École Nationale Supérieure Louis Lumière Section son 2012

LA RADIO ÉDUCATIVE POUR ENFANTS : UNE ALTERNATIVE QUALITATIVE À LʼOFFRE AUDIOVISUELLE ACTUELLE

CONCEPTION DʼUN EXEMPLE DE RADIO ÉDUCATIVE POUR ENFANTS ET RÉALISATION DʼUNE JOURNÉE DE PROGRAMME DIFFUSÉE SUR LE SITE DE LA RADIO

Mémoire de fin dʼétudes Par Anouck Bernet

Rédigé sous la direction de : Guillaume Richardot et Éric Urbain

Membres du jury : Gérard Pelé, Guillaume Richardot, Éric Urbain

! REMERCIEMENTS

Merci à Gérard Pelé qui a soutenu mon projet depuis le début et qui a su mʼapporter ses lumières,

à Guillaume Richardot et à Éric Urbain, mes deux directeurs de mémoire, de sʼêtre montrés disponibles et dʼavoir encouragé mon travail,

à Florent Fajole pour la documentation.

Merci à James Blanc pour ses illustrations originales, et à Hugo Bernet pour le temps passé à élaborer le site Internet de la Zigoradio.

Merci à Myriam Gauvain, pour son investissement dans le projet de mémoire,

à Antoine Desrats pour lʼaide apportée à la réalisation de ma partie pratique.

Merci à Philippe Chamont, Paul Merchat et Marie-Agnès Besse de mʼavoir apporté leur point de vue de professionnels de lʼenfance et de lʼéducation.

Merci à Olivier Dumolin pour son témoignage sur Radio Moussaillons,

à Phil Barouf, mixeur de Bouskidou, pour ses conseils.

Merci à tous ceux qui ont participé à la réalisation de ma partie pratique : Pascal, Laurianne, Christophe, Antoine, Bruno, Angela, Sophie, Gaétan.

Merci à mes proches pour le soutien moral, et à ma famille pour les relectures et les idées.

" RÉSUMÉ

Alors que les radios libres prolifèrent et se partagent des publics toujours plus spécifiques, le paysage dénote une grande absente : cʼest la radio pour enfants. Public rêvé des artistes du livre, de lʼaudiovisuel, de la chanson et du spectacle, il semble boudé par la création radiophonique ; pourtant, la plupart des enfants aiment écouter la radio.

Ce mémoire est un travail de recherche embryonnaire qui propose des réflexions sur la notion de radio éducative pour enfants.

Mʼappuyant sur les expériences réalisées en matière de radios et webradios (éducatives ou commerciales) pour enfants, jʼen analyse les points forts et les points faibles sur les plans éditorial et économique.

Jʼassocie cette analyse à une réflexion poussée sur lʼéducation et sur le rôle que peut jouer une radio éducative dans la construction de lʼenfant, en considérant que lʼépanouissement de lʼindividu se fait grâce à la culture, lʼouverture dʼesprit et lʼacquisition du libre-arbitre.

Je propose des pistes concrètes pour créer une radio éducative pour enfants cohérente et efficace sur les contenus diffusés, la dynamique de lʼanimation et le rythme des programmes. Ces pistes mènent à la création dʼune station de radio éducative pour enfants fictive, dont je développe la ligne éditoriale et les contenus, et dont je réalise une journée de programme.

Mots clés : radio éducative pour enfants, radio, enfance, éducation, création dʼune radio, médias pour enfants, Superloustic, pédagogie, musique pour enfants, culture enfantine.

# ABSTRACT

Among the diversity of radio stations, you can find one which fits with your needs and tastes, whoever you are. Whoever ? No ! One public, special but yet quite large, seems to be left out by radiophonic creation, whereas it is so much cared by other artists such as singers, illustrators, authors or directors : children. Nevertheless, children do like to listen to radio.

This dissertation is a preliminary work of research, which proposes thoughts about an educative radio for children.

Leaning on examples of experimental radios and webradios for children, Iʼll analyse their strengths and weaknesses from economic and editorial angles.

Beside this analysis, Iʼll lead a thorough reflection about education, and which role an educative radio for children can have in child construction, considering that human beings blossom thanks to culture, open-mindedness and acquisition of a free will.

At last, Iʼll propose concrete leads to create an educative radio for children that will be coherent and effective in broadcast contents, in animation dynamic and in programmes rhythm. These leads will lead to a creation of a fictitious educative radio station for children, which Iʼll develop the editorial line and the contents of, and which Iʼll direct a day of programmes of.

Key words : educative radio for children, radio, childhood, education, creation of a radio station, media for children, Superloustic, pedagogy, music for children, childrenʼs culture

$ TABLE DES MATIÈRES

%&'()*+,'%)&- . %/-01-21341536378-9:-6;3<=61>7173?>-9;@>:-A193?-89@B173C:-=?@A-:>21>74-91>4-6:-=1D41E:- A193?=F?>3G@:-1B7@:6- !H %/-!I-J347?3A:-9:-K@=:A6?@473B- !H %/-"I-0:-=1D41E:-1B7@:6-9:4-A193?4-:7-L:5A193?4-=?@A-:>21>74- !M %/-#I-,?>B6@43?>4-:7-=:A4=:B73C:4-=?@A-61-BA8173?>-9;@>:->?@C:66:-A193?-=?@A-:>21>74- "$ %%/-0:4-3>78AN74-9;@>:-A193?-89@B173C:-=?@A-:>21>74- #! %%/-!I-01-A:B?>4398A173?>-9:-6;:>21>7- ## %%/-"I-(:C16?A34:A-6;3<=?A71>B:-9:-6;8B?@7:- $# %%/-#I-+>:-A193?-89@B173C:-O-=?@AG@?3-P- $Q %%/-$I-01-A193?-B?<<:-B?<=1E>?>-9:-6;:>21>7- RR %%/-RI-+>:-A193?-9;8BF1>E:- RQ %%/-.I-01-A193?-=?@A-:>21>74-91>4-6:-B19A:-21<36316- .! %%/-SI-+>-?@736-9:-=A?-9:-61-B@67@A:-:>21>73>:- .R %%/-,?>B6@43?>-4@A-6:4-3>78AN74-9;@>:-A193?-=?@A-:>21>74- .S %%%/-,?>B:=73?>-9;@>-:T:<=6:-9:-A193?-89@B173C:-=?@A-:>21>74-:7-A81634173?>-9;@>:-U?@A>8:- 9:-=A?EA1<<:-9322@48:-4@A-6:-437:-9:-61-A193?- .Q %%%/-!I-0:4-2?>91<:>71@T- .Q %%%/-"I-VA366:-9:-=A?EA1<<:4W-B?>7:>@4-:7-3>7:>73?>4-9:-61-X3E?A193?- SS %%%/-#I-0:-437:-9:-61-A193?- QQ ,)&,0+K%)&-*+-YZY)%([- M! \%\0%)V(]^J%[- M" ]>>:T:-!-O-_@:473?>>13A:-9;:>G@N7:-19A:448-`-9:4-1>B3:>4-1@937:@A4-9:-K@=:A6?@473B- MR ]>>:T:-"-O-_@:473?>>13A:-4?@<34-`-9:4-86aC:4-9:-,[!-:7-,["- MQ ]>>:T:-#-O-0:77A:4-9:-4?@73:>-`-K@=:A6?@473B-:>-!MM"- !!"

R INTRODUCTION

Lʼenfance, ce paradis perdu, est un bien vaste sujet auquel lʼadulte nʼa de cesse de rêver. Lʼenfance cʼest lʼinnocence, cʼest la pureté, la fraîcheur, la perfection. Tant dʼéloges faits à cette période de la vie, comme si elle était finalement un but secret, une utopie. Dans certaines cultures cʼest la vieillesse que lʼon vénère ; les cheveux blancs, les rides sont preuve de sagesse ; en France, pendant lʼAncien Régime, les nobles et bourgeois enfarinaient leurs perruques pour se donner lʼair sage. Aujourdʼhui la mode serait plutôt aux crèmes anti-rides, aux liftings et aux camouflages tinctoriaux de racines blanches. Oui, depuis le XVIIIe siècle, la mode est au jeune.

Appuyons-nous sur le postulat positiviste des sociologues selon lequel lʼhumain est défini par ses pratiques et ses consommations. Pour définir lʼenfant, il faut alors connaître ses pratiques culturelles, ses accès aux médias et sa façon de consommer. Or de manière récurrente, lorsquʼon ouvre un ouvrage de sociologie de lʼenfant ou de travaux dʼenquête sur les moins de 15 ans, lʼune des premières informations données concerne le manque de travaux abordant ce sujet.

« Soulignons tout dʼabord une carence : la sociologie sʼest peu intéressée aux moins de 15 ans, la plupart des travaux sur la “jeunesse” sʼintéressant aux 15-25 ans.»

Introduction de Les loisirs culturels des 6-14 ans, S. Octobre, 2004

« Pour parler des parents et de leurs habitudes éducatives, les professionnels de terrain sont les mieux placés. Pourtant, [...], on leur donne rarement la parole et cʼest un tort. »

Première partie de Quels repères pour grandir ?, P. Béague, 2004

. « Lʼouvrage [...] veut avant tout combler un manque méthodologique. En effet, de nombreux manuels présentent les techniques dʼenquête auprès dʼadultes, mais travailler auprès dʼenfant nécessite des précautions spécifiques et oblige à adapter les modalités habituelles. »

Introduction de Enquêter auprès dʼenfants et de jeunes, I. Danic, J. Delalande, P. Rayou, 2006

La culture enfantine, elle, existe, et la presse jeunesse, les albums et BD pour enfants, les jeux de société, festivals et expositions, spectacles et concerts pour enfants ont plutôt bonne mine ! Lʼindustrie du dessin animé et du film dʼanimation pour enfants se porte tout à fait bien aussi ; des chaînes de TV sont même entièrement consacrées à ce public (Gulli, Tiji, Télétoon+...).

Un secteur, pourtant, ne semble pas leur prêter attention : cʼest la radio. Cʼest pour cela que, en tant que potentielle future professionnelle de la radio et concernée par lʼenfance et lʼéducation, jʼai eu envie de travailler sur le sujet de la radio pour les enfants, média culturel et à portée éducative si on le désire.

Cʼest la radio de flux qui mʼa intéressée ; comment et pourquoi développer une radio de flux pour enfants ? En ce sens, le “concurrent” premier de la radio est la TV. Aussi, il mʼa semblé pertinent de travailler sur la potentialité dʼune radio éducative pour enfants, car elle serait une alternative à la TV, dont les programmes sont parfois indigents, voire ineptes. Puisque la radio a pour “point faible” de ne pas servir dʼimages, on lui attribue le “point fort” de plaire aux parents, pédagogues et autres responsables éducatifs. Ainsi, une radio pour enfants serait une alternative intéressante, au moins pour les parents.

Au tout début de mon travail, alors que mon sujet nʼétait pas encore tout-à-fait défini, jʼai reçu des réactions enthousiastes mais aussi perplexes à lʼannonce de mon projet de mémoire. Dʼaucuns ont apprécié lʼidée, surpris de nʼavoir jamais réalisé lʼabsence de radio pour enfants. Dʼautres, moins nombreux mais plus septiques, mʼont assuré quʼune radio pour enfants ne saurait capter une audience à lʼheure où la TV occupe une place si importante.

S En commençant mes recherches, jʼai appris lʼexistence de “webradios” pour enfants, ou “playlists” diffusées sur Internet, rencontrant une certaine audience. Puis jʼai découvert Superloustic, une radio pour enfants créée en 1988 et éteinte en 1992, dont je parcourrai lʼhistoire au cours de ce mémoire, car elle est correspond en tout point à ce que jʼavais imaginé en pensant à une radio éducative pour enfants. Jʼai alors eu le soulagement de constater que les enfants sont capables dʼécouter la radio et, mieux encore, quʼils peuvent lʼapprécier.

Et cʼest ainsi que, de fil en aiguille, jʼai affiné mes recherches et ai commencé ce travail de mémoire. Jʼai ainsi réussi à concilier mes deux domaines de compétences que sont le son et lʼéducation, ce que jʼaimerais continuer de faire dans mon parcours professionnel.

Posons, avant de commencer, les jalons de la problématique. Je parlerai dans ce mémoire de radios “pour enfants”, “pour adolescents” et “pour adultes”, mais souvenons-nous que les publics ciblés ne sont quʼindicatifs, et non restrictifs. Nous appellerons radios “pour adolescents” les radios qui se définissent comme radios “pour les jeunes” ; ce sont, pour les plus connues, NRJ, , et Rires et Chansons. Ces radios font passer lʼhumour et le divertissement avant le sérieux et lʼinformation. Nous appellerons radios “pour adultes” celles qui ne sont ni des radios “pour enfants”, ni des radios “pour adolescents”.

Les enfants dont je parlerai dans mon mémoire sont les enfants de la culture occidentale ; la radio est conçue dans lʼobjectif dʼêtre écoutée par des enfants francophones, scolarisés et entendants, même si les deux premières critères ne sont pas exclusifs. Les enfants non-voyants ont dʼautant plus dʼintérêts à la création dʼune radio que les autres, mais ils ne feront pas lʼobjet de considérations particulières dans le contenu du travail.

Enfin, contrairement à ces radios et webradios pour enfants qui entendent cibler tous les moins de 15, 12 ou 9 ans, je tiendrai compte des différentes étapes de lʼenfance afin dʼadapter la radio à une tranche dʼâge : les 6-10 ans. Cʼest lʼéquivalent ordinaire de lʼécole élémentaire : CP à CM2. La petite enfance (de 3 à 5 ans) et la

Q préadolescence (11 à13 ans) semblent répondre à des besoins différents en terme de contenus et de rythme ; ils ne font pas partie du public considéré dans ce mémoire.

Ce travail a pour objectifs de faire réfléchir à la faisabilité et aux intérêts dʼune radio éducative pour enfants, puis dʼaider à définir la pertinence de se lancer dans un projet de création dʼune telle station de radio.

Nous étudierons pour commencer le paysage des radios pour enfants (en englobant dans le mot “enfants” tous les moins de 15 ans) afin dʼenvisager la faisabilité pratique dʼune radio éducative pour enfants aujourdʼhui ; nous parlerons donc du cas “Superloustic” avant de parler du paysage actuel, qui compte divers exemples de webradios et “playlists” pour enfants. Puis nous étudierons les intérêts des enfants à avoir une radio pour enfants ; je ferai part des mes réflexions sur lʼéducation et les besoins de lʼenfant en matière de média et dʼaudio, quʼont nourries des ouvrages de sociologie, des témoignages de professionnels de lʼenfance et de lʼéducation, ainsi que mes formations dʼanimatrice et directrice de séjours de vacances. Je poserai ensuite les bases dʼun exemple de radio éducative pour enfants que je souhaite concevoir, et dont je réaliserai le site Internet et une journée de programme dans le cadre de ma partie pratique de mémoire.

M I. La faisabilité de lʼimplantation dʼune radio éducative pour enfants dans le paysage radiophonique actuel

À lʼheure où la consommation médiatique bat son plein, chaque action peut devenir prétexte à faire du profit. Mais dans notre modeste pays, un effort est fourni du côté de la culture, fierté nationale. Avec sa société publique de diffusion radiophonique, la France peut se vanter de promouvoir lʼart radiophonique et de proposer des stations culturelles intéressantes. Cependant, lʼenfant est complètement délaissé dans le paysage de radios hertziennes publiques. Du côté des sociétés de radiodiffusion privées, il nʼest guère plus considéré. Pourtant, la TV sʼintéresse à ce public. Nous allons donc explorer ce paysage de la radio pour enfants, sous différentes formes : webradios, radios FM...

I. 1) Histoire de Superloustic

Superloustic est le nom dʼune radio pour enfants qui a émis sur les ondes FM de 1989 à 1992. Elle a vite su trouver son public et connaissait un succès bien mérité. Cʼest la première station européenne dédiée aux enfants, et la seule qui ait su se démocratiser, dans tout le paysage de la radio analogique. Parvenant en 1990 à un rayonnement quasiment national, elle a marqué ses auditeurs qui, encore aujourdʼhui, regrettent la disparition de Superloustic survenue brutalement en 1992. Revenons sur ce bel exemple de radio éducative pour enfants dont lʼhistoire nous révèle bien des choses quant à la place de la radio dans la vie des enfants et dans le contexte économique et culturel français.

!H I. 1) a) De la naissance de Muppies FM aux débuts de sa successeure Superloustic

Née de lʼidée dʼun père de famille musicien, Muppies FM est la création de quatre hommes de radio et de production. En 1987, Denys Didelon, Gilles Gressier, Joël Pons et Frédéric Charbaut créent une première bande de trois heures de diffusion ; grâce à Patrick Meyer, fondateur de RFM, les quatre compagnons utilisent lʼantenne de Vélizy, qui ne sert plus depuis que RFM a eu lʼinterdiction dʼémettre, pour diffuser en pirate leur bande en boucle. Les 3 à 5 ans et leurs parents sont le public visé par ce programme fait de chansons et de génériques de dessins animés pour enfants. Du fait de lʼoriginalité de lʼinitiative, le succès est prompt et bientôt Muppies FM élargit son répertoire pour maintenir son public, déjà fidèle à cette radio dʼà peine plusieurs mois. Mais après quatre mois dʼémissions et des milliers de courriers dʼauditeurs reçus, la station se voit refuser par la CNCL (ancien CSA) une place dans la liste des radios parisiennes autorisées à diffuser. Lʼexpérience sʼachève en mai 1987.

En novembre 1987, Superloustic voit le jour, direct héritière de Muppies FM. Elle est diffusée à Lyon, sur la fréquence libérée par Cristal FM, qui vient dʼêtre reprise par le grand groupe . La radio est inaugurée en décembre de la même année, par un grand spectacle en plein air réunissant artistes et groupes favoris des enfants. En janvier 1988, la radio émet officiellement, destinée à tous les enfants de moins de 12 ans. Elle a pour objectifs « de distraire ses jeunes auditeurs, de capter leur attention, de favoriser le développement de leur imaginaire, de leur sens critique et de compléter leur enseignement grâce à leur participation interactive : jouer, écrire,

!! téléphoner, dessiner, participer aux grandes manifestations extérieures organisées par la station… »1. Forte de son succès et aidée par des contacts bien placés, Superloustic accède un an plus tard à une fréquence de diffusion sur la région parisienne. Cʼest le début dʼun grand parcours qui amènera progressivement Superloustic à une couverture quasiment nationale via trente émetteurs répartis sur les grandes villes françaises.

I. 1) b) Superloustic : un programme adapté

1 extrait de la page “Histoire” du site www.superloustic.com.

!" La grille de programmes est adaptée au rythme de lʼenfant, et comprend des émissions de culture générale, traitant du monde des animaux, des secrets de la science, de cuisine, de livres, BD, musique... Les flash infos sont diffusés régulièrement, hors temps scolaire. La tranche 17-20h est dédiée à une émission très humoristique menée avec brio par Benoix de Coco (humoriste maintenant connu sous le nom de Érick Bernard), avec chaque jour, en invité, un personnage de dessin animé (concrètement, les acteurs des voix françaises). La soirée repose sur lʼinteractivité grâce à un programme de disques à la demande.

850 enfants sont interrogés chaque mois pour donner leur avis sur le programme ; des modifications sont faites en tenant compte des réponses des Loustics2.

I. 1) c) 1992 : la fin de Superloustic En trois ans, la radio a réuni plus dʼun million dʼauditeurs, les médias publics et indépendants vantent les mérites de cette initiative originale qui donne enfin la parole à lʼenfant. Ce public, jusquʼalors négligé, a trouvé un moyen de sʼexprimer et dʼêtre acteur de sa culture en participant à la vie de la radio. De grands groupes sʼintéressent à Superloustic, tels NRJ, Bayard Presse, ; la station des jeunes coproduit même une émission diffusée une fois par mois sur RFI, La planète des Jeunes, où des enfants de 7 à 13 ans parlent de lʼactualité dans le monde.

Pourtant, en 1992, alors que la radio continue à étendre son rayonnement, et malgré un succès attesté par les mesures de Médiamétrie (qui pourtant ne comptabilise pas encore les moins de 15 ans), les annonceurs, finalement peu enthousiastes, se retirent peu à peu de lʼaventure pour investir dans la publicité télévisée. Mais le développement de la radio sʼest fait extrêmement vite et les dépenses ont été considérables ; Superloustic peine à tenir son budget. Rapidement, la station est mise en liquidation judiciaire, et les émetteurs principaux (Lyon et Paris) sont coupés. Face à cela, les auditeurs se manifestent ; cʼest la première fois quʼon

2 Surnom donné aux auditeurs de Superloustic

!# voit en France des enfants militer pour une cause. Bon nombre de personnalités sʼélèvent également contre la suppression de Superloustic (cf. annexe). Les animateurs résistent à la pression de la CNCL et viennent travailler gratuitement ; le propriétaire des locaux de la radio, EDF et TDF (propriétaires des émetteurs) entendent lʼappel général et font tous les trois grâce de leur services. Des milliers de pétitions sont envoyées au standard, totalisant un million de signataires défenseurs de Superloustic. Des chanteurs pour enfants se mobilisent pour sortir un titre musical, La radio cʼest ton droit, qui sera vendu pour aider aux dépenses de la radio. LʼAssociation pour la Défense de Superloustic récolte des fonds de la part des familles dʼauditeurs et des sympathisants.

Le secrétaire dʼÉtat à la communicationJean-Noël Jeanneney déclare que Superloustic a toute sa place dans le paysage radiophonique, mais se dit réticent à lui offrir une place au sein de la Maison de la Radio qui, en ce contexte économique peu favorable, peine à boucler son budget.

Malgré tout cet engouement, par des personnalités, des auditeurs et des politiques, la radio sʼéteint le 5 septembre 1992. Cʼest un grand vide qui est laissé dans la vie des enfants.

Après une seconde tentative de diffusion via la AM, lancée en 2002 et avortée quatre ans plus tard, il semblerait que la fin de Superloustic soit irrémédiable...

Guillaume Richardot, ancien animateur de la station, a créé en 2012 la webradio Bleu Pomme, sur laquelle il continue dʼanimer des émissions héritières de Superloustic : Debout les Loustics et Génération Loustic, diffusées du lundi au vendredi de 7h à 9h et de 16h à 20h. La programmation musicale reste dans le même

!$ esprit mais sʼest aussi modernisée. Les contenus rappellent ceux dʼémissions de Superloustic, et cette dernière est un sujet parfois abordé. Ces émissions sʼadressent autant aux anciens Loustics quʼaux parents et enfants dʼaujourdʼhui.

I. 1) d) Enquête sur des anciens auditeurs de Superloustic Beaucoup dʼanciens Loustics restent, encore aujourdʼhui, très attachés à leur radio. Un site a été construit en son “hommage”, qui rediffuse des archives de la radio en continu. Créé par un ancien Loustic, il rassemble plus dʼune centaine dʼinternautes nostalgiques, qui apportent des témoignages et expriment leur plaisir à retrouver des programmes de leur jeunesse.

Jʼai mené une enquête auprès de ces anciens Loustics, à laquelle 23 dʼentre eux ont répondu (questionnaire copié en annexe). Jʼai pu constater que Superloustic trouvait son public majoritairement chez les préadolescents. Ci-dessous, un graphique montrant, en pourcentages, la répartition des Loustics par âge, réalisé selon lʼenquête menée auprès des 23 anciens auditeurs.

Répartition des Loustics par âge 30%

24%

18%

12%

6%

0% 8 ans 9 10 11 12 13 14 >14

!R La radio sʼadressait à ses débuts aux moins de 12 ans, mais a progressivement élargi sa cible jusquʼaux jeunes de 15 ans ; les auditeurs de moins de 8 ans, dʼaprès le graphique, étaient moins nombreux ; peut-être nʼen ont-il simplement pas le souvenir aujourdʼhui.

Voici maintenant un tableau indiquant la fréquence de lʼécoute de Superloustic par les interrogés.

Plus de 3 heures par jour 11

Entre 2 et 3 heures par jour 3

Entre 1 et 2 heures par jour 2

Plusieurs fois par semaine 6

Plusieurs fois par mois 1

Plusieurs fois par an 0

Le panel des interrogés est certes particulier, puisque 20 ans après ces personnes se souviennent toutes de Superloustic, mais il est intéressant de constater quʼune partie des auditeurs ne se contentaient pas dʼallumer leur poste les dimanches pluvieux...

« Avec qui les auditeurs écoutaient leur radio ? » 18 auditeurs répondent seul, dont 12 comme unique réponse. 9 personnes mentionnent la famille (parents ou fratrie), tandis que 3 seulement lʼécoutaient avec leurs copains. Les résultats ne laissent pas transparaître de lien significatif entre lʼâge, la fréquence dʼécoute et la compagnie pendant lʼécoute des auditeurs. La radio pour enfants nʼest visiblement pas seulement un média qui aide à combattre lʼennui, il peut aussi être un outil de partage dans une famille.

Corrigeons tout de suite lʼidée reçue quʼune radio pour les enfants ne peut pas exister tant que la TV leur propose des programmes. En effet, dans les années de diffusion de Superloustic, la TV occupait déjà une place importante dans la vie des enfants, et les auditeurs nʼétaient pas des simples “privés de TV”. Les auditeurs

!. interrogés affirment tous avoir regardé la TV pendant la période de diffusion de la radio pour enfants, et 12 disent lʼavoir regardée aussi souvent quʼils écoutaient la radio, contre 9 qui disent avoir regardé la TV moins souvent.

Globalement, les anciens auditeurs interrogés écoutent moins souvent la radio aujourdʼhui quʼà lʼépoque de Superloustic. On pourrait émettre lʼhypothèse que la raison en est la réduction du temps dʼécoute disponible due au passage à lʼâge adulte, hypothèse qui inciterait à vouloir exploiter ce créneau de la radio pour enfants. Cependant, je préfère ne pas tirer de conclusions trop radicales car je ne saurais lʼaffirmer avec certitude.

Pour finir sur cette enquête, je voudrais retranscrire quelques réponses à la question « Quʼavez-vous pensé quand vous avez appris la suppression de Superloustic ? » :

« Comment est-ce possible que l'on retire la radio des enfants ?! Avec autant de succès et à un pareil moment de son existence ?! »

« Un drame. J'ai signé les pétitions, porté le pin's que j'ai encore. Une vraie grosse perte. »

« Une profonde tristesse, un sentiment d'injustice et une forte incompréhension. » « Jʼétais très triste car c'était un des seul médias pour les enfants. »

« J'avais participé à la collecte de signatures mais j'ai toujours eu espoir que d'autres radios verront le jour. J'ai d'ailleurs fait dix ans de radio par la suite avec cette conviction. »

« J'étais surpris et dégouté. »

!S Ces réponses révèlent le profond malaise quʼa provoqué la suppression de Superloustic. Cʼest ce type de réactions qui a encouragé les parties prenantes de la radio à persévérer dans lʼaventure, même une fois les premiers annonceurs retirés. Cʼest ce type de réactions, aussi, qui a poussé Joël Pons, lʼun des fondateurs de la station, à relancer la radio en 2002. Et cʼest ce type de réactions qui encourage tous ces parents/professionnels à entreprendre des initiatives de programmes audio pour les enfants.

!Q I. 2) Le paysage actuel des radios et webradios pour enfants

Lʼhistoire de Superloustic a précédé plusieurs initiatives de radios ou webradios pour enfants pendant ces dernières années, mais une partie dʼentre elles a rapidement avorté, toujours pour des raisons économiques. Le dernier exemple en est

R2O, lancée par Joël Pons (fondateur de Superloustic) en 2009, diffusée sur la RNT3 puis abandonnée en 2011. Voici un aperçu des irréductibles programmes audio.

I. 2) a) Radio Moussaillons

Il semble que Radio Moussaillons soit le plus bel exemple de ce quʼil existe aujourdʼhui en matière de webradio pour enfants. Créée par Olivier Dumolin en janvier 2011 à destination des moins de 13 ans, elle est la webradio la plus écoutée en février, mars et avril 2012, avec plus de 3000 internautes connectés au site www.radio-moussaillons.fr chaque jour 4 . Si lʼunivers graphique est centré autour du bateau, la ligne éditoriale est généraliste ; la radio diffuse des contes et des musiques pour enfants (dont quelques chansons éducatives), des émissions culturelles, des actualités du livre et des événements pour les enfants dans toute la France. En attente de lʼattribution dʼune fréquence FM par le CSA, Radio Moussaillons est diffusée via une chaîne de TV chez Free ; une application Smartphone est également disponible.

3 Radio Numérique Terrestre

4 classement Weborama, parmi 85 000 sites

!M Les musiques sont variées et adaptées au rythme de lʼenfant. Dans le répertoire, beaucoup de comptines classiques arrangées dans des versions plus modernes. Les chansons choisies sont des titres assez récents (années 1990 et 2000) et vont de la comptine didactique, plutôt adressée aux moins de 8 ans, à la chanson moins “tout-petits”, avec de lʼhumour, du second degré, des thèmes différents...

Constituée de programmes courts, la radio nʼest pas humainement équipée pour permettre lʼintégration du direct. Dʼailleurs, la radio se situe plutôt dans lʼesprit dʼune chaîne de TV comme Gulli (chaîne pour enfants appartenant au groupe Lagardère) que dans lʼesprit dʼune radio traditionnelle axée sur le direct. Aussi, des billets de publicité pour des événements culturels prennent la forme dʼune interpellation directe de lʼauditeur, afin de ne pas perdre le lien avec lui.

Le site Internet de la radio propose de lʼinteractivité avec les enfants, qui peuvent y faire des coloriages mais aussi envoyer des questions auxquelles lʼanimatrice pourra répondre via la webradio.

Radio Moussaillons est une webradio commerciale gérée par une Société par Actions Simplifiées. Elle compte trois salariés et sa marque est déposée auprès de lʼInstitut National de la Propriété Intellectuelle.

I. 2) b) Radio Junior

Radio Junior, aussi appelée Radio Mômes, a pour slogan La première radio pour enfants. Cʼest à vrai dire une description quʼon peut lire sur bien des projets de webradios pour enfants ! Créée en 1998 par des anciens animateur et journaliste de

"H Superloustic, elle a pour parrain Richard Gotainer et pour soutiens des personnalités importantes de la chanson et de lʼanimation.

Forte de son site Internet riche en informations, la radio entend sʼadresser aux moins de 15 ans, et le site consacre une partie importante à des conseils pratiques destinés aux parents.

Pas de chansons éducatives, et encore moins de comptines sur Radio Junior. Le répertoire englobe des chansons humoristiques pour enfant, des tubes commerciaux pour adolescents et préadolescents, et des chansons plus complexes à définir, modernes, à mi-chemin entre la naïveté enfantine et la “rebellitude” adolescente, telles certaines productions lauréates des prix MINO Talent ADAMI Jeune Public.

Pas de direct non plus sur cette webradio, mais des virgules régulières enregistrées par des voix connues, comme celle de Vincent Malone ou celle de Omer Simpson. La radio mise principalement sur sa programmation musicale.

Recalée en 2002 pour lʼattribution dʼune fréquence AM puis en 2005 pour une fréquence FM, sous le prétexte que quelques émissions “généralistes” proposent déjà des émissions pour enfants, Radio Junior devrait être bientôt diffusée par la RNT...

I. 2) c) De nombreuses webradios ou programmes audio

Bon nombre de sites Internet français proposent des “programmes audio” pour les enfants. En voici une liste dʼexemples : Radio Barbouillots, Radio Mirliton, Radio Disney Club, Pop Corn Radio, Ma petite Souris, Radio Ouistiti, la webradio des marmots, Générikids...

Différents de radios à proprement parler, ces sites proposent des enchaînements de contes et de chansons, ou de chansons seulement. Certains dʼentre eux font évoluer leur programmation musicale en fonction des nouvelles sorties, mais ce nʼest pas le cas de tous... La francophonie est souvent favorisée ; la

"! tranche dʼâge visée étant plutôt large, la cohérence entre les musiques est parfois douteuse : il peut arriver dʼentendre sur Radio Barbouillots une chanson dʼHenri Dès suivie de M Pokora (respectivement chanson pour les tout-petits et tube pour adolescents) . Pour sʼadresser à un plus large public, certaines webradios misent sur une (trop) grande variété !

Aucun ancrage dans le présent dans ces programmes ; ils sont plus un moyen dʼécouter de la musique sur Internet sans avoir à chercher des noms dʼartistes et de chansons. La fidélisation des auditeurs tient souvent au seul fait des choix musicaux.

Les sites sont souvent plus élaborés que les radios en elles-mêmes ; entre les dessins dʼenfants mis en ligne, les conseils pour les parents, les liens vers des événements culturels pour enfants..., on peut trouver des espaces dʼexpression : livres dʼor, votes pour les prochaines chansons à diffuser (équivalent des disques à la demande)... Mais ces sites, aux designs et graphismes parfois peu enfantins, sont plutôt destinés aux parents quʼaux auditeurs eux-mêmes. La majorité des webradios pour enfants citées plus haut trouvent leur public, mais il me semble que ce nʼest pas toujours celui escompté : par exemple, Radio Barbouillots compte une bonne partie de préadolescents dans ses auditeurs, alors que le terme barbouillots ne leur est guère approprié. De plus, les webradios nʼoccupent pas, dans la vie des enfants, une place identique à celle dʼune radio FM pour les adultes.

I. 2) e) Zoom sur lʼémission à succès Des histoires en musique, sur

Des histoires en musique est une émission présentée par Élodie Fondacci, diffusée du lundi au vendredi de 20h à 20h05 sur Radio Classique. Chaque soir, ce sont 100 000 enfants de 4 à 10 ans qui écoutent le conte diffusé, illustré par des bruitages amusants et des morceaux de musique classique.

"" Une maman explique : « Jʼaime sa façon délicate de parler aux enfants sans énerver les parents. Avant, cʼétait un combat pour coucher ma fille. Grâce à ce rendez-vous, elle file dans son lit sans quʼon le lui demande »5. Cʼest en 2009 que lʼidée est venue à la chroniqueuse de Radio Classique dʼun format dʼémission pour les enfants. Après avoir convaincu les responsables de la station, elle adapte La belle au bois dormant de Tchaïkovski, en cinq épisodes de cinq minutes. Lʼémission est un succès, et Radio Classique lui demande de mettre en sons un conte par mois. Puis en 2010, on lui réclame une histoire par jour, aussi sʼassocie- t-elle à des maisons dʼéditions jeunesse ; elle exploite aujourdʼhui des contes de tous les pays.

Son équipe de réalisateurs confectionne avec soin le montage de bruitages et extraits sonores ; sans effets extraordinaires, le montage est dʼune précision très appréciable. « Sans eux, je ne peux rien faire. Ils ont lʼoreille absolue et une imagination géniale. Et moi, je bosse lʼécriture et la voix. Cʼest lʼunion de deux forces. » Élodie Fondacci, à propos des réalisateurs de lʼémission

Cet exemple nʼen est quʼun parmi dʼautres, et le principe dʼune émission pour enfants nʼest pas nouveau, très développé avant la démocratisation de la TV (certaines générations ont appris des chansons par la radio, ou écouté des feuilletons comme Astérix et Obélix) ; ces émissions inscrites dans des programmes “classiques” (pour adultes), telles celle-ci ou Les petits bateaux, sur , sont autant appréciées par les adultes que par les enfants.

5 tiré de lʼarticle “Élodie Fondacci, la fée radiophonique” écrit par Marie Baget pour lʼhebdomadaire La Vie, publié le 22 décembre 2011.

"# I. 3) Conclusions et perspectives pour la création dʼune nouvelle radio pour enfants

Le travail dʼanalyse sur ces radios et webradios pour enfants, qui ont lʼair de rencontrer un certain succès, me fait conclure sur le fait que le principal facteur qui empêche le développement dʼune radio “officielle” pour enfants (par officielle jʼentends “assez intégrée dans le paysage radiophonique pour être connue de ceux quʼelle est susceptible dʼintéresser”) est dʼordre économique ; lʼidée reçue quʼune radio ne peut pas plaire aux enfants est donc à éradiquer.

Il semble quʼun effort général soit fourni du côté des institutions, pour revaloriser lʼimportance de la radio et pour travailler à repenser lʼéducation. Le nouveau gouvernement avait fait de lʼéducation un des thèmes principaux de sa campagne. Le SNRL a rédigé un mémorandum à lʼintention de tous les candidats à la présidentielle, où il rappelle le service rendu à lʼÉtat par les radios associatives, à travers la diversité culturelle et la pluralité des médias. Il y préconise un doublement du Fonds de soutien (de 29 à 58 millions dʼeuro annuels) et une prise de position officielle en faveur dʼune radiodiffusion « universelle, populaire et gratuite ». Médiamétrie, qui jusquʼalors mesurait lʼaudience radiophonique des plus de 15 ans, a baissé en 2002 son seuil à 13 ans, à la demande de stations de radios comme NRJ et Skyrock, qui espéraient même une étendue de la mesure dʼaudience aux 11 ans et plus. Pour lʼinstant, il semblerait que la raison qui empêche de mesurer lʼaudience des moins de 11 ans réside dans le recueil déclaratif par téléphone de lʼécoute de la radio6 ; on peut cependant imaginer que si les jeunes de 13 ans sont comptabilisés, lʼargument pour les moins de 13 ans pourrait être rediscuté... Tous ces événements récents pourraient faciliter la mise en place dʼun “complément” dʼéducation dispensé par une radio ; en soutenant un projet de radio éducative pour enfants, les institutions citées plus haur donneraient une valeur officielle au projet ; dʼautres associations, sociétés culturelles, maisons dʼéditions pourraient également être dʼune grande utilité.

6 dʼaprès Natalie Bevan, Directrice de la Communication & du Marketing opérationnels chez Médiamétrie.

"$ Pour maintenir une radio, des choix sʼimposent en matière de structure, de personnel et de programmation. Puisque les radios et webradios pour enfants que nous avons mentionnées plus tôt ont toutes un certain audimat, nous nʼallons pas remettre en cause les choix de programmation mais plutôt nous pencher sur les choix qui, peut-être, pourraient être reconsidérés.

I. 3) a) Les pistes à explorer sur le plan économique

Le support est le premier paramètre à déterminer pour créer la radio. Il semble, dʼaprès les expériences de Superloustic et R2O, quʼune radio pour enfants ne peut pas naître dans le luxe du studio, des antennes dʼémission FM et des effectifs dʼanimateurs techniciens, sous peine de déchoir rapidement, jusquʼà lʼextinction. Il paraît donc prudent, pour commencer, de penser une radio sur le plan local ou utilisant la voie dʼInternet, pour la développer ensuite, lentement mais sûrement.

La diffusion par le biais dʼune chaîne de TV peut être rentable, mais elle ne me paraît pas très intéressante quant aux possibilités pratiques (podcasts, livres dʼor...), aussi je ne mʼétendrai pas sur ce cas. La FM présente lʼavantage de permettre aux plus jeunes dʼallumer leur station sans lʼaide de leurs parents. Cʼest également un moyen de faire découvrir la radio de lʼauditeur qui “zappe” sur son poste de radio. Si lʼon décide de lancer une radio pour enfants sur la FM, il faudra dʼabord commencer par émettre en local, donc proposer des retombées sur la ville, le canton, le département..., en construisant des programmes qui intéressent la proximité. Mais quel avenir pour la FM ?

Lʼavenir est assez incertain pour la radio ; on parle de la RNT ici comme un bébé mort-né, là comme lʼespoir de la radio... Il paraît peu pertinent de ne compter que sur la radio numérique pour créer une radio pour enfants aujourdʼhui. Il serait préférable, pour expérimenter la station, dʼavoir recours à des voies moins onéreuses et plus sûres quant à la pérennité.

"R Il me semble que le plus stable et le plus certain reste la diffusion de la radio par Internet ; cʼest en tout cas le seul mode dʼémission radiophonique dont on ne prédit pas encore la mort ! Dʼailleurs, les premiers autoradios avec accès au web ont déjà été commercialisés. En nous basant sur le succès relatif de Radio Moussaillons - plus écoutée des webradios mais encore assez méconnue dans les familles -, nous pouvons reprendre lʼidée de la webradio, en redéfinissant notre radio éducative pour enfants afin quʼelle soit inédite.

I. 3) b) Comment définir une nouvelle radio éducative pour enfants ?

Au vu du succès sans pareil quʼa connu Superloustic et des regrets et indignations qui ont suivi sa disparition, il paraît intéressant dʼélaborer une radio qui suit la même ligne éditoriale, qui est finalement assez généraliste et proche de celle de Radio Moussaillons notamment. Les difficultés économiques rencontrées par Superloustic nous suggèrent dʼêtre vigilants quant aux effectifs dʼanimateurs, standardistes... Aussi les programmes ne seront probablement pas aussi riches que Superloustic, du moins dans un premier temps, pendant la phase de développement.

Il est utile, par contre, de bien définir le public ciblé pour construire une programmation pertinente : musiques, fictions et émissions adaptées. Alors que les radios pour enfants ne sont pas très nombreuses, il faut se démarquer des webradios existantes, et cʼest notamment par la tranche dʼâge ciblée quʼon peut le faire. Toutes les radios se revendiquent destinées aux “moins de 12 ans”, ou “moins de 15 ans”. Il me semble quʼà vouloir cibler trop large, on est peut-être moins cohérent dans la programmation de musique, de contes et dʼémissions, aussi une nouvelle radio pourrait se concentrer sur la tranche dʼâge 6-10 ans. Lʼunité de cette tranche dʼâge est confirmée par les écoles élémentaires, puisque 6 ans est lʼâge où lʼon entre au CP, et 10 ans lʼâge quʼon a en CM2. Cʼest également la période dite de “lʼenfance”, située entre la petite enfance (3 à 5 ans) et la préadolescence (11 à 13 ans). Le psychologue Jean Piaget a identifié quatre étapes essentielles dans le développement de lʼindividu : le stade de l'intelligence sensori-motrice (de 0 à 2 ans), le stade de l'intelligence pré-opératoire (de 2 à 7 ans), le stade de l'intelligence opératoire concrète (de 7 à 11 ans) et le stade de l'intelligence opératoire formelle (de 11 - 12 ans à 15 - 20 ans).

". Lʼintelligence opératoire concrète, celle qui nous concerne ici, correspond à des notions essentielles telles la relativisation, la sociabilité, la prise en compte du monde extérieur. À cet âge-là, lʼenfant apprend à sʼéloigner de sa famille et commence à acquérir une certaine forme de culture personnelle, un libre-arbitre, découlant des cultures familiale, scolaire et sociale. La tranche dʼâge 6-10 ans est, il me semble, la période de lʼenfance la plus propice au développement dʼune culture apportée par le média.

I. 3) c) Le cas dʼune webradio associative pour enfants

Pour utiliser à la fois la diffusion par Internet et une structure associative permettant lʼimplication de bénévoles, nous allons considérer le cas de la création dʼune webradio associative pour enfants. Avant dʼétudier les intérêts dʼune radio pour enfants, il serait bon de sʼassurer quʼun tel projet soit réalisable. Ce travail nʼa pas pour ambition dʼétablir un plan économique détaillé dʼune radio associative pour enfants, mais il donne quelques pistes que lʼon pourrait suivre dans le cas dʼune concrétisation.

Élaborons dʼabord un budget prévisionnel indicatif. Les moyens humains et matériels sont choisis en tenant compte des besoins spécifiques dʼune webradio éducative pour enfants dʼune “bonne” qualité technique, et sʼappuient sur des exemples de webradios associatives existantes.

• Les frais dʼinstallation (matériel) -Mobilier studio 800 € -Un ordinateur + onduleurs et connectique 1000 € -Console numérique 1000 € -Carte son adaptée à la diffusion par le web 1500 € -Un logiciel de diffusion 500 € -3 micros + câbles + pop-killers + supports 600 € -3 casques 450 €

"S • Les frais de fonctionnement pendant la phase de développement (par mois) -Le loyer (+ charges) 1000 € (installons le studio en province) -Lʼhébergement du streaming + Site Internet 800 € (streaming pour un maximum de 500 auditeurs simultanés) -Les droits de diffusion (SACEM + SCPP + SPPF) 250 € -Les frais généraux (téléphone, transports, consommable...) 200 €

• Les frais de personnel (par mois) -3 salariés à plein-temps 5000 € -1 Contrat dʼAide à lʼEmploi (20 heures) 400 €

• Les frais de lancement du programme -Personnel pour la création de 10 jingles et 10 génériques 1000 € -Communication visuelle 1000 € (illustrateur, webdesigner, frais de publicité...)

Ce budget indicatif correspond à une webradio associative ambitieuse, mais pas surréaliste. Le FSER7 peut fournir des subventions après réception dʼun dossier complet sur les intérêts de la webradio pour enfants ; en ce cas il sera probablement la principale ressource financière. Pour déposer un dossier de demande au FSER, il est utile de mettre en valeur les fonds propres de la webradio : lʼimplication de bénévoles, une part du matériel déjà acquise, les cotisations des adhérents...

Il faut faire des appels aux dons et obtenir des cotisations, donc des adhérents à lʼassociation. Pour cela, la communication ne doit pas être négligée : campagne de promotion visuelle, logos attrayants et présentations du projet concises et efficaces...

Ne comptons pas trop sur lʼaide financière de la publicité commerciale ; si les annonces publicitaires radiophoniques ne doivent pas équivaloir à plus de 20% du budget mensuel de la station, il serait raisonnable quʼelles ne dépassent pas les 5% du budget. En effet, la moyenne de la part du budget que la publicité diffusée à

7 Fonds de Soutien à lʼExpression Radiophonique

"Q lʼantenne couvre est de 5% par radio associative ; en écoutant des radios associatives, pourtant, on ne se dit pas que la publicité manque... En outre, on a vu avec Superloustic que les annonceurs sont réticents à investir pour des publicités radiophoniques adressées aux enfants. Aussi, la webradio sera peut-être limitée malgré elle à 2% dʼinvestissement de la part des annonceurs ! Mais quʼimporte : il existe bien des webradios associatives qui ne diffusent aucune publicité, par simple choix : , Radio Libertaire... Ce nʼest plus lʼabsence dʼannonceurs qui peut, à elle seule, empêcher le développement dʼune radio éducative pour enfants.

En évaluant les retombées de la radio sur la ville, le département et la région dʼimplantation, il est possible dʼobtenir des subventions des collectivités territoriales. Pour cela, la webradio peut, en plus de créer des emplois, organiser des événements culturels liés à la station : concerts de musique pour enfants, pièces de théâtre jeune public... Toutefois, il faut réfléchir au préalable à lʼimpact dʼune orientation locale ou régionale, car elle peut influencer lʼécoute de la webradio dans le reste du pays.

Des partenariats peuvent être établis avec les maisons dʼédition de livres et presses jeunesse, des magasins de jeux de société, des institutions relatives à lʼéducation...

On pourrait également penser à la création dʼun atelier radiophonique pour enfants au sein de lʼassociation. Y serait proposés lʼécriture collective dʼune histoire, lʼélaboration dʼune mise en onde et lʼenregistrement. On peut imaginer quʼen deux mois dʼatelier (à raison dʼune heure et trente minutes par semaine), une fiction serait réalisée. Un tel atelier nécessiterait la présence dʼun membre de lʼassociation et la location dʼun studio en plus, mais les avantages quʼil présenterait sont nombreux : une interactivité plus grande et plus appliquée, une cotisation des parents des participants ajoutée au tarif de lʼinscription à lʼatelier, la disponibilité des parents pour travailler bénévolement à lʼanimation dʼémissions, au standard ou à lʼadministratif, pendant que leurs enfants sont occupés. Nous estimons que, vu le nombre limité de radios/webradios pour enfants en France, le lancement dʼune webradio associative pourrait être soutenu et suivi dʼune

"M évolution de sa structure, jusquʼà dʼéventuelles fréquences FM allouées à la station (si tant est quʼau moment venu, la FM existe encore...).

Quoiquʼil en soit, la création dʼune webradio associative pour enfants paraissant tout à fait envisageable sur le plan économique, il sʼagit maintenant de définir la forme quʼelle pourrait prendre et les arguments solides qui convaincraient les financiers potentiels à aider sa mise en place. Aussi, nous allons aborder les intérêts de lʼexistence dʼune radio pour enfants dans le paysage radiophonique, avant de proposer les bases dʼune station que jʼimagine, et qui pourrait être concrétisée un jour.

#H II. Les intérêts dʼune radio éducative pour enfants

« Mais que fabriquons-nous avec notre jeunesse ? »

Philippe Meirieu, 2007

Lʼenfant a longtemps été considéré comme un objet, avant une remise en question générale de sa considération permise grâce à des psychologues et sociologues du XXème siècle. Lʼenfant objet est alors devenu enfant sujet. En 2000, le sociologue et philosophe Émile Durkheim décrit lʼenfant comme « un devenir, un commencement dʼêtre, une personne en voie de formation », et lʼenfance comme « la période de lʼéducation et de lʼinstruction ».

De plus en plus, lʼenfant sujet laisse une place à lʼenfant acteur : acteur social, acteur de sa culture. Les sociologues Allison James et Alan Prout parlent de « beings in present », quʼon peut traduire par « êtres actuels ». Lʼenfant nʼest pas le sous- adulte, lʼidiot culturel quʼon a longtemps dénigré. Il nʼen reste pas moins que la réification de lʼenfant, toujours sous-jacente, notamment par lʼidée dʼ“objet culturel”8, lui confère une dimension finie, une dimension dʼindividu accompli.

Il est important, pour décrire les intérêts dʼune radio éducative pour enfants, de bien reconsidérer la définition du public ciblé, et de replacer lʼenfant dans le contexte actuel.

Avant dʼaller plus loin...

Nous parlerons dans cette partie des intérêts pour les enfants dʼune radio pour enfants.

Les intérêts quʼune telle radio peut apporter à des parents, à des professionnels de lʼéducation et de lʼenfance ne seront pas détaillés. Leurs objectifs

8 formulation empruntée à Sylvie Octobre

#! sont sans aucun doute le bien-être et lʼépanouissement de leur enfant / élève, que la radio éducative pour enfants cherche à favoriser. Nous mentionnerons tout de même lʼapport que peut apporter lʼenfant cultivé à ses parents.

De même, nous considérons que les intérêts pour la société et le bien public se retrouvent en partie dans lʼéducation et le bien-être des futurs citoyens, aussi nous nʼen développerons pas davantage.

Les professionnels de la radio trouveront leur compte dans la singularité dʼune station destinée à ce public particulier ; dʼaprès les témoignages dʼanimateurs de Superloustic et de Radio Moussaillons, nous pouvons présager, pour un nouveau studio de radio pour enfants, dʼune ambiance de travail agréable, détendue et riche en surprises et émotions.

Une partie sera consacrée aux intérêts dʼune radio pour enfants pour les acteurs de la culture enfantine : chanteurs, musiciens, comédiens, metteurs en scène...

#" II. 1) La reconsidération de lʼenfant

II. 1) a) La dépréciation ambiante de lʼenfant

Cette décennie a vu se développer de nombreuses tentatives de crétinisation collective9 par divers moyens : télé-réalités, émissions TV ayant « pour vocation [...] de divertir [le spectateur], de le détendre pour le préparer entre deux messages [de publicité]. »10. Ainsi, les personnes adultes et donc responsables se voient de plus en plus, pour une part conséquente, placées au rang dʼenfants, de proies faciles, malléables et naïfs.

En parallèle, on remarque une fâcheuse tendance générale à déconsidérer les enfants à grands coups de “Tu as vu le Ouah-Ouah ?” et de “Il a bien fait pipi dans son po-pot ?”. Si ce phénomène est dû en premier lieu à une méconnaissance des différentes tranches dʼâge ou peut-être à un certain attendrissement, on assiste de manière évidente à une dévalorisation de lʼenfant, dont lʼorigine nʼest peut-être pas si complexe. La déconsidération de lʼadulte, traité par la société comme un vulgaire élève de la consommation, peut en effet être le générateur dʼune déconsidération de lʼenfant, visant à recréer une hiérarchie entre le jeune et le “mature”.

Sans parler à lʼenfant comme à un adulte, lʼanimateur dʼune radio pour enfants ne doit pas lʼabaisser au rang de bébé, et encore moins à celui de crétin. Il est nécessaire de sʼaccompagner de professeurs des écoles et de toute forme de professionnels de lʼenfance (conteurs, comédiens, psychologues), pour apprendre à lʼanimateur à bien adapter son discours et son langage à la tranche dʼâge du public. Cʼest en connaissant le public ciblé quʼune radio, indépendante ou dʼÉtat, peut fonctionner. Il ne viendrait pas à lʼesprit de créer une radio pour détenus sans connaître un minimum les conditions dʼincarcération. Aussi, il faut chasser les idées reçues pour redéfinir les besoins et attentes du public de la tranche dʼâge ciblée, à savoir les enfants de 6 à 10 ans, de la manière la plus précise possible.

9 formulation empruntée au psychanalyste Philippe Chamont

10 Patrick Le Lay, ancien PDG de TF1, interrogé pour le livre Les dirigeants face au changement, Les associés dʼEIM, éd. Huitième Jour, Paris, 2004

## II. 1) b) Le trouble des frontières de lʼâge

Le trouble des frontières de lʼâge, provoqué par cet accès de plus en plus précoce aux droits et possessions autrefois réservés aux adultes, est en ce moment fortement dénoncé. Quel enseignant ne sʼest pas plaint de voir un enfant dans un “costume” dʼadolescent (vêtements, portable, lecteur MP3...) ? Qui nʼa jamais entendu cet adulte râler devant lʼenfant : “Ah les jeunes, ce nʼest plus ce que cʼétait !” et “De mon temps, on nʼétait pas si...” ?

En mars 2012, la ministre des Solidarités et de la Cohésion Sociale, Roselyne Bachelot, a alerté les citoyens sur le phénomène dʼhypersexualisation des enfants. Suite à un catalogue de publicité pour des vêtements de Lolitas, paru dans le magazine Vogue en décembre 2010, et mettant en scène des filles de 10 ans adoptant des positions lascives, elle a confié à la sénatrice Chantal Jouanno la tâche de dresser lʼétat des lieux de lʼhypersexualisation en France. Le rapport constitué, intitulé Contre lʼhypersexualisation, un nouveau combat pour lʼégalité, a été remis le 5 mars. Le 28 du même mois, Roselyne Bachelot signait la charte Protection de lʼenfant dans les médias. Cette charte est en vigueur dans toutes les institutions médiatiques françaises. La définition de lʼenfant qui y est donnée, tirée de la Convention Internationale des Droits de lʼEnfant, se limite à « tout être humain âgé de moins de 18 ans ». Outre lʼaltération des frontières de lʼâge dénoncée dans le projet de loi et dans la charte, on observe dans ce point dʼactualité des difficultés flagrantes, de la part des institutions, à considérer lʼenfant en tenant compte de son âge. À en croire de telles publications, lʼenfant nʼest encore quʼun vague concept que lʼon connaît mal, mais que lʼon se doit de protéger.

En plus de ce phénomène dʼ“adultisation” de lʼenfant, le fossé entre lʼadulte et lʼenfant sʼest largement réduit depuis les années 1990. Les ouvrages sociologiques fleurissent pour parler de cette tendance : Vos enfants ne sont pas des grandes personnes de Béatrice Copper-Royer (1999), Enfants adultes : vers une égalité des statuts de François de Singly (2004), Parents immatures et enfants adultes de Gisèle Harus-Révidy (2004)... La révolution numérique a facilité ce rapprochement des

#$ statuts de parents et enfants11 ; en effet, face à de nouveaux outils technologiques, les parents nʼont pas toujours dʼascendant sur leurs enfants, cʼest même parfois lʼinverse. De plus, des appareils conçus pour les enfants, tels les jeux vidéos, font souvent le bonheur des parents également.

Du fait de ce rapprochement des statuts entre lʼenfant et ses parents, on lʼexpose parfois à des discussions auxquelles il ne devrait pas assister. Ainsi beaucoup dʼenfants de moins de dix ans ont des notions dʼargent très fortes, ainsi que de sexualité ou de politique. Alors quʼon rêve avec de cet état dʼinsouciance de lʼenfant, il serait cohérent de le lui accorder, et de ne pas lʼen priver en le laissant entendre certains propos “dʼadultes”, comme ceux que lʼon peut entendre sur certaines stations de radio : émissions interactives des radios pour adolescents type Fun Radio ou Skyrock, informations sur des sujets graves comme, encore récemment, lʼ“affaire Merah” ou lʼ“affaire DSK” etc...

La création dʼune radio pour enfants donne une occasion de réfléchir sur les besoins des moins de 10 ans en matière de contenus auditifs (informations, émissions, fictions, musiques) et les précautions à prendre pour préserver leur “innocence”.

II. 1) c) Lʼenfant auditeur : un client rentable ?

On entend de plus en plus parler de lʼécourtement du temps de lʼenfance, à cause des phénomènes cités précédemment, cʼest-à-dire lʼ“adultisation” précoce, la réduction du fossé entre enfants et adultes... Lʼenfant, depuis quʼon le considère comme un sujet, est parfois traité comme un adulte par la société, les parents, la télévision ou plus particulièrement la publicité. « Oubliant son âge et la génération qui les sépare, [les parents] se laissent déstabiliser lorsque lʼenfant sʼaffirme

11 Hervé Glevarec, La culture de la chambre - Préadolescence et culture contemporaine dans lʼespace familial, éd. La documentation française, Paris, 2009

#R vigoureusement, ou lʼentraînent dans des préoccupations qui ne sont pas les siennes. »12

Depuis le XXème siècle, qui a été marqué par ce renouveau de lʼéducation et de la considération de lʼenfant, grâce aux travaux de Françoise Dolto notamment, on a accordé de plus en plus de droits aux enfants, allant jusquʼà leur prêter une maturité démesurée. Aujourdʼhui, ceux-ci sont propulsés dans le monde social, mais aussi consumériste (le marché) dès le plus jeune âge.

« Ne nous y trompons pas : se battre pour le Droit de lʼEnfance, cʼest dénoncer lʼenfant-martyr, lʼenfant-soldat, lʼenfant-objet sexuel ; ce nʼest pas veiller à ce que la couleur des baskets soit assortie à celle du téléphone portable ou du dernier jeu électronique à la mode. Il est bon de rappeler à lʼenfant quʼil a des droits mais aussi des devoirs. » Philippe Chamont

Les travaux sur la revalorisation de lʼenfant comme acteur ont donné libre cours à lʼexploitation par la publicité. Mais si lʼenfant peut sʼavérer “rentable”, il est avant tout un être dont lʼadulte doit sʼoccuper de favoriser lʼépanouissement, et ce sans rien demander en retour. Lʼadulte quʼon a aidé à se construire a un certain devoir moral dʼéduquer à son tour.

Ainsi, la société a choisi de laisser une grande autonomie à lʼenfant, qui nʼest pas toujours bien dosée. De fait, lʼautonomie réclamée par les sociologues et psychologues, à savoir lʼautonomie de la pensée, acquise par le savoir et la culture, est souvent confondue avec lʼautonomie de mouvements, dʼactions, de choix. Lʼenfant est devenu libre de consommer, libre de dicter ses volontés, libre de régner : cʼest le fameux enfant-roi. Mais dans ces cas cités, il est rarement libre de sʼépanouir en acquérant son propre libre-arbitre.

12 Béatrice Copper-Royer, Vos enfants ne sont pas des grandes personnes, Albin Michel, Paris, 1999

#. Sans être rétrograde, la radio éducative pour enfants doit être vigilante quant aux publicités quʼelle diffuse, afin de ne pas promouvoir la société de consommation, déjà largement vantée dans les cours de récréation, les publicités télévisées...

De manière générale, il faut offrir à lʼenfant une culture gratuite et populaire ; en somme la radio serait le support idéal de transmission. Et pourtant... Proposons un état des lieux du rapport entre enfant et radio.

II. 1) d) État de la place de la radio dans les habitudes culturelles des enfants

Lʼouvrage sociologique réalisé par Sylvie Octobre en 2004, Les loisirs culturels des 6-14 ans, unique en son genre, répertorie différentes enquêtes sur les consommations des 6-14 ans en musique, mais nʼaborde la thématique de la radio que pour les plus de 10 ans. Si aucune explication nʼest donnée, on peut supposer que la raison en est lʼabsence de radio dédiée aux moins de 10 ans. Ceci dit, un tableau nous donne une idée de la place de la musique et de la radio (englobés dans une même question) chez les 6-14 ans, donc pour les 6-10 ans (CP à CM2) en ce qui nous concerne.

Écoutent des CDs, Jamais ou 1 à 2 fois par 1 à 2 fois Tous les cassettes ou la presque mois par jours ou radio... jamais semaine presque

CP 8,0 11,5 44,5 36,0

CE1 11,0 13,0 48,0 28,0

CE2 4,5 13,5 41,5 40,5

CM1 5,5 6,5 42,5 45,5

CM2 8,0 12,0 33,0 47,0

NB : Les réponses des CP, CE1, CE2, CM1 et CM2 sont données par les parents, donc a priori fiables.

#S La musique occupe une position privilégiée dans les habitudes culturelles des 6-10 ans ; elle est source dʼéchanges, et de la construction dʼune identité. Elle est en grande partie responsable de lʼintégration de la radio dans le rythme hebdmadaire des trois quarts des 6-10 ans.

En comparaison avec les chiffres concernant la consommation télévisuelle13, on constate que les CP et CE1 regardent globalement plus la TV quʼils nʼécoutent de la musique, mais quʼà partir du CE2 (8 ans), les tendances sʼinversent.

Jʼai mené une enquête auprès de 17 élèves dʼune classe de CE1, puis de 43 élèves de CE2 pour avoir une idée chiffrée des différentes radios écoutées chez des moins de 10 ans. Les classes interrogées font partie dʼécoles publiques de la banlieue lyonnaise, socialement mixtes. Les résultats confirment lʼimportance que les moins de 10 ans donnent à la radio.

N’écoutent pas la Ne connaissent pas Écoutent des Écoutent des radio les noms des radios pour radios pour stations écoutées adultes adolescents CE1 (17) 5 9 1 2 CE2 (43) 6 8 25 15

NB : Les élèves écoutant des radios pour adultes et des radios pour adolescents sont comptabilisés deux fois.

Les radios “pour adultes” citées sont : France Inter, RFM, Europe 1, RTL2, Beur FM, Radio Salam (locale), (locale), Chérie FM, MFM.

Les radios “pour adolescents” citées sont : Fun Radio, Skyock, NRJ, Rires et chansons.

Créer une radio pour les enfants aujourdʼhui nʼest pas du tout hors de propos ; il semble quʼelle occupe déjà une place importante dans les habitudes et les plaisirs des jeunes.

13 Sylvie Octobre, Les loisirs culturels des 6-14 ans, p. 133, La documentation Française, Paris, 2004

#Q Deux enfants seulement, sur les 49 qui écoutent la radio, disent lʼécouter sur Internet ; 9 dʼentre eux ont affirmé allumer eux-mêmes la radio, pour 22 qui ont leur mot à dire quant au choix de la station.

II. 1) e) Adapter la radio aux besoins de lʼenfant

Face à la constatation de deux comportements opposés par rapport à lʼenfant (infantilisation excessive et “adultisation”), il est nécessaire de savoir lui redonner la place qui lui convient.

Il paraît essentiel dʼêtre à lʼécoute de lʼenfant, afin de connaître précisément ses désirs, non en matière dʼéducation, mais de divertissement. Aussi il serait judicieux quʼune radio pour enfants ne se limite pas à une station dʼémission à sens unique. Le média doit également laisser une part dʼexpression à lʼauditeur. En tant que créateurs potentiels dʼune telle station de radio, il nous appartient de définir la forme de lʼinteractivité à adopter : possibilité dʼanimer des émissions, jeux radiophoniques, moments dʼéchanges sur un problème du quotidien, ou simple livre dʼor dédié sur le site Internet de la station radio...

Lʼenfant dispose dʼun riche potentiel créatif, et lʼadulte a besoin de sa fraîcheur, sa spontanéité, pour découvrir, créer... Picasso lui-même disait : « Jʼai mis toute ma vie à savoir dessiner comme un enfant. » Lʼenfant est un créateur ; à Oslo et à Tokyo, il existe des musées dʼart enfantin, magnifiques lieux de partage dʼun art surprenant, différent, frais. Il me semble que la notion dʼenfant artiste est complexe et passionnante ; cʼest en observant lʼenfant créer que lʼadulte peut définir ses besoins culturels, et en déduire les meilleurs moyens dʼéduquer par lʼincitation.

Le domaine ludique est un terrain dʼéchange particulièrement fécond. On sait, nous adultes, fabriquer des jeux adaptés, et sʼinspirer des occupations spontanées des enfants pour créer ; car lʼenfant est doté dʼune imagination naturelle fertile. Le jeu du Memory vient directement de la créativité de lʼadulte, mais la poupée vient du jeu du papa et de la maman, spontanément pratiqué par lʼenfant, et de la fascination des

#M aînés par leurs petits frères et sœurs. La dînette vient du jeu de la cuisine, le tableau noir au format dʼenfant du jeu de la maîtresse. Lʼadulte met au service ses compétences techniques pour alimenter matériellement les jeux de lʼenfant. De même, les programmes de la radio doivent sʼinspirer des envies et besoins de lʼenfant : les contes, les émissions culturelles, la musique...

Il ne faut pas aller trop loin dans la matérialisation par lʼadulte des envies de lʼenfant. Quelques créateurs cupides, en plus ou au lieu de sʼinspirer de lʼenfant, essaient de démocratiser leurs outils technologiques. Nʼimporte quel parent adepte de ces nouveaux outils ne pourra sʼempêcher dʼassommer son fils ou sa fille avec notre monde, notre culture, les outils “des grands”. Ainsi, dès son plus jeune âge, on peut faire jouer un bébé à une application I-phone comme Les histoires de Lapin sur Iphone (dès 1 an, précise le descriptif). On peut aussi lʼendormir grâce à Bébé Doudou, et jʼen passe. Il me vient en tête une situation assez cocasse que jʼai observée récemment, où une jeune maman mettait son Iphone dans les mains de son fils (dʼun an à peine). Elle lui expliquait un jeu où lʼintéressé devait appuyer sur la photo dʼun bébé, qui se mettait alors à crier en grimaçant. Ce jeu amusait beaucoup la maman. Son fils, une fois la tâche exécutée, jetait systématiquement le téléphone et prenait la poupée posée dans sa caisse de jouets. Et la maman de recommencer, infatigable.

Lʼenfant est un adulte en devenir, et nous devons apporter au futur citoyen ce dont il a besoin pour sʼépanouir : de lʼémerveillement, de lʼamusement, de lʼattention et une nourriture intellectuelle, via des émissions culturelles et des invitations à réfléchir sur des thèmes profonds et variés.

À la question « Sʼil existait une radio pour enfants, lʼécouterais-tu ? » posée aux élèves de CE1 et CE2, 44 répondent oui, et 16 -dont 9 CE1- répondent non. Près de 3 enfants sur 4 semblent donc favorables à lʼexistence dʼune radio pour enfants. Même en admettant que les réponses données par les CE1 reflètent bien leur attitude face à une telle radio si elle existait, les chiffres sont plutôt encourageants.

$H Voilà pour finir les raisons qui pousseraient les enfants à écouter une radio adaptée, telles que formulées par une partie de ces élèves interrogés :

« parce que ce serait bien » « car jʼaime la musique pour enfants et grands » « parce que je voudrais bien entendre ce quʼils diront » « parce que cʼest pour les enfants » « parce quʼon nʼest pas encore des adultes » « parce que ça ferait beaucoup rigoler, pas comme pour les adultes » « parce quʼon nʼest toujours pas des adultes » « parce que je comprendrais mieux » « parce que cʼest rigolo et amusant » « parce quʼon pourrait voir ce quʼils disent les enfants » « car ce seront des questions que lʼon comprendra » « parce que jʼaime la radio » « parce quʼelles sont très bien les chansons pour enfants » « je lʼécouterai que si cʼest drôle » « je lʼécouterai parce quʼon a une radio » « parce que comme ça jʼapprendrai des choses » « pour écouter Sexion dʼAssaut » « car ça mʼintéresserait » « parce que cʼest pas les infos » « parce quʼil y aurait enfin une radio pour les enfants, il y en a pour les grands » « car il y aurait moins de mots vulgaires » On retrouve donc, dans les attentes de lʼenfant vis-à-vis dʼune radio dédiée : - de la musique pour enfants ; - de lʼhumour ; - de la compréhension et de lʼapprentissage ; - une appartenance exclusive de la radio à lʼenfant. Cʼest sur ces données que je souhaite mʼappuyer pour construire une grille de programmes de radio éducative pour enfants.

$! Le ton général de la radio doit être léger et humoristique. Le choix des musiques se fera dans le respect de lʼenfant et en explorant le genre “chanson pour enfants”. Les musiques appréciées par la nouvelle jeunesse, sous perfusion de radios pour adolescents telles Skyrock, Fun Radio et NRJ, qui diffusent certaines chansons aux paroles violentes déguisées sous des rythmes et mélodies entêtants, ne seront pas diffusées, tant pour des raisons morales que par souci dʼoriginalité.

$" II. 2) Revaloriser lʼimportance de lʼécoute

II. 2) a) Lʼassistanat par lʼimage

Comme le philosophe Gillian Rose le suggère, la postmodernité est non seulement « oculocentrique » par la quantité dʼimages qui circulent et articulent les connaissances, mais parce que les individus interagissent toujours plus avec des expériences visuelles totalement construites14. Lʼessayiste Guy Debord, le sociologue Jean Baudrillard et lʼurbaniste et philosophe Paul Virilio ont dénoncé dès les années 1960 cette tyrannie de lʼimage qui, fabriquée et servie par des institutions puissantes, amoindrit la fonction de nos propres yeux. « Quand lʼimage construite et choisie par quelquʼun dʼautre est devenue le principal rapport de lʼindividu au monde quʼauparavant il regardait par lui-même, [...], on nʼignore pas que lʼimage va supporter tout. » 15

Lʼexplosion dʼimages et de technologies visuelles survenue à la fin du dernier siècle a amené avec elle un changement culturel dans la vie quotidienne des individus. Ainsi, lʼabondance dʼaffiches publicitaires dans les villes et le partage de photos et images numériques facilité par la multiplication des réseaux sociaux ancrent lʼindividu dans une société des images, le gavent, le soumettent, et monopolisent les cinq sens au profit dʼun seul.

Le son, pourtant intimement associé à lʼimage, devient secondaire par rapport à elle. Aussi, lorsquʼon souhaite écouter une musique sur Internet (en streaming), va-t- on préférer Youtube à Deezer, car il propose une vidéo en même temps : clip, photos privées, paroles de la chanson... Le consommateur dʼimages en est devenu dépendant.

14 Gillian Rose, Visual Methodologies: An Introduction to the Interpretation of Visual Materials, Sage Publications, Thousand Oaks (USA), 2001 15 Guy Debord, Commentaires sur la société du spectacle, éd. Gérard Lebovici, Paris, 1988

$# À une grande personne il est difficile de réapprendre à écouter, de même quʼun adulte quʼon a nourri toute sa vie de malbouffe aura du mal à apprécier des mets plus sophistiqués et plus sains. À 6 ans, lʼenfant nʼest pas indemne de consommation dʼimages, mais il faut lui faire travailler sa concentration auditive.

« La résistance de la radio, dans cette société de lʼimage, confirme notre sensibilité particulière à la communication sonore. » 16

Proposer une alternative à cet assistanat par lʼimage, que dʼaucuns nomment lʼintoxication par lʼimage, paraît pertinent et donnerait aux parents et éducateurs le choix dʼune culture synesthésique pour leur enfant. Et cette alternative peut prendre la forme dʼune radio divertissante.

Plus quʼune parade à la culture de lʼimage, lʼécoute exclusive est un moyen dʼapprendre à lʼenfant à se concentrer, et à affiner sa perception qualitative, à lui éduquer lʼoreille. Lʼenfant peut acquérir, par une écoute assidue dʼune radio de bonne qualité, une exigence particulière sur les produits sonores et une pertinence auditive, quʼon pourrait appeler une “bonne oreille”. Parmi les témoignages reçus par 23 anciens auditeurs de la radio pour enfants Superloustic, deux technicien et journaliste du son rapportent avoir eu le goût de la radio et lʼamour du son grâce à Superloustic.

Enfin, lʼabsence dʼimage permet à lʼauditeur dʼécouter son programme en continuant ses activités, et réserve donc à la radio tous les créneaux où lʼenfant doit se préparer pour aller à lʼécole, manger, faire la cuisine, les tâches ménagères...

II. 2) b) Revaloriser la parole

Cʼest dans les livres que lʼon apprend à lire, ce sont eux également qui enrichissent notre vocabulaire.

16 Michel Alberganti, dans lʼémission Science publique du 12 février 2010, sur

$$ Le langage parlé nous restreint largement quant à lʼapport de vocabulaire ou syntaxique. Ceci dit, le langage oral présente cette richesse inouïe, beaucoup utilisée en poésie, quʼest la phonétique. Si le média oblige lʼanimateur à formuler des phrases courtes, directes, avec un langage concret et précis, il faut réussir à faire de cette contrainte une richesse. On peut, pour ce faire, utiliser les allitérations, les assonnances, les paranomases, et autres figures de styles qui créent une certaine sensibilisation à la beauté du vocable. La poésie ne sʼimprovise pas, aussi un tel art pourrait prendre la forme de chroniques quotidiennes, poèmes récités...

Lʼapprentissage des langues étrangères trouverait également sa place dans une radio pour enfants. Dans les goûts musicaux des 6-10 ans, on retrouve un certain nombre de chanteurs/chanteuses américain(e)s ; les paroles non comprises ne sont pas un barrage pour lʼenfant qui apprend par coeur des chansons en “yaourt”. À lʼinstar du dessin animé Dora lʼexploratrice, qui apprend quelques mots dʼanglais à des tout-petits, une émission pourrait inclure une part de bilinguisme.

Il est important, dans lʼensemble, que le discours soit facile à comprendre ; la volonté éducative doit laisser lʼenfant apprécier la radio pour sa simplicité dʼaccès. Je citerai pour illustrer les réponses dʼélèves de CE2, retranscrites telles quelles, aux questions « Sʼil existait une radio pour enfants, lʼécouterais-tu ? Si oui, pourquoi ? » : « Oui Je veux lʼécouter ; parce que je comprendrai mieux. » « Oui. Car ce seront des questions que lʼon comprendra. »

« Oui comme ça jʼapprendrai des choses. » « Oui, car il y aurait moins de mots vulgaires. » (x2)

II. 2) c) Faire travailler lʼimaginaire de lʼenfant par le son

« L'avantage de la radio sur le cinéma, c'est qu'à la radio l'écran est plus large. » Orson Welles

Si les sens sont pour nous le moyen naturel de percevoir une donnée, il me semble que lʼimagination a un rôle essentiel. Ainsi en lisant un roman, ce nʼest pas

$R toujours la vue des mots descripteurs qui provoque une émotion, cʼest parfois la représentation que lʼimagination sʼen fait. De même, la radio doit stimuler lʼimagination et ne pas se contenter du simple rôle de bruit de fond.

À la question de mon enquête « Que faisiez-vous en écoutant Superloustic ? », 6 personnes sur 23 répondent “rien dʼautre”. Réponse quelque peu surprenante, quand la TV paraît plus attractive que la radio pour celui qui nʼa rien à faire de ses yeux. Les anciens Loustics faisaient également leurs devoirs en écoutant la radio, ou des travaux manuels, et 15 sur 22 répondent quʼils laissaient tourner le programme en continu. Dans ces derniers cas, la radio se contente de son seul rôle dʼémetteur sonore, voire de chasseur de silence. Mais revenons au cas où lʼauditeur se concentre sur ce quʼil écoute. Lʼoreille y est rarement le seul outil de perception.

La description par la suggestion ou lʼévocation est parfois bien plus pertinente que la réduction dʼune description à un exemple dicté par des images. Cʼest pour cette raison quʼun lecteur est souvent déçu en allant voir lʼadaptation cinématographique dʼun de ses livres fétiches : le travail dʼimagination quʼa suscité le livre est détruit par lʼimposition de certains choix dʼimages, dʼacteurs, de couleurs. Il ne faut pas penser que ce nʼest le cas que pour le visuel : on peut aussi être déçu par une voix, une musique, un effet sonore. Cependant lʼimagination précise beaucoup moins les éléments sonores, de la même manière quʼon nʼa pas de souvenirs des bruits dans les rêves, alors que les images abondent. Ainsi, en nʼutilisant quʼun support (le son), lʼimage reste un champ total de liberté pour lʼimagination. Aussi, lʼauditeur concentré sur un programme peut créer un univers visuel, habitude quʼil nʼa peut-être pas sʼil est asservi par les images narratives rationalistes (publicités, courts métrages, séries, films...).

« Le jeu automatique des associations, lʼimprégnation par le matériel subconscient des images créées dans le préconscient nʼincombe plus obligatoirement à lʼauteur mais au public. » Gaston Bachelard, dans Radio et Rêverie

Le son sans image offre une liberté de création précieuse, qui garantit dʼailleurs une certaine pérennité à la radio. Profitons de cet atout pour inciter les enfants à

$. développer leur imaginaire, à explorer leur rêverie, à créer. Si cʼest un plaisir certain, cela peut également être très formateur ; un exemple en est le témoignage dʼune ancienne auditrice de la radio Superloustic, aujourdʼhui illustratrice : « Jʼexerce également un métier de rêve, je pense que Superloustic y a contribué. »

II. 2) d) Améliorer la capacité de concentration

Philippe Schlienger, organisateur du festival Momix, festival international du jeune public, observe chez lʼenfant des années 2000 une plus grande vivacité, une plus grande capacité à faire plusieurs choses à la fois, mais une capacité de concentration plus réduite quʼavant la démocratisation des outils et médias numériques. Inféodés à la multitude des supports audiovisuels et visuels, les enfants sujets ont énormément de choix, et adoptent, par facilité, la mode du zapping. Pour réussir à faire travailler la concentration des enfants, il est utile de les fidéliser à un programme, par des outils techniques qui prendront la forme de jingles identifiables, de voix singulières et dʼeffets sonores originaux.

À une heure où les acteurs du système scolaire cherchent un nouveau mode dʼapprentissage, notamment en créant plus dʼinteractivité entre le professeur et les élèves, une radio éducative permettrait de remettre au centre la concentration auditive. Contrairement à lʼenseignant, frustré lorsque la classe ne lʼécoute pas, la radio nʼimpose pas une concentration continue de lʼauditeur pendant toute la durée dʼun programme ; elle se contente de capter son attention, le plus souvent possible.

Lʼenfant, comme lʼadulte et lʼadolescent, apprend plus facilement de son plein gré. Ainsi la génération des fidèles de Cʼest pas sorcier ou À toi lʼactu@ (émissions télévisées de vulgarisation scientifique et dʼactualité pour les enfants) en a surpris plus dʼun en faisant preuve dʼune connaissance du monde assez développée. Lʼaction que fait lʼenfant, en prêtant une oreille attentive à une émission culturelle, lui est propre ; en décidant lui-même dʼacquérir du savoir, il retiendra bien mieux que la page 37 de son livre dʼhistoire quʼon lui a demandé dʼapprendre par coeur.

La radio doit susciter lʼintérêt de lʼenfant, lui ouvrir lʼesprit pour lʼencourager à écouter lʼadulte, vecteur de transmission.

$S II. 3) Une radio éducative : pourquoi ?

II. 3) a) Quelques notions élémentaires

« Ce qui fonde la pédagogie, cʼest lʼéducation de la liberté. Lʼobjectif, ce nʼest pas dʼabord lʼemployabilité des élèves (même si, évidemment, cʼest quelque chose dont nous devons avoir le souci), cʼest dʼabord la possibilité donnée à un être de se poser comme sujet. De se mettre en jeu dans ses activités, de ne pas être manipulé, réduit à un simple consommateur quʼil faut séduire et dont il faut flatter en permanence les pulsions les plus archaïques. Cet objectif, qui fut toujours lʼobsession des pédagogues, devient aujourdʼhui dʼune terrible actualité. Et je prononce le mot « terrible » dans son sens propre : notre monde est, en effet, en passe dʼêtre complètement piloté par la machinerie médiatico-commerciale… qui, précisément, a tout intérêt à ne pas avoir en face dʼelle des sujets libres, mais des enfants scotchés aux écrans et manipulables par la publicité. »

Philippe Meirieu

Ce mémoire traite dʼune radio éducative pour enfants, aussi faut-il préciser que le terme “éducatif” nʼest pas à prendre dans le sens où on lʼutilise abusivement, cʼest- à-dire celui quʼon associe aux programmes ou émissions, et qui colporte parfois une connotation péjorative, de “didactique” voire “pompeux”. La radio éducative nʼest pas à considérer comme une simple radio au programme culturel périscolaire ; elle ne se contente pas dʼalimenter le développement intellectuel ou, osons le dire, lʼépanouissement dʼun sujet par le scolaire. Comme lʼécrivait Pierre Schaeffer, « que le commentaire sur les valeurs soit désormais plus important à lʼécole que le discours sur les notions, cʼest bien probable. Que les deux sources de lʼécole proviennent du sens commun autant que du savoir, cʼest évident. Mais peut-être faut-il que lʼécole ne soit plus seule à assumer une éducation si incomplète, si hésitante »17.

Lʼamalgame est trop souvent fait entre éducatif, culturel, pédagogique et instructif. Aussi peut-il être utile de redéfinir la notion dʼéducation.

17 Pierre Schaeffer, “Médias de masse : lʼécole entre Descartes et McLuhan”, in Éducation aux médias, éd. Unesco, Paris, 1984

$Q Lʼétymologie du verbe “éduquer” se situe entre le latin educare (élever, cultiver) et educere (tirer hors, développer). La notion dʼéducation regroupe les termes de croissance, formation, développement, socialisation, instruction, évolution18. Cette double étymologie traduit une ambiguïté de lʼéducation, qui implique à la fois une certaine passivité de lʼindividu éduqué, qui se contente de suivre le chemin du maître (educare), et une démarche personnelle, un développement non orienté par lʼéducateur (educere).

Lʼhistorien Joseph Ki-Zerbo a écrit quʼ« après la mise au monde, il reste lʼéducation [...] Et pour une société donnée, cʼest par lʼéducation quʼelle se perpétue dans son être physique et social. Il sʼagit dʼun accouchement collectif qui prolonge lʼenfantement biologique individuel »19. Cette image rappelle que lʼéducation est fondamentale pour permettre lʼintégration dans la société. Elle offre une seconde naissance à un individu.

La pédagogie correspond à lʼensemble des méthodes utilisées pour éduquer les enfants et les adolescents. Dʼailleurs, dans la Grèce antique, le pédagogue était la personne chargée de lʼéducation extra-scolaire, il était le complément de lʼenseignant.

Un jeu peut être éducatif même sʼil nʼapprend pas la lecture ou les chiffres. Et la radio pour enfants que je conçois nʼa pas pour but premier lʼenseignement, mais bien lʼéducation, par le biais de la pédagogie !

Méfions-nous donc de lʼassociation abusive de lʼ“éducation” à lʼ“enseignement”, car le programme éducatif dont je parle est décorrélé de toute notion dʼenseignement, qui contient dans sa définition une connotation scolaire : enseigner : faire apprendre quelque chose à quelquʼun, le lui expliquer en lui donnant des cours, des leçons. Lʼécole sert à éduquer, mais surtout à former des futurs travailleurs, des producteurs. A contrario, beaucoup de médias et de publicités actuels apprennent à

18 Carlo Nanni, “Educazione”, in Dizionario di scienze dellʼeducazione, éd. LAS, Rome, 1997

19 Joseph Ki-Zerbo, Éduquer ou périr, LʼHarmattan, Paris, 1990

$M devenir des bons consommateurs, en prodiguant une certaine forme de culture, mais sans participer à lʼéducation du spectateur/auditeur. La radio éducative revendique une mission dʼapprentissage (lʼenfant peut acquérir des connaissances par son biais, si tant est quʼil décide dʼentreprendre une démarche personnelle), mais nʼa pas vocation à former (faire acquérir des connaissances à lʼenfant, le priver de lʼeffort culturel). Il est important dʼapporter une notion culturelle nouvelle dans les médias audio et audiovisuels pour jeunes, mais sans en oublier lʼobjectif distractif !

Enfin, débarrassons-nous de lʼidée reçue associant la culture à lʼintelligence. Il existe plusieurs registres de culture. La culture classique, académique, est celle quʼon apprend à lʼécole ou dans les institutions comme les musées ou programmes dits “culturels” : les dates dʼévénement historiques, les pays du monde, la biologie... Une deuxième culture vient compléter ces connaissances ; cʼest la culture du quotidien, créée par ses “usagers” : la culture urbaine (vaste domaine comprenant des styles de musique, de danse, des looks, lʼart de rue ou street art, lʼargot...), la culture TV (du téléfilm à la télé-réalité en passant pas les talk-show, émissions de divertissement et séries diverses), la culture Manga (films animés, musiques, langue, style vestimentaire ou capillaire, livres, Japanexpo...)... Cette culture, apanage des jeunes, sera intégrée dans les programmes de la radio éducative ; cʼest elle qui inscrit la station dans une réalité contemporaine. La culture classique ne sera pas laissée pour compte. Cependant, pour préserver sa fraîcheur, la radio pour enfants tentera de ne pas transmettre la “culture” de la consommation, bien assez véhiculée par dʼautres médias.

Une radio éducative pour enfants sʼinscrirait dans la lignée des revues “intelligentes”20, telles les revues proposées par Bayard Presse ou Milan. Il faut donc trouver un équilibre satisfaisant entre école ou programme éducatif indigeste et média ludique et flatteur du consommateur.

20 Le terme “intelligent” est à bien dissocier de la notion de “savant”.

RH II. 3) b) Nourrir lʼintellect de lʼenfant abruti par une malnutrition médiatique21

Le psychologue John Berry répertorie trois formes de transmission culturelle22. La première est la plus traditionnelle : la transmission verticale ; elle décrit la transmission de la culture des parents aux enfants, du haut vers le bas. Cʼest une transmission à sens unique. La transmission horizontale, elle, concerne les échanges entre pairs au cours du développement, de la naissance à des âges plus avancés. Quant à la transmission oblique, elle définit les apprentissages par des adultes extérieurs ou des institutions : lʼécole, le travail... La radio éducative, outil de transmission oblique et de transmission horizontale (elle favorise lʼexpression de lʼenfant et lʼinteraction entre les auditeurs), ne se substituera pas à la transmission verticale.

À lʼheure où la TV est devenue le premier média consommé23 par les enfants, les parents en désarroi ne savent plus comment éviter lʼimposition de la “culture TV”. Ce constat est dʼautant plus frustrant que lʼon sait, grâce à des recherches publiées sur les rapports entre enfants et télévision, que la TV est toujours un deuxième choix, derrière des activités familiales, artistiques, sportives24... La TV est donc bel et bien un moyen de combattre lʼennui, ou plus exactement de remplir lʼennui.

Une radio pour enfants ne saurait révolutionner lʼaffaire ; cependant elle sera une alternative pour les parents en quête de solutions. Ne confondons pas culture TV avec culture abrutissante : encore aujourdʼhui, il est possible pour lʼenfant de se construire une culture TV intéressante, grâce à certaines émissions dont le nombre

21 dʼaprès la formulation de Philippe Chamont, dans La précocité intellectuelle : les magiciens du paradoxe, éd. Champ social, Nîmes, 2008

22 John W. Berry, Cross-cultural psychology : research and applications, Cambridge University Press, Cambridge, 1992

23 le choix du terme “consommé”, à considérer avec sa connotation péjorative, permet de rappeler la passivité du spectateur, gobeur dʼimages qui peuvent le priver de tout esprit critique.

24 Marina DʼAmato, “Les enfants captifs de la télé : un remède à lʼennui ?”, in La lettre de lʼenfance et de lʼadolescence, n° 60, éd. Cairn.info, 2005

R! reste limité. Il ne sʼagit pas dʼopposer TV et média intelligent. Mais ne nous leurrons pas : ce ne sont pas les émissions culturelles qui font le succès de la TV.

Lʼenfant est un être naturellement curieux, toujours en quête de réponses à ses questions, des plus concrètes aux plus existentielles. Le “pourquoi” de lʼenfant nʼest pas seulement un moyen de se faire entendre, il est également la transcription dʼune réelle soif innée de connaissance. Considérant tous les cas dʼenfants isolés ou sans réponses à leurs questions, une radio éducative est un moyen dʼapporter à lʼenfant du matériau constructif pour y répondre, dans des émissions sur les sciences, lʼHistoire racontée... Entretenons cette curiosité naturelle pour préserver lʼouverture dʼesprit dʼune jeunesse mise à mal par une enculturation aux codes trop radicaux. Il paraît toutefois opportun de proposer à lʼauditeur des moments libres de réflexion ou dʼévasions, pour lʼinciter à la rêverie, nécessaire au bien-être et à lʼélévation ; il faudrait donc aménager des plages calmes, ou de débats participatifs à lʼantenne, pour se démarquer dʼune radio “ordinaire” qui alimente en continu (dʼoù la notion de “perfusion” utilisée précédemment).

La radio éducative pour enfants, si elle est attractive, peut limiter la consommation des programmes télévisuels abrutissants tant décriés.

II. 3) c) Culture par la radio et culture scolaire

Paul Clerc a montré par une étude quʼà diplôme parental égal, le revenu nʼinflue pas sur la réussite scolaire des enfants. Par contre, à revenu parental égal, les enfants dont les parents ont des diplômes ont généralement de meilleurs résultats25. De ces constats lʼon peut conclure que lʼinfluence du milieu familial sur la réussite scolaire est essentiellement culturelle. La réussite scolaire ne dépend pas exclusivement des capacités intellectuelles ; elle est aussi le fruit dʼune certaine motivation, dʼun environnement familial et social favorisant, et dʼune adaptabilité au système scolaire.

25 Paul Clerc, Les sciences de l'éducation pour l'ère nouvelle : Démographie scolaire, éd. Les sciences de lʼéducation, Paris, 1994

R" La radio est un média qui traverse les barrières sociales. Elle fait partie de la culture populaire, la culture du quotidien, tout en étant capable dʼapporter à lʼoreille de lʼauditeur des thèmes de culture classique. Favorisant la concentration auditive, elle peut fait découvrir des informations sur lʼactualité (dans le monde, dans les univers culturels...), mais aussi des sujets divers via des documentaires ou des émissions culturelles. La radio éducative nʼa pas vocation à remplacer lʼécole, et doit éviter de proposer des programmes culturels redondants avec les programmes scolaires, tout en étant un support potentiel pour une leçon appliquée. Elle doit apporter à lʼenfant un savoir de manière ludique, et un savoir différent de celui enseigné par lʼÉducation nationale. Celui-ci peut être transmis par la fiction, par des anecdotes, et enrichi par des illustrations sonores, pour rendre les éléments plus vivants.

En éveillant lʼintérêt de lʼenfant pour des sujets variés, du plus futile au plus essentiel, la radio éducative peut lui donner le goût de la connaissance. En acquérant du savoir, ne serait-ce quʼanecdotique, cʼest un outil pour sʼintégrer dans une conversation que gagne lʼenfant, et un moyen de faire le lien entre sa nouvelle culture et les cours enseignés par le professeur à lʼécole.

II. 3) d) Lʼimportance dʼune ligne éditoriale concrète

Il est fondamental de créer une cohérence dans la radio éducative pour enfants, et pour cela la ligne éditoriale de la radio doit être concrète.

La radio pour enfants a pour mission dʼoffrir une attention particulière à ce public parfois négligé. Cette attention se traduira par trois moyens : des programmes distrayants, un apport éducatif adapté et une interactivité permettant aux enfants de sʼexprimer.

Pour distraire lʼenfant, la radio le surprendra, le fera rire et lui permettra de sʼévader. Lʼoriginalité des voix, des histoires et des sujets abordés réveillera lʼenfant ;

R# les jingles, inventifs, sont un leitmotiv, identité sonore de la station. Les animateurs seront sources dʼhumour et de répartie ; ainsi ils communiqueront leur énergie et leur bonne humeur. Les fictions, dont un soin particulier sera accordé à lʼillustration sonore, seront un vecteur de rêverie et susciteront lʼimagination de lʼauditeur.

Lʼapport éducatif prendra la forme dʼémissions culturelles. Celles-ci apporteront à lʼenfant des connaissances variées et originales sur lʼHistoire, lʼenvironnement, les nouvelles technologies etc... ; la culture apportée par la radio sera singulière, elle ne se résumera pas aux différentes cultures accessibles par dʼautres biais, cʼest-à-dire la culture scolaire et la culture du quotidien. La culture classique pourra faire partie du contenu dʼune émission, et elle sera en ce cas vulgarisée et transmise de manière ludique. Enfin, la radio fera découvrir aux enfants et aux parents dʼautres médias : presse enfantine, livre jeunesse, musique ou théâtre pour enfants...

Lʼinteractivité offrira à lʼenfant-auditeur la possibilité de sʼexprimer. Sa parole sera non seulement écoutée, mais aussi prise en compte ; elle pourra être vecteur de construction du contenu au cours dʼune émission, ou dʼamélioration des programmes.

La radio placera lʼenfant au centre du média en lʼincitant à écouter, à réagir, à réfléchir et à sʼexprimer. Elle lui permettra de sʼépanouir par les choix véhiculés par cette ligne éditoriale.

R$ II. 4) La radio comme compagnon de lʼenfant

II. 4) a) La pertinence du flux

Lors dʼun entretien téléphonique mené avec Olivier Dumolin, le créateur de la Webradio pour enfants Radio Moussaillons, je lui ai demandé de mʼexpliquer lʼélément déclencheur de son initiative de programmes adaptés : « Il a eu lieu au cours dʼune formation à lʼemploi de baby-sitter, où un formateur avertissait des dangers de lʼécoute de certaines radios dans la voiture avec les enfants gardés : si lʼadulte peut occulter, lʼenfant, lui, nʼest pas à lʼabri dʼentendre et dʼintégrer certains propos nocifs. Cʼest comme ça que, des années plus tard, après lʼarrivée de mes enfants, je me suis lancé dans la création de Radio Moussaillons, la radio qui peut tourner sans risque dans nʼimporte quel véhicule. »

Le flux est une donnée importante de la radio pour enfants. Il lʼintègre dans la vie de lʼauditeur ; même quand lʼenfant nʼen a pas besoin, la radio lʼattend, présente. Il prend place en voiture et nʼa quʼà appuyer sur un bouton pour découvrir ce qui se passe dans les studios au même moment. La radio de flux est personnifiée, elle est quelquʼun sur qui lʼon peut compter. Lʼauditeur nʼa plus quʼà sʼintégrer dans lʼémission, faire sa place dans un imaginaire, adopter lʼunivers proposé. Lʼenfant, qui a besoin dʼun cadre, choisit le sien, un média intéressant et distrayant.

À lʼheure où lʼon dénonce la société de lʼinstantané, lʼattente dʼune émission est un phénomène précieux quʼil faut tenter de préserver. Aussi, la récurrence dʼun feuilleton radio ou dʼune émission peut créer lʼexcitation dans lʼattente de lʼheure du programme, à laquelle il ne peut se soustraire.

Pour autant, il nʼest pas inenvisageable de mettre des émissions à disposition de lʼenfant sous forme de podcast sur le site de la radio, une fois lʼémission diffusée bien sûr, et pour une durée de temps limitée.

Enfin, une radio de flux pour enfants permet aux familles de remplir les temps creux de la journée avec un programme adapté, sans autre équivalent.

RR II. 4) b) Chasser lʼangoisse du silence

« Trop de silence nʼest pas plus acceptable que trop de bruit et le besoin de silence correspond à un besoin de son. » Pierre Mariétan

Le psychanalyste Philippe Chamont répertorie cinq types dʼangoisse chez les enfants, dont fait partie lʼangoisse du silence. Cette angoisse révèle une peur de la solitude, un besoin de compagnie, dʼadultes ou de camarades du même âge. Lʼenfant angoissé cherche à provoquer lʼenvironnement familial pour stimuler les réactions ; la provocation peut alors prendre une tournure conflictuelle. Pour contrer cette angoisse, Philippe Chamont préconise le simple recours à un bruit de fond, tel un aquarium ou une musique douce dans une chambre.

Il semblerait que la TV occupe cette fonction de bruit de fond lorsquʼelle est allumée en continu. Celle-ci ne se contente pas, malheureusement, de remplir lʼoreille, elle a aussi une forte capacité à happer, par ses images, la concentration de lʼenfant qui va sʼasseoir devant sans compter les heures. Une radio nʼa pas ce défaut.

Revenons sur lʼenquête menée auprès des anciens auditeurs de Superloustic. À la question « Que faisiez-vous en écoutant Superloustic ? » (plusieurs réponses possibles), quinze des vingt-trois participants répondent « tout et rien à la fois, la radio tournait en continu ». On peut trouver plusieurs explications à cette tendance. La première serait une simple paresse à allumer et à éteindre la radio, comme nous-mêmes, adultes, la reconnaissons. Le cerveau étant capable dʼocculter les éléments sonores dont il nʼa pas besoin, on nʼéprouve pas toujours la nécessité dʼéteindre le poste, ou de baisser le volume. Une deuxième explication reprend cette idée dʼangoisse du silence, et est confortée par un commentaire dʼun ancien Loustic : à la question « Pourquoi aimiez-vous Superloustic ? », il répond « Cʼétait pour moi des personnes qui me tenaient compagnie avec la radio ! ». Lʼenfant seul, lʼenfant qui sʼennuie ou qui a du chagrin allume sa radio, dont la présence rassure.

R. II. 4) c) Lʼimportance du direct

Le direct est la caractéristique essentielle dʼune radio. Cʼest lui qui ancre ce média dans notre présent, qui lui permet de devenir notre compagnon dans le quotidien. Il crée un rapport étroit entre lʼanimateur et lʼauditeur. Il semble important, pour une radio pour enfants, que le direct sʼaccompagne dʼune interpellation de lʼauditeur, pour lʼinclure dans lʼémission.

Si le direct paraît aujourdʼhui une notion naturelle pour la radio, il lʼest probablement de moins en moins avec la multiplication des webradios, dont les possibilités techniques ne permettent pas toujours de lʼutiliser. Et pourtant cʼest bien la force de la radio française ; même pour copier les États-Unis qui se laissent 7 secondes de marge de réaction en cas de dérapage dʼun interviewé, notre pays ne cède pas à la tentation du différé.

Dans lʼenquête menée auprès des anciens Loustics, et à la question « Pourquoi aimiez-vous Superloustic ? », quatorze des vingt-trois réponses obtenues mentionnent la qualité des animateurs : la qualité de lʼanimation ainsi que celle du ton adopté pour sʼadresser à lʼenfant. Un des interrogés mentionne la « fraîcheur » et la « spontanéité » des programmes de Superloustic. Il me semble que cʼest bien là que la radio peut se démarquer de la TV et attirer lʼenfant malgré lʼabsence dʼimage qui facilite lʼattrait. Le direct crée une sorte dʼexpectation de quelque imprévu par lʼauditeur, qui le sort dʼune passivité totale.

Il semble également que le direct soit une aide précieuse aux identités des émissions. La pression mais également lʼexcitation quʼil provoque chez lʼanimateur lui permettent une plus grande affirmation de sa personnalité. Il doit faire preuve de répartie, de spontanéité, et est donc dans un rapport plus personnel avec lʼauditeur. Ainsi lʼenfant peut percevoir la sincérité du discours et il lui est plus facile de prendre un des animateurs pour référent(e), tel un grand frère ou une grande sœur.

Le direct est également la clé pour une interactivité assumée.

RS II. 5) Une radio dʼéchange

« Ce nʼest plus vous qui écoutez la radio, cʼest la radio qui vous écoute. » Claude Villers

II. 5) a) Lʼinteractivité comme moyen de placer lʼenfant au centre du média

À la question « Pourquoi aimiez-vous Superloustic ? » posée à ses anciens auditeurs, voilà quatre réponses recueillies : - « Et enfin, les enfants pouvaient s'exprimer ! » - « Toujours à l'écoute envers ses auditeurs » - « Pour les jeux » - « L'interactivité avec les Loustics »

La radio, plus que la TV, peut être un moyen dʼéchange entre lʼauditeur et lʼanimateur. Cʼest une des qualités essentielles de ce média, à lʼinstar de la presse écrite avec sa page de courrier des lecteurs. Lʼinteractivité peut créer entre les auditeurs un lien social, un esprit de communauté ; propice aux confidences dans le cas dʼune émission dʼécoute des problèmes dʼauditeurs, propice à la reconnaissance pour des jeux de culture générale, propice à la mise en confiance car lʼauditeur a une influence sur le déroulement de lʼémission.

Donner la parole à lʼauditeur est une marque de confiance extraordinaire pour lʼenfant. Lʼéditeur, en le proposant, perd le contrôle du contenu diffusé, tout en en étant responsable. Le standardiste et lʼanimateur, modérateurs des propos des intervenants, peuvent contrôler les dérapages sans pour autant les empêcher. Lʼenfant, en parlant à lʼantenne, obtient un pouvoir, une liberté dʼexpression qui ne lui est pas assez offerte dans le paysage médiatique actuel.

Lʼinteractivité doit être un des piliers centraux de la radio pour enfants. Cʼest la condition qui permettra un attachement de lʼenfant à sa station.

RQ II. 5) b) Les différents modes de partage à envisager

Des invités ou animateurs de radio La manière la plus directe dʼintégrer lʼauditeur dans le déroulement du programme est de le faire participer à un enregistrement ou un direct par le seul intermédiaire du micro. Lʼauditeur pourrait être un invité occasionnel dʼune émission ; dans des conditions spécifiques, il pourrait également endosser le rôle dʼanimateur : pour une manifestation extérieure via un duplex (dʼun salon ou festival pour la jeunesse par exemple), dans le cadre dʼune journée/semaine à thème...

Des interactions avec les radios et webradios créées par des élèves Le CLEMI (Centre de Liaison de lʼEnseignement et des Médias dʼInformation) répertorie pas moins dʼune trentaine de radios hertziennes, webradios et audioblogs diffusées par des jeunes (collèges et lycées) en France. Il serait tout à fait intéressant de faire un lien avec ces radios, qui pourraient préparer des émissions ou des fictions ou documentaires radiophoniques pour leurs cadets, ensuite diffusés sur la station. La porte serait alors ouverte alors à de nouvelles créations radiophoniques par des écoles élémentaires notamment.

Les inserts téléphoniques Lʼinsert téléphonique est le moyen le plus courant et le plus direct pour donner à lʼauditeur une place significative au sein de la radio. Grâce à la mise en place dʼun standard téléphonique, lʼenfant peut participer à des jeux (des questions de culture générale par exemple) ou poser une question, personnelle ou existentielle, source dʼun débat où auditeurs et animateurs peuvent intervenir. Les témoignages, à la manière de Carnets de campagne sur France Inter, sont également une piste à valoriser ; les enfants pourraient intervenir, mais également des professeurs, des parents, des organisateurs de festivals... Une émission de disques à la demande peut également être envisagée, intégrant la voix de lʼenfant ou non.

RM Internet : blogs, forums et livres dʼor Plusieurs espaces peuvent être créés à des fins dʼéchange sur le site Internet de la radio. Des relations auditeurs-auditeurs, auditeurs-animateurs, auditeurs- directeurs artistiques peuvent être développées par les blogs, forums et livres dʼor. Si les forums ont plus vocation à créer des discussions où les auditeurs seraient en autonomie, les blogs semblent plus appropriés car ils permettraient aux auditeurs de réagir à un thème ou à une émission lancé(e) par les auteurs de la radio. Le livre dʼor est autant un moyen pour lʼauditeur (enfant ou parent) dʼexprimer son opinion générale sur la radio que pour les auteurs, directeurs artistiques et animateurs dʼavoir des retours, peut-être constructifs, sur leur travail.

La traditionnelle voie postale Courriers et cartes postales peuvent être envoyés spontanément par les auditeurs au standard. Dessins, poèmes, anecdotes... peuvent être rapportés par les animateurs durant des plages dédiées.

Des enquêtes par téléphone ou par Internet Des enquêtes téléphoniques peuvent être réalisées pour connaître les désirs, les satisfactions et les idées des auditeurs. Les résultats dʼenquêtes permettraient de prendre en compte lʼavis du public concerné pour améliorer ou faire évoluer les programmes. Si le support du site Internet présente un net avantage dʼun point de vue pragmatique, il crée un certain tri des auditeurs interrogés, qui sont a priori tous des utilisateurs du site Internet. Les enquêtes téléphoniques permettent la sollicitation dʼun panel dʼauditeurs plus représentatif. Des concours Le public ciblé par la radio pour enfants est une source inépuisable dʼhistoires, de blagues, dʼimaginaires divers quʼil serait dommage de ne pas exploiter. Le but ne serait évidemment pas dʼutiliser de la main dʼœuvre bon marché, mais dʼinviter les enfants à écrire des histoires, des poèmes des chansons. On peut imaginer que le gagnant du concours verrait son histoire illustrée par de la musique et un habillage sonore, sa chanson orchestrée et enregistrée en studio. Le tout serait diffusé sur la station une ou plusieurs fois.

.H II. 6) La radio pour enfants dans le cadre familial

II. 6) a) Une radio qui plaît aux parents

« Bonjour, exaspérée par l'addiction a la télé de mon fils Louis 8 ans je cherche une chaine radio ou des programmes d'émissions radio pour les enfants. Cela existe- t-il ? Merci de votre aide »26

Lʼaddiction ou la consommation dʼécrans est un phénomène très décrié aujourdʼhui, car on en connaît les méfaits physiques pour lʼoeil et le bien-être corporel, mais également les méfaits moraux en cas de programmes abrutissants ou de zapping récurrent. Ce phénomène nʼest pas nouveau et, contrairement à lʼidée commune, les enfants ne regardent pas “de plus en plus” la TV. Il semblerait que la tendance stagne, dʼaprès les études menées par le CSA.

Avec une radio éducative, les parents ont une alternative à offrir à lʼenfant qui sʼennuie, et qui utilise la TV comme « bouche-trou » ou comme « tapisserie »27. En aucun cas la radio éducative pour enfants ne se place en opposante réactionnaire à la télévision ; dʼailleurs, elle ne saurait la remplacer. Les anciens auditeurs de Superloustic disent avoir regardé la TV au moins autant quʼécouté la radio pendant la période où celle-ci était diffusée.

Si lʼenfant ne va pas à la radio, ses parents peuvent la lui apporter. Aussi, si la radio plaît aux parents, ceux-ci se feront un plaisir dʼaccompagner leur enfant dans la découverte des programmes ou dans lʼexploration du site Internet de la radio, pour que lʼenfant y prenne ses repères. Dix-sept des vingt-trois auditeurs ayant répondu à lʼenquête sur lʼécoute de Superloustic disent quʼils ont découvert la station par hasard en cherchant sur la bande FM. Je ne saurais dire à quel point cela pourrait être vrai pour le cas de notre public, puisque les auditeurs interrogés avaient de 9 à ... 22 ans lorsquʼils écoutaient Superloustic !

26 lu sur un forum Internet

27 François Mariet, Laissez-les regarder la télévision, éd. Calmann Lévy, Paris, 1989

.! La radio pour enfants pourrait être également une radio familiale ; pour empêcher les écoutes “nocives” de stations non adaptées, la radio pour enfants pourrait tourner dans le salon, dans la salle à manger... sans le moindre risque ! Faire de notre radio pour enfants une radio familiale pourrait être un objectif intéressant à atteindre. Cela dit, il faut être vigilant quant à lʼorientation que lʼon souhaite prendre : la radio de lʼenfant, son espace personnel, ou un média qui réunit toute la famille ? Intégrant lʼinconnue de la présence de lʼadolescent dans les parties communes, peut- être réticent à lʼécoute dʼune telle radio, il semble que le choix nʼest peut-être pas à faire en amont de la création. Dʼaprès les différents témoignages dʼauditeurs et animateurs de Superloustic, on peut constater que les enfants y trouvaient un espace personnel mais que les parents ne se gênaient pas pour profiter de la qualité des programmes ! Il est même arrivé que des parents téléphonent au standard pour participer à des jeux radiophoniques, pendant que leur enfant était à lʼécole.

En tout cas, si lʼon veut offrir la possibilité de faire de la radio pour enfants une radio familiale, il me semble important de ne pas négliger les journaux dʼinformations, les rappels dʼheure et la météo, qui sont les trois facteurs communs des radios pour adultes. Ainsi le parent ne sera pas frustré de sacrifier sa radio de prédilection au profit de celle pour enfants. Aussi, le ton général de notre station ne doit être ni trop moralisateur ni trop puéril (dans le sens péjoratif du terme).

II. 6) Des outils pour réintégrer lʼenfant dans le cadre familial Les relations de transmission et de reproduction ont récemment laissé la place à des relations dʼéchanges, ce qui laisse une place bien plus conséquente aux moyens culturels extra-scolaires, car lʼenseignement suit toujours (pour lʼinstant) le schéma classique de lʼinformation à sens unique. La culture de la rue a décliné en même temps que lʼenvironnement domestique a donné plus dʼimportance aux

." médias28. En apportant du savoir à lʼenfant, sous forme dʼanecdotes ou de fictions, ainsi quʼune certaine culture, la radio pour enfants peut être le moteur dʼun tel échange.

Par la vulgarisation de lʼinformation et par lʼinvitation à réfléchir et débattre sur des thèmes philosophiques, existentiels ou du quotidien, la radio donne à lʼenfant des armes pour faire sa place dans une conversation familiale. Il est évident, encore une fois, que la radio ne déplacera pas des montagnes, car bien dʼautres facteurs sont en jeux, mais elle ne saurait quʼenrichir les rapports. Les enfants ne sont pas des adultes, mais la différence ne saurait les empêcher dʼavoir des discussions.

Contrairement à Internet qui, même utilisé par des moins de dix ans, ne peut pas toujours être contrôlé par les parents, il semble que la radio soit un support dont les parents peuvent suivre lʼinteractivité. Quʼelle soit une radio familiale ou personnelle, elle laisse au parent un droit de regard sur lʼutilisation quʼil fait de lʼinteractivité proposée.

Notons quʼen plus de cela, le parent, qui fait finalement indirectement partie du public ciblé par la radio, peut y découvrir les préoccupations de son enfant, de même que lʼenfant découvre les activités adultes par des programmes radiophoniques ou télévisuels.

Il peut dʼailleurs être opportun de consacrer un espace parents sur le site de la radio pour proposer des idées, ou débattre entre parents, sur lʼéchange des cultures adulte et enfantine.

28 Sonia LIVINGSTONE, “From family television to bedroom culture : young peopleʼs media at home”, in Eoin DEVEREUX : Media studies : Key issues and debates, Sage Publications Ltd, Thousand Oaks (USA), 2007

.# II. 6) Les limites de la radio

Nous nous devons de parler des effets négatifs que pourrait produire une radio éducative pour enfants. Je pense à lʼaddiction et à lʼisolement quʼelle pourrait provoquer chez lʼauditeur. Sous prétexte quʼelle serait enrichissante, il ne faudrait pas laisser la radio prendre une place trop importante dans le cadre familial.

Forte de son inscription dans les médias de flux et dans les relations sociales virtuelles (par le site Internet de la radio), elle profitera de la mode lancée de ce type de supports. Mais elle ne doit pas reproduire les mêmes défauts. Idéalement, lʼauditeur écouterait la radio en compagnie dʼautres personnes, sauf sʼil est seul à la maison, ce qui est rarement le cas chez les moins de 10 ans. Idéalement encore, la radio serait un lien dans la fratrie et vers lʼextérieur. Cependant, on ne peut pas négliger le fait quʼelle comporte un risque dʼisolement de lʼenfant, contre lequel les parents seuls devront faire face.

Lʼaddiction dont pourrait être responsable la radio ne concerne pas une émission ou un animateur, ce qui semblerait peu probable (une fidélisation serait plus appropriée) ; cʼest lʼaddiction au bruit de fond qui peut découler dʼune écoute trop régulière. Lʼoreille a besoin de repos, et le cerveau de silence. Lʼavantage de la TV, si jʼose dire, est quʼon lʼéteint -en général- lorsque lʼon a besoin de ses yeux. Si la radio tourne en continu, elle peut devenir un poison pour la famille lassée.

Enfin, la radio, riche de conseils, de fictions et dʼhistoires pour sʼendormir, ne doit pas suppléer les parents. Elle nʼest quʼun troisième interlocuteur, une entité pédagogique de périphérie qui ne saurait prendre lʼascendant sur le parent et lʼenseignant. Il paraît opportun dʼencourager les parents à participer à la vie de la radio et à lʼinteractivité quʼelle propose, mais aussi à veiller à laisser la radio au rang de complément éducatif, via un espace dédié sur le site Internet de la station.

.$ II. 7) Un outil de promotion de la culture enfantine II. 7) a) La musique et le théâtre

Encore aujourdʼhui en France, où Internet est largement démocratisé, la radio reste lʼun des principaux moyens de promotion culturelle, et notamment de promotion musicale.

La musique pour enfants est un secteur de production particulièrement dynamique, notamment grâce au succès des festivals et concerts donnés à ce public. Cependant, les chanteurs et musiciens pour enfants sont assimilables, parfois malgré eux, aux artistes indépendants, par lʼabsence ou quasi-absence de médiatisation. La radio est un excellent outil de promotion musicale, plus efficace en tout cas que la presse enfantine. Il faut créer ce partenariat entre la radio pour enfants et les sociétés de production de groupes de musique pour enfants : Au Merle Moqueur, Graml, Pirates production...

Alors que certains groupes ont déjà arrêté la production dʼalbums pour se consacrer à la scène, dont le piratage nʼa pas encore ôté la lucrativité, la radio, grâce à la SACEM, reste un moyen sûr de rémunérer les artistes. Les artistes musiciens ont tout à gagner avec la création dʼune radio officiellement déclarée !

De la même manière, des pièces de théâtre pour enfants peuvent être promues par la radio, dʼune part par des annonces dédiées, mais dʼautre part par des extraits de pièces choisis et diffusés.

Médiatisés par une radio destinée aux enfants, les groupes de musique et de théâtre seront directement appréciés par eux ; ainsi les enfants peuvent être demandeurs de concerts et représentations théâtrales, devenant ainsi acteurs de leur propre culture. Les parents ne sont plus quʼun intermédiaire pragmatique entre artiste et public.

.R II. 7) b) Livres, jeux et curiosités

En France, les livres jeunesse sont très en vogue depuis déjà plusieurs décennies (déjà en 1961, Tomi Ungerer connaissait un réel succès avec Les trois brigands). Le Salon du Livre et de la Presse jeunesse, créé en 1984, reçoit chaque année à Montreuil plus de 100 000 visiteurs : enfants, parents, professionnels, curieux... La TV ne diffusant guère de spots publicitaires pour des nouvelles sorties littéraires, la radio éducative peut les faire découvrir à lʼauditeur. Sʼil nʼest pas abonné à la presse enfantine, ce sont ses parents qui choisissent ses livres ; de la même manière, Denis Chessoux, dans son émission Lʼas-tu lu mon petit loup ? (France Inter), sʼadresse directement aux parents. À six ans, lʼenfant découvre la lecture et peut choisir ses propres livres sʼil sait ce qui paraît. Dans des familles où la lecture nʼest pas mise en avant, la radio peut donner lʼenvie, voire lʼidée de se pencher sur cet outil de culture.

De manière générale, il est intéressant de créer un pont entre les différentes cultures, qui ne saurait que renforcer la médiatisation, ou la publicité. Ainsi, le jeu de société ou le jouet, dont la promotion est reléguée aux catalogues commerciaux, peut très bien faire lʼobjet de publicités sonores, car il est source dʼimaginaires riches.

Enfin, les curiosités à visiter, expositions temporaires ou événements culturels peuvent être annoncés via la radio, outil plus apte quʼaucun autre à lʼinvitation temporalisée, par son ancrage dans le présent.

La radio a une place importante comme média de promotion, et une radio pour enfants peut ouvrir le rideau derrière se cachent beaucoup dʼartistes de lʼombre.

.. II. Conclusion sur les intérêts dʼune radio pour enfants

Tous ces intérêts dʼune radio éducative pour enfants de 6 à 10 ans sʼappliquent à tout type de programme radiophonique, tant quʼil respecte une ligne éditoriale “éducative” et tient compte du public ciblé.

Dans la troisième partie de ce mémoire, je décrirai ma partie pratique de mémoire, cʼest-à-dire la conception personnelle dʼune radio éducative pour enfants et la réalisation dʼune journée de programmes, que je ferai écouter à plusieurs 6-10 ans.

.S III. Conception dʼun exemple de radio éducative pour enfants et réalisation dʼune journée de programme diffusée sur le site de la radio

III. 1) Les fondamentaux

Avant de construire une proposition de grille de programmes, je tiens à soulever les questions que pose la responsabilité de lʼapprentissage de lʼécoute. Pour les auditeurs de la tranche dʼâge ciblée, la radio que je conçois sera probablement la première quʼils écouteront dans leur vie. Elle mérite donc quʼon se penche sur des questions de déontologie. Construisons dʼabord un code de déontologie professionnelle appliquée au milieu restreint quʼest la radio pour enfants.

• Le technicien de radio se doit dʼêtre exigeant sur la qualité du son quʼil émet, par respect pour lʼauditeur ainsi que pour son milieu professionnel, qui pâtirait de voir se dégrader la sensibilité auditive des auditeurs, et de ce fait la considération de la profession.

• Lʼanimateur doit employer un langage correct, sans pour autant tomber dans la niaiserie ni le “politiquement correct” ; il est une référence pour lʼenfant et doit utiliser son influence à bon escient.

• La radio étant destinée aux enfants, il est normal de leur réserver le “service clients” ; un point dʼécoute de lʼauditeur doit être créé, lʼavis de ce dernier doit être entendu, et pris en compte selon sa cohérence avec la ligne éditoriale. Lʼauditeur, premier “client” de la radio, doit avoir un pouvoir sur lʼélaboration des programmes.

• Le contenu des émissions doit comporter une part de discours constructif sinon éducatif afin de ne pas ressembler aux programmes médiatiques abrutissants, déjà trop nombreux.

.Q Voilà deux questions qui me semblent essentiel de soulever avant de concevoir la ligne éditoriale dʼune radio pour enfants :

La radio peut-elle avoir une appartenance politique ou religieuse ? Commençons par des questions faciles. Si lʼon refuse toute manipulation des médias, il paraît nécessaire de ne pas assujettir les enfants à nos idées politiques ou à nos convictions religieuses, afin de laisser ce rôle aux parents. Jʼappose donc la réponse NON. Cependant, en aucun cas il serait exclu dʼencourager des valeurs objectives, comme les valeurs fondamentales judéo-chrétiennes ou humanistes, à savoir la solidarité, la tolérance... Il est également tout à fait intéressant dʼintégrer dans certaines émissions de lʼenseignement politique ou religieux, en privilégiant les explications de faits historiques ou du fonctionnement dʼinstitutions et en trouvant un équilibre entre les différents partis et religions.

Quelle liberté peut-on prendre quant au choix des musiques ? 1) Lʼintégration de toute musique dont le clip associé contiendrait des violences, des vulgarités ou relevant de mœurs légères est à proscrire. Les critères ne sont pas objectifs, aussi lʼéquipe de direction artistique doit se porter garante du bon respect de cette règle. 2) Les chansons comportant dans les paroles des violences verbales ou des grossièretés gratuites ne seront évidemment pas diffusées, de même que pour les chansons aux paroles vulgaires, ou à caractère amoral. 3) Certaines chansons partisanes ou calomnieuses pourront être utilisées dans le cadre dʼémissions culturelles, toujours accompagnées dʼexplications du contexte et de mises en garde.

***************************************

Ma partie pratique de mémoire consiste en lʼélaboration dʼune grille de programmes sur une semaine ainsi quʼen une production dʼun exemple de journée sur la station. Je choisis de produire une journée de semaine, de 7h du matin à 22h.

.M La journée enregistrée et diffusée suit les lignes globales du projet de radio que je conçois, mais les conditions techniques en limiteront certains aspects : la qualité, le direct, la publicité (imposée par Radionomy, outil Internet de création et diffusion de webradios).

Dʼautre part, je ne me soucie pas, pour la radio que je crée comme pour la partie pratique de mémoire, des moyens humains ni des questions économiques contraignant la réalisation dʼune “vraie” radio, afin de me concentrer sur la création. Pour créer une radio dʼune dimension semblable à celle que je propose, il faudrait constituer une équipe de pas moins de six animateurs salariés, un directeur artistique, un gérant, trois techniciens du son, un standardiste, et quelques prestataires de service pour les remplacements dʼanimateurs ou techniciens, la création du site Internet, la maintenance... Il semble quʼau vu des échecs quʼont essuyés diverses tentatives de créations de radios officielles, une radio pour enfants ne saurait commencer avec un contenu aussi dense ; cependant, un programme de cette ampleur serait un objectif à viser.

III. 1) a) Lʼancrage dans lʼactualité

Mon idée de radio sʼinscrit dans un objectif de revalorisation de ce média aux yeux - ou devrais-je dire aux oreilles - des plus jeunes. Afin de créer un lien étroit entre lʼauditeur et sa station de radio, le rythme du programme tiendra compte du quotidien de lʼenfant. Ainsi la journée se verra ponctuée de journaux dʼinformations, de météo, et de jingles réguliers reconnaissables. Lʼenfant nʼayant souvent que peu de repères temporels et chronologiques, il sera intéressant de rappeler régulièrement lʼheure et le jour, en particulier le matin avant le départ à lʼécole. De même, les jours fériés, anniversaires, de solstices, dʼéquinoxes etc... seront lʼoccasion de journées à thèmes.

À une plus grande échelle, lʼactualité nous ramène au monde extérieur, aux événements qui surviennent dans le présent. Les moyens dʼinformation sont tels aujourdʼhui quʼil serait dommage de se priver de la présence dʼun journal sur une station de radio. Les enfants aussi ont le droit de sʼintéresser au monde, et

SH commencer jeune par une approche simplifiée leur facilitera probablement, en temps voulu, lʼaccès à lʼactualité des adultes. Me basant sur les arguments donnés dans la première partie de ce mémoire, je souhaite donner une place importante à lʼactualité, quʼelle soit politique, culturelle, ou dʼinitiatives.

Si les journaux dʼinformation doivent être adaptés au niveau de compréhension de lʼenfant, il est également nécessaire de sélectionner les sujets. Pour cela, les journaux pour enfants peuvent être dʼune grande utilité. Il ne sʼagit pas de traiter toutes les informations “des grands” et de les simplifier pour les rendre compréhensibles ; ce serait traiter lʼenfant en sous-adulte. Il existe de nombreux sujets qui intéressent les plus jeunes, jugés futiles par certaines grandes personnes, tels lʼactualité du jeu, du film dʼanimation, ou différentes initiatives lancées par des jeunes ou des classes. Au-delà dʼinformer, les informations pourraient susciter des ambitions. En outre, nous choisirons une orientation globale plutôt positive, dans la perspective de préserver lʼoptimisme naturel et ainsi susciter lʼenvie dʼagir, contrairement à un journal télévisé (pour adultes) qui nous laisse souvent perplexes quant à notre capacité à changer les choses, ou dépités face à lʼavenir.

Enfin, puisque la notion de temporalité nʼa de sens que située dans un contexte spatial, précisions la position de la radio. Elle se réclame de portée universelle, sans marqueur local. La France, et dʼautant plus la France métropolitaine, est le contexte dans lequel elle évolue, et elle ne saurait briser complètement ce cadre, par le simple fait de la langue utilisée par exemple. Cependant, on veillera à ne pas limiter les indices spatiaux à certaines zones géographiques, comme le font certaines stations de radio nationales parisianistes. Aussi, si lʼheure donnée est a priori celle du fuseau horaire UTC+1 (le fuseau horaire de la France Métropolitaine), on peut donner de temps en temps lʼheure dans les DOM-TOM ou dans dʼautres pays encore.

III. 1) b) Privilégier la qualité technique

De nombreuses initiatives de webradios pour enfants sont audibles sur la toile, fortes de leur originalité. Malheureusement, la qualité technique, pour certaines, laisse

S! à désirer... Si la qualité technique est loin dʼimpliquer à elle seule un succès en audience, elle est toutefois nécessaire pour y accéder. Cʼest selon moi un point à ne pas négliger pour deux raisons. La première, très pragmatique, concerne lʼéquipe dʼanimation et de technique. Si lʼauditeur nʼest pas toujours sensible à la qualité du signal, on peut attendre du technicien quʼil le soit. Celui-ci sera sans aucun doute plus enthousiaste pour un tel projet, sʼil sait quʼil peut sʼy épanouir professionnellement, cʼest-à-dire si les moyens lui permettent de réaliser un travail digne de ses compétences. Aussi pour faire tourner le studio, investir dans la qualité peut se montrer dʼune véritable efficacité.

La deuxième raison concerne lʼéducation du jeune à la qualité. Il serait ambitieux, voire prétentieux, dʼimaginer faire changer les conditions dʼécoute auxquelles les auditeurs sont peut-être déjà habitués. Une station de radio ne saurait guère permettre un revirement soudain des exigences des jeunes et de leurs parents. Il paraît assez inévitable que la radio pour enfants sera écoutée, comme beaucoup dʼautres, sur un autoradio ou un radioréveil qui ne capte que très modestement, un poste situé au milieu des discussions de la cuisine, un baladeur muni de deux écouteurs bon marché, deux enceintes mal placées dans le meilleur des cas... Si les moyens dont on dispose lorsquʼon démarre une radio sont rarement à la hauteur des talents des créateurs (tous vous le diront !), il est nécessaire de ne pas lésiner sur le matériel à utiliser ni sur les exigences. Il est aisé de se laisser avoir par cette réaction : “Ce nʼest pas grave, personne nʼy fera attention”, ou “Ça ne passe quʼune fois, on sʼen moque”, mais veiller toujours à une bonne facture fera peut-être la différence pour réussir à faire perdurer la radio. Il faut aussi absolument éradiquer lʼidée reçue que les enfants ne sont pas sensibles à la qualité ; au contraire, avant 10 ans, les sens sont à la fleur de lʼépanouissement. Beaucoup de parents disent quʼà cet âge-là “ils entendent tout”. De fait, lʼoreille nʼest pas encore formatée, elle est encore presque vierge de toute “mauvaise” habitude dʼécoute. De plus, lʼenfant a moins cette tendance quʼa lʼadulte à remettre les perceptions dans leur contexte : “Vu les moyens de production, les résultats sont respectables”...

Cʼest une lourde responsabilité dʼavoir à occuper les oreilles des plus jeunes, et pour ne pas faillir, il est de notre devoir de ne pas habituer lʼenfant à la médiocrité. Sʼil

S" paraît difficile dʼempêcher quelquʼun de choisir le bas de gamme par facilité, le professionnel de la technique ne peut pas, déontologiquement, se permettre dʼalimenter lʼenfant en mauvais son.

Mon projet de radio, inscrit dans la lignée de mes études à lʼÉcole Louis Lumière, se veut digne de lʼexigence technique à laquelle les enseignants nous sensibilisent, et je tiens à ce quʼil ne tombe pas dans le piège facile de la médiocrité.

Aussi les montages seront soignés, ainsi que les mixages. La compression sera moindre, et le critère de sélection des produits sonores diffusés (musiques, fictions radio, reportages) prendra en considération lʼexigence qualitative de la station. Malheureusement, le cadre de cet exercice de partie pratique ne permettra pas une diffusion à la hauteur de ce que nous souhaiterions, utilisant le support Radionomy pour la diffusion ; quant aux produits, je nʼexclus pas dʼutiliser quelques formats mp3, pas toujours de la meilleure facture. Je nʼexploiterai pas la stéréo qui semble secondaire pour commencer, mais me concentrerai sur la nature des sons (timbres, résonance...), et le rythme du montage.

Jʼutiliserai pour lʼenregistrement un micro large membrane T-Bone SC-1100, pour capter la rondeur de la voix. Lʼenregistrement se fera directement sur un Macbook, via une carte son Motu UltraLite Mk3. Le montage et le mixage se feront sur le logiciel Cubase.

III. 1) c) Susciter des sens et des sensations

Bien trop souvent, à la radio, on entend les animateurs tenir ce genre de propos : “Cʼest dommage, vous ne pouvez pas voir, mais Untel est habillé de telle manière” ou “Il faudrait une caméra pour montrer aux auditeurs la tête que vous faites”. Cʼest une vision terriblement réductrice de la radio que je rejette ardemment ! Lʼabsence dʼimage est une richesse inouïe, à condition de savoir manier le son.

S# Lʼouïe doit être nourrie par différents éléments ; il serait frustrant de se contenter de la parole, pour autant pilier central de la radio. Bruiteurs, sonothèques, monteurs son, les moyens sont multiples pour agrémenter les discours dʼanimateurs et de narrateurs. Si les fictions radiophoniques sont le support qui me paraît le plus propice à ce genre de travail dʼornementation, certaines émissions peuvent également y être adaptées, comme lʼémission dʼhistoire que je propose.

Ce que jʼappelle ornementations sonores rassemble tous les effets, bruitages ou paysages sonores qui contribuent à placer le discours dans un certain contexte. Ainsi une fiction se déroulant dans la forêt amazonienne ne saurait se limiter à une ou plusieurs voix en interaction ; elle donnerait à entendre lʼambiance de cette forêt, le vent dans les feuilles, les oiseaux, de lʼeau, la présence éventuelle dʼanimaux... De même quʼon imagine mal un reportage sur un maréchal-ferrant sans bruits de marteaux ou hennissements. Ce sont ces restitutions dʼambiances sonores qui suscitent chez lʼauditeur des images très claires. Jʼaimerais citer en illustration une reconstitution sonore de la place des Abbesses à Paris, réalisée lʼannée dernière par Rémi Chanaud dans le cadre de son mémoire de fin dʼétudes à Louis Lumière. Utilisant les technologies modernes pour nous placer virtuellement et efficacement au cœur de la place des Abbesses, il a reconstruit lʼactivité sonore du lieu à différentes époques données. Ce nʼest pas la notion du temps, dʼévolution sonore qui mʼintéresse ici, même si cʼest le point central du travail du réalisateur. Cʼest la sensation que lʼécoute du produit final mʼa procurée que je souhaite rapporter : elle mʼa mis en tête des images précises, des images de lieux que je ne connaissais pas. Sensible au son, je suis aussi particulièrement sensible aux créations de lʼimaginaire quʼil peut provoquer ; pour cette raison, ainsi que pour lʼambition de faire travailler lʼimaginaire de lʼenfant, je prévois dans mon programme des émissions propices à la restitution dʼunivers et de paysages sonores.

Il ne faut pas oublier de parler des émissions “traditionnelles”, celles dont le paysage nʼest autre que le studio de radio lui-même. Comme je lʼécrivais plus haut, la parole est le pilier du média radio. Il nʼest pas question donc de négliger son importance. En outre, les mots peuvent appeler à la création dʼimages lorsquʼils sʼappliquent à décrire, à lʼinstar de la chronique hebdomadaire Un musée dans

S$ lʼoreille, diffusée sur France Inter, dans laquelle Maxime Paz décrit une œuvre dʼart. Décrire la tenue dʼun invité, décrire un dessin envoyé au standard par un auditeur, décrire la couverture dʼun livre...

Enfin, la radio que je conçois proposera chaque mois un concours dʼécriture de contes, fictions, poèmes, pièces de théâtre ou chansons sur un thème donné. Les auditeurs sont invités à envoyer leurs travaux, dont le plus original se verra diffusé à la radio (enregistré ou lu par un animateur) ; les autres pourront être publiés sur le site de la radio.

Je tiens beaucoup à cette notion dʼinvitation au travail dʼimagination et la retranscris dans les bases de la ligne éditoriale.

III. 1) d) Choix de la ligne éditoriale

Si je devais “mʼinspirer” (ou faire le plagiat honteux) dʼune ligne éditoriale existante, ce serait celle-ci : « Une mission de radio généraliste : informer, éduquer, distraire, avec lʼexigence constante de la qualité ; une indépendance éditoriale qui laisse place à la pluralité des points de vue ; ouverte sur le monde, la station privilégie lʼoffre, la création : la différence. » (ligne éditoriale de France Inter)

Ajoutons à cela lʼambition dʼélever lʼenfant, de lʼencourager à lʼactivité constructive, à lʼouverture et à lʼépanouissement social. Notons, de plus, que ces critères sont appliqués dans le respect des besoins et des choix de lʼenfant, dans un langage et à un niveau adapté.

La radio pour enfants que je conçois sʼinscrit dans un paysage relativement clairsemé ; il faut tenir compte de cette considération pour élaborer sa ligne éditoriale. En effet, le paysage des radios pour adultes offre un large panel de choix à chacun, en fonction de sa nature, de sa culture, de son éducation, de ses goûts... Il se trouve

SR que, dans notre cas, le panel est nettement plus étroit et quʼil ne faudrait pas le restreindre par des choix un peu trop étriqués. Dʼailleurs, si notre radio est éducative, elle nʼest pas pour autant “scolaire” ; elle ne doit pas, par des émissions particulièrement techniques, savantes, ou trop “scolaires”, exclure ou lasser les auditeurs. Unique en son genre, elle a la vocation première dʼouvrir les horizons des enfants en les distrayant, sans distinction de milieu : classe sociale, catégorie socio- professionnelle, origine ethnique, famille nombreuse ou enfant unique...

Elle se donne trois missions principales : 1) nourrir sainement les oreilles ; 2) chatouiller les zygomatiques ; 3) stimuler la matière grise.

La radio doit également avoir sa propre identité. Un de ses objectifs est de devenir le compagnon de lʼenfant dans son quotidien ; aussi lʼauditeur doit pouvoir reconnaître “sa” station, sʼen imprégner, sʼen emparer. Cette identification de la radio passera par le contenu et la ligne éditoriale, mais également par la couleur de radio choisie.

La publicité sera minimale, et privilégiera les produits ou événements culturels, tels des jeux de société ou des expositions, plutôt que des produits alimentaires ou issus du star-system. En lʼoccurrence, pour la journée de programme que je crée et diffuserai par Internet, la publicité sera choisie et imposée par Radionomy.

Le contenu de la radio sera diffusé en suivant deux lignes générales, que sont la fiction et lʼhumour.

S. III. 2) Grille de programmes, contenus et intentions de la Zigoradio

III. 2) a) Lʼinstauration dʼun imaginaire

Afin de donner une identité forte à la radio, je souhaite intégrer les contenus dans un imaginaire. En lʼoccurrence, pour garder lʼaspect généraliste de la station, jʼai choisi un thème large, inspiré par lʼun des thèmes favoris des enfants : les extra- terrestres à noms farfelus.

Deux extra-terrestres de la planète Zigom ont atterri dans le studio avec leur ami Zigo, un étrange appareil qui permet de transmettre du son à ce quʼils appellent des Zigoditeurs. Ces deux personnages, nommés Gom et Tik, souhaitent découvrir le monde sur lequel ils sont tombés par hasard, mais qui commence déjà à leur plaire.

Chaque matin, de 7h à 9h, Gom et Tik prennent les commandes de la station pour réveiller les Zigoditeurs. Tik, le jeune excentrique, est curieux et bavard, cʼest lui qui amène les sujets de conversation. Le vieux Gom, plus posé, se charge de contrebalancer ; il est le clown blanc et Tik lʼAuguste. Détail pragmatique : Zigo est responsable de tous les problèmes techniques !

Ce sont ces trois personnages qui annoncent les émissions en prêtant leur voix aux génériques. Curieux du monde, ils réclament aux animateurs des explications sur les phénomènes naturels, lʼactualité, lʼHistoire etc...

La voix de Gom est posée, voire lourde, légèrement caricaturale. Tik parle vite et son timbre de voix est plus aigu. Leur ami Zigo ne sʼexprime quʼavec des sons caractéristiques de radio hertzienne analogique : fréquence brouillée, tuner quʼon règle, jingles divers qui interfèrent... Les voix seront naturelles ou très légèrement modifiées, pour ne pas lasser lʼenfant ni le parent avec des caricatures lourdes.

Les animateurs pourront interpeller les extra-terrestres pour lancer les génériques, mais les enfants restent les auditeurs premiers, et les protagonistes ne seront en aucun cas un intermédiaire entre lʼanimateur et lʼenfant.

SS Dans le cas dʼune concrétisation de la radio éducative, lʼanimateur responsable des deux voix de Gom et Tik (ou les deux animateurs si besoin) pourrait être le seul faiseur de directs.

III. 2) b) La grille de programmes

La Zigoradio émettra de 7h du matin à 23h. Les horaires suivent le rythme de la journée scolaire dʼun enfant. On sait, dʼaprès les travaux dʼOlivier Galland retranscrits dans son ouvrage Sociologie de la jeunesse29, quʼune bonne moitié des plus jeunes (6 ans) sont couchés avant 21h (52%), alors que 42% se couchent entre 21h et 22h30. Chez les enfants de 10 ans, 31% sont couchés avant 21h, 61% entre 21h et 22h30. Aussi, la station diffusera des programmes plus calmes de 20h à 23h.

Lundi à vendredi Samedi Dimanche

Quand Gom et Tik 7h - 9h prennent les Croque ta biscotte Croque ta biscotte commandes

Par monts et par La tête dans les 9h - 11h30 5 sur 5 vaux nuages

11h30 - 14h Zigo fait son show Zigo fait son show Zigo fait son show

Les disques à la 14h - 17h Sur le flux Le Momanga demande

Gom et Tik au 17h - 20h Le goût du bagou Écoutez la télé ! concert

20h - 21h Au coin du feu Sous les étoiles Sous les étoiles 21h - 23h Sous les étoiles

La plage du 7-9 propose des moments dʼinformations, diverses blagues et improvisations des deux animateurs Gom et Tik. Croque ta biscotte est une émission équivalente, mais présentée par dʼautres animateurs.

29 Olivier Galland, op. cité, éd. Armand Collin, Paris, 2011

SQ De 9h à 11h30, en semaine, les enfants sont a priori à lʼécole, et nous profitons de ce moment pour diffuser des émissions culturelles. Les programmes sont, à cette heure-là, utilisables par les professeurs des écoles, et peuvent également être écoutés par les élèves absents ou non scolarisés. Par monts et par vaux présente chaque semaine un nouveau lieu. La tête dans les nuages est une émission de réveil, qui diffuse des chansons dynamiques ; lʼanimateur y est chargé de créer un “liant” entre les musiques diffusées.

Le midi, informations décortiquées, météos et chansons sont annoncées par une animatrice en direct, aidée par Zigo le transmetteur.

Sur le flux reprend le même type de contenus que 5 sur 5. Le Momanga (moment manga) et Les disques à la demande sont programmés les après-midi du week-end parce quʼon peut présager pour de telles émissions, dʼaprès les témoignages des anciens Loustics, dʼune audience intéressante. Ainsi le week-end nʼest pas une période de creux.

À 17h, place à un animateur charismatique qui amusera les enfants, les divertira en proposant des jeux, énigmes, blagues et un feuilleton radiophonique participatif (détail dans la partie consacrée aux émissions). Le samedi, 17h marque le début dʼun concert retransmis sur la station, et le dimanche, cʼest lʼheure dʼune séquence orientée sur le thème du dessin animé.

La tranche 20-23h est consacrée au coucher ; une animatrice raconte une histoire, par-dessus un tapis sonore de feu qui crépite dans la nuit, et des chansons et morceaux de musique calmes clôturent la soirée. Lʼhistoire peut être musicale, à la manière de Pierre et le loup, de Serge Prokofiev ou de lʼémission Des histoires en musique, présentée par Élodie Fondacci sur Radio Classique. Les contes et histoires ne sont pas tous des sorties récentes car ce serait trop contraignant.

Aucune diffusion nʼest prévue la nuit car elle serait coûteuse et peu utile. Tenant compte de la durée de concentration auditive de lʼenfant, chiffrée à 2ʼ30ʼʻ par des chercheurs en pédopsychologie, les formats ne dépassent pas 5

SM minutes sans interlude ; nous estimons que si la parole est agrémentée de pauses musicales ou dʼeffets sonores, lʼenfant peut écouter plus que 2ʼ30ʼʼ, comme il est capable dʼécouter une histoire pendant dix minutes sʼil en a les illustrations sous les yeux.

III. 2) c) Émissions culturelles et chroniques

Les émissions et chroniques sont présentées par des animateurs au sein même des tranches horaires dont ils ont la charge ; elles se démarquent donc par des génériques spécifiques et des ambiances sonores différentes du reste de la tranche horaire.

Au fil de lʼhistoire (à 10h du lundi au vendredi) Cette émission propose une approche originale de lʼhistoire, en retraçant lʼévolution dʼun thème au cours des époques. Un même sujet est développé sur les cinq émissions dʼune même semaine. Les périodes temporelles sont choisies en fonction de leur pertinence. Lʼémission prend la forme dʼune balade en pirogue sur le fleuve Histoire, où les auditeurs sont transportés par le courant. Lʼeau comme symbole du temps qui passe, symbole du son qui file au rythme des heures, des minutes, des secondes. Une ambiance sonore traduit cette croisière dans le temps. Des chansons ou musiques illustratives agrémentent le discours du présentateur, ainsi que des extraits de films, pièces de théâtre ou autres extraits sonores éventuels. Bien que les cinq épisodes de la semaine forment un tout, il est possible de nʼécouter que lʼun ou lʼautre ; du mardi au vendredi, un résumé des épisodes précédents est proposé à chaque début dʼémission.

Le plus beau métier du monde (à 11h du lundi au vendredi) Le plus beau métier du monde, cʼest celui quʼon a choisi. Cʼest le “log line pitch” de cette émission qui, chaque jour, présente un métier ; un professionnel vient décrire son quotidien, et un reportage sonore peut être réalisé en fonction de lʼambiance de travail (plus pertinent pour un menuisier que pour un écrivain). Lʼanimateur pose à lʼinvité des questions précises et concrètes pour orienter lʼinterview sur des éléments qui parlent aux enfants. Les métiers mis en exergue iront du plus “ordinaire” au plus

QH méconnu. Lʼobjectif est double : découvrir des métiers originaux et se mettre dans la peau dʼun professionnel.

Il faudra quʼon mʼexplique (à 15h du lundi au vendredi) Lʼanimatrice de Sur le flux explique des phénomènes et concepts scientifiques, explorant la planète, lʼenvironnement, lʼhistoire de la physique, les nouvelles technologies... Il faudra quʼon mʼexplique est une plage consacrée à lʼétude des sciences, assouvissant les esprits curieux, distrayant les autres par ses musiques (sélectionnées en fonction du thème), et ses volutes sonores. Lʼapproche adoptée est concrète, mais les sujets abordés peuvent aller toucher lʼinfini et lʼespace intersidéral.

Photomaton (à 16h du lundi au vendredi) Comme son nom lʼindique, le photomaton voit entrer un personnage dans la cabine et en réalise un portrait. Sur Zigoradio, cʼest lʼanimatrice qui nous raconte la vie dʼun personnage, historique, de fiction ou contemporain. Dʼun ton romanesque, elle retrace sa vie, son oeuvre, et la trace quʼil a laissée. Éventuellement, des extraits sonores peuvent être diffusés, et plus particulièrement sʼil existe des archives de la voix du personnage.

Le goût du bagou (de 17h à 20h, du lundi au vendredi) Place à lʼinteractivité avec le prince du bagou. Un jeu auquel les Zigoditeurs participent par téléphone, un feuilleton radiophonique participatif, une séquence de témoignage, cʼest Le goût du bagou. Le jeu consiste en une série de questions de culture générale, où lʼauditeur a pour seul concurrent le sablier. Le feuilleton est basé sur le principe dʼune de ces séries qui enchaînent les saisons, cʼest-à-dire que la fin de lʼhistoire nʼest pas prévue à lʼavance, ni même datée ; chaque jour, les Zigoditeurs sont invités à soumettre par Internet leurs idées de péripéties pour faire avancer lʼintrigue, et lʼanimateur sélectionne arbitrairement une réponse parmi celles qui sont cohérentes et réalisables. Chaque jour, un auditeur témoigne dʼune action, ou activité quʼil a réalisée, quel que soit le domaine auquel elle appartient.

Q! Par monts et par vaux (chaque samedi, de 9h à 11h30) Cette plage horaire est dédiée à la visite dʼun lieu, en France ou ailleurs ; lʼanimateur est enregistré en studio mais présente le lieu comme sʼil y était grâce à la description de paysages photographiques, reportages... Des reportages sonores dʼévénements caractérisant le lieu en question sont diffusés, ainsi que des paysages sonores si les lieux sʼy prêtent (reconnaissables ou au moins particuliers quant à lʼambiance sonore : marché de campagne, terrain de basket en banlieue, salle de bain...). Cette émission donne également lʼopportunité de diffuser des musiques traditionnelles du monde.

Le Momanga (chaque samedi, de 14h à 17h) La plage horaire du samedi après-midi est consacrée au Manga et comprend la diffusion exclusive de génériques dʼ“animés” (séries dʼanimation japonaises) et dʼinformations relatives au Manga : histoire, actualité, auteurs, techniques...

Gom et Tik au concert (chaque samedi, de 17h à 20h) Gom et Tik vont toutes les semaines à un concert de chanson pour enfants, quʼils nous font partager par une rediffusion le samedi.

À vos bafouilles (chaque dimanche à 16h) Cette chronique quotidienne a pour objet la mise en ondes des courriers des auditeurs. Poèmes, histoires, témoignages ou dessins sont relatés par lʼanimateur.

Les disques à la demande (chaque dimanche, de 14h à 17h) Les auditeurs sont invités à appeler pour demander les titres quʼils voudraient écouter, et éventuellement dédicacer leur diffusion. Tout au long de cette plage horaire, des billets dʼactualité de lʼalbum jeunesse, du film, de la BD et du jouet sont proposés.

Écoutez la télé ! (chaque dimanche, de 17h à 20h) Pour finir le week-end, un personnage de dessin animé est invité à venir interagir avec lʼanimateur de lʼémission Écoutez la télé !. Les discussions peuvent porter sur le personnage, mais ne sont pas limitées en terme de contenus.

Q" Chaque jour sont diffusés, régulièrement, des flash infos (matin, midi et soir), des blagues (racontées par les auditeurs sur un répondeur téléphonique puis retransmises), et des bulletins météo.

Enfin, à la fin de chaque tranche horaire, cinq minutes sont consacrées à un genre musical différent des musiques programmées habituellement : Lʼétagère des parents fait découvrir de la chanson française et de la variété du répertoire “classique” (de Piaf à Goldman, en passant par Brel, Barbara, Renaud...) ; Dans la chambre du grand frère programme des chansons dʼaujourdʼhui, toujours dans le respect des codes déontologiques (pas de violences verbales) ; Trouvé dans le grenier est consacré à la musique dite “classique” (musiques populaires et savantes du Moyen-Âge à nos jours) ; Les incontournables du rock explore les grands succès internationaux du rock ; La machine à remonter le temps diffuse de la musique pour enfants des années 1980 et 1990 (la programmation musicale globale de la station nʼinclut pas les sorties antérieures à 2000) ; Les tubes du cinéma propose la (re) découverte de musiques de films et de films dʼanimations pour enfants, sans contrainte de date de sortie.

Quelques absentes dans notre programme : du bilinguisme, de la cuisine (pourtant à la mode), des animaux, et des “Confiez-moi vos problèmes”. En voilà des éléments dʼexplication : • Le bilinguisme : plutôt quʼun bloc dʼapprentissage dʼune langue, je préfère répartir quelques répliques en anglais (la langue anglaise est choisie par conformisme...) au cours des émissions : lʼheure, des répliques improvisées... • La cuisine : peu dʼadeptes de Marie Clafoutis sur Superloustic (5 anciens Loustics sur 23 interrogés le placent dans leurs émissions préférées) ; en outre, jʼestime peu adaptée la description dʼune recette tant quʼelle nʼest pas réalisée en direct par tous. • Les animaux : lʼémission Doc Panda, émission sur les animaux diffusée sur Superloustic, est citée une seule fois sur les 23 réponses obtenues à la question posée aux anciens Loustics sur leurs émissions préférées. Il me semble que la découverte des animaux se fait plutôt par des images que par des sons... Cela dit, je ne suis pas du tout opposée à lʼintégration dʼune telle émission dans les programmes, si les auditeurs le demandent.

Q# • Les “Confiez-moi vos problèmes” : je trouve que les jeunes (préadolescents et adolescents) ont bien assez lʼoccasion dʼexprimer sur des blogs publics les confidences quʼils auraient écrites il y a dix ans dans un journal intime pour ne pas avoir besoin de sʼexposer au stade de lʼenfance.

III. 2) d) Le choix des animateurs

La voix de lʼanimateur participe au plaisir que lʼauditeur prend à écouter une émission. Une voix dite “radiophonique” est certes un critère de sélection important pour toute radio. Cependant, je privilégie pour la radio pour enfants les animateurs capables de proposer une ou des voix amusante(s) ; le talent dʼimprovisateur et le sens de lʼhumour sont préférés aux voix et prosodie “radiophoniques”. Lʼhumour étant la première qualité quʼattendent les enfants pour un programme qui leur est adapté, il est primordial que les animateurs sachent faire preuve de répartie, et éventuellement de second degré sʼil est accessible à un jeune de moins de 10 ans. Pour cela, lʼanimateur doit bien connaître le public ciblé. Le profil idéal serait un conteur ou comédien spécialisé dans le théâtre pour enfants ; on peut également envisager une formation de bénévoles et/ou professionnels de la radio allant dans ce sens.

Quant à la prosodie à adopter, il serait intéressant de se détacher du traditionnel ton de journalistes radiophoniques, dont la scansion et les césures leur sont propres. La prosodie de lʼanimateur radio est directement influencée par le contexte social et culturel ; ainsi, dans notre société de lʼinstantané, les mélodies sont plus rapides, plus aiguës, les voix moins posées. Pas de silences entre les phrases, pas de moments laissés à lʼauditeur pour assimiler. Grâce à lʼintégration de fictions radio et de feuilletons dans le programme de la radio pour enfants, laissant des temps de respiration, ainsi que par lʼadoption de prosodies posées, les discours ne ressemblent pas à un “bourrage de crâne” intensif, ou à une rentabilisation du temps dʼantenne.

Je ne souhaite pas intégrer dʼenfants animateurs dans la radio pour enfants, car témoignages et expérience me font constater que lʼenfant écoute avec plus dʼintérêt lʼadulte qui cherche à le distraire que lʼenfant que lʼont met en valeur en lui

Q$ offrant un rôle de transmetteur. Au long de la journée, je veux respecter une parité intelligente et adapter les voix aux tranches horaires. Cʼest à la fois un moyen de sʼadapter aux besoins et une occasion de reconsidérer la place de la femme dans lʼanimation radiophonique, encore trop souvent attelée, surtout dans les radios commerciales pour adolescents, au rôle de voix suave ayant pour unique fonction la mise en valeur de lʼanimateur masculin. Lʼanimatrice occupe donc non seulement la tranche horaire du soir, voix maternelle qui rassure lʼenfant au moment du coucher, mais a également en charge les plages du midi et de lʼaprès-midi. Les disques à la demande et autres émissions du week-end laissent également une belle part à la femme, pour ne pas lui laisser seulement les moments culturels et didactiques.

Enfin, les animateurs sont plutôt jeunes dans lʼensemble (20 à 35 ans), mais je tiens à lʼemploi dʼune voix “mûre” pour lʼémission dʼhistoire, qui sʼapparente ainsi à une histoire vécue par un vieux sage, ou un grand-père qui aurait connu la Préhistoire. Tous ont des voix et des personnalités différentes, car la diversité permet à lʼenfant de choisir lʼanimateur auquel il souhaite sʼidentifier.

III. 2) e) La programmation musicale

Situation observée en mars 2012, lors dʼun séjour de vacances : Andy, 12 ans, a enregistré sur son lecteur MP3 des titres de David Guetta, Sexion dʼAssaut, et autres chanteurs de mouvance RʼnʼB, rap, ou house. Son animateur diffuse Non, non, rien nʼa changé, chanson des Poppies (groupe de variété dʼenfants des années 1970, très ancré dans lʼépoque, et aux chansons très mélodieuses). « - Cʼest quoi, cette chanson ? - Non, non, rien nʼa changé, ça date des années 1970. - Waouh, à lʼépoque il y avait des chansons avec des notes ? On nʼa plus ça nous, maintenant, cʼest trop nul. »

Les musiques choisies suivent une cohérence avec lʼensemble du programme de la station : de lʼhumour, mais pas de “bêbête” ni de “didactico-éducatif”. Nous ne

QR diffuserons pas non plus de musiques pour les tout-petits (Henri Dès, comptines diverses...), ni pour les préadolescents et adolescents.

Je souhaite, par la radio éducative pour enfants, promouvoir les groupes et chanteurs donnant des spectacles dans le cadre des festivals de musique pour enfants : Chorus des enfants (dans les Hauts-de-Seine), Momix (festival alsacien)... Des chansons riches en mélodie, et des paroles qui concernent les enfants : la récré, les jeux, les relations avec les frères et sœurs ou les parents, plutôt que des chagrins dʼamour ou problèmes dʼadolescents... Nous nous définissons comme une radio dʼactualité, et diffusons donc des titres récents ; puisque les chansons pour enfants enregistrées ces deux dernières années ne suffisent pas à varier la diffusion, nous considérons comme “récent” tout titre sorti après 2000. Une chanson peut passer jusquʼà trois fois dans une même journée.

Nous privilégions également la diffusion de productions francophones, en nous appuyant sur lʼexemple de Superloustic : les titres demandés par les auditeurs dans le cadre des disques à la demande étaient à 80% des chansons françaises, “parce quʼau moins on comprend les paroles”. Nous intégrons également dans notre programmation des génériques de dessins animés, en français sʼils existent, et de films pour enfants, notamment des bandes originales sans paroles pour lʼémission Sous les étoiles.

Les musiques acoustiques et les mélodies et instrumentations riches sont favorisées, mais nous tâchons de proposer une diversité de genres pour ouvrir les habitudes musicales de lʼenfant.

Enfin, des chansons ou musiques sans rapport avec la programmation générale sont intégrées dans le cadre de certaines émissions ou chroniques : Au fil de lʼhistoire, Lʼétagère des parents...

La station programme en moyenne 70% de musique pour 30% de paroles, en créant une alternance dynamisant le rythme.

Q. III. 2) f) Précisions sur lʼidentité sonore de la station

La couleur sonore de la station sʼapparente à un mixage de chanson française, plaçant la voix en avant pour favoriser lʼintelligibilité sans pour autant négliger lʼinstrumentation ; un filtre peut appliquer une très légère bosse sur les fréquences des voix, de 2 à 4 kHz environ, mais je nʼen utilise pas pour la journée de programme que je réalise, les contenus utilisés présentant déjà une couleur appropriée. Une légère compression sur le signal permet une diffusion correcte, sans dégrader les musiques.

Les jingles, à caractère humoristique, présentent une certaine unité, cohérente avec la musique diffusée. Ce sont des enfants qui prêtent leur voix pour annoncer le nom de la station. Les musiques sont burlesques, mais certaines sont plus calmes que dʼautres, plus propices à des diffusions vespérales.

Les génériques et virgules sonores sont enregistrés par Zigo, Gom et Tik (des effets sonores pour Zigo et un même animateur pour les deux voix de Gom et Tik). Plus longs que les jingles, ils peuvent durer jusquʼà 30 secondes. Les musiques utilisées comme tapis sonores sont en accord avec le choix de la programmation musicale de la station, sauf pour certaines émissions à thème.

QS III. 3) Le site de la radio

Il paraît impensable de concevoir aujourdʼhui une radio qui nʼaurait pas son site Internet. Cʼest non seulement la vitrine de la station, mais aussi son support matériel, médium de lʼinteractivité. Il est donc nécessaire dʼen soigner le contenu et la forme.

III. 3) a) Le contenu Le site de Zigoradio sʼinspire des sites des stations de Radio France. Il propose lʼécoute du direct en ligne ; une grille des programmes est accessible et chaque plage horaire dispose dʼune rubrique.

Chaque rubrique se compose de :

- une description succincte de lʼanimateur (sans photo pour aller jusquʼau bout dans lʼimportance de la voix et de lʼécoute) ;

- la description de chaque chronique et émission contenue dans la plage ;

- les sujets des chroniques et émissions de toute la semaine, ainsi que les noms des invités et les références des chansons et extraits sonores utilisés ;

- les podcasts des émissions déjà diffusées (disponibles une semaine) ;

- un espace pour les commentaires des auditeurs.

Le site permet de podcaster et de sʼabonner au podcast de plages entières ou de chroniques ou émissions isolées.

NB : pour la partie pratique, les émissions ne sont pas téléchargeables, mais audibles sur le site. Il nʼy a pas non plus dʼabonnement à un podcast !

Un livre dʼor permet de recueillir les avis des auditeurs sur la radio en général.

Des jeux en ligne sont également proposés, tels des quizz, des énigmes ou des jeux de lettres : jeux ludiques stimulant lʼintelligence verticale, celle qui permet de sʼélever

QQ par la réflexion (par opposition à lʼintelligence horizontale qui consiste en une restitution de données apprises).

Les dessins et écrits (poèmes, contes...) envoyés au standard sont publiés sur le site.

Un calendrier dʼévénements culturels est mis à jour, qui sʼadresse aussi bien aux enfants quʼaux parents.

Un espace est réservé aux parents et comprend :

-un forum libre pour les auditeurs ;

-une rubrique de conseils sur la place que peut occuper la radio dans la famille (la radio ne remplace pas les parents) ;

-des pages de promotion culturelle : nouveautés de lʼalbum jeunesse, de la BD, des CDs, des jeux de société...

Enfin, le site présente lʼhistorique et la structure (association, SAS...) ; lʼadresse et le plan dʼaccès du siège de la radio sont indiqués, ainsi quʼune adresse mail et un numéro de téléphone.

III. 3) b) Le visuel Je ne parlerai pas de la mise en forme, qui est gérée par un webmaster- webdesigner et dont seule lʼergonomie nous importe. Mais lʼaspect visuel est plus subjectif, il a un lien fort avec lʼidentité de la radio. Par conséquent, je souhaite une cohérence entre les illustrations, les couleurs utilisées, et la typographie, qui doivent être réalisées dans le même esprit que lʼest la Zigoradio. Pour cela, un illustrateur jeunesse travaille à définir le tout.

Lʼillustration des personnages de Zig, Gom et Tik est faite de manière artisanale et non numérique ; les média utilisés sont des crayons de couleur, de la graphite et des marqueurs de peinture. En attendant de découvrir le site, voici des propositions de logo de Zigoradio, la radio des Zigotos.

QM MH CONCLUSION DU MÉMOIRE

Ce travail de mémoire est une réflexion sur les questions que soulève la création dʼune radio éducative pour enfants : pertinence, faisabilité, enjeux et procédés de réalisation. Il nʼest pas exhaustif, ni suffisant pour garantir un succès en cas de mise en pratique ; répondre à toutes ces questions ne peut se faire, selon moi, quʼen expérimentant le lancement dʼune telle radio ou webradio.

Durant mes recherches, je me suis confrontée à certains comportements fatalistes pour qui « lʼenfant nʼest plus récupérable », déjà corrompu par les programmes audiovisuels abrutissants. Malgré toutes les difficultés quʼont subies les initiateurs de radios pour enfants, je garde toujours la conviction que rien nʼest impossible, rien nʼest trop tard. Entre lʼarrivée de la radio numérique et la prolifération des radios associatives, un projet de radio pour enfants ne sera pas facile à imposer, mais les débats qui se multiplient autour de lʼéducation et de la nécessité de réagir me laissent optimiste.

En attendant de créer un nouveau projet, les recherches sur le contenu dʼune radio éducative pour enfants et sur les possibilités de réalisation pourraient être continuées ; peut-on réaliser une fiction radio efficace pour enfants sans narrateur ? Peut-on diffuser un programme fait dʼune dominante de parole ?

La réalisation de la partie pratique a été un travail très agréable, et jʼai lʼimpression que lʼimagination est beaucoup plus fertile lorsquʼon cherche à surprendre lʼenfant, au lieu de suivre une démarche clientéliste qui consisterait à lui servir systématiquement le programme dont il a envie. Lʼoutil radiophonique est un champ immense dʼexpression de lʼimaginaire et de lʼhumour, idéal pour faire rêver lʼenfant.

Consciente quʼà 22 ans, et sans grande expérience professionnelle, il serait un peu utopiste de se lancer dans la création dʼune webradio associative, il me semble plus judicieux de mʼinvestir dans des projets existants, en cours de création ou déjà créés, auxquels je pourrais apporter mes réflexions et analyses, ainsi que mes compétences en techniques et arts sonores.

M! BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages :

BÉAGUE Philippe, Quels repères pour grandir ?, éd. Couleur livres, coll. Savoir communiquer, Charleroi (Belgique), 2004 BERRY John, Cross-Cultural Psychology : research and applications, Cambridge University Press, Cambridge, 1992 BUISSON Ferdinand, Dictionnaire de pédagogie et dʼinstruction primaire, éd. Hachette, Paris, 2000 (1ère édition chez Kimé en 1887) CHAMONT Philippe, La précocité intellectuelle : les magiciens du paradoxe, éd. Champ social, Nîmes, 2008 CLERC Paul, Les sciences de l'éducation pour l'ère nouvelle : Démographie scolaire, éd. Les sciences de lʼéducation, Paris, 1994 COPPER-ROYER Béatrice, Vos enfants ne sont pas des grandes personnes, Albin Michel, Paris, 1999 DANIC Isabelle, DELALANDE Julie, RAYOU Patrick, Enquêter auprès dʼenfants et de jeunes : objets, méthodes et terrains de recherche en sciences sociales, éd. Presse Universitaire de Rennes, coll. Didact Education, Rennes, 2006

DʼAMATO Marina, “Les enfants captifs de la télé : un remède à lʼennui ?”, in La lettre de lʼenfance et de lʼadolescence, n° 60, éd. Cairn.info, 2005 DEBORD Guy, Commentaires sur la société du spectacle, éd. Gérard Lebovici, Paris, 1988 GALLAND Olivier, Sociologie de la jeunesse, éd. Armand Collin, Paris, 2011 GLEVAREC Hervé, La culture de la chambre – Préadolescence et culture contemporaine dans lʼespace familial, 2010 GUIMOND Serge, Psychologie sociale : perspective multiculturelle, éd. Mardaga, Wavre (Belgique), 2010 JAMES Allison, PROUT Alan, Constructing and reconstructing childhood, éd. Falmer Press, Londres, 1990 KI-ZERBO Joseph, Éduquer ou périr, LʼHarmattan, Paris, 1990 LIVINGSTONE Sonia, “From family television to bedroom culture : young peopleʼs media at home”, in Eoin DEVEREUX : Media studies : Key issues and debates, Sage Publications Ltd, Thousand Oaks (USA), 2007 MARIET François, Laissez-les regarder la télévision, éd. Calmann Lévy, Paris, 1989

M" NANNI Carlo, “Educazione”, in Dizionario di scienze dellʼeducazione, éd. LAS, Rome, 1997 OCTOBRE Sylvie, Les loisirs culturels des 6-14 ans, éd. La documentation Française, Paris, 2004 PIAGET Jean, De la pédagogie, éd. Odile Jacob, Paris, 1988 PIAGET Jean, Le langage et la pensée chez lʼenfant, éd. Delachaux et Niestlé, Paris, 1923 PIAGET Jean, La construction du réel chez lʼenfant, éd. Delachaux et Niestlé, Paris, 1937 ROSE Gillian, Visual Methodologies: An Introduction to the Interpretation of Visual Materials, Sage Publications, Thousand Oaks (USA), 2001 SCHAEFFER Pierre, “Médias de masse : lʼécole entre Descartes et McLuhan”, in Éducation aux médias, éd. Unesco, Paris, 1984 SINGLY François (de), Enfants-adultes, vers une égalité des statuts, éd. Universalis, Paris, 2004

Articles, émissions et débats

Débats Télérama sur lʼenfant et la culture (débat n°1 et débat n°4) : http:// www.telerama.fr/idees/reecoutez-les-debats-du-forum-telerama-nos-enfants-et-la- culture,80197.php Émission radiophonique Science publique du 12 février 2010, sur France Culture BAGET Marie, “Élodie Fondacci, la fée radiophonique” pour lʼhebdomadaire La Vie, publié le 22 décembre 2011 GUSTAVE Anne-Marie, “La voix à la radio”, entretien avec le chercheur Pierre-Marc Biasi publié dans le Télérama n° 3127, 2010 JARRAUD François, “Entretien avec Philippe Mérieu autour de son livre Pédagogie : le devoir de résister”, mis en ligne en 2007 sur www.cafepedagogique.net SCHMIDT Blandine, “La radio au service de ses auditeurs”, publié sur le site du GRER (Groupe de Recherches et dʼÉtudes sur la Radio) en 2009

M# Sites Internet

Site du Syndicat National des Radios Libres : http://www.snrl.fr, consulté en avril 2012 Site de la radio Superloustic http://www.superloustic.fr, consulté de octobre 2011 à avril 2012 Site du Centre de Liaison de lʼEnseignement et des Médias de lʼInformation : http:// www.clemi.org/fr/, consulté en mai 2012 Article “Les enfants et la publicité” : http://www.unaf.fr/spip.php?article4110 Site de Médiamétrie : http://mediametrie.fr, consulté en mars 2011 Site de la Confédération Nationale des Radios Associatives : http://www.cnra.fr/- FSER-, consulté en mai 2012

Entretiens

BAROUF Phil, musicien et mixeur du groupe de rock pour enfants Bouskidou BEVAN Natalie, Directrice de la Communication & du Marketing opérationnels chez Médiamétrie CHAMONT Philippe, psychanalyste DUMOLIN Olivier, fondateur de Radio Moussaillons HEIMO BOURGKNECHT Tanya, fondatrice de Radio Ouistiti GAUVAIN Myriam, professeure des écoles

M$ Annexe 1 : Questionnaire dʼenquête adressé à des anciens auditeurs de Superloustic (3 pages)

1/ Vous êtes :

• Un homme ? • Une femme ? 2/ Vôtre âge : 3/ Quelle est votre situation actuelle ?

• Travailleur ? (précisez) • Etudiant ? (précisez) • Autre ? (précisez) 4/ À quelle fréquence écoutiez-vous Superloustic ?

• Plus de 3h par jour ? • Entre 2 et 3 heures par jour ? • Entre 1 et 2 ? moins de 1 ? • Plusieurs fois par semaine ? • Plusieurs fois par mois ? • Plusieurs fois par an ? 5/ À quel âge avez-vous écouté Superloustic ? (si vous lʼavez écouté plusieurs années, vous pouvez détailler)

6/ Que faisiez-vous pendant que vous écoutiez vos programmes ? (vous pouvez cocher plusieurs cases)

• Rien dʼautre ? • Vos devoirs ? • Des activités manuelles (bricolages, cuisine...) ? • Vous vous prépariez pour aller à lʼécole / au lit ? • Les tâches ménagères ? • Tout et rien à la fois, la radio tournait en continu ? • Autre ? (précisez)

MR 7/ Avec qui écoutiez-vous Superloustic ?

• Vos parents ? • Vos frères et sœurs ? • Vos copains ? • Seul ? • Autre ? (précisez) 8/ Quelle(s) émission(s) préfériez-vous ?

• Pappy Loustic ? • Ça cartoone (Benoix de Coco) ? • Show les micros ? • La chasse aux trésors ? • Merci dʼêtre venu ? • Les DAD ? • La grande parade des TV Toons ? • Au secours jʼai pas sommeil ? • Salut les Loustics (Guillaume et LʼAffamé) ? • La superboum de Superloustic ? • Le grand feuilleton ? • Doc Panda ? • Marie Clafoutis ? • Archibalde et Évariste ? • Autre ? (précisez) 9/ Pourquoi aimiez-vous Superloustic ? 10/ Regardiez-vous également la TV les années où vous écoutiez Superloustic ?

• Oui ? • Non ? 10bis/ Si oui, plus souvent ou moins souvent que la radio ?

• Plus ? • Moins ?

M. 11/ Comment avez-vous découvert lʼexistence de Superloustic ?

• Bouche à oreille ? • Par vos parents ? • Par une revue de presse ? • Par hasard en cherchant une station de radio ? • Autre ? (précisez) 12/ Vos parents écoutaient-ils la radio pendant la période où vous écoutiez Superloustic ?

• Oui ? • Non ? 12bis/ Quelle(s) station(s) ? 13/ Quʼavez-vous pensé / fait lorsque vous avez appris la suppression de Superloustic ? 15/ À quelle fréquence écoutez-vous la radio aujourdʼhui ?

• Plus de 3h par jour ? • Entre 2 et 3 heures par jour ? • Entre 1 et 2 ? moins de 1 ? • Plusieurs fois par semaine ? • Plusieurs fois par mois ? • Plusieurs fois par an ? 16/ Quelle(s) est (sont) votre (vos) station(s) de prédilection ?

17/ Connaissez-vous des médias culturels auditifs (webradios, site de chansons, de contes...) que vous aimez/aimeriez faire connaître à des enfants ? Lesquels ?

18/ Cʼest la fin de questionnaire, merci beaucoup pour le temps que vous avez passé à le remplir. Avant de nous quitter pour de bon, vous pouvez écrire ici vos commentaires : détails à ajouter sur Superloustic, anecdotes intéressantes, critique du questionnaire....

MS Annexe 2 : Questionnaire soumis à des élèves de CE1 et CE2 Sélection de quelques exemples intéressants

MQ MM !HH !H! !H" !H# !H$ !HR !H. !HS !HQ !HM !!H !!! Annexe 3 : Lettres de soutien à Superloustic en 1992

!!" !!# !!$ !!R !!. !!S !!Q !!M !"H