Aperçu écologique de la forêt direction de et Cernay puis, progressivement, vers le Nord en direction de suburbaine du Nonnenbruch et pour finir vers . Elle s’inscrit dans un triangle formé Par Jean-Paul Weber (juin 2011) par -Cernay-Ensisheim, intéresse une quinzaine de communes, et se situe plus Naturaliste et animateur U.P près des Vosges que du Rhin puisqu’elle ne franchit pas le cours de l’Ill.

Quand l’Homme laisse agir la Nature et ne Au point de vue climatique, on parle à perturbe pas les mécanismes qui la régissent, l’échelle d’un pays ou d’une très vaste région il s’établit un état d’équilibre entre le climat et du macroclimat, par exemple le macroclimat la végétation. Le milieu naturel qui se façonne de l’Est de la qui est actuellement du ainsi correspond dans nos régions tempérées type semi-continental avec des étés chauds et de plaines à la forêt de feuillus. Cette sylve des hivers assez froids. Un climat plus localisé, caducifoliée représente alors la forêt primitive intéressant une région plus petite, s’appelle ou forêt climacique ou encore la formation un mésoclimat, par exemple le mésoclimat du végétale appelée climax. D’ailleurs, cet état Nonnenbruch, et dans celui-ci on peut d’équilibre se retrouve au niveau des sols, on distinguer une foule de microclimats selon le parle alors d’un pédoclimax. milieu considéré : bosquet, lisière, tapis herbacé, mare ou fente de rocher. Cette brève étude écologique est consacrée à l’une d’entre elles : le massif forestier du L’altitude de la région varie entre 295 m à Nonnenbruch considéré au sens large, c’est-à- Cernay, 200 m à et même 217 m dire forêt de la Thur comprise. Il sera question à Ensisheim. En moyenne elle est de 243 m. de son climat, de sa géologie et sa pédologie, La température annuelle moyenne en plaine de sa flore et de sa faune, de son rôle en tant est voisine de 10°. Les écarts maxima de que forêt suburbaine ainsi que des dangers et température sont en été de +38° (à l’ombre) des pollutions diverses qui menacent sa et en hiver de -27°. La température de la survie. Le Nonnenbruch est situé dans une région oscille entre +30° et -20° et la moyenne région densément peuplée, son accès est des températures est de +5° pour facile, en dix minutes à peine depuis le centre . de Mulhouse, la voiture vous dépose à sa lisière et ses nombreux chemins accueillent un La chaîne des Vosges forme un écran aux nombre grandissant de promeneurs, ce qui est pluies qui sont de ce fait réduites dans la réconfortant. plaine ainsi qu’aux vents dominants d’Ouest. Le fossé rhénan est une zone de vents faibles, 1. Le climat de la région les vents calmes et faibles sont fréquents (d’après la carte des roses des vents en La forêt du Nonnenbruch est un bon exemple ), les vents forts et réguliers rares. La de forêt de plaine ; elle fut longtemps, par sa vitesse moyenne du vent dans le fossé rhénan superficie d’environ 4000 hectares, la est de 1,8 à 2m/s avec néanmoins des pointes troisième forêt d’Alsace après celles de saisonnières en octobre et janvier. Haguenau et de la Harth. Elle s’étend, du moins ce qui est reste actuellement, de la Dans le nord et le centre de la plaine sortie Ouest de Mulhouse vers l’Ouest en alsacienne, la direction prédominante des vents est parallèle à l’axe de la vallée rhénane. perturbations s’engouffrant par la Mais, plus au sud dans la région de Mulhouse, Porte de Bourgogne. les vents d’ouest sont importants, ils s’engouffrent par la Porte de Bourgogne et la En ce qui concerne le brouillard : c’est un distribution des directions des vents est plus phénomène météorologique fréquent en plaine en automne et en hiver. De 1956 à équilibrée, la région subissant l’influence 1965, le Nonnenbruch a connu entre 40 et 50 océanique. Il existe toutefois une direction de vent opposée : celle du vent continental, froid jours de brouillard par an en moyenne. Leur du Nord –Nord-Est. Wittelsheim par exemple nombre augmente en direction du Rhin ; ils sont liés à la fréquence élevée du phénomène se localise dans l’axe de la trouée de Belfort par où passent le plus souvent des masses des inversions de température (en moyenne d’air humides, tièdes et plus douces de 130 jours par an), surtout en hiver. Il est dû à la superposition de 2 masses d’air ne se l’Atlantique mais aussi celles plus sèches et plus froides du Nord et du Nord-Est, d’origine mélangeant que très difficilement : de l’air continentale ou polaire. Les journées sans froid arrivant par le Nord à basse altitude et de l’air doux, d’origine océanique soufflant en vent sont assez rares dans ce secteur, l’air altitude. De plus, la formation de brouillard étant presque toujours en mouvement. dans l’air froid de la plaine accentue cette Au printemps et en automne peuvent se inversion puisqu’elle empêche le soleil de produire des tempêtes, avec vents très réchauffer la plaine alors que celui-ci violents occasionnant des dégâts aux toitures réchauffe les crêtes vosgiennes. Le plafond ainsi qu’en forêt (chutes d’arbres ou chablis). d’inversion se situe en général à une altitude minimale de 500 m au-dessus du niveau de la Le Mésoclimat du Nonnenbruch se subdivise plaine En plaine : l’altitude et le régime en gros en 2 parties quant à sa pluviométrie : pluviométrique à minimum d’hiver, expliquent une moitié Nord-Est avec un maximum la faiblesse relative de l’enneigement. d’environ 700 mm de pluie par an, et une Plusieurs hivers peuvent se suivre moitié Sud-Ouest avec un maximum d’environ pratiquement dans chutes de neige (dignes de 800 mm de pluie par an. Mais, en fait, en ce nom) en plaine, ce qui s’est vérifié ces étudiant les précipitations moyennes dernières années avec une légère exception annuelles tombées entre 1931 et 1960, on voit pour l’hiver 1975-1976. que la région se divise en 3 parties : Entre 1951 et 1965 le nombre moyen annuel

a) La partie Nord-Est du massif forestier de jours de chutes de neige sur la région qui la plus sèche, bénéficiant de l’écran nous intéresse se situait entre 25 et 30, vosgien (région d’Ensisheim, proche nombre nettement inférieur entre 1965 et de l’ombilic de ), reçoit entre 1975. 700 et 750 mm de pluie par an ; b) La partie Sud-Est (vers Mulhouse) 2. Aperçu reçoit entre 750 et 850 mm de pluie par an. Actuellement Mulhouse reçoit géologique,pédologique 717 mm de pluie par an ; et hydrologique du c) Enfin, la partie Ouest du massif forestier (vers Cernay) reçoit de 850 à Nonnenbruch 900 mm de pluie par an dus aux a) La géologie Le Nonnenbruch se développe dans le fossé importante en superficie, s’est effectivement d’effondrement séparant Vosges et Forêt- développée sur des alluvions anciennes de Noire, plus spécialement entre deux affluents Basse Terrasse Vosgienne comprenant les de l’Ill : la Doller au Sud et la Thur au Nord. Forêts de , , , Reiningue (avec Vorwald, Langholz, Son substratum géologique est formé de Rosengarten et Heiden), Wittelsheim (avec terrains quaternaires, correspondant aux Härthle, Graffenwald, Langhurst, Rotscheuer, cônes de déjection de la Doller et surtout de la Moos et Rothmoos), enfin celles de Thur, le long desquelles s’est déposé du , et . quaternaire récent. Ces alluvions anciennes sont largement Le cône alluvial de la Thur appelé représentées de part et d’autre du Rhin ainsi est le support d’une maigre végétation de qu’au débouché dans la plaine de la vallée de buissons et broussailles à son débouché dans la Thur par l’Ochsenfeld. Elles comprennent la plaine, végétation pauvre se poursuivant essentiellement des sables, graviers et galets vers l’Est et le Nord-Est par la forêt du non altérés et bien roulés et sont exploités Nonnenbruch. Ces alluvions quaternaires sont dans de nombreuses gravières. étagées en terrasses pouvant atteindre une épaisseur importante par exemple 120 m à Une deuxième partie du Nonnenbruch Ensisheim. englobant les forêts de la Thur et se terminant vers Ensisheim s’est développée sur la D’après la carte géologique d’Alsace et de formation géologique précédente (alluvions Lorraine au 1/200.000e datant de 1930, on anciennes de Basse Terrasse), mais aussi sur voit qu’entre les formations alluvionnaires des alluvions récentes, d’origine vosgienne récentes de la Thur et de la Doller se présente (Doller et surtout Thur), de nature sablo- du quaternaire correspondant au Pléistocène caillouteuse, exploitées également dans de récent, plus précisément à la Basse Terrasse nombreuses gravières. L’épaisseur de la masse Vosgienne. Cette formation géologique alluviale de la plaine du Rhin varie du 0 au intéresse la majeure partie du Nonnenbruch. seuil d’Istein à 212 m à . Une autre partie au Sud-Ouest du massif Se sont développées sur ces alluvions récentes forestier reposerait sur du Pléistocène ancien la majeure partie des forêts longeant la Thur, correspondant aux Moyenne et Haute à savoir celles de Staffelfelden, , Terrasses ainsi qu’à du loess (sédiment Pulversheim, Feldkirch, Ungersheim et d’origine éolienne). Il subsiste un petit Ensisheim, ces forêts ne subsistant souvent lambeau de cette même formation géologique plus que par quelques lambeaux. vers Mulhouse ainsi que vers Wittenheim. Ces terrasses sont souvent recouvertes de limons En ce qui concerne les localités : Lutterbach, loessiques pouvant atteindre 20 m Pfastatt (en partie seulement), Richwiller, d’épaisseur. Kingersheim, Wittenheim, Ruelisheim et Ensisheim : elles se sont établies sur des Pour une étude géologique plus détaillée, limons loessiques et limons des plateaux. Ces consultons la carte géologique et limons sont des dépôts pulvérulents, apportés e agronomique du Haut-Rhin au 1/100.00 par le vent en rapport avec le sphénomènes datant de 1955 ainsi que la feuille de glaciaires, souvent altérés en lehm. Ces limons Mulhouse au 1/80.000e de 1961. Nous nous renferment des loess récents jaunes à fossiles apercevons qu’une première partie, la plus caractéristiques, notamment des Mollusques potassique de Mulhouse s’étendant sous le Gastéropodes comme Pupa muscorum L., Nonnenbruch à une profondeur variant de Succinea oblonga Drap, Helix hispida L. ainsi 550, 650 et même à 1.038 m comme à que des loess anciens bruns jaunâtre à Helix Ensisheim. arbustorum et à grosses concrétions calcaires Nous arrivons à la fin de l’ère tertiaire, au ou poupées. Ces couches de limons sont Pliocène, puis à la période préglaciaire et enfin exploitées pour la fabrication de tuiles et de au Quaternaire. A la fin du Pliocène se briques. produisit, à la suite d’une érosion intense, une Par contre, Wittelsheim, Staffelfelden, accumulation d’importantes quantités de Bollwiller et Pfastatt (en partie) se situent sur sables, argiles fluviatiles et de galets au pied des alluvions anciennes de la Basse Terrasse des Vosges et dans la vallée du Rhin. Ces Vosgiennne. Enfin, au Sud de Wittelsheim, la alluvions sont toujours fortement décalcifiées. cité Langenzug se trouve sur un lambeau de Par ailleurs, les effondrements rhénans ont limons loessiques égaré au milieu du continué à se produire mais faiblement en Nonnenbruch et Reiningue est la seule localité s’atténuant vers la fin du Pliocène et au cours nous intéressant implantée sur les formations du Quaternaire. alluvionnaires récentes. D’ailleurs, la Doller et la Thur se frayent un chemin à travers ces C’est la dernière glaciation (dite de Würm) qui, mêmes alluvions vosgiennes récentes. Sous tout au plus, aurait pu exercer une influence sur la région qui allait devenir le Nonnenbruch ces formations quaternaires se trouvent les couches du Tertiaire, en particulier du puisque sur le versant alsacien de glacier de la Miocène avec le Stampien supérieur ou Doller se terminait en amont de Masevaux et celui de la Thur à Wesserling (longueur : Chattien, se présentant dans le bassin potassique à l’état de marnes bariolées avec environ une quinzaine de kilomètre). Il y a peu intercalations de grès également bariolés de dépôts morainiques sur le versant alsacien contenant comme fossiles des Mollusques car ils furent durant le post-glaciaire. Lamellibranches : les Cyrènes et de Poissons : La plaine fut alors recouverte d’un très épais les Melettes dont on ne trouve la plupart du revêtement alluvial de sorte que la forêt du temps plus que les écailles. Nonnenbruch a pu s’installer sur des alluvions L’histoire géologique de notre région débuta surtout vosgiennes. donc au Tertiaire, une fois le fossé Schématiquement, pour les alluvions d’effondrement mis en place. Une bonne rhénanes ,les éléments dominants sont partie du Nonnenbruch s’étend sur une zone d’origine jurassienne et alpine avec galets d’affaissement, une dépression de la plaine granitiques et cristallins, galets calcaires, e d’Alsace mise en place à l’Oligocène (2 sables micacés et vases grises ; pour les subdivision du Tertaire) caractérisée par une alluvions vosgiennes, les matériaux consistent épaisse accumulation de sédiments (de 1.200 surtout en galets granitiques et cristallins, à 1.800 m d’épaisseur). galets schistograuwackeux, sables rouges et Entre Colmar et Mulhouse, cette zone vases rouges du Permien et Trias gréseux. d’affaissement maximale est marquée par un Recouvrant le tout, une couche de limons loessiques éoliens, l’élément dominant étant faciès de lagune sursalée à l’origine des sels de potasse d’âge Sannoisien (Oligocène le loess sur les collines sous-vosgiennes et les inférieur). Ce sont les sels du bassin diverses terrasses rhénanes, sauf les plus Dans la région de Cernay, à Aspach-le-Haut, hautes te la plus basse. on trouve du gravier vosgien typique, sans lehm, ceci correspondant à une grande partie A cette époque, la plaine d’Alsace a pris peu à du Nonnenbruch et à toute l’étendue de peu sa morphologie actuelle avec la faune et l’Ochsenfeld. On remarque également une la flore caractéristiques des différentes couche argilo sableuse supérieure très peu périodes du Quaternaire, l’évolution épaisse. géologique de la région étant pratiquement terminée. Dans un chemin entre Lutterbach et Richwiller, on voit une alternance de lehm

b) Quelques notions de pédologie jaune et de lehm gris dans l’ordre suivant du Après la géologie, intéressons-nous quelque haut vers le bas : peu à l’étude des sols, c’est-à-dire à la 1) Couche mince de lehm brun peu pédologie de la région. Le sol est la partie la coloré plus superficielle de la croûte terrestre, 2) Lehm gris (3 m) modifiée par divers facteurs, issu de la 3) Lehm jaune (1,50 m) transformation d’une roche-mère. Celle-ci 4) Lehm gris (1 ,50 m) exerce une influence prédominante au cours de la formation des sols, autrement dit de la Enfin, toujours d’après les mêmes auteurs, pédogenèse. De plus, notons la grande entre Pfastatt et Lutterbach, on trouve du importance des évènements du Quaternaire, lehm alpin alors que sur la plaine s’étendent avec les alternances glaciaires, les surtout des alluvions vosgiennes. interglaciaires, la dernière glaciation et le Donc, en plaine, en général, nous trouvons les réchauffement post-glaciaire. alluvions fluviatiles rhénanes à tendance Reprenons d’abord les grandes lignes de la calcaire, et les alluvions, avec en plus apport « Description géologique et minéralogique du par le vent de la fine poussière de quartz Haut-Rhin T.2 » par J.Delbos et J.Koechlin- chargée de calcaire fixée par les herbes ou Schlumberger (1867). Ces auteurs nous loess. Par arrêt de l’apport éolien par les apprennent que dans la Thur, près de son pluies se sont produites une décalcification et confluent avec l’Ill, on trouve des galets oxydation du loess, d’où formation de lehm de principalement vosgiens, bien reconnaissables différentes teintes. En bref, ces sols de plaine peu arrondis, avec porphyre rouge du sont très variés selon la nature de l’alluvion et Rothhütel et des galets rhénans, moins bien ces galets et gravier alluviaux sont exploités identifiables, nettement arrondis, de dans de vastes et trop nombreuses gravières différente nature et à galets de granite. (rebaptisées récemment zones d’emprunt).

C’est ainsi qu’entre Mulhouse et Pulversheim le sol est composé presque jusqu’en surface de galets vosgiens, avec du sable, la couche c) Un peu d’hydrologie supérieure correspondant à du Lehm avec des L’action de l’eau souterraine, comme la impuretés (couche inférieure ou égale à 15 cm proximité d’une nappe phréatique, est loin d’épaisseur). D’autre part, on voit une d’être négligeable vis-à-vis des sols. Sous le superposition entre gravier vosgien (en haut) Nonnenbruch existe l’ensemble de nappes et gravier rhénan (en bas) dans les berges de phréatiques le plus développé d’Europe, l’Ill. formé essentiellement de 3 niveaux. A une les vannes tombent en ruine quand elles n’ont profondeur relativement faible (de l’ordre de pas déjà disparu. 1,50 m à 1,80 m, parfois seulement de 0 ,50 m, sauf par grande sécheresse) se situe une Cette forêt humide du Nonnenbruch (comme importante nappe phréatique, visible par l’indique d’ailleurs son nom, Bruch = zone humide) est aujourd’hui malheureusement en endroits, dans les gravières et sous forme voie d’assèchement. Quelques mesures de pH d’étangs comme celui du « Baggerloch » creusé par l’homme. On y a en effet exploité furent effectuées pour les eaux de la nappe là le gravier alluvial lors de la construction de la où elle affleure, de même pour certains première voie ferrée au 19e siècle ainsi que ruisseaux parcourant le Nonnenbruch . durant la période de 1914 à 1918. On constate une assez faible variation du pH De plus, notre forêt est sillonnée par de de ces eaux, qui sont en général d’une acidité nombreux ruisseaux, souvent affluents des faible à très faible voire voisines de la deux torrents vosgiens, Doller et Thur. Il en est neutralité. résulté que le substratum alluvial argilo- Enfin, il est réconfortant de pouvoir signaler la caillouteux, très humide par endroits, est présence de la menthe aquatique dans le parfois devenu tourbeux par suite de la Dollerbächlein à Lutterbach, ce qui indique stagnation de l’eau. une pollution très faible, pratiquement nulle.

Cette forêt du Nonnenbruch était une forêt Après l’étude de quelques aspects inertes de hygrophile, à nappe phréatique assez notre milieu forestier, venons-en aux superficielle, bien que ces dernières années composantes vivantes que sont la flore et la celle-ci ait accusé des baisses de niveaux faune. Nous nous résumerons à l’essentiel en spectaculaires et inquiétantes pour la survie ce qui concerne le Nonnenbruch. de certaines espèces d’arbres. Nous en reparlerons plus loin. 3. La flore du Nonnenbruch Par ailleurs, en forêt de Pulversheim, Ce massif forestier se divise en deux grandes existaient dans les années 1925-1930 des parties : une moitié Nord ressemblant à une résurgences (remontées à la surface du sol) de forêt type de l’Ill avec chêne pédonculé et la nappe phréatique, et beaucoup de frêne et une moitié Sud rappelant une forêt Lutterbachois se souviennent des de type Harth avec chêne rouvre et charme débordements du Baggerloch situation qui ne (comme dans certaines parties de la forêt de s’est plus produite depuis passablement Lutterbach et de Reiningue), traitées en taillis d’années. sous futaie, ou en futaie de chêne et de D’ailleurs, par le passé, on entretenait à charme. Cette subdivision grossière se travers la forêt des canaux d’irrigation et de retrouve d’ailleurs dans les précipitations drainage, notamment dans celle de atmosphériques. Lutterbach ; un fossé est encore visible Etudions quelques aspects de cette flore par aujourd’hui, partant du Baggerloch, mais strates de végétation. incapable depuis des années d’irriguer ka forêt du fait de la baisse de la nappe a) Strate arborescente phréatique. A l’heure actuelle, ces fossés sont pratiquement comblés, faute d’entretien et La forêt du Nonnenbruch subit nettement l’influence de la montagne vosgienne voisine. Au Sud-Est des alluvions récentes de la Thur A signaler, l’absence de hêtraies dans la plaine on se trouve une sorte de « delta » dû à la d’Alsace car cette essence nécessite au Thur, la pente faible de la Basse Terrasse minimum 800 mm de pluie par an. Vosgienne a favorisé une acidification du substratum par la stagnation des eaux de la Toujours en milieu humide, croissent en abondance diverses espèces de saules comme Doller et de la Thur. Salix cinerea, S. aurita, S. purpurea et S.caprea De ce fait, deux essences surtout ont été (ou saule marsault). On peut même trouver favorisées dans les zones humides : l’aulne et des saules hybrides comme X.Salix Reichartii le bouleau. L’espère dominante est l’aulne A.Kern (= S.caprea XS.cinerea), par ex sur une glutineux (Alnus glutinosa) que l’on retrouve lande du Nonnenbruch, près de Lutterbach le long des cours d’eaux. C’est un des arbres (V.Rastetter). résistant le mieux aux fortes humidités du sol, autrement dit à une certaine asphyxie des A la lisière du Nonnenbruch, dans un fond humide près de la Doller, se dressait il y a peu racines. En effet, ses racines supportent beaucoup mieux celles d’autres arbres les sols de temps encore un magnifique exemplaire de lourds et les conditions de vie en milieu mal Saule fragile. Hélas, actuellement on ne peut plus que l’admirer sur photos car il a été oxygéné car pourvues de nodules dus à un champignon (Frankia) leur permettant victime du remembrement de Lutterbach et d’assimiler l’azote atmosphérique. de la cupidité humaine.

En 1972, se produisit une baisse très forte de En compagnie des saules croissent fréquemment diverses espèces de peupliers. la nappe phréatique, ce qui transforma l’étang du Bagglerloch (forêt de Lutterbach) en un Un des plus répandus est le tremble (Populus fossé à sec de près de 700 m de long sur une tremula). Ces essences sont comme les saules à croissance rapide et aiment les mêmes quinzaine de mètres de large, au fond tapissé par une épaisse couche de vase et stations le long des cours d’eau, le pourtour des étangs et marécages, les fonds humides. profondément craquelée. Leur rôle n’est nullement négligeable, surtout Cette situation, qui dura plusieurs mois, dans la rétention des alluvions le long des jusqu’à l’approche de l’hiver comme en cours d’eau, dans la fixation des berges et des témoigna le développement d’une importante sols meubles ou en pente. végétation terrestre, entraîna le dépérissement progressif et la mort de la En forêt de Lutterbach fut introduit le peuplier du Canada (Populus canadensis) dont certains plupart des aulnes dans un vaste secteur en forêt de Lutterbach, ceci malgré la remontée exemplaires ont atteint une taille progressive de la nappe, le Baggerloch ayant impressionnante. Certains saules et peupliers sont écologiquement parlant assez électriques retrouvé en mai 1973 son niveau habituel. puisqu’ils colonisent d’anciens terrils des Le Bouleau (Betula verrucosa) est, avec saules M.D.P.A comme celui de la Cité Fernand-Anna et trembles, une espèce pionnière, à Wittenheim. colonisatrice des espaces laissés vides dans la Plus vers l’Est, sur terrain un peu plus sec, se forêt, notamment des clairières naturelles ou résultants de coupes non suivies de développent le chêne pédonculé (Quercus reboisement. Ceci est particulièrement net en pedonculata = Q.Robur) avec le frêne (Fraxinus excelsior). Ces 2 essences forêt de Pfastatt. fournissent des bois très appréciés. Le chêne sessile (Q.sessiliflora) se rencontre également forme ramifiée, buissonnante (Lutterbach). Ils ça et là. Le Nonnenbruch possède encore sont victimes de la graphiose, maladie plusieurs spécimens de chêne de belle taille : cryptogamique. le plus grand se trouve en forêt de Pulversheim et a une circonférence à hauteur A Lutterbach, comme en d’autres secteurs, croissent des érables : l’érable sycomore (Acer d’homme de 4,60 m et un autre en forêt de pseudoplatanus) est assez fréquent, l’érable Pfastatt une circonférence de 4,48 m. plane (A.platanoïdes) et l’érable champêtre D’autre part, furent introduit des chênes (A.campestris) le sont moins. Signalons encore américains tels que Quercus coccinea, le le Tilleul (Tilia cordata) appréciant le lehm chêne écarlate (Forêt de Lutterbach, de disséminé à travers le Nonnenbruch, dans les Pulversheim) et Quercus palustris ou chêne zones pas trop humides, son écorce ce des marais. portant presque toujours la trace des coups de bec des pics. Enfin, n’oublions pas le Au 19e siècle, la forêt de Pulversheim a été le merisier (Prunus avium) qui se mélange aux siège de nombreuses introductions d’arbres autres essences en quelques beaux exotiques surtout américains, sous l’impulsion exemplaires (Lutterbach). Existent également d’un certain N.Baumann de Bollwiller. en forêt de Lutterbach, quelques pommiers et L’essence la plus fréquemment plantée fut le poiriers sauvages. Pour en terminer avec les chêne rouge (Q.borealis) avec le chêne feuillus, mentionnons deux espèces de écarlate, le chêne des marais. Furent aussi Sorbiers de notre forêt, le Sorbier des oiseaux implantés des Juglandacées comme Carya (Sorbus aucuparia) et l’Alisier (S.torminalis) amara (Hickory) et le noyer noir d’Amérique que l’on rencontre sporadiquement, voire (Juglans nigra), en compagnie de peupliers tels relativement fréquemment (forêt de Populus canadensis ou Peuplier de Virginie, le Lutterbach), (forêt de Pfastatt, entre autres). peuplier baumier (P.balsamifera) et le peuplier Les pins, comme tous les résineux, sont de l’Ontario (P.candicans). introduits. En plus, la forêt de Pulversheim a été enrichie b) Strate arbustive par quelques Tulipiers (Liriodendron tulipifera F.Magnoliaciées) et Catalpa (C.bignoniodes) et Elle est riche en espèces, discontinue parce plus récemment par quelques hêtres (n’existe que ne disposant pas toujours de la lumière en pas à l’état naturel en plaine). quantité suffisante pour prospérer. On y trouve des espèces aux exigences écologiques Sur sols graveleux, peu ou pas recouverts variées : des arbustes thermophiles et plutôt d’argile, pousse le chêne sessile avec les calcicoles arrivent néanmoins à prospérer tels charmes aimant la chaleur (Carpinus betulus) que : concurrencent de plus en plus les aunes. Les chênes pédonculés se mélangent aussi aux - le troène (Ligustrum vulgare) est frênes et aux charmes (chênaie-charmaie de bien représenté (zones bien Lutterbach). Apparaissent sporadiquement éclairées, F.Oléacées quelques ormes champêtres (Ulmus - la viorne lantane (Viburnum campestris), rarement en grands arbres ; ce lantana) sont les ormes les plus thermophiles ; de plus, - les cornouillers avec le cornouiller (par-ci par-là), rencontre-t-on l’orme blanc à sanguin (Cornus sanguinea) fruits pédonculés (Ulmus effusa), surtout sous arrivant parfois, mais rarement, à former un arbre (forêt de appelé « Groupement de lisière » ou Pfastatt), et le cornouiller mâle « manteau de la forêt » (Mantelgesellschaft) ; (C.mas) originaire du Sud-Est on les retrouve en effet le long des lisières et européen dont les fruits rouges des chemins forestiers en association avec étaient consommés (cornouilles) d’autres plantes héliophiles et thermophiles. - l’aubépine avec Crataegus Parmi celles-ci croissent en abondance les monogyna et C.oxyacantha sureaux (Sambucus nigra, S.Racemosa), les - le prunellier, très fréquent framboisiers (Rubus idaeus) et autres ronces (Prunus spinosa), dont la floraison du genre Rubus produisant leurs mûres précède l’apparition des feuilles jusqu’en automne, en compagnie des - le nerprun purgatif, plutôt rare églantiers (Rosa canina), dont les fruits sont (Rhamnus Cathartica, forêt de très appréciés en confiture.Les feuilles de Pfastatt) n’atteint pas une taille ronces sont très importantes pour la survir du importante chevreuil en hiver . - un chèvre-feuille buissonnant et

arbustif : le camérisier, dans les c) Les espèces lianoïdes endroits suffisamment ensoleillés Les arbres et arbustes de nos forêts servent (Lonicera xylosteum). souvent de support à des plantes grimpantes D’autres arbustes préfèrent des milieux plus ou lianes, importantes au point de vue physionomique du milieu, dotées parfois humides. Parmi ces espèces plus hygrophiles, citons le cerisier à grappes ou putiet (Prunus d’une étonnante vitalité. Certaines viennent padus) répandu assez largement, surtout en bien dans un sol humide, voire très humide, d’autres préfèrent la chaleur, mais toutes forêt de Lutterbach-Wittenheim redoutent l’asphyxie des racines. - la viorne boule de neige (Viburnum opulus) La plus abondante est le chèvre-feuille des - le fusain (Evonymus europaeus) bois (Lonicera periclymenum) dont les fleurs atteint parfois une grande taille embaument la forêt en juin. - la bourdaine (Rhamnus frangula) Puis vient le houblon sauvage (Humulus ne craignant pas les sols lourds, lupulus), amateur de lumière, aux fruits est assez fréquente (Lutterbach) caractéristiques et très abondants vers la fin et atteint parfois la taille d’un de l’été. arbre (1 exemplaire en forêt de Wittenheim au tronc Le lierre (Hedera helix) grimpe à l’assaut de impressionnant) certains chênes à l’intérieur de la forêt, leur - feuilles de ronces très tronc dépasse parfois l’épaisseur d’un bras importantes pour la survie du (forêt de Lutterbach). Le lierre est la seule chevreuil en hiver liane à feuilles persistantes et toujours vertes, - enfin le noisetier (Corylus bien que celles du chèvre-feuille apparaissent avellana) sans exigence déjà en plein hiver. écologique particulière. Dans les zones très humides, voire Ces espèces buissonnantes, nombreuses et marécageuses, sur des arbres au pied dans variées forment avec des espèces grimpantes l’eau se développe très abondamment une lianoïdes un groupement végétal particulier solanée : la Douce-amère (Solanum dulcamara accompagnée par V. hirta, V.riviniana – marécage du Mar-en-Bois-Wittelsheim). (Lutterbach – Pfastatt).

Finalement, la Clématite vigne-blanche Signalons aussi la parisette (Paris quadrifolia – (Clematis vitalba), ligneuse comme le lierre et Lutterbach, Pulversheim), l’ail des ours (Allium vivace comme toutes ces lianes, ne se ursinum) (abondant dans la forêt de Reiningue rencontre, contrairement à la forêt rhénane, – Oelenberg), des primevères (Primula qu’en de rares points du Nonnenbruch (par elatior), le lierre terrestre (Glechoma ex. lisière forêt de Reiningue et de hederacea), le bugle rampant (Ajuga reptans), Lutterbach). les lamiers (L.album maculatum, galeobdolon). Toujours en milieu nitrifiant se développent le

d) La strate herbacée muguet (Convallaria maialis), l’épiaire des bois Cette strate, comme les précédentes, est riche (Stachys silvatica), le pied de veau (Arum et variée. La forêt est une forêt ouverte, maculatum – Wittenheim – Reiningue), laissant arriver suffisamment de lumière au l’angélique sauvage (Angelica silvestris) plutôt sol, ce qui permet le développement des en lisière. espèces héliophiles (plantes de lumière) aussi Cette strate s’enrichit encore de nombreuses bien que des espèces sciaphiles (plantes espèces impossibles à citer toutes ici ; d’ombre) dans les zones plus ombragées. mentionnons toutefois la reine des prés En milieu suffisamment humide poussent (Filipendula ulmaria), la scrofulaire (Scrofularia diverses espèces de laîches ou Carex tel Carex nodosa), le Séneçon de Fuchs (Senecio acutiformis, de grandes graminées rappelant Fuchsii), divers chardons et cirses, la le roseau, faux roseau, Phalaris arundinacea chanvrine, la mauve alcée et même la digitale (chemins forestiers – Lutterbach). Les canches, pourpre dans les zones bien ensoleillées. indicatrices de l’acidité du sol, avec En forêt, sur sols graveleux recouverts de Deschampsia cespitola (en touffes) traduisent lehm, à l’ouest de Schoenensteinbach, nous l’influence vosgienne. retrouvons une autre laîche : Carex umbrosa, Sur terrain plus sec prospère une laîche une luzule (Luzula pilosa), une Fétuque caractéristique du Nonnenbruch Carex (Festuca heterophylla) et un paturin (Poa brizoïdes, le Crin végétal (Seegras), exploité nemoralis). La Stellaire (Stellaria holostea) est dans le temps dans notre forêt ainsi que très répandue, de même la fraise des bois l’explique très clairement M.Ch.Sauter dans (Fragaria vesca), les raiponces (Phyteuma son excellent livre « Wittelsheim ». Sur sol nigra). S’y ajoutent des euphorbes graveleux, pousse Carex silvatica. Ce tapis (E.cyparissias, E.amygdaloïdes), Moehringia végétal compte des espèces vernales profitant trinervia (Nabelmiere), la gesse sauvage du maximum de lumière qui précède le (Lathyrus silvestris). développement des feuillages comme la Scille Dans ce secteur aussi, la proximité du massif (Scilla bifolia – forêt de Wittenheim) et la vosgien se remarque par Poa Chaixi, une Ficaire (Ficaria ranunculoïdes). Mais l’espèce potentille (Potentilla sterilis), un gaillet printanière la plus commune est l’anémone (Galium silvaticum), une immortelle sylvie (Anemone nemorosa) aimant les sols (Gnaphalium silvaticum) que le pasteur riches en nitrates, ainsi que le Sceau de G.Ochsenbein estime dus à un mécanisme Salomon (Polygonatum multiflorum), la violette des bois (Viola silvestris) d’entrainement par alluvions des ruisseaux « Schweinlochboden »). Cette flore comprend vosgiens. de nombreuses espèces dites hélophytes (plantes de rives supportant l’immersion de Ailleurs, l’influence vosgienne se retrouve par leur base), entre autres :la massette(Typha une pulmonaire (Pulmonaria officinalis, latifolia), en plus du roseau, la grande P.obscura), alors que la plus répandue est Consoude (Symphytum officinale), l’iris des P.montana ssp.montana (V.rastetter) et le marais (Iris pseudacorus), des laîches (Carex) compagnon rouge (Melandrium rubrum). en grosse touffes comme Carex stricta, On pourrait encore mentionner beaucoup C.elata, ainsi que des joncs (Juncus d’autres éléments intéressants de notre flore, conglomeratus), l’influence de l’Homme, par ex. les landes du Nonnenbruch avec une responsable d’une certaine pollution, s’y fausse bruyère (Calluna vulgaris) et de traduit par la croissance d’énormes touffes nombreuses graminées (Agrostis vulgaris, d’orties (Urtica dioica).Certaines années, le Molinia coerulea, Brachypdium pinnatum, long d’un layon humide fleurit une orchidée Anthoxanthum odoratum, Festuca ovina sl.), répandue en milieu humide : l’Orchis tacheté formant des associations végétales (O.maculata) particulières : la molinaie ou Molinietum D’autre part, les rives des ruisseaux et cours (entre Richwiller et Lutterbach) ou encore d’eau (Doller, Thur) portent également des celle du lieu-dit « Silbermatte » près de associations végétales intéressantes, où on Richwiller (V.Rastetter) où on retrouve des retrouve un grande renouée du Japon espèces submontagnardes comme : Roripa (Polygonum cuspidatum ou Reynontria pyremaica (Sumpfkresse), le nard raide japonica) une introduite au 19e siècle, (Nardus stricta), un jonc (Juncus acutiflorus), Collomia grandiflora (Thur puis Doller et enfin une laîche (Carex vulgaris), la callune propagée à la vallée de Steinbach, de la Lauch (C.vulgaris) et même un bouleau (Betula et même de la Villé), enfin une grande pubescens). balsamine : Impatiens Roylei = I. glanduligera Par ailleurs, sur une lande à l’Ouest de propagée grâce aux inondations de la Thur. Lutterbach, on peut rencontrer une orchidée : Les rives des étangs comme celles des cours Orchis ustulata, ou Orchis brûlé. Le long de d’eau voient fleurir en été une oenothère : certains chemins forestiers fleurit Listera Oenothera biennis (Nachtkerze), aux ovata (Orchidée). nombreuses variétés (Baggerloch – Lutterbach – Pulversheim). Pour être à peu près complet, il faudrait parler des milieux humides, des zones marécageuses Terminons cette étude par les espèces assez (par ex. Mar-en-Bois, Rothmoos à rares, voire rares, ou aux exigences très Wittelsheim), avec leurs roselières, les spéciales, telle la flore halophile du voisinage phragmitaires, peuplements de Phragmites, des terrils des mines de potasse. les phragmitaires, peuplements de Phragmites Dans le groupe des plantes peu répandues, communis, au sol souvent stérilisé par le sel, citons la phalangère (Anthericum liliago – ce qui a entraîné la mort de nombreux arbres ; Lutterbach), l’œillet superbe (Dianthus sur leurs troncs morts comme sur les superbus). Parmi les plantes rares, inconnues survivants grimpe la douce-amère, ce qui en Allemagne et en Suisse, remarquons donne un aspect particulier au paysage l’unique station française(avec la Harth) de végétal (bordure du Mar-en-Bois, lieu dit Viola Schultzii, la rare Viola montana, ou encore le Peucedanum des marais poussées, voire un certain degré de (P.palustre). spécialisation.

Enfin, à l’Est de Wittelsheim, sur sol graveleux, Les mousses et les lichens, végétaux se trouve la seule station haut-rhinoise symbiotiques et colonisateurs, constituent des d’Ornithogalum pyrenaicum ssp.flavescens ou micromilieux dont l’étude écologique se aspergette, un des derniers avant-postes avec révèle des plus intéressantes. les 3 à 4 du Bas-Rhin de cette sud- 1. La strate muscinale comprend de occidentales, inconnue en Allemagne (G.Ochsenbein). Par ailleurs, le Nonnenbruch nombreux genres, certains vivant sur s’enrichit de quelques variétés ou formes le sol (espèces terricoles, en coussinets comme Leucobryum intermédiaires intéressantes dont : Roripa prostrata + R.amphibia / R.silvestris à (L.glaucum) à l’aise en milieu acide ou Lutterbach, Viola Schultzlii / V.Riviniana, près en grosses touffes comme Polytrichum ; la Funaire hygromérique Lutterbach (V.Rastetter 1955), Corydalis (Funaria hygrometrica) colonise les integrata (forêt de la Thur près Pulversheim). emplacements d’anciens feux de Quant à la flore propre dite, elle se caractérise bûcherons ; le genre Hypnum par les espèces suivantes : la soude (Salsola (H.cupressiforme) se développe parmi Kali), Chenopodium glaucum, des arroches les feuilles mortes, et avec d’autres, (Atriplex hastata, A.salina). Depuis 1952 furent vivent sur le bois, les souches, les signalées dans la région qui nous intéresse les troncs (espèces lignicoles) ou les plantes suivantes, toujours parmi la flore écorces (espèces corticoles). Parmi les halophile des terrils : Atriplex heterosperma plantes aquatiques du Baggerloch on Bge (Rastetter 1954-1959) ; des graminées : peut trouver la mousse du genre Atropis distans (L.) Griseb (Simon 1958) et Fontinalis. Hordeum jubatum (L.) ( Engel 1956), une 2. La strate lichénique avec de nombreux composée subméditérranéenne en voie de genres dont Parmelia, Evernia, naturalisation : Inula graveolens (L.) (Simon Xanthoria, Cladonia, comprend 1954), enfin une caryophyllacée : Spergularia également des espèces terricoles, marginata Kittel (Simon 1954-1955-sur les lignicoles, corticoles, voire rupicoles terrils).Cette strate herbacée serait (vivant sur des rochers ou des incomplète sans les Ptéridophytes (Fougères), casemates de la dernière guerre). les plus fréquentes étant la grande fougère 3. La strate cryptogamique mâle (Dryopteris filix mas.) la fougère femelle (champignons). Nous laisserons (Athyrium filix femina) et en quelques très volontairement de côté es rares stations croît la fougère aigle, une champignons inférieurs, pour nous silicicole (Pteridium aquilium – forêt de intéresser aux champignons qualifiés Pfastatt). de supérieurs (du fait de leurs filaments mycéliens cloisonnés). e) Les strates muscinales, lichénique et cryptogamique L’écologie des champignons supérieurs a été très bien étudiée par G.Becker (thèse 1954 – L’étude de ces strates de végétation un peu Besançon). Il existe dans nos forêts trois sortes particulière requiert de celui qui veut de champignons d’après leur mode l’aborder des connaissances déjà assez d’existence : a) Les Saprophytes se développent sur en plus répandue des promenades des matières organiques mortes ou à cheval par les sentiers forestiers. inertes (bois, feuilles mortes, humus, Sur le crottin pousse dans excréments, cadavres animaux et certaines conditions un Coprin : végétaux). Coprinus sterquilinius. Les b) Les Parasites se développent sur des excréments humains ou de organismes vivants (très souvent des carnivores portent parfois une arbres, parfois des plantes herbacées flore particulière à Strophaires. ou d’autres champignons). Souvent ils se développent le long c) Enfin les Mycorhiziques menant un des sentiers quand l’excrément a mode de vie particulier qui déjà disparu, indiquant une zone correspond à un commensalisme( vie riche en matière organique. côte à côte, dans un milieu, profitant Stropharia aeruginosa se des mêmes aliments), à bénéfices développe sur des débris d’os et réciproques, soit à une véritable de plumes d’une corneille ou symbiose. En effet, par mycorhize, on d’une buse. entend une association plus ou moins - Les humicoles ou champignons de étroite entre les racines d’un arbre et l’humus sont très répandus sur les le mycelium d’un champignon. débris végétaux en décomposition. Sur le terreau de Reprenons ces 3 grands groupes : feuilles et d’aiguilles de résineux a) Les Saprophytes : ces champignons on peut trouver plusieurs espèces vivent de matière organique en de Lépiotes, Clitocybes, décomposition, parfois exclusivement Rhodopaxilles, Volvaires et dans un milieu donné, parfois ils sont Agarics. tributaires d’une température précise Comme humicole pur, citons Lepiota ou d’un degré hygrométrique donné, rhacodes, alors que Lepiota procera est plus parfois ils sont très spécialisés, parfois ubiquiste(coulemelle) aimant les milieux polyphages. D’après leur substratum, acides (lande à l’Ouest de Lutterbach, on peut distinguer diverses catégories V.Rastetter). de saprophytes : - Les fimicoles et coprophiles (sr Le genre Agaricus est bien adapté à l’humus, fumier, excréments) son mycelium y pénètre profondément et - Les humicoles (sur humus) participe à sa décomposition. Les agarics - Les terricoles (sur la terre, mais la poussent parfois en cercles parmi les résineux distinction terre-humus n’est pas ou les feuillus. aisée à établir) La forêt de Lutterbach a vu pousser au cours - Les praticoles (sur débris herbacés des prairies) de l’automne 1975 une quantité appréciable - Les foliicoles (sur feuilles) de Rhodopaxillus nudus (pied bleu), dont l’humus constitue le milieu naturel le plus - Enfin, il existe des saprophytes à milieux spéciaux (cadavres favorable. Toutefois, son développement d’insectes) nécessite des conditions de température et d’humidité bien précises à certains stades de - Les fimicoles et coprophiles bénéficient de la pratique de plus son évolution. Plusieurs récoltes peuvent s’avérer possibles parfois tout l’hiver si le sol printemps et de l’automne correspondre avec n’est pas gelé. une plus grande pluviosité.

Certains automnes fructifient le Clitocybe Enfin, terminons par une espèce lignicole très anisé (forêt de Lutterbach) et au bord des commune : l’armillaire, couleur de miel chemins se développent des Inocybes, près (Armillariella mellea-Hallimasch en allemand) des charmes ou des tilleuls dont les feuilles se qui existerait sous différentes races selon les décomposent dès leur chute. essences attaquées, ce champignon se comportant en saprophyte sur les souches

- Les lignicoles : parmi ceux-ci on mortes en en parasites sur les arbres vivants distingue des lignicoles externes qu’il tue. Après la mort de l’arbre parasité, il se servant du bois comme d »un redevient saprophyte et le digère support, et des lignicoles internes complètement. Ce comportement assez dont le bois est digéré par des particulier dépendrait du milieu environnant. substances chimique (enzymes) élaborées par le champignon. - Les foliicoles : ces champignons sont tous générateurs d’humus, Il existe aussi des lignicoles purs : Pleurotes, donc des humigènes. Ils sont bien lentins, polypores au sens large, sur bois mort représentés par les genres qu’ils assimilent, alors que d’autres ont besoin Marasmius, Mycena et Collyba du bois déjà décomposé par des entre autres. Les Mycènes sont prédécesseurs, nécessitant de l’humus de très communs et se développent lignine comme certains volvaires sur les feuilles, au dépend du (V. bombycina, V.volvacea) ou les Mycena. limbe, l’enveloppant sans y Presque tous les Porés (Polypores) envoient pénétrer, alors que les Marasmes leur mycelium à l’intérieur du bois qu’ils s’implantent dans les tissus digèrent ; les Marasmius font de même. Un foliaires envoyant leur mycelium Lenzites enveloppe le bois, l’entoure de son dans les faisceaux libéro-ligneux. mycelium et se détache entier de son support - Pour en finir avec les Saprophytes, alors qu’un Daedalea ne peut être détaché signalons des espèces inféodées à sans détruire la souche ou le champignon. des milieux très particuliers, par Coriolus versicolor envahit le bois mort qui se exemple une morille (Morchella détache du reste et laisse une plaie béante. rotunda) caractéristique des milieux azotés et même sucrés, a Pour les grands lignicoles comme Pholiota et été trouvée en Alsace poussant Hypholoma, le mycelium interne fait d’autant sur une place de béton armé plus de ravage dans le bois que leur taille est (aussi au voisinage de maisons plus grande. brûlées, sur la terre souillée de sang des tranchées, dans des Ces champignons apparaissent le plus souvent trous d’obus, partout où elles en automne et fructifient quand leur support trouvent des matières organiques est gorgé d’eau ; les plus tardifs, comme les très concentrées). Pleurotes peuvent se reproduire en hiver, gelant et dégelant sans dommages. D’autres A côté des amateurs de glucides, il y a les parts, les espèces lignicoles pérennantes amateurs de potasse, prospérant à voient leur maximum de croissance du l’emplacement d’anciens feux, de bois brûlés, de cendres. D’autres préfèrent les glands ou bouleau, ce parasite prépare le les cônes de pins, ou des champignons morts terrain au suivant, très fréquent ou des dépérissants (Volvaria loveyana sur (voisinage du Baggerloch), le Clitocybe nebularis). Piptopore (= Piptoporus betulinus) ou Unguline du bouleau (= Bref, les saprophytes en général recherchent ingulina betulina) qui a la des milieux azotés ou potassiques et, comme particularité de n’attaquer que les micro-organismes du sol, ils participent à la des individus malades, âgés, décomposition de toute matière végétale. affaiblis par une sécheresse ou b) Les Parasites : les champignons traumatisés par le gel (essence à supérieurs parasites sont assez peu bois cassant). nombreux, s’attaquant surtout aux - Enfin, l’Armillaire déjà signalée arbres, alors que les champignons plus haut, se comporte en parasite microscopiques parasites sont très redoutable (vrai fléau pour les nombreux. forestiers dans certaines forêts), - Par exemple, en forêt de Pfastatt, mais rarement dans les forêts sur certains chênes, se développe saines et vigoureuses. Comme le Polypore soufré (Polyporus beaucoup de parasites, elle sulfurens), il est polyphage, pénètre par une blessure, s’attaquant à n’importe quelle contamine et envahit les arbres essence. Il a de grands besoins en voisins en passant par les racines. eau et se développe Mais il y a des arbres qui lui considérablement lors de la résistent, ceci serait dû d’après montée de la première sève ( mai- G.Becker à leurs mycorhizes car juin), puis, lors de la deuxième les arbres isolés sans champignons sève (aout-septembre). Son mode mycorhiziques sont très souvent de vie particulier permet d’être attaqués. saprophyte et parasite, profitant des blessures pour s’introduire c) Les champignons mycorhiziques : on dans son hôte. distingue deux sortes de mycorhizes : - Le frêne peut être attaqué par les mycorhizes ectotrophes, où le Inonotus hispidus, ainsi que les mycelium entoure les racines ou les arbres fruitiers. Son cycle de radicelles d’un feutrage plus ou moins développement est identique à épais ; nous avons là un exemple de celui du polypore soufré, mais ce commensalisme à bénéfices champignon est un parasite pur réciproques et non une symbiose causant la mort de l’arbre avant véritable car il n’y a aucune d’en avoir digéré le bois. pénétration dans la racine. - Citons une Pholiote (Pholiota Les mycorhizes endotrophes, où le squarrosa), vivant en saprophyte mycelium vit à l’intérieur des racines d’un ou en parasite sur la base d’arbres végétal supérieur, et là il s’agit bien d’une vivants ou morts, feuillus ou symbiose (association étroite aux résineux (surtout bouleau), son bénéfices réciproques) (2e sorte de mycelium soulève l’écorce et mycorhizes). provoque la mort de l’arbre. Sur le Beaucoup de champignons très connus et d’une essence alors que d’autres comme appréciés pour leur saveur se classent Cortinarius caerulescens, se rencontrent parmi les mycorhiziques. partout indifféremment du terrain et de l’essence associée. Parmi les genres mycorhiziques ou capables de l’être, on relève : les Amanites Certains hygrophores comme H. penarius dans leur grande majorité, avec Amanita lié au chêne et au charme dans l’Est muscaria (amanite tue-mouche) souvent fructifient considérablement les années en compagnie du bouleau sur terrains de glandée totale, la même remarque siliceux ainsi qu’avec des résineux ; s’appliquant à Amanita caesarea et à A.caesarea (A. des Césars) liée au chêne, Botelus edulis (Cèpe de Bordeaux). parfois assez rare, alors que A. rubescens (A. rougissante), A. spissa (A. épaisse), ou Le noisetier est aussi un arbuste à A. pantherina (A. panthère-mortel) ont hygrophores, alors que Russules et Lactaires se rencontrent en compagnie de une répartition beaucoup plus vaste, de même pour l’amanite la plus dangereuse, conifères, de grands feuillus, de bouleaux et de peupliers. Boletus edulis se la phalloïde mortelle (A.Phalloïdes). rencontre avec beaucoup d’arbres, aussi L’amanite solitaire et la vaginée (A. bien feuillus que conifères, en terrain solitaria, A. vaginata) poussent souvent en neutre ou acide. lisière et le long des chemins forestiers de préférence en association avec le charme B reticulatus est plus acidophile, souvent sur terre de bruyère très acide, fructifie et le chêne. abondamment les années suivant les Les Hygrophores, les Russules et les années chaudes. Lactaires (dont le lactaire délicieux au lait rougeâtre) sont en grande majorité Quand aux Paxilles, P. involutus est saprophyte sur terreau de résineux et mycorhiziques ainsi que les Clavaires, les Chanterelles (Cantharellus) ou Giroles et mycorhizique avec les trembles et les les Trompettes de mort (Craterellus) très peupliers en général. abondantes certaines années. Les chanterelles poussent avec divers Les Tricholomes au sens strict sont tous feuillus (chêne, charme), ainsi qu’avec des résineux, mais il existe des espèces mycorhiziques, ainsi que les Bolets (ou Cèpes, à part quelques rares exeptions), saprophytes (C. neplectus sur terrain les Sarcodons Calodons, la plupart des acide). Basidiomycètes et Ascomycètes L’Hydne ou pied de mouton avec Hydnum souterrains comme la Truffe, alors que les repandum, se rencontre un peu partout Cortinaires ne le sont qu’en partie. en forêt, aussi bien avec des feuillus Le Tricholome équestre est en général qu’avec des résineux. associé aux conifères, alors que Ces quelques exemples, pris parmi Tricholoma columbetta pousse avec le beaucoup d’autres, nous montrent chêne sur silice ; il fructifie tardivement en l’existence de rapports très étroits entre formant des cercles discontinus autour du les champignons et les arbres de la forêt. chêne. Les exigences de ces champignons Certaines essences se caractérisent par le sont très variables, certains sont exclusifs cortège, parfois très étroit, d’espèces de de champignons mycorhiziques sont les champignons les accompagnant, alors que plus sensibles aux maladies et aux pour d’autres le nombre d’espèces parasites tels les ormes en voie de mycologiques peut être vaste et varié. La disparition dans le Bassin parisien et dans plupart des essences forestières ont leurs l’Est (forêt de Wittenheim), les frênes champignons mycorhiziques et couverts de polypores ainsi que des l’implantation d’essences exotiques peut chênes (Mar-en-Bois), les châtaigniers et ne pas réussir faute de champignons les fruitiers, dérivant souvent d’espèces mycorhiziques restés dans le milieu exotiques n’ayant pas chez nous leurs d’origine, alors que pour le Douglas par champignons du milieu d’origine et qu’il exemple, son adaptation aux faut traiter chimiquement. Ces champignons mycorhiziques de l’épicéa champignons participent à la nutrition des (ce sont pratiquement les mêmes arbres, les sols forestiers manquant espèces) facilite sa plantation chez nous. souvent d’azote ; or, tous les champignons ont besoins d’azote, certains le prélèvent Il y a ainsi des associations fongiques dans le milieu (les saprophytes), d’autres caractérisant tel ou tel milieu, donnant le fixent et le concentrent en quantités des indications écologiques très fortes et pourraient ainsi en importantes ; certaines espèces indiquent approvisionner les arbres qui leur que l’essence forestière se trouve dans tel fourniraient certains éléments par leurs milieu à son optimum vital ,se sont des racines. Toujours est-il que, dans une espèces spécifiques d’une essence ; forêt, de très importants phénomènes ont prenons le cas du chêne : deux lieu sous terre et l’existence des hygrophores lui sont liés presque mycorhizes est capitale pour les forestiers, exclusivement (H. penarius et H. russula), les phytosociologues, les mycologues et mais ils ne se développent pas sous tous les écologistes. les chênes. Chez nous, dans l’Est sur terrains graveleux et chauds, bien f) Ceci nous amène à mentionner exposés, où seul le chêne se développe l’existence de la dernière strate, normalement, ces espèces sont même si elle passe facilement caractéristiques de la chênaie originelle. A inaperçue : la strate hypogée avec leur vue, le forestier saura que le chêne toutes les parties souterraines des est ici chez lui et qu’il est inutile d’y végétaux étudiés, favoriser une autre essence. - tels les racines, rhizomes, mycelium de champignons, Plus un arbre héberge de champignons mycorhizes, mycorhiziques et plus ses chances de se - ainsi que d’autres organismes trouver dans la biocénose la plus vivants souterrains : algues favorable sont grandes. Souvent les forêts unicellulaires, Bactéries en grand à nombreux champignons mycorhiziques nombre sont en excellente santé, dépourvues d’espèces parasites comme si leurs espèces mycorhiziques leur conféraient 4. La faune une immunité antiparasitaire et Pour la faune, de plus en plus dérangée par les favoriseraient leur équilibre biologique ; interventions humaines (chasse, circulation, ce qui entraîne que les arbres dépourvus chantiers, gravières), nous nous contenterons traqué sans merci. On en voit les traces, d’en donner les caractéristiques les plus l’afouillement (rôle utiles en brassant et intéressantes et d’en faire un relevé (sans labourant la terre à la recherche de doute incomplet). nourriture) et, par place, des souilles caractéristiques (Mar-en-Bois, Reiningue). A) Les Vertébrés se répartissent en Sa prolifération pose de sérieux différentes classes. problèmes. 1. Classe des Mammifères : assez riche, le plus typique de cette forêt de plaine Comme carnivores : le renard est en voie étant, parmi les grands mammifères, de disparition, chassé, exterminé par le chevreuil. Il affectionne gazage des terriers, piégeage (lutte contre particulièrement un paysage coupé et la rage), alors qu’il y a quelques 7-8ans, il riche en couvert bas. Leur nombre a étant abondant (Lutterbach – Reiningue considérablement diminué du fait notamment). Actuellement on rencontre d’une chasse abusive. En 1972-73, en surtout des terriers abandonnés. Parfois le une heure de promenade en forêt de renard cohabite avec le blaireau, autre Lutterbach, j’en rencontrais une hôte très discret de notre forêt bonne dizaine. Aujourd’hui, en une (Reiningue). journée entière, avec de la chance, j’en vois 1 ou 2, parfois aucun. Cet Des carnivores très petits, difficiles à observer et encore plus à photographier herbivore territorial n’hésite pas à défendre son domaine marqué par les habitent cette forêt : la martre, l’hermine, mâles ou brocards par leurs frottis la belette, le putois. caractéristiques (substances Pour les rongeurs : l’écureuil avec le rat chimiques, écorçage), les hardes étant musqué dans les zones humides souvent conduite par une femelle ou (Lutterbach, Mar-en-Bois) sont assez bien chevrette) expérimentée. Les mises représentés. bas ont en général lieu en mai et la période du rut se situe dans la De temps en temps, on rencontre un deuxième moitié de juillet et la lièvre surtout vers les lisières et dans les première d’août. talus de déblais bordant les plantations de résineux formés par l’humus et les bois Par place, on remarque de jeunes taillis de morts ; on remarque des terriers de lapins chênes et surtout de charmes ayant subi de garenne, ce qui est réconfortant après l’abroutissement par les chevreuils, ce qui l’épidémie de myxomatose. Le décapage leur donne une forme typiquement au bull-dozer de la couche d’humus qui a arrondie, en coussinets (Lutterbach, mis des siècles à se former et de toute Reiningue, Wittelsheim). Le chevreuil est matière végétale, vivante ou morte de la très sensible, surtout pour sa nourriture, surface du sol est encore une erreur au aux changements du milieu. La gestation point de vue écologique. est retardée, subissant une période de repos pendant la mauvaise saison. D’ailleurs, depuis peu, on ne désouche plus, les vieilles souches évoluant en L’autre mammifère ongulé d’un poids humus, enrichissant par les produits de nettement supérieur est le sanglier, leur décomposition le sol forestier. omnivore, surtout nomade et de passage, D’autres micromammifères, comme les - Eperviers d’Europe en vol le loirs, lérots, muscardins, campagnols et 12.6.71 au-dessus du Rothmoos mulots sont plus difficiles à observer. Pour - Milan noir : 1 couple nicheur. étudier leurs populations, les dénombrer, Observé journellement en chasse il faudrait procéder par piégeage et au-dessus de l’Ochsenfeld, des marquage des individus. gravières de Reiningue, du Rothmoos, de Richwiller Comme insectivores : signalons la Taupe, - Huppe fasciée, assez fréquente à la musaraigne, le hérisson. Lutterbach – Espèce revue au Classe des oiseaux : c’est l’avifaune qui printemps 73 et 74 jusqu’en été l’emporte sans doute quant au nombre de 93 ses espèces. Il y aurait en effet environ - Poules d’eau : une dizaine sur 120 espèces d’oiseaux dans notre forêt. La bassin de décantation du majorité des observations suivantes sont Rothmoos en octobre 71 dues à Patrick Foltzer, le restant à mes - Grèbes castagneux, environ 8 au propres observations. Elles débutent au même endroit. Egalement sur la printemps 1971 au mois de mai : P.Foltzer Doller en hiver a observé : - Râle d’eau : cris entendus au Rothmoos le 28.10.71 et observés - Vanneaux huppés (3 nids – au Mar-en-Bois au printemps Rothmoos) 1974 - Chevalier sylvain : importants - L’année précédente (en 1970) passages au Rothmoos P.Foltzer nous signale - également de passage : 1 l’observation dans les marais et chevalier combattant, 2 chevaliers régions humides du Nonnenbruch gambettes, 1 chevalier arlequin, 3 de quelques espèces chevaliers guignettes intéressantes, dont : 13 chevaliers - 2 petits gravelots (toujours aboyeurs le 24.8.70, 1 chevalier Rothmoos) gambette le 21.9.70 ; en - 1 femelle et 6 jeunes de poule septembre-octobre 70, les d’eau (Mar-en-Bois – Rothmoos) bécasseaux variable, minute, - Foulques : plusieurs couples – cocorli et de Temminck. Rothmoos - Pie-grièche écorcheur dans jeune En outre, il relève, de fin juillet à fin octobre pinède – Rothmoos ainsi que la 1970 la présence du grand et du petit locustelle tachetée et l’accenteur gravelot, de la barge rousse, de la bécassine mouchet des marais, du héron cendré, du grèbe - Coucous très fréquents castagneux, du grèbe huppé du grèbe à cou - Sarcelle d’hiver nichant au noir, des colverts, de 3 fuligules milouins et de Rothmoos, ainsi qu’en d’autres passage de sarcelles d’été. secteurs du Nonnenbruch - Il a démontré 18 espèces

- Bergeronnettes grises, communes d’échassiers (dont 15 limicoles) à Rothmoos – Baggerloch quelques km de Mulhouse, ce qui - Bruant des roseaux (fréquent) – prouve la richesse de cette plusieurs couples nicheurs avifaune des milieux humides sans parler des nombreuses espèces bien exposées, assez dégagées (landes ou plus ou moins typiquement coupes par exemple). forestières. L’orvet qui se range parmi les lézards se Il arrive qu’en hiver sur la Doller on puisse rencontre assez fréquemment, se faufilant observer la famille des pics, bien représentés parmi les feuilles mortes. avec le pic épeiche, vert, cendré, mar, Classe des Batraciens ou Amphibiens : avec 2 épeichette et même plusieurs couples de pics ordres : les Anoures (sans queue à l’état noirs nichants (Lutterbach, Pfastatt, adulte) représentés par les grenouilles, Wittelsheim). crapauds et rainettes et les Urodèles (adultes Les rapaces comprennent en plus de ceux déjà pourvus d’une queue) essentiellement mentionnés : la buse, le milan royal (observé représentés par diverses espèces de Tritons. plusieurs hivers de suite (1974-75), la crécerelle, le busard des roseaux, le balbuzard Notre département est une des zones les plus riches, peut-être la plus riche en batraciens (automne 2010). d’Europe. Parmi les nocturnes : diverses espèces de chouettes et des hiboux (moyen-ducs entre Le Nonnenbruch compte parmi ses habitants : autres). - La grenouille verte (Baggerloch), la Beaucoup de passereaux, représentés par grenouille rousse, qui pond très ère diverses espèces de mésanges égaient le tôt (1 ponte début mars en 1976 – Richwiller, pontes ayant la Nonnenbruch : mésange bleue, charbonnière, nonnette à longue queue, et en hiver (janvier particularité d’être flottantes et 1976) la mésange huppée avec le grimpereau insubmersibles) - La grenouille agile ayant aussi et le roitelet triple bandeau. pondu en mars 1976 – gravière Inutile de nous étendre davantage, nous n’en Wittelsheim finirions pas avec les geais, corneilles, pies, - La rainette (Baggerloche – sittelles, grives et autres espèces communes, Richwiller) nous en oublierions sûrement quelques-unes. - Plusieurs espèces de crapauds dont le crapaud commun qui se Classe des Reptiles : les espèces de cette ressemble en grand nombre pour classe ne sont pas très nombreuses, bien que la reproduction en mars de certains de leurs représentants se rencontrent certains endroits comme la forêt de temps à autre. de Wittelsheim (pontes en Parmi les Ophidiens (serpents) la couleuvre à chapelets), le crapaud calamite et collier fréquente les endroits humides le crapaud vert se reproduisent (Baggerloch – Dollerbächlein – Doller). La plus tard (mai – Richwiller) coronelle lisse fréquente le ballast de la voie De plus, on peut rencontrer le crapaud ferrée du tram-train accoucheur et le pelobate (Lutterbach – Les Lacertiliens (lézards) sont plus nombreux Feldkirch) ainsi que plusieurs espèces de en espèces et en individus avec le lézard gris, tritons, dont le triton crêté (Richwiller ; le lézard vert (Reiningue), le lézard agile travaux de F.Reck (Reiningue)). (Baggerloch), ces animaux aimant les zones Les invertébrés : à côté des Vertébrés, les buprestidés ; d’autres sont Invertébrés constituent un monde, tant sont aquatiques (dytique). nombreux leurs espèces et les individus de ces espèces. Il est, par conséquent, impossible de A propos de Coléoptères, le Dr C. s’étendre et d’être complet, nous nous Sorel a signalé l’existence en 1969 contenterons d’en signaler les plus dans le biotope particulier du importantes subdivisions avec quelques voisinage d’un terril des mines de représentants. potasse près de Richwiller de quelques espèces halophiles Schématiquement, ces invertébrés comme Pogonus chalceus, comportent : L’embranchement des Acupalpus elegans et un Anthicus Arthropodes (à appendices articulés) avec : assez abondant, peut-être A. a) Le sous embranchement des humilis. Malheureusement, cette Chélicérates (sans antennes) dont : station fut bouleversée par des - Les Arachnides (araignées), travaux autour du terril au nombreuses espèces dont les printemps de 1972 ; le genre Epeires, les Opilions ou Faucheurs Pogonus a survécu, ce qui ne - Les Acariens (dans le sol, humus, semble toutefois pas être le cas feuilles mortes sur les troncs), pour Acupalpus elegans, ni pour espèces nombreuses dont les Anthicus humilis. Tiques qui sont parasites. - Les Diptères (avec des mouches, b) Les Antennates se répartissant en Eristale, Volucelle, et des trois classes : moustiques dont gigantesques - D’abord celle des Insectes : la Tipulés) faune entomologique est très - Les Hyménoptères (avec Abeilles, riche et variée, aussi bien en guêpes, Frelons, Ichneumons, milieu terrestre qu’aquatique. s’attaquant aux larves des Dans le sol, sous les pierres, dans xylophages et donc très utiles) l’humus vivent des Aptérygotes - Les Hémiptères (surtout des (sans ailes) comme les punaises terrestres, Pentatomes Collemboles, Protoures, Diploures et Graphosomes), mais aussi et Thysanoures appartenant à la aquatiques : Gerris, Ranatres, microfaune du sol, avec des vers Notonectes, Naucoris (Baggerloch) et de nombreux microorganismes - Les Orthoptères : sauterelles et - Les Ptérygotes (insectes ailés) criquets dans les endroits très comprennent de nombreux ensoleillés (landes) ordres. Parmi ceux-ci : la foule des - Les Odonatoptères, nombreuses Coléoptères (hanneton, bousiers espèces de libellules (calopteryx, ou geotrupe, Rhagium, Lucane ou Agrion, grandes espèces bleues ou cerf-volant, silphe à corselet à ailes tachetées) rouge, lepture, procustre, cétoine, - Enfin, les Lépidoptères ou etc…). Plusieurs espèces sont papillons avec leurs larves : les xylophages et s’attaquent au bois, chenilles dévoreuses de plantes ; notamment parmi les scolytidés et parfois ravageuses des essences forestières. Au début du printemps, volent les Citrons, et faune pose des problèmes plus délicats que Paons du jour, après un hivernage celle de la flore, les animaux souvent fuient, dans une cache bien abritée, puis ont un comportement particulier, certains les Aurores précédant les Piérides, étant nocturnes ; aussi faut-il savoir Damiers, Céphales, Tabacs interpréter leurs traces (poils, plumes, débris d’Espagne, Silènes et autres de coquilles, squelettes, nids, terriers, gîtes Vulcains, pendant toute la belle divers, pelotes de réjection, végétaux rongés saison. Une seule fois, j’ai pu etc…) les marques qu’ils laissent de leur observer la femelle de la Zérène passage pour identifier les espèces même si du Groseiller (Abraxas elles ne sont pas directement observables. grossulariata) sur un groseiller sauvage en forêt de Lutterbach.

Rapidement un mot sur les mille-pattes ou 5. L’importance et le rôle Myriapodes que l’on voit sous les écorces, d’une forêt suburbaine dans les souches comme les deux Diplopodes suivants : l’Iule qui s’enroule ou le Glomeris Les forêts au voisinage des villes ou forêts qui se roule en une bille parfaite. Certains suburbaines, ainsi que celles entourant Chilopodes préfèrent vivre au sol, dans certaines agglomérations ou forêts l’humus, sous les pierres comme le brun périurbaines ont été jusqu’ici peu étudiées Lithobius ou le jaune et grêle Géophile. quant à leur influence dans l’environnement urbain. Un unique représentant terrestre de la classe des Crustacés se rencontre sous les pierres, Des études sont cependant en cours, d’autres feuilles, dans les endroits humides du fait de ont déjà livré leurs résultats. Essayons d’en sa respiration branchiale : le très commun dégager l’essentiel. cloporte. a) Rôle des forêts dans la concentration Après la pluie, les chemins forestiers en CO2 (dioxyde de carbone) de l’air : permettent de voir les traînés brillantes du mucus laissées par des Mollusques Les réactions chimiques de la photosynthèse, Gastéropodes très fréquents : escargots, caractéristique des plantes vertes, produisent limaces rouges, brunes ou noires. de l’oxygène et consomment le « gaz carbonique » de l’air. Les forêts, pour les Cette brève et incomplète étude faunistique plantes terrestres, sont responsables pour 2/3 aura quand même permis de se faire une idée de la photosynthèse générale. A l’échelle de sa richesse, due à la variété de milieux ou géologique, notre air s’enrichit en oxygène et biotopes du Nonnenbruch, depuis les le carbone est stocké (sous forme de fossiles, marécages, étangs jusqu’aux landes plus de pétrole, de charbon). Mais depuis environ sèches en passant par des milieux salins. un siècle, certains cycles naturels sont Comme la végétation, la faune montre une perturbés, notre air s’enrichit en CO2 par la organisation verticales et horizontales, mais consommation industrielle du carbone fossile beaucoup plus souples ; par ailleurs, faune et (pétrole, charbon). flore sont intimement liées (nourriture, abri) ; de plus, la flore dépend plus étroitement du Les plantes vertes peuvent donc jouer un rôle climat, ainsi que du sol. La découverte de la de régulation, en absorbant le CO2 en excès, surtout les forêts, du moins à court terme, car à long terme le problème se pose la forêt freine l’étalement des différemment, le taux de CO2 de l’air risquant poussières et d’après des mesures de se trouver augmenté avec des et des travaux récents, on conséquences écologiques encore constate qu’il vaut bien mieux imprévisibles (réchauffement climatique). avoir une forêt au voisinage d’une usine libérant des poussières A l’échelle locale, le rôle d’une forêt sub- ou qu’une prairie. périurbaine a été peu étudié dans ce domaine, mais il semble que ce rôle dans la régulation On n’a pratiquement jamais tenu compte de du CO2 atmosphérique ne soit pas cet effet des forêts dans l’aménagement des négligeable, ce seraient même les forêts les zones industrielles, au contraire, on supprime plus productives qui seraient les plus efficaces gaillardement des forêts pour agrandir ou dans la régénération de l’oxygène de l’air. implanter lesdites zones industrielles. (Projet du Wendlingswald – Ungersheim – b) Rôle des forêts dans la pollution de Pulversheim – Wittelsheim). l’air - D’autre part, la forêt est Se pose à ce niveau le problème des responsable d’un effet de poussières et de polluants chimiques. Les captation (en cours d’étude), de industries libèrent souvent des poussières et rétention des poussières. On a des particules diverses (mines de potasse, constaté en trois semaines une cimenterie, etc …). La circulation des véhicules interception de 44% de en ville, l’activité humaine dans son ensemble l’ensemble des poussières reçues libèrent et transportent des substances par un peuplement feuillu adulte. chimiques mais aussi des microbes - Certains polluants chimiques sont pathogènes. véhiculés sous forme de A ce propos, la forêt suburbaine revêt une brouillards ou d’aérosols, d’autres grande importante puisque, par ses surfaces sous forme de poussières. de contact très élevées, elle capte ces Les composés fluorés sous forme peu soluble poussières et particules, les arrête, les fixe (les s’accumulent sur les parties aériennes des essences forestières ayant une efficacité plantes. La forêt arrête ces poussières et variable due à leur feuillage). composés toxiques et peut en subir des D’après des mesures effectuées, on avance les dégâts, voire la destruction. Ce qui est vrai chiffres suivants : 32t/ha pour l’épicéa, mais pour les poussières l’est aussi pour les 68 t/ha pour un feuillu comme le hêtre. polluants gazeux.

D’ailleurs, l’action de la forêt se manifeste Le rôle du Nonnebruch comme dépoussiérant sous deux aspects : et dépollueur de l’atmosphère est brillamment souligné par un article paru dans - D’abord la forêt est responsable le journal « L’Alsace » du 9.5.76 intitulé d’un effet aérodynamique par « Beaucoup trop de sel ce matin-là… » le ciel modification de la vitesse du vent de Staffelfelden ayant été envahi par d’épais au contact des arbres. Une forêt nuages de poussières gris jaunâtre chargés de rend un paysage plus « rugueux » sel, ceci par la simple remise en route d’un et augmente la rugosité de celui-ci puissant ventilateur. Les habitants de la région de Staffelfelden, leurs maisons, jardins et pourrait provoquer le retour du vergers furent alors gratifiés de ce cadeau polluant au sol. agressif et empoisonné sous l’effet d’un petit Le plomb (issu de la combustion des vent du Nord-Est. carburants automobiles) également est stocké L’anhydride sulfureux (SO2) libéré par la en quantité importante dans les tissus combustion des charbons et fuels dans l’air végétaux, souvent sans effet toxique visible. Il des villes peut devenir très nocif, selon les est cependant très toxique pour l’homme et conditions atmosphériques, alors que les les animaux, des risques d’intoxication en plantes absorbent, stockent et assimilent en chaîne existent, augmentés lorsque le bétail se partie ce gaz qui leur est pourtant toxique nourrit de fourrages contaminés. Un écran (pluies acides). végétal en bordure des routes s’avère dans ce cas efficace dans la protection des zones Forêts et espaces verts jouent-ils un rôle avoisinantes (pâturages par exemple). épurateur efficace ? Toujours est-il que l’on sait d’après des travaux récents que le bouleau, le hêtre ou le charme peuvent décharger l’air de faibles quantités de SO2, d) Le bruit et son amortissement par la l’orme (Ulmus effusa), le saule marsault (Salix végétation caprea) ou le robinier étant moins efficaces. On sait que les écrans boisés freinent, parfois arrêtent la propagation des ondes sonores. On D’autres polluants comme l’ozone (O3) sont à l’étude, O3 provient de l’action de la lumière admet que le peuplement végétal agirait par sur les gaz d’échappement automobile et l’importance de ses surfaces et la propagation du son diminuerait proportionnellement à la peut-être absorbé et réduit par les plantes surface foliaire. Des études ont déjà été (d’après des travaux de laboratoire). entreprises dans ce domaine et on sait que Mais dans ce domaine comme dans d’autres, il des atténuations fortes de l’ordre de 16dbA convient de se méfier des conclusions hâtives, pour une épaisseur de 30 m de fourrés sont tout en se réjouissant de constater l’ouverture susceptibles d’être obtenues (12dbA de perspectives intéressantes. correspondant à une diminution du bruit de l’ordre de 50%). D’ailleurs, en Allemagne

- Il existe aussi des polluants depuis des années, plus récemment en absorbés et stockés sans France, on équipe les autoroutes d’écrans transformation par les plantes. antibruits qu’il conviendrait également de Ceci est le cas du fluor très mettre en place dans quelques années autour toxique pour la végétation (libéré de l’agglomération mulhousienne quadrillée par diverses industries : d’autoroutes. aluminium, engrais phosphates, briqueterie…). Il est absorbé par La forêt a aussi un rôle à jouer dans la lutte les feuilles, s’y accumule et contre les microbes. On a dénombré détermine des nécroses 4.000.000 de germes microbiens par m3 d’air caractéristiques, les feuillus étant dans un grand magasin, près de 600.000 sur moins touchés que les résineux/. les grands boulevards et 50 seulement en Le lessivage des feuilles en place forêt de Fontainebleau : ces chiffres se ou tombées au sol par la pluie passent de commentaires. Des travaux soviétiques récents ont montré l’enrésinement presque systématique. On a que les feuilles de certaines essences pratiqué des coupes à blanc, rasant tous les forestières peuvent avoir un effet bactéricide feuillus sur de vastes surfaces, même quand le par émission de substances chimiques. Le procédé ne se justifiait pas pleinement. Le frêne ou le tilleul seraient peu efficaces dans remplacement systématique des feuillus en ce domaine, d’autres essences beaucoup plus. plaine par des résineux est un non sens du point de vue écologique car il en résulte un Ce rôle connu est évidemment d’un intérêt bouleversement du milieu naturel, aux capital dans l’aménagement d’espaces verts conséquences très souvent néfastes, urbains et la protection des massifs forestiers notamment pour le sol et les êtres vivants périurbains. On pourrait encore signaler (coupe de peupliers remplacés par des d’autres aspects du rôle des arbres et des résineux à Lutterbach, auxquels furent ajoutés forêts en ville et à leur voisinage comme leurs heureusement quelques feuillus). influences sur le microclimat, le régime des eaux et surtout celui de plus en plus important Autre exemple : le massacre du Rothmoos en de la détente ; des loisirs, de la découverte et 1973. Les résineux le plus souvent utilisés de la connaissance de la nature. après ces coupes sont l’épicéa (le moins exigeant), le pin noir d’Autriche, le pin Mais pour que les forêts péri- et suburbaines sylvestre. Il y a aussi par place, ça et là, puissent remplir leur rôle aux multiples quelques rares mélèzes et quelques douglas aspects, il faut avant tout les protéger parce en forêt de Lutterabch. qu’elles sont elles-mêmes sensibles à la pollution, les agrandir, les ré-implanter ou les Le Nonnenbruch comprend des forêts implanter là où elles ont disparu ou n’ont communales dépendant essentiellement de la jamais existé. mairie des communes concernées (forêt de Lutterbach par exemple), des forêts privées et De plus en plus de gens heureusement ont de grandes surfaces appartiennent aux Mines conscience des bienfaits de la proximité d’un de potasse d’Alsace ou M.P.D.A. auxquelles massif boisé, les conditions de vie dans notre notre forêt a déjà payé un lourd tribut. Les société urbanisée et industrielle ont mis en Mines ont leur propre service forestier alors évidence le rôle de la forêt dans la protection que pratiquement tout le reste de la forêt à de la qualité de l’environnement et de la vie, part les parcelles privées, est régi par l’Office dans le maintien d’un équilibre biologique National des Forêts ou ONF créé en 1966. tolérable pour l’Homme. Heureusement que sous l’effet des groupes de protection de l’environnement et du réveil de 6. La survie du l’opinion publique, le vent s’est mis à tourner Nonnenbruch est-elle et que l’on s’achemine vers une mise en encore possible ? veilleuse de cette politique d’enrésinement. En effet, les M.D.P.A. depuis peu d’années Avant de conclure cette étude du font des essais de reboisement en feuillus : Nonnenbruch, on ne saurait mettre en chêne, merisier entre autres. Ailleurs évidence les dangers, les menaces qui planent (Rotscheuer) on fait des plantations de feuillus sur sa survie. Ceux-ci sont de divers ordres. nobles : frêne, merisier, noyer.

D’abord, pendant passablement d’années Ceci peut être que bénéfique à la forêt car son notre forêt a souffert de la politique de sol déjà acide ne ferait que s’acidifier davantage par l’arrivée des résineux Rhône, devant relier Strasbourg directement à générateurs d’humus acide pauvre en Belfort à travers le Nonnenbruch. Des dizaines fermentations et peu favorable à la vie d’hectares sont sacrifiés pour pour un gain de bactérienne, ce qui entraînerait une quelques minutes et une dépense de plus de dégradation des sols. C’est la cupidité un milliard d’euros (juin 2011) ! humaine, une politique à courte vue sacrifiant Dans cette étude, nous avons tenté de mettre le milieu naturel à une rentabilité rapide, à court terme, qui a failli mettre en jeu la survie l’accent sur la richesse floristique et du Nonnenbruch, les résineux croissant faunistique du Nonnenbruch qui constitue, pour tout naturaliste, une mine inépuisable beaucoup plus vite que les feuillus (surtout les producteurs de bois de qualité). Le problème d’observations, de connaissances nouvelles et se pose bien sûr en termes tout à fait pour tout amateur de nature, de surprises enrichissantes, de spectacles passionnants. Ce différents quand le sol forestier a été stérilisé et rendu inapte au développement des milieu vaut la peine d’être défendu et feuillus. D’ailleurs aux abords des installations sauvegardé pour ces multiples raison et ceci particulièrement du fait de sa situation des mines de potasse, on note des affaissements de la plaine par tassement des géographique aux portes de la ville de galeries d’exploitation, d’où la transformation Mulhouse et au milieu des quinze communes industrielles ou petites villes dortoirs.[…]. de certaines régions en ried artificiel noyé.

Enfin, l’action néfaste du sel gemme des résidus d’exploitation (terrils des M.P.D.A. peu Jean-Paul WEBER esthétiques dans le paysage) et des eaux salées des industries potassiques et chimiques ont stérilisé certains sols du Nonnenbruch entraînant la mort des arbres et l’installation de zones marécageuses comme au lieu-dit « Mar-en-Bois » à Wittelsheim.

Les résineux susceptibles de pomper davantage d’eau du sol grâce à leur feuillage persistant et surtout ces déversements de résidus chimiques constituent des menaces graves pour la nappe phréatique. Les sols sont souvent très perméables, d’où danger de l’absorption. Et de la propagation des pollutions chimiques diverses par les eaux souterraines (langue de sel dépassant Colmar). Une part importante du sel résiduel est évacuée vers le Rhin, mais il reste sur place, dans le Nonnenbruch précisément, d’énormes quantités de sel dans les terrils marneux. En plus de l’extension des zones d’activités commerciales et industrielles (Wittelsheim), plane sur notre forêt une autre épée de Damoclès : la 2ème phase du TGV Rhin-