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Sommaire | juin 2015 Éditorial 5 | Réformer l’islam › Valérie Toranian Événement 8 | Éric Zemmour. « J’aime la France de 1660 à 1815 » › Valérie Toranian et Marin de Viry 24 | Éric Zemmour est-il un intellectuel ? › Franz-Olivier Giesbert Dossier | L’islam face au Coran. La réforme est-elle possible ? 32 | Histoire de la réforme en islam › Malek Chebel 45 | La révolution de la raison › Ghaleb Bencheikh 53 | « Il faut se débarasser du wahhabisme » › Alaa El Aswany et Valérie Toranian 63 | La réforme religieuse n’est pas un long fleuve tranquille › Robert Redeker 70 | Plutôt que réformer l’islam, réformons l’école › Leïla Slimani 76 | L’islam et l’école › Jean-Paul Brighelli 85 | L’imamat en France : magistère religieux et formation › Bernard Godard 94 | Chair et charia › Shereen El Feki 99 | Pour aller plus loin › Aurélie Julia Études, reportages, réflexions 102 | Vers la paix au Moyen-Orient : l’accord nucléaire avec l’Iran › Renaud Girard 106 | Les lieux de l’historien › Philippe Raynaud 2 JUIN 2015 118 | Pourquoi calculer la valeur de la vie humaine ? › Annick Steta 126 | Journal › Richard Millet 130 | Choses entendues › Arthur Dreyfus Critiques 138 | Livres – Malraux derrière la caméra › Michel Ciment 142 | Livres – L’accouplement selon Jean-Didier Vincent › Laura Bossi Régnier 145 | Livres – Les enquêtes de Roger Chartier › Michel Delon 148 | Livres – Vers un abêtissement irrémédiable › Robert Kopp 151 | Livres – Morand entre Chardonne et Nimier › Stéphane Guégan 155 | Livres – Alain Gouttman, le désastre de Sedan › Robert Kopp 157 | Livres – Raymond Barre : le remède français ? › Henri de Montety 160 | Expositions – L’invention de l’intime › Bertrand Raison 164 | Disques – Pierre Boulez, 90 ans, 135 CD › Jean-Luc Macia Notes de lecture 168 | Patrick Leigh Fermor | Jean Lopez | Zakhar Prilepine | François Angelier | René Crevel | Anjelica Huston | Azorín | Revue Temps noir JUIN 2015 3 Éditorial Réformer l’islam n a beau ne pas partager les convictions d’Éric Zemmour (cette étrange obsession pour la soumission des femmes !), la place qu’a prise le plus dérangeant des essayistes français dans O le débat public (notamment avec le Suicide français (1), 500 000 exemplaires vendus à ce jour) prouve qu’il appuie là où ça fait mal. Le pessimiste, disait Oscar Wilde, est celui qui entre deux maux choisit toujours les deux. Éric Zemmour choisit tout : déclinisme, nostalgie, fascination pour Bonaparte et Robespierre, regrets éternels pour la France de De Gaulle et du Parti communiste, chacun campé dans ses certitudes, la frontière bien tracée et les vaches bien gardées. Mais comment devient-on Éric Zemmour ? Quel est le parcours littéraire de ce prophète de l’Apocalypse ? Quand et comment lui est venue sa révélation mélancolique ? Quels sont les auteurs, les siècles et les textes fondateurs qui l’ont modelé ? La réponse dans ce numéro de la Revue des Deux Mondes. Depuis al-Qaida, Daesh et les attaques terroristes, le monde musulman est confronté à l’interprétation de son texte sacré. Une réforme est-elle possible ? Le philosophe Malek Chebel nous invite à revisiter l’histoire de l’islam. Le défi, nous explique-t-il, est le suivant : « Comment unifier les rangs des musulmans sans devoir choisir entre le repli identitaire ou la guerre sainte comme seuls concepts ? » Autre impasse soulignée par Alaa El Aswany, le célèbre JUIN 2015 5 auteur égyptien de l’Immeuble Yacoubian (2), ce pas de deux infernal entre dictature ou islamisme, « les deux faces d’un malheur historique », rendu possible par le wahhabisme. Pour le théologien Ghaleb Bencheikh, « il faut renouer avec l’humanisme d’expression arabe et le conjuguer avec toutes les conceptions philosophiques éclairées du pro- grès ». Robert Redeker s’interroge sur l’exemple préalable du christianisme : les deux types de réforme religieuse expé- rimentés en Europe (la réforme protestante fondée sur le « retour à la lettre » et la réforme catholique s’appuyant sur l’administration d’un clergé) sont deux modèles inopérants pour l’islam : revenir au texte littéral, c’est exactement le projet islamiste, et réformer par le clergé n’est pas possible car le sunnisme ne s’appuie pas sur une telle organisation. La réforme ne sera pas un long fleuve tranquille. Et d’ailleurs la réforme de l’islam est-elle la bonne question ? « Imaginons qu’au lieu de réformer l’islam on réforme l’école, propose l’écrivain Leïla Slimani. Et qu’à Alger, à Casablanca, à Tunis ou au Caire, tous les enfants aient droit à l’éducation. Qu’on leur inculque l’art de la dissertation, de la thèse et de l’antithèse… Toute réforme de l’islam est vouée à l’échec s’il n’y a pas des musulmans éclairés pour l’incarner et la faire vivre. » L’exemple de la Tunisie, où la démocratie est à l’œuvre et résiste courageusement au djihadisme, nous autorise à conclure positivement. Dans cette société et dans bien d’autres, les musulmans ont envie de réforme. Sociale, poli- tique et religieuse. Valérie Toranian 1. Éric Zemmour, le Suicide français, Albin Michel, 2014. 2. Alaa El Aswany, l’Immeuble Yacoubian, Actes sud, 2006. 6 JUIN 2015 ÉVÉNEMENT 8 | Éric Zemmour. « J’aime la France de 1660 à 1815 » › Valérie Toranian et Marin de Viry 24 | Éric Zemmour est-il un intellectuel ? › Franz-Olivier Giesbert « J’AIME LA FRANCE DE 1660 À 1815 » › Entretien avec Éric Zemmour réalisé par Valérie Toranian et Marin de Viry Comment devient-on Éric Zemmour ? Quels sont les écrivains, les historiens qui ont influencé la pensée du plus controversé des polémistes français ? Qui sont les maîtres de l’auteur du Suicide français ? Retour aux origines. Revue des Deux Mondes – Quelle est la première lecture qui vous a marqué lorsque vous étiez enfant ? Éric Zemmour Alexandre Dumas, plus exactement deux «de ses romans : les Trois Mousquetaires et Vingt ans après. Le second m’a plus frappé que le premier, je l’ai relu à 40 ans et il est bien meilleur. Revue des Deux Mondes – Parce que Milady réapparaît… Éric Zemmour Oui, Milady… C’est à travers elle que j’ai compris la figure de la femme. Chez Alexandre Dumas, il y a toujours Milady et Constance, mais – et c’est là où c’est génial – il n’y a pas de mani- chéisme. Milady n’est pas purement méchante. D’Artagnan est du côté de Constance et de Milady à la fois : ça, c’est français ! 8 JUIN 2015 événement Revue des Deux Mondes – C’est français ou masculin ? Éric Zemmour C’est masculin et français. Mais les Français ne s’in- terdisent pas d’être masculins, nous l’assumons, et nous l’assumons dans l’histoire de France. Ça me frappe tout de suite, cette masculinité fran- çaise. Ma deuxième lecture, vers 11 ans – un cadeau de ma mère –, c’est Bonaparte, Napoléon et l’Aiglon, la trilogie d’André Castelot. Mon entrée en littérature se fait par Alexandre Dumas et Napoléon. À 14 ans, c’est Balzac avec Illusions perdues. C’est simplissime. Je suis un garçon simple. Revue des Deux Mondes – Qu’est-ce qui vous a particulièrement mar- qué dans Illusions perdues ? Le personnage de Lucien de Rubempré ? Éric Zemmour C’est Rubempré, c’est la scène où il lit son article, qui lui permet d’entrer dans le monde des actrices, et même dans le monde en général ! J’ai relu cet article et je me suis aperçu que le style était extraordinaire, et que je passais ma vie à le copier. Revue des Deux Mondes – Il y a deux « figures » du journaliste chez Balzac : Lucien de Rubempré et Étienne Lousteau. Lousteau, c’est le petit malin, le petit cynique et… Éric Zemmour Jeune, je veux être Lucien Rubempré et Daniel d’Arthez, pas Lousteau ! D’Arthez est celui qui pense, Rubempré est celui qui écrit, et j’ai envie de faire les deux. À 14 ans, je suis fasciné par Rubempré, qui représente le succès, et par d’Arthez, parce qu’il incarne l’œuvre. Être les deux, c’est suivre Éric Zemmour est essayiste et cette phrase de Victor Hugo, que je ne journaliste. Il a notamment publié : le Premier Sexe (Denoël, 2006), connaissais pas encore à l’époque, où il dit Mélancolie française (Fayard, 2010) que la littérature est comme le journalisme, et le Suicide français (Albin Michel, qu’elle ne peut être que politique « car on 2014). ne fait pas de révolutions avec du mauvais style. C’est parce qu’ils sont de grands écrivains que Juvénal assainit Rome et que Dante féconde Florence ». C’est exactement ça. JUIN 2015 9 événement Revue des Deux Mondes – Dans votre famille, est-ce qu’on lisait ? Y avait-il une culture littéraire ? Éric Zemmour C’est très paradoxal. Il n’y a pas de culture autour du livre et quasiment pas de livres. Mon père lit beaucoup les San Antonio, des choses comme ça. Et en même temps, il y a un amour fou pour la littérature française, pour la France à travers la littérature française plus précisément. Revue des Deux Mondes – On croirait du Romain Gary. Un surmoi familial littéraire et français… Éric Zemmour Exactement. La mère de Gary, c’est la mienne. Et ma mère, c’est l’injonction paradoxale : reste avec moi, deviens un homme. C’est toujours l’ambiguïté des éducations traditionnelles, ambiguïté qui pour moi est formatrice. Revue des Deux Mondes – Comment se situe votre famille sur l’échi- quier politique ? Plutôt à droite, plutôt à gauche ? Éric Zemmour Elle est gaulliste. Ce qui est plutôt paradoxal… Revue des Deux Mondes – Surtout chez un pied-noir ! Éric Zemmour Mais seul mon père était gaulliste, les autres ne l’étaient pas. Revue des Deux Mondes – Mais pourquoi l’était-il ? Éric Zemmour La France.