dix ans de collaboration entre une compagnie de danse et une école d’art

2008 2018

à Michel... 2008 2018 Françoise Gamerdinger directeur des afaires culturelles de Monaco

L’idée d’un partenariat entre une entité culturelle de la Principauté telle que les Ballets de Monte-Carlo et l’École Supérieure d’Arts Plasiques es particulièrement réjouissante dès lors que celle-ci réunit étudiants et professionnels du monde de l’art autour d’un projet commun. La singularité de cet exercice élève le cursus pédagogique vers plus de professionnalisation, facilitant ainsi les coix d’orientation et confortant des vocations. Cete initiative permet non seulement une première exposition au regard de l’autre, à l’appréciation du public, mais aussi un dévoilement de leur créativité exacerbée par une bienveillance professionnelle. Je salue ici le travail des équipes pédagogiques et de la compagnie des Ballets de Monte-Carlo et notamment l’enthousiasme qu’ils metent dans la mise en œuvre de ces projets permetant à de nombreux étudiants de vivre de premières expériences professionnelles exaltantes.

dessin Céline Marin —— 5 Pas de deux

Isabelle Lombardot Vint ensuite le temps de rejoindre le plateau. Insants directrice du Pavillon Bosio d’inquiétude saupoudrée d’adrénaline, tensions des derniers préparatifs, atmosphère feutrée et vibrante des 2001, prémices d’un projet d’école qui doucement flages, puis arrive la rencontre avec cet impénétrable se dirige vers une hisoire réunissant l’art & la parterre, ensemble souvent solidaire et doté de centaines scénographie. C’es son direceur d’alors, Micel Enrici 1, de paires d’yeux : le public. qui en es le porte-parole. Le pas réalisé entre nos deux srucures pourrait L’idée es de penser un scéma qui puisse sans doute s’apparenter à une fgure dansée, à une notamment s’inscrire dans un territoire, être au plus volée d’éphémères invitées à tournoyer quelques jours près de srucures culturelles, de celles qui interrogent ensemble. l’art et leurs mises en espace. Souhaitons à ce duo de poursuivre sa desinée et de Auprès des Ballets, l’intention était claire : de continuer cete valse pour les nouvelles saisons à venir. manière complémentaire, nous metrions en place J’invite le leceur à tourner ces quelques pages pour un programme commun dès que nous trouverions le découvrir cete hisoire au caracère si particulier. moment propice à cacun. L’idée ft son cemin. Les premiers pas furent défnis. Ils commencèrent par des rencontres entre voisins, via les créations de la compagnie. Les images ci-contre témoignent de ces premiers dialogues. C’es plus tard, en 2007, que Jean-Chrisophe Maillot nous propose de les rejoindre pour une session d’Imprévus. Dès lors, il s’agit de trouver une formule : comment insaurer un dialogue entre deux corps consitués ? En efet, d’un côté des danseurs professionnels, de l’autre de jeunes étudiants en art. C’es au fur et à mesure des années que la méthode prit son allure. En amont des représentations, des rencontres s’organisent. Tous convoquent et projetent leurs imaginaires et désirs d’invention. Puis formes corégraphiques, personnages, objets et univers plasiques prennent vie, s’écoutent, se srucurent et se déploient.

1. Micel Enrici, critique d’art, commissaire d’exposition, ancien direceur de la fondation Maeght et de nombreuses écoles supérieures d’art françaises, fut aux commandes du Pavillon Bosio pendant quatre ans, de septembre 2001 à septembre 2005. Il es à création de Jean-Chrisophe Maillot, D’une rive à l’autre, 2003 l’origine du développement de l’école vers l’enseignement supérieur, 1. Michel Enrici, Jean-Chrisophe Maillot, Philippe Guillotel, Yan Maresz et Dominique Drillot j’ai eu l’honneur de lui succéder et de poursuivre le projet. 2. Yan Maresz, Michel Enrici, Daphne Corregan, Isabelle Lombardot, Valérie Virgile et les étudiants —— 7 « Attentif à la couleur du temps »

Jean-Christophe Maillot collaboration entre arts plasiques et danse ? Pour le chorégraphe dire autrement, quand l’idée de collaboration avec le directeur des Ballets de Monte-Carlo Pavillon Bosio es née, avec les Imprévus notamment, Ondine Bréaud-Holland tu as tout de suite senti des possibilités uniques pour professeur d’esthétque, philosophie, les corégraphes et les danseurs de la compagnie. Elles spectacle et art vivant au Pavillon Bosio étaient de quel ordre à ce moment-là, c’es-à-dire en 2009 et seraient de quel ordre aujourd’hui ? Ondine Bréaud-HO lland : J’ai l’impression JCM : Diaghilev a révolutionné la danse en la que la danse es naturellement associée à la musique et connecant aux autres disciplines. Il a demandé aux que la scénographie vient après, même si l’hisoire des artises de sortir de leurs ateliers, de leurs sudios, avant-gardes (Dada, consrucivisme, futurisme, etc.), de leurs salons d’écriture et de travailler ensemble. nous a enseigné le contraire. Les Imprévus reposent Diaghilev avait compris qu’il fallait en fnir avec cete sur l’idée de relations ténues entre corégraphie conception de l’artise démiurgique qui s’occupe de tout. et scénographie. Ces relations vont-elles de soi Il était préférable selon lui de séparer la producion d’un fnalement ? ballet en diférentes parties et de confer cacune au Jean-CH ristO p H e MaillO t : Spontanément, meilleur créateur possible. C’es pour cela que les Ballets on pourrait croire qu’un corégraphe n’a besoin que de russes sont avant tout une aventure humaine. La lise notes et de rythmes pour créer son ballet. Le rôle de la de ceux qui y ont participé donne encore aujourd’hui le musique es de fait primordial (même s’il es toujours vertige. Les Imprévus avec le Pavillon Bosio et les Ballets possible de le remetre en quesion) mais un specacle de Monte-Carlo essaient de reproduire ce processus de corégraphique a besoin de beaucoup d’autres coses création à l’écelle de l’Atelier. C’es aussi cet esprit que pour exiser. Sans lumières, vous êtes dans une boîte nous avons voulu célébrer à travers le centenaire des noire. Sans cosumes, il es difcile de diférencier les Ballets russes à Monaco. danseurs ou d’identifer leurs rôles. Sans décors, c’es Ce centenaire nous a permis de faire le consat le retour à la boîte noire en termes de narration… il suivant : les Ballets russes représentent une manière de es quasiment impossible d’inscrire les danseurs dans faire de l’art qui rese, aujourd’hui encore, le modèle un récit. En fait, la corégraphie es un art situé au srucurel et la matrice de la plupart des compagnies croisement de plusieurs disciplines qui sont en relation de danse acuelles. C’es pourquoi nous avons décidé avec la danse, le temps d’un ballet. Mais comme tu l’as de présenter un écantillon d’œuvres originales mais dit, ce sont des relations ténues et un corégraphe doit surtout de montrer à quel point elles ont proliféré ! La parfaitement comprendre ces relations pour trouver le reprise des diférents Sacre que nous avons proposée juse équilibre. Les Imprévus sont un laboratoire où les pendant le centenaire, depuis le ballet originel de jeunes créateurs peuvent s’essayer à cete tâce délicate. Nijinski jusqu’à celui de Pina Bausc en passant par Le maître en la matière, et qui nous permet d’avoir celui de Béjart, a permis de montrer à quel point l’art ce type de conversation aujourd’hui, c’es bien sûr de la corégraphie es devenu grâce à Diaghilev un art Diaghilev et ses Ballets russes. relié aux autres. Balancine es un cas un peu à part OBH : À propos des Ballets russes, il faut insiser en mais qui es rice d’enseignements. Sous l’infuence efet sur ce qu’ils nous ont légué, artisiquement parlant. des Ballets russes, il a créé une quinzaine de ballets Cet héritage, tu as souhaité non seulement l’honorer assez cargés eshétiquement et qui refètent bien mais encore en prolonger les efets au moment de la prolifération et l’intrication des arts voulue par la célébration du centenaire. En quoi cet événement Diaghilev. Arrivé aux États-Unis, il s’es débarrassé Jean-Chrisophe Maillot a-t-il été une occasion unique de relancer l’idée de la de tout cela pour se concentrer sur l’écriture d’un —— 9 vocabulaire corégraphique adapté aux danseurs OBH : De façon très concrète, comment as-tu une donnée importante à l’ère du numérique, de la le mouvement et qui ne se jusifait pas par rapport à la américains et il a créé un lien avec la musique coisi les corégraphes qui ont participé aux Imprévus ? modélisation 3D et de la dématérialisation. L’intérêt narration que je voulais metre en place. Ernes Pignon- absolument unique. « Voir la musique et écouter la Les candidats, si je puis dire, étaient-ils nombreux ? de toutes ces collaborations, autour de la danse, que Ernes a donc imaginé un pan incliné qui conserve cete danse ». Personne n’es allé aussi loin dans la fusion de Atendais-tu d’eux des compétences ou des dispositions tu évoques, c’es qu’elles ont obligé les étudiants du dualité entre une position haute et basse mais surtout la danse avec une autre discipline et cela rese à mon particulières ? Pavillon Bosio à metre « les mains dans le cambouis ». qui permet à Roméo d’approcer Juliete en dansant sens un prolongement des Ballets russes. La musique JCM : Ce que je peux dire avant toute cose, c’es Les Imprévus leur ont fait voir comment foncionne plutôt qu’en escaladant de manière ridicule le balcon es à mes yeux l’art suprême mais, à titre personnel, elle que les jeunes corégraphes ont aujourd’hui beaucoup une perce et comment on doit pouvoir canger de en s’accrocant au lierre. Dans le cadre des Imprévus, ne me suft pas lorsque je créée un ballet. J’ai besoin plus de facilités que nous en avions il y a quarante décor rapidement. Le Bal des chimères leur a montré les jeunes corégraphes et les jeunes scénographes se de collaborer aussi avec des peintres, des scénographes, ans. Ils sont nourris d’une quantité d’informations la difculté de transformer une verrière en salle de plient ensemble à cete exigence de jusifcation. C’es des sylises et des compositeurs. Rencontrer des que nous n’avions pas à notre disposition. Je pense specacle et le projet d’afcage pour aites de la vrai que beaucoup créent des obsacles sur scène. Cela artises comme Philippe Favier ou Ernes Pignon- notamment à la vidéo qui permet aujourd’hui de voir danse leur a fait découvrir les joies de l’encollage et n’es pas gênant tant que cela répond à une volonté Ernes m’es infniment précieux. Ce n’es d’ailleurs insantanément ce que nos prédécesseurs ont fait. Leur comment une sérigraphie doit pouvoir résiser aux et à un univers défni. A contrario, certains danseurs pas leur peinture mise sur scène qui m’intéresse mais culture corégraphique se forme plus vite. Ils reçoivent, intempéries. et corégraphes éprouvent le besoin de disposer leur regard de peintre sur un espace scénique vivant, par les réseaux sociaux, un fot d’infuences artisiques OBH : Pour revenir à la scénographie, il me semble d’un plateau entièrement nu. C’était le cas de George mouvant et qui es à l’opposé d’une toile tendue sur sans commune mesure avec ce que nous pouvions glaner que le plateau idéal pour un danseur es le plateau nu, Balancine dont nous avons déjà parlé. Son écriture un câssis. Dans le cadre de ces collaborations, cacun au gré de nos expériences. Les « candidats » se metent c’es-à-dire celui qui ofre le moins d’obsacles possible corégraphique avait pour ambition de n’exiser que doit oublier son rapport solitaire à la création, metre beaucoup plus tôt à la corégraphie et ne l’envisagent aux corps en mouvement, à ces corps qui semblent par et pour la danse. Pour ma part, quand je me place de côté une part de son ego et s’ouvrir à l’idée d’une pas uniquement comme l’accomplissement logique d’une animés d’une vie propre. Alain Badiou a écrit des coses dans une relation à la théâtralité, quand je suis dans composition collecive. C’es pour cela qu’avant de carrière mais comme un processus qui accompagne assez belles sur la danse en tant que métaphore de la un rapport à la narration, je dois pouvoir circuler faire appel à un plasicien en tant que scénographe, je leur parcours de danseur. L’expression « artise pensée, l’opposant à tout esprit de pesanteur — c’es pour fuidifer le récit. Je préfère donc les éléments commence toujours par lui commander un rideau de corégraphique » prend ici tout son sens. Elle ne sépare la danse moderne et non pos-moderne qu’il a en tête modulables. Je crée une arcitecure corégraphique scène. Cela me permet de voir s’il peut relier son travail pas le danseur du corégraphe, elle rend compte de cete lorsqu’il écrit cela. J’ai pourtant vu dans les specacles avec les corps qui se déplacent à l’intérieur d’éléments à un plateau et surtout… cela me permet de teser l’être nouvelle manière d’être un artise autour de la danse. réalisés dans le cadre des Imprévus des plateaux scéniques mobiles. humain. En revance, je remarque que les jeunes corégraphes relativement encombrés avec de véritables décors et des OBH : Ce que j’ai dit du plateau, j’aurais aussi pu OBH : Je vois dans cet art, la scénographie, sont souvent dispersés dans leur approce du specacle. objets qui pouvaient être manipulés par les danseurs. le dire des cosumes. J’ai toujours pensé que le cosume plusieurs possibilités : créer des atmosphères, des Ils ont du mal à resserrer leur propos et à s’y tenir. Les J’ai vu des scènes quasi naturalises avec un glissement idéal pour un danseur était celui le plus léger possible. ambiances, voire des paysages, grâce à la lumière en Imprévus leur apprennent jusement à se concentrer sur inévitable vers le théâtre. Es-ce qu’une voie a été Certainement pas les cosumes imaginés par Oskar particulier. Cete atention au sensible se note cez une intention et à agréger correcement l’ensemble des ouverte à cet endroit ou renforcée par rapport à ce que Sclemmer pour son allet triadique qui peuvent séduire certaines personnes mais se cultive également. Plus on moyens scéniques autour de cete intention. C’es une les Ballets de Monte-Carlo faisaient déjà ? Je veux parler le plasicien certes mais semble bien contraignants. fréquente les œuvres d’art, quelles qu’elles soient, plus des coses les plus dures à réaliser et qui peut faire toute du lien entre corégraphie et théâtralité. J’aimerais maintenant te poser une quesion d’ordre on es à même d’en saisir la force et la beauté. Es-ce la diférence à la fn. J’ai eu la cance d’avoir un père qui JCM : Dans le cadre des Imprévus, il es normal plus général. On imagine que pour arriver à un résultat que les danseurs ont une formation dans ce domaine ? était artise-peintre et qui réalisait beaucoup de décors que l’on permete aux étudiants du Pavillon Bosio qui ne ressemble pas à un collage d’éléments disparates, Dans un précédent entretien, tu parlais d’ailleurs de pour l’opéra et la danse. Grâce à lui, j’ai toujours associé de s’exprimer, de produire dans l’espace et donc des concessions doivent être faites, soit de la part du l’absence de formation en matière de corégraphie les Beaux-Arts à l’art vivant et c’es probablement d’encombrer raisonnablement le plateau. Ce qui es corégraphe, soit de la part du, ou des, scénographes (c’es un peu analogue dans le domaine du théâtre, les aussi de là qu’es venue la volonté de travailler avec le intéressant pour les corégraphes, c’es que l’obsacle puisque les plasiciens de l’école travaillent souvent en formations à la mise en scène sont rares). En quoi les Pavillon Bosio. Les étudiants et les jeunes corégraphes généré par la scénographie va conditionner leur écriture. équipe. As-tu perçu des phénomènes de ce type ? Pour Imprévus combleraient-ils ce manque ? ont tout à apprendre les uns des autres. Souvent, et Bien sûr, tout dépend du type de danse dont on parle. le dire d’une autre manière, comment as-tu encadré les JCM : C’es vrai que l’art de la corégraphie c’es assez sidérant, les plasiciens ont des conceptions Une danse urbaine comme le hip-hop va accorder une projets pour que ces difcultés soient écartées, même si ne s’enseigne pas. La seule école es celle du faire corégraphiques très avancées et les corégraphes importance à la pesanteur. Elle va s’ancrer dans le sol l’idée d’une autonomie des camps artisiques a pu être et de la transmission direce de corégraphe à débordent d’intentions scénographiques. C’es assez et le marteler pour mieux le posséder. À l’inverse, une revendiquée par les aceurs du Blac Mountain College danseur. Les premiers pas du corégraphes sont donc drôle de consater que cacun a le désir d’aller sur le ballerine montée sur pointes va cercer à s’arracer du par exemple ? Merce Cunningham ne parlait-il pas souvent des tâtonnements plus ou moins réussis et territoire de l’autre, pour le meilleur et pour le pire, ai-je plancer des vaces pour poursuivre un idéal de légèreté. « d’une non-collaboration bien orcesrée » ? c’es pour cela que les Imprévus ont vu le jour. Non envie de dire ! On sent cez eux une envie bouillonnante C’es là que les obsacles jouent un rôle diférent. Le JCM : Merce Cunningham a développé l’idée d’une seulement, ils rassemblent de jeunes artises autour de s’exprimer et donc pour répondre à ta quesion, oui, corégraphe doit en tirer avantage. Le tout es que cela dissociation au sein même du principe de collaboration d’un projet commun mais ils permetent aussi à les candidats aux Imprévus sont toujours très nombreux. soit jusifé. Qe l’on prenne un specacle comme tomp entre la musique et les arts plasiques, dissociation caque participant de voir comment leurs camarades OBH : Ce goût de l’art, au sens large du terme, on où les danseurs shootent dans des poubelles, Le Sacre au service de la danse cependant ! Il utilisait, pour « apprentis corégraphes » ont pu résoudre certains le trouve à plusieurs endroits. La collaboration avec du Printemps de Pina Baush où les danseurs marcent la musique, la notion de hasard, en la laissant agir problèmes. Être corégraphe, c’es rarement imaginer le Pavillon Bosio a dépassé largement le cadre des sur de la terre ou n the lat ing de William Forsythe caque soir diféremment. Qand je vois un specacle des mouvements en toute liberté, c’es souvent se Imprévus, puisque tu as invité les étudiants à réaliser des où des tables limitent l’espace des danseurs à leur de Cunningham, c’es toujours un enricissement confronter à une série de contraintes d’ordre scénique, peintures grand format et des afces pour aites de la espace intérieur, l’obsacle es au cœur de la recerce formidable, un enricissement sans fn, même si je tecnique, qui semblent nous éloigner de la création danse. Il y a eu aussi le Bal des Chimères avec la Rue de corégraphique, il es pleinement jusifé. En revance, peux trouver le rendu fnal parfois indigese. Sans mais qui en vérité nous obligent à être clair et précis L’Atelier transformée en salle de danse et les dispositifs dès que l’obsacle devient un accessoire, alors on sombre Cunningham, on ne se serait jamais autorisé à danser dans nos intentions. C’es pour moi la meilleure école. du centenaire des Ballets russes au Grimaldi Forum. dans l’anecdotique. Lorsque j’ai créé oméo et Juliee de dos, on n’aurait jamais considéré le trois-quarts Non seulement elle vous fait découvrir des œuvres d’art JCM : Je dis toujours aux plasiciens « prenez par exemple, j’ai tout de suite supprimé la scène du comme une position en soi, on n’aurait jamais accepté mais elle vous demande aussi de metre en résonance vos pinceaux, cela ne peut pas vous faire de mal. balcon telle qu’on la conçoit traditionnellement. C’es l’idée que l’espace situé à l’arrière-plan avait la même votre travail avec ces œuvres. Confrontez-vous à la matière et à vous-même ». C’es une lourdeur scénographique qui entrave inutilement valeur que celui situé à l’avant. Mais il ne faut pas —— 11 s’y tromper, même si les ingrédients de la danse de OBH : La vidéo es de plus en plus souvent et les danseurs ? Sont-ils curieux d’explorer les communication au même titre que tous les specacles Cunningham semblent dissociés les uns des autres, convoquée au théâtre, peut-être moins en danse. Mais possibilités qu’il ofre, en matière d’interacivité par de notre programmation. J’espère que les participants leur coexisence et leur juxtaposition « hasardeuse » elle es efecivement apparue dans certains Imprévus, exemple ? Et ce, dans la continuité de ce qu’avait mis en ont conscience de cete cance qui leur es oferte. resent le fruit d’une réfexion intellecuelle comme on en particulier en 2018. Projetée au sol, en fond de place Merce Cunningham à la toute fn des années 90 ? Karl Lagerfeld, qui a beaucoup créé pour les Ballets de n’en a peu vue dans l’hisoire de la danse. Lorsqu’on scène ou sur des surfaces créées pour l’occasion, elle JCM : Certaines expériences interacives Monte-Carlo, me répétait inlassablement qu’il fallait regarde les collaborateurs de Cunningham, John Cage, joue entre absracion et fguration. Elle permet toutes menées grâce au numérique sont magnifques et très faire sysématiquement confance à la jeunesse et Rauscenberg, Ducamp, Warhol, on mesure le niveau sortes de phénomènes visuels dont des phénomènes séduisantes. Mais là encore, je crois déceler un certain lui donner sa cance. C’es comme ça, disait-il, qu’il d’exigence de ce corégraphe. Malheureusement, de dédoublement des corps des danseurs, ou du risque : celui de la redite. Les aceurs de cinéma jouent avait toujours su se renouveler. Comme lui, je crois certains émules ont mis assez grossièrement le pied corps du danseur lorsqu’il danse en solo, faisant de plus en plus souvent sur fond vert, sans contac avec à la créativité propre à la jeunesse et aux nouveautés dans l’encoignure de la porte que Cunningham nous de lui un personnage, voire une icône. En quelques un environnement naturel ou un décor. Cela produit produites par les arts plasiques. Ceux-ci évoluent a ouverte. Sous prétexte que le hasard pouvait avoir phrases, pourrais-tu me parler de la relation que les un jeu lisse, égal et étale. L’aceur fnit par disparaître… plus vite que la danse dont l’hisoire suit un rythme sa place dans la corégraphie et que l’on pouvait corégraphes et les danseurs entretiennent avec la vidéo Je rese donc encore dans l’expecative par rapport à plus lent, parce qu’elle dépend des autres pour exiser. disjoindre les éléments d’une corégraphie, certains aujourd’hui ? Pourrais-tu préciser ce point, ne serait-ce ce type d’interacivité. De toute façon, l’interacivité la Les arts plasiques sont un peu le thermomètre de la ont bâclé le travail. Démonter un moteur, c’es à la que par rapport à la problématique du visage que Robert plus importante à mes yeux resera toujours celle entre créativité. Ils nous permetent en tant que corégraphe portée de n’importe qui. Le remonter, c’es beaucoup Morris voulait gommer et que Chrisian Rizzo cerce le danseur et la musique. C’es encore plus évident d’être atentif à la couleur du temps. plus compliqué. Les Imprévus sont là pour apprendre encore à efacer aujourd’hui ? lorsqu’un ballet es accompagné par un orcesre. aux scénographes et aux plasiciens à être de bons JCM : Dans la continuité d’une hisoire de l’art Chacun se met à l’écoute du corps de l’un ou de mécaniciens et si notre lieu de travail s’appelle l’Atelier, qui va des toiles peintes avec fausses perspecives aux l’insrument de l’autre. Je dirais donc que l’interacivité ce n’es pas non plus un hasard. décors consruits en volume, j’ai cru à un moment que avec le numérique ouvre un vase camps d’application OBH : Je poursuis l’idée de collaboration même si la vidéo allait permetre de créer des volumes artifciels, aux corégraphes mais ces derniers doivent garder à elle implique celle, paradoxale, de dissociation entre les des décors holographiques qui pourraient notamment l’esprit que cela resera toujours plus excitant pour un arts. Les afnités élecives entre créateurs n’exisent pas résoudre le problème de l’obsacle scénique dont nous danseur de répondre à la musique qu’à un pixel. toujours. Même si l’on croit avoir les mêmes goûts ou la parlions tout à l’heure. Mais le problème avec la vidéo, OBH : Certains corégraphes étaient déjà en même sensibilité artisique, il faut beaucoup de temps c’es qu’elle prend vite le dessus, elle s’impose avec possession d’un syle avant les Imprévus. As-tu pour apprendre à travailler ensemble et se comprendre force et insisance. Notre regard es naturellement eu l’impression que ce syle a évolué grâce à cete au-delà des mots. Ce n’es d’ailleurs pas pour rien, happé par l’image. Notre œil n’a jamais été autant expérience ? Q’il y a eu des trouvailles en quelque qu’au théâtre, des couples de meteurs en scène et de sollicité et il s’es adapté. Dès qu’il voit de l’image sorte, l’émergence de nouvelles écritures que l’aventure scénographes exisent. Les Imprévus ont-ils déboucé animée, il se jete dessus. Mais bien entendu, il y a aurait donc permis ? sur la création de couples ou trios artisiques ? plein d’expériences qui resent encore à tenter et qui ne JCM : J’ai noté en tout cas un phénomène de JCM : Les collaborations ne foncionnent qu’à partir manqueront pas de défricer de nouveaux territoires. contamination dans le « faire » et dans le désir de du moment où le corégraphe accepte l’idée qu’il es Pour l’heure, je trouve que l’œuvre la plus aboutie créer ensemble. Si certains corégraphes ont enrici un cef d’orcesre atentif à l’eshétique d’ensemble. Il rese Biped de Merce Cunnigham. La projecion à leur vocabulaire au contac des plasiciens, d’autres n’es pas un démiurge. Lorsque cela es « acé », alors on l’avant-scène sur un tulle crée un efet de disanciation ont véritablement éclos à leur côté. Des artises peut voir éclore des collaborations formidables. Avec par rapport à la corégraphie. Cela trouble l’écriture corégraphiques passés par les Imprévus comme Ernes Pignon-Ernes, nous avons réalisé dix pièces mais valorise aussi ce mouvement que l’on aimerait Gaëtan Morloti ou Mimoza Koike ont à l’évidence ensemble. Son écriture scénographique et mon écriture voir dévoilé. L’expérience la plus signifcative que j’ai été imprégnés par ces expériences. Ils ont beaucoup corégraphique sont devenues une seule et unique pu mener avec de la vidéo remonte au ballet il pour collaboré par la suite avec les plasiciens issus du signature. Nous sommes de véritables co-auteurs. œil. Dans cete pièce, je montrais sur le plateau ce qui Pavillon Bosio. Gaëtan et Mimoza ont également Qand le rideau se lève et que l’on voit la scénographie se déroulait hors scène en direc. Grâce à la vidéo, je développé une écriture liée à la performance in situ dans de Pignon-Ernes, on voit aussi la corégraphie de pouvais également projeter en gros plan le visage de des musées tels que le NMNM et la Galerie Marlborough Maillot. C’es une évidence. Je considère qu’on peut Bernice Coppieters, ce qui permetait au public de à Monaco, ou le Musée Matisse et le Musée Marc parler d’une réussite lorsque qu’il n’es plus possible de comprendre que son personnage était aveugle. J’ai Chagall à Nice. dissocier les auteurs de l’œuvre, lorsqu’elle exise dans toujours accordé de l’importance au jeu d’aceur. Les OBH : Qelques mots en guise de conclusion ? son unité. Nous avons eu également le bonheur de voir danseurs des Ballets de Monte-Carlo sont également JCM : C’es une cance exceptionnelle de pouvoir grâce, aux Imprévus, naître des collaborations qui se des comédiens. Je leur demande toujours de se servir faire exiser à Monaco de tels projets d’étudiants et de sont prolongées. Je pense en tout premier lieu à Joseph de leur visage autant que de leur corps. À ce titre, faire éclore des vocations. Ailleurs, il exise des projets Hernandez qui, depuis Les Imprévus, connaît une belle l’interacivité permise par la vidéo es utile. Elle enricit tutorés, des travaux de fn d’études qui préfgurent carrière de corégraphe et continue de travailler avec le propos et livre des informations nécessaires à la des projets de scénographie souvent très aboutis mais Yannic Cosso et Jordan Pallagès, anciens étudiants compréhension de la pièce mais il faut l’utiliser à bon peu d’expériences sont aussi immersives et concrètes du Pavillon Bosio. Ils sont revenus ensemble créer une escient car elle peut vite obnubiler le regard et tuer la pour de jeunes apprentis-artises que les Imprévus. pièce pour les Ballets de Monte-Carlo en juillet 2018 corégraphie. Ceux-ci sont bien plus qu’un travail d’étudiant. Ils et c’es évidemment un objet de ferté pour toi comme OBH : On parlait de la vidéo, je voudrais te sont un specacle à part entière, présenté à un public pour moi de voir cete équipe invesir la salle Garnier demander la même cose au sujet du numérique. de connaisseurs exigeants qui vient pour juger les de l’Opéra de Monte-Carlo alors que quelques années Sa présence a été forte dans certains Imprévus. Si propositions artisiques. Ils sont réalisés par une plus tôt, l’un corégraphiait sur les vidéos que les autres elle répond à un désir de la part des plasiciens- équipe tecnique professionnelle qui travaille avec projetaient sur les murs de l’Atelier. scénographes, en es-il de même pour les corégraphes les plus grands corégraphes et ils font l’objet d’une —— 13 Retour sur l’expérience producions en amont et nos étudiants communiquent premières sessions — à partir de 2008, s’es imposée très tôt dans l’année avec les jeunes corégraphes. Les en 2018, pour démultiplier les corps, faire entrer des imaginaires se répondent avec beaucoup de complicité fragments de réalité dans les pièces mais aussi pour des Imprévus et les équipes se forment, même si les afnités élecives insaurer un dialogue avec le cinéma. Aujourd’hui, n’exisent pas toujours. Si l’on croit avoir les mêmes les arts numériques (la réalité augmentée, les logiciels goûts ou la même sensibilité, il faut toutefois beaucoup de mapping vidéo, etc.) donnent lieu à des recerces de temps pour apprendre à travailler ensemble et se dont les applications futures engendreront, espère-t- comprendre au-delà des mots. Nous organisons donc des on, de nouvelles manières d’envisager la présence des réunions préparatoires dans lesquelles des thématiques corps dansants dans des espaces de scène eux aussi sont proposées. Les références sont évoquées, étudiées, réinventés, metant en jeu des formes inédites de puis les concepts se metent en place, les univers des uns création corégraphique. et des autres se rejoignent et les projets s’inventent avec Les Imprévus ont également permis d’expérimenter Gilbert Della Noce de plus en plus d’autonomie. La corégraphie représente avec succès des sysèmes non frontaux avec les ancien professeur de scénographie, pour nos étudiants un callenge assez paradoxal, compte specateurs, par exemple la scène modulable conçue représentaton de l’espace scénographique tenu de leur enthousiasme à remplir le plateau. Après pour la saison 2, Léritage, ou bien le dispositif au Pavillon Bosio écange avec les corégraphes, ils réalisent qu’il faut en de plateau dédoublé, lors de la saison 9, Peau noire, Dominique Drillot jeter les trois quarts. masques blancs. Si la frontalité es bien souvent de mise, professeur de scénographie, scénologie, C’es alors que les difcultés de création se font du fait de la confguration des sudios des ballets, rien espace et lumière au Pavillon Bosio jour et donnent lieu à des débats toujours très rices. n’es jamais épuisé, rien n’es jamais défnitif ; il faut L’ensemble doit absolument apparaître comme le expérimenter et se demander sans cesse si de nouveaux En 2007, nous assisons tous deux pour la première fois produit de créateurs diférents. Les scénographes rapports avec les specateurs ne sont pas à reconsidérer. aux specacles Jeunes chorégraphes dans le cadre des recourent au dessin, aux simulations numériques et à Encore une fois, la réalité virtuelle semble à cet égard Imprévus des Ballets de Monte-Carlo. Les propositions la maquete pour appréhender l’espace et en concevoir un terrain fertile à exploiter. inventées par les danseurs qui s’essayent à la l’arcitecure. Ces étapes sont nécessaires et consolident Parfois, la collaboration es sortie du cadre des corégraphie sont nombreuses, de qualité, parfaitement les acquis tecniques. Au fl des saisons, nous avons Imprévus : des afces de grand format ont été réalisées interprétées. La perspecive d’une collaboration fabriqué une sorte de boîte à outils où la plupart des pour l’événement aites de la danse, puis elles ont avec nos étudiants-scénographes nous semble alors écueils que l’on peut rencontrer à l’écelle du plateau revêtu les murs de la ville pour annoncer la fête. Mais très séduisante. Les relations entre corégraphe et sont anticipés et globalement résolus en amont. Il s’agit aussi, le Bal des Chimères, sorte de farce burlesque, et scénographe auraient en efet ceci de piquant : l’un a le de concevoir une scénographie cohérente, resituer le les dispositifs inventés pour le centenaire des Ballets désir d’un espace libre pour danser, l’autre pense que projet en 3D, penser sa mise en lumière, convoquer russes… Dans ces diférents contextes, les contraintes se quelques obsacles lui seraient proftables. d’autres médiums, élaborer une conduite de specacle sont avérées des opportunités à saisir pour les étudiants. Très tôt, dès 2001, avec les direceurs Micel efcace, tout en consruisant des images signifantes. Les arts plasiques et visuels se sont déployés dans Enrici et Jean-Chrisophe Maillot, le développement Enfn, être en capacité de communiquer avec les des direcions périphériques. Souvent, les frontières d’un partenariat entre les deux insitutions avait été tecniciens. entre l’objet scénique et l’accessoire sont tombées. envisagé. C’es un peu plus tard qu’une présence dans Si d’une façon générale, les producions ont S’il y a peut-être eu une diférence d’appréhension, le programme des Imprévus s’es imposée comme une été pertinentes, elles n’ont pas toutes refété une l’un es resé plus conceptuel et l’autre foncionnel ou évidence. La première collaboration fut mise en place compréhension réciproque des binômes (corégraphe- symbolique. Par exemple, les objets du quotidien sont en 2008. Les relations, timides au départ, se sont peu à scénographe). Ce paramètre rend cete expérience devenus sculptures, la céramique s’es transformée peu révélées très frucueuses pour les apprentissages d’autant plus rare quand elle es réussie. Certains en insrument visuel et sonore prodigieux, les objets réciproques. couples, trios ou collecifs artisiques, forts de leurs fabriqués ont contraint les corps alors que les miroirs L’année suivante, le centenaire des Ballets russes écanges et de leur envie créatrice, ont parfois continué ont multiplié les perspecives. à Monaco nous a fourni un magnifque support le cemin ensemble. Dans cet espace de création Les Imprévus, repensés et réinvesis caque année, intellecuel et iconographique pour poursuivre notre rice, les syles des corégraphes et des scénographes sont des expériences uniques de rencontres entre des collaboration. Nous avons occupé et transformé évoluent en s’infuençant, et leur dialogue peut se étudiants-scénographes et une compagnie de danse l’Atrium du Grimaldi Forum en un espace dédié à la disendre ou gagner en profondeur. Ce sera le cas pour professionnelle presigieuse, auprès de danseurs folie créatrice de Nijinski. La demande était claire : faire le corégraphe Joseph Hernandez avec les plasiciens corégraphes talentueux, que nous entendons remercier en sorte que l’expérience du specateur francissant Jordan Pallages et Yannic Cosso, tout comme Tina ici par nos témoignages. le sas d’entrée soit immédiate. Ce fut le cas grâce aux Alloncle avec le corégraphe Jeroen Verbruggen. nombreuses insallations présentées. L’addition des arts sur scène s’es muée en fusion L’aventure s’es ensuite poursuivie au cours de pour faire naître de nouvelles écritures corégraphiques. nombreuses éditions. Des relations particulières avec des médiums Sur le plan de la méthode, quatre enseignants de spécifques, tels que le son, le décor et la lumière, ont l’école encadrent le projet : Ondine Bréaud-Holland, été développées, parfois séparément, parfois ensemble. Dominique Drillot et Gilbert Della oce Damien Sorrentino et nous-mêmes. Nous préparons les La vidéo qui es apparue dans les Imprévus — dès les —— 15 10 ������� saisons +1 ������ entracte SAI SON propos 1 —— ——

I Tapis noir — Tapis blanc M P R É V U S 2008 inaugure le partenariat entre la compagnie des Ballets de Monte-Carlo et l’École supérieure d’arts 2 plasiques de la Ville de Monaco, suite à l’invitation 0 lancée par Jean-Chrisophe Maillot. 0 Pour la première fois, les étudiants, apprentis scénographes, et les danseurs, apprentis corégraphes, 8 « Pour caque pièce inventer une travaillent ensemble à la création de specacles. Ils sorte de langage pour l’œil qui écrivent les prémices d’une aventure, dont la part soutenne les signifcatons de la d’imprévisibilité intrinsèque à la défnition même de ce pièce, les prolonge et leur fasse éco, mot, es assumée jusque dans le titre de l’événement. tantôt de façon précise et presque Manifesation dédiée à la danse, inventée par Jean- critque, tantôt de façon difuse, et Chrisophe Maillot et présentée annuellement sur la presque subtle à la manière d’une scène de l’Atelier des Ballets, les Imprévus s’ouvrent image poétque (où les sens fortuits en efet aux infuences des arts plasiques, et à cete ne sont pas moins intéressants que possible intrusion de l’aléa qui nimbe toute nouvelle ceux que l’on a cercés) à l’intérieur association. Il faut s’apprivoiser, assouplir certains du regisre et du mode d’expression réfexes, et surtout partir à la découverte de l’autre dans coisi. » une volonté commune d’expérimenter. Pour ce faire, les deux insitutions aménagent René Allio des temps dans leurs plannings respecifs afn Une scène qui n’existe pas d’encourager la disponibilité des équipes. L’approce es empirique mais le processus de travail se développe jusqu’à son terme en intégrant les contraintes. Les danseurs expriment leur intérêt d’être enricis en tant qu’interprètes, par une meilleure compréhension des potentialités de la scénographie, tandis que les étudiants en art peuvent s’exercer à écelle 1, dans des conditions idéales d’accompagnement tecnique. Tous apprécient de faire évoluer ensemble écriture scénographique, maquetes et dessins, vers leur transcription dans l’espace. Neuf propositions résultent de ces rencontres d’individus et d’idées, elles révèlent la matérialité des écanges et dessinent des territoires de recerce partagés. Elles sont données lors de deux soirées disinces, intitulées « Tapis blanc » et « Tapis noir », en foncion de la couleur du plateau coisie pour la scénographie. Ainsi « Tapis blanc » rassemble les pièces : Et le bus, Choré-gra, Chase the core, n petit point dans le paradis, Gie Me et « Tapis noir » les suivantes : aclash, Recycled Silence, n ne doit pas, urn. Sandrine Perrin coordinatrice des études et de la recherche au Pavillon Bosio

Et le bus, représentations au ateliers desalletsdeMonte-Carlo —— 19 SAI SON disribution 1 —— ——

TAPIS NOIR TAPIS BLANC

Backlash Et le bus —— —— Chorégraphie : Francesco Nappa Chorégraphie : Piotr Czubowicz Scénographie : Alexandra Voisin Scénographie : Leslie Bourgeois Cosumes : Francesco Nappa Danseurs : Katarina Edling, Mimoza Koike, Gioia Masala, Musiques : Francesco Nappa Leart Duraku, Evguenii Slepov, Julie Strandberg, Danseurs : Anjara Balleseros, Agalie Vandamme, Sivan Blitova Leart Duraku, Jeroen Verbruggen, Francesco Nappa

Choré-graphik Recycled Silence —— —— Chorégraphie : Ramon Gomes Reis Chorégraphie : Bruno Roque Scénographie : Vincent Lemasson Scénographie : Laureline Bergamasco Danseurs : Katarzyna Scripps, Nathalie Nordguis, Cosumes : Bruno Roque Katarina Edling, Ramon Reis, Bruno Roque Musiques : Dead Combo ; Te Cinematic Orcesra ; Rinôçérôse ; Dave Franklin ; Clif Friend Danseurs : Lisa Jones, Nathalie Nordquis, George Oliveira, Chase the Score Bruno Roque —— Chorégraphie : Julien Guérin Scénographie : Charlote Guinand On ne doit pas… Danseurs : Elodie Puna, Carolyn Ramsay Rose, Jenifer Brie, —— Sivan Blitovan, Francesca Dolci, Evguenii Slepov, Chorégraphie : Jeroen Verbruggen Jens Weber, Claude Gamba, Raphaël Boucard Scénographie : Géraldine Mercier Cosume : Géraldine Mercier, Jeroen Verbruggen Musique : Gare2, Aphex Twin ; Loesongs, Mikhail ; Un petit point dans le paradis Child o god, Antony et Te Johnsons ; shiete, Heiji ; —— armaPolice, Bad plus Chorégraphie : Gaëtan Morloti Danseurs : April Ball, Agalie Vandamme, Katarina Edling, Scénographie : Doo Hwa Gianton représentations au ateliers Sarah Jane Medley, Qinn Pendleton, Olivier Lucea, Cosumes : Ballets de Monte-Carlo desalletsdeMonte-Carlo Asier Uriagereka, Julien Bancillon, Stephan Bourgond Danseurs : Georges Olivera, April Ball, Leart 1. U-Turn Duraku, Nathalie Nordguis, Sarah Jane Medley, 2. Et le bus Johaquim Stephenson 3. Un petit point dans le paradis U-Turn 4. Give Me —— 5. Choré-graphik Chorégraphie : Mimoza Koike, Jérôme Marcand Give Me 6. On ne doit pas… Scénographie : Olivier Pavis d’Escurac —— 7. Recycled Silence Cosumes : Mimoza Koike, Jérôme Marcand Chorégraphie : Karyn Benquet 8. Baclash Musiques : Fabian Paganini Scénographie : Nicolas Rosani, Laura Touvenin 9. Chase the Score Danseur : Maud Sabourin, Mimoza Koike, Danseurs : Julien Bancillon, Georges Olivera, Anjara Balleseros, Asier Uriagereka, Jérôme Marcand, Francesca Dolci, Maude Sabourin, Lisa Jones, Olivier Lucea, L. Aboukrat Raphaël Boucard, Elodie Puna, Caroline Rose Ramsay, Stephan Bourgond

—— 21 SAI SON U-Turn témoignages 1 —— —— ——

Olivier Pavis d’Escurac et bruyant des grandes villes. Une grande liberté de jeu diplômé, DNSEP 2008 s’ouvrait alors à nous. J’ai volontairement laissé entre les mains de Mimoza Dans le cadre de mes études à l’ESAP, j’ai eu le plaisir et Jérôme une maquete de ces deux objets. Cela d’étudier la scénographie auprès de Dominique Drillot, leur a permis de fnaliser les diférents mouvements scénographe et créateur de lumière. corégraphiques et leur a donné, je pense, une plus La collaboration entre jeunes scénographes et grande liberté d’expression. Aujourd’hui, je compare jeunes corégraphes nous a permis de travailler dans cete scénographie à un outil arcitecural scénique, des conditions professionnelles exceptionnelles. autonome, agissant comme un aceur. Les diférents ateliers de cosumes, de lumières, Pour répondre à un désir d’augmenter notre camp de consrucion, la régie son, ont été mis à notre d’expérimentation, l’utilisation de la vidéo m’es apparue disposition pour nous aider à réaliser un projet de comme une nécessité. La projecion de visuels a permis fn d’études, à écelle 1. Dans ce programme, je me d’apporter un fltre supplémentaire, celui du « réel ». suis associé à deux jeunes danseurs, Mimoza Koike et Ainsi, les premiers grands aplats blancs de lumière Jérôme Marcand. Tous deux aspiraient à écrire leur disparaissaient, laissant apparaître des images urbaines, première corégraphie. Ils avaient en commun le désir venues bousculer l’imaginaire du specateur. de quesionner la place du corps dans la ville, partant Aujourd’hui, en tant qu’arcitece et scénographe, du consat que l’urbanisation es de plus en plus intense c’es avec beaucoup de sensibilité que j’observe les et que notre soif de sur-consommation ne cesse de complémentarités mais aussi les contradicions entre ces grandir. deux disciplines. La scénographie révèle et sublime les Pour me lancer dans ce projet, j’ai longuement espaces arcitecuraux. observé et photographié les danseurs. J’avais besoin de comprendre l’espace dans lequel ils travaillaient. L’univers de la danse m’était alors inconnu. J’allais aussi découvrir cete fameuse boîte noire, Mimoza Koike ouverte sur une seule face, celle des specateurs danseuse chorégraphe confortablement assis. Les corps des danseurs en mouvement dans cet espace sombre et vide résonnaient i zaB ela d ziepak : Comment cete U-Turn, représentation et en moi comme un éco. Le vide immense de la scène collaboration s’es-elle engagée ? Comment avez-vous au ateliers des allets de me paralysait, aucun repère ou marqueur matériel ne utilisé la vidéo dans ce projet ? Monte-Carlo pouvant me donner de limites, de cadres. MiMOza kOike : Pour les Imprévus de 2008, nous J’avais besoin de voir les corps prendre conscience avons formé une équipe de deux corégraphes avec de cet espace. Je souhaitais leur permetre de se détacer Jérôme Marcand qui, lui aussi, était danseur aux Ballets du premier et du second plan, mais aussi du sol, dans la de Monte-Carlo, ainsi qu’un jeune scénographe, Olivier perspecive de montrer, avec quelle puissance et légèreté Pavis d’Escurac. Olivier, acuellement arcitece, a les danseurs s’élèvent dans les airs. préparé à cete occasion une maquete comprenant deux Nous avions carte blance pour réaliser ce projet, cubes en forme de V placés à l’horizontale. notre imaginaire était puissant, puisque presque Pour souligner le caracère urbain de ce projet, nous tout était envisageable. Dès lors, comment apporter avons tourné à la gare de Monaco afn de signaler, au une acion srucurante pour les aceurs-danseurs travers de projecions au début et à la fn du specacle, et comment reser en accord avec le scénario des que l’acion se déroulait dans le métro que j’emprunte jeunes corégraphes ? Ma réponse fut la suivante : habituellement au Japon. Trois projecions vidéo ont été « par la réalisation d’un dispositif scénique mobile qui employées pour la narration : l’entrée de la gare, le train deviendrait un support narratif ». qui passe et la sortie de la gare. J’ai donc imaginé une double srucure grande id : Pourriez-vous partager vos idées concernant le et massive, pleine et vide en son milieu, légère à fait de danser entre ces deux objets gigantesques ? Es- manipuler, pouvant s’assembler et se séparer en deux. ce que le coix de montrer de grands volumes es dicé Cet objet permetait de metre en parallèle la rigidité par la nécessité d’accentuer la danse ? du décor et la souplesse des corps en mouvement. M k : Normalement, je vois toujours l’image fnale Mon objecif était de démontrer, de manière poétique, de la scénographie mais cete fois-ci, nous avons décidé la façon dont les corps sont confrontés à l’usage de de laisser les coses prendre leur forme en posant sur l’arcitecure. Cete micro arcitecure, mobile et le plateau juse ces deux cubes mobiles afn que la scénique, objet fnalement très minimalise, permetait corégraphie s’y adapte. C’es d’ailleurs là où l’on a pu de créer des visions métaphoriques de diférents lieux, remarquer un vrai écange dans la collaboration. Nous ofrait diverses perspecives urbaines. La lumière et le avons établi nos places respecives, sacant que cacun son ont permis d’accentuer l’univers parfois inquiétant de nous avait sa propre vision du projet bien défnie. —— 23 SAI SON U-Turn témoignages 1 —— —— ——

Grâce à cete répartition des rôles, nous avons gagné M k : La vidéo, si on ne l’utilise pas de la bonne en facilité de communication. C’était une réussite car, manière, peut déranger. C’es un médium qui prend souvent, on rencontre de multiples difcultés quand il beaucoup d’atention. J’ai remarqué que, en tant que s’agit de se metre d’accord. Le déf pour Olivier était specatrice, j’ai tendance à regarder la vidéo plus la possibilité de rendre ces cubes mobiles et faciles à qu’autre cose. Il y a une certaine difculté de suivre et déplacer. Même si l’eshétique était minimalise, il y d’apprécier la vidéo en même temps que d’autres formes avait de nombreuses façons d’employer ces volumes d’expression. blancs sur le tapis noir ; par exemple, ils pouvaient Dans le specacle -urn, la vidéo es présente jusement évoquer des trains. poncuellement, au début et à la fn, et en ce sens elle Ils ont bien servi en tant qu’écrans pour les es contrôlable et absraite du jeu des danseurs. Elle projecions vidéo, mais également pour organiser possède le rôle principal pendant des moments coisis. et urbaniser l’espace scénique. Les espaces ont été Globalement, la vidéo était de nature informative créés par le biais des formes géométriques des cubes et a apporté la dynamique voulue, un élan dans le et de la lumière rasante. Par exemple, si les deux mouvement, avec la musique. représentations au ateliers srucures étaient placées face à face, un nouvel espace id : Qelle était la spécifcité de cete corégraphie ? desalletsdeMonte-Carlo était délimité, la faille était complétée par les corps M k : À ce moment-là, j’aimais beaucoup reproduire 1. Give Me émergents des danseurs. Nous avons pu aussi créer des les mouvements à l’envers. Pour la corégraphie, nous 2. Un petit point dans le paradis trappes à l’intérieur des cubes pour placer des objets avons pu apprendre et répéter ces mouvements grâce comme, par exemple, des journaux. aux enregisrements vidéo lus en sens inverse. C’était id : Comment une forme minimalise dans l’espace comme si on dansait et puis on reculait, comme si c’était scénique peut-elle conditionner la danse ? véritablement une vidéo. À la recerce du gese parfait, M k : Finalement, je sais par expérience qu’il faut nous voulions dépasser quelque cose. Cete tentative laisser place à l’imaginaire. Ici, l’équilibre entre ce qui de refaire, de revenir dans le passé, de moduler les faits était défni et ce qui était illusoire sur scène fut trouvé. et geses dans le temps, es jusement possible dans l’art J’aime que la scénographie soit consituée d’objets de la danse. mobiles qui peuvent se trouver en mouvement pendant id : Dans votre pratique, pendant le processus le specacle. Puis, dans ce projet, nous avons utilisé aussi de préparation, préférez-vous vous enregisrer sur le bien la lumière colorée que l’ombre. La scénographie fut support vidéo ou analysez-vous le mouvement qui se donc un apprentissage de création d’espaces artifciels refète dans le miroir ? par la lumière et l’ombre. Je crois d’autre part que M k : J’utilise surtout la vidéo et je me flme cet exercice m’a permis d’apprécier ces deux grandes beaucoup. Le refet dans le miroir me semble moins vrai formes minimalises dans leur dialogue. De toute façon, parce que je pense que le mouvement n’es pas complet. le décor de grande taille a toujours été ma marque de C’es comme regarder quelque cose en 2D et pas en 3D, fabrique. et la danse ne peut pas être perçue ainsi. En ce moment, id : Qels sont les traits caracérisiques de la nous travaillons beaucoup avec le danseur Asier Edeso corégraphie présentée ? et nous flmons la totalité de notre travail, ensuite M k : Avec Jérôme Marcand, nous avons eu l’idée nous le visionnons pour en parler. Ces discussions sont de parler des relations entre des inconnus dans l’espace spéciales, parce qu’elles naissent jusement dans ce public, comme on peut l’observer dans le métro. À un contexte-là. moment, nous avons trouvé nécessaire d’enregisrer id : Es-ce que la pratique plasique, du dessin ou des sons produits par des macines à café, des pièces de de la peinture, vous infuence et vous inspire dans la monnaie etc., pour composer la bande-son. Puis, cete création corégraphique ? ambiance sonore a permis d’enricir la scénographie. M k : Mes parents, mon oncle et ma tante également, Une autre idée importante du specacle, proposée sont des artises qui font de la peinture, ma mère es par Jérôme, était de manipuler mes ceveux. En dansant, peintre et mon père es arcitece. Depuis toute petite, on peut obtenir, avec les ceveux, des mouvements j’ai vu les maquetes de ses projets cez nous, et je supplémentaires, dotés d’une certaine tension les ai toujours aimées. À l’école d’art, des étudiants dramatique. Jérôme voulait une corégraphie qui travaillent, eux aussi, sur des maquetes en tous genres. maintienne le contac avec ma cevelure. Nous avons Moi-même, je m’exprime librement par la peinture, c’es observé des couples pour les caricaturer, et nous avons l’inconscient qui dice le tableau. J’ai réalisé un grand ainsi formé un duo qui exprimait une relation de couple. nombre de toiles et je trouve que c’es toujours bien de Je crois que la forme d’expression qui en a découlé es cultiver diférents savoir-faire. parlante. id : En quelques phrases, pourriez-vous donner votre point de vue sur l’importance de la vidéo dans l’écriture corégraphique, et en particulier dans ce projet ? —— 25 représentations au ateliers desalletsdeMonte-Carlo 1. 2. Choré-graphik 3. Chase the Score

représentations au ateliers desallets de Monte-Carlo 1. Baclash 2. Chase the Score 3. On ne doit pas…

—— 27 SAI SON propos 2 —— ——

B L’ Héritage A L L E T S 2009 célèbre le centenaire des Ballets russes, dont R l’aura a imprégné l’hisoire des arts en Principauté. U Deux fgures s’en détacent, Serge Diaghilev et S Vaslav Nijinski, duo emblématique de specacles qui S marqueront leur époque : Le pere de la rose, L’Après- midi dun aune, Petroucha, arcisse… D’autres, E « Les formes qui (…) ont poussé parmi lesquelles celles de Léon Baks, Pablo Picasso, S naturellement dans le sol russe Mikhaïl Fokine ou Claude Debussy, viennent également sont plus proces du cœur russe. témoigner de ces créations famboyantes, où se 2 Toutefois, il serait étrange et répondaient les arts plasiques, la musique et la danse. 0 même absurde (…) de cesser d’être Plusieurs événements se succèdent, afn 0 un européen maintenant. C’es d’accompagner cet anniversaire. 9 pourquoi, à côté d’œuvres de notre Ainsi, une exposition-déambulation, Parcours art natonal, nous n’aurons pas peur initiatique, entre dispositifs scéniques, insallations, de présenter toute sorte d’œuvres peintures et vidéos, invesit la verrière et l’entresol étrangères et européennes. » du Grimaldi Forum. Les étudiants s’emparent de ces espaces au travers de propositions oniriques ou de Alexandre Benois détournements espiègles, avec la volonté de transmetre préface non signée à un legs plus que d’exprimer de la nosalgie. Khudozhestvennyye À l’étage, ils conçoivent une sorte d’agora au décor sokrovishcha Rossii de toiles peintes en noir et blanc, à l’image d’une forêt sombre et lumineuse à la fois. À l’intérieur d’une roulote-camisole, une vidéo inspirée des Cahiers évoque l’esprit tourmenté de Nijinski ; ailleurs, une scène mobile accueille des performances ou des specacles, tout en invitant à une réfexion sur les dimensions protéiformes du plateau. Des atracions, comme la fausse boutique-souvenir et le sudio photo, atirent le public de façon ludique, pour le diriger vers l’entresol. Là, après un passage sous le vélum d’une église russe, où fote par endroits le regard grimé de Nijinski, il accède à une grande fresque aux couleurs exubérantes, ode à l’œuvre de Baks. SP

L’Héritage, sudio préparatoire au thétre du Ponant —— 29 SAI SON L’Héritage témoignages 2 —— —— ——

Antoine Loudot Ander Zabala diplômé, DNSEP 2011 danseur chorégraphe

Cete scène conçue par Tibault Vanco et moi-même L’expérience avec les étudiants fut intéressante, car ces sous le nom de LB & FM obéissait à un principe : derniers furent très atentifs à notre manière d’aborder produire un objet foncionnel qui fasse sens dans les rapports entre nos mouvements, la srucure et le contexte du Monaco Dance Forum. Dès lors, l’espace qu’ils avaient créés. celui-ci devait être porteur du fondement même de En amont, nous avions beaucoup parlé des cete manifesation, où monsration et discussion diférentes méthodes de travail envisagées par les cohabitaient. équipes et de la difculté de produire un travail, C’es ainsi que nous avons abouti à ce grand plateau cacun de notre côté. La scène mobile produite, et ses pouvant se diviser en plusieurs modules, passant ainsi nombreuses possibilités de création d’espaces, nous ont du satut de promontoire dédié à la représentation à un fortement inspirés. espace ouvert et propice à l’écange. Pendant les performances, nous avons travaillé avec Une fois séparé en cinq îlots disincs, la srucure les deux étudiants, afn d’être en capacité d’utiliser ces laissait apparaître des rangées de gradins, proposant objets dans une certaine dynamique, tout en créant une ainsi un espace de déambulation, de dialogue ou encore sorte de corégraphie arcitecurale dans laquelle il était de repos. possible de se déplacer. Par exemple, en agissant sur Pour nous, cete srucure a également été un lieu les modules, entre les modules et vice-versa, dans les d’écange, puisque c’es autour d’elle que nous avons intersices produits, qui poncuellement surgissaient, au pu rencontrer le danseur et corégraphe Ander Zabala fur et à mesure de nos acions. accompagné de Parvaneh Scarafali et Cyril Baldy, de la En même temps, nous devions tenir compte du compagnie de William Forsythe, et produire ensemble public, qui lui aussi était forcé de se déplacer et devait une performance. rapidement s’écarter pour que la performance puisse Cet exercice fut très enricissant dans la mesure où continuer de se dérouler. nous expérimentions pour la première fois le principe Nous avons donc direcement interféré avec la de la commande, et nous avons pu suivre la producion srucure — tempo — espace et la corégraphie. de cet objet jusqu’à sa réalisation fnale. Nous avons élaboré la partie corégraphique à Francfort, mais c’es le travail développé avec les étudiants qui fut essentiel pour terminer la création dans l’espace du Grimaldi Forum. Parvaneh Scarafali, Cyril Baldy et moi-même, avons créé la partie dansée ensemble. Dans nos parcours de danseurs, nous avions déjà expérimenté diférentes formes d’espaces, dans lesquels nous devions bouger tout en étant contraints par des srucures. Aussi, nous étions rompus au travail d’improvisation et à la capacité d’interagir avec ce type d’environnement. Nous travaillons acuellement avec le corégraphe William Forsythe qui a utilisé et développé ces principes et recerces dans plusieurs de ses créations.

L’Héritage 1. ue de linsallation dans la Grande Verrire du Grimaldiorum au premier plan, la scne modulable LB & FM 2. scne LB & FM, plan 3D dispositi ouert

—— 31 L’Héritage 1. ue de linsallation cosumes pour la perormance Parade auGrimaldiorum 2. isuel ache Parcours initiatique, dessin EaMedin DEP 2011 3. sudio préparatoire au thétredu Ponant

L’Héritage 1. ue de linsallation grande toile peinte daprs Léon as au Grimaldi orum 2. sudio préparatoire coneion de robes de papier Caans peints aec lartise Isabelle de orchgrae

—— 33 L’Héritage, étapes préparatoires 1. maquees pour le Grimaldi orum, orshop aec Philippe Délis, scénographe 2. étude pour un aune, Vincent Lemasson DEP200 3. dessins omas egreergne DEP 200

L’Héritage 1. dessin Eva Medin (DNSEP 2011) 2. 3. sudio préparatoire et ue dune des insallations au Grimaldi orum

—— 35 SAI SON propos 3 —— ——

B Two Pieces + 2 A L L E T S En 2010, le projet o Pieces 2 es imaginé en puisant R dans le répertoire des Ballets russes. Les recerces U réunissent d’une part des danseurs de la compagnie des S Ballets de Monte-Carlo, des étudiants en scénographie S du Pavillon Bosio et des étudiants de l’Università di Venezia (IUAV) pour les cosumes et d’autre part, la E « Le public ne m’a pas aimé car il a Hocsculübergreifendes Zentrum Tanz (HTZ), et S voulu s’en aller. Alors j’ai commencé l’Universität der Künse de (UDK). Les équipes à jouer des coses gaies. Le public ainsi formées travaillent cacune de leur côté à la 2 a commencé à s’amuser. Il pensait création de deux pièces dansées, tout en se transmetant 0 que j’étais un artse ennuyeux, mais des informations, des croquis, des maquetes, des 1 j’ai montré que je savais jouer des idées. Elles se rejoignent ensuite pour deux resitutions 0 coses gaies. Le public s’es mis à publiques, l’une en juillet sur les terrasses du Casino de rire. Je me suis mis à rire. Je riais dans Monte-Carlo, l’autre en ocobre à l’UDK. ma danse. Le public aussi riait dans la Inspirée du ballet Le Chant du rossignol, ossignols danse. Le public a compris ma danse plonge le specateur dans le songe d’un empereur, car il eu envie de danser aussi. Je tiraillé entre la Nature et la Tekhnè. Adaptation du dansais mal, car je tombais quand il ballet éponyme, Jac in the o présente un solo sombre ne fallait pas. Peu importait au public et intrigant, dont l’écriture se concentre sur les rapports car ma danse était belle. Il avait humains parfois complexes au sein des Ballets russes. compris mon idée, et s’amusait. » Préparation fait référence au célèbre saut de Vaslav Nijinski dans Le pere de la rose de Mikhaïl Fokine ; Nijinski la pièce conjugue deux danseurs et un musicien, tous Cahiers trois unis par le désir de réaliser le grand saut. Zausend. och enfn, évocation du rain bleu, invite le specateur à pénétrer un espace-temps dont les contours se métamorphosent consamment. Au cours des deux saisons consacrées aux Ballets russes, diférents hommages — exposition, performances, specacles — sont menés au travers d’écanges foisonnants entre des srucures et insitutions culturelles, nationales et internationales. Ils contribuent à perpétuer le dialogue entre les arts entamé au début du siècle dernier, et acualisent l’indéniable modernité d’une des plus célèbres compagnies de ballet. SP

Jac in the Box, coulisses Derlin —— 37 SAI SON disribution 3 —— ——

Rossignols Préparation —— —— Chorégraphie : Mimoza Koike Chorégraphie : Anna Melnikova Scénographie : Leslie Bourgeois, Tomas Negrevergne Scénographie : Franziska Keune, Silke Bauer Cosumes : Stefano Collini, Carla Zamboni Cosumes : Franziska Keune, Silke Bauer Lumières : Leslie Bourgeois Lumières : Veit Griess Musiques : Fabian Paganini ; Guillaume Perret Musiques : Holger Tretac Danseurs : Mimoza Koike, Nathalie Nordquis, Lisa Jones, Danseurs : Florian Bücing, Felix Ariel Casillo Casro Leart Duraku Encadrement scénographie et cosumes : Oliver Brendel Coordination, encadrement scénographie et Encadrement chorégraphie : Ingo Reulece cosumes : Dominique Drillot, Gilbert Della Noce Coordination : Anna Bergel

Jack in the Box Zausend.Hoch représentations lDerlin —— —— 1. Jac in the Box Chorégraphie : Jeroen Verbruggen Chorégraphie : Jana Unmüssig 2. Zausend.Hoc Scénographie : Eva Medin Scénographie : Mirella Oesreicer, Hsuan Huang 3. Préparation Cosumes : Stefano Collini, Carla Zamboni Cosumes : Mirella Oesreicer, Hsuan Huang, 4. Rossignols Lumières : Jeroen Verbruggen Université des Arts de Berlin Musiques : Uri Caine ; Tim Garland ; Aphex Twin ; Lumières : Veit Griess Micael Buble ; Joni Mitcell ; Janis Joplin ; Cher ; Danseurs : Ma’ayan Danoc, Cecilia Nilsson, Robert Armbruser ; Aeollis Brass Band Acousica ; Tara Silverthorn, Charlie Foucier Pascal Dusapin ; Alvin Currain ; Jennifer Holiday Encadrement scénographie et cosumes : Oliver Brendel Danseurs : Maud Sabourin (Monaco), Anja Behrend Encadrement chorégraphie : Ingo Reulece (Berlin) Coordination : Anna Bergel Coordination, encadrement scénographie et cosumes : Dominique Drillot, Gilbert Della Noce

—— 39 SAI SON Two Pieces + 2 témoignages 3 —— —— ——

Jeroen Verbruggen C’es un contexte qui enricit mes propres tecniques danseur chorégraphe et méthodes de travail. Mais je serai peut-être, un jour, tenté de concevoir seul un projet de A à Z. i saB elle lOMBardO t : Tu es aujourd’hui il : Qelles trouvailles ou découvertes as-tu faites un corégraphe reconnu, pourrais-tu revenir sur tes auprès des plasiciens, et plus particulièrement dans la premières expériences dans le contexte des Imprévus ? pièce Jac in the o ? JerO en VerB ruggen : Dès mes débuts, à JV : J’avoue que cela n’a pas toujours été évident. l’École Royale de Ballet d’Anvers, en Belgique, je me Il y a des rencontres âmes sœurs, des rencontres suis essayé à la corégraphie. J’ai toujours eu envie horribles, et des rencontres avec lesquelles je suis de créer des univers, et la danse représente pour moi toujours en contac amical et professionnel. le lieu idéal. Qand j’ai commencé ma carrière de Jac in the o, par exemple, ne fut pas une danseur, je me suis toujours promis de créer au moins collaboration agréable, et pourtant, c’es une pièce dont une pièce par an, afn de ne pas perdre ce rêve et je suis encore très fer aujourd’hui, très réussie et fnie. nourrir ce besoin. Je n’oublierai jamais l’incroyable travail de la Après avoir longtemps et souvent tenté l’expérience plasicienne Eva Medin, son invesissement, sa faim avec de petits projets, disposant de peu ou pas de et sa volonté. Nous étions tous les deux très jeunes, et budget, c’es fnalement dans le cadre des soirées n’avions pas forcément encore appris à gérer nos egos, Jeunes chorégraphes (en 2007), organisées par les consitués de forts caracères et très diférents. Encore Ballets de Monte-Carlo, que m’a été donnée, et pour la une fois, ce fut une très grande leçon. première fois, la cance de créer dans des conditions il : Cete expérience t’a-t-elle permis de professionnelles. Par la suite, ces rendez-vous m’ont « t’insaller » dans une écriture corégraphique, ofert la possibilité de collaborer avec de jeunes de metre en place des principes qui sont les tiens scénographes issus du Pavillon Bosio, et de participer au aujourd’hui ? projet 2 Pieces2. Dans ce contexte, j’ai réalisé Jac in JV : On grandit de caque expérience, de caque the o, pièce jouée à Berlin et à Monaco. création. L’art corégraphique es pour moi en Ces premières opportunités, que j’ai su saisir, et consante évolution. Ce bagage es là, je n’y reviens pour lesquelles j’ai travaillé dur, demeurent aujourd’hui pas, mais il rese présent. Ce que j’exprime aujourd’hui encore mes meilleurs souvenirs. Ces moments ont se consruit sur le passé, mais contient les émotions consitué une forme d’apprentissage. d’aujourd’hui. Cete promesse de créer au moins une pièce par il : De nouvelles perspecives se sont-elles ouvertes an, je l’ai tenue. J’ai aujourd’hui la cance d’être invité sur le plan corégraphique et dramaturgique ? pour cinq créations annuelles environ, et de vivre de ma JV : J’ai toujours été fan de la forme danse / théâtre, Jac in the Box, représentations lDerlin passion. et en même temps je suis très atiré par le travail de il : Ces expériences ont-elles engendré des tecnique sur pointes. J’ai reçu une formation classique. méthodes de travail ? Mais je n’ai jamais été « classique » dans mon esprit. JV : Mon travail es visuel, je souhaite avant tout J’ai toujours craint, et pensé, que je ne trouverai pas exprimer des émotions, tenter d’oublier et de faire ma place dans un monde si divisé entre ce qui es oublier aux autres, et pour un temps, la réalité. classique et ce qui es contemporain. Mais je n’ai jamais La première carte blance, Jeunes Chorégraphes, a renoncé à cete envie et à ce besoin de mélanger les été un des plus beaux cadeaux faits à un jeune créateur langages. Il y a quelques années, quand je transmetais comme moi. Il n’y avait aucun frein, aucune barrière. des projets et mon travail aux compagnies, la réponse J’ai pu créer sans limites, tout en expérimentant, en était invariablement « non ». C’es le bouce-à-oreille même temps. qui a fnalement foncionné et m’a permis d’exiser Peu à peu, j’ai appris à donner plus d’importance aujourd’hui. à l’écriture corégraphique, car créer des univers était J’ai suivi un parcours varié, allant de compagnies déjà présent, presque de manière intuitive, dans ma extrêmement modernes, à des compagnies néo- pratique. Encore aujourd’hui, je travaille de cete façon : classiques, puis vers les grandes insitutions classiques, des visions, puis l’écriture. J’ai besoin de me metre en de petites aux grandes srucures. Je vais là où l’on danger, besoin de trouver des solutions aux défs que je veut de moi, et c’es très bien comme cela. Je me rends m’impose. compte que j’ai ma place dans le monde de la danse, pas il : As-tu ainsi envisagé d’une nouvelle manière le si divisé que cela, fnalement. processus créatif et le plateau ? il : Qelles ont été les difcultés rencontrées, les JV : Depuis cinq ans, je travaille avec diférents points d’entente (jusqu’où partage-t-on une culture créateurs : scénographes, cosumiers, lumières, commune) ? musiciens et compositeurs. Parfois, je dois remplir un de JV : J’aime travailler dans une ambiance amicale. ces poses, pour des raisons budgétaires ou autres, mais Travailler en équipe, c’es tout d’abord faire des j’aime collaborer. J’apprécie le dialogue entre artises. rencontres. Ce besoin de comprendre et de se faire —— 41 SAI SON Two Pieces + 2 témoignages 3 —— —— ——

comprendre, pour ensuite pouvoir travailler, discuter et Anna Bergel se sentir en sécurité pour défendre sa cause. directrice de producton, collaboratrice artstque et J’ai fait des rencontres incroyables ces cinq scientfque, Université des Arts de Berlin, Faculté des dernières années, et j’espère en faire encore. arts dramatques, opton scénographie Même si cete route peut paraître souvent solitaire, Oliver Brendel elle m’a permis de grandir en tant que personne, de scénographe, intervenant artstque et pédagogique, retrouver des valeurs, de prendre confance, d’être Université des Arts de Berlm Faculté des arts responsable. Aussi, on se rend très rapidement compte dramatques, opton scénographie que l’on ne fait jamais rien tout seul. J’en suis très conscient et très reconnaissant. Travailler ensemble Lors de la réalisation de notre projet intitulé oPieces2, on nous a souvent posé la quesion : comment foncionne une collaboration artisique ? Eva Medin Comment foncionne efecivement ce travail en diplômée, DNSEP 2011 commun ? Notre point de départ pour la réalisation du projet Réaliser cete scénographie a été pour moi une o Pieces 2 se résume à l’idée d’un travail collecif. expérience très formatrice. Appréhender un projet Il s’agit d’une sorte de complicité que nous avons de ses premières phases de recerces jusqu’à sa d’ailleurs expérimentée pendant des années lors de nos fnalisation sur scène, m’a permis de me confronter propres études de scénographie à l’Université des Arts à des enjeux professionnels, que je n’avais encore de Berlin et qui a su trouver des issues diférentes au cas jamais abordés en tant qu’étudiante. par cas. Ce travail, qui s’es développé pendant plus d’un Le terme de complicité, dont Gesa Ziemer se an, a été présenté à Monaco mais également à l’UDK sert dans de nombreuses publications 1 et qu’elle de Berlin. utilise dans le contexte du processus même de J’ai ainsi pu comprendre les enjeux de déplacements collaboration, provient originairement du droit pénal. d’un décor sur diférentes scènes et développer un Litéralement cela veut dire qu’il y a complicité dans dialogue privilégié avec tous les aceurs du projet. le sens de culpabilité collecive. Appliqué dans le Cete plongée dans la réalité concrète d’une œuvre cadre d’une réalisation théâtrale, cela signife que des scénographique et corégraphique a posé les bases personnes dont les capacités sont d’abord et avant qui ont contribué au déploiement par la suite de mon tout individuelles, forment temporairement une propre vocabulaire d’artise. J’y ai découvert des enjeux équipe dont l’objecif es l’excellence du travail de liés à la théâtralité, à la mise en scène des corps et de la montage et de réalisation d’une producion. D’une lumière dans l’espace ; des outils qui sont maintenant manière analogue nous pensons que le scénographe, très présents dans ma pratique personnelle. le cosumier et le meteur en scène développent leurs Cete expérience a également joué sur mon coix idées scénographiques d’une manière similaire. Leur de développer des œuvres immersives qui s’inscrivent dialogue évolue ensuite ensemble avec les aceurs et les dans une logique de projet et se consruisent au gré des musiciens et peut être même reformulé complètement. dialogues et des collaborations. L’abandon de toute hiérarcisation représente un élément essentiel du travail collecif. Nous savons naturellement que ces espaces libres de hiérarcie n’exisent pas dans la réalité. La hiérarcie srucure continuellement notre communication. C’es par le biais de cete hiérarcie que nos relations au pouvoir s’acualisent et se sabilisent en permanence. Défni par une foule Rossignols, représentations lDerlin de rôles et de positions, des posures spécifques, l’accessibilité à diverses sortes de capitaux, qui défnissent eux-mêmes à nouveau des ressources spécialisées, l’individu se voit atribuer une place dans le groupe. C’es avec un très grand intérêt, que nous observons le travail de certains collecifs issus de la scène des performances comme les She She Pop 2 ou Gob Squad 3, qui dans un processus assez lent ont développé un travail en commun. Ici il semblerait en efet qu’un discours sans hiérarcisation ait été possible. Il abolit —— 43 SAI SON Two Pieces + 2 témoignages 3 —— —— ——

tout aussi bien des foncions spécifques que des rôles 1. Gesa Ziemer : « Komplizenscaf. Eine Taktik und Ashetik der et les défnit et les consruit caque fois d’une nouvelle Kritik? » (Complicité. Une sratégie et une eshétique de la critique ?) manière. in Jôrg Huber, Philipp Stôllinger, Gesa Ziemer, Simon Zumseg Loin de toute hiérarcie prédéfnie par le pouvoir, (Editeur) sheti der riti der Verdecte Ermilung (Eshétique des srucures hiérarciques s’ajusent : par la ou critique, ou l’enquête cacée) Série T: G/05. Zuric, Vienne New compétence ou la confance elles se transforment en York 2007. Gesa Ziemer : omplizenscha. Eine olletie uns- une compétence en rapport avec l’Autre. De la sorte, und lltagsprais (Complicité, un art collecif dans la pratique la confance es le début de toute collaboration. Elle quotidienne) htp://gesa-ziemer.c/ simule la confance en la compétence complice. 2. htp://www.sheshepop.de Mais avant tout, c’es l’imaginaire de l’Autre qui 3. htp://www.gobsquad.com nous intéresse. Une communication réussie et une collaboration efcace demandent, sollicitent même, l’intérêt et la curiosité au sujet de la pensée de l’Autre. C’es à l’intérieur du processus artisique que les protagonises devraient communiquer et développer leurs idées interacives. De cete même façon, ils acquièrent la capacité de prendre des décisions responsables. Pour nos projets futurs il serait souhaitable que la réfexion théorique sur la manière de collaborer, le « travailler ensemble », prenne davantage de place. Nous prêtons une atention toute particulière aux comportements et à la pensée des diférents protagonises, leurs manières de travailler et de communiquer, leur façon de se comporter en groupe et leur manière de générer des savoirs, c’es-à-dire leur capacité réfexive au sujet d’eux-mêmes et de l’autre, ainsi que leur compréhension des atributions de rôles dans les diférentes disciplines artisiques. Parallèlement et sous l’égide de la théorie de la communication qui dit que toute entente trop facile ne conduit pas forcément à une augmentation de nos connaissances, nous nous atacons à rendre les étudiants capables d’imaginer et d’expérimenter des sratégies de communication efcaces. Mais une quesion rese centrale : comment travailler ensemble dans des projets artisiques ? — Anna Bergel

Épilogue Le processus de réalisation de la producion oPieces2 s’es déroulé sur 2 ans. Cela représente un processus lent pendant lequel il s’agissait de braver quelques tempêtes ! Ajoutons que la collaboration avec nos collègues de l’École Supérieure d’Arts Plasiques de la Ville de Monaco était une expérience merveilleuse : un grand merci à Isabelle Lombardot, lvana La Fata, Gilbert Della Noce et Dominique Drillot. Nous remercions également Jean-Chrisophe Maillot, qui a témoigné d’une très grande confance et qui a soutenu cete entreprise et ce processus par son engagement. Merci aussi à Carole Laugier et le Monaco Dance Forum pour le soutien généreux à l’égard de ce projet. — Anna Bergel, Oliver Brendel

Zausend.Hoc, représentation sur les terrasses du Casino, Monaco —— 45 1. 2. Jac in the Box, répétitions lDerlin 3. Rossignols, insallation du dispositi scénique lDerlin

orshops et séances detraailpréparatoire 1. 3. dessins préparatoires 2. au ateliers des allets deMonte-Carlo . lDerlin . . lEP Monaco, aec lesétudiants de lIV de Venise

—— 47 SAI SON propos 4 —— ——

I Changement de décor M P R É V U S En 2011, la thématique porte sur le Changement de décor — de situations scéniques, de corps, d’objets —, 2 interrogé à l’aune des expériences scénographiques de 0 peintres comme Gilles Aillaud, Antonio Recalcati ou 1 Eduardo Arroyo. Dans Vibrations, les oi de la danse, le danseur 1 « Les moyens requis pour cet ace réagit aux ondulations de deux longues cordes. Éclairant de transfguraton sont la forme comme des néons, elles se détacent du rese de la et la couleur, moyens du peintre scène plongé dans le noir et dessinent en serpentant des et du sculpteur. Le lieu de cet ace formes lumineuses. Elles produisent en fendant l’espace de transfguraton es la srucure le son d’un soufe qui accompagne la danse. formelle, consructve, de l’espace La corégraphie d’sinato graphique, quant et de l’arcitecure, œuvre de à elle, se transforme comme un kaléidoscope, en l’arcitece. C’es par là que se ofrant de saisissants contrases entre la poésie des défnit, dans le domaine de la scène, corps et la recitude graphique des projecions. La le rôle de l’artse plastcien, de celui scénographie es en efet uniquement défnie par la qui fait la synthèse de ces éléments » lumière et l’intervention sur le plateau des tecnologies numériques. Oskar Schlemmer Daphnis et Chloé ravive les émois du premier désir Théâtre et abstracton amoureux, au travers du texte original de Longus et (l’espace du Bauhaus) de l’argument de Mikhail Fokine et Maurice Ravel. Deux couples réalisent, l’un à la suite de l’autre, une corégraphie similaire devant deux vidéos diférentes. Dans la première, le trait d’Ernes Pignon-Ernes se déploie pour dessiner des anatomies ; le second, une animation facétieuse et bucolique, montre les tribulations d’un troupeau de brebis efrontées. Enfn, otall ol fait appel à un décor épuré, consitué de bandes de tissu blanc, colorées par la projecion lumineuse. Conçues pour être modulables, dépliables comme un origami, elles mutent sur scène sans discontinuer. Rapidement, le cadre pitoresque saturé de kitsc craque de toutes parts pour sombrer dans l’absurde. Ces recerces scéniques sont mises en perspecive avec la pluralité des pratiques plasiques contemporaines, en faisant le coix d’une scénographie minimalise qui met l’accent sur la force d’expression d’un objet unique sur scène. SP

Totally Folk, —— 49 SAI SON disribution 4 —— ——

Vibrations, les voix de la danse (extraits) Osinato graphique —— —— Durée : 16 min Durée : 13 min

Chorégraphie : Ramon Reis Chorégraphie : Julien Guérin Scénographie : Antoine Loudot Scénographie : Louise Parnel Lumières : Dominique Drillot, Samuel Tery Musiques : Passacaille, ugue 2 pour orgue, Direcion musicale : Stephano Visconti Johann Sebasian Bac ; arrangement pour piano, Musiques : igeunerlieder 11 chants iganes op.103, Eugen d’Albert Johanes Brahms, Eric Breton, Flavio Romano Interprète piano : Erns Breidenbac Danseurs : (élèves de l’Académie Princesse Grace) Danseurs : (élèves de l’Académie Princesse Grace) Carmen Andres, Katarzyna Kucarska, Qinn Pendleton, Liam Blair, Jeanne Berdalle, Meiri Maeda, Lauren Elodie Puna, Frances Murphy, Lenneke Vos, Ediz Erguc, Baznik, Yi Sun, Rafaele Zarrella, David Navarroyudes, représentations au ateliers des allets de Monte-Carlo Ian Parsons, Stefan Stewart Alessandro Giovine, Alessio Scognamiglio, Shizen Kazama, 1. Vibrations, les voix de la danse (extraits) Kennedy Kawai Ligget 2. Osinato graphique 3. Daphnis et Chloé Daphnis et Chloé (2 extraits) 4. Totally Folk —— Totally Folk Durée : 2 × 10 min —— Durée : 12 min Chorégraphie : Jean-Chrisophe Maillot Lumières : Dominique Drillot, Samuel Tery Chorégraphie : Jeroen Verbruggen Cosumes : Jérôme Kaplan Scénographie : Tina Alloncle, Douce Hollebecq, Vidéo (version originale) : Ernes Pignon-Ernes Corentin Bucaudon Vidéo (nouvelle version) : Eva Medin, Cosumes : Carolyn Rose Tony Barthélémy, JP Racca-Vammerissse Musiques : Goldberg ariation 22, Johann Sebasian Bac Direcion musicale : Stephano Visconti (arrangement Uri Caine) ; PasseoMedio, den Musiques : igeunerlieder 11 chants iganes op.103, lersen gaillarde, Capilla Flamenca ; LapagnaI, Johannes Brahms, Maurice Ravel, Eric Breton, Te Purcell Consort of Voices ; erse 0, Flavio Romano Georg Friedric Haendel, Max Emanuel Cencic Danseurs : (Ballets de Monte-Carlo) Anjara Balleseros, Danseurs : (élèves de l’Académie Princesse Grace) Jeroen Verbruggen, Kaori Tajima, Asier Edeso ; (élèves Makoto Mori, Lisa Lanteri, Sayaka Tsukui, Nanami Saikusa, de l’Académie Princesse Grace) Carmen Andres, Liam Blair, Takeaki Miura, Rafaele Zarrella, Shizen Kazama Katarzyna Kucarska, Qinn Pendleton, Elodie Puna, Frances Murphy, Lenneke Vos, Ediz Erguc, Ian Parsons, Stefan Stewart

—— 51 SAI SON Osinato graphique témoignages 4 —— —— ——

Louise Parnel classique, tout en utilisant un camp plus libre au diplômée, DNSEP 2011 niveau du mouvement, afn de leur permetre de trouver des cemins plus organiques ou naturels. Cete collaboration avec Julien Guérin a d’abord été une Ce coix artisique s’es fait dans un but atirance commune entre nos univers. Dans mon idéal, pédagogique, c’es-à-dire pour ofrir aux jeunes la scénographie devait souligner la corégraphie et danseurs la possibilité de se consruire et en tant défnir l’espace, mais aussi, se faire oublier. Rapidement, qu’interprètes, de metre en pratique leurs acquis nous étions convenus de travailler pour un espace tecniques au service d’une création, de les placer en épuré, sans décor matériel, uniquement composé de situation de recerce. Mon objecif était également de projecions graphiques en mouvement. les metre en valeur d’un point de vue eshétique, de La musique coisie par Julien a été notre point de les sublimer. J’ai ainsi dessiné diférents espaces en leur départ. atribuant des parties corégraphiques disinces. Un Dans un premier temps, j’ai imaginé une découpage s’es organisé autour de solos, de duos, de scénographie évolutive en retranscrivant d’une quatuors, danses de garçons, danses de flles, etc. manière graphique ce que m’évoquait la Passacaille Louise es venue régulièrement assiser aux de J.-S. Bac. Dans un second temps, j’ai suivi la répétitions et en a très vite perçu les enjeux. Sa présence création de la corégraphie et retranscrit tous les a permis une réelle et étroite collaboration entre mouvements des danseurs dans l’espace. La première nous. Elle m’a suggéré de rendre visibles les dessins partie des animations a été réalisée en foncion des spatiaux formés par les déplacements des danseurs et déplacements des danseurs, afn de les syncroniser de jouer sur le graphisme de l’espace, en utilisant la avec la corégraphie. La seconde a, quant à elle, été lumière produite par des vidéoprojeceurs et diférentes pensée en lien avec la musique sans se préoccuper des tecniques d’éclairage. mouvements des danseurs. Louise a réalisé plusieurs maquetes, sur papier et La couleur ne fait son apparition qu’au milieu de ordinateur, exprimant le rendu visuel qu’elle souhaitait la pièce, marquant le cangement de rythme de la apporter, et ce qu’elle pensait intéressant pour faire musique. Les cosumes ont été réalisés, d’après mes évoluer la pièce. Elle a également conçu les cosumes, croquis, par l’atelier confecion des ballets. Ils ont repris qui ont été réalisés avec l’aide de Jean-Micel Lainé, cef les dégradés de gris présents dans les projecions. cosumier des BMC. Ces derniers, faits de diférentes Pouvoir concrétiser un projet scénographique dans tonalités de gris, ont permis aux corps des danseurs les conditions des Imprévus a été une grande cance. Le d’être en osmose avec la scénographie. Les fgures travail de l’espace à écelle 1 a été une expérience spatiales efecuées par les danseurs, à partir de mon fondamentale qui m’a été très utile pour les projets qui écriture, ont créé un graphisme que Louise a sublimé ont suivi. Même si, aujourd’hui, je me suis éloignée de par les éclairages et les cosumes. la scénographie pour me rapprocer du dessin, le lien Ce qui nous a rassemblés, tout au long de ce travail entre mon travail et l’espace es toujours présent. de création, c’es la musique de J.-S. Bac. Elle a donné, à mon sens, deux aspecs à la pièce : mathématique et poétique. Le titre qui en découle, sinato graphique, symbolise à la fois les répétitions et ses variantes. Julien Guérin Je pense que cete collaboration rese un merveilleux danseur chorégraphe moment de partage entre les élèves danseurs, Louise et moi-même, car le travail a été complémentaire. Il La collaboration entre Louise Parnel et moi-même s’es s’es déroulé dans l’écoute et dans le suivi du projet, établie grâce au partenariat entre les Ballets de Monte- des premières répétitions jusqu’à la première des Carlo où je suis danseur (et corégraphe) et le Pavillon Imprévus. Un très beau souvenir... Huit ans, déjà. Bosio où Louise Parnel était étudiante en 2011. Luca Masala, direceur de l’Académie de danse Princesse Grace, m’a proposé de corégraphier et créer une pièce pour ses élèves. J’ai composé cete pièce absraite à partir de la Passacaille, pièce musicale de J.-S. Bac, interprétée au piano. La forme répétitive de cete œuvre, un osinato, consitue le socle de l’écriture corégraphique. Les diférentes phrases musicales se juxtaposent, ce qui permet de créer un vase camp de rythmes et de phrasés, tout en gardant une base consante. J’ai utilisé un langage corégraphique propre aux Osinato graphique, représentations au ateliers des allets de Monte-Carlo élèves danseurs de l’Académie, basé sur un vocabulaire —— 53 représentations au ateliers des allets de Monte-Carlo 1. 2. Vibrations, les voix de la danse 3. Totally Folk

1. lumire, étape préparatoire 2. 3. dessins Louise Parnel 4. Vibrations, les voix de la danse, ntoine Loudot, Jean-Chrisophe Maillot, amon eis

—— 55 SAI SON propos 5 —— ——

I Les Dispositifs M P R É V U S L’édition 2012 propose des réponses à la quesion suivante : comment concevoir une producion 2 plasique dédiée à la danse, au travers d’un unique 0 médium de la scénographie ? 1 Portées, entres autres, par le texte de Giorgio « Le phénomène de l’espace es Agamben, es-ce quun dispositi, les recerces 2 déterminé par une limite fnie dans se focalisent sur les relations particulières que peut un camp d’acton infni, par le entretenir la danse avec la lumière, le décor et la mouvement des corps mécaniques musique. Des ateliers sont développés, metant à ou organiques et la variaton de la l’œuvre caque médium séparément. lumière ou des sons à l’intérieur L’atelier lumière permet d’étudier les facultés de cet espace délimité. La créaton narratives et révélatrices des tubes fuorescents, de l’espace animé, vivant, c’es- des téléviseurs à tube cathodique, des lampes à-dire artstque, suppose une conventionnelles ainsi que des projeceurs de specacle. maîtrise supérieure de toutes les Ce lexique d’outils trouve son articulation dans la pièce exigences naturelles de la satque, Verirrung der Gehle, adaptation corégraphique de la mécanique, de l’optque et de de la nouvelle de Stephan Zweig : La Conusion des l’acoustque nécessaire pour donner sentiments. corps et vie à l’idée. » L’atelier décor explore les potentialités de diférents volumes, qui induisent des fgures corégraphiques Walter Gropius nouvelles, tout en transformant sans cesse l’espace du La Constructon des théâtres plateau. Ainsi, la pièce Ichi i an engendre un élégant duo amoureux, tandis que les scénographes se muent en des performeurs invesis, faisant corps avec les éléments scéniques qu’ils déplacent à vue. Litéralement, les corps et les décors accompagnent dans la danse les deux protagonises. Élaboré en partenariat avec le Conservatoire à Rayonnement Régional – Pierre Cocereau de Nice, l’atelier son et acousique crée une combinaison musicale surprenante. Telles des balises dans un espace immersif, Des-compositions déploie sur scène un inventaire d’insruments insolites, trufés de micro piezzos. On entend la céramique se désagréger dans l’eau, une bouilloire vociférer un cataclysme potentiel, des ballons hurler leur désarroi, des câbles d’acier grincer en haute-contre, un maelsröm sonore auquel le danseur répond de sa danse viscérale. SP

Ici Ni San…, représentations aux ateliers des Ballets de Monte-Carlo —— 57 SAI SON disribution 5 —— ——

Verwirrung Der Gefühle Des-compositions (La Confusion des sentiments de S. Zweig) —— —— Durée : 15 min Durée : 15 min Chorégraphie : Gaëtan Morloti Chorégraphie : Julien Guérin Lumières : Tina Alloncle, Samuel Tery Scénographie : Tina Alloncle, Tony Barthélémy, Musique : Création collecive interprétée en direc par les Jordan Pallagès élèves du Pavillon Bosio et du conservatoire de Nice Cosumes : Jean-Micel Lainé, Tina Alloncle Scénographie, interventions sur scène : (ESAP) Remi Lumières : Dominique Drillot, Samuel Tery Leserle, Céline Fantino, Charlène Dray, Camille Franc- Musiques : Antonio Vivaldi, , Trafc Qintet, Guerra, Douce Hollebecq, (Conservatoire à Rayonnement Joseph Haydn Régional de Nice) Simon Leopold, Jean-Baptise Zellal, Arrangements : Jérôme Marcand Rémi Vacerot Coordination : Dominique Drillot Coordination : Damien Sorrentino, Jean-François Laporte Danseurs : (Ballets de Monte-Carlo) Noelani Pantasico, Danseur : (Ballets de Monte-Carlo) Gaëtan Morloti Vanessa Henriques, Anne-Laure Seillan, Sivan Blitova, Sarah Jane Medley, Gaëlle Riou, Maude Sabourin, Jérôme Marcand, Raphaël Boucard (For)Play —— Durée : 15 min Ichi Ni San… —— Chorégraphie : Bruno Roque Durée : 15 min Scénographie : Corentin Bucaudon Cosumes : Jean-Micel Lainé, Corentin Bucaudon Chorégraphie : Mimoza Koike Lumières : Bruno Roque, Dominique Drillot, Samuel Tery Scénographie et performers : Fanny Raiola, Camille Musiques : ulgarian Chics, Balkan Beat Box ; a ong, Franc-Guerra, Guillaume Braquet, Amandine Koc, Dead Combo ; Lisboa Mulata, Dead Combo ; quele eio Aurélie Frisina, Flora Kuent, Tony Barthélémy, Julia Oto Eterno, Dead Combo Cosumes : Jean-Micel Lainé, Mimoza Koike Danseurs : (élèves de l’Académie Princesse Grace) Lauren et les étudiants Baznik, Shizen Kazama, Alessio Scognamiglio, Mikio Kato, Lumières : Dominique Drillot, Samuel Tery, Surimu Fukushi Mimoza Koike Musiques : Berlin, Alva Noto & Ryuici Sakamoto ; tme, Malte Burba ; Le remblement de terre, Mica Vanony ; Jnethe, Aphex Twin Arrangements : Mica Vanony Coordination : Gilbert Della Noce représentations au ateliers Danseurs : (Ballets de Monte-Carlo) Makoto Mori, desalletsdeMonte-Carlo Daniele Delveccio 1. Ici Ni San… 2. Verwirrung Der Gefühle (La Confusion des sentiments de S. Zweig) 3. Des-compositions 4. (For)Play

—— 59 SAI SON Des-compositions témoignages 5 —— —— ——

Remi Lesterle Damien Sorrentno diplômé, DNSEP 2015 professuer d’acoustque, Installatons et dispositfs au Pavillon Bosio J’ai une atirance marquée pour le médium son, et c’es donc naturellement qu’en 2012, les enseignants Pour les Imprévus 2012, nous décidons de dédier m’ont proposé de « squater » les diférents sudios la session aux diférentes composantes de l’espace d’expérimentation sonore qui ont conduit à la pièce Des- scénique : son, lumière, dispositifs. compositions. C’es ainsi, en pirate embarqué — j’étais en Chaque discipline es à l’origine d’un projet principe trop jeune pour y participer — que j’ai abordé scénographique et corégraphique, et donne lieu à trois pour la première fois les Imprévus. pièces dansées et corégraphiées par les danseurs des Au travers des interventions de Jean-François Ballets de Monte-Carlo. Laporte, le travail de recerce s’es orienté sur la Je consacre mon travail bien évidemment au son création d’objets sonores. Qelle meilleure introducion et lance des invitations vers un compositeur et de à la pratique bruitise, pour des plasiciens, que cete jeunes musiciens de la classe d’élecroacousique de fabrication, à mi-cemin entre la lutherie expérimentale Micel Pascal au Conservatoire de Nice. Pour mener et une sorte de macine à bruiter les flms d’horreur ? à bien cete entreprise, nous avons eu la cance de Premiers écaufements — d’après des pièces de pouvoir organiser plusieurs ateliers d’une semaine dans Jef (Jean-François Laporte) : concert de ballons de diférents lieux en foncion des phases de réalisation baudruce et larsens contrôlés par saladier (et autres (ateliers de consrucion, salle de répétitions, scène de bouées). Dans la foulée commence la création des théâtre…) outils : tubes de PVC, brosses métalliques, et ressorts de plusieurs mètres subissent alors des mutations (usuelles La genèse d’un specacle sinon formelles) pour devenir de vrais insruments, Ce travail a pour point de départ la conception, la avec leurs vocabulaires de jeu, leurs subtilités et leurs réalisation et la consitution d’un orcesre amplifé variations. Premières consatations : le rapport au son es possédant un large regisre de sons et de modalités profondément physique et sa pratique es intimement liée de jeux, lors d’un workshop avec le compositeur et au mouvement. Ainsi un dialogue, un allez-retour, peut performeur Jean-François Laporte. commencer à s’insaurer entre le corégraphe-danseur Nous réalisons avec les étudiants trois types d’objets et les interprètes, une matière commune es apparue, le produisant des sons sur scène : l’objet amplifé, le mouvement transformé spontanément en son auquel dispositif sonore, l’insrument élecroacousique. Entre répond le son, transformé tout aussi spontanément en accessoire, sculpture et lutherie expérimentale, les mouvement par Gaëtan (Morloti). étudiants conçoivent et développent de nombreux outils La « musique » ainsi obtenue (Pierre Scaefer et sonores et musicaux. Des-compositions, représentation au ateliers des allets de Monte-Carlo Pierre Henry détaillent beaucoup mieux ce terme que Certains sont acifs, d’autres sont passifs, certains moi) sert de liant à la srucure générale du specacle, tout serviront le projet du danseur, d’autres ceux des juse émergente : les interprètes — musiciens — produisent performeurs, certains sont visibles, d’autres moins du mouvement, ils doivent donc accompagner Gaëtan sur apparents la plupart s’entendent. À la fn de la scène, de même les mouvements de Gaëtan doivent être première session de travail avec Jean-François Laporte, capables de produire de la matière sonore, donc il sera une proposition es faite au danseur corégraphe, qui sonorisé. L’alliance des sons profonds des insruments et rejoindra l’équipe dès le deuxième temps de travail, des geses de Gaëtan va ainsi créer le fl rouge de la pièce : pour une semaine de recerces d’improvisations et de l’idée de raconter une nouvelle cosmogonie, qui a lieu répétitions dans l’ancien théâtre du Ponant aujourd’hui sous nos yeux dans l’espace scénique. transformé en cinéma. Cete première participation pour moi aux Une troisième phase de travail a été dédiée à Imprévus a peut-être été la plus rice d’insrucion et a l’élaboration de dispositifs scéniques (sonores et non particulièrement contribué à consruire ma vision de la sonores), ainsi qu’à l’amélioration et la fabrication création d’un specacle : de nouveaux insruments (plus adaptés aux pises — dans la continuité de la pensée d’Anton Tcekhov, explorées précédemment). le nécessaire amène la forme : tout objet présent dans Enfn, une semaine es consacrée aux répétitions et à l’espace scénique doit prouver son utilité dans la la création lumière. dramaturgie en cours ; — le son (et non juse la musique) compte au moins Qand le gese devient son autant que la vision dans la perception du specateur, il Le gese musical, l’acion, la danse, la représentation doit donc faire l’objet de la même atention lors d’une De l’improvisation à l’écriture création. Lors des séances de répétitions et par le biais de l’improvisation, les étudiants peuvent inventer et metre au point des tecniques de jeu insrumentales pour créer —— 61 SAI SON Des-Compositions témoignages 5 —— —— ——

des univers sonores, entre musique concrète, bruits et composition élecroacousique. C’es ici par le biais de l’expérimentation et de l’improvisation libre que diférentes intentions s’expriment. Il s’agit ensuite de les isoler et de les organiser en un tout cohérent. Logique subtile et fragile qu’il faut saisir et traduire pour sa reproducibilité. Entre conduite et partition, les étudiants doivent trouver une écriture propre au projet.

De l’espace scénique comme un jeu de go Sur scène, tout commence par un vide que l’on occupe petit à petit comme sur un jeu de go. On y crée des tensions, on défnit des zones de représentation, des zones de jeu pour le danseur comme pour les musiciens. Une logique intrinsèque à cet espace émerge et se précise au fl des répétitions. Mise en place des insruments et dispositifs scéniques comme la consrucion d’un monde.

Qand le son devient espace, mise en scène, mise en son Le son possède cete capacité d’évoquer sans dévoiler, d’écafauder à la fois des espaces physiques et mentaux, visuels et spatio-temporels. Ici, tous les sons sont Ici Ni San…, représentation au ateliers des allets de Monte-Carlo produits sur scène par les musiciens, les performeurs et le danseur. Une connexion physique et spatiale s’établit entre le danseur et les objets, les insruments, les dispositifs scénographiques et les musiciens performeurs. En régie, un opérateur gère, quant à lui, les niveaux sonores et les répartit dans l’espace de difusion, entre la scène et la salle.

Composante fondamentale du projet, le temps s’es imposé de lui même après plusieurs séances de répétitions, comme une logique physique et mentale intrinsèque au projet : 18 minutes. La lumière es créée en dernier, pour acever de délimiter les espaces et les diférentes ambiances du projet. Un specacle multidimensionnel s’es dessiné, dans lequel l’espace et le temps ont été induits par des musiques et des sons, par les lumières qui, les animant, éclairaient des corps dans la nuit.

—— 63 représentations au ateliers des allets de Monte-Carlo 1. 2. Verwirrung Der Gefühle sudios préparatoires 3. (For)Play 1. maquee 2. 3. orshop préparatoire aec Jean-ranois Laporte au thétre du Ponant, étudiants de lEP et du Conseratoire raonnement régional de ice . lage, ateliers des allets de Monte-Carlo . léquipe 2012 eunes chorégraphes, eunesscénographes

—— 65 SAI SON propos 5 BIS —— ——

I Le Bal des chimères M P R É V U S Accompagné par Maca Makeief à la mise en scène, un groupe d’étudiants es invité à concevoir, 2 parallèlement aux Imprévus, une performance à partir 0 de l’œuvre de Jérôme Bosc : LeJardin des délices. C’es 1 plus précisément l’une des parties de ce triptyque, LeJugement dernier, qui vient nourrir leur imagination. 2 « L’imaginaton humaine a complété Dans la Rue de l’Atelier des Ballets, de grandes toiles le réel par tout un univers peintes, conçues comme une fresque, sont déployées fantasmagorique, très rice et très pour occuper et transformer l’espace en un inventaire varié […] Les monsres peuvent théâtral de la cruauté. En son centre, une forme prendre quantté de formes intitulée Le al des chimres lantichambre, croît, intéressantes ; par exemple, ils se déplie, et lentement se répand, comme une sorte ofrent à la libre inventvité de de déflé à la fois macabre et burlesque. Au bout d’un l’artse des ressources immenses en podium représentant le purgatoire, une balance des arabesques ou entrelacs. Ils prêtent âmes oriente les protagonises vers le paradis ou l’enfer, à ces correspondances entre formes selon la sentence prononcée. animées et formes arcitecurales. » Consituée de cosumes, d’accessoires, de sculptures et tableaux vivants, cete curieuse procession interprète, Etenne Souriau à sa manière, la peinture du maître famand où les Vocabulaire d’esthétque douleurs et les délices se côtoient, s’altèrent ou se transcendent. Les étudiants performeurs-amateurs acceptent, pour ce rendez-vous, d’habiter leurs personnages et de jouer le jeu. Cete expérience grandeur nature es appréhendée comme un moyen d’expérimenter des dispositifs scénographiques liés à la mise en scène de cosumes, elle permet ainsi une autre approce de la relation entre outils visuels, plasiques, sonores. SP

Le Bal des cimères, réalisation des toiles peintes, théâtre du Ponant, —— étudiants de 1 année, dessin de Sabrina Elarbi 67 SAI SON Le Bal des chimères témoignages 5 BIS —— —— ——

Sabrina Elarbi pour leur symbolique démoniaque. À titre d’exemple, diplômée, DNAP 2012 le cuir, sélecionné pour l’eshétique des rapports de domination, ou pour sa manière de personnifer le Je garde un très bon souvenir des Imprévus 2012. mal dans certaines œuvres de science fcion, tels les Cete année-là, nous avions pour thématique le Borgs dans tar re, ou encore les démons Cénobites purgatoire et le jugement dernier. Ce fut l’occasion pour dans les flms d’horreur de Clive Barker (Hellraiser). moi de faire exiser mes dessins dans un format colossal Ainsi, déflaient ces personnages. Specres vêtus de à l’intérieur d’une scénographie vivante. Au-delà de la cuir, extirpés d’un monde lointain ou revenus d’entre conception des dessins, de mes petits monsres sur fond les morts. Cete sorte de procession se déplaçait d’enfer pour lesquels j’ai pris un réel plaisir à travailler, solennellement, pour fnalement ateindre une esrade je retiens surtout de cete expérience un véritable travail et se rassembler en un jury infernal. Ce jury était placé collaboratif. De la réalisation des dessins sur de grandes sous l’autorité implacable du monarque Triton à la toiles de plusieurs mètres par une quarantaine d’autres fourrure qui siégeait sur un trône aux allures de mirador petites mains d’étudiants encadrés par Marc Van Helden et ordonnait les sentences infigées. et Frédéric Pohl, à la réalisation des incroyables Je conserve du Bal des chimères, de vives images cosumes, en passant par la lourde organisation et de joie et le souvenir de beaucoup d’excitation, les l’enricissante coordination du travail de cacun. diférents aceurs de ce vase projet travaillant en cœur Je garde le sincère souvenir d’un travail d’équipe autour de ce moment diablement scénographique et producif. humain. Nous avons fni rincés, des étoiles plein la tête, tous écoués sur les marces des ateliers des Ballets de Monte-Carlo, sans avoir eu le temps de prendre la mesure de ce qui venait de nous arriver... J.-P. Racca-Vammerisse diplômé, DNSEP 2012

Revenir au Bal… 2012 était l’année de mon diplôme, dans une atmosphère de fn du monde annoncée par le calendrier maya. Je n’avais pas de temps à perdre pour créer. Cete dernière année fut intense et aussi un temps béni, rempli de recerces et de trouvailles. Maison-monsre es le titre générique donné à l’ensemble du travail que j’ai produit dans le cadre du Bal des chimères. Tout a commencé par la lecure de LaVénus la ourrure de Sacer-Masoc. Ce récit s’atace à décrire la relation entre un homme et une femme, où l’amour prend la forme d’un esclavage librement coisi et consenti. J’y ai découvert « un univers de phantasmes et de suspens, rempli de femmes de pierre, de travesis, de geses punisseurs, de crucifxions et même de câtiments pour des fautes non encore commises. » (Gilles Deleuze, Leroid et le cruel) À partir de cete lecure, les rapports de forces sont devenus la pierre angulaire de ce projet, mais aussi, par ricocet, de mes problématiques personnelles. Pour Maison-monsre, j’ai inventé une forme de cosmogonie, créé un groupe de personnages qui foncionnait autour d’un couple royal et en consituait la cour. Ce groupe était srucuré en deux clans opposés, roi contre reine à leurs têtes. À l’insar d’un jeu de rôle, tous ces personnages incarnaient des situations dont l’étrange duo royal 1. 2. Le Bal des cimères, dessins préparatoires, abrina Elarbi consituait l’épicentre. Leur règne caotique consisait 3. 4. Le Bal des cimères, Maison-monsre, cosumes J.-P. acca-Vammerisse en un régime totalitaire. Les matériaux utilisés avaient été coisis pour leurs diférentes textures et efets de matières, mais surtout —— 69 Le Bal des cimères, perormance dans la ue desateliers des allets de Monte-Carlo

Le Bal des cimères 1. perormance dans la ue des ateliers desallets de Monte-Carlo 2. dessin Céline antino 3. premiers essais, sudio préparatoire au thétre du Ponant

—— 71 SAI SON propos 6 —— ——

I L’Objet scénique M P R É V U S 2013 consacre la place de l’objet sur scène, dans une relation qui, selon la meteure en scène et plasicienne 2 Maca Makeïef, « n’écappe pas à l’idée de Révélation ». 0 Cete année-là, les Imprévus prennent forme dans le 1 sillage du colloque Lbet scénique : deux événements phares du programme de recerce be o tage 3 « Inerte l’accessoire ? Qu’on ne développé par le Pavillon Bosio. s’y trompe pas, les objets ont à Comment l’objet intervient-il sur scène aujourd’hui ? voir avec la légèreté des aceurs, Qelles foncions recouvre-t-il et quelle eshétique avec leur liberté de mouvement produit-il à l’heure des associations entre animé et sur le plateau. Ils ont le matériau inanimé, bricolage et producion de masse, féticisme dramatque, et à ce ttre font et déni de la matérialité ? Telles sont les diférentes parte d’une lise primordiale dans quesions qui viennent enricir les expériences. l’élaboraton du specacle. Les coisir Huit ballets en découlent, dans lesquels l’accessoire, es le même casse-tête, le même érigé véritablement au rang d’argument narratif, forme décirement, la même frusraton, la clé de voûte de la corégraphie. Réparties sur deux la même excitaton que faire une soirées, les pièces carrient dans la danse tout un disributon. » arsenal hétéroclite. Il y a les caises molles de Memor ouse, les fenêtres suspendues et les plumes de Macha Makeïef Murmuring indos, la soucoupe-matrice de e ill Ces choses de la scène to Eplore ou la barricade-écran à l’œuvre dans adus (revue Pavillon n°5) and us. L’on entend également tinter les écailles d’un cosume en céramique dans ruits blancs, l’on voit les écrans à la fois opaques et transparents de oir de te, le paravent, scène de crime de Crimes eemplaires, et enfn les réceptacles des diférents états de l’eau (écrans, tuyaux, bacs) dans o em. Ces éléments, non seulement accompagnent le sens de la corégraphie, ils ofrent aussi une réponse tangible à l’acion des corps. Plus qu’une révélation, il es alors possible de percevoir dans la confrontation du corps dansant aux objets une sorte d’épiphanie, l’invisible vibration d’un éco. C’es d’ailleurs une absence qui inspire la réfexion sur l’objet scénique, et cete édition paradoxalement si prolixe en propositions : celle du père du meteur en scène Jan Lauwers, dont la pièce La Chambre dIsabella révèle, au travers de la foultitude des objets ayant appartenu au défunt, la persisance du gese. SP

No Rem, représentations aux ateliers des Ballets de Monte-Carlo —— 73 SAI SON disribution 6 —— ——

TAPIS NOIR TAPIS GRIS

Bruits blancs (performance) Memory House —— —— Durée : 10 min Durée : 15 min

Cosumes : Douce Hollebecq, Camille Franc-Guerra Chorégraphie : Anja Behrend Lumières : Camille Franc-Guerra Scénographie : Tina Alloncle, Johanna Braun Musique : Greenelds, Te Brothers Four Cosumes : Anja Behrend, Tina Alloncle Interprète : Douce Hollebecq Lumières : Tina Alloncle Musiques : El planeta, either Predator nor Pre, Von Magnet ; Laias Journe, Max Ricter Soir de Fête Danseurs : Aurélien Alberge, Asier Edeso, George Oliveira, —— Maude Sabourin Durée : 13 min

Chorégraphie : Julien Guérin Murmuring Windows Scénographie, lumières : Charlène Dray —— Cosumes : Julien Guérin Durée : 12 min Musiques : La ource etraits, Leo Delibes représentations au ateliers Piano : Lucas Mais Chorégraphie : Leart Duraku desallets de Monte-Carlo Danseurs : Raphaël Boucard, Asier Edeso, Alexis Oliveira, Scénographie : Fanny Lavergne, Corentin Bucaudon 1. No Rem Lucien Poslewaite, Alvaro Prieto, Gaëlle Riou, Lumières : Fanny Lavergne, Corentin Bucaudon, 2. Bruits blancs (performance Anne-Laure Seillan, Kaori Tajima Leart Duraku Douce Hollebecq, DNSEP 2013) Musiques : Les Yeu noirs, Sanie Cuzurgalai ; Luz de luna, 3. Crimes exemplaires Chavela Vargas ; Er nemo lants, Bratsc 4. Soir de fête Crimes exemplaires Danseurs : Raphaël Boucard, Edgar Casillo, Ediz Erguc, 5. Te Will to Explore —— Giovanni Mongelli, Gaëlle Riou, Beatriz Uhalte 6. Memory House Durée : 13 min 7. Murmuring Windows 8. Sawdus and Rus Chorégraphie : Bruno Roque The Will to Explore Scénographie : Guillaume Braquet, Vanessa Zarrouk, —— Julia Luci, Trisan Ligen Durée : 12 min Cosumes : Vanessa Zarrouk Lumières : Bruno Roque Chorégraphe : Piotr Czubowicz Création sonore : Bruno Roque, Vanessa Zarrouk, Scénographes : Remi Leserle, Mathieu Stefani Julia Luci Musiques : 100 Billion Cells Musiques : Erupting Light, paque, Hildur Gudnadotir ; Danseurs : Carmen Andres, April Ball, Sivan Blitova, Petite eur, Sydney Becet ; egin the egine, Artie Shaw ; Frances Murphy, George Oliveira, Yi Sun nadamasor, Dead Combo Danseurs : Francesca Dolci, Mimoza Koike, Noelani Pantasico, Maud Sabourin Sawdus and Rus —— Durée : 11 min No Rem —— Chorégraphie : Joseph Hernandez Durée : 11 min Scénographie : Yannic Cosso, Tania Georget, Jordan Pallagès Chorégraphie : Anjara Balleseros Cosumes, lumières, vidéos : Yannic Cosso, Scénographie, cosumes, lumières : Déborah Bailet, Tania Georget, Joseph Hernandez, Jordan Pallagès Oriane Bajard, Sung-Ah Han, Chloé Angiolini Musiques : e nl une pt. 1 e o isers ; Musiques : tre, Nicolas Jaar ; ndante du concerto pour enlune, pt. 2 e ld Mill Pond, Nico Muhly deu mandolines, Antonio Vivaldi ; lighing igh, Slaskwax Danseurs : Vanessa Dos Santos Henriques, Carmen Andrès, Danseurs : Francesca Dolci, Ediz Erguc, Alvaro Prieto, Stephan Bourgond, Liisa Hämäläinen, Anne-Laure Seillan, Jeroen Verbruggen, Simone Webser Lucien Poslewaite, Simone Webser —— 75 SAI SON Memory House témoignages 6 —— —— ——

Tina Alloncle Anja Behrend diplômée, DNSEP 2013 danseuse chorégraphe

Les Imprévus 2013 resent pour moi un souvenir Il s’agissait de ma première création corégraphique marquant dans mon parcours. avec les Ballets de Monte-Carlo, j’en étais très toucée. À ce moment-là, et encore maintenant à vrai dire, Le fait que nous soyons en collaboration avec le Pavillon j’avais une passion pour les objets usuels, déformés, Bosio était nouveau pour moi, et j’étais ravie de pouvoir exagérés. Une fascination pour la routine qui, lorsqu’on travailler de concert avec de jeunes étudiants venus l’exacerbe, mène à des absurdités révélatrices et à des d’horizons si divers. Je me sentais honorée d’avoir été problématiques émotionnelles qui me toucent, et coisie pour participer à un tel projet. qui sont au cœur de mon travail artisique dans son En parallèle, je traversais une période difcile ensemble. C’es pour cete raison que j’ai été atirée par dans ma vie privée. Un grand nombre d’émotions les idées d’Anja, car les thématiques qu’elle souhaitait contradicoires me tiraillaient. S’ateler à la aborder rejoignaient les miennes. corégraphie fut une manière parfaite d’exprimer ce J’ai tout de suite eu des images en tête, un intérieur que je portais en moi. J’avais une idée très précise de de maison sandard aux proportions absurdes. J’ai ce que je voulais, ce qui rendait la collaboration plus présenté ce projet à Anja sous forme de dessins. De son évidente. Je me suis focalisée sur l’immense quantité de côté, elle m’a fait part de la narration qu’elle souhaitait souvenirs que nous sommes en capacité d’engranger metre en place. Ces écanges nous ont mutuellement au cours d’une vie, et les disorsions qu’ils subissent. infuencées. Les mouvements et trajecoires qu’elle J’ai coisi un projet de scénographie dans lequel, une écrivait pour les danseurs, ont souvent modifé la maison — sylisée et placée sur un grand rideau de disposition des éléments de décor sur le plateau. De fond de scène — évoquait pour moi un corps empli la même façon, la présence et la nature des objets de mémoire. Le titre Memor ouse es ensuite venu scéniques lui ont inspiré des cangements et de nommer la pièce. J’imaginais une gigantesque table nouveaux mouvements. avec ses caises, posées sur le plateau, en avant-scène, Le projet s’es déroulé de façon très méthodique, en m’inspirant de la fabuleuse performance de théâtre ce qui nous a permis de vraiment nous concentrer dansé, ansel et Gretel, donnée à Berlin par Johann sur la créativité, sans perdre de temps avec des oublis Kresnik. J’ai coisi de m’associer à l’artise performeur Memory House, représentation au ateliers d’ordre tecnique. Recerces de matières, de couleurs, français Phil Von, dont la musique m’a particulièrement desallets de Monte-Carlo tess en miniatures sous forme de maquetes, puis inspirée. La proposition scénographique de l’étudiante déploiement des objets grandeur nature lors de périodes Tina Alloncle m’a immédiatement plu, tout en étant une de workshops, pour enfn arriver sur scène. C’es à ce vraie surprise. La fragilité de ces barreaux de caises qui moment-là que l’on a créé les tableaux de lumière, avec n’en fnissent pas donnait le sentiment de vulnérabilité Anja et Samuel Téry, régisseur lumières aux BMC. que je cercais. Le fait de rendre l’ensemble réalise Le découpage lumière s’es réalisé presque était un déf, que Tina a merveilleusement relevé. La naturellement, car la narration comprenait plusieurs corégraphie rassemblait quatre danseurs, trois hommes tableaux, qui se dessinaient clairement. Nous avons et une femme. Je me suis identifée à cete femme, orcesré des visions d’ambiances colorées en foncion voyageant dans mon propre passé par ce biais. de caque capitre. Pour emmener le public dans Nous avons commencé le travail avec une équipe notre univers, nous voulions commencer par une soudée, mais comme dans la vie réelle, nos cemins ambiance claire et lumineuse, pour se tourner ensuite ont divergé. Ainsi, nous avons fni par représenter vers des ambiances plus contrasées, tamisées. Il était une forme de caos où cacun était prisonnier de indispensable de travailler main dans la main avec les sa mémoire. C’était une hisoire simple, pour que tecniciens, car avoir des idées ne fait pas tout, et c’es le public puisse la suivre et s’y projeter. Le langage grâce à eux que les images issues de notre imaginaire corégraphique était moderne et en accord avec la sont devenues concrètes. scénographie absraite. J’ai réussi à créer quelques moments collecifs et un pas de deux très intéressants ! Au fnal, je pense que la scénographie de Tina était le point fort de la création, et les danseurs fantasiques l’ont fait exiser. Je suis particulièrement heureuse des souvenirs émus que me laisse cete création.

—— 77 représentations au ateliers desallets de Monte-Carlo 1. 2. 3. Murmuring Windows 4. Te Will to Explore

représentation au ateliers desallets de Monte-Carlo 1. Crimes exemplaires 2. Soir de fête

—— 79 1. étapepréparatoire, thétre du Ponant 2. 3. . au ateliers desallets de Monte-Carlo . . maquee et croquis ina lloncle et Jordan Pallags DEP 2013

représentations au ateliers desallets de Monte-Carlo 1. No Rem 2. 3. Sawdus and Rus

—— 81 SAI SON propos 7 —— ——

I De Sisyphe à Icare M P R É V U S 2014 met en scène la rencontre de célèbres fgures de la mythologie grecque : Sisyphe et Icare. Lors de cete 2 édition, deux motifs corégraphiques se disinguent : la 0 répétition et la cute, l’une pouvant mener à l’autre. Les 1 personnages des quatre pièces semblent tous en efet les prisonniers d’un desin irréversible et absurde qui les 4 « La vitalité des mythes se mesure emporte vers un point critique où la routine déraille. à leur pouvoir d’être consamment Dans « Im not ormed b things that are rom remis en mots et en images au fl des msel alone ider isphe, une bande-son saccadée siècles, réinventés et recréés par les accompagne une débâcle de geses inutiles. Des objets artses de tous horizons ; écrivains, du quotidien sont portés, déplacés, reposés, une toile musiciens, peintres, sculpteurs, es peinte puis abandonnée ; dans l’ombre, un créateur cinéases. Parfois, pourtant une seule assise à ces élucubrations : ce sont celles de sa pensée. parmi l’ensemble des réécritures et Puis, La able dEhpsis vient fragmenter les corps représentatons d’un même mythe à l’aide d’un dispositif de miroirs. Le mimétisme des acquiert une prééminence telle, geses, faits de conventions arbitraires, es démultiplié et qu’on s’y réfère comme à ce qui nous l’incompréhension s’accroît. lone place les danseurs donnerait la clé d’un sens universel. » au centre d’arcitecures improbables en perpétuelle métamorphose. Au gré d’une musique jazz, ils suivent Sophie Klimis les méandres infnis d’une ligne de ruban adhésif qu’ils Sisyphe ou l’éternel tourment tracent au sol, tour à tour. Enfn, Persisent equence de l’homme rusé désorganise litéralement la scénographie, vue comme l’arcitecure d’un cerveau : des boîtes d’arcives sont ouvertes et les documents qu’elles contiennent dispersés sur le plateau. La musique répétitive, les mots prononcés en boucle par le personnage principal, et les corps des danseurs qui se répliquent comme autant d’anomalies, crisallisent le délabrement de la mémoire. L’entropie que révèle l’ensemble écappe pourtant par endroits à la fatalité. Dans « Im not ormed , une voix solitaire susurre « to become free », tandis que les protagonises de lone s’amusent à recomposer le décor. Conduit par l’Icare trompeur d’Yves Klein, avec son aut dans le ide, ou le Sisyphe volontaire dépeint par Albert Camus, le sysème porte en lui sa décadence et sa rédemption. SP

La Table d’Ehpysis, lage au ateliers des allets de Monte-Carlo —— 83 SAI SON disribution 7 —— ——

« I’m not formed by things that are from La Table d’Ehpysis myself alone » (Aider Sisyphe) —— —— Durée : 16 min Durée : 25 min Chorégraphie : Leart Duraku Chorégraphie : Anja Behrend Scénographie, cosumes, lumières : Johanna Delalay, Scénographie, cosumes, lumières : Lucie Audau, Nicolas Guérin, Rui Li, Charly N’Doumbé Paul Guian, Fanny Lavergne, Rémi Leserle, Inès Panizzi Musique : I lie, Hillier & Ars Nova Copenhagen ; Musiques : hisling une rom a Lonel Man, orldtoCome, Maya Beiser ; inonia partita n2 Clint Mansell ; pace Mones, Te Dus Brothers ; LePlaisir V 2, Jazz Sebasien Bac ; Grae, llegro, des sens, Raymond Devos ; Chocolate Charms, Clint Mansell ; Giovanni Batisa Pergolesi Chemical Burn, Te Dus Brothers ; esra in , Danseurs : Anjara Balleseros, Daniele Delveccio, Daniel Pemberton ; Im am ell too, Clint Mansell ; Leart Duraku, Ediz Erguc, Alexis Oliveira, George Oliveira, lossoming, Clint Mansell ; Im not ormed b ings that Chrisian Tworzyanski are rom Msel lone, Mia Wasikovska ; Duet, ugar, Vendil & Trevor Gurecis représentations au ateliers Danseurs : Sarah Clark, Daniele Delveccio, Persisent Sequence desallets de Monte-Carlo Micael Grünecer, Alvaro Prieto, Anne-Laure Seillan, —— 1. « I’m not formed by things Yi Sun, Le Wang Durée : 22 min that are from myself alone » (Aider Sisyphe) Chorégraphie : Joseph Hernandez 2. La Table d’Ehpysis Kyklone Scénographie, cosumes, lumières : Xiao Wang, 3. Kyklone —— Yannic Cosso, Mathieu Stefani, Jordan Pallagès, 4. Persisent Sequence Durée : 17 min Vanessa Zarrouk Musique : Get im, Te Exciters ; ...er inn ips Chorégraphie : Bruno Roque oards the un..., Hecq ; elgrade, Dirty Beaces ; Prism, Scénographie, cosumes, lumières : Oriane Bajard, Tim Hecer ; Virginal I, Tim Hecer Adrien Blanc-Guillon, Julia Luci, Trisan Ligen Danseurs : April Ball, Asier Edeso, Liisa Hämäläinen, Musiques : ossa, Donald Byrd ; Marchinha do anto Vanessa Henriques, Frances Murphy, Alvaro Prieto, ntnio Descambado, Dead Combo ; Esse olhar que era Bruno Roque, Maude Sabourin, Kaori Tajima, steu, Dead Combo Lucas X Treefoot Danseurs : Anjara Balleseros, Stephan Bourgond, Mimoza Koike, George Olivera, Noelani Pantasico, Lucien Poslewaite, Maude Sabourin

—— 85 SAI SON Persisent Sequence témoignages 7 —— —— ——

Jordan Pallagès et Yannick Cosso Joseph Hernandez diplômés, DNSEP 2013 et 2014 danseur chorégraphe

Suite à une première pièce, adus and us, réalisée La création de Persisent equence a permis d’articuler dans le cadre des Imprévus en 2013, nous nous sommes ma voix corégraphique. Au début, l’immensité de la retrouvés pour la création de Persisent equence. tâce me déconcertait. J’étais, et je suis, obsédé par le Dans ce projet, basé sur le thème mythologique de mouvement, même si je ne savais pas comment créer un Sisyphe, nous avons traité le sujet du câtiment infernal contexte pour le corps. J’ai appris que la danse n’exise de façon plus psycologique. pas en vase clos et que le corps en mouvement ne peut Maya Pearlman, personnage névrosé, se retrouve jamais être séparé de son contexte social, politique, coincée dans les arcives de sa mémoire, dont leur hisorique et anthropologique. Avec Yannic et Jordan, classifcation lui es obsessionnelle. nous avons pu défnir ce qui était nécessaire à notre Contrairement à adus and us (où l’hisoire et création théâtrale. Nous avons entrepris de créer la musique étaient déjà établies par Joseph), nous avons l’expérience que nous souhaitions que les gens vivent développé ensemble l’intégralité du projet : le concept, par une étude minutieuse des interacions entre la danse l’écriture, les décors, les cosumes, la lumière et la et l’image. Grâce à cete collaboration, le rythme, les corégraphie. geses et la virtuosité que j’ai toujours aimés dans la C’es avec Persisent equence que nous avons danse ont été mis en contexte, en travaillant vers un but pu véritablement dialoguer entre artises, et nous commun à travers la narration et la réalisation de son enricir mutuellement de nos pratiques respecives. imagerie. La scénographie ne servait plus alors la corégraphie : danse, décors, cosumes, lumière et musique convergeaient au service de l’hisoire. Par la suite, cete expérience nous a menés à ofcialiser notre collecif. La fusion de nos univers eshétiques nous permet aujourd’hui non seulement de créer des ballets mais également de réaliser des projets artisiques à médiums multiples (danse, performance, vidéo, dessin, écriture et insallation) que nous présentons en dehors de la scène traditionnelle du specacle. Nous nous remémorons Persisent equence comme le temps de l’expérimentation novice et de la découverte enivrante du milieu de la danse et comme la confrmation de nos ambitions collecives. Enfn, travailler avec Joseph nous a enricis dans nos pratiques personnelles : « Tout au long de mes études, le corps fut toujours central dans mon travail plasique, mais la corégraphie m’a véritablement confronté au mouvement, et a ainsi déclencé tout une nouvelle approce performée du dessin. » — Yannick Cosso « Dans mon travail, je crée une fcion faite d’arcitecures vides dont la fgure humaine es quasiment absente, fantomatique. La participation aux Imprévus m’a enfn permis de recercer des manières singulières d’associer la présence du corps à la fcion. » — Jordan Pallagès

Persisent Sequence, représentation au ateliers desallets de Monte-Carlo —— 87 représentations au ateliers desallets de Monte-Carlo 1. La Table d’Ehpysis 2. 3. « I’m not formed by things that are from myself alone » (Aider Sisyphe)

Kyklone, représentation au ateliers desallets de Monte-Carlo

—— 89 ENT RAC propos TE —— ——

E Scène sans corps N T R A C T E En 2015, le projet cne sans corps vient se subsituer au rendez-vous annuel avec la compagnie des Ballets 2 de Monte-Carlo, ses danseurs ayant eu un planning de 0 tournée particulièrement intense. Un groupe d’étudiants 1 es placé face au déf de concevoir une forme de specacle où le corps serait suggéré mais absent. La 5 « Le mouvement perpétuel, la vie, Compagnie du Zerep — Sophie Perez, Xavier Boussiron c’es la minute où nous cercons et Stéphane Roger — accompagne et dirige cete tous à être heureux ; c’es la lumière, réfexion. la ricesse, le luxe, l’amour loin des La première quesion posée es : de quelle manière conventons de la pudeur ; sans évoquer l’aspec physique d’une personne par une morale pour les sots, sans recerce expression plasique ? Pour y répondre, les propositions artstques pour les snobs. » des étudiants englobent une vase gamme d’approces, faite d’esquisses, de maquetes, de dispositifs, d’images, Francis Picabia de performances que traversent des fantômes. La scène Écrits critques devient rapidement une matière modulable, permetant aux corps de ressurgir grâce aux plans découpés, aux efets de perspecives. La représentation commence par la simulation d’une séance de spiritisme, convoquant des célébrités dont l’infuence es encore palpable dans le monde de l’art aujourd’hui. Puis, ces personnages sont fnalement invités sur scène, leur présence tantôt resituée par des refets translucides, tantôt par le biais de corps grimés, métamorphosés, momifés. Il s’agit de décrire, puis de visualiser, des formes de pensée, cacune d’elle évoquée par les jeux des étudiants devenus pour ce projet artises-aceurs, reprenant à Baruc Spinoza son interrogation : « que peut un corps ? ». S’ensuit un écoulement d’images-formes éphémères, de trajecoires, de saynètes ; hisoires qui fniront par disparaître complètement, laissant place à un monocrome virant du jaune à l’orange : la sensation d’un souvenir vécu. SP

Scène sans corps, représentation au étre Princesse Grace —— 91 ENT RAC Scène sans corps témoignages TE —— —— ——

Amandine Maillot et Sinem Bostanci de la cne sans corps en une partie de Ouija, censée diplômées, DNSEP 2016 permetre la communication avec les esprits. Figures d’étrangeté, les jumelles et siamoises sont Comment appréhender la scène sans corps ? vouées à incarner les fantômes invoqués par le Ouija. En Notre première pise de recerce visait à extraire efet, ce duo étonnant représente une identité diférente totalement la présence du corps de scène. Nous avions de celle du commun, auquel on a d’ailleurs longtemps imaginé travailler avec une scène jouée, mais dont on associé des pouvoirs relevant du paranormal. De ce fait, apercevrait seulement une ombre sans que jamais le la symétrie physiologique et psycique des jumelles- corps ne soit révélé. siamoises s’accorde avec la dualité que l’esprit humain L’arrivée de l’équipe du Zerep a sacrément aime depuis toujours introduire dans son appréhension boosé l’ambiance générale. Elle ne semblait pas du monde et de lui-même. prévoir une seule minute de priver l’espace scénique Cete dualité accentuée par nos diférences de corps ! Pas de corps de danseurs, c’était une corporelles — l’une petite, l’autre grande — conférait donnée certaine, en revance, c’es nous qui sommes à notre personnage un caracère absurde, dans une devenus les cobayes de nos propres expériences cohabitation insensée. Ainsi, au fl du processus, c’es plasiques ! « Tout le monde sur scène sans dans cete peau commune et déséquilibrée que notre exception, et sans broncer ! » L’annonce de cete personnage ft quelques apparitions sur scène, tel un nouvelle extrêmement enthousiasmante a eu l’efet passager, à mi-cemin entre l’absence et la présence d’une détonation interne. Sophie Perez et Xavier soïque, endeuillé face à son impossibilité de tisser du Boussiron semblaient horrifés par la vue de nos corps lien avec le monde réel. Desiné à errer dans la fcion immobiles. Tout devait bouger, jouer, canger et la à jamais, ne trouvant pas la possibilité de s’incarner. pensée devenir immédiatement acion. Pour agiter À travers l’invocation du Cri de Munc, les jumelles le tout, rien de tel que de produire une urgence face expriment un cri exisentiel infni et silencieux. à l’imminence de la presation scénique. Dans les C’es de cete manière que nous avons souhaité coulisses, c’es l’efervescence ! aborder la scène sans corps. Interroger où se situe la Du point de vue de nos quatre yeux, le Zerep avait limite de la fcion et la réalité au sein de notre propre sous-esimé notre paralysie (démesurée) à l’idée de personne / personnage. À travers un « moi » que nous devoir monter sur scène. façonnons continuellement, en foncion de variations Au cours de la deuxième entrée en pise, nous avons internes et d’interacivités externes. eu, toutes deux, beaucoup de facilité à nous remémorer La scène sans corps, oui, mais si Je es un autre ? quelques proces souvenirs, et à créer ofciellement un personnage indissociable, ou plutôt deux en un, ou, plus jusement un et demi. Une sorte de jumelage tentant d’accorder deux entités que tout semble opposer. Finalement, le seul espace que nous puissions tenter de déployer était celui que contenait le « corps » lui-même et ses dimensions.

« Je es un autre », le personnage comme disanciation Les prémices de création du personnage « jumelles » se sont dessinées lors d’un sage que nous avions réalisé avec Maca Makeïef. L’équipe tecnique avec laquelle nous étions en contac s’amusait de notre tandem. Au fl du temps, nos personnes ont commencé à devenir une seule et même entité aux yeux des autres. Ainsi fusionnées, nous étions tantôt « les sagiaires », tantôt « les inséparables ». Frusration en miroir, de ne parvenir à s’émanciper l’une de l’autre. Les jumelles-siamoises soulèvent des quesions : comment se consruit la division entre le Je et l’Autre ? Où se situe cete scission, et qui en décide ? « Car je es un autre », telle es la célèbre afrmation d’Arthur Rimbaud dans sa letre à Paul Demeny, datée du 15 mai 1871. Comment peut-on être autre à soi-même ? Entre- temps, l’atmosphère feutrée de ce théâtre à l’italienne Scène sans corps, représentation au étre Princesse Grace nous infuence dans la transformation du projet collecif —— 93 ENT RAC Scène sans corps témoignages TE —— —— ——

Tristan Ligen diplômé, DNSEP 2015

Une scène sans corps… À première vue, ce projet ne me parlait pas du tout et l’approce de la Compagnie du Zerep ne m’a, je dois l’avouer, pas beaucoup aidé à m’y accrocer. Pour moi, la scénographie sur scène dialogue avec le corps de l’interprète. Si le corps n’es pas là ou s’il es présent uniquement par la contrainte, il n’y a pas de dialogue possible. Mais peut-être y avait-il des « corps » auxquels nous n’avions pas pensé. Des corps qui n’étaient pas matériels. C’es à partir de ce consat qu’es venue l’idée de convoquer des esprits. Ces derniers étaient nombreux dans ce théâtre : en tout premier, celui de la Princesse Grace, mais également ceux des comédiens disparus, qui ont pu jouer sur cete scène (et dont les noms couvrent les afces présentes sur les murs de la salle d’accueil de ce lieu). Enfn, vinrent les esprits d’artises que nous avions coisis de convoquer et qui devaient certainement veiller un peu sur nous. Par cance, ils se sont montrés bavards. Il es vrai qu’ils avaient tous, bien plus que moi l’habitude d’être sur scène. Ainsi, le dialogue pouvait reprendre, entre scénographie et esprits, mais aussi entre les membres de la Compagnie du Zerep et moi.

1. Scène sans corps, représentation auétrePrincesse Grace 2. 3. Scène sans corps, étapes préparatoires aeclaCompagnie du erep au thétre PrincesseGrace Scène sans corps, auétrePrincesse Grace

—— 95 SAI SON propos 8 —— ——

I Pasolini, l’engagement M P R É V U S En 2016, la fgure du cinéase, poète et écrivain Pier Paolo Pasolini donne l’impulsion à la création de trois 2 pièces, inspirées des flms : Mamma oma, éorme et 0 La icoa. 1 Ces œuvres puissantes sont interprétées à travers le prisme de l’engagement dont l’artise a fait preuve tout 6 « À ce point, je ne veux pas au long de sa carrière et de sa vie. m’émouvoir sur mes raisons, c’es- Les specacles des Imprévus se font les écos à-dire sur le fait que non seulement contemporains d’une lecure rice et complexe de l’Italie l’engagement n’es pas fni mais d’après-guerre. Ils refètent l’image pasolinienne d’une qu’au contraire il commence. » réalité féticisée, dans laquelle le sacré transparaît. La crudité de certaines scènes — la mère de Mother-. Pier Paolo Pasolini engloutie sous les corps de ses agresseurs, la famille Qui je suis de eorem en proie à une transe convulsive —, se transcende en efet dans le traitement de la lumière, le coix des cosumes et de la musique. Dans La icoa, une vidéo montre des danseuses qui dévorent un gâteau en se barbouillant le visage, puis nous les retrouvons sur scène apprêtées et vêtues de cosumes sophisiqués ; la projecion et les corps se répondent, illusrant les inégalités entre les classes sociales et les dérives du pouvoir. C’es peut-être cete année-là que la danse et la scénographie dialoguent le plus, au sens d’une confrontation lucide de leurs écritures. Plus que cela, il es quesion d’une rencontre entre une expression scénique et une œuvre polymorphe. éorme par exemple, était d’abord conçu comme une pièce de théâtre, avant de devenir un flm et un roman. Les corps des danseurs incarnent, dans l’énergie du mouvement, les liens profonds qui unissent le texte et l’image cez Pasolini. SP

La Ricota or Te Dream of a Ting or Frühherbs, représentations aux ateliers des Ballets de Monte-Carlo —— 97 SAI SON disribution 8 —— ——

Mother-F La Ricotta or The Dream of a Thing —— or Frühherbs Durée : 18 min —— Durée : 25 min Chorégraphie : Bruno Roque Scénographie, cosumes, lumières : Sophie Blet, Chorégraphie : Anja Behrend Maxime Decouard, Panthéa Habibi Ravancad, Scénographie, cosumes, lumières : Sinem Bosanci, Gaël Rosicer, Inès Rosicer Marie Pellegrino, Juliete Broquet, Lucile Bodin, Musiques : urora Em Lisboa, Dead Combo ; Eogenesis, Jingran Tan, Jérémy Grifaud, Amandine Maillot mphon Part 1 erture, Muse ; Concerto in D minor, Vidéo : Jérémy Grifaud V0, Il Largo, Antonio Vivaldi Musiques : e our easons, Vivaldi, recomposed by Danseurs : Maude Sabourin, Mimoza Koike, Asier Edesco, Max Ricter Micael Grünecer, Lucas Treefoot, George Oliveira, Danseurs : Marianna Barabas, Candela Ebbesen, Leart Duraku Anna Blacwell, Kaori Tajima

Theorem 68 —— Durée : 23 min représentations au ateliers desallets de Monte-Carlo Chorégraphie : Julien Guérin 1. Mother-F Scénographie, lumières : Roxane Ducruet, Axelle Terrier, 2. Teorem 68 Julien Rebour, Eddy Acard 3. La Ricota or Te Dream of Cosumes : Laurie Camous, Marianne Le Duc a Ting or Frühherbs Création sonore : Julien Guérin Musiques : antaisie in minor or piano our hands D0, Franz Scubert ; or-Peter-oilet rushes-More, ammers, all, ils Frahm Danseurs : Vicoria Ananyan, Gabriele Corrado, Anne‑Laure Seillan, Gaëlle Riou, Daniel Delveccio, Alessandra Tognoloni, Lucas Treefoot, Alexis Oliveira, George Oliveira, Mikio Kato, Le Wang, Sarah Clark, Elena Marzano, Tifany Pacecco, Kaori Tajima

—— 99 SAI SON Mother-F témoignages 8 —— —— ——

Maxime Decouard un peu de pression, en tout cas, d’un point de vue diplômé, DNSEP 2017 corégraphique. dd : Qelle était alors votre connaissance de Participer à l’élaboration de Mother- a été pour moi Pasolini ? l’une des expériences les plus rices de mon parcours au B r : Honnêtement, elle était pratiquement sein du Pavillon Bosio. Je me suis engagé dans ce projet inexisante, à part les Mille et une nuits (1974). Je le de manière… « engagée », pour reprendre la thématique connaissais en tant que réalisateur, mais je n’étais même des Imprévus de cete année-là. pas au courant qu’il était poète, écrivain, scénarise… Dès le départ, je ne souhaitais pas me cantonner aux dd : Comment s’es opéré votre coix pour Mamma seuls camps d’expertise de la scénographie (le décor, oma ? les cosumes, etc.) J’étais aussi très intéressé par le B r : Comme je l’ai déjà dit, je ne connaissais pas projet dans son ensemble, assisant aux répétitions des grand-cose. Pour faire mon coix, j’ai d’abord vu danseurs, pour tenter de m’imprégner au plus près de tous ses flms. Après ce marathon pasolinien, il était l’ambiance que Bruno avait en tête, afn d’en concevoir clair que Mamma oma était le flm qui me parlait le en retour une scénographie cohérente. plus. Peut-être y avais-je trouvé nombre de parallèles Les premières phases de travail ont d’abord consisé en avec mon parcours personnel. Au-delà de ça, l’hisoire une approce de l’œuvre de Pasolini dans son ensemble. me semblait aussi être la plus propice à une mise en Le visionnage du flm Mamma oma, qui m’avait scène corégraphique. beaucoup toucé, et la lecure de ses textes, notamment dd : Pourquoi avoir dédoublé le personnage de la ses écrits corsaires et ses poèmes. Tout cela nous a donné mère ? beaucoup de matière pour brainsormer, avec Sophie Blet B r : Pour être honnête, j’ai fait ce coix au départ car et Gaël Rosicer, mes partenaires scénographes. Nous je savais que cete expérience serait la dernière avons commencé à dessiner quelques grandes pises, opportunité, pour moi, de participer à ce projet et je comme le soupirail par exemple, direcement extrait du souhaitais travailler avec Mimoza et Maude. Par contre, flm et représenté de manière inversée sur le plateau. Nous après avoir décidé de les avoir toutes deux comme avons ensuite imaginé cete poussière projetée en fond de interprètes, j’ai mené une vraie réfexion afn de donner scène qui monte et cute, comme un grand mouvement tout son sens à ce binôme. Pour moi, il s’agissait de la qui synthétiserait toute l’hisoire et représenterait l’espace dualité évidente entre la Mère et la Prosituée. C’était domesiqué. aussi la représentation des diférents moments de la vie Les espaces sont donc nés à la fois d’une recerce de cete femme, des coix faits et de ses regrets. entre scénographes et les intentions dramaturgiques dd : Comment avez-vous envisagé la consrucion que souhaitait Bruno. La conception des personnages de cete pièce ? notamment, la dualité mère / prosituée, les « mecs » B r : Mon idée était d’essayer de retrouver cete comme il les appelait, la fgure du fls, etc. Le focus sur la essence / énergie que j’ai ressentie dans ce flm, mais fgure de la Mère et l’idée consante de résilience. sans être trop descriptif et sans vraiment retrouver la À partir de ces données, nous avons conçu et consruit même narration. Au niveau corégraphique et pour les éléments scénographiques avec Gaël au sein des simplifer l’explication, j’ai développé un mouvement et ateliers des Ballets. C’es au moment de la consrucion en le modifant ensuite afn de représenter exacement que le plateau s’es, en quelque sorte, divisé en deux, les deux facetes de cete femme. Un peu comme une comme pour correspondre de manière plus forte à même mélodie, jouée dans des syles, des phrasés, des l’opposition mère / putain. Pour fnir, j’ai dessiné les vitesses diférentes. cosumes avant de les ciner en friperie, sur le net ou dd : Cete expérience, à laquelle vous étiez bien dans les socs de l’atelier cosumes des Ballets. Le habitué puisque vous avez participé plusieurs fois aux specacle prenait forme. Imprévus, qu’a-t-elle eu de particulier ? B r : Je pense que le fait d’avoir une base thématique (si évidente et claire), sur laquelle s’appuyer, et également de travailler avec seulement deux interprètes Mother-F, représentation Bruno Roque ont été les atouts qui ont fait la diférence. auateliers desallets danseur chorégraphe dd : Qelle importance apportez-vous à la deMonte-Carlo scénographie dans vos projets ? dOMinique d rillO t : Comment vous êtes-vous B r : Ça dépend, je suis parfaitement capable de projeté dans ce projet ? développer quelque cose qui puisse exiser sans BrunO rOque : Pour moi, il était assez rassurant aucun élément scénographique ; à l’opposé, je peux la d’avoir un thème spécifque sur lequel je pouvais considérer comme la genèse et / où, conclusion d’un m’appuyer afn d’établir un concept de base. Aussi, le concept. fait de savoir que j’allais travailler avec deux danseuses, à qui je faisais énormément confance, m’a enlevé —— 101 1. équipe et présentation despices 2. La Ricota or Te Dream of a Ting or Frühherbs, représentation auateliers desallets deMonte-Carlo

représentations auateliers desallets deMonte-Carlo 1. 2. Teorem 68 3. La Ricota or Te Dream of a Ting or Frühherbs

—— 103 SAI SON propos 9 —— ——

I Peau noire, masques blancs M P R É V U S 2017 se focalise sur l’ouvrage du psyciatre et essayise Frant Fanon : Peau noire, masques blancs, pour en 2 proposer une interprétation turbulente et pleine d’éclat. 0 Ce traité magisral analyse la complexité des rapports 1 entre blancs et noirs dans le contexte de la colonisation. La transcription scénique du texte s’incarne dans une 7 forme expérimentale, à la croisée des arts plasiques, de la danse et du théâtre. Deux comédiens de la compagnie du Téâtre National de Nice — Les Éclaireurs — rejoignent les danseurs et les étudiants-performeurs, pour fnaliser le travail de performance et transmetre la puissance du verbe. « Nous ne sommes rien sur terre, Au travers de la scénographie, les specateurs sont si nous ne sommes pas d’abord invités à prendre — litéralement — position en optant l’esclave d’une cause, celle des pour tel ou tel point de vue, et à éprouver ainsi l’altérité peuples ou celle de la justce et de la comme l’expression d’une afnité élecive. La salle liberté. » ayant été vidée de ses gradins, ils peuvent en efet coisir de reser satiques à la lisière du specacle ou Frantz Fanon d’évoluer en son intérieur, leurs présences mouvantes Letre à Roger Taieb absorbées dans l’acion. Comme un écran cinéma de drive in, un fond de scène sépare en outre l’espace en deux parties égales, cacune parcourue par une longue esrade où se déploient la corégraphie, le jeu, et parfois le cahut aux limites de la transe. En préambule, une étudiante lit des passages du premier capitre du livre dans trois langues mélangées, français, anglais et cinois, ouvrant la représentation sur un état confusionnel. Puis, amplifés par les mots de Frant Fanon, mais aussi Bertolt Brect, Toni Morrisson ou Jean Genet, divers intermèdes se succèdent, voire se télescopent lorsque l’écriture de la pièce unit les deux zones. Au centre, des projecions d’extraits de flms américains, dont le Malcolm de Spike Lee, palpitent par intermitence. L’ensemble, traversé par les corps peints des danseurs comme autant de références à l’hisoire de l’humanité, associe des individus dans une sorte de no mans land lumineux et sonore. Il semble s’y inventer, de façon à la fois autonome et reliée, des formes intemporelles de communication. SP

Peau noire, masques blancs, performance aux ateliers des Ballets de Monte-Carlo —— 105 SAI SON disribution 9 —— ——

Peau noire, masques blancs ——

Chorégraphie : Anja Behrend, Gaëtan Morloti Scénographie, performance : Naomi Aitahar, Morgane Benyamina, Lucile Bodin, Mary Bonnin, Laurie Camous, Dylan Haond, Margot Lemaire, Marie Pellegrino, Fanny Spano, Barbara Tran, Huimin Wu Source des textes : Frant Fanon, Jean Genet, Bertolt Brect, Toni Morrison Vidéos : Jean Rouc (extraits), Huimin Wu, Mary Bonnin, Lucile Bodin, Fanny Spano Création sonore : Barbara Tran Lumières : Naomi Aitahar Coordination de projet : Gilbert Della Noce, Dominique Drillot, Laurent Berger Danseurs : Anja Behrend, Gaëtan Morloti Comédiens : (Les Éclaireurs, TNN) Irène Reva, Kevin Fordjani

Peau noire, masques blancs, perormance auateliers desallets de Monte-Carlo

Peau noire, masques blancs, perormance auateliers desallets de Monte-Carlo

—— 107 SAI SON Peau noire, masques blancs témoignages 9 —— —— ——

Huimin WU était considéré comme « correc ou incorrec » : la cute diplômée, DNSEP 2018 vers une vision clicé, racise ou passéise menaçait. Cependant, je pense qu’être passés par la caricature Qand j’ai afronté le sujet Peau noire, masques blancs a été une étape importante dans nos recerces — je dis « afronté », car ce projet fut réellement difcile pour pouvoir prendre du recul, s’en éloigner, puis la pour moi — ce thème lourd a nécessité une grande détourner pour ensuite emmener ce sujet ailleurs. remise en quesion : il fut l’objet d’une discussion continuelle avec moi-même. Le format de cete année était inédit : deux Très vite, j’ai ressenti un sentiment très étrange, et corégraphes-danseurs (pas d’interprètes), deux une quesion que je n’avais jamais abordée s’es posée. comédiens de théâtre (du TNN), et nous… (les Je suis aune, cete couleur es absente de cete trise étudiants). hisoire. Ce qui était intéressant, c’es que l’on avait la J’avoue même m’être demandé si j’avais la légitimité possibilité de sortir du format salle de specacle pour en parler. classique, d’où notre idée d’un espace fragmenté aux Mais les deux professeurs responsables du projet, points de vue multiples avec des performances en Dominique et Gilbert, ont toujours été en mesure de simultané. trouver des points de vue et des arguments qui m’ont Au gré de notre avancée, des rencontres avec les permis de me conduire vers d’autres quesionnements. corégraphes puis les comédiens ainsi que la collece de Au seuil de ce projet, j’ai proposé fnalement que données générales (textes, images, musiques, etc.), j’ai deux danseurs, représentent l’un un homme noir, l’autre commencé à mieux me situer. Je me suis alors pencée son ombre. Ce refet pouvant, dans ce contexte, être sur la dimension sonore jusque-là peu exploitée. interprété comme le symbole de la domination d’une J’ai en premier lieu enregisré les comédiens race sur une autre, et agir comme l’incarnation du interpréter des morceaux de textes de Jean Genet, colonialisme. Tous les peuples partagent une hisoire Frant Fanon et autres, pour alimenter notre banque commune et je me suis fnalement appropriée cete de données. Ensuite, j’ai débuté mes expérimentations hisoire. avec ces voix et j’ai composé une première pièce. Le Finalement, c’es avec un certain engouement et travail du son m’a permis de m’éloigner de l’image pour beaucoup de sérieux que j’ai réalisé ce projet. explorer d’autres pises. Je me suis très vite remémorée les nombreux flms Finalement, c’es une fois sur place aux ateliers des classiques occidentaux, traitant des barrières entre Ballets que tout s’es créé. les noirs et les blancs, que j’avais regardés. Leurs Il y avait la base, cet espace fragmenté. Chacun versions sous-titrées en cinois, ma langue maternelle, amenait au fur et à mesure de petits morceaux de Peau noire, masques blancs, s’accompagnent inévitablement d’ambiguïtés. En efet, création : corégraphies, performances, lumières, représentation au ateliers les nombreuses diférences culturelles et hisoriques éléments de décors, accessoires, cosumes, bribes de desallets de Monte-Carlo n’énoncent pas pleinement les personnages et leurs pièces de théâtre, vidéos, musiques… et ue du dispositi caracérisiques, les traducions brouillent le véritable De répétition en répétition, tout s’es modelé pour sens des images. arriver à un ensemble cohérent. C’es aussi ce que souligne Frant Fanon dans son C’es de cete manière que la bande-son générale ouvrage. s’es créée elle aussi. J’amenais dans ma partition numérique mes pises, des samples de musique déjà exisants, des créations d’autres étudiants. J’ai adapté, recomposé, mixé et difusé dans l’espace Barbara Tran tous ces éléments sonores sur mesure en foncion de la diplômée, DNSEP 2018 façon dont se formait la représentation. Le coix de travailler le son plus que les autres Peau noire, masques blancs de Frant Fanon. médiums m’a permis de montrer d’autres facetes de C’était un sujet très complexe, assez éloigné des ce sujet. Par exemple, donner une autre forme aux problématiques que j’ai l’habitude de traiter dans mon textes, jouer avec des aspecs peu présents comme les travail. infuences musicales ou recréer des environnements. J’ai eu du mal à trouver de la jusesse, donner Cete édition des Imprévus a été une très bonne une forme aux premières pises que j’ai explorées expérience de recerce plasique et de création (performance, céramique, cosume, vidéo, etc.) collecive, dont j’ai beaucoup apprécié la liberté de Étant blance, étudiante à Monaco, ce sujet me format. donnait l’impression de marcer sur des œufs et d’avoir en permanence une épée de Damoclès au-dessus de moi. Durant nos premières recerces, je nous sentais comme des funambules jonglant en équilibre entre ce qui —— 109 Peau noire, masques blancs 1. lage 2. représentation auateliers desalletsdeMonte-Carlo

Peau noire, masques blancs, représentation au ateliers desallets de Monte-Carlo

—— 111 Peau noire, masques blancs 1. 2. étapes préparatoires, orshop cosumes aec Yashi abassomi, designer de cosumes de scne 3. dessin Mar onnin DEP 201

Peau noire, masques blancs 1. dessinspréparatoires Maa acca DP 201 2. 3. . répétitions auateliers desallets deMonte-Carlo

—— 113 SAI SON propos 10 —— ——

I Electric Body M P R É V U S En 2018, les specacles des Imprévus naissent du dialogue entre corps dansants et nouvelles tecnologies. 2 Pour cete édition, l’ESAP mène une collaboration 0 pédagogique avec le département « Création et 1 gesion de l’image numérique » de l’Université Aix- Marseille (AMU). 8 « On a beaucoup parlé ces dernières Lors d’une première phase de travail, les étudiants de années du ‹ corps-macine ›, du l’ESAP et ceux de l’AMU, ainsi que des enseignants des ‹ corps-avatar ›, du ‹ corps-prothèse › deux srucures, se rejoignent à Aix-en-Provence dans le du ‹ corps réel / virtuel ›. Ces cadre du fesival Gamerz, dédié aux arts numériques. extensions nous ramènent dans le Ils poursuivent leurs recerces au cours d’une mouvement centripète / centrifuge deuxième rencontre à Monaco, au théâtre Princesse à son épicentre humain le plus Grace, cete fois en synergie avec les corégraphes. essentel et partant de là, au Ensemble, ils évaluent la capacité de certains dispositifs processus créatf encore et toujours à participer, non seulement de la scénographie, mais réinterrogé et aux nouvelles formes aussi de l’écriture corégraphique. Qatre pièces d’écriture en mouvement. » dansées trouvent là leur forme défnitive, singularisées par une forte présence de la vidéo. Philippe Frank Élément specral de od or obod, un objet Corps numérique en scène lacescent vibre et émet des sons au contac du danseur, comme une interprétation sibylline de son acivité ; Chambre 1 dépeint une femme kaléidoscopique, icône fracale et démesurée des codes de la féminité ; Ersa au contraire, en confrontant le corps à l’omnipotence d’écrans, réduit peu à peu son amplitude et son rythme ; dans 5 enfn, il se dédouble, translaté dans un monde parallèle d’images issues d’une réalité anxiogène ou produites par la 3D. Depuis les premières collaborations entre artises et ingénieurs développées par Experiments in Art and Tecnology (EAT) dans les années 60, les nouveaux médias ont permis des approces inédites de l’espace de la scène et du temps de la représentation. Aux corps réels s’ajoutent ces « elecric bodies » dont les contours dématérialisés écappent à la gravité. Aux geses du danseur et à la srucure de la corégraphie répondent des signaux sonores ou lumineux, des images, des dispositifs interacifs, des avatars. SP

Body or Nobody, représentations aux ateliers des Ballets de Monte-Carlo —— 115 SAI SON disribution 10 —— ——

Body or Nobody Ersatz —— —— Durée : 15 min Durée : 15 min

Chorégraphie : Gaëtan Morloti Chorégraphie : Asier Edeso Scénographie : Barbara Tran, Candice Navello, Scénographie, vidéo : Asier Edeso, Marine Gambardella, Audrey Jimenez, Clémentine Sassi Morgane Benyamina, Dylan Haond Danseuse : Kaori Tajima Arrangement : Barbara Tran Danseuses : Mimoza Koike, Marketa Posplsilovà

Chambre 19 —— 5 Durée : 15 min —— Durée : 15 min Chorégraphie : Julien Guérin Scénographie : Eva Ponzio, Eva Dmitrenko, Fiona Galati Chorégraphie : Le Wang Danseuse : Maude Sabourin Scénographie : Huimin Wu, Mary Bonnin Danseur : Daniele Delveccio

représentations au ateliers desallets de Monte-Carlo 1. 5 2. Ersat 3. Chambre 19 4. Body or Nobody

—— 117 SAI SON Ersatz témoignages 10 —— —— ——

Asier Edeso liberté d’acion, elle devenait un outil d’insabilité dans danseur chorégraphe la danse. En fn de compte, la personne es toujours assise, en état de malaise dans ses routines. La danseuse, i zaB ela d ziepak : En quoi la scénographie es- Mimoza, sans pouvoir quiter sa « prison », y cercait elle entrée dans le processus de création ? de nouveaux équilibres pour canger sa condition. La a sier e desO : L’édition Eleric od a permis de pièce se joue dans cete intimité. metre l’accent sur les relations entre la corégraphie, id : Qelle a été la place accordée à l’improvisation créée en solo, et les arts numériques. Personnellement, dans ce projet ? j’ai décidé d’employer des vidéoprojeceurs et j’ai ae : Personnellement, j’aime beaucoup participé à la réalisation d’une bande sonore avec une l’improvisation, mais j’aime aussi un cadre de règles des étudiantes, Barbara Tran. Avec Marine, Morgane, établies au sein duquel on peut improviser. Mimoza Dylan et Barbara, nous avons travaillé sur trois était libre dans son jeu parce que la corégraphie était diférentes références litéraires pour créer un monde conçue pour lui permetre de s’exprimer, pour favoriser où un personnage évolue parmi des tableaux qui, en l’apparition de moments magiques. Bien sûr, aux Ballets vérité, n’étaient rien d’autre que les projecions de nous travaillons sur des coses bien spécifques mais ces son inconscient. L’enjeu était d’accorder la vidéo à la moments de liberté en font aussi intégralement partie. corégraphie par rapport au traitement du mouvement Il y a une citation de Pina Bausc que j’aimerais ici dans le temps. évoquer : « Ce n’es pas la manière dont les gens bougent id : Qelle a été l’importance accordée à la vidéo qui m’intéresse, mais ce qui les fait bouger. » L’objecif dans ce projet ? donc es d’aller au cœur de l’émotion. ae : La danseuse, Mimoza Koike, interprétait des id : Es-ce que la scénographie permet, selon vous, interrogations du personnage qui pouvaient être suivies, de partager des visions issues de diférents domaines de simultanément, par la narration racontée par la vidéo. l’art pour trouver un camp commun ? Décalé dans le temps, le mouvement enregisré réécrivait ae : Pour moi, l’expérience des Imprévus de l’hisoire elle-même étant une sorte d’enregisrement 2018, était enricissante car j’ai tendance à contrôler de souvenirs. Les moyens scénographiques rendaient l’évolution des coses. Pour Eleric od, il s’agissait possible la narration qui, encore une fois, était de montrer les mouvements du personnage, mais sans indispensable pour accentuer la danse. déplacer la caméra. En ce qui concerne la musique, id : Pouvez-vous nous présenter l’évolution Mimoza a déclamé des phrases dans diférentes langues Ersat, représentation au ateliers du processus de travail ? Peut-on évoquer ici une pour les mixer sur une même bande-son qui accélérait desallets de Monte-Carlo scénographie évolutive ? Comment la collaboration de plus en plus, comme cela arrive dans certains s’es-elle déroulée et en quoi consisait le partage des processus de répétition obsessionnelle de nos pensées. idées ? Il faut admetre qu’ici la collaboration a pu pleinement ae : Ma rencontre avec les étudiants m’a ouvert des nourrir la création artisique comme, par exemple, camps de possibilités, à explorer pour défnir comment l’exemple de la peinture d’Egon Sciele peut devenir traiter d’un personnage qui modife son comportement une thématique à part entière, une inspiration pour une à la suite d’un événement inatendu. Sur cete base, nous œuvre corégraphique. avons pris en considération certains concepts issus de séries noires telles que lac Mirror ou encore des pièces de Romeo Casellucci ou de Dimitris Papaioannou. Nos premières idées circulaient autour du miroir cassé, qui Dylan Haond pourrait être placé sur la scène avec une table ronde, diplômé, DNSEP 2019 où siégeraient des juges. Progressivement, nous avons décidé que ces miroirs pouvaient être remplacés par Pour cete session des Imprévus, nous avons eu la cance des panneaux-écrans répartis sur scène. Le mapping de collaborer avec Asier Edeso, jeune corégraphe au vidéo a permis de projeter simultanément sur diférents sein des Ballets de Monte-Carlo. panneaux les images découpées. Puis, un objet de la vie L’objecif étant de monter un solo, nous avons coisi quotidienne a été coisi : Dylan a proposé une caise, et une problématique commune à nos quatre univers plusieurs de ses interprétations plasiques. singuliers : la quesion du double et de la folie. Ensuite, id : Qel es le rôle de la vidéo dans l’espace-temps tout en conservant une certaine porosité entre les consitué par le jeu de danse ? diférentes tâces à accomplir, nous nous sommes cacun ae : J’ai décidé de flmer la danseuse de dos, car je concentrés sur des aspecs bien précis de la producion. trouve que c’es intéressant d’observer quelqu’un ainsi. Personnellement, je me suis atelé à imaginer un J’ai produit des images qui s’accélérèrent comme si accessoire de design scénique avec lequel la danseuse cete personne voulait fuir. Finalement, l’espace ainsi pouvait évoluer tout au long du solo. J’ai donc élaboré, consruit était celui de l’inconscience, des souvenirs, sous la supervision du collecif de designers bruxellois du passé. La caise signifait un cadre qui limite notre Ous (collecif avec lequel j’efecuais un sage), —— 119 SAI SON Ersatz témoignages 10 —— —— ——

une double caise mêlant inox, bois teintés et un Les Imprévus nous ont permis d’expérimenter squelete apparent, qui permetait des jeux de lumières concrètement, et pour la première fois, le travail intéressants. J’ai ensuite rejoint Morgane Benyamina en groupe, ainsi la disribution des rôles, la mise en et Marine Gambardella sur la consrucion d’écrans en commun et le débat des diférentes idées. De plus, ce PVC aux srucures singulières. projet a été une première occasion de répondre à une Une fois la scénographie et le contexte du solo mis commande, sans oublier nos sensibilités personnelles. en place, nous nous sommes réunis à nouveau avec Asier et Mimoza Koike, la danseuse, pour nous accorder sur l’ensemble. Ce fut une formidable opportunité et une très bonne Morgane Benyamina expérience ainsi qu’une rencontre que je n’oublierai pas diplômée, DNSEP 2019 avec un corégraphe particulièrement talentueux. Le thème de cete session des Imprévus était Eleric od, ou comment faire intervenir les arts numériques dans une scénographie contemporaine ? Pour notre Marine Gambardella projet, c’es à travers le mapping vidéo que s’es traduite diplômée, DNSEP 2019 cete réfexion. Tout coïncidait avec notre propos : rendre visible un espace mental (dé)consruit par les Dès le lancement du thème des Imprévus 2018, Eleric images. C’es pourquoi les écrans présents sur scène od, nous avons insincivement coisi le projet servaient de support à des vidéos grâce à un logiciel d’Asier Edeso dont le sujet permetait de nous projeter conçu à cet efet. Nous lancions également ces vidéos en aisément dans l’espace : le double et la perte identitaire foncion de la corégraphie, afn que les images entrent dans la quête de soi. La scénographie es intervenue en interacion avec celle-ci. dans notre processus de création au travers d’un À mon sens, cete collaboration fut un réel succès sur dispositif qui dialoguerait direcement avec la danseuse bon nombre de points. Tout d’abord, je mets l’accent sur Mimoza Koike. notre processus de création qui s’es établi en prenant Nous voulions créer une scénographie imposante en considération les compétences de cacun. Pour ma ou autoritaire qui graviterait autour de la danseuse. part, c’es la relation à l’écriture qui m’a le plus apporté. Nous avons par ailleurs pensé la vidéo, l’élément Qe ce soit celle de l’espace ou celle de la dramaturgie. immatériel, en même temps que les éléments matériels L’apport narratif était très important pour nous car, de notre scénographie. Nous voulions composer une même si nos univers et nos compétences sont diférents, arcitecure déconsruite, signifant la perte de contrôle, notre lien principal réside dans la volonté de proposer qui servirait aussi comme support pour la vidéo. Dans une hisoire à nos specateurs. Ici, nous voulions la dramaturgie, notre scénographie correspondait à évoquer la fgure du double dans une quête identitaire. l’espace mental de la danseuse. En efet, nous avons La scénographie es donc la représentation d’un univers envisagé cet espace comme une matérialisation de éclaté en plusieurs fragments : des écrans vierges qui quelque cose d’immatériel, composé d’éléments n’atendent qu’à être remplis par des images mentales. fragmentés et asymétriques. Nous avons également Cete collaboration fut une première pour représentation et au ateliers voulu metre l’accent sur l’immatériel prédominant nous en tant qu’étudiants. Une réelle opportunité desallets de Monte-Carlo sur le matériel, d’où notre parti pris de ne consruire professionnalisante car elle nous a permis de nous que des écrans, faisant ainsi référence aux écrans qui confronter à un vrai travail de scénographe. Comment embarrassent notre quotidien. répondre à une commande scénographique tout en Nous nous voyions régulièrement avec Asier, resant le plus proce de nos sensibilités artisiques ? ainsi que Mimoza, pour élaborer le déroulement de Ersa en es la première réponse. l’hisoire. La vidéo consituait un point essentiel de celle-ci. En efet, le solo pensé par Asier devait s’ajuser rigoureusement avec la vidéo et la place qu’elle avait dans l’espace scénique. La consrucion de l’hisoire s’es donc faite en même temps que l’évolution de la scénographie. La thématique — Eleric od — correspondait totalement au sujet du solo Ersa. Cete thématique résonnait comme une ligne de conduite dans le scénario. Tecniquement, nous avons joué avec le mapping vidéo qui s’acivait en régie pendant le solo afn de créer un faux direc et qui permetait à la danseuse de dialoguer avec les images dans la vidéo. —— 121 Chambre 19 1. 2. représentation au ateliers desallets deMonte-Carlo 3. présentation des pices

Body or Nobody, représentationau ateliers desallets deMonte-Carlo

—— 123 ����Hors plateau

Icare, peinture grand ormat, orshop au sudios de la Viorine aec le décorateur Marc Van Elden 201 —— 125 De l’apprentissage de la peinture aux Ballets de Monte-Carlo

Frédéric Pohl professeur dessin, peinture, techniques de la représentaton au Pavillon Bosio

Les étudiants ont souvent été sollicités pour participer aux événements programmés par la compagnie des Ballets de Monte-Carlo, au travers de la pratique de la peinture. Déjà en 2009, à l’occasion du centenaire des Ballets russes au Grimaldi Forum, un fond peint avait été produit par les étudiants et inclus à la très grande scénographie du hall d’entrée. Lors de ce même événement, et pour orner l’accès aux salles de conférences, se tenait sur les murs du hall une autre peinture, de 41 × 3 m : celle-ci reprenait, à la manière de, une gouace de Léon Baks. Lors des Imprévus 2012, un grand bal fesif a été produit dans le hall d’entrée de l’atelier des Ballets, et donné à l’issue des specacles. Une toile de 17 × 8 m a accompagné et enveloppé ce Bal des chimères, une réjouissante dérive sur le thème de l’enfer et du purgatoire, inspirée de l’œuvre de Jérome Bosc. En 2014, une immense aile bleue a été peinte sur une toile de 12 × 8 m pour illusrer le thème d’Icare, elle a été déployée à nouveau dans le hall des Ballets, un espace de grande hauteur également nommé « la Rue ». À partir de 2016, et pour les 30 ans de la compagnie, l’invitation s’es faite via la commande d’afces pour illusrer cet anniversaire. Des peintures ont alors été réalisées sur des papiers de 4 × 3 m, pour une partie de la campagne publicitaire des manifesations Lété danse en 2016. Une petite vingtaine de peintures originales, dédicace à la pluralité des formes d’expression de la danse, a ainsi habillé les panneaux d’afcage des rues de Monaco. En 2017, les Ballets de Monte-Carlo ont créé le projet aites de la danse et aménagé, sur la place du Casino, un grand dancing ouvert au public. Sur le même principe que l’année précédente, environ trente afces peintes ont été produites en 4 × 3 m et réparties sur les murs de la ville, en préambule à la fête. orshop au sudios de la Viorine, étudiants de 1 année 2013201 —— 127 F(ê)aites de la danse, achage public, uillet 201

L’été danse, achage public, uin 201

—— 129 1. Sisyphe et Icare, orshop au sudios delaViorine, ice,201 2. L’été danse, orshop ausudios de la Viorine, ice,201

1. rédéric Pohl et Jean-Chrisophe Maillot auateliers des allets de Monte-Carlo, 201 2. Sisyphe et Icare, orshop au sudios delaViorine, ice, 201 3. L’été danse, préparation des proets, 201

—— 131 D’un plateau à l’autre

colloque Les Arts plasiques et la scène, décembre 200, ndineréaud-olland et Georges Didi-uberman au Grimaldiorum

Ondine Bréaud-Holland au-delà des assertions communes. Car, si le colloque professeur d’esthétque, philosophie, du Pavillon Bosio et le Monaco Dance Forum se spectacle et art vivant au Pavillon Bosio présentent comme des rencontres frucueuses entre protagonises du monde des arts visuels et vivants, le Et si le Pavillon Bosio organisait caque année un débat s’insalle toujours à leur occasion. colloque… Un colloque qui se déroulerait en présence Et puis, des corégraphes et des plasiciens de cerceurs et d’artises, désireux d’explorer les auraient pu intervenir sur le plateau du théâtre des ressorts de la création contemporaine, d’en montrer la Variétés en présentant aux étudiants le résultat de leur ricesse et de mesurer les enjeux théoriques et pratiques collaboration : parler des processus créatifs, évoquer qui s’y ratacent inélucablement. Un colloque qui se les trouvailles qu’ils ont faites ensemble, repérer concentrerait sur l’acualité artisique sans renoncer les inventions qu’ils ont peu à peu intégrées à leurs pour autant à situer les œuvres d’aujourd’hui dans des procédés d’écriture scénique et corégraphique. On perspecives hisoriques qui rendent hommage à la pense en particulier à Micel Blazy et Chris Haring qui scénographie. ont pris la parole en 2018 en abordant la manière dont …Les rts plasiques et la scne, Mises en scne du réel, des matériaux organiques peuvent participer d’une Lbet scénique, LEpérience de leposition, éception dramaturgie d’ensemble et d’un jeu d’écelles troublant et temporalité, topies du Musée, Pour une mémoire (ig Dish). dnamique, Dispositis et représentations, La Place En tant qu’amateur d’art contemporain, on se descorps, till lie… demandera où ces expériences sont consignées. Dans Les thématiques élaborées par le Pavillon Bosio ont nos mémoires, en premier lieu. Elles s’animent par permis d’inviter des danseurs et corégraphes tels que moments en nous faisant de nouveau goûter au carme La Ribot, Arkadi Zaides, Chrisian Rizzo et Luc Peton. des discussions, des images projetées et des specacles Les inviter, c’es-à-dire écouter leur témoignage sur qui se sont déroulés sous nos yeux. En second lieu, dans leur producion et recueillir le fruit de leurs réfexions, la revue Paillon, à travers des articles et des interviews les entendre sur ce qui motive leur travail et lui donne qui deviennent à leur tour source d’inspiration, pour les raison d’être. Dans un cas, il s’agira d’inscrire la danse artises comme pour les critiques. dans le musée, dans l’autre, de réfécir aux relations Les colloques organisés en relation direce avec le entre corps et espace, dans un autre encore, d’exorciser Monaco Dance Forum ont été : des aces politiques inacceptables ou simplement de — Les rts plasiques et la scne, décembre 2009 ; consruire des images poétiques avec des animaux — Mises en scène du réel, décembre 2011 ; vivants. — Lbet scénique, décembre 2012 ; Mais imaginons, outre les conférences, qu’il eût — Les topies du musée pour une mémoire été possible d’assiser aux specacles du Monaco dnamique, décembre 2014 ; Dance Forum. La danse s’es frotée à la quesion de — La Place des corps, décembre 2016 ; l’injusice (ae You ugged, issed and espeed — till lie, décembre 2018. Your ron Venus, Robyn Orlin), du caos programmé (Salves, Maguy Marin), ou s’es interrogée sur ce qui fonderait notre humanité (e Great amer, Dimitris Papaioannou). Il serait plus juse de dire que les ballets proposés dans le cadre de la manifesation ont éveillé les intelligences et les sens. Ils les ont provoqués en permetant de conduire la discussion —— 133 telles que Vers un pas sage (1995), oméo et Juliee Le Pavillon Bosio La Compagnie (1996), Cendrillon (1999) La Belle (2001), Le onge (2005), ltro Canto (2006), aus (2007), Lac (2011), Chore (2013), Art & Scénographie des Ballets Casse-oisee Compagnie (2013)… Par ailleurs Jean-Chrisophe Maillot enricit École Supérieure de Monte-Carlo également le répertoire de la compagnie en invitant des —— corégraphes majeurs de notre époque mais aussi en d’Arts Plasiques permetant à des corégraphes émergents de travailler L’ancrage de la danse à Monaco : avec cet outil exceptionnel que sont les 50 danseurs des de la Ville de Monaco les Ballets russes Ballets de Monte-Carlo. Parmi ces corégraphes invités —— 1909 marque le début d’une forte implantation de fgurent notamment Sidi Larbi Cherkaoui, Shen Wei, l’art corégraphique à Monaco. Serge de Diaghilev Alonzo King, Emio Greco, Chris Haring, Marco Goece, Située sur le Rocer de Monaco dans un environnement présente pour la première fois à ses Ballets russes. Lucinda Childs, William Forsythe, Jiri Kylian, Karole presigieux, l’École Supérieure d’Arts Plasiques Ils s’établissent à Monte-Carlo qui devient leur atelier Armitage, Maurice Béjart ou encore Marie Chouinard. de la Ville de Monaco (ESAP) es un établissement créatif pendant deux décennies. Depuis la Principauté, En 2000, Jean-Chrisophe Maillot crée le Monaco d’enseignement supérieur et de recerce habilité à Diaghilev réforme le ballet de son temps dans toutes Dance Forum, vitrine internationale de la danse qui délivrer un Diplôme National d’Art (Licence) et un ses formes. À sa mort en 1929, la compagnie es présente un foisonnement éclecique de specacles, Diplôme National Supérieur d’Expression Plasique dissoute. Plusieurs personnalités et corégraphes la font d’expositions, d’ateliers et de conférences. La compagnie (Maser). Il s’inscrit dans un réseau de srucures renaître sous diverses appellations mais elle disparaît participe régulièrement à ce fesival ainsi que culturelles et d’insitutions partenaires, pour des défnitivement en 1951. l’Académie Princesse Grace. collaborations qui permetent aux projets de passer du dessin et de la maquete à des formats réels La naissance de l’actuelle compagnie L’avenir des Ballets de Monte-Carlo d’expositions ou de specacles. des Ballets de Monte-Carlo En 2011, sous la Présidence de S.A.R. la Princesse de Dispensée sur cinq années, la formation couvre les En 1985, la compagnie des Ballets de Monte-Carlo Hanovre, une nouvelle srucure dirigée par Jean- camps de l’art et de la scénographie. Elle se consruit voit le jour grâce à la volonté de S.A.R. la Princesse de Chrisophe Maillot réunit ces trois insitutions : autour d’une pédagogie de sudio qui comprend, entre Hanovre qui souhaite s’inscrire dans cete tradition de Les Ballets de Monte-Carlo concentrent à présent autres, le dessin, le design graphique, le design d’objet, la danse à Monaco. La nouvelle compagnie es dirigée l’excellence d’une compagnie internationale, les atouts la photographie, la vidéo, la peinture, la céramique, par Ghislaine Tesmar et Pierre Lacote, puis par Jean- d’un fesival multiforme et le potentiel d’une école de les arts numériques, l’insallation, la performance et Yves Esquerre. haut niveau. Création, formation et difusion sont à la scénographie. Elle répond de manière progressive présent réunies à Monaco pour se metre au service aux opportunités ofertes par le contexte culturel et L’essor de la compagnie de l’art corégraphique d’une manière inédite dans le économique, national et international. En 1993, S.A.R. la Princesse de Hanovre nomme à monde de la danse. Au travers d’Ateliers de Recerce et de Création la tête des Ballets de Monte-Carlo, Jean-Chrisophe (ARC), l’ESAP interagit en outre avec des universités Maillot. Fort d’une expérience de danseur acquise cez et des écoles supérieures d’art européennes. Dans ce Rosella Hightower et John Neumeier, et corégraphe- contexte, les étudiants s’enricissent d’autres cultures direceur du Centre Chorégraphique National de Tours, et enseignements. Enfn, les interventions de nombreux Jean-Chrisophe Maillot fait prendre un tournant artises invités, les conférences, un colloque annuel à la compagnie. Il crée pour elle plus de 40 ballets et des publications viennent nourrir les ressources dont plusieurs entreront au répertoire de grandes académiques. compagnies internationales. Les Ballets de Monte-Carlo L’ESAP es un établissement de service public de la sont désormais sollicités dans le monde entier grâce Mairie de Monaco. aux œuvres emblématiques de Jean-Chrisophe Maillot Direceur de publication : Isabelle Lombardot, direcrice du Pavillon Bosio

Comité de rédacion : Ondine Bréaud-Holland, Dominique Drillot, Isabelle Lombardot, Maxime Matray, Sandrine Perrin, Valérie Virgile

Conception graphique : Remi Leserle Maxime Matray

Relecure : Isabelle Lombardot, Sandrine Perrin, Valérie Virgile

Traducion : Ivana La Fata, Damien MacDonald

Stagiaire : Izabela Dziepak

Remerciements : Georges Marsan, Maire de Monaco Françoise Gamerdinger, direceur des afaires culturelles Jean-Marc Deoriti-Casellini, délégué à l’ESAP Jean-Chrisophe Maillot, corégraphe et direceur des Ballets de Monte-Carlo Maca Makeïef, meteure en scène, direcrice du T. N. de la Criée, Marseille Chrisine Goiran, cargée de communication à la Mairie de Monaco et tous les diplômés, étudiants, anciens étudiants, professeurs, anciens professeurs, corégraphes et danseurs ayant contribué à cet ouvrage

Crédits photographiques : Alice Blangero et le Pavillon Bosio

Dépôt légal à parution

ISBN : 978-2-9566398-3-1

Les éditions du Pavillon Bosio, décembre 2019