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Syndicat National des Médecins Spécialisés en O.R.L et Chirurgie Cervico faciale (SNORL)

Centenaire 1908 - 2008

Illustration : © BIUM - Examen du larynx au moyen de l’appareil Killian. goldenBOOK21x27SNORL- 29/09/08 22:23 Page 2 Photo : Getty Image

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Syndicat National des Médecins Spécialisés en O.R.L et Chirurgie Cervico faciale (SNORL)

Centenaire 1908 - 2008

Le SNORL remercie tout particulièrement la Bibliothèque Interuniversitaire de Médecine et d'Odontologie (BIUM) pour sa collaboration à nos illustrations.

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Traitement de première intention dans les formes modérées à sévères de la rhinite allergique*.

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* Avis de la Commission de la Transparence Avamys® du 19 mars 2008

Version n°AVAM1R3_8. * Pour une information complète sur le produit,

veuillez vous reporter au dictionnaire VIDAL. - Octobre 2008 © Laboratoire GlaxoSmithKline 3308AVAM23 goldenBOOK21x27SNORL- 29/09/08 22:24 Page 5

Centenaire 1908 - 2008

Editorial du Président

Chères Consœurs, Chers Confrères,

Notre syndicat fête son centenaire. A l’échelle d’une vie c’est beaucoup à l’échelle de notre spécialité c’est une étape !

Un tel cap est l’occasion de faire le point : - Quelle belle évolution pour notre spécialité pendant ces 100 dernières années de progrès médical! - L’ORL d’hier n’est pas celle d’aujourd’hui, mais l’avenir de notre spécialité s’appuie sur ce passé.

Mais commémorer un centenaire, c'est aussi l'occasion d’entrevoir l’avenir : - Quelles seront les perspectives pour les prochaines années alors que progresse notre connaissance du vivant, que les biotechnologies se diffusent, et que de nouvelles techniques thérapeutiques vont apparaître ? - Spécialité initialement chirurgicale puis médico-chirurgicale avec le développement des explora- tions fonctionnelles, saurons-nous affronter le défi de maintenir notre unité et notre cohésion face à l’hyperspécialisation ?

Notre syndicat est né en même temps que les autres instances de la spécialité, lorsqu’apparut la nécessité d’une organisation et d'une défense collective des ORL. Un syndicat est souvent perçu uni- Traitement de quement comme un organisme de défense corporatiste, voire n'est sollicité que dans ce rôle, alors première intention s les formes modérées qu’il a également un rôle prospectif : Il se doit de chercher à anticiper l’évolution de notre environ- à sévères de la nement sociétal, afin de mieux préparer ses mandants à réagir face à lui, et projeter ainsi les bases rhinite allergique*. de sa défense future.

Remb.Séc.Soc à 35 % Sachons tirer parti de ce centenaire pour réfléchir, et tout en profitant des éclairages du passé, Agréé Collect. essayons d’avoir une vision prospective pour les 20 prochaines années, pour la génération d’ORL montante. * Avis de la Commission de la Transparence Avamys® du 19 mars 2008 - Notre spécialité touche 3 sens : Des perspectives nouvelles d’exploration et de prise en charge thé- rapeutique s’ouvriront à elle. - Notre spécialité est médico-chirurgicale, et sa formation doit le rester, traduite par l’unicité de la for- mation initiale de l’internat, ou le volet médical doit être autant privilégié que le volet chirurgical. - Notre spécialité se féminise (17 % en augmentation), vieillit (moyenne d’âge de 51 ans pour les hommes et 47 ans pour les Femmes), c’est un constat, mais c’est aussi un défi pour son évolution, pour la rendre attractive par rapport aux autres spécialités. - Nos conditions d’exercice évoluent. L’entretien de notre technicité devient de plus en plus coûteux. Notre exercice s’articule dans un parcours de soins de plus en plus réglementé. Cela nous conduit à réfléchir à d’autres modes d’organisation, et de relation avec nos confères en particulier généralis- tes, pour une meilleure prise en charge de nos patients futurs.

Vous trouverez dans ces quelques pages plusieurs textes éclairant les diverses facettes de notre Spécialité, et écrits par des personnalités qui ont marqué son histoire. Je les remercie très chaleureu- sement d’avoir participé à l'élaboration de ce Golden Book. Je remercie aussi l’équipe du syndicat qui en a assuré la réalisation.

Longue vie donc à notre Syndicat !!! Docteur Benoît FEGER, Président du SNORL

5 tion complète sur le produit, S.N.O.R.L. Centenaire 1908 - 2008 3308AVAM23 - Octobre 2008 © Laboratoire GlaxoSmithKline 3308AVAM23 goldenBOOK21x27SNORL- 29/09/08 22:24 Page 6 goldenBOOK21x27SNORL- 29/09/08 22:24 Page 7

Centenaire 1908 - 2008

Sommaire

Editorial du Président du Président (Dr. Benoit Feger)...... p 5

Chapitre 1 : Histoire du Syndicat 1. Quelques souvenirs du Docteur Lucien Choay...... p 9 2. Histoire du Syndicalisme médical (Dr. Benoit Feger)...... p 11 3. L’orl et la normalisation Européenne (Pr. Michel Wayoff)...... p 21 4. Le syndicat de 1992-1996 (Dr. Jean-Pierre Fombeur)...... p 29 5. Le syndicat de 1997-2003 (Dr. Alain Vuong) ...... p 33

Chapitre 2 : Documents d’époque 1. 1907 Adhésion à l’USM...... p 36 2. 1908 Liste des membres...... p 37 3. Tarifs et Honoraires de 1908 ...... p 38 4. Photo du Professeur Paul Jacques ...... p 40 5. Tarifs B élaboré par l’A.G. du Syndicat en Octobre 1928...... p 42 6. Présidents et Secrétaires Généraux depuis la création du syndicat ...... p 48

Chapitre 3 : Histoire de l’ORL 1. L’Etat de l’otologie en France il y a 100 ans (Pr. Michel Wayoff) ...... p 51 2. Un siècle d’histoire de la chirurgie de l’otite chronique (Pr. François Legent)...... p 57 3. Un siècle d’otospongiose ou « le siècle » de l’otospongiose (Pr. Jacques Trotoux) ...... p 63 4. Cent ans de Vertiges (Pr. Claude Perrin)...... p 71 5. Le Laser en ORL (Pr. Charles Frèche)...... p 77 6. Traitement chirurgical du cancer du larynx au cours du XXe siècle (Pr. Henri Laccoureye)....p 81 7. 1957-1998….2008 : la surdité (Pr. Alain Morgon)...... p 95 8. « La troisième revolution médicale, entre puissance et crises (1945-2000) (Dr. J.Y. Boussigue)...... p 99

Conclusion Docteur Jean Michel Klein (Secrétaire Général du SNORL) ...... p 109

Bulletin d’adhésion au SNORL...... p 112 Membres du bureau du SNORL...... p 113

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Syndicat National des Oto-Rhino Laryngologistes français

Chapitre 1 Histoire du Syndicat

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es français Centenaire 1908 - 2008

Mes souvenirs de Trésorier du Syndicat de 1956 à 1973

Pr. Louis CHOAY Lauréat de la Faculté - Médecin Honoraire des Hôpitaux Publics (Né en 1919) Trésorier du Syndicat National des ORL de 1956 à 1973

J’ai été sollicité par notre collègue Franck afin d’assumer le poste de Trésorier.

Ce poste a fait l’objet d’une médaille de bronze pour services rendus au syndicat pendant plusieurs dizaines d’années.

En clientèle, je n’ai guère de souvenirs précis en dehors de ce malade qui venait périodiquement me voir parce qu’il avait mal « principalement partout ».

En dehors de cela, j’ai rencontré un jour dans le métro, un de mes ex-patrons qui se reprochait de ne pas m’avoir poussé un peu plus.

Par ailleurs, étant en activité, j’ai eu des responsabilités diverses comme délégué du personnel et autres fonctions qui se prolongeaient en nocturne.

Quand j’ai pris ma retraite, j’ai, avec leur assentiment, proposé à deux de mes collaborateurs :

- à l’un, un poste d’administrateur au syndicat des chefs de service hospitaliers

- à l’autre, un poste d’administrateur au Syndicat des ORL : vous le connaissez tous : Jean Marchand.

Il faisait partie de ces quelques appellations dont une me plaisait particulièrement sous le qualificatif de « Bande à Choay ».

J’ai toujours pensé qu’une partie de mon rôle consistait à pousser mes collaborateurs que je considé- rais comme valables et qui ont successivement occupé des postes de chef de Service.

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es français Centenaire 1908 - 2008

Histoire du Syndicalisme médical

Dr. Benoit FEGER Président du SNORL, Vice-Président FMF

Plus d’un siècle de syndicalisme médical… et demain ?

Célébrer le centenaire de notre syndicat, c’est l’occasion de porter un regard sur l’origine particulière du syndicalisme médical, né bien avant la généralisation d’une protection sociale. Cette plongée dans le passé des luttes syndicales engagées par la profession pour garder son indépendance, nous éclaire sur les enjeux futurs qui nous attendent. Le caractère « Libéral » de l’exercice de la médecine va bien au delà de l’organisation de la rémunération de l’activité de ville : Il concerne tous les modes d’exer- cice, hospitalier comme ambulatoire. C’est l’essence même de cette relation de confiance que l’on ins- taure avec son patient. Le rappeler aux pouvoirs publics n’est pas forcément inutile. Le rappeler nécessitera peut être, comme dans le passé, une mobilisation forte des médecins. C’est là que le terme « combat syndical » prend tout son sens.

Création Mutualité, prévoyant pour le étant ensuite remboursé par l’admi- patient le libre choix du praticien, nistration (système du tiers payant), Le besoin d’un syndicalisme médi- et pour le médecin, le principe de les syndicats médicaux se mobilisent cal français se fait sentir dès la créa- la rémunération à l’acte. pour le respect de « principes » pré- tion de la Revue le Concours médi- servant un exercice autonome de la cal sous l’impulsion du Dr L’affirmation du syndicalisme médi- médecine, en particulier le libre Margueritte du Havre en 1879 (1). cal s’explique aussi par la lutte choix du médecin par le malade et Le premier syndicat local sera créé contre le charlatanisme (et les offi- la rémunération à la visite (et non en Vendée en 1881. En 1884, se ciers de santé). pas au forfait). Les médecins obtien- constitue l’Union des syndicats nent satisfaction puisque, à la fin du médicaux français (USMF), qui Cette lutte recouvre d’abord des siècle, le libre choix domine dans les regroupe 74 syndicats locaux, soit intérêts économiques, et vise à trois quarts des départements. Forte 20% de la profession (environ 3 apporter une réponse à la peur de ces succès, l’USMF compte envi- 500 praticiens). La reconnaissance récurrente de la « pléthore médi- ron 12 000 adhérents en 1910, soit légale ne sera reconnue qu’ulté- cale ». Elle marque ainsi la volonté plus de 50% du corps médical de rieurement en 1892 avec la loi de ne pas voir s’exacerber une l’époque (2). Chevandier, (l’article 13 stipule que concurrence entre praticiens qui « les médecins ont le droit de for- risquerait de peser sur le niveau des C’est dans ce mouvement que sera mer des Syndicats pour la défense honoraires. Le monopole des créé le SNORL officiellement en de leurs intérêts professionnels ») médecins sur l’exercice des soins est 1908 pour défendre notre spécialité. (2). donc obtenu en même temps que le droit à l’organisation collective Cette émergence du syndicalisme de la profession (1,2). Premières crises premières médical est contemporaine de l’ap- divisions parition des mutuelles, favorisée Face à la mise en place de l’assis- par les lois de 1852 et 1898. tance médicale gratuite en 1893 qui Le syndicalisme médical reste mar- permet à tout malade inscrit sur la qué par ses origines (3). Il est issu, En 1895 un accord de principe est liste des indigents de se faire soi- dans l’entre-deux-guerres, d’un signé entre l’USMF et la Ligue de la gner gratuitement, le médecin syndicalisme de combat et de réac-

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Syndicat National des Oto-Rhino Laryngologistes français

tion contre l’hégémonie des institu- Derrière cette division se retrouve avril 1928, la CSMF obtient satisfac- tions de protection sociale. Il s’agis- aussi un clivage sociologique avec tion : Le nouveau paragraphe 4 de sait alors de préserver les principes d’un coté plutôt les médecins de peti- l’article 4 contient l’affirmation de la de la médecine libérale (2). tes villes et de campagne, de l’autre libre entente (il est désormais ques- les médecins des grandes aggloméra- tion de la « part contributive garan- Avec la fin de la Première Guerre tions avec en particulier les puissants tie par les caisses », ce qui laisse aux mondiale le tiers payant est intro- syndicats de la Seine, du Rhône, du médecins toute latitude de deman- duit, donnant le droit aux victimes Nord, et la présence de plusieurs pro- der des honoraires supérieurs aux de guerre de se faire soigner gratui- fesseurs de médecine (2). tarifs de remboursement fixés par les tement. En 1920, une modification caisses), l’absence de tiers payant de la loi entraîne la mise en place Réunification autour des principes (« cette part contributive est avancée d’un tarif fixe et la limitation du libre fondateurs de la Médecine Libérale ou remboursée par la caisse à l’as- choix. Elle déclenche le premier En novembre 1926, la Fédération suré ») et l’habilitation syndicale conflit frontal entre les médecins et adopte une charte définissant les (« les caisses ne pourront passer des l’État puisque l’Union organise une principes de l’exercice de la méde- conventions qu’avec des syndicats grève administrative en décembre cine : professionnels habilités par leurs 1920. L’USMF obtient la négociation « respect absolu du secret profes- groupements nationaux »). (2) du tarif et le contrôle du tiers sionnel ; libre choix du médecin par payant. le malade ; entente directe entre le Les médecins restent donc attachés à médecin et le malade (ou sa famille) l’exercice libéral de la médecine (7) La mise sur agenda de la loi sur les suivant les conditions de la pratique et refusent qu’elle soit réglementée assurances sociales, suscite de fortes ordinaire ». Cette charte va s’impo- par un système de protection sociale. divergences au sein de l’Union et ser lors du congrès des syndicats Le rapport avec le patient reste un entraîne lors de l’assemblée générale médicaux de 1927 (5) et débouche rapport individuel régi par les de 1925 une scission syndicale. La sur la réunification syndicale : la mêmes règles qu’auparavant. Les majorité revendique la mise en place Confédération des syndicats médi- médecins refusent aussi l’institution- de contrats collectifs afin de modifier caux français (CSMF) sera créée en nalisation des relations avec les cais- un rapport de force trop défavorable décembre 1928. ses et les mutuelles, car ils redoutent entre le médecin isolé et la caisse, de devenir des médecins subordon- conception d’un syndicalisme médi- La défense de l’identité libérale l’em- nés à ces institutions (8). cal s’intégrant à la protection sociale porte sur l’intégration du syndica- L’autonomie professionnelle ne afin de défendre les intérêts des lisme au système de protection connaît aucune remise en cause du médecins (2). Cette nouvelle ligne de sociale : « Par son caractère intellec- fait de la mise en place des assuran- l’USMF ne veut pas s’opposer à la tuel, la médecine est une profession ces sociales. Grâce à sa mobilisation mise en place d’un système d’assu- libérale ; ce qui veut dire que l’on politique, le syndicalisme médical a rance sociale qui représente une exerce en toute liberté : liberté d’ac- été en mesure de peser sur la défini- avancée sociale pour les citoyens : « il corder ou de refuser ses soins ; tion de l’organisation même du sys- ne faut pas isoler le corps médical de liberté de traiter le patient à sa tème d’assurance maladie, car le syn- la société, c’est ce que nous devons guise, ayant pour seul guide et seul dicalisme français s’est construit faire de telle sorte que nous ne frein l’intérêt du malade et la avant la mise en place d’un système paraissions pas diriger nos efforts conscience professionnelle ; liberté d’assurance maladie obligatoire (3). contre l’intérêt social car les intérêts de réclamer des honoraires que l’on médicaux sont liés aux intérêts proportionne à l’importance des Dans ce contexte corporatiste, voire sociaux » (4). soins donnés et du service rendu, aux xénophobe (9) (soutien de la loi du situations sociales du client, person- docteur Ambruserter de 1933 réser- La minorité pour qui la préservation nelle du praticien. C’est cet affran- vant l’exercice de la médecine en du caractère strictement individuel chissement de toute entrave morale France aux citoyens français), la créa- de la pratique doit être l’unique but et matérielle, cette indépendance tion d’un ordre et d’un code de poursuivi par le syndicalisme médi- absolue du médecin qui, avec la foi déontologie professionnel deviendra cal, refuse toute intervention exté- en sa science, engendre la confiance une des principales revendications rieure venant perturber le « colloque en lui que lui voue son malade et lui des représentants syndicaux tout au singulier » entre le médecin et le donne le pouvoir de guérir. » (6) long des années 30. malade et fonde en dissidence la La dissolution des syndicats en 1940 Fédération Nationale des Syndicats Par la loi du 30 avril 1930, modifiant touchera aussi les syndicats médicaux de Médecins de France. la loi sur les assurances sociales du 5 et l’ordre sera créé en 1941.

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En 1945 naissance bles, la disparition des conventions partenaires devaient trouver une de la Sécurité Sociale départementales et des adhésions solution soit par des règles de meil- individuelles, en échange d’un leure utilisation des soins, soit par La sécurité sociale et avant elles les financement des cotisations socia- une revalorisation limitée des assurances sociales sont nées d’ini- les retraites : ASV « Allocation honoraires. tiatives de solidarité d’abord mises Supplémentaire de Vie » avancée Finalement la revendication du sec- en oeuvre par les salariés au sein de sociale à l’époque qui se révèle teur 2 est satisfaite par le gouverne- différentes corporations ou dans maintenant être en fait un piège à ment de droite qui ne veut pas un cadre mutualiste, avec pour retardement pour la profession mécontenter un électorat qui lui est objectif premier de se prémunir de avec l’évolution démographique et traditionnellement favorable à la la perte de leur capacité de travail. le déficit des dépenses publiques. veille des élections de 81. Mais le Il s’agissait principalement d’assu- plan Barrot au final ne fut jamais rer un revenu aux salariés trop âgés Depuis la convention médicale est appliqué, les syndicats y voyant une pour continuer à travailler (la le pivot de l’organisation de la logique de maîtrise comptable qui retraite) ou empêcher temporaire- médecine de ville. Chaque négocia- débouchait sur des sanctions. La ment de poursuivre leur activité (la tion conventionnelle donne lieu à FMF est en fait la grande gagnante, maladie). (10) un bras de fer syndical. Dans l’en- car la libre entente est regagnée (8). ceinte conventionnelle se jouent Les ordonnances sociales se feront non seulement l’avenir de la pro- Les conflits autour de cette ques- sans la participation des médecins à fession, le statut social du médecin, tion sont récurrents depuis lors la table de négociations et la le développement de la formation favorisés par le désengagement de médecine libérale perd le principe médicale continue, la régulation l’assurance maladie avec les bloca- de la liberté tarifaire. Cela entraîna des dépenses de santé ou de la ges tarifaires. Si les syndicats médi- des remous au sein de la CSMF démographie professionnelle mais caux s’inscrivent pour les généralis- reconstitué entre les tenants de la également les conditions de l’accès tes dans la logique des tarifs oppo- liberté des honoraires et partisans aux soins pour l’ensemble des assu- sables, pour les spécialistes ils per- de la négociation s’affronteront rés sociaux (8). sistent à soutenir des revendica- sans merci jusqu’au départ, en tions visant, selon l’expression syn- 1960, des premiers réunis au sein La question de la liberté des tarifs dicale convenue, à créer des « espa- de l’USMF qui deviendra en 1968 la ressurgit dès 1980 avec la création ces de liberté tarifaire ». (12) Fédérations des Médecins de du secteur 2 négocié par et pour la France (FMF). Les conventions, FMF. C’est une opportunité de s’af- lorsqu’elles existent, sont départe- franchir du tarif opposable pour Le « trou de la Sécu » mentales avec tarifs spécifiques. En faire entrer dans le giron conven- et les réformes l’absence de convention, l’ancien tionnel médecins restés non- système perdure consistant pour les conventionnés (12). Il est aussi dû à Dès 1963 l’augmentation des char- médecins à pratiquer un « tarif syn- la réactivation du clivage entre la ges d’assurance maladie commence dical » et pour les Caisses un « tarif CSMF et la FMF, cette dernière à inquiéter les pouvoirs publics. de remboursement », sans lien retrouvant des positions plus libé- Les différents gouvernements met- mécanique entre les deux (8). rales sur la convention de 1980. En tent en place une succession de effet, la FMF milite pour le retour réformes: de la libre entente avec création 1960 Le tournant Conventionnel d’un secteur avec des honoraires En 1978 l’enveloppe globale de libres pour un certain nombre de Raymond Barre. A partir des années 1960 (11), la médecins. Alors que le gouverne- CSMF s’est orientée vers une atti- ment de Raymond Barre avec le Puis 1981 avec l’arrivée de la gau- tude de coopération avec les orga- plan Barrot essaye au contraire de che conduit le gouvernement à nismes de sécurité sociale et l’ins- diminuer les dépenses de santé faire passer par décret du 11août tauration d’une convention natio- dont celles de la médecine ambula- 1983, la mise en place du budget nale. En 1971 l’adoption de la loi toire en indexant le rythme des global hospitalier. Une régulation du 31 juillet posant le principe dépenses de santé sur celui de la est possible : l’évolution des bud- d’une convention médicale et richesse nationale, ce plafonne- gets est désormais subordonnée à d’une représentativité nationale ment des dépenses se faisant sous un taux directeur de croissance des organisations syndicales a per- forme d’une enveloppe globale arrêté chaque année par le minis- mis de généraliser les tarifs opposa- annuelle. En cas d’écart négatif, les tre des finances.

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Syndicat National des Oto-Rhino Laryngologistes français

Claude Evin en 1988 introduit une doivent faire face à des attaques pour éviter la crise conventionnelle. maîtrise des dépenses fondée sur un médiatiques et politiques contre le L’absence d’accord conventionnel est taux directeur plafonné, une limita- secteur 2, dans un contexte de défi- en effet considérée comme un échec, tion du secteur 2 en effectif de cits cumulés abyssaux des comptes qui manifeste l’incapacité des pou- médecins, en nombre d'actes, et en sociaux. Parallèlement, les besoins en voirs publics (assurance maladie et valeur des honoraires, et le principe soins augmentent, par le double État) à obtenir l’adhésion des méde- du médecin référent. effet mécanique du vieillissement de cins à leur politique. Cette dépen- la population et du coût des progrès dance est d’ailleurs plus forte pour En 1991 avec l’instauration de la médicaux, conduisant à une néces- l’assurance maladie, dont la légiti- CSG, le financement de la sécurité saire prise en charge de davantage mité et la capacité d’action auto- sociale n’est plus assuré par les seules de chroniques. Dans un nome par rapport à l’État dépendent cotisations sociales mais aussi par contexte économique atone, le pro- de son aptitude à dégager des l’impôt. blème du financement de notre sys- accords avec les représentants du tème de soins devient de plus en plus corps médical. L’actuel président de En 1993 sont introduits les premiers préoccupant. l’UNCAM, Michel Régerau, témoigne outils de la maîtrise médicalisée : les de cette dépendance des négocia- RMO (Références Médicales La préparation de la loi Patient Santé teurs conventionnels par rapport aux Opposables). Territoire pour l’automne 2008 vou- syndicats médicaux : « C’est dans drait concilier la maîtrise des dépen- cette logique de recherche d’adhé- Le plan Juppé de 1995 par voie d’or- ses, l’organisation territoriale et la sion que les conventions ont été, donnance, édicte les nouveaux prin- régulation des soins (13). pendant plus de vingt ans, axées sur cipes de la maîtrise comptable : vote les droits des professionnels plus que d’un ONDAM (Objectif national des sur ceux des patients. » (16) dépenses d’assurance maladie) par le La diversité syndicale s’installe Parlement, et reversements autori- Dans ce paysage fragmenté, on peut taires imposé collectivement aux Le syndicalisme médical s’est émietté distinguer d’une part les syndicats médecins en cas de dépassement de et fragmenté. La CSMF ne peut plus qui se sont créés en opposition à la cet objectif. prétendre depuis les années 1960 au CSMF autour de la volonté de défen- monopole de la représentation des dre plus vigoureusement l’identité La loi de financement de la Sécurité médecins (12). La FMF est créée en libérale de la médecine, et notam- sociale pour 2000 a instauré un 1968, puis le SML (Syndicat des ment la liberté des tarifs (FMF en mécanisme dit « des lettres clefs flot- Médecins Libéraux) en 1981, MG 1968 et SML en 1981) et, d’autre tantes ». France Médecin Généraliste de part, les syndicats MG France et France, enfin Espace Généraliste en Espace généraliste qui entendent La loi Douste-Blazy/Bertrand de 2004, aiguillonné par la montée en défendre de manière spécifique les 2004 a encadré, et progressivement puissance des coordinations de intérêts des généralistes (12). rétréci, l’autonomie des gestionnai- médecins généralistes en 2000, de res de la CNAMT et créé UNCAM spécialistes en 2002. Lors des dernières élections aux (Union nationale des Caisse unions régionales de médecins libé- d’Assurance Maladie). Elle renforce La participation des syndicats médi- raux (URML) en 2006 : les voix se sont la position de l’Etat avec la nomina- caux à la définition de la politique réparties entres sept organisations tion du directeur de l’UNCAM par le des soins est institutionnalisée à tra- (création d’Espace généraliste, scis- gouvernement et non plus par le vers le dispositif conventionnel. Une sion de MG France et décomptes conseil paritaire syndicats des sala- large délégation législative laisse à la séparés des voix entre Alliance et riés et patronat de l’UNCAM. Le maî- négociation entre les syndicats médi- UCCMSF). (17) tre mot de la politique de santé en caux représentatifs et l’assurance ville sera la restauration de la maladie le soin de discuter non seu- Partant du constat que, depuis 1990, confiance avec le corps médical (12). lement les tarifs mais plus largement aucune convention médicale n’était les modalités d’organisation de la parvenue à son terme, le législateur Depuis, on assiste au retour de la médecine de ville et de régulation a cherché à mieux associer aux négo- maîtrise médicalisée dans la conven- des dépenses (14,15). Ce dispositif ciations les syndicats représentants tion, mais aussi à celui d’une certaine institutionnel rend les représentants les professionnels de santé : il a donc maîtrise comptable, avec la mise en des médecins incontournables; tant mis en place un mécanisme (le droit place d’une enveloppe globale pour l’État que l’assurance maladie ont d’opposition) permettant d’éviter la CCAM technique. Les médecins besoin d’au moins un partenaire l’adoption de dispositions conven-

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tionnelles auxquelles serait oppo- caux pourrait, dans une certaine la critique vigoureuse de l’opposi- sée une majorité de professionnels. mesure, constituer une force pour tion syndicale. Cette tentation de À l’origine, la loi avait prévu que les pouvoirs publics en leur permet- la surenchère est d’autant plus pré- l’opposition formée à l’encontre tant de jouer sur la concurrence gnante pour les syndicats qui d’une convention par au moins syndicale. (12) Toutefois, de fait, acceptent de s’engager dans le dis- deux organisations syndicales jusqu’en 1996, la CSMF était consi- positif conventionnel qu’ils sont représentatives – représentant dérée comme un interlocuteur régulièrement sanctionnés lors des pour les médecins, d’après les résul- incontournable par la majorité de élections aux URML (12). tats des élections aux unions régio- gestion de la CNAMTS (FO-CNPF). La participation au dispositif nales des médecins exerçant à titre Le plan Juppé, dès lors qu’il a sus- conventionnel n’est pas le seul libéral (URML), la majorité absolue cité une opposition farouche de la canal d’influence dont disposent les des suffrages exprimés. La loi du 21 CSMF, a fait de MG France, jusqu’en médecins. Ils peuvent également décembre 2006 a remédié à cette 2004, le partenaire attitré de la intervenir par les voies de la mani- situation en prévoyant que, désor- nouvelle majorité de gestion festation et de la grève, instru- mais, le droit d’opposition ne pour- (CFDT-Medef). Enfin, depuis la loi ments de pression sur le politique, rait être exercé que par les seules de 2004 qui prévoit que des syndi- pour faire prévaloir leurs vues. C’est organisations représentatives, cats peuvent s’opposer à un accord ainsi, par exemple, que les méde- relançant le débat sur les critères dès lors qu’ils sont majoritaires aux cins des coordinations ont obtenu de reconnaissance de la représenta- dernières élections aux URML, la une augmentation de 14% du tarif tivité syndicale par le gouverne- capacité des pouvoirs publics à de la consultation en 2002 (passage ment. Mais, bien que validée par le jouer sur la concurrence syndicale du C de 17,5 à 20 euros). juge constitutionnel (18), cette est singulièrement réduite. Les L’expression vigoureuse de leur modification n’est pas sans se révé- résultats des élections aux URML mécontentement leur a permis ler à son tour quelque peu problé- devraient dorénavant désigner les d’obtenir la promesse de voir leur matique, puisqu’elle revient à interlocuteurs obligés des pouvoirs revendication satisfaite par Jacques empêcher des organisations syndi- publics dans le jeu conventionnel. Chirac, candidat à la présidence de cales de faire opposition à un Une tradition de relations houleu- la République. Après l’élection, les accord (en l’occurrence, un ave- ses avec la sécurité sociale et la partenaires conventionnels ne pou- nant) au motif qu’elles ne sont pas fragmentation de la représentation vaient que mettre en oeuvre la pro- représentatives alors même qu’el- syndicale conduisent naturelle- messe présidentielle. Cette aptitude les seraient indiscutablement majo- ment à la surenchère. Il est d’au- à la mobilisation pour faire pression ritaires (17). tant plus difficile de consentir à des sur le politique permet de ne pas se accords avec les pouvoirs publics laisser enfermer dans le cadre des La multiplicité des syndicats médi- que les signataires seront soumis à relations conventionnelles (8).

Charte de la Fédération Nationale des Syndicats de Médecins de France. Congrès des syndicats médicaux du 30 novembre 1927

1) Le libre choix du malade de son médecin…

2) Le respect absolu du secret professionnel ...

3) Le droit à des honoraires pour tout malade soigné…

4) Le paiement direct par l’assuré en prenant pour base minimum les tarifs syndicaux …

5) La liberté thérapeutique et de prescription, l’intérêt technique du traitement doit primer sur le facteur éco- nomique ;

6) Contrôle des malades par la caisse, des médecins par le syndicat et commission médicale d’arbitrage en cas de désaccord ;

7) Nécessité de représentation du syndicat dans les commissions techniques organisées par les Caisses.

« Charte commune de la profession qu’aucune loi, règlement ou contrat ne doit remettre en cause »

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Et demain ? 2° La libre entente tarifaire professionnel », contribuent à la Des principes de la médecine libérale constitution de « déserts médicaux ». de 1927 que restera-t-il ? Elle concerne seulement les méde- Ajoutons à cela l’augmentation des cins exerçant en secteur 2 qui ont la besoins de soins, par le truchement L’atténuation de ces principes liberté de fixer leurs honoraires à conjugué du vieillissement de la résulte de la subordination de plus condition qu’ils le fassent avec « le population et des progrès de la en plus grande aux caisses d’assu- tact et la mesure ». médecine, qui accentue encore le rance maladie, de l’impact des réfor- Le blocage des honoraires opposa- déséquilibre territorial. Une pre- mes de l’assurance maladie qui tente bles a favorisé la dissociation entre mière tentative de limitation de la de maîtriser les dépenses dans un les secteurs, en permettant aux seuls liberté d’installation a été repoussée contexte de crise économique. S2 de s’adapter à l’augmentation du par la mobilisation des jeunes méde- coût de la pratique sans jouer sur les cins en formation à l’automne 2007. 1° L’indépendance des médecins est volumes. On voit donc les spécialités La loi « Santé , Patients et Territoires » remise en cause ne pouvant jouer sur leur volume en cours d’élaboration proposerait d’acte comme la chirurgie s’exercer des « mesures incitatives positives et Avec la perte de la propriété de leur de plus en plus en Secteur 2 en oppo- négatives » pour réglementer indi- outil de travail, par le salariat hospi- sition à d’autre spécialité comme la rectement l’installation… Au final la talier par l’arrivée des groupes finan- radiologie ou l’effet volume reste liberté d’installation libérale sera ciers dans l’actionnariat des clini- une variable possible d’ajustement bien contrainte ! (13) ques, les médecins perdent leur de revenu. Elle subsiste encore mais indépendance dans l’administration elle tend à se réduire avec la volonté 5° Liberté de prescription de leur moyen de production, dans politique d’imposer un Secteur leur liberté d’avis et de la mise en Optionnel encadrant en volume et Ce poste représente le principal œuvre de leurs décisions. en niveau les dépassements. poste de dépense de l’enveloppe des soins de ville. Il s’agit donc d’un Au sens large l’indépendance des 3° Le libre choix levier important pour contrôler les médecins est remise en cause par les dépenses. caisses par la subordination des Le libre choix du médecin par le La liberté de prescription est donc de médecins envers les caisses de l’assu- patient en principe garantit par l’ar- plus en plus encadrée dans des pro- rance maladie. En effet, les médecins ticle 58 du code de déontologie : « Le tocoles de bonne pratique, de res- sont liés par des conventions à l’assu- médecin consulté par un malade soi- pect strict d’AMM etc.… limitant l’in- rance maladie. Ce sont des contrats gné par un de ses confrères doit res- dépendance des médecins dans leur de droit public, afin de déterminer pecter : le libre choix du malade qui art. notamment les conditions et donc les désire s'adresser à un autre médecin » limites dans lesquelles les praticiens se contracte avec, pour limiter le Cette limitation de la prescription libéraux qui ont adhéré à ces conven- nomadisme médical et la consulta- vise surtout à modifier les comporte- tions peuvent facturer leurs actes de tion directe du spécialiste, l’obliga- ments à travers la maîtrise médicali- soins aux assurés sociaux. C’est donc tion du médecin traitant, le respect sée des dépenses. En effet, la nou- une sorte de contrat de travail dans du parcours de soins et les sanctions velle convention médicale du 12 jan- la mesure où elles fixent les tarifs de financières sur le niveau de rembour- vier 2005 agréée par le gouverne- rémunération qui ne sont pas horai- sement de l’assurance maladie mais ment, a prévu un effort de maîtrise res mais liés à l’acte pratiqué. De plus, aussi des complémentaires avec les de dépense autour de 998 millions dans la mesure ou l’assurance mala- contrats dit « responsables ». d’euros. Elle porte néanmoins bien die assure en moyenne les deux tiers atteinte à la liberté de prescription, des cotisations sociales des médecins 4° La liberté d’installation car elle prévoit sous forme d’engage- conventionnés dans le secteur 1 et ments de maîtrise médicalisée entre que c’est elle qui fixe le niveau de La volonté politique de limitation autres: une limitation de la prescrip- rémunération des médecins avec du numerus clausus visant à réduire tion de certains médicaments afin de l’enveloppe limitative de soins de l’offre médicale, l’évolution qualita- réaliser des économies. ville, dont elle entend imposer aux tive de la démographie médicale De plus, un contrôle indirect s’effec- médecins le respect, elle se comporte avec l’augmentation des spécialistes, tue sur la prescription Il se fait par en employeur de fait vis à vis des le vieillissement des médecins libé- des incitations à travers le dérem- médecins conventionnés en secteur 1 raux, l’évolution sociologique des boursement partiel ou total des (19). jeunes médecins qui privilégient leur médicaments jugés inefficaces au projet de vie avant un « sacerdoce regard de leur utilité et de leur coût.

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L’incitation s’effectue donc sur la l’on proportionne à l’importance retrouvés dans les options défen- bourse du patient et non par une des soins donnés et du service dues par leurs syndicats. limitation de l’ordonnance du rendu, aux situations sociales du médecin. client, personnelle du praticien. Les pressions de la société tant C’est cet affranchissement de toute politiques qu’économiques ou 6° Le secret médical entrave morale et matérielle, cette sociales pour encadrer l’exercice indépendance absolue du médecin médical sont bien à l’œuvre. Les Sur le fond, ce principe n’est pas qui avec la foi en la science, engen- choix ne sont pas uniquement éco- contesté. C’est même le seul prin- dre la confiance en lui que lui voue nomiques mais aussi idéologiques. cipe qui outre une protection son malade et lui donne le pouvoir Quelle médecine, quels médecins déontologique, bénéficie d’une de guérir ». la société veut-elle ? La réponse reconnaissance pénale. C’est d’ail- n’est toujours pas claire pour nos leurs le premier des 7 principes concitoyens qu’ils soient patients libéraux à être cités dans le code de Les médecins veulent-ils rester ou médecins. Les débats lors de la déontologie à l’article 4 : « Le des libéraux ? dernière élection présidentielle secret professionnel, institué dans n’ont jamais abordé le problème. l'intérêt des patients, s'impose à Toutes ces contraintes qui pèsent Nous avons vu des passes d’armes tout médecin dans les conditions sur la médecine libérale rendent sur le besoin et le coût d’un établies par la loi ». son exercice de moins en moins deuxième porte avion sur le quin- Cependant, il est plus difficile de attrayant pour les médecins. quennat. Dans le même temps conserver le secret avec le dévelop- La rémunération forfaitaire et le l’augmentation des dépenses de pement des techniques médicales salariat se développent. Par des santé qui croit plus que le PIB en en groupe. En principe, le médecin pratiques mixtes (activité salarié raison des besoins, nécessitera un ne peut délivrer aucune informa- complémentaire) ,mais aussi de financement supplémentaire équi- tion sans l’accord du patient, mais plus en plus de médecins désertent valent au coût d’un porte avion on remarque qu’à l’hôpital, où le l’exercice libéral, car ils trouvent chaque année. (20) . travail en équipe est omniprésent, que le salariat a un statut plus le secret médical à bien du mal à avantageux. Cette tendance est Pourtant la médecine libérale a des être préservé. Le travail en équipe aussi renforcée par la féminisation atouts. Elle a prouvé son efficience rend nécessaire le partage d’infor- de la profession qui préfère le sala- même si, comme toute entreprise mation. riat comme mode d’exercice afin libérale l’entreprise médicale doit Avec la mise en place dossier médi- de concilier plus facilement vie équilibrer son budget, dégager les cal personnel, malgré les garde- familiale et vie professionnelle. moyens de son développement, fous électroniques, l’inviolabilité rémunérer ces acteurs. Elle a du secret n’est pas garanti. L’intérêt Le paiement direct à l’acte l’élé- prouvé sa capacité et sa souplesse médical est d’avoir une exhausti- ment le plus caractéristique de l’in- d’adaptation. Le principe régula- vité des données, l’intérêt du dépendance de la médecine libé- teur et mobilisateur du paiement à patient est d’en masquer les plus rale diminue avec l’augmentation l’activité est même introduit dans sensibles au risque dans dénaturer du tiers payant des actes d’hospita- l’hôpital public avec la mise en l’intérêt. lisation, des actes explorations, la place de la T2A, rapprochant ainsi CMU, les ALD. la philosophie économique entre le privé et le public. L’évolution du Editorial du Médecin de France médecin « artisan » maître de son du 15 novembre 1930 En conclusion, nous sommes art, vers le médecin « ingénieur », donc bien en 2008 à un tour- ne doit pas nous faireoublier, ce colloque singulier humaniste du « Par son caractère intellectuel, la nant de l’histoire de la méde- médecin avec son patient. Gardons médecine est une profession libé- cine libérale. rale ; ce qui veut dire que l’on notre proximité ; ce contact « char- l’exerce en toute liberté : liberté nel » avec nos patients ! C’est Nous voyons avec cet éclairage his- d’accorder ou de refuser des soins, notre mobilisation qui empêchera torique à l’occasion du centenaire liberté de traiter le patient à sa de faire de nous des « techniciens de notre syndicat que les luttes du guise ayant pour seul guide et seul médicaux », des « officiers de santé » passé pour défendre ces principes frein l’intérêt du malade et la aux ordres d’un système de santé ont mobilisé la combativité des conscience professionnelle ; liberté plutôt rationné que rationalisé! médecins du terrain et se sont de réclamer des honoraires que

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La crise actuelle ne nous laisse pas 10 - Spaeth J.-M., Les syndicats et l’assu- 17 - Borgetto M., La représentativité des entrevoir une défense facile des rance maladie, Sève 2008/1, N° 18, p. 29-37. syndicats en droit de l’assurance maladie, principes de la médecine libérale Sève 2008/1, N° 18, p. 39-45. dans le futur : Notre taux de syndica- 11 - Hatzfeld H : Le grand tournant de la médecine libérale, Ed. ouvrières, 1963. 18 - Cons. const. , décision n° 2006-544 lisation est faible, les positions syn- DC, 14décembre 2006,Rec., p. 129,cons. dicales conventionnelles sont dés- 12 - Bras P.-L., Organisation des soins et 28 (« en subordonnant à la condition de avouées lorsque la démocratie pro- régulation des dépenses ambulatoires : le représentativité la possibilité, pour une fessionnelle s’exprime. Nos marges rôle des syndicats médicaux, Sève 2008/1, organisation syndicale, de former opposi- de manoeuvres « d’actions » syndica- N° 18, p. 47-56. tion à un accord, le législateur n’a les sont limitées, comme nous l’ont méconnu ni la liberté contractuelle, ni la montré les sanctions financières 13 - Bachelot – Narquin R. Ministre de la liberté syndicale, ni aucune autre exi- infligées aux syndicats ayant santé, de la jeunesse, des sports et de la gence constitutionnelle »). vie associative Discours de CAEN 27 Juin défendu le mot d’ordre du 2008, Charte d’organisation de l’offre de 19 - Kervasdoué J., la crise des professions « DE » défensif. soins, PDS, FMC, EPP de santé, Dunod, Paris 2003, p195-196.

Notre syndicat est bien sur aussi tou- 14 - articles code de la sécurité sociale L. 20 - Prieur C., Dépenses de santé. ché par cette crise. Avec ses moyens, 162-14-1 et L. 162-5 Pourquoi ne pas dire la vérité aux avec les autres structures de la spé- Français ?, Sève 2008/1, N° 18, p. 95-104. cialité (Collège, Société) il s’efforce, 15 - le rapport de la Cour des comptes sur et il s’efforcera toujours de défendre la sécurité sociale pour 2007. la spécialité, ses conditions d’exercice 16 - Régereau M., « La politique conven- et son attractivité. tionnelle :ses ambitions et ses limites », Revue française d’administration publi- Mais son action sera d’autant plus que, n° 113, 2005, pp. 75-82. efficace qu’il ressent le soutien de tous les médecins de terrain !

Bibliographie

1 - Noir J. Aperçu général de leur histoire, leur organisation, leur rôle et leurs ten- dances , Bulletin de l’Union des Syndicats Médicaux de France, 1908

2 - Hassenteufel P., Syndicalisme et méde- cine libérale : le poids de l’histoire, Sève 2008/1, N° 18, p. 21-28.

3 - Hassenteufel P., Les médecins face à l’État, Paris, Presses de Sciences Po, 1977.

4 - Le Médecin syndicaliste, 15 janvier 1926, p47.

5 - Le Médecin syndicaliste, 1er janvier 1928, p37-39

6 - Le médecin syndicaliste,1er janvier 1928, pp 37-39

7 - Editorial du Médecin de France du 15 novembre 1930

8 - Michau G. Construction et devenir de l’identité de la médecine libérale fran- çaise. Mémoire IEP Aix-en-Provence 2006

9 - Le Médecin de France 15 avril 1930, p.302.

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La Syndicalisation des Médecins 1893 1908

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L’orl et la normalisation Européenne

Pr. Michel WAYOFF Professeur des Universités, Clinique O.R.L., Hôpital Central, 54000 Nancy. Représentant français à l’UEMS, secrétaire de la section ORL-CCF.

Préface

Lorsque nous avons demandé au Professeur Michel Wayoff de participer à cette publication du cente- naire, il nous a soumis deux thèmes de réflexion : l’otologie et son expérience au sein des instances européennes.

A la lecture de l’article qu’il avait rédigé en 1992 pour « Les cahiers d’ORL » sur la normalisation euro- péenne, il nous a semblé que son analyse restait pertinente et d’actualité.

Il y retrace avec lucidité les méandres de la confrontation administrativo-médicale compliquée des tra- ditions propres à l’évolution de notre spécialité dans les divers pays impliqués.

A l’époque, nous n’étions que 12 pays, nous sommes maintenant 27 !

Il est certain que notre regard syndical sur le futur ne peut ignorer cet aspect de notre spécialité et que l’ORL Française doit rester présente dans cette démarche nécessaire mais difficile au sein de l’Europe du XXI ième siècle.

Le Professeur Wayoff nous a demandé de préciser que son action a été poursuivie avec mérite et constance par Jean-Michel Klossek et Bertrand Geoffray dans le cadre de l’UEMS (Union Européenne des Médecins Spécialistes).

Qu’il soit remercié pour la réflexion qu’il nous inspire.

Le Bureau du SNORL

"Nous n'avons pas affaire à la L’Europe de la santé : état siasme "assomptionniste"1 dans l'es- crise de la modernité; nous actuel de l’ORL prit des médecins de l'O.M.S. qui avons affaire à la nécessité de pouvaient proposer une définition moderniser les présupposés sur Les guerres qui ont ravagé l'Europe idéale : "la santé est non seulement l'absence de maladie mais un état lesquels la modernité est fon- peuvent être considérées comme de global de bien-être physique, mental dée. La crise présente est non véritables "guerres civiles" et c'est bien pour ne plus jamais voir "cela" et social". La protection sociale pas la crise de la Raison mais la que les 6 pays fondateurs de s'améliorait rapidement. La maladie crise des motifs irrationnels, la Communauté Économique était ressentie comme l'injustice désormais apparents, de la Européenne (C.E.E.) ont ratifié diffé- sociale à l'état pur, et les hommes rationalisation telle qu'elle a rents traités d'intégration et d'exten- politiques quadrillaient le territoire été entreprise." sion à long terme. Le temps de pan- d'hôpitaux électoraux, de promesses ser les plaies économiques, les pro- démagogiques, tout en vouant aux André GORZ grès rapides et soutenus de la méde- gémonies la gent médicale qu'ils (Métamorphose du travail, 1988) cine faisaient fleurir un enthou- méprisaient de plus en plus.

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Les Facultés de Médecine dont le progression de l'Europe Blanche dotée d'un standard européen, après budget était alors calculé à la capita- même si les professionnels de la 15 ans de discussion. II est vrai que le tion, participaient allègrement à la Santé ont toujours été moins proté- Comité Permanent des médecins de prolétarisation d'une profession sans gés par leurs représentants politi- la C.E. avait dû faire face à de nom- pour autant se fournir les moyens ques que d'autres catégories plus breuses taches avant de se structurer d'une formation de qualité suffi- intéres-santes pour la récolte des en conséquence : charte des méde- sante ce qui creusait les écarts inter- voix aux diverses élections. Il est aussi cins du travail, charte des médecins individuels. Handicapés socialement beaucoup plus noble et surtout plus salariés et hospitaliers, libre circula- par leur humanisme hippocratique, facile, de promettre la Santé pour tion conditionnelle des médecins les médecins ne peuvent pas persis- tous. Cela n'engage pas les élus alors hospitaliers. ter dans la revendication parce que, qu'une lutte contre le tabagisme et de façon dialectique, leur altruisme l’alcoolisme culturel seraient de véri- Le Comité Permanent est à l'inter- statutaire leur est renvoyé comme tables actes de bravoure politique. face des organismes gouvernemen- un boomerang. A la belle époque de taux (politiques) et des Orga-nismes l'utopie communautariste, on enten- Ainsi jusqu'au récent sommet de consultatifs (professionnels). Il est dait des phrases comme : "Vous avez "Maastricht", le Comité Permanent constitué par : un si beau métier que vous devriez ne pouvait donner que des directi- payer pour le faire ! " Les médecins ves, des recommandations aux Pays - 12 délégations nationales, avec se sont donc laissés enfermés dans membres de la Communauté, cha- comme invités permanents la Suisse. une rentable nasse : le piège fonc- que pays restant maître de ses struc- l'Autriche, la Suède. la Finlande et, tionnait au-delà des espérances de tures internes. depuis peu la Hongrie. Elles compor- tous les consommateurs de la santé tent 4 à 5 membres mandatés par les comme de tous ses parasites, aussi La directive 362 orientait à court ordres et juridictions nationales bien les gestionnaires que les assu- terme vers la reconnaissance apparentées et les représentants des reurs. Les prestataires de service eux- mutuelle des "diplômes, certificats et organisations professionnelles. mêmes, comme les ayant-droits assu- autres titres ouvrant l'accès a l'exer- jettis sociaux et mentaux, ont fini par cice des activités du médecin". - 4 commissions : éthique et déonto- mettre, surtout en France, la mar- Remarquons en passant la dispa- logie médicale, médecine préventive mite en ébullition. Au seuil d'un rition du titre de "Docteur en et environnement, formation et éva- bond (sic...) de l'Europe, auquel on Médecine" dans la littérature admi- luation, sécurité sociale et économie ne peut encore apporter de qualifi- nistrative européenne. En France, (industrie pharmaceutique). Des catif, voyons quel peut être le sort comme souvent l’application allait groupes de travail sont formés à la prévisible de la pratique médicale en au-delà du nécessaire : le médecin demande pour initier certaines générai et de notre spécialité en par- fait place au "praticien" pour les démarches. ticulier. organismes de sécurité sociale, voire au "clinicien" dans le jargon hospita- Les organismes consultatifs : lier le suffixe « cien » est commun a Conférence Internationale des L'Europe et les médecins : grand nombre d'emplois ainsi traites Ordres (CIO), Union Européenne des structures sur une base plus égalitaire. On uti- Médecins Omnipraticiens (UEMO), lise également le terme générique Fédération Européenne des En mai 1957, avec le traité de Rome, de « prestataire de services ». Médecins Salariés (FEMS), l'idéal hippocratique ne pouvait Susceptibilité excessive direz-vous Association Européenne des qu'adhérer avec enthousiasme aux que de souligner cette déviation Médecins Hospitaliers (AEMH), Institutions Européennes. Dès 1959, sémantique ? Non pour qui connaît Jeunes Médecins Hospitaliers (PWG), à Amsterdam, un Comité Permanent les arrière-pensées des dialecticiens Union Européenne des Médecins des Médecins " fut institué pour conditionnés à la réflexion marxiste. Spécialistes (UEMS). représenter la médecine et la Une seconde directive 363 coordon- conduire " à un niveau toujours nait les conditions de formation des Les structures politiques de la croissant de qualité dans un espace médecins : 5000 heures en 6 années Communauté Européenne sont lour- ouvert à la libre circulation des études. des et complexes : le Parlement médecins ". Les faits sont têtus et les Européen, le Comité Economique et diversités politiques administratives Publiées en juin 1975, en vigueur en Social et l'ensemble des Commissions et sociales des pays de la France le 31 décembre 1976, ces des Européennes. Communauté Européenne ont directives faisaient de la médecine. apporté leurs inerties respectives à la La première profession libérale

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En ce qui concerne la santé, ces Les contraintes de l’harmonisa- enfin de l'évolution de la responsa- commissions s'appuient sur un tion bilité médicale qui ouvre un mar- comité de hauts fonctionnaires de ché potentiellement juteux pour la Santé Publique et sur le comité Les diversités coutumières, linguis- les professions juridiques. consultatif pour la formation médi- tiques, socio-économiques des dif- D'éventuels réfractaires sont cale prenant avis d’experts profes- férents pays, comme d'ailleurs les réduits au silence par différents sionnels, d'experts gouvernemen- idées souvent peu évolutives et moyens d'exclusion voire de rétor- taux et d'experts universitaires parfois préconçues de différents sion. dans chacun des 12 pays membres. experts, sont autant d'obstacles à une harmonisation rapide et équili- Jusqu'à présent, sur un terrain qui La mission générale de ces commis- brée. Enfin, derrière les textes ne pouvait recueillir que l'unani- sions, on pourrait même dire leur apparemment officiels concer-nant mité, les textes et déclarations du philosophie, est d'élaborer les tex- réglementation des études, les sta- comité permanent ont surtout tes de directives que les organismes ges hospitaliers et la formation porté sur l'éthique et la déontolo- consultatifs sont chargés de trans- continue, se cachent en fait de gie médicale. En 1967, la "charte mettre à la base. Jusqu'à présent grandes diversités qualitatives de Nuremberg" définissait les prin- ces directives ne recevaient pas de entre les pays, et même à l'inté- cipes fondamentaux s'imposant décrets d'application. Elles ont rieur de chaque pays. aux praticiens mais aussi aux orga- pour rôle d'inciter les représentants nismes sociaux et aux états-mem- des organismes consultatifs à La dispersion des qualités morales, bres. A Copenhague, en 1978, apporter ces recommandations intellectuelles et manuelles dans un paraissait une déclaration sur les devant leurs instances décisionnel- échantillon de population médicale coûts de la médecine moderne et les pour obtenir leur application est d'ailleurs mal acceptée par les les dangers d'adopter les seuls cri- progressive dans chaque pays, et fonctionnaires de tous pays car elle tères financiers. La torture était dans la mesure où ces instances ne a plus de conséquences individuel- évoquée en 1990, et le SIDA en font pas la sourde oreille. les et collectives que les variations 1991. du comportement et des dysthy- La décision d'appliquer ces recom- mies d'un technocrate anonyme. II La reconnaissance mutuelle des mandations incitatrices revient est vrai que de nombreux médecins diplômes a fait l'objet de discus- naturellement aux autorités minis- fonctionnarisés dans les faits et sions parfois véhémentes mais la térielles (donc politiques) dans cha- dans leurs mentalités se font les libre circulation de tous les méde- que pays. En fait, ces autorités ont parangons de la vertu diagnostique cins en pratique Iibérale sera effec- désigné préalablement une série et thérapeutique alors que les diffi- tive à partir du 1.01.1993. Il parais- d'experts auprès du comité consul- cultés s'amoncellent sur le terrain sait pourtant difficile d'admettre tatif pour la formation médicale. lorsque les élus (dont le voeu le une rétro-activité égalisatrice pour Ces experts ont déjà eu connais- plus cher est d'être élu une fois de des fourchettes de forma-tion sance des travaux des organismes plus) continuent à promettre une allant de 3 à 6 ans pour l'ensemble consultatifs, transités par le comité médecine de haut niveau, à vitesse des spécialités. permanent et son secrétariat per- unique, de gratuité croissante et manent (qui siège à Bruxelles). Ces autres billevesées relevant de la Il est utile de rappeler brièvement experts ont leur propre conception, pensée "assomptionniste", Il faut le développement historique du variable selon les pays, qu'ils ten- avouer que le mal n'est pas nou- Comité Permanent pour compren- tent de synthétiser au cours de dis- veau et Hippocrate fustigeait déjà dre cet échelonnement dans le cussions parfois vives, et en prin- les "théoriciens sans pratique" temps. cipe, d'adapter aux voeux des orga- aussi bien que les « praticiens sans nismes consultatifs, tout au moins théorie ». Reconnaissons qu'il est La structure du CP fut élaborée en lorsqu'ils leur paraissent receva- souvent nécessaire de balayer octobre 1969 par 3 fondateurs : 1 bles. devant sa porte et que le compor- italien, 1 allemand, 1 français. tement social du médecin dérive L'extension progressive de la com- Il existe donc une boucle de rétro- trop souvent vers des pratiques munauté de 6 à 12 pays se poursui- action, dont le dernier mot revient plus ou moins discutables sous la vait les années suivantes posant au comité permanent lorsqu'il pression des exigences du public, toujours de nouveaux problèmes, publie un texte (directive ou de nécessités d'amortissement du mais progressant inéluctablement recommandation) qui retourne matériel lourd (la trésorerie des fir- devant la volonté délibérée du CP vers la base. mes industrielles se porte bien), et des organismes politiques.

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D'ailleurs, à Madrid. en octobre que médicale ne va pas dans l'intérêt de qualification et que le titre de 1991, le CP remplace l'unanimité par des malades. spécialiste européen soit établi sur la majorité des 3/4 pour les visions des critères comparables au niveau le politiques. L'harmonisation est d'autant plus plus exigeant mis en oeuvre parmi difficile que chaque pays établit sa les différentes qualifications natio- Le CP est assisté par des conseillers réglementation interne et que ses nales. juridiques dont, pour la France. Jean représentants syndicaux et/ou uni- MIGNON, vice-président de la versitaires ne disposent d'aucune En 1973 avec l’intégration du Commission des juristes, conseiller marche de manoeuvre pendant les Royaume Uni, de l’Irlande et de juridique de la CSMF, et ancien direc- réunions européennes sous peine l’Italie, la Communauté passe à 9 teur du Concours Médical. d'être désavoués voire complète- membres. ment ignorés dans leur pays. Le secrétariat permanent sera géré En 1974 la réunion de Monaco abou- par une association internationale A tous niveaux l’influence des "lob- tit à la réservation du domaine de droit belge dont le siège social bies" n’est pas innocente. En France maxillo-facial pour 4 spécialités : sera Bruxelles. Comme l'écrit J. on a pu assister à la création d'un MIGNON : « La période des fonda- D.E.S. de chirurgie plastique recons- La chirurgie plastique, l’O.R.L, la sto- teurs arrive à. son terme, le temps tructive et esthétique de portée très matologie et l'ophtalmologie. Avec des organisateurs est venu ». générale qui aurait pu être intéres- une formation chirurgicale de base sante, autrefois, lors de l'édification et une formation complémentaire Il a donc fallu 32 ans pour bâtir un unitaire des principes fondamentaux chacun de ces spécialistes doit pou- édifice cohérent dans ses intentions de cet aspect spécialisé de l'exercice voir prati-quer la chirurgie maxillo- et sa finalité, même si les va-et-vient chirurgical, mais qui est devenue faciale. Dans des discussions analo- entre les organismes consultatifs et obsolète avec la spécification centri- gues, l'hypertrophie de la phoniatrie le CP n'ont duré que 16 ans. fuge des applications pratiques. et l'individualisation de l'audiologie Peut-on intervenir de façon réguliè- apparaissent comme des menaces Le souci d'harmonisation met au rement heureuse plastiquement et préludant à l'éclatement de l'O.R.L. premier plan l'équilibre entre les dif- surtout esthétiquement voire fonc- tandis que les stomatologistes doi- férentes spécialités. Il n'est pas ques- tionnellement à tous endroits de vent se défendre devant la promo- tion d’accroître la durée de forma- l'organisme ? tion du "doctorat en chirurgie den- tion d'une spécialité par rapport aux taire". Alors qu'une formation mini- autres, même si le développement Heureusement ce D.E.S. a rapide- male de 4 ans était envisagée pour de la médecine moderne fait appa- ment disparu mais la présentation autoriser la migration des O.R.L. en raître de nouvelles pratiques ou des actuelle soulève de nouveaux pro- Europe, la section O.R.L. de modifications dans le champ des blèmes. l'U.E.M.S. proposait une formation compétences. Il faut assister aux réu- de 6 ans pour l'aspect modernisé et nions pluridisciplinaires pour com- réaliste de la spécialité avec l'intitulé prendre I'ambiguïté de certains mots Le cheminement de la section Oto-Rhino-Laryngologie et Chirurgie parfois leur intraductibilité littérale U.E.M.S. en O.R.L. cervico-faciale. dans les différentes langues d'où naissent des malentendus inévitables En 1963, la section O.R.L. de La grande majorité des sociétés col- que la courtoisie et la diplomatie l'U.E.M.S. définissait la spécialité lèges et/ou académies nationales tentent de réduire le mieux possible. comme devant comprendre la men- adoptent le titre complet aussi bien Si, dans les faits, la chirurgie géné- tion "chirurgie cervico-faciale" et en Europe, que sur le continent amé- rale est démantelée en France, ce l'on envisageait, pour l'avenir, la ricain. Mais cette préemption, d'ail- n'est pas encore le cas dans certains création d'un certificat de spécialiste leurs légitimée par les faits, ne pays. Pour les généralistes de tel ou européen. En 1966 et 1967, on réa- constitue pas un droit et il n'y a pas tel pays, la pédiatrie relève d'un lise des études comparatives des de réservation légale sur le territoire. mode d'exercice et non d’une spécia- nomenclatures sans finalité directe. En 1975, il est procédé à l'inventaire lité à part entière. Il est vrai que le La Hollande est le seul pays à payer des centres formateurs dans les diffé- Comité Consultatif comporte une ses cotisations. rents pays, une reprise méthodique majorité de généralistes médicaux de la définition de l'O.R.L. est réali- ou chirurgicaux pour lesquels, non En 1968, le Pr MOUNIER-KUIIN pense sée et qui inclut le domaine cervico- sans quelques justes arguments la qu'il est préférable de laisser chaque facial dans le programme des études. segmenta-tion excessive de la prati- pays libre de déter-miner ses critères Les efforts soutenus de J. BOURGUET

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et Y. GUERRIER aboutissent à un D'ailleurs le Comité de Direction de raires médicaux à la baisse ou pour consensus des membres de la sec- l'U.E.M.S. fait cesser toutes les illu- favoriser la médecine spécialisée tion O.R.L. de l'U.E.M.S. dont J. de sions en précisant successivement : salariée. BOURNONVILLE (Belgique) assure le secrétariat permanent sous une - Que la durée de formation d'une présidence tournante. spécialité ne peut être augmentée État actuel et perspectives séparément et qu'il faut harmoni- Résumons : ser les durées de l'ensemble des Quoiqu'il en soit des vicissitudes - Un programme d'études théori- spécialités médicales. politiques du traité de Maastricht, ques et pratiques de la "chirurgie les professions de santé ne doivent O.R.L. et cervico-faciale". La notion Que la seule spécialité d'exercice se faire aucune illusion. Elles seront même de rhino- et d'oto-neuro-chi- est l'O.R.L. et que la chirurgie cer- offertes en "holocauste" dans le rurgie "réalisée en équipe" est vico-faciale est accessible à tout cadre de l'Europe Sociale, corollaire introduite dans ce programme. chirurgien généraliste. de l'Europe Blanche. D'ailleurs, nos décideurs politiques comptent bien - Une durée souhaitable de 6 ans Que la migration des professions ainsi nous imposer des mesures comprenant un tronc commun de de santé dans les divers pays euro- qu’ils appliqueront au nom sacré formation chirurgicale allant de 6 à péens doit être favorisée à tout de l’ « EUROPE », au nom d'une 18 mois selon les pays. prix et que, dans l'état actuel, auto-rité supérieure à l'autorité avant d'allonger le temps de for- nationale, espérant ainsi ne pas Le secrétaire général de l'U.E.M.S. mation, il faut harmoniser à un ressentir les conséquences électora- (Dr DEMAREZ, stomatologiste, niveau de 4 ans (ce qui est entré les négatives qui ne manqueraient Belgique) fait approuver ces dispo- maintenant dans les faits). pas de survenir, s'ils avaient le cou- sitions par la Commission de rage de les appliquer directement. Formation et d'Evaluation en sep- - Que chaque pays peut à son gré Il ne faut pas croire non plus que le tembre 1989. Le comité de direc- allonger la formation dans les "modèle français" à « vitesse uni- tion de l'U.E.M.S entérine le facultés de médecine du sol natio- que » mais bien onéreux, soit 14.10.89 ce qui aboutit à la motion nal, mais que les autochtones séduisant pour d'autres pays. Les D 8953 dans laquelle il est toutefois seront alors défavorisés dans leurs vierges effarouchées par la méde- précisé que la section monospécia- possibilités de migration par rap- cine a deux vitesses ne semblent lisée d'O.R.L. ne demande pas une port aux médecins d'autres origi- pas comprendre qu'elles enclen- réservation du domaine chirurgical nes, de formation moins longue, et chent la marche arrière, à moins, cervico-facial, qui doit "rester donc capables d'occuper plus tôt suprême duperie, qu'il ne s'agisse accessible à tout chirurgien qui a les postes disponibles. d'un calcul stratégique. reçu la formation adéquate requise pour l'exercice compétent de cette Sans extrapolations particulières, On pourrait d'ailleurs faire d'autres chirurgie". les corollaires de ces précisions réflexions mettant en parallèle les apparaissent nettement : II y a une notions de "Santé Publique" et de Nous ferons grâce au lecteur de équivalence rétro-active des diplô- "santé du public". Est-il cohérent tous les détails concernant l'évolu- mes à partir du 1.01.1993. de ne pas mener à fond les actions tion de cette demande, des malen- de médecine préventive (certaines tendus et des incompréhensions à Il existe une volonté délibérée de vaccinations sont encore onéreu- ce sujet. La commission peut très ne pas allonger de façon notable la ses), de ne pas mener a bien des bien affirmer qu'elle approuve le durée des études et cela pour diffé- actions contre le tabagisme et l'al- plan de formation en O.R.L. et chi- rentes raisons avouées ou implicites : coolisme qui seront bientôt nos rurgie cervico-faciale, dans le sens nivellement à un niveau technique seules spécificités culturelles, sans où il lui paraît correspondre a ce qui n'entraîne pas trop de dépen- mettre en parallèle les frais occa- qui doit être le niveau européen ses d'une part ou de prétentions sionnes par toutes ces aberrations pour un chirurgien voulant exercer quant aux rémunérations d'autre comportementales. La médecine de dans la totalité de ce territoire ana- part : favoriser les migrations qui soins doit-elle absolument repré- tomique. Mais cela ne signifie en jusqu'à présent n'ont pas beaucoup senter une affaire d’état dans tous aucune façon que cette commission posé de problèmes en restant à un Ies secteurs. La santé de l'individu envisage d'officialiser cette entité taux modeste, étant entendu que n’est-elle pas du domaine de la "vie par un diplôme d'exercice. Elle n'en cette situation pourrait changer privée" et dans ce cas, la collecti- a pas le pouvoir. pour favoriser la révision des hono- vité doit-elle forcément supporter

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les frais les plus ultimes de la sophis- Il existe naturellement des diplômes sus complet de l'O.R.L, l’exploration tication thérapeutique l. Est-il possi- d’études spéciales complémentaires fonctionnelle cochléo-vestibu-laire, ble de favoriser plus longtemps l’ab- (DESC) dont la réglementation vient la pathologie de la communication, sence de responsabilité individuelle de changer. lis sont répartis en deux l’immuno-allergologie. du consommateur de Santé par un groupes : tiers payant démago-gique ? Le Il y a donc inadaptation de la régle- médecin doit-il devenir un distribu- 1. Les uns ne sont accessibles qu'au mentation actuelle à la pratique teur de soins aux ordres de son titulaire de DES de chirurgie géné- médicale moderne et cela peut employeur ? Le colloque singulier et rale (5 ans) : infantile, maxillo- constituer pour certains patients un sacré ne risque-t-il pas de devenir faciale, plastique. reconstructrive et très grand malheur. On conçoit mal une méfiance en face d'une défiance ? esthétique, vasculaire, viscérale, qu'une belle spécialité comme Il ne nous appartient pas d'aller plus pour ce qui peut interférer avec l'O.R.L., nécessitant un équilibre loin, dans le cadre de cette mise au I’ORL. complet dont l'honneur est juste- point, mais ces questions se poseront ment d'être médico-chirurgicale, bien un jour avec toute la « cruauté 2. Les autres ne sont accessibles puisse éclater en comportements du réel ». qu'aux titulaires de certains DES d'applications techniques, dont peu exclusivement : la chirurgie cervico- d'individus seraient dorénavant Dans la mesure où une homogéneï- faciale pour l’ORL, l'orthopédie capables de faire la synthèse. sation doit être envisagée dans le dento-maxillo-faciale pour la stoma- cadre européen, il convient de résu- tologie. Cette situation est-elle spécifique- mer la situation actuelle en France ment française ? Traduit-elle notre d'une part, et au niveau des projets Le territoire maxillo-facial reste donc besoin cartésien de plier les faits à des Commissions Euro-péennes d'au- bien accessible au chirurgien généra- nos préjugés théoricisants ? Signifie- tre part. liste surtout s’il est assorti d'un DESC t-elle que nos adaptations soient d'orientation cervico-faciale, plasti- toujours en retard : comme nous que ou vasculaire. Il est toutefois avons été la dernière grande Nation Situation française actuelle permis de constater une évolution à opérer la révolution industrielle du favorable à notre spécialité, à condi- XIX` siècle, plus tard à moderniser L'évolution de la formation des spé- tion que l'accès au DESC de chirurgie nos armées, enfin aujourd'hui à cialistes en France a entraîne la dis- cervico-Faciale soit tout à fait sélec- changer les mentalités d'un peuple parition des CES et parallèlement le tif. Le Collège Français d'O.R.L. et de versatile. Rien n'est parfait non plus passage obligé par l'internat de spé- chirurgie cervico-faciale donnera cer- dans les autres pays européens, mais cialités chirurgicales ouvrant l'accès a tainement à ce sujet des instructions en ce qui concerne l'O.R.L., les plis un Diplôme d'Études Spéciales d’ORL précises pour éviter les particularis- d'aisance existent : on a évité la et à l’obtention consécutive d’une mes éventuellement laxistes. dérive réglementariste et le centra- autorisation d’exercice de la spécia- lisme excessif. lité d’O.R.L. L'attitude de l'Ordre National des Médecins sera enfin déterminante Il existe une formation audiologique Les codifications rigides ne corres- pour réguler les litiges territo-riaux propre en Italie et en Espagne. La pondent jamais aux réalités prati- éventuels et inspirer les propositions pathologie allergique des voies ques et, sous l'évidence des inadap- des compagnies d'assurances du ris- aériennes supérieures est directe- tations (heureusement) comme sous que professionnel. ment prise en charge par l'O.R.L. en la pression des « lobbies » (malheu- Allemagne, en Italie et en Suisse. reusement). On a assisté à d’impor- D'aucun pourrait regretter que la Pourtant en France, l'existence d'un tantes modifications, la disparition formation O.R.L. ne passe pas le important lobby voudrait que l'aller- d’un DES-méteore de chirurgie plas- tronc commun de chirurgie au prix gie soit une spécialité à part entière. tique, reconstructive et esthétique, d'un allongement modeste de la for- Dans une lettre à la section O.R.L. de l’isolement de la neuro-chirurgie qui mation. D'ailleurs, comme en prati- l'U.E.M.S. (25.09.91) l'Union a quitté le tronc commun de chirur- que et à juste titre, l’accés à l’ORL se Européenne des phoniatres donnait le gie, l'intégration de la chirurgie fait par le biais de l'Internat de chi- modèle d'une solution pragmatique maxillo-faciale dans le dit « tronc rurgie, les candidats de la spécialité pour réduire cette fragmentation de commun » et la réduction concomi- se sentent une "vocation et/ou un l'O.R.L. et demandait que la phoniatrie tante de la stomatologie comme spé- tempérament chirurgical". Ils rechi- soit considérée comme une branche de cialité isolée (complètement séparée gnent à se soumettre à la formation l'O.R.L. avec des droits égaux aux de la chirurgie maxillo-faciale). très spécifique que nécessite le cur- autres subdivisions de cette spécialité.

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A l'évidence, il existe une unité cette formation. Une fréquenta- sans nuire aux particularités de O.R.L. et cervico-faciale qui domine tion non négligeable de différents chaque pays tout en favorisant la de loin tous les autres critères de milieux internationaux ne permet formation continue et la conver- classification car elle répond, non pas une telle affirmation. En tout gence vers une harmonisation pro- seulement à la pratique quoti- cas, la forme récente et encore gressivement maximale. dienne, mais aussi à l’adaptation actuelle de l'Internat ne nous per- moderne de la spécialité à un cor- met plus aucun sentiment de supé- La création d'un "Board" est pus de base incontournable. Cette riorité organisationnelle par rap- demandée à chaque section de affirmation, non pas tellement ter- port aux autres pays européens. Il l'U.E.M.S. Pour éviter tout faux- ritoriale, mais surtout physiopatho- est même étonnant qu’on sou- sens, précisons qu'un "Board" n'est logique et thérapeutique, ne mette l’élite de notre jeunesse à un pas un simple diplôme mais une conteste en aucune manière ni la concours difficile pour la laisser vérification de qualification sur chirurgie cutanée de surface, ni la ensuite se former vaille que vaille, épreuves. chirurgie osseuse crânio-faciale, ni et sans évaluation véritable à la les particularismes bucco-maxillai- sortie. L'organisation d'un "Board res. Elle souligne, par contre et for- Européen" par les urologues nous tement, qu'il est peu recommanda- Ces propos sont heureusement a été confirmée par le Pr HAERTIG. ble de s'aventurer dans cet ensem- contestables et beaucoup de nos Après deux sessions de questions â ble à partir de ces trois modes jeunes collaborateurs sont particu- choix multiples ou de cas cliniques, d'exercices. lièrement brillants et conscien- les candidats restant en piste sont cieux, mais manifestement le sys- soumis à une prestation orale d'un La solution la plus adaptée à l'évo- tème n'est pas bon. La France est le jury de plusieurs membres dont un lution prévisible, et déjà largement seul pays, pour prendre un exem- de la même langue que le candi- entamée, de la pratique médicale ple, ou l'étudiant en médecine dat. L'organisation matérielle moderne, est d'envisager un tronc commence à être spécialiste avant revient aux diverses sociétés et col- commun d'O.R.L. sur lequel d'être complètement médecin. lèges de la spécialité dans les diffé- seraient branchées 4 subdivisions Partout ailleurs l'inscription dans rents pays grâce aux cotisations de complémentaires : chirurgie cer- une spécialité est subordonnée à ces structures et a un droit d'ins- vico-faciale, oto-neuro-chirurgie, l'obtention du diplôme d'état, cription exprimé en écus (corres- immuno-allergologie, pathologie presque toujours assortie d'un pondant de 1 200 a 1 500 FF). Le de la communication (alias phonia- stage de 12 à 18 mois de pratique soutien matériel de grands labora- trie). générale. toires internationaux peut être envisagé. Les solutions pratiques ne peuvent Justification d'un Board Européen pas être trouvées en un jour mais Les candidats seront des spécialistes ne vaut-il pas mieux prendre le Nous ne reviendrons pas sur les confirmés avant exercé en pratique temps nécessaire à une réflexion motivations qui ont incité les privée ou hospitalière dans leur approfondie et consensuelle, plu- Institutions Européennes à recon- pays d'origine, après un délai de tôt que d'entretenir un climat d'in- naître l'équivalence des diplômes formation supérieur à 6 ans. Il ne stabilité permanente et de prendre et à recommander de ne pas allon- saurait être question de favo-riser des décisions tellement hâtives et ger la durée minimale des études. une qualification nivelée par le bas. non consensuelles, qu'elles nécessi- Dans la pratique, une différencia- Il s’agit d’offrir une qualité de soins tent d'incessantes retouches et tion s'établit naturellement dans dont le label sera certainement très empêchent l'organisation d'un les modes d'exercice et dans les apprécié par les compagnies d’assu- enseignement cohérent. compétences même si la vérifica- rances. Ce « Board » peut favoriser tion des connaissances apparaît enfin des échanges de postes entre La médecine française s'enorgueil- comme une épreuve coercitive et les universités et les hôpitaux des lit de son "Internat", comme les peu démocratique. différents pays partenaires. "Grandes Écoles" donnent une teinte assez particulière au forma- Dans un document du 29.06.91, le Conclusion lisme intellectuel des commis, plus Dr DERCQ, vice-président du ou moins grands, de l'État. Dans Comité Consultatif Européen pour Réaliser véritablement l'Europe est certaines revues françaises, on pou- la formation des jeunes médecins, autre chose que de faire fonction- vait lire récemment que les diri- envisage les moyens de favoriser ner la C.E.E, (Communauté geants allemands nous enviaient une migration médicale de qualité, Européenne Économique) par une

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somme de règlements. La Dans cette perspective, les profes- est une valeur primordiale. Tout en Commission de Bruxelles a bien sions médicales seront, dans quel- reconnaissant que la pratique médi- conscience que l'aménagement du ques mois, les seules a pouvoir être cale s’exerce à des niveaux de com- nouvel espace Européen a besoin exercées indifféremment dans un plexité, et, justement à cause de cela, d'autres ciments. On aurait pu espé- quelconque des 12 pays européens les types de formation doivent être rer que la formation de la jeunesse alors que l'équivalence, fautes diplô- différenciés à partir d'une base mini- représente le défi idéal pour méta- mes de formation longue continuera male intangible. Par voie de consé- morphoser la Société, éliminer les a être étudiée cas par cas. S'agit-il quence, un système d'évaluation violences, responsabiliser les citoyens d'une manœuvre calculée pour favo- doit être mis en place. Au-dessus des de demain en ouvrant les esprits de riser un taux de migration qui reste variantes nationales liées a la subsi- Façon intelligente et sans sectarisme. insuffisant aux yeux de la commis- diarité et la délivrance d'un diplôme, En fait, la France a beaucoup à faire sion de Bruxelles ? S’agit-il de prolé- le "Board Européen" doit constituer dans cette voie pour atteindre un tariser encore davantage la profes- un label d'appréciation qualitative standard européen. Elle semble pré- sion de médecin ? valable au-delà des frontières, et, à férer la stratégie démagogique des fortiori, en deçà. grands fléaux qui menacent la Santé Comme les digressions parsèment Au sommet de Milan (1989), les chefs volontairement le texte qui précède, (Les cahiers d’O.R.L. – 1992 d'Etat avaient lancé l'idée d'une ces questions paraissent bien éloi- T. XXVII. – N°10) campagne "Europe contre le gnées du sujet précis de l’ORL dans la Cancer", sans doute pour galvaniser CEE puis dans l'Europe. Le lecteur 1. L'assomption est une opération logi- les populations. A l'époque il s'agis- attentif comprendra que tout est lié que par laquelle on assure une proposi- sait du seul consensus possible entre et que l'humanisme médical ne peut tion considérée comme universellement Mme TATCHER et François MITTER- faire de concessions sur l'indépen- acceptée d'avance. En filigrane, on devine qu'il y a beaucoup de présomp- RAND. De son côté Jacques DELORS dance du médecin par rapport à tout tion et la proposition admise peut être persiste à penser que la Santé peut pouvoir. Dans le cadre de l'huma- difficile, voire impossible à assumer. Pour constituer ce « supplément d'âme » nisme hippocratique, applicable à PIAGET, ce type de raisonnement hypo- nécessaire à la construction de tout être humain et en tout lieu, la thético-déductif, sans relation nécessaire l'Europe. compétence professionnelle et son avec la réalité, est caractéristique de la adaptation continuelle au progrès pensée "adolescente" (cf. Psychologie de l'intelligence).

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Le syndicat de 1992-1996

Dr. Jean -Pierre FOMBEUR Président d’Honneur du Syndicat

Lorsqu’on accepte la présidence d’un Syndicat (médical ou autre) on se doute rarement de ce qui vous attend...

Le Docteur Jacques Werner, mon prédécesseur, ainsi qu’Alain Vuong, Secrétaire Général à cette épo- que, ayant exercé une « pression amicale » sur l’auteur de ces lignes, j’ai donc accepté en toute can- deur. Rétrospectivement je pense que l’on devrait proposer ce poste à un confrère 2 ans environ avant sa retraite pour qu’il puisse encore être efficace les 3 années suivantes, ce qui ferait au total 5 ans d’ac- tivités syndicales.

Il est en effet tout à fait acrobatique de mener de front sa carrière hospitalière (je dirigeais le service de St Michel à Paris), sa propre clientèle privée à laquelle j’avais droit en dehors de l’hôpital… et la présidence du Syndicat.

Les problèmes pendant cette période furent multiples et variés ; heureusement qu’Alain Vuong était resté secrétaire général (c’était du reste une condition…). Je retiendrais essentiellement 4 choses : 1. Le combat pour la nomenclature de la chirurgie endonasale, 2. Celui pour la nomenclature de la chirurgie du ronflement, 3. La compétence en chirurgie cervico faciale, 4. Et, à un moindre degré, car n’ayant pas nécessité de combat, l’investissement dans la lutte contre le bruit, en siégeant au CNB (Conseil National du Bruit), pendant plusieurs années après ma présidence ainsi que les études menées en 2002 et 2003 sur les dégâts du bruit dans les discothèques ou autres établissements recevant du public.

1- le combat pour la nomencla- s’est avéré très vite comme beau- En effet la nomenclature prévoyait, ture de la chirurgie endonasale coup plus performant. soit l’exploration du sinus maxil- laire par trépanation de la fosse Il faut rappeler en effet l’essor Comme toujours la nomenclature canine (Caldwell Luc) cotée KC 80, extraordinaire de cette chirurgie, d’un acte nouveau était à la traîne soit le drainage du sinus maxillaire d’abord dans les années 80, puis et les refus de cotation des méde- (par ponction au niveau du méat qui s’est accéléré dans les années cins conseils des caisses se multi- inférieur) coté K 30. 90. On se souvient des célèbres plièrent. Pour la chirurgie de l’eth- « cours sinus » qui avaient lieu une moïde, le problème fut très vite Tous les confrères commençant année à Foch sous l’égide des Prs réglé puisque le De Lima (opéra- cette chirurgie endonasale savaient Bouche et Frèche puis l’autre tion jugée aveugle et aveuglante bien que l’abord du sinus maxillaire année à Arles dans le service du Pr. par l’un de mes maîtres...) était par le méat inférieur (puis après par Rouvier. Cette chirurgie a com- déjà coté à l’époque KC120. Il suffi- le méat moyen), qu’il soit fait au mencé à se faire à l’aide du micros- sait de proposer la même cotation microscope et plus tard à l’optique, cope puis très rapidement Pierre à l’évidemment ethmoïdal qu’il soit était quand même plus difficile et Rouvier, à la suite du Pr. Terrier en fait au microscope ou à l’optique. nécessitait du matériel spécialisé. Suisse, a utilisé des endoscopes, ce Par contre le combat fut assez rude qui restait dans l’air du temps et pour le sinus maxillaire et les 2 Il apparaissait donc logique de meatotomies. coter KC 80 comme un Caldwell

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Luc. Les refus de cotations commen- ryngotomie.et ce qui devait arriver 3 La chirurgie de la face et du cèrent alors à pleuvoir dans tout arriva, les mêmes confrères se virent cou. l’Hexagone et le courrier arrivait en refuser par les médecins conseils de abondance au Syndicat. Avec Alain leur Caisse cette cotation. Il faut dire Cette « affaire » a été traitée en Vuong nous avons donc demandé un que le dossier était plus sensible que binôme entre le Syndicat et bien sur rendez vous au Médecin Conseil la méatotomie assimilable au le Collège des enseignants puisque National pour lui expliquer le pro- Cadwell Luc, dont la logique était relevant aussi bien des 2 structures. blème. facile à démontrer. Je dois dire que la présidence du Collège étant assurée par mon ami le A titre personnel, j’avais subi aussi Avec Alain Vuong, le Médecin Professeur Trotoux (que je connais- un refus pour une patiente opérée Conseil National reçu donc notre sais depuis notre passage à St Louis fin 93. Je me suis donc aussi rendu à visite pour tenter de justifier la cota- en 1964) a beaucoup facilité nos la CPAM du 92 avec mon crâne (sec..) tion et l’entretenir des problèmes de démarches communes. pour expliquer « de visu » l’abord Santé publique induits par le ronfle- par la fosse canine et celui par les ment chronique, mais sans vraiment Un peu d’historique est indispensa- meats. Ces 2 contacts ont été effica- convaincre. Je me souviens même ble si on veut comprendre ce qui ces et je recevais de la Caisse qu’en quittant son bureau il m’avait s’est passé. Nationale une lettre datée du 11 oct pris (très courtoisement) par le revers 1994 qui stipulait : « la trépanation de la veste en me disant :« très hon- Jusqu’en 1984, date de la réforme de du sinus maxillaire doit être cotée KC nêtement, mon cher confrère, vous l’Internat, la formation des médecins 80 quelle que soit la voie d’abord ne croyez pas quand même, qu’il y a ORL comportait schématiquement 2 transmaxillaire ou endonasale (méat des problèmes de santé publique voies : celle de l’Internat de ville de moyen et /ou inférieur) par exten- plus important dans notre pays que faculté, suivi souvent par 2 ans de cli- sion des nombreuses assimilations le ronflement nocturne ? » nicat ou l’on apprenait à pratiquer la ponctuelles ou la meatotomie est totalité de la spécialité (ORL et chi- cotée comme le traitement d’une Un argumentaire assez détaillé fut rurgie de la face et du cou) et la voie lésion non maligne du sinus maxil- mis au point par le Bureau du des CES (certificat d’étude spéciale) laire, quelle qu’en soit l’origine par Syndicat pour justifier notre ou la chirurgie de la face et du cou trépanation de la fosse canine ». Ce demande. Il reprenait les grandes était certes enseignée en théorie problème réglé restait le ronflement. lignes du rapport à la Société mais, sauf exception, rarement prati- Française d’ORL de 1993. Quittant quée. mes fonctions en 1996 je ne puis que 2- La chirurgie de la rhonchopa- résumer la suite du feuilleton, que je * Le DES d’ORL qui sanctionnait thie. n’ai pas vécu : la fin de l’internat nouveau régime fut suivi assez rapidementd’un DESC Avant que de nombreuses spécialités * lettre du Médecin Conseil de chirurgie de la face et du cou, réa- se saisissent du problème, les ORL National, en date du 14 mai 1998, au lisé en principe en 2 ans pendant le étaient parmi les premiers médecins Dr Vuong pour lui demander une clinicat. consultés, aussi bien par les hommes rencontre pour « essayer de mettre à que par les femmes, et commencè- plat ce problème », rent à s’intéresser à la chirurgie du * Voici donc arrivant sur le mar- voile pratiquement en même temps * combat isolé d’un confrère de ché, une nouvelle catégorie de que la chirurgie endonasale prenait la région de Blois pour tenter que médecins ORL ayant droit de faire son essor. C’est dire que les problè- soit acceptée définitivement la cota- figurer sur leurs ordonnances « ORL mes de nomenclature survinrent pra- tion KC100. Le TASS lui donne raison et chirurgie de la face et du cou. » tiquement au même moment. le 5 janvier 2000, mais la Sécurité Comment coter l’ablation des amyg- Sociale se pourvoit en cassation et, Et les anciens ? Pas contents du dales associée à une plastie plus ou par une décision du 19 juillet 2001, il tout… Le problème en fait était moins large du voile ? La nomencla- est donné définitivement raison au assez terre à terre mais bien humain : ture de l’amygdalectomie était cer- confrère. Le problème redevient les titres sur les ordonnances et les tes codifiée depuis longtemps KC40, entier je crois avec la nouvelle façon spécialités exercées sont aux yeux mais cette plastie du voile ? En éplu- de coter les actes chirurgicaux, mais des malades essentiels. Le fait de voir chant la dite nomenclature de nom- je sors là de mon époque ! un jeune diplômé arborer « chirurgie breux confrères estimèrent que tout de la face et du cou » et pas les cela valait bien le KC100 de la pha- anciens, avait du mal à passer…

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* Deux compétences étaient et du cou est une compétence pou- 3- Notre présence au CNB reconnues par le Conseil de l’Ordre vant être exercée avec la spécialité (Conseil National du Bruit). à cette époque : chirurgie maxillo- ORL » et l’autre modifiant l’intitulé faciale (revendiquée par les stoma- des commissions de qualification Il s’agit d’un organisme consultatif tos et quelques rares autres confrè- en « commissions de qualification crée en 1982 et placé auprès du res) et chirurgie plastique et répa- en ORL /chirurgie de la face et du Ministère de l’environnement. Son ratrice (quelques confrères ORL y cou ». but était très clairement d’analyser avaient droit mais très peu). Quelle toute les sources sonores nuisibles solution adopter ? Après avoir lar- * ces textes parus restaient les à la santé et de proposer des gement débattu de ce problème modalités pratiques. actions préventives et curatives. avec les instances du Collège des Shematiquement 3 cas se présentè- enseignants, il est apparu que la rent : Sa composition a été déterminée moins mauvaise solution passait par le décret du 7 juin 1982.De très par la création d’une nouvelle com- - Les confrères membres du Collège nombreuses personnalités y sié- pétence qui s’appelerait « compé- des enseignants ou ayant la prati- geaient et, en particulier, beau- tence en chirurgie de la face et du que quotidienne indiscutable de la coup de syndicats sauf le notre ! cou ». Deux organismes clés chirurgie cervico faciale : dans ce cas Seul ORL le Dr Causse participait devaient être contactés : les Commissions de Qualification aux travaux mais en sa qualité de « accordaient sans problème le personne qualifiée » La présidence * tout d’abord le Conseil de fameux label. était assurée par une personnalité l’Ordre des médecins : c’est le politique choisie en fonction de Pr. Glorion qui nous reçu, le - Les confrères qui ne postulaient à l’alternance et toujours suivant la Pr. Jacques Trottoux et moi-même aucun titre dans la mesure où leur majorité au pouvoir. pour lui expliquer les raisons de activité professionnelle n’était pas notre demande. Le Dr Jacques concernée par cette nouvelle com- Ayant été contacté par un membre Werner, mon prédécesseur à la pré- pétence, du CNB pour faire un exposé sur sidence du Syndicat (et seul mem- l’audition, j’ai profité de cette ren- bre ORL du Conseil National de - Enfin les confrères dont le cursus contre pour lui confier qu’il serait l’Ordre) avait bien sur préparé hospitalier pendant leurs études sans doute opportun que le notre rencontre. Le Pr. Glorion pro- ainsi que leur activité opératoire de Syndicat figure parmi les membres mis de plaider notre cause et nous tous les jours ne permettaient pas du CNB. J’ai donc, sur ses recom- suggéra d’emblée de faire modifier de trancher de façon évidente sur mandations, effectué les quelques l’intitulé des Commissions de l’opportunité de leur accorder le démarches nécessaires pour que le Qualification qui devaient devenir sésame. Syndicat soit représenté : le « Commissions de Qualification en Ministre en charge du Ministère à ORL et Chirurgie de la Face et du C’est bien entendu dans cette der- l’époque, Mme Corinne Lepage, Cou ». nière catégorie que les décisions signait le décret officialisant ma des commissions de qualification nomination au CNB, le Pr. Frachet * ensuite il fallait aussi que furent le plus délicates à prendre. étant mon suppléant, en 1996. notre ministre de tutelle de l’épo- Malgré cela, je ne pense pas que que, le Pr. P Douste –Blazy, donne l’activité chirurgicale des uns et des Pendant 18 mois (jusqu’à ma son aval à cette solution. Un rendez autres ait varié d’un iota à cette retraite anticipée en juin 1998) j’ai vous fut obtenu avec notre époque ; chacun est resté dans ses eu un peu de mal à participer à Ministre grâce à l’obligeance du compétences et les en têtes d’or- toutes les réunions, car elles Pr. JJ Pessey. Les Pr. Trottoux et donnance furent -peut être- moins avaient lieu toujours le matin… Pessey donnèrent leur avis d’uni- chargées. versitaires … 2 mesures intéressaient au plus Il ne faut pas oublier dans cette haut point notre spécialité : * je passe sur les problèmes aventure que cela a permis aux ORL - la limitation de la puissance des pratiques qui ont suivi pour arriver et à eux seuls de se faire reconnaî- baladeurs obtenus par la loi du 28 à l’essentiel : tre le territoire chirurgical de la mai 1996 face et du cou, région convoitée - la limitation du niveau sonore Au JO du 14 juin 1994 paraissaient par d’autres spécialités, qui dans les « établissements ou locaux les 2 arrêtés du 10 mai 94 : l’un pré- auraient très bien pu nous la sous- recevant du public et diffusant de voyant « que la chirurgie de la face traire. la musique amplifiée » appelé à

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tort décret discothèque obtenu par de dégager quelques indications Au total je ne regrette rien, pas plus le décret du 15 décembre 1998. intéressantes car les 2/3 des traumas j’en suis sur que mon complice de sonores observés et rapportés l’époque le Dr Alain Vuong, dévoué On imagine mal l’opposition terrible avaient trait à la musique amplifiée. Secrétaire Général qui, quelques et les discussions sans fin que ces 2 années plus tard allait reprendre la décrets suscitèrent. J’ai surtout parti- Avant de quitter définitivement le présidence. cipé, avec le Pr. Frachet, aux discus- CNB en 2004 et de passer la main, je sions concernant le 2ème décret, sur présentais ce travail en séance plé- J’en profite pour remercier ici tous les discothèques. On se doutait bien nière ce qui a eu le mérite de sensibi- les membres du Conseil que ce premier round gagné, on liser encore plus les intervenants ; d’Administration de l’époque qui, nous mènerait la vie dure pour la cela permis aussi à M. Godal (DASS par leurs conseils et leurs avis tou- limitation des décibels dans les des Yvelines) de lancer une enquête jours pertinents, m’ont beaucoup concerts en milieu ouvert ou fermé. très structurée dans la région pari- aidé, sans oublier notre fidèle secré- Pour sensibiliser les intervenants du sienne à laquelle participèrent les taire Nadia. CNB, le Syndicat organisait une ORL hospitaliers et libéraux ainsi que enquête en 2002 et 2003 sur les nui- des audioprothésistes, enquête dont « On ne se souvient pas de ce qui est sances sonores provoquées par les les résultats recoupèrent à peu près ancien ; et ce qui arrivera dans la TSA (trauma sonores aigus). les chiffres retrouvés par l’enquête suite ne laissera pas de souvenir chez syndicale. Le but de toutes ces étu- ceux qui vivront plus tard » Un questionnaire adressé à tous les des était bien sur de faire renforcer Ecclésiaste 1- 11 syndiqués à travers l’hexagone ne les contrôles dans les discothèques et souleva pas l’enthousiasme des surtout dans tous les autres lieux confrères noyés déjà par des mon- publics ou la législation était encore ceaux de paperasses, mais une hésitante (concert en plein air en bonne centaine de réponses permis particulier).

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Le syndicat de 1997-2003

Dr. Alain VUONG Président d’Honneur

L’accès à la présidence en 1997 s’est fait dans les circonstances tendues de l’attribution de la compé- tence en chirurgie cervico faciale :

La tentation de scission entre les hospitalo-universitaires et les libéraux a été grande, mais la modéra- tion à prévalu ; il faut insister ici sur le rôle de la Fédération Française d’ORL.

Des actions j’en retiendrai trois, et du patient dans l’entretien pré Certains projets ont été menés de j’adresse ici mes remerciements à opératoire. Par ailleurs tout récem- 1997 à 2003, et la présence de Philippe LERAULT pour sa présence ment, CNORL est intervenu auprès Bruno FRACHET a été essentielle : et pour son aide : du Conseil National de la Chirurgie pour demander la représentation - Auditions 2000 a été lancé en - Tout d’abord l’épisode de la de notre spécialité au Conseil de la 1997 avec l’espoir comme son nom chirurgie plastique qui a aboutit Chirurgie. l’indiquait, d’une concrétisation en à la reconnaissance par le Conseil 2000. Le résultat en est le Bus de National de l’Ordre de la capacité - Les prions : les problèmes de sté- l’Audition que Bruno Frachet a des ORL à pratiquer la Chirurgie rilisation induits par l’apparition réussi à mettre en place en 2006 et Plastique et Reconstructive dans le des prions (vache folle) ont été à ceci sans le soutien du SNORL qui y territoire de la face et du cou (ci- l’origine de la saga de la stérilisa- avait renoncé en 2003. joint - page 32 : la lettre reçue par tion de nos nasofibroscopes ; en le Conseil National de l’Ordre des clair : apparition du sujet sur les - Mission Informatique, autre pro- Médecin du 3 avril 2008). prions au Conseil d’Administration jet de Bruno FRACHET, est devenue MIORL avec la participation de la - La mise en place du Conseil du Syndicat en mars 2001, espoir de résolution du problème de la stéri- SFORL et du Collège. National de l’ORL : Collège – lisation des nasofibroscopes en SFORL – SNORL - ceci afin que la mars 2008 ; tout cela pour dire que Voilà quelques lignes sur les points spécialité puisse parler d’une même les négociations sont une longue forts que le SNORL à pu vivre de voix ; le CNORL a pu ainsi réaliser patience. 1997 à 2003. l’édition des fiches d’informations

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Chapitre 2 Documents d’époque

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1907 adhésion à l’USM

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1908 Liste des membres

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Tarifs et Honoraires de 1908

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Pr. Paul JACQUES 1869 – 1964

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Autolaryngoscopie avec la lumière Position de l’explorateur artificielle directe. (D’après Czermak.) en examinant un larynx.

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Tarifs B élaboré par l’A.G. du Syndicat en Octobre 1928

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Présidents et Secrétaires Généraux depuis la création du syndicat

Années Présidents Secrétaires Trésoriers

1907-1914 MOURE M. MAGNAN GELL_ 1914-1926 MOURE M. MAGNAN DUBAR 1926-1930 MOURE G. BATIER DUBAR 1930-1932 DUBAR G. BATIER BONNET-ROY 1932-1933 DUBAR G. BATIER GIRAUDEAU 1933-1936 JACQUES G. BATIER GIRAUDEAU 1936-1940 DUBAR G. BATIER GIRAUDEAU 1940-1943 F. LAVAL P.RIGAUD DE GORSSE1 1943-1944 DURIF G. BATIER Jean MAGNAN1 1944-1945 DURIF G. BATIER GRIPPON DE LA MOTTE 1945-1946 DUBAR G. BATIER GRIPPON DE LA MOTTE 1946-1949 TERRACOL G. BATIER GRIPPON DE LA MOTTE 1949-1952 BOUCHET G. BATIER GRIPPON DE LA MOTTE 1952-1955 G. BATIER F. BARON GRIPPON DE LA MOTTE 1955-1956 G. BATIER G. FRANCK GRIPPON DE LA MOTTE 1956-1958 G. BATIER G. FRANCK L. CHOAY 1958-1961 MOUNIER-KUHN G. FRANCK L. CHOAY 1962-1973 FRANCK J. MARCHAND L. CHOAY 1973-1988 J. MARCHAND P. FEDI BOUCHE 1988-1992 J. WERNER A. VUONG BOUCHE 1992-1996 J.P. FOMBEUR A. VUONG B. FRACHET 1996 J.M. FRIOT A. VUONG B. FRACHET 1997-2003 A. VUONG B. FRACHET A. QUEYROUX 2003-2006 B. GEOFFRAY D. COUPEZ A. QUEYROUX 2006-2007 A. VUONG J.M. JUVANON A. QUEYROUX 2007-2008 B. FEGER J.M. KLEIN A. QUEYROUX

1 C’était alors L’Association Nationale des O.R.L. Français, hâtivement constituée sous l’occupation ennemie pour rem- placer le Syndicat dissout – comme tous les syndicats médicaux – par les Pouvoirs Publics.

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Chapitre 3 Histoire de l’ORL

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L’Etat de l’otologie en France il y a 100 ans

Pr. Michel WAYOFF Professeur honoraire des Universités(1) - Nancy

La commémoration d’une « structure » telle que le Syndicat National des Médecins Spécialisés en O.R.L. et chirurgie cervico-faciale amène à rechercher ses origines ainsi que les raisons de son unité « durable » et de son extension ultérieure.

Dès le milieu du 19° siècle dans une EUROPE encore ouverte à la circulation de l’intelligence, en limi- tant leur activité dans un souci de perfectionnement, de nombreux médecins préfiguraient l’appari- tion des spécialités.

La reconnaissance officielle hospitalière, libérale, voire universitaire de leurs compétences a rencontré les obstacles habituels du conservatisme régulateur, paradoxalement plus important en France qu’ail- leurs.

Par précaution préliminaire, avec Fernand BRAUDEL, reconnaissons qu’il n’y a pas d’histoire plus pas- sionnante que celle de la médecine. Plus sûrement encore, il n’y a pas d’histoire plus compliquée, plus enchevêtrée, plus difficile à écrire

Il n’en reste pas moins que la collaboration «pluri-orificielle » de praticiens d’origine diverses a préludé à l’apparition de notre spécialité. Succédant aux anciens « auristes », les otologistes furent les élé- ments fédérateurs, avec une première manifestation internationale à NEW-YORK dés 1876 (sic).(9)

Bien persuadé que l’histoire ne se répète pas, mais que ses rendez-vous et ses leçons se ressemblent, nous pensons qu’une historiographie documentée (notes comprises) devrait retenir l’attention de tou- tes les générations d’ORL à l’aube du 21°siècle. INTRODUCTION

En 1913, à Paris, la thèse de Claude CHAUVEAU , préfacée par A. POLITZER (2) lui-même est intitulée : « Contribution à l’étude de l’otologie française au cours des cinquante dernières années ». Connu par d’autres publications, l’auteur apparaît comme un remarquable historien de notre spécialité.

Il fait état du « retard français en otologie ». Pour bien le comprendre, il est nécessaire de mettre en perspective comparée d’autres pays européens au cours de ce 19°siècle, si contrasté en France et si fon- dateur pour d’autres.

Dans sa conception unitaire actuelle, l’oto-rhino-laryngologie ne sera vraiment couronnée qu’en 1922 lors d’un premier Congrès International à Paris.

Antérieurement, l’historiographie démontre que POLITZER, ayant acquis les connaissances fondamen- tales indispensables à une bonne pratique clinique, apparaît comme le personnage central de la matu- ration de l’otologie à cette époque.

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Etat des lieux entraîne l’organisation des congrès lité. En 1904, il obtenait la première mondiaux d’otologie jusqu’en 1922 agrégation de la spécialité, transfor- Tout en signalant les différences sta- (9). mée en chaire en 1913. tutaires des structures hospitalières et/ou universitaires en Europe avant En 1904, à Bordeaux, sous la prési- Le « retard français », stigmatisé dans 1914, le décompte des consultations dence d’Emile MOURE, le 7ème le thèse de CHAUVEAU, était donc en spécialisées, officielles ou privées Congrès International consacre le voie de comblement comme en atteste comme celui des services hospitaliers dynamisme du précurseur français de la préface rédigée par A. POLITZER. orientés, donne une idée assez réa- l’otologie moderne [9]. liste de l’importance de l’otologie naissante, variable selon les nations. En France, en effet, l’enseignement L’ouverture scientifique du 19e Contrastant avec le centralisme fran- reste longtemps officieux autour de siècle : la période des auristes çais et son monolithisme mandarinal, personnalités privées comme M.E. le nombre et la dispersion des foyers GELLE (1834-1923), Georges POYET Le grand chambardement de la otologiques dans les pays de langue (1847-1926 – médecin du Révolution Française, la volonté de allemande sont remarquables [6] : 4 Conservatoire de Paris), de LUBET- faire « table rase du passé » a provo- royaumes, 5 grands duchés, 7 princi- BARBON (1857-?) et Pierre BONNIER qué de profondes modifications dans pautés, 6 villes libres hanséatiques. (1861-1918). Quelques médecins hos- la mentalité des élites, en même La plupart des universités sont pitaliers ouvrent des consultations temps qu’une certaine sidération situées dans des villes de moyenne otologiques comme E. ESCAT (1865- après la fermeture des Facultés lors- importance. Cette position favorise 1948) à Toulouse, M. LERMOYEZ que AF de FOURCROY (1755-1809) la compétition dans le travail fonda- (1858-1929) et E. LOMBARD (1868- envisage de revoir totalement l’en- mental et la recherche. Un ensei- 1920) à Paris [10]. seignement de la médecine et s’ex- gnant (professeur ordinaire ou clame à la tribune de la Convention : « dozent ») ne devient titulaire de A Lyon, M. LANNOIS (1850-1942) sera « peu lire, beaucoup voir, beaucoup son poste (chaire/extraordinariat) chargé de cours en 1898. F. COLLET faire » [12]!! qu’après deux ou trois changements (1870-1966) se forme chez POLITZER d’université. et devient médecin des hôpitaux en Caractéristique bien française que le 1901, s’orientant vers la neurologie. déclenchement de drames idéologi- Pendant la seconde moitié du 19e siè- Après le règne des « auristes », la ques pour masquer des retards liés à cle, en otologie, on dénombre : spécialité naissante attirait des oph- une réelle passivité devant l’écla- 12 postes dans le REICH allemand talmologistes (la double spécialisa- tante nécessité d’évoluer. D’une (contre 22 en laryngologie) tion existe encore avant la WW2, en manière moins tonitruante, un tel 5 en Italie, en Grande Russie et aux particulier dans les hôpitaux militai- programme avait été proposé par USA res), des médecins et quelques chi- BOERHAVE [5] et transposé à Vienne. 4 dans l’Empire Austro-Hongrois rurgiens. Reçus au même concours 3 au Royaume-Uni et en Irlande d’agrégation d’anatomie (1895), P. Le 19e s. est ainsi jalonné d’exemples 3 en France et en Suisse SEBILEAU (1860-1953) à Paris, J. de développements stochastiques. 1 en Belgique. MOURET (1805-1928) à Montpellier, Au moment où Cl. BERNARD publie et P. JACQUES (1869-1964) s’orien- « Introduction à la médecine expéri- L’apparition progressive de revues tent vers cette nouvelle activité spé- mentale » en 1865, il pouvait tou- spécialisées témoigne de l’intérêt cialisée [10]. jours écrire : « il existe encore des soulevé par la pathologie de l’oreille A Nancy, P. JACQUES assurait officiel- médecins d’un grand mérite qui per- et la perspective des progrès théra- lement un enseignement ORL dès dent leur temps à discuter le vita- peutiques. William NEIR [8] en a éta- 1897 et une consultation hospitalière lisme, l’animisme ». bli la liste inaugurée en 1864 par en 1898, suivie plus tard par l’ouver- « Archiv. für Ohrenheikunde », puis ture d’un service de 25 lits. Il devait La description des maladies construi- « Archives of Ophtalmology and être chargé d’un cours d’état le sait une nosologie impénétrable et » (bilingue aux USA en 1.11.1913, transformé en chaire en contredite par l’évolution des 1869) et « Annales des maladies de 1920 [11]. méthodes d’observation. l’oreille et du larynx en 1875 en L’interaction entre tactique et straté- France. Un premier contact à New- A Bordeaux, E. MOURE (1855-1914) gie entraînait la différenciation des York en 1876 (simple section otologi- ouvrait un cours libre en 1886 qui attitudes et des pratiques, que que dans le cadre du Congrès attirait de nombreux élèves venus de George WEISZ assimile à une vérita- International des Sociétés Médicales) toute la France s’initier à la spécia- ble histoire sociale [13].

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Si PENCIZ (1700-1736) fait naître la précurseurs de l’otologie en France Le père de l’otologie : Adam microbiologie, il faut attendre L. ont été recensés par F. LEGENT qui Politzer (1836-1920) PASTEUR (1822-1895) et R. KOCH montre bien que l’éducation des (1843-1910) pour ouvrir l’ère de la sourds représentait leur activité Alors que l’Ecole Viennoise avait bactériologie, à un moment où les essentielle [17]. déjà une dimension mondiale, le élèves attardés de BROUSSAIS se hongrois J. von OPPOLZER (1808- battaient pour la génération spon- Par contre, en Angleterre, J. TOYN- 1871), membre du Collège profes- tanée et la putréfaction louable : BEE (1815-1866) eut une renom- soral, décidait de libérer les spécia- « plus on suppure, mieux on guérit » mée mondiale pour ses travaux lités médicales dont il prévoyait [14]. anatomiques [18]. l’incontournable nécessité, et d’or- Souffrant d’acouphènes, il mourut ganiser leur enseignement. Ayant La pauvreté des moyens d’examen immédiatement après s’être délivré apprécié les qualités et la motiva- explique le caractère très incertain une irrigation tubaire d’un tion d’Adam POLITZER [21], il lui des pratiques médicales, justifiant mélange d’acide prussique et de offrait un plan de structuration de distinguer deux périodes au 19e chloroforme ! associant la pratique et l’enseigne- siècle séparées par la Révolution de ment clinique, à partir d’études 1848 pour la France, ainsi qu’une En Irlande, Sir W.R. WILDE (1815- anatomiques et histopathologi- traînée de secousses sociales par- 1876) a laissé son nom à une inci- ques, parallèlement à la recherche courant Berlin, Prague et Vienne à sion pour les mastoïdites menaçant physiologique. Après cinq mois la même période. de s’extérioriser qui, à l’époque, fut d’initiation à Vienne, il accomplira âprement discutée [18]Il faut atten- un périple de 2 ans, visitant En 1842, ITARD avoue : « quelqu’extra- dre le traité de W. KRAMER (1801- Würzburg, Heidelberg, Paris et ordinaire puisse sembler cette 1875) en Allemagne [20], démon- Londres. Reçu « dozent » le assertion, le temps n’est pas fort trant que la synthèse de connais- 6.12.1861, il devient le premier éloigné où les médecins n’avaient sances anatomiques approfondies, enseignant officiel d’otologie aucun moyen d’examiner les par- de recherches physiologiques pour accéder au titre de profes- ties affectées elles-mêmes, celles du méthodiques et d’investigations seur en 1871, et de co-directeur moins que leur situation soustrait à anatomopathologiques sont indis- avec J. GRUBER (1827-1900) de la la vue immédiate » [15]. D’ailleurs, pensables pour que l’auriste Clinique Otologique de Vienne : au terme de sa vie, Claude BER- devienne réellement un otologiste. 20 lits, plus de 15000 consultants NARD [16] pouvait encore écrire : annuels, sans interruption pen- « la médecine empirique règne en C’est l’époque où J. STUART MILL dant 46 ans ! plein aujourd’hui... la médecine précise : « Aucun art n’est complet scientifique n’est point une méde- à moins qu’un autre art, celui de Présentant une importante collec- cine théorique. Elle ne doit pas, au construire les instruments et de les tion d’os temporaux disséqués, éla- contraire, être séparée de la méde- approprier à leur destination, ne borant un très riche atlas de tym- cine pratique. » Les auristes [17] lui soit associé » [19]. pans pathologiques, il insiste sur la étaient bien empêtrés devant le minutieuse rigueur de l’examen pavillon. Sauf exception, le fond du La nécessité de voir le tympan otoscopique, de l’évaluation de la conduit reste invisible. La surdité autrement qu’à la lumière ou à la trompe et de l’audition. représente le motif thérapeutique lueur d’une bougie devient impé- essentiel fondé sur un concept rieuse. En elle-même, l’histoire de Il donnait sa première leçon « obstructif » qui justifie des gestes l’OTOSCOPIE mériterait un long devant quatre étudiants dont A. aventureux : irrigations variées par développement pour, dans la rela- LUCAE (1825-1911). Parlant cou- le nez, la bouche et même le tivité des dates et des priorités, ramment 6 langues, il allait rece- conduit ! ou des paracentèses à expliquer le passage du simple voir plus de 7 000 otologistes venus l’aveugle. Devenant des otiatres, ils miroir concave au miroir de Clar du monde entier. Son élève R. agissent sans connaissances fonda- [20]. L’évolution de l’otoscopie est BARANY (1827-1936) reçut le Prix mentales. Les constatations nécrop- certainement fondatrice dans la réu- Nobel en 1914. siques les amènent en logique nion « orificielle de la spécialité ». apparente, à penser que l’oreille et On notera en 1875, que le titre de A. POLITZER se plaisait à rappeler la mastoïde représentent la voie de la première revue française l’importance des travaux fonda- drainage spontané des abcès céré- « Annales des Maladies de l’Oreille mentaux soulignant : « voir pour braux (produits par la putréfaction et du Larynx » est sous-titré « otos- connaître, travailler pour savoir ». primitive du tissu cérébral !). Les copie, laryngoscopie, rhinoscopie ».

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Syndicat National des Oto-Rhino Laryngologistes français

Ces principaux contacts furent : Developpement de l’otologie en même pensée que ce docteur qu’un - en Physiologie : France entre 1870 et 1914 assistant envoyait à Paris : « Allez en V. HELMOLTZ (1821-1894), France, vous vous instruirez beau- H. MÜLLER (1820-1864) Dès 1878, le fameux « Lehrbuch der coup ; vous verrez ce qu’il ne faut pas V. von KÔLLIKER (1817-1905) Ohrenheilkunde » supplante tous les faire ». (1823-1878) traités précédents avec cinq éditions successives. En 1884, la traduction En deux décennies, cette réflexion - en anatomie pathologique : française d’Antonin JOLY (Lyon) sera fielleuse perdait de sa portée comme W. WILD (1815-1867) elle-même rééditée. en témoigne la préface signée par A. J. TOYNBEE (1815-1866) POLITZER pour la thèse de CLCHAU- Nous avons déjà cité les principaux VEAU. C’est d’ailleurs en France que, - en clinique : otologistes français ayant pris le che- rapprochant leurs pratiques, les oto- V. TRÔLTSCH (1829-1890) min de Vienne et de Berlin comme logistes, les laryngologistes et les P. MENIÈRE (1799-1862) l’on fait aussi des laryngologistes tel anatomistes ont réalisé les premiers que A. GOUGENHEIM (1839-1901). Il l’unité de la nouvelle spécialité. A Ainsi par son travail inlassable, A. est impossible de donner la liste Paris, dès 1875, la publication des POLITZER, fils d’un modeste commer- exhaustive de tous ceux qui sont « Annales des Maladies de l’Oreille çant juif hongrois, mais petit-fils de allés se soumettre à la « politzerisa- et du Larynx » s’ornait d’un sous-titre médecin, se placera au premier rang tion » de l’esprit pendant la longue significatif de préoccupations com- des fondateurs de l’otologie période de la « crise allemande de la mune : « otoscopie, laryngoscopie, « moderne ». La lecture de ses trai- pensée française ». Il est permis de rhinoscopie ». A cette époque l’im- tés, tous traduits en anglais, et pour s’étonner de trouver encore portance et la fréquence de la certains en français et en espagnol, aujourd’hui l’adjectif « germano- pathologie de toute la sphère cer- est encore aujourd’hui d’un intérêt phone » accolé comme une restric- vico-faciale et des cavités annexes considérable [22] : tion muette au nom de ceux (méde- explique le développement de la cins ou autres) qui pratiquaient cette nouvelle discipline. 1873 : Atlas d’Otoscopie, révisé en langue [23]. 1896 En 1880, simultanément, en Belgique 1878-1882 : Traité des maladies de Revenons sur LUBET-BARBON, qui, à et en France [8] se forment deux l’oreille (2 volumes - 5 éditions) son retour, ouvre à Paris la première Sociétés d’Otologie, de Laryngologie 1907-1913 : Histoire de l’otologie (2 consultation gratuite. La clarté de et de Rhinologie. Elles précédaient volumes). son enseignement et sa remarquable des fusions successives en Hollande dextérité opératoire attirait de nom- et en Russie en 1893, aux U.S.A. avec Il lui reviendra de présider à breux auditeurs... canadiens et amé- la « Triological Society » en 1895, , en 1909, le 8e Congrès ricains du sud francophones. De puis en Angleterre en 1907, avant Mondial d’Otologie. En 1912, à Lyon, F.J. COLLET (1870-1966) fera le l’Allemagne en 1921. Boston, pendant le congrès suivant, pèlerinage de Vienne en 1892 et un prix Politzer sera partagé entre R. 1895. Il y rencontre M. LERMOYEZ Il convient d’insister sur le dyna- BARANY, A. CHEATLE et G. SHAM- (1858-1929) alors médecin des hôpi- misme d’Emile MOURE (1855-1914) à BAUGH senior. taux de Paris qui proposera le terme Bordeaux où, dés 1881, il ouvrait un d’otospongiose pour l’otosclérose et centre de formation privé couvrant Sa collection d’os temporaux se souhaitera aux patients de ne pas tout les aspects de la nouvelle spécia- trouve au Musée Mutter à rencontrer un « auriste » actif à lité, etattirait des auditeurs du Philadelphie. En 1902 il est élevé au l’époque où s’impose la condamna- monde entier. rôle de conseiller à la cour de tion des « extracteurs d’étrier ». A la Président du Congrés International l’Empereur d’Autriche. Il meurt brus- fin de sa mission en 1894, il publiera d’Otologie en 19044i1 parvenait à quement le 10 août 1920 à 85 ans. [24] une monographie intitulée équilibrer le relations de la province Son buste a trouvé place en son lieu « Enseignement et Pratique de la et de Paris avec de nouveaux statuts de naissance (Albertirsa en Hongrie). Faculté de Médecine de Vienne » pour la société Française d’ORL en En 1985, pour le 150ème anniversaire dans laquelle on peut lire « j’avais 1907. Dans le même élan, il était de sa naissance, l’Autriche émet un comme condisciples les assistants des appelé à la Présidence du Syndicat timbre à son effigie. plus grands laryngologistes alle- des ORL de 1907 à 1930 ! mands : de KRA USE, de JURACZ, de SEIFERT... J’avais peine à supposer Aujourd’hui, à un siècle de distance, qu’ils viennent à Vienne dans la dans un contexte scientifique et

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socio-économique, culturellement 8) WEIR W. Otolaryngology, an illustra- nage de Vienne, il est le seul qualifié de inqualifiable, et par une évolution ted story. (Butterworths Cambridge germanophone (cf. note n°23). Issu inversée, nous sommes au seuil 1990) d’une famille lorraine, d’une grande d’une satellisation de l’otologie. A rigueur intellectuelle, sa formation 9) Liste des Congrès Internationaux complète sera assurée à Berlin et à Davos, en 1978, la première réu- d’Otologie avant WW1 : Vienne. A St Pétersbourg, il rencontrera nion de la SOCIETE POLITZER appa- 1e - 1876 : New York : section otologi- PROUSSAK (1839-1897), (otologiste raît comme un ultime hommage. que du Congrès Int. Sc. Médicales. russe = espace de PRÛSSAK, dans l’or- 2e - 1880 : Milan (Président : SAPOLINI) : thographie française). A Moscou, il rend GRADENIGO et LABAS décident de visite à S.F. STEIN et E.M. STEPANOV. A Notes et references fusionner laryngologie et otologie. Fribourg en Brisgau, G.J. KILLIAN (1860- 3e - 1884 : Bâle (Président : A. BURCK- 1921) l’accueillera comme assistant. En HARDT-MERIAN). 1920, il obtient une chaire d’ORL à 1/ Professeur honoraire des Universités. La fusion n’est pas générale : indépen- Nancy et présidera la Société Française dance de l’otologie jusqu’en 1922. en 1924, puis le syndicat des ORL de 2/ www.bium.univ-paris5.frhistmed. Fondation du prix Lenval (riche ban- 1933 à 1936 quier polonais) attribué une seule fois - Titulaire de la chaire d’ORL 1920 Nancy 3/ www.asmp.fr en 1899. - Président de la Société Française d’ORL 4e - 1888 : Bruxelles (Président : DELS- 1924 4/ www.diploweb.com/france TANCHE Fils) GELLE présente le réflexe - Président du Syndicat National des binraural. ORL 1933-1936 5/ BOERHAVE (1668-1738) fut certaine- 5e - 1895 : Florence (Président GRAllI) ment le médecin le plus célèbre du 18e 6e - 1899 : Londres (Président : O. PRIT- siècle. Il envoie, à Vienne, son élève CHARD). Prix Lenval décerné à DELS- 12) L’acte de naissance de la médecine Gerhard von SWIETEN (1700-1772) à la TANCHE. moderne. J. Bernard, JF Lemaire, A. demande de l’Impératrice Marie- 7e - 1904 : Bordeaux (Président : E. Larcan. (Les empêcheurs de tourner en Thérèse, qui entamait d’importantes MOURE). rond). Synthelabo. Paris 1995°. réformes de l’enseignement médical. Il 8e -1909 : Budapest (Président : A. deviendra l’ami de Mozart. L’ouverture POLITZER). 13) WEISZ G. Divide and conquer. A d’un hôpital impérial (1784) et la créa- 9e - 1912 : Boston (Président :BLAKE). comparative historv of medical speciali- tion d’un Collège Professoral amorcent Prix Lenval : GE SHAMBAUGH (Chicago) zation. (Oxford Un. Press 2005). la renommée mondiale grandissante de et KOLMER (Vienne) la médecine autrichienne. En 1849, ce Prix Politzer : BARANY, CHEATLE, 14) PASTEUR Louis. Ref : les génies de la Collège est composé d’autrichiens, de SHAMBAUGH Senior science n°33/2002/24-35 hongrois, de tchèques et d’allemands. Prix Cozzolino : GÔRKE (Breslau). En 1871, Pasteur est tellement républi- Citons SKODA, Von ROKITANSKY, von WW1 - 1915 : Annulation du congrès cain qu’il renvoie à Bonn son diplôme « HEBRA, HYRTL, BILLROTH, noms bien prévu à Halle sous la présidence de honoris causa » ce qui lui vaudra, de la connus dans la littérature française. DENKER. part de M. Naumann une réponse 10e - 1922 : Paris (Président P. SEBILEAU) méprisante. Pasteur, qui rencontrera 6) BRUSIS T. Geschichte der deutsch. dernier congrès purement otologique, souvent l’hostilité des médecins, ana- HNO. Kliniken in 20e Jahrhund suivi aussitôt par une réunion laryngo- lyse avec lucidité le retard scientifique (Springer V 2002) Chaque collège uni- rhinologique. français (qui est et sera également versitaire fait appel à plusieurs candi- Dans son discours, P. SEBILEAU qualifie industriel) dans un article du journal « dats lorsqu’un poste de professeur titu- A. POLITZER de « bienfaiteur de l’huma- Le Salut Public » : « victime de son insta- laire est libre, ce qui lui permet un choix nité ». bilité politique, la France n’a rien fait documenté. Pour chaque spécialité, pour entretenir, propager, développer avec le temps, une sorte de classement 10) Succédant à A. GOUGHENHEIM le progrès des sciences dans notre s’établit entre les universités. Dans la (1839-1908), plutôt laryngologiste, P. pays... Elle a vécu sur son passé, se deuxième moitié du 19e siècle, nous SEBILEAU se consacrait surtout à la chi- croyant toujours grande, tandis que citerons LUCAE et PASSOW à Berlin, rurgie cervicale à Lariboisière (Paris), l’Allemagne multipliait les universités.... WITTMAACK à Greifswald, SCHWARTZ tandis que M. LERMOYEZ obtenait le établissant entre elles la plus salutaire à Halle, KESSEL à Iena, BEZOLD à premier titre d’ORL des Hôpitaux avec émulation. » München, von TROLTSCH à Würzburg. Il un service à St Antoine (où il aura M. En 1874, à l’occasion d’un discours au nous appartient, dans le cadre de la SOURDILLE comme collaborateur). collège d’Arbois (distribution des prix), SORLEF, de noter que STRASBOURG n’a à propos de la libre pensée, Pasteur pas été négligée pendant la période 11) L’évocation de P. JACQUES (1869- s’écrie : « C’est pour les uns la liberté de bismarekienne avec les nominations de 1964) à Nancy justifie quelques préci- ne pas penser du tout et d’être asservis A. KUHN et de P. MANASSE7) ORL in sions. Se destinant à l’ORL, il renonçait à par l’ignorance ; pour d’autres, la Europe between 1880 and 1920. J. la chaire d’anatomie libérée par le liberté de penser mal ; pour d’autres Laryngology & Otology. supplément transfert d’A. NICOLAS à celle de Paris encore d’être dominés par les sugges- n°30-119-2005. Editors : A. Mudry, W. en 1906, tout en assurant l’intérim. tions de l’instinct et de mépriser toute Pirsig, N. Weir. Parmi les français ayant fait le pèleri- autorité et toute tradition... la liberté

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Syndicat National des Oto-Rhino Laryngologistes français

dans l’effort, la Iiberté dans la recherche, Politzer. A Paris, les consultations d’auris- 24) LERMOYEZ M le droit de conclure sur le vrai... Ayons un tes tels A. Blanchet et E. Triquet ne l’ont (www.bium-paris5.fr.25) F. LEGENT. Les culte pour cette liberté là ». pas retenu. Il souligne son intérêt pour le débuts de la Société Française d’ORL. travail E. MENIERE, qui succéda à son père (www.sforl.org) 15) ITARD JM Traité des maladies de à la direction de l’Institut des Sourds et La lecture des revues et des rapports de l’oreille et de l’audition. Mequignon Muets. Certains écrits français avancent cette époque (1880-1913) montre que le Editeur Paris 1842. qu’il a rencontré plusieurs fois Prosper traitement des suppurations chroniques MENIERE (1799-1882). Le contrôle des otomastoïdiennes entraînent des discus- 16) BERNARD Claude. Leçons de patholo- dates permet de penser qu’il y eut parfois sions récurrentes sur les évidements gie expérimentale (Paris 1865). confusion entre le père et le fils. Certes, pétro-mastoïdiens, les différentes plasties en 1862, A. Politzer a publié des docu- du conduit, le rythme des pansements 17) LEFENT F. La naissance de l’ORL en ments anatomopathologiques pour post-opératoires avec les noms de France. confirmer les idées de Prosper MENIERE SCHWARTZE, ZAUFAL, SIEBENMANN, mais il ne fait pas mention d’une rencon- STACKE, etc..; 18) J. TOYNBEE (1815-1866) a mis en exer- tre personnelle. En fait, à Paris, Politzer a Après une initiative de E.Moure en 1882, gue l’importance de l’anatomie patholo- surtout rencontré Claude Bernard qui il faudra une décennie pour que les pro- gique montrant le danger vital des sup- avait comme collaborateur Rudolphe vinciaux puissent être membres de plein purations chroniques de l’oreille Koenig (1932-1901) pour l’étude des droit de la Société Française moyenne. En 1857, il collige les données vibrations ossiculaires. d’Otorhinolaryngologie et de Rhinologie de 1659 dissections de temporaux. qui deviendra en 1907 Société Française W. WILDE est le père du célèbre poète 22) Geschichte der Ohrenheilkunde par d’ORL. De 1880 à 1814 27 présidents Oscar WILDE. En 1864, la ville de Dublin A. POLITZER. (dont 13 otologistes) et 45 rapports (dont plongeait dans l’émoi. William WILDE lui- Stuttgart. Enke Vol I (1907) Vol II (1913) 13 otologiques). même fut accusé d’avoir séduit et violé History of otology par A. POLITZER. Trad sous chloroforme la fille d’un professeur anglaise par S. Milstein et ail. Phoenix de droit du Trinity College, Miss Mary (Arizona) 1981. TRAVERS... Les frais du procès s’élèveront à 2000 livres, mais Mary n’eut qu’un « far- 23) DIGEON Cl. La crise allemande de la thing » d’indemnité (sic)... pensée française. PUF (Paris) 1959. Après Oscar Wilde, his lift and confessions par la défaite française de 1871, les débats Franck HARRIS (Londres 1938) avec accusations et injures ont fait florès dans tous les sens. En France, après le 19) J. STUART MILL.Introduction of the gouvernement et l’aimée, l’université est system of logic (1843). violemment critiquée. Pour G. MONOD, à l’époque, l’Allemagne reste « cette 20) J. WILLEMOT et al. Naissance et déve- seconde patrie pour les hommes qui étu- loppement de l’ORL dans l’histoire de la dient et qui pensent ». médecine Acta Medica Belgica (Bruxelles 1981). L’otoscopie est fondamentale en clinique. BONNAFONT, quant à lui, fait construire dès 1834, un à miroir latéral. C’est à Paris en 1855 que von TRÔLTSCH présente un miroir concave perforé mais il rendra l’honneur de l’innovation à HOFFMANN (Burgsteinfurt) qui le décri- vait en 1841. Il sera utilisé avec un ban- deau frontal, puis muni de deux trous par KONRAD CLAR à Vienne, en 1902, et d’une lampe à incandescence par Etienne LOMBARD en 1905. Des lunettes grossis- santes sont proposés par von EICKEN en 1920.

21) The yole of ADAM POLITZER (1835- 1920) in the History of otology. par Albert Murdry (Lausanne). How A. Politzer becarne an otologist. A. Murdry et M. Kraff; Otology and Neurology 2005, 29, 292-299 Ces deux articles donnent quelques préci- sions sur les voyages scientifiques d’A.

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es français Centenaire 1908 - 2008

Un siècle d’histoire de la chirurgie d’otite chronique

Pr. François LEGENT Service ORL, Hôpital Hôtel Dieu, place A. Ricordeau, 44000 Nantes.

A la fin du siècle dernier, la chirurgie de l’étrier et celle de la membrane tympanique avaient des adep- tes mais elles connurent une longue période d’hibernation. La chirurgie mastoïdienne venait d’appa- raître et allait se perfectionner au cours du siècle. La conservation du système tympano-ossiculaire, puis plus tardivement sa reconstruction, ont bénéficié tour à tour de l’invention du lambeau tympa- noméatal et de la chirurgie du tympanum, puis de la tympanotomie postérieure et de l’amélioration de la myringoplastie, permettant les tympanoplasties en technique fermée. De même, l’aérateur trans- tympanique, oublié pendant plus d’un demi-siècle, a pris une place considérable dans le traitement des otites chroniques à tympan fermé.

Une des difficultés rencontrées rations tympaniques. Après avoir à imaginer le grand bouleverse- dans l’étude des traitements des vanter les mérites de la cautérisa- ment qu’apporta cette chirurgie otites chroniques est la frontière tion des perforations, il écrivait : « pour les auristes habitués aux soins séparant les otites en évolution et On ne peut faire d’aussi grands élo- locaux. Ce fut en fait une véritable leurs séquelles. Selon les auteurs, ges de la myringoplastie, une révolution qui d’ailleurs se réper- les époques et l’importance des méthode qui consiste à combler la cuta même sur la dénomination lésions évolutives, les traitements perforation par implantation de des spécialistes des oreilles, auristes des lésions inflammatoires et des tissu vivant. Les expériences de devenus otologistes. Non seule- séquelles sont séparés ou intriqués. Berthold, la transplantation de ment, les otologistes s’initiaient à En fait, la chirurgie de ces deux l’épiderme de l’homme ou de la cette nouvelle chirurgie mais ils aspects de l’otite chronique ont grenouille, plus tard, de la pellicule devaient aussi se familiariser avec évolué de concert. Il est intéressant de la coque ovulaire, sont connues une nouvelle conception de l’infec- de noter que la chirurgie fonction- ; non moins connu est le résultat tion chronique de l’oreille, passant nelle de l’oreille a véritablement qui condamne cette méthode. » du traitement de l’otorrhée rebelle commencé avec la mobilisation de Aussi entra-t-elle dans une longue à celui de l’otite chronique, ce qui l’étrier par Boucheron, puis Miot période d’hibernation. Elle était à allait de pair avec une nouvelle vers 1888-90, exactement à la peine évoquée dans les traités thérapeutique. Aussi, pour com- même époque que la chirurgie des d’otologie jusqu’aux années 60, prendre l’histoire de cette chirurgie cavités de l’oreille moyenne pour époque où son renouveau coïncida dans ce début du XX siècle, il les otites chroniques. Pendant la avec celui de la chirurgie de l’étrier. importe de rappeler en premier dernière décennie du XIXe siècle, la cette grande mutation de la fin du chirurgie de l’étrier connut beau- Depuis plusieurs décennies, les oto- XIXe siècle. En pratique, l’histoire coup plus d’adversaires que logistes ne s’affrontent guère sur le de la chirurgie de l’otite chronique d’adeptes, ce qui la fit condamner terrain de la chirurgie des lésions peut être découpée en trois gran- sans appel en 1900. La myringo- inflammatoires des otites chroni- des périodes : plastie pratiquée depuis l’initiative ques, hormis sur des questions de - une ère d’éclosion : la dernière de Berthold en 1872 subit un sort détails, de terminologies, de procé- décennie du XIXe siècle, identique mais avec moins d’éclat. dés techniques. Les grandes lignes - une ère de développement avec Dans un long mémoire paru en ont déjà été tracées et il n’est l’attention particulière pour une 1902 dans les Annales des Maladies guère possible de s’en éloigner. Il chirurgie fonctionnelle : de 1900 de l’oreille et du larynx, B. n’en était pas de même au début aux année 60, - une ère de perfec- Gomperz [1], privat docent de du siècle car cette chirurgie venait tionnement jusqu’à nos jours. Vienne, faisait une revue très d’éclore au cours de la dernière détaillée du traitement des perfo- décennie du XIXe siècle. On a peine

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LA PÉRIODE D’ÉCLOSION aller en arrière jusqu’à l’antre. En en place d’une mèche de gaze iodo- 1891, Zaufal, Stacke, Schwartze, formée. La notion d’otite chronique s’est combinèrent ces deux interventions substituée à celle d’otorrhée rebelle. pour ouvrir largement les cavités de Telle était donc cette intervention Pendant une grande partie du XIXe l’oreille moyenne. Dès lors, durant dont le nom s’est perpétué jusqu’à siècle, les auristes traitaient des toute la dernière décennie, chirur- notre époque, mais non sans avoir symptômes dont l’otorrhée, et non giens et auristes n’hésitèrent plus à soulevé des discussions et entraîné pas des maladies. Toute nouvelle ouvrir ces cavités de l’oreille des équivoques. thérapeutique était essayée pour moyenne, modifiant la technique tous les symptômes. Le traitement de tout en conservant le concept. Il s’agissait bien, selon la description l’otorrhé chronique reposait sur le L’intervention dans les pays de lan- de Malherbe, d’une cavité mettant en lavage et les topiques. La chirurgie gue allemande prit alors le nom de « communication mastoïde, attique et prônée pour cette otorrhée avait radicale » tant elle paraissait consti- conduit auditif externe, sans résec- pour but, hors les complications, de tuer l’étape ultime et efficace pour tion tympanoossiculaire systémati- faciliter les soins locaux, qu’il s’agisse guérir les otorrhèes chroniques, trai- que. Le but était d’agir « comme on de l’ossiculectomie et même de la tant le mal à sa racine. agirait suivant les règles chirurgicales, mastoïdectomie pour laquelle en ouvrant largement les cavités de Schwartze recommandait de laisser Cette chirurgie, née en Allemagne, l’oreille moyenne, en enlevant les tis- un drain antral permettant de laver gagna rapidement la France grâce sus malades et en rétablissant un drai- l’oreille moyenne pendant des en particulier à des chirurgiens des nage facile ». Cet excellent travail, semaines. Quant à l’ossiculectomie, hôpitaux de Paris comme A. Broca bien présenté, imprimé, était suivie voici ce qu’en pensait M. Lermoyez [3]. La thèse d’un futur otologiste, d’une très riche bibliographie. [2] en 1901 : « C’est la plus avanta- interne en chirurgie des hôpitaux de Malheureusement, la notoriété de geuse de toutes les interventions Paris, n’allait pas tarder à marquer Malherbe eut à pâtir après qu’il eut qu’on soit amené à pratiquer contre définitivement les esprits. C’est en proposé cette intervention pour la les suppurations chroniques de 1895 qu’Aristide Malherbe présenta : chirurgie fonctionnelle de « l’otite l’oreille ; elle est inoffensive si elle « L’évidement pétro-mastoïdien dans scléreuse », c’est-à-dire l’otospon- est bien faite ; ses résultats sont mer- le traitement des suppurations de giose, ce qui lui valu les foudres de veilleux lorsque son indication a été l’oreille moyenne » [4]. Il utilisa le Laurens et de Lubet-Barbon [6] lors bien saisie ; elle peut guérir en quel- terme « évidement » pour montrer du congrès de médecine de 1900 – ques jours des suppurations datant l’importance du curetage de l’antre section otologique – qui correspon- de plusieurs années. On enlève le mastoïdien et de l’aditus ad antrum. dait à l’actuel congrès mondial d’ORL. marteau, l’enclume mais jamais Quant au terme pétromastoïdien, l’étrier ». On comprend mieux pour- Malherbe précisait qu’il faisait réfé- On comprend pourquoi Georges quoi les opérateurs qui adoptèrent rence au « conduit pétro-mastoïdien Laurens commençait son article paru la nouvelle intervention que fut », appellation de l’aditus ad antrum en 1899 dans la Presse Médicale sur « l’évidement pétromastoïdien n’hési- par Sappey, célèbre anatomiste de Le traitement rationnel de l’otorrhée taient pas à la compléter par une l’époque ([5] p. 812). chronique » [7]. résection des reliquats tympano-ossiculaires. Malherbe décrivait deux types d’évi- « La formule thérapeutique de dement pétromastoïdien : l’otorrhée chronique est essentielle- Mais les auristes n’étaient pas les - « l’évidement pétro-mastoïdien », ment variable pour qui la traite. En seuls médecins s’intéresser à l’oreille. simple ouverture de l’antre pétro- présence d’une oreille qui coule : les En 1888-89, Küster et Gergmann, mastoïdien avec curetage des cellu- uns la lavent, d’autres la pansent, deux chirurgiens berlinois, voulurent les voisines, d’autres opèrent. appliquer à l’oreille les règles de - « évidement pétro-mastoïdien avec mise à plat des collections purulen- ouverture large de la caisse », com- Résultats : quelquefois, le malade tes. Leurs procédés, assez voisins, plément du procédé précédent. Il guérit mais souvent il continue à cou- consistaient à prolonger vers la s’agissait d’ajouter à la mastoïdecto- ler. Quant à son oreille ayant parfois caisse la mastoïdectomie de mie une tranché dans la paroi posté- perdu à la bataille un nerf facial ou Hermann Schwartze en ouvrant rieure du conduit osseux. Puis, l’opé- acquis un vertige qu’il n’avait pas ». l’aditus et le conduit auditif, mais en rateur enlevait les fongosités et les respectant l’attique. En 1890, Stacke, parties malades. Il terminait par l’in- Il poursuivait : « On peut dire que trois auriste allemand, réalisait une attico- cision de la paroi postérieure du grands courants dirigent la thérapeuti- tomie avec ossiculectomie, mais sans conduit fibrocartilagineux et la mise que actuelle en matière d’otorrhée :

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- les indifférents ou sceptiques, a donné, comme il est coutume, son gie. Quelle divergence de vues très, trop nombreux, vieux jeu, nom, c’est-à-dire un nom différent sépare Stacke et Politzer. L’un prati- réactionnaires convaincus, pour les- suivant la région où il donne son que systématiquement la belle opé- quels un écoulement de pus par premier coup de gouge, selon qu’il ration qu’il a imaginée dans tous les l’oreille est quantité négligeable, va de l’antre à la caisse ou inverse- cas où il constate une carie des osse- - les interventionnistes à outrance, ment. Peu importe l’essentiel est lets, sans s’attarder à essayer d’au- à l’étranger surtout, radicaux, véri- qu’elle réalise véritablement la cure tres traitements préalables. tables hystérectomistes de l’oreille, radicale de l’otorrhée. » [7]. soucieux d’une belle statistique ou Volontiers, il y recourt d’emblée s’il amateurs de nouvelles opérations, C’est à la même époque que la existe dans l’attique cholestéatome pour eux la trépanation mastoï- notion d’otorrhée fut combattue ou suppuration chronique. L’autre, dienne et l’évidement du rocher au profit du concept d’otite chroni- plus temporisateur, n’en vient à sont chose simpliste, que, notamment par Lermoyez [2]. cette extrémité qu’en s’autorisant à - enfin, le camp opportuniste qui On ne traitait plus un symptôme l’insuccès d’une thérapeutique plus sera celui des ralliés, représentés mais une maladie. Cette approche douce longtemps et soigneusement par l’Ecole Otologique contempo- permettait notammen de mieux mise en oeuvre. » raine, Ecole créée par quelques identifier le rôle du cholestéatome Maîtres viennois et allemands. qui restait cependant considéré En fait, à la fin du siècle dernier, les comme une conséquence de l’otor- idées restaient encore confuses sur On enseigne que pour traiter une rhée. Lermoyez [8] écrivait en 1921 les indications respectives des diffé- otorrhée, on doit établir le diag- qu’il existait deux types de choles- rentes interventions, ossiculecto- nostic de la cause, de la nature et téatome : mie et ouverture des cavités de du siège de la lésion, qu’il faut faire - le cholestéatome primitif : choles- l’oreille moyenne. Toute nouvelle le diagnostic du mode de l’inter- téatome congénital, thérapeutique avait des indications vention opératoire. » - le cholestéatome secondaire : le très larges, du moins pour certains plus fréquent. opérateurs. C’est dans ce troisième camp que se plaçait Laurens, comme son Maître « Ce cholestéatome secondaire est Ainsi, la chirurgie des cavités Lermoyez dont il était l’assistant. une conséquence de la suppuration masto-atticales existait au début du « Le traitement doit être essentiel- chronique de l’oreille moyenne, siècle. Elle ne cessa de se perfec- lement rationnel et éclectique. Il est mais par un cercle vicieux, il l’entre- tionner durant tout le siècle grâce souvent suivi de succès à la condi- tient à son tour et en aggrave à la à l’accumulation de détails. Le pro- tion d’être temporisateur. Il fois le pronostic et le traitement ». grès porta surtout sur : importe de se rappeler que Cette notion perdura plusieurs - l’élargissement du conduit fibro- patience et longueur de temps font décennies puisque, en 1949, cartilagineux donnant quelquefois plus que gouge et Maurice Aubry et André Lemariey lieu à de nombreuses descriptions, curette. Après une étude minu- [9] admettaient encore la même - le comblement de la cavité mas- tieuse et pleine de tâtonnement de conception. Le traitement du cho- toïdienne. son oreille, l’auteur aborde l’étape lestéatom commençait donc par Deux grandes étapes restaient à chirurgicale en cas d’échec des dif- celui de l’otorrhée. Les avis diver- franchir : férents soins locaux. Le principe en geaient pour déterminer l’indica- - le respect de la fonction, est simple. Toute fistule ne guérit tion opératoire. - la reconstitution tympano-ossicu- que par l’incision et l’excision de laire. son trajet. Ici, la caisse tympanique En 1894, à son retour de Vienne, représente l’orifice externe d’une Lermoyez écrivait ([10] p. 478) : fistule borgne dont le trajet est « Quoiqu’on pense de la révolution LA PÉRIODE constitué par l’aditus et l’antre. chirurgicale actuellement en train DE DÉVELOPPEMENT Nous transformons en tranchée ce de s’accomplir, le domaine de la qui était précédemment un tunnel : thérapeutique otologique ce n’est Cette période a été marquée par c’est la chirurgie à ciel ouvert... certes pas aux auristes viennois une amélioration dans la réalisa- L’intervention consiste à mettre à qu’on pourra reprocher de se lais- tion chirurgicale des cavités tout en jour tout le système de l’oreille ser entraîner par un enthousiasme essayant non seulement de conser- moyenne et de ses annexes, ainsi précipité vers une rénovation qui ver l’audition, mais aussi de recons- que l’apophyse, et constitue l’évide- prépare l’annexion prochaine de truire un système tympano-ossicu- ment du rocher. Chaque auteur lui notre spécialité à la grande chirur- laire altéré.

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Le respect de la fonction tionnait les cavités incomplètes avec mutation de la chirurgie de l’otite conservation plus ou moins grande chronique a probablement été Dès le début du XXe siècle, plusieurs de la paroi postérieure. Cette occulté par ses travaux sur la fenes- auteurs insistèrent sur l’importance conception se distinguait donc de tration [13]. du respect des reliquats tympanossi- l’évidement classique avant tout au culaires, notamment Heath en 1904, niveau de la paroi postérieure du En1950, un auteur allemand, Moritz, et Bondy e 1908. Les modifications conduit. La terminologie utilisée proposa d’utiliser un lambeau apportées au classique évidement entraînait une équivoque, concer- cutané pour créer une cavité tympa- engendrèrent une nouvelle termino- nant : nique fermée, isolant la fenêtre logie pas toujours bien comprise. - d’une part, le terme « évidement » ronde, dans certaines séquelles qui au début portait uniquement sur d’otite chronique pour lesquelles L’autre progrès au cours des deux pre- la cavité et qui, dès lors, intéressait le une fenestration semblait possible. mières décennies du XXe siècle a contenu de la cavité de l’oreille Dès l’année suivante, Zollner, puis porté essentiellement sur la qualité moyenne, Wüllstein, appliquèrent le même de la réalisation de la cavité, notam- - d’autre part, le terme « radical » principe dans la réfection d’une ment sur l’abaissement du mur du qui, initialement, signifiait efficacité cavité comprenant les deux fenêtres, facial. L’évidement pétro-mastoïdien et qui devenait, « la grande opéra- et substituèrent un greffon libre de était devenu une intervention diffi- tion » avec sacrifice tympano-ossicu- peau au lambeau de Moritz. On leur cile, sculptant littéralement les élé- laire. doit le concept de reconstruction du ments nobles de l’oreille. En fait, tympanum ou tympanoplastie en c’était une intervention réservée seu- Les derniers progrès concernant la agissant non seulement sur la mem- lement à quelques opérateurs. Aussi, chirurgie des cavités de l’oreille brane mais aussi sur les osselets. Ils pour diminuer les difficultés et éviter moyenne a été apporté par Claus classèrent ces reconstructions en plu- les complications, d’autres opérateurs Jansen en 1958 avec la tympanoto- sieurs types qui restent encore des se contentaient de faire une antroat- mie postérieure. Cette ouverture de références actuellement. Mais l’en- ticotomie beaucoup moins dange- la caisse par voie mastoïdienne per- thousiasme de ces reconstructions reuse qu’un évidement classique. mettait la reconstruction de la mem- était souvent rendu éphémère par brane tympanique et de la chaîne les mauvais résultats lointains liés En 1942, Ramadier expliquait [11] ossiculaire tout en conservant le dus à la reconstruction de la mem- que, depuis quelques années, il avait conduit osseux et en contrôlant par- brane par de la peau. Les avis diver- abandonné l’évidement pétro-mas- faitement les cavités. Associée à une geaient pour expliquer les échecs, toïdien total (celui où on abaisse reconstruction tympano-ossiculaire, liés selon les auteurs au greffon trop totalement le mur du facial) pour lui cette chirurgie des cavités ainsi épais o trop aminci, à la région de substituer une opération plus écono- conçue constituait le fondement de prélèvement avec cependan une pré- mique qu’il appelait « évidement la tympanoplastie moderne avec dilection pour la région rétroauricu- antro-attical ». L’intervention limitait conservation du conduit. laire, au caractère pédiculé ou non son action à l’antre et à l’attique de la greffe. D’autres matériaux dont elle supprimait le contenu ossi- La reconstruction furent proposés comme le périoste culaire. Elle respectait la membrane tympano-ossiculaire de tibia. Le grand progrès fut l’utili- tympanique et la caisse. Elle avait sation de l’aponévrose temporale pour but d’assurer l’exérèse totale Les noms de Zollner et de Wüllstein par Ortegren, (1958), Heermann des lésions atticales. Pour Ramadier, sont passés dans l’histoire des pion- (1961), Stors (1961). elle s’opposai : niers de la chirurgie reconstructive - àl’évidement total ou opération des otites chronique. En fait, dès De même, la continuité ossiculaire radicale des auteurs allemands, 1929, Maurice Sourdille avait donné pouvait être rétabli. Zöllner créa le - et à l’antro-atticotomie simple, les bases de la tympanoplastie, tant terme d’effet columellaire, par ana- encore appelée « évidement partiel » pour l’abord de la caisse que pour le logie avec la columelle des oiseaux. en France, « radicale conservatrice » traitement des lésions d’otite chroni- en Allemagne, « atticotomie trans- que [12]. De plus, il apportait un Ainsi, à la fin des années 50, tous les mastoïdienne » de Sourdille. Selon nouveau procédé de fermeture des ingrédients étaient en place pour les cas, Ramadier résèquait la paroi perforations de la membrane tympa- réaliser la chirurgie moderne de postérieure du conduit osseux ou la nique par mobilisation de la mem- l’otite chronique avec le concept de respectait. brane qui allait donner un nouveau « tympanoplastie en technique départ à la myringoplastie. Le rôle fermée » toujours d’actualité. Par sa publication, Ramadier cau- de Maurice Sourdille dans cette

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LA PÉRIODE DE Sourdille avait noté la durée opéra- PERFECTIONNEMENT toire : Urbantschitsch avait mis 15 minutes pour une radicale type Stacke, et Bondy 14 minutes pour Elle s’étale sur les quatre dernières une radicale type Schwartze [14]. décennies du siècle. Elle est mar- quée essentiellement par une amé- Certes, le fraisage du rocher était lioration considérable de l’environ- connu dès la fin du siècle dernier, nement opératoire, un foisonne- avec le tour à pédale des dentistes. ment d’essais de matériaux en tous On trouve dans la littérature du genres, vivants ou inertes, de nou- début du siècle la description du velles terminologies qui n’attei- tour électrique [15]. Mais l’utilisa- gnent pas toujours le but recherché tion des tours n’était pas dénué de de meilleure identification. C’est danger ; lorsque le flexible se ainsi que l’évidement pétro-mastoï- « grippait », l’opérateur risquait de dien est devenu une technique perdre le contrôle de la fraise. ouverte, englobant ainsi sous une L’apparition des turbines et des même dénomination la cavité microtours a permis une chirurgie d’évidement initialement décrite et plus précise. Il en fut de même avec les diverses cavités d’antro-attico- le microscope opératoire [16]. tomie avec sacrifice incomplet de la Figure 1 : OEillet de Bonnafont et l’em- paroi postérieure du conduit porte-pièce pour le mettre en place (in osseux. La tympanoplastie sur La chirurgie de l’otite chroni- 17). cavité d’évidement est devenue que muqueuse à tympan fermé tour à tour aménagement de la caisse puis petite caisse, alors que Elle mérite une place à part si tant ce terme avait déjà été utilisé par est que la mise en place d’un aéra- Moritz en 1950 pour signifier le teur soit un acte chirurgical. Il est déphasage des fenêtres ovales et intéressant de rappeler que cette rondes. chirurgie naquit vers le milieu du siècle dernier et subit une éclipse La chirurgie proprement dite des totale pendant plus d’un demi-siè- cavités de l’oreille moyenne pour cle. Dés 1845, la mise en place d’une les otites chroniques a subi deux canule en or [17] fut essayé pour grands courants au cours des der- maintenir l’ouverture tympanique. nières décennies. D’une part, elle a En 1860, Bonnafont montrait l’inté- été marquée par le développement rêt d’un tel aérateur et en créait de la technique fermée. D’autre plusieurs modèles (fig. 1 et 2). part, les techniques « entrouvertes » type antroatticotomies avec sacri- Un peu plus tard, Politzer proposait fice partiel du massif facial ont suf- un aérateur en caoutchouc durci. fisamment montré les aléas de cica- Mais dès la fin du siècle, ce traite- trisation pour être abandonnées. ment était seulement mentionné par quelques auteurs et aban- La réalisation de cette chirurgie de donné par la plupart. Il fallut atten- l’otite chronique a bénéficié, dans dre 1954 pour que Armstrong redé- cette deuxième moitié du XXe siè- couvre ce procédé. cle d’innombrables progrès techni- ques concernant notamment l’ima- gerie, l’anesthésie, les moyens opti- CONCLUSION ques, les biomatériaux, les condi- tions de surveillance post-opératoi- Il est intéressant de comparer l’his- res. La rapidité n’est plus un facteur toire des trois thérapeutiques chi- de sécurité comme elle pouvait rurgicales de l’oreille qui concer- Figure 2 : Canule de Bonnafont (in 18), l’être au début du siècle. Lors de nent les otites chroniques avec ancêtre du “T tube”. son séjour à Vienne, Maurice otorrhée, les otites chroniques à

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tympan fermé, et la chirurgie de 4. MALHERBE A. L’évidement pétro-mas- 12. SOURDILLE M. Le traitement chirurgical l’étrier, nées au siècle dernier. toïdien dans le traitement des suppura- conservateur des suppurations chroniques Seule la chirurgie de l’otite chroni- tions de l’oreille moyenne ». Thèse Paris de l’oreille moyenne. Atticotomie et attico- que avec otorrhée s’est développée 1895, Société d’Éditions scientifiques Ed. tympanotomie transmastoïdienne. Annales Paris, 142 p. des Maladies de l’oreille, du larynx, du nez tout au cours du siècle, alors que les et du pharynx 1929;48:690-9. deux autres connaissaient une lon- 5. SAPPEY Ph. Traité d’anatomie descrip- gue période d’occultation. tive, 4 ème édition, Tome III ; Paris 13. LEGENT F. La tympanoplastie et Mais dès le début des années 60, ces Lecrosnier et Babé Eds 1889, 870 p. Maurice Sourdille. Annales Otolaryngol trois types de chirurgie connurent un Chirurgie Cervicofac,2000;117,215-9 essor qui n’a pas encore fléchi. S’il 6. LAURENS G. La chirurgie de la surdité. n’est pas possible de prévoir l’avenir, Le procès de l’otite scléreuse devant le 14. SOURDILLE M. Notes manuscrites au on peut cependant penser que les congrès d’otologie de 1900. Extrait de la cours d’un séjour à Vienne en juin-juillet presse médicale 1901, no 32, 20 avril 1914. nouvelles conceptions concernant Georges Carré et C. Naud Ed. Ed. Paris, l’inflammation chronique de l’oreille 1901, 42 p. 15. BOTEY R. La trépanation de l’oreille et moyenne auront des répercussions du crâne au tour électrique. Annales des sur les attitudes thérapeutiques. 7. LAURENS G. Le traitement rationnel de Maladies de l’oreille, du larynx, du nez et l’otorrhée. Extrait de la PresseMédicale du pharynx 1907;33:20-38. no 103, 27 décembre 1899. Georges Carré et C. Naud Ed. Ed. Paris, 1899, 32 p. 16. LEGENT F. Le microscope opératoire et RÉFÉRENCES 8. LERMOYEZ M, BOULAY M, HAUTANT Maurice Sourdille. Ann Otolaryngol A. Traité des affections de l’oreille. Tome Chirurgie Cervicofac,2000;117,210-4 1. GOMPERZ B. De l’amélioration des I, Paris Octave Doin 1921, 436 p. troubles de l’audition, suites d’otite sup- 17. LÉVI M. Des divers moyens proposés purée. Annales des maladies de l’oreille, 9. AUBRY M, LEMARIEY A. Précis d’oto- pour maintenir ouverte une perforation du larynx, du nez et du pharynx rhino-laryngologie. Paris Masson Eds chirurgicale de la membrane. Annales des 1902;28:297-326. 1949, 131-54 p. maladies de l’oreille et du larynx 1975;1:349-56. 2. LERMOYEZ M. Thérapeutique des 10. LERMOYEZ M. Rhinologie, otologie, maladies de l’oreille M. Lermoyez et M. laryngologie. Enseignement et pratique 18. BONNAFONT JP. Notes sur un cas de Boulay Tome II Octave Doin Ed. Paris, de la faculté de médecine de Vienne. surdité ancienne, rebelle à tous les traite- 1901, p.83. Paris, Georges Carré Eds. 1894, 539 p. ments ordinaires, guérie radicalement par la trépanation de la membrane du 3. BROCA A. Opérations sur l’apophyse 11. RAMADIER JA, Eyriès Technique de tympan pratiquée par un nouveau pro- mastoïde. Annales des maladies de l’évidemment antro-attical. Annales cédé. Annales des maladies de l’oreille et l’oreille, du larynx, du nez et du pharynx d’oto-laryngologie, 1942;10, 11, 12: 157- du larynx 1877;3: 251-4. 1895, 21. 66 et 1943;1, 2, 3 :1-9.

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Un siècle d'otospongiose ou « le siècle » de l'otospongiose ?

Pr. Jacques TROTOUX Service ORL, Hôpital Boucicaut, 78, rue de la Convention, 75015 Paris.

Peu d'affections ont suscité autant de polémiques et de passion dans notre discipline que l'otospon- giose ne le fit pendant ce siècle. En réalité si la connaissance anatomo-pathologique et physio-patho- logique (à des détails près) de l'affection était déjà bien connue à la fin du XIX esiècle et n'est donc peu ou pas concernée par ces discussions, c'est l'approche chirurgicale qui cristallise toutes les préoc- cupations.

Tout commence après les premiers essais d'action directe sur l'étrier à la fin du siècle dernier et les condamnations sans appel qui en résultent. « Il n'y a aucun avenir dans la chirurgie de la surdité » dira Denker en 1904 ; cela bloquera les recherches pendant au moins vingt ans, mais correspondait proba- blement à une attitude raisonnable, dès lors que le sujet n'était pas « mûr » et les moyens non réunis (instrumentation, microscope, lutte contre une éventuelle infection, etc.). Bientôt cependant, c'est-à- dire au cours du deuxième quart du siècle, un certain nombre de pionniers et en particulier le Français Maurice Sourdille vont s'efforcer de contourner l'obstacle de l'étrier et ceci va aboutir à la fenestration qui sera reprise aux Etats-Unis par Julius Lempert, faisant oublier au moins outre-Atlantique le point de départ européen de l'approche labyrinthique.

La deuxième moitié du siècle sera directement et rigoureusement stapédienne, mais cette fois les pas- sions vont se concentrer sur l'importance de l'ouverture de la fosse ovale, (platinectomie totale, plati- nectomie partielle, platinotomie), sur la façon de transmettre les vibrations (tube, piston), sur le maté- riau (acier, polyéthylène, téflon, carbone), sur la forme, la taille, le calibre de la prothèse, qui permet par sa diversité la satisfaction d'amours propres patronymiques multiples, tandis que la diffusion du Laser met actuellement en cause les habitudes chirurgicales établies mais difficiles à transmettre et à conserver dès lors que le recrutement individuel diminue pour des tas de raisons (épuisement défini- tif des "réserves" opérables, multiplication des opérateurs, etc.).

L'excellence des résultats généralement obtenus, limite paradoxalement la portée des espoirs d'amé- lioration qui deviennent très marginaux, mais ceci ne doit pas faire oublier qu'il s'agit d'une maladie héréditaire et que les progrès de la génétique ouvrent peut-être aujourd'hui d'autres perspectives.

LA MALADIE OSTOSPON- - Gian Fillipo Ingrassia, (1510-1580), après avoir disséqué plus d'un mil- GIEUSE AU DÉBUT DU SIÈCLE découvre et décrit l'étrier ; lier de crânes et observé sur le - Gabriel Fallope, (1523-1563), cadavre l'ankylose de l'étrier [1]. publie en 1561 « Observationne Connaissances anatomiques anatomicae » avec description com- Etape physio-pathologique et plète des osselets et de leurs Elles reposent comme dans presque anatomo-pathologique connexions ; tous les domaines de l'anatomie - Ambroise Paré, (1510-1590), com- sur les découvertes des grands ana- Il faut attendre la deuxième moitié mence à entrevoir le rôle du tym- tomistes italiens du XVI e siècle : du XIX e siècle pour que Toynbee pan et des osselets ; - André Vesale, (1514-1564), décrit en 1860 fasse le rapprochement de - Antonio Maria Valsalva, (1666- d'abord l'enclume et le marteau l'ankylose de l'étrier découverte 1723), Professeur d'Anatomie à qu'il compare curieusement à l'os par Vasalva un siècle et demi plus l'Université de Padoue publie en de la cuisse ; tôt et la surdité de transmission qui 1704 « de Aure Humana Tractus », en résulte.

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Adam Politzer à Vienne décrit en » officiel, et pendant vingt ans il n'y d'ailleurs physiologiquement, puis- 1893 les signes cliniques de l'otospon- aura plus aucune tentative chirurgi- que l'impulsion sur la fenêtre ovale giose et surtout les lésions anatomo- cale quelle qu'elle soit, les otologis- par l'intermédiaire du système tym- pathologiques d'otosclérose [ 2. tes se réfugiant mollement au labo- pano-ossiculaire est bien plus impor- Von Tröltsch avait décrit la tympa- ratoire sans qu'émergent d'avancées tante que celle qui se produit sur la nosclérose en 1873. rigoureusement contrôlées et scien- fenêtre ronde. tifiques. La peur d'une action directe Les premières tentatives chirur- sur l'étrier durera un demi-siècle, et Lorsqu'il n'y a ni tympan, ni osselets, gicales sera un des éléments des actions on peut donc améliorer considéra- indirectes qui vont conduire au choix blement l'audition en obturant une Les premiers essais chirurgicaux sont de la fenestration de Sourdille. des deux fenêtres avec une boulette menés par Kessel en 1876 [ 3] après de coton huilée à condition qu'un que celui-ci ait constaté un retour de peu d'air soit emprisonné entre la l'audition chez un sujet ayant eu une LA FENESTRATION SOLUTION boulette et la membrane obtura- fracture du canal semi-circulaire DE LA PREMIÈRE MOITIÉ DU trice. C'est ce que l'on va appeler le tympan artificiel. externe. SIÈCLE Malgré les difficultés, l'absence d'ins- En fait il faut donner aux liquides Puisqu'on ne peut toucher à l'étrier, trumentation adaptée, de grossisse- labyrinthiques, par définition incom- on va s'efforcer de trouver d'autres ment, ces tentatives se multiplient pressibles, la possibilité d'un mouve- moyens pour permettre aux vibra- avec Moure [4] (1880), Boucheron ment induit par la pression sur une tions sonores d'atteindre l'oreille [5] (1888), Miot [6 (1889), Faracci [7] des fenêtres, et compensé par le interne ou plus exactement pour (1889) et se portent naturellement mouvement de l'autre ; d'où l'idée améliorer le « rendement » auditif. d'emblée sur l'étrier, préfigurant en de créer une fistule ou fenêtre en un réalité l'approche de la deuxième autre point du labyrinthe, à défaut C'est en 1910 que Robert Barany, qui moitié du siècle ; il s'agit déjà de de le faire au niveau de la fosse recevra le Prix Nobel de Médecine et mobilisation de l'étrier, voire de ten- ovale. Il faut ajouter que la peur de de Physiologie en 1914, expose en tative de stapédectomie totale. Les l'infection de la caisse est très grande détail à la Société de Médecine de résultats sont parfois surprenants, ce qui va expliquer les premiers choix Vienne [ 10] le résultat de ses recher- toujours incomplets, rarement dura- de site de trépanation labyrinthique ches sur le tympan artificiel, qui est bles, mais parfois bien sûr dramati- ou la multiplication des temps opéra- en réalité une boulette de coton ques, ce qui va entraîner une mise au toires. imprégnée d'huile de vaseline dont il point sévère des « autorités officiel- tentait de préciser la position opti- les » de l'époque. L'opération de Barany male dans le fond de caisse et l'effi- cacité en fonction de celle-ci. Les condamnations de la fin du Barany choisit de trépaner le canal e e semi-circulaire postérieur à travers la XIX siècle et du début du XX Il rapportait l'expérience suivante : mastoïde. La trépanation propre- siècle lorsqu'on instille dans une oreille ment dite est faite à la gouge. La ouverte une ou deux gouttes de première opération est réalisée le 8 En 1894 au Congrès International de mercure, et l'on bascule la tête du août 1910, l'amélioration de l'audi- Médecine de Rome [8], Moure, patient, il arrive un moment où l'on tion est manifeste mais éphémère. Politzer, et Cozzolino de Naples, por- observe une considérable augmenta- Elle ne dure que quelques jours. tent une condamnation totale sur la tion de l'audition. Ce moment cor- chirurgie de l'étrier et sur la chirur- respond à l'obturation de la fenêtre Plus tard Barany tentera la trépana- gie de la surdité en général. ronde par le mercure. En revanche si tion du canal semi-circulaire externe, En 1900 Siebenmann et Ricardo le mercure obture à la fois la fenêtre en essayant de maintenir l'ouverture Botey, au Congrès International de ronde et la fenêtre ovale, l'améliora- par de la graisse et une boulette de Médecine de Paris confirment cette tion de l'audition disparaît en tota- gutta percha, sans succès durable. condamnation sans appel [9]. lité, et réapparaît lorsque la fenêtre Denker déclare en 1904 : « il n'y a ronde est dégagée et la fenêtre L'opération de G. Holmgren, aucun avenir dans la chirurgie de la ovale obturée. Barany en concluait surdité ». qu'il ne fallait pas que l'onde sonore 1917 [11] frappe en même temps les deux Dès lors personne ne peut plus envi- fenêtres labyrinthiques avec la Holmgren porte son choix sur le sager de braver ce « noli me tangere même intensité, comme cela est, canal semi-circulaire supérieur

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abordé par voie endo-crânienne immédiatement recouverte par le ceps dont il juge les résultats de sus-pétreuse. L'ouverture du canal lambeau. meilleure qualité et surtout beau- se fait à la fraise. Il semble que l'ab- coup plus durables. sence de résultat durable, et l'im- Les résultats de cette intervention portance de l'opération font que furent assez rapidement très satis- La technique de Lempert : la son auteur va s'orienter successive- faisants, reproductibles et surtout vulgarisation mondiale ment vers l'ouverture du promon- se révélèrent durables. Ils furent toire (technique déjà proposée sans présentés pour la première fois à la Lempert [17] réalisera dans l'autre grand succès par Passow), puis le Société de Laryngologie des sens, un voyage en Europe, auprès canal semi-circulaire externe. Hôpitaux de Paris le 16 décembre de Holmgren et de Sourdille, et 1929, il y a donc exactement 70 ans, publiera très vite en 1938 dans Malheureusement là encore le gain et en 1935 firent l'objet du rapport Archives Otolaryngologie une « obtenu ne se maintient pas malgré du Congrès de la Société Française technique chirurgicale nouvelle en un résultat initial tout à fait satis- d'Oto-rhino-laryngologie illustré un temps d'amélioration de l'audi- faisant et le problème reste entier. par l'expérience de 109 cas. tion dans l'otospongiose ».

L'apport de Maurice Sourdille : En 1937 Sourdille se rend aux Etats- Cette technique simplifie bien évi- la Tympano-labyrinthopexie en Unis et présente d'abord un exposé demment considérablement la trois temps [12-16] théorique de l'intervention et les prise en charge, mais en réalité est résultats obtenus devant la section extrêmement proche de la techni- otologique de l'Académie de Maurice Sourdille a connaissance que de Sourdille (qui n'est pas cité). Médecine de New-York. des travaux de Holmgren à travers La fenêtre est recouverte d'un lam- une communication au Congrès beau tympano-méatal créé sur Cet exposé sera l'objet d'une publi- International d'Oto-rhino-laryngo- l'instant et dont l'application est cation dans le bulletin new-yorkais logie de Paris en 1922, et se rend facilitée par l'ablation de l'en- de l'Académie de Médecine. Il réa- donc à Stockholm pour rencontrer clume. L'autre différence réside lise aussi une série de démonstra- celui-ci. dans l'utilisation d'un abord tions sur pièces anatomiques, mais endaurale transméatal du canal ne peut faute de temps faire de De retour en France il va patiem- semi-circulaire externe. réelles démonstrations opératoires ment mettre au point une opéra- sur le vivant, avec le contrôle des tion en trois temps : la tympano- Petit à petit cette intervention va résultats puisque l'intervention labyrinthopexie (le mot fenestra- s'imposer et reviendra en Europe comporte trois temps espacés par tion sera employé plus tard) : en 1945 puis sera diffusée dans le quelques semaines ou mois. monde entier. En 1947, - le premier temps est une mastoï- Ombredanne, Aubin et Clerc font Cette démonstration n'entraîne dectomie élargie à l'attique avec état d'une technique encore plus qu'un succès d'estime, malgré une résection de la tête du marteau. Les simple avec sacrifice de tout le sys- extension du voyage vers Chicago, cavités sont soigneusement tapis- tème tympano-ossiculaire, vérita- puis vers le Canada, mais Julius sées par des lambeaux du conduit ble évidement radical, et création Lempert en a compris le sens et pour isoler la caisse ; d'une fistule du canal semi-circu- substituera bientôt aux trois temps laire recouverte par une greffe de Sourdille une opération en un - le deuxième temps est réalisé libre de peau totale pour temps qui s'imposera d'abord aux quelques mois plus tard quand Ombredanne, greffe dermo-épi- Etats-Unis, puis se généralisera plus l'épidermisation est parfaitement dermique mince de 3 à 4 dixième tard de par le monde. obtenue et désignée sous le terme de millimètre d'épaisseur pour de substitution des lambeaux, qui Aubin et Clerc. Les diverses techni- En France, des modifications sont consiste à préparer par un lambeau ques vont un temps encore se che- proposées, en particulier l'utilisa- tympanoméatal large la couverture vaucher et se concurrencer, mais le tion de peau libre (paupière infé- ultérieure de la fistule ; temps n'est pas loin du retour à rieure) par Moulonguet pour l'action directe sur l'étrier. On entre recouvrir la fenêtre. Sourdille lui- - le troisième temps est la fenestra- dans la deuxième moitié du XX même « explore » une technique tion proprement dite, effectuée à esiècle. en deux temps, voire en un temps, l'aide d'une sorte de grattoir sur la mais reste longtemps convaincu de face supérieure de la boucle du la supériorité de la technique prin- canal semi-circulaire externe et

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LA DEUXIÈME MOITIÉ DU XX e nylon pour rétablir la transmission veine est ouverte sur sa longueur ; SIÈCLE : L'ÉTAPE entre l'enclume et l'étrier. Très vite il l'endoveine tournée vers la caisse ; préconisera un tube en polyéthylène STAPÉDIENNE ET préparé, taillé et adapté sur l'instant - cette technique de l'interposition SON ÉVOLUTION connu sous le nom de tube de Shea [ veineuse est toujours très pratiquée, [20]]. mais beaucoup d'auteurs utilisent La mobilisation de l'étrier aujourd'hui un fragment d'aponé- Cette technique va rapidement sup- vrose temporale, prise au niveau des Alors que la fenestration semble dés- planter toutes les autres méthodes lèvres de l'incision en cas d'incision ormais donner toute satisfaction, et s'imposer, jusqu'à sa mise en ques- endaurale de Shambaugh. Le pro- alors que la technique de Lempert tion par Shea lui-même en 1960, qui cédé a l'avantage de la commodité, est revenue en France après la préconisera une platinotomie avant de la rapidité, et ne semble aucune- guerre, et que l'on s'efforce d'en de revenir à la spadédectomie. ment modifier le résultat ; simplifier la technique et d'en amé- liorer les performances, Samuel L'évolution de la stapédectomie - on a pu proposer aussi une interpo- Rosen [18]] à New-York en 1953 sition de périchondre. reprend les interventions de Miot et Technique de stapédectomie de Boucheron de la fin du siècle der- Il n'y a pas de grandes variantes. Technique de rétablissement de la nier, et réalise une mobilisation de Tous les auteurs s'accordent à la créa- continuité l'étrier avec grand succès. Il précise la tion d'un trou de sécurité dans la C'est avec la taille de l'ouverture technique qui donne de meilleurs platine qu'il faut effectuer avant labyrinthique, l'élément le plus fré- résultats immédiats que la fenestra- toute action sur l'étrier. Les branches quent de discussion, et les formes tion, mais dont le succès n'est pas sont enlevées après section du ten- proposées pour la prothèse sont définitif, dès lors que l'étrier mobi- don de l'étrier et désarticulation extrêmement variées. Mieux vaut lisé va tendre à se refixer. On appel- incudo-stapédienne. Cette ablation sans doute en préciser les principes : lera longtemps cette mobilisation, des branches est effectuée au cro- - Shea avait utilisé le tube en polyéthy- l'opération de Rosen première chet, et peut entraîner une stapédec- lène légèrement taillé en biseau, pour manière, l'auteur lui-même s'étant tomie d'emblée en cas de platine s'appliquer sur la fosse ovale et ouvert ultérieurement orienté vers la stapé- peu fixée. « en ailette » pour s'adapter à l'apo- dectomie. physe lenticulaire. Ce tube présente On s'accorde généralement dans le plusieurs avantages : absence de coût, Fowler [19] propose de mobiliser la cadre des platinectomies totales à parfaite coïncidence avec l'axe de partie postérieure de la platine après admettre qu'il vaut mieux laisser en l'apophyse lenticulaire, mais risque de avoir sectionné la branche anté- place la partie tout antérieure de la déplacement secondaire élevé ; rieure et "poinçonné" la platine en platine si l'importance de la fixation à son milieu. Il s'appuie sur la fré- ce niveau, rend périlleux son ablation. - Schuknecht [[22]] a proposé une quence dominante du siège anté- prothèse métallique comportant à rieur de l'ankylose. En fait cette technique n'a pas véri- son extrémité distale une boucle tablement évolué depuis Shea [ [21]] dans laquelle est incluse un fragment P. Clerc en France, réalise une techni- qui en avait parfaitement établi le de graisse ou de tissu conjonctif qui que dite du timbre poste, par un principe. est « serti » en quelque sorte dans la poinçonnage péri-platinaire qui per- boucle. De ce fait, cette graisse ou ce met d'étendre les indications et les Technique d'interposition tissu conjonctif constitue en même possibilités de la mobilisation. En cas de platinectomie totale ou temps l'interposition. Le procédé a presque totale, une interposition est l'avantage de son faible coût Les premières tentatives de sta- nécessaire pour fermer la fosse ovale, puisqu'il peut être préparé extempo- pédectomie éviter les fuites de liquide labyrinthi- ranément avec du fil d'acier, ou du fil que, et le flottement de l'extrémité de Tantale. Le risque est représenté Tandis que la fenestration et la mobi- du piston dans la fenêtre ovale. par la nécrose possible de la branche lisation de l'étrier se disputent désor- descendante de l'enclume, il peut se mais l'intérêt des otologistes avec La nature de cette interposition est retrouver trop serré par le fil métalli- des arguments très forts, John Shea variable : que et dévascularisé ; réalise en 1956 la première stapédec- - initialement Shea a préconisé l'in- tomie totale avec interposition vei- terposition veineuse à partir d'une - M. Portmann [ [23]] a proposé un neuse, utilisant un étrier artificiel en veine prise sur le dos de la main ; la moment l'utilisation de la branche

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postérieure de l'étrier, déplacée mm, en obturant l'orifice par un Utilisation du laser dans l'otospon- vers l'avant, conservant ainsi l'arti- greffon veineux, comme dans l'in- giose culation incudo-stapédienne au terposition sur platinectomie. Cette prix il est vrai d'une manipulation technique assure évidemment une Les polémiques difficile et qui ne peut être toujours parfaite étanchéité en limitant le Les premiers résultats de l'utilisation réussie lors des interventions. traumatisme platinaire et paraît du laser sont publiés en 1980 par particulièrement séduisante. Perkins [ [26] ], à propos de 11 inter- En fait les procédés les plus utilisés ventions, et l'auteur s'en montre sont actuellement représentés par Les Techniques laser très satisfait. Il utilise le laser Argon les pistons en téflon, avec des dis- et réalise une platinotomie par cussions qui portent essentielle- Les différents lasers impacts circulaires en « rosettes ». ment sur le calibre du piston. En cas On dispose actuellement de trois de platinectomie totale ou subto- types de laser dans ce domaine : le Dix ans plus tard Mac Gee [ [27] ] tale, on utilise des pistons qui vont laser Argon le premier utilisé, le conforte largement ces premiers de 4/10 à 8/10, le plus utilisé étant laser KTP, le laser CO2 : résultats et se montre particulière- sans doute le 6/10 de millimètre. - le laser Argon a une longueur ment enthousiaste sur l'intérêt de On a remarqué que les pistons trop d'onde de 488 à 514 nanomètres ; la technique. étroits, 3/10 de millimètres, trans- mettaient mal les fréquences gra- - le laser KTP a une longueur Entre temps plusieurs auteurs ves. d'onde de 532 nanomètres. avaient émis d'importantes réser- ves en particulier M. Portmann en Nous utilisons pour notre part le Ces deux lasers, sont extrêmement 1981, et surtout Gantz en 1982 [ piston-cup en téflon, auquel nous maniables et précis, et le rayon [28] ], qui avaient démontré expéri- trouvons beaucoup d'avantages. coloré permet d'ajuster parfaite- mentalement le risque de perfora- ment le geste microscopique de tion sacculaire chez le chat. La platinotomie l'ouverture de la platine puisqu'on voit réellement le rayon ; Les publications de Lesinski [ [29] ], Dès 1960 Shea propose une plati- appuyées sur un long travail expé- notomie avec mise en place d'un - le laser CO 2 dont la longueur rimental (1989) et sur une expé- piston trans-platinaire et aban- d'onde est de 10,600 nanomètres, rience clinique importante (1993), donne bientôt la technique. n'a pas de rayon coloré. Il doit donc semblent de ce point de vue très être doublé par un laser de visée à rassurantes pour ce qui concerne H. Martin [ [24] ] propose en 1963 l'hélium. Il n'y a pas toujours exacte l'utilisation du laser CO 2. Mieux une platinotomie calibrée, le trou coïncidence entre les deux fais- elles autorisent son application réalisé devant être à la dimension ceaux ce qui peut aboutir à des dys- dans le cadre des révisions de sta- du piston et les résultats font l'ob- fontionnements. Par contre le laser pédectomies dont on connaît par jet de la thèse de Jean Elbaz en CO 2 a l'avantage d'être absorbé ailleurs les difficultés en technique 1982, portant sur 3923 interven- par l'eau et les liquides incolores, conventionnelle. tions. ce qui limite considérablement le risque d'échauffement au niveau La technique ou ce que permet le Cette technique se répand à travers du labyrinthe que l 'on reproche laser la publication des divers résultats aux deux premiers. - La section du tendon de l'étrier, qui semblent montrer une meil- atraumatique et sans saignement. leure tenue à long terme dès lors De plus c'est un laser dont dispo- On peut s'interroger sur son intérêt de l'ouverture du labyrinthe a été sent à peu près tous les services dès lors que les techniques classi- moins importante. L'apparition des d'ORL. Et en réalité le risque de ques aux microciseaux ou au cro- techniques « laser » ne peut que non-concordance entre le rayon chet ne nous semblent pas présen- favoriser sa diffusion. Hélium et le rayon laser propre- ter de réelles difficultés, il est vrai ment dit est actuellement très avec l'expérience. On en rapprochera la technique de limité depuis l'apparition de micro- platinotomie avec interposition manipulateurs qui suppriment les - La section de la branche posté- proposée par J.B. Causse [ [25] ]. miroirs et les lentilles de transmis- rieure de l'étrier et parfois de la Elle consiste à réaliser une platino- sion et améliorent le rendement branche antérieure (qui n'est pas tomie de 0,8 mm (au besoin au optique. toujours techniquement possible). laser) avec une prothèse de 0,4

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- La platinotomie calibrée, soit par LE XXIe SIÈCLE SERA-T-IL LE Resultati di una nuova serie di opera- perforation directe, progressive SIÈCLE DE LA PRISE EN zioni. Arch Ital Otol 1899; 9: 209-21. agrandie ou non au microcrochet, soit selon la technique dite en « CHARGE GÉNÉTIQUE ? [8] Congrès International de Médecine Rome 1894. Traitement chirurgical de rosettes » ou en « timbre poste » qui l'otite moyenne chronique sèche. permet d'isoler un microdisque plati- Il est toujours difficile de préjuger de l'avenir comme ce texte en est l'illus- Rapport. Discussion Cozzolino, Politzer, naire et de le récupérer. L'intérêt Vacher. principal réside ici dans l'absence de tration. Au début du XX esiècle on traumatisme, et de risque d'enfonce- ne voyait aucun avenir dans la chi- [9] Congrès International de Médecine de ment de la platine. rurgie de l'étrier. Au début du XXI Paris 1900. Traitement Chirurgical de la esiècle il serait sans doute imprudent Sclérose otique. Rapport. Discussion. G. Il faut cependant être très vigilant, d'élaborer une théorie d'éradication Laurens, A. Malherbe, Miot, Suarez de Mendoza, Politzer. du moins en ce qui concerne les génique de l'affection, plus encore d'imaginer un calendrier d'action. lasers Argon et KTP, sur le risque [10] B arany R. Versuche zur exacten d'échauffement des liquides labyrin- Demonstration und Erklärung der thiques et respecter les règles expéri- Cependant les études génétiques Wirtung des Kuns Hichen Trommelfells mentalement établies, tant en ce qui déjà réalisées et en particulier (Gesellschaft der Aerzte in Wien Sitzung concerne la puissance, le mode, et le l'étude de Tomek M.S. [ [31] ] ont von 6 mai 1910). calibre du spot, le temps de l'impact permis de localiser avec précision sur que du respect de l'intervalle libre le chromosome 15q (15q25-q26) le [11] H olmgren G. Till Otosclerosens gène de l'otospongiose. Cette locali- Kirurgiska behandling. Nord-tidskr Oto entre deux impacts permettant le Rhino Laryng Bd 1917; ii . refroidissement. sation, outre qu'elle renforce, ou plutôt confirme le caractère hérédi- [12] S ourdille M. Nouvelles techniques Une technique originale, mini-inva- taire de l'affection, ouvre indiscuta- chirurgicales pour le traitement des surdi- sive, a été décrite par H. Silverstein [ blement des perceptives de thérapie tés de conduction ou ostosclérose. [30] ] sous la dénomination de génique à plus ou moins long terme. Présentation d'opérée. Société d'otologie Technique laser Stamp (Laser Mais ceci reste encore du domaine des Hôpitaux de Paris, 16 décembre 1929. Spadedotomy minus prosthesis). de la prospective et sort indiscutable- Académie de médecine 17 décembre ment du cadre de notre sujet. 1929.

Elle rappelle la technique de Fowler [13] S ourdille M. Traitement chirurgical et n'est applicable qu'aux blocages de l'ostopongiose. Rapport Congrès limités à la partie toute antérieure Références Société Française d'Oto Rhino de la platine, au niveau de la fissula Laryngologie, Paris 1935. ante fenestram, il est vrai les plus fré- [1] V asalva AM. De aure humana tractus. quents. Bologna, 1704. [14] S ourdille M. New technique in the Surgical treatment of severe and progres- [2] P olizer A. Uber Primare Erkrankung sive deafness from ostoclerosis. Bull NY L'auteur propose de vaporiser der Knochernen Labyrinth Kapsel. Z. Acad Med 1937; 13: 673. d'abord plus ou moins partiellement Ohrenheilkd 1893; 25: 309-29. la branche antérieure de l'étrier (ce [15] S ourdille M. Traitement chirurgical qui n'est pas toujours possible), puis [3] K essel J. Uber das Mobilisieren des de l'ostopongiose. Monographie Masson de réaliser une platinotomie linéaire Steigbugels durch Ausscheneiden des et Cie Editeurs Paris 1948. à l'union du tiers antérieur et des Trommelfelles, Hammers und Amboss bei deux tiers postérieurs de la platine, undurchganikeit der Tuber. Arch [16] S ourdille M. Tendances évolutives de qui se trouvent ainsi isolés par rap- Ohrenheilkd 1878; 13: 69-88. la fenestration. Monographies Oto- Rhino-Laryngologiques Internationales. port au point de fixation. La « tran- [4] M oure EJ. De la mobilisation de Masson et Cie Editeurs, Paris 1955. chée » est alors obturée avec de la l'étrier. Rev Laryngol 1880; 7: 225-33. graisse. [17] L empert J. Improvement of [5] B oucheron E. La mobilisation de in otosclerosis a new stage surgical tech- L'auteur qui utilise le laser Argon l'étrier et son procédé opératoire. Union nique. Archiv Otol 1939; 28: 42. admet que cette élégante et atrau- Med 1888; 46: 412-6. matique technique n'est applicable [18] R osen S. Restoration of hearing in qu'à quelques cas privilégiés et [6] M iot C. De la mobilisation de l'étrier. otosclerosis by mobilization of the fixed Rev Laryngol 1890; 10: 49-54. stapedial footplate. An analysis of results. qu'elle ne met pas à l'abri d'une Laryngoscope 1955; 65: 224-69. refixation ultérieure obligeant alors à [7] F araci G. Importanza acustica e fun- utiliser une technique plus classique. zionale della mobilizzazione della stoffa ; [19] F owler EP. Anterior crurotomy and

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Centenaire 1908 - 2008

Cent ans de vertiges

Pr. Claude PERRIN Professeur des Universités, Ancien Chef du Service ORL, du CHU Nancy-Brabois 54000 Nancy

Naissance de l’objectivité expérimentale

En matière de vertiges et de troubles de l'équilibre, l'ère moderne débute avec J.E. Purkinje (1787- 1869), anatomiste, histologiste, embryologiste et physiologiste tchèque qui fut un véritable vision- naire. Avant lui, les vertiges faisaient l'objet de débats philosophiques passionnés où s'était notam- ment illustré J. Offray de la Mettrie (1709-1751), mais ne suscitaient pas de recherches médicales. Par l'auto-observation des manifestations déclenchées par la rotation du corps et en fonction de différen- tes positions de la tête (1820-1826), J.E. Purkinje entre dans l'ère expérimentale objective de l'étude des vertiges et des troubles de l'équilibre. Il pense que ces manifestations fondent le cadre d'un cha- pitre particulier de la physiologie concernant la motricité affectée à nos relations avec le monde envi- ronnant sans, pour autant, parler encore d'équilibration ni de nystagmus. Il n'établit pas de relations avec les travaux de destructions labyrinthiques réalisés en 1824 par P-M.J. Flourens (1794-1867), et ses travaux resteront totalement ignorés jusqu'à leur traduction intégrale en 1918 !

C'est Vulpian (1526-1887) qui le premier emploiera le mot de nystagmus en 1861, bientôt suivi par les neurologues. P. Ménière (1799-1862) n'en fera pas mention dans les célèbres descriptions de la triade labyrinthique à laquelle son nom reste attaché.

L'attribution d'une fonction sensorielle affectée à l'équilibration aux différents canaux semi-circulaires est expressément formulée en 1870 par F.L. Goltz (1834-1902) à qui, en outre, doit être reconnu le mérite d'avoir observé la notion très féconde que la réhabilitation motrice de grenouilles ayant subi des exérèses étendues de cortex cérébral n'est complète que si les animaux ne sont pas entravés. Son élève et successeur à Strasbourg alors allemande, J.R. Ewald (1855-1921), réalise sur les canaux semi- circulaires du pigeon des expériences de stimulation basées sur la création de courant ampullipète et ampullifuge permettant d'établir les lois qui portent son nom. Il donnait consistance aux travaux convergents de J. Breuer (1842-1925), E. Mach et A. Crum-Brown établissant dans les années 1873-1874 que ces canaux semi-circulaires fonctionnaient comme un dispositif inertiel freiné par les frottements et dont la disposition orthogonale les rendaient aptes à enregistrer les mouvements de la tête dans les 3 plans de l'espace. Enfin, l'apparition d'un nystagmus au cours et à la suite de mouvements de rotation de la tête est clairement considérée comme la preuve d'un bon fonctionnement labyrinthique par Kreidl en 1892.

La labyrinthologie clinique des labyrinthites à une époque où, En fait, le départ de la labyrintho- en raison des risques chirurgicaux, logie moderne devait s'effectuer à La clinique suivra avec retard. les opérateurs étaient à la recher- partir du nystagmus provoqué par Schwabach rapporte un cas d'infec- che d'un indice de gravité obli- une stimulation calorique, et c'est tion grave de l'oreille associé à un geant à intervenir. En 1904, R. Barany (1876-1937) qui en a, à la nystagmus en 1878. Lucae décrit le Hennebert décrit le signe de la fis- fois, fondé les bases et assuré l'es- signe de la fistule labyrinthique en tule inverse, interprété comme sor. Le constat de départ était le 1881 et, c'est Jansen qui, en 1894, signe de laxité ligamentaire de l'ar- nystagmus observé lors des lavages dénonce le nystagmus comme ticulation stapédo-vestibulaire d'oreille à l'eau froide et le premier signe d'appel chirurgical au cours dans la syphilis. argument décisif établi par Barany

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a été l'inversion de la direction du l'épreuve de l'indication. La confron- terme d'une épreuve comptant 10 nystagmus quand le lavage était tation des résultats de la recherche tours en 20 secondes comme le pro- effectué à l'eau chaude, ce qui a de ces différents signes permet la posait Barany en 1906, l'opérateur donné lieu à une note technique séparation entre syndromes harmo- observe deux effets intriqués : nys- publiée à la Société d'Otologie de nieux (d'origine périphérique) et tagmus per-rotatoire et nystagmus Vienne en 1905. Un travail dense de syndromes dysharmonieux (d'origine post-rotatoire. Buys, en 1909, remé- 104 pages devait faire suite l'année centrale). diera partiellement à cet inconvé- suivante, exposant une théorie cohé- nient en utilisant une accélération rente du mécanisme du nystagmus infraliminaire permettant d'attein- reposant sur la création d'un courant Les épreuves instrumentales dre la vitesse angulaire de l'épreuve endolymphatique d'origine thermo- précédente. L'arrêt brutal permet convective. Un argument de poids Il appartenait à Barany de codifier alors, en théorie, de n'observer que était l'inversion de la direction du l'épreuve calorique, épreuve reine les effets de cette décélération bru- nystagmus provoqué par la bascule pour celui qui avait échafaudé un tale. de la tête qui retournait du même système cohérent reposant sur elle. Il coup le canal semi-circulaire inté- y pourvoit dès 1906 et propose d'em- En 1948, Van Egmond, Groen et ressé par la stimulation calorique. blée également la stimulation bilaté- Jongkees proposeront une série Cette inversion, spécifique du nys- rale simultanée. Utilisant un otogo- d'épreuves, selon le modèle de pro- tagmus d'origine calorique, à l'exclu- niomètre et réglant la température tocole de Buys, explorant toute une sion des nystagmus d'origine rota- de l'eau par un otocalorimètre, gamme de vitesses angulaires. toire, galvanique ou pressionnelle, Brünnings, en 1911, codifie les 3 Etudiant réponses nystagmiques et renforçait la démonstration. Barany positions qui portent son nom, pour sensation ressentie par le sujet, ils s'est livré à un inventaire de toutes une observation optimale. pensent ainsi appréhender durée et les situations donnant lieu à l'appari- valeur de la déflectivité cupulaire et tion de nystagmus et à sa recherche Bien plus tard, en 1942, Fitzgerald et considèrent qu'ils réalisent ainsi une dans les affections cliniques à tro- Hallpike, soulignant la difficulté cupulométrie. Utilisant l'électronys- pisme labyrinthique. Il a débordé ce d'observer le début des secousses tagmographie en continu, cadre strict pour reconnaître les nystagmiques, proposeront de noter Montandon, en 1954, propose une tumeurs développées sur le tronc du l'intervalle de temps séparant début épreuve comportant une accéléra- nerf auditif. On lui doit également la de l'irrigation et fin du nystagmus tion angulaire constante et entrete- description du vertige positionnel (plus aisément observable). A cette nue, avec recherche du seuil d'appa- avec son assistant Carlefors, la époque, l'accord semble fait pour le rition du nystagmus. Après palier à notion de position déclenchante et choix de 37° et 44° comme tempéra- vitesse constante, il réalise soit décé- même le constat rapporté par cer- tures de référence (il y a des excep- lération régulière, soit arrêt brusque. tains patients que le maintien volon- tions, comme Kobrak par exemple). taire de la position critique pouvait Les paramètres de référence sont Mais c'est l'épreuve rotatoire amor- avoir à terme un effet thérapeuti- essentiellement la durée et l'inten- tie, obtenue par les mouvements que. sité (amplitude, fréquence, et, bien- périodiques d'un fauteuil solidaire tôt, vitesse angulaire de la phase d'une barre de torsion écartée de sa lente), et, de façon diversement position d'équilibre, proposée en Les déviations segmentaires appréciée, la latence. Torek note 1961 par Greiner, Conraux et Picard, qu'il y a culmination fréquentielle qui sera appelée au plus brillant Dès 1846, Romberg (1795-1873), entre la 30 et la 60 eseconde de essor. Elle permet, en effet, de stimu- considéré comme le fondateur de la l'épreuve codifiée d'Hallpike. ler quasi symétriquement les deux neurologie, immortalise son nom en Henrikson montre que cette période labyrinthes par une succession d'ac- décrivant l'effondrement des mala- est aussi celle où la vitesse angulaire célérations angulaires dégressives. des atteints de tabes dorsalis est la plus élevée. La nystagmogra- Associée à l'enregistrement nystag- lorsqu'on leur demande l'occlusion phie computerisée tiendra compte mographique en continu, elle devait des yeux. M. Charcot décrira la dévia- de ces constats. pendant de nombreuses décennies, tion de la marche en 1874, Babinski être la référence de base en matière et Weil la marche en étoile en 1913. Organe inertiel, le labyrinthe n'est d'exploration instrumentale rota- En 1938, Unterberger proposera le sensible qu'aux accélérations et non toire. Malheureusement, victime de piétinement sur place. Mais, c'est aux vitesses et la mise au point d'une son succès, elle a eu l'inconvénient Barany qui décrit en 1906 la dévia- épreuve rotatoire fiable souffrira de détourner le médecin de l'appro- tion des membres supérieurs et longtemps de cette particularité. Au che clinique raisonnée de son

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malade et de conduire à des excès Ménière à rebours et assimile à 1955 d'interprétation des tracés et de l'onglée des doigts qui précède le Un Cours international de labyrin- leur moindre altération (salves, retour de l'irrigation sanguine chez thologie clinique, à l'initiative d'A. bouffées, pauses, crochetages, le sujet victime d'une gelure ou Aubin et P. Clerc, associe à Paris, micro-écriture, etc.). atteint d'un syndrome de Raynaud. des cliniciens, des électrophysiolo- On doit aussi à Lermoyez un apho- gistes et des chercheurs. L'effet de l'orientation du regard risme qui n'a rien perdu de son Cette démarche originale et très par rapport à la direction du nys- actualité et qui gagnerait à être constructive fera école, le chemine- tagmus a été connu très tôt, obli- médité en notre époque où seules ment des connaissances s'opérant geant à prendre des mesures en courbes graphiques et images sont jusque là souvent en rangs disper- conséquence. Jansen avait observé jugées dignes de crédit : « si vous sés et le défaut de communication en 1898 que le nystagmus spon- n'avez pas fait le diagnostic d'un étant très préjudiciable à tout pro- tané, d'origine clinique, est ren- vertige à l'interrogatoire, vous ne grès. forcé, par le regard dans sa direc- le ferez jamais ! » tion. Wanner en 1912 étendra ce La seconde moitié du siècle constat au nystagmus post-rota- 1927 Elle semble marquée par l'abandon toire du sujet sain, et Alexander en G. Portmann pratique une inter- du « tout labyrinthique » et la prise tirera une classification en 3 degrés vention à visée décompressive sur en compte progressive de la pluri- de l'intensité du nystagmus. Dès le sac endolymphatique pour atté- modalité sensorielle caractéristique 1906, Barany observait le nystag- nuer les vertiges d'une triade laby- de la fonction d'équilibration. mus derrière lunettes grossissantes. rinthique de Ménière. Cet auteur Mettons à part l'originale démons- Les lunettes de Bartels apparaîtront avait réussi, un des premiers, à tration apportée par Money et en 1912. visualiser la cupule en injectant de Myles en 1974 sur le mécanisme des l'encre de chine dans le labyrinthe troubles de l'équilibre, et notam- Le nystagmus d'origine centrale de la raie, qui communique large- ment du nystagmus, liés à la n'obéit pas aux mêmes règles : c'est ment avec le milieu marin ambiant. consommation d'alcool. Barany ce qu'établit Holmes en 1917 à pro- s'était déjà intéressé à la question pos du nystagmus cérébelleux. Et 1938 en tentant de profiter des tradi- c'est ce qui déterminera en 1968 C.S. Hallpike (1900-1979) rapporte tionnelles beuveries des étudiants Demanez à définir un indice de avec H. Cairns les corrélations ana- viennois, mais, il s'était fait rosser fixation visuelle, dans l'intention tomo-cliniques précises (avec cou- et cette tentative avait contribué à d'opérer une discrimination à pro- pes histologiques d'une grande le discréditer à une époque où il pos d'un nystagmus indéterminé. qualité à l'appui), de malades décé- n'en avait pas vraiment besoin. Le On sait aujourd'hui que le seul fait dés des suites d'une intervention nystagmus à l'alcool évolue en pour un sujet, lors d'une épreuve neurochirurgicale réalisée pour deux phases distinctes, géotropi- rotatoire, de fixer une cible imagi- « syndrome de Ménière ». Il pro- que dans la première phase, agéo- naire, dans l'obscurité, à des réper- pose une explication pathogénique tropique dans la seconde. Selon la cussions sur les tracés enregistrés. appelée à un grand avenir sous le démonstration apportée par ces nom d'Hydrops labyrinthi, bien que deux auteurs, toute la question Toutes ces particularités ont eu des l'expression ne soit pas employée repose sur une modification de conséquences pratiques importan- dans le texte. densité ; dans une première phase, tes dans l'exécution des épreuves l'alcool imprègne la cupule et celle- instrumentales. La vidéonystag- 1952 ci est hypodense par rapport à l'en- moscopie sera très utile sur ce plan Dix et Hallpike présentent un dolymphe, dans la seconde phase, au cabinet du médecin. important rapport sur « la patholo- le passage de l'alcool dans l'endo- gie, la symptomatologie et le diag- lymphe en l'absence de toute nostic de certains désordres com- alcoolémie, provoque l'effet Quelques repères importants muns du système vestibulaire » qui inverse. L'ingestion d'eau lourde contribue efficacement à clarifier détermine exactement les mêmes 1919 les idées sur les signes distinctifs du effets successifs, ce qui donne des M. Lermoyez, le fondateur de la cli- vertige de Ménière (redevenu pour réponses « en miroir inversé » par nique Oto-rhino-laryngologique la circonstance Maladie de rapport à celles de l'alcool. Il y a parisienne avec Sebileau, décrit « le Ménière), de la neuronite vestibu- donc dans les deux cas, disparition vertige qui fait entendre » qu'il laire, et du vertige positionnel transitoire de l'isodensité considère comme un vertige de paroxystique bénin. cupule/endolymphe.

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Quelques jalons de la deuxième L'étude de cette variété très particu- riences vécues. C'est la non-concor- moitiè du siècle lière de mal des transports et des dance des informations par rapport à troubles de l'équilibre en microgra- des schémas préétablis qui serait à la 1964/1967 vité imposera des protocoles expéri- base du mal des transports et entrai- Description et étude par Greiner, mentaux complexes et surtout l'éla- nerait des manifestations considé- Collard, et Conraux, du nystagmus boration d'appareils de mesure très rées comme expressives d'un syn- de torsion cervicale, « nystagmus sophistiqués dont bénéficieront à drôme d'adaptation. Ce concept qui binoculaire déclenché par la rotation terme la physiologie et la clinique restitue leur valeur à l'ensemble des du corps, la tête restant fixe », consi- humaines. entrées sensorielles et non plus seu- déré comme un test global de dépis- lement à l'entrée labyrinthique, nous tage d'un facteur cervical osseux, Une des premières préoccupations a paraît d'une grande fécondité y com- articulaire, musculaire ou vasculaire, été de vérifier si l'épreuve calorique pris dans l'interprétation du vertige, excluant toute composante vestibu- produisait les mêmes effets en impe- manifestation essentiellement sub- laire. Battant dans la direction oppo- santeur qu'en conditions de gravité jective. Aussi lui avons nous fait une sée à la rotation du corps, il est phy- terrestre. Reposant sur la notion large part dans le rapport 1987 à la siologique chez le nouveau-né, mais d'un flux induit par un différentiel Société Française d'Oto-Rhino- inconstant chez l'adulte. Sa recher- de densité du liquide endolymphati- Laryngologie intitulé che en pathologie donne lieu à des que créé par l'effet thermique, résultats contradictoires et déconcer- l'épreuve pratiquée en microgravité « L'équilibre en pesanteur et en tants qui ne peuvent recevoir une n'aurait pas dû provoquer les effets impesanteur » et surtout dans le part d'explication que si on les reca- obtenus sur terre. L'expérience fut petit essai paru en 1991, « l'Homme dre dans la pluri-modalité des réalisée lors de l'expédition Spacelab et ses espaces » tous les deux expo- entrées sensorielles de la fonction S.L. 1 en novembre 1983. Les tests sant, sans doute pour la première d'équilibration. Or le poids des furent réalisés avec de l'air à 30 °C et fois, une vision synthétique des trou- entrées sensorielles diffère d'un indi- 44 °C et les résultats comparés à ceux bles de l'équilibration, des illusions vidu à l'autre et en fonction des obtenus au sol avant et après la mis- sensorielles et des différentes varié- actions à entreprendre. L'entrée pro- sion. Les réponses se révélèrent iden- tés de mal des transports, en les prioceptive nuquale est en outre sus- tiques en condition 0 g et 1 g, ce qui regroupant dans le cadre plus large ceptible d'être modifiée voire per- paraissait remettre en question la des troubles de l'intégration spa- vertie par une atteinte pathologique théorie thermoconvective élaborée tiale. (rhumatisme, traumatisme et spécia- par Barany. En fait, sans entrer dans lement « coup du lapin »). Les expé- les détails, cette remise en cause Les dernières décennies du siècle riences utilisant les vibreurs, comme n'est que partielle. Il s'agit plutôt de Elles voient apparaître la posturolo- celles réalisées par Roll et coll. don- relativiser la part de la thermocon- gie, en France essentiellement sous nent consistance à cette manière de vection et celle de la variation l'impulsion de P.M. Gagey, permet- voir et rendent caduques les inter- induite de pression hydrostatique tant d'explorer le réflexe vestibulo- prétations faisant suite à l'élabora- dans les deux types de conditions de spinal et de ne plus se limiter au tion du syndrome d'irritation sympa- gravité. réflexe vestibulo-oculaire. thique cervicale de Barré-Liéou. Posturologie statique puis dynami- 1975 que, bientôt couronnée en clinique 1961 J.T. Reason et J.T. Brand élaborent la médicale par l'Equitest dû à Nashner. L'aventure spatiale a déjà com- « sensory rearrangement theory Ce dispositif entérine et couvre la mencé, mais le fait déterminant est »,connue en France sous le nom de nécessité d'un bilan multisensoriel ici la mention par Germann Titov, théorie du conflit d'informations, réalisé par la méthode des scores, cosmonaute soviétique, d'une sensa- concept interprétatif de la pathogé- obtenus par privations sensorielles tion de malaise quand il bouge la nie du mal des transports, repris et sélectives. tête. Le mal de l'espace fait son diffusé en France par J. Colin. Ce entrée dans l'inventaire des syndro- concept est basé sur la plurimodalité L'équitest permet de rendre compte mes d'adaptation de la fonction concordante, congruente, voire de l'utilisation réelle des différentes d'équilibration à un environnement redondante des informations senso- entrées sensorielles indépendam- gravito-inertiel différent de celui qui rielles (acquise par l'usage) permet- ment de leur valeur fonctionnelle et règne sur terre. Il s'intègre vraisem- tant d'assurer l'équilibration et la de définir l'organisation sensorielle blablement dans le chapitre des ciné- capacité d'interagir avec l'espace propre à un individu déterminé. Il toses. environnant. Il faut y ajouter la sen- permet d'appréhender des syndro- sation escomptée basée sur les expé- mes de négligence ou pour Freyss et

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Vitte d'omission labyrinthique dés offerts par la microscopie élec- Bibliographie succincte comparables aux négligences tronique et ses dérivés parvient à visuelles bien connues des neurolo- découvrir le support biologique Le lecteur comprendra aisément qu'il gues. Il permet également de jau- aux hypothéses avancées par les est illusoire d'envisager une bibliogra- ger les capacités compensatoires en physiologistes. phie complète sur une période aussi situation de déséquilibre induit. Vieux rêve, la vidéonystagmoscopie étendue dont nous n'avons dressé que Outil de détection et de mesure, a vu le jour et constitue un atout le panorama. l'Equitest est également un instru- considérable pour le clinicien Nous conseillons de se reporter aux ment d'orientation et de contrôle comme pour le chercheur pouvant ouvrages et rapports suivants à la fois de la rééducation. C'est une réfé- observer en toute liberté et dans pour compléter ce que nous n'avons rence précieuse dans l'évaluation des conditions idéales non seule- fait qu'ébaucher et pour trouver les des potentialités réelles du sujet ment les nystagmus les plus cou- références y afférant :P ERRIN C (sous la âgé, souvent victime, à son insu, de rants mais aussi les variétés qui, par direction de...). L'équilibre en pesanteur déficits successifs dont la compen- nature pouvaient échapper à l'ob- et en impesanteur. Rapport à la société sation plus ou moins précaire peut servation classique. Eric Ulmer s'est française d'ORL 1987. Arnette Edit.PER- RIN C. L'homme et ses espaces. 1991. être mise à mal par un fait incident beaucoup impliqué dans le déve- PUN.P ERRIN C. Le vertige. Histoire et nouveau ou sous l'effet de drogues loppement de cette technique. actualité.1998 L.Pariente Edit.W ILLE- diminuant la vigilance. MOT J (sous la direction de...). Le nystagmus a lui même changé Naissance et développement de l'oto- C'est un fait marquant et préoccu- de nature ; de simple mouvement rhino-laryngologie dans l'histoire de la pant de nos sociétés vieillissantes considéré comme « réflexe » per- médecine, Acta oto-rhino-laryngologica que ce risque accru de chute lié à un mettant un recadrage de la vision belgica,1981. syndrome d'instabilité posturale. et le suivi de la cible grâce à la Nous y adjoignons l'article suivant, de Des mesures préventives de tous déviation lente, la saccade est grande valeur historique :MICHEL J. ordres s'imposent pour en atténuer devenue une excursion à part Recherches historiques sur la décou- la portée, notamment financière. entière, pouvant revendiquer un verte du nystagmus et de sa significa- rôle de premier plan dans la capa- tion physio-pathologique. L'approche scientifique, notam- cité de maintenir une vision stable ment de l'école d'A. Berthoz, lors des mouvements de rotation Rev Prat (Paris)1990 ;40 :23. consacre ce type d'évolution de la de la tête. clinique. Nous savons désormais que les noyaux dits vestibulaires Les physiologistes redécouvrent sont en réalité des centres d'inté- avec intérêt et émotion les super- gration et de coordination de la bes images obtenues il y a plus de plupart des afférences sensorielles cent ans par le chronophotographe affectées à la fonction d'équilibra- de J.E. Marey et le zoopraxiscope tion. Les circuits réflexes, notam- de Muybridge lors de l'observation ment du réflexe vestibulo-oculaire, de l'animal ou de l'homme au cours commencent à livrer leurs secrets, de la plupart des modes de dépla- impliquant des spécialisations et cement. La simple étude de ces cli- des modalités fonctionnelles parti- chés est lourde d'enseignement : la culières à certains groupes de neu- stabilité de la tête et du regard y rones. La constitution de réseaux sont parfaitement visualisés ! neuronaux fugaces entrant littéra- L'avenir est sans doute dans la lement en résonance pour permet- recherche du déterminisme de nos tre une prise en compte et une actions, la philosophie de l'action : réponse immédiate à une sollicita- l'école de A. Berthoz s'emploie à tion du monde environnant paraît cet effet à réexaminer la boucle bien démontrée. L'étude fine des perception/action. structures grâce aux divers procé-

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LA DOUCHE NASALE - POUR LE RINÇAGE DU NEZ EN DOUCEUR ET EN PROFONDEUR

Recommandé en cas de • rhinite chronique • sinusite Facile et agréable • rhinite allergique • rhinite sicca 1. Remplir la • après intervention endonasale douche nasale avec de l'eau tiède.

2. Ajouter le con- tenu d'un sachet de sel de rinçage Rhinicur®. Secouer jusqu'à ce que le sel soit dissout.

La solution de rinçage adéquate : 3. Ouvrir la valve Pour les rinçages du nez, il est en règle générale en tournant toujours conseillé d´utiliser une solution isotonique. vers le haut. La composition du sel de rinçage Rhinicur® est analogue à la composition minérale du sérum nasal et contient le sel de source naturel. Elle favorise 4. Appliquer l’em- d’une part les mécanismes d’épuration et de bout nasal sur la régénération des cellules de l’épithelium et reduit narine. Le liquide d'autre part les métabolites inflammatoires grâce de rinçage pénètre à sa concentration en ions hydrogénocarbonate. automatiquement Composition complexe minéral en g/kg : dans le nez et s’écoule vers Sel de source naturel 50, Hydrogénocarbonate de Sodium 205, l’extérieur par la seconde narine. Chlorure de Sodium 725, Sulfate de Potassium 20. • utilisation simple • dosage précis • rinçage à grand volume • pression de rinçage réglable individuellement • réutilisable

Pour une information complète consultez : Ecomar SA, 67, rue du Luxembourg, F-59777 Euralille [email protected] • www.rhinicur.com goldenBOOK21x27SNORL- 29/09/08 22:29 Page 77

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Le Laser en ORL

Pr. Charles FRÈCHE CEUR Ancien Chef du Service O.R.L. de l'Hôpital Foch Consultant O.R.L. à l'Hôpital Américain de Paris Membre de l'Académie Nationale de Chirurgie

Je me suis occupé du laser depuis 1975. Je vais vous décrire les différents types de laser et leurs indi- cations.

Le laser CO2 ses laryngées de l’enfant. Ils étaient couragea fortement dans cette la submergés par des malades venant entreprise. Il me présenta son sale En 1975 j’ai lu un article signé de tous les USA. Ce faisceau lumi- grand ami, CHIBRET qui avait un d’une équipe de Boston sur le laser neux invisible renforcé par un important laboratoire d’ophtalmo- . CO2 dans le traitement de la papil- hélium néon donnait un spot logie et il s’occupait également lomatose laryngée. Cet article du rouge permettant de voir où nous d’optique avec ses deux fils. Je me « Year Book » me fascina et je déci- étions. Le microscope volatilisait lit- retrouvai avec le dernier Jacques le con- dai d’aller sur place. J’en parlais à téralement les papillomes avec un CHIBRET comme sponsor et comme sachet Muler, mon ancien maître à minimum de traumatisme pour les relation directe bien décidé à faire inçage Trousseau qui les traitait à l’époque cordes vocales. Certains enfants un laser français et à le vendre en à l’azote liquide et qui me dit d’ailleurs plus grands avaient été France. Jacques LOTTEAU, ingé- squ'à « allez voir et vous m’en reparlez » décanulés en quelques séances. nieur chef de la SNCF (locataire de Mais la récidive habituelle de la l’hôpital Foch) fut un collaborateur J’écrivis à S. STRONG un des auteurs papillomatose obligeait à les passionné comme moi, et l’aven- a valve de l’article. Il était ravi de me rece- reprendre régulièrement mais ils ture commença. Nous fîmes six n’avaient plus de canule. mois d’expérience sur le chien nt voir à Boston. Je partis et restai un mois et demi à Boston. STRONG (durée, puissance, largeur du fais- ut. était un homme de haute taille, Boston en août était une ville très ceau, saignement...) excellent enseignant (il commen- agréable, la Nouvelle Angleterre à tait tous ses gestes) et excellent mes yeux, est à un étage supérieur Je souligne là qu’avec Jean BOU- aux autres états des Etats Unis que CHE nous avions relancé en 1965 l er l’em- opérateur. Il avait une équipe com- posée de deux Hongrois, un ORL et je connais bien. laryngoscopie en suspension de sur la le célèbre POLYANI, ingénieur qui Killian un an après Kleinsasser et liquide avait adapté la machine Laser au Quand j’ai demandé à VAUGHAN que nous avions donc une grande pénètre microscope opératoire un assistant pourquoi il ne faisait rien d’autre, il expérience de la laryngoscopie. uement Charles VAUGHAN qui traitait la me répondit « qu’il inaugurait s plus part des malades et un sta- cette technique et qu’il n’avait pas La direction de Foch accepté (cela narine. giaire portugais PAIS Clement de le temps d’essayer le CO2 sur d’au- ne lui coûtait rien) et avec l’accord Porto au Portugal qui lui resta deux tres lésions laryngées. POLYANI me du Ministère, l’intervention ans. STRONG était enchanté que sa proposa de me faire un laser humaine eut le droit de se réaliser. technique pouvait intéresser un comme le prototype mais le prix Donc près d’un an après STRONG français c’est-à-dire moi- même. Je était très élevé pour un universi- nous commençames, peu de papil- fus stupéfait de voir ou et com- taire français. Je décidai en ren- lomes car il était pratiquement ment se déroulait la séance laser. trant à Paris de faire un laser fran- tous à Trousseau, polypes, nodules, On commençait tous à 8 heures çais ce qui n’était pas une mince pseudomyxomes. Nous fîmes deux dans un sous-sol, pas du tout high affaire. séances par semaine. Le laser CHI- tech et pendant ce mois et demi, je BRET appelé Ferlux qui était à Foch, ne vis traiter que des papillomato- Mon patron Jean BOUCHE m’en- était scellé au mur et Lotteau avant

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inventé un laryngoscope isostatique avant de s’en servir. Les indications ser par SHARPLAN un laser micro- qui se calait sur la spatule, on voyait actuellement du CO2 ont évolué point superpulse qui correspond donc directement le larynx du dans trois directions. exactement aux idées que j’avais au malade. Le malade bien endormi ne début. pouvait pas bouger. Dans cette chi- 1°) Bien connu sur les lésions béni- rurgie laser j’ai retenu les éléments gnes, nous n’insisterons pas. Actuellement la technique est rodée suivants : le laser CO2 est dangereux avec en Europe un nombre très surtout pour l’oeil. Toutes les person- 2°) Les paralysies laryngées en ferme- important de cas. nes présentes dans la salle d’opéra- ture. Je fis une vingtaine d’aryténoï- J’eus le plaisir de voir POLYANI à tion devaient porter des lunettes. Il decotmie unilatérale, intervention Foch et je l’invitais à déjeuner à la ne doit être mis en marche qu’une lourde qui donnait une dysphagie Ferme du Mont Valérien. fois la spatule en place dans le mais qui ne récidivait pas. Jean GAIL- Etant plasticien diplômé, je n’ai larynx. Son faisceau doit être le plus LARD de Lyon fit une cordotomie jamais fait de laser cutané me petit possible et les impulsions les postérieure (une taille de la corde contentant de faire les rhinoplasties plus courtes également, la puissance vocale) devant l’apophyse vocale de que m’avaient appris Guy JOST qui minimale pour ne pas léser la l’aryténoïde d’un côté, intervention fut mon maître. muqueuse adjacente. Quelques cen- rapide, mais qui parfois peut récidi- taines de cas furent réalisées très ver. Je pense que cette méthode est Les autres indications du laser CO2 rapidement. Le Professeur VOURCH, tout de même meilleure. sont plus modestes à mes yeux. chef de l’anesthésie de Foch s’en occupait personnellement au début. 3°) Le traitement des lésions commis- Dans le ronflement la technique de surales antérieures mais avec cali- KAMAMI qui fait deux tailles vertica- Nous eûmes deux accidents graves. brage, en effet la synéchie se les de part et d’autre de la luette Avec le CO2 il faut couper l’oxygène reforme immédiatement. Le tube de pour la rétrécir n’a pas apporté de et passer uniquement en air. TRAISSAC permet de les récupérer. résultats majeurs et surtout très algi- Sinon si on n’a pas le tube de TRAIS- ques. Il faut plusieurs semaines et En effet malgré la protection de la SAC qui n’a pas eu le mérite qu’il très souvent les malades s’en vont sous glotte, nous fîmes exploser deux aurait dû avoir, je taillais un W à la dès la seconde séance. ballonnets et la sonde s’enflamma demande sur une radio avec un fils en torche. Je les arrachais à la de rappel rétrovélique et ceci faisait Sur les cornets le CO2 peut faire sai- seconde près, me brûlant sévère- l’affaire. Il faut le laisser au moins un gner. Il faut donc un autre laser. ment les mains. Les malades n’eurent mois. que des brûlures pharyngées, de la langue et des lèvres. Bien plus tard 4°) Le traitement du cancer cordal Les lasers YAG et DIODES cela m’arriva encore une fois à qui n’atteint ni la commissure anté- Hartmann. rieure ni postérieure avec mobilité Il en existe plusieurs familles cordale conservée. J’en fis un grand Noedyme, YA, Holmium, Erbium, Que fit VOURCH ? A ma grande sur- nombre, suivi de radiothérapie. Une KTP. Ils concernant le traitement de prise il publia dans une grande revue étude de BESNAINOU sur environ 80 la polypose nasale. Il est à noter américaine, des photos des sondes et cas donna des résultats étonnants. qu’avec Pierre ROUVIER, il y a plus de bien plus tard à Los Angeles au 15 ans nous avons lancé la chirurgie UCLA, Paul WARD, chef de service, 5°) A Naples, MOTTA fut plus auda- endonasale. Nous faisions un cours à me dit qu’il me connaissait de nom cieux, l’école française étant très pré- Foch grâce à LERAULT, JAKOBO- et me montra l’article qui était enca- cautionneuse et au CO2 il traita des WICZ, BANKOVA, ROUVIER et d’au- dré dans son bloc opératoire. cancers du ventricule en ôtant la tres collègues, une fois en Arles avec bande ventriculaire, de l’épiglotte l’équipe locale et l’année suivante à Le laser eut des adeptes en France. après scanner de vérification de la Foch et nous invitâmes très vite ce HAGUENAUER précocement décédé loge pré épiglottique, longeant avec que j’appelle moi le Quadra c’est-à- et PELLERIN à Nancy furent les deux son faisceau la face interne du carti- dire KLOSSEK, DESSI, SERRANO et suivants à suivre ma technique. lage thyroïde, donc pratiquement JANKOWSKI, les quadras de l’épo- une hémilaryngectomie. IL fut fort que, actuellement professeurs des Aujourd’hui il y a un grand nombre argumenté à Paris mais le temps universités. Seul SERRANO a utilisé le d’utilisations en France. Par contre semble lui avoir donné raison. La laser dans la polypose nasale. Cette pour pouvoir s’en servir il est impéra- radiothérapie était systématique. chirurgie est délicate, dangereuse tif de participer à quelques séances REMACLE que je vis souvent fit réali- pour l’oeil et la méninge. Faite sous

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microscoque et actuellement anesthésie locale, malade assis, vocale de la taille d’une lentille. endoscope, elle permet une excel- légère neurolept. Quelques papillomes mais avec un lente exérèse des lésions. Mais la résultat très modeste. Enfin les maladie est capricieuse, la forme la Dans le rapport que j’ai dirigé en pseudomyxomes mais nous n’avons plus grave étant la maladie de 2000, je cite quelques chiffres : pas revu un grand nombre de ces Vidal. Actuellement encore deux BANKOVA 600 malades dont 300 patients. Le diagnostic est posé soit écoles se contredisent sur les indi- polyposes à Holmium, 4 séances, en fibroscopie quand on est très cations les résultats. plus de 60 % de résultats, dans le habitué, ou par une minuscule Widal cela tombe à 30 % ce qui biopsie à la pince pointue de la - L’école chirurgicale c’est la nasali- n’est pas étonnant. Pas de cortico- boite. sation de JANKOWSKI qui a pris le thérapie mais une crénothérapie droit de cité sur toutes les autres au Mont Dore qui donne d’ailleurs Technique : injection d’hématopor- techniques, à juste titre avec une des résultats et dont peu en parle. phyrine 48 heures avant, qui ne corticothérapie endonasale défini- colore pas la lésion. tive (Rhinocort, Flixonase...) Dans les récidives après chirurgie, Mise en place du laryngoscope, 75 % de très bons résultats avec irradiation de 15 à 20 minutes avec - L’attitude Laser YAG : soit de pre- immunomodulation et crénothéra- le colorant visible dans le rouge mière intention, soit de rattrapage, pie. (630 NM). sans corticothérapie (le CO2 n’a pas Il est impératif que le malade ne sa place). Je suis surpris de la rela- JAKOBOWICZ, 549 malades au laser bouge pas du tout pendant l’irra- tive indifférence des ORL pour ces YAG ; sur 360 malades non opérés : diation. méthodes qui ont donné des preu- 29 % de récidive, sur 133 malades Il peut sortir le lendemain mais ves flagrantes. En fait les fabricants opérés : 55 % récidives donc encore l’hématoporphyrine donne une de laser les ont délaissés au profit plus que sur un malade non opéré, sensibilisation à la lumière. Donc d’autres lasers de chirurgie esthéti- dans la maladie de Widal : 77 % de écran total sur le visage, protection que plus rémunérateurs. récidive. Il travaille avec un fibros- des mains environ un mois. Les laser YAG sont en infrarouge cope et canal opérateur. On revoit le malade 15 jours plus invisible et méritent une amplifica- tard et le mois suivant. La lésion a tion complémentaire, seul le KTP Le laser DIODE est également uti- entièrement disparu avec une voix (532 NM qui est vert). lisé en laryngologie (810nm) Il normale. Mais il ne faut pas se leur- passe par un canal ou simplement rer la récidive peut revenir. L’holmium YAG qui est rare une aspiration. Nous avons fait environ une cen- (2100nm) est très absorbé par Ses indications sont les mêmes que taine de patients avec des résultats l’eau, il a un pic d’absorption par le CO2 mais il est plus au proche exceptionnels et aucune dyspho- l’eau. Selon BANKOVA on vaporise des lésions. Il faut être patient et nie. (Actuellement photofrin 1 et 2, ce que l’on voit et on voit ce que surtout ne pas monter l’intensité phtoscan). l’on vaporise. L’action tissulaire car il coupe plus que le CO2. Par dépend de la fluence. Il y en a peu contre il ne charbonne pas. Son Au total le laser en ORL n’est qu’un car il est très cher. Il est superficiel. action est à mi chemin entre instrument. On ne bâtit pas une Il a l’avantage découper l’os et le l’Holmium et le YAG. carrière sur un instrument mais sur cartilage donc de pénétrer dans une méthode thérapeutique qui l’ethmoïde. Le laser à colorant en 1986. m’a donné avec beaucoup d’effort Je suis allé à Détroit où il y avait un de grande joie pour mon équipe et Dans les lasers profonds il faut citer congrès mondial sur le laser. moi même. le YAG (1060), le KPT (532) et le Madame LEFEVRE me présenta laser Diode (810nm). Monsieur PRIN de laserscope qui Les difficultés d’approvisionnement me montra le laser à colorant. Je d’hématoporphirine malheureuse- Indications fus enthousiasmé par cet instru- ment nous ont obligées à interrom- Les lasers profonds sont dangereux ment. Lasercope m’en prêta un. Je pre cette superbe méthode que je pour traiter isolément la polypose fis les premiers avec DE CORBIERE, regrette vivement. parcequ’ils font un mur en béton mon bras droit à Foch qui prit la en cas d’intervention chirurgicale suite et fit sa thèse. Un bon nombre de nos patients ultérieure par contre il donne des pour ne pas encombrer le bloc ont résultats surprenants. Ils doivent Indications été fait à la clinique des Martinets à être manipulés avec prudence en Cancer du 1/3 médian de la corde Rueil Malmaison avec l’aide très

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efficace d’un de mes amis, gastro- Je dédie cet article à la mémoire du que je lui ai dit que je regrettais ne entérologue. Professeur Guy VOURCH, titulaire de pas les avoir gardé. Il les a retrouvées chaire, surnommé le « group captain » et donné les doubles en à fait un Je remercie SHARPLAN, LASERCOPE, car il était un des rares survivants du livre qu’il m’a dédicacé et en m’of- COHERENT, mes assistants fidèles débarquement à Ouistreham qui frant en même temps les mémoires sans lesquels je n’aurai rien pu faire, m’écrivit 30 à 40 lettres de remar- du Général De GAULLE avec cette DE CORBIERE, BANKOVA, JAKOBO- ques pour avoir troublé le bloc opé- phrase « J’y étais ». WICZ, CHABOUT, J. LOTTEAU (ingé- ratoire. Il avait bien sûr raison. Je nieur SNCF) n’avais pas gardé les lettres et lors-

, DEUX FACES D’UN MÊME SAVOIR-FAIRE

A l’heure où l’ORL fête son centenaire, nous sommes fiers de nous associer à cet anniversaire. Car si l’existence de la Société Ceredas remonte à quelques quinze ans seulement, nous avons le sentiment que, depuis lors, nos efforts ont eux aussi contribué à améliorer au quotidien la qualité de vie des laryngectomisés. Aujourd’hui, notre savoir-faire s’incarne dans l’existence du nez artificiel ou Filtre ECH* Cyranose®, une solution permanente qui permet de répondre efficacement aux conséquences de la laryngectomie. Il est également illustré par la protection trachéale jetable Tracheoclean™, un système de protection des voies respiratoires à usage unique destiné aux laryngectomisés et trachéotomisés, utilisable par les patients en période postopératoire comme après leur retour à domicile.

Eric BEZICOT * Echangeur de Chaleur et d’Humidité. Président Directeur Général

191, rue Adolphe Pajeaud • 92160 ANTONY • FRANCE Tél. : +33 (0) 1 42 37 11 12 • Fax : +33 (0) 1 42 37 90 91 Email : [email protected] • Internet : www.ceredas.com

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Traitement chirurgical du cancer du larynx au cours du XXe siècle

Pr. Henri LACCOUREYE Ancien Chef du Service d’ORL de l’Hôpital Laennec Paris

Quels sont, à la fin du XIXe siècle, les techniques du traitement chirurgical du cancer du larynx ?

Le miroir laryngé (Manuel Garcia, soit de haut en bas, technique de nérescence de lésions bénignes. La 1854), la lampe à incandescence Gluck et de son élève Soerensen biopsie sera discréditée pendant (Edison, 1879), le miroir frontal (1895) [1-4]. des décennies, on préférera la thy- réfléchissant la lumière vers l'or- rotomie diagnostique et curative à gane à examiner, plat (Hofmann et La maladie de l'Empereur Frédéric la biopsie endolaryngée et même Von Tröltsch, 1855) ou concave de Prusse (1888) sera un événe- pas de biopsies du tout ce qui don- (Clar, 1902) enfin la laryngoscopie ment important pour le diagnostic nera lieu à de regrettables erreurs. directe (Kirstein, 1895) pratiquée à et l'évolution du traitement chirur- L'importance d'un diagnostic pré- l'aide de tubes ou de spatules à gical du cancer du larynx [1,3,4]. coce, l'espoir de substituer à l'extir- RE lumière distale ou proximale sont à pation totale du larynx une inter- l'origine, à la fin du XIXe siècle, de Le diagnostic sera, après trois biop- vention de moindre importance, la naissance d'une nouvelle spécia- sies négatives et un diagnostic de relanceront la thyrotomie qui est lité, la laryngologie. Les observa- pachydermie, à l'origine de nom- remise en faveur en Angleterre, tions de cancers du larynx se multi- breuses discussions entre laryngo- en1894 par Butlin et Semon, et en plient, l'étude clinique et le traite- logistes allemands tenant de la France, par Brindel et Moure ment chirurgical du cancer du malignité et le laryngologiste en1895 [1,3,4]. larynx commencent vraiment [1-4]. anglais Morell Mackensie tenant de la bénignité. La conservation d'organe est déjà La thyrotomie, pratiquée pour la une préoccupation majeure des première fois par Pelletan en 1788, Les réactions politiques seront chirurgiens qui possèdent trois a été utilisée pour l'extirpation des importantes même jusqu'à nos grandes techniques pour traiter les tumeurs malignes du larynx par jours puisque Ned I. Chalat en 1984 cancers du larynx : la thyrotomie Bowes (1833), Braouers de Louvain (Laryngoscope 94 Octobre), provo- médiane avec cordectomie, l'hémi- (1834), Gordon Buck (1850), Solis- cateur comme McInnis [3,4] en laryngectomie décrite par Billroth, Cohen (1868). Responsable de très 1976, pose la question de savoir reprise et codifiée par Gluck et nombreux échecs, liés à de mauvai- quel a été le rôle de Morell Soerensen, enfin la laryngectomie ses indications, discréditée par Mackensie dans le déclenchement totale selon les techniques de Billroth et Morell Mackensie, elle de la première guerre mondiale. Gluck ou de Périer [2,3]. Butlin cède la place aux tentatives d'exé- décrit aussi en 1897 [2,7,8-10] une rèse totale du larynx. Billroth réa- Pour l'étude et le traitement du cordectomie avec aryténoïdecto- lise la première laryngectomie cancer du larynx, la maladie de mie par thyrotomie médiane que Y. totale, pour cancer du larynx, en Frédéric de Prusse sera à l'origine Guerrier codifiera sous le nom décembre 1873 et la première de nombreuses réflexions sur la d'hémiglottectomie. Solis-Cohen hémilaryngectomie en 1878 [1-4]. valeur des signes de début, sur l'in- de Philadelphie, qui sera le pre- Enfin deux grandes techniques de térêt de la biopsie et les multiples mier, en 1907, à emporter après laryngectomie totale sont décrites erreurs qui lui sont imputables, sur thyrotomie, avec la tumeur, le péri- en cette fin de siècle, soit de bas en son rôle possible dans la survenue chondre interne de l'aile thyroï- haut, technique de Périer (1890), de poussées évolutives et la dégé- dienne [4] rapporte, en 1897, une

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cricoaryténoïdectomie totale évidant le larynx en respectant le cartilage Tableau I thyroïde... avec mort en 48 heures Résultats des traitements chirurgicaux. [2,4,9]. Décès post- Survie à trois ans Lombard rapporte aussi des laryn- opératoire gectomies partielles dites « par mor- cellements ». Ce sont essentiellement 86 Laryngofissures 9,8 % 8,7 % des voies d'accès sur le larynx et sur- tout sur la couronne laryngée : telle 65 Résections partielles 26,3 % 11,8 % la pharyngotomie sous-hyoïdienne, utilisée d'abord par Prat (1859), puis 188 Résections totales 44,7 % 5,85 % Langenbeck (1862), Burow (1875) pour réaliser des épiglottectomies Les interventions se multiplient mais ses et l'anesthésie locale et régionale évoquant déjà une chirurgie par- les résultats ne sont guère encoura- de la face et du cou [2,4,10]. tielle horizontale, mais aussi pharyn- geants comme le montrent les statis- gotomie trans-hyoïdienne, pharyn- tiques rapportées par Sendziak en Cocaïne, novocaïne et adrénaline gotomie latérale. 1897 (tableau 1) [2,4]. ont complètement bouleversé la laryngologie et la chirurgie laryngée. En cette fin de siècle, il n'y a pas Les complications post-opératoires et Pendant plus d'un demi-siècle, la chi- d'autre traitement du cancer que le les erreurs d'indications expliquent rurgie partielle ou totale du larynx traitement chirurgical, et les chirur- ces résultats, au point que les inter- sera faite à l'anesthésie locale. giens, malgré les risques infectieux ventions sur le larynx seront très dis- multiplient les voies d'abord et les cutées et la trachéotomie palliative Certes, l'anesthésie locale améliore techniques d'exérèses. Mais les indi- souvent préférée à l'exérèse les suites opératoires mais celles ci cations restent imprécises bien que restent dominées par les complica- l'on sache déja que la thyrotomie tions infectieuses [2,1012] : pulmo- médiane avec cordectomie donne de Évolution du traitemet au cours naires et locales : suppurations, pha- bons résultats « pour le cancer de la du XXe siècle ryngostomes, nécroses trachéales, partie moyenne de la corde vocale médiastinites, mettent en jeu le pro- qui n'atteint pas la commissure anté- Dans l'évolution du traitement chi- nostic vital. Il faudra du temps pour rieure, reste en deçà du processus rurgical du cancer du larynx, un cer- que les travaux de Pasteur, sur les vocal, n'infiltre pas les tissus en pro- tain nombre de facteurs vont inter- germes microbiens et les travaux de fondeur et laisse à la corde sa mobi- venir et prendre une grande impor- Lister, sur l'asepsie, pénètrent les sal- lité » [1,2]. tance. Outre l'anesthésie et l'infec- les d'opérations [4]. tion qui seront étroitement imbri- Dans la seconde moitié du XXe siècle, L'extension locale est une contre- quées, interviendront aussi, les à l'infection et à l'anesthésie locale indication pour certains auteurs qui Rayons X, la localisation et la classifi- succèdent les antibiotiques et l'anes- n'opèrent que les cancers intrinsè- cation des cancers, enfin les métho- thésie générale. ques. D'autres interviennent dans les des d'examens. formes extrinsèques, encore que, L'infection régresse d'une manière pour Lombard, la durée de survie et - L’anesthésie et l’infection spectaculaire. Dans le même temps, les résultats éloignés invitent à quel- l'anesthésie locale disparaît. Elle est ques réserves [2]. A la fin du XIXe siècle, l'anesthésie est remplacée, le temps de former le générale à l'éther ou au chloro- corps des anesthésistes réanima- L'âge ne parait pas être une contre- forme. Les complications infectieuses teurs, par l'anesthésie générale avec indication si l'état général est bon. pulmonaires sont fréquentes, sans intubation, associée à une réanima- Gluck et Lombard [2] rapportent des compter les complications mortelles tion, de plus en plus efficace, qui interventions sur des sujets de 68 et [2]. prend en charge les suites opératoi- 70 ans. L'augmentation de la longé- res. vité en cette fin de siècle nous donne La cocaïne découverte par le une optique différente. Les contre- Viennois Jellineck en 1884, la novo- L'étude des décès post-opératoires indications sont avant tout les tares caïne simple, puis adrénalinée assu- [1,2,4,10,12,14,15,18] montre les pro- cardio-vasculaires, pulmonaires, rent, progressivement, au début du grès réalisés, souvent sur des séries hépatiques et rénales. XXe siècle l'anesthésie des muqueu- de malades très sélectionnés, grâce à

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La classification en trois étages n'a Tableau II pas été modifiée mais très rapide- Résultats des traitements chirurgicaux. ment sera isolée, dans la région sus-glottique, la margelle laryn- gée ou épilarynx. Cette région Décès post-opératoire Exérèse relève d'une étude clinique et radiologique distincte de celle de Partielles verticales Totales l'endolarynx. Comme le précisait Lombard au début du siècle [2], la Anesthésie générale 26 à 9 % 44,7 à 17 % symptomatologie, les extensions locales, ganglionnaires et le pro- Anesthésie locales de 0 % à 15 % de 1-2 % à 10-15 % nostic sont très différents de ceux de l'endolarynx encore que cer- Antibiotiques 0,5 % 4 % tains sièges relèvent des mêmes types d'interventions que les can- l'anesthésie locale, aux antibioti- La xérographie fera une apparition cers de l'endolarynx sus-glottique ques et bien sûr, à l'amélioration discrète [12] mais elle aussi dispa- [24-26]. des techniques chirurgicales raîtra avec l'apparition de la tomo- (tableau II). densitométrie et de l'imagerie par - Les classifictions des cancers du résonance magnétique qui révolu- larynx Ces résultats doivent être acceptés tionneront l'exploration radiologi- avec grande réserve. Ils témoignent que. En 1944 Pierre Denoix [63] pro- cependant de la nette amélioration pose une classification des can- des suites opératoires. - La localisation des cancers du cers. Révisées à diverses reprises, larynx les classifications de l'UICC et de - Les rayons X l'AJC codifient un langage com- Après Isambert (1877), Krishaber mun qui permet des études com- La découverte, en 1895, des rayons (1879), Fauvel (1875) [10], Etienne paratives. Elles ont une valeur X par Roentgen enrichit la méde- Lombard [2] distingue, en 1914, pronostique que confirment tou- cine et d'un nouveau moyen théra- deux grandes localisations : le can- tes les études, mais ne précisent peutique, la radiothérapie, le cer extrinsèque, marginal de pro- en rien une indication de techni- monopole chirurgical du traite- nostic peu favorable, les adénopa- que chirurgicale bien qu'elles ment du cancer du larynx disparaît, thies y sont précoces et pour ainsi jouent, dans cette indication, un et d'un nouveau moyen d'explora- dire constantes, et le cancer intrin- rôle important. tion, la radiologie, qui ouvre le sèque. Cette classification sera utili- grand chapitre de l'imagerie médi- sée jusqu'aux études d'Hajek Nécessaires, ces classifications cale. (1891), Most (1900) et surtout aux génèrent cependant de nombreu- travaux de Rouviére (1932) et de ses doléances [17, 18] du fait du Les clichés de profil pour les Leroux-Robert, Baclesse, Lederman caractère subjectif de fixation du tumeurs de l'épiglotte, puis les (1935-1939) [4,19-21] qui classeront stade T, de l'ambiguïté dans l'ap- tomographies de face [10,12,19-21] les cancers du larynx selon trois éta- préciation des mobilités laryngées, pour les tumeurs du ventricule ges anatomiques sous-glottiques, sujettes à discussions selon les habi- entreront, après la deuxième glottiques et sus-glottiques. Ainsi tudes, les services, les spécialités, guerre, mondiale dans le bilan des seront précisés, en fonction de ces expliquant pendant longtemps les cancers du larynx. étages, les barrières anatomiques difficultés et le peu d'impact des et les points de faiblesse à l'exten- études multicentriques, ainsi que Pendant plus d'un demi-siècle les sion tumorale extra et intra-laryn- les erreurs de classification entre indications du traitement chirurgi- gée, macroscopiques puis microsco- les Tis et les T1 et entre les stades T cal du cancer du larynx reposeront piques [18, 22, 23]. De la connais- [64-68]. La classification des cancers sur la palpation, l'examen radiolo- sance de ces modalités dépendent ne permet pas d'affiner les indica- gique et la laryngoscopie indirecte dans une grande mesure les indica- tions chirurgicales, rôle qui va reve- qui permet de pratiquer une biop- tions thérapeutiques et en particu- nir aux perfectionnements de l'exa- sie, à la pince, à la consultation, sur lier l'indication d'une chirurgie par- men clinique. le malade assis, sous anesthésie tielle. locale à la cocaïne au dixième.

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- Les perfectionnements de l’examen Évolution du traitement chirurgi- complications infectieuses pulmonai- clinique cal res et médiastinales et évaluer la résistance du patient, puis laryngec- Développés au cours du dernier Dans la première moitié du XXe siècle tomie, devient pour beaucoup de quart de siècle, ils permettent actuel- le traitement chirurgical du cancer chirurgiens la règle [2, 4, 8, 10, 12]. lement de mieux classer les stades du larynx est marqué par des progrès Portmann et Despond proposent tumoraux, de préciser l'extension visant à éviter les complications même une intervention en trois tumorale réelle et par suite, d'affiner infectieuses. temps -trachéotomie, laryngectomie les indications chirurgicales. A coté avec pharyngostomie et fermeture de la laryngoscopie indirecte, néces- - Les laryngectomies totales du pharyngostome 2 mois plus tard. saire pour parfaitement préciser les Ils font état, en 1937, de 100 % de mobilités laryngées, sont venus Pour les laryngectomies totales les succès post-opératoires sur 51 opé- s'ajouter, la laryngoscopie en suspen- chirurgiens [2, 3, 8, 10, 12], pendant rés. Leroux-Robert proposera aussi sion, qui, connue certes depuis le un demi-siècle, discutent des mérites une laryngectomie en trois temps : début du siècle avec les travaux de respectifs des méthodes de Périer ou trachéotomie, décollement pharyn- Kilian (1898), Chevalier Jackson de Gluck et précisent les limites de golaryngé et laryngectomie [3, 4, 8, (1907) [5], Lynch (1915), a repris un l'opérabilité. Ils apportent de nom- 10, 11]. nouvel essor avec les travaux breuses améliorations techniques d'Haslinger (1962) sur la microchirur- portant sur les incisions, les temps Dans la deuxième moitié du siècle, à gie laryngée [3, 4, 10, 12, 18, 55], les opératoires, l'attitude vis-à-vis des l'infection et à l'anesthésie locale endoscopes à fibres souples, l'exa- muscles sous-hyoïdiens, l'alimenta- succèdent les antibiotiques et l'anes- men au microscope, les optiques, la tion à l'aide de la sonde de Nélaton, thésie générale. La laryngectomie palpation du larynx et le choix des toujours utilisée en 1970. La suture totale se fait sous intubation, en un points des prélèvements biopsiques, pharyngée est proposée en 1900, temps, non plus en fonction des ris- avec, si nécessaire, un pelage biopsi- pour lutter contre l'infection selon la ques infectieux mais de bas en haut que, facilitant l'examen de l'ana- technique de Lambert [2] - points ou de haut en bas en fonction des tomo-pathologiste, orientant parfois séparés, au catgut fin, non trans- sièges tumoraux. La trachéotomie, le choix d'une technique chirurgi- fixiants, en deux plans muqueux et réalisée à l'anesthésie locale en cale. musculaire d'enfouissement -. Enfin début d'intervention, est repoussée le drainage, assuré par des mèches au moment le plus propice pour évi- Scanner et IRM précisent les exten- de gaze, parfois idoformées, les ter les décollements inutiles [28], sions tumorales macroscopiques et sutures cutanées, la stomie trachéale [29]. Le drainage n'est plus assuré sont un complément souvent utile donneront lieu à de nombreuses dis- par des mèches de gaze mais par les pour confirmer une indication chi- cussions visant à éviter la redoutable drains aspiratifs que Guy Jost, alors rurgicale mais ne sont pas toujours infection et à simplifier l'exérèse interne chez Henri Redon, met au concluants pour préciser de minimes totale du larynx. Ainsi seront décrites point en 1954 [30]. extensions, en particulier sous-glotti- de nombreuses techniques, de Tapia, ques, qui jouent un rôle important de MacKenty, qui, de 1908 à 1920, Les publications sur les techniques dans les indications de chirurgie par- développera particulièrement les des laryngectomies totales se raré- tielle. soins pré et post-opératoires, techni- fient. Elles sont remplacées par celles ques aussi de Colledge, Hautant, portant sur les techniques de réhabi- L'échographie proposée pour l'étude Aubry, Mundnich, Vasconcello- litation vocale qui visent à pallier la de l'envahissement de la loge hyo- Baretto, Hajek, Chiari... [4, 8, 10-12]. mutilation de l'exérèse totale du thyro-épiglottique est surtout utili- larynx [15]. sée pour l'exploration, ici aussi Le risque infectieux explique la dis- macroscopique, des aires ganglion- cussion du choix entre les techniques Cette réhabilitation commence avec naires. chirurgicales en 1, 2, ou 3 temps. Dès Billroth qui demanda à Gussenbauer 1903, protéger les voies aériennes de lui fabriquer un larynx artificiel Tous ces examens, sans compter la inférieures, sitôt la trachée ouverte, [3, 8]. Elle reposera pendant long- vidéo endolaryngée et bientôt la est un impératif. Certes trachéoto- temps sur la voie oesophagienne vidéo de l'intervention, devront-ils mie et laryngectomie, dans un même après que Gutzmann ait présenté, en être prescrit par un médecin tiraillé temps, selon la technique de Périer, 1909, 20 malades opérés par Gluck entre le coût médical, l'éthique est une technique toujours utilisée. qui avaient réappris à parler [3]. médicale et la plainte déposée Mais l'intervention en deux temps, Après le temps des prothèses laryn- auprès des tribunaux ? trachéotomie pour faire barrage aux gées externes et internes, des larynx

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artificiels électroniques et des l'abord de l'endolarynx en résé- l'indépendance relative des deux amplificateurs de la voix, les procé- quant l'angle antérieur du carti- hémilarynx glottiques, ne peut évo- dés de réhabilitation vocale repo- lage thyroïde. luer. sent, actuellement, soit sur une fis- tule trachéo-oesophagienne main- Progressivement, au cours du siè- Avant la classification des cancers tenue perméable par un implant cle, seront individualisées trois du larynx, les indications des exérè- phonatoire dont il existe de nom- grands types d'interventions [4, 8, ses partielles du larynx restent, breux modèles, soit sur une simple 11-16] : la thyrotomie avec cordec- comme au début du siècle, assez fistule chirurgicale [3, 4, 8, 12, 16- tomie, uni ou bilatérale, intéres- souvent imprécises, ce qui explique 18, 31, 32]. Les indications de ces sant ou non l'aryténoïde, les laryn- la discordance des résultats : de 76 % techniques doivent être discutées gectomies partielles verticales : de survie à 3 ans pour Saint Clair avec la technique de shunt trachéo- fronto-latérale ou frontale anté- Thomson [1930], pour des malades laryngo-pharyngé décrite par rieure qui résèquent un fragment sélectionnés, à 31 % pour Hofer Pearson [33, 34]. Enfin les trans- de cartilage thyroïde, symétrique [1935], pour le tout venant, [4, 8, plantations du larynx ont fait l'ob- ou non par rapport à la ligne 10, 12, 14]. Tous les auteurs signa- jet de nombreux travaux, mais, à ce médiane mais qui ne résèquent pas lent que les résultats sont très bons jour, la tentative de Kluyskens en de cartilage cricoïde. La frontale pour les bourgeons du tiers moyen 1969 n'a pas eu de suite [3, 18]. antérieure, décrite par Tapia en de la corde vocale mobile mais que 1922, reprise par Clerf de l'échec progresse en fonction de - La chirurgie partielle verticale Philadelphie en 1940 puis en 1947 l'extension tumorale et des trou- par Leroux-Robert, indiquée pour bles de mobilité, 30 à 40 % Le développement des techniques les tumeurs prenant les deux cor- d'échecs locaux lorsque la corde de chirurgie partielle verticale mar- des vocales, sera abandonnée en vocale est fixée [12, 14, 15, 18]. que la première moitié du XXe siè- raison d'échecs fréquents et de sté- Albert Hautant et Maurice Aubry cle. La chirurgie partielle dite verti- noses laryngées [14]. Elle reprendra précisent bien mais que c'est la cale repose sur l'indépendance vie dans la seconde moitié du siè- fixité aryténoidienne qui contre- relative droite et gauche de la cle. Enfin les hémilaryngectomies : indique toute chirurgie partielle, glotte et vise au traitement du can- type Gluck-Soerensen qui, après cette notion n'apparaît pas dans les cer de la corde vocale. thyrotomie médiane, résèque classifications actuelles [11, 12]. hémithyroïde et hémicricoïde. Elle Pour conserver, dans 60 % des cas A partir de la thyrotomie médiane, nécessite un temps de reconstruc- et plus, le larynx, les chirurgiens les chirurgiens [4, 8, 10-12] vont, tion et sera abandonnée même par préfèrent courir le risque d'un très rapidement, concevoir toute l'école allemande, ou type Hautant échec local, quitte à le rattraper une gamme d'interventions moins qui ne résèque qu'un fragment de par une laryngectomie totale. Ils mutilantes que la laryngectomie cartilage thyroïde et d'anneau cri- signalent aussi que l'échec gan- totale pour traiter les tumeurs coïdien. Elle sera souvent abandon- glionnaire accompagne ou succède étendues de la corde vocale. Seront née au profit de la frontolatérale souvent à un échec local traité et ainsi décrites de nombreuses tech- de Leroux-Robert. Enfin canule et guéri. Enfin que les patients guéris niques de thyrotomies élargies méchage de type Mickulicz sont localement ne sont pas à l'abri de réséquant une portion plus ou obligatoires dans cette chirurgie métastases à distance et de nou- moins étendue d'aile thyroïdienne, partielle verticale. veaux cancers [12]. par Jack de Londres en 1916 et sur- tout par St Clair Thomson et Dans la deuxième moitié du siècle, Après la classification des cancers Colledge [1930] mais aussi par la chirurgie partielle verticale, sauf en stades, les résultats publiés Nager, Kahler, Chevalier-Jackson. cas particuliers, est faite, progressi- paraissent satisfaisants avec des [4, 7, 8, 10-12]. Sébileau en 1922 vement, sous anesthésie générale survies à 5 ans qui varient de 70 à décrira une laryngectomie écono- et sans trachéotomie ni pré, ni per, 90 %, d'autant que les suites opé- mique- thyrotomie médiane et exé- ni post-opératoire et bien sur sans ratoires ont été améliorées par les rèse à la demande de la tumeur Mickulicz [13-18, 28, 29]. De nom- antibiotiques et que la chirurgie de endolaryngée- qui malgré quel- breux procédés de restauration rattrapage efface les échecs. Car, ques déboires sera encore prati- glottique visant à améliorer l'émis- quelle que soit la technique de chi- quée après la deuxième guerre sion vocale sont décrits [14, 16, 18]. rurgie partielle verticale proposée, mondiale sous le nom de laryngec- Mais les techniques de chirurgie les échecs restent nombreux. Le tomie partielle élargie [8, 10, 12]. partielle verticale stagnent, car le pourcentage d'échecs locaux varie Hautant aura l'idée de modifier concept de cette chirurgie, bâti sur de 2 à 18 % pour les T1 et de 4 à

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24 % (pour les T2) et toujours près de Certes les tactiques des laryngecto- tale antérieure », conservant la par- 40 % lorsque la corde vocale est mies partielles sus-glottiques évolue- tie postérieure des ailes thyroïdien- fixée [66, 67, 69, 71, 72, 75]. ront avec le temps et les opérateurs nes, correspondant au versant pha- mais la stratégie du traitement chi- ryngée du sinus piriforme, initiée Régulièrement de nouvelles techni- rurgical des tumeurs sus-glottiques en1950, puis en1954, par Hoffmann ques d'hémilaryngectomies sont est bien établie. Saguez [41], [42], reprise et précisée décrites, telle en 1986 l'intervention par Kambick, Tucker, B. Guerrier, G. de Biller, laryngectomie partielle Aux laryngectomies partielles supra- Bolot [32], [44-48], Simon [Ann étendue à l'hémi-cricoïde et recons- glottiques, il faut associer les laryn- Otolaryngol Chir Cervicofac 1997 ; truction avec le cartilage thyroïde gopharyngectomies partielles supra- 114 : 3-6] chacun apportant, le plus qui donne à 2 ans 73 % de survie, glottiques qui s'adressent surtout souvent, une technique de recons- 15 % d'échecs locaux et 1 échec gan- aux tumeurs de la margelle latérales truction différente. glionnaire (Laryngoscope, 1986 ; 96 : et résèquent, en plus, le carrefour 61-64). Comme dans la première des replis et la partie sus-glottique La technique réséquant entièrement moitié du siècle, certains espèrent du sinus piriforme. La résection peut le cartilage thyroïde sur un complément de radiation être étendue si nécessaire à la paroi Conservant une partie de l'épiglotte, pour éviter l'échec ou sur une chirur- pharyngée [40]. Dans toute la chirur- proposée, en 1959, par Majer et gie de rattrapage pour le traiter [12, gie partielle supra-glottique, les cor- Riedel (1957) [43], elle a été codifiée 14, 15, 18]. des vocales et les aryténoïdes doi- par JJ Piquet (1974) [49]. vent être mobiles. - La chirurgie partielle horizontale La chirurgie partielle horizontale de La chirurgie partielle horizontale des Si la première moitié du siècle a été l'étage glottique étages glotto-sous-glottiques marquée par le développement des Pour le cancer de la corde vocale, le Technique de Foederl [18], qui, en techniques de chirurgie partielle verti- concept d'une chirurgie partielle ver- 1899 résèque cartilages thyroïde et cale, la deuxième moitié du siècle est ticale, unilatérale, dont on a multi- cricoïde et suture le premier anneau marquée par le développement des plié les techniques, sans en améliorer trachéal à l'épiglotte et à l'os hyoïde techniques de chirurgie partielle hori- les résultats, va être complété par le Cette technique, codifiée par zontale portant sur les étages du larynx. concept de cancer de l'étage glotti- Serafini [ 54] sous le nom de trachéo- que du larynx relevant d'une chirur- hyoïdo-épiglottopexie et pour La chirurgie partielle horizontale de gie partielle horizontale. laquelle le malade devait conserver l'étage sus-glottique Ces techniques en ont été décrites une canule trachéale ce qui la rap- Elle découle des travaux de Rouvière sous des noms divers : laryngectomie procherait des techniques de shunt (1932) sur les lymphatiques du larynx subtotale conservatrice [41], laryn- de Pearson, semble actuellement très et leurs voies de drainage, anatomo- gectomie reconstructive [42], laryn- peu utilisée. topographiques de Leroux-Robert gectomie permettant de conserver la (1935) et radiologiques de Baclesse perméabilité respiratoire (la cricco- Ces interventions prennent place (1939). A leur technique sont atta- hyoïdopexie) [43], crico-hyoïdo-épi- entre les classiques laryngectomies chés les noms de Huet (1938), Alonso glottopexie [44], subtotale fonction- partielles verticales et les laryngecto- (1947), Leroux-Robert (1955), (1956), nelle avec CHEP [45], partielle supra- mies totales. Ogura (1958) [4, 8, 18-20, 21, 35-39]. cricoïdienne avec CHEP [40]. La chirurgie partielle horizontale des Le concept regroupe l'épiglottecto- Trois grandes techniques de chirur- étages glotto-sus-glottiques mie, l'hyothyroépiglottectomie et la gie partielle horizontale de l'étage Ici aussi, deux grandes techniques laryngectomie partielle horizontale glottique peuvent être individuali- peuvent être individualisées en fonc- supraglottique. Ces interventions ne sées en fonction de résections cartila- tion des résections cartilagineuses : se différencient que par une résec- gineuses : tion plus ou moins importante de La technique avec résection totale du cartilage thyroïde et une exérèse La technique avec résection partielle cartilage thyroïde. pouvant aller en arrière jusqu'à du cartilage thyroïde Décrite, en 1971, par Jean Labayle entamer et même réséquer l'aryté- - soit résection horizontale de la [50-52], elle résèque avec le cartilage noïde au dessus de l'apophyse glottectomie horizontale de Calléaro thyroïde l'étage sus-glottique, la vocale. L'horizontalisation des (1978), ou trans-laryngée glottique loge hyo-thyro-épiglottique et ciseaux permet de passer d'une tech- de Traissac (1984) [18], l'étage glottique du larynx. Décrite nique à l'autre [40]. - soit résection verticale, type « fron- sous des noms divers : laryngectomie

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totale avec reconstitution [50], les adapter, pour éviter un échec, tés des cordes vocales ou de la mar- laryngectomie totale reconstruc- non pas simplement au stade gelle était déjà pratiquée à la fin tive [51], laryngectomie subtotale tumoral mais à l'extension tumo- du XIXe siècle et au début du XXe reconstructive [52], subtotale fonc- rale réelle. siècle par de nombreux auteurs : tionnelle avec CHP [49], enfin par- Fraenkel (1895), Lynch (1914), tielle supra-cricoïdienne avec CHP Les antibiotiques, les progrès de Okada (1922), Manschnick (1935), [40] qui précise mieux l'étendue de l'anesthésie réanimation ont réduit [2, 4, 12, 18]. Fraenkel en 1896 rap- l'exérèse et les différencient des les contre-indications du traite- porte, pour des tumeurs de la partielles supra-glottiques qui, ment chirurgical du cancer de l'en- corde vocale, 4 patients guéris sur 9 comme toutes les interventions de dolarynx. Les troubles de dégluti- opérés. Le Jeune en 1946 présente, chirurgie partielle, sont subtotales, tion et l'infection pulmonaire sont sur 39 malades, 19 vivants à 5 ans fonctionnelles et recontructives. fréquents dans la chirurgie par- [12]. Elle est indiquée dans les tumeurs tielle surtout lorsque un aryténoïde glotto-sus-glottiques et aussi sus- a été résèqué, en particulier après Dans la deuxième moitié du XXe siè- glottiques et prend place entre les une chirurgie horizontale supra-cri- cle, les progrès de la laryngoscopie laryngectomies horizontales supra- coïdienne. Il faut savoir y pallier car en suspension, de la microchirurgie glottiques et les laryngectomies ils sont responsables de la plupart laryngée (Kleinsasser, 1963), les tra- totales. des décès. Certaines interventions vaux de Jako, de Strong (1972) et doivent être très discutées chez les en France de Muller, de Frèche, ont Les techniques avec résection par- grands insuffisants pulmonaires et poussé les laryngologistes à traiter tielle du cartilage thyroïde chez les sujets âgés chez qui, sou- avec le laser certains cancers des Connues sous des noms divers : vent, une détérioration de la cordes vocales et de l'épiglotte [18, hémilaryngectomie étendue déglutition apparaît et progresse 55]. Le laser a d'abord été réservé à (Iwai1970), laryngectomie des trois avec l'âge. des lésions limitées : bourgeon du quart (Bocca, 1971 - Ogura, 1974), tiers moyen de la corde vocale, laryngectomie subtotale (Dedo La mortalité a nettement régressé, lésions limitées du bord libre de 1975), laryngectomie verticale sub- puisque à la fin du siècle elle est l'épiglotte ou récidive limitée après totale (Czigner 1984), [16,18]. Le évaluée à 0,5 % pour les partielles chirurgie partielle ou radiothéra- plus souvent ces techniques résè- verticales, 2 à 5 % pour les supra- pie, et aussi au traitement d'ur- quent les structures sus-glottiques glottiques, 3 à 7 % pour les supra- gence des dyspnées liées aux d'un coté et sous-glottique de l'au- cricoïdiennes et à 4 % pour les tumeurs obstructives du larynx [56, tre. Elles associent des temps de laryngectomies totales [15]. La 57]. Divers laryngologistes, Steiner, partielles verticales et de partielles mortalité est liée à des causes Zeitel, Davis, ont étendu à des horizontales supra-glottiques ou diverses locales ou générales sans lésions T2 et même T3 glottiques et supra-cricoïdiennes. véritables causes majeures. sus-glottiques le traitement au laser, alors souvent complété par Ainsi, dans la deuxième moitié du Certes la mortalité a très nette- radiothérapie [55]. Dans les travaux siècle la chirurgie partielle du ment diminué mais les complica- actuels le traitement du couple larynx, réservée aux seuls cancers tions restent trop fréquentes [15], tumeur-ganglion n'est pas encore de la corde vocale, est étendue aux non pas tant pour les partielles ver- précisé. La fréquence des échecs cancers des étages sus-glottiques et ticales mais pour les laryngectomies locaux, pour les T1 de 4 à 20 % et glottique du larynx jusque là traités totales ou des chiffres de 5 à 24 % pour les T2 : 15 à 25 % (Motta, par laryngectomie totale. Le pro- d'infections locales, 3 à 32 % de fis- 1990), tous échecs nécessitant une grès n'est plus seulement techni- tules et 2 à 8 % de pharyngostomes laryngectomie totale de rattra- que, la chirurgie partielle horizon- témoignent trop souvent d'insuffi- page, doit faire discuter l'utilisa- tale du larynx ouvre une nouvelle sances dans l'asepsie et la techni- tion du laser, dès lors qu'une inter- stratégie dans le traitement chirur- que opératoire. vention partielle, n'entraînant pas gical du cancer du larynx et plus de troubles fonctionnels et apporte une pierre majeure au - La chirurgie endoscopique. donnant de meilleurs résultats car- concept de la préservation d'or- Le laser cinologiques peut être indiquée gane. Il reste au laryngologiste à pour la tumeur et pour les aires connaître parfaitement les diffé- A côté du traitement du cancer du ganglionnaires. rentes techniques des laryngecto- larynx par voie externe, l'exérèse mies partielles verticales, partielles par voie endoscopique, en laryn- Cependant en 1994 [58], une étude horizontales et totales et à savoir goscopie directe, des cancers limi- américaine portant sur 8 139 can-

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cers du larynx montre la place que ments qui confirment l'existence de ont eu le mérite de développer la prend le laser aux USA dans le traite- micrométastases, uni ou bilatérales, chirurgie laryngée partielle et totale ment de ces tumeurs. dont la fréquence augmente en en terrain irradié [8, 78-81] et par Comparativement aux laryngecto- fonction du siège et du stade tumo- suite les techniques des lambeaux mies partielles et totales, il est le trai- ral [4, 15, 17, 18, 60-62]. Connues cutanés et myocutanés. tement le plus utilisé, certes pour les depuis Etienne Lombard [2, 4, 8, 15, stades 0 (dysplasies in situ et cancers 17], ces micrométastases expliquent Le développement des techniques de intraépithéliaux), mais aussi pour les les échecs ganglionnaires, survenant chirurgie partielle, le traitement chi- stades I et II des tumeurs glottiques après contrôle de la tumeur primi- rurgical systématique des aires gan- et sus-glottiques et ce surtout chez tive, en l'absence de traitement chi- glionnaires, l'utilisation de la chimio- les sujets âgés de 70 ans et plus. Dans rurgical des aires ganglionnaires et thérapie font actuellement réserver, cet article, où les échecs et la conser- même après complément de radia- pour beaucoup d'auteurs, le complé- vation d'organe ne sont pas nette- tions. ment de radiations seulement aux ment étudiés, on relève le peu d'uti- adénopathies multiples et/ou en rup- lisation de la chirurgie partielle et de L'exérèse de ganglions sains, le trai- tures capsulaires. Qu'il s'agisse de la chimiothérapie et l'auteur plaide tement bilatéral des aires ganglion- chirurgie endoscopique ou de chirur- pour étudier la valeur d'une chimio- naires expliquent la place prise par gie partielle par voie externe, la thérapie adjuvante, d'induction, de les techniques d'évidements fonc- radiothérapie ne doit pas être utili- sensibilisation et de maintenance tionnels proposés par Suarez en sée pour masquer, dans les cancers pour éviter, les métastases, les nou- 1964, introduits en Europe par de l'endolarynx, une erreur d'indica- velles localisations et améliorer la Agazzi, Bocca et Gavilan [4, 8, 17-18]. tion ou une faute de technique, que survie. Etendus parfois à la résection de la en général la radiothérapie ne rat- veine jugulaire interne, limités par- trape guère et qui surtout gêne le - Le traitement chirurgical des aires fois après un examen histologique traitement de l'échec, si ce dernier ganglionnaires extemporané, dont il faut se rappe- survient. ler que seul un résultat positif a une Malgré la publication de Crile qui, en valeur formelle, ces évidements ont La chirurgie et la radiothérapie ont 1906, dans le « Journal of American pris une place majeure dans le traite- été au cours du XXe siècle le traite- Medical Association » [4, 8, 18], ment des aires ganglionnaires N0, ment du cancer du larynx. Les pro- décrit la technique de l'évidement N1, N2. grès de la biologie, de la génétique radical, malgré les travaux de Gluck les relégueront, peut-être au cours (1913) qui, dans les cancers intrinsè- Enfin, de nombreux travaux du XXIe siècle et sûrement au cours ques du larynx, résèque systémati- [15,17,18,59-62] ont insisté sur l'im- du troisième millénaire, au rayon des quement les ganglions prélaryngés portance pronostique du volume, de antiquités. et carotidiens et, si nécessaire, la la multiplicité, de la fixité, de la bila- veine jugulaire et même la carotide téralité et de la rupture capsulaire de La chimiothérapie [2], le traitement chirurgical des aires l'adénopathie et ont montré que les Utilisée depuis longtemps dans le ganglionnaires dans le cancer du récidives ganglionnaire, souvent au- traitement des cancers du larynx [82- larynx n'est pas franchement soulevé dessus des ressources chirurgicales, 84], elle a pris son essor, en 1981, à la pendant la première moitié du siè- et les métastases sont la rançon de suite des travaux d'Al Saraff [85]. cle. Les résultats ne prennent pas en l'envahissement ganglionnaire. Utilisée en induction avant la chirur- compte ce traitement qui n'acquerra gie partielle ou totale, elle ne pré- droit de cité que lorsque sera vrai- - Les associations avec la radiothéra- sente pas les mêmes inconvénients ment maîtrisée la lésion primitive [2, pie et avec la chimiothérapie que la radiothérapie et a comme 4, 8, 12]. intérêt d'orienter le traitement. Elle La radiothérapie ouvre une nouvelle conception dans Au milieu de notre siècle, l'évide- En association avec la chirurgie par- la stratégie du traitement du cancer, ment s'imposera dans les cancers de tielle et la chirurgie totale, elle a été longtemps condamné au face à face l'endolarynx, avec la pratique de utilisée par de très nombreux chirurgie-radiothérapie. En fonction l'évidement ganglionnaire, d'abord auteurs en pré en post-opératoire et du siège, du stade tumoral et de la unilatéral avec les travaux de Hayes en sandwich, tant pour la tumeur réponse à la chimiothérapie seront Martin (1951) Ogura (1952), Alonso primitive que pour les adénopathies dicutées la radiothérapie, la chirur- (1952), Pietrantoni et Agazi (1953), sans qu'on ait pu statistiquement en gie partielle ou totale ou même la puis bilatéral préconisé par Gius et préciser l'intérêt [12, 14-15, 17-18, chimiothérapie exclusive dont de Grier de Portland [1950]. Tous évide- 78]. Les radiations à doses curatives nombreux travaux ont montré que le

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possible échec ne pénalise en rien point de départ d'un cancer de - l’importance de l’échec local le patient [86-88]. En l'absence l'endolarynx et quel que soit son d'échecs, une chimiothérapie exclu- stade, une laryngectomie totale est Au début du siècle, la survie, liée sive est le garant d'une conserva- actuellement indiquée lorsque avant tout à l'échec local, était le tion parfaite de la fonction et de l'aryténoïde est immobile et non seul événement jugeant du résultat l'organe et est le premier accroc au pas lorsque la tumeur atteint l'ary- du traitement. En cette fin de siè- monopole de la chirurgie et des ténoïde, lorsque la loge hypothyro- cle, où l'échec, dans le cancer de radiations dans le traitement du épiglottique est très massivement l'endolarynx, devient rare, c'est lui cancer du larynx. envahie et non simplement enva- seul qui permet de juger de l'effica- hie et enfin lorsque la région sous- cité d'un traitement et non plus la - Résultats glottique est nettement dépassée seule survie. Il est important en chi- dans les cancers glotto-sous-glotti- rurgie partielle d'éviter un échec La classification des tumeurs, les ques, ou, plus rarement, lorsque la local. Certes il est classique d'avan- perfectionnements des examens et tumeur est de siège sous-glottique. cer qu'il peut être rattrapé parfois la multiplication des techniques Dans certains cas, les techniques de par une exérèse partielle, plus sou- chirurgicales ont permis d'affiner Pearson, de Sérafini peuvent être vent par une exérèse totale, mais les indications chirurgicales, de envisagées avant d'en arriver aux une étude récente parue dans comparer les résultats et de juger techniques de réhabilitation vocale Cancer en juin 1999 [75] montre de leur évolution dans le temps. avec implant phonatoire. que tout échec local pénalise nette- ment le patient. Les résultats du traitement chirur- Dans tous les autres cas, il existe gical du cancer du larynx ne sont une chirurgie endoscopique au Cette étude, sur 25 ans, compare pas simples à analyser. Ils sont laser ou un chirurgie partielle par 103 patients ayant présenté un variables selon le T et le N, varia- voie externe, qui, de la chirurgie échec local (groupe I) et 311 bles selon le siège tumoral, d'au- partielle verticale à la chirurgie patients (groupe II) sans échec local tant que les résultats des cancers de partielle horizontale, s'adapte au après une chirurgie partielle verti- l'endolarynx et de la margelle sont siège tumoral, à l'extension tumo- cale pour des stades I et II des can- le plus souvent associés, variables rale réelle et non pas simplement cers glottiques. La survie actuarielle selon les méthodes de calcul statis- au T. Depuis plus de 20 ans, de très à 10 ans est de 30,8 % pour le tique utilisées (globales, corrigées, nombreuses études [17, 40, 65, 69- groupe I et 63,1 % pour le groupe II, actuarielles, pondérées), variables 74] portant sur les échecs de la chi- le taux actuariel à 10 ans de contrôle selon les associations, radiothéra- rurgie partielle verticale du larynx ganglionnaire est de 70,2 % et pie, chimiothérapie. Les échecs sont et l'apport de la chirurgie partielle 96,1 %, enfin le taux actuariel sans mal ou rarement comptabilisés et horizontale, ont permis de mieux métastases à distance est de 80,2 % les comparaisons sont bien difficiles cerner les indications chirurgicales et 96,7 %. L'analyse des causes de à saisir bien que, par rapport au sur le plan local et sur le plan gan- décès montre qu'ils sont liés après début du siècle, l'amélioration des glionnaire d'autant que l'atteinte un échec local au traitement résultats soit parfois spectaculaires. du cartilage thyroïde et l'adénopa- (7,7 %), à la récidive locale ou gan- thie ne sont plus des contre-indica- glionnaire (25 %), aux métastases à tions à une chirurgie partielle. distances (19,3 %), aux nouvelles Conclusions localisations (19,3 %), alors que, en Au point de vue ganglionnaire, l'absence d'échec local, les causes Pour conclure ce XXe siècle et sur- pour les cancers de la corde vocale de décès sont respectivement de tout ne pas anticiper sur le suivant, il vaut mieux traiter, outre le gan- 2,3 %, 3,4 %, 5,7 % et 32,7 %. j'insisterai sur deux points : les indi- glion pré-laryngé, les aires gan- Cette étude confirme que dans le cations chirurgicales et l'impor- glionnaires unilatérales jugulocaro- cancer du larynx, comme dans tous tance de l'échec local. tidiennes et récurentielles lorsque les cancers des voies aéro-digestives la corde vocale présente des trou- supérieures, l'échec local favorise - Les indications chirurgicales bles de mobilité [59-61, 71-74]. les échecs ganglionnaires et les Toutes les autres lésions endolaryn- métastases [76, 77]. En l'absence Il est nécessaire, dans les indica- gées relèvent, au point de vue chi- d'échec local prédominent les nou- tions chirurgicales, d'adapter la rurgical, d'un traitement bilatéral velles localisations qui font, avec technique chirurgicale à l'extension des aires ganglionnaires de prin- les progrès de la thérapeutique, de tumorale réelle et non simplement cipe ou de nécessité [15, 17, 40, 59, la maladie cancéreuse une maladie au stade tumoral. Quel que soit le 60-61]. chronique.

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En cette fin de siècle le laryngolo- [8] Guerrier Y, Arnoux B. Histoire des can- [21] Leroux -Robert J. Les épithéliomas giste doit certes guérir le patient de cers du larynx et du pharynx et de leurs trai- intra-laryngés. Etudes comparées clini- la tumeur pour laquelle il est venu tements. Les Cahiers d'ORL 1980; 15 ; no 1. ques, radiographiques et anatomo-topo- consulter. Il doit aussi préserver au graphiques. Thèse Paris 1936, 172 p. Doin [9] Solis Cohen. Annales des maladies de Editeur. mieux les fonctions physiologiques l'oreille et du larynx, 1897, II, p. 370. du larynx, éviter les échecs locaux et [22] Luboinski B. Les modalités d'exten- ganglionnaires qui mettent en jeu le [10] Canuyt G. Les maladies du Larynx, sion des cancers du larynx. Analyse histo- pronostic vital et sont précurseurs de Paris, Masson, ed., 1939 (bibliographie). pathologique et statistique de 120 pièces métastases. Il doit enfin garder des opératoires de laryngectomie totale. armes pour de nouvelles localisa- [11] Aubry M. Chirurgie de l'oreille, du Thèse Médecine ; Paris 1973. tions. nez, du pharynx et du Larynx, Paris, Masson, ed., 1949. [23] Luboinski B, Sancho H, et coll. Modes of invasion of cancer of the larynx. A sta- Conserver la fonction, si ce n'est l'or- [12] Piquet J, Terracol J. Les Maladies du tistical, histological and radioclinical. e gane aura été tout au long du XX Larynx, Paris, Masson, ed., 1958 (biblio- Analysis of 120 cases. Cancer 1976; 38: siècle le but des laryngologistes. graphie). 346-60. Comme l'écrivait Lombard [2] au début du siècle « les progrès ne se [13] Leroux -Robert J. La chirurgie conser- [24] Brasnu D, Beutter P, Bodard M, L sont pas établis sans efforts, sans vatrice par laryngofissure ou laryngecto- accourreye H. Les épithéliomas de la mar- tâtonnements, sans méprises et sans mie partielle dans le cancer du larynx. gelle laryngée : définition, classification, polémiques ardentes ». J'espère que Ann Otolaryngol Chir Cervicofac 1957; 74: extension. Ann Otolaryngol Chir 40-74. Cervicofac 1980; 97: 963-76. ces polémiques ardentes se perpé- tueront car il n'y a rien de plus dés- [14] Cancer du larynx ; Rapport au 7e [25] Brasnu D, Beutter P, Bodard M, agréable pour l'esprit humain et le Congrès international d'Oto-laryngolo- Laccourreye H. Les épithéliomas de la progrès médical que le plus petit gie. Paris 1961, Karger édit., Bâle. margelle antérieure. Ann Otolaryngol commun dénominateur conceptuel, Chir Cervicofac 1980; 97: 977-93. c'est-à-dire le morne consensus, sur- [15] Pinel J, C achin Y, L accourreye H. tout lorsqu'il peut être imposé. Cancers du larynx. Rapport de la Société [26] Brasnu D, Beutter P, Bodard M, Française d'Oto-rhino-laryngologie et de Laccourreye H. 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1957-1998….2008 : la surdité

Pr. Alain MORGON 69 - Lyon

Ma carrière professionnelle a cou- permet aux centres nerveux audi- Acoustico-facial, du conflit neuro- vert à peu près la deuxième moitié tifs de contrôler le fonctionnement artériel. Scanner, IR M simple ou en du XXème siècle. Des progrès ont de l'appareil périphérique coch- 3D sont des investigations préopé- transformé l'approche du diagnos- léaire. ratoires indispensables. tic et des indications thérapeuti- ques de la surdité. lls ont portésur Le recueil des potentiels évoqués Les étiologies de la surdité de l'en- l'approche morphologique fine de auditifs d'abord tardif puis précoce fant comportaient un pourcentag l'oreille et sur son analyse fonction- a changé le diagnostic des surdités important de causes inconnues. nelle. Aussi l'appréhension de la de perception, particulièrement Les causes génétiques apparaissent surdité en tant que handicap de la des surdités de perception unilaté- maintenant comme représentant communication a conduit à des pri- rales. Autrefois un grand nombre les trois quart des étiologies; ses en charge adaptées car indivi- de tests auditifs étaient nécessaires Les surdités génétiques ont pris dualisées. Trois domaines ont pour différencier surdité de per- cette place d'autant plus que cer- concouru à cette connaissance de ception cochléaire et surdité de taines étiologies disparaissaient l'oreille pathologique : perception radiculaire. Méthode comme la rubéole anté-natale, l'in- l'électrophysiologie, la radiologie objective, rapide, fiable, le recueil compatibilité foeto-maternelle ou et la génétique. des potentiels évoqués auditifs a l'anoxie néo-natale. De même les permis un diagnostic plus précoce soins apportés aux grands préma- L'étude des activités des cellules du neurinome de l'acoustique. turés sont préventifs d'une surdité ciliées cochléaires distinguent for- Applicable quel que soit l'âge, pour qu'un contrôle par les potentiels mellement cellules ciliées internes une oreille séparément, les poten- évoqués auditifs précoces de tous et cellules ciliées externes. Les c tiels évoqués auditifs ont une place les enfants admis en néonatologie ellules ciliées externes sont dotées majeure dans le diagnostic de la permet de diagnostiquer précoce- de propriétés contractiles que surdité de l'enfant, de la simula- ment. l'onde sonore met en jeu ; leur tion, des surdités centrales. contraction entraine un mouve- Si la prothèse auditive était encore ment de la membrane tectoriale Associés aux oto-émissions acousti- à la fin de la première moitié du dans laquelle sont en continuité ques, les potentiels évoqués audi- XXème siècle un boitier avec un fil en leurs cils. Le mouvement de cette tifs sont un instrument performant “Y” qui équipait les sourds de tous membrane entraîne un appui sur pour le diagnostic précoce d'une les âges, l'aide auditive numérique les cils des cellules ciliées internes, surdité de l'enfant. Les méthodes enfin corrige les défauts majeurs véritables cellules sensorielles; sti- électrophysiologiques ont fait qui étaient reprochés à la prothèse mulées, elles sécrètent un média- entrer l’otologie dans une ère nou- analogique. Actuellement le port teur chimique qui excite les fibres velle provoquant un changement d'une aide auditive est possible afférentes du nerf auditif. Cette radical. dans le bruit. Sa visibilité est très contractilité des cellules ciliées diminuée. Les conduits auditifs externes est à la base du recueil des La radiologie vient compléter les externes sont enfin libres. Mais oto-émissions acoustiques provo- examens électrophysiologiques dans le domaine des suppléances quées, examen essentiel qui inter- apportant des précisions anatomo- instrumentales de la surdité, l'évè- roge la cochlée. Des travaux sont pathologiques dans les malforma- nement marquant est l'implanta- en cours pour une connaissance tions de l'oreille interne, des tion cochléaire. C'est en 1972 que meilleure du système efférent qui lésions tumorales du paquet William House présente au congrès

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du Collégium à Berne le premier cas tion spécifique mais cette prise en de boites de nuit, surdité profession- d'un adulte sourd total implanté. Les charge est souvent facilitée par l'im- nelle de l'adulte, presbyacousie dont progrès se sont succédés. Appliquée plantation cochléaire. le nombre de cas augmente au gré à l'enfant pour les surdités totales ou d’une |ongévité qui s’a|longe. profondes, l'implantation cochléaire A l'orée du XXIème siècle, la surdité est a transformé la vie de ces enfants présente comme maladie et comme La surdité ressortit aux traitements permettant une acquisition du lan- handicap de la communication; elle dont dispose l'otorhinolaryngolo- gage telle qu'ils peuvent suivre une est une question de santé publique : giste qui n'oublie pas que la surdité scolarité ordinaire. surdité de perception de l'enfant est aussi un handicap de la communi- nécessitant un dépistage néo-natal, cation qui relève alors de certaines Certes, il reste des cas de surdité avec surdité de l'adolescent et de l'adulte, dispositions de la Loi de février 2005 handicap qui nécessitent une éduca- jeune adepte de certains concerts et sur le handicap. C

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es français Centenaire 1908 - 2008

La troisième révolution médicale, entre puissance et crises (1945-2000)

Dr Jean Yves BOUSIGUE

Dans leur Histoire de la médecine, parue en 1962, Bariety et Coury, présentaient l’endocrinologie comme une histoire de la médecine en raccourci, « passant en cent ans à peine de l’état embryonnaire à la maturité la plus achevée ». Pour ces auteurs, inscrits dans le positivisme propre à l’historiographie médicale française, la médecine vivait alors les « siècles de vérité » (19e et 20e siècles). La « fin de l’his- toire » était à portée de main… La vérité scientifique triomphait enfin, après une longue marche ini- tiée à la Renaissance avec les siècles de renouveau et poursuivie par deux siècles de raison (17e et 18e siècles).

En 1999, M Grmek, notait à propos de la révolution biomédicale du 20e siècle, en conclusion de l’Histoire de la pensée médicale en Occident, que « si l’on peut énumérer, cataloguer et décrire les réa- lisations du 20e siècle, il est difficile, voire impossible, de les soumettre à une analyse historique. Nous sommes arrivés au point où les récits des batailles sont fait par les combattants eux-mêmes et où les idées nouvelles et les découvertes sont expliquées par ceux qui les ont, sinon imaginées et réalisées, du moins vécues plus ou moins directement. Pour ce passé tellement présent, la distance historique nous fait défaut ».

Fallait-il renoncer à faire de la médecine et singulièrement de la deuxième partie du 20e siècle un objet de l’histoire immédiate, moins attentive à la linéarité du progrès ou aux batailles qu’aux mouvements qui travaillent la médecine et la société contemporaines ?

Il est vrai que rien, au début des années 1960, ne pouvait modérer ni à plus forte raison, démentir une perception délibérément optimiste de la médecine. Entre nouveautés et progrès, l’air du temps et l’his- toire semblaient se répondre l’un l’autre, dans un environnement où la croissance économique effa- çait difficultés et inquiétudes conjoncturelles.

Rien ne laissait présager non plus que deux décennies plus tard à peine - au milieu des années 1980 - la médecine française connaîtrait, avec l’affaire du sang contaminé, une crise majeure après quoi bien des choses ne seraient plus comme avant.

Alors que les progrès et l’innovation diagnostique et thérapeutique – avec l’introduction de l’image- rie médicale et les perfectionnements de la chirurgie notamment – se poursuivaient à un rythme sou- tenu, des crises protéiformes ont imposé un nouveau régime d’historicité.

1945-1980. Optimisme et pre- l’expansion continue du système de Adossée aux acquis de la clinique mières inquiétudes… soins. La médecine trouve dans accumulés depuis un siècle et demi, l’expansion économique des trente la médecine française peut encore Dès la fin de la deuxième guerre glorieuses de quoi alimenter un passer sinon pour la première mondiale la médecine vit au développement inédit avec l’Etat médecine du monde, du moins rythme des découvertes – diagnos- Providence pour arrière plan. pour l’une des premières. « Nous tiques et thérapeutiques – et de avons l’une des meilleures médeci-

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nes du monde que tout le monde n’a eu le prix Nobel qu’en 1945. d’information de ces dernières nous envie » se plaisent à dire les Quant aux malades, ils n’en ont années pour apprendre que « les anti- grands patrons. bénéficié, que bien après les sulfami- biotiques, c’est pas automatique ». des, autre découverte de l’entre Mais les deux guerres mondiales sont deux guerres ! (D Bovet. Une chimie La psychiatrie vers la chimiothéra- passées par là et la puissance améri- qui guérit). Reste que les antibioti- pie. caine a pour conséquence, entre ques représentent bien la révolution autres, que l’on ne vient plus – thérapeutique du 20e siècle. En 1952, l’étude de médicaments comme au siècle précédent - en actifs contre les allergies débouche France pour apprendre la médecine. L’éradication de la tuberculose et les sur la découverte des effets psycho- Au contraire, ce sont les médecins victoires des antibiotiques. tropes de la chlorpropmazine français qui, au sortir de la seconde (Largactil). En moins d’une décennie guerre mondiale vont aux Etats Unis Malgré une meilleure connaissance l’arsenal thérapeutique de la psy- pour ramener une médecine pensée clinique et anatomique de la mala- chiatrie se complète avec la décou- désormais comme le modèle de réfé- die, la tuberculose résistait, notam- verte des anxiolytiques et des antidé- rence. En résultera une « reconfigu- ment en raison du succès relatif de la presseurs : « depuis les années ration de savoirs de la santé sous l’au- vaccination par le BCG. soixante, c’est-à-dire depuis que la torité du laboratoire [qui] n’avait recherche de médicaments nouveaux rien de nécessaire ni d’inévitable. En Dans l’entre deux guerres, on avait repose sur des stratégies biologiques ce sens, il s’agit bien d’un produit his- construit des sanatoriums. On comp- sophistiquées, aucune nouvelle torique, d’une invention collective » tait à la veille de la guerre 30 000 lits. découverte notable n’est venue enri- (J P Gaudillière). Avec la collapsothérapie rendue pos- chir la panoplie des psychotropes» (E sible par les progrès de la chirurgie, Zarifian, Les jardiniers de la folie). la cure climatique résumait le traite- 1945-1970. Des avancées théra- ment curatif de la tuberculose. Jusque là, la prise en charge des peutiques indiscutables. malades psychiatrique ne relevait Au début des années 1970, l’éradica- guère que de techniques plus ou Le XXe siècle restera sans doute dans tion de la tuberculose est à portée de moins invasives : électrochoc, loboto- l’histoire de la médecine celui de la main. Avec l’introduction de la strep- mie… le plus souvent dans le cadre révolution thérapeutique. Après le tomycine en 1944 puis de l’isoniazide d’une hospitalisation prolongée, à nihilisme thérapeutique en vogue au et du PAS, on ne meurt plus systéma- l’asile. A l’exception de la lobotomie, 19e siècle, l’arsenal thérapeutique ne tiquement de méningite tubercu- les thérapeutiques « physiques » ne s’enrichit guère dans les premières leuse. disparaitront pas complètement. décennies du 20e siècle. En France au moins, la chimiothéra- Les français vont devenir les premiers En 2000, le « Vidal » dépasse les 10 pie a fait plus que la vaccination par consommateurs de psychotropes au 000 références ! le BCG et la construction des sanato- monde, non pas tant que les affec- riums. tions psychiatriques soient plus fré- La révolution thérapeutique s’ac- quentes ou mieux diagnostiquées compagne d’une révolution écono- Les grandes maladies bactériennes – chez nous, mais en raison d’un choix mique et culturelle de la pharmacie diphtérie, typhoïde, scarlatine – dis- médical, en lieu et place des alterna- avec le l’émergence d’une puissante paraissent des préoccupations des tives que constituent les psychothé- industrie devenue un des piliers de médecins. Mais l’utilisation extensive rapies notamment. l’économie mondiale et une trans- des antibiotiques va bientôt se payer formation de la profession de phar- de l’émergence de résistances avec à L’importance de la consommation de macien. la clé des échecs et la crainte de voir médicaments est une caractéristique l’apparition de germes multirésis- de la médecine française. L’histoire accepte volontiers la tants. Jusqu’à la fin des années découverte de la pénicilline comme soixante, l’innovation thérapeutique La chimiothérapie anticancéreuse. point de départ de cette révolution. semble l’emporter sur le développe- L’exemple des leucémies. Mais la chronologie réserve des sur- ment des résistances, dans une prises : si l’action de pénicillium sur inquiétante course de vitesse entre L’espoir de vaincre le drame des leu- les bactéries a été reconnue en 1929, les microbes et les prescripteurs. cémies qui touchent plus volontiers la première utilisation du médica- des enfants semble à portée de main ment a attendu… 1941 et Fleming Il faudra attendre les campagnes à la fin des années soixante.

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Jean Bernard et Marcel Bessis En même temps, on assiste à la dis- qui devient de plus en plus sophis- obtiennent les premières rémis- parition des préparations magistra- tiquée, l’apparition d’un micros- sions dans les leucémies de l’enfant les et à la montée en puissance des cope dans les blocs opératoires, avec l’exanguino-transfusion – le grands laboratoires industriels pré- l’extension des indications opéra- bon sang qui guérit - en 1947. Mais figurant les complexes médico- toires permise par le perfectionne- les publications des premiers cas de industriels de la fin du 20e siècle. ment – encore à venir toutefois – rémissions durables ne sont publiés de la réanimation et de la prise en qu’en 1970. Les moutardes azotées Les revues médicales y trouvent charge post opératoire. Le fameux et l’acide folique sont les premières leur compte en publiant force choc opératoire s’évanouit avec les molécules reconnues comme effica- essais thérapeutiques signés sou- progrès de l’anesthésie. ces, mais là encore, comme pour les vent par des grands patrons et en antibiotiques et les psychotropes, profitant de la masse publicitaire. C’est dans les années 1960-1970 la recherche bénéficie du hasard. Les laboratoires envoient leurs que la chirurgie des greffes d’orga- représentants – les délégués médi- nes, bientôt dénommées transplan- En 1948, après un premier succès - caux - « visiter » les médecins pour tations » prend son essor. La pre- fugace – à la suite d’une exan- leur proposer de nouveaux médica- mière greffe du rein – réalisée en guino-transfusion, une rémission ments, avec des arguments 1962 à Paris - est considérée comme est obtenue grâce à l’aminoptérine convaincants. une prouesse. Les controverses qui (antifolique). On avait remarqué prennent corps à la suite de la pre- que des souris soumises à l’acide Ainsi, la chimiothérapie, au-delà mière transplantation cardiaque en folique voyaient leurs globules d’incontestables succès, connaît- décembre 1968 tient moins au blancs augmenter. Comme pour elle une véritable révolution indus- geste lui-même qu’à la symbolique l’indication de l’exanguino, ces ten- trielle et devient un secteur écono- attachée à l’organe. Viendront tatives étaient, selon l’auteur, le mique important, alimenté par un ensuite les transplantations de foie, fait de la raison. marché captif et solvable grâce à de poumon et les tentatives de Puis viendra une période où hasard l’Etat Providence. réimplantation de membre après et raison vont se succéder pour amputation accidentelle. aboutir dans les années soixante à « Greffes » d’organe et progrès en de longues rémissions grâce à des chirurgie. Sur l’état des transplantations d’or- associations, telles que corticoïdes ganes, Jean Paul Binet et coll pou- aminoptérine. J Bernard et ses col- Au lendemain de la seconde guerre vaient écrire en 1969 : « l’année qui laborateurs peuvent publier en mondiale, la chirurgie reste encore vient de se terminer, a été marquée 1970, 65 observations de leucémies un métier unique. Alors que la par la réalisation de nombreuses aiguës avec des rémissions « qui médecine anatomo-clinique puisait transplantations d’organes, exécu- ont dépassé quatre ans». dans le fond de la chirurgie, sauf tées dans le monde entier. exception, la chirurgie n’avait pas (…) L’invention des médicaments. suivi la nosographie, non plus que En dehors des greffes cardiaques, la spécialisation d’organes. Il y trois transplantations de poumon, Pour prendre la mesure de cette avait bien quelques individualités de foie et du grêle méritent d’être révolution thérapeutique, il fau- qui se dédiaient à une discipline – rapportées ». drait citer toutes les catégories de la neurochirurgie – mais la chirur- médicaments : corticoïdes, anti- gie restait « généraliste ». Thomas Starzl, pionnier de la trans- inflammatoires, hormones de subs- plantation du foie, résume cette titution, pour ne rien dire des forti- Tout va changer rapidement. La période dans ses mémoires fiants en tout genre… Ampoules, chirurgie orthopédique poussée publiées en1992 : « quand je com- gouttes, suppositoires, comprimés, par la traumatologie de la route mençai à travailler sur les trans- gélules, injections, perfusions dessi- puis le développement des prothè- plantations en 1958, le panorama nent une hiérarchie dans l’effica- ses, de hanche puis du genou, la était presque vide. Il n’y avait pas cité et, corrélativement dans la gra- chirurgie thoracique, celle de la de receveurs en dehors de quel- vité des pathologies. Une profusion sphère ORL, la chirurgie ophtalmo- ques uns qui avaient reçu des reins de médicaments qui va même don- logique. Bientôt, au début des à Boston d’un jumeau homozy- ner corps à des entités pathologi- années 1970, la chirurgie générale gote. Trois ans plus tard quand ques incertaines comme l’insuffi- se résumera à la chirurgie diges- John F. Kennedy fut intronisé prési- sance veineuse chronique et l’insuf- tive. A ce moment là, tout pousse à dent des Etats Unis, la transplanta- fisance circulatoire cérébrale la spécialisation : l’instrumentation tion était encore un exercice ésoté-

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rique pour un petit nombre rêveurs chercheur, et enseignant – institu- en question » écrit Jean Bernard, dans un aussi petit nombre de labo- tionnellement puissant, cumulant les dans Grandeurs et tentations de la ratoires de recherche chirurgicale. fonctions de chef de service et de médecine, publié en 1973. Cependant au moment de l’assassi- chef d’école. nat de Kennedy, en novembre 1963, Et d’évoquer aussitôt, les « consé- la transplantation rénale était réali- Désormais, c’est l’université qui quences sociales, économiques, mora- sée chez un nombre relativement conditionnera la structure interne les des progrès de la médecine » et les croissant d’insuffisants rénaux, et les des hôpitaux universitaires, d’autant cinq tentations qui la guetteraient : premières tentatives de remplace- que les professeurs doivent avoir « Administrative, politique, psycholo- ment du foie avaient été effectuées. leur » service. gique, sociologique et humaniste. Un nouveau champ de la médecine venait de naître. Avant que l’infla- Tout pousse à la montée en puis- La place des magistrats n’est évoquée tion des espoirs suscités par ces sance des hôpitaux, avec en retour – que sous l’angle d’une lutte contre temps premiers ne soit comblée, il innovation technologique et sur spé- ces charlatans dont « la prolifération, allait s’écouler plusieurs années ». cialisation aidant – la construction l’inconscience, la scandaleuse immu- d’une médecine de plus en plus éloi- nité sont singulièrement dangereu- Les propos de Jean Paul Binet en gnée de la pratique quotidienne. ses pour la santé publique ». 1970 caractérisent assez bien l’état d’esprit des chirurgiens cardiaques L’hôpital universitaire devient le lieu La foi dans l’avenir reste intacte : en 1970 et de l’engouement pour la des innovations, des traitements « Rien de plus périmé que la dispute transplantations : « ce qui est certain lourds et nouveaux. scholastique sur la nature de la aussi, c’est que dans ce domaine le médecine opposant ceux qui la tien- progrès est si rapide que ce qui est nent pour un art à ceux qui la tien- dit est déjà périmé et ce qui est écrit 1970-1980. Premières inquiétu- nent pour une science ( …) la est déjà du domaine de l’histoire de des, premières critiques. connaissance objective comme seule la médecine ». source de vérité authentique…, idée C’est dans un milieu bardé de certi- austère et froide qui ne propose Les hôpitaux au cœur du système . tudes et d’une foi jamais remise en aucune explication mais impose un cause dans la nouveauté identifiée ascétique renoncement à toute autre La révolution thérapeutique va trou- au progrès que se manifestent les nourriture spirituelle. » J Monod, cité ver dans la transformation des hôpi- premiers doutes et les premières cri- par J Bernard. P 310 « L’honneur de taux le support nécessaire à son tiques. la médecine et sa difficulté sont dans déploiement. cette alliance du devoir de science et Au début des années 1970, quelques du devoir d’humanité. ». L’ordonnance du 30 décembre 1958 voix tentent de se faire entendre consacre une volonté politique ini- pour exprimer les premiers doutes et Quant à la révolution thérapeutique tiée sous le gouvernement Mendès les premières critiques devant les en cours, dont les médecins consta- France en 1954, ne visant rien moins tentations d’une médecine saisie par tent tous les jours les effets bénéfi- que la création de centres de soins et le vertige de sa récente toute puis- ques, elle « n’est pas encore nette- de recherche, qui seraient, sur le sance. Jean Bernard avec Grandeur ment perçue par l’opinion, par les modèle américain des laboratoires et tentations de la médecine en 1973 ; magistrats. » de prix Nobel. A l’origine de cette Ivan Illich dont la Némésis médicale mutation de l’hôpital public une poi- paraît en France en 1975 ; M La publication de Némésis médicale gnée de médecins parisiens, ayant Foucault avec « l’invention » du bio- en 1975 met en exergue le concept fait le voyage des Etats Unis dans pouvoir ; l’historien de la médecine de iatrogénie sociale. l’immédiat après guerre et conquis espagnol Pedro Laïn Entralgo – dont « L’entreprise médicale menace la par le modèle américain, conjuguant le dernier chapitre de son Historia de santé » A l’époque, cette affirmation soins et recherche. Avec la création la medicina parue en 1978 portait le pouvait faire douter du sérieux de des CHU c’est l’université qui fait son titre de puissance et perplexité, illus- l’auteur, mais elle avait aussi le pou- entrée à l’hôpital, devenant par la trent les doutes sur un progrès voir de provoquer la stupeur et la même occasion centre de soins d’en- continu et indiscutable de la méde- rage. Vingt ans plus tard, je ne pour- seignement et de recherche. Deux cine. rai plus reprendre cette phrase à conséquences vont en découler rapi- mon compte, et cela pour deux rai- dement : l’émergence d’un nouveau « Privilèges, habitudes, somnolence, sons. Les médecins ont perdu le gou- type de médecin – à la fois soignant, la révolution biologique remet tout vernail de l’état biologique, la barre

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de la biocratie. Si jamais il y a un désigne seulement les aspects 1980-200... Temps de crises. praticien parmi les « décideurs », il négatifs ou nocifs de cette est là pour légitimer la revendica- influence. » Et l’auteur d’ajouter : « Dans les années quatre vingt, la tion du système industriel d’amé- une vaste bibliographie montre crise va s’installer comme le régime liorer l’état de santé. Et, en outre, irréfutablement que l’extraordi- d’historicité de la médecine. cette ‘santé’ n’est plus ressen- naire liste des médicaments Les médias vont s’emparer de la tie.(…) Aujourd’hui [en 1998] je aujourd’hui en usage rend difficile médecine. Les problèmes et les diffi- commencerai mon argumentation une bonne connaissance de leurs cultés du système de soins vont faire en disant : « la recherche de la indications, des leurs effets collaté- le succès d’une médecine spectacle, santé devient le facteur pathogène raux et secondaires et de leurs portée par la télévision, jouant prédominant. I Illich, la perte de incompatibilités, et donne lieu, du volontiers sur l’émotionnel, au sens p 330. coup, à de fréquentes altérations détriment d’une réelle pédagogie : iatrogènes chez le malade traité. - Depuis le milieu des années Pedro Laïn Entralgo, se son côté, Une nouvelle discipline, la pharma- soixante dix les difficultés de finan- inscrit la médecine de ces années là cologie clinique, paraît de plus en cement de la Sécurité sociale sont entre puissance et perplexité. plus indispensable pour la bonne devenues une question politique. formation du médecin. » Le « trou de la Sécu » prend des Pour lui, la première guerre mon- allures de feuilleton. diale marque la fin d’une histoire En 1963, Bariéty et Coury évo- de la planète et en ouvre une quaient de manière elliptique « la - En même temps, la survenue de autre, même si dans les années triste expérience récemment crises sanitaires – inédites pour 1970 « on continue à ausculter acquise avec certains tranquillisants l’une des « meilleures médecines comme Potain, à prendre la tension administrés chez la femme du monde que tout le monde nous comme Vaquez et à chercher les enceinte [qui] a montré que cette envie » et quelques erreurs médica- réflexes ostéo tendineux comme pathologie ‘iatrogène’ est d’autant les offrent un terrain propice au Babinski. » plus insidieuse et redoutable développement d’un climat de qu’elle est susceptible d’avoir des défiance à l’égard de la médecine Si la puissance de la technique et incidences génétiques. Sans le dire, et du corps médical en particulier. de la science permettent de com- les auteurs évoquaient l ‘affaire de prendre les phénomènes naturels, la Thalidomide. - De là, une crise dans la relation de la santé ou de la maladie, la per- médecin malade, où l’humanisme plexité demeure devant les ques- L’affaire de la thalidomide reste, traditionnel – accusé d’être l’alibi tions telles que « qui suis-je ? que pour l’histoire de la médecine la du pouvoir médical - est battu en va-t-il advenir de moi ? première affaire de complication brèche avant qu’un lourd appareil liée à la puissance de la médecine. juridique ne vienne s’y substituer. En même temps, il s’interroge sur Voici comment en rendent compte l’influence que pourraient avoir sur Barièty et Coury : « Les traitements Crise de l’Etat Providence la médecine la prolifération de la actuels permettent à des individus, littérature médicale et la naissance jusqu’alors voués à une mort pré- En 1981, Nicole Questiaux eut beau des bases de données, l’intrusion coce, d’atteindre l’âge de la pro- dire qu’elle ne serait pas le « minis- des statistiques – les données glo- création : cette survie prolongée tre des comptes » de la protection bales remplacent les histoires sin- favorisera peut-être la transmission sociale, ses propos – au-delà de la gulières du siècle précédent, et l’or- de tares ou de vices de conforma- courte polémique qu’ils déclenchè- ganisation hospitalière qui « fabri- tion aux générations suivantes. Il rent – relevaient plus de la posture que » une médecine qui lui est pro- faut également tenir compte de politique que d’un réel projet sus- pre. l’incidence des radiations ionisan- ceptible de tirer la Sécurité sociale tes et du danger que comportent, d’un déficit, certes chronique, mais Lain Entralgo s’interroge sur la pour l’embryon et le fœtus, certai- qui, alimenté par l’inflation et la iatrogénie. « Au sens le plus géné- nes médications prescrites aux montée récente du chômage, attei- ral du terme, la iatrogénie désigne parents. Cette dernière notion a gnait 7 milliards de francs. Deux l’influence bénéfique ou nocive été illustrée de façon tragique par ans plus tard, le réalisme économi- selon laquelle la personne ou la un récent exemple. Dans ce que reprend le dessus et Pierre conduite du médecin exercent leur domaine, la rançon du progrès est Beregovoy présente « l’équilibre action en tant que thérapeute ; encore difficile à évaluer » des comptes » comme la condition dans son emploi habituel, le mot de la survie du système.

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Jusque là, les problèmes, pourtant sociale – une quinzaine jusqu’en Crises sanitaires et erreurs médica- chroniques, sinon congénitaux du 1993 – d’où on retiendra les aug- les. financement de la protection sociale, mentations régulières du ticket n’avaient guère sollicité l’attention modérateur, la mise en place d’un Au cours des années quatre vingt des des politiques qui, de surcroît, en forfait hospitalier (1983), l’instaura- crises d’une ampleur inédite vont avaient confié la gestion aux parte- tion de la CSG (1990), une tentative venir ébranler la foi dans le progrès naires syndicaux. de mise en place de références médi- et jeter un doute sur la médecine cales opposables et de création d’un elle-même. Jusque là, les rares crises A l’exception des ordonnances de dossier médical (1993) qui sont la qui avaient fait l’actualité avaient 1967, dont l’objectif était, selon J M seule véritable intrusion directe de la été mises sur le prix à payer pour le Jeanneney, alors ministre des affaires Sécurité sociale dans la pratique progrès. La presse s’était bien fait sociales dans le gouvernement médicale. l’écho de l’affaire de la Thalidomide Pompidou, essentiellement financier – ou des enfants phoques, nés sans - « remédier au déficit existant alors Lui succédera un interventionnisme bras chez des mères qui avaient et plus encore à ceux qui étaient pré- politique direct avec le vote chaque absorbé au début de leur grossesse visibles » - la fuite en avant autorisée année par le parlement d’une loi de ce tranquillisant -, et, ponctuelle- par la croissance économique des financement de la Sécurité sociale ment, des questions soulevées par la trente glorieuses, avait servi de poli- (loi constitutionnelle du 22 juillet réanimation encore à ses débuts ou tique. 1996) et la loi portant réforme de une erreur médicale. l’assurance maladie du 13 août 2004, Le 22 septembre 1969, lors de sa pre- qui, en instituant le parcours de Du sang contaminé à l’hormone de mière conférence de presse, Georges soins, ne peut pas être sans influence croissance. Pompidou,nouvellement élu prési- sur la pratique médicale. dent de la République, lançait cette La découverte, en 1940, des groupes sombre prophétie : Entre l’ambition initiale, qui était sanguins par Landsteiner a ouvert la « Je me suis amusé, si j’ose dire, à d’instituer « une organisation de la voie à des transfusions compatibles, poser à un ordinateur la question Sécurité sociale destinée à garantir au bénéfice d’un grand nombre de suivante : supposons que nos dépen- les travailleurs et leur famille contre malades et des combattants de la ses sociales se mettent à croître au les risques de toute nature suscepti- deuxième guerre mondiale, la gra- rythme où s’accroissent, à l’heure bles de réduire ou de supprimer leurs tuité du don renforçant le caractère actuelle, les dépenses de l’assurance capacités de gain, à couvrir les char- solidaire de la thérapeutique. maladie. Dans combien de temps est- ges de maternité et les charges de L’extension du champ de la chirurgie ce que le budget social de la nation famille qu’ils supportent », les échecs et l’augmentation de la traumatolo- absorbera la totalité de nos ressour- de toutes les tentatives pour mainte- gie routière notamment ont conduit ces et de notre produit national ? nir un équilibre stable, les évolutions à des besoins transfusionnels de plus Réponse de l’ordinateur : 19 ans et socioculturelles intervenues au cours en plus importants à partir des deux mois. de la deuxième partie du 20e siècle, années soixante. La transfusion san- Je ne garantis pas les deux mois. Il le débat reste ouvert, alors que le guine est devenue alors une prati- n’en reste pas moins que nous som- trou de la Sécu est pour certains un que courante, alimentée par les mes là devant un problème d’une mythe technocratique entretenu à valeurs de solidarité et de progrès et extrême gravité et qu’il faut avoir le des fins pédagogiques : « la Sécu de service public, les centres de courage de regarder en face si l’on c’est bien, en abuser ça craint ». transfusion étant implantés en ne veut pas se préparer des chocs milieu hospitalier. Donner son sang brutaux et de mauvaises surprises ». Cependant, son influence réelle sur est un acte civique : « soyez sport, l’évolution de la médecine reste donnez votre sang », dit le slogan. On n’attendra pas… 1998, mais les encore un chantier à ouvrir. Si la premières mesures n’interviendront sécurité sociale n’appartient pas En même temps, la découverte et la qu’en 1975, avec le plan de redresse- stricto sensu à l’histoire de la méde- fabrication de cryoprécipités à partir ment de 1975, dit plan Durafour, cine contemporaine, son histoire du sang a ouvert une voie thérapeu- portant déplafonnement de la base interroge celle de la médecine, à tra- tique qui, rapidement, devait boule- des cotisations salariales et baisse de vers des dispositions telles que la verser le traitement de l’hémophilie. la TVA sur les médicaments. maîtrise médicalisée ou comptable, le développement des génériques, la Pour faire face à l’explosion de la Le plan Durafour ouvre l’ère des répartition des ressources entre la demande – la presse relaie volontiers plans de redressement de la Sécurité médecine de ville et l’hôpital. à l’approche des grands week-end

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les appels des centres – on recher- la sécurité transfusionnelle est mai 1988 fait obligation aux éta- che des donneurs au moment où se garantie, la transfusion reste blissements de surveiller et de lut- développe l’épidémie de sida dont « plombée » par une crise qui au ter contre les infections nosocomia- les premiers cas avaient été diag- total aura occupé l’opinion pen- les – qu’elles posent problème. nostiqués au début des années dant plus d’une décennie. quatre vingt. Dans la foulée de l’affaire du sang Si l’affaire de l’hormone de crois- contaminé et d’une société travail- L’extension de l’épidémie de sida sance n’a pas mobilisé l’opinion lée par un besoin croissant de sécu- au début de la décennie touche un comme le sang contaminé, elle en rité et une demande de santé de grand nombre de pays, mais pré- porte la marque. Le procès qui se plus en plus exigeante, on a cher- sente en France une coloration par- tient actuellement renvoie à une ché aussi, avec la vérité, des respon- ticulière en raison de la structure contamination de malades interve- sables, comme un nouveau défi du système de santé. De-là, un plus nue à la suite de l’utilisation d’hor- lancé par la société à une médecine grand nombre de malades conta- mones de croissance chez des cada- trop sûre d’elle. minés hors hémophilie et des pro- vres contaminés par la maladie de cédures juridiques interminables, Creutzfeld Jacob, et dont les pre- Une nouvelle affaire apparaît au conduisant à la mise en cause de miers soupçons remontent à 1985. début des années quatre vingt dix. responsables politiques au plus Lors du premier procès en respon- Des malades avaient été contami- haut niveau – on se souvient du sabilité civile qui s’est ouvert en nés, lors d’interventions pour her- « responsable mais pas coupable » 2002, les parents d’une malade ont nie discale par une bactérie jusque lancé par G Dufoix - débouchant affirmé avoir porté plainte au civil là pratiquement inconnue en sur un appareil réglementaire qui afin de ne pas laisser le silence pathologie humaine, mycobacté- servira de modèle. recouvrir ce qui, selon eux, était un rium xenopi présente dans l’eau du déni de la vérité. Alors que la plu- réseau. Cette affaire conduira aussi En 1984, alors que le Sida est connu part des familles de malades à un procès et à la création d’une depuis une publication princeps en avaient accepté une indemnisation association de défense des malades 1981, sont publiées les premières à hauteur de 300 000 euros contre – les LIEN – préfigurant la création techniques d’inactivation du virus un renoncement aux poursuites, d’un collectif de défense des victi- de l’immunodéficience humaine. ceux-ci, pour tenir un serment fait mes (CISS). Pour des raisons qui touchent à leur fille avant sa disparition refu- autant ai souci de préserver une sèrent la solidarité nationale : « on Les années suivantes verront de industrie naissante qu’à un système ne voulait pas recevoir ces sommes nombreux procès pour infection et des mentalités bardées de certi- sans savoir pourquoi on nous les nosocomiale en chirurgie aboutis- tudes autant que de méconnais- donnait. » « et puis surtout, avant sant au remplacement de la notion sance du risque, la France ne met- qu’elle ne disparaisse, on avait pro- d’obligation de moyens par celle tra en place les tests d’inactivation mis à … de tout faire pour beaucoup plus contraignante que courant 1986, entraînant la qu’éclate la vérité. » d’obligation de sécurité de résultat. contamination indue de malades et de transfusés. C’est sur cette courte Ces deux affaires, survenues à peu Parallèlement, se met en place un période que se focalisera par la près en même temps – au début dispositif de surveillance et de lutte suite la recherche des responsabili- des années quatre vingt – révèlent contre les infections nosocomiales tés. ce qu’était la médecine convaincue dans les établissements dont les de sa bienfaisance et totalement effets commencent à se faire sentir. Le grand procès tenu en 1991-1992 dépourvue de la notion de risque. Toutefois, le défi de la confiance aboutira à la condamnation à des reste à relever, alors que la ques- peines de prison des plus hauts res- Les infections nosocomiales. tion de la responsabilité civile ponsables médicaux et à la mise en peine à trouver une solution satis- place d’un appareil réglementaire Entre l’innovation et l’extension faisante et que professionnels et organisant la sécurité transfusion- des domaines d’intervention de la établissements exercent sous la nelle, dès 1993. médecine est venue s’interposer la menace d’une réclamation. iatrogénie. Il n’est pas exagéré de dire que l’af- La loi du 1 juillet 1998 dite loi de faire du sang contaminé a marqué Paradoxalement, c’est au moment « sécurité sanitaire » prescrit la tota- sans doute pour longtemps les où elles sont enfin reconnues et lité des établissements de santé ; mentalités. Aujourd’hui, alors que prises en charge – un décret du 6 privés ou publics : « Ils participent à

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la mise en œuvre du dispositif de les années soixante, ils n’ont guère Risquons une hypothèse : la méde- vigilance destiné à garantir la sécu- dépassé le cercle des experts jusqu’à cine de la deuxième partie du siècle rité sanitaire, notamment les pro- l’emballement de la « vache folle » dernier n’est-elle pas lourde d’une duits mentionnés à l’article L. 793-1 qui, en 1996, dégoûta quantité de autre révolution qui en serait un peu et organisent en leur sein la lutte gens de la viande de bœuf et le miroir tendu – ou le choc en retour -, contre les infections nosocomiales et menaça l’avenir de l’élevage bovin d’une efficacité jamais atteinte autres affections iatrogènes dans les en quelques semaines. retournée contre la médecine elle- conditions prévues par voie régle- même ? mentaire. Que quelques cas groupés de légio- nellose surviennent ici ou là, qu’un Pour cela, il faut admettre que les Un décret du 6 septembre 1999 pré- germe se dissémine sur quelques éta- conflits engendrés par les crises sani- cise – définitivement ? – les choses. blissements, que la grippe aviaire taires s’enracinent dans une lutte « Chaque établissement de santé survienne en Indonésie ou en Chine, contre un supposé pouvoir médical. organise en son sein la lutte contre les médias relaient l’information en De fait les défis lancés régulièrement les infections nosocomiales y compris boucle, avec tout l’émotionnel à la médecine depuis deux décennies la prévention de la résistance aux nécessaire et les pouvoirs publics en font bon ménage dans les sondages antibiotiques. rajoutent de peur d’encourir le avec une confiance jamais démentie reproche de n’en avoir pas fait assez. à l’égard de son médecin traitant et Il aura fallu près de quarante ans de l’hôpital. pour que la réglementation prenne En déplaçant l’événement du terrain en compte la résistance aux antibio- du fait divers sur celui de la crise et Les années soixante ont vu naître un tiques, reconnue peu de temps après en lui conférant par médias interpo- militantisme anti-médical qui fait flè- leur introduction. sés une dimension paradigmatique che de tout bois – de la création de en matière de santé publique, on l’ordre des médecins par Vichy au La crise sanitaire, régime d’histori- prend le risque de confondre, pour conservatisme et au paternalisme qui cité de la médecine contemporaine. reprendre les mots de Fernand gouvernerait la relation médecin Braudel, l’écume de l’événement et malade dans une infantilisation de « La syphilis qui fait des siennes. La la vague des changements plus pro- celui-ci – et s’organise progressive- pharmacologie en alerte. fonds ; le temps court des médias et ment en des groupes sociaux dont L’alimentation sur le gril avec le sushi celui beaucoup lent, presque immo- l’activisme trouve une oreille de plus contaminé par des algues corallien- bile, de la longue durée qui, finale- en plus attentive chez les politiques, nes. La fièvre du Nil occidental, sus- ment, modèle le paysage historique. jusqu’à la loi du 4 mars 2002 qui ceptible d’infecter l’homme, qui consacre les droits des malades et gagne les moustiques de Camargue, Quoiqu’il en soit du régime d’histori- leur capacité à intervenir sur la qua- tandis que les chauve-souris ont la cité, la problématique de la crise lité des soins. rage : en cette rentrée, les sujets sanitaire participe désormais d’une d’investigation relevant de la sécu- transformation plus générale de la La publication, en 1971, par le rité sanitaire ne manquent pas. » Ce société qu’elle a contribué a susciter. Nouvel Observateur du manifeste dit florilège, saisi au hasard de la lecture « des 343 salopes » en faveur de des quotidiens en 2001, après l’af- Crise dans la relation médecin l’avortement est un défi inédit lancé faire de la cérivastatine, alors que la malade, ou crise dans la société ? aux trois ans seulement après la loi syphilis venait de passer de 32 cas sur la contraception aux institutions. identifiés en 2000 à 46 pour un La remise en cause du pouvoir médi- L’intervention des autorités morales, semestre, que la fièvre du Nil rassem- cal. Puise dans des débats tels que la qu’elles soient médicales ou non est blait huit cas humains suspects et la pilule ou l’interruption de grossesse rejetée au non de la liberté de pro- rage cinq animaux pourrait sans où le corps médical se trouve en posi- créer, cependant que le corps médi- doute être reproduit aujourd’hui. tion d’accusé. cal et en particulier les gynécologues est partagé, certains espérant ainsi Imagine-t-on aujourd’hui l’affaire de La survenue des crises sanitaires mettre un terme aux avortements la Thalidomide, en pages intérieures, majeures va donner corps à cette cri- provoqués et à leurs complications perdue parmi les informations géné- tique et la justifier. qui font toujours l’objet d’une ques- rales ? Quant aux problèmes soule- tion de concours à l’internat. vés par l’administration de complé- Les comités d’éthique. Fécondation ments alimentaires et autres antibio- assistée. Soins palliatifs. Le biopou- Le 20 décembre 1975, Simone Veil tiques aux animaux, connus depuis voir vers la réglementation de la vie. parvient à faire voter par une assem-

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blée également partagée, notam- Mais la machine de la modernité de 1994 devait être révisée en 1999 ment à droite, la loi sur l’interrup- tournait déjà… avec la description, au moment où Amandine le pre- tion volontaire de grossesse qui un an plus tard, par Crick et mier « bébé éprouvette » - obtenu l’autorise pendant les dix premières Watson de la structure spatiale de par fécondation in vitro - venait semaines. l’ADN. La biologie moléculaire était d’atteindre sa vingtième année. née, après la découverte de la Depuis le début des années 1990, il Une nouvelle ère va s’ouvrir bien- structure chimique des gènes en y a eu la création de la brebis Dolly, tôt avec la naissance de Louise 1944. puis la démonstration en 1997 de la Brown, premier bébé éprouvette, possibilité de produire un mammi- puis d’Amadine en 1982, première Les cinquante années suivantes ver- fère par clonage. La perspective naissance en France. ront des avancées décisives dans d’une procréation asexuée et des trois domaines qui ont une inci- manipulations possibles, entraîna Si la question morale reste toujours dence sur l’idée même de mater- des réactions planétaires : chefs au premier plan quand il s’agit de nité. d’Etat, autorités religieuses, struc- la vie, elle se déplace de la morale - En premier lieu, la génétique per- tures de bioéthique… la morale pure sur le terrain de la bioéthique met désormais un diagnostic pré- reprenait le dessus ! au début des années quatre vingt, natal très fiable, à partir de la biop- avant même l’irruption des crises sie placentaire et de l’amniocen- Mais à côté d’une évolution qui sanitaires. tèse, pour écarter les malforma- frappe autant par son intensité et tions. sa rapidité est venu s’interposer le Le 23 février 1983, un décret miroir d’une iatrogénie pointée un annonce la création d’un Comité - En second lieu, le concept de fer- quart de siècle plus tôt part Ivan consultatif d’éthique chargé de tilité et de grossesse a évolué avec Illich. donner des avis sur les problèmes la mise à disposition de d’ovules de éthiques soulevés par les progrès donneuses ou d’ovules ou d’em- L’affaire Perruche mobilise l’opi- de la connaissance dans les domai- bryons congelés de la mère elle- nion et les médias pour un préju- nes de la biologie de la médecine même. dice de vie. Nicolas Perruche est et de la santé et de publier des porteur des complications connues recommandations sur ces sujets ». - Enfin, les conditions physiques des d’une rubéole congénitale alors femmes au moment de la méno- que le diagnostic n’avait pas été Même si la France fait alors figure pause se sont améliorées. fait chez la mère à la suite d’une de pionnière en la matière, l’inter- Aujourd’hui, avec l’aide d’un traite- erreur de laboratoire. A cette occa- rogation et l’inquiétude ne sont ment hormonal, l’implantation sion, on verra l’opposition devenue pas nouvelles : « En tant que dans l’utérus d’une femme de 60 classique entre le droit, la méde- citoyens et démocrates, notre voire 70 ans est possible. « Mais cine et l’exigence du public. Quatre devoir civique est de veiller à ce doit-on le faire ? » Les principaux arrêts contradictoires seront rendus que le savoir biologique ne soit pas demandeurs de grossesse tardives par des juridictions différentes déformé, ni utilisé par ceux qui sont des couples qui ont perdu un entre 1993 et 2000, quant à la satis- détiennent le pouvoir et cherchent enfant, ceux qui ont un désir tardif, faction de la requête des parents des arguments rationnels pour ou ceux qui à la faveur d’une en indemnisation pour le préjudice excuser leurs préjugés et leurs pas- seconde union souhaitent devenir subi par leur fils. sions». (Pr André Lemaire, Le parents, enfin des femmes seules Monde, 11 janvier 1952). qui ne veulent pas passer à côté de En même temps que se poursuit la « L’avènement de la paix serait l’opportunité d’être mères. médicalisation de la vie, se déploie moins aléatoire si le monde d’au- un appareil juridique qui, de juris- jourd’hui comprenait que, lorsque La technologie autorise toutes les prudence en lois, décrets et circu- la recherche scientifique dépasse demandes, jusqu’à la congélation laires, semble ouvrir de nouveaux les frontières que la nature elle- de tissu ovarien ou de spermatozoï- temps pour la médecine. même a fixées, il peut devenir des chez des adultes jeunes sous impossible d’arrêter la perversion chimiothérapie pour le jour ils Vers une nouvelle médecine… de l’esprit humain et d’empêcher la seront en situation de procréer. destruction de la vie elle-même, à moins d’en appeler à une juridic- La rapidité de l’évolution est telle tion internationale, qui est encore, que l’on n’ose plus légiférer « pour hélas !, à créer». l’éternité » et la loi de bioéthique

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Conclusion

Dr Jean Michel KLEIN Secrétaire Général du SNORL

Ce document est une réflexion sur le passé du syndicalisme médical et sur la pérennité des questions qui taraudent notre système de santé : soigner le mieux possible tous les patients pour un coût le plus faible possible pour la société avec des professionnels de santé correctement rémunérés et considérés.

Mais si le syndicalisme médical a un passé, a-t-il un avenir ?

Certes, les temps changent. Nous étions dans une société hiérarchisée et de lutte des classes, nous pas- sons à une société de partage (partage de l’information, de la connaissance et de l’autorité) et de garantie.

Dans un récent colloque de la Haute Autorité de Santé sur l’évaluation des pratiques médicales, Michel Serres, Académicien, expliquait que ce partage des compétences constitue la revanche de l’aval sur l’amont et qu’il faut l’accepter, nous conseille-t-il. Dans ces conditions, il devient plus difficile d’exercer un quelconque pouvoir ou de prendre une quel- conque décision, cela est valable pour tous les responsables, y compris au niveau syndical.

Parallèlement, on constate la progression de codes décorticants et standardisant nos actes et diagnos- tics médicaux. Notre pratique ainsi « clarifiée », il reste à définir des procédures de prises en charges, véritables scénarii standardisant l’acte médical. De prime abord, la démarche est saine et satisfaisante intellectuellement mais d’autres enjeux se font jour : intérêt des tutelles et des assurances avec, en point de mire, une régulation financière.

Dès lors, le syndicalisme retrouve sa justification : tout en restant une force de défense d’un certain nombre de principe, il doit constituer une force de proposition basée sur ces mêmes principes intangi- bles de notre profession : liberté de choix, secret, compétence, dévouement et équité.

Dans ces circonstances, le lancement du nouveau site du syndicat correspond à cette évolution de notre mode de réflexion et d’action : une écoute, une réactivité, une décision collégiale au travers d’un envi- ronnement numérique.

Pour terminer, je tiens à remercier très sincèrement nos collègues actifs et retraités qui ont travaillés avec passion pour que ce document nous permette de réfléchir sur le chemin parcouru et à parcourir.

Je souhaite, enfin, au nom des instances de notre syndicat, rendre hommage à notre secrétaire, Madame Nadia Aouache, qui a orchestré cet ouvrage avec ténacité et diplomatie. Nous lui devons beaucoup.

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Syndicat National des Médecins Spécialisés en O.R.L. & Chirurgie Cervico-Faciale 79, rue de Tocqueville - 75017 Paris Tél : 01.44.29.01.28 - Fax : 01.40.54.00.66 - E-mail : [email protected]

BULLETIN D’ADHESION Joindre une copie du diplôme d’ORL et de l’inscription à l’Ordre

Docteur :...... Prénom :...... Adresse professionnelle : ...... Tél. : ...... Fax : ...... E-mail : ...... Date et lieu de naissance : ...... Sexe : ...... Nationalité : ...... Année d’installation : ...... Année de thèse : ...... Année de qualification : ......

Mode d’exercice : Libéral exclusif Hospitalier exclusif Exercice mixte Salarié non hospitalier

Secteur d’activité : Secteur 1 Secteur 2

Compétences éventuelles : ...... Titres hospitalier et universitaires : ......

Demande son admission au S.N.O.R.L*

Fait le : ______Cachet

Signature :

Cotisation : - Cotisation 2008 : 150 € - La première année d’inscription seule une demi-cotisation est due (75 € pour 2008).

* ADMISSION : Les statuts prévoient que tout médecin français pourvu du diplôme ‘Etat, régulièrement autorisé à pra- tiquer sa profession et possédant sa qualification en ORL peut demander son admission dans le SNORL. Sa candidature est publiée sur le site internet du SNORL. Sans avis défavorable de la communauté des médecins inscrits au syndicat l’ad- mission est acquise dans un délai de deux mois après la publication.

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LE BUREAU

Secrétariat administratif : 79, rue de Tocqueville - 75017 Paris Tél : 01.44.29.01.28 - Fax : 01.40.54.00.66 - E-mail : [email protected] www.orl-france.org

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Notes

rév

NOUVEA

01 41 91 S.N.O.R.L. 114 Centenaire 1908 - 2008 www.ente goldenBOOK21x27SNORL- 29/09/08 22:32 Page 115

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