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Revue d’information trimestrielle de la La Vie de la Fondation Fondation de la Libre Le mot du président 1 Parution : Juin 2015 Numéro 56 Les Rendez-vous de l’histoire à Blois 1 Hommage national à Jean-Louis Crémieux-Brilhac 2 En couverture : Une vie au service de l’homme 4 Jean-Louis Crémieux-Brilhac présente l’un des tracts réalisés par son service Réunion en hommage à Jean-Louis Crémieux-Brilhac 5 au Commissariat de l’Intérieur, le 3 décembre 2008 à son domicile pari - Le 70 e anniversaire de la bataille de l’Authion 6 sien (photo AFP/archives - Stéphane de Sakutin). La réunion des délégués 7

© Fondation de la France Libre Le 18 juin à 7 Histoire Romain Gary, « artisan de la dignité humaine » 8 Radicofani en 1944, le courage d’oser, (1 re partie) 11 La libération du territoire et le retour à la République 17 Pour un autre 8 mai 18

Livres 19

In memoriam 21

Carnet 26

Dans les délégations 28

N° commission paritaire : 0212 A 056 24 N° ISSN : 1630-5078 Reconnue d’utilité publique (Décret du 16 juin 1994) Il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement la présente publication – loi du 11 mars 1957 – sans autorisation de l’éditeur. RÉDACTION, ADMINISTRATION, PUBLICITÉ : 59, rue Vergniaud - 75013 Paris MISE EN PAGE, IMPRESSION, ROUTAGE : Tél. : 01 53 62 81 82 - Fax : 01 53 62 81 80 Imprimerie LA GALIOTE-PRENANT - 01 49 59 55 55 E-mail : [email protected] Dépôt légal 2 e trimestre 2015 VERSEMENTS : CCP Fondation de la France Libre DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Général Robert BRESSE Paris CCP La Source 42495 11 Z Prix au N° : 5 Euros RÉDACTEUR EN CHEF : Sylvain CORNIL-FRERROT Abonnement annuel : 15 Euros CONCEPTION GRAPHIQUE : Bruno RICCI

© « BULLETIN DE LA FONDATION DE LA FRANCE LIBRE ÉDITÉ PAR LA FONDATION DE LA FRANCE LIBRE » LA VIE DE LA FONDATION

Le mot du président

Plusieurs grands Français Libres nous ont quittés en ce printemps 2015, trop pour les évoquer tous dans ce billet. J’ai une pensée pour tous, et particulièrement pour Jean-Louis Crémieux-Brilhac, le délicieux Jean-Louis, l’historien de la France Libre et le président honoraire de notre comité scientifique, ainsi que pour Roger Nordmann. Tous deux fréquentaient assidûment le siège et se rendaient toujours disponibles pour la Fondation. Un passé glorieux est en train de nous quitter. Est-ce à dire que nous n’avons pas d’avenir ? J’ai la faiblesse de penser que nous en avons un et qu’il est porté par nos délégués. Leur engagement permet à la Fondation de la France Libre de rayonner, de n’être pas qu’une structure parisienne immobile. Je mesure leurs difficultés. À présent que le siège est pérennisé dans des locaux modernes et adaptés, la pérennisation de nos délégations devient la priorité de l’exercice 2015-2016.

Général Robert Bresse

Les Rendez-vous de l’histoire à Blois Comme l’année précédente, la Fondation de la France Libre sera présente aux Rendez-vous de l’histoire à Blois, dont la 18 e édition se tiendra du 9 au 11 octobre 2015 et aura pour thème : « les empires » . Un grand choix de livres et de revues édités ou diffusés par la Fondation sera disponible sur son stand, au salon du livre. Toutes les per - sonnes intéressées par le thème 2015-2016 du Concours national de la Résistance et de la Déportation, qui a pour intitulé « Résister par l’art et la littérature » pourront venir s’y renseigner et découvrir le dossier numérique qui sera mis en ligne à la rentrée, comme chaque année, sur notre site Internet, www.france-libre.net , pour compléter le dossier pédagogique adressé à tous les collèges et lycées. La table-ronde organisée par la Fondation traitera la question de « l’Empire, incarnation de la France Libre » . Ses participants seront : le général Robert Bresse, président de la Fondation, Arlette Capdepuy, chercheur associée au CEMMC, université Bordeaux Montaigne, auteur de Félix Éboué, de Cayenne au Panthéon (1884-1944) , éd. Karthala, collection Hommes et sociétés (à paraître en 2015), Christine Levisse-Touzé, directrice du Musée du Général Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris et du Musée Jean Moulin de la Ville de Paris, direc - teur de recherche associé à l’université Paris IV-La Sorbonne, et Gilles Ragache, diplômé de Sciences Po Paris, maî - tre de conférences en histoire contemporaine, auteur de L’Outre-mer français dans la guerre (1939-1945) , Economica, 2014.

Fermeture estivale La Fondation de la France Libre fermera ses portes du vendredi 10 juillet 2015 à 17h30 au mardi 1 er septembre 2015 à 8h30.

Juin 2015 • N° 56 l 1 LA VIE DE LA FONDATION

Hommage national à Jean-Louis Crémieux-Brilhac

Le mercredi 15 avril 2015, un hom - nyme qu’il avait choisi, en souvenir de la mage national était rendu, dans la rue où, en mars 1940, il avait vécu les pre - cour d’honneur des Invalides, en pré - mières semaines de son mariage avec sa sence de sa famille, de ses proches et de femme Monique. nombreuses personnalités du monde Pour parler de la France Libre, Jean-Louis combattant à Jean-Louis Crémieux- Crémieux-Brilhac aimait à emprunter les Brilhac (1917-2015), ancien des Forces mots de Stendhal sur l’armée d’Italie de 1796. « On n’y eut pas trouvé 30 000 françaises libres et serviteur infatiga - hommes ayant plus de 30 ans. J’ajouterais , ble de l’État, devenu sur le tard l’histo - disait-il, une parole imprudente : ils rien de la France Libre, décédé une n’étaient pas des gens du monde. » C’était la semaine plus tôt. Dans son discours, le France des volontaires venus à Londres et Président de la République a tenu à aussi de l’Afrique, ces 30 000 volontaires de rappeler les engagements successifs de l’Empire qui formaient la moitié des ce grand humaniste et de cet homme troupes du général de Gaulle. C’est cette de savoir, d’une rigueur intellectuelle France-là que Jean-Louis Crémieux-Brilhac toujours impeccable et d’une hauteur a voulu sortir de l’oubli, lorsqu’il a publié de vue jamais démentie. 1 500 pages de l’histoire de la France Libre. Il a montré comment le général de Gaulle a constitué cette utopie combattante « avec Madame, Messieurs les ministres, des bouts d’allumettes ». Il a raconté com - Mesdames, Messieurs les parlementaires, ment elle est devenue cet élan fantastique Mesdames, Messieurs représentant les insufflé dans le corps rompu de la France. autorités de l’État. Jean-Louis Crémieux-Brilhac le 3 décembre 2008 à son Il a rappelé qu’elle fut aussi une extraordi - Nous sommes rassemblés ici, autour du domicile parisien (photo AFP/archives - Stéphane de naire régénération politique, la matrice où cercueil de Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Sakutin). la République s’est réinventée à la Libération plus sociale et plus démocra - parce que c’était un grand Français, dis - éducation, il avait retenu qu’il n’y avait rien tique. paru après une longue vie mise au service de plus digne que de servir la collectivité, et de la République, qui lui avait d’ailleurs c’est cette passion civique qui l’aura finale - Dans cette petite République fraternelle de décerné, avant qu’il ne meure, la grand- ment guidé tout au long de son existence. la France Libre, Jean-Louis Crémieux- croix de la Légion d’honneur. Brilhac était le responsable de la propa - Il se destinait à devenir historien, et c’est gande. Il écoutait les émissions de l’en - Jean-Louis Crémieux-Brilhac était un l’Histoire qui l’a rattrapé. En 1940, il est homme de devoir, il l’avait montré. C’était mobilisé, il se bat avec courage lors de la nemi, il recevait les nouvelles du front, et un homme de savoir, il le démontrait. Avec campagne de France, mais il n’a pas le les rediffusait vers la France occupée. le temps, il était devenu un homme de temps, pas le temps de sauver son pays. Il Tous les mois, il rédigeait un bulletin à l’in - mémoire. voit le spectacle de l’effondrement, de tention de Rex, le chef de la Délégation De son époque, longue, il avait tout vu, l’abaissement, et c’est cette situation générale clandestine. Longtemps, il a tout vécu, tout connu : le premier et le éprouvante qu’il a voulu comprendre, pour ignoré qui était Rex et qui se cachait der - second conflit mondial ; les camps de pri - en déchiffrer les raisons. rière ce pseudonyme, pour découvrir sonniers allemands et les prisons sovié - Il a dénoncé tant de fois cette France ané - ensuite qu’il s’agissait de Jean Moulin. tiques ; à 20 ans, il avait rencontré André miée, divisée, rongée par le défaitisme et la En février 1944, il écrivit un article qui Malraux et Stefan Zweig ; à 30 ans, il avait tentation de l’extrême. Il en avait tiré une dénonçait l’extermination de trois millions servi le général de Gaulle à Londres ; à 40 conviction, elle était simple : c’est lorsque de juifs d’Europe de l’Est « dans des cham - ans, il avait suivi Pierre Mendès France au la France doute d’elle-même, lorsqu’elle se bres asphyxiantes ». Il fut hélas l’un des pouvoir. Jusqu’à la fin de sa vie, il conti - renferme, lorsqu’elle se referme, qu’elle premiers à alerter. Lorsque le jour du nuait d’écrire l’Histoire, après l’avoir faite. cesse de se projeter, que la France cesse débarquement est venu, il eut cet honneur Jean-Louis Crémieux était un enfant de la d’être la France. de rédiger les messages de la BBC, à l’in - République, c’est ainsi qu’il se définissait En pleine débâcle, lui, il avait tenu sa posi - tention de l’opinion française. lui-même. Dans sa famille, on était répu - tion. Ensuite, prisonnier en Allemagne, Dans cette période exaltante qui marqua blicain, évidemment, et citoyen, passion - puis retenu en Russie, il parvint à rejoindre sa vie, il considéra qu’il n’avait qu’un nément. Son père était un professeur, mais Londres, après un périple de plus de huit regret, celui de ne pas avoir connu la clan - c’était aussi un ancien combattant de la mois, avec 185 autres Français. Ils furent destinité. Il aurait dû en effet être para - Grande Guerre. Il avait emmené son fils pour le général de Gaulle, à Londres, l’un chuté sur le maquis de l’Ain, à l’été 1944, Jean-Louis aux obsèques d’Anatole France des plus importants renforts depuis les avec deux officiers, l’un américain et l’au - et du maréchal Foch, comme pour récon - hommes de l’île de Sein. tre anglais. L’Anglais ne s’était pas présenté cilier la France. Libre et Français, Jean-Louis Crémieux à l’heure, et le rendez-vous fut manqué, et Adolescent, il a vu la montée des périls et la l’avait toujours été. À Londres, il devint il dut attendre Paris libéré pour participer à France s’enfoncer dans ses querelles. De son Crémieux-Brilhac. Brilhac, un pseudo - son tour à la libération de notre pays.

2 l Juin 2015 • N° 56 LA VIE DE LA FONDATION

La guerre terminée, Jean-Louis Crémieux- Brilhac devint fonctionnaire, avec une belle idée : promouvoir et diffuser le savoir. Il imagina alors en 1945 la Documentation française, pour que la reconstruction du pays se fasse aussi par la connaissance. Il voulait une maison d’édition de service public, créée pour donner aux citoyens des faits, des chiffres, des analyses, des outils de compréhension sur les grandes questions économiques, sociales, diplomatiques, politiques. François Hollande prononce son hommage (© François Hollande se recueille devant la cercueil de Présidence de la République - C. Chavan). Jean-Louis-Crémieux-Brilhac (© Présidence de la République - C. Chavan).

Jean-Louis Crémieux-Brilhac en fut le de lui, dans cette cour d’honneur de secrétaire général, et à ce titre, il fut asso - l’Hôtel des Invalides, où il a accompagné cié, tout au long de la V e République, avec lui-même tant de Français libres, tant de le général de Gaulle, puis Georges compagnons de lutte. Pompidou, aux grandes réformes scienti - Le 10 avril 2012, j’y étais, c’est lui qui pro - fiques : la création de la Délégation géné - nonçait l’éloge funèbre, ici, de Raymond rale de la recherche scientifique, la moder - Aubrac. Le 7 mars 2013, c’est lui aussi qui nisation des universités, le développe - prononça le discours en hommage à ment de secteurs jusqu’à lors délaissés Stéphane Hessel. À chaque fois, c’était le François Hollande, accompagné de Jean-Yves Le Drian, comme la biologie, les recherches médi - même mot qui revenait dans sa bouche, ministre de la Défense, passe en revue les troupes. Au cales, l’agronomie. Tout cela est dû aussi à fond, l’assistance, venue nombreuse assister aux celui de fraternité. La fraternité d’âme des la promotion de la science dont Jean- obsèques de Jean-Louis Crémieux-Brilhac (© Présidence derniers témoins, de ceux « qui connaissent de la République - C. Chavan). Louis Crémieux-Brilhac fut un des acteurs. tellement plus de morts que de vivants ». En 1986, il prit sa retraite du Conseil Au moment de dire adieu à son ami d’État, et s’ouvrit pour lui une nouvelle Il voulait créer un instrument d’informa - Raymond Aubrac, Jean-Louis Crémieux- carrière, celle dont il avait rêvé, jeune : his - tion, de transparence, de réflexion, pour Brilhac avait retrouvé les derniers mots de torien. Historien parce qu’il voulait expli - une République moderne. Il ne s’agissait la Complainte du partisan d’Emmanuel quer, chercher, comprendre, éclairer le plus de propagande comme sous la France d’Astier de La Vigerie : présent en cherchant dans le passé ce qui Libre, il s’agissait de connaissances, de avait pu nous encombrer, nous entraver « Hier encore nous étions trois savoir, d’information. ou, au contraire, nous élever. Il ne reste plus que moi Il s’attacha à cette maison de la Et je tourne en rond Il revint régulièrement sur « les Français de Documentation française, pendant plus de l’an 40 ». Il y a consacré huit ans de sa vie, Dans les prisons des frontières 30 ans. Il en fut le dirigeant. Il l’a moderni - et il ne voulait, pour être exhaustif, pour Le souffle sur les tombes sée, informatisée, représentée. Pour toute n’oublier personne, aucun fait, aucun La liberté reviendra une génération de responsables publics, visage, il voulait accomplir ce travail, en On nous oubliera de fonctionnaires, dont je suis, il a été mémoire de ses frères d’armes de la France Nous rentrerons dans l’ombre » l’âme de la Documentation Française, Libre. Il voulait aussi tout montrer. C’est Jean-Louis Crémieux-Brilhac ne rentrera celui qui a porté cette volonté inédite de ainsi que Crémieux-Brilhac, à la fin de sa pas dans l’ombre, parce qu’il était une l’État de s’ouvrir aux débats publics et d’ai - vie, fut aussi producteur de documents, lumière. Jean-Louis Crémieux-Brilhac der à la compréhension du monde. réalisateur de documentaires audiovisuels, avait connu tant d’événements, avait L’homme qui incarnait à ses yeux cette toujours avec cette même passion : ressus - connu tant de personnages, avait connu République moderne, transparente, exi - citer l’Histoire et mobiliser les générations trois Républiques et quinze présidents. Il geante, savante, c’était Pierre Mendès d’aujourd'hui, pour qu’elles soient à la en avait gardé comme une forme de déta - France. Jean-Louis Crémieux-Brilhac fut hauteur des précédentes. chement, et en même temps d’engage - auprès de Pierre Mendès France celui qui Il s’attachait aussi à des personnages qu’il ment. définit la stratégie publique pour la avait lui-même connus. En 2010, il publia Dans sa vie, longue, il s’était fait un devoir, recherche en France. Il pensait que ce qui une biographie de Georges Boris. Georges qui se résumait dans cette belle phrase, faisait la force de la France, c’étaient ses Boris, une grande figure républicaine, qu’il que je laisse à la méditation des plus savants, c’était la science, c’était cette avait connu à Londres, et qui avait succes - jeunes : « Quand on habite la patrie des capacité à découvrir. sivement servi Léon Blum, Charles de Droits de l’Homme, on a une responsabi - Il travailla pour promouvoir cette belle Gaulle et Pierre Mendès France. C’est pour lité, celle de l’engagement ». ce livre consacré à Georges Boris, son ami, idée du progrès, à travers l’Association Jean-Louis Crémieux-Brilhac s’est engagé qu’il obtint la récompense qui lui toucha d’étude pour l’expansion de la recherche tout au long de sa vie, et c’est ce message- davantage le cœur que l’esprit. C’était le scientifique. Il le fit avec Jacques Monod, là, ce message de l’engagement, qu’il nous prix d’Histoire du Sénat, parce que ce prix le futur prix Nobel. Cette association était laisse aujourd'hui, et que nous entendons avait une valeur particulière pour lui, originale : elle était composée d’indus - encore. triels, de chercheurs, de syndicalistes. Elle c’était la reconnaissance, par les histo - était placée sous le haut patronage de riens, de son travail d’historien. Pierre Mendès France et fut un aiguillon Aujourd’hui, Jean-Louis Crémieux-Brilhac pour les pouvoirs publics. est dans l’Histoire. Nous sommes autour

Juin 2015 • N° 56 l 3 LA VIE DE LA FONDATION

Une vie au service de l’homme

La France Libre perd l’un de ses grands anciens et l’un de ses plus remarqua - bles historiens, avec la disparition de Jean-Louis Crémieux-Brilhac, surve - nue le mercredi 8 avril. Né le 22 janvier 1917 à Colombes (Seine- et-Oise) dans une famille d’origine juive implantée depuis cinq siècles à Carpentras puis Nîmes et Narbonne, Jean-Louis Crémieux-Brilhac fait des études secon - daires au lycée Condorcet de 1924 à 1933, avant de s’inscrire à la Sorbonne où il obtient une licence ès lettres. Grâce à son oncle, le critique littéraire Benjamin Crémieux (1888-1944), le jeune lycéen côtoie quelques-uns des plus grands noms de la littérature européenne. À partir de 1931, il passe une partie de ses vacances en Allemagne, où il assiste à la montée du nazisme et voit ses camarades socialistes d’adolescence s’affilier l’un après l’autre, Jean-Louis Crémieux-Brilhac le 3 décembre 2008 à son domicile parisien (photo AFP/archives - Stéphane de parfois à l’insu de leurs parents, à la Sakutin). Hitlerjugend (les jeunesses hitlériennes). Précocement politisé, il milite au Comité sous le nom de Jean Brilhac. Ainsi s’achève Dans les années cinquante, tout en gar - de vigilance des intellectuels antifascistes l’odyssée des « Russes », dont Jean-Louis dant son admiration pour le général de de 1935 à 1938. Crémieux-Brilhac a fait le récit en 2004 Gaulle, il soutient l’expérience gouverne - dans Prisonniers de la liberté . mentale et le combat politique de Pierre Mobilisé en septembre 1939, il suit une Mendès France, occupant les fonctions de formation au peloton d’élève-officier de Nommé sous-lieutenant, il est affecté au conseiller technique au cabinet de la réserve (EOR) à Saint-Cyr, avant d’être printemps 1942 au Commissariat national Présidence du Conseil (1954-1955), auprès affecté, avec le grade d’aspirant, à l’extré - à l’Intérieur, à Londres, sous la direction de Georges Boris, avec lequel il avait déjà mité ouest de la ligne Maginot. Fait prison - d’André Philip puis d’Emmanuel d’Astier travaillé au CNI et à qui il a consacré une nier dans la Marne le 11 juin, il est envoyé de la Vigerie, afin de réunir de la documen - biographie en 2010 ( Georges Boris, trente en Allemagne à l’oflag II-D, à Gross-Born, tation politique sur la France. Il supervise ans d’influence ), puis de René Billères en Poméranie, avant d’être dirigé vers le également la mise sur pied d’un service (1956-1958), ministre de l’Éducation stalag II-B, dont il s’évade, avec l’aspirant d’écoute destiné à enregistrer les émis - nationale. En parallèle, il anime, avec Pierre Joriot, le 4 janvier 1941. Ayant réussi sions de Radio Vichy et Radio Paris. À l’été Jacques Monod et le mathématicien André à prendre, à la gare voisine d’Hammerstein , suivant, il prend la direction du service de Lichnerowicz, le Mouvement pour l’ex - un train qui les conduit jusqu’à Göritten, diffusion clandestine chargé d’élaborer pansion de la recherche scientifique les deux hommes passent la frontière près des dossiers documentaires, d’imprimer (1956-1972), organisant des colloques à d’Eydkau et passent en Union soviétique, des tracts et d’envoyer chaque mois du Caen en 1956 et 1966 sur l’enseignement où ils sont dirigés vers Kaunas et empri - matériel de propagande à la Résistance supérieur et la recherche. Enfin, il devient sonnés pour passage illégal de la frontière, intérieure. En 1943-1944, il assure, conseiller d’État (1982-1986). d’abord dans les geôles du NKVD à la conjointement avec Gilberte Brossolette, Loubianka, puis à la prison Boutyrki, avant l’épouse de Pierre, la charge d’officier de Contributeur régulier des travaux du d’être expédiés au camp de Kozielsk, au liaison de la France Combattante à la BBC, Comité d’histoire de la Seconde Guerre sud-ouest de Moscou, le 2 mars 1941. dont il aide à préparer les émissions et où mondiale, il édite en 1975 cinq tomes des il intervient à plusieurs reprises. En mai émissions françaises à la BBC pendant la L’invasion allemande engagée le 22 juin 1944, c’est lui qui rédige les directives d’ac - guerre, Ici Londres. Les Voix de la liberté , 1941 modifie leur situation. Les 218 tion diffusées à la BBC et Radio Alger à avant de se faire historien avec Les Français évadés d’Allemagne sont évacués partir du 6 juin. Français de l’an 40 (1990) et La France vers le camp de Grazoviets, rebaptisé par Libre, de l’appel du 18 Juin à la Libération eux « Grazievitch » et occupé en grande Au début d’août 1944, il doit être para - (1996), livres magistraux qui renouvellent majorité par des Polonais, où ils arrivent le chuté en France dans le cadre d’une mis - profondément l’histoire de la période. 2 juillet. 186 d’entre eux, emmenés par le sion franco-britannique auprès du chef colonel Billotte, obtiennent finalement des maquis de l’Ain, Romans-Petit, mais Jean-Louis Crémieux-Brilhac était grand- d’embarquer le 29 août, à Arkhangelsk, à celle-ci est annulée au dernier moment. croix de la Légion d’honneur, titulaire de la bord de l’ Empress of Canada , qui les Après la guerre, il participe à la création de croix de guerre 1939-1945, de la médaille emmène en Grande-Bretagne, via le la Direction de la documentation et de la de la Résistance et de la médaille commé - Spitzbeg. Arrivés à Greenock, avant-port diffusion, ancêtre de la Documentation morative des services volontaires de la de Glasgow, le 8 septembre, ils souscrivent française, dont il est l’un des cofondateurs, France Libre, officier des Arts et des un engagement dans la France Libre. Jean- avant d’en devenir le directeur-adjoint Lettres, commandeur de l’ordre de l’em - Louis Crémieux signe, le 10 septembre, puis le directeur. pire britannique.

4 l Juin 2015 • N° 56 LA VIE DE LA FONDATION

Réunion en hommage à Jean-Louis Crémieux-Brilhac

Nous étions réunis le 4 juin 2015 après- Aurélie Luneau, productrice à France- midi au siège de la Fondation de la France Culture – ont accepté de venir nous parler Libre, au 59 de la rue Vergniaud (Paris 13 e), de leur rencontre, et des années de travail pour rendre un hommage à notre regretté et de complicité qui les unissaient à lui. La Jean-Louis Crémieux-Brilhac, décédé le 8 discussion était animée par Michel Anfrol, avril à l’âge de 98 ans. Cet hommage, qui président des Amis de la Fondation était prévu de longue date, devait se tenir, à . l’origine, en présence de Jean-Louis Chacune à son tour, elles ont évoqué le Crémieux-Brilhac lui-même. Son but était jeune volontaire engagé dans les Forces de nous retrouver une dernière fois, autour françaises libres, amené, comme il devait le de l’historien de la France Libre, dans ces confier lui-même plus tard, à remplir des lieux attachés à la mémoire des Français responsabilités au-dessus de son âge, du Aurélie Luneau est au micro. À sa gauche, Michel Anfrol Libres, où ils étaient installés depuis 1979, et Thierry Terrier (Fondation de la France Libre). avant le déménagement du siège de la serviteur infatigable de l’État, attaché à la grandeur et à la prospérité de la France, qui Fondation, à l’automne 2015, dans ses nou - Internet de France-Culture. Dans ce docu - veaux locaux, au 16, cour des Petites-Écu - passait par la création de la Documentation ment, il avait enfin accepté de parler de lui, ries, dans le 10 e arrondissement de Paris . française puis le développement de la lui qui, pendant des années, n’avait eu de recherche scientifique, de l’historien plein Entre-temps, malheureusement, Jean- cesse de parler des autres. Ces grandes de rigueur, au style toujours remarquable, et Louis Crémieux-Brilhac nous a quittés. Il a figures dont il avait été des années durant de l’homme profondément humain, discret été décidé de maintenir l’hommage. Trois le collaborateur précieux et admiratif : et modeste, mais animé des plus fermes historiennes qui l’ont bien connu – Charles de Gaulle, Georges Boris, Pierre convictions, et apprécié de tous, qu’était Christine Levisse-Touzé, directrice du Mendès France ou Henri Laugier. Ces Musée général Leclerc de Hauteclocque et tout à la fois Jean-Louis Crémieux-Brilhac. camarades dont il avait partagé les com - de la Libération de Paris-Musée Jean Aurélie Luneau a conclu en présentant des bats avant de les retracer dans des Moulin, Paris Musées, directeur de extraits de l’entretien que lui avait accordé ouvrages qui tous constituent une réfé - recherche à l’université Paris-IV, Chantal Jean-Louis Crémieux-Brilhac pour l’émis - rence encore aujourd’hui. Morelle, professeur d’histoire en classes sion À voix nue en 2010, et dont l’intégra - préparatoires aux grandes écoles, et lité est maintenant disponible sur le site

Plaque en hommage au maréchal Koenig

Lors de notre dernière convention, les délégués de la Fondation de la France Libre ont décidé de faire ériger une plaque à la mémoire du maréchal Koenig en la cathédrale Saint-Louis des Invalides. Cette plaque sera apposée sur le côté du pilier qui accueille déjà celle en l’honneur du maréchal Leclerc de Hauteclocque et face au pilier portant les plaques dédiées aux maréchaux Juin et de Lattre de Tassigny. La Fondation a voté un crédit de 5 000 €. Elle sera rejointe pour ce financement par le Souvenir Français et la Fondation maré - chal Leclerc. Malheureusement, les devis qui nous sont parvenus envisagent tous un coût total largement supérieur, autour de 25 000 €. Nous faisons appel à vous. Si vous souhaitez participer au financement de cette plaque, vous trouverez ci-dessous un formu - laire de souscription. La liste des souscripteurs sera publiée dans la revue. Ils seront invités à la cérémonie de dévoilement qui interviendra avant la fin de l’année 2015.

PLAQUE MARÉCHAL KOENIG - SOUSCRIPTION

Mme , M lle , M. : ...... Adresse : ...... Code Postal : ...... Ville : ......

Je souscris un montant de ...... € destiné au financement de la plaque en hommage au maréchal Koenig, libellé à l’ordre de la : FONDATION DE LA FRANCE LIBRE - 59 rue Vergniaud - 75013 PARIS

Juin 2015 • N° 56 l 5 LA VIE DE LA FONDATION

70 e anniversaire de la bataille de l’Authion

La Fondation de la France Libre et l’Amicale de la 1 re DFL ont organisé un voyage commémoratif, qui s’est déroulé du 26 avril au 2 mai 2015, sur les lieux des combats de l’Authion d’avril-mai 1945 pour commémorer, en par - tenariat avec le conseil départemental des Alpes-Maritimes, la mairie de Nice et l’Association Montagne et Patrimoine (Amont), le 70 e anniversaire de la bataille, qui permit à la France d’acquérir les cantons de Tende et de La Brigue, dont le territoire avait été soustrait au comté de Nice en 1860 pour demeurer italiens. Le 27 avril, à 15 heures, un colloque sur la bataille de l’Authion était orga - nisé par le conseil général au palais des rois sardes, où l’Amicale de la 1 re DFL venait de tenir son assemblée générale. Après la projection d’un film Le 27 avril, Jean-Louis Panicacci, Pierre Robédat, Éric Ciotti, le colonel d’archives réalisé en avril-mai 1945 et monté par l’Amont, Pierre- Martin et Pierre-Emmanuel Klingbeil entonnent l’hymne national, en Emmanuel Klingbeil a présenté l’aspect stratégique de la bataille et le colo - ouverture du colloque (coll. ADFL). nel (h) Pierre Robédat ses combats dans l’Authion, suivis par le colonel Martin, qui a comparé les combats des Alpes du Sud avec ceux des Alpes du Nord, et Pascal Diana, qui a présenté l’histoire du char de Cabanes-Vieilles. Le 28 avril, la Fondation et l’amicale, représentées respectivement par son secrétaire général, Thierry Terrier, et son premier vice-président, Yves Tomasi, ont commémoré avec M. le secrétaire d’État aux Anciens combat - tants, Jean-Marc Todeschini, le maire de Nice, Christian Estrosi, le président du conseil départemental, Éric Ciotti, et le premier vice-président du conseil régional, Patrick Allemand, le 70 e anniversaire de la remise de la croix de la Libération par le général de Gaulle, le 9 avril 1945, à la 13 e demi- brigade de Légion étrangère et au bataillon d’infanterie de marine et du Pacifique, les deux plus anciennes unités de la 1 re DFL, qui ont été de tous les combats entre 1940 et 1945. Les trois jours suivants, la délégation de la Fondation et de l’amicale a visité les lieux des combats de la 1 re DFL, avec une cérémonie au col de Brouis et à Tende le 29 avril, puis à la nécropole nationale de l’Escarène et sur le mas - sif de l’Authion le 30 avril. Le 1 er mai, à Saint-Martin de Vésubie, elle a parti - Le 28 avril, Thierry Terrier prononce son allocution au pied du cipé à un hommage au 3 e RIA organisé par l’Amont et assisté à une confé - monument aux morts de Nice (coll. ADFL). rence de Jean-Loup Fontana sur « le traité de 1947 et la nouvelle frontière ».

Le 30 avril, à la nécro- pole de l’Escarène, Clément Dehu, ancien du BM5, et Christophe Bayard, vice-président de la Fondation, se recueillent, après le dépôt de la gerbe de la Fondation (coll. ADFL).

Le 29 avril, Pierre Robédat, ancien du BM4, présente les combats de la 2e brigade dans le secteur Sospel, Brouis, Breil, Tende (coll. ADFL).

Le 30 avril, cérémonie devant le char de Cabanes-Vieilles, qui avait sauté sur une mine le 11 avril 1945 et a été érigé en monument en 2005 (coll. ADFL).

Le 1 er mai, hommage au 3 e RIA (coll. ADFL).

6 l Juin 2015 • N° 56 LA VIE DE LA FONDATION

La réunion des délégués

Le mercredi 20 mai 2015, s’est aux actions mémorielles des délé - tenue au siège de la Fondation, rue gués dans leur département, la Vergniaud, la réunion annuelle des participation de la Fondation, délégués. Après la minute de pour la deuxième année consécu - silence en mémoire de nos cama - tive, aux Rendez-vous de l’histoire rades disparus, le président a évo - à Blois en octobre 2015, enfin le qué l’acquisition d’un nouveau colloque que la Fondation envi - local au 16, cour des Petites-Écu - sage d’organiser à la fin de 2016 ries, dans le 10 e arrondissement de sur la France Libre et la question Paris, les disponibilités que celui- sociale. ci offre en matière d’espaces de Enfin, l’avenir de nos délégations a réunions et de stationnement, et fait l’objet d’importantes discus - les conditions d’installation de la sions, l’objectif étant non seule - Fondation dans son futur siège, ment de maintenir, mais de déve - d’ici la fin de l’année 2015. lopper localement la présence de la Après un point sur les commémo - Christophe Bayard, vice-président, fait un exposé. À sa Fondation sur le territoire, afin d’organiser rations nationales 2015 et le projet de gauche, le général Robert Bresse, président, et Thierry des manifestations à destination de la jeu - Terrier, secrétaire général (Fondation de la France Libre). réforme du Concours national de la nesse, de recruter de nouveaux participants Résistance et de la Déportation initié par le et de développer nos moyens d’action. président de la République, les différents apposée dans la cathédrale Saint-Louis des projets de la Fondation en cours d’étude Invalides, le bus événementiel de la France Après cette intense réunion de travail, un ou de réalisation ont été présentés : la créa - Libre proposé par Christophe Bayard, vice- buffet campagnard a été offert aux délé - tion d’une plaque commémorative en président de la Fondation et délégué de gués dans l’ancienne salle de restaurant du hommage au maréchal Koenig qui sera l’Orne, pour fournir un support matériel Club.

Le 18 juin à Paris

Le 18 juin 1945, il y a tout juste soixante-dix ans, les armées françaises célébraient la victoire sur l’Allemagne nazie par un défilé sur les Champs-Élysées, après d’ultimes combats dans la poche de Royan, sur le front des Alpes et dans le sud de l’Allemagne, réalisant ainsi les paroles pro - phétiques du général de Gaulle. « Foudroyés aujourd’hui par la force méca - nique , affirmait-il, presque seul, cinq ans plus tôt, jour pour jour, nous pourrons vaincre dans l’avenir par une force méca - nique supérieure. »

Henri Écochard, ancien Français Libre, Thierry Terrier, Le contrôleur général des armées Gérard Delbauffe, secrétaire général de la Fondation, et Alexandra membre du conseil d’administration de la Fondation, Cordebard, adjointe au maire de Paris en charge de Catherine Vieu-Charier, adjointe au maire de Paris en toutes les questions relatives aux affaires scolaires, à la charge de la Mémoire et du Monde combattant, Thierry réussite éducative, aux rythmes scolaires, devant le Terrier, Henri Écochard et Alain Bataillon-Debès, Monument des Français Libres (photo Yves Ropars). président national du Club du 18 Juin, se recueillent devant la statue du Général (photo Yves Ropars).

République, la Fondation a tenu, comme provisoire de la République française chaque année depuis 1948, à commémorer défila, entouré des hommes de la 2 e DB, au ce double événement par un rassemble - milieu d’une foule immense, « massée de ment, à 16h15, au pied de la statue de la part et d’autre de la chaussée » , avant de Le Président de la République salue Fred Moore, délégué France Libre, sur l’esplanade du palais de rejoindre Notre-Dame pour un Te Deum . national du Conseil national des communes Tokyo, pour un dépôt de gerbes à la « Compagnon de la Libération » . Aux côtés de ce dernier, mémoire des morts des Forces françaises Après un hommage au chef visionnaire de Anne Hidalgo, maire de Paris (© Présidence de la libres. la France Libre, à 17 heures, et le tradition - République – L. Blevennec). Puis le cortège s’est dirigé vers les Champs- nel dépôt de gerbes, la journée s’est conclue Après l’hommage national au Mémorial de Élysées où, depuis 2000, une statue réali - par le ravivage de la flamme sur la tombe du la France Combattante du Mont-Valérien, sée par Jean Cardot commémore ce 26 soldat inconnu, à l’Arc de Triomphe de qui s’est tenu en fin de matinée, au Mont- août 1944 où, de l’Étoile à la place de la l’Étoile, sur la place Charles de Gaulle, Valérien, en présence du président de la Concorde, le président du Gouvernement à 18h15.

Juin 2015 • N° 56 l 7 HISTOIRE

Romain Gary, « artisan de la dignité humaine » 1

D’ Éducation européenne , le premier lisé dans la guerre alors qu’il effectuait son mière guerre 7 ». Pour cette génération, roman qui le fit accéder à la renommée service militaire depuis quelques mois, se l’empreinte, au quotidien, de la Première sous le nom de Romain Gary, en 1945, trouvait, le 17 juin 1940 – et ce, depuis le Guerre mondiale avait en effet paradoxa - jusqu’au dernier, Les Cerfs-volants , dédié repli de l’école de l’air de Salon-de- lement nourri, par-delà l’horreur incarnée « à la mémoire » et publié quelques mois Provence à la fin du mois d’août 1939 – à par les survivants, défigurés, amputés, avant son suicide en 1980, Romain Gary a Bordeaux. Là, selon toute vraisemblance toujours traumatisés, la conviction qu’il égrené des noms de camarades, décrit des encore, il y exerçait le rôle d’instructeur de est des valeurs pour lesquelles il peut visages, des paysages, des impressions navigation sur des Potez 540, avec des valoir de risquer sa vie. Cette leçon essen - toujours vivantes en lui : des « vibrations équipages polonais en double com - tielle, l’écrivain affirmait la devoir entre affectives de la guerre, de l’esprit d’esca - mande, étant donné qu’il maîtrisait par - autres à son professeur de français au drille, d’un groupe humain vécu [...] dans faitement leur langue. Cette expérience, lycée Masséna de Nice, Louis Oriol : « Il 2 la plus étroite communion ». succédant à deux années de préparation m’a fait à la main. C’était un paralysé de la Au-delà du talent de conteur et du goût de militaire supérieure entre 1936 et 1938 à guerre 14-18 qu’il fallait lever de son fau - l’écrivain pour « raconter des histoires », Montrouge, lui fut précieuse pour intégrer teuil pour le monter en chaire. Je n’oublie - l’essentiel de ce qu’il a présenté comme les forces aériennes de la France Libre, rai jamais. Jamais 8.» des souvenirs autobiographiques est bien dans l’escadrille « Topic » au groupe de « conforme à la vérit é 3 ». C’est ce qu’a bombardement réservé n° 1, devenu « Rompre avec la France du moment révélé notre étude du parcours de Roman « Lorraine ». pour demeurer fidèles à la France histo - Kacew, de sa naissance à Vilnius en mai Des fiches signées par le Français Libre rique, celle de Montaigne, de Gambetta 1914 jusqu’à son engagement dans la Gary de Kacew – le pseudonyme de com - et de Jaurès [...] fidèles à “une certaine France Libre, fondée sur l’analyse de battant qu’il choisit alors –, attestant de idée de la France”. » 4 5 diverses archives, publiques et privées , et son engagement à Londres dès juillet des témoignages de proches, d’anciens 1940, confortent l’hypothèse suggérée par Si le jeune Roman Kacew n’était pas – et compagnons de la Libération et Français La Promesse de l’aube d’un départ de ne fut jamais – politisé, au sens d’un cer - Libres : une vérité à la croisée de l’histoire Bordeaux le soir même du 17 juin : autre - tain militantisme, en revanche ses ori - et de la sensibilité d’un homme, marqué ment dit quelques heures après l’annonce gines, les blessures de l’exil, et ses liens dès son plus jeune âge par l’expérience radiodiffusée de la défaite par le maréchal entretenus avec la Pologne où vivait son guerrière, l’exil, mais aussi la magie des Pétain. père, Leib Kacew, et où il semble avoir été mots. Si le fait de se trouver le 17 juin sur un lit - passer un diplôme d’études slaves au toral pouvait faciliter matériellement la cours des années 1930, l’avaient rendu « … Parce que toutes les notions de fra - décision de rejoindre l’Angleterre ou sensible à la violence politique, écono - ternité, de démocratie, de liberté [...] sont l’Afrique du Nord – où le combat semblait mique et sociale, dont l’Europe se trou - des décisions, des choix, des proclama - devoir alors continuer –, et si l’absence de vait alors bouleversée, et qui semblait tions d’imaginaires auxquelles souvent responsabilité familiale – au sens ou plus devoir menacer jusqu’aux valeurs de la 6 on sacrifie sa vie pour leur donner vie .» des trois quarts des Français Libres République française. Des valeurs aux - n’étaient pas mariés, et 87,5 % d’entre eux quelles, comme tant d’immigrés, Roman Si La Promesse de l’aube romance son n’avaient pas d'enfant – permettait Kacew, arrivé en 1927 en France, croyait aventure de cinq années dans les forces d’échapper à un dilemme majeur, il reste et tenait avec une intensité toute particu - aériennes de la France Libre, lui conférant que le choix de la dissidence puisa pour lière, conscient de leur signification pro - même souvent une tournure burlesque, chacun d’entre eux au cœur d’un terreau fonde et de l’histoire pleine de sacrifices l’humilité de l’auteur ne doit pas occulter intime complexe, singulier, dont nous ne qui avait finalement permis de les ins - l’essentiel : le courage d’un engagement pouvons que nous efforcer d’appréhen - crire au fronton de notre société. Et c’est par lequel lui-même, comme chacun des der, modestement, quelques racines. bien au nom de cette fidélité, que les individus qui choisirent, dès juin 1940, le Romain Gary en a témoigné : l’idée de la Forces françaises libres furent une chemin de la désertion, ne pouvaient défaite, quelques semaines à peine après « internationale de l’engagement […] une ignorer qu’ils risquaient leur vie. le début des combats en mai 1940, était Tour de Babel militaire fondée sur le Les archives du Service historique de l’ar - insupportable, aux yeux de tant de jeunes volontariat dont il y a peu d’exemples au mée de l’air permettent de confirmer que gens élevés, ainsi que le rappelait aussi XX e siècle, à l’exception des Brigades le sergent aviateur Roman Kacew, mobi - Albert Camus, « aux tambours de la pre - Internationales 9 ».

1 Le titre et les sous-titres sont repris à l’article Romain Gary : « Les Français Libres » , publié dans la Revue de la France Libre , en octobre 1970, p. 25-26. 2 Id ., p. 128. 3 Pour reprendre l’expression de l’auteur, au bas d’une fiche administrative complétée et signée par lui le 12 septembre 1945 (SHAA). 4 Archives nationales, Service historique de l’armée de l’air (SHAA), ordre de la Libération (OL), ministère des Affaires étrangères (MAE). 5 Nous remercions encore ici Olivier Agid tout particulièrement. 6 Romain Gary, La Nuit sera calme , Gallimard, 1974, coll. « Folio » , p. 271-272. 7 Albert Camus, L’Été , Gallimard, 1950, coll. « Folio » , p. 149. 8 Romain Gary, La Nuit sera calme , Gallimard, 1974, coll. « Folio » , p. 128. 9 Jean-François Muracciole. Les Français Libres, l’autre Résistance , Tallandier, 2009, p. 59-60.

8 l Juin 2015 • N° 56 HISTOIRE

humblement sa demande d’écrire un livre sur le général de Gaulle : « Je ne peux pas, je suis un étranger » lui aurait-il alors répondu. La stupeur de Pierre Lefranc res - tait intacte trente ans plus tard : comment cet homme, dont toute la vie avait été consacrée à défendre les valeurs de la République, pouvait-il ne pas se sentir reconnu pleinement comme Français ? Ces témoignages et cette dernière anec - dote sont précieux, révélateurs des fragili - tés avec lesquelles composait Romain Gary, compagnon de la Libération, décoré de la Légion d’honneur, diplomate, écri - vain talentueux, prix Goncourt, parcou - rant le monde et côtoyant les plus grands : Passeport retrouvé dans les archives de Vilnius, montrant Nina et Roman Kacew dans les années 1920 (photo Christine Tarricone). derrière l’homme un peu flamboyant et provocateur, dont il cultivait l’image, Le jeune homme était conscient, aussi, à se confronter, dans la France des années n’oublions pas ces ombres qui le han - des sacrifices de sa mère, Nina, pour lui 1930, tandis que la confiance dans la taient, et toujours plus intensément dans permettre de grandir dans ce pays long - République et sa méritocratie demeuraient les dernières années de sa vie : « des fan - temps rêvé : « La France que ma mère évo - une ancre d’espérance inébranlable pour tômes qui se mettent à revenir, quarante quait dans ses descriptions lyriques et ins - cette femme : « Lorsque quelque fournisseur ans après » , écrivait-il dans La Nuit sera pirées depuis ma plus tendre enfance avait exaspéré la traitait de “sale étrangère” , elle calme en 1974. L’historien Stéphane fini par devenir pour moi un mythe fabu - souriait » tandis que son fils se faisait alors Audoin-Rouzeau l’affirme : « l’expérience leux, entièrement à l’abri de la réalité […] fort de pouvoir un jour « défiler en uniforme de guerre – vécue comme témoin [...] mais beaucoup plus tard, après quinze ans de de sous-lieutenant aviateur au marché de la plus encore comme acteur et, au premier contact avec la réalité française, à Nice, Buffa, avec ma mère à mon bras 11 ». chef, comme acteur dans l’activité de com - […] mais n’ayant rien appris, rien remar - La tentation de l’armée, et plus particuliè - bat – constitue une expérience centrale qué, elle continua à évoquer, avec le même rement de l’aviation, semble trouver, outre dans le cours d’une vie humaine. [...] sourire confiant, ce pays merveilleux la fascination exercée par les avions et les Aucun autre événement collectif n’a pu qu’elle avait apporté avec elle dans son aviateurs depuis la Première Guerre mon - s’inscrire au cœur d’un si grand nombre de baluchon ; quant à moi, élevé dans ce diale sur les jeunes gens de cette généra - destins individuels 13 . » musée imaginaire de toutes les noblesses et tion, une explication très matérielle : en de toutes les vertus […] je passais d’abord effet, alors que Roman Kacew achevait « Pour le reste... je vous retrouve souvent, mon temps à regarder autour de moi avec avec succès sa première année de licence vous, les “disparus”... » stupeur et à me frotter les yeux, et ensuite, en droit, une loi promulguée le 19 juillet l’âge d’homme venu, à livrer à la réalité un 1934 imposait aux naturalisés français un Comment revenir de la guerre ? Romain combat homérique et désespéré, pour délai de dix ans avant de pouvoir devenir Gary l’affirmait : « j’y suis resté ». Et toute redresser le monde et le faire coïncider avocat – barrière que le Conseil d’ État élar - son œuvre, entremêlant obstinément les avec le rêve naïf qui habitait celle que j’ai - git par jurisprudence à diverses autres pro - voix d’un passé intime au fil de la poésie, mais si tendrement. Oui, ma mère avait du fessions juridiques. Pour le jeune homme, 10 talent – et je ne m’en suis jamais remis .» désireux de soulager sa mère, diabétique et En effet, dans la communauté juive de affaiblie, l’armée est alors sans doute appa - Vilnius où il était né en mai 1914, et pour sa rue comme une porte de sortie honorable, mère tout particulièrement, la France n’était en même temps qu’un moyen de gagner sa pas seulement cette terre de culture bril - vie le plus rapidement possible : c’est pour - lante particulièrement prisée par une cer - quoi, une fois naturalisé en 1935, Roman taine élite dans l’empire russe ; elle repré - Kacew opte pour une préparation militaire sentait aussi, et surtout, la patrie de la supérieure, au terme de laquelle il se voit Déclaration des droits de l’homme, un pays sans raison valable écarté de la promotion dont les citoyens – l’affaire Dreyfus venait de d’officiers… peut-être victime de l’antisé - le prouver quelques années auparavant mitisme – très vif encore parmi ces haut- encore – étaient capables de se soulever gradés de l’armée –, comme il en était pour défendre un homme injustement convaincu, et selon son amie Sylvia Agid, accusé. « blessé à mort 12 ». Cette blessure, restée Dans ce même livre pourtant, l’écrivain toujours à vif, c’est avec un étonnement évoque, avec autant de discrétion que de profond que Pierre Lefranc l’avait ressen - pudeur, les marques d’antisémitisme et de tie, quelque temps seulement avant le sui - xénophobie auxquelles sa mère et lui eurent cide de l’écrivain, lorsque ce dernier refusa Romain Gary en aviateur (collection Olivier Agid).

10 Romain Gary, La Promesse de l’aube , Gallimard 1960, coll. « Folio » , p. 44-45. 11 Id. , p. 178. 12 Syvia Agid à Kristel Kryland, 6 août 1988 (archives Olivier Agid). 13 Stéphane Audoin-Rouzeau, Combattre , Seuil, 2008, p. 11-12. 14 Romain Gary, La Nuit sera calme , Gallimard, 1974, coll. « Folio » , p. 95. 15 Id. , p. 94 Juin 2015 • N° 56 l 9 HISTOIRE

témoigne d’un impossible deuil : qu’il soit permis d’entendre parler assez tôt – Éduca - Jadis, au départ de l’escadrille, on donnait celui des camarades, celui de sa mère – tion européenne en témoigne – du massacre chaque matin aux équipages des fusées que décédée en février 1941 –, celui de son des Juifs en Europe. Quand a-t-il appris de nous tirions dans le ciel lorsqu’un avion père et de tous ses proches restés en façon certaine que son père, et avec lui inconnu apparaissait à l’horizon. S’il répon - Pologne et massacrés dans la Shoah ; toute sa deuxième famille, en avaient été dait par les couleurs convenues, nous savions celui, enfin, de sa jeunesse. victimes ? Il semble probable qu’en 1946 en à qui nous avions affaire. S’il ne les avait pas « La guerre fut pour moi la disparition […] un tout cas – les archives du MAE attestent sur lui, même s’il portait notre insigne [...] par un, sortie par sortie, pendant quatre ans, d’un bref voyage du secrétaire d’ambassade nous ne le laissions pas approcher. C’est ce que sous tous les cieux, de la seule tribu humaine en Pologne… – il n’ait guère plus d’espoir de la RAF appelait “les couleurs du jour” : elles à laquelle j’ai appartenu à part entière 14 . » La retrouver son père vivant. nous permettaient toujours de distinguer confrontation à la mort fut d’abord, en effet, Entre ces ruines intimes, affleure aussi un autour de nous l’ami de l’ennemi. [...] pour chaque combattant, celle des compa - certain désespoir, face à un monde à ses Comprenons-nous bien. Ce ne sont pas seule - gnons, dont la vie si souvent « venait de com - yeux si peu digne et reconnaissant des ment des idées que je défends [...] si tout cela 15 mencer »... comme Robert Colcanap, à qui sacrifices accomplis pour la libération du n’était qu’ [...] un système de plus sur notre l’écrivain choisit de dédier Éducation euro - joug nazi. Le Grand vestiaire , publié en chemin, j’aurais laissé ces couleurs s’effacer péenne , le roman qu’il écrit entre deux mis - 1948, témoigne de la vision triste et désabu - mille fois de mon ciel, plutôt que de voir tant 16 sions, la nuit, en pleine guerre. sée qui fut celle de la plupart des Francçais de camarades donner pour elles leur vie . » Comme à chacun de ceux qui, au moment Libres de retour au pays, comme déjà le ton En 1978, pour conclure son émission de leur engagement dans la France Libre cynique de Tulipe , écrit à la fin de la guerre, Radioscopie , Jacques Chancel s’adressait avaient peut-être été portés par un senti - ment d’invincibilité propre à leur jeune âge, la guerre eut tôt fait de rappeler au combattant, dans sa chair et dans son âme, la fragilité de la vie, à commencer par la sienne. Mourant, c’est l’état dans lequel Romain Gary est décrit par certains de ses camarades, à la fin de l’année 1941, cloué au lit depuis l’été par une violente fièvre typhoïde contractée en Afrique. Il frôle à nouveau la mort en mission, à son poste de navigateur-observateur, le 25 janvier 1944, touché par un éclat d’obus à l’abdomen. Pourtant, aidé par le mitrailleur René Bauden, il ramène l’avion dont le pilote avait été touché aux yeux par des éclats d’obus, ce qui lui vaut d’être cité à l’ordre de la Libération, avant de terminer la guerre comme chef de bureau de la Chancellerie, à l’état-major des forces aériennes françaises en Grande-Bretagne. L’historien des Français Libres Jean- François Muracciole a pu observer que Une page des Cerfs-volants, conservée au Musée des Lettres et des Manuscrits (photo Christine Tarricone). nombre d’entre eux choisirent de partir à l’étranger après la guerre. Pour Romain laissait entrevoir un sentiment d'amer - ainsi à l’écrivain : « vous, vous allumez la Gary, l’entrée au cadre complémentaire tume, qui ne cessa alors de se creuser. fraternité » . Rêvée, questionnée, vécue, la dans la diplomatie et son mariage avec Des lettres à son ami René Agid, en 1945 fraternité semble en effet avoir été pour Lesley Blanch favorisèrent l’envol pour et 1946, évoquent un sentiment de « dés - Romain Gary, tel Prométhée, un flambeau d’autres horizons… Mais, à sa démobilisa - intégration » et de « tentation de suicide ». arraché au monde de l’idéal pour en éclai - tion en décembre 1945, comblé d’hon - Cette tentation l’aura-t-elle jamais vrai - rer l’humanité, et lui apprendre à en entre - neurs, écrivain reconnu par le prix des ment quitté ? tenir la lumière, jusque dans les ténèbres Critiques, Romain Gary est, profondément, de son histoire. L’écriture, comme rempart contre le vertige un homme ébranlé, déraciné. S’il a été pré - Et c’est avec le sentiment d’avoir honoré sa venu, dans les semaines qui ont suivi la et l’angoisse de l’oubli, constitua pour Romain Gary un fil auquel il se raccrocha, et promesse, qu’il tire sa révérence, au soir du mort de sa mère Nina en février 1941 à Nice, 2 décembre 1980 : « car on ne saurait mieux qu’il ne quitta plus. Mais si l’écriture fut un par la famille Agid, ce n’est qu’au moment dire 17 ». où les survivants purent enfin rentrer chez refuge, elle répondit aussi à un souci essen - eux et retrouver les leurs, qu’il se confronte tiel : celui de porter la mémoire d’un engage - Christine Tarricone pleinement à cette cruelle disparition, qui ment, et de le continuer, « à la poursuite de la signifie aussi la fin du havre trouvé au pays tendresse humaine, de la tolérance et de la Notice biographique rêvé de Nina. C’est aussi la mort de son fraternité [...] nous ne renonçons à rien [...] ce Christine Tarricone, agrégée d’histoire- père, qu’il doit affronter. Son engagement sont nos couleurs, nous marchons les yeux géographie, est l’auteur de « De Roman parmi les Français Libres lui a sans doute fixés sur elles, c’est elles que nous suivons. Kacew à Romain Gary : de Vilnius à la France Libre, 1914-1945 » (master II 16 Romain Gary, Les Couleurs du jour , Gallimard, 1952, p. 71. Histoire/Sciences sociales, sous la 17 C’est sur ces mots qu’il conclut son dernier roman : direction de Vincent Duclert, EHESS, Les Cerfs-volants , ainsi que son mot d’adieu « pour le jour J » Paris, juin 2012). (Archives de l’ordre de la Libération).

10 l Juin 2015 • N° 56 HISTOIRE

Radicofani en 1944, le courage d’oser (1 re partie)

Présentation aux limites orientales de notre vieille au champ d’honneur, avant leur transfert plus tard au cimetière militaire français de La Libye et l’Égypte sont maintenant der - Europe, ainsi que dans de nombreux endroits de la planète qui peuvent faire Rome. rière la 1 re division française libre. Le géné - ral Kœnig, en partance pour Alger, passe craindre un élargissement des conflits. Un L’insouciance des hommes et la poussière son commandement au général Brosset. constat terrible s’impose à nous : jamais du temps l’avaient presque privée de son Fin avril 1944, la DFL embarque à Bône et autant de conflits n’ont peut-être été acti - véritable sens : perpétuer le souvenir. vés simultanément de par le monde ; il y a à Bizerte et part pour l’Italie. Au fur et à À la fin des années quatre-vingt-dix, avec cent ans, la Première Guerre mondiale se mesure de l’arrivée des unités, elle se l’appui de la municipalité et du Souvenir déclenchait et les hommes ont peu regroupe dans la région de Naples. La Français, l’Amicale des anciens d’Italie de appris ! 13 e DBLE va pouvoir continuer sa lutte la Légion étrangère (ANIEL) a fait en sorte contre l’ennemi allemand qu’elle poursuit Dans la vie, rien ne se résout, tout conti - que la stèle soit restaurée et déplacée de depuis février 1940. Elle assiste à la percée nue. On demeure dans l’incertitude et on quelques mètres, dans une position favo - sur le Garigliano et elle se prépare à la restera jusqu’à la fin sans savoir à quoi risant sa visibilité. s’en tenir ; en attendant, la vie se poursuit poursuite. Ce seront San Giorgio et Ponte Vers la même époque, grâce à la disponi - comme si de rien n’était... Corvo où elle subit des pertes sévères, bilité d’un groupe d’anciens légionnaires mais rien n’arrête sa course en avant. Ce L’expérience instruit plus que de conseil ! qui ont y ont travaillé, a été érigé un sont la marche sur Tivoli, la traversée de Soyons des sentinelles en alerte. monument à la mémoire de ces hommes Rome, l’arrivée au lac de Bolsena et la En ce 17 juin, 70 e anniversaire des com - courageux. prise de Radicofani, qui vaut au 1 er bats, journée du souvenir, nous nous Aujourd’hui, alors que nous célébrons le bataillon de Légion une citation à l’ordre associons à nos camarades italiens ; eux soixante-dixième anniversaire de ce fait de l’armée, et c’est avec sérénité et une aussi honorent ceux qui sont tombés sur d’arme, cet ouvrage nous permet de grande confiance que les légionnaires ce même lieu, pour la liberté de leur mieux illustrer cette période et de faire attendent le débarquement dans le Midi patrie. connaître, en particulier aux jeunes, un de la France. Je me recueille avec émotion devant le petit bout de route parcourue par ces Les détails de cette épopée sont présentés monument érigé par les anciens légion - légionnaires, par ces soldats français qui, par notre ami, Giors Oneto, homme cul - naires italiens et j’ose, à la manière de nos avec leur sang, ont contribué, avec d’au - tivé et généreux, qui n’a jamais manqué anciens, « more majorum » au lendemain tres, à payer le prix de notre liberté. un rendez-vous donné par les anciens de la Grande Guerre, dire très fort : « Plus Un grand merci, à l’ami Giors Oneto, et à légionnaires italiens, qu’il en soit ici jamais ça » ; malheureusement l’expres - tous ceux qui ont de quelque manière que remercié. sion instruit plus que conseil ! Restons ce soit participé aux travaux et aux Inlassablement nous avons fait « nôtre » le vigilants ! recherches, et pour avoir ainsi permis, devoir de faire une cérémonie à Général (2S) Vittorio Tresti aujourd’hui, de prolonger la mémoire, de Radicofani pour conserver et conforter la maintenir vivante. notre mémoire collective, rappelant ce Radicofani, le 18 juin 2014 que fut cet événement historique, afin La Légion ne pleure pas ses morts, qu’il serve d’exemple et de modèle. elle les honore Dr. Giancarlo Gaudenzio Colombo Président de l’ANIEL Cela nous concerne tous et nous souhai - C’est dans cet esprit que « l’historien, tons dire et redire aux jeunes générations l’écrivain » , l’ami, Giors Oneto, a que, tout comme le pire n’est jamais cer - condensé dans ce livre, l’histoire, les diffi - Note de l’auteur tain, rien n’est jamais acquis. La paix est cultés, le sacrifice, l’héroïsme, des légion - Lorsque le général Tresti et le président toujours fragile tant les hommes portent e naires de la 13 DBLE qui, sous le com - Colombo me demandèrent de rédiger un en eux les germes de la violence. mandement du chef de bataillon Gabriel bref essai pour rappeler le soixante- Cette commémoration des combats de Brunet de Sairigné, se sont battus en 1944 dixième anniversaire de la bataille de Radicofani doit être un symbole fort en Italie, pour que notre pays soit libéré Radicofani, où les légionnaires de la contre l’oubli, elle précise et souligne un de l’occupation allemande. « Treize » se couvrirent de gloire, j'acceptai signe d’espoir pour les générations pré - À Radicofani en particulier, la volonté, la et en fus flatté. Flatté et quelque peu sentes et à venir. capacité et la discipline au feu des légion - anxieux aussi car conscient de la difficulté L’horloge du siècle le plus meurtrier de naires a été déterminante pour permettre de repérer dans un délai très court le l’histoire de l’humanité s’est arrêtée, grâce de « briser le verrou » de la ligne défensive minimum nécessaire de documentation. aussi à ces soldats légionnaires de la 13 e imposante, commencée par les troupes Je ne me trompais pas. Les documents DBLE, venus de tous les horizons, quelles allemandes sur les lignes de crête ; de officiels, pour commencer, sont aussi que soient par ailleurs leur nationalité, l’Amiata – passant par la pierre angulaire maigres que rares. Et ceux qui les détien - leur race, leur religion, qui se sont battus de Radicofani – du Mont Calcinajo, conti - nent n’ont pas nécessairement tendance à pour la liberté et qui ont fait le choix de nuant vers l’est, vers Chiusi, bloquant « faire vite ». Quant aux témoins, ils ne servir la paix, au prix pour bon nombre l’avance des troupes alliées en direction sont pas nombreux non plus et le temps d’entre eux de sacrifier leur propre vie ; de Sienne et Florence. commence parfois à embrumer leur mais notre mémoire saigne toujours. Après cette sanglante bataille, une stèle en mémoire. Aujourd’hui, nos valeurs essentielles peu - marbre avait été érigée sur le site – qui, à Il y a enfin les essais historiques et égale - vent à tout instant être à nouveau mena - l’origine, dans l’immédiateté des faits, ment les mémoires écrits avec moins cées. Les exemples sont nombreux : hier avait accepté provisoirement d’accueillir d’ambition par ceux qui vécurent directe - encore en Europe centrale et maintenant les corps de 108 soldats français tombés ment les événements. Le matériel ne

Juin 2015 • N° 56 l 11 HISTOIRE

manque pas dans ce dernier domaine, rangers envoyée en reconnaissance. Vraie sache que c’était la 5 e armée qui avait fait mais avec les inconvénients que l’on peut ou fausse, l’hypothèse avancée reste au le travail 2.» imaginer. La bonne foi du témoin, hélas, moins plausible, car le général Mark Il ne faut pas oublier à ce propos que la ne suffit pas toujours à éviter les péchés Wayne Clark et les commandements amé - même annonce aurait perdu, quelques d’individualisme ou d’imprécision. Les ricains étaient obsédés par la crainte de se jours plus tard, toute sa force en termes de renseignements basés sur les ouï-dire faire doubler par les Britanniques dans la propagande. Le débarquement en finissent souvent par se contredire ou par course vers la Ville éternelle. Cette obses - Normandie, prévu pour le 6 juin, allait agrandir des faits mineurs, tout en ren - sion hantait depuis longtemps le com - bientôt occuper le devant de la scène et dant flous les contours de la réalité. mandant américain, qui avait d’ailleurs aurait rendu négligeable même l’occupa - Je ne prétends pas qu’il n’y ait rien de dis - noté dans son journal intime un mois tion de Rome, jadis caput mundi 3. cutable dans ce petit livre, mais une certi - avant : « Je suis informé de machinations Quoi qu’il en soit, les Alliés avancèrent e tude me rassure : aucune dramatisation afin que ce soit la 8 armée britannique avec beaucoup de prudence. Tout en ou inexactitude produite par l’ « esprit qui prenne Rome [...] si seulement sachant que Kesselring avait retiré de lui- ancien combattant » ne saurait remettre Alexander essaie une pareille chose, il aura même ses forces, conformément à la pro - en question l’épopée de la « Treize » en droit à une bataille rangée de plus, contre clamation de Rome « ville ouverte », les Toscane. Conscient du sérieux de mon moi 1. » Américains craignaient une réaction de engagement et satisfait du travail accom - résistance de la part de la population. pli, j’aimerais consacrer ce texte à la C’est pourquoi ils furent surpris par l’ac - mémoire de deux amis légionnaires qui cueil enthousiaste reçu de la part des malgré leurs personnalités totalement Romains. Ces derniers célébraient d’un opposées – ou peut-être à cause de cela – côté le retour de la liberté, la fin de la m’ont laissé un souvenir très fort : Gianni guerre, des persécutions, des déporta - Ragnoli et Carlo Gilardino ( « Panet »), tions et peut-être aussi de la faim – anciens combattants de Diên Biên Phu. comme devait le souligner plus tard l’his - toriographie officielle de l’après-guerre –, mais ils confirmaient en premier lieu une L’entrée des Alliés dans Rome certaine tendance à se rallier au vain - Nous sommes début juin 1944 et Rome queur. est occupée par les Alliés après que les Pour atteindre Rome, la 5 e armée améri - Allemands l’ont quittée sans opposer pra - Fantassins américains abrités derrière la tourelle d’un caine avait perdu plus de 30 000 hommes tiquement aucune résistance, en respec - char Sherman, le 5 juin 1944. Photographie officielle de (morts, blessés et disparus), et la 8 e armée tant son statut de « ville ouverte ». l’entrée dans Rome (DR). britannique 12 000. Ce à quoi il faut ajou - Parmi les troupes qui entrent en premier ter 8 000 Polonais, Français, Sud-Africains, dans la capitale on compte les Français de etc. Du côté allemand, les pertes s’éle - la 1 re division française libre (1 re DFL) com - vaient à environ 25 000 hommes. mandés par le général Diego Brosset. Ils Tout compte fait, si la prise de Rome se arrivent avec les avant-gardes améri - révéla importante sur le terrain de la pro - caines depuis la Ciociaria, après la pagande, elle le fut beaucoup moins sur le conquête de Tivoli et de la Villa Adriana. plan opérationnel car le commandant Nous sommes le 5 juin. allemand, après la perte de Cassino et le En réalité, le général Clark avait déjà débarquement allié à Anzio dans le cadre annoncé officiellement son entrée le jour de l’opération Shingle , avait renoncé à précédent, quand les hommes de la 5 e toute idée de défense à outrance, ce qui armée n’étaient encore qu’à la périphérie aurait été d’ailleurs une erreur sur le plan de la ville, par une dépêche adressée à pratique, avec des conséquences néga - Londres, Washington et, bien entendu, Des soldats tahitiens emmènent un souvenir, sur la tives en termes politiques et psycholo - route 6, à la gare de Sentocelle, en juin 1944 (ECPAD). aux médias. Pour rendre cette informa - giques. Il avait donc commencé le replie - tion plus crédible, une photo avait été ment de ses forces vers le nord, jusqu’à la ajoutée à la dépêche, reproduisant un ligne « gothique », après avoir convaincu char du 2 e corps à l’arrêt devant un pan - On retrouvera le thème dans les mémoires Hitler de renoncer à sa ligne « Albert », tra - neau de signalisation annonçant de guerre du même Clark : « Non seule - cée entre les lacs de Bolsena et Trasimène. « Roma ». Une rumeur existe d’après ment nous avions l’intention de prendre la Pour les Alliés, une fois la capitale occu - laquelle cette fameuse photo fut prise ville, nous considérions aussi l’avoir pée, il ne restait guère de temps à perdre assez loin de Rome, en utilisant un pan - mérité [...] nous voulions être la première car ils avaient déjà pris un grand retard neau récupéré dans le quartier romain de armée, depuis quinze siècles, à prendre par rapport à la feuille de route dressée au l’ Esposizione universale di Roma (EUR) à Rome par le sud, et nous voulions aussi moment du débarquement en Sicile. la faveur de la nuit, par une patrouille de que la population, au retour à la maison, Maintenant, il fallait plutôt remédier à ce

1 Mark Clark, Diary , 5 mai 1944 : « I know factually that there are interests brewing for Eighth Army to take Rome, and I might as well let Alexander know now that if he attempts anything of the kind he will have another all-out battle on his hands ; namely, with me » (NDLR). 2 Mark Clark, Calculated risk , New York, Harper & Brothers, 1950, p. 352 ; Mark Clark, Diary , 5 mai 1944 : « Not only did we intend to become the first army in fifteen centuries to seize Rome from the south, but we intended to see that the people back home knew that it was the Fifth Army that did the Job » (NDLR). 3 En français, capitale du monde (NDLR).

12 l Juin 2015 • N° 56 HISTOIRE

retard en poursuivant un ennemi dont Les Américains s’opposèrent à ce projet, vôtres, trouvant surprenant que l’accord l’organisation et les structures étaient res - exigeant, en revanche, l’exécution avant le de mon Gouvernement ne m’ait pas été tées intactes, contre toute attente, et qui 15 août 1944 de l’opération « Anvil », qui notifié au préalable 5.» gardait tout son esprit de combat. prévoyait un débarquement dans le sud Le général de gaulle lui répond le jour Après avoir ramené le drapeau tricolore de la France avec la participation de après, le 17, avec un autre message : troupes soustraites au général Clark. Les bleu-blanc-rouge à la villa Médicis, siège « Tout en comprenant profondément ton généraux Truscott et Juin quitteront ainsi historique de la diplomatie française à regret de voir tes unités passer successive - le front italien, avec trois divisions améri - Rome, et avoir défilé aux Fori Imperiali ment maintenant dans la zone de com - caines et trois autres françaises, destinées (les forums impériaux), nos soldats mandement d’un autre, tout en convenant à préparer le débarquement en Provence. reprennent donc les opérations de pour - que, peut-être, il aurait été préférable de On priva aussi Alexander d’une bonne suite de l’ennemi. Les légionnaires de la pousser en Italie jusqu’aux Alpes plutôt e re partie des forces aériennes d’appui tac - 13 DBLE, rattachés à la 1 brigade de la que de s’arrêter sur l’Arno, je suis sûr que tique. L’ouverture de deux fronts en DFL, aux ordres du colonel Raymond tu admettras qu’il faut jouer et poursuivre France eut donc comme conséquence Delange, agissent en direction de Viterbe, l’exécution d’un plan longuement préparé immédiate la réduction du potentiel des à côté de leurs camarades des 4 e et 2 e bri - par un commandement allié qui en est forces alliées en Italie. gades (on arrêtera à Bolsena cette der - avec notre assentiment, stratégiquement nière, à bout de force et presque décimée responsable 6.» après cinq mois de combats) et des Américains de la 40 e division blindée.

L’Italie ou la Provence ? L’opération « Diadème » (nom donné à l’offensive générale alliée) se solda par une victoire et la libération de Rome mais n’atteignit pas de résultats décisifs sur le plan stratégique : les Allemands perdirent environ 10 000 hommes et eurent 20 000 L’artillerie arrose les centres de résistance ennemis, après prisonniers, mais les forces d’Alexander la prise de Rome (ECPAD). Colonne en marche vers Acquapendente (DR). essuyèrent également des pertes élevées (18 000 Américains, 14 000 Britanniques, Après la pause de Rome, les troupes fran - 10 000 Français), sans pour autant parve - çaises reviennent sous le commandement Voilà une manière formellement inatta - nir à détruire les deux armées du feld- opérationnel des Américains. C’est la troi - quable de se décharger de la responsabi - maréchal Kesselring, qui se replièrent sième fois que ce « changement » se pro - lité du rappel du corps expéditionnaire avec ordre au nord de Rome. Les choix duit entre la 5 e américaine et la 8 e anglaise, français pour le déplacer en Provence stratégiques adoptés par les dirigeants depuis la bataille du Garigliano, et le géné - dans le cadre de l’opération « Dragoon » politiques et militaires alliés obligeront ral Juin, qui n’aime pas cela, ne renonce (ex- « Anvil » ) qui prévoit l’ouverture d’un aussi Alexander à abandonner son idée de pas à s’en plaindre auprès de De Gaulle. Ce deuxième front dans le sud de la France. mettre à profit la victoire par une avancée n’est qu’un parmi tant d’autres échanges Juin n’a aucune intention d’en démordre. éclair vers le nord-est de l’Italie. (pour ne pas dire affrontements) dialec - Il obtient d’être reçu par le chef d’état- tiques entre deux personnalités qui ne s’ai - major américain, le général Marshall, au ment pas du tout et dont les caractères pré - QG allié où, avec le soutien du général 4 sentent beaucoup de points de friction . Clark, mécontent lui aussi à l’idée de se L’affrontement va se reproduire quand, le voir retirer des milliers d'hommes (il va 16 juin, le commandement du corps expé - devoir renoncer, en plus des Français, à ditionnaire français sera informé qu’il doit deux corps d’armée américains), il essaie retirer du front italien ses deux premières de le convaincre de vive voix. Mais rien à divisions entre le 25 juin et le 7 juillet et faire : il est trop tard pour révoquer ou que l’engagement français en Italie n’ira modifier « Dragoon » . pas au-delà du fleuve Arno. Juin envoie Toutefois, Juin ne quitte pas le QG les aussitôt à de Gaulle un message urgent : mains vides : Marshall lui remet l’insigne Un détachement de la 13 e demi-brigade de Légion étrangère sous les ordres du commandant Paul Arnault « On a peine à comprendre cette stratégie de la Distinguished Service Medal , en fai - (à droite) présente les honneurs au général de Gaulle, même s’il s'agissait d’atteindre avant tout sant ainsi le premier Français à recevoir accompagné du général Juin, commandant du corps le sud de la France. Quoi qu’il en soit j’exé - cette prestigieuse décoration pendant la expéditionnaire français en Italie, à la villa Médicis, à Rome, le 28 juin 1944 (ECPAD). cuterai les ordres quand j’aurai reçu les Seconde Guerre mondiale.

4Nous ne pouvons souscrire à une telle affirmation. Même si de Gaulle et Juin ne se sont pas spécialement lié à Saint-Cyr et ont fait leur carrière sur des théâtres différents, l’un en Europe, l’autre en Afrique du Nord, les deux hommes, marqués par la camaraderie de Saint-Cyr, conservaient, selon Bernard Pujol, Juin, Maréchal de France , Paris, Albin Michel, 1988, 407 pages, p. 23, au-delà du tutoiement, « une certaine connivence que seuls des événements tragiques finiront, sur le tard, par briser » . Pour plus de précisions, nous renvoyons à Philippe Vial, « La Quatrième et son maré - chal : un essai d’interprétation du comportement politique d’Alphonse Juin » , in Olivier Forcade, Éric Duhamel, Philippe Vial (dir.), Militaires en République : Les officiers, le pouvoir et la vie publique en France : Actes du colloque international tenu au Palais du Luxembourg et à la Sorbonne les 4, 5 et 6 avril 1996 , Publications de la Sorbonne, 1999, 734 pages, p. 153-180 (NDLR). 5Télégramme du général Juin au général de Gaulle, 16 juin 1944, reproduit dans Alphonse Juin, La Campagne d’Italie , G. Victor, 1962, 233 pages, p. 151, et Pierre Le Goyet, La Participation française à la campagne d’Italie, 1943-1944 , Imprimerie nationale, 1969, 347 pages, p. 158 (NDLR). 6Télégramme du général de Gaulle au général Juin, en réponse au précédent, 17 juin 1944, reproduit dans Charles de Gaulle, Lettres, notes et car - nets, tome 5 : Juin 1943-mai 1945, Paris, Plon, 1983, p. 251-252.

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Le corps de poursuite français Toujours le 9 juin, la 3 e division d’infante - Reprenons maintenant le fil des événe - rie algérienne entre à Valentano, alors que e e ments. la 6 division blindée sud-africaine (XIII corps britannique) est arrêtée par une La progression au nord de Rome se résistance allemande acharnée aux pieds déroule assez aisément jusqu’à une de Bagnoregio, qui tombera deux jours dizaine de kilomètres de Viterbe, où des plus tard, grâce à l’intervention française. affrontements de plus en plus rapprochés Nous arrivons ainsi au 11 juin. La ville de et sanglants éclatent entre, d’une part, les Bolsena, massivement bombardée par les légionnaires du 1 er bataillon, aux ordres du Américains le 8 et le 9, vient d’être prise et commandant Gabriel Brunet de Sairigné, contournée sans difficultés, mais voilà que du 2 e bataillon, aux ordres du comman - la division se voit contrainte à des combats dant René Morel, et les hommes du meurtriers sur toute la ligne du front. 4e régiment de la 3 e division d’infanterie L’ennemi est toujours repoussé, mais à américaine et, de l’autre, le 3 e régiment chaque fois au prix de lourdes pertes pour parachutiste du colonel Herzingen et le 3 e e les troupes alliées. C’est le moment où les groupe du 17 régiment d’artillerie blindée er Anglais de la 9 e division quittent l’axe de la Un blindé du 1 RFM à Torre Alfina, près allemande. voie Cassia pour se diriger d’abord sur d’Acquapendente, en juin 1944 (DR). La ville, épuisée et vidée par les violents Orvieto (pilonnée elle aussi par l’aviation bâtiments, ce qui rend assez dangereux bombardements américains des 6 et 7 américaine) et continuer ensuite vers les ratissages et la mise en sécurité des juin et ceux du 9 dans la matinée, est Pérouse, en remontant le cours du Tibre, maisons. occupée pratiquement sans pertes dans la dans le but de participer activement à l’of - soirée du même jour. Montefiascone, tou - fensive dans le nord-est, le long de la côte La division avance suivant deux directions : jours sur la voie Cassia, sera prise le lende - adriatique. Les Anglais étaient encore vers le mont Amiata et vers Radicofani, où e main par la 1 re DFL, c’est-à-dire les convaincus qu’il fallait développer l’offen - se dirige aussi la 13 DBLE, véritable fer de hommes de la 13 e demi-brigade de la sive finale en direction de l’Autriche et de la lance du contingent français. Légion et ceux du 22 e bataillon nord-afri - Yougoslavie, alors que les Américains s’en La progression des troupes est sans répit cain, avec l’appui du 1 er régiment d’artille - tenaient strictement aux engagements pris et, le 13 juin, Bagnoregio tombe. er rie et du 1 bataillon du génie du com - à la conférence de Téhéran, d’après les - Le 14, les légionnaires du 2 e bataillon, que le mandant Tissier. quels les Balkans devaient rester sous le commandant Morel conduit personnelle - contrôle exclusif de l’Union soviétique. ment, parviennent à libérer Castel Giorgio À partir du 12 juin, la et San Lorenzo Nuovo après une – énième – manœuvre allemande d’op - attaque très violente. Dans le cas d’espèce, position se fait encore plus un facteur déterminant a été l’opération déterminée. L’action visant à nocturne grâce à laquelle les hommes de la retarder l’ennemi se fait de compagnie du capitaine La Rocque ont plus en plus méthodique et réduit au silence deux mitrailleuses instal - imprévisible à la fois, à tel lées sur la Rocca di San Giovanni. point qu’elle arrive souvent à C'est à ce moment-là que, pour la pre - limiter la mobilité de l’adver - mière fois depuis la prise de Rome, des saire. Il s’agit de techniques formations de maquisards entrent en aussi simples qu’efficaces : action contre les arrière-gardes alle - embuscades éclair réalisées mandes. Il s’agit de tout petits groupes par de petites unités mobiles, menant contre l’ennemi, de manière ou ponts et routes minés que improvisée mais courageuse, des actions l’on fait sauter juste après le de sabotage ou de diversion pour les - passage de la tête d’une quelles elles paient sans compter le prix colonne. Un de ces engins du sang. L’opération la plus éclatante a explosifs tue le lieutenant- lieu le 17 juin à Radicofani, où les colonel Laurent-Champrosay, Allemands, avant de quitter la forteresse, commandant du 1 er régiment exécutent le carabinier Vittorio Tassi et le artillerie, qui saute avec sa résistant Renato Magi (l’un et l’autre jeep de commandement en seront décorés pour leur valeur militaire), traversant un gué emprunté qui appartenaient à une section de sabo - afin d’éviter un pont d’aspect tage de la (du nom du trop rassurant pour ne pas « brigade Si.Mar » dissimuler de piège. colonel Silvio Marengo), qui vient d’atta - quer des positions allemandes dans la val - Les Allemands s’évertuent à lée du Paglia. À la différence des hommes désorienter et terroriser l’ad - des « brigades Garibaldi » et du « groupe versaire, au moment où les patriote de l’Amiata », agissant dans d’au - Alliés n’ont vraiment pas de tres zones de la région, les maquisards de temps à perdre. Ils ont la « Si.Mar » venaient de l’arme des cara - déposé des mines antiper - biniers et n’étaient pas très politisés. Ils sonnel un peu partout, constituèrent des patrouilles d’avant- La poursuite en Toscane (DR). notamment à l’intérieur des garde, pendant la progression des troupes

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L’ordre de dépasser le Podere del Rigo et d’avancer sur Radicofani est donné à la 13 e DBLE le 16 juin. Les conditions météo - rologiques se détériorent : il pleut et fait froid. Gravir les lignes de faîte, transfor - mées en pièges boueux, et marcher le long de routes et de sentiers escarpés transfor - més en torrents, représente un vrai cal - vaire. En outre, ces routes et sentiers, que les bombardements américains des jours précédents ont rendus presque imprati - cables, se trouvent constamment sous le tir des canons automoteurs allemands et surtout des mortiers qui, installés en hau - teur, à plus de 600 mètres au-dessus des campagnes environnantes, ne laissent guère de place à l’optimisme. Et pourtant, les hommes de la 13 e ont un très bon moral. Les nôtres ont hâte de se battre : en lisant les mémoires et notes personnelles que tant d’entre eux nous Le général de Gaulle sur le front d’Italie. À ses côtés, on reconnaît, de gauche à droite, le général Béthouart, le géné - ont laissés, on les dirait en proie à une ral Juin et le général Brosset, une carte en mains. Photo de Bernard Saint-Hillier, à gauche de l’image (coll. famille envie, presque une frénésie, de se jeter Saint-Hillier). dans la bagarre. Ce qui n’est pas surpre - alliées en Toscane, et s’engagèrent, par la bataille de Radicofani, à cause du mauvais nant, si l’on considère l’esprit de compéti - suite, dans le Corps italien de libération. temps qui s’empare de la zone. Cette tion présent dans les gènes de chacun La résistance allemande dans ce théâtre mauvaise météo, imprévisible car totale - d’entre eux ; on pourrait même dire que d’opérations se concentra, jusqu’à se faire ment hors saison, devait conditionner c’était dans leur culture. acharnée, sur Acquapendente et Torre lourdement le déroulement de la bataille. Transis et trempés, ils passent cette veillée Alfina, à tel point que, pour les en déloger Le plus difficile est encore à venir et com - d’armes sous des abris de fortune, moins – le 15 juin –, il fallut des bombardements mence quand la 13 e reçoit l’ordre d’avancer bien équipés probablement, que leurs massifs de la 12 e Air Force américaine et plusieurs jours de combats engagés par les légionnaires du 2 e bataillon, les Anglais du 27 e régiment d’infanterie et les hommes de la 61 e brigade d’infanterie américaine, appuyés par les batteries du 1 er régiment d’artillerie français libre, du lieutenant- colonel Laurent-Champrosay, et celles du 977 e régiment d’artillerie américain. Les Allemands abandonnent Acquapen- dente, Torre Alfino et Onano le 15 juin. Les deux divisions françaises se trouvent au même moment sur les hauteurs au nord d’Acquapendente, face à un vaste amphithéâtre fermé vers le nord par deux grands reliefs naturels, le mont Amiata et le rocher de Radicofani. Et c’est bien par là qu’il faut passer pour s’ouvrir le chemin vers la vallée de l’Arno. Au fond de la vallée entre le mont Amiata et Radicofani, la rivière Paglia sépare les zones d’opérations des deux divisions françaises : alors que la 3 e DIA intervient à Parachutistes allemands à la défense d’Onano avec une mitrailleuse MG 42, durant l’été 1944 (photo de Toni l’ouest, vers Santa Chiara et Pian Schneiders, Bundesarchiv, Bild 1011-587-2253-15). Castagnaio, la 1 re DFL opère plus à l’est, en vers Radicofani et se prépare à donner adversaires et leurs « voisins de palier » direction de Radicofani. Au cimetière l’assaut à la forteresse. On commence par anglo-américains. Et pourtant ils atten - d’Onano, dominant la vallée du Paglia renforcer, sur le mont Calcinaio, à Celle dent tranquillement l’ordre de « sortir » jusqu’à la ligne « Albert », un observatoire sul Rigo, à Cetona et sur le mont Cetona, pour aller s’emparer de ce village au nom d’artillerie est immédiatement installé, des positions hautement stratégiques, bizarre, perché au sommet d’un pic, qu’ils qui ne sera malheureusement d’une pour pouvoir franchir Radicofani, vérita - ont à peine entrevu aux rares moments où grande aide ni pour l’aviation ni pour l’ar - ble porte d’entrée de la Toscane, atteindre les nuages se sont dissipés. Ils attendent tillerie dans les jours cruciaux de la Sienne et finalement Florence. cet ordre comme s’il s’agissait de partir

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apprivoiser une charmante dame, un peu les camarades tombés pendant les cam - Notre bon aumônier ne manque pas de hautaine peut-être, sans se douter que, pagnes de cette guerre, depuis Narvik. travail, ces jours-là, et l’accomplit remar - grâce à la conquête de cette madone flo - Drôle de rêve qui me laisse un goût amer à quablement, d’après le caporal Hotain : rentine, ils vont entrer dans l’histoire. mon réveil, quand je commence, avec mon « Le comportement de notre aumônier Ce qu’ils savent, en revanche, c’est qu’on groupe de combat, à préparer la nouvelle dans cette lutte a été digne de nos leur a confié cette tâche-là, qu’ils mène - conquête. » louanges. Il faut bien le dire. Il s’est prodi - ront très bien à la baïonnette, pendant des Assez prosaïquement, un autre soldat, gué sans répit auprès de chacun : des combats à l’arme blanche, car ils sont les allongé sous un abri accroché à ce qui moribonds pour leur administrer les seuls sur lesquels on peut compter. Les reste d’un hameau détruit, demande à sacrements, des blessés pour les soigner, autres n’iront peut-être pas au-delà de son voisin : « Va savoir pourquoi ces des indécis pour les encourager. Il se soucie bombardements aériens, souvent Italiens ont voulu bâtir autant de bourgs de tout le monde jusqu’à oublier le siffle - conduits à l’aveuglette et contre de mau - sur des pics si durs à escalader… » ment des balles. N’importe : nous avons vais objectifs, comme ce fut le cas à Ponte besoin de lui et, lui, il va et revient, sans se di Rigo, localité assez éloignée de Il y a aussi ceux qui songent aux âmes. Le soucier du sang qui empourpre son visage Radicofani, où plusieurs fermes ont été révérend Jules Hirlemann, compagnon de frappées avec le pont et où de nombreux la Libération, aumônier de la 13 e après la et ses mains, ou de la boue qui raidit ses civils sont morts. mutation du Père Stanislas Malec, a bien à vêtements. » Quoi qu’il en soit, nos légionnaires ne faire en se déplaçant d’une position à l’au - sont pas très anxieux. Voilà comment le tre pour soutenir et encourager ses (à suivre) sergent Mittenaere relate sa nuit avant « paroissiens ». Une parole de consolation l'assaut : « Je dors comme une souche et, en n’est pas encore un sacrement in articulo rêve, je défile sous l’Arc de Triomphe avec mortis , mais cela aide toujours pour gar - Giors Oneto mon détachement, en compagnie de tous der un bon moral. Traduit de l'italien par Pietro Petrucci

Bibliographie

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Appel à contributions

Héritière de la Revue de la France Libre , organe de l’Association des Français Libres de 1946 à 2000, Fondation de la France Libre publie des articles consacrés à l’histoire de la France Libre, de son chef, le général de Gaulle, de ses membres et de ses combats, jusqu’à la victoire de 1945. Longtemps organe de la mémoire française libre, la revue se veut aujourd’hui un relais entre cette mémoire, la recherche scientifique et la vulgarisation de la connaissance historique.

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16 l Juin 2015 • N° 56 HISTOIRE

La libération du territoire et le retour à la République

Nous reproduisons ci-dessous l’allo - machine de guerre de l’armée d’occupa - cution de Louis Cortot, compagnon de tion en Île-de-France. J’ai par exemple la Libération, prononcée à la cérémo - participé à faire dérailler un train de tanks nie de remise des prix du Concours qui venait des usines Renault. national de la Résistance et de la J’ai eu beaucoup de chance pendant long - Déportation au palais de l’Élysée le 8 temps, car je n’ai jamais été arrêté. En mai 2015. 1944, je suis devenu agent de liaison entre l’état-major des Forces françaises de l’in - Permettez-moi d’abord de me présenter. térieur de Seine-et-Marne et celui de Paris Je m’appelle Louis Cortot. Je suis né près commandé par le colonel Rol. de Dijon, il y a 90 ans. En 1940, j’avais 15 ans. En 1945, j’avais 20 ans. J’ai participé à Pour se déplacer, il n’y avait que la bicy - la Résistance intérieure dans le mouve - Louis Cortot avec sa croix de la Libération au Mémorial clette mais peu de pneumatiques. Pour les ment des Francs-Tireurs et Partisans fran - de la France Combattante, au Mont Valérien, le 18 juin cartes d’alimentation, nous faisions des 2015 (ACFL). çais. J’ai été blessé à la tête durant les commandos dans les mairies et les cen - combats de la Libération. J’ai perdu la des véhicules à moteur était interdite aux tres de distribution. vision d’un œil. J’ai été fait compagnon de particuliers. C’était l’économie de guerre Des gens nous ont aidés sans que per - la Libération par le général de Gaulle le 11 et le couvre-feu. sonne ne le sache. Je me souviens que, novembre 1944. Au début de l’année 1941, j’ai dû arrêter dans une commune de Seine-et-Marne Pourquoi me suis-je engagé ? mes études pour aller travailler dans une où nous étions intervenus, le secrétaire de usine. C’est à ce moment-là que je suis mairie nous avait accueillis en nous J’ai grandi en Côte d’Or puis à Paris. Mes entré dans la Résistance. Je n’avais pas 16 disant : « Eh bien, ce n’est pas trop tôt, parents étaient artisans. Dans ma famille ans. Depuis longtemps avec mes cama - depuis le temps que je vous attends ! » Cet et à l’école de la République, j’ai été édu - rades on cherchait quoi faire. On a fini par homme et son épouse étaient formida - qué et averti des horreurs de la guerre. rejoindre un groupe qui s’appelait bles. Ils cachaient chez eux deux enfants Mon oncle qui était né en 1856 me parlait l’Organisation Spéciale. juifs et ils ont mis à notre disposition une de la guerre de 1870. Mon père, c’était celle de 1914-1918. Et moi j’ai connu celle Les jeunes qui sont entrés dans la chambre dans leur pavillon que nous de 1939-45. Résistance au début de l’occupation avons utilisée jusqu’à la Libération en n’étaient pas nombreux. Pour la plupart, août 1944. J’avais 14 ans quand elle a commencé, c’étaient des jeunes qui faisaient partie mais je savais depuis longtemps que la J’ai été grièvement blessé à la fin des com - comme moi de mouvements de jeunesse, paix était en danger. Je savais ce que Hitler bats de la Libération de Paris. J’étais en étudiants, sportifs, scouts, qui s’étaient voulait. J’avais vu ce qu’il avait fait avec route le 25 août 1944 et, à Lieusaint, en intéressés à la vie du pays et à la situation Mussolini en Espagne. Seine-et-Marne, j’ai croisé des Allemands internationale (la guerre d’Espagne, le en déroute qui m’ont tiré dessus. J’ai Je participais aussi à des mouvements de Front populaire, Munich, la montée du perdu un œil et, 70 ans plus tard, j’ai tou - jeunesse. Pour mes parents, le Front nazisme). Des jeunes qui avaient été jours un éclat de métal dans la tête. populaire, cela avait été les lois sociales. humiliés par la débâcle et par l’occupa - Pour moi, cela a été l’Aviation Populaire, tion allemande. La libération de Paris, la liesse et la fête, je une belle aventure qui avait été inventée ne les ai pas vues car j’étais à l’Hôtel-Dieu par les ministres Pierre Cot et Jean Zay Il y avait aussi beaucoup de femmes et de en train d’être soigné. Ensuite je me suis pour que la jeunesse et les classes popu - jeunes filles. Elles furent souvent des remis et j’ai continué la guerre. Quand j’ai laires puissent piloter. Eux aussi pensaient agents de liaison formidable. Quelques- été appelé en 1945 pour passer le conseil déjà à la guerre qui venait. unes aussi prirent part à la lutte armée. de révision, je suis arrivé en uniforme, je Elles firent preuve de courage et d’engage - me battais depuis déjà quatre ans ! Ils ont En 1940, j’ai vu la défaite. Les Allemands ment, et mettaient sans cesse leur vie en préféré me laisser partir… étaient dans mon pays et on ne les avait péril au cours de leurs actions. Certaines pas invités : c’était ce que je pensais alors. résistantes furent internées, déportées. La Pendant la guerre, je ne pensais pas J’ai vu aussi la création de l’État Français. contribution des femmes et des jeunes trop à la suite. Pour moi, la France, c’était la République, filles à la libération du territoire fut essen - Pour nous, la priorité c’était de libérer le les droits de l’homme, les lois qui protè - tielle. On n’en parle pas assez. gent. Ce n’était pas le gouvernement de pays. Mais on voulait tous que ce soit Vichy. Qu’ai-je fait dans la Résistance ? mieux après. Nous avions vu l’effondre - ment de la France, et tout ce que le Front Mes activités pendant cette période se Dans la région parisienne où j’étais, ce fut populaire n’avait pu faire. le temps de la faim, pour moi comme sont passées en région parisienne. J’ai pour la majorité des gens qui ne pou - commencé par des petites tâches, comme Nous voulions le retour de la République, vaient pas payer les tarifs exorbitants du récupérer des armes, couper des lignes et c’est aussi pour cela que les résistants marché noir. Les hivers étaient rigoureux, téléphoniques, distribuer des tracts. Puis se battaient. Pour prendre en main nous- on avait froid dans les écoles, on gardait j’ai participé à des opérations de sabotage. mêmes notre destin. C’était la mission des manteaux et gants. Toute circulation avec Notre mission, c’était de désorganiser la commissaires de la République. Le der -

Juin 2015 • N° 56 l 17 HISTOIRE

nier d’entre eux était mon ami Raymond du CNR, et nous veillons à la mémoire de j’avais votre âge. J’ai connu une France où Aubrac qui est mort en 2012. nos camarades qui ont donné leur vie il y avait très peu d’automobiles, pas d’eau pour que nous puissions vivre dans la paix. courante dans les logements, pas de gaz, Leur rôle a été très important. Après la pas d’électricité. Mais j’avais quelque Libération, pendant environ six mois, tout Qu’est-ce que je retiens de mon chose de bien plus précieux, de bien plus était décentralisé, même les évènements expérience dans la Résistance ? utile pour une vie : j’avais un idéal. civils et militaires, et ce n’était pas évident de parcourir le même chemin et de main - D’abord, la camaraderie. Le sentiment de Réfléchissez, n’acceptez pas les injustices, tenir les mêmes valeurs pour l’unité de solidarité qui nous unissait, la confiance agissez. Pas parce que vous êtes sûr de réus - notre République. qu’on se faisait. C’est quelque chose que sir, mais parce que c’est juste : c’est cela je n’ai plus jamais retrouvé avec cette avoir un idéal. Restez toujours vigilants. En 1945, il ne nous restait qu’une chose à intensité. Intéressez-vous à ce qui se passe en France, faire, c’était de reconstruire, appliquer le en Europe, dans le monde. Tout vous programme du Conseil national de la Aussi l’espérance. Nous étions dans une concerne. Défendez vos droits, mais ayez Résistance, adopté à l’unanimité le 15 époque atroce, et nous avions l’espoir. Parce que nous avions un idéal. aussi conscience de vos devoirs. Vous pou - mars 1944 par les organisations de vez le faire. J’ai confiance en la jeunesse. Résistance, les partis politiques et les syn - Aujourd’hui je rencontre beaucoup de dicats résistants. jeunes. Grâce au Concours national de la Merci. Le sacrifice de tous ceux qui s’étaient enga - Résistance et de la Déportation, je vais gés au péril de leur vie pour combattre la leur parler de ce que j’ai vécu. Je suis barbarie nazie et lutter pour la liberté, frappé par le nombre d’entre eux qui dou - trouvait ainsi son accomplissement. tent de l’avenir. C’est très différent de ce que nous avions connu. Ils ont parfois du Beaucoup de progrès qui nous semblent mal à comprendre comment nous normaux aujourd’hui viennent directe - vivions. Les privations, la faim, le froid. Ils ment de ce programme, la sécurité se demandent aussi ce qu’ils auraient fait sociale, les retraites, le droit du travail, à notre place. C’est peut-être ce que vous l’accès à la culture… Il faut le relire car il vous demandez aussi. Personne ne peut reste une inspiration. répondre à cette question. Maintenant, je suis en retraite, je fais par - Mais ce que je peux vous dire, c’est que tie d’une association d’anciens résistants. vous avez une chance extraordinaire. Vous Nous défendons les valeurs de la vivez une époque avec des progrès que je Louis Cortot avec François Broche le 17 juin 2015 Résistance énoncées dans le programme ne pouvais même pas imaginer lorsque (AFCL).

Pour un autre 8 mai

J’ai vécu le 8 mai 1945. Nous avions libéré Tunis et connu ainsi les vant. En uniforme, évidemment : un sol - premiers merveilleux témoignages de la dat ! J’attendais une place dans un bateau C’est pourquoi je me permets de vous joie d’une victoire et d’une délivrance chè - pour me faire libérer en Tunisie. Nous interpeller, vous tous, vieux comme moi, rement acquises. Comment ne pas se sou - n’étions plus le 8 mai, mais c’était encore moins vieux et plus jeunes. J’éprouve, venir de ces habitants de Montefiascone, de la folie. Inimaginable ! depuis quelques années, ce besoin que je en Italie, surgissant des grottes où ils ne satisfais qu’aujourd’hui, de crier, de s’étaient réfugiés pendant la durée des « gueuler » : « Mais arrêtez, arrêtez ! Ce combats pour ouvrir leurs caves et offrir, Alors, vous tous, intervenez auprès des n’est pas le 11 novembre ! Le 8 mai 1945 fut dans la rue, leurs tonneaux de ce vin blanc responsables, faites que le 8 mai devienne une journée d’explosion de bonheur, de plein de soleil à leurs libérateurs ! Et cette un jour de liesse, à l’instar du 14 juillet, car joie, de délivrance ! » remontée de Cavalaire à Lyon, cette traver - c’est le même esprit qui anima les soldats Dans les rues, sur les places, ce jour-là, sée de la Provence où toute la population de l’An II, ceux des maquis de notre fière tous mes camarades qui y « sont restés » des villes, des campagnes nous acclamait Résistance, ceux de Bir Hakeim, de auraient souhaité que vous dansiez la et nous comblait de tous les produits Cassino et d’ailleurs. farandole, que vous chantiez, même les locaux jetés à profusion dans nos camions La Liberté se fête dans la joie, pas comme chants actuellement à la mode, pour américains ! Quant au 8 mai 1945, les un enterrement. accompagner « Ah ! Le petit vin blanc » , cloches déchaînées, et puis les défilés ! « « Le Chant des Africains » , « Le Faites gaffe ! Ce n’est pas le moment de se Mousquetaire » , la « Marche lorraine » , casser un bras ! La guerre est finie ! » , car la Un Carmausin « Fanchon » , « Le Chant des partisans » , chaussée était couverte de roses et la foule Matricule 3 200 etc., toutes chansons qui fleurissaient exubérante ne nous laissait que peu de Français Libre 29 370 dans la joie et au rythme de notre avancée place, à notre drapeau et à sa garde, pour de libérateurs. remplir ce dernier devoir à nos camarades disparus. Ce n’est pas le 11 novembre, jour anniver - saire de la fin d’une boucherie inexcusa - Pour ma part, j’ai cru mourir étouffé sur le ble, c’est le jour de notre libération ! Vieux Port, à Marseille, le 14 juillet sui -

18 l Juin 2015 • N° 56 LIVRES

Résistance (1927-1943)

Né dans un milieu républicain, ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm, agrégé d’histoire, Pierre Brossolette (1903-1943) opte pour le journalisme, après son service militaire. Engagé à partir de 1924 en faveur de la cause pacifiste, il milite pour le règlement des contentieux internationaux dans le cadre de la SDN et œuvre pour la création d’une Fédération européenne. En parallèle, il adhère à la Ligue des droits de l’homme, à la Ligue internationale contre l’antisémitisme, à la Grande Loge de France puis au Grand Orient de France. Au plan politique, il rejoint la SFIO au début des années trente, après avoir été proche plusieurs années durant des Jeunes-Turcs du parti radical. Spécialisé dans les questions de politique internationale, il montre, dans ses textes de l’entre-deux- guerres, tout à la fois une pleine compréhension des périls qui menacent le monde et une incapacité à se détacher de schémas de pensée liés à ses fidélités politiques. Après l’arrivée au pouvoir de Hitler en Allemagne, son souci de préserver la paix se heurte à l’exigence de s’opposer aux agissements des dictatures. Partisan de la fermeté au moment de Munich, pour tenter de sauver la paix, il se résout à la guerre qui vient, au printemps 1939. Affecté à la protection du grand quartier-général pendant la « drôle de guerre » et la campagne de France, il s’engage dans la Résistance au début de mars 1941, au sein du groupe du Musée de l’Homme, puis au réseau Confrérie-Notre-Dame du colonel Rémy, et noue des contacts avec plusieurs mouvements, avant d’être appelé à Londres, à la fin d’avril 1942. Engagé dans les Forces françaises libres dès décembre 1941, il devient l’adjoint de Passy au BCRA, parallèlement à une activité de propagandiste, et effectue trois missions en France avec Forest Yeo-Thomas et Passy, au cours desquelles il participe à l’unification des résistances. Jusqu’au bout, cependant, il demeure fidèle à son aspiration à la rénovation, dont il espérait voir l’aboutissement au moment de la Libération, sous la conduite du général de Gaulle. Paru initialement en 1998, ce choix de vingt-six textes, articles, chroniques radiophoniques, rapports et discours, dont la rédaction Résistance (1927-1943) s’étale de 1927 à 1943, fait l’objet d’une réédition, à l’occasion de l’entrée de leur auteur au Panthéon, aux côtés de Geneviève de Gaulle- Pierre Brossolette Anthonioz, Germaine Tillion et Jean Zay. Une heureuse initiative qui Textes rassemblés et présentés par Guillaume Piketty permet à Guillaume Piketty, auteur de cette remarquable anthologie, d’analyser les raisons du destin posthume contrasté de cette grande Odile Jacob, avril 2015, 208 p., 21,90 € figure de la France Libre, aujourd’hui redécouverte.

Correspondance d’avant-guerre et de guerre

Née à Neuilly dans une famille modeste d’origine piémontaise par son père et mosellane par sa mère, Madeleine Michelis (1913-1944) mène des études brillantes qui la conduisent en 1934 à l’École normale supérieure de Sèvres. Après un échec au concours de l’agrégation, qu’elle continue à préparer et finira par obtenir en 1943, elle devient professeur de lettres classiques au lycée de jeunes filles du Havre, où elle enseigne le français et le latin de 1937 à 1939. Le déclenchement de la guerre en septembre 1939 et l’afflux de réfugiés du Nord et de la région parisienne conduisent à l’ouverture à Étretat d’une annexe du lycée, où elle est détachée et accueille essentiellement des élèves parisiens durant la drôle de guerre. Après la débâcle de juin 1940 et l’exode, qui la conduit à Caen puis en Charente-Maritime, et la signature de l’armistice, elle retrouve ses parents à Pamiers, en Ariège, avant de devoir rejoindre , où elle enseigne à l’École primaire supérieure jusqu’en mars 1941. Affectée ensuite à titre provisoire au lycée Victor Duruy, à Paris, elle protège ses élèves juives, transmet des messages pour la Résistance et devient la collaboratrice de Pierre Brossolette, avant d’être mutée au lycée de jeunes filles d’ à la rentrée. Dans une ville dévastée par les bombardements allemands de mai 1940 et divisée en deux par la ligne de démarcation entre la zone occupée et la zone interdite, elle apporte son concours au réseau d’évasion Shelburn, qui dépend du Special Operations Executive (SOE) britannique, dont elle devient un agent P1 puis P2 au début de 1944. Arrêtée à son domicile par la Gestapo le 12 février 1944 dans le cadre de ses activités pour Shelburn, elle est transférée deux jours plus tard à Correspondance d’avant-guerre Paris, où elle trouve la mort, le 15 ou le 16 février, suicidée ou étranglée par ses bourreaux. et de guerre À travers sa correspondance, fournie en raison des nombreux liens Madeleine Michelis qu’elle n’a cessé d’entretenir non seulement avec sa famille, mais aussi Préface de Jean-Louis Crémieux-Brilhac, de nombreux amis, on découvre son quotidien d’étudiante puis de professeur, son goût des voyages et des paysages, mais aussi son présentations de Julien Cahon, Marie-Claude Durant humour, sa joie de vivre, ses idées pacifistes et ses inquiétudes devant la et Charles-Louis Foulon montée des périls. Le Félin, janvier 2015, 270 p., 20 €

Juin 2015 • N° 56 l 19 LIVRES

Churchill – de Gaulle

La première rencontre entre Churchill et de Gaulle date du 9 juin 1940, en pleine débâcle des armées françaises. Le Premier ministre britannique vient insuffler sa détermination au gouvernement français, où de Gaulle est, depuis quelques jours, sous-secrétaire d’État à la Défense nationale. Il est difficile d’imaginer, en apparence, deux personnes plus dissemblables que Churchill et de Gaulle. Issu d’une famille aristocratique, Churchill grandit dans un foyer désuni et se révèle un cancre, plus passionné par la littérature que par le latin ou les mathématiques. À défaut d’autre choix, il entre dans l’armée avant de devenir correspondant de guerre, activité qui lui assure revenus et notoriété, et lui ouvre une carrière politique fulgurante mais aventureuse et cahotée. Né dans une famille bourgeoise très soudée, catholique pratiquant, plus jeune d’une génération que Churchill, de Gaulle est un élève exemplaire, et sa carrière militaire, si elle est plus lente, s’avère toutefois plus régulière. Surtout, il ne partage guère les passions impériales de son aîné, et son amour de la patrie est plus exclusif. Scellée par les accords Churchill-de Gaulle du 7 août 1940, cette relation traverse la guerre jusqu’à la victoire de 1945, malgré toutes les difficultés, qu’il s’agisse de Mers El-Kébir, de l’échec de Dakar ou de l’affaire du Levant. Orageuse, elle l’est, à plus d’un titre, d’autant qu’elle s’insère, en fait, dans un trio avec le président des États-Unis, Roosevelt, dont l’animosité à l’égard de De Gaulle est devenue proverbiale. Mais, par-delà les emportements et les incompréhensions, demeure entre les deux hommes un inébranlable respect. Le rôle de leur entourage respectif aura été, dans ces circonstances, plus d’une fois déterminant. S’il décrit leurs différences et leurs différends, le livre s’attache également à certaines thématiques communes aux deux hommes. Une même préoccupation les habitait, Churchill – de Gaulle à l’égard des médias, dont ils appréciaient tout l’intérêt pour se faire connaître et Fondation Charles de Gaulle, Musée de diffuser leur message, même si l’un et l’autre se remarquaient par une même propension à ne les considérer que comme un moyen pour atteindre l’opinion l’Armée (dir.) publique. Écrivains et orateurs, ils n’hésitaient pas à puiser dans le patrimoine Préfaces de François Hollande, de SM la littéraire et historique d’utiles références, et montraient un même souci dans le choix de leurs éditeurs. Contraints tous deux de quitter le pouvoir, au sortir de la reine Elizabeth II, de Jacques Godfrain et de guerre, ils avaient fini par être rappelés par leurs concitoyens, à des périodes sir David Cannadine, avant-propos du différentes, mais avec des enjeux parfois similaires. Des décennies après leur mort, à présent qu’ils sont entrés dans l’histoire, leurs figures demeurent présentes, et leur général Christian Baptiste couple inoxydable. Éditions de La Martinière, mars 2015, 288 Cet ouvrage est le catalogue de l’exposition qui se tient actuellement au Musée de p., 28 € l’Armée, depuis le 10 avril 2015 et jusqu’au 26 juillet prochain.

Les Relais de la Mémoire

Quand on évoque la question de la mémoire, on pense naturellement à son rôle social – elle est communément associée, aujourd’hui, à l’idée de devoir – ou à ses enjeux – en particulier, les concurrences qui l’entourent. C’est également devenu un objet de recherche historique, depuis le grand succès des Lieux de mémoire (1984-1992), publiés sous la direction de Pierre Nora.

Après un précédent ouvrage, paru en 2011, consacré aux carrés militaires, la délégation des Hauts-de-Seine du Souvenir Français s’attache ici au rôle des témoins dans la transmission de la mémoire des principaux conflits dans lesquels la France a été engagée durant les cent cinquante dernières années.

L’objectif n’est pas ici de bâtir un récit historique, au sens strict du terme. Qu’il s’agisse de la guerre franco- prussienne de 1870, des première et deuxième guerres mondiales, des guerres d’Indochine et d’Algérie, ou des opérations extérieures dans lesquelles la France est intervenue, ces dernières années, les auteurs ont pris le parti de mettre en lumière les différents aspects de ces conflits – ceux, du moins, que la mémoire a conservés – en s’appuyant sur les seuls témoignages d’anciens. Si les carnets personnels, correspondances et mémoires conservés par les familles ou publiés constituent l’unique ressource documentaire pour les deux premiers conflits, le témoignage oral ou écrit, rétrospectif, a été chaque fois privilégié, dès que subsistaient des survivants.

Dans certains cas, les événements décrits sont survenus sur le territoire de l’actuel département des Hauts-de-Seine. Dans d’autres, ils impliquent Les Relais de la Mémoire simplement des habitants du département ou leur ancêtre. Mais le récit qui en Frédéric Rignault (dir.) est proposé dépasse le cadre étroit de l’histoire locale pour s’attacher à l’histoire de la France tout entière. Atlante éditions, novembre 2014, 288 p., 25 €

AVIS À NOS ABONNÉS Sauf avis contraire de notre part, les ouvrages faisant l’objet d’un compte-rendu dans notre revue ne sont pas disponibles à la vente à la Fondation de la France Libre.

20 l Juin 2015 • N° 56 IN MEMORIAM

Paul Baudin les aérodromes de Perpignan et de Georges Caïtucoli Montpellier. Né le 15 août 1920 à Ferryville, actuelle - En 1942, par l’intermédiaire d’un cama - ment Menzel Bourguiba, en Tunisie, il fait rade de promotion de Rochefort, Paul est ses premiers pas dans l’armée de l’air à 18 recruté par le BCRA (service de renseigne - ans au cours de son service militaire ments de la France Libre) pour créer et comme sous-officier pilote sur Potez 63 . diriger le secteur Roussillon du réseau Engagé en 1943, il rejoint le 3 e SAS. Cette « Andalousie ». Son nom de code est unité est parachutée en France en 1944 « Benjamin » (il n’a en effet que 24 ans). Il puis en Hollande lors de l’opération remplit parfaitement sa mission et se rend Amherst en avril 1945. parfois à Toulouse, où se trouvent le chef Après-guerre, il travaille dans le journa - de réseau et la liaison vers Londres. Ces lisme, avant de devenir agent commercial déplacements lui valent quelques aven - puis entrepreneur dans le textile après- tures et quelques frayeurs, mais son sang- guerre. Vice-président (1982-1983) puis froid, son sens de l’improvisation et une président national de l’Amicale des bonne dose de chance lui permettent anciens parachutistes SAS et des anciens Paul Baudin. d’échapper aux griffes de la Gestapo et de commandos de la France Libre (1983- la Milice. 2000), il rejoint en 1987 le comité direc - Paul Baudin nous a quittés le 6 mai der - En juin 1945, nommé aspirant, il est nier. Il participait activement à la repré - teur de l’Association des Français Libres, affecté à la BA 118 du Bourget, puis à d’au - où il succède à Georges Ronceray au sentation de la Fondation, au pied du tres bases et entrepôts de la région pari - Canigou, dans le Conflent. Ses obsèques, poste de secrétaire général en 1990. sienne. En avril 1953, il rejoint l’Indochine À ce poste, il participe à la création, en célébrées à l’église Saint-Saturnin de et le groupe de transport 2/62 stationné Vernet-les-Bains le 7, ont permis à ses 1994, de la Fondation de la France Libre, près de Hanoï dont les Dakota larguent qui prend la suite de l’association le 18 nombreux amis, membres des associa - parachutistes et ravitaillement dans tout tions patriotiques accompagnées de leur juin 2000, et dont il a été l’animateur en le Tonkin et en particulier à Dien Bien qualité de secrétaire général de 2000 à drapeau, de présenter leurs condo - Phu. Il termine son séjour fin 1954 près de léances à ses enfants et petits-enfants. 2011 et de vice-président de 2007 à 2011, Saigon. Au retour, il est affecté au service contribuant à de nombreux projets Voici l’allocution prononcée par le géné - du matériel de l’armée de l’Air où il restera mémoriels, dont le département Seconde ral (2S) Serge Ménard, président départe - jusqu’en 1967. Il quitte alors le service actif Guerre mondiale du Musée de l’Armée et mental de l’association des Anciens comme commandant mais continue à le train de la France Libre. Après son enfants de troupe. œuvrer dans la réserve. retrait, il demeurait administrateur. Il est Il entame une seconde carrière au minis - décédé à son domicile parisien dans la Mesdames, Messieurs, chers Amis, tère de l'Éducation nationale, il est à la nuit du 2 au 3 juin 2015. Nous sommes réunis pour rendre un der - Direction régionale de la Jeunesse et des Il était grand officier de la Légion d’hon - nier hommage à Paul Baudin. Je vais rap - Sports d’Île-de-France de 1967 à 1972, puis neur, médaillé militaire, grand-croix de peler ici qui fut ce camarade. Paul est né à à l’Inspection académique de la Mayenne l’ordre national du Mérite, titulaire de la Amélie-les-Bains le 13 décembre 1918. Il à Laval, de 1972 à 1982. Il prend alors une croix de guerre 1939-1945 avec palme, de n’a pas connu son père, adjudant de la retraite définitive. la médaille des évadés et de la Military Coloniale, tombé deux mois plus tôt sur le En 1992, après le décès de son épouse, il Medal . front de Champagne après avoir servi s’installe à Vernet, dans la maison fami - Il a, en outre, été membre du Haut depuis 1904, notamment en Chine et au liale, face au Canigou qu’il aimait tant. Il Conseil à la Mémoire Combattante et du Maroc. Il passe son enfance à Vernet-les- se consacre alors, comme à Laval, à de Conseil économique et social. Bains où sa mère, originaire de Feuilla, s’est nombreuses activités de mémoire et d’en - installée. traide. À 14 ans, en 1932, il entre aux Enfants de Le commandant Baudin était chevalier de troupe, à Saint Hyppolyte-du-Fort (30), et la Légion d’honneur, médaillé militaire, poursuit ses études à l’École militaire pré - officier de l’ordre national du Mérite et des paratoire de Billon (63). À 18 ans en 1936, Palmes académiques. il s’engage dans l’armée de l’Air. Il est alors Les membres de la Légion d’honneur, les envoyé à l’École des apprentis mécaniciens anciens des Forces françaises libres et de la de Rochefort. Il en sort deux ans plus tard, Résistance, ceux du Souvenir Français et sergent, breveté supérieur mécanicien des associations patriotiques, les anciens avion. de l’armée de l'Air, se joignent aux anciens Affecté en 1938 à la base aérienne de Enfants de troupe pour ce dernier adieu à Villacoublay, il prépare le concours de un homme d’honneur, dont la force d’âme l’école d’officier mais est interrompu par le et le courage n’ont eu d'égal que la gentil - début de la guerre. Il rejoint le groupe de lesse et la modestie. chasse 2/12 près de Rouen. En mai et juin Nous assurons sa famille de toute notre 1940, lors de l’invasion allemande, il se compassion en cette triste circonstance. replie avec son unité, tout en poursuivant le combat par Rennes, La Roche-sur-Yon, Les cérémonies du 8 mai, à Perpignan et à Rochefort, Bordeaux, Toulouse. C'est là Prades, ont été une nouvelle fois, l’occa - que les rattrape l’armistice et l’ordre de sion de rappeler sa mémoire. Georges Caïtucoli en 2002, lors de la première conven - déposer les armes. Il est démobilisé puis Marc Gervais tion générale de la Fondation à l'hôtel de ville de reversé dans une unité de gardiennage sur Délégué pour les Pyrénées-Orientales Paris (photo Yves Ropars).

Juin 2015 • N° 56 l 21 IN MEMORIAM

Anna Durand Entrée en qualité de pensionnaire à En janvier 1943, il accompagne en l’Institution nationale des Invalides le 3 Angleterre le groupe Lorraine, qu’il réin - décembre 2012, elle y est décédée le 13 tègre en septembre, après plusieurs mois avril 2015, dans sa 97 e année, et a été de formation et diverses affectations. inhumée aux côtés de son époux dans le Navigateur leader d’escadrille, il se dis - cimetière de Kerfautras à Brest. Elle était tingue par son calme et ses qualités d’ob - officier de la Légion d’honneur, médaillée servateur, recevant une seconde citation militaire, titulaire de la croix de guerre à l’ordre de l’armée, mais est blessé lors 1939-1945 avec palme, de la médaille d’une opération. commémorative 1939-1945 avec barrette Élevé au grade de capitaine en juin 1944, « engagé volontaire » , de la médaille com - il est affecté, le 1 er août suivant, au 2 e mémorative des services volontaires dans bureau de l’état-major des forces la France Libre et de la croix du combat - aériennes françaises en Grande- tant volontaire 1939-1945. Bretagne, à Londres, après 74 missions de guerre et 145 heures de vol. Muté au groupe de transport 1/15 Paul Ibos Touraine en juillet 1945 en qualité d’offi - Né en 1919 à Saigon, Paul Ibos est le fils Anna Durand en uniforme des volontaires féminines cier de renseignements, il se fait démobi - (coll. Michèle Durand). du général Pierre Ibos (1871-1949), qui liser en mars 1946 et entre à la compagnie reçut la soumission d’Abd el-Krim en aérienne UAT, devenue UTA, dont il Née Anna Morvan le 26 février 1919 à 1926, et d’Yvonne Augé. Après des études devient plus tard directeur. secondaires au lycée Louis-le-Grand à Keryéquel-en-Pleyben, dans le Finistère, Commandant de réserve en 1958, com - Paris puis au lycée Lakanal de Toulouse, il dans une famille d’agriculteurs, Anna mandant honoraire en 1978, il est décédé prépare l’École de l’air au lycée Durand refuse la défaite de juin 1940 et le 12 mars 2015 à Versailles. Il était com - Montaigne de Bordeaux en 1938 et s’en - décide de rejoindre Londres, où elle s’en - mandeur de la Légion d’honneur, compa - gage dans l’aviation pour la durée de la gage dans les Forces françaises libres le 29 gnon de la Libération par décret du 20 guerre le 1 er octobre 1939. novembre 1940, sans en avoir prévenu ses novembre 1944, titulaire de la croix de parents. Admis aux cours d’élève officier de guerre 1939-1945 avec trois citations et de L’une des premières à servir dans le Corps réserve (EOR) à Châteauroux, où il est la médaille coloniale avec l’agrafe des volontaires féminines, commandé nommé aspirant en janvier 1940, breveté « Libye ». d’abord par Simone Mathieu puis par observateur en avion, il est affecté en mai Hélène Terré, elle est affectée au quartier- 1940 au Centre d’instruction de bombar - général de Moncorvo House. Lors du dement à Toulouse. bombardement de la caserne de Hill Lors de la débâcle de juin 1940, son unité Robert Maloubier Street, le 17 avril 1941, elle est grièvement est repliée à Port-Vendres. Avec deux blessée à la tête. camarades, Henri Labit (1920-1942) et Après la formation du Comité français de Antoine Forat, il réussit à obtenir des faux la Libération nationale, le 3 juin 1943, et papiers polonais et un visa pour la fusion des Forces françaises libres avec l’Espagne, d’où il rejoint la Grande- l’armée d’Afrique, effective à compter du Bretagne, via le Portugal, à la fin d’août 1er août 1943, elle embarque à Glasgow, le 1940. 10 septembre 1943, à destination de Engagé dans les Forces aériennes fran - l’Algérie, où elle œuvre au Centre de çaises libres avec le grade de sous-lieute - transfusion sanguine de Mustapha, puis à nant, il est affecté à l’école de pilotage la 1 re unité administrative à Alger. d’Odiham, avant d’être envoyé, en avril Après la Libération, elle est désignée pour 1941, à Takoradi (Gold Coast, actuel rejoindre, à Paris, la direction des Ghana), où il retrouve le Groupement de Auxiliaires féminines de l’armée de terre bombardement n° 2, avec lequel il effec - (AFAT), créées par Hélène Terré en janvier tue des missions de reconnaissance Bob Maloubier le 5 janvier 2011 à son domicile 1944, et regagne la métropole en décem - durant la première campagne de Libye. d'Houilles (photographie de Bertrand Langlais - AFP bre 1944. Ayant rejoint le groupe de bombarde - Getty Images). Démobilisée le 30 juillet 1946, elle ment Lorraine lors de sa création en sep - épouse, en 1948, l’adjudant André tembre 1941, il sert comme officier obser - Fils cadet d’enseignants né en 1923 à Durand, qui s’était illustré dans les rangs vateur lors de la seconde campagne de Neuilly-sur-Seine, où il étudie au lycée de la colonne Leclerc, à Koufra puis dans Libye et obtient, lors de missions de bom - Pasteur, Robert Maloubier, dit « Bob » , la campagne du Fezzan, et de la 2 e DB. bardement, des résultats très précis qui prépare son baccalauréat quand les Celui-ci étant appelé, plus tard, à travail - lui valent, en novembre 1941, une cita - Allemands envahissent la France. Après ler en Guinée Conakry, elle l’accompagne tion à l’ordre de l’armée. plusieurs tentatives pour embarquer à et met au monde, en 1952, sa fille Promu lieutenant en juin 1942 et détaché destination de l’Angleterre, il s’engage en Michèle. De retour en métropole en 1958, en août au 203 squadron du Coastal janvier 1941 dans l’aviation de l’armée la famille s’installe à Brest puis à Bagneux, Command à Saint-Jean d’Acre, il effectue d’armistice, dans l’espoir de pouvoir en région parisienne. Après le décès de plusieurs missions sur la Méditerranée s’évader vers Gibraltar ou Malte, mais est son époux, à l’âge de 68 ans, elle vient à puis suit un entraînement à l’école de affecté à la garde de la base aérienne de Paris, où elle a fait carrière à la Caisse des pilotage de Damas, obtenant le brevet de Bizerte. À la suite du débarquement dépôts et consignations. pilote militaire en octobre 1942. anglo-américain au Maroc et en Algérie,

22 l Juin 2015 • N° 56 IN MEMORIAM sa base est encerclée par les Allemands. Il Charles Millot groupe à l’attaque du village de Lagarde parvient à s’évader de Tunisie et à rejoin - sous un violent tir d’artillerie, donnant un dre Alger, où il apprend « qu’une officine bel exemple du mépris du danger. » discrète recrute des volontaires pour étof - Par la suite, à l’automne 1944, le com - fer un commando clandestin dont le mandement relèvera le bataillon, dont les survivants sont fragilisés par les rigueurs noyau est constitué de gaullistes ayant eu climatiques. maille à partir avec le pouvoir vichyste et Le 28 mai 1945, le général de Gaulle que les Anglais ont pris sous leur aile. Ce décerne la croix de la Libération au commando se terre à Cap Matifou, à une bataillon avec cette citation : « Vétéran de vingtaine de kilomètres à l’ouest de la 1940, formé par les coloniaux de Chypre et ville. Il a pour nom Special Detachment. » les volontaires du Pacifique. A combattu Des volontaires du BIMP le jour du défilé de la vic - en Libye, à Cheren, à Massaouah, à Bir- Là, il rencontre Jacques Vaillant de Guélis, toire à Tunis, le 20 mai 1943 (Musée de Nouméa, coll. Hakeim, en Italie, à Toulon, à Belfort et en un agent franco-britannique qui le Dalstein). Alsace. Après avoir eu deux compagnies convainc de s’engager au Special citées à l’ordre de l’Armée, a obtenu lui- Operations Executive . Embarqué pour Extrait de l’éloge du délégué de la même deux citations du même ordre. Londres, via Gibraltar, le 10 janvier 1943, Fondation prononcé le 8 avril 2015 Chefs de corps tués à l'ennemi : lieutenant- il intègre la section F, après un passage Charles Millot est né le 18 février 1914, à colonel Broche, chef de bataillon Savey, par Patriotic School . Parachuté dans la Nouméa. Il s’engage individuellement chef de bataillon Magny. Gardera dans région de Louviers dans la nuit du 15 au pour la durée de la guerre en septembre l’Histoire la gloire d’avoir représenté l’in - fanterie coloniale sur les champs de 16 août 1943, il mène des opérations de 1940 et rejoint le bataillon du Pacifique formé par le commandant Broche. bataille où les Forces Françaises Libres ont sabotage pour le réseau Salesman. De été les premières à reconquérir l’honneur. » Il quitte la Nouvelle-Calédonie le 5 mai retour en Angleterre dans la nuit au début Charles Millot en fait partie ! 1941 à destination de l’Australie. Le 27 de février 1944, il repart en mission en juin, il prend place à bord du paquebot Enfin vint la délivrance et le retour au juin, auprès des maquis du colonel Queen Elizabeth pour le Moyen-Orient et pays, à bord du Sagittaire le 21 mai 1946. Guingouin, dans le Limousin, cette fois, arrive à Suez le 31 juillet où il rejoint la Le sergent-chef Millot est de ces combat - pour ralentir la division Das Reich . En 1re division française libre. Après quatre tants à qui nous devons la belle liberté décembre 1944, il est affecté à la Force mois d’entraînement et de manœuvres que nous vivons aujourd’hui et je vou - 136 et saute en août sur le Laos, où il est au Levant, équipé et armé, il fait mouve - drais simplement vous dire d’être fier de capturé par les Japonais, qui le retiennent ment, avec la brigade du général Kœnig, votre père, de votre grand-père qui n’a vers la frontière égyptienne le 1 er janvier pas hésité à traverser la planète pour aller prisonnier jusqu’à la fin de la guerre. 1942. combattre la barbarie nazie dans des Passé dans les services de renseignement Son bataillon s’installe à Bir Hakeim le 15 pays qu’il ne connaissait pas, pour des extérieur, il participe à la création du ser - février. Durant plus de quatre mois, il va gens qu’il ne connaissait pas et dans des vice action du Sdece, en 1947, et fonde mener une guerre de course dans le conditions de vie que bien peu d’entre l’unité des nageurs de combat d’Arzew désert libyen contre l’ Afrikakorps et les nous pourraient supporter de nos jours. avec l’enseigne de vaisseau Claude troupes italiennes. Du 27 mai au 10 juin, il En témoignage de reconnaissance, il est en première ligne lors du siège de la Riffaud, en 1952. Contraint de quitter le reçut entre autres, la médaille des ser - position par les forces de l’Axe. vices volontaires de la France Libre qui service en 1960, il devient forestier en Pendant quinze jours, Charles Millot et s’accompagnait de la citation suivante : Afrique et travaille en parallèle pour ses 3700 compagnons vont tenir tête à « Charles Millot Jacques Foccart, pour le compte duquel il 32 000 adversaires permettant ainsi aux met sur pied la garde présidentiel du pré - Répondant à l’appel de la France en péril forces britanniques de se redéployer et de mort, vous avez rallié les Forces sident gabonais Léon Mba. Recruté par la d’infliger une défaite cinglante aux Françaises Libres. Vous avez été de l’équipe troupes du général Rommel à la bataille société pétrolière Shell en 1962, il passe volontaire des bons compagnons qui ont d’El Alamein. ensuite chez Elf, où il termine sa carrière. maintenu leur pays dans la guerre et dans Auteur d’une dizaine de livres, décoré par Devant cet exploit, le général de Gaulle l’Honneur. Vous avez été de ceux qui, au écrira : « Général Kœnig, sachez et dites à les Britanniques du Distinguished Service premier rang, lui ont permis de remporter vos hommes que la France vous regarde et la Victoire ! Order , l’ Order of the British Empire , de la Charles Millot que vous êtes son orgueil. » Au moment où le but est atteint, je tiens à 1939-45 Star et de la France and Germany est l’orgueil de la France ! vous remercier amicalement, simplement, Star , il avait reçu, côté français, la croix de Le sergent Millot prendra part, avec son au nom de la France ! la Légion d’honneur, la croix de guerre bataillon, à tous les combats de la Le 1 er septembre 1945 1939-1945, la médaille de la Résistance, la 1re DFL : campagne de Tunisie, campagne Charles de Gaulle » médaille des Évadés, la médaille colo - d’Italie, débarquement de Provence et niale avec l’agrafe « Extrême-Orient » , la remontée des Vosges et de l’Alsace. Non, le Sergent-chef Millot, chevalier de la Légion d’honneur, médaillé militaire, médaille des services volontaires dans la En date du 6 octobre 1944, le sergent titulaire de la croix de guerre, de la France Libre, la médaille commémorative Millot est cité à l’ordre du régiment et obtient la croix de guerre pour les motifs médaille de la Résistance et de bien d’au - de la guerre de 1939-1945 avec quatre suivants : « Excellent chef de groupe pen - tres décorations, ne nous a pas quittés ! agrafes, l’insigne des blessés militaires. Il dant toutes les campagnes de Libye, Il est allé rejoindre ses compagnons tom - est décédé le 20 avril 2015 dans un hôpi - Tunisie et d’Italie s’est toujours signalé. Le bés au champ d’honneur pour la liberté tal parisien, à l’âge de 92 ans. 22 août 1944 s’est lancé à la tête de son de notre patrie la France ! Il est présent

Juin 2015 • N° 56 l 23 IN MEMORIAM dans nos cœurs et dans nos mémoires ! Il puis est affecté au 21 e groupe antillais de Raymond Richert est présent dans les plis du fanion, dans la DCA, avec lequel il termine la guerre. croix de la Libération et dans la croix de guerre du bataillon d’infanterie de Il était commandeur de la Légion d’hon - Né le 30 juillet 1924 à Beyrouth (Liban), marine et du Pacifique. neur, grand officier de l’ordre national du Raymond Richert est décédé le 30 mars 2015 à Pons, en Charente-Maritime. Merci M. Millot, honneur à vous, dormez Mérite, titulaire de la croix de guerre 1939- en paix. 1945, de la médaille de la Résistance, de la En 1942, il rejoint l’École militaire des médaille coloniale avec les agrafes « Libye Cadets de la France Libre, dont il sort – Bir Hakeim – Tunisie 43 » et de la aspirant avec la promotion 18 juin, et Michel Mourguet médaille du Levant. devient officier de liaison tactique auprès de la 2 e division américaine. En novembre Après-guerre, ingénieur, Roger Nordmann 1944, il intègre le 23 e régiment d’infanterie Roger Nordmann entre chez Dassault, où il dirige les achats coloniale, avec lequel il entre en de la branche « avions » puis l’hebdoma - Allemagne. daire Jours de France . Après la guerre, il décide de rester dans Il est inhumé au cimetière du Père- l’armée et servira successivement en Lachaise, à Paris. Indochine, au Sénégal, en Haute-Volta, à nouveau en Indochine, puis en Algérie et enfin à Brazzaville et à Pointe-Noire. En 1968, avec le grade de commandant, Charles Pasqua chevalier de la Légion d’honneur et valeur militaire, il quitte l’armée et entre à l’Édu - Né à Grasse le 18 avril 1927, Charles Pasqua cation nationale. s’engage dans la Résistance dès l’âge de 15 ans dans le réseau Phratrie, dépendant du Homme fidèle, il n’a survécu que huit BCRA, aux côtés de son père André, poli - jours à Simone, qu’il avait épousée il y a 69 cier, et de son oncle Philippe, qui deviendra ans. le chef du sous-réseau Tartane avant d’être Que ses enfants, Marie-José, Joëlle, Jean- arrêté à l’automne 1943. Agent de rensei - Louis et Didier, et ses dix petits-enfants, gnements sur le secteur côtier, immatriculé sachent que les Cadets gardent de à Londres sous le nom de code de Raymond et de Simone un souvenir très « Prairie », Charles assure le transport du attachant. He was a jolly good fellow ! Roger Nordmann (à gauche), avec René Marbot, sur le courrier du secteur Montagne à la centrale pont Bir Hakeim, lors des cérémonies du 9 novembre et les relevés des plans. Passé dans le René Marbot 2014 (photo Yves Ropars). maquis de l’ORA, il prend part aux combats de la Résistance dans la région R2 jusqu’à la Roger Nordmann est décédé dimanche 3 Jean Vancolie mai 2015, à l’âge de 94 ans. Libération, puis passe son baccalauréat. Licencié en droit, marié à 20 ans, il entre Aîné de trois garçons, Roger, Charles, Hommage à Jean Vancolie Pierre Nordmann voit le jour le 30 novem - en 1952 comme représentant chez Paul bre 1920 à Paris dans une famille juive Ricard, dont il devient, au bout de À la demande de Marie-Rose et Éric, fille bourgeoise. Son père est administrateur quelques années, directeur général des et gendre de Jean Vancolie, Sandra et de sociétés, sa mère, Germaine, artiste ventes puis de l’exportation, jusqu’à son Steffie, ses petites-filles, Claude peintre. Étudiant, il fait partie du Racing départ en 1967. En parallèle, fidèle à la Montaufray et moi-même, Marcel Hupin, club de France, où il fait de l’athlétisme et figure du général de Gaulle, il s’engage avons l’honneur, au nom de la Fondation du hockey sur gazon, et prépare son dans le Rassemblement du peuple fran - de la France Libre, de rendre un respec - çais, participe à la création du Service d’ac - entrée à Polytechnique quand, le 17 juin tueux hommage à notre ami Jean. 1940, il entend à la radio l’appel du maré - tion civique et fonde, en mai 1968, les Cet hommage sera bien sûr centré sur chal Pétain à cesser le combat. Révolté, il comités de défense de la République, qui cette période d’exception que fut l’épopée décide de passer en Angleterre, avec l’ac - préparent la manifestation du 30 mai sur de la France Libre où « des hommes partis cord de sa mère, qui lui « fait un papier, les Champs-Élysées. de rien » , comme l’écrira René Cassin, ont, autorisant son fils mineur à s’engager Élu député des Hauts-de-Seine aux législa - par leur refus de la défaite, leur engage - dans les troupes anglaises ou améri - tives de 1968, président du conseil général ment et leurs combats, sauvé l’honneur caines ». en 1973, sénateur en 1977, proche de de la France, participé à sa libération et Jacques Chirac, il préside le groupe RPR à la Embarqué à Saint-Jean-de-Luz, avec son hissé notre pays au rang des vainqueurs Haute-Assemblée, avant de devenir minis - ami Jean-Mathieu Boris, à bord du Baron du nazisme. Jean Vancolie fut de ces tre de l’Intérieur en 1986-1988 et 1993-1995. Nairn à destination de Liverpool, il signe hommes et femmes d’exception. Lors du référendum sur le traité de son engagement dans les Forces fran - Rappelons qu’ils ne furent pas nombreux : Maastricht en 1992, il milite avec Philippe çaises libres le 1 er juillet. un peu plus de 50 000 seulement. Et pour - Séguin pour le « non », puis lance une liste tant, modeste comme l’étaient tous les Après l’opération sur Dakar, il est envoyé à souverainiste lors des européennes de Français Libres, Jean répliquait devant l’école des élèves officiers de Brazzaville. 1999, mais renonce à se présenter aux pré - e notre admiration : « Je n’ai fait que mon Sorti aspirant, il sert comme officier à la 7 sidentielles de 2002. Retiré de la vie poli - travail et c’était pour la France ! » compagnie du bataillon de marche n° 2, tique en 2011, il est décédé le 29 juin 2015 à avant de rejoindre le 1 er régiment d’artille - l’hôpital Foch de Suresnes, des suites d’un « Né dans une famille modeste le 15 octo - rie, avec lequel il combat à Bir Hakeim, accident cardiaque, à l’âge de 88 ans. bre 1923, je suis l’aîné de deux enfants.

24 l Juin 2015 • N° 56 IN MEMORIAM

Mon père, mutilé de 14-18, était cordon - nous avions notre DCA qui les « allu - le silence radio. » Strasbourg est libérée le nier. Ma mère, ouvrière agricole dans des maient » . Nous nous jetions sous nos véhi - 23 novembre. En janvier 1945, Jean parti - exploitations légumières, tenait aussi la cules camouflés le long des haies dans les cipe aux combats pour la réduction de la maison. En 1940, nous habitions chemins creux de Normandie. Les éclats « poche » de Colmar. La 2 e DB est alors Bouvignie, dans le Nord. Chez nous, il n’y d’obus ricochaient dans tous les coins. » envoyée en renfort pour faire tomber les avait pas beaucoup d’argent. Aussi ai-je Après la bataille de Normandie, les poches de résistance allemandes de quitté l’école à 13 ans, avec en poche le seul Américains et la 2 e DB foncent vers le sud, l’Atlantique, elle participe victorieuse - certificat d’études. Étant costaud, j’ai été libèrent Avranches le 31 juillet, puis se ment à la prise de celle de Royan. embauché comme bûcheron et coupais scindent en trois colonnes. Fougères est Mais si la France est libérée, la guerre n’est des arbres dans la seule forêt de cette libérée le 3 août, puis Vitré. Mayenne et pas finie. Jean Vancolie et sa division vont région de mines de charbon. Laval seront libérées le 5 août et Château- repartir sur le Rhin et entrer en Allemagne 1940, j’avais 17 ans, c’est la défaite et l’oc - Gontier le 6 août. Jean se souvient très jusqu’en Bavière. Le 7 mai, la veille de la e cupation ! Trop jeune pour m’engager, j’ai bien de l’accueil chaleureux de la popula - capitulation de l’Allemagne nazie, la 2 DB attendu jusqu’en 1942 en prenant soin de tion, souvent étonnée qu’il soit Français. s’empare du « Nid d’aigle de Hitler » . Jean ne pas me faire remarquer car les Boches Jean Vancolie faisait partie des avant- Vancolie raconte qu’entrant dans le raflaient les jeunes pour leurs chantiers de gardes. Dans leur automitrailleuse, ils repaire dévasté de Hitler, il découvre, au l’Atlantique. Grâce à un cousin de mon étaient jeunes, d’un courage fou, roulant à milieu des gravats, des photos du Führer père, je réussis à rejoindre l’armée tombeau ouvert, à la recherche des pre - et des insignes SS abandonnés dans leur d’Afrique ; j’avais 19 ans. À mon départ en mières lignes ennemies. Le contact était fuite par les nazis. Ainsi prenait fin, dans gare de Lille, je croise des uniformes fran - chaque fois brutal et meurtrier. Les la poussière, cette idéologie mortifère et çais ! C’étaient ceux de la Légion antibol - Allemands disposaient d’armes antichars criminelle qui régnait par la terreur et fut chévique qui partaient pour le front russe. redoutables, que seuls l’aviation ou la responsable de millions de morts et d’une Nous n’avions vraiment pas pris la même prise à revers arrivaient à neutraliser. Et la Europe dévastée. direction ! course reprenait. Jean Vancolie parlait peu de lui. Ses pen - Ainsi de sanglants combats se déroulent sées allaient en premier lieu à tous ses Nous débarquons à Alger et sommes diri - au lieu-dit la Hutte, alors que la 2 e DB compagnons de guerre, morts au cours gés sur Oran, alors qu’avait lieu le débar - contourne Le Mans. C’est là que Jean des combats où lui a survécu. C’était un quement des Américains, je m’en souviens Vancolie sauvera Yves Guéna, qui s’était homme d’action, porté tout jeune par des très bien ! Un jour que nous avions pris écroulé dans la tourelle de son automi - convictions qui se sont traduites par un position dans une tranchée avec les mon - trailleuse, touché par une balle en pleine engagement spontané mais réfléchi et tagnes derrière nous, notre chef donna cet poitrine. Yves Guéna qui deviendra prési - personnel, au nom de valeurs qui sont le ordre : « Les Américains sont nos enne - dent du Conseil constitutionnel, se souve - visage de la France de par le monde. mis. S’ils arrivent, vous faites feu » . nait toujours de Jean Vancolie. Il en parlait Ces valeurs portent des noms : République, Abasourdi, je me suis mis à penser très vite chaque fois qu’on le rencontrait en disant: État de droit, démocratie, liberté, égalité, et je décidai que je détruirai ceux qui « Vancolie ! Ah oui, Jean, ce héros qui m’a fraternité, laïcité. Ces valeurs, Jean Vancolie seraient contre les Américains, étant sauvé la vie. » nous les a données en héritage, à nous et donné que ceux-ci s’étaient battus pour pour nos enfants. Pour tout cela et pour nous en 14-18 ! Heureusement, les Le 22 août, alors que Paris vient de se sou - e ton exemple, merci Jean . Américains ne firent pas mouvement vers lever, Leclerc lance la 2 DB vers la capitale nous. Le lendemain, il se passa quelque qui sera atteinte le soir du 24 août. Jean Ce récit est issu d’entretiens faits auprès de chose d’inimaginable. Nous sommes arri - Vancolie et ses compagnons, toujours en Jean Vancolie, d’extraits des notes écrites vés au beau milieu d’une troupe améri - tête, participent à la reddition de la garni - par lui, ou tirés de ses documents person - caine. La rencontre s’est passée très natu - son allemande du Mont Valérien. Puis nels, ou des souvenirs racontés par ses rellement et nous avons fraternisé. c’est la libération de Paris. Jean en gardera compagnons. Les témoignages recueillis et un souvenir ému et inoubliable. la mise en forme ont été réalisés par La nouvelle que des Français Libres se Jean Vancolie participera aux combats qui Marcel Hupin, délégué 53 de la Fondation trouvaient en Tunisie se répand. Moi, je jalonneront alors la « chevauchée » de la 2 e de la France Libre. décide de déserter pour les rejoindre. DB. Septembre 1944, c’est le début de la L’encadrement, resté vichyste, se doute de terrible campagne des Vosges et d’Alsace. quelque chose et décide de nous déplacer à L’un des frères d’armes de Jean raconte la Biskra, en plein désert, puis sur violence des combats : « Nous étions en Constantine. C’est là que je déserte et, à tête de la reconnaissance commandée par pied, pars en direction des troupes alliées le commandant Morel de Ville. Un canon avec l’espoir de tomber sur des Français antichar 88 allemand a tiré juste devant Libres. En fait, je suis ramassé par un nous. Stévenot, notre conducteur, avait des camion anglais où se trouvent déjà plu - éclats à la tête et à la colonne vertébrale, sieurs soldats français, déserteurs comme Pierre Hubrswiller, lui, avait le coude moi ! Les Anglais nous conduisent directe - coincé dans la culasse de son canon et il ment en Libye et, là, nous débarquent dans était bien handicapé ! Stévenot et moi- un camp de Français Libres. Nous station - même avons réussi à ramener notre véhi - nerons assez longtemps en Libye et serons cule et à secourir alors les blessés. Au cours constamment à l’entraînement. de cette reconnaissance, dans les automi - Puis on nous envoie en Angleterre et, le 3 trailleuses à côté de nous, les brigadiers août 1944, nous foulons enfin le sol de Salas, de Paris et le spahi Marq ont été France sur la plage de Grandcamp tués. Nous avons entendu pendant (Calvados). Tous les soirs la Luftwaffe quelques minutes Salas appeler au venait pour nous canarder. Heureusement secours, les véhicules brûlaient, puis ce fut

Juin 2015 • N° 56 l 25 CARNET

DÉCÈS

BAUDIN Paul (réseau Andalousie), IBOS Paul (Lorraine, FAFL), MATRAY Henri (SAS), le 6 mai 2015 à Vernet-les-Bains (66) le 12 mars 2015 à Versailles (78) le 19 mars 2015 à Alix (69)

BETFORT Jean (FNFL), LABORDE Jean Joseph MILLOT Charles (BIMP, 1 re DFL), le 24 mai 2015 à (988) (501 e RCC, 2 e DB), le 5 avril 2015 à Nouméa (988) le 4 juin 2015 à Bordeaux (33) BOULISSET Georges (FNFL), MORIN Jean-Joseph (2 e DB), le 18 avril 2015 à Porto-Vecchio (2A) LECLERC DE HAUTECLOCQUE le 17 mai 2015 à Évran (22) Hubert (2 e DB), BROTHERS Peters (FNFL), le 19 avril 2015 à Tailly (80) NORDMANN Roger (1 er RA, 1 re DFL), le 14 février 2015 à Punaauia (987) le 3 mai 2015 à Paris (75) LE GALL Maurice (1 re DFL), CAÏTUCOLI Georges (SAS), le 30 avril 2015 à Morlaix (29) OLINY Rémy (1 re DFL), le 3 juin 2015 à Paris (75) le 27 mars 2015 au Robert (972) LOUBOUTIN Guy (1 er RA, 1 re DFL), CRÉMIEUX-BRILHAC Jean-Louis le 24 janvier 2015 à Paris (75) PASQUA Charles (CNI), (réseaux Phratrie et Tartane), le 8 avril 2015 à Paris (75) MADEMBA SY Josette le 29 juin 2015 à Suresnes (92) (veuve de Claude, RMT, 2 e DB), DESCHAMPS Jacques (FNFL), le 4 mars 2015 à Lagrave (Tarn) PAUCHARD Alfred (RMSM, 2 e DB), le 23 mars 2015 à Toulouse (31) le 21 avril 2015 à Rebais (77) MAHÉ DE LA VILLEGLÉ Pierre DURAND Anna (née Morvan, (501 e RCC, 2 e DB), PAPAZOW Alain (SAS), volontaire féminine), le 11 juin 2015 à Saint-Malo (35) le 20 juin 2015 à Plaudren (56) le 13 avril 2015 à Paris (75) MALOUBIER Robert (SOE), PELLETER Amédée (FNFL), FRANTSCHI Nicolas (FAFL), le 20 avril 2015 à Paris (75) le 22 mars 2015 à Quimperlé (29) le 28 mai 2015 à Douarnenez (29) MARIÉ Jacques (réseau RICHERT Raymond FRÉBAULT Jean-Marie (FNFL), Gallia/Kasanga), (Cadets de la France Libre, 1 re DFL), le 19 avril 2015 à Piraé (987) le 26 février 2015 le 30 mars 2015 à Pons (17) à Saint-Germain-en-Laye (78) HELME Alfred (FNFL), VANCOLIE Jean (2 e DB), le 27 novembre 2013 à Faaa (987) le 22 mars 2015 à Angers (49)

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26 l Juin 2015 • N° 56 CARNET

Légion d’honneur : Grand-croix : Charles Flamand Chevalier : Georges Cidolit Chevalier : Michel Lipani Chevalier : Joseph Abbu Chevalier : Yvette Coulomb Chevalier : Maxime Maman Chevalier : Jacques Aboudara Chevalier : Pierre Decouan Chevalier : Maurice Marais Chevalier : Simon Amaoua Chevalier : Pierre Desorgues Chevalier : Maurice Martin Chevalier : René Andriot Chevalier : Antoine Dollin Chevalier : Joseph Melloul Chevalier : André Avrilleux Chevalier : Guy Ducourau Chevalier : Francis Mesguen Chevalier : Pierre Barre Chevalier : Charles Dusson Chevalier : Simon Molina Chevalier : François Bartoli Chevalier : Armand Elbaz Chevalier : Moussa Moscou Chevalier : Pierre Bécouarn Chevalier : Vincent Farrugia Chevalier : Manuel Navascues Chevalier : Paul Béladina Chevalier : André Forgeard Chevalier : Gilbert Piault Chevalier : Georges Benoit Chevalier : Michel Foussard Chevalier : Paul Platel Chevalier : Michel Bensimon Chevalier : Yves Gajac Chevalier : Jacques Quittelier Chevalier : Rémy Bijaoui Chevalier : Henri Gambourg Chevalier : Jean-Édouard Riche Chevalier : Louis Bilan Chevalier : Auguste Gerente Chevalier : René Richin Chevalier : Gilbert Bin Chevalier : Pierre Goriot Chevalier : Sylvain Richter Chevalier : Albert Bogo Chevalier : Max Gruel Chevalier : Marcel Rosso Chevalier : René Bogo Chevalier : René Guigli Chevalier : Auberville Rouyard Chevalier : David Bokobza Chevalier : Raphaël Houri Chevalier : Jean Salmon Chevalier : Louis Bondioli Chevalier : Raymond Hutin Chevalier : Mary Shearer Chevalier : Maurice Bonneton Chevalier : Alain Javelot Chevalier : Aimé Sidoun Chevalier : Roland Bonnin Chevalier : Joseph Jégo Chevalier : Paul Sintès Chevalier : Marcel Bosredon Chevalier : Lucien, Céline Jurin Chevalier : Julien Toubiana Chevalier : Marcel Bouniol Chevalier : Marie-Louise Chevalier : Magdeleine Travers Chevalier : Robert Boutonnet Kergourlay Chevalier : Armand Vacca Chevalier : Armand Bruballa Chevalier : François Kerveillant Chevalier : Laurent Vangell Chevalier : Sauveur Cassar Chevalier : Yves Lacaze Chevalier : Nicolas Vermandel Chevalier : Pierre Cescutti Chevalier : Roger Lahmi Chevalier : Alfred Wolarski Chevalier : Charles Chetrit Chevalier : Charles Le Dall Chevalier : Guido Zouari Chevalier : Lucien Chich Chevalier : Maurice Le Noury

Souscription pour la plaque Koenig

Ils ont répondu présent, généreusement… Merci à vous tous.

M. GILBERT Jean Le Coteu 42120 M. YON Henriette Fontenay-le-Fleuri 78330 Mme RAVET Henriette Paris 75007 M. PELLONI Ildebrando Reims 51100 M. RICHE Édouard Méneslies 80520 M. CARTIER Michel Paris 75017 M. AUFSEESSER Jean-Claude Bois-le-Roi 77590 M. BUQUIN Roger Évian-les-Bains 74500 M. ABOUCHAR Bernard Paris 75007 M. KEMPF Michel Asnières 92600 M. BOBINET Yvon Boussy-St-Antoine 91800 M. HUIN Georges Sarzeau 56370 M. MAYER Léon-Jacques Neuilly-sur-Seine 92200 M. ANFERTE Jacques Méru 60100 M. SEBLINE Patrick Paris 75116 M. DUVAL Alain Ampuis 69420 M. PETIT Yves St-Dizier 52100 M. CALLEGARY Albin Charleville-Mézières 08000 M. BRIENS Louis Douarnenez 29100 M. MARTIN Michel La Bachellerie 24210 Mme DELAVEAU Marie-France Cernay-lès-Reims 51420 M. BRACQUART Charles Beauficel-en-Lyons 27480 M. BOZON Louis Dijon 21000 M. GASCOIN Claude Drancy 93700 M. CRIPPA Angelo Quint-Fonsegrives 31130 M. CHAVANNES Gilbert Ploubazlanec 22620 M. GONTIER-MALLET Maurice Paris 75016 Mme GAULTIER Martin Boulogne-Billancourt 92100 M. ROBÉDAT Pierre Hossegor 40150 M. LUCCHINI Pierre Bastia 20600 Mme KINSKY Thamar Boulogne-Billancourt 92100 Mme OUDIN Paulette Pau 64000 M. BALAY Maxime Givet 08600

Juin 2015 • N° 56 l 27 DANS LES DÉLÉGATIONS

Bouches-du-Rhône Soilihi, du collège Françoise-Dolto de Saint-Andiol, a obtenu le 8 e prix des col - lèges, le très jeune Corentin André, du Un grand colloque pour célébrer collège Mont-Sauvy d’Orgon, décrochant, la libération de Paris pour sa toute première participation, un honorable 28 e prix des collèges. M. Valéry Chavaroche, notre délégué sup - pléant pour les Bouches-du-Rhône, On doit aussi souligner la participation assisté de Patrick Brèthes, professeur au de nombreux établissements des quar - lycée militaire d’Aix-en-Provence et tiers urbains défavorisés : Laura membre de notre Fondation, a organisé le Amarouche, Soumya Bouchaboub, 9 octobre 2014 un grand colloque de Stéphane Paoli interroge Bertrand Hervieu et Jean- Fainou Houmadi et Lynda Ouzaghla, du commémoration de la libération de Paris, Jacques Rault (photographie Région PACA-LEGTA collège Jean-Claude Izzo à Marseille se au lycée agricole de Valabre à Gardanne. Valabre). sont illustrées avec le 6 e prix des collèges, La première pierre de cet établissement un prix d’encouragement étant de sur - avait été posée, en 1962, par Edgard La Fondation en première ligne à la croît décerné au collège Henri-Wallon Pisani, ancien résistant, acteur de la libé - remise des prix du CNRD le 20 mai des quartiers nord de Marseille. Valéry ration de la capitale (incarné par Michel Chavaroche a encouragé également le Piccoli dans le film Paris brûle-t-il ? ), Valéry Chavaroche, notre délégué sup - lycée technologique du Rempart à célèbre ministre de l’agriculture du géné - pléant, a pris une part active à la remise Marseille qui s’est adjugé le 4 e prix des ral de Gaulle de 1961 à 1966. des prix du Concours national de la lycées. C’est avec cet établissement que Résistance et de la Déportation, dans les notre président, le général Robert Bresse À l’invitation de Valéry Chavaroche, salons d’honneur de la préfecture, le 20 et notre délégué suppléant avaient orga - Edgard Pisani était revenu en 1994, évo - mai 2015, en présence du préfet de nisé, le 2 février 2012, un hommage au quer sa résistance, dans ce lycée dont le région, M. Michel Cadot, une cérémonie capitaine des parachutistes de la France proviseur, Joseph Weinzaepfel est active - remarquablement organisée par M. Libre, le Marseillais Guy de Combaud- ment partie prenante du devoir de Hervé Gourio, directeur départemental Roquebrune, dans la rue éponyme. mémoire. Ce colloque était placé sous la des anciens combattants. présidence de Stéphane Le Foll, ministre Valéry Chavaroche de l’Agriculture, et de Jean Pisani-Ferry, Jean-Pierre Beaux, président départe - Délégué suppléant pour commissaire général à la stratégie et à la mental du CNRD ayant été victime du vol Bouches-du-Rhône prospective auprès du Premier ministre. de son véhicule avec de nombreux lots, Valéry Chavaroche a eu à cœur de contri - Valéry Chavaroche avait tenu à associer à buer à doter le CNRD sur ses deniers per - ce projet un aéropage de quarante hautes sonnels, en offrant le superbe ouvrage Les personnalités de tous horizons (Cécile Compagnons de l’aube , de Guillaume Rol-Tanguy, Michel Rocard, Robert Piketty et Vladimir Trouplin. La Badinter, Jack Lang, Max Gallo, Jean- Fondation avait considérablement Pierre Chevènement, Jean-Claude abondé cette dotation. Casanova, Jean-Marie Guillon…). Notre Cette année encore, Matthias Guibert, du délégué a reçu aussi le soutien amical et lycée Adam de Craponne à Salon-de- chaleureux d’Hervé Gaymard et de Bruno Provence, déjà lauréat national, a rem - Le Maire, anciens ministres de l’agricul - porté pour la troisième fois un premier ture et députés gaullistes. Un livret ras - prix départemental. Au palmarès 2015 semblant tous ces témoignages de sou - des 260 lauréats des 66 prix (sur quelque tien a été imprimé et distribué aux cen - 1300 candidats), la Fondation a récom - taines de lycéens et étudiants présents. pensé notamment Élisabeth Rodriguez, e Les débats furent animés par Stéphane 19 prix, du collège de la Nativité à Aix-en- Paoli, grande voix de France Inter. Provence. Christine Levisse-Touzé, directrice du Le lycée militaire d’Aix-en-Provence, par - Musée du général Leclerc, a évoqué la tenaire de notre Fondation, se taille la libération de Paris, la saga d’Edgard part du lion en remportant 10 des 17 prix, Pisani et l’épopée de la 2 e DB. François- Léonore Jactel s’adjugeant le 2 e prix, la Valéry Chavaroche remet son prix à Élisabeth Rodriguez. René Cristiani-Fassin, journaliste hono - jeune Oumou Diarra, boursière particu - raire à France Culture, fit revivre l’épopée lièrement méritante, remportant le 14 e Châteaurenard de son père, Raymond Fassin, Français prix, encouragés par leurs professeurs Libre parachuté avec Jean Moulin dans Frédérique Bezançon, Christelle Sceriha, Une exposition sur la Deuxième Guerre les Alpilles, en 1942, mort en déportation. Patrick Brèthes, membre de la Fondation, mondiale et la libération de la France a Laurent Dorey, de leur chef de corps, le été organisée à Châteaurenard du 4 au 13 Hervé Gaymard a évoqué « pour l’adoles - colonel Vincent Pasquiet et de leur provi - mai dernier, à l’initiative de l’Association cent gaulliste que j’étais, et le gaulliste que seur, Éric Rusterholtz. Castel Fox Team Airsoft de je demeure, la découverte admirative Châteaurenard, en partenariat avec d’Edgard Pisani, de tous ces Résistants et Valéry Chavaroche s’est également réjoui l’ANORGEND, Fédération nationale des Français Libres aux parcours légendaires. des excellents résultats obtenus par les associations des réservistes de la gendar - La liberté grande doit se conjuguer avec collèges des Alpilles, où la Fondation s’at - merie nationale. La Fondation France l’ardente fidélité. » Bruno Le Maire avait tache à cultiver le souvenir de Jean Libre y tenait également une place remar - incité notre jeunesse à s’approprier Moulin : le délégué du général de Gaulle quée. « l’exemple donné par le refus de la défaite fut parachuté près de Fontvieille dans la et de l’infamie de la Collaboration par fameuse nuit du 1 er au 2 janvier 1942, 703 visiteurs se sont pressés à cette expo - ceux qui, en définitive, auront toujours avant de rejoindre son cabanon sition, qui était présentée dans la salle veillé sur un même trésor : l’âme de la d’Eygalières, non loin de sa demeure « Le Rialto » , dont une classe de primaire France ». familiale de Saint-Andiol. Chamsat et trois du collège de la ville. Des per -

28 l Juin 2015 • N° 56 DANS LES DÉLÉGATIONS

sonnes qui avaient vécu cette période le-Saunier, a été l’une des quatre lauréates troublée ont découvert avec émotion les nationales. Elle a reçu son prix des mains pièces qui étaient présentées, de même de François Hollande à l’Élysée. La déléga - que les membres de la famille Testenière, tion de la Fondation de la France Libre descendants de Gilles Testenière, dont le félicite et remercie tous ceux qui s’inves - récit de prisonnier de guerre faisait l’objet tissent pour le CNRD. d’une relation. Tout le fond de la salle était aménagé pour reconstituer une Exposition Les Français Libres et scène de maquis très réaliste. Dans ce leur chef le général de Gaulle décor d’un autre temps était disposé un Du 5 au 16 mai 2015 s’est tenue l’exposi - PC portable diffusant les images et témoi - tion sur les Français Libres et leur chef, le gnages mis à disposition par la Fondation général de Gaulle, dans la très belle France Libre. Robert Hérault, Olivier Dauphin et David Rivière le 8 médiathèque Firmin Gémier de Saint- mai à Saint-Denis (Paule Delmas). La municipalité, très satisfaite du travail Amour, à l’occasion des 70 ans de la vic - présenté, nous a d’ores et déjà retenus toire de mai 1945. Mme Bruquier, direc - national de la Résistance et de la pour d’autres événements sur le thème trice de la médiathèque, a choisi le thème Déportation ont été reçus dans les salons du devoir de mémoire. « les Français Libres », exposition prêtée de la préfecture. Pour la deuxième année par l’ONAC du Jura. Plus de 500 personnes Major (r) Francis Dorr consécutive, la Fondation de la France Président de la section historique l’ont visitée. Ce fut un véritable succès. Libre a remis à chaque lauréat un livre. Les visiteurs ont été enthousiasmés par cette très belle exposition. Ils ont pu com - Paule Gervais-Delmas prendre une partie de l’épopée de la France Libre et le sens des combats des Français Libres, ceux qui n’avaient pas posé leurs armes, en juin 1940. La direc - Lot-et-Garonne trice a reçu les félicitations et le soutien de En cette année du 70 e anniversaire de la la délégation de la Fondation de la France victoire de 1940-1945, la part royale du Libre du Jura. succès des armes de la présence de la France dans les combats libérateurs sur Bruno Raoul terre, sur mer et dans les airs aux côtés de Délégué du Jura ses alliés appartient à la France Libre. Cette commémoration s’est déroulée en Lot-et-Garonne à Agen avec la participa - Scène de maquis au fond de la salle. tion de Bertrand Solès, adjoint au délégué départemental en présence des hautes La Réunion autorités civiles et militaires. L’assistance Jura La commémoration du 8 mai 2015 a été était peu nombreuse, mais de qualité avec marquée par de nombreuses cérémonies les présidents d’associations d’anciens Remise des prix du CNRD à Lons-le- combattants toujours fidèles à ces ren - dans toutes les communes, mais, à Saint Saunier contres. Une délégation de jeunes collé - Denis, en présence du général Franck giens a donné un peu plus d’écho à cette Mercredi 22 avril, à l’hôtel départemental Reignier, commandant supérieur des du Jura, à Lons-le-Saunier, s’est tenue la manifestation en entonnant le Chant des forces armées de la zone sud de l’océan partisans . La présence d’un nombre remise des prix du concours de la Indien (FAZSOI), des autorités civiles et de Résistance et de la Déportation de l’année conséquent de porte-drapeaux a souligné nombreux porte-drapeaux et de prési - 2014-2015, en présence de Clément l’hommage accordé à cette journée. dents d’associations, de M. Camille Pernod, président du conseil départe - mental, du sénateur Gérard Bailly, de Bourhis, délégué de la Fondation de la Michel Bodin, président du CNRD du France Libre, deux Français Libres ont été Jura, des associations de résistants, du mis à l’honneur : David Rivière et Robert Souvenir Français, des déportés, de l’asso - Hérault, et Olivier Dauphin, FFI, adhérent ciation des « Diables bleus » et du délégué à la Fondation de la France Libre et assidu du Jura de la Fondation de la France Libre. à nos réunions. Ils ont été faits chevalier Le thème 2014-2015 était « la libération de la Légion d’honneur par M. le Préfet des camps nazis, le retour des déportés et la Dominique Sorain. À l’issue de la cérémo - découverte de l’univers concentration - nie, les récipiendaires et tous les présents naire ». Ce fut une très belle année pour le se sont retrouvés au vin d’honneur offert concours : 485 élèves ont participé et les par le maire de Saint Denis, Gilbert devoirs ont été d’une qualité exception - Annette. nelle. Mercredi 27 mai 2015, à Saint-Denis, la Le délégué FFL, Bruno Raoul, a remis leur journée nationale de la Résistance a été prix à Théo Folio et Corentin Saudusse, Lila et Francis Ruffier-Monet, et Patrick Cassany, maire. commémorée devant le monument du élèves de troisième au collège Xavier- Bichat à Arinthod. Cette cérémonie était général de Gaulle, en présence des autori - À Villeneuve-sur-Lot, c’est le délégué-47, orchestrée de main de maître par le colo - tés. M. Camille Bourhis, délégué de la Francis Ruffier-Monet qui, entouré des nel Jean Guichard, du Souvenir Français, Fondation de la France Libre, a déposé diverses autorités civiles et militaires et et nous le félicitons. Pour clôturer la céré - une gerbe. M. le sous-préfet de Saint- d’un nombre convenable de participants, monie, l’hymne national fut entonné par Pierre, Loïc Armand, a lu le texte du minis - dont plusieurs présidents d’associations les élèves et l’assistance. Clara Millet, 17 tre des Anciens combattants. À l’issue de d’anciens combattants, chefs d’établisse - ans, élève du lycée Jean-Michel de Lons- la cérémonie, les lauréats du Concours ments scolaires et délégations d’élèves de

Juin 2015 • N° 56 l 29 DANS LES DÉLÉGATIONS

lycées et collèges, a déposé une impo - 1941 au sein du bataillon de marche n°5, réfugiés étrangers et français internés au sante croix de Lorraine au pied du monu - puis du bataillon de marche n° 9. En jan - camp des Milles. En juillet 1942, en liaison ment aux morts en compagnie de deux vier 1943, avec le BM9, il se retrouve à avec le réseau d’évasion « Libérer et fédé - jeunes élèves. À noter la présence de Djibouti. Trois mois plus tard, il embarque rer », il est passeur sur la frontière franco- nombreux porte-drapeaux, dont celui de à destination du Levant, où il reste, avec espagnole à partir de l’Ariège, son dépar - la Fondation de la France Libre, porté par son unité, jusqu’en 1945. Après la guerre, tement de naissance. En mars 1943, le jeune Hugo Dauphin, qui a reçu son il sert à Casablanca dans le 6 e régiment recherché par la Gestapo, il est contraint diplôme et son insigne des mains de M. le de passer en Espagne. Arrêté par la police maire Patrick Cassany. La cérémonie s’est d’infanterie coloniale. Il quitte l’armée en franquiste, il est interné dans la prison de terminée aux accents de la marche de la juin 1947 et devient agent général d’assu - glorieuse 1 re DFL « El Alamein - Tunis » . Ce rances. Durant plus de vingt ans, Robert Lérida. Transféré à l’hôpital de la ville, il fut ensuite la réception à l’hôtel de ville Pestieaux a été le secrétaire général de est pris en charge par un prêtre espagnol où furent tenus les discours du délégué l’Association des Français Libres de qui lui permet de rejoindre Barcelone, où Francis Ruffier-Monet, de M. le maire Maine-et-Loire. il est hébergé par des ingénieurs français. Patrick Cassany et de M. le député Jean- Le 14 juillet, il rejoint le port de Setubal et Louis Costes. Un vin d’honneur offert par André Beauchêne a 21 ans, lorsqu’il est embarque pour le Maroc. Sur le bateau, la municipalité a clôturé cette journée requis pour le STO en novembre 1942. âgé de 24 ans, il signe son engagement dans une ambiance de congratulations Avec deux de ses amis, dans la même dans les Forces françaises libres. À amicales et solidaires. situation, Alfred Charpentier et Daniel Casablanca, il est dirigé vers la caserne de Martin, il décide de ne pas servir Francis Ruffier-Monet Médiouna, où les agents recruteurs girau - l’Allemagne nazie et de rejoindre l’Afrique distes lui font pression. Sorti de là par un du Nord en passant par les Pyrénées. Tous colonel d’aviation, il arrive à Alger, d’où il les trois partent de Cholet (Maine-et- repart le 13 août pour rejoindre, à Damas, Loire). Avec l’aide de passeurs, ils fran - en Syrie, les Forces aériennes françaises chissent la frontière franco-espagnole libres du Moyen-Orient. Le lendemain, il dans la nuit du 24 au 25 novembre 1942. est affecté aux Lignes aériennes militaires Arrêté, André est emprisonné dans les pri - stationnées sur le plateau du Golan sons de Pampelune et de Miranda de Ebro (Syrie), sous les ordres du colonel de du 27 novembre 1942 au 24 mai 1943. Marmier. Le 24 mars 1944, affecté à Alger Libéré, le 26 mai 1943, il embarque à à la disposition de l’état-major du général Setubal (Portugal) sur un navire à destina - de Gaulle, il participe à plusieurs missions tion de Casablanca, où il arrive deux jours nocturnes au-dessus de la Méditerranée. plus tard. Au centre de recrutement de Sa dernière mission est de transporter les Médiouna (Maroc), contrôlé par des archives personnelles du général de « giraudistes », lui et ses camarades ne Gaulle d’Alger à Paris libéré. Démobilisé Hugo Dauphin, porte-drapeau de la délégation. peuvent admettre les opinions qui se en septembre 1945 et de retour à la vie manifestent contre le général de Gaulle, civile, il travaille d’abord dans le domaine qu’ils sont venus rejoindre. Sans argent, aéronautique militaire et civil, avant de Maine-et-Loire sans relations, ils partent pour Oujda Trois Français Libres promus cheva - (Maroc), où ils arrivent le 12 juin 1943. Le lier de la Légion d’honneur 18 juin, à Alger, ils voient le Général dépo - ser une gerbe au monument aux morts. Le 6 février 2015, M. François Burdeyron, Recueillis par des gaullistes, ils partent le préfet de Maine-et-Loire, a remis l’insigne 25 juin pour Tunis, vêtus d’un uniforme de chevalier de la Légion d’honneur à anglais. Le 6 juillet, André et ses deux Robert Pestieaux et André Beauchêne, au compagnons signent leur engagement cours d’une cérémonie dans le salon dans les Forces françaises libres à d’honneur de la préfecture. Kairouan (Tunisie), sont affectés au Robert Pestieaux est à Granville (Manche) bataillon de marche du Tchad (2 e quand, le 17 juin 1940, il entend le maré - bataillon) et participent à la formation de chal Pétain annoncer la capitulation de la la 2 e DB au Maroc. Embarqué le 20 mai André Beauchêne, M. le préfet et Robert Pestieaux France. Le 21 juin, la mère d’un de ses 1944 à destination de l’Angleterre, André camarades lui apprend qu’un général, débarque à Grandcamp (Normandie), le parlant sur la radio de Londres, dit que la 1er août, et participe à la libération de la guerre n’est pas finie. Il est alors allé France, dont Paris, et à la campagne l’écouter sur une TSF. Ne pouvant accep - d’Allemagne. Il est démobilisé le 10 sep - ter la honte et la défaite, et bouleversé par tembre 1945. le message délivré par le général de Le 21 février 2015, à la mairie de Mûrs-Éri - Gaulle, il décide de le rejoindre en gné (Maine-et-Loire), René Joffres a reçu Angleterre. Il part avec deux copains, les insignes de chevalier de la Légion Julien Ozanne et Jacques Lamort, dans la d’honneur des mains du Dr Pierre Morel, nuit du 25 au 26 juin 1940, et traverse la président du Comité d’action de la Manche en passant par Chausey et Jersey. Résistance. Âgé de 20 ans, il s’engage dans les Forces françaises libres le 1 er juillet 1940 à En octobre 1940, alors qu’il est étudiant à Londres. Soldat, il est incorporé au sein du l’École nationale d’ingénieurs des Arts et bataillon de chasseurs de la France Libre. Métiers d’Aix-en-Provence, René Joffres En 1941, il est envoyé au Cameroun en réalise de fausses cartes d’identité aux Pierre Morel, M. le maire de Mûrs-Érigné et René Joffres.

30 l Juin 2015 • N° 56 DANS LES DÉLÉGATIONS

rejoindre des sociétés privées. En 1960, flamme sous l’Arc de Triomphe, après tion nationale, et de M. Arnaud Bayeux, son activité professionnelle l’amène à avoir défilé sur une partie des Champs- directeur de l’ONAC. s’installer en Maine-et-Loire, où il prend Élysées où Benjamin portera le drapeau sa retraite en 1985. Aujourd’hui, René de l’association départementale des Musée de Saint-Marcel Joffres est président du comité départe - anciens combattants français libres et des Les nouvelles concernant l’avenir du mental des Combattants volontaires de la amis de la France Libre dont notre délé - musée sont plutôt rassurantes. M. Joël Résistance (CVR) et membre du jury du gué est le président. Belle récompense Leveau, nouveau maire, a confirmé que la Concours national de la Résistance et de pour ce lycéen qui fait honneur à notre gestion, assurée par un SIVU constitué la Déportation (CNRD) du Maine-et- jeunesse. des deux communes, Saint-Marcel et Loire. Au niveau national, il est membre Malestroit, était prise en charge par la du jury du CNRD, liquidateur de la communauté de communes Val d’Oust Confédération Nationale des CVR, mem - Lanvaux, présidée par M. Launay. Un bre du premier collège du conseil d’admi - comité de pilotage restreint composé nistration et président du comité d’ani - d’élus a été mis en place. Le commandant mation et de suivi de la Fondation de la Leroy, conservateur du musée de Saint- Résistance. Cyr Coëtquidan, poursuit les investiga - tions qui doivent permettre le début des travaux. M. Leveau souhaite que le musée Morbihan Benjamin à la cérémonie à la Chapelle des haies en reste ouvert aux visiteurs pendant la res - Benjamin Bauché représentera les Sérent, devant les tombes de l’aspirant François tauration des bâtiments. L’avenir du per - Mariani, cadet de la France Libre, et de Roger Vautelin, sonnel est assuré. Certains resteront au e jeunes porte-drapeaux aux cérémo - parachutiste du 4 SAS (DR). musée, les autres seront employés par la nies du 14 juillet à Paris CCVOL. La librairie, propriété de Concours de la Résistance et de la l’Association des amis du musée de la L’Office national des anciens combattants Déportation organise un séjour à Paris pour des jeunes Résistance bretonne et des parachutistes porte-drapeaux à l’occasion de la fête Mme Marie-José Chombard de Lauwe, de la France Libre, a quitté le musée. nationale du 14 juillet. En 2012, Benjamin résistante déportée, a participé aux deux Un son et lumière sera organisé du 12 au Bauché, alors élève du collège Saint-Julien séances organisées par le comité de liai - 14 juin, avec la participation d’associa - de Malestroit, était lauréat du Concours son du CNRD pour la préparation du tions de propriétaires de véhicules mili - national de la Résistance et de la concours à Lorient puis Vannes. Environ taires anciens. Il contribuera à pérenniser Déportation organisé par le ministère de 300 lycéens et collégiens ont participé à le souvenir des combats du 18 juin 1944. l’Éducation nationale. chacune des séances. Inauguration de la rue René Le Pierre Oillo, alors président du comité qui La remise départementale des prix a Touzic organise le concours au niveau départe - constitué la 1 re cérémonie de la commé - mental et qui est aussi le délégué départe - moration de la libération de la « poche de La municipalité de Damgan avait été solli - mental de la Fondation de la France Libre, Lorient ». Après une visite de la base des citée, il y a une douzaine d’années, par participe chaque année aux cérémonies sous-marins de Kéroman dans la matinée notre délégué et le président du comité du organisées dans les Landes de Lanvaux à du mercredi 6 mai, 50 lauréats ont assisté Souvenir Français de Muzillac pour la mémoire des parachutistes du colonel à la cérémonie patriotique qui s’est qu’une rue de la ville porte le nom de Bourgoin : à La Nouette, à la Croix des déroulée devant le monument aux morts, René Le Touzic, né le 25 décembre 1916 à parachutistes, à la Chapelle des haies, à place Glotin. Mme Lecomte, présidente Damgan, parachutiste, caporal-chef dans e Plumelec, à Trédion où des Français du comité de liaison du CNRD, a déposé le 4 SAS, parachuté à Duault le 9 juin Libres du 4 e SAS ont trouvé la mort, il tient une gerbe en compagnie du sous-préfet, à mettre à l’honneur des lauréats du du maire de Lorient et du député. Les lau - CNRD en leur proposant de porter le dra - réats et leurs professeurs étaient ensuite peau de son association lors des cérémo - invités au repas servi au lycée Dupuy de nies. Depuis 2012, Benjamin Bauché Lôme et offert par les associations d’an - porte régulièrement le drapeau de la ciens combattants et de mémoire. La Fondation de la France Libre. C’est tout cérémonie de remise des prix se déroula naturellement que notre délégué a consti - dans la salle d’honneur de l’hôtel de ville tué le dossier pour que Benjamin puisse sous la présidence du sous-préfet de participer à la cérémonie nationale du 14 Lorient en présence de M. Métairie, maire juillet à Paris. Le dossier, retenu au niveau de Lorient, de Mme Favreau, directrice départemental par M. Arnaud Bayeux, départementale des services de l’Éduca - Joël Leveau, Thierry Terrier et notre délégué dans le directeur des services de l’ONAC du musée. Morbihan, a été transmis à la direction 1944, arrêté lors d’une mission auprès du nationale de cet organisme. commandant Bourgoin le 11 juillet et Benjamin vient de recevoir la réponse : fusillé à Josselin le 4 août 1944. Après accompagné par son père, le 13 juillet, il accord du conseil municipal, l’inaugura - rejoindra Paris où ils seront pris en charge tion s’est déroulée le 24 janvier en pré - par l’ONAC. Le 14 juillet, ils assisteront au sence de M. Jean-Marie Labesse, maire de défilé sur les Champs-Élysées puis, après Damgan, et de plusieurs adjoints et un pique-nique aux Invalides, ils décou - conseillers, du délégué militaire départe - vriront Paris en bateau-mouche, avant de mental, de présidents d’associations participer à la cérémonie du ravivage de la Notre drapeau était porté par un lauréat de Malestroit. patriotiques, accompagnés de leurs

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porte-drapeaux, des représentants de la l’histoire, ils sont sortis marqués, comme Gaulle du 18 juin 1940 organisé à Paris et à Fondation de la France Libre et du a pu en témoigner Vincent lorsqu’il a pris Beauvais, avec son porte-drapeau, Gaël Souvenir Français. la parole, pour la remercier. Désormais Valy, et sa petite-fille Charlène. Celle-ci a dépositaires d’une part de cette mémoire lu l’Appel au monument aux morts de Remise de la Légion d’honneur à douloureuse, Clément, Ayrton, Vincent, Beauvais, en présence du préfet de l’Oise. Mme Cestari Adrien et les cinq cents collégiens et Le 26 avril 2015, journée nationale du sou - lycéens du département qui ont participé Nommée chevalier de la Légion d’hon - venir des victimes et des héros de la au CNRD vont pouvoir s’en faire les pas - neur par décret du 9 novembre, Mme déportation, le délégué et le porte-dra - seurs. Madeleine Cestari, a été décorée le peau étaient à la cérémonie commémora - samedi 28 février au Palais des Arts et de la Madeleine est la dernière survivante de la tive organisée au monument des déportés Culture de Vannes. Membre dès novem - famille Renault, qui a particulièrement de la gare de Compiègne-Margny, pour le bre 1940 du réseau de renseignements souffert pendant l’occupation de notre 71 e anniversaire du dernier convoi de organisé par son frère Gilbert Renault, pays par l’Allemagne nazie et marqué déportés, qui partit pour l’Allemagne le 27 plus connu sous le nom de « colonel l’histoire de la ville de Vannes. Les person - avril 1944 avec 1 700 détenus du camp de Rémy », elle a été arrêtée par la gestapo le nalités civiles et militaires, sa famille et ses Royallieu. 15 octobre 1942. amis étaient venus nombreux pour rendre hommage à cette Française Libre et assis - Somme ter à sa remise de la Légion d’honneur, C’est le mercredi 27 mai dernier que le juste récompense pour son engagement secrétaire général national Thierry Terrier au service de son pays, de sa Patrie. nous a fait la gentillesse et l’honneur de Pierre Oillo nous rendre une visite très appréciée, Délégué du Morbihan pour dévoiler une plaque apposée sur une maison qui fut habitée de juillet 1934 à juin 1936, à Amiens, par Jean Moulin, alors sous-préfet de la Somme. Par une intervention aux qualités soulignées par Mme la préfète Nicole Klein elle-même, M. Terrier rappela par quelques traits d’histoire le rôle de celui qui fut la clé de voûte du dispositif d’unification de la Résistance intérieure. Et chacun d’avoir à l’esprit l’éloge funèbre prononcé par

David Robo, Pierre Oillo, notre porte-drapeau Henri Notre porte-drapeau Henri Brosset (à droite). Brosset, Yvette Lecomte, présidente du comité de Vannes de la Légion d’honneur, et François Goulard entourent Mme Cestari. Une nombreuse assistance s’était rassem - blée pour rendre hommage à cette résis - tante discrète mais unanimement esti - Oise mée. M. David Robo, maire de Vannes, M. Le 18 juin 2014, le délégué de la François Goulard, ancien ministre, prési - Fondation, Jacques Anferte était à la céré - dent du conseil général, et M. Arnaud monie organisée pour le soixante-dixième Bayeux ont successivement pris la parole anniversaire de l’appel du général de pour remercier et féliciter Mme Cestari. C’est notre délégué qui lui a remis la Thierry Terrier, Daniel Bourriez, délégué départemen - Légion d’honneur après avoir retracé son tal de la Fondation, et Nicole Klein, préfète de région. parcours dans la Résistance. Il ne manqua pas d’associer à son hommage ses frères André Malraux lors du transfert de ses Gilbert, Claude, officier dans la 1 re DFL, cendres au Panthéon en 1964, tandis que Philippe, déporté à Neuengamme, qui d’autres héros le rejoignaient ce même trouva la mort le 3 mai 1945 sur le Cap jour : « Entre ici, Jean Moulin, avec ton ter - Arcona , bombardé en baie de Lubeck, ses rible cortège. Avec ceux qui sont morts sœurs May et Isabelle, déportées à dans les caves sans avoir parlé, comme Ravensbrück, sa mère et ses sœurs Hélène toi ; et même, ce qui est peut-être plus et Jacqueline internées avec elle 28 mois atroce, en ayant parlé… » dans la prison de Fresnes et les camps de Ajoutons pour la petite histoire que Jean Romainville et Compiègne. « Avec le temps Moulin devait revenir dans la Somme en qui passe, la menace qui pèse sur nous est 1940 pour quelques jours de repos (après l’oubli » précisa Pierre Oillo. sa tentative de suicide en prison) chez son ami le docteur Antonin Mans, médecin Cette année encore, à 94 ans, Madeleine dans le village de Cottenchy, près Cestari a reçu quatre lycéens de deux éta - d’Amiens. blissements de Vannes qui préparaient le concours de la Résistance et de la Daniel Bourriez Déportation. De cette immersion dans Jacques Anferte avec son porte-drapeau et sa petite-fille. Délégué de la Somme

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Tarn à St-Michel le 10 mars 2015 pour le der - la présentation suivie de la lecture du nier hommage à Angelin German, « le tou - poème d'Aragon La Rose et le Réséda , Hommage au colonel Claude bib des maquis du Var » , ancien député symbole d’unité de la Résistance. La lec - Mademba Sy UDR et maire de Flayosc, décédé à l’ap - ture a été effectuée par nos correspon - proche de sa centième année dans la nuit dants, âgés de 14 et 19 ans et en grande À l’initiative de Roger Boffo, soutenue par du 6 au 7 mars 2015. majorité lauréats du CNRD 83 associés à le bureau de la Fondation de la France la Fondation de la France Libre : Gabrielle Libre et son délégué Laurent Haaf, prési - Michel Magnaldi représenta la Fondation Bellon à Montfort-sur-Argens, David dent de l’Association tarnaise des amis de à la cérémonie funèbre de l’ingénieur Recht (élève de terminale du lycée la Fondation de la France Libre, son prési - Jacques Perez décédé le 3 avril 2015, figure Raynouard) à Brignoles, Manon dent d’honneur, Claude Mademba Sy, de Rhin-et-Danube et du Souvenir fran - Schneider et Marie Océane Leroy à Six- e FFL, ancien de la 2 DB, décédé le 9 avril çais du Var, à l’église de Saint-Nazaire de Fours-les-plages, Mieszko Duvette à 2014, a été honoré à titre posthume par le Sanary-sur-Mer le 7 avril. Forcalqueiret, Edwin Soudet à Taradeau, dépôt d’une plaque sur sa sépulture, Le 26 avril 2015, pour identifier les initia - Charlotte Pernel et des élèves de primaire samedi 9 mai 2015. tives de la délégation du Var, plusieurs à Garéoult, Adam Ducotey et des jeunes Installé dans le Briatextois depuis 1960, lauréats du CNRD 83, associés comme Gardéens à La Garde, Gaëlle Derougemont colonel de l’armée française, cet ancien correspondant de la Fondation de la et Polina Sheleg au Beausset (où elles tirailleur sénégalais est le seul soldat noir France Libre, participèrent aux commé - déposèrent la gerbe de la Fondation avec à avoir vécu l’épopée de la 2 e DB. morations des héros et martyrs de la Michel Magnaldi), Hadrien Voillot à St- Ambassadeur du Sénégal, Claude Déportation par la lecture de la présenta - Raphaël, associé au délégué départemen - Mademba Sy a aussi obtenu, en janvier tion hommage de Georges Mandel – colla - tal de Fréjus-St-Raphaël, Éryc Pioch, vété - 2011, que les retraites allouées aux borateur de Clemenceau durant la ran de La France Libre, pionnier de anciens combattants des ex-territoires Grande Guerre et ministre de l’Intérieur l’Association des Français Libres présent français soient alignées sur celles des en 1940 qui mena un combat contre les dès 1945 dans nos anciens locaux, avenue métropolitains de l’époque. C’est au défaitistes – et des lettres adressées par sa des Champs-Élysées mis à disposition par « cimetière rond » de Puybegon, où il fille Claude, âgée de 14 ans, à Pierre Laval l’avionneur Dassault. À la Farlède, Guy re repose, que s’étaient réunis en ce 9 mai et Philippe Pétain. À travers ces deux let - Vadon, vétéran de la 1 DFL, a remis la ses amis, compagnons d’armes et sa fille tres, la voix d’une courageuse jeune croix de la Légion d’honneur à un cama - Catherine Mademba Sy Norget, conseil - orpheline de France, Claude Mandel a rade. À Toulon, la gerbe de la Fondation lère municipale à Lagrave. résonné et rappelé le martyre subi par fut remise par Michel Magnaldi, délégué départemental du Var, Dan Boilleau (lau - Extrait du Journal d’Ici Tarn Georges Mandel, rapatrié du camp de concentration nazi de Buchenwald et réat premier prix devoir individuel collège remis à la Milice qui l’exécuta en forêt de du CNRD 83 2014), maître Phân Xuang Fontainebleau le 7 juillet 1944. La lecture Tòng et Louis Janvier, collégien de l’éta - des lettres Claude Mandel, par Gabrielle blissement toulonnais Pierre Puget. Bellon à Brignoles, Maï-ly Nguyen à Amandine Régnier (lauréate quatrième Sanary-sur-Mer, Manon Schneider et prix travaux collectifs collège 2015, corres - pondant FFL sur La-Seyne-sur-Mer) était Marie-Océane Leroy à Six-Fours-les- associée au député Philippe Vitel pour la Plages (où elles accompagnèrent André remise de gerbe au monument, place Monchablon pour la remise de la gerbe Gabriel Péri. Le délégué du Var a fait ravi - commémorative), Polina Sheleg au ver la flamme au côté d’anciens combat - Beausset (qui accompagna le représen - tants par Dan Boilleau et Louis Janvier. tant de Rhin-et-Danube pour la remise de Louis Fiori, président du Club varois du 18 la gerbe commémorative), permit d’ap - De gauche à droite, Roger Boffo, Catherine Mademba juin, s’est proposé pour la lecture de l’or - Sy, fille de Claude, Laurent Haaf, délégué FFL du Tarn porter une variante au protocole, marque dre du jour du général de Gaulle du 8 mai et président de l’ATAFFL, notre ami Henri Marie-Olive, de la délégation du Var. À Toulon, au porte-drapeau France Libre section Midi-Pyrénées, 1945. Vive la France ! délégué FFL de la Haute-Garonne. Mémorial de la Déportation, le lauréat premier prix devoir individuel collège Michel Magnaldi Var 2014, Dan Boilleau, associé comme cor - Délégué du Var respondant FFL, a lu le texte national Franck Laussel, délégué sur la commune commun des fédérations de déportés, de La Crau, et Michel Magnaldi, délégué suite à la demande de nos amis déportés Var de la Fondation de la France Libre, ont et du capitaine de vaisseau André accompagné André Monchablon, prési - Lemaire, des Évadés de France par dent du jury varois du CNRD, rescapé de l’Espagne, vice-président du Mémorial de Mauthausen qui fut le radio du général la Déportation de Toulon, membre de la Charles Delestraint, chef de l’Armée Fondation de la France Libre. À La Valette- secrète mort en déportation, pour une du-Var, notre délégué Morgan Maginot a conférence liée au thème 2015 du CNRD, fait lire la lettre de Claude Mandel adres - avec projection d’un film sur le camp de sée au maréchal Pétain par Brice, jeune Mauthausen, devant une soixantaine Valettois de 11 ans. d’élèves de l’Institution Saint-Joseph La Le 8 mai 2015, la délégation participa aux Navarre, à La Crau le 18 février 2015. cérémonies du soixante-dixième anniver - Jean Claude Dufort, délégué FFL sur saire de la Victoire en suggérant dans cer - Manon Schneider et Marie Océane Leroy, lauréates du CNRD 83 2014 catégorie devoir individuel collège, cor - Entrecasteaux - la Provence verte, repré - taines communes la lecture de l’ordre du respondantes de la Fondation sur Six-Flours-les- senta la Fondation à la cérémonie funèbre jour du général de Gaulle du 8 mai 1945 et Plages, avec André Monchablon devant le monument. tur fu s le Figaro, an Groupe z d stèmes, rial tre sault Sy lt, Artcu En ion, Das Dassau lt Aviat hâteau Dassau ssault, C lière Da Immobi

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