LA CRÉOLISATION : PROCESSUS, DIMENSIONS, ET CONTRAINTES : LE CAS DU

PIDGIN NIGRÉIAN

A Thesis

Submitted to the Faculty of Graduate Studies and Research

In Partial Fulfilment of the Requirements

For the Degree of

Master of Arts

in

French and Francophone Intercultural Studies

University of Regina,

Saskatchewan

By

Samuel Okechukwu Nnam

Regina, Saskatchewan

March, 2020

© 2020: O.S Nnam

UNIVERSITY OF REGINA

FACULTY OF GRADUATE STUDIES AND RESEARCH

SUPERVISORY AND EXAMINING COMMITTEE

Samuel Okechukwu Nnam, candidate for the degree of Master of Arts in French and Francophone Intercultural Studies, has presented a thesis titled, La Créolisation: Processus, Dimensions, Et Contraintes: Le Cas Du Nigérian, in an oral examination held on March 6, 2020. The following committee members have found the thesis acceptable in form and content, and that the candidate demonstrated satisfactory knowledge of the subject material.

External Examiner: Dr. Sylvia I.C. Madueke, University of Alberta

Supervisor: Dr. Michael Akinpelu, La Cite Universitaire Francophone

Committee Member: Dr. Emmanuel Aito, La Cite Universitaire Francophone

Chair of Defense: Dr. Fadila Boutouchent, Faculty of Education

ABSTRACT

Nigerian Pidgin evolved as a result of language contact with the colonialists and foreign traders. It is one of the fast-growing languages in Nigeria, it is the only language that has no native speakers, making it a unifying language. In spite of the fact that Nigerian Pidgin is probably the language with the highest population of users in Nigeria, it does not enjoy official recognition and is excluded from the education system. It lacks prestige because it is seen by some Nigerians especially the elites as a “bad” form of English and associated with a socially deprived and uneducated set of people.

This current status of the Nigerian Pidgin has motivated us in this study to consider these crucial questions: Why is the Nigerian Pidgin still not considered a national language, despite its popularity among the Nigerian population (According to the current statistics, it is estimated that over 75% of the population speak it? Could this be as a result of the negligence shown by the government? If Nigerian Pidgin were considered a national language, what are the economic, social and political importance? Would it eventually become a creole?

The objective of this research is to describe the current state of pidgin in Nigerian society, in order to: identify the stages that can lead to the creolization of pidgin in the Nigerian context, determine the reasons why pidgin is yet to gain an official recognition, despite its popularity among the population, present advantages associated with the recognition of pidgin in the country. This study will also examine the processes the pidgin has to go through before becoming a creole and the things that could hinder it from gaining the creole status.

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ACKNOWLEDGEMENTS

I am indebted to God Almighty for the strength, wisdom, knowledge and ideas He granted me to actualize this program. I would like to appreciate the University of Regina, especially La Cite universitaire francophone and the Faculty of Graduate Studies and Research for the scholarships awarded to me in the course of the program namely; French Studies

Graduate Entrance Award -2017 fall, UR Graduate Scholarship – 2018 and Faculty of Graduate

Studies and Research Master Graduate Teaching Assistantship – 2019.

I am extremely grateful to the Department of French and Francophone Intercultural

Studies (La Cité) for their tireless efforts and commitments in helping me achieve my goal. I would like to express my gratitude to Dr. Emmanuel Aito (Director of La Cité universitaire francophone) for his fatherly advice, encouragement and support throughout my master's program. I equally want to appreciate my supervisor Dr. Michael Akinpelu for his patience, the sleepless nights he sacrificed and ideas he offered in making sure this thesis is well done. I would also like to extend my gratitude to Dr. André Magnan (Associate Director), Dr. Abdoulaye Yoh

(Director, Administration & Finance) and the following members of the French department:

Céline Magnon, Dr. Jérome Melancon, Dr. Michael poplyansky, Nadine Bouchardon, David

Lawlor and Halley Toth.

I would like to thank my course mates, Etommy Fredrick, Ruth Chukwuma, Francisca

Nwugo, Dorcas Oyebamiji and Rebecca Alao for making the master's program interesting. Many thanks for your support during this research. Last but not the least, I would like to thank my beautiful wife, Confidence Onyedikachi Nnam for helping me with necessary materials during this research. I also want to appreciate my family and friends for being there for me throughout this program, you will forever be in my heart. I love you all.

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TABLE DES MATIÈRES

Résumé/Abstract ii

Remerciements/Acknowledgment iii

Table des matières iv

Tableau de figures v

INTRODUCTION 1

CHAPITRE I : CADRE CONCEPTUEL ET THEORIQUE 6

1.1 Définition de pidgin 6 1.1.1 Raison de la création de pidgin 10 1.1.2 Types de pidgin 11 1.1.2.1 commerciaux et nautique 11 1.1.2.2 Pidgins étendus 11 1.1.2.3 Pidgins maritimes/nautique 12 1.1.2.4 Pidgins militaires 13 1.1.2.5 Pidgins urbains 14 1.1.2.6 Pidgins de plantation 14 1.1.2.7 Pidgins des mines et de l'industrie 16 1.1.3 Le statut de la langue pidgin 16

1.2 Définition de créoles 17 1.2.1 Types de créoles 22 1.2.1.1 Créoles exogènes 22 1.2.1.2 Créoles de plantation 23 1.2.1.3 Créoles marron 24 1.2.1.4 Créoles endogènes 25

1.3 Similitudes entre pidgin et créole 26 1.3.1 Différence entre pidgin et créole 27

1.4 Langues mixtes 29

1.5 Les particularités et dimensions d'un créole 31 1.5.1 Processus de créolisation 33 1.5.1.1 L'approche de Bickerton 34 1.5.1.2 L’approche de basilectalisation progressive 35 1.5.1.3 L'approche constructive 36 1.5.1.4 L'approche dominante 36

1.5.2 Contraintes de créolisation 42

iv

1.6 Choix d'une langue nationale 44 1.6.1 Implications du choix d'une langue nationale 46

CHAPITRE II : LE PIDGIN AU NIGÉRIA 48

2.1 Brève histoire du Nigéria 48

2.2 Diversité linguistique au Nigéria 51

2.3 Statut et hiérarchie des langues 56

2.4 Origine et l’évolution du pidgin au Nigéria 58

2.5 Pidgin nigérian 62

2.6 Politique linguistique au Nigéria 65

2.7 Particularités et variété du pidgin nigérian 68 2.7.1 Le pidgin oral 70 2.7.2 Le pidgin écrit 72

CHAPITRE III : LA PLACE ET L’AVENIR DU PIDGIN AU NIGÉRIA 74

3.1 Le pidgin dans le paysage linguistique actuel du Nigéria. 74

3.2 Aspects de la syntaxe du pidgin nigérian moderne 76

3.3 Avantages socioéconomiques reliés à la créolisation du pidgin nigérian 79

3.4 Obstacles à la créolisation du pidgin au Nigéria. 83

3.5 Les propriétés d'une langue standard 88

3.6 La survie du pidgin dans la société nigériane 88

CONCLUSION 92

BIBLIOGRAPHIE 96

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TABLEAU DE FIGURES

Tableau 1 : La différence entre le pidgin et le créole Page 28

Tableau 2 : Résumé des travaux de recherche « formels » sur Page 43

les langues au Nigéria au cours de trois décennies

1980-2010 (University of Ibadan -Nigeria)

Figure 1 : La carte du Nigeria Page 49

Tableau 3 : Les mots pidgins empruntés de différentes langues Page 70

Tableau 4 : Le marquage numérique dans les noms Page 76

Tableau 5 : Le nombre, le genre et le cas en pronoms Page 77

Tableau 6 : Formation de question ; certaines des façons dont Page 78

les gens posent des questions en pidgin.

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INTRODUCTION

Un pidgin est un moyen de communication grammaticalement simplifié qui se développe entre deux ou plusieurs langues qui n'ont rien en commun : typiquement, son vocabulaire et sa grammaire sont limités et souvent tirés de plusieurs langues. Le pidgin occupe une grande place au Nigeria. Le pidgin parlé au Nigeria est l’ensemble des langues indigènes et certaines langues européennes. Il joue un rôle important dans la société ; notamment au marché, dans les institutions supérieures et dans la rue où il y a les gens qui ne sont pas éduqués ou les gens qui ne parlent pas la même langue indigène. Le pidgin gagne du terrain dans la société nigériane et au- delà, il est actuellement parlé par environ 75 millions de personnes au Nigéria et parmi la diaspora nigériane, (Edosa, 2018). Il est largement utilisé comme et est actuellement la langue dont la croissance est la plus rapide au Nigéria ; pour de nombreux utilisateurs, il s'agit de la langue principale dans leur communication quotidienne, (Faraclas,

2013a). La première forme enregistrée du pidgin nigérian a été documentée par le célèbre Antera

Duke, un chef éminent et commerçant de Old Calabar, qui a principalement écrit sur les activités qui se sont déroulées entre l'Efik (une langue locale) et les partenaires commerciaux blancs. Le pidgin nigérian a commencé comme une langue de communication d'entreprise, et avec le temps, il s'est étendu à d'autres domaines et fonctionnalités, (Mensah, 2011). Le pidgin nigérian a l'anglais comme source lexicale principale, tandis que d'autres langues comme le français, le portugais et les langues indigènes du Nigeria sont la source de substrat de l'influence lexicale,

(Mensah, 2011). Il est à noter que le premier contact du peuple ouest-africain avec les Européens a été avec les Portugais au XVe siècle. Cela explique la présence d'une poche de mots portugais dans le lexique du pidgin nigérian tels que pikin (enfant), palaver (problème), gift (cadeau), sabi

(savoir), etc. (Vanamali, 1993).

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Les langues pidgins et surtout les créoles ont été au centre du siècle dernier, un sujet d'intérêt en raison de la façon dont elles remettent en question diverses théories de la langue. Ils ne correspondent pas au concept d'arbres généalogiques, c'est-à-dire à l'idée que les langues descendent d'un parent, car les pidgins et les créoles ont clairement plus d'un ancêtre. Depuis le début des études sur le pidgin et le créole, les principales questions ont donc été de savoir comment ces langues sont apparues, si elles forment un groupe structurel qui leur est propre et ce qu'elles peuvent nous dire sur la nature de la langue. Les créoles ont généralement reçu plus d'attention que les pidgins. L'étude systématique et scientifique des langues créoles a commencé dans la seconde moitié du XIXe siècle. Addison van est un pionnier des études créoles, la première étude comparative est intitulée « Contributions à la grammaire créole » d'Addison

(1869-1870), où il souligne leur pertinence pour la linguistique. Selon Édouard Glissant dans son

œuvre « une pensée archipélique », il a défini la créolisation comme la mise en contact de plusieurs cultures ou au moins de plusieurs éléments de cultures distinctes, dans un endroit du monde, avec pour résultant une donnée nouvelle, totalement imprévisible par rapport à la somme ou à la simple synthèse de ces éléments, (Glissant, 2008 :1).

Un autre pionnier important des études créoles est Adolpho Coelho, qui a tenté une vaste

étude comparative des créoles portugais-lexifiés dans plusieurs épisodes de la Boletim da

Sociedade de Geografíea de Lisboa en 1880-1882, sous le titre général « Os Dialectos

Romanicos ou Neo-Latinos na Africa, Asia e América » (« Les dialectes romans ou néo-latins en

Afrique, en Asie et en Amérique »). Coelho a soutenu que les créoles sont les résultats des principes universels de l'acquisition des langues étrangères. Hugo Schuchardt, un autre pionnier important des études créoles, et contemporain de Coelho, qui s’est inspiré des premiers travaux de Coelho. Schuchardt a en fait été appelé le « père incontesté des études créoles - pidgin »

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(DeCamp, 1977 : 9). Il a produit quelque 700 pages de descriptions et de discussions sur diverses langues créoles (Schuchardt,2019).

Les études sur les langues créoles sont devenues plus fréquentes dans la première moitié du XXe siècle et des contributions importantes ont été apportées par Dirk Christiaan Hesseling, travaillant spécifiquement sur l'afrikaans et le negerhollands, alors que Suzanne Sylvain travaillait spécifiquement sur l’haïtien, et bien d'autres. « Un autre universitaire qui a été appelé le « père des études créoles modernes » (Holm, 2000 : 38) est John E. Reinecke, dont la thèse de doctorat complète sur ce qu’il a appelé les « langues marginales », couvrait les jargons, les pidgins et les créoles. Dans sa thèse, Reinecke a non seulement discuté des théories du développement de ces langues et du problème de leur classification, mais il a également mené une enquête sur plus de 40 langues, discutant de leurs origines socio-historiques et de leurs caractéristiques linguistiques ainsi que d'une bibliographie complète pour chacune d'elles.

Une autre étape importante dans le domaine des études créoles et pidgins a été la première conférence internationale sur les études de langue créole tenue à Mona, Jamaïque en

1959. C'était la première fois que presque tous les spécialistes connus des pidgins et créoles de différentes parties du monde se réunissaient et au cours des discussions « les participants ont commencé à se considérer davantage comme des « créolistes » que comme des étudiants de français haïtien ou d'anglais jamaïcain » (DeCamp, 1977 : 12). Au moment de la deuxième conférence, tenue neuf ans plus tard, le domaine s'était élargi.

L’objectif de cette recherche est de décrire l’état actuel du pidgin dans la société nigériane, afin de ;

• Identifier les étapes pouvant mener à la créolisation du pidgin dans le contexte nigérian,

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• Déterminer les raisons pour lesquelles le pidgin ne bénéficie pas encore de

reconnaissance officielle, malgré sa popularité au sein de la population,

• Présenter des avantages associés à la reconnaissance de la langue dans le pays. Nous

nous pencherons également sur les avantages associés à une éventuelle créolisation de la

langue.

Pour réaliser ceci, nous commencerons la thèse avec l'introduction, qui contiendra la définition des mots-clés qui apparaissent dans le sujet de recherche, et puis de ce qui nous a motivé à choisir le sujet et la délimitation des études. Ainsi, nous expliquerons clairement comment le sujet et les sous-thèmes de chaque chapitre seront traités les uns après les autres.

La méthodologie adoptée pour cette recherche est descriptive, elle permet de faire ou de peindre l’image de la situation telle qu’elle d’un phénomène à partir des connaissances préalables sur le sujet, en se basant sur des études antérieures, (Debret, 2018). Dans le cadre de notre étude, nous nous sommes basés sur la littérature existante (articles, site web, etc.). Nous avons consulté plusieurs ouvrages qui ont été réalisés sur le pidgin et le créole par de nombreux auteurs notamment le Pidgin Nigérian. Nous voulons regarder ce que les gens ont déjà dit sur la créolisation et nous voulons l'appliquer au Nigéria pour voir si le Pidgin Nigérian peut devenir un créole ou une langue nationale. Le Nigéria a trois langues régionales majeures ; l'igbo, le yoruba et le houssa mais nous voudrions voir si le pidgin peut devenir une langue nationale même s'il n'a pas de statut officiel compte tenu du nombre de ses locuteurs.

Cette recherche nous ouvrirait les yeux sur de nombreux avantages si le pidgin nigérian devenait une langue officielle. Si le Pidgin Nigérian est reconnu comme une langue officielle ou une langue nationale, cela créera de nombreuses opportunités d'emploi, et cela aidera tout le monde à participer au développement du pays. Avec la façon rapide dont la langue du pidgin

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propage au Nigeria, nous pensons que si elle devient une langue officielle, cela stimulera l'économie du Nigéria. Mais la question c'est pourquoi le pidgin nigérian demeure encore une langue non reconnue officiellement malgré son expansion rapide au sein de la population ?

Pourquoi le gouvernement ne veut pas déclarer le pidgin comme une langue officielle ?

Le gouvernement a un rôle important à jouer si le Pidgin Nigérian deviendrait une langue officielle. La raison pour laquelle le Pidgin Nigérian doit être considéré comme une langue nationale ou une langue officielle c'est parce que le nombre de personnes qui le parlent sont nombreux (3 Nigérians sur 4 parlent le pidgin) (Edosa, 2018). Il est parlé dans de nombreuses stations de télévision et de radio (Ex. BBC, NTA, AIT, WAZOBIA etc.), il est utilisé dans de nombreux films nigérians, les comédiens l'utilisent, les musiciens, même les politiciens l'utilisent pendant la campagne électorale, les footballeurs l'utilisent entre eux, il est également utilisé pour la publicité et pour transmettre des informations importantes au public.

Après l'introduction, nous allons passer au corps du travail. La recherche sera divisée en trois chapitres. Le chapitre 1 de cette recherche examinera le cadre conceptuel et théorique, définition de pidgin, raisons de la création de pidgin, le statut social des langues pidgin, types de pidgins, définition du créole, types de créoles, langues mixtes, similitudes entre pidgin et créole, les différences entre pidgin et créole, les particularités et dimensions d'un créole, processus de créolisation, contraintes de créolisation, choix d'une langue nationale et l'implication du choix d'une langue nationale. Le chapitre 2 examinera la brève histoire du Nigeria, la diversité linguistiques au Nigéria, statut et hiérarchie des langues, langues exogènes et langues neutre, le pidgin au Nigeria. Nous examinerons l’origine et l’évolution du pidgin au Nigéria, les particularités et la variété du pidgin nigérian. Nous allons parler du pidgin oral et du pidgin écrit.

Ici, nous allons montrer les différentes façons du pidgin parlé dans les différentes régions du

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Nigeria et les variétés du pidgin écrit. Le chapitre 3 examinera la place et l’avenir du pidgin au

Nigeria, Les avantages économique et social de la langue, les rôles de la société de garder la langue à mourir ainsi que les obstacles à la créolisation du pidgin.

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CHAPITRE 1 : CADRE CONCEPTUEL ET THEORIQUE

Cette première partie du travail portera sur la définition du pidgin et du créole par différents auteurs, les différences et les similitudes entre le pidgin et le créole, la raison pour laquelle le pidgin a été créé, le statut social du pidgin, les différentes types du pidgin et créole, les particularités et les dimensions d'un créole, les processus de créolisation, les contraintes qui peuvent empêcher le pidgin de devenir un créole, le choix d'une langue nationale et les implications du choix d'une langue nationale. Il est nécessaire de parler de la langue avant de définir le pidgin et le créole.

La langue est un système conventionnel de symboles parlés, manuels ou écrits, grâce auquel les êtres humains, membres d'un groupe social et participants à sa culture, s’expriment,

(Akinola, 2016). Les fonctions de la langue incluent la communication, l'expression de l'identité, le jeu, l'expression imaginative et la libération émotionnelle, (Crystal, 2017). Les linguistes américains ont formulé la définition suivante ; Une langue est un système de symboles vocaux arbitraires au moyen duquel un groupe social coopère, (Bernard et George, 1960). La langue est notre outil de communication privilégié. Elle est un système de signes conventionnels ; elle peut

être gestuelle, visuelle et orale.

1.1 DÉFINITION DE PIDGIN

Au début, une langue pidgin n'a pas de locuteurs natifs et elle était utilisée uniquement pour faire des affaires entre des personnes qui partagent que cette langue. Les pidgins sont des langues apparues dans des situations de contact intense, dans lesquelles les locuteurs de langues mutuellement incompréhensibles avaient besoin d'un moyen de communication. Un pidgin est une langue qui apparaît lorsque des groupes de personnes sont en contact étroit et répété, et ont besoin de communiquer les uns avec les autres mais n'ont pas de langue en commun, (Vevika,

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2015). Un besoin de communication se présente dans de nombreuses situations, mais chaque partie parle des langues mutuellement inintelligibles et doit donc recourir à une sorte de pont de communication. Le commerce, par exemple, est l'une de ces situations. Si les locuteurs de différentes langues se rencontrent à plusieurs reprises pour négocier, ils auront besoin d'un outil de communication. Cet outil doit uniquement servir à la fonction immédiate de la situation et n'est généralement utilisé que dans cette situation particulière ; pour tout le reste, les parties ont leurs propres langues respectives. Si cet outil ou ce pont de communication est utilisé systématiquement, une nouvelle variété linguistique, un pidgin, peut émerger. Il est important de garder à l'esprit que les pidgins ne sont pas des langues ad hoc, mais qu'ils ont une structure linguistique à apprendre, (Viveka, 2015).

Il y a donc quelques éléments cruciaux dans la définition donnée ci-dessus. Tout d'abord, le contact doit être répété ou étendu. Un pont de communication spontané entre, par exemple, un touriste français qui ne parle que le français et un marchand de fruits italien qui ne parle que l’italien, impliquant de nombreux gestes et efforts pour se comprendre, n’est pas un pidgin, mais un jargon. Deuxièmement, dans une situation de contact qui donne lieu à un pidgin, les langues de chaque partie ne sont généralement pas mutuellement intelligibles. Le danois et le suédois, par exemple, sont deux langues très proches qui se comprennent dans une large mesure. Un touriste danois parlant une sorte de danois lors de négociations avec un vendeur de fruits suédois ne parle pas un pidgin. Si ce genre de situation se présentait systématiquement, il pourrait en résulter un nivellement dialectal des deux variétés linguistiques, chaque partie rendant sa variété plus semblable à celle de l’autre. Troisièmement, un pidgin n'est pas simplement une deuxième langue imparfaitement apprise. Par exemple, les locuteurs qui essaient d'apprendre une nouvelle langue auront différents niveaux de compétence tout en l'apprenant, ce qui pourrait simplifier la

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langue cible de différentes manières. Ou encore, les immigrés peuvent être imparfaitement compétents dans la langue de leur pays d'accueil. Dans aucun de ces cas, les locuteurs n'utilisent un pidgin, mais plutôt ce qu'on appelle une langue inter (parfois appelé aussi une langue cassée).

Quatrièmement, le pont de communication, le pidgin, est généralement utilisé dans des situations spécifiques. Par exemple, le pidgin sera utilisé par ses locuteurs au marché, au port, sur le bateau ou dans les plantations, mais pas chez eux et généralement pas à des fins sociales, (Viveka,

2015).

En outre, le pidgin doit être utilisé par deux groupes de langues ou plus. Comme le note

Jourdan, « Un pidgin est une langue secondaire dans une communauté de parole » (Jourdan,

1991 : 196), c'est-à-dire qu'un pidgin n'est généralement pas la langue maternelle de ses locuteurs, bien qu'il existe des situations dans lesquelles les langues pidgin acquièrent des locuteurs natifs, notamment en milieu urbain. Un pidgin est une langue structurée qui émerge de la nécessité d'un pont de communication entre des locuteurs de langues mutuellement inintelligibles. Il est généralement appris en tant que langue seconde et est généralement utilisé dans des situations spécifiques ou en tant que lingua franca dans les communautés.

Si une forme de la langue cassée est utilisée uniquement par le groupe A dans leurs contacts avec le groupe B, et non par B dans leurs contacts avec A, ce n'est probablement pas un pidgin, mais soit une forme de conversation étrangère soit une seconde langue imparfaitement apprise, (Bakker, 1994 : 26). Si un jargon est utilisé assez régulièrement, il pourrait se stabiliser dans un moyen de communication classique. Ce processus implique généralement que l'outil de communication acquiert un ensemble de normes structurelles pouvant être apprises plus ou moins parfaitement comme deuxième langue - elle est devenue une nouvelle langue, un pidgin.

Nous pouvons ainsi définir le pidgin comme des « systèmes de communication normatifs à

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acquérir, mais qui ne sont pas encore la langue maternelle » (Bakker, 2008 : 131). Un pidgin est une langue qui doit être apprise - par opposition aux solutions ad hoc d'un jargon - et qui peut donc être apprise à un degré de compétence supérieur ou inférieur. En d’autres termes, une personne peut parler plus ou moins couramment le pidgin.

En outre, plus généralement, le pidgin est une langue secondaire pour les locuteurs, généralement utilisée dans certains contextes, ou en tant que lingua franca lorsqu’ils communiquent avec des locuteurs de langues autres que la leur. Cela signifie que la plupart de ceux qui utilisent un pidgin auront une autre langue principale qu'ils utilisent par exemple à la maison ou pour des fonctions plus expressives, telles que la narration d'histoires ou la poésie. Les pidgins peuvent exister pendant de longues périodes, voire plusieurs siècles. Généralement, ils survivront, c'est-à-dire qu'ils continueront à être transmis de génération en génération tant que la situation de contact existera. Si les contextes dans lesquels ils sont utilisés cessent d'exister pour une raison quelconque, le pidgin est susceptible de disparaître. Par exemple, le 19ème siècle a vu une industrie de la chasse à la baleine intensive, ce qui a conduit à un certain nombre de variétés de contact utilisées avec et parmi les baleiniers sur les navires et les ports. Une fois que cette industrie s'est estompée, le besoin de ces variétés s'est estompé, (Velupillai, 2015).

En linguistique, un pidgin est une forme de langue simplifiée formée d'une ou de plusieurs langues existantes et utilisée comme lingua franca par des personnes qui n'ont pas d'autre langue en commun. Les autres définitions sont les suivantes : le pidgin est une langue

émergente ayant besoin de communication parmi les personnes qui n’ont pas la même langue à utiliser - par exemple parmi les ouvriers de plantation qui venaient de différentes origines géographiques, (Jeff, 2008). Le pidgin est un système linguistique développé par des personnes qui n’ont pas de langue commune à partager, c’est une langue de contact où il n’y a pas de

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langue commune à utiliser. Todd (1974) définit le pidgin comme suit : « Un pidgin est une langue marginale qui répond à certains besoins limités » Selon, RL Trask et Peter Stockwell

(2007 :5), « le pidgin n'est la langue maternelle de personne et ce n'est pas une vraie langue du tout : il n'a pas de grammaire complexe, il est très limité dans ce qu'il peut communiquer et différentes personnes le parlent différemment ». Pourtant, pour des raisons simples, cela fonctionne et souvent, tout le monde dans la région apprend à le manipuler. De nombreux linguistes s'opposent à l'observation de (Trask et Stockwell, 2016 :3) selon laquelle un pidgin « n’est pas du tout une vraie langue ». Wardhaugh, (2010) par exemple, observe qu'un pidgin est « une langue sans locuteurs natifs, il est parfois considéré comme une variété réduite d'une langue normale. Si un pidgin devient la langue maternelle d'une communauté de parole, il est alors considéré comme un créole ».

1.1.1 RAISONS DE LA CRÉATION DE PIDGINS

La création de pidgin a plusieurs raisons, notamment parce que les personnes n’ont pas une langue commune pour communiquer. Par conséquent, le besoin de communication les conduit à créer un pidgin. Un bon exemple sont les esclaves importés d'Afrique au XIXe siècle en Amérique du Nord pour travailler dans les plantations. Ils venaient de différentes parties du continent. Ils n'avaient pas de langue partagée entre eux. Leurs chefs les ont choisis dans différentes régions pour les empêcher de communiquer et de s’échapper. Ils ont donc dû développer une langue pour communiquer. Ils ont fini par créer une langue pidgin, (Cassidy,

1971 : 205).

Une autre raison de la création de pidgin est la colonisation. La plupart des pidgins ont

été créés en français, espagnol, portugais, anglais et néerlandais en raison de leur pouvoir sur les colonies. Il est évident qu'il doit toujours y avoir une langue supérieure et dominante à laquelle la

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majeure partie du vocabulaire d'un pidgin est empruntée, (Versteegh, 2008 : 161). Ces langues dominantes sont appelées langues superstrates; en créole de Papouasie-Nouvelle-Guinée, la langue des superstrats était l'anglais, (Versteegh, 2008). Par ailleurs, toutes les autres langues minoritaires qui contribuent à un pidgin sont appelées langues de substrat. Les langues superstrates sont celles sur lesquelles les pidgins ou les créoles sont principalement basés et c'est généralement la langue du peuple colonisateur, (Arends et al., 1995 : 99).

1.1.2 TYPES DE PIDGINS

Comme nous l'avons déjà mentionné, un pidgin est formé en raison du manque d'une langue commune parmi les personnes dans une situation géographique particulière. Dans cette section, nous traiterons de sept différents types de pidgins et des domaines dans lesquels ils sont utilisés.

1.1.2.1 Pidgins commerciaux et nautiques

Le commerce a joué un rôle déterminant dans l’émergence de pidgins : des situations répétées dans lesquelles des personnes de différentes origines linguistiques devaient pouvoir communiquer entre elles. Le commerce impliquait souvent les navires en tant que moyen de transport et de communication essentiel. En général, cela impliquait la navigation de plaisance mais le commerce par voies navigables inclut également les lacs et les rivières. Par conséquent, il n’est pas toujours possible de donner des catégories de pidgins maritimes ou nautiques versus pidgins du commerce. Certains pidgins typiquement maritimes ou nautiques étaient principalement utilisés comme des langues commerciales. D'autre part, tous les échanges ne dépendaient pas des voies navigables, de sorte que tous les pidgins commerciaux ne sont ou n'étaient pas maritimes ou nautiques.

1.1.2.2 Pidgins étendus

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Si un pidgin devient le principal moyen de communication inter-ethnique, il peut être utilisé dans plus de domaines qu’il n’était pas utilisé à l’origine. Ainsi ce pidgin est appelé pidgin

étendu ou pidgin stable. Ce terme, suggéré à l'origine par Loreto Todd, était destiné à indiquer que la langue s'avère d'une importance vitale dans une région multilingue et, en raison de son utilité, est étendue et utilisée au-delà de fonction limitée qui l’a fait naître, (Todd, 1974 : 5). Plus récemment, le terme pidgincréole a été suggéré, Bakker (2008 : 131) pour indiquer que ces types de langues ont des affinités avec les pidgins et les créoles. La principale différence entre les pidgins et les pidgins étendus (pidgincréoles) réside dans le fait que ces derniers sont devenus la langue principale de la communauté, régulièrement utilisés dans un grand nombre de situations, peut-être même au sein de la communauté ou de la famille proche. Une autre différence importante est que, une fois que la langue est devenue un moyen de communication aussi important, elle peut devenir une langue maternelle pour certaines personnes. Ceci est particulièrement vrai en milieu urbain et se produit avec, par exemple, Tok Pisin (Papouasie

Nouvelle Guinée) et le pidgin nigérian. Les pidgins étendus (pidgincréoles) sont généralement plus stables que les pidgins. Ils sont généralement utilisés dans une grande variété de situations, des transactions quotidiennes aux marchés, aux fonctions officielles et aux médias. Tout comme les pidgins, ils ont des normes structurelles qui doivent être apprises et peuvent être apprises à un degré plus ou moins élevé de compétence. Avec un pidgin, un apprenant aurait peut-être seulement dû maîtriser les règles d'achat, de vente, de refus et d'acceptation de marchandises. Un pidgin étendu (pidgincréole) possède un ensemble plus large de normes structurelles et une utilisation - en principe - illimitée.

1.1.2.3 Pidgins maritimes / nautiques

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Un certain nombre de pidgins ont émergé à la suite de communications inter-ethniques entre des marins de différentes origines linguistiques à bord de navires et entre navires, ainsi qu'entre des marins et des côtiers, par exemple lors de leurs transactions dans les ports. Un exemple de pidgin maritime ou nautique connu à ce jour - en fait le plus ancien pidgin connu à ce jour - est Lingua Franca (parfois aussi appelé Sabir), qui a été parlé dès l'époque des croisades, sinon plus tôt, et utilisé dans les ports de la côte méditerranée jusqu'au 19ème siècle.

La pêche a conduit à un certain nombre de pidgins maritimes. Les basques, par exemple,

étaient des marins de bonne heure très expérimentés. Leurs techniques de construction navale

étaient très avancées et ils ont été parmi les premiers Européens à se livrer à la chasse à la baleine et à la pêche au cabillaud en haute mer. Cela les a conduits dans les zones de pêche nord- atlantiques et arctiques, ce qui les a mis en contact avec les populations riveraines. Il existe des preuves de pidgins lexifiés par le basque le long des côtes orientales de l'Amérique du Nord ainsi qu'en Islande aux XVIe et XVIIe siècles, (Bakker, 1989). La pêche était également la raison des contacts intenses entre les navires norvégiens et russes autour du Cap Nord aux XIXe et XXe siècles, ce qui a conduit au pidgin mixte Russenorsk. Le pidgin chinois en anglais est un exemple de pidgin commercial parlé principalement dans les ports où le commerce avec les Européens

était autorisé. Il est apparu dans le sud de la Chine et a survécu pendant plus de deux siècles. Il est maintenant effectivement éteint, bien qu'il y ait-t-il encore des gens qui se souviennent,

(Matthews & Li, 2013).

1.1.2.4 Pidgins militaires

Les pidgins militaires sont apparus dans des situations où les troupes ou les forces étaient composées de membres de divers horizons linguistiques. Un exemple de pidgin militaire est l’arabe de Juba (appelé arabi juba par ses locuteurs), un pidgin étendu (le pidgincréole)

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soudanais, parlé au Sud-Soudan. Il est apparu dans les camps militaires égyptiens au Sud-Soudan dans lesquels des soldats de différentes origines ethniques avaient été recrutés. Elle a survécu en tant que lingua franca et est actuellement parlée par la majorité des Soudanais du Sud. Elle a même acquis un nombre considérable de locuteurs de langue maternelle, en particulier dans la capitale, Juba, (Manfredi & Petrollino, 2013a). Les militaires nigérians utilisent le Pidgin

Nigérian pour une communication facile entre eux.

1.1.2.5 Pidgins urbains

Le pidgin hawaïen est l'un des exemples de pidgin urbain, issu du contact inter-ethnique en milieu urbain ; mais son utilisation était initialement limitée à Honolulu et aux autres communautés comptant un grand nombre d'anglophones, (Roberts, 2013a : 120). Très rapidement, il s'est étendu à d'autres domaines et est devenu le principal moyen de communication inter-ethnique dans les plantations. Flaaitaal (également appelé Tsotsitaal ou

Iscamtho) est parfois appelé vernaculaire de contact urbain. Il est apparu au XXe siècle dans les communautés urbaines de l'Afrique du Sud comme un « résultat en groupe d'interactions sociales et linguistiques entre égaux, ou partageant des valeurs et des perspectives socioculturelles similaires », (Makhudu, 2002 : 399) utilisé par les hommes adultes africains. Cependant,

Flaaitaal n'est pas un pidgin en soi, mais plutôt un marqueur d'identité de sous-culture dans le groupe, (Slabbert & Myers-Scotton, 1996) et (Mesthrie, 2008). Le Pidgin Nigérian est un autre exemple de pidgin urbain, il est parlé dans toutes les grandes villes du pays.

1.1.2.6 Pidgins de plantation

Un type important de pidgin multilingue sur le marché du travail est le pidgin de plantation, né des grandes entreprises agricoles qui ont été l’un des nombreux effets de l’expansion et de la colonisation européennes. La nécessité d'une main-d'œuvre nombreuse et

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constante pour la plantation, conjuguée aux conditions difficiles, a conduit à une importation massive de main-d'œuvre sur les sites de plantation, avec des ouvriers de divers horizons linguistiques. Ce type de pidgin a fait l’objet d’une attention particulière du fait que beaucoup des langues de contact que nous connaissons aujourd’hui ont leur origine dans des contextes de plantation.

Le Tok Pisin est un exemple de pidgin de plantation, utilisé à l'origine principalement dans les plantations des territoires allemands de la Nouvelle-Guinée. Il existe différentes théories sur l'origine exacte de Tok Pisin: il se peut que Tok Pisin soit une descendance du pidgin de plantation samoan, (Mühlhäusler, 1976) et Mosel & (Mühlhäusler, 1982), largement repris dans

(Smith & Siegel, 2013a), rapportés par les travailleurs des plantations néo-guinéennes rentrant chez eux et utilisés dans des plantations néo-guinéennes. Cependant, les archives archivistiques allemandes peuvent suggérer qu’il existait également les travailleurs des plantations allemandes de Nouvelle-Guinée qui avaient acquis un pidgin anglais alors qu'ils travaillaient dans le

Queensland, (Huber & Velupillai, 2009), auquel cas le Tok Pisin pourrait être une progéniture partielle du Queensland Plantation Pidgin. Quelle que soit l'origine exacte de Tok Pisin, il est juste de supposer que le langage (ou plutôt ses prédécesseurs) est le résultat d'une main-d'œuvre multiethnique dans les plantations. Sur les îles d'Hawaï, deux pidgins distincts se sont développés : un pidgin hawaïen lexifié, puis un pidgin lexifié anglais. Aucuns des deux n’a

émergé à la suite de plantations, bien que les deux soient devenues le principal moyen de communication dans les plantations. Le pidgin hawaïen était à l’origine spécifiquement utilisé entre hawaïens et étrangers ; à la fin du XIXe siècle, il était devenu la principale langue utilisée par les travailleurs des plantations de différentes origines. Quelques décennies plus tard, le pidgin anglais d’Hawaii, qui a émergé dans les centres urbains et en interaction avec les

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anglophones, a gagné en prestige et a rapidement remplacé le pidgin hawaïen également dans les plantations, (Roberts, 2013a).

1.1.2.7 Pidgins des mines et de l'industrie

Le pidgin de mine et de l'industrie est le type de pidgin utilisé dans les mines et les industries parmi les travailleurs et les personnes qui les entourent. Shaba Swahili (également appelé Lubumbashi Swahili) est un exemple de pidgin minier apparu entre 1920 et 1940 à la suite de l’exploitation d’une mine de cuivre belge à Shaba (anciennement le Katanga), dans le

Sud-Est de la République démocratique du Congo. La main-d'œuvre a été recrutée dans toute l'Afrique centrale, menant à une main-d'œuvre multilingue, (Rooij,1994a). Le shaba swahili est devenu un pidgin étendu (pidgincréole) et est largement utilisé dans tous les domaines de la société shaban, (Kapanga, 1998). Une autre langue généralement citée comme pidgin minier est le Fanakalo en Afrique du Sud. Il a été créé il y a environ 200 ans et était utilisé à l'origine sur le marché du travail, comme dans les fermes, les mines, le travail domestique, etc. C'est encore une langue largement parlée, même si en déclin, et elle est utilisée dans les situations de travail ainsi que dans les communications transactionnelles telles que les stations-service, les magasins, les marchés et les magasins de commerce rural, dans lesquelles l'un des interlocuteurs est noir et l'autre Indien ou blanc, (Mesthrie & Surek-Clark, 2013 : 34).

Le pidgin Ngarluma est un exemple de pidgin industriel qui a été utilisé vers les dernières décennies du XIXe siècle dans la région de North West Cape, en Australie, comme langue de contact entre les peuples autochtones et les premières années de l’industrie perlière de Pilbara,

(Dench, 1998 : 57).

1.1.3 LE STATUT SOCIAL DES LANGUES PIDGIN

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Le pidgin n'est généralement pas reconnu comme une langue à part entière dans les sociétés où il est utilisé. Très souvent, une langue pidgin est perçue comme un discours « paresseux » ou « cassé » sans prestige apparent et pouvant même avoir un impact négatif sur l'utilisateur. Pour acquérir un statut positif, il n'est pas nécessaire que les langues deviennent officielles dans un pays ou une région donnée : le Nagamais, par exemple, est la lingua franca commune du Nagaland, à l'extrême nord-est de l'Inde, à la frontière avec le Myanmar. Il est largement utilisé dans toutes les couches de la société, à la fois dans les ménages privés, tels que les ménages mixtes, et dans les domaines publics, tels que les médias, les annonces gouvernementales et comme moyen d’enseignement dans les écoles (Boruah, 1993 et Sreedhar,

1985). Les pidgins peuvent également avoir un statut positif en tant que marqueurs d’identité :

Juba Arabic (le pidgin parlé au Sud-soudan) est devenue le symbole d'une « identité super-tribale sud-soudanaise » (Manfredi & Petrollino, 2013a : 55). Les pidgins sont généralement des langues orales et non écrites. En République centrafricaine, par exemple, malgré son statut officiel, le sango n'est pas utilisé dans des contextes formels. Au lieu de cela, le français est la langue des médias, du système éducatif et des institutions officielles, (Manfredi & Petrollino,

2013a).

1.2 DEFINITION DE CRÉOLE

Le terme « créole » était utilisé à l’origine pour les Européens nés dans les colonies, en particulier les Caraïbes. Le terme a ensuite été utilisé pour désigner toute personne, animal ou plante né, élevé ou cultivé dans les colonies (en particulier les colonies des Caraïbes), par opposition à celles d'origine autochtone ou importées récemment. Peu à peu, le terme « créole » a

été utilisé pour désigner la culture et la langue de ceux qui constituaient la majeure partie de la population des colonies. La première utilisation connue du terme « créole » pour désigner une

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langue provient d'un récit de voyage du Portugais Francisco de Lemos Coelho en 1684 où il écrit

à propos du « creoulo » de Cacheu Guinée-Bissau, (Bartens, 2013a) et (Couto, 1994 : 35). La première utilisation connue en anglais de « créole » pour désigner une langue date de 1726.

Actuellement, le terme en anglais est principalement utilisé pour désigner les langues issues de l'expansion et de la colonisation européennes du monde, bien qu'il existe un certain nombre de langues créoles connues qui ne sont liées à aucune langue européenne. Par exemple, juba arabe, yilan créole japonais etc.

Un créole est une langue naturelle parlée en tant que langue maternelle par toute une communauté née de situations de contact intense. Les créoles sont des langues à part entière

égales à toutes les autres langues naturelles du monde et sont capables de répondre à tous les besoins linguistiques de la communauté de la parole concernée. En d’autres termes, tout ce qui peut être parlé, réfléchi et conduit, par exemple en japonais, italien, français, russe ou toute autre langue du monde parlée comme langue maternelle par toute une communauté, peut également

être parlé, pensé et mené dans n'importe quelle langue créole donnée. Les créoles sont des langues apparues dans des situations de contact intense. Ils sont les langues maternelles de communautés entières et peuvent remplir toutes les fonctions de la langue humaine. Ils tirent généralement l'essentiel de leur lexique d'une ou de plusieurs langues, généralement celle (ou celles) parlée(s) par une minorité politiquement dominante dans les colonies. Les langues créoles ont une longue histoire de stigmatisation et de condescendance, généralement considérées comme des versions inadéquates et corrompues de leurs lexiques. Le terme « créole » vient du criar ibérique « élevage » (du latin creare « créer, produire ») et signifiait à l’origine « indigène,

élevé dans le pays ». Les créoles peuvent être divisés en différents types en fonction de la situation de contact qui a donné lieu à la langue, (Viveka, 2015). Les créoles exogènes sont

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celles où ni les colonisateurs ni la main-d'œuvre (esclave ou sous contrat) ne sont indigènes de la région où le créole est né. Des exemples sont les créoles de plantation, qui sont apparus dans les plantations, et les créoles marrons, qui ont été formés par des esclaves évadés qui ont créé leurs propres communautés loin de l'institution de l'esclavage. Les créoles endogènes sont ceux qui sont apparus dans des régions où au moins une partie de la population qui formait la langue était autochtone. Les créoles de fort ont leur origine dans des centres d'échanges où les colons

(principalement engagés dans le commerce) étaient des étrangers et au moins une partie de la main-d'œuvre était autochtone. Les créoles sont généralement supposés être moins complexes que leurs langues d'entrée, avec un système phonémique et morphologique simplifié et une grammaire et un lexique plus transparents. Certains affirment que les créoles peuvent être identifiés par leur structure linguistique, c’est-à-dire qu’ils forment un type particulier de langue

(voir par exemple McWhorter, 2005, Bakker et al. 2011 et Bartens, 2013a).

D’autres soutiennent qu’il n’existe aucune (ou pas assez) de preuves permettant d’affirmer que les créoles constituent une classe typologique distincte et que la motivation pour traiter certaines langues en tant que créoles réside dans les contextes socio-historiques dans lesquels elles ont émergé (Mufwene, 2000, DeGraff, 2003 et Ansaldo & Matthews, 2007).

Toutefois, aucun linguiste sérieux ne s'interroge sur le fait que les langues créoles sont des langues naturelles parfaitement adéquates, susceptibles de répondre à tous les besoins linguistiques des locuteurs.

Un créole est une langue stable naturalisée qui a vu le jour grâce à la combinaison de deux ou plusieurs langues. C’est une langue développée ou dérivée de sabir. Quand une langue a son origine dans un espace étendu entre plusieurs communautés, dont l’un est européen alors la langue est appelée un créole. Le créole intègre les caractéristiques de toutes les langues parentes

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pour établir la langue maternelle d'une communauté. Le créole a des locuteurs natifs.

Contrairement au pidgin, il est la première langue des enfants de la communauté où il est parlé, c’est-à-dire que c’est une langue maternelle pour les enfants. (Bickerton, 1988). La créolisation est définie comme une forme particulière d’ethnogenèse qui, dans les contextes de plantation,

était un processus par lequel les mondes sociaux et matériels ont été définis. Un créole apparaît lorsque les enfants naissent dans un environnement parlant le pidgin et acquièrent le pidgin comme langue maternelle. Todd (1974 :3) définit également un créole de la façon suivante : « un créole se présente lorsqu'un pidgin devient la langue maternelle d'une communauté de parole ». Il est plus simple de définir un créole comme tout pidgin qui devient stable et que les enfants apprennent en tant que langue maternelle.

Les langues créoles n’ont généralement pas été acceptées comme langues d’éducation ou de médias et ont rarement un statut officiel dans les sociétés où elles sont parlées. Au lieu de cela, les langues des anciens colonisateurs sont considérées comme les seules langues souhaitables et acceptables. En bref, la seule voie vers le bien-être individuel et collectif consiste

à acquérir la langue européenne de l'ancien colonisateur. Cette attitude prévaut encore dans beaucoup de sociétés ; par exemple, dans de nombreux cas, le créole ne figurera pas parmi les langues officielles. Angolar, par exemple, n'était pas répertorié comme langue nationale de la

République démocratique de São Tomé et Príncipe lors du recensement de 2006 (Maurer,

2013a). De même, les langues officielles de Hawaii sont l’anglais et l’hawaïen, mais pas l’anglais hawaïen créole, langue maternelle de la moitié de la population. L’enseignement en hawaïen se fait en anglais standard (américain) et la langue des médias est également en anglais standard (américain), à l’exception des éléments tels que les dessins animés et les publicités.

L’anglais créole hawaïen est généralement considéré comme un obstacle à l’avancement.

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De telles attitudes ont poussé beaucoup de créolophones à considérer leur propre langue comme arriérée ou inférieure, ce qui a amené beaucoup de personnes à nier le fait qu'elles avaient une langue créole comme langue maternelle. Ces types de situations mènent aussi généralement à la diglossie, où les locuteurs utilisent des variétés de langue spécifiques dans des situations spécifiques, généralement en créole dans des situations familières ou informelles tout en utilisant la ou les langues officiellement reconnues dans des situations officielles ou formelles.

Ambon Malay, par exemple, est parlé sur l'île d'Ambon (Indonésie) depuis plusieurs siècles et compte environ 200 000 locuteurs de langue maternelle. Il est également utilisé comme lingua franca par un million de locuteurs des îles Maluku du centre et du sud. Cependant, les locuteurs d'Ambon Malay le considèrent souvent comme une variété inférieure d'Indonésien (Paauw,

2013a : 94). Les deux langues entretiennent une relation diglossique l'une avec l'autre, l'indonésien étant utilisé dans des contextes formels (administration publique, médias, éducation, etc.) et Ambon Malay utilisé à la maison ou lors d'une interaction informelle au sein de la communauté (Paauw, 2013a).

Néanmoins, comme le souligne Viveka (2015) les deux dernières décennies ont amené un certain degré de renversement de ces attitudes à des degrés divers dans de nombreuses sociétés où les langues créoles sont parlées. À Hawaii, par exemple, les mentalités évoluent lentement pour permettre de reconnaître le fait que l’anglais créole hawaïen est une langue pleinement fonctionnelle comme toute autre, grâce aux programmes de sensibilisation ciblés de Mānoa, ainsi que des locuteurs qui commencent à affirmer la validité de la langue. Le Palenquero, parlé par quelques milliers de personnes dans le village d'El Palenque en Colombie, était jusqu'à récemment fortement stigmatisé, ce qui a amené les jeunes générations à passer à l'espagnol

(Viveka, 2015). Cependant, la dernière décennie a été marquée par un renversement d'attitude.

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Aujourd'hui, de nombreux adolescents prennent beaucoup de plaisir à apprendre le créole et le temps où Palenquero et sa culture étaient rejetés est révolu (Schwegler, 2013a : 182). Les sociétés ont également commencé à accepter les langues créoles dans l'enseignement. À

Trinidad, par exemple, le créole trinidadien est accepté dans les écoles primaires depuis 1975

(Mühleisen, 2013a). Le créole haïtien et le français sont les langues officielles d'Haïti, bien que la plupart des textes administratifs soient en français et aient été acceptés comme moyen d'enseignement en 1979 (Fattier, 2013). Néanmoins, le français est toujours considéré comme la langue préférée. Malgré cette stigmatisation et malgré le fait que les créoles étaient pour cette raison, jusqu'à récemment, principalement des langues orales et non écrites, de nombreuses sociétés dans lesquelles les langues créoles sont parlées ont connu un usage littéraire dynamique de ces langues. Un certain nombre de langues créoles sont utilisées pour la poésie, le théâtre, les romans, etc.

En d'autres termes, le pidgin est un antécédent de créole. La question est maintenant de savoir ce qui a créé l’uniformité et les différences. Pour trouver une réponse à cette question, nous devons examiner les similitudes et les différences entre le pidgin et le créole.

1.2.1 TYPES DE CREOLES

Le cadre sociohistorique exact pour une langue donnée est unique, y compris pour une langue créole donnée. Comme nous l'avons déjà mentionné, un créole est une langue naturelle parlée en tant que langue maternelle par toute une communauté née de situations de contact intense.

Pourtant, dans cette section, nous traiterons de quatre différents types de créoles et des domaines dans lesquels ils sont utilisés. Le fossé le plus fondamental entre les types de créoles en ce qui concerne leurs antécédents sociohistoriques est de savoir si les locuteurs étaient autochtones ou non de la région (Viveka, 2015).

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1.2.1.1 Créoles exogènes

Les créoles exogènes sont ceux qui sont apparus dans un environnement où aucun des groupes impliqués n'était autochtone. Ici, nous avons essentiellement une situation où différents degrés de migration ont mis en contact des personnes de langues différentes. Il s’agissait généralement de colonies de peuplement situées soit dans des zones auparavant inhabitées, soit dans des zones où la population autochtone avait rapidement décliné après la colonisation

(généralement en raison de maladies importées associées à des conditions de travail pénibles et / ou à un génocide). Les deux situations ont généralement entraîné une importation massive de main-d'œuvre, généralement de personnes d'origines diverses. Cela a conduit à une main-d'œuvre linguistiquement hétérogène. Avec les créoles exogènes, les locuteurs des langues superstrates et les locuteurs des langues substrats étaient donc des immigrés dans la région où le créole était né.

Les colons étaient généralement numériquement minoritaires mais dominaient sur le plan socioéconomique et assujettissaient la main-d'œuvre, malgré la majorité numérique de cette dernière.

1.2.1.2 Créoles de plantation

L'exemple le plus typique d'un créole exogène est un créole de plantation, né dans le contexte de l'économie de plantation coloniale. L'expansion européenne a vu une multitude de sociétés de plantation. Cela a conduit à une importation à grande échelle de main-d'œuvre, sous forme de travail forcé (surtout dans l'Atlantique) ou de travailleurs sous contrat (surtout dans le

Pacifique). La main-d'œuvre était généralement hétérogène sur le plan linguistique, ce qui signifiait que les ouvriers avaient besoin d'un pont de communication commun. Les colons européens appartenaient généralement à la minorité numérique, mais dominaient politiquement les sociétés. La main-d'œuvre devait généralement être capable de fonctionner dans la langue des

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propriétaires de plantations ; Ce fait et le fait que la main-d'œuvre n'avait pas de langue commune, ont généralement amené la langue européenne à devenir le principal pont de communication au sein de la main-d'œuvre. De plus, l'accès aux différentes langues de substrat des différents groupes ethniques composant la main-d'œuvre était limité une fois que la main- d'œuvre (notamment les esclaves) avait été transportée dans les colonies.

De ce fait, certains spécialistes ont suggéré de limiter l’influence du substrat sur les créoles issus de sociétés exogènes à économie de plantations. Un certain nombre de langues créoles sont apparues dans les sociétés de plantations exogènes. La plupart des créoles des

Caraïbes ont pour origine des créoles de plantation, tels que, pour ne citer que quelques-uns, les

Jamaïcains lexifiés anglais en Jamaïque, le créole bélizien au Belize et le créole anglais à

Trinidad ; le créole haïtien lexifié par la langue française en Haïti, le créole guadeloupéen en

Guadeloupe et le créole martiniquais en Martinique.

1.2.1.3 Créoles marron

Les créoles marrons forment également un type de créole exogène, ces langues étant

également des créoles apparus dans des régions où aucun des principaux groupes de population n'était autochtone. Le terme « marron » provient du cimarrón espagnol « sauvage, indompté ; fugitif »et se réfère aux « esclaves qui se sont enfuis de plantations et se sont établis sur la base d’une origine ethnique commune ou qui s’étaient échappés des mêmes plantations » (Bartens,

2013a : 67). Ces Marron s’établiraient dans des régions difficiles d’accès, telles que les zones de montagne densément boisées. Certaines communautés d'origine marron sont devenues suffisamment fortes pour constituer une menace pour les sociétés de plantation. Le palmarès, par exemple, situé dans l'est du Brésil (dans l'actuel État d'Alagoas), était un État formé par les

Marron et qui existait pendant presque tout le XVIIe siècle. C'était « un royaume centralisé avec

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un dirigeant élu » (Kent, 1996 : 187) fondé au plus tard en 1605/6 et persistant jusqu'à sa destruction en 1694 après deux décennies de guerre avec les propriétaires de plantations néerlandais et portugais (Kent, 1996). Vers la fin du 17ème siècle, il mesurait environ 1 100 mètres carrés (Ennes, 1948) et comptait plusieurs milliers d'habitants (Kent, 1996). Parce que les

Marron se sont échappés de l'esclavage et ont créé leurs propres sociétés, la question se pose de savoir si cela pourrait avoir des conséquences linguistiques. Tout d’abord, à l’instar des créoles de plantation, il se peut que l’influence du substrat soit limitée, car les locuteurs ont été déplacés de leurs zones ancestrales ; Cependant, il se pourrait aussi que les éléments de substrat aient plus d'espace pour évoluer une fois que la pression du lexifiant a été supprimée.

1.2.1.4 Créoles endogènes

Les créoles endogènes (souvent appelé aussi créole fort en référence aux postes de traite mis en place par les explorateurs et les colonisateurs européens) se sont généralement développés par le biais de contacts entre des colons immigrants, généralement engagés dans un commerce systématique, et la population autochtone des régions. Un scénario typique le long des côtes ouest africaines et indiennes était que les marchands européens établissent des centres commerciaux pour leurs activités dans la région. Un scénario typique le long des côtes ouest africaines et indiennes était que les marchands européens établissent des centres commerciaux pour leurs activités dans la région. Cela est particulièrement vrai pour les premières activités coloniales portugaises, mais cette pratique a été poursuivie par les dernières puissances anglaises.

Il est important de garder à l'esprit que, contrairement aux sociétés de plantation, les éventuels colonisateurs de ces zones ne formaient pas de grandes colonies agraires, mais que leur colonisation était fondée sur le commerce. Dans ce type de situation, les partenaires

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commerciaux, ainsi que la main-d'œuvre nationale, seraient non seulement exposés à un lexique européen, mais également aux langues vernaculaires des régions.

Cependant, on ne peut pas présumer automatiquement que la main-d'œuvre (typiquement l'esclave) des colonies européennes de centre d'affaire était indigène dans la zone du centre commercial : en Afrique de l'Ouest et en Inde, la main-d'œuvre était souvent déplacée d'une région à l'autre. Quelques exemples de créole endogène qui est toujours vivant se trouve en

Afrique de l'Ouest et en Asie. Il est souvent expliqué en portugais. En Afrique de l'Ouest, le kriyol de Guinée-Bissau lexifié par le portugais est parlé comme langue maternelle par environ

600 personnes. (Et une deuxieme langue de 600 000 personnes supplémentaires) en Guinée

Bissau et dans le sud du Sénégal (Intumbo et al. 2013), tandis que le casamançais dans la province de Basse Casamance au Sénégal compte environ 10 000 locuteurs (Biagui & Quint,

2013). En Inde, le diu indo-portugais a encore environ 180 locuteurs sur l’île de Diu à l’ouest

(Cardoso, 2013) et Korlai est parlé par environ 800 personnes dans le village de Korlai au sud de

Mumbai (Clements, 2013). Il reste encore quelques locuteurs du portugais sri-lankais à

Trincomalee et Batticaloa sur la côte est du Sri Lanka (Smith, 2013). La papia Kristang,

également parlée par le portugais, est parlée par quelque 800 personnes, principalement à

Malacca, dans l'ouest de la Malaisie (Baxter, 2013). Kinubi est un exemple de créole fort basé sur une langue non européenne, l'arabe soudanais étant son principal lexique. Il est parlé au

Kenya et en Ouganda, en tant que langue maternelle par le Nubi et en tant que lingua franca par d'autres groupes ethniques (Luffin, 2013a). Bien que les exemples ci-dessus puissent être considérés comme des créoles fort en raison du fait qu’ils ont tous eu leurs débuts dans les centres commerciaux, toutes les créoles endogènes ne sont pas des créoles fort. Le tayo (lexique

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français) est un exemple de créole endogène qui n'est ni un fort créole, ni un portugais, mais environ 3 000 locuteurs le parlent à Saint-Louis en Nouvelle-Calédonie (Ehrhart & Revis, 2013).

1.3 SIMILITUDES ENTRE PIDGIN ET CREOLE

Les deux langues apparaissent naturellement dans une situation de contact en raison du manque de langue commune à partager entre groupes de personnes. Elles servent de lingua franca (langue de communication plus large). Selon (Wardhaugh, 2006), le pidgin et le créole résultent d’un besoin fondamental que les personnes qui parlent différentes langues doivent trouver un système de communication commun. Un tel système commun est souvent appelé une lingua franca. Pour renforcer ce point de vue, Wardhaugh (2006) a fait référence à la définition de lingua franca de l'UNESCO en 1953 : « Une langue utilisée habituellement par des personnes de langue maternelle différente afin de faciliter la communication entre eux ». Wardhaugh (2006

: 65) indique que les pidgins ou les créoles ont tous deux un système linguistique bien organisé.

Ainsi, même si le vocabulaire est emprunté à une langue maternelle, il reste à l’apprendre et non

à le simplifier et à l’utiliser. Par exemple, vous ne pouvez pas parler Tok Pisin en simplifiant simplement le vocabulaire ou la grammaire.

Une autre similitude entre un créole et un pidgin est qu'il y a moins de sons et leurs arrangements sont moins compliqués que ceux d'une langue standard, Onuigbo, (1999 : 200) affirme que « ce qui a commencé à l’origine comme une langue commerciale est progressivement devenue une langue de compromis pour une communication plus large ». Mais

Mufwene (2001) a un point de vue différent dans lequel il affirme que le pidgin et le créole se présentent individuellement dans des conditions différentes et qu'il n'est pas nécessaire qu'un créole soit précédé d'un pidgin ou d'un créole pour se développer à partir d'un pidgin.

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1.3.1 LES DIFFERENCES ENTRE PIDGIN ET CRÉOLE

Le pidgin n'a pas de locuteurs natifs (pas dans tous les cas), alors que le créole en a. Sur le plan linguistique, la forme et la grammaire du pidgin sont simplifiées et réduites, mais le créole est stable et développé en un langage naturel complet et adéquat à part entière. Wardhaugh

(2006 : 75) affirme que les pidgins se développaient rapidement pour devenir une langue. La différence réside dans le taux de changement pour les créoles et les pidgins. Une autre différence importante entre les créoles et les pidgins est que la pidginisation se produit très rapidement, presque en une nuit, mais que la créolisation nécessite environ deux générations pour se former.

Le créole existe souvent dans les régions postcoloniales et est utilisé quotidiennement comme vernaculaire, tandis que le pidgin existe principalement à l'époque coloniale limité. Le créole a des structures grammaticales moins élaborées que les langues plus anciennes, c'est-à-dire qu'il peut être normalisé ou non, mais certainement plus que le pidgin. Il comporte de nombreuses variantes mais des normes sociolinguistiques (évaluation / intégration) cohérentes, expressives.

Le pidgin est le produit de l’acquisition incomplète d’une langue seconde. Il présente une grammaire de surface très variable. Les créoles sont principalement liés à une langue dominante.

Les créoles ont un statut officiel dans les sociétés où elles sont parlées mais cela n'est pas le cas du pidgin dans les sociétés.

Sur le plan sociolinguistique, Bickerton (2019) déclare que le pidgin n'avait aucune norme d'interprétation ou une norme incohérente d'interprétation avec des domaines limités pour les fonctions d'expression et de communication. Généralement, il meurt ou évolue en créole par le processus de créolisation. Rickford (1977) affirme que les modifications pidginisées ayant connu des difficultés et un processus d'expansion linguistique, le créole pouvait être utilisé pour

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toute nouvelle variété stable résultant de ce processus. Ci-dessous, est le résumé de la différence entre le pidgin et le créole.

Tableau 1 : La différence entre le pidgin et le créole

LE PIDGIN LE CRÉOLE

Il n'a pas de locuteurs natifs (pas dans tous les cas) Il a de locuteurs natifs.

Il n'a pas le statut officiel. Il a le statut officiel (pas dans tous les cas)

La pidginisation se produit très rapidement, presque La créolisation nécessite environ deux générations en une nuit. pour se former.

Le pidgin a moins des structures grammaticales. Le créole a plus des structures grammaticales.

Ayant traité le pidgin et le créole, il y a ce qu'on appelle les langues mixtes et il est nécessaire que nous comprenions de quoi il s'agit.

1.4 LANGUES MIXTES

Les langues mixtes sont des langues ayant des origines divisées, c'est-à-dire des langues qui ont deux (ou quelques) langues parentales identifiables, et qui sont généralement apparues dans des situations de bilinguisme communautaire (Viveka, 2015). Ce n'est qu'au cours des dernières décennies que les langues mixtes ont fait l'objet d'une attention accrue. Thomason &

Kaufman (1988) ont identifié ces langues comme des langues de contact à part entière. Depuis lors, des données sur un certain nombre de langues mixtes sont disponibles, facilitant ainsi l'étude de ce groupe de langues. Les langues mixtes sont, comme les pidgins, les créoles et les langues de contact. Cependant, les langues pidgin et créole ont généralement plusieurs langues

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d'entrée ou source et le plus souvent, seule la source du lexique est connue avec un degré de certitude certain. Les langues mixtes n'ont généralement que deux langues sources et, le plus souvent, la source du lexique et la structure de la langue sont identifiables. En outre, le plus souvent, les deux langues sources sont parlées dans la même région, à côté de la langue mixte.

Comme les créoles, les langues mixtes sont associées à des communautés spécifiques, qui sont nées du fait des contacts. Contrairement aux créoles, les langues mixtes ne sont pas nécessairement la langue maternelle de la communauté et, souvent, celle-ci maîtrise une ou même parfois les deux langues source.

Bien que des créoles aient pu émerger en raison de la nécessité d’un moyen de communication, ce n'est pas le cas pour les langues mixtes, les communautés en question ayant déjà des langues communes. Au contraire, les langues mixtes ont émergé en raison de conditions sociales qui ont favorisé le désir d’un marqueur d’identité au sein du groupe prenant la forme d’une langue mélangée. Il est important de garder à l'esprit que les langues mixtes forment des systèmes linguistiques autonomes ; ce sont des langues à part entière. En d’autres termes, il ne s’agit pas de variétés des langues sources qui sont ensuite modifiées individuellement, par exemple, par commutation de code ou par emprunt. Il est probable que la commutation de code et l’emprunt ont été des facteurs déterminants dans la formation de toute langue mixte (par exemple, Thomason & Kaufman (1988), Auer (1999), Muysken (2000), Thomason (2001),

Matras (2003), Myers-Scotton (2003). Il est également possible que «la langue mixte et la commutation de code puissent continuer à coexister au sein d'une même population de locuteurs

» (Meakins, 2013c : 198). Même dans ce cas, les langues mixtes sont des langues autonomes pour diverses raisons. Par exemple, les locuteurs de différentes langues tendent à présenter un niveau élevé d’uniformité à la fois en ce qui concerne le lexique et la structure de leurs langues.

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C'est-à-dire que, comme dans toute autre langue, les structures sont prévisibles entre le discours d'individus différents et dans le discours d'un même individu. En outre, les langues mixtes et leurs langues d'origine ne suivent pas nécessairement les mêmes schémas de changement ; les langues sources peuvent changer de différentes manières sans affecter la langue mélangée ou, inversement, les langues mélangées peuvent adopter de nouvelles fonctions qui ne sont reflétées dans aucune des langues sources.

Il est généralement admis que les langues mixtes apparaissent comme des marqueurs d'identité au sein du groupe plutôt que par la nécessité d'un pont de communication entre les groupes de population. Cependant, les processus de formation impliqués dans l’émergence d’une langue mixte restent un sujet de débat.

1.5 LES PARTICULARITÉS ET DIMENSIONS D'UN CRÉOLE

Il s'agit ici d'éléments permettant de reconnaître ou d'identifier un créole. Selon

Glissant (1996), la créolisation présuppose que les éléments culturels réunis doivent nécessairement avoir une valeur équivalente pour que cette créolisation ait effectivement lieu.

Autrement dit, si les éléments culturels liés aux uns sont inférieurs aux autres, la créolisation n’est pas vraiment faite. Cela se fait de manière bâtarde et injustement. Cette définition masque l'idée que la créolisation nécessite une relation, une mutualisation ou un échange entre des cultures égales. L’égalité, dans ce cas, représente l’une des conditions de possibilité de la créolisation. Cependant, c'est compliqué : il est parfaitement clair qu'une communauté d'égaux est à la fois une communauté d'inégalité. En effet, Glissant (1996) reconnaît qu’une forme de relation fondée sur l’inégalité ou la domination peut être établie entre les cultures en donnant lieu

à une créolisation bâtarde. Créolisation bâtarde, créolisation injuste, en ce sens qu'elle dissimule

« l’injustice » en tant que fait impossible à créer. L'égalité n'est pas le seul élément qui contribue

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à la définition de la créolisation. Notons que l’égalité est la relation instituée entre deux agents

égaux, regroupant de manière égale les héritages et les gains culturels et intellectuels qu’ils détiennent pour permettre la création. Dans cette perspective, nous reprenons cette autre définition de Glissant : «la créolisation est la rencontre, l'interférence, le choc, les harmonies et les discordances entre les cultures, dans la totalité réalisée du monde-terre » (Glissant, 1996 :1).

Les créoles se développent à partir d'un stade antérieur de pidgin. Une langue créole est une langue qui résulte de la fusion de deux cultures ou plus, généralement dans un contexte colonial. Il se distingue du pidgin, qui est le nom donné au dialecte simpliste parlé lorsque des personnes de groupes linguistiques différents sont obligées d'interagir. Contrairement à un créole, un pidgin n'est pas à proprement parler une langue. Un pidgin découle de la nécessité et est informé par l'aptitude humaine intrinsèque à communiquer contre toute attente. Il sera tiré des différentes langues des personnes qui participent à sa création et sera généralement basé sur la langue du groupe social dominant - ainsi, au Nigéria, les pidgins parlés étaient sensiblement dérivés de l'anglais.

Cependant, un pidgin ne sera pas cohérent grammaticalement : chaque locuteur d’un pidgin le modifiera à l’aide d’éléments grammaticaux ou de vocabulaire dérivé de sa langue de naissance, ce qui signifie qu’il y aura autant de versions d’un pidgin que de locuteurs de celui-ci.

Le créole a un petit vocabulaire, dérivé presque exclusivement d'une langue dans la situation de contact. Le vocabulaire n'est pas simplement dérivé d'une langue, mais généralement du super ordonné dans la situation de contact, la langue du groupe avec le plus pouvoir économique et politique et le plus grand prestige social. C'est parce que le vocabulaire de la langue supérieure est dominant. Ainsi, par exemple, nous parlons de pidgin anglais, qui est le résultat de contacts

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entre des esclaves africains et coloniaux anglais, plutôt que de pidgin yoruba, pidgin igbo ou même de pidgin africain.

Selon Robert Baron et Ana Cara (2003 : 4) « La créolisation est une créativité culturelle en cours ». Quand les cultures entrent en contact, des formes expressives et des réalisations

émergentes de cette rencontre fluides dans leur adaptation à des circonstances changeantes et ouvertes à multiples significations, les formes créoles sont des expressions de cultures en transition et en transformation. Traditionnellement associée avec les cultures du Nouveau Monde au sein des sociétés de la Caraïbe et de l’Amérique latine, la créolisation est maintenant de plus en plus envisagée comme un processus universel qui peut survenir partout où des cultures se rencontrent.

1.5.1 PROCESSUS DE CRÉOLISATION

L’un des sujets dominants dans les études créoles de la dernière décennie a été une redécouverte et une remise en question des questions et notions fondamentales dans le domaine et, par conséquent, une réaffirmation de la question de savoir ce que cela signifie exactement quand une langue donnée est classée « un créole ». Il n’y a pas que la question de savoir dans quelle mesure les théories existantes sur la genèse créole peuvent être harmonisées ; le processus même de la créolisation s'est avéré être une préoccupation centrale des recherches récentes. Le modèle conventionnel de créolisation de Hall (1966) en tant que génération de la langue spontanée par une première génération d'enfants, causé par l'insuffisance structurelle et de communication du pidgin fourni par un pidgin, s'est révélé trop idéalisé et intenable à la lumière des données récentes. Plusieurs considérations et orientations de recherche ont contribué à une insécurité accrue concernant les principes fondamentaux de la discipline. Plus important encore, le processus même de la créolisation lui-même a fait l'objet d'un examen plus approfondi, fondé

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sur de meilleures preuves socio-historiques et linguistiques sur les premières phases de tels processus dans certaines communautés créoles. Par exemple, contrairement aux modèles classiques proposés par Bickerton (1981), il a été suggéré que la créolisation ne se produisait pas brusquement mais plutôt progressivement (Arends,1993), et que le rôle des enfants dans la formation d'un nouveau créole semble grandement surestimé (Singler, 1996).

Il est largement admis dans les recherches récentes que la créolisation est marquée par certains processus de grammaticalisation (Lehmann, 1995). Les processus par lesquels un

élément lexical devient un élément grammatical, ou un élément partiellement grammatical devient plus grammatical (Lehmann, 1995 : 11). De tels phénomènes de grammaticalisation ont souvent été initiés dans les variétés de base non standard, puis ont été systématisés et automatisés ultérieurement lors de la créolisation (Chaudenson, 1992 ; Bollée et Neumann-Holzschuh, 1993 ;

Bruyn, 1995). Une autre notion fondamentale est celle de la réanalyse. La définition classique de la réanalyse en tant que « changement dans la structure d'une expression ou d'une classe d'expressions n'entraînant aucune modification immédiate ou intrinsèque de sa manifestation superficielle » (Langacker, 1977 : 59) permet de comprendre certains processus observés dans la créolisation.

Dans cette section, nous discutons de quatre approches de la créolisation, dont les trois premières semblent représenter des opinions extrêmes parmi les créolistes.

1.5.1.1 L'approche de Bickerton

Bickerton (1979, 1981, etc.) présente un scénario de la façon dont les créoles sont apparus dans un contexte de plantation, en gros comme suit. En conséquence du transport d’Africains de divers contextes ethnolinguistiques à travers l’Atlantique pour qu’ils travaillent collectivement pour les Européens en tant qu’esclaves dans les sociétés de plantations, la

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pidginisation de la langue européenne s’est produite. Les enfants nés d’esclaves dans ces sociétés, réalisant que les langues africaines parlées par leurs parents étaient comprises par relativement peu de gens, acquéraient du vocabulaire à partir des variétés pidginisées de la langue européenne qu’ils entendaient autour d’eux, mais trouvant ces langues linguistiquement insuffisantes, ils ont puisé dans leur capacité linguistique innée le « bioprogramme » linguistique

- pour en faire une langue adéquate. Bickerton suppose que les créolophones auraient modifié leur discours dans le sens de la langue européenne dans la mesure où ils avaient accès à cette dernière. L'hypothèse de Bickerton a conduit à la notion de « créole radical ». Comme le dit

Byrne (1987 : 3), « les grammaires des créoles les plus radicaux se rapprochent le plus de l'état approximatif de l'état non marqué de notre seule faculté de langage, innée et génétiquement dotée ».

1.5.1.2 L'approche de basilectalisation progressive

Nous empruntons les mots "basilectalisation progressive" de Chaudenson pour décrire le récit de la formation des créoles français exposé dans Chaudenson (1992) puis élaboré et appliqué à un plus large éventail de créoles par Mufwene (par exemple, 1996). Les commentaires suivants concernent principalement le modèle de Chaudenson (1992) et les hypothèses de base de son approche sont les suivantes : a) que les non-Européens arrivés comme esclaves sur des territoires gérés par des Européens ont identifié la langue européenne comme cible. b) que plus la proportion de la population totale formée par les premières vagues d'esclaves à leur arrivée était petite, et plus elles étaient jeunes au moment de leur arrivée, plus leur progression vers l'acquisition de la langue cible européenne serait grande.

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c) que les arrivées ultérieures d'esclaves, dans une population où la proportion d'esclaves augmentait, tendraient de plus en plus à acquérir des approximations de la cible parlée par les esclaves arrivés avant elles plutôt que de la cible proprement dite parlée par les Européens ; d) que ces tendances se poursuivraient de sorte que, lorsque la traite négrière connaisse son apogée, les derniers arrivants d'esclaves acquièrent des approximations de la langue cible européenne, ce qui permet d'obtenir le créole basilectal attesté dans la plupart des territoires à partir de la fin du XVIIIe siècle.

Néanmoins, cela ne semble pas être une supposition que nous n’avons pas si bien réussie.

Une hypothèse similaire est faite par la plupart des créolistes de toutes tendances ; cf. Bickerton

(1981 : 4) stipule que le nombre de blancs doit être inférieur à 20% pour qu'un vrai créole de plantation émerge.

1.5.1.3 Approche constructive

Nous convenons que, chaque fois que deux ou plusieurs groupes de personnes dépourvus d'une langue commune sont mis en contact soudain et durable et ont un intérêt mutuel à la fois à communiquer et à conserver leur identité de groupe, ils sont susceptibles de commencer à construire un moyen de communication interethnique, (Baker, 1990). Nous affirmons également que les langues de contact sont essentiellement ce que ceux qui les ont construites voulaient qu'elles soient, plutôt que le résultat d'un apprentissage imparfait de la langue seconde.

1.5.1.4 Approche dominante

De nos jours, la plupart des créolistes ne s'allient pas étroitement aux approches de

Chaudenson, Bickerton ou Lefebvre, bien qu'ils puissent partager certaines des hypothèses d'un ou de plusieurs de ces auteurs. Une approche plus largement respectée à la fois pour la

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pidginisation et la créolisation est celle exposée dans Thomason et Kaufman (1988). Ces auteurs distinguent les langues connues sous le nom de pidgins et / ou de créoles en trois types :

(a) les pidgins (c.-à-d. langues de contact développées à des fins limitées par des personnes qui conservent leur langue maternelle),

(b) les créoles brusques (résultant de la langue de contact naissante) devenant immédiatement la langue principale de la communauté ; (Thomason et Kaufman, 1988 : 150), et

Les créoles résultant d’un pidgin stable préexistant acquérant par la suite des locuteurs natifs.

Hypothèse de relexification de Lefebvre :

« Nous pensons qu'il serait juste de dire que les sous-spécialistes en général sont plus soucieux d'identifier des caractéristiques particulières comme africaines (ou non européennes) que de proposer des théories sur la formation d'un créole. Néanmoins, la plupart des sous- spécialistes semblent généralement convenir qu'il y avait une progression vers l'acquisition de la langue européenne, même avec une certaine réticence. Ils semblent également convenir qu’une nouvelle langue résultait de ce processus et que sa grammaire, son lexique et son système phonologique contenaient des caractéristiques tirées de sources européennes et non européennes

». L'hypothèse de relexification de Lefebvre (par exemple, 1993, 1999) est une forme extrême et constitue en fait une version mise à jour de l'approche de Sylvain (1936), à savoir que le créole haïtien est essentiellement une langue gbe relexifiée avec le vocabulaire français. S'il en était vraiment ainsi, il n'est pas évident que le créole haïtien puisse être considéré comme un français restructuré de manière significative. Les langues gbe étaient traditionnellement placées dans la branche Kwa des langues Niger – Congo, mais plus récemment ont été classées comme langues

Volta – Niger. La langue gbe la plus parlée est l'ewe (environ 3 millions de locuteurs au Ghana et au Togo),

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L'hypothèse de relexification de Lefebvre soulève deux problèmes majeurs.

Premièrement, il faut supposer qu’il existe une période identifiable d’années de création du créole haïtien et que les locuteurs d’une langue donnée (Fon), ou d’un groupe de langues apparentées (Gbe), étaient numériquement et / ou socialement dominante tout au long de cette période. Les locuteurs de langues gbe semblent avoir formé plus de la moitié de la population d'esclaves en Haïti pendant au moins quatre décennies, jusqu'en 1740, mais ils ont ensuite été dépassés en nombre par les locuteurs de langues bantoues (Singler, 1996). Néanmoins, l'hypothèse de Lefebvre n'aborde pas la question de ce que la minorité substantielle d'esclaves qui ne parlaient pas le gbe pendant que les fon et leurs parents ethnolinguistiques étaient en train de relexifier leur langue (Baker, 1993 : 135). Deuxièmement, l’hypothèse découle de l’hypothèse selon laquelle le créole haïtien est un créole original, née d’une situation de contact en Haïti et impliquant uniquement des locuteurs de langues française et africaine. Il ignore totalement les faits que ;

(i) les français étaient en communication avec les Africains de la région depuis l'établissement de leur première colonie caribéenne à Saint-Kitts en 1625.

(ii) Une langue créole de lexique français était apparue dans les Antilles d'au moins 1671 et

(iii) Une partie des français et des esclaves en Haïti depuis le début de sa colonisation

en 1659 (Singler, 1996 : 187) aurait probablement parlé le créole émergent des Petites

Antilles. Il est donc inconcevable que le créole de Petite Antille n'ait pas eu un impact

majeur sur le créole haïtien, comme en témoignera toute comparaison entre ces langues

(Baker, 1987).

Hymes (1971) indique que les processus de pidginisation et de créolisation représentent la limite extrême de l'influence des facteurs sociaux sur le processus de transmission et d'emploi

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de la langue. Pour cet auteur, la pidginisation provient d'une réduction fonctionnelle et d'une simplification des matériaux linguistiques disponibles dans les échanges, tandis que la créolisation correspond à une phase d'expansion fonctionnelle et linguistique de données linguistiques antérieurement simplifiées. (Muhlhàusler, 1986) soutient que la pidginisation et la créolisation résultent de dynamiques d'appropriation, apprentissage des langues secondes dans le cas de la pidginisation, et acquisition du langage en ce qui concerne la créolisation. Il isole les phases suivantes dans ces continuums d'appropriatif :

1. Le jargon : Il existe différentes définitions du jargon et nous suivrons ici essentiellement

celle donnée dans (Bakker, 2008 aussi Drechsel. 1999). Un jargon (appelé aussi pidgin

instable / primitif / rudimentaire ou pré-pidgin, entre autres) est, comme mentionné,

essentiellement une variété de contact très variable et dépourvue de normes stables. Le

fait crucial à propos d'un jargon est « qu’il soit utile ou non dans un contexte donné »

(Bon, 2012 : 7), c'est-à-dire qu'il n'existe aucune langue structurée à apprendre qui, par

conséquent, pourrait être utilisé de manière imparfaite. Les jargons sont plutôt « des

solutions individuelles au problème de la communication entre des langues et sont donc

soumis à des stratégies individuelles » (Mühlhäusler, 1997 : 128). En d’autres termes, le

jargon est simplement ce qui est compris par toutes les parties qui doivent communiquer

entre elles (Thomason, 1993) - les niveaux de compétence et les questions de correction

sont essentiellement sans pertinence. Cela signifie que l’outil de communication, le

jargon, est structurellement très variable ; Les utilisateurs importent généralement

beaucoup de leur propre langue maternelle pour expérimenter des mots et des phrases

afin de faire passer leur message. Le jargon est un ensemble de mots ou d'expressions

utilisés par un groupe particulier de personnes, tels que les types de mots et d'expressions

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utilisés par les professionnels de la santé (jargon médical), etc. Cette définition diffère, par exemple, de Clark (1990), qui considère le jargon comme un système linguistique assez structuré utilisé dans la communication intra-ethnique, par opposition aux pidgins qui sont « le moyen de communication habituel utilisé par des non-locuteurs natifs ». En termes informels, nous pouvons considérer un jargon comme un livre de phrases destiné aux voyageurs. Il comprend des descriptions d'énoncés qui font quelque chose plutôt que d'un système permettant de générer et d'interpréter un ensemble d'énoncés ouverts exprimant un ensemble ouvert de sens conceptualisables dans une grammaire complète.

(Bon, 2012 : 7). De la même manière, les jargons sont des outils utiles pour la communication entre des locuteurs de langues différentes, mais ils sont généralement limités dans ce que le locuteur peut exprimer avec eux. Un jargon est donc par définition un outil de communication instable, qui doit être réinventé pour chaque situation et par chaque utilisateur. Il peut y avoir plusieurs façons de dire la même chose - ce qui est important, c'est que les deux parties parviennent à comprendre ce que l'autre essaie d'exprimer. Par exemple, quelqu'un qui veut savoir ce que coûte un article peut pointer sur l'article et demander « combien ça coûte ?» Ou « combien ?» Ou « coût ? Quelqu'un qui a besoin d’indications pour se rendre au port peut demander « où est le port ?» Ou « où port ? Un individu qui constate qu'un mode d'expression particulier fonctionne est susceptible d'utiliser à nouveau la même solution dans des situations similaires.

Cependant, cela reste une solution individuelle qui n’est généralement pas transmise aux autres. Les jargons ne sont donc généralement pas transmis de génération en génération.

Le jargon (phase rudimentaire et idiosyncrasique impliquant un recours au non- verbal). Il existe différentes définitions du jargon et nous suivrons ici essentiellement

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celle donnée dans (Bakker, 2008, Drechsel, 1999). Un jargon (appelé aussi pidgin

instable / primitif / rudimentaire ou pré-pidgin, entre autres) est, comme mentionné,

essentiellement une variété de contact très variable et dépourvue de normes stables. Le

fait crucial à propos d'un jargon est « qu’il soit utile ou non dans un contexte donné »

(Bon, 2012 : 7), c'est-à-dire qu'il n'existe aucune langue structurée à apprendre qui, par

conséquent, pourrait être utilisé de manière imparfaite.

2. La stabilisation : la stabilisation est très importante pour le processus de la créolisation.

Elle suppose la constitution en communauté linguistique d'un groupe de locuteurs ; ce

système présente des réductions et des implications fonctionnelles et formelles.

3. L'expansion, qui implique une complexification morphosyntaxique et lexicale ainsi que

des développements du point de vue de la variation stylistique.

4. La créolisation, qui amène des changements syntaxiques et sémantiques. Selon D.

Véronique, 2000, la créolisation et la pidginisation sont des processus qui s'inscrivent sur

un double axe, celui du développement et de la restructuration. Il peut se produire des

complexifications sans phase de jargon, des situations de créolisation sans pidginisation

préalable. Si des auteurs talentueux y écrivent un très bon livre, il peut s'agir d'un roman,

d'un recueil d'histoires, d'un poème long ou même d'une pièce de théâtre. Le genre n'a pas

d'importance, tant que le livre est très bon. Il peut même s'agir de la traduction d'un bon

livre d'une autre langue, mais quelque chose d'original raconte une histoire intéressante et

honnête sur la vie des personnes qui parlent cette langue est le meilleur choix. De

nombreuses langues sont devenues importantes et respectées grâce aux bons livres :

Dante, Shakespeare, Pouchkine, Cervantes, etc. L’écrivain ne devrait pas s’inquiéter de l’orthographe non standard : l’histoire est bien plus importante à ce stade. Nous pouvons

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promouvoir la créolisation via les médias sociaux, c'est l'un des processus de la créolisation. Par exemple, un entrepreneur peut créer un site Web d’information populaire dans cette langue. Il devrait comporter des informations qui intéressent les gens : la politique, les stars de cinéma, les sports, les reportages d'autres pays. Cet entrepreneur devrait aimer la langue et en prendre soin.

Quand Eliezer Ben-Yehuda, un lexicographe hébreu et rédacteur de journal. Il était à l'origine de la renaissance de la langue hébraïque à l'ère moderne a commencé sa campagne pour la renaissance de la langue hébraïque, l'une des premières choses qu'il a faits a été de créer un journal simple pour que la langue fonctionne bien. Les écoles élémentaires doivent avoir des manuels dans cette langue. De cette façon, les enfants verront que la langue est suffisante pour

écrire des livres respectables. Cela les aidera également à apprendre, car ce sera proche de la façon dont ils parlent réellement. Le gouvernement a un rôle crucial à jouer si la langue du pidgin doit devenir officielle. Maintenant que nous avons vu les processus de créolisation, la section suivante traitera des choses qui peuvent être considérées comme des obstacles du pidgin

à devenir un créole.

1.5.2 CONTRAINTES DE CRÉOLISATION

Les arguments contre l'utilisation de pidgins et de créoles dans l'éducation sont de trois types. Le premier type fait référence à la nature supposée « dégénérée » des pidgins et des créoles. (Rickford et Traugott, 1985 :255) soulignent une accusation commune contre la langue créole, affirmant que celui-ci n'est pas une langue réelle ou légitime. Cette affirmation découle de l'affirmation erronée mais fréquemment affirmée qu'elle ne contient pas de grammaire ou qu'elle n'est qu'une version brisée du standard. Il est stigmatisé comme un type d'anglais inférieur, une

"langue de déchets". Le deuxième type d’argument est que l’utilisation d’un pidgin ou d’un créole dans l’éducation est une perte de temps, car dans chaque pays où l’on parle, l’objectif

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pédagogique est d’apprendre la variété standard de la langue. Par conséquent, il s'ensuit qu'il faut apprendre la langue standard. Par exemple, (Shnukal, 1992 :4) note que, dans le détroit de

Torres, les gens sont réticents à accepter l’utilisation du créole comme moyen d’enseignement officiel dans leurs écoles, le considérant comme un moyen de les priver d’un enseignement en anglais que les Blancs utilisent, et donc les condamnant à un statut permanent de sous-classe. Le troisième argument est que l’utilisation d’un pidgin ou d’un créole dans l’éducation empêchera les étudiants d'acquérir un anglais standard.

L’un des plus grandes contraintes de la créolisation est celui de la stimulation et du renforcement des activités de recherche dans ce domaine. La recherche est une étude minutieuse d'un sujet, notamment pour découvrir de nouveaux faits ou de nouvelles informations à son sujet.

La puissance, la vitalité et le dynamisme d’une langue peuvent être liés à l’ampleur de l’intérêt de recherche montré et mené à ce sujet. Plusieurs langues du monde ont des activités de recherche robustes qui les ouvrent à une analyse empirique au niveau de la phonétique, de la phonologie, de la morphologie, de la syntaxe, de la sémantique et à l’application de ces connaissances à la résolution de problèmes de société (liés à la langue), etc.

Un aperçu rapide des activités de recherche menées sur le pidgin nigérian de 1980 à 2010 est inquiétant. Au niveau informel, un travail appréciable a été effectué, notamment vers la fin du

20ème siècle et la première décennie du 20ème siècle. C’est à ce moment que certains érudits ont eu la recherche sur le pidgin au niveau informel. Par niveau formel, nous désignons ici les recherches effectuées dans les limites d’un établissement d’enseignement supérieur strictement placé sous surveillance pour l’attribution de diplômes, diplômes et certificats. Par informel, nous entendons les recherches effectuées à l’extérieur ou à l’intérieur du cadre formel, mais ne permettant pas de les qualifier un grade, diplôme ou certificat.

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Type de Pidgin Langues Langues Langue Langue

recherche Nigérian Nigérianes étrangères anglaise africaine

Premier 13 816 1 90 1

cycle

Deuxième 3 215 NIL 21 4

cycle

Doctorat 1 40 NIL 5 2

Tableau 2 : Résumé des travaux de recherche « formels » sur les langues au Nigéria au cours de trois décennies 1980-2010 (University of Ibadan -Nigeria)

Comme on peut le voir sur le tableau, en trois décennies, il n’y a eu que 13 projets de recherche sur le pidgin nigérian au premier cycle, contre 816 sur les langues nigérianes et 90 sur l'anglais. Aux cycles supérieurs, d’abord, le programme de maitrise à la période correspondante, nous n’avons que trois thèses contre 215 sur les langues nigérianes et 21 sur la langue anglaise.

Au niveau du doctorat, pendant trois décennies, il y a une thèse contre 40 sur les langues nigérianes et 5 sur la langue anglaise. Un autre problème du pidgin est que de nombreux parents ont du mal à enseigner à leurs enfants. Ils grondent même les enfants chaque fois qu'ils les entendent parler pidgin parce qu'ils croient que ce n'est pas approprié, alors que la langue standard est la clé du succès dans les domaines de l'éducation et de l'emploi.

Le Nigéria n'a pas encore choisi de langue nationale qui unifiera tous les groupes ethniques. Ayant vu les progrès du pidgin jusqu'à présent, c'est l'une des langues à la croissance la plus rapide, parlée par plus de 75 millions de personnes. Nous examinerons le choix de la langue nationale dans la section suivante.

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1.6 CHOIX D'UNE LANGUE NATIONALE

Le nombre de langues différentes en Afrique a été estimé à environ de 800 à plus de

1200. Le Nigeria compte jusqu'à 450 langues - réparties de manière inégale en zones géographiques et en locuteurs. Bien que classifiantes en quatre catégories :

1. La langue officielle (l'anglais et le français).

2. La langue nationale : l'igbo, le yoruba et l'hausa.

3. Les principales langues reconnues aux niveaux des États, telles que le fulfulde, l’izon,

le Tiv, l’efik, le kanuri, le nupé, l’edo, l’Igala et l’urhobo. Pour ne citer que neuf langues.

4. Les nombreuses langues mineures sont limitées au niveau du gouvernement de district

ou local dans l’Ogono, l’Idoma, le Gwari ou le Ganagana etc.

Le résultat est que les Nigérians sont divisés en groupes dissidents avec des allégeances distinctes qui créent des conflits internes et menacent parfois même la viabilité de la République fédérale. Ils accroissent généralement la résistance face aux tentatives de promotion de l'intégration socio-politique et de la compréhension mutuelle et sapent souvent l'efficacité des relations inter-ethniques.

En l'absence d'une langue nationale, l'un des besoins les plus pressants du Nigéria est pour un moyen de communication commun. Selon la phraséologie de Graham Davis, 2010, « un peuple sans langue propre est une demi-nation ... C'est une barrière à la source, une frontière plus importante que la forteresse ou le fleuve ». Comme le dit très justement David Smock 1989 : En définitive et idéalement, les pays d’Afrique de l’Ouest parviendraient plus rapidement et plus efficacement à réaliser l’unité nationale et les autres avantages d’une nation homogène si des mesures étaient prises dès maintenant pour promouvoir une langue unique en tant que moyen de communication dans le pays.

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Il existe sans aucun doute une résistance généralisée au Nigéria à l’adoption de l’anglais comme une langue « nationale », même s’il sert maintenant de moyen principal de communication officiel. Beaucoup de gens pensent que seule une langue autochtone (et non une langue coloniale) serait en mesure de générer le sentiment nécessaire de fierté nationale, de sensibilisation culturelle et de loyauté des citoyens. Bien que l'anglais puisse unir superficiellement les élites, il les sépare nettement des masses. Il faut toutefois comprendre la triste réalité selon laquelle les identités ethniques et linguistiques sont encore très fortes et que toute tentative de choisir ou de rejeter l’une des trois principales langues régionales comme moyen de communication nationale susciterait des réactions amères et intenses.

1.6.1 IMPLICATIONS DU CHOIX D’UNE LANGUE NATIONALE

Les membres de tous les groupes linguistiques du monde ont tendance à résister instinctivement à toute tentative de les priver de leur langue maternelle. La réalité de la situation au Nigéria est que, bien que certaines ethnies tolèrent les locuteurs d'autres langues et apprennent même volontairement à communiquer avec elles, elles s'opposent farouchement à toute menace, réelle ou imaginaire, de sous-estimer la signification de leur propre langue. Joshua Fishman

(2008) a suggéré comme option politique viable que la reconnaissance et la préservation de langues importantes dans un État particulier soient complétées par l'adoption d'une ou de plusieurs langues à des fins officielles et pour la communication au-delà des frontières linguistiques du pays. Pierre Alexandre souligne toutefois qu'il est très rare qu'une langue locale puisse être choisie pour atteindre cet objectif sans risquer de générer des problèmes politiques encore plus graves que ceux résultant du manque d'homogénéité linguistique. Le choix d'une langue nationale dans un pays ethniquement hétérogène comme le Nigeria a des implications non seulement politiques, mais aussi sociales et économiques. Comme le dit si justement D. Oke,

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(1989 :1) «si à l'avenir le Nigéria choisit une lingua franca nationale, ce devrait être avec le consentement de la grande majorité de la population ». Eugene Nida et William Wonderly

(1996 :5) notent que pour qu'une langue devienne « nationale », elle doit être politiquement neutre.

Etant donné que les langues igbo, hausa et yoruba sont si largement utilisées au

Nigéria, une de ces langues devrait-elle être choisie comme langue nationale ou toutes devraient- elles être utilisées ? Pour aider à déterminer la qualification relative d'un médium particulier pour fonctionner comme langue nationale, Abba Rufai (2013) a mis l'accent sur les principes de base de la théorie de la planification dans ce domaine: à savoir l'efficacité (la quelle entre les trois langues est la plus dominante), l'adéquation (est ce que la langue possède toute les critères de devenir la seule langue nationale) et l'acceptabilité (est ce que cette langue sera accepter par les citoyens et le gouvernement). Manifestement, aucune des trois langues semi-nationales du

Nigeria ne satisfait à ces critères. La différence qui sépare beaucoup de gens, encourage les mouvements séparatistes et affaiblit ainsi les loyautés nationales. Quelle est alors la solution ? La meilleure stratégie pourrait être de choisir une langue « neutre ». Aux fins d'intégration sociopolitique et de progrès, il est nécessaire de disposer d'un médium pouvant être largement utilisé dans tout le pays, à tous les niveaux - riches et pauvres, hommes et femmes, éduqués et non instruits, jeunes et moins jeunes afin que les gouvernés puissent communiquer avec ceux qui les gouvernent. Comme 70% de la population est pauvre et, selon les normes occidentales, analphabète, le seul médium non ethnique pouvant interagir à tous les niveaux est le pidgin nigérian. Dans une mesure notable, il a non seulement encouragé les liens horizontaux entre tous les groupes ethniques, mais a également favorisé une intégration intra-verticale des masses et des

élites.

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CHAPITRE II : LE PIDGIN AU NIGERIA

2.1 BRÈVE HISTOIRE DU NIGERIA

Couvrant une superficie de 923 768 km, le Nigéria est un pays anglophone d’Afrique de l’Ouest entouré de pays francophones (le Niger et le Tchad au nord, le Bénin à l’ouest et le

Cameroun à l’est). Les religions principales sont l’islam, le christianisme et la religion traditionnelle. Historiquement, avant l’arrivée des Européens au XVIe siècle, la région nigériane

était composée de divers royaumes indépendants qui assuraient eux-mêmes leur gouvernance.

Plusieurs empires (Kanem-Bornu, Benin, Oyo et Sokoto) y ont dominé pendant des siècles avant que le règne colonial vienne bouleverser le paysage politique de la région. Après avoir fait du sud un protectorat en 1885 et conquis le nord entre 1901 et 1906, les colonisateurs britanniques décident, en 1914, pour des raisons administratives et politiques, de fusionner les deux parties de la région en une seule entité politique qui sera nommée « Nigéria », sous l’autorité du gouverneur général Frederick Lugard. Comme système de gouvernance, les Britanniques avaient adopté le système d’administration indirecte (indirect rule) qui consistait à gouverner par l’entremise des leaders politiques traditionnels (rois et chefs) qui étaient eux-mêmes soumis à l’autorité des officiers britanniques. Cette décision de fusionner des centaines de groupes linguistiques distincts initialement indépendants, contraints de vivre ensemble, sera à l’origine de fortes tensions et de conflits, étant donné que chaque groupe ethnolinguistique cherche à défendre son identité culturelle. Après des années de luttes acharnées menées essentiellement par des mouvements nationalistes, qui dénonçaient l’injustice et l’inégalité de la colonisation, le

Nigéria accède à l’indépendance le 1er octobre 1960. Une fois au pouvoir, les nouveaux leaders africains ont tout simplement choisi de gouverner le pays comme une fédération, ne voulant pas

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séparer ce qui avait été réuni. Néanmoins, au début, pour faciliter la gouvernance, le pays avait

été divisé en trois régions (l’Ouest, l’Est et le Nord) avec comme capitale fédérale, Lagos. En

1967, le pays est passé à douze États, à dix-neuf en 1976, à vingt et un en 1987 et à trente en

1990. Le Nigéria comprend trente-six (36) États depuis 1996 et Abuja est devenue la capitale fédérale depuis décembre 1991. La carte suivante présente les six (6) zones de la fédération nigériane ainsi que les 36 États et la capitale fédérale, Abuja, le constituant.

Figure 1 : La carte du Nigeria

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Cela faut-il ajouter vingt-huit années de régimes militaires caractérisés par le pillage des fonds

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publics et la dictature. En effet, quoique les mouvements nationalistes se soient unis d’un commun accord pour revendiquer la gouvernance de leur propre pays, force est de reconnaître que cette union n’était que superficielle, puisque chaque mouvement régional ne cherchait que son propre intérêt, notamment celui de posséder le contrôle du gouvernement central.

Cependant, les divisions les plus inextricables entre les mouvements nationalistes étaient régionales. Les mouvements nationalistes qui avaient émergé comme des efforts pan-nigérians pour promouvoir l'indigénisation du gouvernement dans les années 1930 ont dégénéré en partis politiques régionaux au début des années 1950, avec les adhésions bien circonscrites le long des frontières ethniques. L'indépendance ainsi réalisée en 1960 était fragile, les partis étant unifiés sous une constitution fédérale dans laquelle les groupes ethniques politiquement conscients rivalisaient pour le contrôle du gouvernement central par l’intermédiaire des partis politiques essentiellement ethniques. Il faut aussi souligner que le Nigéria observe actuellement sa plus longue période de régime non militaire, depuis l’indépendance. En effet, la passation du pouvoir du président Olusegun Obasanjo au président élu Umaru Yar’Adua en avril 2007 est un moment historique, puisque c'est la première fois dans l’histoire du pays qu’un leader non militaire transmet le pouvoir à un autre. Après la mort de Umaru Yar’Adua en mai 2010, le vice- président, Goodluck Jonathan a été nommé le président. En 2015 muhammadu Buhari a été élu président. La démocratie du pays est donc naissante. L’administration politique s’exerce à trois niveaux : le fédéral, l’État et l’administration locale (local government), (Akinpelu, 2016).

2.2 LA DIVERSITE LINGUISTIQUE AU NIGERIA

Le Nigéria est un pays d'Afrique occidentale qui a longtemps abrité de nombreuses tribus et royaumes. Le pays que nous connaissons aujourd'hui a été créé par les Britanniques lors de la fusion de deux États en 1914. Comme nous avons mentionné auparavant, les Britanniques

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ont gouverné indirectement jusqu'en 1960, année de l'indépendance du Nigéria. Sept ans plus tard, la guerre civile a éclaté et a duré jusqu'en 1970. La guerre civile nigériane était profondément enracinée dans la discrimination qui régnait parmi les différentes tribus qui habitaient et habitent toujours le pays. La diversité très tribale qui a contribué à la guerre civile est exactement ce qui rend le Nigéria unique et important en tant que pays. Par exemple, environ

521 langues différentes sont parlées au Nigéria, mais neuf d'entre elles sont maintenant éteintes.

Les langues parlées au Nigéria sont une représentation de toutes les langues africaines, puisqu'elles font partie des trois grandes familles de langues africaines : la famille Niger-Congo, la famille nilo-saharienne et la famille afro-asiatique. L’anglais est la langue officielle du

Nigéria, mais c’est plus un vestige de la colonisation britannique qu’une décision consciente d’avoir une langue officielle non autochtone (Akinpelu, 2016).

Le Nigéria est un pays extrêmement fragmenté sur le plan linguistique. En fait, la situation linguistique actuelle du pays peut être comprise dans le contexte d’un processus mondial de balkanisation. Selon Connor (1991 :1), il s’agit d’un processus dû à « l’absence presque totale de coïncidence qui existe aujourd’hui entre les frontières politiques et ethniques du monde ». Babajide, (2003), sur le plan géographique, le Nigéria compte plus de 160 millions d'habitants, dont 35% sont des locuteurs de houssa/fulani situés dans la région du nord, 20% sont des Yorubas qui vivent dans la région occidentale, 18% sont des Igbo situés dans la partie orientale du pays et dont certaines régions parlent des langues différentes, comme indiqué sur la carte du Nigéria Babajide (2003 :49) est d’avis que, sur la base des langues parlées au Nigéria, il convient de supposer que l'haoussa / fulani, le yorouba et l’igbo sont les trois langues principales et que chacune est largement parlée dans leurs diverses régions, tandis que plus de 450 autres langues du pays sont considérées comme des langues « minoritaires ». Les étiquettes « langues

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majoritaires / principales » et « minoritaires » au Nigéria se traduisent également directement par la répartition du pouvoir et du prestige sociopolitique et économique.

La langue est un puissant outil de contrôle utilisée par les puissances coloniales. La langue constitue une grande partie de la culture des gens, car c'est à travers elle que les peuples expriment leurs contes populaires, leurs mythes, préservent leur culture et leur histoire. Pinker,

(1994) considère la langue comme une couverture ou plus puissante caractéristique du comportement humain. Elle consiste en un ensemble de sous-langues complet et qui se chevauchent avec un territoire défini éthiquement et géographiquement, connu sous le nom de dialectes. Certains dialectes sont définis par des paramètres partagés connus pour être enregistrés, tandis que d'autres sont liés à une profession, à une classe ou à un niveau d'éducation, ou à une combinaison de ces éléments. Chez les humains, la langue découle d'un besoin de communication. Halliday (2006) définit la langue en tant que moyen avec lequel les

êtres humains communiquent entre eux. Cependant, la langue, aussi puissante soit-il, fonctionne dans certaines situations et certains environnements. Par conséquent, la langue n’est pas vécue isolément mais par rapport à des actions et à des événements dont les paroles et les écrits tirent leur sens (Halliday, 1985). L'utilisation de la langue lors de différents discours dépend largement de la situation du contexte basée sur les caractéristiques linguistiques du champ, du ténor et du mode. Ce sont des concepts très généraux pour décrire comment le contexte de la situation détermine les types de sens exprimés (Halliday, 2006). Bai et Shi (2002) affirment que la langue englobe un large éventail de variations dans la diversité des activités humaines dans un système d'interaction avec quelqu'un, la société ou la culture. Elle joue également un rôle crucial dans la vie sociale, politique et économique des habitants d’une entité géographique donnée.

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En dépit de tous les rôles perçus des langues pour l’humanité, une interprétation globale de celle-ci continue de nous échapper en raison de la complexité de sa structure et des fonctions qu’elle remplit. Lewis (2001) est d'avis que toute directive concernant la langue, en particulier dans le système d'éducation, doit tenir compte de l'attitude de ceux qui risquent d'être affectés. La langue est un outil important dans la société car l'homme en a besoin pour partager ses idées, ses expériences, ses émotions et pour interagir avec d'autres personnes de la société ou de son environnement. Il est le principal moyen utilisé par lequel les êtres humains communiquent entre eux. La langue est principalement parlée, bien qu'elle puisse être transférée sur d'autres supports, tels que l'écriture (Bhatia, 1993). Crystal (2003) affirme que la langue est une méthode purement humaine et non instructive de communication d'idées, d'émotions et de désirs au moyen de symboles produits volontairement. Il existe d'autres formes de communication comme la communication non verbale, qui consiste à utiliser la langue du corps, des gestes, des signes et des signaux pour transmettre des informations. Fakuade (1998) définit la langue comme « le moyen par lequel les hommes communiquent entre eux et avec eux-mêmes ».

Par conséquent, il est de nature à conclure que la langue est un outil efficace de socialisation et de relations sociales.

Babatunde (2003) observe que la langue remplit des fonctions transactionnelles, interactionnelles et éducatives. Les rôles des langues dans la société humaine englobent une grande partie de l'expérience historique des gens, de leurs modes de pensée et de leur vision du monde. Les rôles linguistiques parallèles à l'incarnation de la culture conduisent à approfondir la réflexion d'une personne au-delà des nécessités pratiques de la vie sur des aspects tels que la recherche de connaissances, l'éducation et la collaboration entre sociétés multiethniques. De cette manière, il a révélé à quel point il est possible pour la langue anglaise d’élaborer des fonctions

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dans presque toutes les facettes de la vie au Nigeria. Langacker (1973) explique que la langue est l'instrument qui se propage dans nos pensées, modère notre relation avec les autres et s'insinue dans nos rêves. C’est fondamentalement un système de conceptualisation, qui facilite la réflexion et détermine l’action des personnes. C'est un moyen par lequel les gens communiquent. La pensée et les activités humaines sont complexes et véhiculées, non seulement par les actions, mais aussi par le véhicule de la langue. L’utilisation de la langue à un moment donné est le reflet des activités menées, qui donnent naissance au concept de registre au sens le plus large

(Fakuade, 1998). La langue permet d’imaginer des objets, des événements et des états de fait contrefactuels ; il est intimement lié à l’intentionnalité : caractéristique de toutes les pensées humaines qui utilisent essentiellement une langue ou qui le dirigent vers des choses extérieures à elles-mêmes (Drew et Heritage, 1992). En gros, la langue peut être décrit comme un système de médiation interposés comme une couche entre une couche de « réalité » et une couche de « société », qui parle dans et de ce monde donnant ainsi naissance au concept de sociolinguistique qui est la réalité de la société qui façonne et limite l’utilisation de la langue (Fakuade, 1998).

L’utilisation de la langue rend généralement la plupart des actions plus utiles et plus efficaces, et permet de nombreuses autres actions possibles la réalité (Morris et Hirst, 1991).

L'efficacité linguistique est possible parce que la langue est une activité régie par des règles.

Lorsque les règles sont désobéies, des malentendus, un manque de clarté, de la confusion et de l'ambiguïté peut se produire. Dans une situation où la structure linguistique ne permet pas une communication efficace, probablement en raison de manipulations stylistiques, de difficultés de compréhension et d'interprétation peuvent être confrontés par les utilisateurs de la langue. En pragmatique, toutefois, les significations sont implicites et la règle suivie est une règle « non-dit, non écrit» (Keith, 2001).

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2.3 STATUT ET HIÉRARCHIE DES LANGUES

On distingue en général trois types de langues au Nigéria : (1) les langues endogènes ; (2) les langues exogènes ; et (3) une langue neutre.

1) Les langues endogènes

Les langues endogènes nigérianes appartiennent à trois des quatre grandes familles de langues parlées en Afrique, notamment les familles nilo-saharienne, afro-asiatique et Niger-

Congo. Soixante-dix pour cent (70%) des langues nigérianes appartiennent à la famille du Niger-

Congo qu’on retrouve principalement au sud, tandis que les familles nilo saharienne et afro- asiatique au nord se partagent 30% des langues. Il va sans dire que le statut des langues endogènes varie selon leurs fonctions dans la société, le nombre de locuteurs et le degré d’usage.

Ainsi peuvent-elles être regroupées en trois classes, à savoir les langues nationales, les langues régionales et les langues locales. Aussi appelées langues majoritaires parce qu’elles sont des langues de grande communication, les langues nationales sont les plus influentes et représentent ensemble plus de la moitié de la population nigériane et sont composées de trois langues (le yorouba, l’haoussa et l’igbo). Couvrant principalement la partie nord du pays, l’haoussa (une langue de la famille afro-asiatique) constitue le groupe linguistique le plus important du pays, avec 29% de la population. Vient ensuite le yorouba, une langue de la famille nigéro-congolaise, qui domine le Sud-ouest du pays et représente 21% de la population. L’igbo est la troisième langue importante du Nigéria, dominant le Sud-Est du pays et comptant 18%, (Akinpelu, 2016).

Parlées dans 18 des 36 états, ces trois langues sont officiellement reconnues comme langues nationales du pays par la Constitution du Nigéria. Elles ont pour fonction d'assurer l’unité du pays, de promouvoir la culture et elles sont utilisées pour l’éducation formelle initiale, c’est-à- dire les trois premières années du primaire. Les langues régionales sont les langues qui dominent

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dans les différentes régions où elles sont parlées. Comptant environ 5 millions de locuteurs chacune, on dénombre 11 langues dans cette catégorie : le fulfulde, l’efik, le kanuri, le tiv, l’ijo, l’edo, le nupe, l’igala, l’idoma, l’ebira et l’ibibio. Il convient de souligner au passage que même si les langues majoritaires sont perçues comme des langues nationales, elles ne sont en réalité que des langues régionales dans la pratique, étant donné que le yorouba est essentiellement parlé dans le Sud-Ouest, l’igbo dans le Sud-Est et l’haoussa dans le Nord. Les langues locales, quant à elles, sont plus de 450 langues et sont perçues comme langues minoritaires, à cause de leur faible importance sociolinguistique.

2) Langues exogènes et langue neutre

L’anglais, le français et l’arabe sont les principales langues exogènes, tandis que le pidgin nigérian remplit la fonction de langue neutre. Il faut préciser qu’il y a deux langues officielles au

Nigéria : l’anglais (langue officielle de facto héritée de la colonisation) et le français (proclamé langue officielle en 1996). Le pidgin nigérian (pidgin anglo-nigérian) est un mélange des langues nigérianes avec l’anglais standard phonétiquement et grammaticalement simplifié, qui a vu le jour avec les premiers contacts entre les Britanniques et les populations nigérianes qui ne parlaient pas l’anglais. Il possède aujourd’hui une forme écrite et est surtout employé dans les grands centres urbains et le long de la côte du pays. Pour la population non scolarisée, le pidgin anglo-nigérian constitue une langue de communication forte privilégiée, tandis qu’il est employé par des personnes scolarisées pour les communications non formelles.

Il y a lieu de noter en passant qu’au Nigéria, il n’existe pas de langue endogène capable d’exprimer l’identité nationale, puisqu’aucun idiome ne constitue la langue maternelle de la majeure partie de la population. Il existe plutôt des langues dominantes aux niveaux régional et local. Ainsi, dans chaque État, les langues avec le plus grand nombre de locuteurs occupent

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naturellement le rôle d’idiome majoritaire ou de lingua franca (langue véhiculaire). Par exemple, l’efik est la langue dominante de l’État de Cross River, dans le Sud du pays, où coexistent 50 langues ; il en est de même pour l’État de Nasarawa où coexistent 29 langues dans le nord du pays, les idiomes majoritaires étant le mada, le rindre et l’eggon. Cette distribution linguistique complexe constitue sans doute un énorme défi pour les activités d’aménagement linguistique et suscite parfois beaucoup de rivalités entre les différents groupes ethnolinguistiques, tels que le régionalisme et l’ethnicité qui sont deux gros obstacles à la construction de l’identité nationale,

(Akinpelu, 2016).

2.4 ORIGINE ET EVOLUTION DU PIDGIN AU NIGERIA

Les récits historiques de l'origine et de l'évolution du pidgin nigérian vont vers Calabar, la première capitale administrative du Nigéria, où les premiers contacts avec des marchands portugais ont donné naissance à une langue pidgin à base portugaise connue sous le nom de « portugais noir » au 15ème siècle. L'arrivée des Britanniques en tant que partenaires commerciaux et, plus tard, en tant que missionnaires et administrateurs coloniaux, accroît encore la demande de communication dans le pidgin nigérian, qui s'est métamorphosée en anglais à partir du passage de l'histoire. Emananjo (1985) reconnaît le pidgin nigérian comme l’une des quatre langues couramment parlées au Nigéria, en concurrence avec les langues dites nationales du pays

– l’haoussa, l’igbo et le yoruba. La langue témoigne une série de transformations compte tenu du degré de contact avec ses sources de superstrat et de substrat. Comme nous l'avons dit auparavant ; au Nigeria, avant et après les indépendances, l’attitude envers le pidgin nigérian

était extrêmement négative et dégradante. Elle était considérée comme « anglais cassé », « jargon rebelle », « vulgaire » et « corrompue ». Il a été interdit dans les écoles et au sein du gouvernement. La langue était principalement associée aux paysans, aux personnes sans

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éducation, aux artisans et à la population générale à faible revenu. De cette façon, le statut du pidgin nigérian était principalement déterminé par l’identité de ses locuteurs. Même au sein du cercle linguistique mondial, les langues pidgin n’ont guère retenu l’attention des chercheurs.

C'est pourquoi Holm (2000 : 5) soutient que : Ce n'est que relativement récemment que les linguistes ont compris que les pidgins et les créoles n'étaient pas des versions erronées d'autres langues, mais plutôt de nouvelles langues… façonnées par les mêmes forces linguistiques qui ont façonné l'anglais et d'autres langues « propres ». En dépit de son antagonisme contre le pidgin nigérian, celui-ci continue de prévaloir et gagne en importance et en utilité contrairement au pidgin néo-zélandais du peuple maori, remplacé par un anglais standard grâce à l'éducation de masse. Un autre exemple est le pidgin chinois anglais qui s'est éteint en Chine du fait de son interdiction par les autorités chinoises. Chaque mouvement visant à éliminer le pidgin nigérian ou à en réduire la propagation et l’influence au Nigéria a toujours naturellement échoué.

L’exemple du projet WAZOBIA proposé, qui préconisait la création artificielle de la langue nationale du Nigéria sur la base des ressources provenant des trois langues dites principales du

Nigéria. Le concept est dérivé du mot signifiant « viens » dans ces langues. Wa (yoruba), zo

(hausa) et bia (igbo).

Le projet était un moyen de réduire l’influence du pidgin nigérian mais la conception entière est morte à l’arrivée. Le pidgin nigérian est resté chez les Nigérians et acquiert de nouveaux rôles dans toutes les facettes de la vie économique et sociopolitique du pays. Il n'est plus considéré comme le mode restreint de communication interlingue avec un lexique limité, mais comme une langue dotée de sa propre vitalité et de sa propre essence. Mufwene (2008 : 7) soutient que : à mesure que les fonctions de communication des pidgins se développaient (comme dans les villes issues d’anciennes usines commerciales), ces « variétés de contact » devinrent structurellement

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plus complexes et leur régularité d’utilisation leur donnait plus de stabilité. Ces caractéristiques supplémentaires les ont transformés en ce qu'on appelle des pidgins expansés tels que Tok Pisin et le pidgin nigérian. Le pidgin nigérian est principalement une langue parlée (bien que diverses tentatives infructueuses aient été tentées pour l’engager à écrire en concevant une orthographe standard), très polyvalent et dynamique. Les conditions sociales de l’environnement nigérian imposent de plus en plus d’utilisation et de fonctionnement. De nombreux linguistes (Essien

1993, Egbokhare 2003, Emenanjo 1985, etc.) ont réclamé l'adoption du pidgin nigérian comme langue nationale au Nigeria, tandis que d'autres (Marchese et Schnukal 1982) ont réclamé sa reconnaissance en tant que langue autochtone nigériane de sa popularité, sa simplicité et sa neutralité. La rivalité entre les trois langues dominantes donne au pidgin nigérian un avantage en tant que meilleure alternative et favori indispensable dans la quête d’une lingua franca du

Nigéria. Elle est détachée sur les plans politique, social et ethnique et est plus acceptable que n’importe quelle langue nigériane préexistante. Sa simplicité améliore également l’apprentissage,

étant donné sa forme réduite et contractée. Son système sonore, ses stratégies de formation de mots et sa structure de phrases sont dépourvus de toute complexité pouvant être rencontrée lors de l’apprentissage d’une langue nigériane. Le rôle renouvelé du pidgin nigérian dans les médias

électroniques, tels que la traduction d'informations, les dramatiques, l'illumination publique, la mobilisation de masse et l'éducation, favorise sa survie en tant que langue capable de combler les fossés ethniques et de créer un nouveau badge d'identité. La station de radio Wazobia et la station de radio Naija FM à Abuja, Lagos et Rivers ancrent exclusivement tous leurs programmes, des informations à la sensibilisation du public et au divertissement sur le pidgin nigérian. Ce sont des efforts louables pour maintenir la pertinence du pidgin nigérian en tant que langue des médias et du discours national. Sur la scène musicale nigériane, en particulier avec la

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culture émergente de la pop naija, le pidgin nigérian est une langue d’expression prédominante et une forme de solidarité ou une marque d’identité parmi les divers groupes de jeunes multiethniques qui aspirent à créer leur culture urbaine respective en raison de leur dynamique de groupe et de leur orientation sociale.

Dans l'arène religieuse, le pidgin nigérian occupe une place prépondérante dans les sermons d'église, les chants, les témoignages et un moyen de prière. Tant dans la publicité imprimée que dans les médias électroniques, le pidgin nigérian a été utilisé de manière créative et stylistique pour manipuler les valeurs et l’attitude sociales dans la formation du goût des consommateurs. Il existe un projet en cours de traduction de la Bible en pidgin nigérian, une initiative de la traduction de la Bible en langue pidgin nigériane (NPLBT) conjointement avec

Literacy International (Ofule, 2010). Dans le domaine universitaire, bien que le pidgin nigérian ne soit pas un moyen d’enseignement dans les écoles nigérianes, il est souvent utilisé comme moyen d’expression parmi les étudiants, en particulier ceux des établissements d’enseignement supérieur pendant les heures creuses. Un certain nombre de genres littéraires tels que le théâtre, le poème et la prose ont été publiés dans le pidgin nigérian. De nombreux aspects de sa structure et de ses formes linguistiques ont été décrits et analysés.

Avec une population nombreuse et vigoureuse et une longue tradition de diversité ethnique et linguistique et de tolérance, le Nigéria a pu développer une société hautement mercantile avec des centres urbains majeurs des siècles avant le débarquement des navires de commerce européens au XVe siècle ou l'arrivée du Jihad en le treizième siècle. La vie dans les villes, les mariages mixtes, les échanges commerciaux et les voyages ont rapproché des

Nigérians de différentes langues pendant des milliers d'années. Le bilinguisme et le multilinguisme ont toujours été la norme plutôt que l'exception dans la plupart des régions du

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Nigéria. Pour ces raisons, il est très probable que les versions pidginisées des langues nigérianes ont été largement utilisées dans de nombreux domaines. En fait, l’haoussa pidginisé est encore parlé par les non-locuteurs de cette langue sur les marchés autour du lac Tchad, tandis qu'une forme pidginisée de l'igbo est actuellement utilisée sur certains marchés du Delta du Niger. Le pidgin nigérian pourrait très bien s’être développé à partir d’une ou plusieurs de ces langues nigérianes pidginisées parlées le long de la côte avant l’arrivée des Européens. En raison de l'importance du commerce européen et de la réticence des Européens à apprendre d'autres langues, des mots européens auraient été substitués aux mots nigérians pour faciliter la communication. Depuis que les Portugais sont arrivés les premiers, quelques éléments dérivés du portugais, tels que sàbi 'savoir' et pìkîn 'enfant', auraient été adoptés à l'origine. Parallèlement au colonialisme britannique, l'éducation européenne s'est faite par l'intermédiaire de missionnaires dont beaucoup parlaient le krio de la Sierra Léone (principalement d'anciens esclaves ou des descendants d'esclaves « rapatriés » des Caraïbes).

2.5 PIDGIN NIGERIAN

Au cours de la quête européenne de nouveaux marchés et de matières premières au XVIIe siècle, de nombreux missionnaires et commerçants portugais sont arrivés sur les côtes de la

Jamaïque et de pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale ; les missionnaires ont largement visité la Sierra Leone, le Cameroun et le Nigeria. À des fins commerciales et religieuses sans langue commune, ils ont créé une forme de communication avec des bases de la langue européenne, donnant naissance à la plupart des langues africaines : telles que le créole, le pidgin et le patois. Ces langues ont fini par servir le du Cameroun (mélange de français et d’anglais) parlé par les jeunes aujourd’hui. Le pidgin nigérian est une lingua franca, parlé le long des côtes de l’Afrique de l’Ouest et s’est étendu à la diaspora, en raison des migrants nigérians.

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Après le départ des missionnaires, cette lingua franca ne les a pas accompagnés mais est restée et est la langue la plus parlée au Nigéria aujourd'hui par rapport à l'anglais. Il existe encore des mots portugais dans le pidgin nigérian, tels que : « Sabi (savoir) et Pikin (enfant) ».

Le pidgin nigérian est considéré par certains comme une bastardisation de la langue anglaise utilisée par les analphabètes, bien qu'il soit très parlé au Nigéria par beaucoup de gens, et ce dès le plus jeune âge. Dans le pays, les personnes alphabètes, telles que le président, les politiciens en campagne, les avocats, les médecins et les non-alphabètes parlent et comprennent le pidgin, bien qu'il soit principalement utilisé dans des situations informelles et que l'anglais est utilisé à des fins officielles et comme moyen d'éducation. Le pidgin nigérian est la langue la plus largement parlée, car il n’est pas la langue maternelle des tribus du Nigeria, mais la seule langue que tout le monde comprend et considère comme la forme la plus facile d’interaction parmi la population. Comme vous le savez, la République fédérale du Nigéria compte trois langues principales : l'igbo dans l'est, le yoruba dans le sud et l’haoussa dans le nord, l'anglais étant la langue officielle, à côté de 500 autres dialectes parlés. En effet, le pidgin nigérian est considéré comme une langue bâtarde car il n’a pas encore de forme écrite standard. Le pidgin nigérian n'est pas seulement parlé au Nigéria, il est largement utilisé par les communautés de la diaspora d'Afrique, d'Amérique, d'Angleterre et du Canada. Ces communautés diasporiques utilisent le pidgin entre elles pour se sentir chez elles.

Bien que toutes les lois et tous les règlements du pays soient rédigés en anglais standard, ils sont principalement appliqués en pidgin nigérian, ce qui est largement parlé dans les forces armées, la police et les prisons. De plus, comme beaucoup d'hommes et de femmes d'affaires ne sont pas éduqués au sens conventionnel, ils communiquent souvent en pidgin. C'est aussi la langue du système de marché ouvert du Nigéria, ainsi que des événements sportifs, en particulier

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lors de matches de football. Le pidgin nigérian peut être décrit comme une lingua franca dans toutes les universités, collèges, lycées et autres établissements d’enseignement. Dans la littérature nigériane, le pidgin a été utilisé pour des effets à la fois comiques et tragiques dans des pièces de théâtre, des romans, des nouvelles et souvent des versets, par exemple dans le poème le plus acclamé de Frank Aig-Imoukhuede, « Une femme pour un homme ». Une première tentative d'utilisation du pidgin nigérian dans la presse eut lieu en 1969 lorsque le 'Lagos weekend' commença à publier la colonne "Walkabout" de Wole Falodun, nommée d'après un personnage dont les escapades étaient de plus en plus nombreuses.

En effet, cette caractéristique régulière est devenue si populaire que d’autres journaux ont introduit des caricatures et des bandes dessinées qui s’appuient principalement sur leur rire en pidgin. Bien que généralement limité au divertissement dans les médias, le pidgin est parfois utilisé pour des commentaires satiriques et des critiques sur des déclarations dignes de l'actualité.

Le Nigéria a essayé de réaliser une plus grande intégration sociopolitique depuis sa fusion en

1914, et le gouvernement fédéral devrait maintenant reconnaître officiellement non seulement la contribution utile déjà apportée par pidgin, mais surtout son potentiel croissant en tant que langue pouvant permettre à la nation tout entière de parler, au moins de temps en temps, d’une seule voix. Il peut être nécessaire de rappeler que la fonction unificatrice nationale d'une langue créole a été utilisée à bon escient en Sierra Leone, en Papouasie-Nouvelle-Guinée et au Cap-

Vert, pour ne donner que trois exemples. Un défaut notable du pidgin nigérian est l’absence d’orthographe standard. Toutefois, si le gouvernement le promeut officiellement, cela faciliterait la recherche de l’orthographe et de l’utilisation convenue.

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2.6 POLITIQUE LINGUISTIQUE AU NIGERIA

Le Nigeria, pays le plus multilingue d'Afrique, compte plus de 450 langues ( Adegbija,

2004). La politique et la planification linguistiques dans le pays revêtent une importance primordiale, d’abord en raison de la fidélité à différentes langues, et en second lieu, en raison des implications pour d’autres contextes multilingues dans le monde entier. Une politique est nécessaire, comme dans beaucoup d'autres contextes multilingues, pour des fonctions officielles, nationales, éducatives, interethniques et internationales. Bamgbose (2001) observe que : Comme dans la plupart des pays africains, la politique linguistique au Nigéria est rarement documentée, mais ses effets se manifestent dans divers domaines, tels que l'utilisation comme langue officielle, le moyen d'instruction dans les écoles, l'utilisation de la langue par les médias et par l'assemblée législative, (Bamgbose, 2001 : 1).

Les problèmes de langue au Nigéria étant souvent assez explosifs et conflictuels, les recensements ne contiennent jamais d'éléments ou de questions sur les langues. Ainsi, des statistiques fiables portant sur des questions telles que le nombre de langues, leur étendue, le nombre de locuteurs de chaque langue ou le pourcentage de la population qu’elles constituent sont rarement disponibles. Sur le plan géographique, le Nigéria est divisé en 36 États et un territoire de la capitale fédérale, Abuja. Pour la facilité de l'administration, chaque État a été divisé en zones de gouvernement local. Le nombre varie en fonction de la taille de la population, de l'influence politique, du pouvoir de pression de la population au sein de l'État et des attitudes et décisions des gouvernements à la fois fédéral et des États. En tout, le gouvernement fédéral reconnaît officiellement 774 gouvernements locaux dans tout le pays.

Les langues indigènes nigérianes appartiennent à trois des quatre langues principales familles en Afrique. Il s’agit du phylum Niger-Kordofanian, auquel appartiennent environ 70%

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des langues ; le phylum afro-asiatique, auquel appartiennent environ 29,5% des langues, et le phylum nilo-saharien, auquel appartiennent seulement environ 0,5% des langues nigérianes. Le phylum Niger-Kordofanian a pour membres le kwa, l'adamaoua et les groupes de langues de l'Atlantique Ouest. La plupart des langues kordofaniennes du Niger au Nigéria appartiennent à la branche Kwa (Centre Sous-branche Niger-Congo du Niger Congo). Des langues telles que le yorouba (également parlé dans des pays voisins comme le Bénin et le Togo), l'igbo, l'oko osanyin, l’edo, l'igala, l'Idoma, le itsekiri et le nupé appartiennent à la branche kwa du phylum nigero-kordofanien. Les langues Benue-Congo telles que l'ibibio, l'efik, l'ejagham, le tiv et les langues adamawa telles que le chamba, les langues jukunoid et les langues de l'ouest de l'Atlantique telles que le shuwa, qui est membre de la branche sémite, sont également membres du phylum Niger-Kordofanian. La majorité des langues nigériano-kordofaniennes se trouvent dans la partie sud du Nigéria, dans les États de Jigawa et de Taraba au nord. Le représentant principal du phylum afro-asiatique au Nigéria est l’haoussa. L’haoussa est également parlé dans des pays voisins comme le Tchad, le Niger et le Ghana. Les langues kanuri, dendi et zabarma sont les principaux représentants du phylum nilo-saharien au Nigeria. Toutes les langues afro- asiatiques et nilo-sahariennes sont situées dans la partie nord du Nigéria. De nombreuses langues nigérianes présentent de nombreuses similitudes structurelles, notamment en termes de classification génétique (Adegbija, 2004 ; Agheyisi, 1984 ; Akinnaso, 1991 ; Brann, 1990 ;

Ruhlen, 1991). Trois principaux types de langues sont reconnaissables au Nigéria. Ce sont : les langues autochtones ou endoglossiques; langues étrangères ou exoglossiques; et variétés de langues pidgin, dont la plus dominante est la plupart du temps pidgin nigérian basé en anglais. La principale langue exoglossique utilisée au Nigéria est l’anglais ; d'autres sont le français et l’arabe.

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D'autres langues exoglossiques telles que l'allemand, le russe, l'italien, etc. ont une présence plutôt minimale, car elles sont largement utilisées dans les ambassades et les familles d'employés d'ambassades, parmi quelques-uns et dans les salles de classe des universités. Au fil des ans, l’anglais s’est métamorphosé en deuxième langue en raison de sa pertinence fonctionnelle, de sa domination officielle et de son rôle de lingua franca nationale au Nigéria.

L’anglais est l’une des langues officielles du Nigéria constitutionnellement reconnues, aux côtés de trois langues autochtones, à savoir l’haoussa, le yoruba et l’igbo. L'anglais est la langue prédominante dans l'éducation, les médias écrits et électroniques, le pouvoir judiciaire, la plupart des transactions officielles, ainsi que devant l'Assemblée nationale et le Sénat. La diplomatie internationale est également menée en anglais. Les huitièmes Jeux panafricains, auxquels ont assisté des délégués de 52 pays africains, ont officiellement commencé le 4 octobre 2003 et se sont déroulés sur 15 jours. Les comptes rendus d'événements se sont déroulés en grande partie en anglais et en français. Le discours de bienvenue de l'ancien président Olusegun Obasanjo a été prononcé en anglais et interprété en français. Les présidents du Nigéria parlent anglais lorsqu’ils visitent d’autres pays et lorsque des dignitaires étrangers se rendent au Nigéria. L’anglais joue

également un rôle majeur - celui d’unification des différentes ethnies nigérianes. C'est la langue principale de la communication et de l'interaction interethniques officielles et non officielles. Son rôle est tellement vital que beaucoup de Nigérians pensent que le pays ne peut pas exister, ou du moins que son existence en tant qu'une entité unique serait gravement menacée ou compromise, sans l'anglais. Mann (1996 : 104) commente comme suit le rôle et le statut de l’anglais au

Nigéria : « Il est très peu probable que le rôle de l’anglais comme langue officielle du Nigéria soit remis en cause dans un avenir proche. La mise en valeur récente de l'idéologie capitaliste dont les principaux agents et acteurs anglophones suite à l'effondrement des systèmes socialistes

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en Union soviétique et dans d'autres pays d'Europe orientale, renforcer son statut sur la scène mondiale, Mann, 1996. »

2.7 PARTICULARITÉS ET VARIÉTÉ DU PIDGIN NIGERIAN

Le pidgin nigérian est une variété du créole d’Afrique de l’Ouest, qui remonte au XVe siècle, dans les régions côtières de Calabar, Port-Harcourt, Sapele, Warri et Badagry. La montée de l'intérêt pour la traite négrière a provoqué le premier contact entre les Européens et les

Africains et, en l'absence d'un moyen de communication commun, l'émergence d'une langue pidgin est devenue apparente (Nair, 1972). La première forme enregistrée de pidgin nigérian a

été documentée par le célèbre Antera Duke, chef et commerçant de premier plan dans le Vieux

Calabar, qui a principalement écrit sur les activités qui se sont déroulées entre les Efik et les blancs (Mensah, 2011). Il est à noter que les premiers contacts des peuples de l'Afrique de l'Ouest avec les Européens ont eu lieu avec les Portugais au 15ème siècle. Ceci explique la présence de quelques mots portugais dans le lexique du pidgin nigérian, comme pikin (enfant), palaver (problème), dash (cadeau), sabi (savoir) etc. (Vanamali, 1993). La documentation d'Antera Duke est connue sous le nom de journal d'Antera Duke. Fayer (1990) soutient que le journal d'Antera Duke prouve que le pidgin anglais utilisé dans le vieux Calabar n'était pas seulement une langue parlée, il avait également des fonctions écrites. Le journal a également fourni certaines des preuves les plus anciennes du pidgin qui continue sous le nom de Nigerian pidgin English, Fayer (1990: 185). Malheureusement, une plus grande partie du journal a été bombardée à la bibliothèque de l'Église unie d'Écosse pendant la Seconde Guerre mondiale

(Fayer, 1990).

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Un certain nombre de variétés de pidgin nigérian ont été reconnues dans la littérature, telles que le wafi, principalement parlé à Warri et Sapele (Marchese et Schnukal, 1982), l'Ajegunle, parlé à Lagos et ses environs (Jowitt, 1991), l'Una, parlées dans le sud du Nigéria

(Mensah, 2011) et l'anglais spécial, les variétés parlées à Port-Harcourt et Onitsha, etc. Une caractéristique généralement connue de toutes ces variétés est qu'elles se sont développées dans des contextes très hétérogènes sur le plan linguistique. Elles sont également mutuellement intelligibles mais chacune a ses particularités sociales et morphosyntaxiques qui la distinguent comme une variété distincte. La variété Warri serait la plus polyvalente et la plus créative de toutes les variétés de pidgin nigérian (Marchese & Schnukal, 1982 ; Mensah, 2011). Elle fournit la plus grande quantité d’argots qui gagne finalement en popularité et devient conventionnelle dans le lexique de leur variété de pidgin nigérian et au-delà. Parmi les nouveautés inventées dans la variété Warri, on peut citer efizy « style », káwásáki « quitter rapidement », strafe « relations sexuelles », ákátá « un afro-américain » et gbósá « un grand bruit » etc. Ces éléments lexicaux ont des significations socialement inventées qui se propagent progressivement aux autres variétés. La variété Ajegunle est fortement influencée par l'argot yoruba tel que egunje «pot-de- vin », tokumbo « marchandise d’occasion », òròbò « une personne extrêmement grosse », lékpá

« une personne très maigre » (généralement une femme), ásháwó « une prostituée », ibeji « twins

» etc.

Chacun des 450 groupes ethniques ou plus au Nigéria peut converser dans la langue pidgin, bien qu'ils aient généralement leurs propres mots. Par exemple, les Yorùbá utilisent les mots « sebi » et «abi» lorsqu'ils parlent le pidgin. Ils sont souvent utilisés au début ou à la fin d'une phrase ou d'une question intonée: "Vous venez, n'est-ce pas?" devient Ṣebi you dey come? ou you dey come abi?

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Un autre exemple est l'igbo qui ajoute le mot « nna », également utilisé au début de certaines phrases pour montrer la camaraderie : Homme, ce test était très difficile, devient Nna, that test hard no be small. Les Hausas ajoutent le mot « bah » à la fin d'une phrase ou d'une question posée : Abdul est ton frère n'est-ce pas ? devient Abdul na your brother bah ? Le pidgin nigérian varie également d'un endroit à l'autre. Les dialectes du pidgin nigérian peuvent inclure le

Warri ; Sapele ; Benin City ; Port Harcourt ; Lagos, en particulier à Ajegunle ; et les variétés

Onitsha. Le pidgin nigérian est surtout parlé dans la region de Delta, riche en pétrole, où la majorité de sa population le parle comme première langue. Il y a des comptes de pidgin parlés d'abord dans le Nigeria colonial avant qu'il ne soit adopté par d'autres pays le long de la côte ouest africaine.

2.7.1 LE PIDGIN ECRIT

Le pidgin est ouvert à de nombreuses influences de l'anglais et des langues nigérianes locales, notamment des langues haoussa, igbo, yoruba et du groupe de langues édoïdes parlées dans la région de Delta. Bien qu'une grande partie du vocabulaire du pidgin soit dérivée de l'anglais, son lexique principal, le reste du vocabulaire, provient d'autres langues contributives telles que l'edo, l'haoussa, l'igbo et le yoruba, ainsi que du portugais, comme le montrent les exemples suivants, (Esizimetor and Egbokhare, 2001).

Tableau 3 : Les mots pidgins empruntés de différentes langues

Mots anglais

Chop Manger To eat/ to consume

Domot Couloir door mouth area

Doti Saleté Dirt

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Pesin Quelqu’un Someone

Trowe Jeter Throw away

Tok Parler To speak

Mots edo

Kpangolo Le recipient Container

Kpekere Chips de plaintain Plantain chips

Okada Moto motor-bike

Ororo Huile végétale Vegetable oil

Ozeba Un gros problème A big problem

Mots hausas

Dabaru Détruire To destroy

Dogo Une personne de grand taille A tall person

Gworo Noix de cola Cola nut

Koboko Fouet a cheval Horse whip

Suya Viande grillée, épicéé Spicy grilled meat

Mots igbo

Akamu Fécule de mais Corn starch/ pap

Biko S'il vous plait Please

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Obodo Pays Country/ land

Okrika Articles d'occasion Second-hand items

Ogbanje Un esprit de l'eau A water spirit

Ugu Feuilles de citrouille Pumpkin leaves

Mots yorubas

Adire Nouer teindre Tie and dye

Agbo Phytothérapie Herbal medicine

Ashawo Une prostituée A prostitute

Shakara Frimer Show-off

She Espérer Hope

Shele Se produire Happen/take place

Mots portugais

Kpalava Trouble Trouble

Pikin Enfant Child

Sabi Saviour To know

Le pidgin a aussi beaucoup de mots d'anglais qui sont entrés dans la langue sous leur forme plurielle. Parmi les plus largement utilisés sont : (Esizimetor and Egbokhare, 2001).

Bins Des haricots Beans

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Machis Les allumettes Matches

Skul fis Frais de scolarité School fees

Soks Les chaussettes Socks

Twins Les jumeaux Twins

2.7.2 LE PIDGIN ORAL

Le pidgin nigérian possède son propre système sonore, très similaire à celui des autres pidgin anglais de l’Afrique de l’Ouest. Le pidgin nigérian a un système sonore de sept voyelles orales - a, i, e,ɛ, o, ɔ, u, aux côtés de leurs homologues nasalisés. Ces sons sont commodément représentés par les lettres , , , , dans le système d'écriture, où représente

à la fois [e] et [ɛ] et représente à la fois [o] et [ɔ], (Esizimetor and Egbokhare, 2001).

Le pidgin nigérian a environ 22 consonnes que le locuteur moyen utilise en combinaison avec les séquences de voyelles et de voyelles pour produire des sons typiques de la langue. Ces lettres sont représentées distinctement dans le système d'écriture par 22 lettres romaines et leur combinaison - b, ch, d, f, g, gb, h, j, k, kp, l, m, n, p, r, s, sh, t, v, w, y, z. se prononce comme «ch» en anglais «chat», se prononce de manière similaire à «j» en anglais «juge», tandis que se prononce également de manière similaire à «sh» en anglais «shoot» .

et témoignent de l'influence des langues nigérianes sur le pidgin, par exemple: agbo

(Yoruba) «phytothérapie», kpako (yoruba) "dur / quelqu'un de pauvre", kpekere (edo) , ogbono / ogbolo (igbo), «soupe gluante». Dans de nombreux mots dérivés de l’anglais où les sons "th" existent, ils sont généralement réalisés sous la forme "d" et "t" dans pidgin. Par exemple: dem

(them), di ‘the’, tink (think) et ‘tank’ (thank).

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Le pidgin est une langue tonale. C'est-à-dire que la hauteur des différentes syllabes dans les mots, qui peuvent être hautes ou basses, est souvent utilisée pour créer une différence de sens dans la langue. La tonalité affecte un groupe important de mots provenant de l'anglais et d'autres langues nigérianes. Par exemple : babá « un vieil homme », bába « un coiffeur », fadá « un prêtre catholique » fáda « un maître à quelque chose », igbó « marijuana », igbo « un membre ou une langue du plus grand groupe ethnique du sud-est du Nigeria », papa « papa ou père », pápa « un vieil homme » (Esizimetor and Egbokhare, 2001).

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CHAPITRE III : LA PLACE ET L'AVENIR DU PIDGIN AU NIGERIA

3.1 LE PIDGIN DANS LE PAYSAGE LINGUISTIQUE ACTUEL DU

NIGERIA

Le pidgin se répand rapidement au Nigéria au point que plus de 60% de la population communique en pidgin. Mensah, E. 2012. Actuellement, le pidgin nigérian a gagné du terrain dans l'industrie de la musique, la comédie, les médias, les marchés, chez les jeunes, etc. Dans l'industrie de la musique nigériane, la plupart des musiciens composent leurs chansons en pidgin et pour faire rire les gens en tant que comédien, vous devez maîtriser le pidgin, car c’est la langue que vous pouvez utiliser pour capter l’attention des auditeurs. Le pidgin est utilisé dans les maisons de presse au Nigeria, certaines stations de radio et de télévision sont strictement destinées au pidgin.

Le pidgin nigérian se distingue des quelque 450 autres langues nigérianes par le fait qu'il est parlé par des membres de tous les groupes régionaux, ethnolinguistiques et religieux de la fédération. Le pidgin nigérian se distingue de l'anglais nigérian par le fait qu'il est parlé par des membres de tous les groupes socio-économiques, alors que seuls ceux ayant de nombreuses années d'éducation formelle peuvent prétendre parler anglais standard avec maîtrise. Pour comprendre les affaires du Nigéria et pour communiquer concrètement au Nigéria, une connaissance du pidgin nigérian devient rapidement indispensable. Bien que le pidgin nigérian soit à bien des égards le choix le plus logique pour une langue nationale, il n'est pas bien reconnu par les responsables politiques au Nigéria. Les attitudes officielles à l’égard du pidgin nigérian demeurent négatives, perpétuant des notions erronées héritées de la période coloniale selon lesquelles le pidgin nigérian est une forme d’anglais cassé. Il est devenu une lingua franca, il est considéré l'anglais cassé comme le patois et le créole, parlé le long des côtes de l’Afrique de

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l’Ouest et s’est étendu à la diaspora, en raison des migrants nigérians. Après le départ des missionnaires, cette lingua franca ne les a pas accompagnés, il existe encore des mots portugais dans le pidgin nigérian, tels que : « Sabi (savoir) et Pikin (enfant) ».

Actuellement, le pidgin nigérian est considéré par certains comme une bastardisation de la langue anglaise utilisée par les analphabètes, bien qu'il soit très parlé au Nigéria par

énormément de personnes, et ce dès le plus jeune âge. Dans le pays, les personnes alphabètes, telles que le président, les politiciens en campagne, les avocats, les médecins et les non- alphabètes parlent et comprennent le pidgin, bien qu'il soit principalement utilisé dans des situations informelles et que l'anglais est utilisé à des fins officielles et comme moyen d'éducation. Le pidgin nigérian est la langue la plus largement parlée, car il n’est pas la langue maternelle des tribus du Nigeria, mais la seule langue que tout le monde comprend et considère comme la forme la plus facile d’interaction parmi la population. Le pidgin nigérian n'est pas seulement parlé au Nigéria, il est largement utilisé par les communautés de la diaspora d'Afrique, d'Amérique, d'Angleterre et du Canada. Ces communautés diasporiques utilisent le pidgin entre elles pour se sentir chez elles.

Actuellement, bien que toutes les lois et tous les règlements du pays soient rédigés en anglais standard, ils sont principalement appliqués en pidgin nigérian, ce qui est largement parlé dans les forces armées, la police et les prisons. De plus, comme beaucoup d'hommes et de femmes d'affaires ne sont pas éduqués au sens conventionnel, ils communiquent souvent en pidgin. C'est aussi la langue du système de marché ouvert du Nigéria, ainsi que des événements sportifs, en particulier lors de matches de football. Le pidgin nigérian peut être décrit comme une lingua franca dans toutes les universités, collèges, lycées et autres établissements d’enseignement. Le pidgin est toujours utilisé pour transmettre une information importante au

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public pour une meilleure compréhension ou si une entreprise souhaite faire de la publicité pour son produit. La vie dans les villes, les mariages mixtes, les échanges commerciaux et les voyages font partie des facteurs favorisant le pidgin au Nigeria. Ces facteurs ont amené les Nigérians qui parlent des langues différentes dans des contacts étroits pendant des milliers d'années.

3.2 ASPECTS DE LA SYNTAXE DU PIDGIN NIGERIAN MODERNE

Les caractéristiques syntaxiques à l’étude sont les suivantes : marquage numérique des noms, identification numérique du nombre et du sexe dans les pronoms et la formation des questions.

3.2.1 Marquage numérique dans les noms

Selon Mafeni (1971 : 110), les catégories grammaticales de l'anglais ne correspondent pas nécessairement aux modèles de Pidgin. Il ajoute que la déduction de la forme plurielle d'un nom de dénomination ne peut être réalisée qu'en plaçant le marqueur pluriel indépendant «dem» après le nom. Cela signifie que la structure d'un nom au pluriel est N + dem. (Notez que dem est aussi le mot pour le pronom pluriel à la troisième personne). Ce qui suit sont ses exemples.

Tableau 4 : Le marquage numérique dans les noms

PIDGIN ANGLAIS FRANÇAIS

Di drayva dẹm de kọm The drivers are coming Les chauffeurs arrivent

A no si di ticha dẹm I did not see the teachers Je n'ai pas vu les professeurs

Di moto dem gud The cars are good Les voitures sont bonnes

Naija pipu dem no lazy Nigerians are not lazy Les Nigérians ne sont pas

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paresseux

Wi tẹl awa gads mek dẹm no We told our guards not to eat Nous avons dit à nos gardes de it/Wi tẹl awa gads dẹm mek ne pas manger dẹm no it

Plẹnti shọshis de dis rod / There are many churches on Il y a beaucoup d'églises sur

Plẹnti shọshis dẹm de dis rod this road cette route

Cependant, la forme plurielle d'un nom est réalisée en N + -s (+ dem). Cela signifie que le pluriel de draiva (chauffeur) est soit draivas (chauffeurs), soit draivas dem (chauffeurs).

Même les noms irréguliers conservent leurs formes anglaises au pluriel et apparaissent avec ou sans la particule dem. Par exemple ; Di men de wok / the men are working/ les hommes travaillent. Quelques autres déclarations doivent être faites sur le dem qui suit un nom dans une phrase nominale. Dans la littérature, il est généralement considéré comme un marqueur pluriel, mais Ndimele (2013 : 1087) le conçoit comme un « totalisateur » en ce sens qu'il peut être utilisé pour exprimer un concept d'accompagnement ou de comitivité. Il fournit les exemples suivants :

1. De gail dem don mari/ the girl and co are married/ la fille et co sont mariées.

2. Pita dem don mari/ Peter and co are married/ Peter et co sont mariés.

3.2.2 Nombre, genre et cas en pronoms

Dans les pronoms modernes en pidgin, le nombre, le sexe et la casse sont différenciés de manière à les rendre plus similaires à l’anglais que par le passé. Les formulaires ci-dessous sont les pronoms standard pidgin nigériens de Elugbe et Omamor (1991 : 90)

Tableau 5 : Le nombre, le genre et le cas en pronoms

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Sujet Objet Possessive

A/ I/ Je Mi/me/moi Mai/mine/mon

Yu/ you/ tu (sg) Yu/you/toi Yo/your/ton

I/him/her/ il/elle Am/his/her/lui/elle In/his/her/son/sa

Wi, we/ nous We/os/us/nous Wi/awa/our/notre

Una/ you/ vous (plu) Una/you/vous Una/your/votre

Dem/ them/ils Dem/them/leur Dem/their/leur

Nous avons quelques phrases dans le tableau ci-dessous

PIDGIN ANGLAIS FRANÇAIS

Mai mama giv wi fud My mother gave us food Ma mère nous a donné à

manger

I si di man yẹstade He/She saw the man yesterday Il / Elle a vu l'homme hier

A dọn giv am in fud I have given him his food Je lui ai donné sa nourriture

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Wi dọn giv dem dia mọni We have given them their Nous leur avons donné leur

money argent

Wi dey go wok fo dia fam We are going to their farm to Nous allons à leur ferme pour

work travailler

Formation de question : Vous trouverez ci-dessous certaines des façons dont les gens posent des questions en pidgin.

Tableau 6 : Formation de question ; certaines des façons dont les gens posent des questions en pidgin.

PIDGIN ANGLAIS FRANÇAIS

Wiẹ wi de go ? Where are we going to? Où allons-nous ?

Wẹn u kọm? When did you arrive ? Quand es-tu arrivé ?

Wai dẹm chọp di fud? Where did they eat the food? Où ont-ils mangé la nourriture ?

3.3 AVANTAGES SOCIOÉCONOMIQUE RELIÉS À LA

CRÉOLISATION DU PIDGIN NIGÉRIAN

On ne saurait trop insister sur le rôle de la langue dans le développement socio-

économique. Là où il n'y a pas de langue, il n'y a pas de développement, et c'est un fait.

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Cependant, la simple présence d'une langue n'entraîne pas la facilitation du but premier de la langue, qui est la communication. Le but principal de la langue est la communication. À son tour, une communication efficace facilite le développement. La communication est une condition préalable essentielle du développement et elle se manifeste par la langue. La langue doit être perçue comme communiquant le sens voulu comme un moyen d'atteindre les objectifs fixés et non comme une fin en soi. Les objectifs fixés dans ce cas seraient l’éducation, l’unité et / ou l’identité nationales et le développement socio-économique.

Comme le disent les économistes, un véritable choix est fait sur des entités similaires ; pas ceux qui ne sont pas au pair. Pour utiliser un concept d'économie, on peut avoir des choses qui ne sont pas égales sans aucun coût d'opportunité. Spécifiquement, l'unité nationale, l'éducation et le développement socio-économique, d'une part, et l'utilisation de la langue, d'autre part, ne sont pas égaux. En fait, l’utilisation de la langue facilite le développement socio-

économique, l’unité et la réalisation de l’éducation. Celles-ci peuvent être atteintes sans nuire à l'autre. Nous affirmons également qu'il est impératif qu'une langue unificatrice soit présente pour que le développement progresse à un rythme significatif. L’argument est qu’il est possible et nécessaire d’avoir une langue unificatrice sans pour autant nuire à l’existence d’utilisateurs d’autres langues. En d’autres termes, il est possible d’avoir une langue unificatrice pour le développement sans empiéter sur les droits des utilisateurs d’autres langues. La question est de savoir si le Nigéria peut avoir une langue commune sans nuire à l’utilisation de plus de 450 langues existantes. À notre avis, le Nigéria peut imposer l’utilisation d’une langue commune sans porter atteinte aux droits des utilisateurs de langues minoritaires. En d'autres termes, les

Nigérians peuvent être identifiés par une langue commune, tandis que différents groupes ethniques conservent leur identité en utilisant leurs langues minoritaires. Le Nigéria peut

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atteindre ses objectifs en matière de développement et exiger que la langue soit utilisée par le pays pour une communication efficace. Le développement est facilité par la convergence des objectifs et par le partage de la même vision par la langue et la communication. Nous observons que la langue est indispensable au développement et à l’unité.

La vision de la langue et de la communication en tant qu'ingrédient indispensable de l'unité et du but de la direction remonte à des temps immémoriaux. L'histoire biblique de la tour de Babel est assez explicite à ce sujet. Genèse 11 : 5-7 dit : « Et l’Eternel dit : Voici, ils forment un seul peuple et ont tous une même langue, et c’est là ce qu’ils ont entrepris ; maintenant rien ne les empêcherait de faire tout ce qu’ils auraient projeté, allons, descendons, et là confondons leur langue, afin qu’ils n’entendent plus la langue, les uns des autres ». Le Seigneur a dit que si comme un peuple parlant la même langue ont commencé à le faire, rien de ce qu’ils envisagent de faire ne sera impossible. Venez et laissez-nous descendre et confondre leur langue, afin qu'ils ne se comprennent pas. Au moment où il y avait beaucoup de langues, il n'y avait aucune compréhension entre elles. Ils ont arrêté de construire la tour et se sont dispersés à travers le monde. Ils ont abandonné le projet. La conséquence inévitable et malheureuse de nombreuses langues est que le projet a été abandonné. Cela implique qu’ils n’ont plus la même vision. Cette situation regrettable existait malgré l'existence d'autres langues (minoritaires). Il est également

évident qu'aucun des groupes plus petits avec leurs langues minoritaires n'a continué à construire la tour, malgré une communication efficace entre eux. Ceci confirme l’adage : Unis, nous sommes ; divisés nous tombons. Une langue commune unissait les gens, leur donnait un but et leur permettait de percevoir la même vision. Il est clair qu’une langue commune est importante pour l’unité de but dans tout ce que nous faisons et que notre but ici au Nigéria est, espérons-le, le développement. Notre tour de Babel au Nigeria est en développement. Il est également clair

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que pour que le développement ait lieu, il doit y avoir une unité de but et partager la même vision. L'UNESCO estime qu'il n'y a rien dans ce monde qui favorise la compréhension entre les peuples mieux que la communication. Cela implique donc que la communication ne peut être présente sans symboles de communication communs, qui est une langue commune. Cela maintiendra le pays concentré sur le développement. En revanche, l’absence de la langue commune est une garantie d’échec. Dans tout processus de développement, une communication efficace est fondamentale. Comme Smith et Smith (1971 : 553) le voient, une communication efficace n’est possible que si les messages sélectionnés possèdent une utilité pour la destination.

En d'autres termes, la communication peut être considérée comme efficace si la transmission des messages à l'utilisateur prévu est sous une forme précise et compréhensible. Si le message n'est pas compris par l'utilisateur, la communication est interrompue, rendant ainsi les informations inutiles et dépourvues de toute pertinence pour la prise de décision en cours de développement. Il n'est pas besoin d'insister sur le fait que l'on ne peut pas commencer à parler de la sélection de messages pour la communication avant l'utilisation d'une langue commune. Nous observons ici que pour qu'une nation soit centrée sur son développement national, une langue commune est une nécessité et non un luxe.

Le Nigéria a besoin d'une langue commune, non pas comme une fin en soi, mais pour une communication efficace dans le domaine de l'éducation, pour la construction de l'unité nationale et pour le développement socio-économique. Le pidgin est la langue commune qui n'appartient pas à une région particulière, il est parlé partout dans le pays, aussi bien les alphabètes que les analphabètes l’utilisent. La plupart des habitants des zones rurales qui ne peuvent pas s'exprimer en anglais britannique mais qui ont quelque chose à offrir au développement du pays sont toujours laissés pour compte en raison de leur incapacité à parler la langue officielle. D'autre

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part, la langue détermine le statut économique de ses locuteurs, l’incapacité de parler certaines langues conduit souvent à la pauvreté en affectant l’accès des individus à l’emploi et à l’éducation, ainsi que leur capacité à participer sur un pied d’égalité aux fonctions de la société.

Un pays où la majorité de la population parle la même langue se développe plus rapidement qu'un pays où il y a tant de langues. Le problème que nous avons au Nigéria ou en

Afrique est que nous avons peu de personnes capables de communiquer couramment dans nos langues officielles et cela affecte le développement de notre continent. Par exemple, en Chine, en

Inde, aux États-Unis d'Amérique, en France, en Allemagne et dans de nombreux autres pays où la majorité de la population parle la même langue a connu un développement rapide. La

République populaire de Chine et la République de l'Inde sont non seulement les deux États les plus peuplés du monde, mais également deux des économies dont la croissance a été la plus rapide des dernières années - et un moteur de plus en plus important de l'économie mondialisée.

La Chine a connu une croissance avec des taux proches de deux chiffres depuis les premières réformes de 1978 et est aujourd'hui le premier récepteur mondial d'investissements directs

étrangers. Depuis 1980, l’Inde génère une croissance réelle moyenne de 6% par an, dépassant constamment la barre des 8% depuis 2003. Dans les années à venir, les économistes s’attendent toujours à des taux de croissance supérieurs à la moyenne mondiale. Wilson et Purushothaman

(2003) dans leur célèbre étude sur les BRIC de Goldman Sachs estiment même que la Chine sera la plus grande économie du monde d'ici 2039, suivie des États-Unis et de l'Inde.

Le développement économique et la modernisation socioculturelle en Afrique sont à l’ordre du jour académique et politique depuis plus d’un demi-siècle, c’est-à-dire depuis la fin du colonialisme européen et l’indépendance de la plupart des pays africains - avec des succès qui accusent un retard considérable. Les Nations Unies ont fixé des objectifs ambitieux pour le

85

Millénaire pour le développement, qui doivent être atteints d’ici à 2015 - l’année est déjà

écoulée, mais ils ne sont pas atteints. Nous essayons de fournir des explications sur la persistance du sous-développement au Nigeria dans une perspective non conventionnelle. Il identifie les déficits du discours académique et politique actuel sur l'Afrique dans la mesure où ils se rapportent à un mépris alarmant du facteur linguistique. Une planification linguistique est nécessaire pour réaliser les transformations de la société et contribuer au développement académique et économique nécessaire au Nigéria pour surmonter le sous-développement, principalement en exploitant ses propres ressources linguistiques, culturelles et intellectuelles.

3.4 OBSTACLES À LA CRÉOLISATION DU PIDGIN AU NIGÉRIA

Pour qu'un pidgin devienne un créole, il doit surmonter certains obstacles avant de pouvoir se tenir debout. Nous examinerons certains facteurs pouvant constituer des obstacles à la créolisation ;

1. Le gouvernement : si le gouvernement continue à considérer le pidgin comme une langue

inférieure, il deviendra difficile pour le pidgin de devenir un créole. Ils ont le pouvoir de

reconnaître le pidgin comme une langue nationale compte tenu du nombre de ses

locuteurs, mais ils le voient toujours comme une langue destinée aux non-éduqués. À ce

sujet, Deuber (2005: 183) a déclaré: Bien qu’il s’agisse d’une lingua franca majeure, elle

n’a pas de reconnaissance officielle; même sans déclaration de politique, il remplit une

gamme croissante de fonctions, y compris par exemple celle d'un média de radiodiffusion

publique, mais le gouvernement n' a aucun effort en place pour le développer afin de lui

permettre de s'acquitter de ces fonctions, comme cela a été fait pour les langues

autochtones majeures et, dans une certaine mesure, aussi pour les langues autochtones

86

mineures. Le gouvernement est le premier obstacle qui empêche la créolisation du pidgin

au Nigeria.

2. Idéologie : Tant de gens ont une très mauvaise idéologie envers le pidgin. Ils croient que

c'est une langue vernaculaire utilisée par ceux qui ne sont pas éduqués. De nombreux

parents empêchent leurs enfants de communiquer en pidgin parce qu'ils pensent que cela

les empêchera de trouver un bon travail à l'avenir. Certains pensent que cela affectera

leurs résultats scolaires. Par exemple, Agheyisi (1971 : 30) indique que les utilisateurs de

pidgin sont ceux qui n’ont que peu ou pas d’éducation formelle. En d'autres termes,

l'affirmation selon laquelle le pidgin est le code du non-alphabète ne semble pas avoir de

validité, car il y a beaucoup de locuteurs éduqués au Nigeria, ils maîtrisent parfaitement

l'anglais standard et le pidgin (Akande 2008).

3. Politiques : Politiquement, le pidgin est marginalisé. Bien que l'anglais et les autres

langues principales soient reconnus dans notre constitution, le pidgin ne l'est pas du tout.

Deux raisons principales peuvent être avancées pour cela. Le premier est le fait que la

plupart des Nigérians, y compris les élites, considèrent le pidgin comme une simple

langue de contact dont on ne peut pas dire qu’elle appartient à une région particulière,

contrairement aux trois langues principales qui ont une base régionale ou ethnique. En

tant que tel, ce n'est la langue d'aucun groupe ethnique. Deuxièmement, bien que le

yorouba, l’haoussa, l’igbo, le français et l’anglais soient étudiés en tant que discipline

dans les établissements secondaires et les établissements supérieurs du Nigéria, il n’existe

à notre connaissance aucune école secondaire où le pidgin est enseigné en tant que sujet.

De même, il n’existe pas de département du pidgin dans une institution supérieure au

Nigéria bien que certaines dissertations aient examiné l’un ou l’autre des aspects du

87

pidgin. Cela implique également que le pidgin est marginalisé dans le programme

scolaire du Nigéria. La non introduction du pidgin dans le programme est politique.

L’existence d’un tel département, où le pidgin est une discipline, signifierait que le

gouvernement ainsi que les universités nigérianes devront le financer.

4. Au niveau social : D'une manière générale, les attitudes linguistiques peuvent être

étudiées à partir de deux cadres théoriques : l'approche comportementaliste qui se

concentre sur les réponses apportées par les locuteurs d'une langue aux fonctions sociales

de la langue (Fasold, 1984) et l'approche mentaliste qui considère les attitudes comme

des états internes utilisés pour prédire un autre comportement (Ihemere, 2006). Bien

qu'en théorie, aucune langue ne soit linguistiquement mineure ou majeure, légitime ou

bâtarde, les gens ont tendance à percevoir le pidgin comme une langue corrompue,

bâtarde ou moins (Igboanusi, 2008 ; Mann, 1996). Comme l'ont souligné Elugbe et

Omamor (1991 : 146), l'attitude à l'égard du pidgin n'est déterminée par aucun critère

objectif. Bien que le pidgin soit utilisé par plus des deux tiers de la population totale du

Nigéria aujourd’hui (Faraclas 2004 ; Igboanusi, 2008) et malgré son utilisation par des

personnes de différents horizons, notamment des diplômés et des professionnels (Akande,

2008), les attitudes générales de la majorité des Nigérians envers le pidgin ne sont

toujours pas encourageantes. Deuber (2005 : 183) note également que le pidgin est la

langue la plus négligée au Nigéria, car aucun rôle majeur ne lui est attribué. Elugbe et

Omamor (1991) et Egbokhare (2003) suggèrent de donner au pidgin le statut de langue

officielle ou nationale, tandis qu'Igboanusi (2008) plaide pour son utilisation en tant que

moyen d'enseignement dès le début de l'enseignement primaire, en particulier pour les

enfants qui peuvent l'utiliser. Pour relever le statut du pidgin au Nigeria, le gouvernement

88

doit le considérer comme une langue unificatrice. La sensibilisation est nécessaire pour

changer les mentalités des gens vers la langue.

5. Economique : L’un des arguments majeurs en faveur de l’adoption du pidgin en tant que

langue nationale est qu’il est un code neutre car il n'a pas de base ethnique. Igboanusi

(2008 : 69) examine les moyens de responsabiliser le pidgin au Nigéria et souligne que

l'éducation est l'institution la plus importante pour augmenter la valeur du pidgin.

Cependant, l’étude d’Igboanusi (2008) montre qu’il n’y a pas de consensus parmi ses

sujets sur l’octroi d’un statut officiel ou national au pidgin, certains d’entre eux estimant,

entre autres, que celui-ci n’a aucune valeur économique. Si les gens ne voient pas les

effets économiques d'une langue, cela affectera sûrement les progrès de cette langue. Le

pidgin ne peut pas être utilisé pour effectuer des transactions commerciales entre de

nombreux pays du monde. De ce fait, il sera difficile de devenir un créole.

6. Manque de recherche adéquate : Un des plus grands défis du pidgin nigérian pour le reste

du XXIe siècle consiste à stimuler et à renforcer les activités de recherche dans ce

domaine. La recherche est une étude attentive d'un sujet, notamment pour découvrir de

nouveaux faits ou de nouvelles informations à son sujet. La puissance, la vitalité et le

dynamisme d’une langue peuvent être liés à l’ampleur de l’intérêt de recherche montré et

mené à ce sujet. Plusieurs langues du monde bénéficient de nombreuses activités de

recherche qui les ouvrent à une analyse empirique au niveau de la phonétique, de la

phonologie, de la morphologie, de la syntaxe, de la sémantique et à l’application de ces

connaissances à la résolution de problèmes de société etc. Un aperçu rapide des activités

de recherche menées sur le pidgin au Nigéria entre 1980 et 2010 est inquiétant. Au niveau

informel, un travail appréciable a été accompli, notamment vers la fin du 20e siècle et la

89

première décennie du 20e siècle. C'est à ce moment que certains chercheurs ont eu un

impact sur la recherche sur le pidgin au niveau informel. Par niveau formel, nous

désignons ici les recherches effectuées dans les limites d’un établissement

d’enseignement supérieur strictement placé sous surveillance pour l’attribution de

diplômes, de diplômes et de certificats. L'informel fait référence aux recherches

effectuées à l'extérieur ou à l'intérieur des cadres formels mais ne qualifiant pas pour un

grade, un diplôme ou un certificat. Il peut s'agir d'articles de revues, d'ouvrages ou de

chapitres d'ouvrages, notamment Mafeni (1972) ; Ifode (1984) ; Faraclas (1983, 1996) ;

Elugbe et Omamor (1991, 1995) ; Munzali (1995) ; Okon (1997)., 2003) ; Egbohkare

(2001) ; Essien (2003) ; Igboanusi et Peter (2005) etc. Ce sont les travaux de ces

spécialistes qui nous ont permis d’avoir un aperçu de l’origine, du développement et de la

répartition géographique du pidgin nigérian, mais aussi, dans une moindre mesure, de la

structure. Même à ce niveau, on peut toujours dire qu'il y a peu de recherche, compte tenu

de l'ampleur des recherches effectuées en conséquence sur les autres langues en

compétition pour la pertinence dans le pays.

À la lumière de ce qui précède, plusieurs défis, règles et oppositions doivent être surmontés pour que la réalisation de la créole en ce XXIe siècle devienne une réalité plutôt qu'une fantaisie.

3.5 LES PROPRIETES D'UNE LANGUE STANDARD

Les propriétés d'une langue standard sont dites "stabilité flexible" et "intellectualisation".

Paul Garvin (1964) a clarifié ces concepts : La stabilité flexible fait référence à la nécessité de stabiliser une langue standard par une codification appropriée et de la rendre suffisamment flexible "pour permettre une modification adaptée au changement de culture.

L’intellectualisation fait ici référence à la nécessité d’augmenter la précision sur une échelle

90

croissante de dialectes fonctionnels, de la conversation au scientifique. En outre, selon Garvin, une langue standard doit remplir trois fonctions : la fonction unificatrice, la fonction prestige et la fonction cadre de référence (Garvin 1964 : 522). Par sa fonction unificatrice, une langue standard relie plusieurs régions de dialecte en une seule communauté linguistique standard qui peut être identifiée comme une entité distincte des autres langues voisines. La fonction de prestige confère à une langue standard une supériorité sur les variétés locales non standard et sa possession confère un prestige social à ses locuteurs par rapport à ceux qui ne la possèdent pas.

En tant que cadre de référence, la langue standard est l'outil permettant de juger des degrés de pertinence (exactitude) dans un contexte social.

3.6 LA SURVIE ET L'AVENIR DU PIDGIN DANS LA SOCIÉTÉ

NIGÉRIANE

Beaucoup ont applaudi la croissance et le développement du pidgin nigérian au fil des ans. Selon Esogbue dans Osuagwu (2010 : 3), la langue (pidgin nigérian) se développe et l'idée autrefois selon laquelle la langue est une langue d'analphabètes se termine rapidement et est progressivement remplacée en tant que langue unique du nigérian quand même le football de l'équipe nationale du pays utilise la langue comme moyen de communication sur le terrain. Pour attester davantage de cette croissance, il est fait référence aux recherches approfondies qui ont

été menées sur le pidgin nigérian, en particulier au cours de la dernière décennie du 20ème siècle et de la première décennie du 21ème siècle. En appréciant ces efforts de recherche sur le pidgin nigérian, Bassey (2008 : 25) précise que « tous ces efforts de recherche menés sur le pidgin montrent que le pidgin connaît une croissance rapide, à l'instar de toute langue à part entière ».

Les enthousiasmes, les attentes, l’intérêt de la recherche sur le pidgin à cette époque étaient tels qu’il était appelé à devenir la langue nationale, résolvant ainsi la question des langues nationales,

91

qui perdurait. Selon Agbeyisi 1983 à Okon (2010), l'utilisation du pidgin nigérian est devenue un phénomène plus répandu. De plus, les deux dernières décennies peuvent être considérées comme la période d’émancipation d’une langue au Nigéria. Le pidgin est considéré comme une langue potentielle pour la communication dans les communautés typiquement multilingues, mal intégrées et en urbanisation. Les antécédents multilingues du Nigéria constituent un véritable terrain d’émergence du pidgin nigérian en tant que formidable langue nationale. Selon les estimations, le Nigéria compte 400 à 500 langues, Gital (1998). Depuis l’indépendance, la langue anglaise, soutenue par la domination coloniale britannique, avait acquis une force numérique non seulement en tant que langue seconde, mais également en tant que langue officielle. Il confère actuellement à ses locuteurs un nombre important et impressionnant d'utilisations qui traduisent une langue standard, ainsi que le prestige, la confiance en soi et le pouvoir, Essien (2003). Sur le nombre de langues autochtones indiqué ci-dessus, trois ; L’hausa, l'igbo et le yoruba sont les principales langues (Brann, 1993). Il a fallu près de deux décennies d’écriture, de beaucoup de discussions, d’expérimentation, de mobilisation des gens, d’influence sur les décisions et les actions en matière de politique linguistique, de planification et de gestion, Jun Aid (2008) avant que les trois langues principales ne deviennent des langues nationales. On peut faire valoir que s'il a fallu tant de personnes, de temps et d'efforts concertés pour que les trois langues principales atteignent leur statut actuel, le pidgin nigérian pour lequel aucun effort concerté n'a été consenti pour élever son statut, ni aucune voix déterminée travaillant sur son nom a tendance à avoir une faible chance de survie. Une reconnaissance et un statut encore plus importants sont encore recherchés pour les langues nigérianes dans une nouvelle politique linguistique nationale proposée. Le gouvernement a tendance à privilégier cette approche avec des défenseurs engagés de ces langues au sein du groupe de formulation des politiques, qui constituent tous des obstacles

92

contre le pidgin nigérian. Le pidgin connaît une croissance rapide au Nigéria et au-delà. La BBC utilise maintenant le pidgin comme l’une des langues utilisées pour transmettre l’information. En dépit de cette croissance évidente, le gouvernement ne voit toujours pas la nécessité de faire du pidgin une langue nationale. La langue doit avoir une utilité, pas seulement pour le spectacle.

Nous avons besoin d’une langue nationale de sorte qu’au moins 90% de nos citoyens comprennent les points de vue de chacun et puissent facilement collaborer les uns avec les autres s’ils le souhaitent. Si nous ne pouvons même pas nous comprendre, pouvons-nous fonctionner comme une véritable démocratie ? Dans une vraie démocratie, les citoyens partagent leurs points de vue et tentent par consensus de développer une vision commune bénéfique pour tous. Le pidgin nigérian a favorisé la propagation des idées nationales, des développements socioculturels, linguistiques et politiques ainsi que la paix et l’unité dans le pays car c’est la seule langue à laquelle les personnes éduquées et non éduquées peuvent s’identifier. Le pidgin nigérian reste l’une des langues le plus dynamique dans la société en dépit de sa reconnaissance officieuse.

Il y a beaucoup de choses que nous avons à gagner si une attention appropriée est accordée au pidgin au Nigeria. Nous allons considérer certains avantages du pidgin qui peuvent faciliter le développement du pays.

1. Avantages économiques : Au niveau économique, faire du pidgin une langue nationale

nous aidera économiquement, il y a beaucoup de gens qui ont un grand potentiel mais ne

peuvent pas l'injecter dans la société à cause de la barrière de la langue. Si le

gouvernement peut reconnaître le pidgin comme une langue nationale, il favorisera non

seulement l'unité mais aussi l'économie du pays, cela réduira le taux de chômage parce

que beaucoup de gens vont devenir des membres importants de la société. Aussi, les

93

coûts de transaction sont moins élevés chez les personnes qui partagent une langue

commune.

2. Avantages politiques : Au niveau politique, le pidgin joue un rôle important, c'est l’une

des langues utilisées par les politiciens lors de la campagne politique pour convaincre les

masses. Si le pidgin est considéré comme une langue nationale, beaucoup de gens

participeront à la politique. En outre, cela aidera le gouvernement à connaître l'opinion

des personnes qui ne parlent pas l'anglais standard.

3. Avantages sociaux : La langue est par excellence un phénomène de société. La langue ne

peut apparaître que s'il y a des groupes sociaux. En raison du nombre de personnes qui

parlent le pidgin au Nigéria, cela favorisera la solidarité. Quand un groupe de personnes

parle la même langue, il se sent instantanément de la solidarité entre eux. Le pidgin peut

être un facteur déterminant dans une société où nous avons plus de 450 langues. Les gens

s'expriment mieux quand ils parlent le pidgin, c'est la langue que les musiciens, les

humoristes, les politiciens, les hommes et les femmes du marché utilisent dans la société

pour gagner leur vie. Toutefois, l'avenir du pidgin au Nigéria est très prometteur, car le

taux d’utilisation quotidienne de cette langue par les gens est énorme.

94

CONCLUSION

Cette recherche nous a permis d’examiner le Pidgin Nigérian, son état actuel, son avenir et l'éventualité d'une reconnaissance officielle. Après avoir vu tant d'avantages que nous aurons à gagner si le Pidgin Nigérian obtient un statut officiel compte tenu de sa popularité, et son impact dans la société, nous exhortons le gouvernement à considérer d'urgence étant donné l'attention qu'il convient au pidgin. Nous avons vu les définitions du pidgin par différents auteurs et les différents types de pidgins. Viveka définit le pidgin comme une langue qui apparaît lorsque des groupes de personnes sont en contact étroit et répété, et ont besoin de communiquer les uns avec les autres mais n'ont pas de langue en commun, (Viveka, 2015). Selon Jourdan, un pidgin est une langue secondaire dans une communauté de parole, (Jourdan 1991 : 196), c'est-à-dire qu'un pidgin n'est généralement pas la langue maternelle de ses locuteurs, bien qu'il existe des situations dans lesquelles les langues pidgin acquièrent des locuteurs natifs, notamment en milieu urbain. Un pidgin est une langue structurée qui émerge de la nécessité d'un pont de communication entre des locuteurs de langues mutuellement inintelligibles. Il est généralement appris en tant que langue seconde et est généralement utilisé dans des situations spécifiques ou en tant que lingua franca dans les communautés. Un pidgin est un système de communication normatif à acquérir, mais qui n'est pas encore la langue maternelle, (Bakker 2008 : 131). Nous avons vu différents types de pidgins et parmi ces types de pidgin, les pidgins commerciaux et nautiques, les pidgins étendus, les pidgins militaires et les pidgins urbains sont utilisé au Nigeria.

Nous avons examiné les définitions du créole dans cette recherche. Un créole est une langue naturelle parlée en tant que langue maternelle par toute une communauté née de situations

95

de contact intense. Les créoles sont des langues à part entière égales à toutes les autres langues naturelles du monde et sont capables de répondre à tous les besoins linguistiques de la communauté de la parole concernée. Todd, (1974) définit également un créole de la façon suivante : « un créole se présente lorsqu'un pidgin devient la langue maternelle d'une communauté de parole ». Il est plus simple de définir un créole comme tout pidgin qui devient stable et que les enfants apprennent en tant que langue maternelle. Nous nous sommes également penché sur les types de créoles, parmi ces types de créoles, les créoles exogènes et les créoles endogènes seront important si le Pidgin Nigérian devient en créole. La recherche nous a permis d'examiner la différence entre le pidgin et le créole ; le pidgin n'a pas de locuteurs natifs mais le créole a de locuteurs natifs, le pidgin n'a pas le statut officiel mais le créole a le statut officiel

(pas dans tous les cas).

En outre, nous nous sommes penché́ sur les similitudes entre le pidgin et le créole. Les deux langues apparaissent naturellement dans une situation de contact en raison du manque de langue commune à partager entre groupes de personnes. Elles servent de lingua franca (langue de communication plus large). Selon (Wardhaugh, 2006), le pidgin et le créole résultent d’un besoin fondamental que les personnes qui parlent différentes langues doivent trouver un système de communication commun. Nous avons vu les particularités et les dimensions d’un créole, les processus de créolisation et les contraintes de créolisation. Quand on parle de particularités et les dimensions d'un créole, il s'agit ici d'éléments permettant de reconnaître ou d'identifier un créole.

Les processus de créolisation s’agissent de comment se forme un créole, c'est-à-dire les approches qu'il faut suivre avant de former un créole. Cette recherche nous a ouvert les yeux sur différentes approches de créolisation ; l'approche de Bickerton, l'approche de basilectalisation

96

progressive, l’approche constructive et l'approche dominante. Certes, ces approches sont nécessaires pour former un créole.

Notre étude sur les contraintes de créolisation a révélé́ énormément de choses qui peuvent empêcher le pidgin nigérian de devenir un créole. Un des problèmes du pidgin c'est que de nombreux parents ont du mal à enseigner à leurs enfants. Ils grondent même les enfants chaque fois qu'ils les entendent parler pidgin parce qu'ils croient que ce n'est pas approprié, alors que la langue standard est la clé du succès dans les domaines de l'éducation et de l'emploi. Nous nous sommes penché́ sur l'importance du choix d'une langue nationale et l'implication du choix d’une langue nationale.

Nous avons examiné les variétés du pidgin parlé au Nigeria. Pendant notre recherche, nous avons constaté qu'il y a différentes variétés du pidgin au Nigeria, la variété Warri est la plus polyvalente et la plus créative de toutes les variétés de pidgin nigérian (Marchese & Schnukal,

1982 ; Mensah, 2011). Le pidgin écrit et le pidgin oral étaient bien traités dans cette recherche.

Nous avons examiné les avantages socioéconomiques reliés à la créolisation du pidgin nigérian.

Là où il n'y a pas de langue, il n'y a pas de développement. Le développement est facilité par la convergence des objectifs et par le partage de la même vision par la langue et la communication.

Pendant la recherche, nous avons constaté que la langue est indispensable au développement et à l’unité.

Le Pidgin Nigérian présente d'énormes avantages, les musiciens, les comédiens, les stations de radio et de télévision, les producteurs de films, les footballeurs, les hommes et les femmes du marché gagnent énormément d'argent avec l'utilisation du Pidgin Nigérian. Pendant les campagnes électorales, les politiciens utilisent le pidgin pour pouvoir convaincre les citoyens.

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Le pidgin nigérian joue un rôle important dans la société, mais il est dommage qu'il n'ait pas encore obtenu de reconnaissance officielle.

Nous proposons au gouvernement de promouvoir l'utilisation accrue du pidgin nigérian de plusieurs manières. Tout d’abord, son utilisation actuelle à la radio et à la télévision pour les campagnes nationales de sensibilisation et les grandes campagnes en faveur de la discipline, de l’éthique du travail, de la santé, de la planification familiale, de la sensibilisation à la politique, etc. élargi pour inclure une émission de nouvelles nationale. Deuxièmement, son utilisation devrait être permise dans un certain nombre de forums importants pour les affaires officielles, notamment la future Assemblée nationale. Troisièmement, les institutions qui possèdent une expertise de recherche en langues et en linguistique devraient bénéficier d’un soutien financier supplémentaire, en particulier pour les études conçues pour promouvoir l’intégration nationale.

Enfin, le gouvernement devrait promouvoir un décret faisant du pidgin nigérian une langue officielle, contribuant ainsi à éliminer de nombreux préjugés contre lesquels il doit maintenant lutter.

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