ANALYSIS | ANALYSE

PRIX 2006 LA CONSTRUCTION ET LE MYTHE MARTIN ELI WEIL DE LA : PRIZE GENÈSE DE LA PLACE MONTRÉALAISE

Récipiendaire du prix Martin Eli-Weil 2006, > JONATHAN CHA JONATHAN CHA est doctorant en études urbaines à l’UQAM, en cotutelle avec l’Institut d’urbanisme de Paris (IUP) de l’Université de Paris XII. Sa thèse de doctorat porte sur la morphogenèse et la sémiogenèse des parcs, places et jardins INTRODUCTION à Montréal ; elle vise à caractériser la « place 1 montréalaise » comme forme et comme sens La Place des Arts (PdA) est aujourd’hui de la ville. Il est récipiendaire des Bourses du un lieu ancré dans le patrimoine com- mun montréalais (ill. 1). Si sa place sur Canada au doctorat et à la maîtrise en plus d’être l’échiquier patrimonial paraît évidente boursier du Gouvernement français. Architecte aujourd’hui, il n’en aura pas moins fallu paysagiste, membre agréé de la Canadian près de quarante ans pour que le patri- Society of Landscape Architects, il est associé à moine « des uns » devienne le patrimoine l’Institut du patrimoine, à la Chaire de recherche « de tous ». Prévue dès sa planification du Canada en patrimoine urbain et au Centre comme monument à l’image du Stade interuniversitaire d’études sur les lettres, les arts olympique, sa reconnaissance internatio- et les traditions (CÉLAT) de l’UQAM. nale s’opposera à un refus d’acceptation populaire du symbole. La Place des Arts de Montréal est née d’une vision – d’un rêve – de situer Montréal au rang des grandes capitales de la modernité et d’un mythe reposant sur la volonté de s’im- planter sur un lieu fondateur ancré dans l’histoire géographique de la ville.

Du prétexte à l’urbanité2 naîtra l’image d’une métropole du progrès qui confron- tera rapidement nationalisme et internatio- nalisme. Dans l’histoire mouvementée de la Place des Arts, ce vouloir de donner un nouveau patrimoine à la ville s’effectuera sans l’acteur populaire, « le nous », pour le visiteur, « l’Autre ». Je soumets l’hypo- thèse que le parachèvement de l’îlot, par l’aménagement de l’esplanade trente ans après l’ouverture de la Grande Salle, aurait contribué à la spatialisation et à l’affection du lieu par la population. Aux valeurs patri- moniales certaines de la Grande Salle, issue d’une fabrication instantanée, s’ajoutera une reconnaissance sociale qui donnera sens et notoriété au lieu.

Cet article construira un discours3 sur l’idée et la forme derrière le projet de ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES Place des Arts selon six prémisses : le rêve, ILL. 1. LA PLACE DES ARTS À SON OUVERTURE, 1963.

JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 > 37-64 37 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 2. AFFICHE SUR LE FUTUR SITE DE LA PLACE DES ARTS, V. 1960. ILL. 3. PREMIÈRE PELLETÉE DE TERRE, 11 FÉVRIER 1961.

le mythe, la réalité, la naissance, le statu lui donne l’aval et l’ambition de raser un une prolifération des arts centres dans les quo et l’avènement. La patrimonialisation quartier pour lui substituer un « regain grandes villes américaines (notamment le de la Place des Arts se construira dans de vie » par l’implantation d’immeubles John F. Kennedy Center, Washington DC) un premier temps autour de la vision de neufs (ill. 5). La métamorphose de ce et ce, depuis la fin de la Seconde Guerre grandeur et du mythe créateur. Les va- quartier du centre-ville de Montréal s’ef- mondiale. Ces complexes artistiques ont leurs patrimoniales de la Grande Salle se fectue dans cette permutation de l’image comme mandat de promouvoir et de dé- confronteront dans un deuxième temps de la métropole (ill. 6). Dans le contexte mocratiser les arts dans et pour toute la aux mouvements de contestation et, fi- qui mène à la venue de l’Exposition population ; de contribuer à franchir en nalement, le long processus de concré- universelle Terre des Hommes en 1967, quelque sorte une frontière mythique, tisation de l’esplanade viendra affirmer Drapeau privilégie l’image de la moder- celle de la culture. Dans ce contexte, il l’image et caractériser l’identité montréa- nité comme vitrine au regard de l’Autre. Il n’est pas étonnant que l’administration laise de la Place des Arts. désire redonner le titre de métropole du Drapeau se soit inspirée d’un modèle pays à Montréal, la situer parmi les capi- américain, le Lincoln Center for the Per- LE RÊVE : LA VISION DE tales culturelles du monde et, surtout, en forming Arts12 de New York, reconnu alors DRAPEAU faire la première ville du vingt et unième comme le nec plus ultra des arts centres. siècle. Son projet pour atteindre ces ob- Plus que des bâtiments réunis sur un qua- jectifs est de bâtir non pas une salle de Avec l’édification d’un tel complexe drilatère, la Place des Arts4 est un lieu où concert, mais un véritable centre culturel9, prestigieux, « Montréal, cesserait d’être le rêve prend forme5 (ill. 2). Ce rêve, alors le « Cultural Centre10 ». une ville de province. Enfin, Montréal qu’il n’était qu’un souhait, a été porté à serait à l’heure de New York ! [...] Bref, bout de bras par Jean Drapeau6, ce maire Dès 1955, Drapeau organise une ren- dotée d’une salle démesurée, Montréal qui a voulu pourvoir Montréal d’un carac- contre importante avec des « avocats et pourrait d’emblée faire partie du circuit tère moderne (ill. 3, 4). Fondamentale- hommes d’affaires, pour les convaincre des grandes villes nord-américaines où ment enraciné dans le mouvement de de la nécessité de doter Montréal d’une passent les troupes en tournée. Tout un rénovation urbaine7 (urban renewal) et salle de concert à la mesure de ses be- idéal »13. C’est donc sans surprise que le dans le contexte des années de rattra- soins et de ses aspirations »11. Ce désir Centre Sir George-Étienne Cartier14 opte page8, le progrès souhaité de Drapeau s’inscrit dans une période marquée par pour les services de l’agence The Raymond

38 JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE VILLE DE MONTRÉAL. ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 4. , MAIRE DE MONTRÉAL DE 1954 À 1957 ET DE 1960 À 1986. ILL. 5. MÉTAMORPHOSE DU CENTRE-VILLE MONTRÉALAIS, 1962.

Loewy Corporation du réputé designer un communiqué émis le 15 août 1963, la Drapeau, surnommé le « bâtisseur22 », américain d’origine française Raymond Maison-Blanche témoigne que « The first adhère au principe que « les grandes Loewy, qui avait travaillé sur le Lincoln opening of the Place des Arts in Montreal œuvres d’architecture naissent tou- Center, pour mener à terme l’étude de la gives fresh evidence of Canada’s vitality jours d’une passion, d’un défi au temps programmation de la Place des Arts. and vision18. » et à l’espace, d’une vision »23. Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que ses Le bouillonnement culturel voulu par Jean Drapeau, dans sa vision de grandeur, référents de grandes réalisations pro- Drapeau se matérialise dans la proposi- n’hésite pas à s’inspirer des idéaux prô- viennent d’Athènes, de Paris et de New tion de la firme new-yorkaise qui suggère nés à la fin du dix-neuvième siècle, par York. Drapeau désire proclamer les ver- d’y ériger un complexe « with rich, civic, le projet de percement du boulevard de tus de Montréal à l’échelle mondiale en and monumental standards »15. Le sym- l’Opéra terminant sa perspective sur le ayant recours à des symboles universels ; bole architectural sera ainsi évocateur Monument national (ill. 7). « Ce boule- la Place des Arts est ainsi le prototype par le recours au gigantisme : « Montréal vard viendrait aboutir, depuis l’est de la des grands desseins de Drapeau (Métro, avait attendu un siècle avant de s’offrir ville, devant le Monument national nou- , JO 1976), « le premier d’une sé- une salle de concert digne d’une grande vellement construit et en valoriser le rôle- rie de grands projets, l’embryon du Stade ville. Tout avait été mis en oeuvre pour phare culturel canadien-français19. » Si ce olympique24 ». Cette volonté de rivaliser y parvenir. L’inauguration de la Grande projet proposé en 1894 avait été relégué avec les grandes capitales culturelles du Salle de la Place des Arts marqua la con- aux oubliettes, Drapeau considère cepen- monde et cette « aspiration à l’universa- crétisation d’un aussi grand rêve »16. Pour dant que « les installations du Monument lité25 » se concrétisent dans l’édification les Étatsuniens, ce projet identifie la vita- national étaient depuis longtemps péri- d’un temple civique dédié aux Arts. Nick lité artistique de Montréal. Le président mées [et que] Montréal [devait] se dot[er] Auf Der Maur écrit : « le maire Drapeau, du Lincoln Center, William Schumann, lors d’un nouveau temple digne de sa vie ar- comme Périclès à Athènes, entreprit de du discours d’inauguration, proclame : tistique »20. La Place des Arts s’inscrit dans donner à Montréal son âge d’or […]. « We are confident that the Place des Arts la reconquête francophone de l’est du Périclès fut lui aussi critiqué pour avoir and the high ideals of those who have centre-ville pendant que la ville se voit construit l’Acropole26. » conceived it symbolizes the increasing vi- investie d’un rôle tout aussi important, tality of Canada Artistic plight17. » Dans celui d’être « sa métropole »21.

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Démocratie, fierté municipale et expres- sion nationaliste mènent à la réalisation de la Place des Arts. Culture et nation gui- dent le positionnement à l’échelle mon- diale de ce temple moderne (ill. 8). Dans ses discours, Drapeau affirme vouloir do- ter Montréal de monuments : « C’est ce que les masses veulent27 ! » « L’idée ini- tiale de construire une salle de concert à Montréal se transform[e] en une entre- prise de promotion de la culture natio- nale28. » Pour Malraux, cela concorderait à diffuser le patrimoine pour forger l’unité et l’identité nationales29. La venue de la Place des Arts survient dans une période de rénovation urbaine, de modernisation et de sécularisation où la promotion de l’identité nationale passe par l’idéolo-

ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES gie culturelle des arts. Montréal tourné ILL. 6. LA « NOUVELLE ÉCHELLE » DU CENTRE-VILLE MONTRÉALAIS : LE QUADRILATÈRE DE LA PLACE DES ARTS, 1960. vers les autres et le monde tourné vers Montréal, voilà la vision et le contexte de la naissance de la Place des Arts.

LE MYTHE DE LA CRÉATION : LE CHOIX DU SITE

L’idée de construire une « place des arts » avait déjà été exprimée bien avant l’ar- rivée de Drapeau à l’hôtel de la ville de Montréal en 1954. La première suggestion de construire une grande salle de concert fut publiée en 1878 dans The Canadian

LA PRESSE. ILL. 7. ESQUISSE DU BOULEVARD DE L’OPÉRA, GEORGE DELFOSSE, PUBLIÉE DANS LA PRESSE, 26 MAI 1894 . Spectator30. En 1937, on prévoyait ériger le « centre civique idéal », angle des avenues des Pins et du Parc, en partie sur le parc Jeanne-Mance (au nord du monument de Sir George-Étienne Cartier), décrit alors comme le centre géographique de Montréal. Proposé par les francophones, ce site déplut aux anglophones qui les ac- cusaient de vouloir détruire la montagne. Ces derniers proposaient plutôt le quadri- latère situé au sud du carré Dominion31. C’est finalement en 1955 qu’une décision « unanime » est prise pour un site d’une superficie de 6,5 acres au centre de la ville.

ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES Il s’agit du « choix le plus approprié », se- ILL. 8. ESQUISSE DE LA PLACE DES ARTS, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES, V. 1959. lon les administrateurs32 (ill. 9).

40 JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 9. SITE CHOISI POUR LA FUTURE PLACE DES ARTS, V. 1959-1960. ILL. 10. ALLÉE PLANTÉE « À L’ITALIENNE », VUE DEPUIS LA RUE SAINTE-CATHERINE, 1960.

Les rappels à l’Antiquité dans le choix oppos[e] l’ouest à l’est [en choisissant] Cet axe nord-sud offre ainsi un face-à- du site sont évocateurs. Le théâtre un emplacement à mi-chemin. In medio face monumental symbolique entre deux comme lieu fondateur est appelé à de- stat virtus de dire Drapeau »35. Ce nou- hauts lieux montréalais dans le temps, venir l’épicentre de la ville moderne. Le veau pôle du centre-ville contrebalance l’un représentant l’héritage religieux et théâtre comme lieu physique au cœur la présence de la dans le l’autre l’essor culturel. Il est important de la ville « fonctionne dans l’imagi- centre-ville ouest et affirme la présence de rappeler qu’un axe planté « à l’ita- naire urbain comme l’invention de ce francophone tout en poursuivant des buts lienne » reliant la rue Sainte-Catherine lieu impossible à ressusciter, cette place clairs d’unir l’ouest et l’est et de surpasser et l’Académie commerciale catholique de centrale où l’unité de la politique et de le mythe de la frontière. Montréal (située alors à la même hauteur l’architecture s’affirme : le forum »33. de la Grande Salle) existait déjà sur le C’est d’ailleurs peut-être « à l’imagerie Alors que « la plaza extérieure de la site (ill. 10). des Congrès internationaux d’archi- Place Ville Marie représente l’aboutisse- tecture moderne (CIAM) que renvoie ment de l’artère McGill College, laquelle À la fin des années 1950 et au début des cette forme, tant elle est symbolique a été planifiée comme perspective vi- années 1960, l’idée de reproduire, dans de l’ultime conquête à laquelle ils as- suelle pour relier cette place publique un même axe, les Champs-Élysées menant pirent, celle du ‘cœur de la ville’ »34. au campus de l’université McGill et au non pas à l’Arc de Triomphe, mais bien à Montréal voit grand et la Place des Arts mont Royal36 », la Place des Arts pour- la Place des Arts, avait été avancée tout se représente comme le cœur culturel et suit un objectif similaire et tout aussi autant que celle d’une extension menant physique de la métropole. symbolique, soit de relier par un axe à la place de la Confédération38. Le mythe visuel la basilique Notre-Dame, symbo- s’est réalisé et poursuivi. Ainsi, les cons- Au référent antique s’adjoint le mythe le identitaire du Vieux-Montréal, et la tructions de la place Desjardins en 1976 de la frontière. À proximité du boule- Place des Arts, terre promise de la ville et du complexe Guy-Favreau en 1983 tien- vard Saint-Laurent, limite imaginaire de moderne. Certains rattachent même dront compte de ce corridor visuel par un « l’ouest anglais » et de « l’est français », une symbolique religieuse au lieu : « La dégagement et une transparence archi- la Place des Arts veut agir comme trait Place des Arts ? Mais c’est la Cathédrale tecturaux. « L’axe Drapeau39 » ou l’axe d’union et « vaincre l’antagonisme qui émergée… et dans l’est, ma chère37 ! » de la valorisation canadienne-française40

JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 41 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 12. LA « COLLINE » OU LE TERRAIN REHAUSSÉ DU SITE LA PLACE DES ARTS, V. 1958-1959.

e ILL. 11. PLAN DU SITE À LA FIN DU XIX SIÈCLE, TIRÉ DE de la topographie du site par les courbes démolisseur et le Service d’urbanisme de MARIE HÉLÈNE BIZIER (1993), L’UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL. LA QUÊTE DU SAVOIR, MONTRÉAL, de niveaux, selon les cartes de 185342 et Montréal entrevoyait une perspective qui LIBRE EXPRESSION, P. 64. les relevés de 196143, évoque éloquem- conduirait, à quelques degrés près, jusqu’à ment une pente descendante vers la l’église Notre-Dame. Il fallait absolument que est désormais connu comme l’axe institu- rue Sainte-Catherine et un point haut à la Grande Salle puisse dominer largement tionnel et culturel de Montréal. l’emplacement même du centre médian l’environnement. Cela coûterait plus cher, du piano nobile de la Grande Salle, dans inévitablement, mais comment ne pas tenir La géomorphologie montréalaise permet l’axe de l’ancienne rue du Plateau (ill. compte de la topographie et de l’esthétique ? cet axe visuel ascendant de la basilique 12, 13). Ce site répond donc aux idéaux En un mot, il fallait voir grand44. vers la Place des Arts, point haut de la symboliques qui reflètent de fait le site rue Sainte-Catherine. Cette opportunité existant et son histoire, ceux d’élever ce Érigée45 sur une plateforme, la Place des topographique sera exploitée encore temple en recul et au-delà du niveau de Arts réaffirme et amplifie l’idée de « pla- davantage sur le site même de son im- la rue, de lui donner une centralité et de teau », se positionne dans une longue tra- plantation. À l’instar des mythiques sept privilégier l’axialité. L’analyse de Laurent dition urbanistique, domine le paysage et collines de Rome d’où s’éleva la fameuse Duval poursuit en ce sens : assemble les cultures (ill. 14). Si le mont place du Capitole de Michelangelo ou de Royal est devenu graduellement la mon- la métaphore de « l’Acropole montréa- Ayant opté pour une salle de prestige, tagne, la Place des Arts semble avoir tiré lais », le site de la Place des Arts offre était-il concevable de la situer au niveau de profit d’un plateau et l’avoir transformé une dénivellation culminée par une pe- la rue alors qu’à l’emplacement même se symboliquement en colline. « Nous voici tite colline aplanie formant un plateau41. trouvait jadis une légère colline qui dominait maintenant comme Moïse devant la terre Une rue aujourd’hui disparue portait les environs ? Et comme pour ajouter à promise46. » L’opportunité territoriale, d’ailleurs le nom du Plateau, de même la force de l’argumentation, toutes les donc contextuelle, aurait fortement in- que l’Académie commerciale catholique, maisons et tous les magasins vétustes, fluencé le choix du site, sa portée sym- surnommée l’école du Plateau, et l’édi- au sud de Sainte-Catherine, étaient voués bolique et proposé une nouvelle lecture fice Plateau Exchange (ill. 11). L’analyse à plus ou moins brève échéance au pic du urbaine de la ville. Le quartier mythi-

42 JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE

que du plateau Mont-Royal trouverait-il alors ses fondements au sud de la rue Sherbrooke, au cœur même de la Place des Arts ?

LA RÉALITÉ : EXPROPRIATIONS ET MANIFESTATIONS

Mais l’entrée de la Place des Arts dans le paysage montréalais ne se fait pas sans heurts. La Place des Arts ou cette « cul- ture monumentale » de Drapeau

construite au tournant des années 1960 [...] constituait un fleuron du programme de modernisation culturelle de la Révolution tranquille. Conçue dans une perspective de restructuration urbaine des années 1960 et érigée à coup de démolition massive dans le

centre-ville, la salle Wilfrid-Pelletier faisait ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 13. DÉNIVELLATION DU SITE DE LA FUTURE PLACE DES ARTS, V. 1958-1959. partie de ces gestes inachevés qui, dans les années 1980, devaient être perçus comme l’origine de la dégradation du tissu urbain. Compléter la Place des Arts contribuerait allaient éventuellement « être net- pas épargnée de son lot de critiques. Cette à la fois au parachèvement d’un projet toyés »51. Seuls les édifices ILGWU et culture à construire en lieu de la Place des culturel, à la « restructuration de la trame Woodhouse avaient été intégrés dans Arts est génératrice de nombreux conflits54. urbaine », et à la relance économique47. les esquisses des années 1958-1959, mais Les appellations « Place des Arts » et « Gran- des contraintes techniques et l’élabora- de Salle »55, enregistrées à des fins d’usage La réalisation du centre culturel entraîne tion de l’édifice des Théâtres52 (et de son unique à l’instar de la Piazza San Marco de la démolition de tout un quadrilatère, stationnement) ont mené à leur expro- Venise56, unique à avoir le titre de « place » soit vingt-trois bâtiments et deux petites priation. Dans un tel projet, il fallait voir dans la ville, suscite de nombreux débats sur rues (du Plateau et Winning) (ill. 15)48. grand et le dégagement du site en entier la désignation de « place ». Les dénigreurs Outre une série de maisons, les princi- apparaissait comme fondamental : évoquent « l’épidémie des places qui n’en paux édifices démolis sont l’Académie sont pas »57. Robillard argue que les termes commerciale catholique de Montréal49, Comment ne pas établir un parallèle entre le « Cité des Arts » et « Centre des Arts » sont les édifices de la Commission des écoles « quadrilatère » et le sacrifice, quelques années déjà répandus et qu’ils sont à la recherche catholiques de Montréal, l’institut et la plus tard, du golf municipal dans le quartier d’une appellation propre à Montréal ; la chapelle Dominique-Savio (connus aussi Rosemont, au profit du Parc olympique ? Qui place porte en effet un sens structurant dans sous les appellations Nazareth et ora- pourrait en tenir rigueur au maire Drapeau ? l’image urbaine de Montréal. toire Sainte-Thérèse-de-l’Enfant-Jésus), Le baron Haussmann n’a pas agi autrement à l’école Notre-Dame, le Woodhouse De- Paris ! C’est peut-être, en effet, le prix à payer Le contexte de la révolution tranquille, la partment Store (Vineberg’s Limited) et pour les grandes réalisations dont profitent montée du nationalisme et le désir des gens l’International Ladies Garment Worker les générations montantes et qui suscitent d’être « maîtres chez eux » entraînent une Union (ILGWU)50 (ill. 16-21). Ces bâtiments souvent leur admiration53. critique du Made in USA et de la pensée dataient tous de la fin du dix-neuvième orientée autour de la « métropole nord- siècle et du début du vingtième siècle. Les démolitions et les expropriations ont américaine ». La population se questionne Les journaux de l’époque évoquaient un lieu sans grandes levées de boucliers. Par sur le statut des artistes et des œuvres quartier « douteux » dont les environs contre, l’institution de la Place des Arts n’est d’expression française dans un centre

JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 43 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 14. LA PLATEFORME DE LA PLACE DES ARTS, 1967.

culturel désireux de s’allier aux productions interprétation politique et socioculturelle de Comme Illien le mentionne, toutes ces américaines. La Place des Arts devient ra- l’histoire de la Place des Arts, Illien affirme questions convergeaient d’une manière pidement « la Place des Arts des autres », que les questions fondamentales sont : ou d’une autre vers la question de l’iden- dominée par l’hégémonie américaine dans tité québécoise et des différentes formes le monde du spectacle et du concert : « La La Place des Arts allait-elle promouvoir la culture de nationalisme qui allaient être projetées Place des Arts, la Place des Autres ! », « une québécoise ou accueillir des artistes américains ? sur l’institution culturelle naissante62. Place des Arts qui n’était pas la Place du Fallait-il voir en cet édifice un lieu de résistance Peuple », « La Place des Arts, c’est notre à la culture de l’Autre ou, au contraire, un La Place des Arts, qui fait l’objet d’une cam- Rolls-Royce…, mais une Volkswagen aurait instrument d’intégration du Québec aux sociétés pagne de presse très défavorable, voire hos- fait l’affaire »58 peut-on lire et entendre lors industrialisées ? La Place des Arts était-elle tile, « devi[e]nt le point de ralliement des de manifestations. La PdA est désormais un monument dédié aux arts, aux Québécois, militants de tout acabit [...]. La Place des surnommée « Place des autres », par les mi- à l’Europe, à New York, à Montréal ou à Jean Arts [fait] maintenant figure d’une forte- litants syndicaux, socialistes et/ou nationa- Drapeau ? Les questions se multiplièrent, resse assiégée63 ». Le soir de l’inauguration, listes59. Avant même d’ouvrir ses portes, la divisant l’opinion publique et mettant dos à dos pendant que sont interprétés à l’intérieur Place des Arts s’est transformée en champ de francophones et anglophones, l’élite économique de la Grande Salle le Ô Canada et le God bataille syndical60. Celle qualifiée de « Sister et les intellectuels de gauche, les factions Save the Queen, les gens à l’extérieur in- Cultural Centre » du Lincoln Center de New séparatistes et les fédéralistes, pour ne citer que vectivent les bourgeois et les Américains York est loin de faire l’unanimité. Dans son ces groupes. La polémique dura des mois.61 et scandent : « Art pour tous ; Molière mon

44 JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 15. PLAN DÉMONTRANT LA JUXTAPOSITION ILL. 17. MAISONS DE LA RUE SAINT-URBAIN AVANT LEUR DÉMOLITION, V. 1958-1959. DE LA GRANDE SALLE SUR L’ÎLOT EXISTANT, THE RAYMOND LOEWY CORPORATION.

cul ; Place des riche-Arts ; La Piasse des Arts ; canadien-français, méprisent le peuple et violons notre culture ; La Place des or-dures ; oublient le destin de la nation »67. Du cô- L’Art de$ Places ; Pas d’or, pas d’art »64, « Les té de la presse anglophone, le regard est aristocrates on les pendra ! ; Gestapo ! ; Maî- tout autre : « Montreal’s Concert Hall Ope- tres chez nous ! »65. Le quadrilatère devient ning – A Spectacular and Glittering Opening alors un terrain de chasse où les policiers à Night68 ». Pour The Gazette, la Place des Arts chevaux chargent les manifestants… Ce qui connaît un succès inégalé. « Cette réussite n’est assurément pas l’image souhaitée par est celle d’une ‘communauté’, identifiée à Drapeau (ill. 22) ! L’entrée noble et la mon- Montréal, et qui pourtant ne désigne que tée graduelle par la place extérieure vers le l’élite de la ville. À l’opposé des journaux temple de la culture vont plutôt se faire par francophones, The Gazette fait l’éloge des voie souterraine… membres de Centre et insiste sur le mariage bénéfique des arts et de la finance69. » Les jours suivant l’ouverture de la Grande Salle, les quotidiens montréalais révèlent La Place des Arts a donc été un champ de deux visages de Place des Arts. Alors que bataille symbolique entre « l’Autre », le Le Devoir titre sobrement : « Splendeur et bourgeois, l’anglophone, l’homme d’affai- chahut », La Patrie est davantage incisive : res, l’Américain et l’étranger, et le « nous », « Le peuple s’était rendu Place des Arts, mais le séparatiste, l’Union des artistes, le tra- on avait oublié de l’inviter66 ». Pour La Pa- vailleur, l’artiste et le francophone70. Au-delà trie, « l’institution bourgeoise » en devenir des critiques marquant l’inauguration de la

ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES qu’est la Place des Arts serait dirigée par des Place des Arts, qu’en est-il de la critique ILL. 16. DÉMOLITION DE L’ÉDIFICE WOODHOUSE DEPARTMENT STORE, 1965. hommes d’affaires qui « ignorent l’Artiste architecturale de la Grande Salle ?

JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 45 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 20. L’ÉCOLE SUPÉRIEURE DE MONTRÉAL, SURNOMMÉE L’ÉCOLE DU PLATEAU, LORS DE SA DÉMOLITION, 1960. ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 18. ORATOIRE SAINTE-THÉRÈSE DE L’ENFANT-JÉSUS, RUE SAINTE-CATHERINE, AVANT SA DÉMOLITION, 1960. ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 21. L’ÉDIFICE WOODHOUSE DEPARTMENT STORE AVANT SA DÉMOLITION, RUE SAINTE-CATHERINE ANGLE SAINT-URBAIN, V. 1958.

LA PRESSE. LA PRESSE. ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES SOURCE : SOURCE : ILL. 19. INTÉRIEUR DE L’ORATOIRE SAINTE-THÉRÈSE DE L’ENFANT-JÉSUS AVANT SA DÉMOLITION, V. 1958-1959. ILL. 22. SURVEILLANCE POLICIÈRE LE SOIR DE L’INAUGURATION DE LA GRANDE SALLE DE LA PLACE DES ARTS, 21 SEPTEMBRE 1963.

46 JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE

LA NAISSANCE : LA GRANDE SALLE

Le 21 septembre 1963, le soir de l’inaugu- ration de la Grande Salle, c’est le triomphe de l’esthétique et de la vision : « The ma- gnificent culmination of more than half a century of dreams, plans, imagination and endeavor71. » Qualifiée d’entrée de jeu de « plus belle au monde », « l’une des plus somptueuses et pittoresques maisons d’opéra du monde72 », la Grande Salle, dite de prestige, qui se compare aux salles les plus réputées de Paris, de Lon- dres ou de Boston73, est destinée à devenir l’émule des grandes capitales culturelles et s’aligne « parmi les plus beaux monu- ments de la ville74 » ; cette masse blanche ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES devrait être hissée à la hauteur des vieux ILL. 23. LA GRANDE SALLE EN CONSTRUCTION, V. 1962. palais européens75 (ill. 23). Trente ans après l’ouverture, le journaliste Clément poursuit dans le même sens : « Ce plaisir irremplaçable pour les yeux et les oreilles, que de plus en plus de Montréalais peu- vent savourer depuis 30 ans à la Place des Arts, on le doit certainement à la pas- sion, à la détermination et à la vision d’un homme : Jean Drapeau76. » ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 24. PREMIÈRE ESQUISSE DE LA PLACE DES ARTS, V. 1958-1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, Les premières esquisses (1958-1959) sem- MICHAUD & SISE ARCHITECTES. blent plaquées sur le modèle du Lincoln Center, avec une touche d’architecture fasciste rationaliste77 empreinte de la no- tion de démocratie par l’épuration des li- gnes, l’uniformité et la rigidité des formes architecturales (ill. 24). Les esquisses sui- vantes délaissent ce modèle et optent pour un édifice unique encore plus im- posant (ill. 25). Cet édifice aux référents classiques est un immeuble parfaitement symétrique, caractérisé par une monu- mentalité appuyée, par ce que certains nomment colonnade et d’autres péristyle (ill. 26). John Bland fait l’éloge du concept architectural :

The designers have preferred to express the ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 25. ESQUISSE DE LA GRANDE SALLE, V. 1958-1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, pleasant elliptical forms of the auditorium MICHAUD & SISE, ARCHITECTES.

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and the great columns supporting the external foyers rather than anything else. In doing so, they have achieved an extraordinary harmony of part to the whole which is consistently felt in every part of the building …]. At night a sense of scale, variety of parts, mystery of outline and rhythm of structure becomes decisively evident […] what has been done is both narrative and international and is extremely competent by any standard of judgment78.

Sa position surélevée sur le site, puisque construite sur une plateforme et regardant alors de haut les « taudis » et les petites maisons qui s’étendent devant elle, rappel- le la situation du Parthénon sur l’Acropole. Si la métaphore du « Parthénon montréa- lais » paraît excessive, elle témoigne par contre du souci apporté à la localisation réfléchie et à l’image projetée de temple moderne. Sa position en retrait des deux bâtiments latéraux projetés (et réalisés en 1967 et en 1992) s’arrime au concept du Lincoln Center et poursuit une logique d’implantation proposée par Michelangelo au Campidoglio de Rome au milieu du sei- zième siècle. Si ces références apparaissent davantage intégrées, notamment parce

ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES que l’ensemble des édifices a été cons- ILL. 26. COLONNADE DE LA GRANDE SALLE, 1963, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. truit ou remanié en même temps ou dans le même style, la Grande Salle79 demeure l’objet dominant, le point focal terminant la perspective, l’arrière-scène monumen- tale à l’instar de la basilique Saint-Marc sur la Piazza San Marco à Venise, où, depuis 1992, le péristyle du Musée d’art contem- porain rappelle l’alignement sobre des procurazie vecchie et nuove.

Pour réaliser la Grande Salle, les admi- nistrateurs font appel à l’une des plus influentes firmes montréalaises et cana- diennes de l’époque, Affleck, Desbarats, Dimakopoulos, Lebensold, Michaud et Sise80 (ill. 27). Architectes spécialistes

BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DU NATIONALE QUÉBEC. BIBLIOTHÈQUE des salles de concert et des complexes ILL. 27. LES ARCHITECTES DE LA GRANDE SALLE : AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES, 1963. culturels, ces derniers viennent tout

48 JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 28. INTÉRIEUR DE LA GRANDE SALLE, 1963, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. juste de terminer en 1959 le Queen Elizabeth Theatre and Playhouse de Vancouver 8 1 , premier complexe de théâtre contemporain au Canada. L’ex-

pertise qu’ils ont acquise leur permet de ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES réaliser à Montréal un bâtiment qui sera ILL. 29. INTÉRIEUR DE LA GRANDE SALLE, 1963, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. abondamment publié et apprécié par la critique. Ils réaliseront par la suite le canadiennes. Le monument par excel- Les premières esquisses proposées par Confederation Centre (Fathers of Confe- lence de Montréal deviendra l’image clé Affleck, Desbarats, Dimakopoulos, deration Memorial Building)82 à Charlot- de la modernité de la métropole, le lieu Lebensold, Michaud et Sise en 1958-1959 tetown en 1962, puis le Centre national offert aux touristes étrangers. réinterprètent le concept d’ensemble du des Arts à Ottawa en 1969, des sites Lincoln Center (ill. 30, 31). L’idée du théâ- de superficie légèrement moindre, de LE STATU QUO : TRENTE ANS tre principal central et des théâtres secon- 5,6 et de 5 acres, comparativement D’ATTENTE (1963-1993) daires latéraux le confirme. Rapidement aux 6,5 acres de la Place des Arts de les architectes délaissent l’inspiration ar- Montréal. La Place des Arts servira L’histoire du site (rêve, vision et contes- chitecturale des trois bâtiments du Lincoln même de référence pour la conception tation) est invoquée sous le signe du Center pour se concentrer à un immense de la National Philharmonic of India83. mythe de la création et de l’affirmation bâtiment dominant l’ensemble. Les diffé- identitaire. La conceptualisation d’une rentes esquisses réalisées sur une période Concernant l’intérieur de l’édifice, le dé- place publique, d’une Place des Arts, de deux ans mettent toutes l’accent sur la corateur Henri Beaula déclare que « l’ar- poursuit cette même logique, des pre- Grande Salle, dans un premier temps, en chitecte Lebensold et lui avaient cherché mières esquisses en 1958 à la réalisation projetant à l’image d’un parvis une vaste ‘à recréer l’atmosphère de chaleur des de l’esplanade en 1992. La notion de place place carrée minérale encadrée par deux salles européennes’. [...] Nous cherchions publique est intimement liée à la Place édifices secondaires (les théâtres) (ill. 32- dans la composition de l’ensemble de des Arts : « Les plans de la Grande Salle 38). Marquée par la centralité, par l’effet la Grande Salle des formes simples, et sa situation centrale dans l’ensemble d’entonnoir depuis la rue Sainte-Catherine lyriques ayant un caractère unique84. » architectural comprenaient une espla- et principalement par l’orientation vers la (ill. 28) L’accent est entièrement mis sur nade85. » Un regard sur les propositions place des trois façades d’édifices, la Place l’élaboration du piano nobile en forme soumises pour aménager l’espace per- des Arts apparaît comme l’extension du de fer à cheval (ill. 29). Ce faisant, la met de lire cette transition d’une place piano nobile, le salon public du complexe Place des Arts contribue à façonner son des autres à une place des nôtres et en- culturel. Le seuil de la place s’approche image mondaine par son ancrage dans fin à une place montréalaise, la place du comme une montée solennelle86 encadrée les grandes traditions européennes et peuple dans un contexte de montréalité laissant place à une grande ouverture et les grandes réalisations architecturales ancrée et vécue. à une percée visuelle sur la Grande Salle.

JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 49 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 30. EXTRAIT D’UNE ESQUISSE TIRÉ DU « PROJET D’UN GARAGE SOUTERRAIN – QUADRILATÈRE DORCHESTER-ST-GEORGES-STE-CATHERINE-ST-URBAIN », OÙ L’ON APERÇOIT LE PLACE DES ARTS TEL QU’IMAGINÉE PAR LES ARCHITECTES AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE, NOVEMBRE 1958. ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 31. PLAN DE LA PLACE DES ARTS, V. 1958-1959, AFFLECK, DESBARATS, ILL. 33. PLAN DE LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 32. ESQUISSE DE LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, ILL. 34. PERSPECTIVE DE LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES.

50 JSSAC | JSÉAC 31 > No 2 > 2006 JONATHAN CHA > ANALYSIS | ANALYSE ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 36. ESQUISSE DE LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 35. PLAN DE LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. ARCHIVES . LE GROUPE ILL. 37. MAQUETTE DE LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ARCHIVES ARCOP. LE GROUPE ILL. 39-40. ESQUISSES D’ENSEMBLE DE LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, ILL. 38. MAQUETTE DE LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES.

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La présence unique d’un bassin d’eau rec- tangulaire aligné, mais désaxé, augmente la qualité esthétique de l’image de l’es- pace. Le vide laisse place à la pureté de l’architecture, à la rationalité des formes et à la gloire de la modernité. Les archi- tectes David, Boulva et Cleve résument : « Le plan directeur original de la Place des Arts, établi en 1959, était fondé sur le principe d’un édifice dominant entouré de structures de moindre échelle, le tout enfermant un carré central et isolé de la rue Sainte-Catherine par une rangée de magasins et de restaurants87. »

Un autre projet similaire proposait une succession de paliers résultant en deux places séparées par deux volées de mar- ches depuis la rue Sainte-Catherine (ill. 39, 40). La Grande Salle, qui était au même niveau que les deux théâtres latéraux dans les premières propositions, regagne une ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 41. ALLÉE MENANT À L’ENTRÉE DE LA GRANDE SALLE DE LA PLACE DES ARTS, AMÉNAGÉE AINSI DE 1963 À 1967, élévation et domine l’espace. La prédomi- AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. nance de l’axe, la hiérarchie des espaces et l’importance donnée à la Grande Salle ca- ractérisent cette proposition qui retrouve le mythe du plateau. Toutefois, tous ces projets ne se matérialiseront pas.

De 1963 à 1993, la Place des Arts sera modifiée à deux reprises par des projets temporaires ou partiels. Dominée les pre- mières années (1963-1967) par sa plate- forme apparente, elle sera accessible par une série de marches précédée d’un axe direct bordé d’arbustes dans une même configuration que l’entrée de la Villa « Rotonda » Almerico Capra à Vicence, mais sans aucune qualité comparative. Le site sera dominé dans sa portion sud- ouest par un parterre composé de trois massifs de gazon et une corbeille de jar- din (ill. 41, 42). Avec l’aménagement du réseau de circulation intérieure et la créa- tion de la Salle des Perdus, la Place, dans sa partie est bordant l’édifice des Théâ- tres, s’adjoindra en 1976-1977 une série de ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 42. VUE D’ENSEMBLE DE LA PLACE DES ARTS APRÈS LA CONSTRUCTION DE L’ÉDIFICE DES THÉÂTRES, 1986. marches et de paliers menant à la Grande

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Salle (ill. 43, 44). Un escalier en axe dia- gonal s’ajoutera à cet aménagement fonc- tionnel qui retrouve, en partie, l’axialité et la monumentalité. Cette composition spatiale est animée par les lampadaires du réputé designer industriel Norman Slater qui ajoutent un caractère ludique à l’es- pace. Le petit espace gazonné et fleuri demeure, mais l’orientation des allées désormais en « X » en est modifiée88. Les aménagements extérieurs, quoique inté- ressants à certains égards, sont encore loin de satisfaire à la planification initiale, à l’idée d’ensemble, à la contemplation et à l’usage prescrit des lieux.

Les propositions campées dans une mo- dernité semblent ne plus satisfaire aux besoins d’une demande de plus en tour- née vers le « nous » plutôt que « l’autre ». Le modèle du vide, l’exemple du Lincoln Center et l’intérêt monumental disparais- ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES sent au profit d’un espace plus chaleureux ILL. 43. L’AMÉNAGEMENT DE LA PLACE DES ARTS EN 1977, DAVID, BOULVA, CLEVE ARCHITECTES, JOHN SCHREIBER RON et caractérisé par le recours au végétal. WILLIAMS ARCHITECTES PAYSAGISTES, NORMAN SLATER, DESIGNER INDUSTRIEL. La Place Ville Marie, place publique mo- derne par excellence de Montréal, sera d’ailleurs réaménagée89 en ce sens. La modernité spatiale est ainsi évacuée et l’effervescence de l’Expo 67 et du nou- veau Montréal estompée.

D’une commande initiale lancée en 1984 pour l’aménagement d’un plan d’eau sur l’esplanade du nouveau bâtiment devant être terminé en 1987, « Place des Arts general manager Guy Morin said he wants less concrete and more green space on the block, along with better access from the street90. » Selon les changements extérieurs projetés, qui concordent avec le vingt- cinquième anniversaire de l’inauguration de la Place des Arts, on veut renouveler l’image du « Place des Arts complex, a sea of concrete that still stands unfinished af- ter 25 years […]. Among its least attractive features is the expansive concrete plaza.

The complex’s centrepiece—Salle Wilfrid ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 44. L’AMÉNAGEMENT DE LA PLACE DES ARTS DEPUIS 1977, DAVID, BOULVA, CLEVE ARCHITECTES, JOHN SCHREIBER Pelletier—stands in the middle of the RON WILLIAMS ARCHITECTES PAYSAGISTES, NORMAN SLATER, DESIGNER INDUSTRIEL, 1986.

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Cartier au Québec, que cent six équipes formulent une proposition d’aménage- ment du nouveau bâtiment, mais aussi de l’espace public à concrétiser. La lec- ture et l’analyse de ces esquisses, à l’instar de la décision du jury, ne permettent pas l’approbation d’aucune proposition : les intentions, les visions, la monumentalité et le mythe du lieu semblent ne plus être générateurs d’une solution spatiale94, la Grande Salle étant relégué, dans bien des cas, à un rôle secondaire.

Alors que quelques esquisses plutôt ma- ladroites privilégient un rayonnement95

ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES depuis la Grande Salle, d’autres n’hésitent ILL. 45. ESQUISSE DE L’IMAGE MONDAINE PROJETÉE SUR LA PLACE DES ARTS, 1959, AFFLECK, DESBARATS, DIMAKOPOULOS, LEBENSOLD, MICHAUD & SISE ARCHITECTES. pas à accorder au lieu une plasticité artis- tique en poursuivant le langage de com- position de la Piazza d’Italia de Charles Moore96. La vision du temple moderne et le mythe fondateur semblent avoir guidé la voie à de nombreuses propositions en empruntant l’idée de l’amphithéâtre ou du théâtre grec97 (ill. 46). Ces images du civil et du sacré seront reprises avec éclat dans le concept d’embrassade œcuménique porté par les colonnades inspirées de la place Saint-Pierre du Vatican98, en enca- drant non pas la place, mais bien la Grande Salle de la Place des Arts (ill. 47) !

La Place des Arts invoque donc encore un caractère symbolique que plusieurs archi- tectes tentent d’acropoliser en y insérant, en plus du nouveau musée d’art, un forum,

CONCOURS D’ARCHITECTURE DU MUSÉE CONTEMPORAIN D’ART DE MONTRÉAL. une agora, un théâtre, un amphithéâtre, ILL. 46. ESQUISSE D’UNE PROPOSITION DÉMONTRANT LA PRÉSENCE D’UN « THÉÂTRE GREC », 1984, GUY FILLION ARCHITECTE. des jardins… La surélévation de la Grande Salle mène à une localisation récurrente concrete desert91. » Vingt-cinq ans plus « The uninviting, concrete-slab aspect of du théâtre, soit un niveau plus bas, au tard, la Place des Arts a toujours des « al- the current Place des Arts »93 doit faire pied du temple. L’idée de créer une espla- lures de chantier », les marches ne mènent place à l’harmonie et à l’intégration des nade99 se révèle un compromis judicieux qu’à des « sorties seulement » et la Grande composantes du site. entre la reproduction d’un théâtre classi- Salle « trône au centre d’un désert d’as- que et la réinterprétation moderne d’une phalte que le temps a crevassé »92. L’image C’est donc à l’occasion du concours public montée baroque (escaliers). L’esplanade mondaine où l’on imaginait les gens gravir d’aménagement pour la construction du poursuit un discours idéologique tourné les marches en robe de bal et en tenue Musée d’art contemporain de Montréal, vers l’ascension, visant à rapprocher les de soirée a fait place à la désolation et concordant avec le quatre cent cinquan- hommes du temple de la culture en les au sentiment du « rêve inachevé » (ill. 45). tième anniversaire de l’arrivée de Jacques élevant vers lui.

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L’AVÈNEMENT : L’ESPLANADE DE LA PLACE DES ARTS

La conception100 de l’esplanade, issue d’une compétition architecturale tenue en 1988, est finalement confiée aux ar- chitectes Dimakopoulos & Associés101 et à Sandra Donaldson, architecte paysagiste. L’intitulé du projet, « Parachèvement du quadrilatère de la PdA », démontre l’in- tention de compléter l’aménagement de l’îlot afin que l’appellation Place des Arts prenne son véritable sens102. Situé au-dessus de la salle des Pas Perdus, le quadrilatère de la Place des Arts, com- plété en 1992, est officiellement inauguré le 27 mai 1993 par la ministre de la Cul- ture, madame Liza Frulla, un an moins un CONCOURS D’ARCHITECTURE DU MUSÉE CONTEMPORAIN D’ART DE MONTRÉAL. ILL. 47. ESQUISSE D’UNE PROPOSITION DÉMONTRANT L’« EMBRASSADE ŒCUMÉNIQUE » À L’IMAGE DE LA PLACE SAINT- jour après l’inauguration du Musée d’art PIERRE DU VATICAN, 1984, RICHARD SZCZAWINSKY, NICK TSONTAKIS, ARCHITECTES. contemporain103 (ill. 48).

Les architectes104 du Musée d’art contem- porain de Montréal (MACM) – réalisé de concert avec l’esplanade pour souligner les trois cent cinquante ans de la fonda- tion de Montréal – désirent donner un certain caractère « sacré » au lieu en re- courant à une forme symbolique pour ce quadrilatère qui constitue le cœur nouveau de la ville. L’architecture du MACM105 se rattache ouvertement à la tendance moderniste du complexe de la PdA et reprend, à l’image d’Aldo Rossi, l’idée de colonnade de la Grande Salle, créant un dialogue rythmique entre les deux bâtiments. Sa valeur réside dans sa ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES force d’encadrement de la Place et son ILL. 48. MAQUETTE DE L’ESPLANADE DE LA PLACE DES ARTS, 1991, DIMAKOPOULOS & ASSOCIÉS. souci de valoriser la Grande Salle par son traitement architectural sobre, mais Rossi que par les expérimentations de l’ar- du design de la Place des Arts (transfor- complémentaire. L’édifice qui recherche chitecte montréalais Melvin Charney. mation du rapport à la rue et à l’espace « l’équilibre esthétique de la ville » ferme de proximité). L’axe nord-sud n’évoque le côté ouest de la Place des Arts et fait L’idéologie conceptuelle de l’esplanade plus seulement une relation monumen- contrepoids au volume opaque de l’édi- est de repositionner la Grande Salle tale entre la Place des Arts et la basilique fice des Théâtres de style « bunker ». À comme point focal de l’espace tout en Notre-Dame, mais encore plus une projec- la fois critiqué et acclamé, l’édifice d’une lui conférant un aspect plus convivial et tion de la montagne au fleuve. Un bassin blancheur immaculée apparaît comme un davantage ancré dans la ville (ill. 49). La d’eau106 et un belvédère regardant vers autre temple sur cette place de la culture, Montrealness of Montreal défendue par le sud, de même qu’un tapis vert, exten- inspiré tant par le courant moderniste de Charney a certes influencé la projection sion du salon vert, au nord de la place,

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évoquent cette spécificité montréalaise. À cet axe s’en adjoint un second, un axe dia- gonal107 qui reprend la réelle orientation cardinale. Ce désaxement de la place lui permet de s’ouvrir et de porter un regard vers la ville, l’ouest du centre-ville culminé par la Place Ville Marie. S’ajoute un dé- sir de « transparence artistique » entre la place publique extérieure (ville tradi- tionnelle) et la ville intérieure (ville mo- derne). Le Kaléidoscope de Bettinger108, ou cette ouverture dans le sol, témoigne de l’essence montréalaise par une fenêtre symbolique sur la ville souterraine.

L’œuvre de Pierre Granche, Comme si le temps… de la rue109, est tout aussi évo- catrice de ce désir de s’appuyer sur les constituantes géographiques, bâties et culturelles de Montréal, dans son projet agissant comme point pivot entre l’espla- nade et la plate-forme, d’une part, et en- tre les deux axes constitutifs, d’autre part. Cette œuvre qui consiste en une dépres- sion semi-circulaire qui peut être appréciée autant de l’extérieur que de l’intérieur, ap- paraît comme une réinterprétation d’une grotte pittoresque et se lit comme un SANDRA DONALDSON ARCHITECTE SANDRA PAYSAGISTE. DONALDSON ILL. 49. ESQUISSE DE L’ESPLANADE DE LA PLACE DES ARTS, 1991. « amphithéâtre antique où les buildings de Montréal sont en quelque sorte les comédiens »110. Ce théâtre gréco-romain sculptural retrouve le mythe fondateur tout en se rattachant à une montréalité, en représentant les rues, l’alignement des arbres, les édifices phares et le fleuve, le tout animé par une coulée d’eau provenant du bassin. L’aménagement semble unir les composantes qui forment le Montréal de tous, le Montréal symbolique, le Montréal des Montréalais (Fleuve Saint-Laurent, mont Royal, Place Ville Marie, rue Sainte- Catherine, etc.) et s’y rattacher.

Le choix des éléments urbains comme composantes de l’espace a été fait dans l’optique de créer un espace optimal com- portant le plus de « successfull features », ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ DE ARTS. LA PLACE DES ILL. 50. L’ESPLANADE DE LA PLACE DES ARTS TELLE QU’ELLE SE PRÉSENTE DEPUIS 1993. concept clé étatsunien des années 1960 à

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1980 développé notamment par Halprin, Marcus, Franklin et Whyte. « The most im- portant role of the exterior landscape and interior circulation is to bring together, both physically and visually all the indivi- dual elements111. » L’espace fait d’ardoise, de granite et de béton préfabriqué est encadré sur trois côtés. Le design au sol, un motif quadrillé allié à une empreinte réutilisant le langage d’un trident, or- donne l’espace et reprend cette idée du rayonnement des arts, rappel de la desti- née de la Place des Arts112 (ill. 50). Le bas- sin rectangulaire muni de jets créant une fontaine, nommé lors de sa conception re- flecting pool, rappelant la symbolique du bassin de Washington DC et la forme de celui du Seagram Building Plaza de New York, se transforme en patinoire l’hiver, à l’instar de celui du Nathan Phillips Square de Toronto.

L’aménagement tire profit de la to- pographie du site par une gradation de niveaux et permet une découverte progressive de la Grande Salle, qui se dévoile peu à peu lorsqu’on gravit la montée (ill. 51, 52). La vaste place com- posée d’un grand escalier curviligne formant un amphithéâtre – rappelant le Pionner Couthouse Square de Port- land113 et trouvant écho dans le nou- veau Federation Square de Melbourne (lauréat du European Landscape Award 2004) – crée une transition souple du bas vers le haut de l’espace public114. Les volées de marches, pièces maîtresses de ILL. 51-52. MAQUETTE DE L’ESPLANADE DE LA PLACE DES ARTS, DIMAKOPOULOS & ASSOCIÉS ARCHITECTES. | Jonathan Cha. l’esplanade qui se transforment en cas- cades d’eau, répondent à la fois à des peuple. Bref, un lieu de circulation et de montréalaise. « Le nouvel amphithéâtre besoins fonctionnels et esthétiques et grande effervescence urbaine115. » en plein air qu’est devenue la Place des sont judicieusement alternées par des Arts117 », extension de son institution, paliers de contemplation. À l’instar de La Place des Arts comporte plusieurs carac- s’ouvre vers la ville et redonne un rôle la Piazza di Spagna de Rome, l’espla- téristiques et références à des espaces clé à l’emblématique rue Sainte-Catherine nade de la Place des Arts « aborde de connus, mais n’apparaît pas comme un cu- qui constitue sa continuation. Cet amé- façon grandiose le concept de ‘voir et mul de concepts (à l’exemple du Tsukuba nagement aura été le carton d’invitation être vu’. Cette longue volée de marches Centre Square116), mais plutôt comme un du peuple, tant attendu depuis près de est à la fois la scène et l’auditorium [...], espace s’étant forgé une identité bien trente ans. La « Place des autres » est de- l’expression d’un lieu dédié à la vie du ancrée dans le territoire et l’histoire venue « Notre place ». L’appropriation de

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montréalaise par excellence. L’esplanade, comme espace de démocratisation de l’en- semble de la Place des Arts, poursuit la quête d’une identité populaire davantage ordinaire et propose de redonner l’impor- tance à la rue, au caractère humain, vivant et dynamique de Montréal. Métropole, montréalité et liveable-city127 s’entremê- lent dans ce lieu devenu patrimoine.

Les artistes Mireault, Tanobe et Théberge ont d’ailleurs situé, dans leurs œuvres respectives, l’importance de la Place des Arts dans la ville et la vie de Montréal (ill. 53). Ils témoignent de la vivacité, de la diversité, du caractère humain et dy- namique de la métropole dans un espace qui a véritablement gagné sa place dans l’imaginaire montréalais. La Place des Arts est en effet de retour au cœur des re- présentations de la ville. Même le célèbre photographe Spencer Tunick en 2001 l’a choisie comme lieu canadien pour ses fa- meux clichés de corps nus. Les Montréalais ILL. 53. REPRÉSENTATION DE LA PLACE DES ARTS, « FESTIVAL INTERNATIONAL DE JAZZ DE MONTRÉAL », ARTISTE MIYUKI TANOBE, 1996, 51 X 61 CM, NIHONGA, TIRÉE DE ROBERT BERNIER (2004), MIYUKI TANOBE, MONTRÉAL, ÉDITIONS se sont ainsi dévoilés sur l’esplanade de la DE L’HOMME. Place des Arts128. la place par la population aura été immé- son axe diagonal de l’autre côté de la rue diate, les festivals extérieurs ayant contri- Sainte-Catherine. La vision et le mythe ont conditionné le bué à créer sa destination et sa notoriété. choix du site, le type de projet et son lan- Plusieurs semaines par année, Montréal La Place des Arts120 est le complexe culturel gage architectural, alors que l’essence de revit, le temps des festivals, le « bouillon- le plus important au pays et l’un des plus l’identité montréalaise aura généré une nement culturel » de l’Expo 67. prestigieux121. « ‘Faire la Place des Arts’, place publique faisant hommage à Mont- c’est le symbole de la concrétisation pour réal. Si « le problème de ‘déficit d’image’ CONCLUSION un artiste122 », « une étape importante sur dont souffrait [la] modeste entrée [de la la route des artistes en tournée internatio- Place des Arts], trop discrète, est en dis- Aux côtés de la Grande-Place Desjardins nale123 », comme en fait foi le concours Ma cordance avec l’importance, en nombre de et de la place Émilie-Gamelin (Berri), la première Place des Arts. « Chacun utilise la sièges comme en valeur symbolique »129, Place des Arts constitue l’âme du Montréal Place des Arts à sa façon et y écrit sa propre les projets d’une nouvelle marquise de la moderne, l’emblème de la place publique histoire, mais rares sont ceux qui peuvent PdA – en référence au concours non con- montréalaise, détrônant de fait la Place l’identifier à une époque particulière, à un crétisé de 2002 remporté par l’Atelier Big d’Armes et la Place Ville Marie. Pôle d’at- nom ou à un mouvement d’idées124. » Elle City – doivent rappeler la longue quête traction de l’activité culturelle et signe de est, à l’instar de la montréalité, qualifia- idéologique du lieu et considérer à part la vitalité montréalaise, elle est fréquen- ble, mais difficilement tangible, comme entière les caractéristiques intrinsèques du tée118 par plus de trois millions de person- l’ont démontré Noppen et Morisset125. La site de la Place des Arts : la pente, le pla- nes par année119. L’image de la place est Place des Arts, avec ou sans quartier des teau, la dominance de l’objet, l’ouverture tellement forte que l’on voudrait, dans le Spectacles, continue d’être le cœur culturel et l’axialité. La Place des Arts et son es- projet du futur , lui de Montréal, « un véritable microcosme planade, devenue piazza, sont désormais joindre une piazzetta, une placette, dans de notre société126 » et la place publique indissociables de l’image montréalaise.

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LA PRESSE ILL. 54. LEMAY, DANIEL (2003), « LES 40 ANS DE LA PLACE DES ARTS “C’EST ENCORE LA PLACE” », LA PRESSE, 27 SEPTEMBRE.

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Ministère des Travaux publics et de l’Approvi- Médiathèque du Musée d’Art contemporain de concrètes : élargissement du boulevard Dor- sionnement, 1983, Musée d’art contemporain Montréal. chester, construction de Place des Arts, pro- Montréal Concours d’architecture, Gouverne- jet de liaison visuelle avec la Place d’Armes, Petrone, Wigglesworth, architectes. ment du Québec, décembre. identification par le Service d’urbanisme Sandra Donaldson, architecte paysagiste. du quadrilatère comme zone de rénovation Pontbriand, Chantal, 1984, « Le nouveau musée urbaine, construction du métro et création d’art contemporain, ou l’esthétique du centre Société de la Place des Arts. des stations Place des Arts et Place d’Armes, commercial », Le Devoir, 28 avril. Université McGill, John Bland Canadian Architec- percement du boulevard Maisonneuve et de Potvin, Gilles, 1988, « La tumultueuse histoire de ture Collection (Fonds John Schreiber). l’avenue Président-Kennedy […] Bref, le dé- la Place des Arts », Le Devoir, 10 décembre. veloppement du quadrilatère est une priorité Presse canadienne, 1983, « La PDA est devenue NOTES en ce qui concerne la consolidation du centre- en 20 ans notre plus important centre cultu- ville. » (La Société La Haye-Ouellet, 1970, Place Desjardins. Sommaire du parti architectural. rel… », Journal de Montréal, 15 septembre. 1. Deux ouvrages clés ont appuyé la structuration Version préliminaire, p. 2-3). Roy, Guy, 1982, La véritable histoire de Jean du propos, soit : Duval, Laurent, 1988, L’éton- 8. Marsan, Jean-Claude, 1992, « Les années de Drapeau, Montréal, Les Éditions Québécor, nant dossier de la Place des Arts 1956-1967, 148 p. Montréal, Louise Courteau éditrice, 427 p. ; rattrapage », Le Devoir, 28 septembre. et Illien, Gildas, 1999, La Place des Arts et la 9. Un projet grandiose auquel les Montréalais Simier, Paul, 1991, « 400 millions d’investissements. Révolution tranquille. Les fonctions politiques e pensaient depuis 1881, mais qui trouva son Les fêtes du 350 auront des impacts à long d’un centre culturel, Saint-Nicolas, Les Presses terme », Journal de Montréal, 24 décembre. plus grand et son plus visible promoteur, de l’Université Laval, Les Éditions de l’IQRC, dans les années cinquante, en la personne de Vanlaethem, France, 1989, « Musée d’art contem- Institut québécois de recherche sur la culture, l’ancien maire Jean Drapeau (au pouvoir de porain », ARQ Architecture Québec, no 47, fé- 151 p. 1954 à 1957 et de 1960 à 1986), aidé de Paul vrier, p. 30. 2. Noppen, Luc et Lucie K. Morisset, 2003, Dozois, Georges-Émile Lapalme et Lucien Saul- Vetrocq, Marcia E., 1991, « Modernity and the « Entre identité métropolitaine et identité nier, sans oublier une bonne partie de l’élite City », Art in America, p. 53. urbaine : Montréal », in Luc Noppen et Lucie anglophone. K. Morisset, Les identités urbaines. Échos de Viau, René, 1984, « Le nouveau Musée d’Art Con- 10. Appellation conférée au complexe jusqu’en Montréal, Québec, Éditions Nota Bene, p. 157- temporain, Vie des Arts, septembre-octobre- 1960. 181. novembre. 11. Duval : 27. 3. Ce discours a été construit par le recours à Villeneuve, Paul, 1988, « Au printemps 1991. une approche historico-interprétative où une 12. « The original Place des Arts, in fact, was ne- Le Musée d’Art contemporain ouvrira sur triangulation entre les monographies (Duval, ver completed. Another grandiose scheme of le site de la PdA », Le Journal de Montréal, Illien), les articles de journaux, les cartes et former mayor Jean Drapeau, the $49-million 27 septembre. photographies anciennes et les esquisses des complex had been modelled after New York’s Whitaker, Craig, 1996, Architecture and the Ame- projets (plans, dessins) a permis d’établir des magnificent Lincoln Centre, complete with rican Dream, New York, Clarkson N. Potter Pu- liens sur la forme et l’idéologie de la Place des a 20-storey office tower. Even without the blishers, 308 p. Arts. tower, Place des Arts has never merited the comparison. » (Fraser, Matthew, 1990, « Reluc- Wigglesworth, David, 1990, « More than ‘Cosmetic 4. La Place des Arts, administrée par la Société tant Prisoner of Place des Arts », The Gazette, Change’ at Place », The Gazette, 18 février. de la Place des Arts, comprend une espla- 3 février.) nade, trois édifices (salle Wilfrid-Pelletier 13. Argumentaire des agences de concerts new- Brochures – 1963, édifice des Théâtres – 1967 et Musée d’art contemporain de Montréal – 1992), cinq yorkaises justifiant le recours au gigantisme . théâtres (salle Wilfrid-Pelletier – 3000 places, (salle de 3100 places). (Duval : 61) Place des Arts. théâtre Maisonneuve – 1300 places, théâtre 14. Ancêtre de la Société de la Place des Arts, or- Duceppe – 750 places, Studio-Théâtre – 400 ganisation en charge de la planification et de places, Cinquième Salle – 140 places) et un Sources d’archives la réalisation du projet de centre culturel de musée (l’unique Musée d’art contemporain la Place des Arts. Bibliothèque nationale du Québec. au Canada). 15. Rapport de la firme new-yorkaise The Ray- Bibliothèques de l’Université de Montréal et de 5. Tiré du Rapport annuel 1993-1994 de la So- mond Loewy Corporation, tiré d’Illien : 16. l’Université du Québec à Montréal. ciété de la Place des Arts, p. 6. 16. Duval : 197. Centre Canadien d’Architecture (Bibliothèque). 6. On ne saurait passer sous silence les contri- 17. Cité dans Duval : 215. Centre Canadien d’Architecture (Collection, Fonds butions remarquées de Lucien Saulnier et de ARCOP). Gérard Lamarche. 18. Idem : 221.

Jodoin, Lamarre, Pratte et associés architectes. 7. En vue de la construction du complexe Desjar- 19. Anctil, Pierre, 2002, Saint-Laurent, La Main dins au milieu des années 1970, « Les instan- de Montréal, Pointe-à-Callière, Sillery, Sep- Le Groupe ARCOP. ces municipales ont préparé l’épanouissement tentrion, p. 22. du secteur par un grand nombre de mesures

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20. Prévost, Robert, 1991, Montréal. La folle en- 40. Lortie : 174. 56. Toutes les autres places publiques de Venise treprise. Chronique d’une ville, Montréal, Édi- portent les appellations campo, campiello, 41. Jusqu’au milieu du dix-neuvième siècle, une tions Stanké, 527 p. piazetta et piazzale. rivière coulait dans l’axe du boulevard de Mai- 21. Linteau, Paul-André, 1992, Brève histoire de sonneuve et de la rue Ontario. 57. Léger, Jean-Marc, 1964, « L’Épidémie des pla- Montréal, Boréal, Montréal, 165 p. ces qui n’en sont pas… », Le Devoir, 13 avril. 42. « Map of the city of Montreal with the latest 22. « Jean Drapeau, bâtisseur », titrait l’article improvements – 1853 », Bibliothèque natio- 58. Duval : 289. d’Éric Clément dans La Presse du 23 octobre nale du Québec. 59. Lepage, op. cit. 1993. 43. Brouillet et Carmel, « Survey Plan », January 1, 60. Lemay, Daniel, 2003, « C’est encore la place. 23. Clément, op. cit. 1961, Job, no. 5819, chemise no 13, Centre Cana- Les 40 ans de la Place des Arts. Toujours ‘le dien d’Architecture et L’Heureux & L’Heureux, 24. Illien : 80. cœur culturel de Montréal’, la Place des Arts, « Plan montrant le quadrilatère compris entre à 40 ans, n’en doit pas moins continuer de se 25. Ibid. : 94. les rues Ste-Catherine, St-Urbain, Ontario et redéfinir », La Presse, 27 décembre. 26. Maur, cité dans Illien : 95. Jeanne-Mance », 24 octobre 1958, révisé le 22 septembre 1961. Archives de la Société de 61. Illien : 4. 27. Drapeau, cité dans McKenna, Brian, et Susan la Place des Arts. 62. Ibid. Purcell, 1980, Drapeau, Toronto, Clarke, Irwin & Company. 44. Duval : 56. 63. Duval : 210.

28. Illien : 59. 45. Première pelletée le 11 février 1961. 64. Ibid. : 322.

29. André Malraux était à la tête du ministère 46. Lapointe (président du Centre Sir Georges- 65. Illien : 28. français des Affaires culturelles créé en 1959. Étienne Cartier), cité dans Duval : 202-203. 66. La Patrie, 26 septembre 1963. Il associait à l’objectif de démocratisation par 47. Bilodeau, Denis, 1993, « Le projet d’architec- le théâtre populaire une mission nationaliste. ture du musée d’art contemporain de Mont- 67. Le centre culturel sera d’ailleurs nationalisé en Selon lui, la culture serait la base d’une appar- réal » (Historique du projet de 1980 à 1992), 1964 sous le gouvernement de Jean Lesage. tenance et d’une affirmation identitaires. Étude commandée par le MAC, Montréal, 68. The Gazette, 23 septembre 1963. Musée d’art contemporain, mai, p. 10. 30. « It is apparent to all who attended any of 69. Illien : 36. the large concerts which have been given this 48. Ce site, par son ampleur, avait déjà fait l’ob- season, that Montreal is in need of a commo- jet de convoitise dès la fin du dix-neuvième 70. On remarque bien que ces deux catégories dious music hall. » (Anonyme, 1878, « Wan- siècle, alors qu’on prévoyait y construire un sont très englobantes. En réalité, les divisions ted – A Music Hall », The Canadian Spectator, nouvel hôtel de ville. La ville avait déjà prévu n’étaient pas telles et plusieurs collaborations vol. 1, no 4, 2 novembre.) d’exproprier tout le quadrilatère. existaient parmi les groupes d’acteurs.

31. Aujourd’hui au sud de la , à 49. Portait anciennement le nom d’École scienti- 71. Titre de The Gazette à la suite de l’inaugura- l’emplacement de l’hôtel Château Champlain fique et industrielle (Archambault). En 1876, tion de la Place des Arts. Marriott. elle prend le nom d’École Polytechnique. 72. Knott, Leonard L., 1965, Montréal l’âge d’or 32. The Raymond Loewy Corporation mentionne (Anonyme, 2003, « L’École Polytechnique », / the golden years, Montréal, McClelland and dans son ouvrage les quatorze sites poten- Forum, Université de Montréal, semaine du Stewart limited, 192 p. 15 septembre.) tiels. (Market Plans Division and The Raymond 73. Brochure promotionnelle de la Place des Arts Loewy Corporation, 1958, A Cultural Centre in 50. Ou siège de l’Union internationale des ouvriers publiée juste avant son inauguration (ano- Montreal. An Economic Analysis in The Arts de vêtements pour dames (UIOVD). nyme et non datée). (Source : Archives de la For Corporation Sir Georges-Étienne Cartier, 51. Lepage, Jocelyne, 1988, « De la ‘Place des Société de la Place des Arts.) p. 117-118.) autres’ à la Place des arts : les 25 ans d’un 74. Lepage, op. cit. 33. Salazar, cité dans Illien : 45. projet grandiose », La Presse, 17 septembre. 75. Illien, op. cit. 34. Lortie, André, 2004, Les années 60 Montréal 52. L’édifice abritant les théâtres Maisonneuve et 76. Clément, op. cit. voit grand, Montréal, Centre Canadien d’Ar- Duceppe (anciennement Port-Royal) a été con- chitecture, p. 101. çu par les architectes David, Barott, Boulva. 77. Notamment la cité EUR 42 de Rome.

35. Duval : 28. 53. Duval : 46. 78. Bland, John, 1980, « Place des Arts, Montreal 1963 », The Canadian Architect, vol. XXV, 36. Marsan, op. cit. 54. Les ouvrages d’Illien et de Duval s’attardent no 11, novembre, p. 23 37. Raymond Guérin, cité dans Pinard, Guy, 1993, à décrire et à analyser en détail l’histoire so- « Trente ans d’émotions de toutes sortes », La cioculturelle et politique de la naissance de la 79. Rebaptisée « salle Wilfrid-Pelletier » le 13 juin Presse, 23 octobre. Place des Arts. 1966.

38. Site aujourd’hui occupé par le complexe Guy- 55. Attribuées à Claude Robillard. Il ne faut 80. Ingénieurs structure : Brouillet & Carmel ; in- d’ailleurs pas confondre la Place des Arts avec Favreau. génieurs mécanique et électrique : Mc Dou- la Grande Salle qui n’en est qu’un élément. gall & Friedman ; conseils acoustiques : Bott 39. Surnommé ainsi par la firme Bélanger, Legault, Beranek & Newman inc. et N.J. Pappas & As- Pelletier. sociates ; conseils pour la salle et la scène : Ben

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Schlanger & Donald Oenslager ; décorateurs : 96. Baillargeon et Desrochers, architectes. ses façades et crée un rythme d’accompa- Henri Baulac & The Raymond Loewy Corpo- gnement pour le piéton. (Source : Jodoin, 97. Beaupré et Michaud, architectes, Jacques ration ; architecte paysagiste : Mc Fadzean & Lamarre, Pratte & Associés.) Bissonnette, architecte, Les architectes Every Ltd. ; conseils pour le garage : Nilbur Carrière, Marcel Deschênes, architectes, 106. « L’eau est omniprésente, pour rappeler le Smith & Associates ; conseils en éclairage : Favreau, Lapointe, Magne, LeMoyne & Asso- fleuve qui coule tout près. Trois bassins cou- Lighting by Feder ; métreurs vérificateurs : ciés, architectes, Guy Fillion, architecte, Fiset, vrent en effet une superficie de 1000 mètres G.A. Hanscomb Partnership ; délégué du Miller, Vinois, architectes, Garant + Vermette carrés sur cette vaste place publique. Il y a un client : The Raymond Loewy Corporation ; architectes, Gauthier, Guité, Roy, Schreiber, bassin rivière, alimenté par 26 jets d’eau, et client : Centre Sir George-Étienne Cartier. Farley, architectes, Les architectes Landry & un bassin cascade où s’écoulent 8500 litres 81. Aussi appelé Civic Auditorium, le projet a Issalys, Arthur C.F. Lau, architecte, Jacques d’eau à la minute. Il y a enfin ce grand bassin été conçu sans la collaboration de Dimitri Leroy, architecte, D.K. Linden, architecte, rectangulaire, orné de chaque côté de huit Dimakopoulos. Miljevic, Miljevic, architectes, Laurie Neale, jets d’eau qui se rejoignent au centre pour architecte, James Ogden, architecte, Louis former un demi-cercle […] L’hiver, l’endroit 82. Cette fois sans la collaboration de Michaud, Pranno, Yves Demers, architectes, Roger Bruno continuera d’être animé puisqu’il accueillera remplacé par Schoenauer. Richard, architecte, Jacques Rousseau, archi- les patineurs. » (Anonyme, 1992, « Place de… 83. « Place des Arts (with Suntory Hall in Tokyo) tecte, Ruccolo, Faubert, architectes, Fichten l’eau », La Presse, 18 septembre.) serves as my primary frame of reference Soiferman, architectes, Les architectes Stahl 107. La Place des Arts est apparue avec une cer- for the broad conception of Philharmonic et Nicolaidis, Peggy Ann Turner, Eva H. Vecsei, taine opposition à la Place Ville Marie. Le court. » (Robert Ryker, directeur musical, architecte, Webb, Zerafa, Menkes, Houdsen, nouvel aménagement réconcilie visuelle- 2000. Extrait d’une correspondance tirée des architectes. ment ces deux monuments modernes de la archives du groupe ARCOP.) 98. Richard Szczawinsky, Nick Tsontakis, métropole. 84. Duval : 68. architectes. 108. L’œuvre intitulée L’artiste est celui qui fait 85. Duval : 98. 99. Gilles Bilodeau, architecte, Jodoin Lamarre voir l’autre côté des choses a été installée en 86. Quatre paliers et cinq volées de marches Pratte architectes, Favreau Lapointe Magne 1993 et réalisée par Claude Bettinger. Elle est (7/7/6/6/2) composent le seuil et contribuent LeMoyne & associés, architectes. composée d’un cylindre de verre émergeant d’un bloc de granite noir et constitue un vé- à rendre dynamique et manifeste l’entrée à la 100. L’importance collective du lieu était assez ritable point de mire devant la salle Wilfrid- Place des Arts. évidente pour que la tâche de concevoir cet Pelletier. Elle agit comme un long périscope aménagement soit confiée à un architecte 87. David, Boulva, Cleve, Architectes, 1982, Ana- transperçant le plafond du couloir des Pas connu, M. Dimitri Dimakopoulos, et ses as- lyse préliminaire de la possibilité d’intégrer le perdus. Par un jeu savant de miroirs disposés sociés (Bonhomme, Jean-Pierre, 1991, « La Musée d’art contemporain à la place des Arts, à l’intérieur du bloc, le passant peut voir, Place des Arts aura sa vraie place urbaine », 12 p. du couloir des Pas perdus, la façade de la La Presse, 5 mai), ceux-là même qui réalisè- Salle Wilfrid-Pelletier sans y être directement 88. Les travaux de l’ensemble du projet ont été rent la Grande Salle. confiés à David Boulva Cleve Architectes, aligné. 101. William S.Y. Sung et David J. Wigglesworth en collaboration avec John Schreiber Ron 109. L’œuvre de Pierre Granche a été réalisée en (de même qu’Alina Morek en 1989). (Source : Williams Architectes Paysagistes. 1991 grâce au concours du programme de Médiathèque du Musée d’art contemporain la politique d’intégration des arts à l’archi- 89. Le projet a été réalisé en 1987 par Sandra de Montréal.) Donaldson, architecte paysagiste. tecture et à l’environnement du ministère 102. Bonhomme, op. cit. de la Culture et des Communications du 90. Peritz, Ingrid, 1988, « Place des Arts to Get 103. C’est en 1983 que le ministère des Affaires Québec. Elle appartient au Musée d’art ‘Welcoming’, Outdoor Facelift », The Gazette, contemporain. 12 décembre. culturelles du Québec annonce la relocalisa- tion du Musée au centre-ville. Le lancement 110. Brisebois, Marcel, 1992, « Le Musée d’Art 91. Idem. du concours d’architecture sur esquisses contemporain », Vie des arts, no 145. pour le futur Musée d’art contemporain de 92. Lepage, op. cit. 111. Bronson, Susan, 1989, « No Fewer Than Six Montréal aura lieu le 29 novembre 1983. Les Projects Planned for Place des Arts, » The 93. Fraser, op. cit. travaux démarreront finalement en 1990 Gazette, 8 juillet. 94. Les esquisses présentées comportent des dé- et l’ouverture officielle aura lieu le 28 mai ficiences majeures à ce titre. De nombreuses 1992. 112. L’idée du rayonnement des arts a été évo- quée lors du discours du président du Centre propositions conservent d’ailleurs les paliers 104. Jodoin, Lamarre, Pratte & Associés (concep- Sir Georges-Étienne Cartier, Louis A. Lapoin- et les volées de marches d’une part et le petit teur Gabriel Charbonneau). jardin d’autre part. L’esthétique et le concept te, en 1963. 105. Son caractère architectural établit un dialo- d’ensemble sont totalement absents. 113. Réalisé en 1982-1984 par les architectes gue avec la Salle Wilfrid-Pelletier en utilisant Willard K. Martin, Martin / Soderstrom / 95. Yves Brault, architecte, Brian E. Burrows, ar- à profit la colonnade qui incorpore ainsi la Matteson. chitecte, D’Anjou, Moisan & Associés, archi- notion de temps. Ce rythme de colonnes tectes, Lesage et Durand Architectes, Denys affirme la nature civique du musée sur la 114. Le Federation Square de Melbourne a été Marchand, architecte, Mercier, Boyer-Mercier, rue Jeanne-Mance, équilibre l’opacité de réalisé par le Lab Architecture Studio en architectes.

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collaboration avec Bates Smart. L’espace a 128. Les célèbres photographies ont été prises été conçu sur un ancien site industriel de le 26 mai 2001. La Place Arts est le symbole neuf acres identifié par le gouvernement que « Montreal is a very open-minded and australien à la fin des années 1980 comme progressive city », selon Spencer Tunick, le site dédié à un nouveau musée et un com- en entrevue à la BBC (British Broadcasting plexe artistique. Corporation).

115. Cha, Jonathan, Stefan Tischer et Roxane 129. Gironnay, Sophie, 2002, « La marquise Oh ! Poisson, 2004, Giardino Villa Piazza. Carnet De la Place des Arts », La Presse, 30 avril. de voyage, Montréal, Université de Mont- réal, p. 36

116. Le Tsukuba Centre Square a été réalisé en 1983 par les architectes Arata Isozaki & Asso- ciates et reprend les formes du Campidoglio de Rome de Michelangelo, de Lovejoy Plaza de Portland de Halprin et des théâtres grecs.

117. Lepage, Jocelyne, 1993, « Trente ans plus tard, les Montréalais ont leur Place des uns et des autres ! », La Presse, vendredi 28 mai.

118. La Place des Arts a le privilège d’être le lieu de rassemblement de manifestations cultu- relles récurrentes. Les principaux festivals logent notamment à son enseigne (Festival International de Jazz de Montréal, Franco- folies, Montréal en lumière).

119. Pendant que plus de huit millions de per- sonnes traversent les souterrains de la Place des Arts chaque année, selon la Société de la Place des Arts.

120. « Trente ans après son inauguration, le 21 septembre 1963, loin des bruits de son parachèvement, des problèmes financiers, des drames et des controverses, on mesure mieux l’importance de l’initiative prise par Jean Drapeau en 1954. Le quartier de la PdA est aujourd’hui bouillonnant d’activi- tés commerciales et culturelles. » (Clément, op. cit.)

121. Rapport annuel 1992-1993 de la Place des Arts.

122. Pinard, op. cit.

123. Rapport annuel 1992-1993 de la Place des Arts : 10.

124. Illien, op. cit.

125. Noppen et Morisset : 157-181.

126. Duval, op. cit.

127. « The ‘Liveable city’ organized both above- ground public spaces and in the world’s most extensive below-surface known as the ‘underground city’. » (Germain, Annick et Damaris Rose, 2000, Montréal. The Quest for a Metropolis, Chichester, John Wiley & Sons, p. 3.)

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