Grand Chelem 1987
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Grand Chelem 1987 ) épopée du XV de France Présentation de PIERRE ALBALADEJO Récit de RENAUD DÇ/LABORDERIE SOLAR Avant la victoire de Twickenham, le XV de France 1987. Assis, de gauche à droite : Philippe Bérot, Philippe Sella, Franck Mesnel, Serge Blanco, Daniel Dubroca, capitaine, Pierre Berbizier, Denis Charvet, Éric Bonneval. Debout, de gauche à droite : Pascal Ondarts, Jean-Pierre Garuet, Laurent Rodriguez, Dominique Erbani, Alain Lorieux, Jean Condom, Éric Champ. Le bonheur de Jacques Fouroux (à droite), l'homme aux trois Grands Chelems, un comme capitaine du XV de France (en 1977) et deux comme homme de terrain (en 1981 et 1987). Assis : Garuet-Dubroca- Ondarts, le trio de fer de la première ligne. LE RUGBY DANS SA PLÉNITUDE par Pierre Albaladejo Une phrase à méditer. Dans l'inoubliable soirée de liesse qui suivit le triomphe de Lansdowne Road, Jacques Fouroux, invité à définir ce que représente un Grand Chelem pour un XV de France, expliqua : « Gagner le Tournoi des Cinq Nations, ce n'est jamais qu'une belle victoire. Remporter un Grand Chelem, c'est fonder une nouvelle famille... » Effectivement, la chaude complicité qui réunit les héros d'un parcours parfait de quatre succès dans le Tournoi des Cinq Nations est d'une essence émotionnelle et affective assez rare pour que les compagnons d'une telle épopée se sentent unis comme les membres d'une même famille du rugby. A ce jour, donc, la famille de Daniel Dubroca a rejoint celles de Christian Carrère (1968), Jacques Fouroux (1977) et Jean- Pierre Rives (1981) dans l'histoire du rugby français. Mon pro- pos n'est pas de comparer ces quatre familles, si différentes les unes des autres et si caractéristiques, chacune en son épo- que, de la vitalité et du prestige du rugby français. Il se trouve simplement qu'au fil de ces années, le XV de France a réussi ce qui, voilà un quart de siècle, n'était qu'un rêve illusoire pour le rugby français. Cet objectif n'est désor- mais plus qu'une étape. Viser un Grand Chelem et le conquérir, ce ne sont maintenant que des performances que les années récentes ont banalisées et que l'avenir, je l'espère sincèrement, confirmera amplement. En vérité, cette progression du XV de France traduit une amélioration générale qui reflète celle de l'ensemble de notre rugby, du bas en haut de la pyramide. Un Grand Chelem n'est aujourd'hui que le fruit d'un sport devenu adulte et maître de lui-même. Cette évidence est autant une vérité absolue qu'une maxime de base. Cela posé, ce Grand Chelem 1987 se caractérise par la noblesse des intentions du XV de France. Les Français ont su, en quatre matches difficiles, s'imprégner des fondamentaux de leur jeu pour s'imposer. Contre les Gallois, en ouverture, il fal- lait avoir préservé la motivation qui avait présidé à la victoire de Nantes, en novembre 1986, sur les Ail Blacks, pour l'empor- ter, non sans peine mais avec un certain mérite. Face aux Anglais, déchaînés en leur temple de Twickenham, il était indis- pensable de répliquer à un rugby d'agression et à un défi physi- que sauvage par une démonstration de sang-froid et de méthode. Pour moi, la victoire de Twickenham fut plus noble dans son esprit que nette au tableau d'affichage. Devant les Écossais, en tout point admirables et irréprochables d'un bout à l'autre d'une partie d'anthologie, il était nécessaire de se livrer à fond, sans faiblir une seule seconde. Cette rencontre du Parc des Princes restera comme un sommet de rugby. Le chef- d'œuvre, en tout cas, de cette marche ascensionnelle de 1987. Enfin, pour dominer les Irlandais à Lansdowne Road, il impor- tait de combler un manque de réussite initiale par une double reprise de conscience et de confiance en ses moyens afin de terminer en beauté. En ces quatre occasions, ce XV de France s'est montré aussi bien égal à lui-même que conforme à son image idéale. C'est pourquoi, au fond, je situe ce Grand Chelem 1987 à un très haut niveau. Les Français ont réhabilité le rugby spectacle, dans sa notion la plus attractive, sans jamais s'évader du strict respect des fondamentaux du rugby. S'ils les avaient, d'ailleurs, aban- donnés, même furtivement, ils n'en seraient pas là où ils se sont hissés à la force de leurs mérites et de leur talent... Le rugby des compagnons glorieux de Daniel Dubroca a sur- tout valu, en premier lieu, par sa plénitude. Ce Grand Chelem 1987 a fait énormément de bien au jeu, dans son esprit comme dans ses réalisations concrètes sur le terrain. L'éclosion de ce XV de France survient, lumineusement, à quelques semaines de la première Coupe du monde. Cette coïncidence constitue, à mes yeux, un investissement d'un prix inestimable. Je ne songe pas seulement à tout ce que pourront réussir les héros de ce Grand Chelem. Je pense surtout à l'exemplarité de leur démonstration. Il est très agréable pour tous les éducateurs de France de proposer à leurs élèves de s'inspirer du style de cette équipe nationale. Ce XV de France 1987 a parfaitement réussi l'amalgame entre des hommes forts et des artistes. On connaît autant les uns que les autres. Quand des individualités aussi diverses et complémentaires que Laurent Rodriguez, Éric Champ, Éric Bonneval, Franck Mesnel, pour n'en citer que quelques-unes sans négliger les autres, s'illustrent merveilleusement, c'est tout le rugby qui en profite et qui s'en trouve ragaillardi, pour son présent comme pour son avenir. Et encore, dans cette énu- mération, je n'oublie personne car, en priorité, la force d'une équipe réside dans son homogénéité et son esprit de corps. De Serge Blanco à Pascal Ondarts ou à Jean-Pierre Garuet, en passant par Philippe Sella, Denis Charvet, Philippe Bérot, Fran- cis Haget, Pierre Berbizier ou Dominique Erbani, ils ont tous été, les uns comme les autres, les puissants comme les rapides, les costauds comme les... moins costauds, les hommes de devoir comme les individualités d'éclat, soumis à la même loi collective d'un rugby total et généreux. Ce qu'ils ont accompli constitue pour eux la plus belle des récom- penses... Et leur triomphe dans ce Grand Chelem 1987 est un formida- ble message destiné à tout le rugby, celui de France et de par- tout. Et aussi, au-delà, à tous ceux qui suivent nos matches d'un œil parfois distrait et critique. Tout l'attachement que nous apportons à un Grand Chelem n'est, au fond, qu'un témoignage de reconnaissance envers des garçons qui ont consacré une partie de leur vie, sinon de leur jeunesse, à une cause commune. La valeur morale du rugby ne se mesure pas au total des points marqués ici et là, à Twickenham, à Lansdowne Road ou au Parc des Princes. Cha- que score a son âme. Chaque victoire a sa signification humaine et profonde. Pourtant, en une période si riche de l'histoire du rugby, un Grand Chelem, aussi somptueux soit-il dans la forme et dans l'esprit, n'est jamais qu'une étape de carrière. Je sais que l'on peut demander beaucoup à ce XV de France parce qu'il est capable d'en donner encore plus. En conclusion, après avoir vu ce XV de France 1987 souder sa continuité en confectionnant du beau rugby, je le crois apte à d'autres exploits. Mon opinion est un éloge suprême en même temps qu'un témoignage de confiance... Daniel Dubroca au pied des siens : le capitaine qui implore ses troupes est, en fait, en train de les galvani- ser... Samedi 7 février PARC DES PRINCES FRANCE PAYS DE GALLES -4 Laurent Rodriguez, le plus « haut » des avants français, mène néanmoins un combat bien isolé contre les Gallois... FRANCE-PAYS DE GALLES : 16-9 Mi-temps : 3-9 Date : 7 février 1987 Terrain : Parc des Princes Temps : gris, froid, terrain lourd Affluence : 49130 spectateurs Arbitre : M. High (Angleterre) FRANCE PAYS DE GALLES Blanco (Biarritz) Thorburn puis Dacey Bérot (S.U. Agen) Webbe Sella (S.U. Agen) Devereux Charvet (Stade Toulousain) Hopkins Bonneval (Stade Toulousain) 1. Evans Mesnel (Racing) o Davies Berbizier (S.U. Agen) m Jones Erbani (S.U. Agen) Pickering cap. Rodriguez (A.S. Montferrand) P. Davies Champ (R.C. Toulon) Moriarty Lorieux (Aix-les-Bains) Sutton Condom (Biarritz) Norster Garuet (F.C. Lourdes) S. Evans Dubroca (S.U. Agen) cap. Philips Ondarts (Biarritz) Whitefoot REMPLAÇANTS FRANÇAIS : Dintrans (Tarbes), Marocco (A.S. Montferrand), Cécil- Ion (Bourgoin), Gallion (R.C. Toulon), Didier Cambérabéro (A.S. Béziers), Lafond (Racing). LES POINTS FRANCE : deux essais de Mesnel (47e) et Bonneval (73e), deux pénalités (27e, 81e) et une transformation de Bérot. PAYS DE GALLES : trois pénalités de Thorburn (19e, 21e, 35e). Le péril rouge vaincu En ce samedi gris et froid, quand Gallois et Français pénètrent sur la pelouse du Parc des Princes, ils plon- gent tous dans l'inconnu. Le mauvais temps a retardé (en avril) un explosif Galles-Irlande (prévu le 17jan- vier), et les Français, qui espéraient bien scruter les Gallois à la télévision, en ont été pour leurs frais. Les uns et les autres ne savent vraiment pas où ils en sont, physiquement et tactiquement. Ce flou s'est perçu dans la préparation des Français. En dépit de tous ses efforts, Jacques Fou roux n'a pas senti chez les siens ce frémissement et cette impatience qui les habitent généralement. En fait, les internationaux français hibernent... En manquant, après moins de 60" de jeu, une péna- lité, l'immense arrière gallois Thorburn ne s'inquiète de rien.