CHRONIQUE DE PULVERSHEIM

Imprimerie - Editions ALSATIA 68500 - 1977 A la Mémoire de mon cher fils MARCEL 1922 - 1967

et

En hommage aux habitants de Pulversheim et à leurs Maires Camille Hueber et Georges Bourgeois

Préface

Dans de nombreux villages d'Alsace, vieilles fortifications, maisons à façades sculptées ou à colombages décoratifs, monuments d'hommes cé- lèbres et fontaines publiques témoignent d'un passé riche en événements et haut en couleur. D'autres villages cachent pudiquement leurs épreuves et leur pauvreté sous l'aspect de masures miséreuses. Serait-ce une raison pour que tant de générations qui y vivaient soient sacrifiées à l'oubli ? On vient de me présenter le manuscrit traitant l'histoire d'un de ces villages : Pulversheim, au surplus une ancienne seigneurie, au passé peu ou mal connu non seulement du grand public, mais aussi de nombreux ha- bitants, guère cité dans nos annales. L'histoire de ce village, qui a subi un sort identique à tant d'autres, présente des particularités propres, pleines d'intérêt. C'est donc pour moi une véritable joie et un grand honneur de pré- facer cette remarquable monographie. Son auteur, Ewald Hirsinger, originaire de Sengern, exerçait du- rant 40 ans comme Directeur d'école et Secrétaire de Mairie à Pulversheim. Après sa mise à la retraite, il retourne dans sa vallée d'origino, à Schweig- house, village natal de son épouse. Mais il demeure fidèlement attaché au village de ses activités passées. Durant ses heures de loisirs il se préoccu- pait d'ajouter à ses souvenirs et ses expériences personnelles les connais- sances rassemblées au cours de patientes recherches dans les archives et des ouvrages imprimés. Il voulait encore se rendre utile à ses concitoyens, à ses anciens élèves et à ses collègues en leur offrant une chronique de leur cité. N'est-il pas dans les attributions des enseignants de faire revivre à travers l'histoire locale les joies et les malheurs, les épreuves déprimantes et les sursauts de grandes espérances, le travail quotidien et les réussites collectives des anciennes générations pour créer chez les contemporains une volonté commune de maintenir et de développer dans une coexistence pacifique l'amour du terroir ? En cela M. Hirsinger a suivi l'exemple d'anciens précurseurs tels Thiébaut Walter, fils de , Eugène Wacker, originaire de Knoe- ringue, Victor Krust, d'Aspach-le-bas, tcus membres de l'Enseignement. Après avoir placé le village dans son contexte géographique, l'au- teur rappelle les vestiges laissés par les premières peuplades qui occu- paient les alentours à i'ére néolithique, les tumulus de l'époque celtique et les trouvailles, plus nombreuses, de la domination romaine. Plusieurs chapitres sont réservés à la « Seigneurie de Pulversheim », dont l'origine remonte aux Comtes d'Alsace. Les donations faites par eux au couvent de Saint-Etienne à Strasbourg et à l'abbaye de sont largement commentées. Il n'était pas facile pour l'auteur de démêler les différentes transmissions des terres seigneuriales et les contestations qui en résultaient. Pulversheim apparaît en qualité d'alleu des Comtes de Horburg ; il passe en 1324 aux Comtes de Wurtemberg, devient fief des Ribeaupierre à partir de 1406, sous-fief des Marquis de Rosen de 1725 à 1775 qui disposaient déjà du ban de Pulversheim par engagement depuis 1645. Le commentaire relatif à l'administration municipale a dû causer moins de difficultés à l'ancien Secrétaire de Mairie. Notons cependant que les événements locaux sont traités dans le Cadre de l'histoire générale propre aux différents régimes politiques issus des 3 guerres qui ont décidé du sort de l'Alsace. L'auteur attache une attention particulière à l'ancien village, aux conditions de vie de ses habitants, paysans et bûcherons, manquant de terres de culture et vivant pauvrement dans leurs modestes habitations. Ayant été de longues années en contact étroit avec cette population, Ewald Hirsingor assiste aussi au renouveau de ce village deshérité, à sa mutation en une cité urbaine, à l'afflux d'une population cosmopolite aux aspirations nouvelles : une période relativement courte, mais riche en réa- lisations de toute nature : culturelles, économiques, urbaines, sociales et sportives. Quoique do date récente on ne peut pas les ignorer ; contrastant singulièrement avec l'immobilisme séculaire de l'ancien village, ces inno- vations témoignent de l'évolution rapide du village tel qu'il apparaît aujourd'hui aux contemporains. Ceux-ci liront avec beaucoup d'intérêt le livre « Pulversheim, ce village que l'on aime ». C'est une monographie fort bien rédigée, où les événements sont concentrés en chapitres bien coordonnés, au surplus, écrits avec beaucoup de cœur. Un travail, qui mérite tous les éloges. En général, le lecteur se sent moins sensibilisé par la lecture d'un ouvrage sur l'histoire générale que par celle d'une monographie sur son propre village. Qu'il soit descendant d'anciennes générations ou résidant de date récente, il s'identifie au passé de son village en tant qu'héritier dos activités de ses ancêtres ou en tant que spectateur et artisan de l'évolu- tion de sa cité. Par leurs diversités, les biographies de nos villages, aussi différen- tCIS les unes des autres que la physionomie des hommes que nous cotoyons, constituent une contribution précieuse à l'histoire de notre province. En ce sens, et bien qu'elle ne traite le passé que: d'un village fort modeste, la chronique sur Pulversheim enrichit les Alsatiques d'uno nouvelle et belle publication, d'un livre qui mérite de trouver le meilleur accueil non seulement parmi la population de Pulversheim et des environs, mais aussi auprès des amis do l'Histoire de notre province.

PAUL STINTZI

Agrégé de l'Université A la recherche du Passé...

Pulversheim, jadis un petit hameau qui végétait à l'ombre de son châ- teau, était un alleu seigneurial qui a maintenu son intégrité au milieu des possessions habsbourgeoises jusquà la Révolution. Village modeste, au pas- sé presque inconnu, dont le nom est peu cité dans les ouvruges historiques. Une grande partie de son histoire s'inscrit dans les manuscrits et par- chemins des seigneurs. A la demande de Desportes, Préfet impérial du Haut-Rhin et propriétaire d'anciens domaines seigneuriaux à Pulversheim, ces documents ont été rassemblés en une seule collection. Celle-ci iut ven- due aux enchères à Paris vers 1850. Le danger était grand que ces précieux documents soient dispersés et perdus à tout jamais pour la collectivité. Ua Alsacien, Engel-Dollius, les conserva précieusement à Paris pendant l'anne- xion et les remit en 1920 aux archives départementales à où ils occupent un rayonnage de 2 m 60 de long. A défaut de coite volumineuse collection, seule et unique par sa com- position, il aurait été pratiquement impossible de reconstituer l'histoire du village sous l'ancien régime. Grâce à l'appui financier de la municipalité, des photocopies des plus importants documents ont pu être réalisées. Elles seront intégrées au « dépôt » du Secrétariat de la Mairie où elles pourraient marquer le début d'un fond d'archives concernant la période d'avant la Révolution. Complétées au cours des années, les photocopies de ces vieux manuscrits, — abstraction faite de leur valeur intrinsèque au point de vue historique — constitueraient un précieux enrichissement des Archives municipales facile à consulter par les amateurs d'histoire locale. Les sources bibliographiques sont moins nombreuses. Eparses dans lets ouvrages historiques, il fallait glaner par ci et par là, rassembler et coor- donner les trouvailles sous les divers chapitres de ce recueil. Jadis la commune comptait un nombre respectable de personnes, issues de vieilles souches, qui se rappelaient encore des récits que leur faisaient leurs grand-parents, dix, vingt fois, toujours avec la même fierté, la même passion. En les écoutant parler de leur passé, de celui de leurs aïeux, ils ont été gagnés par leurs émotions, leur attachement au sol. Cette génération a disparu et, avec edle, les derniers tenants de l'histoire locale.

La population actuelle se compose de quelques descendants de cette vieille souche et de familles, plus nombreuses, venues d'autres horizons, les uns et les autres connaissent peu ou prou de l'histoire de leur commune d'origine ou d'adoption. Tous ceux qui se sont penchés sur l'étude du passé d'un village avaient une ambition commune: éveiller à travers les connaissances de l'histoire une prise de conscience du patrimoine collectif, constitué par l'attache- ment au sol, l'amour du terroir, des coutumes et des traditions, par le senti- ment d'appartenance à une même collectivité aux aspirations communes, toutes ces sages vertus que possédaient à un si haut degré les anciennes générations. Il en est des villages comme des familles. Mieux les enfants connaissent leurs aïeux, leurs comportements et leurs antécédents, mieux l'osprit fami- lial s'épanouira et se consolidera. Plus le citoyen est au courant du passé de son village, plus il s'attachera au sol, à son entourage, à ses concitoyens. Inconsciemment peut-être, il attribue une âme à ce milieu familier dans lequel il a l'habitude de vivre. Et s'il devait revenir au pays après une lon- gue absence, il s'écrierait avec le poète :

Objets inanimés avez-vous donc une âme, Qui s'attache à notre âme et la force d'aimer.

Avant d'aborder le vrai sujet, je voudrais, fidèle à une vieille coutume, remercier toutes les personnes qui, à titre quelconque:, m'ont encouragé, conseillé et aidé, tant par leur soutien matériel que moral, à réaliser une chronique sur Pulversheim. Mes remerciements vont d'abord à Monsieur Bourgeois, Député-Maire, cet ami de longue date, à Messieurs les adjoints Xavier Groshaeny, Pierre Meyer et Auguste Miesch, ainsi qu'à Messieurs les conseillers municipaux qui, généreusement ont bien voulu prendre à la charge de la commune les frais des photocopies de pièces d'archives, de la multiplication du texte manuscrit et finalement souscrire à l'achat d'un important stock de livres. Je manquerais de courtoisie envers- Messieurs les conseillers, si je ne signalais pas la noble geste par lequel ils ont tenu à verser le montant de leur cagnotte au fonds de financement. Je dois un merci tout particulier 'à Monsieur le professeur Stintzi, qui a bien voulu m'initier aux recherches historques, vérifier et contrôler les ébauches.

Dans le même ordre d'idées, j'exprime ma gratitude à Monsieur Chris- tian Wilsdorf, Directeur des Archives départementales du Haut-Rhin, pour ses précieuses directives, de même qu'à Mademoiselle Lucie Roux pour la traduction de certains manuscrits.

Monsieur Gardner, ancien Directeur du journal « L'Alsace » de Gueb- willer, me fit bénéficier de ses vastes connaissances historiques. Je l'en remercie de tout cœur.

D'autres personnes ont effectivement collaboré à la réalisation de cet ouvrage. Jo citerai les employés du Secrétariat de Mairie : Monsieur Jean- Marie Schmidt et Madame Ursprung-Koehl, particulièrement Monsieur Fi- nance pour ses prises de vues et communications de statistiques, ainsi que Monsieur le Curé Nussbaum et Monsieur Louis Arnold, directeur retraité du C.E.S. à , pour la révision du texte, Monsieur André Bonnier, Directeur du C.E.S. à Seltz, anciennement ins- tituteur à Pulversheim, qui a contribué par ses dessins à rehausser la qua- lité de la présentation du livre, Mesdemoiselles Joëlle Husser et Claude Niemerich, pour la reproduc- tion du manuscrit. J'exprime à tous ces collaborateurs et collaboratrices mes sincères re- merciements ainsi qu'aux autres personnes qui m'ont fourni des renseigne- ments et dont le nom est cité en annexe de leurs communications.

Première partie

CONSIDERATIONS D'ORDRE PHYSIQUE

Chapitre 1 : Situation géographique

Chapitre 2 : Sol et sous-sol

Chapitre 3 : Régime des eaux

Chapitre 4 : Conditions climatologiques SITUATION GEOGRAPHIQUE

Pulversheim, ancienne seigneurie indépendante, devenue commune en 1792, est rattachée depuis 1790 d'abord au district de Colmar, puis au dé- partement du Haut-Rhin et au Canton d', 'et depuis 1870, à l'Ar- rondissement de Guebwiller. A leur physionomie caractéristique le passant peut facilement distin- guer deux quartiers fort dissemblables : Le village historique, de caractère agricole, aux maisons basses et vieillottes, parmi lesquelles s'intercalent quelques demeures plus récentes, groupées le long de la RN 430, autour de l'ancienne église paroissiale. Le village moderne, avec la cité des Mines Kali Sainte-Thérèse, ses coquettes maisons individuelles, ses lotissements, sa nouvelle église, sa mairie, son ensemble culturel et sportif, sa zone industrielle et commer- çante, massés de part et d'autre de la route d'Ensisheim. L'espace qui séparait les deux quartiers a disparu. Les maisons se sont rapprochées, les esprits ont fusionné. Il n'y a plus « les anciens » et « les nouveaux ». Le petit hameau est devenu un bourg de plus de 2.000 habi- tants, concentré autour d'un carrefour de deux routes à qrande circulation, la RN 430 de à Guebwiller, la CV 2bis, de Cernay à Colmar. Situa- tion avantageuse qui place le village à peu de distance des centres admi- nistratifs soit : à 31 km de Colmar, à 6 km d'Ensisheim, à 11 km 5 de Gueb- willer et à 11 km du complexe industriel de Mulhouse. Son altitude s'intègre dans celle de la plaine d'Alsace. La pente des terrains s'incline du Sud-Ouest vers le Nord-Est avec une légère élévation aux limites Est et Ouest, ce qui laisse apparaître une faible dépression vers l'axe médian facilement reconnaissable à la direction de l'écoulement des eaux.

Voici quelques cotes relevées du sol (1)

Ces altitudes sont sujettes à de profondes modifications à la suite d'af- faissements du sol provoqués par l'exploitation du gisement potassique. Déjà les prés au nord du cimetière sont submergés sur une vaste surface. Il est à prévoir que ces affaissements s'amplifieront en profondeur et en éten- due nécessitant des mesures de protection appropriée. En prévision, les M.D.P.A. ont déjà creusé des canaux d'évacuation pour draîner les eaux vers la Thur en aval.

Le perimètre du ban mesure 19 km 010. Pulversheim a frontière commune :

au sud-est avec Wittenheim sur 2 km 180 et sur 1 km 040 ; au nord-est avec Ensisheim sur 6 km 600 ; au nord avec sur 2 km 700 ; au nord-ouest avec Feldkirch sur 1 km 200 ; au sud avec sur 4 km 690 et avec Wittenheim sur 0 km 600.

CHAPITRE 2

SOL ET SOUS-SOL

Sol et sous-sol sont de par leur origine et leur composition de la même formation que la plaine d'Alsace. Celle-ci est une région d'effondrement entre la Forêt-Noire et les Vosges. Si l'on fait un forage au milieu de la plaine on trouve à 2.000 ou 3.000 m, selon le cas, les terrains granitiques ou anciens des Vosges. Par dessus ces derniers, s'empilent les terrains se- condaires marins qui ont recouvert toute la région, puis des dépôts salins et argileux de l'oligocène (2). Binder et Bourcrat, se basant sur des observations faites au début du siècle dans le golfe de Karabugas, sur la rive asiatique de la Mer Caspien- ne, nous donnent l'explication suivante sur l'origine du bassin potas- sique (2). A mesure que les terrains entre la Forêt-Noire et les Vosges s'affais, saient en-dessous du niveau de la mer, les eaux salines de la mer oligo- cène, qui couvrait la Belgique et le Nord de la , se déversaient dans cette faille par la trouée entre les Vosges du Nord et la Hardt, et la trans- formaient en lagune. Le niveau de cette mer subissait des mouvements ascendants et descendants, favorisant tantôt un approfondissement de la dépression entre les deux massifs, tantôt une élévation du barrage dans le canal. Ainsi se constitua un bassin d'eau salée qui, à certaines périodes fut séparé de la mer par un seuil probablement au nord de . L'eau de mer ainsi isolée subit une condensation rapide, favorisée par une pé- riode de forte chaleur que certains géologues évaluent à + 40° et même davantage. Les sels les plus solubles se cristallisèrent dans la zone la plus élevée et se déposèrent au fond à raison de 5 mm par an. Ces dépôts furent couverts par des apports terreux qui formèrent des gisements schisteux et bitumeux préservant les couches inférieures d'une nouvelle dissolution lors d'une seconde submersion par l'eau de mer. Dans le puits Rodolphe cette couche saline atteint 3,77 m répartie en trois niveaux di-- 1,60 m, + 1,60 + 0,57 m séparés par une marne dolomitique de 20 à 30 cm. Une nouvelle submersion eut lieu plus tard provoquant une nouvelle sédimentation de potasse à 19,50 m au-dessus de la première. Cette cou- che, dite supérieure, a une épaisseur de 1,33 m et contient de 28,6 à 30% de K20. Au-dessus de la couche de potasse, jusqu'à une profondeur de 303 m, on rencontre des cristaux de sel gemme, entremêlés de marne, de gypse et de rognons d'anhydride. Jusqu'à la fin de l'affaissement, les eaux comblè- rent la dépression avec des matériaux terreux : marne, argile, grès. La couche supérieure est constituée par des alluvions, moraines, galets et sables d'origine vosgienne, mêlés à de l'argile. Le cône de déjection du glacier de l'actuelle vallée de Thann s'est déversé à travers notre ban jusqu'en aval d'Ensisheim, portant le nom de Nonnenbruch. Il est bordé à l'est et à l'ouest par des basses terrasses vosgiennes (3). L'épaisseur de cette couche est très variable : 16,4 m près du cime- tière, 20 m en bordure de la CV 2bis, 34 m au puits Rodolphe, 37,2 m au puits Ensisheim III, 89 m au sud du carrefour (4). On peut voir sa stratifi- cation aux deux anciennes gravières, l'une au Huttenacker, l'autre à l'en- droit de la décharge publique. La teneur en argile est tellement forte que les matériaux ne se prêtent guère pour la construction. Cette sédimentation s'échelonnait durant les différentes périodes de' glaciation. Les anciens glaciers, couvrant tout le massif vosgien, s'éten- daient jusqu'aux débouchés des vallées, plus tard ne débutaient qu'à partir de 800 m pour ne couvrir finalement que les crêtes, mais qui avaient encore l'aspect des sommets alpestres. Les géologues estiment que les derniers glaciers ont disparu entre 8000 et 9000 ans avant notre ère. La sédimentation n'est pas uniforme dans sa composition. Au cours du déversement des matériaux pierreux, se sont accumulés des îlots de li- mons lœssiques, véritables éponges capables d'absorber l'eau jusqu'à 48% de leur volume. Lors du forage du puits Rodolphe II les ouvriers ren- contrèrent une couche de cette nature, ce qui obligea l'entreprise à prendre des mesures de sauvegarde (voir page 238). Quant à l'origine de la couche potassique, Quiévreux rejette la thèse de la formation à partir de dépôt marin. Il est d'avis qu'une mer peu pro- fonde couvrait au début de l'ère tertiaire — il y a de cela plus de 25 mil- lions d'années — la faille qui s'était produite entre les Vosges et la Forêt-Noire. Cette lagune avait une très forte salinité, comparable à celle de la Mer Morte (en tous cas dix fois supérieure à celle des Océans) où au- cun organisme ne peut vivre. Il justifie cette opinion par les nombreux échantillons de fossiles animaux (483) et végétaux (751) découverts dans l'argile entre les différentes couches potassiques.

Ces fossiles animaux sont constitués par des insectes ailés, de toute petite taille à vol mou, facilement entraînés par le vents qui les précipite dans la lagune. Grand nombre d'insectes se trouvent dans une position d'étalement, souvent aussi parfait que les spécimens d'une collection en- tomologique. Ils sont d'une conservation telle que la nervation des ailes, les poils du corps et des pattes, la structure des yeux, sont parfaitement visibles. Ces insectes se rencontrent dans la zone tempérée de l'Europe et dans les zones très chaudes du Gabon, de Madagascar et du Bengale. Ils vivent dans les marécages et les forêts.

Quant aux fossiles végétaux ils sont constitués par des graines et des feuilles où l'on peut observer dans les restes de tissus l'organisation cellu- laire. Les feuilles recueillies dans le gisement sont coriaces. Ce fait pa- raît correspondre à l'existence d'un climat chaud avec une saison sèche très marquée. On trouve des descendants de ces arbres au Chili, en Cali- fornie et au Japon, où la température moyenne est supérieure de 8 à 9° à celle d'Alsace. La présence d'organes végétaux indique donc l'existence de forêts et d'une flore. en bordure de lagunes. A l'exclusion de ces fos- siles, Quievreux n'a découvert dans la zône potassique aucune trace de fossile d'origine marine. Une analyse chimique des matériaux de cette couche ne révèle qu'une faible présence de magnésium, alors que l'eau de mer en contient une grande quantité.

S'appuyant sur ses constatations Quiévreux est d'ayis que la potasse n'est pas un dépôt marin. On peut donc admettre que la potasse a été charriée par des fleuves et des rivières ayant traversé d'énormes gise- ments de ce sol en déposant en cours de route, le magnésium par un phé- nomène connu sous la dénomination de dolomitisation.

Les cristaux de potasse se déposent au fond de la lagune à raison de 5 m/m par an et constituent finalement cet ensemble de couches que nous appelons couramment la zône potassique.

Celle-ci s'enfonce à mesure que la faille entre les Vosges et la Forêt- Noire s'approfondit au début de l'Oligocène et se couvre de dépôts ter- tiaires et quaternaires.

(Renseignements tirés de « Esquisse du monde vivant sur les rives de la lagune potassique » par F. Quiévreux, B.S.I.M., Mulhouse 1935.) La sédimentation ne s'étant pas opérée par couches uniformes, signa- lons à titre comparatif leur profondeur dans les puits situés à la périphé- rie du ban (4). CHAPITRE 3

REGIME DES EAUX

A 1.500 m du carrefour coule une rivière, la Thur. Elle recueille les eaux des versants de la vallée que l'ancien glacier s'est taillée dans le mas- sif vosgien. Nous parlerons dans un autre chapitre de l'asservissement de ses eaux aux besoins des hommes ainsi que la vengeance des éléments quand ils se déchaînaient. Pour le moment suivons ces eaux dans leur course. Une partie s'infiltre et se perd facilement dans le sol de gravier, d'au- tant plus vite que les hommes, soucieux de leurs intérêts les dirigent sur une surface plus vaste. Là, elles alimentent le toit de la nappe phréatique, c'est-à-dire, la surface de l'eau susceptible d'être atteinte par les puits, les pompes et les racines des plantes (5). Cette nappe subit les alternances saisonnières ; son niveau monte au moment des pluies, baisse pendant les périodes de sécheresse. Dans son mouvement descendant elle rencontre des courants souterrains qui se déplacent horizontalement, comme ceux de la surface, mais beaucoup plus lentement, avec une constance presque immuable, sans intervention humaine et qui peut atteindre 100 m par jour. Jadis cette nappe phréatique, à certaines époques de l'année, était à fleur du sol. Les puits à une profondeur de deux m.ne manquaient jamais d'eau. Les arbres provenant des pépinières s'adaptaient mal à ces terrains. Après une croissance rapide ils mouraient jeunes. On prétend que ces courants souterrains excercent une influence né- faste, d'ordre rhumatismal, sur l'organisme. Des habitants ont fait appel à des sourciers, parmi eux le plus renommé, le poète sundgovien Zumstein, pour déterminer l'emplacement le mieux approprié de leur maison. Par endroits, ces courants souterrains se heurtent à des couches argi- leuses imperméables. Alors l'eau remonte à la surface. On désigne ces apparitions d'eau en terrains plats comme résurgences. Telle est l'origine des sources qui alimentaient autrefois le Brunnenwassergraben, de la source du Rondelle, captée par M. Schlumberger, de la Hugyquelle, source du Hugy, qui a fait l'objet d'une décision préfectorale obligeant le sieur Hugelin à retablir le libre écoulement de son eau vers la Thur, en prati- quant une brêche dans la digue de ses voisins (6). Aujourd'hui, toutes ces sources sont taries. Les eaux de ruissellement et d'infiltration n'arrivent plus à gorger cette immense éponge de gravier et de sable, aux endroits où la stabilité du sol ne court pas le risque d'affaissement.

CHAPITRE 4

CONDITIONS CLIMATOLOGIQUES

Le climat de la région est du type continental qui se caractérise par des étés chauds et des hivers froids. La température moyenne annuelle est de + 5° avec des pointes de + 30° et de — 20°. Le fossé rhénan est une zone de vents avec deux directions dominantes et opposées : un vent continental froid venant du nord et du nord-est, et un vent plus doux soufflant par la trouée de Belfort et par-dessus les Vosges. Celui-ci est formé de masses d'air plus humides, d'origine atlantique. Ces vents s'engouffrent dans le corridor constitué par les deux bandes de forêts à l'est et à l'ouest du village et forment un courant d'air quasiment continu. Pulversheim fait partie de la région nord-est du Nonnenbruck, la plus sèche, recevant en moyenne 600 à 700 m/m de pluie par an. Elle bénéficie de l'écran protecteur des Vosges qui arrête les nuages venant de l'ouest et la mettent à l'abri de précipitations importantes et soutenues. La formation de brouillards, fréquents en automne et en hiver, est liée au phénomène des inversions de température dû à 'l'air froid stagnant à faible altitude et recouvert par de l'air plus doux à une altitude plus éle- vée. De 1956 à 1965 notre région a connu entre quarante et cinquante jours de brouillard par an. L'enneigement est très variable : entre 1952 et 1965 on comptait par an entre vingt-cinq et trente jours de chute de neige ; mais ce nombre est nettement intérieur les dix années suivantes (7).

NOTES ET REFERENCES

1 Carte d 'état major - Mulhouse 1-2. 2 Bincler et Bourcard - Die Kaliiverke im Ober-Elsass BSIM Mulhouse 1913. 3 Cette géologique et économique du Haut-Rhin. 4 Ma;/co!<'.sA:y - Contribution à l élude du bassin potassique ■< Clermont-Ferrand 1945. 5 Etude de la nappe phréatique de la plaine du Haut-Rhin par Gendrin-Millot Strasbourg 1957. 6 A.M.P. 0 III - Décision du 28.1.1868. 7 Communiqué par M. Jean Paul Weber professeur à , 26 rue Clemenr:eau. S.I.M. no 4 - 1976. Objets de fouilles, découverts par Max De Ring dans le Hubelwaeldele en 1859 Deuxième partie

DE LA PREHISTOIRE AU MOYEN-AGE

Chapitre 1 : Origine du nom

Chapitre 2 : Au berceau de nos lointains ancêtres

Chapitre 3 : Cinq siècles d'occupation romaine

Chapitre 4 : Alleu des Ducs d'Alsace

Chapitre 5 : Murbach et ses possessions CHAPITRE 1

ORIGINE DU NOM PULVERSHEIM

Le village n'est entré dans l'histoire qu'au 8ème siècle. Nommé pour la première fois dans une charte publique (768) sous son nom primitif Wolfrigesheim (1) ou Wolfriegeshaim (2) son orthographe a subi au cours des siècles, de nombreuses mutations. Citons au passage :

Welfricheshen 1004 (3) Welfersheim 1250 (4) Wulversheim 1285 (5) Wulfersheim 1335 (6) Wulversheim 1420 (8) Wulfersheim 1544 (9)

Etymologiquement la partie génétique provient du gothique wulf ou wolf, syllabe du nom qu'on retrouve dans le nom de nombreuses localités ainsi que de personnes qui ont donné leur nom au village dont elles ont été les fondateurs. Wolfrich est un loup puissant. Le suffixe heim, du nom gothique haim = établissement, a été ajouté sous l'occupation alémanique du 5ème siècle à des centaines de noms de villages en Alsace. Certains étaient des agglomérations importantes situées sur des axes routiers dans des contrées à population ancienne déjà dense. Le mot heim est entré dans le dictionnaire français sous la forme anglo-saxonne « home » qui signifie « le chez-soi ». En aucun cas on ne saurait déduire l'origine du nom Pulversheim du mot poudre (pulver). Une ébauche de l'orthographe actuelle apparait dès le 14ème siècle, Bulffersheim est cité en 1369 par Dietler dans sa chroni- que de Schœnensteinbach et en 1506 dans l'Urbaire de Murbach. En 1725 la localité est orthographiée à la fois Bulversheim (10) et Pulversheim (11) ce qui la rapproche de la phonétique alsacienne Bulverscha. En parlant des habitants d'une localité on usait jadis d'un surnom railleur ou affable, suivant qu'il était issu d'une farce, d'une coutume ori- ginale, d'une légende, d'un évènement historique. Les méchants loups de Pulversheim ont été mutés en coucous. Une mutation honorable : car le coucou est le messager du printemps, l'oiseau porte-bonheur qui possède, dit-on le don de la prophétie (12).

Wenn dü im Freijohr zum ersta mol der Guguk hersch un haesch kai Gald im Sack so blibt'r lahr fürs ganza Johr. Si au printemps tu entends pour la première fois l'appel du coucou et que ta bourse est vide elle le restera toute l'année.

Une prophétie qui vaut avertissement.

NOTES ET REFERENCES

1 Bruckner : Regesta Alsatiac 496-918. Strasbourg 1949. 2 Schoepflin : Alsace illustrée traduite par Revenez Mulhouse 1849-52. 3 Laguille : Histoire d'Alsace Strasbourg 1727. 4 Grandidier. Annales. 4 Urbaire de Murbach. 5 Walter : Urkundenbuch des Stadt Rufach. 1903. 6 Schoepflin et Ravenez : o. c. 7 Mone - Z - XIV. 7 ou ZGOR 14.7.1862. Zeitschrift fiir die Geschichte des Oberrheins. 8 Rappolsteiner Urkundenbuch III p. 132. Karl Albrecht Colmar 1896. 9 Archives départementales du Haut-Rhin AD E 40/2 10 « « « « AD E 40/11 11 « « « « AD E 40/12 12 Folklore et tradition en Alsace - Editions SAEP Colmar 1973.

CHAPITRE 2

AU BERCEAU DE NOS LOINTAINS ANCETRES

Bien avant que nos villages n'aient pris naissance, des peuplades, venues d'horizons divers, s'étaient infiltrées dans nos régions ; les unes, nomades, ne firent que transiter, les autres, sédentaires, s'y fixèrent en colonies, devinrent agriculteurs et artisans. Le sol a livré le secret de leur existence : vestiges précieux qui ont permis aux archéologues de déter- miner l'origine de ces envahisseurs et la lente évolution de la civilisation de nos ancêtres primitifs. Au musée de Colmar est conservée la pointe d'une flèche découverte en 1912 par Forrer à Pulversheim et qui remonte à la période néolithique de l'âge de la pierre taillée (1). De la même époque provient le squelette accroupi découvert en 1930 au sud du hameau de Schœnensteinbach avec comme mobilier funéraire un beau vase portant un dessus spiraliforme de l'époque de la céramique dite « rubannée » et qu'on peut voir au musée de Mulhouse (2). Plus importantes sont les découvertes d'origine celtique de l'âge du bronze et du fer, principalement de la période hallstattienne du 7ème ou 5ème siècle avant J. Christ et de la période de la Tène du 5ème siècle à l'occupation romaine. A partir de 1300 avant J. Christ, les celtes venant de la région du Danube ont traversé périodiquement le Rhin, poussant les anciennes tribus du Sud de l'Alsace vers l'Ouest, et le Midi, où elles finiront par coloniser la Gaule. Les Celtes avaient coutume d'incinérer leurs morts et d'enfouir les os calcinés, conservés dans des vases décorés, sous des tumulus, monticules d'environ 50 m de pourtour et de 3 m de hauteur en moyenne. De Ring a recensé aux abords du ban de Pulversheim sur le territoire d'Ensisheim, en 1858 : 14 de ces tumulus au lieu dit Hubelwàlde 21 dans l'Allemendwald à droite de la route de Pulversheim vers Ensisheim et en 1863 sur le territoire de Wittenheim 12 dans le canton de Neumatt et 14 dans le canton du Schabis (3). A la demande et avec la participation financière de M.M. Schlumberger et De Bary de Guebwiller, tous deux propriétaires de forêts à Pulversheim, De Ring procéda en 1858 à des fouilles dans sept de ces tumulus. Il y décou- vrit sous des cendres de nombreux squelettes, des vases contenant des 05. calcinés, des bijoux (viroles, fibules, anneaux) des poteries ; nombre de ces trouvailles sont conservées au musée de Strasbourg et de St Germain (4). Les fouilles effectuées en 1873 à la demande du Bezirksprésident Heydt dans le tumulus 21 ont été particulièrement fructueuses. Au musée d'Un- terlinden, on peut admirer un diadème et trois bandeaux décorés en or repoussé, des torques creux en bronze, des bracelets et petits anneaux en or, un fer de lance brisé, divers objets en bronze. En raison de la richesse de ces trouvailles ce tumulus a été associé aux tombes princières signalées en Bade Wurtemberg, en Suisse et en France (5). Dans l'Allemend le lieutenant Biehle détecta également en 1885 un tu- mulus non signalé par De Ring et mit à jour deux bracelets à grosses boules en bronze, des fragments d'anneaux et de ceintures en bronze, une pointe de lance et des poteries (6). Cette concentration de nombreuses sépultures laisse présumer l'exis- tence d'une importante colonie celtique à quelque deux km au nord de l'actuel village, à mi-chemin d'Ensisheim. Dans ces parages a été trouvée une épée en fer de l'époque mérovin- gienne ainsi que des objets métalliques conservés au musée de Colmar (7). La situation de Pulversheim sur une ancienne voie celtique d'Ottmars- heim à Soultz (7) a favorisé le passage des tribus vers l'Ouest. Ceci ex- plique aussi le grand nombre de tumulus entre Wittenheim et Pulversheim. L'abbé Walch, curé de Pulversheim de 1866 à 1871, avait été autorisé à entreprendre des fouilles dans un tumulus situé aux confins du ban d'Ungersheim. Il semble qu'elles n'aient jamais été effectuées (8). Les Celtes fixés sur le Rhin se divisèrent en deux peuples distincts, ceux de la rive droite appelés Germains et ceux de la rive gauche nommés Gaulois. L'Alsace fit partie de la Gaule celtique qui a été peuplée par trois tribus parmi lesquelles les Séquanes qui habitaient dans l'Alsace du Sud, le Sundgau, la Franche-Comté, le Jura avec pour capitale Vesuntio - Besançon. Pulversheim fit partie de la Séquanaise.

NOTES ET REFERENCES

1 Forrer : RCA 1912. 2 Hatt dans R.A. 1947 et Ruhlmann dans BMHM 1930. 3 De Ring. Les tombes celtiques dans la forêt d'Ensisheim. Strasbourg 1859. 4 Naue. Die Denkmäler der vorrömischen Metallzeit. Strasbourg 1905. 5 Naue. o. c. 6 Natte. o. c. 7 Rapport Ringeisen dans BCMH tome 6 p. 62 - 1868. 8 Naue. o. c.

CHAPITRE 3

CINQ SIECLES D'OCCUPATION ROMAINE

A l origine de l'occupation romaine se situe la bataille sanglante entre les légions romaines de Jules César et les hordes germaniques comman- dées par un guerrier farouche, Arioviste, qui occupaient la Séquanaise de- puis 68 avant Jésus-Christ Arioviste constitue une menace permanente pour les ambitions du général romain dans son dessein de conquérir toute la Gaule. « Il y avait une grande plaine et dans cette plaine une butte de terre assez élevée. » Cette description sibylline de César (Guerre des Gaules 1/43) du lieu de l'affrontement a suscité de longues controverses entre historiens. Si la thèse de certains (Laguille, Napoléon III, Hatt) qui fixent le lieu de la bataille dans les environs de l'Ochsenfeld devait s'avérer exacte, le sol de notre région aurait résonné sous les sabots des chevaux germaniques. Mais laissons aux archéologues le soin de départager les historiens. En l'absence de témoignages écrits, les vestiges, fort nombreux, de la période de l'occupation romaine sont de nature à fournir des renseigne- ments concrets et précis sur cette époque. Un reliquat des fonds dont disposait Ingold pour ses fouilles à Cernay avait été mis à la disposition de l'abbé Walch, curé de Pulversheim (1866-1871), qui, au cours de ses explorations, découvrit en 1868 dans la commune des traces de trois voies antiques. La grande artère venant d'Epo- manduodurum (Mandeure) passant par le vicus de se divisait à Pulversheim en trois branches, l'une se dirigeant vers Horbourg, l'autre vers Brisach, la troisième vers , l'antique Stabula = Heerweg. Sur ce dernier chemin on a trouvé des tuiles à rebord, des médailles, des fers à cheval et même le sol ferme est dallé (1). En 1868, on découvrit au Hüttenacker, au Kayserbrunnliwald et au sud de Pulversheim de nom- breux tessons de poterie romaine (2). Aux abords de la voie vers Brisach on a déterré une cinquantaine d'armes, une hache celtique en pierre soigneusement polie. Cet endroit porte le nom significatif de « Ziegelacker » (Champ aux tuiles). C'est dans ces parages qu'un habitant de la commune, M. Sponny, a déterré en 1968, par hasard, au cours de ses travaux de jardinage, une belle statuette romaine en bronze.

Statuette romaine trouvée à Pulversheim

Un chemin secondaire partait près du pont de la Thur à travers le Grun pour aller rejoindre la voie de l'Ill près de Meyenheim (3). Là, un lieu-dit porte le nom « Kaisersbrunnliwa.Id » déformé en « Geisenbrunnii- wald » faussement traduit dans un manuscrit en 1585 en « fontaine de l'empereur ». D'après le professeur Spaecklin (4) la particule « Kaiser » ou « Geis » qu'on trouve dans le nom de nombreuses localités, est dérivée du mot latin « casa » ou « casura » signifiant hutte.

Des découvertes de tuiles à rebord ont été faites en 1867 dans cette forêt et dans le bois au sud-est d'Ungersheim. On a déterré sur une éten- due de 50 à 60 m de long sur 200 m de large des monceaux de débris de vases de grande dimension et de fabrication grossière, mêlés à des tuiles à rebord. Dans la même forêt on a mis à jour en 1850 et en 1864 des restes de verre, de la poterie, des fragments de tuiles, des objets en bronze et en fer (2). Dans la forêt de Pulversheim apparaissaient après les grandes crues au bord de la Thur de nombreux fragments de tuiles romaines. La richesse de ces vestiges et le nom d'un lieu-dit semblent indiquer que des habi- tats se trouvaient à ces différents endroits du temps des Romains. Dans le journal « L'Alsace » du 10 mai 1969, Renaud a publié un croquis sur le- quel il indique la partie sud du ban vers Staffelfelden et Wittelsheim de part et d'autre de la route comme site gallo-romain. Les noms des lieux- dits de cette contrée relevés dans l'aveu et dénombrement de 1771 (5) tel que Hüttenacker, Huttenplon, Huttenbach, Kaysersbrunnlimatt, de même que Kaysersbrunnliwald, Ziegelacker, semblent indiquer l'existence d'an- ciens habitats. Certains historiens croient reconnaître dans la dénomination « Hoch- weg » (2) une ancienne voie romaine. Faut-il attribuer cette origine au che- min portant ce nom et qui part des environs des tumulus de l'Allemend- wald vers l'antique voie à travers le Grùnwald ?

En raison de ces trouvailles et de sa situation, Pulversheim semble avoir joué un certain rôle dans les études historiques. Des historiens ont situé sur son territoire la station romaine d'Uruncis. Mais ni les vestiges, ni la situation topographique, ni les distances fournies par les itinéraires officiels n'ont confrmé cette hypothèse (1). D'après les fouilles effectuées par Schweitzer il faut admettre avec certitude que l'ancienne ville ro- maine précitée se situait à .

NOTES ET REFERENCES

1 Rapport Ringeisen dans BCMH tonte VI 1868 p. 62. 2 Werner dans R.A. tome 90 1950/51 p. 28. 3 Werner dans R.A. tome 90 1950/51 p. 27. 4 Journal «L'Alsace» du 27.1.1970. 5 A.D.ll,R. E 40/11. L'Arrondissement de GUEBWILLER à l'époque romaine CHAPITRE 4

ALLEU DES DUCS D'ALSACE 550 - 739

Après un demi siècle de calme et d'expansion matérielle sous l'occu- pation romaine, l'Alsace devient à partir du 3ème siècle une région convoi- tée par des peuplades de l'est, les Alamans d'abord, qui y firent de tré- quentes incursions facilitées par le retrait des troupes romaines qui y étaient en garnison. Ils s'installent dans la plaine, particulièrement rava- gée, refoulant une partie de la population vers les hautes vallées vosgien- nes, tandis que l'autre partie accepte avec résignation le sort d'esclave ou de serf. Tel fut le cas de l'ancienne Séquanaise. A mesure que les Alamans s'avancent vers le nord, ils entrent en con- tact avec leurs voisins les Francs, qui avaient conquis en 486 les derniers restes des terres romaines en Gaule. Par la bataille de Tolbiac (496), Clovis met fin à ces luttes prolongées. Après sa victoire sur les Alamans et sa conversion au catholicisme, appuyé par l'Eglise et les évêques, il établit son autorité sur la Gaule. Les Francs s'installent dans la région, mais l'élé- ment alamanique y demeure prédominant. Afin de maintenir l'intégrité du territoire cis-rhénan et de tenir tête à d'éventuelles incursions des peuples d'outre-Rhin, les successeurs de Clovis, affaiblis par leurs luttes fratricides, créèrent le duché d'Alsace et en confièrent le gouvernement à un duc dépendant de l'autorité royale. Mais les ducs successifs, profitant de la faiblesse des souverains mérovin- giens, accrurent leur autorité sur la région et agrandirent leur souveraineté territoriale. Le troisième de la lignée des ducs d'Alsace fut Adalric Etichon ou Attich (673 - 700), père de Sainte Odile. A l'instar des Rois et d'autres grands de cette époque, les ducs, s'appuyant sur l'autorité et le prestige dont jouissait l'Eglise, favorisent les fondations de monastères. Adalbert, fils d'Adalric, fonde vers 675 l'abbaye Saint-Etienne à Strasbourg. Selon un faux du 12ème siècle, attribué à l'évêque Wernher de Stras- bourg (1005), le Roi Childeric ou Chilperich 1 (719 -721) aurait confirmé à l'abbaye Saint-Etienne des propriétés à Eckwersheim, Huttendorf, Wolf- ganzen, Rosheim, Mulhouse, Pulversheim (Wulfricheshen) et Réguisheim avec tous les droits rattachés à ces alleux (1). Une étude détaillée du document a montré qu'effectivement ces localités constituèrent un fonds très ancien des propriétés stéphanoises. On ne peut guère s'expliquer com- ment Pulversheim, Réguisheim devinrent propriété d'un monastère stras- bourgeois si ce n'est par le duc qui possédait des terres allant du Sundgau jusqu'à Seltz. Cette dotation est sans doute aussi à l'origine du vocable sous lequel fut placée l'église de Pulversheim, car dans la plupart des localités stéphanoises les églises sont dédiées à Saint Etienne (2). Le cou- vent de Saint-Etienne jouissait encore de ses propriétés en 1003 (3). . Après la mort de Luitfried (t 740) le duché d'Alsace cessa d'exister par extinction de la famille ducale dans la lignée masculine. Le dernier frère