Un Été De Folie
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Un été de folie TONI BLAKE DESTINY - 1 Un été de folie Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sophie Dalle Vous souhaitez être informé en avant-première de nos programmes, nos coups de cœur ou encore de l’actualité de notre site J’ai lu pour elle ? Abonnez-vous à notre Newsletter en vous connectant sur www.jailu.com Retrouvez-nous également sur Facebook pour avoir des informations exclusives. Titre original ONE RECKLESS SUMMER Éditeur original Avon Books, an imprint of HarperCollins Publishers, New York © Toni Herzog, 2009 Pour la traduction française © Éditions J’ai lu, 2013 Ce livre est dédié aux professeurs qui m’ont le plus encouragée à poursuivre mon rêve de devenir romancière : Sandra Lillard Adams, feu Dolly West et le Dr Peter Schiff. Prologue — Minou, minou, miaou… Jenny somnolait au soleil sur une chaise longue quand une voix masculine ramena ses sens à la vie. C’était le genre de voix qui vous enveloppait comme une couverture et vous donnait envie de vous y blottir, même par une chaude journée d’été. — Hé ! Réveille-toi ! Debout là-dedans ! Tiens ! Une autre voix. Acerbe, celle-là… et vague- ment menaçante. Jenny s’arracha à sa torpeur et ouvrit les yeux. Au bout du petit ponton flottait une vieille barque occupée par trois garçons qui la lorgnaient dans son Bikini neuf. Seigneur ! Son estomac se noua – ils étaient plus âgés qu’elle et avaient une allure de voyous. D’où sortaient-ils donc ? Puis elle reconnut deux d’entre eux – les frères Brody qui habitaient de l’autre côté du lac. Elle ne les avait jamais vus d’aussi près. Elle voulut répliquer, mais que répondre à « Minou, minou, miaou » ? Son chat, Flocon, déambulait à quel- ques mètres de là, et, étant encore dans les brumes du sommeil, Jenny s’interrogeait : Était-ce à elle qu’ils s’étaient adressés ou à Flocon ? — Tu as perdu ta langue ? s’enquit Wayne Brody, l’aîné. 9 Il devait avoir au moins vingt et un ans, et apparem- ment la voix acerbe était la sienne. Quant au « miaou », il lui avait bien été destiné, même si ce n’était pas lui qui l’avait prononcé. — Que voulez-vous ? articula-t-elle en s’efforçant d’afficher un air mauvais, histoire de leur faire peur. « Ridicule », se reprocha-t-elle instantanément. Comment une fille de seize ans en maillot de bain deux pièces pourrait-elle faire peur à qui que ce soit ? Au contraire, elle ne pouvait que paraître vulnérable. — Comment tu t’appelles ? demanda Mick Brody. D’après les calculs de Jenny, lui n’avait pas plus de dix-neuf ans – lorsqu’elle était entrée en troisième, il était déjà en terminale. Un élève qui séchait les cours, buvait et « cherchait constamment les embrouilles » d’après son père. Mick Brody avait une canette de bière à la main, et tous trois fumaient des cigarettes. Elle demeura figée. Elle n’avait aucune envie de leur révéler son prénom ni de discuter avec eux, car il lui semblait qu’elle serait encore plus vulnérable. Toute- fois, son silence pouvait être interprété comme le signe qu’elle avait trop peur pour parler. Son cœur battait beaucoup trop fort. — Très bien, décida Mick Brody. Je vais devoir t’appeler Minou, dan ce cas. Mince ! Pourquoi son pouls s’emballait-il ? Ce sur- nom aurait dû la faire rougir, au lieu de quoi, il lui fai- sait l’effet d’une caresse sur la peau. À moins que ce ne soit la manière dont Mick Brody la contemplait ? Tout chez lui inspirait la méfiance, et en même temps, ses yeux bleus aussi brillants que des étoiles dans la nuit la fascinaient. Tout à coup, elle se rappela dans quelle tenue elle était. Quelques jours auparavant, elle avait porté ce Bikini pour la première fois devant ses amis, dont plu- sieurs garçons, et s’était sentie parfaitement à l’aise. Là, ce n’était plus le cas. Elle avait l’impression d’être pres- que nue. 10 Flocon choisit ce moment pour s’aventurer à l’extré- mité du ponton. — Tu veux quelque chose à boire, le chat ? lança le troisième garçon. C’était Lucky Romo, un énergumène aux cheveux longs qui traversait fréquemment la ville à toute allure dans sa voiture trafiquée. Le père de Jenny lui avait collé une amende pour excès de vitesse pas plus tard que la semaine précédente. Lucky s’inclina pour verser une rasade de bière mous- seuse devant l’animal. Alors que Flocon tendait le cou pour y goûter, un flot de colère submergea Jenny. Elle se leva d’un bond et fonça vers le bout du ponton. — Laissez mon chat tranquille ! Fichez le camp ! Flocon s’enfuit, de toute évidence bien plus effrayé par sa maîtresse que par les trois indésirables qui riaient maintenant à gorge déployée. La rage de la jeune fille était telle qu’elle se sentit devenir écarlate sous son bronzage. À en juger par la façon dont Mick Brody l’observait, ses mamelons devaient pointer sous son maillot. Elle croisa les bras dans le but de cacher ses seins, mais ne réussit en fait qu’à les remonter plus haut. Pitié ! Mick, lui, continuait à la fixer avec un sourire malicieux. — Approche, Minou. Tu veux faire un tour ? Malgré elle, elle décela le sous-entendu sexuel, et bien que révulsée, elle dut admettre que cela l’excitait. Elle inspira profondément, leva les yeux au ciel pour bien montrer que la suggestion en soi était d’un grotes- que achevé, puis répliqua : — Euh… non, merci. — Allez, minette, on ne mord pas ! insista Wayne Brody. — Sauf si tu nous le demandes, ajouta Mick, les sour- cils en accent circonflexe. Au secours ! Pourquoi était-elle à ce point troublée ? Mick Brody était… dangereux. Le genre de type à fuir 11 absolument. Il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond chez elle, là. — Vous m’avez entendue. Allez-vous-en. — Sinon ? rétorqua Lucky Romo. Tu vas envoyer ton grand méchant papa flic à nos trousses ? Tous trois s’esclaffèrent comme s’ils n’avaient jamais rien entendu d’aussi drôle. — Très bien, souffla Jenny, excédée. Vous ne voulez pas partir ? Dans ce cas, c’est moi qui m’en vais. Après tout, ils étaient soûls, elle en était presque sûre. Et pour autant qu’elle sache, aucun de ses voisins le long de la rive n’était dehors. Elle était donc seule. Son père lui avait appris qu’il valait mieux tourner le dos à une situation potentiellement fâcheuse avant qu’elle dérape ; plutôt prévenir que guérir. Elle ramassa son drap de bain, sa serviette et sa canette de soda light, enfila ses tongs et s’éloigna. — Joli petit cul ! lança Mick Brody. Jenny était soulagée de leur tourner le dos car elle était sûrement rouge pivoine. Tandis qu’elle emprun- tait le sentier qui remontait vers sa maison, elle sentit leurs regards peser sur elle. Surtout celui de Mick Brody. 1 Elle marche tout en beauté, comme la nuit Des climats sans nuages et des cieux étoilés. LORD BYRON Quinze ans plus tard Alors que le crépuscule tombait sur le lac de Blue Valley, Jenny Tolliver poussa dans l’eau le vieux canoë vert qui reposait sur la rive herbeuse. Elle portait encore la jupe légère et le chemisier de coton qu’elle avait enfilés pour l’après-midi de mah-jong chez Mme Kinman. Les seules concessions qu’elle avait faites pour cette excursion avaient consisté à troquer ses sandales à talons pour une paire de tennis et à four- rer son télescope dans un grand sac en plastique. Alors qu’elle grimpait avec précaution à bord de l’embarcation en s’agrippant au ponton pour conserver son équilibre, elle eut l’impression de remonter dans le temps. Elle n’avait pas traversé ce lac depuis ses dix- huit ans, et à l’époque, son amie Sue Ann l’accompa- gnait. Sue Ann se serait sans doute volontiers jointe à elle aujourd’hui, mais elle avait d’autres obligations désormais – notamment un mari et une fille. 13 Du reste, Jenny avait envie d’être seule. Elle avait besoin de… s’échapper. Deux jours à peine que tu es de retour à Destiny et déjà, tu rêves d’évasion ? Mauvais signe. À force de s’entendre couvrir de compliments chez Mme Kinman, elle avait craqué. Cela pouvait paraître idiot, mais toutes ces louanges finissaient par l’exaspé- rer, d’autant que ces derniers temps, sa vie semblait totalement dénuée de sens. Quand Rose Marie Keckley avait vu la tarte au citron qu’elle avait confectionnée pour l’occasion, elle s’était exclamée : — Comme c’est gentil de ta part, Jenny ! Et quand elle avait rempli les verres de thé glacé afin que Mme Kinman puisse rester assise, LeeAnn Turner avait déclaré : — Tu es adorable, Jenny. Puis Lettie Gale avait ajouté son grain de sel parce qu’elle avait aidé Mme Lampton à quitter son fauteuil : — Tu es tellement formidable, Jenny ! C’était la goutte d’eau qui avait fait déborder le vase. Jenny avait pris ses jambes à son cou. À présent, ces mots résonnaient dans sa tête, moqueurs : « Tu es tellement formidable. Tu es telle- ment formidable. » Eh bien, elle en avait par-dessus la tête d’être formidable ! Comment avait-elle décidé d’y remédier ? En traversant le lac en canoë. Pas vraiment un acte de rébellion contre la société, certes. L’avantage, c’était qu’elle avait pu s’éclipser de la réu- nion, fuir ces gens avec qui elle avait grandi, tous convaincus de ses qualités exceptionnelles.