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HORS - SÉRIE 2013 Une publication de la Région HORS - SÉRIE de Bruxelles-Capitale 2013 LEPATRIMOINEÉCRIT LEPATRIMOINEÉCRIT NOTREHISTOIRE LEPATRIMOINEÉCRIT NOTREHISTOIRE Une publication de la Région de Bruxelles-Capitale BRUXELLESPATRIMOINES 25 € ISBN : 978-2-930457-93-2 -PB 006 Couv BAT.indd 1 20/03/15 10:31 LE XXe SIÈCLE 165 BRUXELLES MODERNEET CONTEMPORAINE LE XXE SIÈCLE -PB 006--BAT.indd 165 2/05/13 10:25 -PB 006--BAT.indd 186 2/05/13 10:25 LE XXe SIÈCLE 187 Bruxelles, une capitale en mouvement ? ANS D’ARCHITECTURE ET D’URBANISME SVEN STERKEN Docteur en histoire de l'architecture LUCA School of Arts/KUL Faculté d’Architecture « Becoming modern in Brussels became a i on la compare avec Rotter - permanent situation: an endless repetition of dam, Cologne ou Anvers, la capitale belge a relativement demolition, of building fever, of tearing down peu souffert des dégâts de la SSeconde Guerre mondiale. Plutôt que and pouring concrete. An endless repetition of de se consacrer à reconstruire l’infras- urban decay here, renovation there: the city is tructure, les autorités ont donc pu por- continuously dying, but always in different places, ter leur effort sur l’adaptation de la ville à l’émergence de l’État-providence. so that it may also be continuously reembellished, Pour autant, Bruxelles change profon- renewed, restored. Brussels, in short, is a verb. »* dément à cette époque. La transforma- tion du centre-ville égale en ampleur la Rudi Laermans, 1999. reconstruction qui suivit le bombarde- ment par Louis XIV, 300 ans auparavant. Tandis que les acteurs publics sont sur- tout motivés par le prestige de Bruxelles comme capitale nationale et internatio- nale, le secteur privé se soucie d’abord de ses propres intérêts économiques. Deux ambitions qui se réalisent au détriment des habitants, dont la voix ne se fera entendre qu’à un stade tardif. LE DÉVELOPPEMENT D’UNE CAPITALE DE SERVICES Après la guerre, à Bruxelles, la prio - rité absolue va à l’achèvement de la liaison souterraine Nord-Midi. Le pro- Banque Bruxelles Lambert, avenue Marnix 24, Bruxelles, jet traîne depuis près d’un demi-siècle. arch. G. Brunschaft (SOM), C’est grâce à l’aide du plan Marshall 1959-1960 (M. Vanhulst, 2012 qu’il voit le bout du tunnel en 1952. Les © MRBC). -PB 006--BAT.indd 18 2/05/13 10:25 188 LE PATRIMOINE ÉCRIT NOTRE HISTOIRE 2013 Fig. 1 Centre administrative de l’État, Bruxelles. Brochure de présentation, 1989 (© MRBC) immeubles de bureaux qui longent le la modernisation de l’administration comme le «carrefour de l’Occident®». Les tracé ferroviaire incarnent les piliers de du pays. Véritable ville dans la ville, efforts portent leurs fruits®: en 1957, le l’État-providence®: sécurité sociale, cré- couvrant 400.000 m², la Cité possédait Traité de Rome fait de Bruxelles le siège dit à bon marché, transport et commu- notamment le plus grand restaurant de la CEE et d’Euratom, et dix ans plus nication. Non loin de la gare du Midi se d’entreprise du pays (20.000 repas par tard, l’installation de l’OTAN confirme dresse par exemple la Tour des Pensions jour). Elle disposait aussi de son propre la stature internationale de la capitale. (Yvan Blomme, René Aers, Paul Ramon, accès à la liaison Nord-Midi, la gare de Bien que l’Expo 58 ne soit pas exploitée Marcel Lambrichs, Jean Van Doosse - Bruxelles-Congrès (fig. 1). Fidèles à leur dans le développement urbanistique laere avec Abraham Lipski, 1962-1967). habitude, cependant, les développe - de Bruxelles, l’événement joue un rôle Ses 150 mètres de haut en font un des ments politiques prennent l’architec- déterminant dans la transformation complexes de bureaux les plus hauts ture de vitesse®: la fédéralisation de la d’une ville provinciale et industrielle du pays, et même le plus haut d’Europe Belgique rend la CAE superflue. Fina- en centre national et international d’af- jusqu’en 1972. À côté de la gare Centrale, lement, en 1983, on construit tout de faires et de services. on trouve le Sabena Air Terminus, des- même la tour de bureaux qui domine siné par Maxime Brunfaut (1949-1952), le site, mais c’est surtout pour échap - Dans l’après-guerre, la pensée des urba- qui réalise aussi le nouveau termi - per aux demandes de dédommagement nistes s’inspire largement du principe nal aéroportuaire de Zaventem. Désor- des entrepreneurs. Paradoxalement, la moderniste de la séparation des fonc- mais, les voyageurs peuvent enregis - tour en question sera la première à être tions. Habitat, travail, circulation et loi- trer leurs bagages au cœur de la ville, rénovée à l’occasion de la réaffectation sirs ont besoin d’espaces propres, déli- avant de gagner l’aéroport par un train du site. mités par des zones de verdure. Le Plan spécial en 20 minutes à peine. Unique régional pour l’agglomération bruxel- en Europe ! Le bâtiment Télex de Léon Dans les années 1950, il règne un climat loise («®Plan satellite») du Groupe Alpha Stynen, avec son énigmatique façade en politique tumultueux®: guerre scolaire, (1955) s’inscrit entièrement dans ce¶e panneaux de béton préfabriqué, inau- question royale, grèves des charbon - orientation®: il prévoit autour de la capi- gure la nouvelle société de la commu- nages… Si le gouvernement belge s’obs- tale une ceinture verte comprenant dix nication. Plus loin, la Cité administra- tine à organiser la première exposition villes satellites1. Bien que son impact tive de l’État (CAE), du Groupe Alpha, universelle de l’après-guerre malgré ces soit modeste, l’idée de la séparation des d’Hugo Van Kuyck et de Marcel Lam - conditions, c’est pour assurer ses ambi- fonctions se retrouve dans la suite de brichs (1958-1983), devait couronner tions européennes®: Bruxelles se profile l’évolution de Bruxelles®: le vieux centre -PB 006--BAT.indd 188 2/05/13 10:25 LE XXe SIÈCLE UNE CAPITALE EN MOUVEMENT ? 189 Fig. 3 Masterplan quartier Nord, Groupe Structures, 1969. Dessin de présentation dans une brochure éditée à l’occasion de l’élaboration du projet. Fig. 2 Centre International Rogier, place Rogier, Saint-Josse-ten- Noode, arch. J. Cuisinier et S. Lebrun, 1958. Ancienne carte postale (coll. Belfius Banque © ARB-MRBC). fig. 4 Bâtiment RVS, rue d’Arlon et rue de la Loi, Bruxelles, arch. Kraaijvanger et Ch. Van Nueten, 1958-1964, (Technique des Travaux, janvier-février 1963, p. 11). -PB 006--BAT.indd 189 2/05/13 10:25 190 LE PATRIMOINE ÉCRIT NOTRE HISTOIRE 2013 BRUXELLES ET L’EXPO 58 ’exposition universelle de 1958 a marqué le passage de Sans liaison claire avec le centre-ville, le site de l’Expo fai- la parcimonie et de la sobriété de l’après-guerre à un sait figure d’île autonome de modernité idéalisée. Contrai- avenir fait tout entier de confort et de consommation. rement à d’autres expositions universelles à Bruxelles, dont L La certitude collective que la science et la technique celles de 1880 et 1897 dans l’actuel parc du Cinquantenaire, ne pourraient être que bénéfi ques à l’humanité transparais- et celle de 1910 sur le plateau du Solbosch, l’Expo 58 n’a pas sait également dans les pavillons. L’usage abondant d’acier, de conduit à une urbanisation de ses environs. Le choix du site béton et de verre traduisait une quête de transparence et de était d’ailleurs essentiellement pragmatique®: il était resté non dynamisme. Bien que modérément apprécié de la presse spé- bâti après l’exposition universelle de 1935, et en 1958, il ne cialisée, ce style «Expo®» eut néanmoins une grande infl uence restait plus aucune autre option sur le territoire entièrement sur les goûts en général. Après l’Expo 58, en effet, on vit se urbanisé de Bruxelles-Ville. Tout comme en 1935, le terrain fut multiplier les toits plats, les grandes baies vitrées et les pein- remis dans son état initial. Les vestiges qui ont subsisté (l’Ato- tures murales abstraites. mium, la Flèche du Génie civil et le pavillon américain) résu- ment joliment les fascinations de l’époque®: la science, la tech- Dans la section belge, le Pavillon de l’Urbanisme donnait nique, l’Amérique. des informations sur la politique publique progressiste dans ces secteurs. Dans la plus pure tradition moderniste, l’urba- La fonction événementielle du plateau du Heysel n’a en fait nisme y était présenté comme une discipline rationnelle, pas varié depuis l’Expo 58®: tout le monde s’y rend occasion- visant à apporter des solutions et axée sur la sécurité, l’hy- nellement pour Batibouw, le Salon de l’Auto ou l’un ou l’autre giène et la beauté. La maquette de la Cité Modèle (Braem, match de football. Le pragmatisme économique y a manifes- Groupe Structures, Panis, Van Doosselaer et al.) en offrait tement triomphé de la planifi cation stratégique du territoire. un pi¶ oresque aperçu®: c’était une cité autonome, ordonnan- L’Expo 58 n’a donc pas servi de levier à la poursuite de l’urba- cée de manière strictement orthogonale, d’une capacité de nisation de l’agglomération. Son importance réside davantage 5000 habitants, avec ses propres écoles, un petit centre com- dans la légitimation que l’événement off rait à la transforma- mercial et même une église (fi g. 1). Ce¶ e vision de la ville ne tion «indispensable®» de Bruxelles en un grand centre de ser- s’est toutefois jamais vraiment concrétisée. Il faut dire que la vices. Trois ans à peine après l’ouverture de la jonction Nord- maque¶ e n’était qu’une solution de secours®; au départ, la cité Midi, la ville fut à nouveau en proie à une thérapie de choc, aurait dû héberger le personnel de l’Expo, mais le projet ne ce¶ e fois pour accueillir une circulation automobile explo- démarra qu’à un moment où l’événement était déjà un loin- sive.