Conférence « L'esport Est-Il Un Sport Comme Les Autres
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Conférence « l’eSport est-il un sport comme les autres ? » Compte-Rendu Mercredi 14 juin 2017 17h30 - 19h30 / MAIF Social Club - PARIS L’eSport ou sport électronique connaît depuis une dizaine d’années un développement exponentiel dans le monde entier. Phénomène culturel à l’origine, branche de l’industrie du jeu vidéo (seconde industrie culturelle en France, derrière le livre), il constitue un phénomène de société et un marché économique extrêmement dynamique, notamment dans les pays émergents. Au point que les compétitions d’eSport remplissent aujourd’hui des stades entiers, que les droits de retransmission se négocient à plusieurs dizaines de millions d’euros et que les stars de la discipline sont presque aussi populaires que les champions sportifs. Surtout, le potentiel de développement de l’e-sport semble extrêmement important, tant du point de vue économique et médiatique qu’au niveau de la pratique. 36% des Français s'intéressent régulièrement à l’eSport, soit plus de 7,5 millions d'individus, selon une étude menée par le groupe Webedia. D’après un récent rapport parlementaire, il y aurait environ 850 000 joueurs occasionnels de jeux vidéo compétitifs en France, dont 398 000 joueurs réguliers. Ce qui classerait le e-sport au 9e rang des fédérations unisport françaises, juste derrière le rugby et le golf. Encore faudrait-il que le e-sport soit reconnu comme un sport. Car les débats sont nombreux sur la qualification de cette discipline. Est-ce une activité culturelle ? Récréative ? Sportive ? Pour ses détracteurs, le peu de dépense physique qu’il implique semble lui fermer la porte de la qualification sportive. D’autant plus que les sociétés européennes sont de plus en plus sédentaires, comme les résultats du projet européen PASS mené par notre Think tank Sport et Citoyenneté le soulignent. L’activité en France est d’ailleurs toujours considérée insuffisante par rapport aux recommandations, quand le temps moyen passé devant des écrans est au-delà de 3h par jour, en dehors du temps travail ou du temps scolaire Pour ses partisans, cela n’est pas un argument tenable au vu d’autres disciplines sportives basées davantage sur l’habileté (tir, tir à l’arc), qui, elles, sont considérées comme des sports depuis toujours. Au-delà de ses questions fondamentales sur la nature même de l’eSport, le débat est vif sur la place que les institutions publiques et sportives doivent accorder à cette discipline. Le mouvement sportif (et en premier lieu le Comité International Olympique) est dans l’obligation de constamment se réinventer, afin de coller aux aspirations des nouvelles générations et de répondre aux attentes de ses partenaires et annonceurs. L’entrée au programme olympique de nouvelles disciplines comme le skateboard ou le surf aurait été impensable il y a encore une dizaine d’années. Elles seront pourtant à l’agenda olympique dès les Jeux de Tokyo 2020. Enjeux économiques, enjeux sociétaux, enjeux diplomatiques… que dit l’eSport de nos sociétés (plus connectées, plus intelligentes, plus sédentaires) ? Doit-on se préparer à remettre à Paris en 2024 les 1ères médailles d’or virtuelles ? Est-ce souhaitable d’un point de vue sociétal ? Les gamers le souhaitent-ils vraiment ? Le CIO s’appropriera-t-il cette discipline au risque de remettre en cause sa définition du sport ? Aura-t-il seulement le choix, alors que l’appétit des géants de l’industrie est de plus en plus fort, que le eSport connaît ses plus forts taux de croissance dans les pays émergents (donc de nouveaux champs de développement potentiels) et que certains pays tels le Royaume-Uni ont déjà annoncé leur souhait de mettre en place des Jeux Olympiques de l’e-sport ? Assistera-t-on demain à l’émergence d’e-Games, concurrents directs de nos « vieux » Jeux Olympiques ? • Géraldine Pons, Journaliste Eurosport et ambassadrice du Think tank Sport et Citoyenneté • Stéphane Tisserand, Responsable des relations institutionnelles du groupe MAIF • Julian Jappert, Directeur du Think tank Sport et Citoyenneté • Nicolas Besombes, Docteur en Sciences du Sport, auteur de sa thèse sur l’eSport. • Baptiste Branget, Coach d’une équipe professionnelle, Préparateur mental sportif. • Matthieu Dallon, Responsable de la stratégie eSport chez Webedia • Pierre-Emmanuel Davin, Directeur Général de Nielsen Sports • Thierry Granturco, Avocat spécialisé dans le droit du sport, membre de Sport et Citoyenneté • Olivier Morin, Présentateur du Canal Esport Club, Président et fondateur de JKTV Productions • Patrick Assyag, Cardiologue, Président de l’association de Cardiologie d’Ile de France Stéphane Tisserand commence par accueillir les intervenants ainsi que les auditeurs présents au MAIF Social Club, est un espace dédié aux pratiques innovantes, qui héberge également des expositions. La MAIF porte un intérêt particulier au sport, notamment parce qu’il permet de véhiculer des valeurs citoyennes et éducatives, et qu’il est générateur de confiance, thème de l’émission courte produite par la MAIF « Confiance en tête ». La MAIF est d’ailleurs engagée dans le sport depuis 20 ans, et développe un partenariat avec l’UNSS. Le groupe s’intéresse à l’eSport car il suscite des interrogations pour eux, et ils peuvent avoir des difficultés à l’associer aux sports traditionnels. Julian Jappert prend ensuite la parole, et présente les réflexions du Think tank Sport et Citoyenneté. La réflexion sur l’eSport vient notamment de l’interrogation posée par le mouvement olympique et notamment le comité d’organisation des JOP 2024. L’objectif n’est donc pas de répondre aujourd’hui à la question « l’eSport est-il un sport comme les autres ? » mais plutôt de lancer une série de débats et de pistes de réflexions, et de pouvoir au moins dans un premier temps, les présenter aux acteurs du mouvement sportif et aux décideurs politiques. L’idée de cet évènement est également d’envisager le phénomène eSportif sous un angle plus sociétal, un peu moins orienté « business » ou marketing que ce qui a pu se faire ailleurs. Il encourage la libre expression des parties prenantes, sans jugement, et encourage les personnes présentes dans l’assistance à réagir à la suite de la table ronde. Les présentations de Nicolas Besombes et Pierre-Emmanuel Davin sont notamment assorties d’une présentation powerpoint que vous pouvez retrouver ici Nicolas Besombes : [Héberger les PP sur le site pour mettre un lien] Pierre-Emmanuel Davin : [Héberger les PP sur le site pour mettre un lien] Nicolas Besombes est chargé de présenter le sujet de l’eSport, et notamment les prismes de comparaisons qui peuvent permettre une comparaison avec les sports dits « traditionnels ». Les critères qu’il se propose d’exposer lui viennent de la sociologie du sport. Tout d’abord l’eSport, ne concerne pas que les jeux vidéo sportifs, ou les jeux vidéo amenant à une mobilité des corps des pratiquants (« Exergames », contraction d’« exercise » et de « game » sur des supports de type Wii, Kinect ou Move). L’eSport se définit donc par l’affrontement codifié de joueurs par écrans interposés lors de compétitions de jeux vidéo qui peuvent se dérouler en ligne, ou hors-ligne (en présentiel). Les différents jeux pourraient se comparer à différentes disciplines comme on retrouve plusieurs disciplines différentes au sein de l’athlétisme par exemple. Il s’agit en premier lieu de définir le sport. Un critère qui revient souvent, pour tout le monde, est celui de la dépense énergétique nécessaire à la pratique. Or on remarque que des disciplines présentes aux Jeux Olympiques, qui constituent la plus haute reconnaissance institutionnelle pour une activité physique et sportive, ont des dépenses énergétiques très variables, il suffit par exemple de comparer le marathon au golf ou au tir à l’arc. Ainsi, la sociologie du sport détermine quatre critères qui font consensus auprès des chercheurs du monde universitaire : • Le premier de ces critères est celui de la pertinence motrice. Il s’agit de savoir si la motricité va influer sur le résultat de la compétition entre deux individus. C’est ce qui permet par exemple de distinguer les échecs de la pétanque. On peut considérer qu’aux échecs, si quelqu’un s’occupe de bouger les pions sur les directives de quelqu’un d’autre, cela n’influera pas le résultat final de l’affrontement. On ne peut pas affirmer la même chose de la pétanque. Nicolas Besombes fait notamment le parallèle avec le baby-foot et l’eSport : dans les deux cas l’affrontement se fait sur un terrain symbolique, la table de babyfoot ou le terrain virtuel, l’enjeu pour l’adversaire est de décoder non pas le corps de l’athlète mais bien sa projection, que ce soit les petits footballeurs ou l’avatar virtuel. Enfin les deux se passent en simultané, ce ne sont pas des jeux « au tour par tour ». • En second lieu vient la compétition. C’est ce qui peut apparaître comme le plus important lorsqu’on évoque l’eSport. On le définira comme un affrontement entre deux joueurs. Cela permet par exemple de différencier la course à pied d‘une course de 5000m officielle. L’eSport adopte donc le modèle d’organisation de compétitions propre au sport. De même manière qu’il existe des saisons de kayak, de football ou de ski, il existe des saisons esportives, en fonction des jeux. Ces saisons sont ponctuées de temps « morts », de périodes sans compétitions qui correspondent généralement à l’équilibrage annuel du jeu (les développeurs le repensent pour le rendre plus attractif). Les temps forts correspondent aux tournois qualificatifs et aux championnats, qui mènent à des finales nationales et internationales. • Ensuite, le troisième critère de définition du sport est la codification. Dans le sport, il s’agit des règlements du football, du basketball, etc. Ces règlements sont explicités, téléchargeables sur les sites des fédérations et uniformisés au niveau international.