Master Reference
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Master La traduction de l'opérette : l'exemple de La Chauve-Souris de Johann Strauss TARDY, Charlene Abstract La Chauve-souris est une opérette composée en 1874 par Johann Strauss, qui a fait l'objet de plusieurs traductions françaises. Dans ce travail, nous nous proposons d'étudier la traduction de Paul Ferrier datant de 1904. Dans un premier temps, nous avons étudié les difficultés propre à la traduction des livrets d'opéra, ce qui nous a amené à poser la question de la pertinence d'une telle pratique. Nous avons ensuite présenté le contexte de la création des deux versions. Enfin, nous avons procédé à l'analyse des différences entre les deux versions. Cette étude est divisée en deux parties. L'une porte sur les différences linguistiques au regard de deux thèmes : celui de la vengeance et celui de la fête; l'autre porte sur la traduction des passages chantés et s'appuie sur quelques extraits musicaux. Reference TARDY, Charlene. La traduction de l'opérette : l'exemple de La Chauve-Souris de Johann Strauss. Master : Univ. Genève, 2011 Available at: http://archive-ouverte.unige.ch/unige:15894 Disclaimer: layout of this document may differ from the published version. 1 / 1 Charlène Tardy La Traduction de l’opérette : l’exemple de La Chauve-souris de Johann Strauss Mémoire présenté à l’Ecole de traduction et d’interprétation pour l’obtention du Master en traduction, mention traduction spécialisée Directeur de mémoire : Mathilde Fontanet Juré : Prof. Lance Hewson Université de Genève Février 2011 Remerciements Je tiens à remercier Mme Fontanet pour son aide lors de l’élaboration et de la rédaction de ce mémoire. Ses remarques et ses conseils m’ont été très profitables tout au long de ce travail. J’adresse également mes remerciements à M. Hewson, qui m’a donné de précieux conseils. Je remercie aussi Nadine et Réjane Tardy, qui ont relu et corrigé ce travail. Je tiens, enfin, à remercier ma famille pour son soutien tout au long de mes études. 1 Introduction De tout temps, la musique a entretenu des liens avec la traduction. Ainsi, tout au long de l’histoire de l’opéra, les livrets ont été traduits. Même si, aujourd’hui, la tendance dominante veut que les opéras soient donnés en langue originale, il existe encore des œuvres qui, du fait de leur genèse, sont jouées en langue originale et en traduction. Par exemple, Orphée et Eurydice, de Gluck, existe en version italienne et en version française, selon la demande du compositeur. De même, le livret Des Vêpres siciliennes de Verdi a été écrit en français, mais a fait l’objet de deux traductions en italien. Autre exemple, L’Amour des trois Oranges de Prokofiev a été créé dans sa version française en 1921, avant d’être donné dans sa langue originale en 1927. Enfin, les opérettes ont été largement traduites et leurs traductions sont encore jouées aujourd’hui. Elles comportent, en effet, de nombreuses scènes parlées à caractère comique, qui doivent être comprises du spectateur afin de conserver leur effet. Ainsi, La Veuve joyeuse de Franz Lehár a récemment été donnée au Grand Théâtre de Genève dans une version trilingue, alternant l’allemand, l’anglais et le français. La traduction des œuvres musicales, et notamment des textes destinés à être chantés, nous a paru intéressante, et nous avons décidé d’étudier la traduction d’une opérette. Longtemps considéré comme un simple divertissement, ce genre a fait l’objet de nombreuses traductions. Notre choix s’est rapidement porté sur l’opérette de Johann Strauss La Chauve-souris . Cette pièce fut créée à Vienne en 1874 sur un livret de Carl Haffner et de Richard Genée, s’inspirant de la pièce française Le Réveillon , écrite par Henry Meilhac et Ludovic Halévy. La version française fut créée en 1904, dans une traduction de Paul Ferrier. En comparant les deux versions, il nous est très vite apparu que le traducteur avait transposé l’action dans un contexte familier à son public. Nous nous proposons d’étudier ce qui a motivé ses choix et comment il a traduit les passages musicaux. Au cours de ce travail, nous allons tout d’abord retracer l’histoire des livrets d’opéra et de leur traduction. Cela nous amènera à décrire les difficultés auxquelles le traducteur doit faire face, et à nous interroger sur la pertinence de cette pratique. Nous présenterons ensuite l’œuvre et sa traduction, en les replaçant dans leurs contextes respectifs. Enfin, nous procéderons à l’analyse de la traduction, en deux temps. D’une part, nous aborderons les différences linguistiques dans la perspective de deux thèmes, celui de la vengeance et celui de la fête. Cette analyse portera sur tout le livret (airs et dialogues) et elle sera fondée sur une étude des métaphores et des procédés stylistiques. D’autre part, nous analyserons 2 certains airs afin de mieux comprendre les enjeux de la traduction d’un texte destiné à être chanté et écouté. Ce faisant, nous chercherons à établir si le sens du texte original est respecté dans le texte français, si celui-ci peut être compris par le public et s’il est en adéquation avec la musique. 3 1. La traduction des livrets : aspects théoriques 1.1. Histoire des livrets et de leur traduction dans l’histoire de l’opéra 1.1.1. Histoire des livrets 1.1.1.1. Les livrets dramatiques L’opéra est né vers 1600 en Italie 1. Il a été créé à Florence par un groupe de musiciens, la Camerata , afin de faire revivre sur scène les mythes de l’Antiquité grecque. A l’origine, dans un opéra, c’est le texte qui prime, la musique devant seulement l’accompagner en soulignant la déclamation du chanteur. En effet, avec l’apparition de l’opéra, la voix n’est plus utilisée au même titre que les autres instruments, mais elle devient un moyen de faire passer des paroles. L’accentuation et la scansion sont très importantes et l’opéra se présente comme un long récitatif. Monteverdi est le premier à composer des airs et des morceaux pour orchestre qui mettent en valeur l’action et permettent aux chanteurs de montrer leur virtuosité. Avec le développement de l’opéra en Italie, le côté scénique prend de l’importance, la machinerie est de plus en plus utilisée et l’opéra devient un spectacle grandiose. Le livret n’est plus le seul vecteur du sens : le public devient à même de comprendre l’action grâce à ce qui est représenté sur scène. Les livrets perdent alors de leur qualité littéraire et ne sont plus qu’une succession de scènes et d’actions n’ayant qu’un lien approximatif entre elles. Il est aisé d’intercaler des airs entre les scènes et les livrets deviennent un prétexte aux démonstrations techniques des chanteurs. Patrick Smith écrit à propos de l’opéra italien du XVII e siècle : The chief ones [features of XVII Italia operas] were stage panoply, action taking the form of complex intrigue interwoven with love, little attempt at logical cohesion and rampant emotionalism.2 En France, à la même époque, l’opéra est influencé par le goût du ballet et du théâtre. On accorde une grande importance aux mots et la musique est subordonnée à la déclamation des vers. Les auteurs de livrets utilisent une langue littéraire, riche en 1 Le présent chapitre est rédigé sur la base d’informations trouvées dans le livre: Kaindl Klaus, Die Oper als Textgestalt , Stauffenburg, Tübingen, 1995, pp. 44-41, 61-63 et pp. 116-118 et dans le livre : Smith, Patrick John, The Tenth Muse : A historical Survey of the Opera Libretto , Alfred A. Knopf, New-York, 1970 2 Smith, Patrick John, op.cit. , 1970, p.18 4 métaphores. Les textes sont pensés pour être lus et ont des qualités littéraires. Sur scène, on montre des personnages vivant de grandes émotions, et d’intenses confrontations dramatiques. A la fin du XVII e siècle, en Italie, les livrets d’opéra connaissent une réforme qui s’explique par deux facteurs. D’une part, le goût du public a changé : il se lasse des effets scéniques spectaculaires ; d’autre part, les théâtres ont moins d’argent à consacrer à la mise en scène. Sous l’impulsion d’Apolo Zeno et de Pietro Metastasio on assiste à un retour aux trois unités (temps, espace, action) prônées par Aristote. Désormais, un livret doit aborder des thèmes nobles, proposer un dénouement heureux et exprimer de grands sentiments au moyen de beaux vers. On attend également d’un livret qu’il instruise le public. Apolo Zeno définit les règles d’un nouveau genre : l’ opera seria . L’ opera seria met en scène une galerie de personnages unis par des relations amoureuses et mus par des sentiments nobles. Il développe un thème principal avec des scènes à forte valeur dramatique, chacune se terminant par un air chanté par le personnage qui quitte le plateau. Il comporte peu d’ensembles, de duos ou de pièces pour orchestre. Avec le temps, l’ opera seria évolue. Les compositeurs, remarquant que le public n’est pas toujours très attentif pendant les récitatifs non accompagnés par l’orchestre, écrivent à nouveau des morceaux virtuoses. Au XVIII e siècle, Gluck et son librettiste Calzabigi lancent à leur tour un nouvel appel à la simplicité, prônant une simplification de l’action et une dramatisation de la langue. Le livret ne doit plus être uniquement poétique, mais il doit servir à caractériser les personnages et à rendre plus claire l’action scénique. Les actes doivent être d’une longueur adaptée et permettre au personnage d’intervenir selon son importance.