du 18/12/09 au 22/01/09 | un gratuit qui se lit Q14

La Culture en cadeau

Politique culturelle Orchestre Philharmonique du Pays d’Aix 4 Rencontres artistiques du Var 5 Théâtre Le Gymnase, la Minoterie 7 La Criée, le Massalia 8 Offrez Le Merlan, le Lenche, Miramas, Port-de-Bouc 9 Entretien avec Charles-Éric Petit, Gyptis, Bernardines 10 Daki Ling, Toursky, Montévidéo 11 Arles, Rousset, Aix, Martigues 12 des livres Aubagne, Aix, Berre L’Étang 13 Vivons-nous encore en démocratie ? Le parlement vient Martigues, Grasse 14 d’adopter une loi transformant télévision et radio publiques en Châteauvallon, Draguignan, Gap 15 bras armés de l’État. Le gouvernement a désormais la main Ouest Provence, Port-de-Bouc, Cavaillon 16, 17 mise sur leur financement -en l’absence de recettes Avignon, Arles, Nîmes 18, 19 Danse publicitaires- et sur leur direction -qu’il nomme et révoque. Groupe Dunes, Dansem 20 Les journalistes, dans ces conditions, pourront-ils continuer à Ballet d’Europe, 3bisf, Toursky 21 faire leur travail ? Martigues, Châteauvallon, BNM 22 Il y a peu de chances… La pièce de Thierry Bédard et Jean- Pavillon Noir (Aix), Château-Arnoux, Gap 23 Luc Raharimanana, Madagascar 47, revient sur la répression de Ouest Provence 24 l’armée coloniale française : elle a été brutalement retirée du Arts de la rue Gap Arles, Sirènes et midi net 24, 25 catalogue du Ministère des Affaires Étrangères, qui prévoyait Musique pourtant une tournée dans l’Océan Indien. La censure s’exerce, Opéra 26, 27 indirecte, insidieuse, par le retrait des financements publics Concerts 28 à 38 lorsque le discours dérange… Qu’en sera-t-il à la télévision ? Nîmes, Agenda 39 Les lycéens mènent depuis plus de trois semaines un Disques 40, 41, 42, 43 mouvement de grève exemplaire, contre la réforme des lycées, Arts visuels Toulon, Istres 44 la grande braderie de l’Éducation publique. Les médias de Entretiens avec Michel Butor et Danièle Ubeda 45 masse n’en parlent que lorsque certains débordent, cassent, Athanor, Buy-Sellf Art Club 46 usent de la force. Et ne disent rien des trois enfants arrêtés à Dukan et Hourdequin, Art-Cade, Complex, VIP Art Galerie 47 Grenoble dans leur salle de classe, pour une reconduite à la La Valette, Musée des Tapisseries (Aix) 48 frontière qui n’assume pas son nom d’expulsion. Comment Seconde Nature (Aix) 49 sera-t-elle nommée quand la télévision publique sera devenue Cinéma Turin, Fotokino, Lech Kowalski 50 télévision d’État ? Festival Tous Courts 51 Il n’y a pas de démocratie sans liberté réelle de la presse, Hommage à Jacques Rozier, Institut de l’Image, de la culture, de l’éducation, pas de démocratie si le gouver- Polygone étoilé 52 nement élu impose sans concertation ses vues, ses choix et Livres ses hommes. Rencontres littéraires 53, 54 Il nous faut désormais contrecarrer la propagande. En Agenda 55 Livres : jeunesse, arts, littérature, essais 56 à 65 publiant, en parlant, en résistant. En fermant la lucarne Philosophie insidieuse et les médias dominants, pour nous tourner vers Echange et diffusion des savoirs 66, 67 ceux qui ne sont soumis ni aux grands groupes, ni au pouvoir. Histoire et Patrimoine Et en changeant nos habitudes de consommation qui Musée départemental de l’Arles Antique 68 appauvrissent les rares lieux où la pensée encore palpite. La Pensée de Midi 69 Alors achetez la presse indépendante, offrez des livres, des Sciences et techniques Forum PACA Sciences et citoyenneté, agenda 70, 71 disques, des instruments pour que chacun sache que la Éducation musique se fait. Des places de théâtre, d’opéra et de cinéma Orchestre Français des Jeunes, Averroès Junior 72, 73 pour que vos enfants découvrent qu’il y a d’autres spectacles. Alternative positive, Picasso Métamorphoses 74 Ils feront peut être la moue, préférant le dernier iPod, la Prix lycéen du livre PACA 75 dernière console, le téléphone aux photos qui glissent comme Laterna Magica 76 dans Minority report. Mais si nous voulons qu’ils ne vivent pas Les Zibulons 76, 77 ce cauchemar sécuritaire, ne renonçons pas à leur faire Rubrique des adhérents 78 connaître nos joies. AGNÈS FRESCHEL 04 POLITIQUE CULTURELLE COMMUNAUTÉ DU PAYS D’AIX Partager le plaisir Une communauté d’agglomérations venant de loin d’ailleurs, certains peu habitués à travail de fond pendant le festival d’Art Lyrique, et qui investit dans un orchestre entendre de la musique symphonique en direct… réfléchissons à l’enseignement musical, à sa Quels sont les changements cette année ? nouvelle organisation. Mais cette mission de symphonique, voilà une démarche Il s’agit d’un développement dans la continuité : démocratisation et d’irrigation du territoire nous qui surprend ! Surtout quand elle l’orchestre symphonique s’épaissit, devient semble essentielle. s’attache à diffuser la musique «philharmonique», sera géré directement par la L’orchestre est-il entièrement financé par la CPA ? dans de petites communes, CPA et se dote d’un nouveau chef. Le répertoire Pour les deux opérations dont il est question, oui. de concerts… gratuits ! aussi évolue : autour de Strauss, Jacques Chalmeau C’est un orchestre formé de professionnels, que a prévu des incursions chez Mendelsson et nous mandatons pour ces deux séries Jean Bonfillon, maire de Fuveau et Vice-Président Beethoven. Cela sera plus notable encore cet été, d’événements, mais qui a bien sûr toute liberté de de la communauté du Pays d’Aix (CPA), délégué à avec Dvorak par exemple. Mais l’orchestre sera se produire ailleurs, avec d’autres… la Culture, explique sa démarche avec une grande toujours destiné à constituer la première marche PROPOS RECUEILLIS PAR AGNÈS FRESCHEL clarté… d’un accès à la musique classique, avec un répertoire plutôt facile d’accès. Zibeline : Comment est né cet orchestre ? La volonté de démocratisation de la culture passe Jean Bonfillon : D’une volonté d’irriguer le rarement par la mise en place d’un orchestre territoire aixois en termes de musique classique. Et philharmonique. Pourquoi ce choix particulier ? cela autour de deux périodes : celle des festivités La CPA a une politique culturelle très active, en de fin d’année avec un répertoire viennois, dans la matière de soutien aux compagnies théâtrales et tradition du concert de Noël, et une autre tournée de danse, d’arts de la rue ; pour les musiques en juin, avec une musique plus élaborée. Dans un actuelles aussi, et une politique d’expositions bien premier temps l’orchestre a tourné dans 5 sûr. Mais je sais trop ce que la musique a pu communes du Pays, puis dans 10, et l’an dernier m’apporter, et m’apporte encore, pour en priver mes déjà dans 23… transformant les vœux des maires concitoyens, en particulier ceux qui ne feraient pas en grands rassemblements festifs ! Ainsi, à Fuveau, la démarche d’aller vers elle. Il faut faire partager nous avons accueillis 1000 personnes, certains ce plaisir, ce bonheur. Nous faisons par ailleurs un © X-D.R Relever le niveau artistique Le nouveau chef de l’Orchestre orchestre qui pendant cinq ans a joué essentiel- Brahms, des bis enlevés… C’est un programme qui Philharmonique du Pays d’Aix lement des programmes «légers». Mon ambition fait plaisir et qui semble trouver, depuis les première est de fédérer les musiciens autour premières répétitions, l’adhésion des musiciens. dévoile son ambition à la tête d’œuvres symphoniques majeures pour atteindre un On vous retrouvera plus tard dans l’année ? de la formation locale meilleur niveau artistique, plus professionnel. Et Oui, avec une tournée estivale autour de la Zibeline : Jacques Chalmeau, on vous connaît peu constituer à l’avenir un répertoire stable. Symphonie du «Nouveau monde» de Dvorak ou au dans la région… D’où venez-vous ? Comment avez-vous choisi votre programme ? festival de Musique Sacrée à Saint–Michel pour le Jacques Chalmeau : Je viens à depuis Il faut toujours envisager trois paramètres ! Un bon Stabat mater de Pergolèse et l’un des derniers longtemps pour des raisons personnelles et j’ai programme doit satisfaire d’abord les musiciens, grands oratorios de Haendel : Solomon. dirigé Carmen au Festival de Lacoste l’an dernier... avec lesquels il est nécessaire de créer de vrais ENTRETIEN RÉALISÉ PAR JACQUES FRESCHEL On va dire que je suis parisien, même si je suis né rapports humains, ensuite le public qui vient passer en Normandie. C’est là que j’ai fait mes études un bon moment, enfin il faut que ça entre dans musicales. J’ai ensuite voyagé au gré de mes obli- «l’histoire» du chef. La 7e symphonie de Beethoven, gations professionnelles dans de nombreux pays, je l’ai souvent dirigée ! Et il y a aussi, pour cette surtout en Italie et en Russie, comme pianiste et tournée, des pièces festives de Mendelssohn et chef d’orchestre. Par exemple, du fait que j’ai suivi l’enseignement d’un professeur de piano russe, j’ai été amené à diriger au Conservatoire Tchaïkovski, Philharmonique à domicile ! puis à fonder l’Orchestre Philharmonique de Moscou Si vous avez la chance de crécher à Venelles, Fuveau, extraites du Songe d’une Nuit d’été, de la Symphonie avec lequel j’ai beaucoup joué. Mais c’est difficile Saint-Cannat, Cabriès, Rognes, Peynier, Le Puy italienne ou de joviales Danses hongroises de aujourd’hui là-bas ! J’ai ensuite fait partie de Sainte-Réparade, Pertuis, Simiane-Collongue, Brahms… on n’hésite plus ! Un «tour» qui s’achève l’équipe de direction de l’Opéra de Lyon pendant Peyrolles, Meyreuil ou Châteauneuf-le-Rouge… en point d’orgue, à Aix, au Grand Théâtre de cinq ans et décidé dernièrement de retrouver mon pas besoin de mettre les pneus-neige pour entendre Provence! indépendance… Et comme la région marseillaise l’Orchestre Philharmonique du Pays d’Aix. Jacques possède un formidable potentiel culturel… Chalmeau vous joue Beethoven à domicile, et c’est PAYS D’AIX. Tournée du 9 janv. … on vous a nommé à la tête de l’Orchestre gratuit ! Et quand le programme annonce sa 7e au 1er fév. 04 42 21 69 69 Philharmonique du Pays d’Aix ! symphonie (ah, ce fameux mouvement lent au Programme consultable sur www.aixenmusique.fr Oui ! On m’a sollicité pour faire évoluer cet rythme dactylique !) à côté de pages de Mendelssohn RENCONTRES ARTISTIQUES DU VAR POLITIQUE CULTURELLE 05 L’art marionnettique en débat Les nouvelles écritures du théâtre de marionnettes et d’objets faisaient débat aux Rencontres artistiques du Var qui, avec pertinence, joignaient la parole aux gestes À l’occasion des Rencontres artisti- vrage, permit de retracer à grandes ques du Var à Toulon (voir Zib 13), le enjambées la riche histoire de la Théâtre Massalia de Marseille et le marionnette, depuis son enfance (qui Marionnettes de la cie Pseudonymo © X-D.R Pôle Jeune Public du Revest-les-Eaux a à voir avec le sacré) jusqu’à la Sombsthay, Cyril Bourgois, David invitaient publics et professionnels à plénitude de l’âge adulte (où les Girondin Moab et Philippe Foulquié. réfléchir sur les nouvelles écritures du techniques n’ont rien d’étanche), en On évoqua Claude Lévi-Strauss et son théâtre de marionnettes et d’objets. Un passant par son adolescence rebelle ouvrage La Pensée sauvage dans lequel questionnement que le Théâtre de Cui- (qui fait table rase de la suprématie il fait référence au bricolage (le bris et sine aborda concrètement à travers une du texte). Sans oublier d’esquisser le collage chers également à Roland petite forme spectaculaire, Christian une définition et d’éclairer ses ori- Shön) et les surréalistes «pour dire Carrignon posant avec justesse et gines en faisant référence aux notions que le théâtre d’objets est enfant de humour toute la complexité du savoir d’outil, de technique, de transfor- la société de consommation». On faire de l’artiste-metteur en scène et mation de la matière d’une part, et s’interrogea sur l’apport des outils comédien -et toutes les potentialités aux figures de Dédale et de Narcisse numériques dans la représentation du de ce langage inventif. De fait, cette d’autre part. Avec un allant commu- monde (quid de la réalité et de la introduction donna corps et âme aux nicatif, Stéphanie Lefort réussit la virtualité ?), sur l’écriture et le texte, débats mieux qu’un flux de paroles… gageure d’évoquer 4000 ans d’une «une autre matière, élastique, qui se Même démonstration efficace de histoire foisonnante, «un véritable forme, se déforme comme un objet à Jacques Templeraud, fondateur du chaos» dit-elle, avant de conclure : part entière»… Théâtre Manarf, qui préféra parler de «la marionnette est un objet imagi- Mais c’est en retrouvant la réalité de cours pratique plutôt que de conférence- naire nécessaire à notre survie». la représentation en compagnie du spectacle à propos de son intervention En revanche, en l’absence de Chantal Théâtre de Cuisine, des 4 Vents et Le mouvement communicatif. Seul Guinebault-Szlamowicz, docteur en de Pseudonymo que les objets ina- face au tableau noir, les poches bour- arts du spectacle, le silence qui suivit nimés reprirent véritablement sens ! rées d’élastiques et de bouts de papier, la lecture de sa communication sur le MARIE GODFRIN-GUIDICELLI il donna une formidable leçon de Signe théâtral, procédés rhétoriques, théâtre d’objets plus particulièrement… théâtre avec un minimum d’effets. notion d’interprète-plasticien au théâtre La rencontre se focalisa alors sur les Quant aux interventions plus théori- d’objets montra toute la difficulté des nouvelles technologies et les nou- Rencontres organisées ques, celle de Stéphanie Lefort, intervenants à rebondir sur la symbo- velles écritures en présence de Roland par le Conseil général du Var auteur de Marionnettes : le corps à l’ou- lique des signes et l’amphibologie du Shön, Christian Carrignon, Catherine du 24 novembre au 3 décembre

LE GYMNASE | LA MINOTERIE THÉÂTRE 07 Vos folies sont les miennes Rarement trois heures de théâtre se sentir, comprendre la profonde sont écoulées si rapidement. Pourtant humanité de ces êtres relégués au- le texte est grave, terrible, l’univers delà des marges. Le poids social n’est lourd et oppressant. Lars Nören nous jamais pour rien dans leur plonge sans intermédiaire dans décompensation, ils vivent dans un l’univers de la maladie mentale, au monde anormal et ressemblent à ce cœur d’un asile psychiatrique, dans les que nous pourrions être, à quelques salles communes des patients : sans virgules d’existence près. Lorsqu’à la personnel soignant, sans extérieur, un fin les deux plus atteints sombrent, huis clos qui pourrait être cauche- ceux qui restent et semblent curables mardesque… Il n’en est rien. D’abord sortent Kliniken de la tragédie : l’espoir parce que quelques chansons enton- est là, dans leur chanson commune, nées en chœur font office d’appels dans leur manière de souffrir d’air bienvenus, drôles et senti- ensemble, serrés, de la mort des plus mentaux. Ensuite parce que le texte malheureux d’entre eux. est construit en ménageant une AGNÈS FRESCHEL progression remarquable : les histoires © Pascal Victor de chacun circulent, se développent, Kliniken a été joué au Gymnase faisant émerger du chœur des 14 du 2 au 6 déc. rapproche le metteur en scène et son chien imaginaire, l’épouse s’enfuit personnages des révélations indivi- l’auteur. Le jour se lève, Léopold est le le lendemain des noces, les duelles, moments paroxystiques qui se À venir au Gymnase premier texte à multiples personnages personnages ne savent se nommer, se produisent généralement sans vio- Le premier spectacle de l’année 2009 de Valletti qui, jusqu’en 1988, se parler, se comprendre. Et c’est d’un lence, mais pas sans douleur. La mise promet d’être passionnant. Quand consacrait à des monologues dont lui drôle ! Un texte majeur de Valletti, sans en scène de Jean-Louis Martinelli Michel Didym met en scène Serge seul semble posséder la recette (un doute alors au sommet de son art. est d’une fluidité remarquable, et les Valletti les répliques fusent… comme savant équilibre de mensonges, de comédiens circulent dans les espaces dans Poeub, créé en 2005, ou mieux mots pour rien, de fantasmes et de subtilement cloisonnés comme des encore dans le magnifique solo confessions). Mais cette pièce à neuf danseurs dans un décor, ou des accompagné de Christiane Cohendy personnages, aux répliques courtes, Le Jour se lève, Léopold fourmis sur leur terrain de prospection. Et puis quand le jour s’est levé je me presque sans tirade, met justement en Du 16 au 24 janvier Mais l’intérêt de Kliniken est ailleurs : suis endormie. C’est encore une scène l’échec et les faux-semblants 0820 000 422 les comédiens, passionnants, font voir, histoire d’aube (bien terne) qui des relations humaines : l’un parle à www.lestheatres.net Des larmes au rire La baignoire déborde les mots, lorsqu’ils sont forts et justes, Chanot : il est fort possible que seuls Jésus de Marseille de Serge Valletti, À partir du roman de Marie Darrieus- suffisent à recréer le réel, et même à les Marseillais s’y retrouvent, dans Christian Mazzuchini et la chienne secq, Naissance des fantômes, la s’y noyer. cette géographie. Mais jusque chez les Pile Poil, qui mérite un Oscar pour sa Compagnie LESGENSD’ENFACE a chtis on en rigole… fine interprétation… Jusqu’au 20 déc. proposé à la Minoterie, du 27 au 29 La Minoterie a ri SYLVIA GOURION nov, un monologue mis en scène par En ce mois de décembre, il est bon de Cécile Quaranta, et en images de revoir les principales étapes de la vie Naissance des fantômes © Sandra Ecochard Stéphane Vuillet. Dans ce décor du Christ… à la sauce kakou. C’est un minimaliste, une femme déroule le flux drôle d’Evangile, où les pizzas sont À venir à la Minoterie À nos morts, une pièce très belle et de ses pensées ; son mari est parti. miraculeuses, où le démon roule en très forte de la Cie Mémoires vives, Elle le répète suffisamment pour qu’on moto, où une station service remplace créée dans une grande émotion lors de le comprenne ! Cela pourrait donner l’étable. Un Xésus incrédule narre ses Zone Danse Hip Hop à Miramas et lieu à une autopsie du couple. Mais on mésaventures dans une langue pagno- à Istres (voir page 24). Pour tous ceux nous montre un être envahi par des lesque mâtinée par un passage dans qui aiment la danse, le théâtre et fantasmes auxquels le mari faisait les «quartiers nord». Quelques lour- l’histoire, les 9 et 10 janv. rempart. Sitôt parti, la folie en profite deurs assumées ne parviennent pas à Une Carte blanche à la Cie Itiner- pour coloniser l’esprit de sa femme : plomber la verve et la bonne humeur rances de Christine Fricker, pour éviscération, déchirement de l’intérieur, de l’ensemble ; Xésus se démène que la danse rencontre la musique et comme toujours chez Darrieussecq… comme un beau diable pour nous faire joue avec les mots, à travers 10 La violence des paroles ne suffisant rire et il y parvient. C’est un morceau interprètes musiciens, danseurs et pas, on a recourt à un malheureux de bravoure que les Béatitudes revues comédiens. Du 22 au 24 janv poulpe, malmené pour l’occasion. Pour et corrigées par un pizzaïolo. Son appuyer encore le propos, de temps à monologue loufoque entraîne les autre, un film est projeté sur le mur ; spectateurs dans des pérégrinations La Minoterie images d’une séparation. Une mise en qui le mènent de l’Estaque aux Goudes 04 91 90 07 94 scène à la fois décalée et trop explicite: en passant par les marécages du Parc www.minoterie.org 08 THÉÂTRE LA CRIÉE | LE MASSALIA D’une atteinte imprévue Au Gymnase la Criée vagabonde a programmé la plus belle perle irrégulière de notre littérature théâtrale… 3 femmes Le hall de la Criée a accueilli du 4 au 6 déc un Cabaret portugais en deux parties : si le fado qui concluait était un peu trop classique et sage, la lecture proposée par Ninon Brétécher, par la voix posée d’Emmanuelle Rozes, a Le Cid © Bellamy permis d’entendre une très belle Corneille se définissait comme un chaque tirade, chaque stichomythie du personnages, ils sortent, comme des œuvre poétique : celle de Sophia de «poète dramatique», mettant l’accent Cid se déguste en retenant son souffle. coucous, par trois portes de bois Melio Breyner, députée portugaise sur l’importance des mots dans son Et en découvrant l’humour aussi qui rappelant une horloge mécanique. Ils après la Révolution des oeillets… On théâtre, où l’action importe moins que pointe dans les répliques des frôlent le ridicule, sans y sombrer, et en entendit tour à tour l’amour de la terre, le lyrisme… Toute l’intelligence de la Suivantes, agacées par les obsessions se relevant pour atteindre au sublime. des couleurs et de la mer, la grande mise en scène d’Alain Ollivier tient vindicatives de leurs Maîtresses… Rodrigue est un ange blond, innocent sensualité des vers, et le surgissement dans cette importance accordée à la La réussite de l’entreprise tient à un puis martial, Chimène la douleur soudain de la douleur comme une force du verbe. On se suspend aux parti pris délicat, volontairement anti- même, et les mains de l’Infante, révélation dans l’engourdissement des lèvres des acteurs qui restituent les naturel : les vers sont chantés (sans graciles, fascinent. Un très beau jours… L’envie de lire son œuvre, après antithèses, la frénésie baroque, les emphase), certaines caractéristiques moment de théâtre suspendu… ça, passait dans le public comme un finales féminines, les anaphores phonétiques de la langue du XVIIe sont (voir également l’avis des Zibulons, souffle ému enflées, la musique et les excès d’une restituées, et les ports de bras, les page 77) langue décidément superbe… et on se ports de têtes altières dessinent des AGNÈS FRESCHEL À venir à la Criée souvient, étonné, que chaque vers, signes dans l’air. Quant aux Un autre cabaret, toujours littéraire et musical : Violaine et Hélène Schwartz lisent et chantent, s’ac- Sortez vos ados compagnant au piano, des lettres anciennes et récentes, des Après les réjouissances de Noël fin février, à la Seita. Et commence tes,avecécranetthéâtred’ombres:cela échanges épistolaires. marquées par une version de Pierre et par la reprise d’Une île (du 13 au 31 s’appelle Mister H, entendez le double Bien à vous, du 9 au 11janvier, hall le Loup en figurines animées, avec janv), sa très belle création de la sai- de Mister J, celui qui le créa un jour, à de la Criée grand orchestre (voir Zib 12), le Mas- son dernière, que toute l’équipe de Londres,entestantsurlui-mêmeune for- On retrouve la pianiste et la comé- salia consacre son mois de janvier à Zibeline vous recommande avec mule désinhibitrice… (du 13au 16janv). dienne au Merlan, qui de vagabond desspectaclesvisiblesenfamille, quand chaleur (voir l’article sur notre site Pour les plus grands encore, les pres- devient lieu d’ancrage pour la on a de grands enfants. L’Entreprise, www.journalzibeline.fr). que adultes, un spectacle de la Cie Du Criée. Ce spectacle est porté par Cie de François Cervantes, s’installe Dans le même temps l’Anima Théâtre Zieu dans les bleus : Ursule (du 20 au la metteur en scène qui avait, il y a pour plusieurs spectacles jusqu’en proposera un spectacle de marionnet- 31 janv) est la deuxième partie de la deux ans, proposé un fascinant trilogie des Suppliantes, que la Cie Thomas Bernhardt, L’Ignorant et Une île © Christophe Raynaud de Lage consacre aux grandes figures tragi- le Fou. Célie Pauthe met en scène ques féminines. Il s’agit cette fois d’une cette fois une pièce de Bergman, pièce inédite d’Howard Barker qui S’agite et se pavane, qui ressemble met en scène des jeunes religieuses, par bien des traits au texte de vierges, confrontées au désir d’un Bernhardt : il y est question de folie prince, et à leur propre relation à la et de fantômes, mais aussi de chair. Un texte traversé d’absolues création artistique, de puretés, d’absolues violences, et représentations, de voix cachées d’impossibles renoncements. Comme et d’histrions… l’adolescence? A.F. S’agite et se pavane, du 16 au 24 janvier, Le Merlan Théâtre Massalia La Criée 04 95 04 95 70 04 91 54 70 54 http://massalia.lafriche.org www.theatre-lacriee.com LENCHE | MERLAN | MIRAMAS | PORT-DE-BOUC THÉÂTRE 09 Sous la peau

Le Merlan a choisi de rapprocher l’art Beaucoup d’exposés, d’hypothèses, de la science autour du thème de la d’expérimentations passionnantes et transparence du corps. Tomodensito- de grande qualité : au cinéma et en métrie, cubitus, organe, corps, malaise, partenariat avec le FIDMARSEILLE, des anatomie, geste, coronaire, scanner, courts et des longs métrages ont été éthique, image, squelette, verrou, projetés comme ce film remarquable humain, magnétique, thorax, saignée... de François Deligny : Le moindre Le corps attire, le corps intrigue. Et ce geste où l’introspection se traduit par n’est donc pas un hasard si cette thé- l’observation détaillée du comporte- matique est développée au moment où ment d’un jeune homme de 16 ans le Parc Chanot reçoit l’exposition Our qualifié d’irrécupérable pour la société. Je tremble © Elisabeth Carecchio Body (voir pages 71 et 77). La question de l’intérieur du corps est, semble t-il, Spectacles ? dans laquelle le spectateur déambule les artistes auraient besoin de quitter au centre de nos préoccupations. Il est Pour Marion Baë et sa partenaire, il tout en regardant et écoutant des Narcisse une fois pour toute ? vrai qu’il n’y a pas si longtemps, il était est possible de reprendre contact avec formes «radiographiques» d’un film fan- CLARISSE GUICHARD impossible de voir l’intérieur d’un corps son squelette par le contact avec tastique sur l’exploration des organes vivant. Aujourd’hui, avec les nouvelles l’autre et l’espace environnant. Devant d’un corps humains. À venir au Merlan technologiques, le corps est scruté, un public amusé et conquis, elle enta- La deuxième soirée a finalement été L’événement sans doute de cette fin exploré jusqu’au fond des entrailles. me une conférence dansée, le Petit une succession de projections-confé- d’année. Joël Pommerat a un talent Mais cette exploration n’est plus l’apa- traité d’artnatomie, où chaque os en rences : un cinéaste parle d’une jeune fou, tous les théâtres se l’arrachent. nage du «corps» médical, elle suscite jeu est nommé, touché, senti. femme affublée d’yeux avec des Pour deux soirs seulement Je tremble 1 l’intérêt des artistes, des historiens, Deux autres soirées spectacles étaient rayons X, et une conférence explique et 2 passent par Marseille, après la des anthropologues, des philosophes prévues, qui se sont transformées en le travail d’un artiste, Xavier Lucchesi, création du second volet au Festival et pose des questions d’éthique et spectacle-conférence.PourCervantès qui scrute notamment au scanner les d’Avignon. Le premier épisode avait d’esthétique. Comment perçoit-on le et la cie l’entreprise le corps théâtral œuvres de grands maîtres afin d’y déjà suscité une émotion folle l’an corps aujourd’hui ? Comment l’imagerie interroge sa capacité à devenir trans- découvrir, peut-être, le secret de leur dernier, au Merlan, qui coproduit le médicale façonne notre représentation parent au profit d’un personnage. Dans génie. En violation de l’œuvre ? spectacle (voir Zib 7). À découvrir du corps ? Comment peut s’opérer la un jeu autour de la mort, de la maladie, Les propositions spectaculaires, dans absolument, si vous arrivez à vous captation artistique d’une image de l’âge, les mécanismes de séduction l’ensemble peu abouties, se sont trouver des places. Les 19 et 20 déc médicale? Le Merlan a proposé un sont démontés pour chacun de ses révélées moins intéressantes que les certain nombre de cartes blanches acteurs soit «seul ensemble». Erikm, discours scientifiques, ou les films. 04 91 1119 20 afin chacun expose ses réflexions sur invite à voyager au centre de l’humain Question de moyens mis en œuvre www.merlan.org ce thème. parlaprojectiond’unfilm,uneinstallation sans doute, mais peut être aussi que Au fil des jours On est au théâtre, même si les décors sans y prendre garde, comme si la passer plus de temps encore avec ces et les costumes (superbes) semblent scène s’éclairait peu à peu de petites belles personnes. sortir d’une scène de cinéma. C’est là touches de lumières, de respirations D.M. À venir au Lenche l’une des forces - mais pas la seule ! - moins pesantes. Les années passent, Le Théâtre de Cuisine prend ses de la pièce de Jean-Claude Grum- entrecoupées d’un air jazzy joué par L’Atelier a été joué du 26 nov au 6 quartiers au Panier, pour le plaisir de berg, L’Atelier, mise en scène et jouée les quatre musiciens du Quartet de déc au théâtre de Lenche et le 9 déc vos enfants par la cie Eclats de Scène. D’un Luxe, et l’on se dit que l’on aurait aimé au théâtre de la Colonne à Miramas Ce ventre-là est un très joli spectacle grand réalisme, elle nous plonge dans © F. Pavanello sur ce que fantasment les élèves lors- cet après guerre immédiat, de 1945 à que leur maîtresse est enceinte… du 1952, dans l’atelier de confection de 13 au 17janv. Monsieur Léon où vont se croiser juifs Ka-O est un spectacle pour tout petits, et non juifs, les jeunes oublieux et les de Katy deville, qui raconte comment, plus âgés qui tentent de vivre malgré au début du monde, les formes ont tout, les «revenus de» et ceux qu’on organisé l’espace… du 20 au 24 janv. attend. Mais point de pathos dans L’anthologie du théâtre d’objets pro- l’évocation saisissante de cette épo- pose un historique amusé des divers que terrible ; les comédiens sont d’une techniques de manipulation du 27 au justesse remarquable, évitent la carica- 31 janv. Également au Sémaphore ture et jouent dans un bel ensemble (Port-de-Bouc) le 23 janv. 04 42 06 les scènes collectives où tout se dit ou 39 09. se suggère. Grâce à une scénographie inventive, on passe des années som- Théâtre de Lenche bres et grises à un avenir plus coloré 04 91 91 52 22 10 THÉÂTRE ENTRETIEN AVEC C.-E. PETIT | GYPTIS | BERNARDINES Rupture générationnelle Les plis du rêve Il sont presque tous là, Sacha, Nina, Olga, Smirnov et Platonov à porter doucement les offrandes : plateaux d’huîtres, champagne (Tchékhov trouva dans ses bulles sa dernière réplique et son ultime respiration), bouquets d’âme russe et de fleurs fraîches qu’on abandonne sur les chaises. Création collective de sept jeunes comédiens à partir de l’œuvre de Tchékhov et première mise en scène d’Aurélie Leroux, Tâtez-là si j’ai le cœur qui bat trouve une palpite douce et propice aux réminiscences sourde. Pas le rêve mais les plis du rêve, pas la citation mais l’hommage. Il faut s’y abandonner sans chercher les références, avoir confiance : chaque silence, chaque geste en contient un autre ou son contraire. Au début (mais on sait bien que tout a commencé depuis longtemps) un comédien aux yeux noirs souffle une bougie et la rallume dans le même mouvement ténu et vacillant. La scène est lieu de passages, de traversées; les portes s’ouvrent Dallas © Philippe Malone «bonjour» pour se refermer «bonsoir» ; la profondeur Matière mouvante qui s’est structurée une génération autocréée, qui a coupé à un moment est suggérée par l’au-delà de la moustiquaire ou du au fil des rencontres avec le public, au donné avec son passé. Donc, forcément, la question voile de mariée, l’autre table en miroir dressée à de la transmission devient compliquée. Quel héritage l’identique, là où le bruit des cuillères sur les assiettes cours de lectures, d’ateliers, au sortir de transmettre à notre génération ? Et nous, de notre en faïence donne la cadence; rien de métaphysique: résidences de création, Notre Dallas se côté, comment nous mettre en rupture, et en rupture on y accède en ouvrant l’armoire ! La musique vient dévoile dans son intégralité au théâtre de quoi ? de loin, avec la langue russe parfois et tout cela Gyptis du 20 au 24 janvier. Entretien Ça passe donc par cette interrogation artistique ? fonctionne en un rituel un peu effacé, comme une avec Charles-Éric Petit, auteur et C’est là que notre pari n’est pas toujours pris à sa partition qu’on aurait oubliée sous la neige... Les metteur en scène juste valeur. C’est glissant parce que Dallas c’est jeunes comédiens ont tous des talents subtils : hégémonique, ça a une résonance intime, sociolo- Roxane Clayet-Merle rosit très bien des joues, Zibeline : Qu’allons-nous découvrir en janvier au gique, historique : chacun y vient avec ses fantasmes. Marion Duquenne sait friper son nez et retenir sa Gyptis ? La perche pour moi est dans cet endroit de dialogue, larme à la paupière... Un duvet blanc, témoin du Charles-Éric Petit : Les deux premiers actes dans ce que ça raconte, et tant mieux si c’est du passage d’un ange ou d’une mouette égarée resserrés, et un acte III réécrit, qui déplace le propos théâtre. Si ce projet dure 5 ans c’est aussi parce qu’il s’obstine à voleter au gré des mots. Poursuivons le qui initialement caricaturait les personnages. lui faut 5 ans pour trouver son véritable impact. Et il rêve ! L’acte III se terminait alors sur le modèle d’Aga- est déjà beaucoup plus clair ! MARIE-JO DHÔ memnon d’Eschyle : Sue Ellen revenait, pleine de Suite aux réactions ou suite à l’écriture collective ? vengeance, avec Clive Barnes et annonçait la perte Les deux. L’écriture collective signifie que les acteurs Tâtez-là si j’ai le cœur qui bat a été créé et la fin de J.R. Pour des questions pratiques on remet s’empare d’une proposition. Ce qui est génial en ce aux Bernardines du 4 au 13 déc tout en question ! Ce qui est présent dans l’acte II, à moment où je réécris tout, c’est que j’ai encore en savoir la thématique de l’héritage, se renforce dans tête la musique des acteurs, et je peux rentrer en À venir aux Bernardines l’acte III. On tire un peu cette thématique de l’héri- dialogue avec eux par ce truchement-là. Avec le Encore une création ! Angela Konrad persiste dans tage, en ouvrant aussi au tragique et au lyrique. Et en temps qui se passe et les choses qui se déposent. son exploration shakespearienne et propose son faisant surtout se répondre, parce que c’est l’enjeu, C’est en ce sens-là qu’elle est collective. Je fais avec Macbeth du 13au 25 janv. Avec Frédéric Poinceau Dallas d’hier et sa perception aujourd’hui. eux, avec ce qu’ils sont, avec leurs propositions. en usurpateur poursuivi par ses spectres, quelques C’est un projet qui pourrait ne jamais s’arrêter ? Autant de représentations, donc, autant d’ajuste- sorcières, sa Lady, et sa faute. Je pense qu’il risque de nous tenir encore un petit ments possibles et de questions qui se posent… moment ! Ça dépend de l’accueil qui nous sera fait au En ce moment où tout est si rigide c’est ça qui est Théâtre des Bernardines Gyptis, et des partenaires financiers. Mais le projet passionnant. Cet objet est endogonique, il est vivant, 04 91 24 30 40 est passionnant parce que le public a une expérience tout bêtement. C’est l’intérêt de faire un texte vivant. www.theatre-bernardines.org intime de la série. Dallas est pour nous un prétexte PROPOS RECUEILLIS PAR DOMINIQUE MARÇON pour rencontrer les gens et leur donner la parole. Tatez-la si j'ai le coeur qui bat © Renaud Perrin Quel est le sentiment collectif de cette parole ? Il y a un tabou générationnel. Je suis parti d’une volonté de dialogue : je voulais me mettre en regard, moi qui ai 30 ans, face à cette série qui a 30 ans, et interroger les pères. Sans inquisition, sans vouloir Notre Dallas culpabiliser cette génération. Mais le tabou est celui- Mes Charles-Éric Petit ci:ilportel’échecpolitique.Larupture générationnelle du 20 au 24 jan est très compliquée, la possibilité de transmettre Théâtre Gyptis aussi. La phrase clé de la pièce pour moi c’est 04 91 1100 91 «Générer ou autocréer, voilà notre question». On est www.theatregyptis.com DAKI LING | MONTÉVIDÉO | TOURSKY THÉÂTRE 11 Danse avec Mémère ! Sérénité C’est un bien joli spectacle que la cie Latypique du poisson nous a offert, qui ressemble à un voyage au pays des Mémère a été joué souvenirs des jours anciens et à la tendresse possible au Daki Ling du présent, qui charme et qui émeut, en 35 minutes! du 27 au 29 nov rouge Présenté au Festival de Marionnettes de Sisteron, le voilà à Marseille, au Daki Ling, lieu accueillant et À venir au Daki Ling atypique. Marine Dubois et Bernard Roure ont des Le Club des cinq (clown), formations qui se complètent, scénographie, voix et les 9 et 10 jan à 20h bruitages, marionnettes, et allient leurs compétences Deux matchs d’improvisation du MITHE: le 12 janvier avec subtilité. Le spectacle se déroule dans une à 20h vieille caravane pliante qui s’ouvre et se monte avec (Corinthiens/Mesopotamiens) le secours d’un spectateur réquisitionné au premier et le 17janvier à 20h (M.I.T.H.E./Bastia) rang. On découvre Mémère et ses petites habitudes Un Concert insolite et magique dans sa robe à grosses fleurs jaunes et orange, les avec Guillaume Vallée, mêmes que celles du papier peint. Et Mémère bouge, les 15 et 16 janvier à 20h animée par Marine qui la porte sur son ventre et partage son bras : elle ne font qu’un seul corps et Daki Ling leurs déplacements sont une chorégraphie 04 9133 45 14 chaloupée. Mémère parle seule pour combler sa www.dakiling.com solitude : c’est Bernard qui parle, chantonne et fait tous les bruits, installé au fond de la caravane avec un Luxe n°1 © Agnès Mellon micro. Mémère se prépare un gâteau pour fêter son Mémère © Latypique anniversaire, s’adresse à son mari dans son cadre C’est une PEF (petite entreprise familiale) qui bat de sur le mur, chantonne, se souvient d’un voyage en l’aile ; rien d’étonnant par les temps qui courent : amoureux et écoute la mer dans un coquillage. C’est maman assortit ses godemichés à la cravate de son simple, c’est plein d’humour et de tendresse. mari car papa (c’est le même) ne peut pas... fiston Une 2e partie proposait un théâtre d’objets réjouis- crayonne et dérange... L’écran déverse son lot sant. Des objets sur une table : petits robots d’aphorismes couturiers : Yves St Laurent ou Jean- mécaniques, canard et caniche en plastique, vieux Paul Gaultier disent des choses très mignonnes sur la tourne-disques... Le tout filmé en direct et projeté sur beauté et l’amour ; le luxe, chez ces gens-là, consiste un écran en cadrage serré. Animations d’objets à vivre à petits pas sur un étroit praticable de défilé dérisoires sur fond de Vol du bourdon ou chanson de de mode sous le regard des spectateurs latéraux qui Bourvil, La tactique du gendarme ! Beaucoup de ne perdent pas un clignement d’oeil ni un rictus justesse et d’humour ! égaré. Cette proximité, voire interaction, avec le CHRIS BOURGUE public qui ne peut risquer le moindre raclement de gorge sans être toisé par l’acteur en tension, est la Réussite n°1 de ce court premier volet (triptyque en À la porte de (chez) soi vue) encore bien fragile dans sa réalisation. Le texte écrit et mis en scène par Geoffrey Coppini est Prenez un géant du théâtre, un grand texte, un génial guère innocent que son personnage écrive sur le faible, hélas, dans sa distillation des aléas du couple, adaptateur, et vous obtenez un moment d’exception. Phédon : Socrate y meurt et nous interroge sur malgré le malicieux recours à la précision lexicale des Michel Aumont est ici seul sur scène. Professeur l’essence de l’âme… Texte superbe, intelligent, subtil, économistes ; heureusement les brèves citations des de philosophie bougon et passionné de Platon, il vient élégant, écrit, servi par un acteur époustouflant, que Liaisons Dangereuses de Laclos viennent à propos d’interrompre la rédaction d’un article sur Le Phédon nous suivons dans tous ses délires, ses errances, ses nous rappeler que nous sommes dans le simulacre et et se retrouve, pour avoir raccompagné un étudiant, emportements, ses remarques acides ou cocasses… l’excès ; la gestuelle émotionnelle à la Greuze à la porte de son appartement. Situation banale, avec bonheur ! (postures figées de grandiloquence et travail des propre à la comédie, mais s’ensuit une marche dans MARYVONNE COLOMBANI corps exposés à la lumière), les couleurs ravageuses qui s’avère révélatrice des limites, explorant les des robes de la blonde et blanche Clémence frontières intimes, qui sont autant de portes À venir au Toursky Schreiber témoignent en effet d’une dépense auxquelles nous nous heurtons. tre à la porte ne Le reprise de la Révolte des fous (voir Zib 8) le 19déc théorique et sensible qui pourrait justifier le titre mais recouvre par seulement la réalité physique de se étant complète, on peut vous conseiller des parvient faiblement à élever le sens ; «du luxe et de retrouver «enfermé dehors». L’apparence, les mots, Chaussettes assez décevantes, où le talent hors l’impuissance» donc, pour paraphraser Jean-Luc les habitudes, l’argent, la folie, tout est susceptible norme de Galabru n’efface pas les lourdeurs du Lagarce. Et lorsque la main inexperte de l’enfant de nous mettre à la porte, hors du monde, la dernière texte (du 8 au 10janv). Quant à Voltaire’s Folies Jean- caresse le congre flapi déniché dans l’aquarium en exclusion étant la mort, leitmotiv lancinant et François Prévand l’a écrite avec des extraits de un geste somptueusement odorant, tout le monde obsessionnel. La douleur, le malheur individuel ne pièces, de contes de lettres et de pamphlets du regarde le poisson rouge qui tourne en rond. renvoient qu’à nous-mêmes, nous excluent. Le philosophe… C’est dire si l’ironie doit y régner ! (les 16 MARIE-JO DHÔ discours du philosophe a beau être rigoureux, il ne et 17janv). peut endiguer cette course intime. «Plus on pense de façon objective, moins on existe» écrivait Kierke- Théâtre Toursky Luxe n° 1 / Investir gaard. L’auteur du roman dont est adapté la pièce, 0820 300 033 écrit et mis en scène par Geoffrey Coppini Vincent Delecroix, en est le spécialiste, et il n’est www.toursky.org a été donné à Montévidéo le 4 et 5 déc 12 THÉÂTRE ARLES | ROUSSET | MARTIGUES | AIX Les mots du cœur Réduction argentine Loin de dénaturer les accents tragiques de la pièce de Tchekhov, l’adaptation brillante d’Oncle Vania par le metteur en scène argentin Daniel Veronese l’enrichit d’un univers nouveau Il ne reste plus grand-chose des con-

© Dunn Meas ventions proprettes ni de l’espace des © Elena Consuegra Jean Rochefort ne veut pas écrire ses jouer le faire-valoir dans un numéro salons russes. Autour d’une petite mémoires, il veut les jouer. Égrener sur hilarant qui démontre que Rochefort table, sur un espace scénique plus que Espia a una mujer que se mata un plateau ses rencontres marquantes, imite à merveille la taupe qui découvre réduit, les acteurs vont et viennent, a été joué au théâtre d’Arles avec les textes, les auteurs, les comé- le printemps, la femelle du gibbon ou s’assoient les uns sur les autres. Ils le 9 déc et au Théâtre des Ateliers diens… Un autoportrait qui le fait se le caméléon. Décousu peut-être, mais rient, parlent fort, s’écoutent peu, s’en- du 20 au 22 nov dans le cadre de dévoiler un peu, en toute simplicité, délicieux. Â l’image de ce grand lacent, pleurent à s’en rouler par terre, la programmation des ATP d’Aix avec humour et émotion, en mêlant les monsieur. se saoulent. À la vodka. genres, et les époques. Passant, sans D.M. Remaniés par des langues latines, un en avoir l’air,de Bobby Lapointe à Henry brin réécrits, les mots de Tchekhov Miller, de Jacques Prévert à Primo Levi, sonnent étonnamment juste. Au fond, À venir aux ATP de Charles Trenet à Fernandel ou Jean le metteur en scène opère peu de Adel Hakim met en scène Mesure Yanne, textes joués, dits ou chantés, Entre autres a été joué modificationstextuelles:quelquesques- pour mesure, la pièce de Shakes- Jean Rochefort nous présente son théâ- le 6 décembre aux Salins tionnements sur le théâtre, balayés par peare qui voit la vertu pudibonde tre personnel, un univers où l’humour (Martigues) et jusqu’au 20 déc un Serebriakov propulsé célèbre criti- d’un Angelo porté au pouvoir se le dispute à la fragilité et à la mélan- au Jeu de Paume (Aix). que, un langage un peu plus familier. Le transformer en puritanisme ré- colie. Les anecdotes font mouche, 0820 000 422 profond désespoir de chaque person- pressif, puis en vice avéré. Est-ce convoquent Philippe Noiret, Michel www.lestheatres.net nage reste intact, plus sensible peut l’exercice du pouvoir, ou la Serrault ou Michel Audiard, le conteur être grâce au resserrement, et porté méconnaissance de lui-même, qui ne s’arrêtant que le temps d’une phrase par une troupe d’acteurs irréprochable transforme ainsi l’Angelo? Un spec- musicale, ou d’un biscuit-confiture vite qui adopte un rythme parfait. La trans- tacle programmé dans la Salle avalé. position, dont Daniel Veronese est Emilien Ventre (Rousset) le 20 janv L’accordéoniste Lionel Suarez l’accom- familier, puisqu’il s’était attaché aupa- pagne et souligne les textes, lance un ravant aux Trois Sœurs, s’avère plus 04 42 26 83 98 air qui le fait danser ou déclenche un que réussie: éclairante ! www.atpaix.com de ses sourires lumineux, et va jusqu’à SUSAN BEL

80 jours, c’est mathématique ! Petit théâtre dans le théâtre, les tre mis en avant sert aussi d’élément nomiser les décors (sic), et soulignent d’autres rôles, et enfin, Sébastien rideaux rouges de guignol resserrant dramaturgique. Ainsi, les acteurs sans par leurs fausses rencontres et recon- Azzopardi, inspecteur Fix à la Gabin l’espace, sur une mini scène qui se moyens jouent en accéléré pour éco- naissances, les nombreux rôles qu’ils ou policier d’une mauvaise série alle- transforme aussi bien en comparti- endossent. Distanciation, ironie, jeu mande, metteur en scène et coauteur ment de chemin de fer qu’en salle de Tour du monde © Valerie Lebeau avec l’actualité, c’est un tel festival que de cette pièce avec Sacha Danino. 5 whist du «Reform Club», pour gentle- les acteurs ont parfois du mal à garder acteurs, 80 jours, 115200 minutes… men flegmatiques et argentés… Le leur sérieux ! Tous changent de peau autant d’occasions de rire ! sujet, tout le monde le connaît. Mais le avec brio, Anaïs Harté, danseuse du MARYVONNE COLOMBANI traitement vaut le détour, humour dé- ventre, anglaise snob et princesse calé, anachronismes moqueurs, jeux indienne, malicieuse Aouda, Stéphane Le Tour du monde en 80 Jours de scène, mimiques désopilantes, traits Roux, un Phileas Fogg guindé, pince a été joué Salle Emilien Ventre exacerbés, parodie de music hall… sans rire à souhait, et anglaise rose (Rousset) le 6 déc tous les ingrédients, jusqu’à la musique bonbon…, Eric Gueho, Passepartout de Sylvain Meyniac, contrepoint iro- sans compter ses surnoms, inénar- nique et farceur, sont réunis pour une rable dompteur d’éléphant, Nicolas désopilante réussite. L’artifice du théâ- Tarrin, Consul, et une multitude AUBAGNE | AIX | BERRE L’ÉTANG THÉÂTRE 13 Le Maquis en tournée Le théâtre de Maquis écume la région avec ses deux dernières création : la Cie des spectres et Farralone Florence Hautier joue le roman de Lydie Salvayre, La Compagnie des spectres, en habitant la scène de sa présence. De ses présences plutôt, puisqu’elle campe tout à la fois, dans sa belle robe rouge, avec un naturel sidérant, Rose, sa fille, et l’huissier qui vient les sortir de leur folie, recluses qu’elles sont depuis l’arrestation, en 43, du frère de Rose… Un spectacle qui séduit par sa vitalité, bouleverse à l’évocation de l’Occupation, et analyse des rapports mère-fille qui vont de l’adoration à l’exaspération. Farallone est une pièce comique, et féroce, tirée du roman de Stevenson adapté par Pierre Beziers. Il y est La Compagnie des spectres © Leïla Garfield question d’un voyage de fortune sur le Château de Trets pacifique, de trésor et de champagne, le 20 janv de cargaison et de déréliction. On y 04 42 37 55 00 Ce que parler chante (sur des airs de Martin Le Forum, Berre L’étang Béziers inspiré par… Beethoven) on y le 6 fev ne veut pas rit, on y retrouve des figures de pirates 04 42 10 23 65 et de maquerelles, mais aussi la dire noirceur de Stevenson, qui préfère La Cité du livre, Aix La Cie le Soleil Vert présente au souvent les vices des crapules aux le 13 fev Théâtre Vitez un travail élaboré lors déviances de la justice et de la loi 04 42 38 94 38 d’une résidence au 3bisF. Il y est humaine, ou religieuse… Farralone A.F. question de la parole dans ses fonc- tions phatique et metalinguistique. Les Jeu de Paume, Aix trois acteurs, et la danseuse Barbara La Compagnie des spectres Le 16 janvier Sarreau, y improvisent une parole de MJC Aubagne 04 42 38 94 38 le 9 janv remplissage, tissée de ces mots que l’on prononce non pour signifier des 04 42 18 1717 Le Comœdia, Aubagne concepts ou faire passer des infor- le 5 fév mations, mais pour créer du lien, ou du 04 42 18 19 88 plein. Une mise en scène de Laurent deRichemond,surunschéma textuel, basedesimprovisations,d’Arno Calléja. Atteindre ou attenter A.F. Mon corps est nul En anglais attempt a les deux sens. Attempt to her life, hommes, qui s’empare de ce texte où les voix se Théâtre Vitez (Aix) la pièce de Martin Crimp, est une mosaïque sous présentent comme des témoignages et croisent leur du 13 au 16 janv forme d’énigme qui ne se résout pas, mais s’opacifie invraisemblances, disant ensemble l’impossibilité de 04 42 59 94 37 peu à peu : il s’agit d’atteindre une femme, mais aussi témoigner du réel d’une vie, dans une société où la www.theatre.vitez.fr d’attenter à son existence même en embrouillant les médiatisation du témoignage compte davantage que © X-D.R. fils de sa réalité. Dans une forme d’écriture la réalité des faits rapportés. dramatique très particulière, où les acteurs sont des A.F. instances de paroles plutôt que des personnages,17 Atteintes à sa vie récits forment le portrait hétérogène d’une femme Martin Crimp qui change d’âge, de profession, d’adresse et décline mes Yves Borrini son prénom d’Annie à Aniouchka. Stéphane Gasc, au Theâtre Comœdia, Aubagne Jeu de Paume en 2004, en avait proposé une mise le 16 janv en scène magistrale, façon loft story trash. Au 04 42 18 19 88 Comœdia c’est la Cie d’Yves Borrini, Le Bruit des www.aubagne.com 14 THÉÂTRE MARTIGUES | GRASSE Le Mal qui guette Mefisto for ever est un spectacle marquant. Parce que À venir aux Salins la fluidité de la scénographie, qui superpose avec brio Le Théâtre de cuisine de Christian Carrignon, les gros plans vidéos et la présence réelle des décidément à l’honneur en ce début d’année (voir acteurs, tout en approchant leurs voix de nos oreilles, page 9), propose son spectacle de marionnettes est d’une maîtrise absolue : rarement la vidéo a été inspiré d’Homère : il y est question de fabriquer de si magistralement intégrée, sans ostentation vaine ni l’épique… avec ce qui tombe sous la main ! Et figurez- redondance, à une mise en scène. Les acteurs vous que ça marche, dès 10 ans ! Le 9 janv, La travaillent à l’échelle de notre perception, navigant répétition : une odyssée. aussi entre les textes : celui de la fiction cadre -une Pippo Delbono revient aux Salins avec sa dernière troupe de théâtre aux prises avec la montée, le création Questo buio feroce, un spectacle macabre triomphe puis la défaite des nazis- et les grands textes mais pas morbide, qui évoque et cite les images les dramatiques qu’ils jouent, Shakespeare, Ibsen ou plus noires que l’humanité ait produites. Un défilé Goethe décrivant mieux qu’eux-mêmes leurs états de expressionniste, beau et désespérant, des figures conscience. de la souffrance humaine. Le 13 janv, en italien Car c’est de dilemmes dont il est question, comme surtitré (et peu bavard). Le diptyque de Sonia dans tout grand texte dramatique. Hamlet ou Faust Chiambretto mis en scène par Hubert Colas sera en sont l’objet, ils tranchent, plus ou moins mal, décliné dans les deux salles. En commençant par comme le directeur de ce théâtre qui à force de Mon Képi Blanc, hallucinant monologue hurlé d’un concessions -par pragmatisme ? lâcheté ? simple légionnaire abruti, pour finir dans la petite salle du erreur de jugement ?- finit par servir le régime abject bout de la nuit avec Chto, interdit au moins de 15ans qu’il voulait combattre de l’intérieur. Le texte de Tom (les 20 et 21 janv). Lanoye met en garde contre le lent abandon des idéaux, abandon qui guette les artistes en ces temps Les Salins, Scène Nationale de Martigues de restrictions qui poussent à la concession politique. 04 42 49 02 00 Le spectacle était difficile : 3 heures de vrai texte, www.theatre-des-salins.fr parfois un peu verbeux, sans trop d’action, en Mephisto for ever © Koen Broos hollandais, dans la grande salle des Salins où les Mefisto for ever a été joué surtitres, perdus dans les cintres, obligeaient les non aux Salins les 25 et 26 nov néerlandophones (nombreux !) à une gymnastique Talentueux visuelle entre les acteurs et le texte digne des spectateurs de tennis. Mais le jeu en valait la C’est avec beaucoup de douceur qu’Edouard Baer chandelle : quelque chose de vital, formellement, pénètre dans l’univers de Patrick Modiano. Grave, fondamentalement, était dit. élégant, il va peu à peu s’effacer devant ce texte sombre, implacable, bouleversant dans lequel l’auteur AGNÈS FRESCHEL analyse les vingt premières années de sa vie. Les souvenirs s’enchaînent, douloureux, la voix d’Edouard Les femmes et la douleur Baer se fait distante, détachée, mais toujours tendre, un sourcil relevé soulignant l’absurdité de certaines Outre Anne Sylvestre, le théâtre de Grasse accueille quelques femmes paroles. Dans cette lecture qui n’en est pas une, - sur son vaste plateau… Baer se saisissant de temps en temps d’un texte, Dominique Blanc y lira le 30 janv la première étape demandant, grotesques, de rejouer leur trauma- d’une lettre, comme d’un accessoire qui soulignerait autobiographiquedeDuras,lejournalqu’elletintaprès tisme… Un spectacle drôle et féroce qui s’attaque le propos-, l’intimité qui s’installe est captivante. la guerre tandis qu’elle attendait, dans La Douleur, le aux manichéismes et aux combattants de Dieu (égale- Paradoxe de cette voix posée, balbutiante parfois, retour de son mari (également à Châteauvallon). ment aux Comoni, Pôle jeune public du Revest les comme absente par moment, dont le rythme travaillé Mais avant cela la création d’un spectacle tout public eaux (84), le 13 janv). cisèle les mots. joué par deux comédiennes époustouflantes, qui ont Avant cela, pour commencer l’année (les 7 et 8 janv), Une interprétation humble et profonde de la part d’un travaillé avec Omar Porras et ont acquis une virtuosité Sylvie Testud et Bernard Giraudeau jouent en comédien décidément étonnant. hors du commun : dans Ernest ou comment l’oublier, texte de Max Frisch : Biographie sans Antoinette est D.M. écrit et mis en scène par Ahmed Maddani, Sté- une pièce intéressante sur le déterminisme, mais qui phanie Gagneux et Camille Figuéréo jouent deux ne choisit pas assez franchement le rythme du vaude- Pedigree a été lu le 3 déc aux Salins vieilles femmes qui attendent depuis des années leur ville (voir Zib 13page 9). Tandis que question rythme, amant mythique, cet Ernest qui les a abandonnées Bonaventure Gacon s’y connaît ! Un des acrobates Edouard Baer © Zippo-Starface au crépuscule de leur carrière d’acrobates, en pro- les plus doués de sa génération, trampoliniste vir- mettant de revenir un jour choisir entre les deux l’élue tuose, mais aussi, dans Par le Boudu, clown alcoolique de son cœur… (les 22 et 23 janv). qui tangue et remue sa férocité somme toute géné- L’Agora theatre viendra conter un autre combat : la reuse. Un très beau solo de cirque, «plutôt pour les Cie belge germanophone, dirigée par Marcel Cremer, grands» (les 9 et 10 janv). vient jouer Les Croisés (les 15 et 16 janv), un spec- A.F. tacle créé en 2005 salué par le public, la critique et de nombreux prix. Là encore, des femmes sont au Théâtre de Grasse (06) cœur de la pièce : il s’agit de Religieuses qui soignent 04 93 40 53 00 des mutilés de guerre et les exhibent ensuite, leur www.theatredegrasse.com CHÂTEAUVALLON | DRAGUIGNAN | GAP THÉÂTRE 15 L’Homme hyperbolique À venir en Dracénie Un des temps forts de la saison de Draguignan : le Festival Amarelles propose 8 spectacles de choix, à voir en famille -Le Petit Chaperon Rouge de Joël Pommerat (voir ci-contre) ; -Yaël Tautavel, une très belle odyssée, fantastique et cruellement écolo, de deux frères partis à la recher- che des animaux disparus ; -La dernière création, forcément virtuose et poétique, de la cie Accrorap de Kader Attou ; Le petit chaperon rouge © Thomas Bartel -Un opéra de poche de Jacques Rebotier ; À venir à Chateauvallon -Deux installations théâtrales de la Cie Médiane ; L’année 2008 se clôt avec un magnifique cadeau : le -Et deux spectacles inspirés de peau d’âne : pour Petit Chaperon rouge de Joël Pommerat est une commencer, le festival Seule dans ma peau d’âne merveille qui vous enverra rejoindre les désirables d’Estelle Savasta, inspirée de Perrault ; et pour le terreurs de vos enfants, et les fera trembler de conclure, La vraie fiancée, d’après Grimm, écrit et douloureuse douceur (jusqu’au 20 déc)… mis en scène par Olivier Py, et troisième étape de La Douleur qui ouvrira 2008 sera plus adulte et son voyage cruel et symbolique au pays des contes féminine : Dominique Blanc lit le journal de Duras, mystiques des deux frères romantiques : il y est Falstafe © Loic Venon celui de l’attente, après la Guerre, du retour de son toujours question de pureté, de tentation, de Falstaff est gros, c’est même LE Gros catégorie mari… Un grand texte, servi par une magnifique rédemption, et de beauté… shakespearienne, comme une autre mesure de la comédienne (les 16 et 17janv). A.F. démesure du monde... Valère Novarina est jeune Quelques jours après (le 23 janv), une création : lorsqu’il adapte librement Henry IV et Henry V (en Philippe Calvario met en scène une pièce du dra- 1975, à la demande de Marcel Maréchal) sortant de maturge allemand contemporain Von Mayenburg. Il l’ombre le héros encore alourdi d’un «e» bavard : y sera question de Parasites, et de cinq personnages Falstafe est né, et ce vieux bébé est porté de nou- acharnés à se poursuivre, et à se détruire. Amarelles veau, sur les fonts de scène, pour notre plus grand A.F. du 10 au 30 janvier bonheur,dans les bras épiques de Claude Buchvald. Châteauvallon, Ollioules (84) Draguignan, Lorgues (84) La metteur en scène, qui en connaît un rayon côté 04 94 22 02 02 04 94 50 59 59 poids lourds, d’Homère à Claudel, et sait son www.chateauvallon.com www.theatresendracenie.com Novarina sur le bout des doigts (cinquième création!) livre subtilement sa version musclée et tragique du bouffon éternel. Quand ça commence, dans la longue et jubilatoire La portée des actes première partie, truculence et truanderie arpentent et martèlent le plateau : le jeune prince (fragile et Après avoir fêté dignement ses vingt ans en s’introduit dans l’intimité d’un chef pragmatique et le attentif Mathieu Genet) se frotte crûment à la vie compagnie de Catherine Marnas et Pippo tue non par idéalisme -il perd ses rêves à son contact- aux côtés de l’immonde pédagogue ventru (finement Delbono, le théâtre de Gap reprend ses quartiers mais par désillusion. Une manière pour Sartre de ubuesque Gilles Privat) qui ne mâche pas ses mots; d’hiver… qui sont loin d’être inactifs ! Guy Pierre prêcher, en 1948, pour un marxisme humaniste, qui antithèse ambulante, le duo flanqué de deux autres Couleau, metteur en scène associé du théâtre, rejetterait d’un côté le terrorisme révolutionnaire, et gredins enluminés fait flamber le verbe novarinien créera du 13 au 16 janv Les Mains sales, de Sartre. d’un autre côté les compromissions des pourtant encore un peu timide, en quête de son filon. Parce qu’il aime le théâtre politique : la pièce met en communistes (stalinien) au pouvoir. Albert Camus y L’œil et l’oreille sont repus, tout fonctionne comme la scène deux marxistes, une sorte de Lorenzo qui répondra, moins d’un an plus tard, avec Les Justes, table à double fond du banquet philosophique, dispo- que Pierre Guy Couleau a mis en scène il y a deux sitif cher à Claude Buchvald, gâteau à l’endroit ou cul Les mains sales © Synchro X ans et qui aborde aussi le problème de la résistance par-dessus tête… violente à un régime totalitaire. Un théâtre littéraire Mais le prince est appelé à régner et la deuxième longtemps jugé verbeux après les transformations partie, non moins riche en défilés de trognes et de opérées par Beckett et Ionesco, mais dont la corps de formidables acteurs qui gravent les misères pertinence de la réflexion politique et philosophique de la guerre, peine à trouver son rythme. Rejeté du compense bien le statisme, et l’absence d’innovation désormais souverain, emprisonné, Falstafe est formelle… condamné à devenir innocent : quand la scène se AGNÈS FRESCHEL vide, le monde est vraiment devenu vieux... MARIE-JO DHÔ Les Mains Sales Jean-Paul Sartre Falstafe de Valère Novarina, mes Pierre Guy Couleau d’après Henry IV et Henry V de Shakespeare du 13 au 16 janvier a été joué du 20 au 22 nov à Châteauvallon Scène Nationale de la Passerelle, Gap (05) et le 25 nov à Draguignan 04 92 52 52 52 16 THÉÂTRE OUEST PROVENCE | PORT-DE-BOUC | CAVAILLON Singulier destin Comment Pierre Lericq est seul sur scène ; son vit-on ? personnage, Paul, est seul face à ses jurés, le public autrement dit, à qui il C’est la guerre vue d’ici, et vue de là- s’adresse régulièrement pour lui bas. Ici c’est à Paris, là-bas à Beyrouth, À venir raconter sa vie, pour la défendre. Parce et la guerre celle qui dura quinze ans au théâtre de Fos qu’il est coupable, Paul, il a tué son au Liban. La jeune auteure-metteure Fos accueille la première en France père de plusieurs coups de compas en scène Hala Ghosn oppose les de la nouvelle création de la cie dans le corps, le dernier coup dans regards, et les ressentis, multiplie les québécoise Le Carrousel, Le Bruit l’œil, et sans chercher d’excuses il va points de vue, fait se confronter les des os qui craquent. Le texte de petit à petit faire remonter ses personnages, avec beaucoup d’huma- Suzanne Lebeau, grande figure souvenirs et nous conter, sans pathos, nité et de finesse. Sur la scène, seuls de la dramaturgie pour le jeune son singulier destin. De l’acte sont visibles deux balcons qui se font public, interroge la place de déterminant -son père «l’aban- face : celui de Rima, jeune veuve l’enfant dans le monde et les donnant» dans une ferme, une Le compas dans l'oeil © X-D.R libanaise, et de son jeune frère, Toufic, discours qu’il est «permis» et semaine, où il sera entouré d’horribles bondit, danse, cours, et se pose enfin, membre d’une milice, et celui de nécessaire d’avoir à son endroit. Le personnages qui abuseront de lui, à l’acte perpétré, pour respirer une liber- Marwan, qui vit chez sa tante, et dont Bruit des os aborde la douloureuse son retour, silencieux, et déjà té retrouvée. L’énergie de Pierre Lericq le frère et la sœur, Zyad et Mona, sont réalité des enfants soldats, au coupable, à une vie qui lui échappe. est communicative, réjouissante ! à Paris, vivant la guerre par échos travers de trois personnages : Son amour des mots va le sauver, il s’y DOMINIQUE MARÇON médiatiques interposés. Entre les deux Elikia, enfant dont la vie bascule raccroche, et dans le texte ciselé de balcons, la vie parisienne justement. lorsque éclate la guerre civile et qui Pierre Leriq chacun a son importance, Le Compas dans l’œil Simple mais astucieuse, la scéno- deviendra soldat et victime ; servant l’émotion, du rire à la douleur, a été joué le 25 nov graphie souligne les espaces de Joseph, jeune confident qui va lui poétiques et sincères. Jeux de mots au théâtre du Sémaphore chacun, les circulations, les dialogues: rappeler sa famille, son enfance et donc, et jeu du corps qui sautille, à Port-de-Bouc parce que malgré la guerre on travaille, son humanité ; et Angelina, la seule on fait du sport, on regarde la télé, on adulte, l’infirmière qui les reçoit à se séduit, on espère… Tout est ques- l’hôpital où ils arriveront après tion de perspective et donc de s’être enfuis, et les accompagnera Les rêveurs compréhension, y compris dans une dans le difficile retour à une vie où scène savoureuse où Zyad, confé- les enfants peuvent grandir com- n’ont plus triste figure rencier, va tenter d’éclaircir les raisons me des enfants. Un long travail du conflit. Qui comprend quoi, qui d’écriture, «sans naïveté», qui décrit Sixième collaboration entre Philippe Vincenot et Laurent ressent quoi ? Il n’y a pas de légitimité un monde sombre mais bien réel, Vercelletto, Le cas Quichotte réécrit le mythe de ce fier dans la douleur, pas de degré dans les qui ne peut laisser indifférent. Le chevalier idéaliste et absurde souffrances, on vit, c’est tout. Et c’est spectacle s’adresse à tous, à partir déjà beaucoup. C’est drôle, poignant, de 10 ans. Sancho au carrelage comme des pays intelligent, et l’interprétation brillante Des gens, mise en scène par dispersés dans la mer et se plaint que des comédiens (certains passant Zabou Breitman, est une adap- leurs oiseaux ressemblent davantage à parfaitement d’un rôle à l’autre) est à la tation théâtrale des documentaires des martinets qu’à des colombes. Pour hauteur de cette évocation sensible et Faits divers et Urgences de finalement diagnostiquer à ses patients admirable de la guerre civile libanaise. Raymond Depardon. Des tranches une confusion visuelle. D.M. de vies ordinaires, dialogues glanés C’est peu dire que le texte de Philippe au cœur d’un commissariat et d’un Vincenot rend hommage au roman de Beyrouth Adrénaline hôpital psychiatrique incarnés par Cas Quichotte © Patricjk Servius Cervantès : il le transforme en hymne à s’est joué au Théâtre de Fos Zabou Breitman et Laurent Lafitte Retenu dans une maison de repos qui la rêverie, au voyage, à l’errance, à une le 29 nov. avec beaucoup d’humanité et de «sentl’urine,ladéfécation,leproduitdéter- folie partagée. Un humour et un Beyrouth adrénaline © Marielle Bettembourg sensibilité. gent, avec des notes de crasse et de enthousiasme communicatifs envahis- renfermé», Alonso Quijano s’imagine le sent rapidement la scène qui passe du Des gens monde au-delà des murs qui l’enfer- noir pesant de l’asile au bleu et blanc mes Zabou Breitman ment : le goût sucré des pâquerettes, des songes de Quijano. Point de le 20 janvier la bienveillance des oiseaux, la mer. désillusion, le rêve triomphe assez vite Son camarade de chambre, pourtant de la rigidité d’un médecin et de ses Le Bruit des os qui craquent bien conscient de s’appeler Robert, se croyances, pour notre plus grand Cie Le Carrousel résout à répondre au nom de Sancho, bonheur. le 13 janvier affirme avoir assisté aux péripéties que SUSAN BEL Théâtre de Fos Quijano se plaît à conter : «j’y étais : je 04 42 1101 99 tenais le candélabre.» www.scenesetcines.fr Le médecin chargé du cas Quichotte observe avec tendresse et agacement Le cas Quichotte a été joué le 16 janvier leurs dialogues absurdes mais y prend au Sémaphore le 5 déc Théâtre de Cavaillon part, se figure les bouts de scotch qui et au théâtre de Lenche (Marseille) 04 90 78 64 64 accrochent un dessin de Quijano et du 9 au 13 déc www.theatredecavaillon.com THÉÂTRE 17 Quelle Jusqu’à la folie histoire ! on aurait aimé un peu plus de finesse. Seules Le concept de bonheur à travers les siècles et les les femmes de la langues, telle est la proposition réjouissante campagne qui l’entourent d’Arnaud Meunier et de la compagnie de la arrivent à donner à leur mauvaise graine. De textes philosophiques et apparition une certaine poétiques du XVIIe siècle aux articles de Courrier flamboyance, de même International, le voyage s’annonce fourni tant il est que le danseur et vrai que la notion de bonheur s’inscrit dans chaque comédien Shahrokh époque comme une éternelle révolution. Alors, où en Moshkin Ghalam dans sommes-nous du bonheur, nécessité ou utopie ? le rôle du berger sédui- Le spectacle se promènera en Nomade(s) à Maubec sant et du danseur de (le 6 jan), Vaugines (le 7), Joucas (le 8), Châteauneuf- flamenco, qui parvient, à de-Gadagne (le 9), Morières (le 12) et Mérindol (le traverssonjeuousadanse, 13). à insuffler la sensualité Puis Yannick Jaulin se contera, avec sa manière si violente qui manque tant particulière de partager ses fictions avec le public. Il au spectacle. dévoilera des fragments de vie, de l’enfance passée Yerma © X-D.R D.M. à rêver de sauver le monde jusqu’au faux pas de Yerma est cadenassée dans sa maison et dans le rôle l’enrôlement dans une secte, de l’aveuglement que l’on veut lui faire jouer : celui d’épouse et de Yerma a été joué à l’Olivier le 10 déc jusqu’à la révélation qui suivra. Terrien est comme un mère. Loin de le remettre en question, elle veut le bout de territoire arpenté avec tous ceux qui vivent, jouer pleinement face à Juan, le mari aimé, paysan qui veulent le suivre pour prendre une leçon de vie. taiseux arc-bouté sur son travail et sur les traditions. D.M. Mais son corps refuse cette partition : le manque d’enfant devient lourd, insupportable et violent. En quête de bonheur La poésie de Lorca est obscure, puissante et rêche. À venir à l’Olivier Cie de la mauvaise graine Elle ne souffre ni la distance ironique ni la médiocrité. Christophe Lindon met en scène un texte de Jean- Tournée Nomade(s) La mise en scène de Vicente Pradal (sur une Claude Brisville, L’Antichambre (le 13 janvier). Une du 6 au 13 janvier commande de la Comédie Française) répond à cette incursion au cœur du siècle des lumières et exigence à travers une esthétique élégante, une particulièrement au cœur du salon de la marquise du Terrien scénographie précise et raffinée. Chaque détail est Deffand, femme d’influence, qui use de son pouvoir, Yannick Jaulin soigné : le décor est imposant, sobre et inspiré, servi et de sa proximité avec les grands penseurs, pour Les 20 et 21 janvier par des lumières subtiles qui portent l’intensité des faire et défaire les réputations. L’arrivée, à sa tableaux. Le chant et la danse donnent au jeu une demande, de sa nièce, Julie de Lespinasse, en tant Théâtre de Cavaillon couleur tout à la fois incandescente et délicate, que dame de compagnie la détruira, cette dernière 04 90 78 64 64 notamment avec l’utilisation originale du piano. s’avérant être intelligente en plus d’être jeune… www.theatredecavillon.com Quand le spectacle s’ouvre sur le chant profond Danièle Lebrun, Roger Dumas et Sarah Biasini Terrien © Nicolas Joubard d’Alberto Garcia, le regard s’affûte sur cette interprètent à merveille ce huis clos de salon. scénographie noble. L’émotion affleure. Et pourtant, dès que les acteurs commencent à jouer, la magie Théâtre de L’Olivier disparaît. Le jeu de Coraly Zahonero heurte, gestes 04 42 56 48 48 outranciers, mots déclamés jusqu’à l’emphase quand www.scenesetcines.fr Cher Groucho Rassemblée et mise en lecture par Patrice Leconte, s’installe par moment entre les deux acteurs, les La Correspondance de Groucho Marx est lue par lettres perdent un peu de leur intérêt ; la forme elle- Jean-Pierre Marielle, lunettes rondes et moustache même, la lecture, ne prête pas forcément à la noire, Groucho dans l’âme, et Pierre Vernier, fantaisie. Et malgré le plaisir évident que les deux alternativement l’un ou l’autre des correspondants acteurs prennent à se répondre, et l’engouement des auxquels s’adresse Groucho Marx, tandis que le (excellents) musiciens, la torpeur guette, diluant les Groucho Trio ponctue le tout de joyeux intermèdes mots, et les histoires. jazzys. La matière ne manque pas, c’est une D.M. correspondance riche, pleine de finesse et d’autodérision, des petits bijoux de réparties incisives, Correspondance de Groucho Marx a été joué autant avec les amis qu’avec des producteurs le 28 nov au Théâtre de la Colonne à Miramas, hollywoodiens. Créé à l’origine pour le Festival de la le 30 nov salle Emilien Ventre à Rousset, correspondance de Grignan, le spectacle manque de les 18 et 19 décembre au Théâtre de Nîmes rythme. Mises bout à bout, et malgré le dialogue qui 18 THÉÂTRE ARLES | AVIGNON | NÎMES Un été avignonnais

Depuis quatre ans Joel Jouanneau © Mario del Curto le Festival d’Avignon organise des rencontres mensuelles, le rendez-vous des curieux, qui réunissent, le temps d’une soirée, des spectateurs et des artistes. Des rencontres accessibles à tous qui laissent le temps à la discussion. Le premier rendez-vous, le 18 nov, fut en quelque sorte une remise en route, un bilan de l’édition 2008. Et pour se replonger dans l’ambiance, le docu- mentaire de Michel Viotte, Partage de midi, acteurs en liberté fit une belle cœur,pourfairedialoguerSophocleavec La prochaine rencontre transition, permettant à chacun de se les auteurs contemporains qui l’accom- se tiendra le 12 janvier à 20h30 Moderne remémorer la création de Gaël Baron, pagnentetqu’ilaffectionne.«SiSophocle dans la salle Benoît XII NicolasBouchaud,CharlotteClamens avait croisé Emily Dickinson, Pierre avec Wajdi Mouawad, Le téléphone Sans fil, ou comment Valérie Dréville et Jean-François Michon, William Faulkner… aurait-il écrit artiste associé du Festival 2009 parler sans se parler… Mis en scène Sivadier à la carrière de Boulbon. la même pièce ?» Pour la réponse, par Marc Olinger, le texte de Sergi Comment mettre en débat les res- prière de patienter jusqu’en juillet… Belbel rend compte de cet anachro- sentis des spectateurs?Carc’estbienlà D.M nisme moderne : sans face-à-face la volonté de Vincent Baudriller et comment est-il possible de s’aimer, se HortenseArchambault,lesdirecteurs rencontrer, se découvrir ? En pleine du Festival. Donner la parole non pas L’Annonce faite crise relationnelle, les quatre protago- pour analyser les spectacles, mais pour nistes vont échanger par messagerie appréhender la réception de chacun. interposée, se servant de cet outil pour Et la parole est prise, le micro circule à la femme… braver les non-dits et faire tomber les beaucoup ce soir-là, beaucoup de C’est un spectacle total que nous a offert ce soir masques. remerciements, quelques «analyses» D.M. de l’état de la création aujourd’hui (et la compagnie de Serge Barbuscia au Balcon… le Festival est là pour en donner une Que de poésie, de recueillement, mais de douleur aussi Sans fil vision), des retours sur les propositions dans les textes choisis ! mes de Marc Olinger 2008 et sur leur cheminement après Pour ces Quatre saisons d’une femme, je m’adresse, la femme est une énigme, les 15 et 16 janv l’été (beaucoup sont en tournée par- d’après La Vie au commencement de là est son destin» nous dit Jean Reboul, Théâtre du Chêne Noir, Avignon (84) toutenFrance),surunevisionpopulaire Jean Reboul, cinq personnages, dont psychanalyste etgynécologue,qui inter- 04 90 82 40 57 de la manifestation avignonnaise… Très quatre figures féminines, se partagent roge (et envie ? ) le vide créateur des www.chenenoir.fr disponibles, les deux directeurs pren- un espace dépouillé. La mise en espace femmes. Sans fil © Christophe olinger nent le temps de répondre à chacun, de Serge Barbuscia, en demi-teintes, Dans cette succession de scènes où s’arrêtant sur les interrogations pour distille les images d’une chorégraphie le silence a lui aussi un rôle, la force du faire progresser les réflexions. projetées sur un mur, des chants orien- jeu scénique d’Hélène Azema et l’élo- Deuxième rencontre, le 8 déc, la pre- taux, des percussions cristallines ou quencedeSergeBarbuscias’imposent. mièreavecunartisteprésentau Festival affirmées. Les notes d’un violoncelle Hymne à la femme bien sûr, mais aussi 2009. Joël Jouanneau est là pour égrènentlapartitiond’ElisabethAmalric, hymne à l’Art, «secours du monde», parler de son projet Sous l’œil d’Œdipe, inspirée de Bach ou Chostakovitch, et dont les représentants, «les artistes, avec trois des comédiens qui partici- ponctuent les mots, hymne à la femme ces prophètes de l’impensable, nous perontàl’aventure:MélanieCouillaud, et à son être : «C’est à une femme que permettent de supporter ce que nous Sabrina Kouroughli et Alexandre ne pourrions supporter.» Car au travers Zeff qui en lisent un passage. © Djouadou de murmures, cris, chants, paroles, C’est une traversée théâtrale que pro- récitations, rires et incantations, ces posera l’auteur et metteur en scène, Quatre saisons sont simplement un une plongée dans le théâtre grec par hymne à la vie, à son foisonnement et le biais de la famille des Labdacides, à ses inconcevables mystères… uneconversationavecSophocle, vingt- CHRISTINE REY cinq siècles après. Pour comprendre de l’intérieur ce qu’est une malé- Les Quatre saisons d’une femme diction,poursepenchersurlesrapports ont été créées au Théâtre du Balcon frères/sœurs qui lui tiennent tant à les 5 et 6 déc. 19

La cigogne et le coucou, voilà qui démarre comme une fable. Peut-être en est-ce une d’ailleurs, une fable Histoires fraternelle qui conterait leur cohabitation forcée dans un nid de fortune -après que les oiseaux sont tombés en plein vol-, jusqu’à la complicité naissante et plus si de corps affinité. Agnès Limbos met en scène Martine Go- dard (cigogne blessée qui ne s’en laisse pas comp- ter) et Thierry Hellin (coucou autoritaire et envahisseur), deux volatiles irrésistibles et très hu- mains. À voir à partir de 5 ans le 14 janv. Dans Déversoir (le 20 janv), qui s’adresse aux plus grands (à partir de 14ans), l’intimité familiale sera au cœur de la performance d’Angela Laurier. Un écran sur lequel le père et le frère (schizophrène) racontent et se racontent, et devant eux le corps virtuose de l’artiste circassienne qui dit la révolte et la tendresse, les blessures, la résistance. Une performance en forme de délivrance. Enfin, la cie le GdRA viendra conter ses Singularités ordinaires, où chorégraphies, acrobaties, textes et chants se répondront pour tisser trois histoires de vies. Celle d’Arthur, musicien-guérisseur, de Wilfride, danseuse étoile retraitée de l’Opéra de Paris, et de Michèle, «la nègre», qui passe son temps dans un bar marseillais. Ordinaires et singuliers. D.M.

Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 www.theatre-arles.com Singularites ordinaires © Christophe Modica.

Flamenca Immortalisée par la musique de Bizet, fidèle du texte de Merimée dans Carmen pourrait l’être par celle lequel Don José «raconte à la première d’Antonio Moya dans une mise en personne les sept épisodes de son scène de Juliette Deschamps. histoire d’amour» dit Juliette Spectacle musical en 11 tableaux, Deschamps. C’est un monologue sur Réjouissant Rouge, Carmen est une réécriture fond de flamenco et de chansons

Juliette Deschamps © Marion Gronier gitanes, l’ultime entrevue des deux Oscillant entre la farce burlesque et le drame, Le Mois de Marie, tiré des Dramus- amants que le somptueux décor du cules de Thomas Bernhard, met en scène deux vieilles qui observent l’enterre- peintre catalan Miquel Barceló devrait ment du «brave» monsieur Geissrathner, fauché par un conducteur turc. rendre plus fiévreuse encore. Un huis Références directes aux habitantes de son village natal de Bavière dans les années clos fatal ponctué de claquements de 30, ces personnages personnifient un racisme brutal et radical qui pourrait talons, de chants envoûtants et de presque paraître contemporain… Frédéric Garbe et Gilbert Traïna, de l’Autre guitares ensorcelantes. «Une histoire de Compagnie, campent ces deux commères avec drôlerie et poésie. Le spectacle prédation et de mépris» à laquelle rien est précédé d’une lecture de textes courts de Thomas Bernhard par Alain Cesco- ne peut mettre fin. Résia sous la direction de Frédéric Garbe. D.M. D.M.

Le Mois de Marie Rouge, Carmen L’Autre compagnie les 7 et 8 janv les 15 et 16 janv Théâtre de Nîmes (34) 04 90 85 52 57 04 66 36 65 00 www.theatredeshalles.com www.theatredenimes.com 20 DANSE GROUPE DUNES | DANSEM D’ici à Marseille 2013 Retrouvailles avec le Groupe Dunes qui, même s’il parcourt le globe en tout sens, réside bien à Marseille ! Madeleine Chiche et Bernard de moniteurs, compositions sonores On retiendra donc, parmi les dernières Dans ce monceau de gravats, leur Misrachi, directeurs artistiques du en flux tendu : dans l’obscurité du commandes, l’intervention en intérieur création soulignait les vestiges d’une Groupe Dunes, ont les pieds sur terre, studio, nous voici au cœur de leurs En périphérie du silence à Lab- industrie à jamais balayée… Comme à à Marseille, et la tête dans les étoiles. créations multimédias «dans lesquelles labanque à Béthune : en dépit d’un chaque fois, le Groupe Dunes relève un Car depuis quatre ans, le duo conjugue ils interrogent la présence du spec- cahier des charges contraignant, des défi technique, réinvente l’espace, et son quotidien «hors situ» à , tateur, ses modes de lecture et de spécificités du lieu, de la couleur et des propose au public de lire - autrement - , Osnabrück ou Buenos Aires au perception.» On pourrait craindre que espaces vitrés notamment, ils ont son environnement. gré de ses interventions ou de ses l’usage des nouvelles technologies ne choisi d’investir le centre de MARIE GODFRIN-GUIDICELLI projets. Ce qui ne l’empêche pas les ait déconnectés du réel ! Bien au production et de diffusion en arts d’œuvrer à une nouvelle intervention contraire, leurs réalisations proposent visuels en sculptant l’espace avec Groupe Dunes sur le toit-terrasse de la Friche la Belle une nouvelle approche du réel en l’image et le son spatialisé. Friche la Belle de Mai, Marseille de Mai, D’ici là, qui scellera ses ancrant les images dans cette même Autre expérimentation singulière, en 04 91 50 00 19 retrouvailles avec l’espace de 8000 réalité. À la différence près que leur extérieur cette fois, l’installation More mètres carrés si habilement trans- perception de l’espace urbain est and Less sur le quai Island Brygge de cendé en 1999 avec Vous êtes ici ! alimentée par leurs recherches sur les Copenhague, no man’s land incongru L’installation paysagère devrait voir le principes d’interactivité, les sons, aux abords des artères commerciales jour en 2011car, disent-ils d’une seule l’environnement, la lumière, l’archi- flambant neuves, lambeaux d’un bâti- voix, «Marseille ne doit pas s’arrêter en tecture, sans oublier l’humain, invisible ment aujourd’hui totalement démoli. attendant 2013.» Pour l’heure, mais omniprésent. À la différence près, Madeleine Chiche et Bernard Misrachi aussi, que leur travail puise sa source ont convié amis et professionnels à un dans le mouvement dansé lié à leur petit tour dans leur studio, preuve expérience de chorégraphes : «Nous Dansem finit en beauté tangible de leur enracinement à n’avons peut-être fait que déplacer la Marseille, pour évoquer leurs scène, en substituant aux corps des Cette édition fut riche réalisations en France et à l’étranger. danseurs ceux des spectateurs, qui de surprises auxquelles Écrans vidéos en circuit permanent, dansent aussi parfois.» Chaque instal- Dansem ne nous avait projections d’images murales, lation étant non reproductible, sa pas toujours habitués profusion de sauvegarde est mémorisée par une câbles et énième vidéo, pâle ersatz de la Après Rachid Ouramdane à Arles, création in situ mais trace Abou Laagra à Istres et Gat à Avignon indispensable. (voir Zib 13), le festival s’est recentré à Marseille et conclu au Merlan, par deux soirées pour le moins contrastées… Que dire du travail de Karry Kamal Karry ? La Matrice des Anges, créée le 10déc, est une pièce prétentieuse, très discutable dans son propos parfois Paco Decina © Laurent Philippe mystico-sectaire(«l’espritcritiques’arrête où la foi commence…») et parfois par un long moment où les danseurs ridiculo-grotesque dans ses phrases bougent sans bruit, dans un silence qui répétées à l’envi («l’intérieur n’est pas ressemble à une effraction dans la à l’intérieur», «tu es à l’extérieur de l’inté- surdité, puis les sons débarquent, rieur de toi»…) ou la longue anecdote répétitifs, électroniques, en boucles, et du calamar coréen, fable incompré- s’élaborent jusqu’au mouvement final. hensible assénée par une (magnifique) Mais rien de linéaire dans cette pro- danseuse hilare affublée d’un accent gression, qui revient en arrière et plus que prononcé. Reste que certains reprend lentement ; la danse, de moments sont d’une beauté plastique même, est fondée sur de lentes mises sensualité qui ose presque la porno- en mouvements, au sol pour la plupart, graphie… entre deux mouvements des unissons parfaits, avec quelques

owc,Hnl ihcr rueDunes Groupe - care with Handle Norwich, infantiles, répétitifs ou insignifiants ! accélérations soudaines, des arra- Rien de tout cela dans le travail de chages circulaires, des portés qui Paco Decina. Le chorégraphe napo- amènent la pièce vers une verticalité litain travaille avec une subtilité rare sur retrouvée. La lumière dispense des les zones où la lumière devient obscure. taches blanches aux frontières des- Indigo, dansé le 13 déc au Merlan, est quelles les corps dansent toujours, dans une pièce lente où rien n’est démons- l’entre-deux, l’Indigo. Sans démons- tratif, mais qui vous embarque avec elle tration virtuose, mais sans jamais non en se jouant des frontières. Entre le plus manquer leurs pas. Magnifique ! mutisme et le son : la pièce commence AGNÈS FRESCHEL BALLET D’EUROPE | TOURSKY | 3BIS F THÉÂTRE 21 Le plaisir du mouvement

C’est peu dire que ces danseurs-là ont du talent et du charme. Leur jeunesse pétille, mais aussi leur maîtrise du corps et de l’espace. Ils osent des mouvements d’ensemble très «dansés», et de véritables compositions chorégraphiques, guidées non par le concept mais par le mouvement. Ainsi, au fil des sept pièces présentées à La Friche par les sept chorégraphes du Ballet d’Europe, on a pu apprécier des moments surprenants : Fabrice Gallarague, en moins de 4 minutes, propose un moment de jubilation intense où neuf danseurs se lâchent à toute vitesse, tout à un plaisir communicatif. Jean-Philippe Bayle met au point un duo arachnéen où les corps couverts de bandages jouent avec les fils de l’autre. Aline Richard tente une danse narrative sur le désir féminin, partagé entre l’amour romantique et un fantasme de chair, et Natacha Franck, superbe, éclate de vitalité dans le numéro central conçu par Christophe Roméro, qui transcende la fitness façon Fame… Enfin la pièce de 20 minutes qui clôt le programme, créée par Florencia Gonzales pour neuf de ses camarades, fait preuve d’une véritable maturité de chorégraphe : parce qu’elle construit son rythme en contrastes et progression, maîtrise les © Agnès Mellon mouvements d’ensemble et les duos, dans lesquels Les Worshops du Ballet d’Europe elle ose quelques portés… ont été dansés à la Friche AGNÈS FRESCHEL les 28 et 29 nov

Sade, le retour © Pascal Elliott Comme chaque année M.C. Pietragalla revient faire Bis, Citron, Vélo un tour à Marseille, et s’apprête à faire salle comble au Toursky. Après la saga de mineurs et celle de Le dispositif Tridanse met en réseau trois lieux de Ferré, il s’agit à présent d’évoquer Sade. La création, le 3bisF à Aix, le Citron jaune à Port-Saint- perversion ? La Liberté ? L’apologie du sexe violent Louis et le Vélo Théâtre à Apt pour permettre à un et de la douleur ? Non, Pietragalla et Julien chorégraphe de présenter diverses étapes de son Derouault veulent faire voir «le théâtre des fous» et travail en cours. Yann Lheureux répète actuellement «l’incarcération». Avec huit danseurs qui, malgré Sade, Manifestement, un solo accompagné d’une création tenteront, par les corps, d’atteindre la grâce. Or, si vidéo (Lionel Palun), plastique (Christophe Sade l’atteint, c’est par la distance transcendante de Cardoën) et musicale (François Richomme),dont il l’écriture : retrouver cet esprit-là avec une musique de montrera une étape de travail le 15 janv à Aix, le 29 Laurent Garnier et la voix d’Alain Delon, dans un janv à Port-Saint-Louis puis le 10 fév à Apt. Une spectacle coproduit par Pierre Cardin, semble a mise en réseau qui permet l’éclosion d’œuvres priori un peu illusoire… nouvelles, associées à des ateliers de pratique dans A.F. chacun des lieux. A.F. Sade ou le théâtre des fous Pietragalla Cie 3 bis F du 22 au 24 janv 04 42 16 1775 www.toursky.org www.3bisf.org 22 DANSE MARTIGUES | CHÂTEAUVALLON | BNM Les larmes coulent dedans Il est parfois difficile de rendre compte de l’émotion que suscite un spectacle. Au Bois dormant fait partie de ceux-là. Essayons Trop blanche? mais, surtout, leurs aspirations. Le texte de Marie Desplechin, lui aussi bouleversant, se parle à la première personne, débute par une expérience intime de la séparation d’avec un être aimé, enfermé à l’intérieur d’un pavillon psychiatrique, alors qu’elle reste «enfermée à l’extérieur». Après avoir livré cela elle raconte sa rencontre avec Thierry, avec les autistes, puis établit lentement un rapport au conte, à la métamorphose finale, le baiser magique qui rend les crapauds à leur humanité… Question de frontières encore, © Agnès Mellon mais de passage aussi, et du bonheur qu’il y a à les franchir, La carte blanche laissée aux danseurs même temporairement, imperceptiblement. du BNM s’est révélée décevante : bien La musique de Benjamin Dupé ouvre la pièce, mais sûr les interprètes sont magnifiques de l’accompagne aussi tout au long, entrant en vibration avec technicité, et d’émotion parfois. Mais le corps du danseur, lui donnant ses impulsions, y puisant les leurs univers restent superficiels, et siennes, et tissant de sa guitare, avec brio et émotion, un leurs combinaisons, duos ou soli, univers sonore de glissades et de secousses, strident puis assez pauvres. Seules trois pièces se doux, jamais calmé. Car le plus beau encore sont les rares détachaient un peu de discours rebat- moments de rencontre entre les solitudes des trois acteurs: tus sur le couple : un duo blanc, assez quand Thierry touche Marie, que Marie le nomme, que sensuel, d’Anton Svir, un solo inspiré Benjamin et Thierry se voient, se répondent. Ou encore des lenteurs tendues du Bûto de Yoshi quand dehors un quatrième corps se met à danser, Kinoshita, et une pièce gastronomico inattendu, dans le bois réel qu’on apercevait derrière la vitre. comique de Fanny Barrouquère, qui Une passerelle encore, une porte fermée qu’on va ouvrir et avait l’audace de tenter une danse qui, comme l’arrivée d’un Prince Charmant, remettra burlesque. Ce qui, après tout, en une d’aplomb le bois couché qui jusque là servait de sol à la soirée, est déjà ça ! danse… A.F. AGNÈS FRESCHEL Les Cartes Blanches se sont déroulées Thierry Niang © Agnes Mellon Au Bois dormant a été créé les 4 et 5 déc au BNM C’est un spectacle sur l’autisme. Ou plutôt, sur la douleur à l’École de Danse de Martigues du 10 au 13 déc. qu’il y a à aimer ceux qui ont décroché, ceux qui vivent de Il sera repris à Châteauvallon (84) le 28 janvier l’autre côté de la raison, de la communication, de la 04 94 22 02 02 verbalisation. Sans jamais juger des causes, des conditions www.chateauvallon.com et des traitements possibles des maladies mentales évoquées, Au Bois Dormant propose des passerelles, des À venir aux Salins voies d’accès, modestes, réelles… Tango Metropolis les 19 et 20 déc : avec le Daniel Binelli Pour cela ils s’y sont mis à quatre : la pièce se présente sous quintet (bandonéon magique !), Pilar Alvarez et Claudio la forme d’un trio hétérogène, dirigé pas le regard discret de Hoffmann, et 8 des meilleurs danseurs argentins. Le must, Patrice Chéreau. Mais le cœur du spectacle, où tout bat, pour les amateurs ! où tout visiblement a pris naissance, réside dans le corps Question de goûts, le solo léger de Georges Appaix, sera vibrant de Thierry Thiêu Niang. Il a passé des mois avec après le Massalia dans la petite salle du Bout de la nuit. Un des adolescents autistes et y a fabriqué une gestuelle inédite, nom qui lui va comme un gant de soie, à ce solo qui non pas calquée sur leurs gestes mais s’en inspirant, les décidément aime l’intimité, mais voyage beaucoup… les 8 transcendant, donnant à voir leurs douleurs, leurs blocages et 9 janv, pour commencer l’année tout près de l’intelligence Hiroaki Umeda © Dominique Laulanne des choses, et de guingois Deux soli de Hiroaki Umeda. Le danseur japonais sculpte un univers dansé totalement original. Sur une musique électroacoustique et des projections de lumières d’une grande précision, jouant de contrastes profonds, aux frontières de l’obscurité, de l’éblouissement et de la stridence, l’homme met son corps en jeu. Sa danse passe elle aussi de l’immobilité à la vitesse la plus effrénée : c’est qu’il emprunte à la fois au Bûto ses tensions en dedans, ses replis lents de douleur, et au hip hop ses saccades, sa vitesse, son énergie libérée. Vous avez dit contrastes ?

Les Salins, Scène Nationale de Martigues 04 42 59 94 37 www.theatre-des-salins.fr PAVILLON NOIR | CHÂTEAU-ARNOUX | GAP DANSE 23 Les insomnies de Karolyn Klarkson À force de déguisements, d’accessoires et de personnages, les nuits de Karolyn Klarkson risquent l’insomnie. C’est sucré jusqu’à donner mal au cœur Carolyn Carlson s’est inventé un double pour parler aux enfants : Karabine Klaxon, autrement dit Karolyn Klarkson. Dans sa première pièce destinée au jeune public, créée en 2006, la chorégraphe américaine fait débouler sur le plateau cinq danseurs et un musicien, généreux homme-orchestre sur lequel toute l’archi- tecture repose. Sans lui, tout s’écroule ! Le fil de l’histoire est tellement ténu qu’on pourrait croire qu’il n’y a pas d’histoire…, sauf qu’il s’agit des rêves de Mademoiselle Karabine Klaxon, jeune ingénue à la recherche de son doudou perdu. Ou quelque chose comme ça… Frêle prétexte qui offre à Carolyn Carlson l’occasion de jeter envracunmonstre,unanimalsauvage, © Agnès Mellon deux hommes grenouille, un robot, de tendres petites fées, un épouvantail et tutti quanti. Le tout englouti sous contorsionne (grâce ou à cause des costumes, selon scène. Ça marche à tous les coups et les petits en un amoncellement d’accessoires et de panoplies : son humeur). La parade dégouline de bons sentiments redemandent… casques de plongée, tuyaux en PVC, gants de boxe, et d’images faciles. Heureusement, il y a toujours une MARIE GODFRIN-GUIDICELLI mannette de jeu vidéo, arbre sacré, oiseau magique… bonne âme pour nous sauver, même dans les pires Bref, un fourre-tout sans queue ni tête qui danse (pas rêves : Jalalu-Kalvert Nelson mène la danse avec brio et Les rêves de Karabine Klaxon beaucoup), qui chante (effet comédie musicale garanti), joue sa partition avec tellement de plaisir qu’il attrape au ont été dansés au Pavillon Noir qui gesticule (beaucoup), rampe (parfois), se vol les enfants pour les faire jouer des percussions sur du 4 au 8 déc Perfection plastique Deux jambes apparaissent dans la lumière, arpentent la scène redevenue sol, redevenue terre. Les pas souples et sûrs redessinent les trois cercles de terre ocre qui Faux pas toc délimitent autant d’univers particuliers, le village, la brousse, la ville et sa modernité. Le silence, les respira- Pour la troisième fois de la saison, le Théâtre Durance tions, le bruit des pas participent à un spectacle où le accueille en ses murs une compagnie en résidence, qui corps devient porteur à la fois d’une histoire, d’une mène en son sein un travail jusqu’à son terme, c’est-à- tradition, et chantre de la modernité. dire jusqu’à la représentation. Il s’agit cette fois d’une Le propos du danseur, en résidence au Pavillon Noir, est recréation du chorégraphe Thierry Baë qui, après ses de présenter une œuvre au cheminement achevé. Ce deux soli paradoxaux qui racontaient son impossibilité jeune chorégraphe du Kenya retrace le récit d’un appren- de danser, ou même d’être là, revient sur cette pièce tissage, qui s’ancre dans un passé et donne sens à son pour 6 interprètes, agrémentée de films, qu’il avait créée présent. Avec humour, lors de la conversation libre avec en 2003 avant le succès de Journal d’inquiétude… Il y les spectateurs qui l’ont ovationné, il montre tout ce que nouait déjà des liens particuliers, ambigus, entre le réel, lehiphopdoitàladanseMasaï.Loindeselaisserenfermer le virtuel, l’imaginaire, entre le spectacle et la vie. Cette dans le folklore, l’artiste exploite les gestes traditionnels, reprise constitue pour lui le terme d’un travail sur le faux les retranscrit, sans les dévoyer, nous entraîne dans un en art… et sera également sur la scène de Gap quelques mondeoùchaquegestepeutdonnerlieuàuneinterprétation. jours après la recréation. Mais au-delà de ces explications éclairantes on reste Entity © Ravi Deepres / Odette Hughes, Anh Ngoc Nguyen A.F. simplement subjugué par la perfection plastique du travail À venir au Pavillon Noir Dix danseurs de la Cie de Wayne Mac Gregor viennent présenté. Admirables en effet, la technique souveraine Tout ceci (n’)est (pas) vrai présenter sa nouvelle création, Entity du 15 au 18 janv. de l’artiste, sa maîtrise extraordinaire du moindre muscle, Thierry Baë Sa danse, toujours virtuose, cherchant des contacts sa précision. Le chasseur ou l’oiseau, le danseur de villa- Théâtre Durance, Château-Arnoux (04) multiples et souvent brutaux entre les corps, se ge ou l’amateur de techno, Anuang’a se glisse dans ces le 16 janv confronte ici à l’omniprésence d’écrans, et à deux personnages avec le même brio. Une autre manière 04 92 64 27 34 musiques aux timbres contrastés : un quatuor à cordes, d’atteindre l’universalité ? www.theatredurance.com MARYVONNE COLOMBANI et de la musique électronique. La Passerelle, Gap (05) Pavillon Noir, Aix A journey into the future le 20 janv 0811020 111 a été créé au Pavillon Noir 04 92 52 52 52 les 27 et 28 nov www.preljocaj.org 24 DANSE OUEST PROVENCE | GAP Nécessité de mémoire Ils ont à coups sûrs atteint leur but. Les rancœur, mais avec beaucoup artistes hip hop de la cie Mémoires d’émotions et de sensibilité. Sobre, le Vives, sous l’impulsion de leur dispositif permet la pertinence des MC/directeur artistique Yan Gilg, chants et des danses, libère les voulaient faire bouger les rangs avec mouvements, chaque tableau leur création engagée À nos morts, qui s’accompagnant d’images fortes, rend hommage à tous ceux -soldats oubliées pour la plupart, et dont la ivoiriens, malgaches, burkinabé, visée pédagogique n’est d’ailleurs pas camerounais, antillais, marocains, sans intérêt. Le but est atteint, doublé algériens, tunisiens-, qui furent enrôlés même : la réhabilitation de cette dans l’armée française, tirailleurs de mémoire, qui réaffirme des valeurs de toutes les guerres… tolérance et de respect, enrichit un peu Dépassant largement le cadre strict plus encore la culture hip hop, «art d’une chorégraphie hip hop, le noble qui se voulait d’abord humaniste spectacle mêle chansons rap, danse, et intelligent» rappelle Yan Gilg. A nos morts © X-D.R images d’archives et de documentaires DOMINIQUE MARÇON (fruit d’un remarquable travail de Enfermés recherche), racontant, de façon Partant du postulat que chaque être soumis ou sans soumettre l’autre ? chronologique, cette histoire enfouie À nos morts a été créé le 18 nov est une prison et qu’il faut amputer une Comment le comprendre sans dont la restitution est nécessaire. Du au théâtre de La Conne à Miramas, part de soi-même pour réussir à vivre l’agresser ? Les duos se forment et chemin des Dames à la guerre et le 22 nov au théâtre de l’Olivier avec les autres, la cie E.go utilise la s’équilibrent, se servant des codes d’Indochine, des Aurès jusqu’au à Istres, dans le cadre de Zone métaphore de l’aphasie dans une pièce gestuels du hip hop pour sortir de groupe Manouchian, c’est un Danse Hip Hop pour quatre danseurs qui tentent de l’isolement, énergiques, libres. Et condensé de l’aveuglement du tisser des liens. D’une prison faite de ensemble. colonialisme français qui saute aux barreaux souples ils vont progres- D.M. yeux et aux oreilles, sans démagogie ni sivement sortir ; les corps hésitent, se lancent enfin, se frôlent, forment une Aphasie a été dansé communauté réduite qui dit la difficulté au théâtre de Fos de communiquer avec peu de moyens. le 21 nov dans le cadre de Zone Comment rester soi-même sans être Danse Hip Hop La rue dedans… La Passerelle fêtait ses 20 ans et contamine… Franck Manzoni, qui a donnait rendez-vous à son public pour joué 12pièces sur cette scène, fit alors un spectacle de rue… sur la scène. un numéro épatant de collector de ses Entendez, tous sur la scène, différents rôles, et le public reconnut, spectateurs compris ! Il s’agissait pour lycéens compris, Koltès, Brecht, la Cie Parnas de reprendre Le Crabe Dubillard, Olivier Py… et le hanneton, créé dans la rue, et de Car ce théâtre, en 20 ans, est devenu l’adapter aux circonstances hivernales un lieu où la mémoire se construit. Joël et alpines… L’étonnant est que cela Giraud, Vice-Président de la région resta un spectacle «de rue» : le lien PACA délégué à la montagne, souligna avec les spectateurs participatifs, la dans le discours qui suivit présence de la fanfare des Sex l’exceptionnel travail de la Scène Pistons, et surtout, le rapport à Nationale, son accompagnement au l’exploration commune du lieu long cours des artistes qu’elle soutient, scénique gardèrent la quintessence du la qualité constante de la culture spectacle in situ, lié au lieu et aux gens. qu’elle propose dans une région rurale, Reprenant l’éloge paradoxal des Lois et de montagne, enclavée, et les de Murphy -celles là qui énoncent que 30000 spectateurs fidèles qui chaque le pire arrive toujours, servant ainsi de année s’installent dans ses sièges. caution à l’élaboration d’un monde Exemplarité soulignée également par sécurisé-, la joyeuse troupe invite son François Brouat, Directeur Régional public à un lancer collectif de tartines des Affaires Culturelles, dans une lettre beurrées -censées se retrouver bien adressée à Pierre André Reiso, sûr du côté du beurre-, puis à une directeur de la Passerelle depuis 20 exploration des dangers de l’espace ans… scénique : lointain trop attirant, A.F. quatrième mur qui se dématérialise, mur du jardin qui a trop absorbé de Les 20 ans de la Passerelle se sont textes et qui, si on s’en approche, vous fêtés les 9 et 10 déc à Gap ARLES | SIRÈNES ET MIDI NET ARTS DE LA RUE 25

c’est une nouvelle de poids, le Départ En terre et sur l’air de la Tournée Mondiale du Père Noël se fera de la place de la République, grâce Une 5e édition s’annonce, à la cie Aérosculpture et à la cie Karnavires : un délire pyrotechnique et pour de Drôles de Noël aérien prometteur ! Sans oublier le arlésiens qui vont mettre spectacle d’ouverture avec la cie la ville sens dessus dessous ! Grupo Puja et son K@osmos en altitude (le 20 déc), la yourte de la cie Prise de Pied et son Thé Perché, la Un peu raccourcie dans le temps, très Montgolfière de l’Agence Mélusine, dense donc, mais toujours pleine de les comptines des Petites Poucettes de surprises, la manifestation s’apprête à la cie Rêves et Chansons… Un grand envahir les places, les rues et le ciel rendez-vous populaire, dont la qualité d’Arles, mais aussi, comme l’an passé, ne se dément pas ! la façade de l’Eglise Saint-Trophime. Xavier de Richemont proposera de DOMINIQUE MARÇON nouveau ses Chromatiques éclairées stupéfiantes, couvertures intégrales et Noosphère de la cie Aya Contemporary Circus © X-D.R Drôles de Noëls bigarrées en sept tableaux ; de l’Empire Hybride, présente tout au long du fes- nettes pour de Drôles de songes ; une du 20 au 24 déc byzantin aux fresques italiennes, les tival, avec deux guides très particuliers, cie australienne, la cie Aya Contem- Office de tourisme d’Arles détails s’en trouvent magnifiés, vivants. Les Smockings, qui vous accompa- porary Circus, fera le déplacement en 04 90 18 41 20 Côté spectacles, une quinzaine de gneront de vos pérégrinations ; sous NooSphere au Théâtre d’Arles avec Service culturel d’Arles compagnies devraient faire le bonheur chapiteau, place Paul Doumer, la cie utilisation de d’instruments tradition- 04 90 49 37 40 de tous, avec notamment quatre créa- Khoros revisitera le Songe d’une nuit nels indiens, australiens et européens, tions annoncées : celle de la cie d’été de Shakespeare, avec marion- de la danse et de la jonglerie ; enfin, et Tragédie à Grande Vitesse

Phèdre, à la manière d’un mélo ou d’un Racines a été joué par la Cie vaudeville avec cousine orpheline, Didascalies and Co, sur le parvis belle-mère et bonne. La mise en scène de l’Opéra de Marseille joyeusement décalée répond au mercredi 3 décembre burlesque du texte, sorte de récit bourré d’incises, un texte à la Renaude quoi. Et à la fin, quand une espèce de balayeur futuriste vient embarquer les bateleurs essoufflés, on se prend à imaginer ce que sera la Phèdre version longue que Renaud-Marie Leblanc est en train de concocter… FRED ROBERT

© Agnès Mellon

Lorsque Lieux Publics a sollicité speed de la pièce ? C’est ainsi que, Renaud-Marie Leblanc pour une deuxième bonne idée, il a commandé à performance dans le cadre désormais sa complice Noëlle Renaude de célèbre et attendu de Sirènes et Midi collaborer avec lui. Cela donne Net, le metteur en scène est resté Racines, 10 minutes de jubilation quelque peu perplexe, ne se sentant théâtrale menée tambour battant, que pas vraiment à l’aise avec le théâtre de le grand auteur classique n’aurait sans rue. Et puis, il a eu, c’est chez lui une doute pas désavouées, même si le habitude, une bonne idée. Puisqu’il registre en est résolument changé. travaille actuellement sur Phèdre de Le spectacle évoque le Grand Siècle, Racine, pourquoi ne pas utiliser ce avec airs de ballets à la Lulli, costumes matériau textuel ? Et puisque la et perruques, l’Antiquité aussi avec le consigne veut que la représentation proscenium sur lequel virevoltent les débute à la première sirène de midi et acteurs, qui tiennent tous les rôles à s’arrête net (ou presque) à la seconde, eux 3. Sur ce long tréteau qui coupe le pourquoi ne pas charger un auteur parvis en deux, troisième bonne idée, contemporain d’écrire une version se joue en accéléré la passion de 26 MUSIQUE OPÉRA Britten l’enchanteur La première représentation tante, à la tessiture de contre-ténor, lante de Jean-Louis Martinoty, du Songe d’une nuit d’été que Britten a fait sortir du répertoire secondé par Daniel Ogier dont les de Benjamin Britten, poussiéreux où il était jusque là can- costumes mi-futuristes mi-chiméri- tonné. Timbre doux, posé et presque ques, tout enguirlandés de loupiotes, à l’opéra de Toulon immatériel, Rachid Ben Abdeslam transparaissent au rythme des jeux de le 5 décembre, a remporté s’impose naturellement dans ce lumières obscures et ouatées de un immense succès monde merveilleux. Sa reine Tytania Fabrice Kebour. Véritable synthèse Une des plus belles pages d’opéra du trouve en Maïra Kerey les coloratures des arts, cette production a tout XXe siècle servie par une production équivoques conformes à sa nature fan- © Frederic Stephan d’une grande ! remarquable, associée aux opéras de tastique alors que le bavard Puck, ancien collaborateur et assistant de FRÉDÉRIC ISOLETTA Nancy et de Caen, a offert au public campé par le comédien Scott Emerson, Britten lui-même, l’orchestre laisse toulonnais une soirée étincelante. ne fait que causer. Et dès qu’il prend s’échapper de la fosse des couleurs à Quelques notes caressées aux cordes la parole, l’excellent trompettiste la fois impressionnistes, subjectives suffisent, glissandos et portamentos Pascal Reymond débite les phrases, et éthérées à la faveur d’une palette coulants, et nous voici transportés au musicales cette fois, dans une grande riche de deux harpes, d’un célesta et cœur de la forêt mystérieuse, théâtre virtuosité pour un duo improbable d’un clavecin, en plus des pupitres féerique émergeant des profondeurs qui cimente l’ouvrage. habituels. L’atmosphère enchante- de l’orchestre. Surgit alors le roi Dirigé de mains de maître par le resse créée par Shakespeare se trouve Obéron, créature surnaturelle et inquié- spécialiste du genre Steuart Bedford, magnifiée par la mise en scène pétil- Aïda : le triomphe ! Une belle distribution vocale, un chef, un orchestre et des chœurs exemplaires, des danseurs étonnants, de somptueux costumes et des projections vidéos féeriques… tout a concouru au succès de Verdi à l’Opéra de Marseille !

© Christian Dresse

Pour réussir un grand Verdi il n’y a et une présence captivante ! L’aisance chœurs sont passés du plein éclat cité : c’est qu’on aime retrouver,comme pas de secrets : il faut de grandes scénique n’est pas, par contre, l’attrait glorieux à de fascinants «sotto voce». pour Manon dernièrement, de vraies voix… la scène phocéenne n’en a pas premier de Walter Fraccaro… cepen- Le ballet «afro-guerrier» de Laurence chorégraphies à l’opéra ! manqué ! En tête, dans le rôle-titre, dant son Radamès fut vaillant. Fanon a été particulièrement plébis- Mais le succès n’aurait pas été total l’Américaine Adina Aaron a prouvé On note que l’enchaînement des spec- © Christian Dresse sans l’absolue féerie des projections par ses qualités vocales et son tacles a laissé quelque trace sur les vidéos imaginées par Charles Roubaud. engagement scénique qu’elle est organismes : le 5 décembre (après En fond de scène ou sur les côtés, les actuellement l’une des plus grandes cinq représentations en dix jours !), décors pyramidaux ont donné lieu à interprètes de l’Ethiopienne. Même si on a perçu dans les pianissimi aériens d’habiles emboîtements d’images, l’emploi d’Amnéris (traité en véritable de la soprano un poil de souffle para- effets d’optiques, travelling cinéma- négatif visuel de sa rivale) n’est pas site, quand le ténor s’est avéré un tographiques du plus beau résultat… tout à fait dans les cordes de Béatrice peu court sur les ultimes aigus… Les Jusqu’au final où, suivant le livret, le Uria-Monzon, la mezzo française a basses solides Wotjek Smilek tombeau s’est ouvert sur un ciel compensé un timbre un peu sourd, (Ramfis) et Dmitry Ulyanov (le Roi), nocturne… nous laissant, pour de manquant de «spinto», par des atouts comme le chant généreux de Sandrine longues heures encore, la tête dans musicaux et un vrai talent de tragé- Eyglier (la Prêtresse) ont complété les étoiles ! dienne. Côté hommes, le Coréen Ko un plateau vocal brillant. JACQUES FRESCHEL Seng-Hyoun a époustouflé (comme Dans la fosse, Nader Abassi a con- à Orange en 2006) dans le rôle duit, avec précision et souplesse, un d’Amonasro, grâce à sa voix d’airain orchestre en grande forme, quand les 27 Vieilles perruques et divas fantasques Le 6 décembre au Théâtre du Jeu de Paume, ce qui fut autrefois un divertissement impérial a été représenté devant un plein parterre d’enfants (et de parents). Un spectacle loufoque qui a fait mouche ! En 1786 étaient joués à Schönbrunn, tentent de produire, sous la houlette devant l’empereur, deux opéras com- du «Direktor», un opéra en quatre jours. mandés sur le même sujet : le Sur ce, surgissent deux sopranos Directeur de Théâtre de Mozart et hystériques et gémellaires, enruban- D’abord la musique, ensuite les paroles nées et corsetées, qui se disputent le de Salieri. Autre temps : ce spectacle statut de «prima donna». Cette est aujourd’hui destiné à un «jeune situation donne lieu à d’irrésistibles public». Comme quoi la démocrati- shows clownesques où rivalisent, en sation en matière d’accès à la culture vocalises fantaisistes et mimiques a fait des pas de géant, malgré les bouffonnes, Monique Borelli et Mozart-Salieri © X-D.R dires de certains… Lucille Pessey… alors qu’au piano Ceci dit, l’adaptation conçue par Jan Heiting joue l’homme-orchestre. Jean-François Héron pour la Compa- La mise en scène rythmée de Julien gnie Interlude est une réussite. Cette di Tomaso, souvent déjantée, intègre sorte de vaudeville, avec dialogues les airs tragiques ou parodiques et parlés, ajustés en français, est un permet à la joyeuse troupe d’exprimer habile condensé du «buffo» italien de tout son talent. Magie Salieri et de ce qu’il reste des numé- JACQUES FRESCHEL ros allemands du singspiel mozartien. Le sujet : un poète (Pierre Villa- Homérique Loumagne) et un musicien (Jean- C’est Le Retour d’Ulysse de Monteverdi Christophe Filiol), caricatures des que nous proposait le Théâtre de «vieilles perruques» du XVIIIe siècle, Nîmes les 11 et 12 déc, mis en scène par William Kentridge sous la direc- tion musicale de Philippe Pierlot et l’ensemble Ricercar Consort. Cet Le cadeau de Luca opéra de 1640, même s’il porte en Pour célébrer le 150e anniversaire de la naissance de germe, après l’Orfeo, toute la tradi- tion lyrique à venir reste finalement Puccini, le théâtre d’Aubagne affichait, le 22 novembre, un très loin de l’écoute habituelle de beau plateau vocal… et un ténor royal : Luca Lombardo ! l’amateur d’opéra… La magie de la Le concert affichait quelques scènes de l’Ensemble vocal Philharmonia à mise en scène en a révélé toute la et fameux airs tirés de La Bohème, se surpasser, alors qu’au clavier somp- richesse. Des marionnettes grandeur Turandot, Manon Lescaut, Tosca ou But- tueusement orchestral, l’omniprésente nature, parfois manipulées avec adresse terfly… avant la somptueuse Messe Marie-France Arakelian a, comme de par les chanteurs dans le lointain, de Gloire du grand vériste italien. Au coutume, fait des merveilles. matérialisaient un trompe-l’oeil (baro- Il Ritorno de Ulysse © X-D.R fil des apparitions, on a apprécié les Pourtant on ne sait si les Aubagnais ont que ?) tout en finesse et donnaient aigus scintillants de Monique Borelli, véritablement réalisé leur chance ! une consistance physique aux figura- comme l’émission généreuse, l’élan Certes, la salle a pleinement acclamé lismes qui dominent dans cette communicatif de la soprano Brigitte le ténor Luca Lombardo… mais a-t- musique. Une projection au symbo- Hernandez. Bien connu de la famille elle saisi que le chanteur,qui remplace lisme très achevé complétait en fond lyrique locale, Claude Méloni (depuis régulièrement Villazon défaillant, de scène l’atmosphère intime de cette bientôt 30 ans, le baryton forme des triomphe urbi et orbi dans Carmen, à production aux accents anciens mais générations d’artistes dans sa classe Bastille ou au Stade de France, dans au look de théâtre contemporain. Un de Chant au Conservatoire de Mar- Louise, Les Contes d’Hoffmann, Macbeth peu pris de court dans le Prologue, seille) conserve, à près de 70 ans, une ou Werther et partout dans… Tosca ? Ulysse (Julian Podger) s’est ensuite noblesse de ton et une conduite des Ah, que son E lucevan le stelle fut bonifié, et Pénélope (Romina Basso) phrasés d’une rare élégance. On retient somptueux ! On ne comprend tou- s’est plongée avec conviction dans également la prestation prometteuse jours pas pourquoi ce Marseillais, l’un une trame dramatique suggérée par de l’un de ses protégés dans le bref des plus grands ténors actuels, n’est les continuos. Le public fut conquis air de Colline : Rémi Ortega. La direc- pas à l’affiche de l’Opéra de sa propre par cette poésie riche, sensible et tion expressive et fine de Jean-Claude cité… où il se contente de passer des fascinante. Quand donc cet Ulysse Latil, pour les cinq parties de l’ordi- vacances ! C’est maintenant ou jamais! reviendra-t-il visiter la région ? naire liturgique, a poussé les amateurs JACQUES FRESCHEL PIERRE ALAIN HOYET 28 MUSIQUE CONCERTS Amante et pénitente Cantates et sonates Avec L’amour de Madeleine, le 6 décembre à l’église Si le talent du contre-ténor Max Emmanuel Cencic Ste Catherine, spectacle conjuguant déclamation est indéniable, son récital du 27 novembre à St Victor et chant baroques, Euterpes a conclu son festival a également révélé une formidable flûtiste : automnal par un point d’orgue d’une grande Dorothée Oberlinger richesse littéraire et musicale Le timbre est chaleureux, vibrant, la En contrepoint, partageant la même technique sûre, les phrasés sont élé-

ai rsiaKer©X-D.R © Kiehr Cristina Marie postureextatique, Marie Cristina Kiehr gants, sans un brin de mauvais goût a interprété des pages de Charpentier et, par-dessus tout, le contre-ténor consacrées à Marie-Madeleine. Sa voix Max Emmanuel Cencic file quelques très «phonogénique», homogène sur pianissimi captivants, d’une rare tout le registre, adoptant un pur style beauté. Il arrive souvent que ces voix baroque (plat et peu vibré, douce- présentent un timbre un peu plat, mentornementéetconduitensoufflets) sombre… Ce n’est pas le cas chez cet a séduit la nombreuse assistance, en artiste au vibrato brillant et dont les Dieu qu’elle l’a aimé son doux Jésus particulier dans le prépondérant «Sola passages de registres sont impercep- la Marie-Madeleine évangélique ! videbat in antris», déploration funè- tibles. Sans rien enlever au talent de Jamais peut-être la prose de Bossuet bre de l’amante face au supplice du Philippe Jarrousky, davantage re- n’a exprimé avec autant de stridence Golgotha. connu aujourd’hui, on place Cencic à la passion dévorante qui a animé l’an- Autre sommet du programme : un sa hauteur ! Max-Emmanuel Cencic © X-DR cienne pécheresse… Sa méditation inédit Lamento della Maddalena com- Mais un virtuose peut en cacher un On regrette seulement d’avoir attendu intitulée L’Amour de Madeleine (avec posé par Monteverdi sur son célèbre autre. Dans ce programme alternant le bis pour voir Cencic abandonner les aussi des extraits de l’Elévation sur Lamento d’Ariane ! Même si on peut des Cantates de Haendel et Scarlatti, partitions dans lesquelles il s’est Marie-Madeleine de Bérulle) exhumée attendre, dans ce morceau de bravoure, les Sonates instrumentales du même continuellement plongé. À ce niveau- pour l’occasion par la musicologue une voix plus ample de tragédienne, Haendel et de Sammartini ont révélé là, particulièrement pour des pièces Catherine Cessac, a été lue avec exal- on n’a pas pour autant boudé son une flûtiste hors-pair. Dorothée qui sont presque des monologues tation par «le» spécialiste de la plaisir… D’autant que le Concerto Oberlinger a époustouflé par la sua- d’opéra, chanter par cœur s’avère in- déclamation baroque : Benjamin Soave, conduit des claviers par Jean- vité de ses ornements et sa virtuosité dispensable afin que le public capte, Lazar. Certes, il fallu quelques Marc Aymes, a tissé, au fil du concert, sans faille. Véritable Paganini des dans le regard de l’interprète, les sen- minutes d’adaptation aux «r» roulés, un échéancier soyeux de basse de flûtes alto et soprano, la musicienne timents passionnés qui s’expriment «an» ouverts à la gasconne, «t» et «s» viole, d’arpèges de théorbe, de cha- a furtivement volé la vedette à la tête par le texte ! prononcés en fin demot, «oi» convertis toyantes ritournelles de violons… d’affiche ! JACQUES FRESCHEL en «ouai», pour dépasser l’«exo- Une cérémonie lyrique qui a exalté le tisme» de la diction et recevoir de plein théâtre baroque des passions ! fouet toute la puissance du texte. JACQUES FRESCHEL Carte blanche romantique Dans le cadre d’une Ouverture Soliste, prété Intermezzi op.117 de Brahms, Yann Le Roux-Sèdes, au violon, chet est tiré en monocorde, le piano, l’ensemble Télémaque a proposé un pro- pièce composée à pleine maturité, nous offre ensuite À Paganini pour presque absent dans le premier mou- grammedemusiciensdits Romantiques testament pianistique. Associations violon solo d’Alfred Schnittke. Là vement, repart dans des montées au Ballet National de Marseille. Le de thèmes d’une grande profondeur encore une pièce d’une grande com- mélodiques avec le cor. Un 2nd mou- pianiste Nicolas Mazmanian a inter- et d’une grande virtuosité. plexité avec des trilles qui, mélangées vement vivassissimo et un 3e au © Agnès Mellon à des citations coupées par de grands rythme sauvage et précis, beaucoup coups d’archet, barrent la mélodie d’asymétrie dans cette pièce aux pour qu’elle ne se fixe pas dans notre accents de musique d’Europe de l’Est, mémoire. Interprétation talentueuse climat énergique, turbulent, au qui se termine en désaccordant le propos parfois très jazzy. Une pièce à violon. Intervient ensuite le cor joué la fois moderne dans son écriture, par Marilyn Pongy dans un Trio pour classique par sa forme et… roman- violon, piano et cor op.40 de Brahms tique par ses effets ! d’une expression grave et excen- DAN WARZY trique. L’Escalier du Diable de György Ligeti est probablement le clou de la soirée. Le piano solo nous emmène dans des crescendos incessants et vertigineux… Ensemble Télémaque / Ouverture Puis, en seconde partie du concert, soliste lors de carte blanche le trio de Ligeti : le violon et le cor aux musiciens de l’ensemble joué jouent un phrasé de six notes, l’ar- le samedi 6 décembre au BNM 29 Messiaen… heureusement ! C’est dans une atmosphère tendue qu’a débuté le Trio concert de l’O.L.R.A.P. au Toursky le 2 déc : des complice menaces de liquidation Dès les premières pèsent plus que jamais sur mesures on devine qu’on l’orchestre vauclusien et ne va pas entendre du les subventions nationales Mozart habituel ce 23 nov ont été ôtées à la scène à l’église Ste Catherine… marseillaise… C’est qu’avec le Centre Après des Danses sacrées et Danses Régional d’Art Baroque profanes de Debussy zébrées d’arpèges Euterpes, un Week-end de harpe, Véronique Muzy s’est instal- classique ne peut l’être lée au siège d’un énorme Steinway. tout à fait ! Certes, un tel instrument est inadapté Michel Bourdoncle © X-D.R. aujourd’hui au discours mozartien : de grammé le contemporain Challulau Mozart) a conduit habilement percus- fait, le dialogue orchestre/piano fut (remplacé par Mozart, plus porteur…) sionset cordes.On n’a que peu entendu, conçu au XVIIIe siècle pour un piano- a réconcilié le public avec l’émotion en fond de scène, le texte énoncé par forte à la puissance plus modeste ! musicale… et fait oublier un temps les voix raides et peu juvéniles de la Toutefois, certains artistes distillent les banderilles lancées contre la cul- Maîtrise Gabriel Fauré… Mais elles sur clavier moderne des perles d’une ture. Il faut dire que les Trois petites ont été avantageusement doublées grande suavité. On en fut loin… et le liturgies de la présence divine conser- par les Ondes Martenot, instrument style Sturm und Drang du 20e Concerto vent, depuis 1945, tout leur impact, vibrant et insolite grâce auquel Claude en ré mineur n’excuse en rien un jeu fondé sur l’alternance de mouvements Samuel Lévine a pu rendre justice sans nuance, déséquilibrant grossière- rythmiquement furieux et de lumi- (et justesse) à une oeuvre magistrale. ment les plans sonores ! neuses harmonies. Michel Bourdoncle JACQUES FRESCHEL Fort heureusement, l’hommage à a tenu avec maestria la phénoménale Messiaen, en seconde partie d’un partie de piano, quand Jonathan concert qui avait initialement pro- Schiffmann (plus à l’aise ici que dans

Un duo hétérogène Alice Pierlot © X-D.R Les cordes en boyau du Trio AnPaPié Le 18 nov, à la Faculté de Médecine de Marseille, si le violoncelle de François Salque résonnent merveilleusement. Dans a ravi les sociétaires… Le piano d’Eric Le Sage a quelque peu déçu les différents mouvements du pro- Souvent, dans un duo violoncelle et puissant ou feutré, reproduisant avec goût, techniquement irréprochable et gramme et le Divertimento en mi piano, le premier instrument revêt un une grande sensibilité le mezza-voce des doigts à revendre… mais le bémol de l’enfant de Salzbourg, le rôle de soliste, quand le second se d’un baryton ou d’une soprano, le pianiste s’est accroché vainement, son est chaleureux, les phrasés trouve davantage confiné à l’accom- second a répondu par un jeu frus- dans la Sonate en ré mineur de respirent, les tenues hésitent entre pagnement «faire-valoir». La position trant. Sans une once de faute de Debussy, la Sonate n°2 op. 117 de une blancheur toute baroque et une du violoncelliste situé devant le Francois Salque © X-D.R Fauré, les Pièces dans un style popu- vaporeuse coloration vibrée. Alice piano, lui tournant le dos, renforce laire de Schumann, à ce que son Piérot (violon) endosse le costume habituellement cette impression. compagnon de récital lui suggérait. du chant supérieur, quand Fanny Toutefois, les grands compositeurs de Plus à l’aise dans la Sonate n°3 op.69 Paccoud (alto) et Elena Andreyev musique de chambre s’attachent de Beethoven, Le Sage a pourtant (violoncelle) dessinent aux étages d’ordinaire à répartir soigneusement manqué de couleurs, de lumière, de inférieurs des arabesques rebondies. le dialogue instrumental : le dessin respiration, jouant souvent trop fort, Chose exceptionnelle dans ce réper- mélodique n’est pas l’apanage du seul trop dur, trop droit… toire : les musiciennes jouent par archet, le décor harmonique non- Visiblement ces deux-là ne vont pas cœur ! Cela n’est pas sans risque et il exclusivement dévolu au clavier… Ce ensemble ! Pris de cours pour les bis est arrivé à l’une, peut-être distraite fut le cas pour les opus exécutés lors (rejouant l’intégralité de la Sonate de par une volée de cloche intem- de la 1277e séance de la Société de Debussy !), hormis l’immanquable et pestive, ou l’autre, ailleurs, d’oublier Musique de Chambre de Marseille. superbe Après un rêve fauréen, le duo furtivement un bout de phrase Au demeurant, si le violoncelliste a laissé le public sur sa faim. musicale… Mais qu’importe ! Cette François Salque s’est avéré un JACQUES FRESCHEL posture originale a permis au public chantre bourré d’imagination, Éric Le de mieux suivre, au fil des regards Sage au piano a paru plus fade et complices et des gestes synchrones, moins inspiré… Au son large, ouvert le fin discours mozartien. et brut du premier, vibrant et lyrique, J.F. 30 MUSIQUE CONCERTS Entre India song et Barry Lindon C’est à une charmante promenade dans les partitions du 7e art que le Trio Pythéas nous a conviés le 5 déc à l’auditorium de l’hôtel Pullman, sur la Corniche de Marseille. Un décor de cinéma pour de la musique de film, ambiance feutrée et fauteuils confortables, une chaleur qui avait tendance à malmener les instruments, mais la magie musicale a su opérer. Après la présentation érudite et humoristique de Gérard Abrial, les trois musiciens ont fait preuve de leur indéniable talent. Ensemble Pytheas ©X-D.R La musique originale d’India Song de Carlos d’Alessio ouvrait le bal, dans lequel éternellement dansent Delphine Seyrig et Michaël Lonsdale ; la suite de Bach pour violoncelle seul, qu’interpréta Noël baroque avec brio Guillaume Rabier, nous replongeait dans l’ambiance torturée du huis clos de Sonate L’ensemble Pythéas et le ténor Laurent Blanchard communicatif, et transmettait ce mélange d’entrain d’automne de Bergman ; les accents de Williams ont proposé un concert de Noël rassemblant des et de sérénité au goût d’hiver. Celui que l’on peut laissaient les échos de La liste de Schindler répondre airs enjoués du répertoire baroque, et un quatuor connaître lors des fêtes de fin d’année… ce qui est à la Ballade n°1 de Chopin toujours dans le monde de Mozart à des auditeurs plus qu’enthousiastes. somme toute le but pour un concert de Noël ! tragique de la guerre du Pianiste. Le merveilleux On ne fut pas déçu de l’interprétation généreuse SUSAN BEL thème de Barry Lindon, pardon, du Trio n°2 de des Cantates de Bach ou des quelques airs de Schubert, fermait un spectacle qui connut les Haendel et Purcell par Laurent Blanchard, ni de Le Concert de Noël a été joué rappels qu’il méritait. Il est vrai que les noms des l’aplomb du quatuor. On regrette cependant l’acous- par Pytheas le 13 déc à l’église films venaient à l’esprit avant celui des compo- tique de l’Eglise qui n’a malheureusement pas Saint Ferreol (Marseille) siteurs, tellement ces morceaux leur sont liés d’une permis d’apprécier à sa juste valeur la transcription manière indissociable ! L’interprétation sûre et de Sitkovetsky pour trio à cordes des Variations magistrale de Marie-France Arakélian au piano, le Goldberg, rendue pourtant avec beaucoup de toucher sensible du violon de Yann Le Roux, ont précision et de solidité. conquis une salle comble. Un très joli moment de On put également entendre le Canon de Pachelbel musique sans cinéma ! et le fameux Aria de la Suite n°3 de Bach : le plaisir MARYVONNE COLOMBANI du quatuor à exécuter ces grands classiques était

Marathon Beethovenien au Théâtre de Nîmes Abdel Rahman El Bacha © Alvaro Yanez C’est un relais longue distance que emmène dans des mondes insoupçonnés en nous ont proposés sept pianistes pour adéquation totale avec les n° 21 & 22. parcourir l’intégrale des sonates de Les Dieux de la musique étaient au rendez-vous, Nîmes en était le théâtre ! Beethoven PIERRE-ALAIN HOYET Lundi 1er décembre, n° 10 et 11 avec humour en Ho Jeong Lee © X-D.R guise d’échauffement. Puis, le tempo allègre du sostenuto de la Clair de lune nous fait craindre le pire… Jean-Efflam Bavouzet assume ses choix et tient la route avec cohérence et sans défaillance pour la suite : tout est enchaîné avec brio et le pianiste, un pied qui pulse en dehors du siège, se libère avec les n° 12, 13 et 18. Ça swingue chez Beethoven et ça court d’un pas jubilatoire à Nîmes! Mais il y en aura pour tous les goûts : on enchaîne avec Andrei Korobeinikov époustouflant de force, d’assurance et de vitalité (Apassionata et op 101 & 109...) en regard de la grande sensibilité d’Emmanuel Strosser. C’est le contraste école Française et Russe que panache avec brio Claire Désert le lendemain. Les hommes n’ont qu’à bien se tenir et chapeau bas Mesdame : Ho Jeong Lee confirme le lendemain dans La Pathétique. Entre ces deux dernières, Abdel Rahman El Bachat. Que dire ? Il est hors compétition : sa fluidité nous 31 Soie, Pour 3 euros béton, et 2 héros Ébène Beau programme chantent et les timbales ponctuent, sensible. L’alliage des timbres avec les au Galet de St-Martin Mozart est bien là et on s’attend à cordes est magnifique dans le mou- de Crau dans le cadre voir arriver Susanna et Figaro ! En vement lent et la cohésion confirmée lieu et place Anne-Marie Girard nous dans le rondo et les entrées qui ga- du Festival des Nuits livrent un ultime Concerto n° 27 KV gnent en confiance au fil des refrains. pianistiques le 22 nov 595 en si bémol dans un style parfait Quel(s) couple(s) ! Parfois, les mo- Mozart et Beethoven successive- et épuré (une pédale un peu trop destes (Anne-Marie et Thomas Girard ment interprétés par Girard & Girard dosée ou un effet de l’acoustique enseignent à la dynamique Ecole de (Anne-Marie et Thomas) : un couple sacrée ?), un jeu sobre perlé et déli- Musique intercommunale des fait écho à un autre couple, sous la cat, tout en nuances. C’est Mozart ! Alpilles de la Camargue et la Crau) bénédiction de l’Orchestre Lyrique Anne-Marie se libère au fil de l’œuvre, n’ont rien à envier aux plus grands... d’Avignon (en difficulté, et sous tu- l’orchestre répond avec tact et entre- et mériteraient d’être plus souvent telle... voir Zib 12 et 13) dirigé par tient la sagesse mesurée et le bon sur scène ! Quatuor Ebene © X-D.R Volker Schmidt-Gertenbach (au goût de la pianiste. PIERRE-ALAIN HOYET Le Quatuor Ebène, tarif de 3 euros à l’initiative de la Thomas Girard prend le relais après accompagné par Éric Mairie de St-Martin de Crau...). une virile Ouverture des créatures de Le Sage lors du concert Une Ouverture des Noces pour chauffer Prométhée, caractère auquel ne déro- du 23 nov au Méjan l’orchestre avec brio et tonicité : les ge pas le 5e Concerto totalement à Arles, a fait entendre cordes fusent, les vents contre- révélé par son interprète, engagé et tous les états de la matière… Le béton, c’est cette magnifique interprétation du molto vivace central Un pianiste aux doigts d’or… de Schumann, bissé bien évidem- ment (Quintette pour piano et cordes Soirée merveilleuse ce 25 nov à l’opéra d’Avignon, Ce prodige aux doigts d’or, âgé de 40 op 44). La soie, c’est cette révélation qui a offert sa scène au pianiste russe mille fois auréolé, ans, enchante les scènes internatio- de l’écriture dense et imbriquée de et partout triomphant, Boris Berezovsky nales depuis de nombreuses années. Fauré (Quintette pour piano et cordes Un changement de programmation op 89) qui suggère une trame de Boris Berezovsky © X-D.R nous a permis d’écouter la sonate tissu noble. Tour de force supplémen- Waldstein de Beethoven (au lieu de taire : ils passent de Fauré à Schumann, l’Appassionata ) dans laquelle le pia- stylistiquement très différents, sans niste a usé d’une palette sonore rompre avec leur cohérence. Nos musi- infinie, mêlant sobriété du geste et ciens révèlent, totalement engagés beauté du son. dans leurs interprétations, ce qui Dans les Scherzi de Chopin (remplaçant s’est passé en cinquante ans d’his- la Wanderer-Fantaisie de Schubert), il toire de la musique. C’est de la haute fut enchanteur, comme si, par magie, couture, et la révélation juste et pas- des milliers de perles délicates s’en- sionnée d’une architecture musicale volaient du clavier… Le summum de de haut vol. la perfection (car il faut croire qu’elle PIERRE-ALAIN HOYET existe !) fut atteint dans la Sonate en Si mineur de Liszt: parti sur un tempo diabolique -mais n’était-ce pas pour donner toute sa place à Méphisto présent dans l’œuvre ?-, Berezovsky a joué cette sonate de haute voltige en rendant au compositeur toute son âme: l’on peut parler ici, sans hésita- tion, d’interprétation transcendante! Il fit salle comble, fut chaudement et longuement applaudi, et revint offrir deux bis. Car ce soir-là le piano était bien possédé, mais non par le Diable de Franz Liszt : par Boris Berezovsky, divin poète virtuose ! CHRISTINE REY 32 MUSIQUE CONCERTS Scénographie ne chante point Récitation Au Grand Théâtre de carton à haut-fond, des tasses rangées Le Trio Wanderer, depuis Provence, le 11 décembre, sur une table, la théière, et puis les vingt ans qu’il «voyage» à fleurs et son vase, la nappe… et la travers le monde, a acquis on annonçait du théâtre table elle-même, le tapis, les rideaux… musical : I went to the avec la tringle !… (et tout reposi- une réputation telle qu’une house but did not enter… tionner ensuite, à l’inverse, sur le même affiche à leur nom suffit On n’y est pas entré tempo assommant) ; à écouter des à emplir les salles de non plus ! mélodies raides, polyphonies sylla- concert… Ce fut le cas biques rasoir, qui ne chantent jamais, du vaste auditorium du Comment ! Tu n’as pas vu la dernière ou alors chevrotantes, des harmonies Grand Théâtre de Provence, création d’Heiner Goebbels ? Avec plates sur des rythmes lancinants, dans le 20 novembre quelle économie de moyen ce metteur une chambre d’hôtel à la lumière d’un en scène allemand exerce une irrépres- projecteur de diapos au cadrage trop Si le mot «Wanderer» évoque assu- sible fascination sur les spectateur ? large… rément Schubert, il n’a jamais été aussi Comment il cultive la réserve naturelle Quel dommage qu’une telle débauche pertinent que pour ce récital-là ! du Quatuor Hilliard…. et jusqu’où ce de moyens esthétiques s’avère si sté- Songez que les mélomanes ont entendu compositeur scrute, fragmente les rile! Car la scénographie est léchée, deux des plus beaux joyaux de la textes z’essentiels et énigmatiques de réglée au pied à coulisse : virtuosité musique de chambre : ses illustres Trios T.S. Eliot, Maurice Blanchot, Franz dans la création des lumières, am- © Agnès Mellon en si bémol et mi bémol ! Tous Kafka, Samuel Beckett, exploite leur biances sonores finement travaillées attendaient le fameux Andante de «méfiance envers les formes narratives (au deuxième tableau particulièrement l’Opus 100. On n’a pas été déçu… mais linéaires», contradictions et question- réussi), décors impressionnants… Et pas non plus totalement emballé ! nements poétiques sans réponse, «sans les quatre voix anglaises, en harmonies, Certes, le trio français est particu- contenu»… leur échec ? possèdent une suavité qui fait lièrement remarquable dans le soin Disons-le tout net : on s’ennuie à ardemment regretter de ne pouvoir les apporté au mixage des timbres, tout en observer dans le silence, de longues entendre dans Pérotin ou Ockeghem, minutes durant, quatre silhouettes qui leur vont si bien ! débarrasser au compte-goutte, dans un JACQUES FRESCHEL Les enfants et la Mort Le théâtre des Salins À l’écoute du conte de Grimm Le ques minutes d’entracte! Dans deux pas seulement des personnages, comme est bondé de bambins qui vaillant petit tailleur (vous savez : «Sept ronds de lumière, une clarinettiste et la Princesse ou le Roi, mais aussi des piaffent, le 21 nov. Sur d’un coup !») narré par la comédienne un contre-bassiste se font face, «Idées» que l’on n’associe que rarement le plateau, les musiciens Julie Cordier, les bambins jubilent, car dessinent des contrepoints énigma- au monde de l’enfance : Dieu, La Mort… les sonorités illustratives (glissandos tiques. Le langage musical s’avère C’est que La Mort marraine de Grimm de Télémaque chauffent figurant la chute des mouches, combat subitement plus moderne, l’atmosphère est un conte à part, offrant de nom- leur biniou. Pour capter percussif des géants, fanfare crâneuse vire à l’étrange… breux niveaux de lecture : biblique, l’attention, le maestro de cuivres, féerie toute ravélienne…) Dès la présentation des motifs musi- symbolique, analytique… Au premier Raoul Lay entre et salue habilement composées par Tibor caux, à la manière de Pierre et le loup, degré, à son écoute, un enfant ordi- lentement : le silence Harsànyi renforcent l’intérêt du récit. on comprend qu’on n’a pas affaire à nairement constitué risque au mieux se fait! Et le tour est joué ! simple un conte naïf. À la différence de d’être angoissé, au pire de décrocher… Mais l’enjeu est tout autre après quel- Prokofiev, les thèmes ne représentent Mais ce ne fut pas le cas à Martigues, en partie grâce au jeu habile et mini- © Agnès Mellon maliste de Julie Cordier… pas un brin racoleur ! La comédienne laisse la place à l’imaginaire et, surtout, elle s’efface quand il le faut devant la partition du compositeur. La facture moderne et lyrique de Raoul Lay, poétique, tantôt puissante ou sarcastique, doucement dissonante, colle à souhait à l’univers onirique et implacable du récit. Au final, le pari est gagné : non seulement ce conte difficile a fasciné, mais les pitchouns ont écouté sans ciller… de la musique contemporaine ! Vous savez, celle qu’on qualifie sempiternellement d’inaudible et d’élitiste… JACQUES FRESCHEL 33 soignée La forza tranquilla manquant de vie, de fantaisie, de Le concert symphonique, donné le 12 décembre dans fragilité, de risque… d’émotion ! l’auditorium du palais du Pharo, a révélé un formidable Le piano délicatement coloré de Vincent pianiste italien : Andrea Lucchesini Coq a pâti d’une utilisation abusive de la sourdine (sans doute par peur de couvrir les cordes) : du coup il a parfois manqué de corps dans les contre- chants. Au violoncelle profond et lyrique de Raphaël Pidoux, le seul à nous entraîner, au-delà des notes, vers des rivages rêvés trop furtivement abordés, le violon de Jean-Marc Trio Wanderer © Achim Liebold Phillips-Varjabédian a répondu par des nuances subtiles, correspondances sonorités ni très nettes, ni très synchrones des phrasés : leur technique rondes… un peu sèches ! est éprouvée, l’entente magistrale ! De Ceci dit, la leçon est toujours belle plus, dans ces opus hyper-connus, ces quand elle est signée Schubert ! trois-là adoptent des choix personnels : JACQUES FRESCHEL comme celui récurrent de prendre finement appui sur la pulsation, afin d’accorder aux mouvements une unité © X-D.R stylistique qui les tirent élégamment du C’est dans le 2e mouvement du 4e initial, une puissance virtuose tout coté de la danse. Cependant, leur jeu concerto de Beethoven qu’Andrea expressive. L’abondant public de léché et implacablement raisonné a, de Lucchesini a scellé son succès. Par la l’auditorium, lui aussi vaincu, a temps à autre, semblé un peu récité, douceur de son chant et de finalement laissé partir le musicien se souveraines suppliques, il a, reposer en coulisses, après deux patiemment, fait céder la formation brillants bis, cerises rougeoyantes sur orchestrale, l’emportant dans les un savoureux gâteau. ultimes mesures. Plutôt qu’Orphée Emmené par le volubile et pointilleux pleurant Eurydice, on a imaginé le chef italien Evelino Pido, l’Orchestre Baroques parodies… sage Sarastro chantant avec la voix Philharmonique de Marseille a Ce mois-ci, l’ensemble des Festes d’Orphée a proposé de Pamina, luttant contre la répondu positivement à son sens du deux programmes à Marseille et Aix : Splendeurs puissance négative de cordes détail et des respirations. Dans «La grandiloquentes… À côté d’un jeu Grande» Symphonie n°9 de Schubert, du baroque italien et Grands motets provençaux en Noël d’une sensibilité supérieure, Andrea la qualité des solos de l’harmonie a point précis d’Histoire musicale. Celui Lucchesini a fait entendre, dans les estompé les travers d’une œuvre, de la reconversion, puisque nous mouvements allants, une sonorité certes novatrice et épique, mais avons pu en apprendre un peu plus d’une rare homogénéité, claire et s’égarant parfois dans des redites sur le procédé de la parodie dans les ronde, sans dureté, un style perlé, fastidieuses. C’est qu’on préfère sans «Noëls», transformant une musique souple, facile et élégant, adjoignant doute le Schubert plus intime des pré-existante en récit de la naissance quand nécessaire, comme dans Lieder et de la musique de chambre ! de Jésus ! On reconnaît alors, l’impressionnante cadence de l’allegro JACQUES FRESCHEL amusés, le thème De bon matin repris par Auphand pour son Dixit. On Petit choeur des Festes d'Orphée © X-D.R repart heureux d’en avoir appris Si les qualités musicales de l’en- encore un peu sur le répertoire semble instrumental, tout comme des baroque provençal, qui gagne chœurs et des solistes, est indé- décidément à être connu ! niable, et fort agréable, le premier SUSAN BEL programme s’avéra peu surprenant : le choix des œuvres de Lotti, Monteverdi et Carissimi manquait un peu d’originalité, ou d’intérêt musical. On ne peut en dire autant des Motets provençaux, qui composaient un répertoire moins attendu et qui pourtant paraît nettement plus familier ! Car le concert, construit de manière pédagogique, présentait aux auditeurs des œuvres illustrant un 34 MUSIQUE CONCERTS Opérettes à la fête Jeunesse Lyrique Entre Noël et l’Epiphanie, un peu sur la Canebière, à l’Odéon, Pour bébés… et femmes Rossini & Beaumarchais fête rime avec… opérette ! pour l’inusable succès de Francis enceintes La Compagnie Opéra éclaté repré- A Marseille on chante avec La Veuve Lopez Quatre jours à Paris (les 17 et Voilà une expérience rare et sente le Barbier de Séville de Rossini Joyeuse une délicieuse «Heure ex- 18 janv à 14h30) et à Miramas pour originale! Si Raoul Lay a déjà en remplaçant les récitatifs de l’opéra quise qui nous grise…» (les 31 déc. 2, un rare «bouffe» signé Delibes par «composé pour le jeune public avec la par les extraits de la pièce éponyme 6 et 8 janv. à 20h, le 4 janv à 14h30), Les Brigands : La cour du Roi Pétaud complicité d’Olivier Py, ou encore à de beaumarchais. Mathias Vidal, quand à Avignon (également pro- (le 16 janv à 20h30). partir de contes des frères Grimm», il Jean-Michel Ankaoua, Hermine grammé par le Théâtre de Nîmes), va encore plus loin dans Nokto. Avec Huguenel, Christophe Lacassagne, on se souvient de Luis Mariano et de MARSEILLE. Opéra 04 91 55 11 10 / la complicité du metteur en scène Jérôme Varnier, Alain Herriau sont son fameux falsetto dans Le Odéon 04 96 12 52 70 - Jean-Pascal Viault, il conçoit un dirigés du piano par Corine Durous, Chanteur de Mexi…iii coooh!!! (les http://marseille.fr spectacle qui prend les bébés au dans une mise en scène d’Olivier 27 et 31 déc à 20h30, le 28 déc à AVIGNON. Opéra-Théâtre 04 90 82 sérieux. Le temps s’y étire, aux sons Desbordes. 14h30). 81 40 - www.mairie-avignon.fr éthérés d’une voix de soprano, d’une DRAGUIGNAN. Le 4 janv à 17h.- Si à Toulon on danse sur Theodorakis NÎMES. Théâtre 04 66 36 65 10 - flûte, de percussions, et conduit au Théâtre pour un Zorba le Grec accompagné http://www.theatredenimes.com rêve en stimulant l’imaginaire… 04 94 50 59 59 - en direct par le chœur et l’orchestre TOULON. Opéra 04 94 92 70 78 - www.theatresendracenie.com de l’Opéra municipal (les 27 et 31 déc www.operadetoulon.fr LE REVEST. Les 6, 8 et 9 janv. à 20h, le 28 déc à 16h), on patiente MIRAMAS. La Colonne 04 90 50 05 à 19h30. Maison des Comoni Diva au Faron 26 / www.scenesetcines.fr 04 94 98 12 10 - La soprano Adina Aaron, qui vient de www.polejeunepublic.com triompher dans Aïda à Marseille, Baroque http://lyonne-en-scene.com - chante Vienne et des airs d’opéras et Noël www.ensemble-telemaque.com d’opérettes pour le Concert du Nouvel-an toulonnais, accompagnée L’ensemble Eleusis (voix, flûtes, AIX. Le 15 janv à 18h30 par l’orchestre maison (dir. Giuliano harpes et viole de gambe) dirigé par au Musée des Tapisseries Oh ! La soprano Annabelle Playe, à partir Carella). Corine Tièche joue Charpentier Bach MARSEILLE. Le 16 janv à 20h30 Adina Aaron © X-D.R d’opus d’Aperghis, Berberian, et des Noëls traditionnels. à la Bastide de la Magalone Baroques Graffiti 04 91 64 03 46 - Cage… explore le son, manipule la MARSEILLE. Le 20 déc à 17h – www.baroquesgraffiti.com langue, détourne le maniement Eglise adventiste de Saint-Tronc - d’objets, crée un monde poétique à Entrée libre Musique spirituelle l’usage des tous-petits (dès 3 ans). 04 91 26 20 14 du soir: le temps de Noël Mozart à Paris Le chœur La Passacaille dirigé par MARSEILLE. Cité de la Musique – Auditorium Un étonnant voyage baroque pré- Françoise Espitalier, accompagné à 04 91 39 28 28 - sente, autour de Sonates de Mozart, l’orgue et par un quatuor à cordes, www.citemusique-marseille.com des pièces de compositeurs au- chante une Cantate de Buxtehude, un jourd’hui oubliés que le jeune Choral de Mendelssohn et un chœur Salzbourgeois rencontra lors de son extrait du Messie de Haendel. second séjour dans la capitale Solistes française. Sharman Plesner (violon) AIX. Le 20 janv à 19h – Chapelle des Oblats Son et lumière et Jean-Paul Serra (pianoforte) Le clarinettiste Jean-Christian jouent donc Johann Schobert et le Festes d’Orphée Michel choisit de fêter ses 40 ans de TOULON. Le 8 janv à 21h Opéra Chevalier de Saint Georges. 04 42 99 37 11 - www.orphee.org carrière dans l’abbaye où il donna … Et récital du CNIPAL le 15 janv. jadis son premier concert : «jazz et à 19h au Foyer. musique sacrée à résonance spatiale» 04 94 92 70 78 - Jazz avec «effets laser volumétriques en www.operadetoulon.fr Scène ouverte AIX. Le 20 janv à 20h30 au Grand chorégraphie de lumière». MARSEILLE. Les 18 et 19 déc Le jazz-band des élèves et ensei- Théâtre de Provence. Mozart Short Cuts à 20h30 à St-Victor. gnants de la Cité de la musique fait 04 42 91 69 69 - Il y a quelques temps, Laurence Espace Culture : 04 96 11 04 61 - le bœuf en sous-sol. www.legrandtheatre.net Equilbey (artiste associée au G.T.P.) www.jean-christian-michel.com MARSEILLE. Le 12 janv à 21h à La concevait pour Nîmes un «opéra Cave 16 rue B. Dubois. Entrée libre Modern Pop Quartet imaginaire» de Mozart , mis en scène Régis (vocal et percussions) et Boris le Grand par Macha Makeïeff et Jérôme André Ceccarelli (batterie), père et Immanquable ! Le Cours Mirabeau Deschamps et accompagné par 04.91.39.28.28 - fils, accompagnés du pianiste Eric attend, après son triomphe avignon- l’Orchestra of the age of www.citemusique-marseille.com Legnini et du contrebassiste Laurent nais (voir p.31) le tsar des pianos enlightenment. Cette suite d’airs Just Jazz quartet Vernerey reprennent les titres de leur Boris Berezovsky dans Beethoven, poursuit à sa manière l’exploration Schubert et Liszt. Un phénomène de Le batteur aux influences africaines dernier album pour un voyage swing aixoise de l’œuvre de Wolfi. puissance virtuose et de musicalité ! Aldo Romano improvise avec Henri de Broadway à Londres. AIX. Le 22 janv à 20h30 au Grand Texier (contrebasse) Géraldine Laurent AUBAGNE. Le 20 janv à 21h AIX. Les 15 et 16 janv à 20h30 Théâtre de Provence (saxophone) et le clarinettiste Mauro au Comœdia au Grand Théâtre de Provence 04 42 91 69 69 - Negri. 04 42 18 19 88 - 04 42 91 69 69 - www.aubagne.com www.legrandtheatre.net www.legrandtheatre.net 35 Musique de chambre Symphonique Quatuor Gabriel Tomasi en portrait L’an neuf Trois orchestres Fondé en hommage à Fauré il y a 20 La Cité de la Musique ouvre ses L’année 2009 commence en fanfare Exceptionnel ! L’Orchestre National ans, l’ensemble français interprète les portes pour rendre hommage, deux dans la Cité des papes avec Les 100 de France (dir. Daniele Gatti) joue Quatuors avec piano n°1 en ut mineur jours durant, au compositeur Henri violons tziganes de Budapest (le 3 la 4e Symphonie de Brahms et se joint du dit Fauré et l’Opus 23 du belge Tomasi disparu il y a une quarantaine janv à 20h30) suivis du concert du à Mihaela Ursuleasa pour le 3e Joseph Jongen… à découvrir ! d’années. À l’occasion de la parution Nouvel an 2009 par l’OLRAP et les Concerto pour piano de Bartok (Le MARSEILLE. Le 6 janv de la première biographie du Ballets de l’Opéra sur des musiques 20/12) avant que l’Orchestre A 20h30 à la Faculté de Médecine musicien (dont le talent et l’aura signées Piazzola et Offenbach (le 10 Français de Jeunes dirigé par S.M.C.M. adhésions 04 96 11 04 60 méritent bien davantage !), Jacques janv à 14h30 ou 20h30, le 11 janv. à Dennis Russell ne prenne le relais Bonnadier anime une rencontre avec 17h – Entrée libre). dans la 8e symphonie de Du Danube à la Volga l’auteur Michel Solis (entendez son AVIGNON. Opéra-Théâtre Chostakovitch et, en compagnie de L’Opéra municipal poursuit son cycle fils Claude Tomasi) avant la 04 90 82 81 40 Laurent Korcia pour le Concerto pour de musique de chambre en affichant projection de deux films- www.mairie-avignon.fr violon de Tchaïkovski (le 23 déc, voir des solistes du crû : Augustin documentaires sur ce Corse né à page 72). Bourdon (violon), Alain Geng Marseille (le 8 janv. à partir de Violon et orchestre Emmanuel Krivine enfin, à la tête (clarinette) et François Killian 18h30). de La Chambre Philharmonique (piano) jouent Berg, Khatchatourian, C’est ensuite à l’Ensemble Pythéas dirige Haydn sur instruments Stravinsky et Bartok. au grand complet, emmené par le d’époque (le 10 janv). MARSEILLE. Le 10 janv violoniste Yann Le Roux-Sèdes, de à 17h au Foyer célébrer la musique de chambre de AIX. Concerts à 20h30 04 91 55 11 10 - Tomasi. Une œuvre multiforme, au Grand Théâtre de Provence http://opera.marseille.fr lyrique et sensuelle, s’échelonnant de 04 42 91 69 69 - 1928 à 1969 (le 9 janv. à 21h – www.legrandtheatre.net Bicentenaire Haydn & Approche musicologique par Lionel Mendelssohn Pons à 19h30) L’un est mort en 1809, l’autre est né MARSEILLE. Cité de la Musique – cette année-ci ! Les Musiciens Auditorium 4 rue Bernard Dubois Renaud Capucon © X-D.R Fin de tournée d’Hélios jouent deux trios pour 04 91 39 28 28 - www.citemusique- À Marseille, Louis Langrée dirige Noëls du Cg13 piano, violon et violoncelle de ces marseille.com L’Apprenti sorcier de Dukas, et la Suite Les traditionnels concerts de Noël du deux-là ! L’un est en la… et pas en n°2 de Daphnis et Chloé de Ravel. Conseil Général des BdR. s’achèvent si… l’autre est en ré ! L’orchestre philharmonique accompa- au pied du sapin, juste avant la dinde AIX. Le 14 janv à 18h30 – gne également le violoniste Renaud aux marrons ! Musée des Tapisseries. Capuçon dans Tzigane du même Ravel Tchoune et ses Gitans sont à 04 42 21 69 69 - Brigitte Engerer © X-D.R et l’Introduction et Rondo capriccioso Marseille - Eglise St-Just le 19 déc à www.aixenmusique.fr de Saint-Saëns 19h, à l’église de Miramas le 20 déc MARSEILLE. Le 10 janv à 20h à l’Opéra. à 21h et sur l’esplanade de la Cantiques d’Amour 04 91 55 11 10 - Tourette le 21 déc à 17h. On attend, au bord du Rhône, la http://opera.marseille.fr La Maîtrise des Bouches-du-Rhône pianiste Brigitte Engerer dans Bach, chante aux Milles - Eglise Sainte Schubert et Liszt, en compagnie du Marie Madeleine le 19 déc à 20h30, comédien Daniel Mesguich qui lira Marseille - Eglise Saint-Pierre Saint- des poèmes de Baudelaire, Aragon, Paul le 20 déc à 19h45, à Fos - Eglise Lamartine et Verlaine. Saint Sauveur le 21 déc à 17h, à ARLES. Le 23 janv à 20h30 au Fontvieille - Eglise Saint-Pierre Es Méjan Liens le 22 déc à 20h30, Martigues 04 90 49 56 78 – www.lemejan.com Salle du Grès le 23 déc à 20h30. Picante mêle mélodies aztèques et boléros mexicains à Marseille - Eglise Contemporain Saint-Mître le 19 déc à 20h - Eglise Derniers cris ! L’école de Vienne Saint-Henri le 20 déc à 20h30 - L’ensemble vocal Musicatreize complète et affine son L’Ensemble Télémaque poursuit sa série de ses concerts Eglise Saint-Pierre le 22 déc à 20h30 programme de concert sur le thème des «Cris». A côtés thématique en Portraits composés. C’est au tour du - Eglise Saint-Loup le 23 déc à 20h30 des inusables Cris de Paris de Janequin, Roland fameux trio viennois, géniteur d’un pan entier de la ou Salon - Collégiale Saint-Laurent le Hayrabedian dirige Cries of London de Berio, Les Cris de musique du XXe siècle, de passer sous le moule analytique 21 déc à 17h. Marseille de Régis Campo, et… Cris de Ohana. De et pédagogique de Raoul Lay. Après cela les «Libertés et Convivencia chante les classiques de surcroît, on découvre une création : les derniers Cris de contraintes» de la «Musique atonale» feront partie des Noël. à Aix - Eglise d’Encagnane le Nancy de Jean-Christophe Marti et Jean Poinsignon. conversations les plus courantes du plus profane des 19 déc à 19h ; Marseille - Eglise de amateurs… Avec évidemment, au programme, Berg, l’Immaculée Conception le 20 déc à MARSEILLE. Le 15 janv à 20h au Temple Grignan. Webern et un chef-d’œuvre : le Pierrot Lunaire d’Arnold 20h30 - Eglise du Canet le 22 déc à Atelier d’écoute autour du programme le 13 janv Schönberg (Brigitte Peyré : soprano). 20h - Eglise Ste Emilie de Vialar le 23 à 17h à l’Alcazar – Entrée libre MARSEILLE. Le 23 janv. à 19h. déc à 20h30 ou Gignac - Espace 04 91 00 91 31 - www.musicatreize.org Archives départementales Gaston Defferre. Marcel Pagnol le 21 déc à 17h. 04 91 08 61 00 - ww.ensemble-telemaque.com JACQUES FRESCHEL 36 MUSIQUE CONCERTS Un écrin de voix dans un monde de brutes… Même si elles n’aiment pas être «mises en boîte», ces nouvelles artistes suivent une même direction, un chant clair et retenu et une guitare en bandoulière, traçant la même voie qu’avait emprunté Tracy Chapman il y a vingt ans... Soyons chauvins, commençons par Soha, qui retrouvait en rappel l’autre fil conducteur unissant toutes ces ici son ancien employeur, l’Espace Julien (28/11), sur femmes : s’approprier le rythme reggae pour y diffuser un scène cette fois : pas dépaysé par son flow reggae-ragga, message de paix... le public se laissa porter par les accordéons et la guitare Leurs disques sont à ranger à coté de ceux de Césaria de Jamba, de Cuba au Cap vert, en passant par Paris (une Evora, Norah Jones, Tuck & Patti, Rokia Traore, Jill Scott superbe reprise des Ptits papiers de Gainsbourg). Les ou Erika Badhu, (de telles références évitent les carnets de voyage de Grace, en première partie, démarrent étiquettes!), mais aussi Annabel Lamb ou Eddie Brickell, aux USA, berceau du folk, qu’elle apprivoise avec des deux artistes des années 80, dont leurs voix semblables en parents musiciens. Mais c’est l’Afrique là aussi qui évitera font l’écho exact. Ils suivent la vague de succès lancée de s’échouer dans un virage pop trop mièvre, laissant par Ayo, qui devrait laisser le même sentiment au Dock place à une belle émotion. des Suds le 20 janvier prochain : Capitaine de ce Tout comme Mélissa Laveaux, qui partageait la scène renouveau folk-cool au féminin, et dans les mains du avec Eric Bibb à Cavaillon (5/12). Cette jeune pousse de reggae-man Patrice, elle chantera les chansons de son Melissa Laveaux © Herve Milliard@artimage 23 ans «veut être accessible», et tisse un lien entre Folk deuxième album, et devrait elle aussi nous faire rêver, et Blues, jouant sur sa guitare de façon percussive, pour apaiser nos consciences, et dispenser une chaleur se rapprocher peut-être des ses racines caribéennes. Sur bienfaisante. son My Space, une démo de huit titres l’a fait signer en X.RAY France pour sortir Camphor and Copper, sensible et attachant, qui attend désormais une diffusion au Canada. La France a réservé le même accueil à la militante Asa, Camphor and Copper prix Constantin, et déjà plus de 70 000 albums vendus, Melissa Laveaux débordant de bonheur et de chaleur sur la scène de No format - Universal l’espace Julien (10/12). Son Fire in the mountain a illustré Ayo, le 20 janv au Dock des Suds Hissé haut, le niveau ! Baptisé du nom du fruit emblème de la Réunion, la Margose, voici que s’arrête en rade de Marseille un voilier fédérateur qu’aucun amateur de musique ne laissera filer... Avec dans ses cales un programme universaliste, ils ont naturellement qui tient la route, résumé sous une accepté un tel projet, des parti- bannière universelle : Mieux vivre cipants d’Urban Creole avec le ensemble, ici et ailleurs. À son bord, marseillais David Walters, aux plus le créateur de ce festival Margose, virtuoses des jazzmen d’aujourd’hui, Christian «Acecool» Ortolé, qui anciens d’Ultramarine ou Sixun, avait déjà amené Lockwood sur les s’illustrant aussi au festival Carib’in rivages d’Arménie au Dôme en 2007. jazz de Paris et ici programmés sous L’ancre sera jetée dès le 14 janvier, le nom de Sakesho... On pourra donc dans les Studios Decanis, pour déambuler autour de techniciens hors l’inauguration d’un Web café littéraire pairs comme Sylvain Luc, toucher les «Aimé Cesaire», pour «aimer ces baguettes (bio ?) de Steve Gadd, aires», de rencontres et d’ouverture participer à une masterclass en com- culturelle avec les Antilles. pagnie de Moktar Samba, se rincer David Linx © X-D.R Sur le pont supérieur, une «plate- les oreilles pour des rencontres devrait pas décevoir vu le nombre et À l’Espace Julien jeudi 15 (Sandra forme promotionnelle dotée d’un esprit hautes en couleurs (comme Sandra la qualité des musiciens s’exprimant Nkaké, David Walters, Gérald collectif» et une place réservée au Nkaké), et se mettre à l’œuvre pour sur ce sujet... Toto, David Linx et invités) et jeune public, avec des contes, pro- sauver la planète. Du cocktail de X RAY samedi 17 (collectif Playtime par jections vidéo, concerts, répétitions, bienvenue offert aux adhérents (non Acecool, Zépis, Malafa, Blanc interventions d’artistes et associa- alcoolisé !) à l’affiche du dernier soir, Acecool présente du 14 au 17 Métis et invités, puis concert tions. unissant Richard Bona, Sylvain Luc janvier le festival Margose, exceptionnel Richard Bona, Sylvain Mais ce qui rend original un tel et Steve Gadd, ce festival, contre l’inauguration de l’espace Aimé Luc, Steve Gadd et invités) débordement d’activité, c’est l’iden- vents et marées, s’implique et met le Césaire, masterclass inédites, Renseignements tité éco-citoyenne de tous ses cap vers une vision alternative et concerts. aux Ateliers Decanis participants : tous issus du courant bourrée de bonnes intentions, qui ne www.margose-festival.com Débordements kaléidoscopiques Sensibiliser et faire partager la passion Boulez, Luciano Berio, Mauricio Kagel du free-jazz aux étudiants dans des ou encore Stockhausen. Homme aux espaces inattendus, tels sont les défis multiples facettes, il utilise des cris que cinq étudiants en Master Manage- (à la manière des tennismen !) pour ment en Manifestations Culturelles de évacuer les trop-pleins d’émotion que l’IMPGT d’Aix-en-Provence ont decidé lui procurent les improvisations avec de relever pour couronner leur ses acolytes. Bruno Chevillon est dernière année d’étude. probablement un des contrebassistes William Memlouk, spécialiste de la français les plus recherchés. Par son chose jazzistique, nous propose une écoute d’une acuité sensible, il donne introduction très documentée juste la réplique d’une façon très intel- avant le concert. Il a parlé de «la ligente et intuitive aux propositions capacité de ces musiciens à se mettre de ses partenaires. Ses réponses sont en danger», et l’aventure mettra le toujours la démonstration d’une trio sur le fil du rasoir. Michel Portal éloquence extrêmement riche et (clarinette, saxo) a pratiqué dans ses créative. Quant à Daniel Humair, jeunes années les musiques populaires c’est un batteur qu’il faut absolument basques mais a également collaboré à voir jouer ! Pour prendre en compte des projets musicaux avec Pierre toute la dimension de sa gestuelle, de Michel Portal © Georges Bartoli son humour et de son énorme talent. DAN WARZY

Ce concert a été donné le 29 nov au Théâtre du Jeu de Paume à Aix-en-Provence en partenariat avec Les concerts d’Aix- www.concertsdaix.com Petit conte de Noël au soleil Il était une fois deux coup de bambou : ils voulaient acolytes musiciens, produire un de leurs intrumentaux, le l’un grand, l’autre plus DST riddim, et faire venir toute la hype dancehall y poser leurs voix. petit, qui allaient mener C’est de cette façon que le reggae se de front un rêve fou… vend en Jamaïque, et ce coup fut leur La vie dans les vignes provençales première bouffée de succès, aux n’est pas celle de Kingston, mais cotés de Junior Kelly, I Wayne, grâce à des connections efficaces, Al Fatan Mojah, et surtout Morgan et Mehdi ont retrouvé le goût de Heritage (le titre Headline dans leur leurs racines musicales… Déjà em- dernier album). barqués dans 10 ans de concerts avec Mais leur ambition n’est pas restée leurs potes Sons of Gaïa, Ras sur le coin d’un cendrier, et toutes Poletti, ou Gang Jah Mind, ils ont ces voix d’or de l’âge du roots, qui entraîné dans leur sillage Aubagne, le s’étaient tues depuis l’arrivée du temps des fêtes annuelles de la Paix, ragga, attendaient de reprendre le organisées par la ville avec la MJC de chemin des studios. Un cadeau magi- Pin Vert et le Kabba Roots sound- que donc, ce Ghetto living de Linval system. Car ils rapportaient à chacun Thompson. Un instant de «pures de leur voyage ce rêve de faire bonnes vibes», nostalgique sans être tourner ces anciennes stars ici. obsolète, et un duo avec Warrior Confrontés à la désertification de King qui fait déjà parler de lui : un musiciens dans les studios au profit Handcart Band prometteur… des machines, ils se sont retroussés X-RAY les manches, en tournant avec Putus & Fuzzy, le regretté Eloquent, puis Ghetto Living Assassin et Johnny Clarke. Linval Thompson Un matin de janvier 2007, un appel sur I Tunes dès le 23 Décembre de la radio Irie F.M leur asséna un www.myspace.com/thehandcartband 38 MUSIQUE CONCERTS D’ici Noël Et pour continuer… Même si lors des fêtes de fin d’année il ne se passe pas Après une rentrée musicale bien remplie, c’est le moment grand-chose, musicalement il y a toujours moyen de des grandes résolutions pour cette nouvelle année dénicher un ou deux bons concerts ! culturelle (19/12), et le Cargo de Nuit (Arles) Pendant cette période peu active, vant son public lors du passage de qui fait monter sur scène Raoul Petite certaines salles font le break, comme sélections inédites sur un système de (19/12) et Pascal Ayerbe et Cie le Bathazar qui éponge ses malheurs son puissant et artisanal ! Cette «Dub (21/12). depuis leur récente inondation. Au Station»* est la meilleure façon de Pour les piétons du centre ville mar- menu, seul l’habituel Cooking sound ressentir le pouls du reggae. Musical seillais, la Machine à Coudre est une au Variétés, et après les recettes Riot, l’association aixoise qui s’in- très bonne alternative : Great Smut japonaises de l’an dernier, c’est du vestit à fond dans ce style depuis six Zarma Orchestra conclura l’année 100% bio servi ce 16 janv, sur une ans déjà, par le booking et la promo (20/12) alors que vous pourrez assiette, avec un ticket de ciné et un d’artistes comme Aba Shanti ou les repartir pour 2009 sur de nouvelles DJ pas tout à fait au régime, MC Big Hollandais King Shiloh, a amplifié le bases avec le punk hardcore améri- Bouddha. mouvement en s’étendant partout en cain et allemand de The Effort et Fall Tout aussi zen, la Meson maintient France, et même les Parisiens font Appart (6/1). Petit message à celles le service dans cette trêve hivernale : appel à eux pour des soirées simi- et ceux qui ne s’arrêtent jamais : La Avec un concert de musique indienne laires au Trabendo. Iration Steppas, revanche du Pire Noël sera sur la (27/12) de Nabankur Battacharya, déjà présents en 2006 pour le tour en scène de l’Intermédiaire le jour J en soutien à un enfant malade de Pays d’Aix, sont deux artistes très (25/12). Joyeux Noël ? Calcutta, où l’accent méridional et la versatiles, pouvant prendre un virage FRÉDÉRIC ISOLETTA mandole d’invités membres de Dupain Trip-hop (avec Kitachi) ou collaborer fraterniseront avec la tradition des avec leurs homologues français, le tablas. Puis viendra Raphaël Imbert dernier Improvisators Dub prouvant le jour de l’Epiphanie (4/1), accompa- tout leur dynamisme et un certain UN BON CONCERT gné du banjoïste américain (rencontré renouveau dans le genre. Ne pas rater Les blerots de ravel © Matthieu Ollitraut-Bernard À VENIR aux «Nuits d’hiver» de l’an dernier) ce train, pour démarrer l’année avec Tout d’abord il est encore temps de Après les Chemirani’s le 15 janv, le Paul Elwood, où les deux extrêmes entrain ! monter la rue Breteuil pour se rendre Forum de Berre l’Etang programme blues et free sauront là aussi se re- On attendra ensuite la rêveuse Ayo, au Grim à Montévidéo. Les derniers le 23 janv prochain Carmen Maria joindre. Enfin, c’est la sauce gitane et le virulent Kéziah Jones, tous concerts du 6e Festival Nuit d’Hiver, Vega. Une petite bombe de femme d’El Titi mêlé aux ingrédients cubains deux au Dock des Suds, les 20 et 31 de l’écrit à l’improvisé ne doivent impétueuse et menteuse, ses textes de son groupe qui en sera le plat du janv prochains. Mais d’ici là, toutes pas vous faire hésiter avec les Elec- en Français la font plus passer pour jour (9/1, et le 10 avec la danseuse les résolutions seront oubliées… tronic Cowboy Cacophony (19/12) un titi parisien qu’à une Dolores hispa- Florence Deleria). X-RAY et la contrebassiste improvisatrice nique, et sa musique proche de Mais la cerise sur le gâteau (des Rois) compositrice (ouf) Joëlle Léandre Django Reinhardt (avec uniquement reste la venue d’un célèbre Sound * Troisième édition des Dub (20/12) pour, entre autres réjouis- une guitare et une contrebasse) est System de «UK Dub», en gare de Stations, avec Jacin’, Lion Roots sances, la présentation de son livre A tranchante et drôle. Un univers de l’Affranchi, à Saint Marcel (17/1). Sound, et IRATION STEPPAS with voix basse, qui ouvrera la soirée de comédie acoustique proche de Tryo, Comprenez par-là des anglais derrière Mark Iration et Dan Man, le 17 janv clôture du festival, au demeurant Thomas Dutronc, dont elle a fait les leurs platines, adeptes des rythmes à l’Affranchi, 212 bd de Saint animée et festive : G. Foccroulle au premières parties… jamaïcains, de ce lourd son de basse Marcel, entrée : 10 € piano pour des pièces de Braxton, X.R sortant de rangées d’enceintes, soule- Aixonoespanic venu tout droit de Ayo © Jean-Marc Lubrano et Clam Barcelone et un mix de soirée en 04 42 10 23 60, mode aléatoire pour conclure. Le www.forumdeberre.com lendemain (21/12), retrouvailles dès 17h en compagnie de l’électronique Ninh Lê Quan et de Tony di Napoli pour découvrir la musique sur pierre ! Après tout, pour les inconditionnels de l’Espace Julien, Noël peut tout autant se préparer dans une am- DERNIÈRE MINUTE biance métal au gros son de Dagoba El Ache de Cuba propose une foire (19/12) ou hip hop engagé de Médine aux disques vinyles pour tous les et rap palestinien de 3D All Star & accros de la galette, alors pourquoi Gaza Team (20/12). pas se faire plaisir avec du vintage en Quelques rues plus loin, le sympa- ces fêtes de Noël, ce samedi 20 thique café concert le Paradox joue les décembre de 13 heures à 19 heures, prolongations avec Monzon (22/12). avec tables d’écoute à disposition… Comme quoi, on a toujours le choix, X.R la preuve avec l’Usine (Istres) qui 04 91 42 99 79, accueille Les Blérots de Ravel www.elachedecuba.com NÎMES | AGENDA MUSIQUE 39 Du cante au baile, flamenco ! C’est la 19e édition d’un festival qui fait de Nîmes une ville flamenca durant dix jours. Toute la diversité du genre est au rendez-vous, des interprètes de légende aux jeunes prodiges qui s’imposent, avec de grandes soirées prometteuses Parmi les rendez-vous attendus, une ristes du cante jondo et amateurs soirée qui verra se succéder sur la d’un flamenco modernisé, avant que scène du Théâtre Juan José Amado, le jeune guitariste surdoué Antonio Fernando Terremoto et José Rey n’enflamme l’Odéon (le 20 jan à Antonio Pantoja «Chiquetete» (qui, 20h). Côté espoirs, Alfredo Lagos, soulignons-le, choisit Nîmes pour son que les Nîmois avait découvert en grand retour événement au flamenco) 2006 aux côtés de Terremoto et Israel pour un hommage au cante. Trois Galván dans Edad de Oro, revient, styles et sensibilités différentes, Trois plus créatif que jamais. Le même soir, voix pour l’histoire (le 22 jan à 20h au Alicia Gil, chanteuse sévillane aty- Théâtre). Autre événement, et de taille, pique, offrira son chant pur, dépouillé Mujeres © Luis Castilla la présence, pour la première fois sur (le 21 jan à 20h à l’Odéon). flamenco, une rencontre détonnante grande révélation de la danse une même scène, de toute la famille Le sud de la France ne sera pas en pour un spectacle qui ne l’est pas féminine, et Belén Maya, fille de Galván ! Car ils n’ont jamais dansé reste avec la venue de la danseuse moins (le 17 jan à 18h30 au Théâtre). Mario (le 24 jan à 21h et le 25 jan à ensemble, José, le père, Eugenia de marseillaise La Rubia, désormais Enfin, Mujeres viendra clore ce 15h au Théâtre). los Reyes, la mère, Israel, le fils, et installée à Jerez, et du chanteur Port- festival foisonnant. L’émotion sera au D.M. Pastora, la fille. Se distinguant chacun de-Boucain Luis de Almeria, l’une rendez-vous pour le dernier grand sur les scènes internationales, ils des grandes voix du flamenco en spectacle de Mario Maya, figure offriront au public du Théâtre, le 23 France (le 19 jan à 20h à l’Odéon). historique du baile décédé en Festival de flamenco de Nîmes jan, le spectacle unique d’un grand Les enfants aussi seront comblés avec septembre ; une rencontre explosive du 15 au 25 janvier moment de flamenco gitan. En grand un spectacle présenté pour la entre trois femmes aux tempéraments Au Théâtre, à l’Odéon et à travers habitué du festival nîmois, Diego première fois en France : Malgama est différents mais complémentaires : la ville Carrasco, insaisissable chanteur à la le fruit d’un mélange unique, celui Merche Esmeralda, authentique 04 66 36 65 10 voix cassée, réunira à nouveaux pu- des arts du cirque, de la danse et du «maestra», Rocio Molina, dernière www.theatredenimes.com Au Programme MARSEILLE Paradox : Alexandre Manno en trio, Nordeste Brasil VITROLLES BMVR-Alcazar : Les Cris, atelier d’écoute de (19/12), Nimba (20/12), Monzon (22/12) Moulin à Jazz / Charlie free : The Nu Band (10/1), Musicatreize commenté par Jean-Christophe Marti 04 91 63 14 65 projection du film Let’s Get Lost de Bruce Weber sur (13/1) Le Lounge : Drôles de Drames & guests (20/12) Chet Baker (24/1) 04 91 55 56 34, www.bmvr.marseille.fr www.myspace.com/lelounge13 04 42 79 63 60, www.charliefree.com Cabaret Aléatoire : Jack de Marseille (20/12), Simon Bassline Smith, Sigma (16/1), Kamelancien, AIX COUSTELLET Tunisiano, Olkainry, Black Marche, Non sens (23/1) Le Korigan : Rakel Traxx, Rockett Queens, The La Gare : Une Nuit au Pakistan (20/12) 04 95 04 95 09, www.cabaret-aleatoire.com Martins (20/12), Georgovia, Neo Cultists, Asserben, 04 90 76 84 38, www.aveclagare.org El ache de Cuba Maudit comptoir (19/12), Lukesky Odium (27/12), Misery Index, Hate Eternal, Aeon, + guests (20/12) See You Next Tuesday (21/1) SALON 04 91 42 99 79, www.elachedecuba.com 04 42 54 23 37, Luynes Portail coucou : Boogie Balagan (20/12) Embobineuse : Art & Terrorisme 4, L’abominable Le Pasino : 100 violons Tziganes (6/1) 04 90 56 27 99, http://portail.coocoo.free.fr antifestival international des blanches dans la 04 42 59 69 00, www.pasino-aixenprovence.com maison noire (19 et 20/12) SIMIANE 04 91 50 66 09, www.lembobineuse.biz AUBAGNE Office de la culture : Bizet était une femme Espace Julien : Dagoba et invités (19/12), L’Escale : Alatoul, Les Doigts de l’Homme (19/12), par la cie La Rumeur (10/1) Medine, 3D all star & Gaza Team (20/12) Escale électro (17/1) 04 42 22 62 34, 04 91 24 34 10, www.espace-julien.com 06 29 75 09 71, www.mjcaubagne.fr www.mairie-simiane-collongue.fr La Machine à Coudre : The Great Smut Zarma Orchestra, Devil Crockett, Demons (20/12), The AVIGNON CHÂTEAU-ARNOUX/SAINT-AUBAN effort (6/1) Théâtre des Doms : Le jazz perd le nord : Mâäk’s Théâtre Durance : Novo Quartet (20/1), Claire 04 91 55 62 65, www.lamachineacoudre.com spirit (16 et 17/1 à 11h30), Fabien Degryse Trio, Diterzi (23/1) Leda Atomica Musique : Kabar Labolition (20/12) Animus Anima (16/1 à 20h30) et Melanie de Biasio 04 92 64 27 34, 04 96 12 09 80, http://ledatomica.mus.free.fr Quintet (17/1 à 20h30) www.theatredurance.com 04 90 14 07 99, www.lesdoms.be 40 MUSIQUE DISQUE

Offrez des disques ! L’objet reste agréable, le son incomparable, et si le disque continue à s’effondrer ce sont les enregistrements qui vont se raréfier… Qu’allez-vous donc télécharger, après ? Alors, quelques idées de cadeaux, sur quatre pages. Pour tous les goûts : vos enfants, vos amis et vos parents… Le CD Le baroque jeunesse Le pasticcio est un plat italien mélan- On a découvert le conte de Grimm Le Le jeune geant différentes saveurs pour un petit tailleur, mis en musique par quatuor goût succulent mais également un Tibor Harsànyi, le 21 novembre florilège transalpin baroque d’airs La star dernier sur la scène des Salins à Le Quatuor Modigliani s’est brillam- d’opéras parfois oubliés et d’auteurs Après Roberto Alagna chante Martigues, joué par l’ensemble Télé- ment produit, le 2 décembre dernier, différents. L’ensemble français Pasticcio Mariano (double-disque de platine), maque (voir page32). On entend ici à l’auditorium de la Faculté de Barocco, au demeurant cosmopolite, la star enregistre des chants tradi- un bel enregistrement de l’histoire Médecine de Marseille dans le cadre s’est naturellement tourné vers le tionnels siciliens. Le ténor français s’y par des musiciens de l’Orchestre de la de la saison de la Société de Musique style résolument varié du compo- engage pleinement, le timbre enso- Suisse Romande avec Caroline Sage- de Chambre. Les adhérents désireux siteur violoniste Jean-Marie Leclair et leillé, la verve démonstrative, et rend man au piano. En récitant fantasque, de prolonger le plaisir de l’écoute, ou ses sonates opus 4 pour deux hommage à l’île de ses parents. «C’est Smaïn fait la preuve d’une grande ceux qui voudront découvrir l’un des hautbois et basse continue. Goût le disque d’un Sicilien cherchant ses d’imagination et interprète le conte meilleurs jeunes quatuors français français et style italien au sein des racines» précise Roberto ! Ces avec nuances et drôlerie. Lors de actuels, se procureront leur deuxième mêmes opus : l’apogée des «goûts tarentelles et valses lentes, chants de cette captation en partie en direct enregistrement. Présent sur les scènes réunis» est remarquablement illustrée charretiers ou de banquet, on les (on y entend par moments des de concerts depuis seulement trois par la virtuosité et la musicalité de clamait aux sons des guitares, chez enfants qui réagissent au spectacle), ou quatre ans, après un CD consacré David Walter et Hélène Gueuret sur les Alagna, le dimanche à la fin du à Genève, embobinée par les magné- à Mendelssohn, Schumann et Wolf, le instruments modernes. Que ce soit repas. Les arrangements signés Yvan tos de Lyrinx et les micros de René Quatuor Modigliani grave trois chefs- dans un gravement pointé «à la Cassar habillent les mélodies Gambini, le Comique ajoute un opus d’œuvre de Haydn. On entend les française» ou un presto d’écriture populaires de soieries cinématogra- musical cher à nos têtes blondes (ou fameux Lever de Soleil (op. 76 n°4 en fuguée, le timbre clair, précis et léger phiques de cordes et de vents, du brunes) : le Carnaval des animaux. À si bémol), Le Cavalier (op.74 n°3 en des deux solistes trouve un alliage duduk arménien ou de la mandoline, la partition fantaisiste de Saint- sol mineur) et l’Opus 54 n°1 en sol parfait dans un continuo dynamique de tissus orientaux… En clin d’œil à Saëns, Smaïn agrège un commentaire majeur dans des interprétations sans surcharge aux clavecin, basson Nino Rota, on entend aussi la savoureux qui réactualise les fameux pleines d’assurance, de lyrisme, de et à la contrebasse. Agrémentée d’une chanson du film Le Parrain. Un disque portraits sonores : de La Marche générosité et de vigueur rythmique, récréation musicale opus 8 très réussie, déjà classé parmi les meilleures royale du Lion aux Tortues mollas- le tout doublé d’un naturel certain cette première galette consacrée à ventes au rayon classique ! sonnes, des Kangourous sauteurs au dans l’expression… Une réussite ! Leclair se déguste avec délectation. J.F. Cygne majestueux… J.F FRÉDÉRIC ISOLETTA J.F. Sicilien Joseph Haydn – Quatuors à cordes Pasticcio Barocco Roberto Alagna L’histoire du petit tailleur – Quatuor Modigliani Jean-Marie Leclair CD DEUTSCHE GRAMMOPHON Le carnaval des animaux CD MIRARE MIR 065 Hérissons production 4801302 CD Lyrinx LYR 2258 La compil. György Cziffra (1921-1914) baigna dans la musique dès son plus jeune âge et fut un enfant prodige. Comme de nombreux Hongrois (son profes- seur le compositeur Ernst von Dohnányi par exemple), il subit la Le DVD festif double-peine de l’histoire : l’alliance Les DVD d’opérettes d’Offenbach avec les Nazis puis le joug commu- mises en scène par Laurent Pelly, niste. Il fut prisonnier de guerre de qui paraissent régulièrement autour 1941 à 1947, puis prisonnier des fêtes de fin d’année, recueillent politique de 1950 à 1953, condamné un vif succès. Après La Belle Hélène aux travaux forcés. Un miracle fait qu’il et La Grande Duchesse de Gerolstein, a pu redonner des concerts, retrouver c’est au tour de La vie parisienne l’usage normal de ses mains et fuir en d’être revisitée par le fantaisiste 1956 pour s’exiler à l’Ouest : en homme de théâtre… et ce film France. Rapidement ses moyens excep- devrait connaître le même bonheur tionnels font fureur dans Liszt, que les précédents. Dans cet opéra- Chopin, les partitions les plus acroba- bouffe, davantage que dans les autres tiques. Il adopte le prénom de opérettes classiques du «Mozart des Georges lors de sa naturalisation en Champs-Élysées», les dialogues 1968, après avoir fondé le festival de parlés occupent une place prépon- la Chaise-Dieu en Auvergne. dérante. Du coup, ce sont souvent C’est tout simplement l’un des pia- des comédiens chantant qui interprè- nistes les plus prodigieux du XXe tent l’ouvrage… au détriment de la siècle ; aussi l’un des plus populaires, qualité musicale ! Ce n’est pas le cas invité régulier de feue l’émission Le ici : les chanteurs (qui jouent fort Grand Echiquier. Un coffret de 40 CD, bien la comédie) se nomment intégrale (ou quasi !) de ses enre- Devellereau, Wesseling, Bou, Naouri, gistrements studio de 1956 à 1986 Fouchécourt… Ils sont accompagnés vient de paraître ! De quoi ravir les par l’orchestre et les chœurs de fans, les nostalgiques, ou simplement l’Opéra de Lyon (filmés fin déc. ceux qui voudraient entendre le 2007). Et la réactualisation contem- virtuose dans Les Années de poraine de l’opus est burlesque à pèlerinage, Les Etudes d’exécution souhait ! transcendantes, les transcriptions de J.F l’Ouverture de Tannhäuser, du Vol du bourdon, de la Danse du Sabre et les La vie parisienne Danses hongroises de Brahms… et DVD Virgin classics 50999 Chopin, Beethoven, Tchaïkovski, 5193019 6 Franck… Disque classique JACQUES FRESCHEL

Coffret Cziffra – ses enregistrements studio 1956-1986 Coffret 40CD chez EMI classics 42 MUSIQUE DISQUES

Lignée À la grâce Après la venue deux années de suite à Marseille de Séun, la comparaison de Grace ne pouvait être évitée, ce 22 nov, Après une longue traversée du désert, lorsque Femi Kuti s’est produit sur la Hurricane renoue avec la Grace : cette scène de l’Espace Julien : chacun des Musique grande dame proche de l’âge de la deux rejetons de Fela Kuti assume retraite cultive le charme et l’énergie, l’hérédité de l’Afro-Beat à sa façon ! à déguster sur des chemins inattendus. Des Baha- Autant dire que la malédiction du Éclairage Le CD-Livre Cooksound orchestré par mas à Paris, beaucoup d’hommes se «fils de», dans la grande famille des Laurent KOUBY (musicien, gastro- sont approchés d’elle (Helmut Newton, artistes, n’est pas respectée en de nuit nome et créateur d’évènements) nous Jean-Paul Goude, Andy Warhol) pour Afrique, le legs parental étant même L’élégance esthétique marinée de propose une dégustation sonore redessiner ses contours ambigus, le fondement culturel de l’éman- glam rock fait de Jad Wio un groupe autour d’une balade groove électro jusqu’à une certaine débauche de sens. cipation des générations suivantes… à part, au gré des métamorphoses et suave et délectable. Le concept Sur disque, l’égérie de l’icônerie Gay des Son dernier cd, Day by day, suit la performances scéniques de son leader novateur et assurément original de années 80 a imposé sa voix lourde et lignée avec la présence de son fils de emblématique Denis Bortek. L’œuvre l’association musico culinaire (qui profonde… aujourd’hui intacte. La 13 ans qui participe librement à personnelle excentrique, telle qu’il la organise des cooksound party) met fidèle paire rythmique reggae, les l’effort créatif du père, sans pouvoir définit lui-même, se joue du tous nos sens en émois devant un «Jamagical» Sly and Roobie, flanqués encore le suivre en tournée. L’Afro- conformisme épidermique pour cocktail de musique ensoleillée servi de Barry Reynolds et Wally Badarou, Beat a été largement digéré, sur They creuser une démarche immaculée aux juste à point. Le chef à double restituent le son d’époque, dans Well will Run par exemple, pour des confins du rock. Sombre et duveteux, casquette nous mijote ses deux well well et Love you to life. Mais cette saveurs plus jazzy-soul, et la bonne l’album Nu cle air pop, édité en passions et gagne son pari ! L’ouvrage jamaïcaine d’origine manœuvre ici avec teneur en cuivres se confirme dans coffret collector, sort de l’ombre pour trilingue (français-anglais-japonais) eux un tournant plus acid jazz et trip- son show, certes moins hypnotique se mettre à nu. Jouvence contagieuse propose 13 recettes typiques pro- hop : produit cette fois par Ivor Guest et radical qu’avec le frangin... Des pour les onze titres majoritairement vençales telles que l’Anchoïade, (Misty Oldland), avec Tony Allen, ralentissements, voire des lenteurs, écrits en français et noir fantasque, l’Aïoli, les Tomates à la provençale ou Brian Eno ou la voix de Tricky, la sont suggérés, qui ne s’inscrivait pas pour une atmosphère voisine du glam les Calissons, accompagnées de 13 lourdeur et la précision jamaïcaine se jusque là dans l’héritage familial. gothique caverneux ! Composée de bouchées sonores concoctées par la plaquent sur des envolées de cordes Femi construit ses titres en concert ballades pesantes ou de rock bien crème des artistes marseillais, musi- pleines d’amertume, un peu dans la avant de les accoucher sur disque, trempé de facture minimaliste, la ciens-gourmands de surcroît, histoire lignée de Massive Attack. C’est d’ail- comme le faisait son père, mais au livraison se veut intimiste et de cuisiner en rythme et d’éveiller ses leurs à leur concert à Londres le 19 juin final ne semble pas être autosatisfait… reluisante à la fois. Inclassable en papilles auditives (Stéphane le dernier, que bravait un Une recherche perpétuelle, boulever- somme, à l’image de ce groupe hors Borgne, Dimitri Shapko, David nouveau départ, confirmé par cet sante, qui laisse jaillir des notes de du commun qui compulse tel un ovni Walters et Loop entre autres). album à l’esthétique superbe, décelant nervosité et de mal-être dans la sonore l’univers mystique et Gourmets, enfilez vos tabliers et un foisonnement d’idées musicales direction de son orchestre. romanesque du rock français. savourez la musique ! autour de cette femme de caractère. X-RAY FRÉDÉRIC ISOLETTA SONIA ISOLETTA X-RAY

Day by Day Nu cle air pop CD-Livre Cooksound Hurricane Femi Kuti Jad Wio Laurent Kouby ed. Actes Sud - Grace Jones Labelmaison – PIAS Exclaim / Warner Naïve «Marseille-Provence» Wall of sound – PIAS 43 L’Abbé Bill Aux portes d’Addis Vainqueur du K.O Bill Deraime revient prêcher la bonne Faire du neuf avec du vieux aboutit En réponse au chaos de la crise parole avec un nouvel album, souvent au bricolage. Dans les mains mondiale, l’Afrique a deux mots adaptant la tournure Gospel du label Real World de Peter Gabriel, à nous dire, et les uppercuts et Funk de sa musique aux douze cela devient un travail d’orfèvre musicaux lancés par cet ancien cordes d’une guitare retrouvée rigoureux, lorsqu’il touche sans les boxeur sénégalais servent d’élixir pour l’occasion… heurter deux sensibilités éloignées contre la fatalité Certains le prennent pour un illuminé, mais la carrière La route vers Addis et ses rythmes millénaristes avait Après 47 ans d’indépendance, d’indifférence, ils sont de cet ancien éducateur (dans une des premières free- été dégagée par les Éthiopiques, qui ne s’étaient de plus en plus nombreux et déterminés, ces artistes cliniques) l’a amené à faire jouer des bluesmen guère arrêtés au carrefour du Dub, cette expression africains qui s’approprient le rythme reggae dans ce américains bien avant de sortir ses albums. Il a musicale s’inspirant du Reggae jamaïcain et d’une pays. Le vétéran Marcel Salem les encourage et en ensuite connu la vie facile, jalonnée de tubes vision spirituelle de l’Éthiopie de Hailé Sélassié : Jah appelle à la vigilance. La Kora de Djeli Moussa éloquents comme C’est dur, S’coue-toi, Le chanteur Shaka à Londres en est le maître du genre, et tient à Diawara (Kora Jazz trio) côtoie le one drop maudit ou Babylone tu déconnes, puis une descente garder près de sa table de mix’ la photo de cet jamaïcain, retenu avec aisance et agrémenté de aux enfers bénéfique : «Sinon, je serai devenu un con, Empereur-Dieu. Si lui ou Jah Wobble avaient pu chœurs féminins à la Tiken Jah. La comparaison dans un milieu style Obispo, où tu dois être comme défricher de telles frontières, c’est Dubulah, s’arrête là, cette production plus modeste rapprochant eux…». Revenant d’un pèlerinage marital qui l’a sauvé producteur attitré du label et remixeur derrière le l’artiste de son environnement traditionnel. Même si d’une probable dépression, le mystique Bill a trouvé la Temple of Sound, qui concilie ces mondes aux sa voix reste un trop peu en retrait, ses textes foi en un vrai groupe, présent au Garden’Blues antipodes, et jette ici un regard vierge sur la croisée touchent nos consciences endormies, épinglent les festival à Marseille le 10 oct pour présenter sa inexplorée des deux Cultures. Des riffs reggae et des problèmes, soutenus par des breaks puissants sur dernière liturgie, Bouge encore. Une idée lumineuse échos puissants font face à une corde ancestrale de Hypocrite et Wonna caakke, et jusqu’à un dénouement d’avoir remis au goût du jour ses anciens titres : «Je messenqo, et des voix atypiques se posent sur du final acoustique sublime. Après la mémoire des n’avais jamais trouvé le courage avant, mais avec cette roots, comme dans Sima edy. Mais l’invitation à tirailleurs traitée dans son premier cd, un second guitare, on obtient un son bien plus large». Tous ses approfondir notre connaissance de ce peuple se révèle round sans concession. vieux tubes sont ressuscités, et cinq nouvelles prières plus passionnante encore à l’écoute du très jazzy Neh X-RAY invoquées, en respect à tous ces exclus auxquels il a Yelginete ou du bluesy Shegye shegitu. voué sa vie. X-RAY X-RAY

Bouge encore A town called Addis Bill Deraime Dub Colossus Africa Vigilance autoproduit- Real World – Marcel Salem distribution Mozaïc Harmonia Mundi I-Welcom – Socadisc

L’invitation au voyage Lofofora : toujours l’hallu Le pop psychédélique serait-il de joue sur du velours et s’aventure à Lofofora, groupe phare de la scène discographie (5 titres, Lofofora, retour ? Saturnin sort du four sa pas feutrés dans un espace infini, rock française depuis près de 19 ans, Double, Le fond et la forme et Les première galette éponyme et nous laissant le champ libre à son sort un nouvel opus intitulé Mémoire choses qui nous dérangent). laisse présager un bel avenir. imagination sonore incommensu- de singes. Les rockers de la bande Néophytes, il n’est pas trop tard donc Tranquille, perché et lunaire, Christo- rable. Il reste des places à bord…. emmenée par le chanteur Reuno pour vous intéresser de près à ce phe Talon, alias Saturnin, nous fait FRÉDÉRIC ISOLETTA nous plongent dans un univers aux groupe déjanté ! voyager dans un monde parallèle créé sonorités fusionnelles d’éléments SONIA ISOLETTA de toutes pièces, fantastique et Saturnin punk, hardcore et métal. Se retrou- féerique, par ses chansons aux Saturnin vent sur ce nouvel album, et comme Mémoires de singes accents cosmiques, somnambuliques, Busy Line Discograph à leur habitude, des paroles engagées Lofofora presque progressifs. Sur un instru- et militantes ainsi que toute l’énergie At(h)ome Wagram mentarium synthétique, chimérique et la rage qu’on leur connaît. Puisant et riche en couleurs se couche le son inspiration dans le climat social mélancolique, faisant sonner ses et politique actuel, Lofo excelle dans mots comme une lecture de poèmes la description cynique du monde et éthérés et subjectifs. Dans les bacs ce tout au long des 13 titres qui depuis novembre 2008, Saturnin est composent ce recueil. Le groupe une véritable invitation au voyage au profite de cette sortie pour éditer un cœur d’un monde sonore peu luxueux coffret, leur premier, avec les défriché, du moins ces temps-ci. Il cinq albums mythiques retraçant leur 44 ARTS VISUELS TOULON | ISTRES Pierre Beloüin, un artiste multi plates-formes Avec Marseille et Nice, la halte toulonnaise de Pierre Beloüin porte un éclairage différent sur son travail qui fait du temps un élément majeur C’est une histoire au long cours que celle de l’exposition de Pierre Beloüin à la galerie des Musées (Remparts) de Toulon. Awan~Siguawini~~Spemki~~~ Croquons (Extended Version 2008), qui signifie Air-Au printemps-Paradis en langue ensemble indienne, fait suite à une résidence en Le 6 décembre, le CAC d’Istres orga- 2006 à Langage Plus au Québec. Là- nisait sa première rencontre-débat bas, Pierre Beloüin s’immerge dans sur la question «du dessin dans l’art les paysages et la solitude, entretient contemporain»danslecadredel’expo- une relation épistolaire par mails sition d’Abdelkader Benchamma interposés avec l’artiste Nicolas Mêmeles choses invisiblessecachent. Ledoux, et passe commande à douze Dans la petite salle comble, ont compositeurs d’autant de séquences © Pierre Béloüin participé à la discussion avec le public sonores, interessé par les images mentales produites par En attendant, un Special Kit réalisé avec Nicolas Ledoux, À animée par Béatrice Béha respon- l’écoute«. Des divagations musicales nées des matières chaque jour suffit sa peine, est édité par Optical Sound et sable de l’artothèque intercommunale brutes prélevées in situ et transmises par voie numérique… Monografik comme une énième trace de cette aventure de Miramas, les artistes Adbdelkader De cette expérience, Pierre Beloüin a créé plusieurs œuvres protéiforme. Un kit qui comprend deux éditions de 24 pages Benchamma, Noémie Privat, Christo- qu’il expose sous différents angles, feuilleton ininterrompu en quadrichromie, un DVD avec deux films d’une durée 98 phe Boursault ; et Michel Barjol dont on a vu un premier extrait au Frac à Marseille, un minutes, une photo originale et un jeton de casino représentait la galerie Martagon, deuxième aujourd’hui à Toulon et un troisième au Dojo à spécialement désigné Casino’23 en nacre synthétique et Corinne Girieud le Blog du Dessin Nice. Chaque fois dans une version nouvelle, combinaison dorure à chaud. Rien de surprenant ni dans la forme ni dans Contemporain, Claude Lorin pour d’images montées en vis-à-vis de bandes sonores invitant le fond quand on sait que cet artiste multimédia, comme il Zibeline. Y ont été vantées les vertus le public à un plongeon physique et mental, images se définit lui-même, aime à produire de petites éditions qui du carnet de croquis, de la pratique du arrêtées tirées en grand format permettant au spectateur collent à ses projets, et à naviguer entre plusieurs médiums. dessin, et regretté une certaine de s’isoler grâce au casque d’écoute, vidéo réalisée sous la prédilection, dans l’enseignement et forme d’un diaporama et d’une lecture du texte de Nicolas Marseille-Toulon-Nice les galeries contemporaines, pour les Ledoux par Sophie Bocquet, mis en son par Coccon. De Ce parcours inédit a été rendu possible grâce à la copro- arts vidéo et numériques… alors que cette matière vivante et riche naîtra peut-être une duction des trois lieux d’exposition, notamment la direction nombre de jeunes artistes aiment à réalisation cinématographique… des affaires culturelles de Toulon qui souhaite favoriser les pratiquer les arts plastiques : ceux du partenariats dans la région. Depuis trois ans, la galerie des contact et de la matière. © Pierre Béloüin Musées (Remparts) s’est ouverte aux pratiques émer- Encouragé par ce premier succès, gentes de la création contemporaine : en 2009 elle exposera Bernard Hennequin, directeur du Cédric Teisseire, Catherine Bay, Françoise Huguier et centre d’art reconduira l’expérience Cyprien Gaillard, espérant ainsi s’inscrire dans la dyna- lors de l’exposition de Frédéric mique de la Villa Noailles à Hyères, du centre d’art Tamaris Clavère en 2009. à La Seyne-sur-Mer ou Le Moulin à La Valette. Une galerie A.F. conçue comme une préfiguration à l’ouverture d’une galerie d’art au sein des musées de la Ville. Affaire à suivre… MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Centre d’art et artothèque : www.ouestprovence.fr Lire l’article de C. Girieud sur http://d0010.org Pierre Beloüin jusqu’au 3 janvier de g. a d. Beatrice Beha, Noemie Privat, Michel Barjol, Abdelkader Benchamma © C. L Galerie des Musées (Remparts), Toulon (84) 04 94 91 45 60 ENTRETIENS AVEC MICHEL BUTOR ET DANIÈLE UBEDA ARTS VISUELS 45 «J’ai tellement raturé…» Michel Butor était Peinture mais aussi celui la Descrip- spécialisés dans le livre d’artiste artistes qui m’inspirent alors là ça à Marseille sur l’invitation tiondeSanMarcoetdeL’embarquement comme ici. Peu à peu ça se fait, c’est marche, d’autres moins. de Paradigme pour de la Reine de Saba… toujours intéressant à voir. Je me Travaillez-vous sur plusieurs projets à l’édition d’un livre d’artiste, Michel Butor : Ah oui ? je suis content demande toujours ce que je vais la fois ? Collecte, mis en lecture que ces textes vous aient apporté une pouvoir mettre dedans. Évidemment, Oui, j’ai beaucoup de projets entassés vision particulière dans votre forma- je regarde si je n’ai pas de textes prêts à l’intérieur de mon bureau. Je ne sais par Jean-Claude Nieto tion artistique. L’écrivain voit les qui pourraient aller, ce qui m’arrive pas quand j’arriverai à tout faire ! Et de le jour du vernissage choses aussi à sa façon et il essaie de parfois, mais le plus souvent je suis temps en temps il y a une urgence le faire avec ses mots, ses images. obligé de faire quelque chose de parce que le peintre a une exposition, Vous venez de réaliser Collecte avec nouveau. C’est aussi intéressant pour le musicien un concert. Autrement les l’atelier Vis-à-Vis, ici à Marseille. moi, ça m’oblige à faire des choses choses attendent. Quand c’est mûr, Quelle a été votre part ? nouvelles que je n’aurais jamais faites alors j’y vais. Il faut forcer un peu. Ils m’ont contacté pour me proposer avant. Donc ça m’ouvre des quantités Parce que les gens attendent. Alors je le travail préparé dans leurs ateliers, de portes. Ça me maintient jeune, et fais ce que je peux. plusieurs livrets. J’ai fait les textes en me permet de dire le monde autre- Il y a ces obligations qui arrivent de rapport, des choses sur le voyage, le ment. l’extérieur ;mais comme pour d’autres titre aussi. C’est-à-dire ? créateurs existe-t-il chez Michel Butor Vous êtes très régulièrement sollicité De parler du monde, qui est toujours une nécessité intérieure ? Michel Butor dans les ateliers Vis-à-Vis, 2008 © X-D.R pour des collaborations croisées. le nôtre, mais vu autrement. On a Les choses marchent parce que ça Le trop bref passage de Michel Butor Quels sont vos projets actuels ? fortement besoin de le voir autrement. vient aussi de moi, seulement j’ai la a permis de saisir au vol quelques Oh ! il y en a des dizaines ! Je travaille Le monde tel qu’il est actuellement ne chance d’avoir beaucoup d’occasions. paroles sur son travail. L’écrivain à la en ce moment aux tomes neuf et dix satisfait pas le poète ? Ces occasions me permettent de sortir figure bachelardienne s’est prêté avec de mes œuvres complètes. Et puis des Non, il ne me satisfait pas tel qu’il est ce que j’ai besoin de sortir. Ça m’aide grâce à nos questions, très disert. artistes m’envoient ou m’apportent actuellement avec tout ce qui se passe. beaucoup parce que j’ai tellement Pour autant, il ne dira pas tout ! des livres. et j’essaie d’écrire à l’inté- Alors il faut le changer. raturé ! rieur. Ou bien dans certains cas il y a Il y a donc toujours à faire ? Zibeline : Je voudrais remercier tout des textes qui sont déjà faits que C’est toujours très difficile. Il y a d’abord -puisque je l’ai aujourd’hui j’envoie à des artistes qui me les toujours des problèmes à résoudre, devant moi- l’auteur des Mots dans la demandent ou à des sortes d’éditeurs c’est ça qui est intéressant. Il y a des Éclaircissements ? Nous avons demandé à Danièle Ubeda de nous présenter le projet à l’origine de Collecte. Zibeline. C’est votre première colla- On retrouve dans ce livre la grande Une exposition de livres tirés boration avec Michel Butor. Quelle a importance que vous attachez à de la collection de l’écrivain été votre démarche ? l’objet, la qualité de fabrication, sur ces trois dernières années Michèle Ubeda : En effet c’est notre l’aspect matériologique. est présentée jusqu’au 20 déc. premier projet avec Michel Butor et Nous avons choisi du papier pur Un film est en cours de réalisation nous étions un peu impressionnés chiffon Arjomari, du buvard, des im- dans la collection Artimentaires. avant de le rencontrer ! Nous lui avons pressions sur feuilles de calque, des envoyé six livrets fabriqués autour de gaufrages ou des découpes, des l’idée du comportement de voyage. pliages qui impliquent donc des Lorsque Michel Butor abandonne le manipulations. romanen1962,ilacommencéàvoyager Michel Butor est intervenu dans les pour ne plus s’arrêter (les États-Unis, espaces laissés libres, en marge, sans le Japon beaucoup) en plus de ses utiliser les possibilités offertes des fonctions d’enseignant. Donc nous pliages (caché/dévoilé) ou les opacités avons conçu cette proposition comme du calque. un itinéraire dans le temps et dans C’est lui qui a écrit les textes et donné l’espace. Le livret évoque le carnet de tous les titres, mais en respectant la notes. part plastique du projet comme il le couverture du livre d'artiste Collecte consacré Le livret Lucarne fait référence à fait toujours, peut-être pour ne pas à Michel Butor, édition atelier Vis-à-Vis, 2008 l’antiquité… empiéter sur la création de l’autre. Oui, Michel Butor a écrit par rapport à On s’aperçoit en lisant ses textes qu’il cette période, et ici c’est une feuille donne souvent un nombre de lignes Collecte de carnet de notes qui date de 1938, fixe à ses paragraphes. Pour Collecte Michel Butor/Atelier Vis-à-Vis celui-là un extrait de carte d’état c’est à chaque fois sept. Savez-vous collection Vice-Versa, 2008 major de la Champagne. pourquoi ? 24 exemplaires, 520 /450 euros Est-ce en rapport avec la vie de Non ! Michel Butor aime rencontrer, en souscription l’auteur? mais il ne parle pas beaucoup de ce Non, c’est pour l’aspect visuel, les gra- qu’il fait ! Mais je lui demanderai à Atelier Vis-à-Vis / Paradigme phismes des routes, des chemins, la notre prochaine visite. 04 91 33 20 80 géographie du voyage. ENTRETIENS RÉALISÉS PAR CLAUDE LORIN www.ateliervisavis.com 46 ARTS VISUELS ATHANOR | BUY-SELF ART-CLUB

blancs n’apporteront pas plus d’infor- Beau de bête indéterminée mations contextuelles, tout juste une évocation d’un paysage rocheux et aride. L’ambivalence accuse un espace de sens interlopes. L’esthétique mise en avant par Lina Jabbour évacue radicalement toute jubilation et on peut concevoir facilement une certaine retenue du visiteur face à une telle chimère. Ici le cadavre n’est pas exquis ! C.L.

Isidore Lina Jabbour jusqu’au 31 janv Buy-sellf Art Club 04 91 50 81 22 www.buysellfartclub.com Lina Jabour, Isidore, installation, dessin et techniques mixtes, 2008 © Yohanne Lamoulere-Transit Depuis Dada et le Surréalisme, D’ailleurs l’installation se compose, sous-jacent et sombre. S’y ajoutent l’univers de l’art moderne et contem- entre deux dessins muraux opposés, -apparemment non conformes à porain est peuplé d’objets hybrides et d’une sculpture hybride au centre de l’anatomie humaine- deux excrois- ambivalents. La proposition réalisée la pièce. Un plateau peint en gris, noir sances spatiales symétriques (bras/ par Lina Jabbour pour l’espace de la et blanc, en forme de peau de bête qui antennes ?) faites d’os humains en galerie Buysellf en poursuit l’explo- aurait subi l’aplatissement rectiligne résine, peintes (badigeonnées ?) de ration en ajoutant un sentiment d’un rouleau compresseur : la sen- blanc laiteux, couronnées chacune d’indétermination inquiétante, déjà sualité de la fourrure se dissipe pour par la tête griffue de balais à feuilles présent dans son travail graphique. À laisser place à une représentation de jardinier, grise aussi. Un gris que commencer par son titre, Isidore. froide. Cette distance est renforcée l’on désigne dans le métier de moyen, Prénom à la sexualisation mixte mais par un léger surélèvement invisible ni clair ni foncé, comme la couleur du plutôt masculine, évoquant aussi par rapport au sol : le socle tradi- sol (mais il parait que la relation est l’animalité d’un personnage de dessin tionnel disparaît mais sa fonction fortuite). Les deux interventions animé (Isidore le chat malin…?). persiste paradoxalement dans le vide peintes en noir sur le bas des murs Décollages et transfigurations Le bestiaire de François le sol a désormais disparu : suppres- substituées de nouvelles matières Transport Mezzapelle perd pied sion des pieds jusqu’au buste pour ne (fourrure, tissus, chevelure, spirale François Mezzapelle conserver plus que la tête ; au plastique ou papier aluminium, fil de Galerie Athanor et prend de l’air polyester stratifié des corps ont été fer, broderies, ficelle, pierre…). Ainsi jusqu’au 10 janvier sous les plafonds délestés de leur fardeau, impitoya- 04 91 33 83 46 © C.L de la galerie Athanor blement décharnés et désincarnés, désubstancialisés, ces mannequins © C.L Ces derniers temps ses drôles de hybrides se sont élevés vers le plafond zozos semblent s’échapper de la auquel ils sont désormais suspendus. pesanteur terrestre pour filer au Ils recouvrent parfois quelque indice plafond. Si les formes rondouillantes d’humanité : coiffure, costume, persistent à gonfler certaines sculp- tunique… Cependant les vêtements ne tures en de balourdes baudruches sont qu’enveloppes vides, l’air et son incapables du moindre frémissement corollairemétaphoriqued’anti-matière de désolidarisation de leurs surfaces les emplissant de rien, un rien d’appui, le panthéon métamorphe inquiétant quand même. mezzapellien s’enrichit de nouvelles Avec ses Zélateurs acérés coiffés hybridations rompant avec les formes d’hélices improbables, Mezzapelle gibbeuses précédentes et les arrière- annonçait-il dans les années 2001 trains callipyges. cette tentative encore illusoire de se Le contraste est saisissant puisque libérer de l’attraction terrestre ? tout ce qui faisait contact pesant avec CLAUDE LORIN DUKAN | HOURDEQUIN | ENCHÈRES ARTS VISUELS 47 Syncretic paintings Un os dans Sam Dukan et Marc Hourdequin montrent les enchères et partagent ce qu’ils aiment : la peinture. Après Emmanuel Barcillon, Joffrey Ferry, Alicia Paz présente ses grands formats récents. D’apparents enfantillages.

Dans l’esthétique initiée en leur temps rent déjà peint, nature d’image parlePopartetl’Artbrut,onne compte (papier, décalcomanie, stickers), plus aujourd’hui les artistes qui se inclusion d’objets réels et/ou leur fac- sont emparés du quotidien. similé jouxtant la chose peinte… On Au lieu de détourner le vernaculaire pense à la Nature Morte à la Chaise des objets en stratégies spectacu- Cannée de Picasso et aux Combine laires dans le monde de l’art, Alicia Paintings de Rauschenberg, mais en Paz s’obstine à peindre. Ses tableaux bien plus réjouissant ! s’apparentent à des chromos surdi- Dans cette profusion hétérogène, la mensionnésintégrantnombresd’icônes peinture d’Alicia Paz agit par un extraites des divertissements po- jubilatoire syncrétisme. Ses origines Vue de l'exposition aux Grands Bains Douches © Yohanne Lamoulere pulaires (teletubbies, super héros de mexicaines y seraient-elles pour un Ça y est ! La joie légèrement factice de BD, monstres de dessins animés) et peu ? fin d’année s’exhibe en guirlandes desreprésentationsstéréotypées (récits C.L. pour enfants, rites de Noël,décors clignotantes (seule forme actuelle asiatisant…). Justement, Alicia Paz se d’alternative ?) et signale le départ de la plait à jouer avec ambivalence des course aux cadeaux… différents niveaux de représentation. Ce n’est pas la crise globalisée qui arrêtera le rituel… À Comme dans ces paysages à la chi- vérifier cependant dans le secteur de l’art, les indicateurs de noise où le spectateur hésite entre tendance du côté des galeries d’art marseillaises. représentation peinte (elle-même Alicia Paz VIP Art Galerie proposait début du mois une expo-vente variable : aplats au pinceau, pochoir à jusqu’au 17 janvier spécial fêtes avec des œuvres de Bentin, Daderian et Ozenda l’aérographe, empâtements imitatifs…) Galerie Dukan et Hourdequin à moins de 1000 euros. Dans quelques jours, Complex invite et collages d’images simulant le réfé- www.dukanhourdequin.com à une «vente aux peuchères» du 19 au 21 décembre, avec Chinoisierie (2008) huile, acrylique et collage sur toile 210 x 170 cm © Todd-WhiteArt Photography. commissaire «friseur». Plus orientée générosité caritative fut la mise en vente, sous le marteau de maître Leclere, d’une vingtaine de vestes customisées par des artistes de bonne notoriété (Surian, Marchetti, Le Gouic, Muntaner…) à l’occasion de la journée de lutte contre le sida. Toujours bien armé, Damien Leclere aux Bains Douches n’a donc pas cassé la baraque le 11 décembre. Bien que les prix établis par les artistes eux-mêmes fussent attractifs, moins de la moitié de la quatre-vingtaine de pièces a trouvé acquéreur. Ainsi le grand tirage couleur et romantique, Sleeping Zône de Mélanie Terrier resté en sommeil. Reste à savoir si de telles initiatives sont profitables. Collectionneur, vendeur d’art, spéculateur, galerie, et, pour l’artiste, quid de sa côte réelle ? Comment réinvestir et soutenir le marché de l’art, quels acheteurs attendons-nous, qu’attendons-nous pour acheter ? Laissons passer les fêtes. C.L

Le Triangle de la solitude Art-Cade de Sophie Urbani 04 91 47 87 92 www.art-cade.org

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VIP Art Galerie 04 91 55 00 11 www.leclere.auction.fr 48 ARTS VISUELS LA VALETTE | MUSÉE DES TAPISSERIES

jettent le trouble aux voyeurs que nous sommes Le corps, cet obscur devenus. Corps transgressé, outil d’évocations sensuelles équivoques comme dans sa série La Toison d’or de 2008, natures mortes objet du désir photographiques mettant en scène un buisson de filets de poils blancs aussi foisonnant qu’une touffe pubienne. Corps ambigu traité avec une douceur exceptionnelle dans sa toute dernière sculpture en plâtre, Twins, qui figure avec sérénité et tendresse deux frères siamois. Corps barricadé aussi, comme dans ses autoportraits au visage grillagé de 2006, In God We Trust, plongés dans un noir carcéral et une féminité interdite. Le visage (son visage) dupliqué en masque mortuaire, quand il n’est pas lapidé ou décapité… Autant de miroirs -et de mirages ?- que Michèle En proie à la migraine Sylvander réplique au fil du temps qui passe, ce même temps qui laisse des traces sur les corps (son et aux insomnies, l’artiste corps) et dont elle a fait œuvre. À l’endroit ou à marseillaise Michèle Sylvander l’envers, son corps est sa carte d’identité, son arbre s’offre une nouvelle promenade généalogique. «Sa prison», dit-elle, et l’objet de tous au rayon de l’intime ses désirs… Et la nouvelle surprise de Michèle Sylvander, c’est actuellement au Moulin, où elle livre sa toute première sculpture musicale, Tu me fais tourner la tête, véritable exploit technique et ivresse poétique. Réalisée en Plexiglas, cette sphère translucide tourne sur elle-même au ralenti, tandis que des La dernière surprise de Michèle Sylvander, c’était révèle aujourd’hui l’Espace d’art Le Moulin, à La hauts parleurs diffusent en boucle, depuis l’intérieur en septembre dernier chez Marianne Cat à Valette, qui réunit œuvres anciennes et inédites : de leur cocon douillet, ce must de la chanson Marseille, lors de la présentation de son film photographies, sculptures, dessins (transferts française. Édith Piaf immortelle ? Sans doute un d’artiste Une brève histoire d’Amour, conçu comme d’images et crayons de couleur), film et vidéo, toutes mirage de plus… «un roman-photo en mouvement.» Une histoire habitées par un même appétit de la métamorphose. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI d’amour tournée au ralenti qui se terminait Une promenade en Céphalée, titre de l’exposition tragiquement dans un crash sonore… Michèle varoise, est arc-boutée autour du corps et de ses Sylvander abordait l’image cinématographique avec infinies représentations. Corps tantôt éclaté, cette gourmandise qui l’anime depuis ses premiers difracté, comme si en radioscopant le cerveau ou Michèle Sylvander travaux, ne cessant depuis les années 1990 d’offrir l’oreille, Michèle Sylvander explorait l’intérieur de jusqu’au 24 janvier un large spectre d’images. l’âme. Corps plongé dans une spatialité aqueuse, Espace d’art Le Moulin, La Valette (83) C’est justement cette diversité de médiums que comme dans ses Autoportraits 1-2-3 de 1995 qui 04 94 23 36 49 Tchèques en blanc et noir Au Musée des Tapisseries, musiciens, traduites par d’élégants portraits tirés en sobriété le propos du photographe. Bernard Lesaing expose noir et blanc sur papier baryté, alternent les L’exposition se poursuit avec une sélection de moments de paysages vécus comme de secondes quelques œuvres d’artistes tchèques, deux peintres, une série de clichés noir et blanc rencontres. L’anecdotique ou le descriptif, Vaclav Machan, Michal Blazek et un sculpteur, Jiri alternant portraits d’artistes et l’évènementiel ou la dramaturgie du reportage Netik, invités en retour à présenter leur travail à Aix. paysages tchèques. Les éditions laissent place le plus souvent à l’acte empathique du On retiendra notamment le grand tableau de Michal praguoises Kant ont édité portrait que n’auraient pas renié August Sanders ou Blazek, aux puissants contrastes colorés, inspiré par le catalogue. Plus une petite Diane Arbus. La mise en espace, quoique les paysages de Colombie. Pour 2009, l’ensemble nécessairement linéaire par force des lieux, conçue des photos sera présenté au Centre culturel tchèque sélection d’œuvres par la conservatrice Christelle Roy, sert avec de Prague pour revenir à Lyon et Cannes. d’artistes du pays. C.L. B. Lesaing - Teresa Konickova Bernard Lesaing a visité la République tchèque à plusieurs reprises. La première fois, adolescent, par Visages et paysages tchèques reportage interposé lors de l’invasion de la jusqu’au 31 décembre Tchécoslovaquie en 1968. L’impression laissée ne le Musée des Tapisseries quitte plus. Un an avant la Révolution de velours 04 42 23 09 91 (1989) il fait une escapade à partir de Munich puis www.aixenprovencetourism.com est invité en 2005 pour une exposition. S’en suit un www.imagesetrecherche.org projet en hommage aux artistes tchèques qui nécessitera trois ans de gestation et d’allers- catalogue retours. L’exposition comme le catalogue déroulent 66 ill. n&b la linéarité du voyage mais, entre les visites auprès trilingue: français, tchèque, anglais des artistes plasticiens, écrivains, cinéastes ou éditions Kant, 2008, 20 euros SECONDE NATURE ARTS VISUELS 49 Les murs ont des oreilles Seconde nature se pose à Aix où la contemporaine en présence d’artistes qui investissent les mondes virtuels et le réseau : Ville met à sa disposition l’Espace Collectif Dardex/Mort2faim, France Cadet, Lionel Sextius. Histoire d’un nouveau lieu Scoccimaro, Pascal Silondi et Damien Berthier. pérenne pour les arts numériques et les musiques électroniques Un troisième festival Le festival Seconde nature représentant près de Il y a vingt-cinq ans déjà, l’Espace Sextius à Aix quarante pour cent de l’activité de l’association, la résonnait des musiques acousmatiques de François troisième édition aura lieu en juillet prochain dans la Bayle et Bernard Parmigiani, se souvient le sociolo- continuité de Territoires électroniques et gue SamuelBordreuil, qui inaugurait le 11 décembre d’Arborescence. Il devrait se dérouler comme dernier la Scène numérique de Seconde nature dont précédemment à la Cité du livre et à l’École il est Président d’honneur.L’Espace Sextius est donc supérieure d’art, à l’Espace Sextius bien sûr, même le nouveau temple des arts numériques et des musi- si l’équipe lorgne déjà du côté de Grand Théâtre de ques électroniques : après dix ans de pérégrinations Provence et du Pavillon noir… sur le territoire Aix-Marseille entre l’École supé- En attendant la concrétisation de nouvelles colla- rieure d’art, la salle du Bois de l’Aune et la Fondation borations, le festival s’inscrira en vis-à-vis de Vasarely, Seconde nature trouve ici un espace de l’exposition Picasso Cézanne (voir page 74) en visibilité pérenne. Une installation bouclée en quel- abordant la thématique de la métamorphose. ques mois… à faire pâlir les sans logis ! Soutenue par la Ville, la Communauté du Pays d’Aix, Mais si certains s’étonnent de cette mise à dispo- le Conseil général 13, la Région et l’État à hauteur sition du lieu par la Ville, cette décision ne fait aucun de 631000 euros en 2009, Seconde nature devrait doute pour Sophie Joissains, 8e adjointe au Maire : sortir grandie de sa chrysalide et poursuivre son «On a véritablement eu raison de vous confier ce lieu Inauguration de la Scene Numerique © X-D.R. vol... municipal car on a fait confiance à l’avenir.Vous avez d’activités de proximité pour aller à la rencontre de MARIE GODFRIN-GUIDICELLI fait un parcours exemplaire depuis vos premiers pas tous les publics (scolaires, centres sociaux, à l’École supérieure d’art et, grâce à vous, nous entreprises…) et la réalisation de projets à accueillerons peut-être en 2013 la Biennale des l’international (lancement en février du projet Seconde nature / La Scène numérique jeunes créateurs d’Europe et de la Méditerranée.» européen Terraz, développement depuis trois ans Espace Sextius, Aix-en-Provence (13) Même engouement partagé par Patricia Larnaudie, d’actions à Beyrouth, accueil du BJCEM…). En 2009, 04 42 64 16 50 6e adjointe, qui soutient pleinement Seconde nature la question de la diffusion sera traitée sous forme dans son projet de développement de ses activités séquentielle avec cinq cycles de programmation au cœur de la cité, évoquant même «un pari sur constitués chacun de rencontre, workshop, l’avenir et sur l’intelligence…» exposition, concert et résidence d’artiste. Un premier Quant à Jean-Paul Ponthot, complice de la première rendez-vous sera proposé du 8 au 31 janvier autour heure, il a eu le plaisir d’accueillir à l’École supé- du Game Art, «Récréations», une manière ludique rieure d’art la première édition d’Arborescence : et artistique de s’interroger sur les rapprochements «J’ai vu dans cette association des qualités que je entre l’univers des jeux vidéo et la création souhaite voir se développer chez nos étudiants… Les contenus qu’ils mettent en œuvre sont proches de Inauguration de la Scene Numerique © X-D.R. nos réflexions pédagogiques.» Et d’ajouter : «Les territoires électroniques sont ceux que nous occupons en permanence.» Au vu de la foule présente ce soir-là, mêlant représentants des collectivités territoriales, professionnels, artistes et public, les arts numériques et les musiques électro- niques sont vraiment des territoires de partage. Un lieu pluridisciplinaire Depuis la fusion en 2007 des associations Biomix et Terre active qui a donné naissance à Seconde nature, l’équipe a mis en place un projet artistique transversal de grande ampleur.«On n’affiche pas les arts numériques comme un art nouveau. Ce sont des pratiques artistiques développées par des artistes issus de plusieurs domaines : la musique, la littérature, la vidéo, les arts visuels», rappelle son directeur Pierre-Emmanuel Reviron, intimement convaincu «que le développement des nouvelles technologies ne peut se faire sans son corollaire, le développement durable.» Concrètement, il s’agit de soutenir les artistes, «moteur et essence même du projet», par la diffusion et la production d’évènements, de concerts ou d’expositions. Par le développement aussi 50 CINÉMA TURIN | FOTOKINO | LECH KOLAWSKI Match-making À Turin, lors des 6eJournées Européen- nes de coproduction, des producteurs régionaux ont fait face à l’audiovisuel européen… Avec Taupek Au départ, il y a l’idée. De court ou de long métrage, rêves, pleine de poches, et l’a fabriquée avec l’aide de fiction ou de documentaire. Mais après, il faut des animaux de la forêt… Cet épisode a été précédé convaincre de l’intérêt et du réalisme du projet de de La Petite taupe et le parapluie, dont sept enfants de film ! C’est là qu’interviennent le pitching et le match- l’atelier animé par Catherine /Vincent ont créé la making. Ces pratiques, évidemment américaines, bande son. sont apparues en Europe il y a une dizaine d’années, Petits et grands ont pendant quelque temps oublié la dans les forums professionnels. La première consiste pluie, le froid, les embouteillages en rêvant avec la à présenter son projet, en quelques minutes, devant petite taupe. un parterre de gens susceptibles d’être preneurs. ANNIE GAVA Quant au match-making, c’est une sorte de speed dating pour partenaires potentiels, la plupart du À venir à Laterna Magica temps producteurs et diffuseurs. Les gosses de Tokyo de Ozu Le dernier week-end du festival ménage de bonnes L’Union Européenne encourage vivement de tels Un mercredi après-midi d’hiver, pluvieux et glacial sur surprises cinématographiques ! forums. La Région PACA, très active en matière le boulevard d’Athènes, à Marseille. Pourtant, au La soirée de clôture, le 19déc à 20h aux Variétés, d’audiovisuel, également. Ainsi une délégation régio- Rendez-vous des Quais, des enfants sont venus, très propose un ciné concert : Gosses de Tokyo, de Ozu, nale s’est rendue à Turin, du 18 au 20 nov. Conduite nombreux, des tout-petits accompagnés d’adultes qui est un chef-d’œuvre intemporel du cinéma japonais par Isabelle Nobio, responsable du programme paraissent aussi heureux qu’eux. Ils ont rendez-vous (1932), proche du burlesque américain par l’humour, Média pour le Sud, elle comprenait quatre produc- avec la petite taupe et très vite, la salle est pleine. mais plus cruel envers les patrons, et tourné à la teurs qui ont retrouvé une centaine de leurs collègues C’est à Fotokino qu’on doit cette après-midi avec le hauteur des enfants, héros du film. Uli Wolters, dans le Lingotto, ancienne usine Fiat reconvertie en dessin animé de Zdenek Miler, une des nombreuses jazzman, accompagnera la projection de ses centre de congrès, pour trois jours de match-making propositions de Laterna Magica qui se tient 3 au compositions (percu et sax). intensif. 21 décembre. Le public a pu ainsi voir le tout Mais il y aura aussi, pour finir en beauté avec les tout Seul, Paul Saadoun, de 13 Productions, était venu premier épisode de la série, réalisé en 1957,en tchè- petits, des projections de dessins animés le matin et sans objectif précis. Mais la réputation acquise dans que, traduit en direct par Nathalie Guimard. l’après-midi des mercredi 17, samedi 20 et dimanche toute l’Europe par sa série Palettes lui a valu d’être La petite taupe est née d’une commande au 21 : des histoires de jouets aux Variétés, Mia et le assailli de propositions, dont il a jugé certaines dessinateur Zdenek Miler d’un film d’animation sur la Migou à l’Alhambra… Pour fêter Noël dignement ! intéressantes. fabrication de vêtements. C’est ainsi que la petite Alexandre Cornu, des Films du Tambour de soie, taupe (en tchèque, taupe se dit krtek) a fait ses 09 50 38 41 68 proposait un projet de documentaire qui replace premiers pas à la recherche de la salopette de ses http://fotokino.org Pétain dans le contexte des droites européennes de l’époque. Et il cherchait un partenariat pour les images d’archives. Bingo ! Outre des contacts prometteurs avec des Allemands, il a découvert qu’avec ce sujet Lech in Marseille il pouvait postuler au fonds de soutien à l’audiovisuel du Bade-Wurtemberg ! Le 12déc au Polygone Etoilé, l’association Peuple et Lech Kowalski, qui a mis en ligne une sorte de journal Deux tables plus loin, son confrère Fred Premel, de Culture-Marseille accueillait Lech Kolawski, par filmé, un projet qui allie esthétique et urgence à dire, Tita Productions, bataillait comme un diable pour faire envie de montrer les films de ce cinéaste américain camerawar.tv, en a montré le premier chapitre et avancer son projet sur Bela Tarr qui sera, s’il se d’origine polonaise, qu’Éric Vidal, programmateur de présenté celui qu’il comptait tourner à Marseille le réalise, le premier portrait filmé du cinéaste hongrois. l’association, a découvert sur Arte avec East of lendemain. Dans sa ligne de mire : le responsable des program- Paradise. Aprèslaprojectiondudocumentairetournéà Cracovie, mes de nuit de la RAI, dont l’engagement pourrait The Boot Factory, Lech a parlé avec le public nom- être déterminant. Lech Kolawski © X-D.R breux de ses choix de cinéma, de la place primordiale À ce trio de Marseillais s’ajoutaient les Arlésiens de du rythme, de sa conception du montage, l’important StationAnimation,venusprésenterLamareauxtêtards, étant les images qu’on enlève. Pour The Boot Factory, série TV pour la jeunesse, et un projet de long- son premier film en vidéo, dont la première partie est métrage d’animation, Suzy et Milpli.«Dans de gros en noir et blanc, il a suivi pendant une année de marchés comme le MIP, les gens sont peu disponibles, jeunes punks qui ont créé une entreprise de expliquaient-ils. Ici, on a le temps de discuter et ça fabrication de chaussures en cuir et a utilisé des peut vraiment tilter.En plus, on se fait une notoriété, on caméras diverses -la première étant une Hi8- de plus confronte des expériences, on détecte des talents. en plus perfectionnées adaptées aux scènes filmées. Bref on bâtit les collaborations futures.» Une rencontre passionnante qu’on aurait aimé À les voir tous à leur pupitre, défendant mordicus prolonger longtemps ! leurs projets de films dans un invraisemblable mélan- ANNIE GAVA ge d’anglais, d’italien et de français, on ne pouvait en douter ! On peut retrouver Lech Kolawski JEANNE B. sur son site www.extinkt.com FESTIVAL TOUS COURTS CINÉMA 51 Des p’tits courts, des p’tits courts, La nuit de tous toujours des p’tits courts ! les courts La 26e édition du festival plus fort, qui place le spectateur devant tions modestes, est obligé de remplacer Vendredi 5 décembre, vers 22h30, une René, en ciré jaune, «un cri sans écho» son père, très malade. Dix ans c’est en- longuefile,bienrangée,devantle Mazarin, Tous Courts d’Aix s’est dé- cherchant désespérément, tout au long core l’âge où on joue et Mika, facilement à Aix. La plupart ne dépassent pas les rouléedu1er au6décembre: du film, le chemin qui le sortira de la distrait par sa sœur plus jeune, doit faire trente ans. Tous attendent patiemment impossible, même sans dor- solitude. René de Tobias Nölle ne laisse face. Un film, austère et poignant. le début de la Nuit du Court, 21 films mir, de voir les 163 films personne indifférent. Patrice Carré pour Cinécourts n’a pu répartis en quatre programmes, qui se Il a aussi accordé une mention spéciale trancher entreZohar de Yasmine Novak terminera au petit matin. Et pour «tenir programmés ! à 4960, un film auto produit par Wing- et Sa’et asary (A la fin du jour) de Sherif le court» trois pauses avec café, bois- Alors, certains voient les «carnets de Yee Wu : Josef et Aïda essaient de se El Bendary, qui a eu aussi le prix du jury sons et biscuits. voyage», d’autres les «journaux inti- communiquer. Difficile ! Il étudie à jeunes. Cette année, une thématique : les re- mes», films expérimentaux qui peuvent Chicago et elle, à Sarajevo, ne peut sortir Primés aussi un tout premier film d’Emilie gards de femmes sur le monde, des surprendre parfois, d’autres les films sans s’exposer aux snipers. Carpentier, tourné dans un village rou- films en compétition les années précé- en compétition, 59 répartis en dix pro- Le prix Libre Court a été décerné au film, main, Les Ombres qui me traversent, Josh dentes, des films de l’histoire du cinéma, grammes (deux de plus qu’en 2007). sans paroles mais aux images parlantes, de Govinda Van Maele, à la fois drame sans oublier les quatre films proposés Tous peuvent rencontrer les cinéastes Mein Vater Schläft (Mon père dort) de et étude de milieu au Luxembourg et le dans la carte blanche des Rencontres et producteurs présents. Bien équi- Grzegorz Muskala. Mika, (excellent film d’animation de Michal Pfeffer et Films, Femmes et Méditerranée. Des librée, chacune des séances offrait Maximilian Kirchner) âgé de dix ans, Uri Kranot, Le Cœur d’Amos Klein. films drôles, graves, des films d’ani- des films pour tous les goûts ! qui vit à la campagne dans des condi- ANNIE GAVA mation, des documentaires, des films expérimentaux, des fictions, parmi les- Le coeur d'Amos Klein de Michal Pfeffer et Uri Kranot Parmi tous ceux qu’on a pu déguster, quels le dernier court métrage de quelques-uns à savourer… Blandine Lenoir, Pour de vrai. Dans Taxi Wala, Lola Frederich filme Voir tous ces jeunes (près de 350 !) avec sensibilité et poésie la rencontre assister jusqu’à l’aube à la projection de éphémère entre un chauffeur de taxi et ces courts métrages, dont certains sont une femme perdue, incapable de rentrer loin d’être faciles, fait chaud au cœur : chez elle, qui ne sait qu’une chose : par c’est entre autres le fruit d’années de la fenêtre de son appartement, elle voit travail du Festival Tous Courts en direc- passer des trains. tion du public scolaire. Cela devrait faire Dans La mort qui tue, adapté de la nou- réfléchir(etreculer!)tousceuxquiveulent, velle éponyme, Hadrien Bichet suggère aujourd’hui, réduire -voire détruire- l’édu- par le non-dit et l’ellipse la sourde cation à l’image et les enseignements violence qui anime une jeune fille, (super- artistiques. bement interprétée par Hande Kodja) A.G. après la mort accidentelle de son frère. Lucas sur terre de Maud Alpi parle du deuil non fait : Lucas sort une bouteille, puis va labourer du côté du silo, le jour de Motivé, motivé le jury ! l’anniversaire d’Isabelle qui aurait eu 25 Le public a pu rencontrer le Jury du 26e ou irrité, dérangé, découvrir des films actuels, peu de comédies mais n’est-ce ans… Tous Courts, la comédienne et réalisa- audacieux… pas logique puisque le cinéma est un trice Blandine Lenoir, le critique Pierre Ce qui les motive, c’est soutenir le court reflet de son temps ? Et puis, il y a ceux qui se sont Murat, le délégué général du Festival métrage. Certains préfèrent le terme de Les membres du jury, unanimement, re- fait remarquer ! européendufilmcourtdeBrest, Philippe «film court» parce qu’on voit mieux que prochent une certaine absence de prise Le public a donné son coup de cœur à Coquillaud et le producteur-réalisateur c’est un film. derisque, aussi bien au niveau du scénario Tony Zoreil de Valentin Potier, déjà Ron Dyens (Sacrebleu Productions). Certesontrouvebeaucoupd’universglau- qu’auniveaudelaréalisation.Tropprudents distingué à Rome, Prague et Clermont- «Tousontété recrutés pourleurhumanité», ques, de situations dures dans les courts les réalisateurs de courts sélectionnés Ferrand, qui traite de la différence sur un précise Christine Aublet-Béranger, la en 2008 ? Trop soumis aux pressions des mode léger et drôle : Tony, âgé de vingt- Coordinatrice Générale de Tous Courts. Le Jury © Delphine Pincet producteurs ? «Il m’arrive d’essayer de huit ans, a, comme toute sa famille, de Une tâche fatigante mais passionnante, pousser des réalisateurs vers des pistes très, très grandes oreilles et souffre selon eux : il faut savoir passer en une plus audacieuses formellement, nuance d’une sensibilité extrême au moindre heure et demie (durée d’un programme, Ron Dyens, mais ça résiste !» bruit. Sa vie est un véritable cauchemar et il y en a dix !) d’un univers à un autre, Le public présent à cette rencontre le jusqu’au jour où… Une idée originale, une dépasser ses propres goûts cinémato- jeudi 4 décembre à la Fnac d’Aix aura pu réalisation soignée, mais un film qui ne graphiques pour laisser leur chance à ainsi, pendant près de deux heures, faire gagne pas forcément à être revu. tous les films, repérer le REGARD derrière le point sur le court métrage. Le Jury a primé à l’unanimité un film, la caméra, accepter d’être bouleversé A.G. 52 CINÉMA JACQUES ROZIER | AGENDA Tout Jacques Rozier Pour les 20 ans d’Extérieur le 28 nov Jacques Rozier, et Bernard de Zéro de conduite dont il dresse un Nuit, en mai, Michèle Menez, acteur révélé par Du côté portrait pour la série Cinéastes de notre Berson a tenu à rendre d’Orouët, sublime dans sa recette du temps : accessible à tous et peu com- congre et roi de la samba dans Maine mun ; drôle et décalé ; intemporel et hommage à Marseille, Océan. Et le critique Emile Breton. engagé. Beau comme cette jeune fem- sur le thème au «cinéaste L’ouverture de cette deuxième partie a me qui retrouve ses 5 ans en revenant du présent», à Jacques tourné autour du «miracle» selon Rozier. dans la maison de vacances à la mer Rozier, réalisateur phare Pour la sortie de Philippine, Supplé- Du côté d’Orouët. de la Nouvelle Vague ment au voyage en terre, conçu avec Adieu Philippine aborde, l’air de rien, la Extérieur Nuit, il a raconté comment guerre d’Algérie ; Les Naufragés de l’île Dans le cadre de la sortie d’un coffret le hasard (auquel il ne croit pas) fait de la tortue détourne l’image de Pierre de six films a eu lieu la deuxième partie bien les choses : il a obtenu l’accord Richardpourdénoncerletourismemon- de la rétrospective : treize films -fictions parfait dans Adieu Philippine, film qui dialisé. Cinéaste de l’instant, Jacques et films pour la télévision où il s’est l’a projeté au premier rang de la Nou- Rozier prend le temps de nous embar- formé- clôturés par une carte blanche velle Vague, grâce à sa rencontre avec quer dans des histoires au long cours. (Take me out the ball game, comédie une chanteuse corse dont le chant fut Et pour que l’on visionne Tout Rozier Le créateur du Marcel Petigas de Maine musicale de Busby Berkeley, 1949). le point d’orgue du film. en 2009, Extérieur Nuit débloquera les Océan n’a pas dit son dernier mot ! Cerises sur le gâteau : en chair et en os Rozier est beau comme le Jean Vigo films inédits si les subventions suivent… ARMELLE MARIÉ Au programme Cinéma en résistance Au Polygone Etoilé Du 14 au 27 janvier, l’Institut de Parmi ceux-ci, les connus, Nuit et Samedi 17janvier l’association360et Dubell qui évoque le parcours d’un l’Image à Aix propose, avec un col- brouillard d’Alain Resnais ; S21, la ma- même plus propose une carte blanche prêtre anti-colonialiste à Lyon pendant lectif d’associations, de fêter le 60e chine de mort Khmère rouge de Rithy au peuple qui manque, structure de pro- laguerred’Algérie,l’abbéAlbertCarteron, anniversairedelaDéclarationUniverselle Pahn, les plus rares, Black Liberation grammation et de distribution basée à surnommé par les Algériens de Lyon des Droits de l’Homme en program- d’EdouarddeLaurot;lesplus récents, Paris. «El-bi’r», l’homme des secrets bien mant douze oeuvres humanistes ayant It’s A Free World de Ken Loach ou À Seront projetés deux films : gardés. En évoquant son parcours, les contribué à dénoncer la barbarie et à côté de Stéphane Mercurio, sans à19heures: lesAcciones(performances) témoins lèvent le voile sur cette guerre célébrer la résistance. Des films qui ont oublier Black Panthers d’Agnès Varda de Mujeres creando, féministes boli- clandestine qui se menait sur le sol de traité «les grandes questions qui ont ou Punishment Park de Peter Watkins. viennes en lutte contre les oppressions France. façonné notre vision de l’humanité au A.G. patriarcales, les schémas coloniaux, les A.G. cours de ces 60 dernières années : la politiques néolibérales. Shoah,laconditiondesfemmes,le com- Institut de l’Image (Aix) à 21h 45 : Flaming Creatures de Jack bat des Noirs américains, l’apartheid, le 04 42 26 81 82 Smith, une des figures marquantes du 360°et même plus génocide cambodgien, le sort des pri- www.institut-image.org cinémaundergroundaméricain.Flaming 04 91 91 50 08 sonniers, et la question des sans-papiers Creatures a déclenché dès ses pre- www.360etmemeplus.org et del’immigration.» (Régis mières projections l’ire de la censure Dubois). aux États-Unis et il a été longtemps interdit (Jonas Mekas et Ken Jacobs ont Le Polygone Etoilé été arrêtés en 1964 pour avoir voulu le 04 91 91 58 23 présenter publiquement.) www.polygone-etoile.com Entre les deux films, repas, débat, ren-

lc atesdAnsVarda d'Agnes panthers Black contre avec les invitées, Aliocha Imhoff et Kantuta Quiros

Samedi 14 février, à 20 heures, le collectif basé à Lyon, Grand Ensemble est invité par 360 et même plus à pré- senter El - Bi’r (le Puits) de Béatrice RENCONTRES LITTÉRAIRES LIVRES 53

On les rencontre sous des chapiteaux, sur des places ou dans des ruelles, ils prennent le frais aux terrasses et sur les balcons ; on les déguste au comptoir, pendant l’apéro, ou à une table de resto. Le charme discret Bref, ils ont la bougeotte et semblent tout faire pour attirer le public hors des lieux battus ! Pourtant, nombre de libraires proposent encore dans leurs murs des rencontres au calme, loin des rencontres de la foule. Histoire de converser entre amateurs de lecture, tranquillement, simplement. De tels rendez-vous sont fréquents, dans toute la région. En cette période de rentrée littéraire, nous avons littéraires assisté à quelques-uns uns d’entre eux. Si ces rencontres ne sont pas secrètes, C’est un fait, livres et auteurs se montrent et sortent elles n’en restent pas moins confi- de plus en plus souvent de leurs rayonnages dentielles, souvent faute de moyens de communication… et prennent parfois et de leurs bureaux… des allures de réunions d’initiés. Elles se déroulent généralement en fin d’après- parallèle entre l’écriture et le sport. Maylis de Kerangal est venu écouter la romancière à midi ou en début de soirée, à l’heure où rebondit en affirmant son mépris pour la notion d’inspiration L’Attrape-Mots. Surtout des lectrices la librairie ferme ses portes au public. et le caractère très concret, technique de son travail. Les deux fidèles, qui ont tout lu et ont des Les happy few motivés, et disponibles romanciers, dans la lignée de Flaubert, font d’ailleurs ce qu’ils questions précises à lui poser, comme à en semaine, et en début de soirées, nomment le «réglage à l’oral» du texte et revendiquent le soin une connaissance, à une amie presque. s’installent alors dans un coin agré- apporté à la langue et au rythme. Deux stylistes donc, sur des Présente aussi une jeune prof de lettres menté de quelques chaises. Face à eux, modes très différents, mais animés d’une même énergie, qu’il qui souhaite faire étudier le roman à ses le (ou les) auteur(s), derrière une table a été plus que plaisant d’entendre dialoguer et rire ensemble, lycéens. Atmosphère cosy dans un coin couverte de ses (leurs) œuvres ; à leurs dans une connivence suscitée par la rencontre. de la librairie, où peu à peu l’auteure en côtés, le ou la libraire en maître d’œuvre. vient à évoquer son parcours (brillant, Les premiers instants sont souvent Entre lectrices lui aussi) de l’enseignement supérieur à laborieux ; même si l’assistance est peu Autre lieu, autre ambiance. Catherine Cusset vit depuis l’écriture. Catherine Cusset revient lon- nombreuse, elle est très proche, donc longtemps à New York et fait cette année sa première rentrée guement sur Marie, son double très visible. Mais une fois ce cap de la littéraire en France. Mais elle est tout sauf débutante ! Un fictionnel, et aussi sur la question de la gêne et du trac franchi, la rencontre se brillant avenir (voir page 62) est son 9e roman ; et elle vient langue. Car cette écrivaine française fait et se fait bien. de se voir décerner pour lui le Goncourt des Lycéens. Elle écrit d’abord en anglais (elle dit s’y Car on a beau avoir appris que l’œuvre parle d’ailleurs avec beaucoup d’humour et de modestie des sentir moins inhibée) avant de tout se suffit à elle-même, être convaincu affres de ses rencontres avec les jeunes et de la vraie surprise réécrire en français ! que les données biographiques sont de qu’a été pour elle cette distinction. Un public particulier Marie d’Hombres a choisi la formule peu d’intérêt, voir un écrivain en chair de la lecture pour faire connaître son et en os, dans son humanité ordinaire, La Liseuse de Fragonard livre sur la Belle-de-Mai (voir page l’écouter lire des passages de ses textes 60). Avec ses complices de l’Association ou parler de son travail captive l’ama- Récits, ils se sont donné la réplique sur teur de littérature. des extraits de l’ouvrage avant de répondre aux questions de l’auditoire, Le travail du styliste qui se sont poursuivies autour d’un Eh oui, un auteur est un être humain apéro convivial et informel, dans l’esprit comme les autres, et son métier un vrai des éditions P’tits Papiers et de la labeur, qui nécessite du temps, de l’en- librairie Païdos. traînement. C’est ce qu’ont répété à Toutes ces rencontres ont bien sûr un l’envi Maylis de Kerangal (voir Zib aspect promotionnel qu’il serait 11) et Pierric Bailly (voir page 61), absurde de nier. Elles aident toutefois à invités par Dominique Paschal à la faire connaître les nouveaux-venus de librairie Prado-Paradis. Ces deux très la scène littéraire et apportent un jeunes écrivains, cités pour de grands éclairage intimiste sur les œuvres. Et un prix littéraires, ont choisi de raconter grand plaisir littéraire, lorsqu’au détour l’adolescence en été, de «traquer la grâce de questions anodines surgissent de adolescente, la beauté derrière la difficulté vraies interrogations sur la démarche de d’être» de cet âge.Tous deux ont évoqué création. Un bonheur discret donc, leur volonté de transcrire la langue de mais qui gagnerait à être partagé, et à la jeunesse actuelle, et la difficulté de la s’épanouir à la lumière ! tâche. Car, en dépit des apparences, il FRED ROBERT n’y a «rien de spontané», comme le sou- ligne Pierric Bailly, qui établit un 54 LIVRES RENCONTRES LITTÉRAIRES La préhistoire prend des allures féministes ! Des romans d’aventures qui mettent en scène des filles… à nouveau ! Et Christine Féret-Fleury adore répondre aux questions des ados, ses lecteurs… C’est pour évoquer son roman Chaân, la Rebelle, paru en Est-ce que vous faites un plan avant de commencer à écrire ? 2007 dans la collection Castor Poche chez Flammarion, que Je ne fais jamais de plan au départ, mais 10 ans d’édition l’auteure, qui réside tout près de là, est venue rendre visite aux m’ont permis d’en travailler la technique avec les auteurs. Dès élèves du collège de Trets. De sa voix douce et nuancée, elle les deux premiers chapitres je sais quelle sera la taille de mon répond au feu roulant des questions, et mène le jeu. livre. J’écris lentement, plusieurs livres à la fois, par tranche de Les élèves : Pourquoi la préhistoire ? Pourquoi une fille ? une heure pas plus de deux pages, ensuite, l’écriture perd en Christine Féret-Fleury : J’étais un jour en panne densité. Le récit avance cependant, les évènements d’inspiration, alors je suis sortie me promener sur la colline s’imbriquent, c’est parfois comme sur une route, on ne voit derrière ma maison. C’est là que je l’ai rencontrée… Elle pas après les virages, il faut avancer pour que la suite se courait dans les herbes, un épieu de bois durci au feu à la dévoile. main. Elle s’est à peine retournée. J’ai su que c’était elle qui Est-ce qu’en ce moment vous écrivez un autre roman ? tenait mon histoire, j’ai eu envie de la suivre. Je me suis Bien sûr. Aujourd’hui, je suis en train d’écrire une trilogie plongée dans des livres concernant la préhistoire, je me suis dont le premier tome est paru, Atlantis. C’est une expérience documentée. Pour cette période, les informations ne nouvelle, puisque je l’écris avec ma fille. Je dois souligner constituent pas une somme énorme, j’avais dû travailler qu’elle est ma première lectrice et ma première critique ! beaucoup plus pour des romans ayant pour cadre le XVIIIe Pourquoi accepter de rencontrer des élèves ? siècle comme La Tour du silence ou les débuts du XXe pour Parce que je n’ai pas eu cette chance enfant. L’existence de SOSTitanic. La difficulté du roman historique, c’est que tout l’auteur était totalement dissociée du roman, alors que pour doit être vérifié dans les moindres détails. Ce qui rend la moi c’était quelqu’un de magique ! Cela le rend plus humain, recherche difficile, ce sont les sources qui se contredisent, alors et c’est bien… on est contraint à déterminer ce qui nous apparaît comme le Pour nous, même si nous vous rencontrons, vous conservez plus vraisemblable… cette magie ! Le nom de Chaân ? … J’ai un cheval qui se nomme Chawan, il aime la liberté, PROPOS RECUEILLIS PAR MARYVONNE COLOMBANI comme mon héroïne. Elle tient aussi de moi, elle est très maladroite, mais c’est pour cela qu’elle ne se sent pas à sa place et qu’elle en revendique une autre. Ses difficultés viennent du fait que ses proches refusent de lui donner un autre statut. C’est donc une féministe de la préhistoire ? Mon histoire, ou plutôt celle de Chaân, se déroule pendant De Barreau en trophées la dernière période de la préhistoire, le néolithique, il s’agit d’une période charnière, les peuples nomades sont en train de Le polar à la barre se sédentariser. C’est pour cela que je l’ai trouvée intéressante Succès pour la première rencontre littéraire au Barreau, vendredi 12 décembre. Nombreux le public à traiter, en fait toutes les charnières de l’histoire le sont, car de la Maison de l’Avocat, nombreux aussi les auteurs de romans judiciaires, policiers ou tout simplement les mentalités bougent, changent. Je me suis inspirée des noirs. Pas mal d’entre eux étaient d’ailleurs juges et parties, puisque sur la vingtaine d’écrivains présents, paysages de l’Ukraine pour le cadre, puisque c’est là que les une bonne moitié sont ou ont été avocats, juges ou flics ! De quoi donner aux débats du jour, autour de premiers chevaux seront domestiqués. Et l’un d’eux sauvera Mythe du polar et réalité judiciaire, toute leur épaisseur. Les discussions se sont déroulées autour de Chaân. tables rondes animées, faisant état, en dépit de tous les discours alarmistes, de la vitalité du genre, de sa Pourquoi écrire ? diversité. De sa nécessité aussi, face à une réalité judico-policière tellement banale qu’il faut bien la J’ai toujours aimé lire et je n’ai jamais cessé de raconter des mythifier un peu ! histoires, à mes neveux, ma famille. Il n’y a qu’une seule façon de remonter dans le temps, c’est par l’intermédiaire des livres. L’Arménie aux Archives La lecture et l’écriture constituent le meilleur moyen de vivre Le public s’est également pressé aux ABD Gaston Defferre, samedi 13 décembre, pour assister au 2e mille vies. C’est pourquoi sans doute j’ai deux métiers, celui Festival National du Livre Arménien. Toute l’intelligentsia arménienne était là, dès le début d’après- d’éditrice et celui d’écrivain. midi, pour la séance de dédicaces ; de très nombreux auteurs, de tous les genres et pour tous les publics, Où écrivez-vous ? réunis dans une ambiance très conviviale. À noter l’énorme succès de Sophie Audouin-Mamikonian, Partout ! Mais je dois avouer que je préfère toujours qui n’a pas eu le loisir de lâcher son stylo, tant étaient nombreux les jeunes et fervents lecteurs de sa série m’installer devant un mur pour ne pas être distraite, n’avoir Tara Duncan, «la petite sœur française de Harry Potter», paraît-il. Un peu vexant pour le réalisateur pour seule fenêtre sur le monde que l’écran de mon Guédiguian ou l’historien Mutafian ! La journée s’est conclue par une table ronde sur la presse ordinateur. J’écris tous les jours. L’écriture selon moi, c’est communautaire arménienne aujourd’hui en France, avant la remise très attendue des prix : Henri Verneuil comme un muscle, il lui faut un entraînement quotidien. Il 2009 (roman) et Arménia 2009 (essai), entre autres, sous la présidence d’honneur de Mme Edmonde n’y a pas de «robinet» d’inspiration, c’est une idée romantique, Charles-Roux Defferre. l’inspiration c’est du travail. FRED ROBERT AGENDA LIVRES 55

Au Programme

AIX-EN-PROVENCE FORCALQUIER Sabah, éd. Grandir, 2008). Jusqu’au 8 janvier. Des livres pour rendre l’art plus proche : Une maison d’édition bien lunée : à la découverte rencontre/débat animée par Sophie Curtil, peintre des éditions Nykta, du 5 janvier au 4 février ; Librairie Païdos et graveur, créatrice de la coll L’Art en jeu aux rencontre et lecture avec Jacques Fulgence et 04 91 48 31 00 éditions du Centre Pompidou, et de la coll Kitadi Pierre Courtault autour du livre Cher Douglas, aux éditions Dapper. Le 15 janvier à 18h30. le 8 janvier. TOULON Manga : les secrets d’un phénomène : Cité du livre Librairie La Carline analyse des codes graphiques et différents genres 04 42 91 98 88 04 92 75 01 25 seront traités. Jusqu’au 27 déc.

ARLES MARSEILLE Bibliothèque Municipale La croissance : idéologie ou nécessité ? Exposition En découdre : le textile 04 94 36 81 20 Dans le cadre du forum Décroissance, vers une dans tous ses états, avec des œuvres de Florence décroissance conviviale ? Garabé, Katarina Kudelova, Gregg Smith, Attac Pays d’Arles organise deux tables rondes Kimsooja, Maja Bajevic, Angelo Filomeno, le 17 janvier : Miguel Rothschild, Sébastien Rinckel, Julie la première, de 15h à 17h30 réunira Paul Ariès, Legrand, Cathryn Boch, Aicha Hamu, Santiago Jean-Marie Harribey Borja. Du 8 janvier au 21 février. et Jean-Claude Girard ; la seconde, de 18h à 20h, Claude Llena, Les Casseurs de pub, la Espace Ecureuil, Coopérative Longo Maï de Treynes, les marais 04 91 54 01 01 du Vigueirat et l’association Oasis Carapa dans le Gard. Chilpéric 1er, portrait d’un roi Mérovingien mal aimé : La confédération paysanne organisera un repas conférence de Frédéric Armand, auteur du livre paysan à partir de 20h. Chilpéric 1er, le roi assassiné deux fois aux éditions La Louve. Le 17 janvier à 15h dans l’auditorium. Attac Pays d’Arles, Formation et enseignement des sciences : quelles 04 90 49 63 45, réformes pour quels objectifs ? Pierre Arnoux, www.local.attac.org/13/arles chercheur à l’Institut de Mathématiques de Luminy évoquera les réformes des années 80 et 90 et AVIGNON analysera les réformes en cours. Le 24 janvier à 15 Rencontre/débat : Diffuser du jazz en région, animé à l’auditorium. par Jean-Paul Ricard, directeur de l’Ajmi, le 17 janv à 14h30; État du jazz en Belgique francophone, Marseille-Barcelone : itinéraires animé par Dominique Simonet, journaliste au photographiques : cette exposition réunit deux quotidien photographes, Frédéric Celly et Rodolfo Garcia La Libre Belgique, le 17 janv à17h. autour d’un projet commun qui est de saisir les contrastes de ces deux villes méditerranéennes. Théâtre des Doms, Jusqu’au 3 janvier dans la salle d’exposition. 04 90 14 07 99, Les clients en question : exposition proposée dans le www.lesdoms.eu cadre de l’enquête menée par le mouvement Le Nid sur les clients de la prostitution en 2004. Photos de COUSTELLET Marc Helleboid. Du 6 au 14 janvier dans l’allée Exposition photo organisée par le collectif Des Yeux centrale. Dans Les Oreilles intitulée Le Pixel Noir : photos et graphisme mêlés autour du film noir, avec une BMVR Alcazar, scénographie construite à l’instar d’une enquête 04 91 55 56 34, policière dans laquelle le public se fait détective. www.bmvr.marseille.fr Du 19 au 24 janv La Gare, Exposition des dessins originaux de Kamel Khélif 04 90 76 84 38, (pour L’Algérie, texte de Djilali Djelali, éd. Grandir, www.aveclagare.org 2008) et de Mathilde Chèvre (pour La Maison de 56 LIVRES JEUNESSE Très grands albums pour tout petits ! De très grands livres sont aventure de séduction, sans estomper le interdictions des adultes. arrivés dans les librairies, côté féroce et naturel de l’animal. Deux livres à partager avec les enfants... presque aussi grands Au pays de Titus (28x42 cm) met en s’ils consentent à vous les prêter ! que leurs futurs lecteurs. scène un petit garçon de 7 ans qui ne CHRIS BOURGUE Encombrants mais veut pas parler : il préfère regarder les adultes dans les yeux et rêver aux réjouissants ! nuages, aux feuilles des arbres, au Oméga et l’ourse (40x30 cm) présente mouvement des vagues. Il ne veut pas l’histoire inquiétante et captivante se presser, pas obéir. Claudine Galea d’Oméga, petite fille brune aux grandes joue avec les mots, invente de nouveaux lunettes rondes, qui s’échappe avec une verbes d’action, détourne les emplois ourse dans la forêt pour vivre une belle habituels, créant un langage inventif et aventure, qui pourrait mal tourner... savoureux comme celui des enfants. Les illustrations composites de Béatrice Goele Dewanckel, sa complice pour la Alemagna sont un mélange de 3e fois, propose d’immenses peintures Oméga et l’ourse Au pays de Titus découpages, de photos, de dessins, de d’une végétation et d’un bestiaire très Illustrations Béatrice Alemagna Illustrations Goele Dewancke collages avec de beaux camaïeux de colorés, de personnages noirs et Texte Guillaume Guéraud Texte Claudine Galea bruns et de verts ; le texte de Guillaume rébarbatifs, et utilise de grands éditions du Panama éditions du Rouergue Guéraud conte sobrement cette graphismes rouges et noirs pour dire les 16 euros 22 euros Livre rose, livre objet Il est des jours où les livres décident de Qui frappe à la porte dérangeant toutes s’évader de leur forme première, de les activités de la maisonnée, jeux de rajouter des trous à leur quatrième de balles, de déguisements, douche, linge à couverture… de susciter une curiosité ranger, cueillette ? Détails loufoques, tactile, d’égarer le mode classique de cadrages étonnants, traits vagues et Le tout petit invité reliure, de laisser conserver au papier la tendres… Hélène Riff dans ce petit Hélène Riff continuité de l’histoire, suite bijou aux teintes pastel raconte pour les Albin Michel Jeunesse, ininterrompue des feuilles, en fait, ici, tout petits comme pour les plus grands 14,90 euros une seule, qui peut aussi se transformer les bouleversements qu’amène en construction mouvante. Livre à lire, immanquablement une naissance. Une à toucher, à construire, à regarder aussi, petite merveille sensible et tendre, à avec des dessins qui semblent s’être mettre entre toutes les mains. évadés de tableaux de Chagall. MARYVONNE COLOMBANI Geste domestique Un matin, tous les gants sautent de la histoire que celle que Mon petit doigt L’album éclate de couleurs et de corde à linge et deviennent Chouette, m’a dit(e). créativité. Et puis, quelle charmante Paon ou Cygne. Doigts-Rouges, qui n’a Et des jeux de mains pas vilains du tout. manière de dire qu’à deux, on est plus pas de nom véritable puisqu’il n’a pas Catherine Galodé, l’auteure marseillaise heureux. trouvé sa moitié, décide à son tour de de ce magnifique album, vient de FRED ROBERT faire le grand saut. Du rideau à la l’audiovisuel. Elle s’inspire ici d’un chemise, de la machine à laver à la travail réalisé pour la télévision avec le corbeille à linge sale, le pauvre gant plasticien Mario Mariotti. Les mains solitaire part en quête de son alter ego, peintes d’alors, les ani-mains, sont rencontrant sur son chemin toutes devenues des mains gantées. Unies, sortes d’animaux, de drôles d’oiseaux, zébrées, à pois, en couleurs, elles restent qui le houspillent, le chassent, le le signe de la métamorphose de Mon petit doigt m’a dit regardent de haut. Après un périple l’inanimé en vivant animé, et donnent Catherine Galodé semé d’embûches, sur fonds de à cette épopée d’appartement un éd. Alice Jeunesse, serviettes éponge et de vêtements caractère inédit et très original, qui 12,90 euros colorés, le vaillant Doigts-Rouges devrait enchanter les enfants… à qui trouvera enfin gant à sa main. Uni à rien n’interdit d’imaginer d’autres ani- Pouce-Jaune, il deviendra «le plus beau gants et de leur inventer de nouvelles Coq du quartier». Une bien jolie aventures. 57 Que philosopher c’est apprendre à grandir C’est forte de ce principe que Juliette doutes et les agacements de l’enfant. Grégoire a créé, il y a un peu plus d’un Bien sûr, on trouve tout au Grand an, L’Initiale. Cette nouvelle maison Magasac, mais est-ce qu’on y trouve le d’édition marseillaise publie une bonheur ? Là est la question… que le collection «philosophique» destinée au papa préfère d’ailleurs éluder. tout jeune public. Même format, Le texte, violine et fuschia, épouse, sur 16x16 cm et 24 pages, même prix, 11 fond anis, les superbes illustrations de euros, soin semblable apporté aux Michel Diacoyannis. Collages et assem- illustrations, les livrets de la collection blages de photos, de papiers colorés, de abordent certaines grandes questions pliages, de traits et de dessins, leur que se posent les petits. fantaisie poétique fait de ce bref ouvrage Farces et Attrapes Le premier, La Grande Couverture, dit un tremplin pour la réflexion, mais illustrations de Michel Diacoyannis la naissance de l’autre, et la nécessité de aussi pour l’émotion esthétique. Bien texte de Juliette Grégoire l’accepter. Lothar dans le Grand Cycle attrapé, l’hypermarché! L’Initiale, 11 euros traite du deuil et de la souffrance. En F.R. tout, six titres pour permettre aux plus jeunes de comprendre et de distancier. Et à leurs parents de formuler plus aisément, au détour de la lecture. Parmi ces jolis livres cartonnés, mention spéciale à Farces et Attrapes. À la manière des disciples de Socrate, père et enfant dialoguent. Et à la frénésie consumériste du papa répondent les Apprivoiser la mort À l’image de son jeune héros, son charme et son originalité, ce sont Guillaume Bianco, dessinateur et aussi tous les autres éléments qui s’y scénariste de Billy Brouillard, semble intercalent : galerie de portraits maca- doté du «don de trouble vue», celui que bres, extraits de la Gazette du Bizarre, les adultes perdent en tuant l’enfant qui fiches techniques sur certaines créatures est en eux, celui qui conduit son crayon surnaturelles, vampires, vermicolles et et son histoire sur les sentiers non battus autres coléopandres, poèmes fantasti- d’une imagination fantasque. Mais quesetmiscellanéesoffrentdeséchappées aborde de front le sujet, trop souvent réjouissantes de fantaisie et d’humour tabou aujourd’hui, de la mort. noir. Dès la couverture, qui reprend la Ainsi, au fil des pages, qui à partir du formule inscrite sur les cadrans solaires chiffre 13 n’en bougent plus, Billy ap- «Vulnerant omnes, ultima necat» et prend à composer avec l’irré-médiable, Billy Brouillard, le don de trouble vue s’orne d’un bestiaire effrayant, on est à dompter ses peurs. Une leçon de Guillaume Bianco fixé. Dès les premières vignettes aussi : sagesse pleine d’esprit(s). éditions Soleil, collection le chat Tarzan est mort. Billy ne Cet album inaugure la collection Méta- Métamorphoses, 22 euros comprend pas ; au début, il croit même morphose de la maison d’édition que l’animal fait semblant. Et lorsqu’il toulonnaise Soleil. Cette collection a lui faut bien admettre le fait, alors, il va pour but d’éditer des œuvres à mi- chercher à percer le mystère de la mort. chemin entre le roman graphique et Billy va se mettre en quête de son chat l’album jeunesse. Avec une prédilection disparu et affronter les esprits pour le fantastique, mais surtout pour nocturnes, même les plus terrifiants. les œuvres qui abordent par la fiction L’album, pourtant, ne se résume pas à la des questions philosophiques. Avec BD qui retrace -vignettes noir et blanc Billy Brouillard, Métamorphose a pris arrondies, bien circonscrites, trait un bon départ! soigné et aigu-, la lutte du garçonnet FRED ROBERT contre les images de la mort. Ce qui fait 58 LIVRES ARTS

Pour gourmands La collection Solo, aux éditions Le Mot et le Reste, cinéphiles nous dépose au carrefour Ce n’est pas un coup d’essai pour les situation que le gourmet qui doit de la littérature et de la auteurs : ils ont déjà proposé aux composer un menu. On lui présente une gourmets des recettes inspirées par les carte où tous les plats le tentent…» musique le temps d’un texte œuvres d’Agatha Christie, ou de la écrivait Hitchcock dans la préface à Comtesse de Ségur… C’est au tour du L’Homme du Nord-Express de Patricia court, fruit d’une rencontre cinéaste amateur de bonne chère, Highsmith. Alfred Hitchcock. L’ouvrage, publié Pour composer leur livre, Anne marquante avec une chanson, aux Cahiers du Cinéma, superbement Martinetti et François Rivière ont fait un album, une pochette illustré par des photos des films du le bon choix de montage : alternant maître ou par les photographies récit de la vie du cinéaste, anecdotes culinaires de Philippe Asset nous croustillantes et 80 recettes retrouvées Beatlesmania balade de Londres à la Côte Ouest des au fil des films, sans oublier cocktails et Le Rouge et le Bleu ou comment les États-Unis, avec quelques escapades «soirées», le livre se déguste chansons des Beatles infusent dans l’exis- ailleurs. L’occasion de saliver devant le savoureusement. La sauce est parfaite ! tence est tiré de la plume alerte de tajine de la Mamounia de L’Homme qui ANNIE GAVA Jérôme Attal, lui-même chanteur en savait trop, ou devant le smorgasbord auteur compositeur. Cet amoureux du Rideau déchiré. Ceux qui préfèrent des mots nous livre son ressenti sans rester en Amérique pourront essayer la concession autour des deux compila- salade new-yorkaise de La Corde, ou le tions phares des quatre garçons de corn chowder de la Maison du docteur Liverpool. Né en 1970, et bien trop Edwardes (le maïs n’y était pas jeune pour avoir vécu l’effervescence transgénique !). Et les becs sucrés ne de la Beatlesmania, il ne nous résisteront pas au moelleux Kendall de emmène pas dans la nostalgie rouge La Mort aux Trousses, aux muffins aux et bleue. Ce n’est pas une énième biographie, ni une analyse myrtilles (sauvages !) que réussit musicale, juste un lien émotionnel et affectif écrit de manière divinement Miss Gravely dans Mais La sauce était presque parfaite habile et subtile, un regard éthéré sur un compagnon de route Qui a tué Harry ? ou au birthday-cake Anne Martinetti musicale qui a accompagné sa jeunesse. Un exercice de style de Cathy, tout rose, des Oiseaux. et François Rivière singulier. «Au moment de choisir le sujet d’un film, Les Cahiers du cinéma, je me sens à peu près dans la même 29,90 euros Le rouge et le bleu Jérôme Attal Ed. Le Mot et le Reste, L’art chez soi coll Solo, 7 euros Paru aux éditions Flammarion sous la rare, la première du genre, a la qualité direction de Nadia Candet, le très bel de présenter en regard de leurs œuvres Spooky who ? ouvrage Collections particulières, d’art les collectionneurs eux-mêmes, Qui connaît donc les Spooky Tooth? 150 commandes privées d’art sous forme de portraits très réussis par Hélas plus grand monde ! Le mérite contemporain en France se visite Marie Clérin et Carine Soyer. d’avoir ressuscité Spooky two, le second plus qu’il ne se feuillette. Invités à FRÉDÉRIC ISOLETTA et meilleur album du groupe de blues- déambuler dans les lieux de rock outre manche (1969), revient à collectionneurs mécènes français et EmmanuelLoi.L’intermédiaireàcette notamment à Marseille, vous serez sous heureuse entreprise ? Les éditions Le le charme de leurs collections Mot et le Reste et leur collection particulières présentant plus de 150 Solo. Joli coup avec le blues rock œuvres d’art contemporain. Parfois in structuré et psychédélique qui rappel- situ en intérieur ou en extérieur, Buren lera de vieux souvenirs à ceux qui l’ont côtoie Garouste, Arman, César, vécu. Essai libre et réussi pour le Raynaud, Harring, Faustino ou encore romancier qui nous conte sa relation «à vingt piges» avec les Lapie. Intimiste, ce beau livre grand bacs regorgeant de merveilles chez le disquaire du coin. Spooky format jouit du concours du Tooth / Two, ce pou qui tousse se déguste sans chichi et peut photographe André Morin dont les donner de bonnes idées aux amoureux du rock. remarquables tirages rendent formi- FRÉDÉRIC ISOLETTA dablement ces intérieurs confiés au génie créatif d’artistes de renommée Spooky Tooth internationale. Agrémenté d’essais Collections particulières Emmanuel Loi pertinents sur la commande privée dir. Nadia Candet Ed. Le Mot et le Reste, (historique, droit…) cette publication Flammarion, 65 euros coll Solo, 7 euros 59

Expérience d’écoute Biographie La collection «Solo» publie de petits livres dans lesquels un auteur décrit les émotions ressenties à l’écoute d’un Le 22e ouvrage de la série «Mélophiles» disque, d’un musicien, d’un groupe (voir ci contre). (s’ouvrant «aux grands compositeurs peu Le dernier opus est signé par un jeune marseillais (né traités par l’édition francophone, voire à Toulon) vivant à Paris. méconnus»), s’intéresse à un «classique» Jérôme Orsoni, va au-delà de la présentation scolaire du XXe siècle : Eric Wolfgang de l’album Standards, enregistré en 2001 par le groupe Korngold. Il arrive que l’on cite son «post-rock» Tortoise. Il développe, avec nuances, nom à propos de son opéra symboliste l’intérêt historique du dépassement de la structure créé en 1920 : Die tote Stadt (La Ville couplet/refrain ou de la tendance à la disparition de la morte) d’après Bruges-la-morte de voix dans cette nouvelle esthétique. Il analyse les plages Rodenbach. Mais on sait peu de du disque, comme un musicologue le ferait d’une choses de cet enfant prodige, né en sonate classique, interpelle le lecteur en lui faisant 1897, qui faisait l’admiration de partager l’intimité de son expérience acoustique… A Mahler et Strauss, fils d’un critique découvrir ! musical influent et élève de Zemlinsky. Erich Wolfgang Korngold J.F L’œuvre conséquente de ce Viennois, Nicolas Derny juif exilé aux USA (où il composera des Éditions Papillon, Tortoise/Standards musiques de films), adopte une écriture 16,70 euros Jérôme Orsoni complexe malgré un ancrage dans le Editions Le mot post-romantisme tonal… jusqu’à sa et le reste, mort en 1957. Son catalogue est ici 7 euros décrypté par de judicieuses analyses, au fil d’un récit chronologique illustré de photos d‘archives. J.F.

I can’t get no… Voici un livre mythique ! En 1972, Robert Greenfield suit les Rolling Stones lors de leur tournée américaine : peut-être le premier grand «Tour» vérita- blement «pro» de l’ère du rock. A cette époque les Stones sont «l’attraction mondiale numéro un. Le seul grand groupe des années soixante encore présent sous sa Légende forme originelle…» Après le désastre d’Altamont en 1969, la bande à Mick et Keith sillonne à nouveau les Voici le premier ouvrage en français sur States, déclenche des émeutes de kids, entre des soirées la légende du rock Freddie Mercury ! de débauche, nuits d’alcool et de drogue, et offre mira- Cette biographie comblera les culeusement des concerts légendaires. Cet ouvrage, aficionados nostalgiques des gigan- «l’un des meilleurs jamais écrit sur le rock’n roll», épuisé tesques concerts de Queen, de leurs depuis trente ans, sujet aux rumeurs les plus extra- clips vidéos baroques… et des chansons vagantes, reparaît en français : brut, psychédélique…! mémorables : Bohemian Rhapsody, We J.F are the champions ou The show must go on… Le jeune écrivain Selim Rauer a interrogé les proches, mené une S.T.P., à travers enquête pointilleuse sur les origines du l’Amérique avec chanteur né à Zanzibar en 1946... C’est les Rolling Stones que ce «Divo» pop, foudroyé par le Sida Robert Greenfield en 1991 (près de trois ans après sa Editions Le Mot dernière prestation scénique), avait ses et le Reste, secrets, ses failles… L’auteur en dévoile Freddie Mercury 23 euros une part, traçant finement le destin Selim Bauer fabuleux d’un jeune Indien parsi, élevé éditions Fayard, près de Bombay et répondant au nom 20,90 euros de Farrokh Bulsara! JACQUES FRESCHEL 60 LIVRES ESSAIS Cache Cash, un jeu d’économistes Ça va Connaissez-vous un économiste ? En avez-vous déjà rencontré un ? Non ? Nos deux auteurs, membres de la confrérie, vous serviront de guide dans un monde fabuleux où analyses sau- cartonner ! grenues et grandes questions existentielles se côtoient... Dans Carton, mobilier / éco-design / architecture, Olivier Leblois retrace la Leur but est évidemment initiatique : prévisions des économistes ! Surtout, fabuleuse histoire de ce matériau. dévoiler les attirances, les préoccupa- leur morceau de bravoure illustre bien L’auteur est lui-même architecte et tions, les compétences, les appétences de tout l’intérêt de leur analyse décalée. enseignant à l’École Spéciale d’Archi- ces bons esprits qui bouillonnent au Face au créneau libéral, face à tous les tecture de Paris (E.S.A). Spécialisé dans fond de leurs laboratoires d’écono- experts pontifiants ou aux politiques les projets urbains et les collèges, il a mistes… Sur un mode amusant ils nous éplorés et menaçants, nos deux héros notamment crée le Fauteuil Carton entraînent, grâce à de lumineux tra- pourfendent un thème sacré entre tous intégré aux collections permanentes de vaux, à reconsidérer notre approche de pour la nation : la dette publique. Non nombreux musées du monde ainsi que sujets triviaux : la monogamie vaut-elle seulement c’est un débat inutile, mais les Tables Basses Carton, Étagères, le coup ? Sans considérer sa justification pire,ilesttotalementinepte!Oui,ladette Paravent Won… morale, sans penser aux bonnes mœurs est utile ; non, l’État n’est pas en faillite Au fil des pages son ouvrage permet de ou aux préceptes religieux, mais d’un et le considérer comme une entreprise à découvrir le carton en tant que maté- simple point de vue de rentabilité ! Et rentabiliser est une aberration ! riau, mais également ses possibilités bien oui, il est plus coûteux (économi- Bien d’autres thèmes jalonnent ce par- architecturales et de design. Écologi- quement et socialement) d’avoir plu- cours «éconoclaste» et rafraîchissant : que, économique, modulable à souhait sieurs femmes -ou maris- qu’un seul l’OMC et la banque mondiale, qui ne et léger, le carton peut donc aussi accé- Sexe, drogue…et économie partenaire ! servent à rien ; les maisons de disques der au rang de matériau d’art... Les Pas de sujet tabou pour les économistes Armés de leur crible, les deux compères Alexandre Delaigue, ou les laboratoires pharmaceutiques, années 60 voient émerger des meubles se mettent ensuite à examiner l’inter- Stéphane Ménia qui savent profiter de toutes les situa- en carton, en premier lieu aux États- diction de fumer dans les lieux publics tions ; le bonheur, et comment l’appré- Unis, puis en France avec un architecte: Pearson Education France,19 euros ou à l’école… cier… On l’aura compris, nos deux Jean-Louis Avril et son fauteuil cylin- Mais même lorsqu’ils naviguent plus compères, à la langue vivante et drôle, dre de 1966. Puis viennent les années À consulter également, près des questions usuelles de l’écono- nous permettent de porter un autre 70 et 80, avec les très médiatisées le site des deux «éconoclastes» : mie, ils portent un regard détaché et regard sur les petits côtés de nos vies ! productions d’un autre architecte : http://econo.free.fr ironique sur le problème du réchauffe- RENÉ DIAZ Franck Gehry (musée Guggenheim à ment climatique, ou sur l’inanité des Bilbao). De nos jours, en France, le concept s’est un peu plus démocratisé, avec notamment l’arrivée en 1993 d’Eric Guiomar et de sa Cie Bleuzen La Belle abandonnée qui par des formations en ricochet «Oui, on parle sans arrêt de dégringolade «voix fictives largement inspirées de voix et comorienneetafricainedepuisles années étend sa technique sur tout le territoire. du quartier. Mais cette dégringolade est de personnes réelles» évoquent tour à tour 80. Elle retrace aussi quelques moments Ainsi, l’éco-design, fort à la mode, transitoire. Le changement est en cours. leur arrivée en France, leur installation dramatiques, comme le bombardement semble avoir de longs jours devant lui ! Mais il ne faut pas se tromper,par exemple dans le quartier, leurs difficultés et leurs américain en 1944 ou la fermeture Alors, peut-on s’asseoir dans un fauteuil en construisant tous azimuts. Ce qu’il joies. Cette chronique dramatisée suit progressive de toutes les entreprises qui en carton ? Pirouette cacahouette… nous faut ici, c’est un vrai projet politique un siècle d’immigration : italienne au faisaient vivre le quartier. Assurément oui ! Ce très beau livre d’aménagement qui ne se réduise pas à de départ, pied-noir dans les années 60, La parole est livrée quasi-brute, sans exhaustif aux textes soignés et aux la construction immobilière. Si on fait de fioritures. Cette sincérité est touchante, illustrations pratiques est là pour en ce quartier un lieu-dortoir, il mourra.» comme le sont les photographies de témoigner. Serge Pizzo, président du CIQ de la Julien Anselme, qui font un terrible SONIA ISOLETTA Belle-de-Mai ne mâche pas ses mots. écho aux documents d’archives. Les Et annonce dès la préface, l’objectif du vieilles photos noir et blanc témoignent livre de Marie d’Hombres, D’une Belle de la vitalité du quartier : rues en chan- à l’autre : restituer la mémoire d’un tier, ouvriers et artisans au travail ou en quartier populaire de Marseille, rendre habits du dimanche ; même sur ces hommage au lieu et à ses habitants, afin images arrêtées tout cela vit et bouge. de lui donner un avenir. Aujourd’hui, sous le béton écrasant des Pour réaliser ce parcours de vie de piliers de l’autoroute, dans les rues aux migrants, Marie d’Hombres a choisi façades cimentées, derrière les portails de relater l’histoire du 3e arrondis- entrouverts des usines désaffectées, c’est sement de Marseille, au fil des récits de un présent de déshérence et de paupé- ses habitants. Ceux-ci ont été entendus, risation qui saute aux yeux. filmés, leur parole a été recueillie D’une Belle à l’autre, Raison de plus pour soutenir tous les pendant près de 2 ans. De ces multiples Parcours de vie de migrants à Marseille acteurs du projet dont ce livre est une Carton interviews est né le livre, une pièce en 7 Marie d’Hombres des facettes, afin que se réveille enfin la Mobilier/éco-design/architecture actes avec arrêts sur chœur des rumeurs Éditions P’tits Papiers, Belle endormie. Olivier Leblois et épilogue sans concession, où des Association Récits, 15 euros FRED ROBERT éd Parenthèses, 32 euros 61 Rap, tulipes et tagazous J.G «Je suis très très chaude, nous crache Missy les barbares d’un autre village, soirées Elliott du poste de Johannes. (…) Missy alcoolisées, fêtes municipales et Ballard éclabousse. Un bain de mousse, une baignades au lac. C’est l’été, il fait cambrousse de coton. Je flotte, je bronze. chaud, les corps éclosent, s’ornent de Son chant bouillant.» Ainsi démarre le tulipes. Le désir s’en mêle. Et, sous l’art ou la récit, sur fond de R&B au beat «en consommé de la glande, sous le plastoc», et de syntaxe syncopée. C’est détachement apparent et les expressions vraie vie Lionel, dit Petit Lion, qui tient cette crues, l’émotion affleure, amoureuse, chronique adolescente, estivale, amicale. «Nous vivons dans un monde de jurassienne et déjantée. Revenu pour Dans ce premier roman, Pierric Bailly simulacres… la relation tissée entre l’été de Besac (Besançon), où il traîne compose un hymne à l’adolescence hommes et femmes de nos jours est une toute l’année ses guêtres d’étudiant contemporaine, à cet âge qui flotte sorte de roman. Nous vivons nos propres désabusé, «c’est pas mon truc les études», entre deux, à tous les niveaux. À travers vies comme des vies légendaires.» Ainsi il retrouve avec délices son bled du 3.9. son narrateur, il porte sur le groupe de parlait le maître, dans un de ses derniers et ses potes. Ceux de sa sœur Diane, en «tagazous» un regard attendri entretiens. fait, des humains pas encore «périmés», (nostalgique ?) et rend à merveille le Polichinelle Les propos de l’écrivain de science- des lycéens en pleines bouffées «vague des passions» qui les habite et les Pierric Bailly fiction (mais peut-être faudrait-il dire d’adolescence, avec des corps étranges, fait constamment osciller des pires P.O.L., 15 euros de «fiction», tout simplement) sont qui semblent leur échapper pour vivre conneries aux envolées les plus lyriques. particulièrement intéressants. Ils une existence propre. L’une a des Le style, élaboré au plus près de la donnent quelques clefs pour mieux jambes yo-yo, l’autre les cils qui langue orale, mêle avec bonheur les comprendre un univers particu- tombent, le troisième un trou dans registres et donne à cette histoire d’un lièrement complexe ; en effet, Ballard l’épaule. Ces bizarreries transitoires ne été jurassien une dimension universelle, travaille tout autant sur les distorsions les empêchent pas de vivre l’été épique parfois, et toujours poétique. du corps que sur celles, plus classiques jurassien à plein tube, entre virées en FRED ROBERT dans la SF,du temps. Le tout dans son scooters, expéditions punitives contre décor préféré, celui de la «suburbia», espace indéterminé entre deux villes, entre deux zones de banlieue. Là il traque ce qu’il appelle un «néo- Le fruit des origines réalisme», notion pour le moins paradoxale dans la SF. «Ce n’est La Pomme est le deuxième volet d’une malade, un voyageur instable, un et «rêver» sont paronymes… Pomme évidemment plus le réalisme au sens où trilogie de l’écrivain turc, Enis Batur, homme raffiné et subtil hanté par la des origines, métaphore de l’écrivain, aurait pu l’entendre quelqu’un comme et se situe entre Amer savoir (2003) et mort ? Quelles furent les relations de bonheur du lecteur… Flaubert… la plupart des éléments de D’autres chemins (2008), textes l’ambassadeur de l’Empire ottoman à MARYVONNE COLOMBANI notre vision de la réalité sont en fait fictifs, autofictionnels qui permettent à Paris avec le peintre Courbet, qui paya ce sont des éléments mythiques réifiés» l’écrivain de s’interroger sur la posture ses amitiés révolutionnaires avec explique-t-il. Autrement dit, la SF ne de l’artiste, les relations entre les arts, les Proudhon, par une peine de prison ? ferait qu’enregistrer les métamorphoses mythes fondateurs, et celles qui Pourquoi le peintre s’acharna-t-il à internes de notre psyché collective. s’établissent avec le «consommateur» de «croquer» dans sa cellule des pommes ? Voilà une nouvelle grille de lecture des l’objet artistique. Il emprunte, dans La Ce fruit obscur, symbole de la œuvres de J.G. Ballard : sûrement la Pomme, une écriture kaléidoscope qui connaissance arrachée à l’arbre, n’est-il plus inquiétante. s’efforce, avec un véritable souci pas aussi celui de notre mort, punition SYLVIA GOURION scientifique, à donner une idée de la ultime de l’éveil de notre conscience ? réalité de l’histoire de l’extraordinaire Pourquoi si peu de représentations du tableau de Courbet, L’origine du sexe féminin dans l’histoire de l’art, et monde. Se démarquant résolument de pourquoi tant de pommes sous le la forme romanesque qui invente et pinceau de Courbet ? reconstitue la trame des possibles, il Le texte d’Enis Batur, qui se veut «une nous livre une écriture lacunaire, à tentative de roman sur les techniques de l’image de ces reconstitutions de tissage», est un diamant aux multiples musique antique pour lesquelles seuls facettes dans lesquelles le lecteur La Pomme les fragments de manuscrits sont joués. musarde, s’instruit, réfléchit, suit avec Enis Batur Ce qui ne l’empêche pas d’inventer des bonheur le romancier dans sa quête, Traduction Ferda Fidan rencontres que le jeu des probabilités jusque dans son petit essai sur… Ed. Actes Sud, 21.50 euros aurait rendues possibles, comme celle GuillaumeTell ! Encore une histoire de de Dostoïevski et Khalil Chérif Pacha, pomme en fait ! Une «théorie de la le commanditaire de cette œuvre qui a pomme» bien séduisante, d’ailleurs, attendu plus d’un siècle pour être n’apprend-on pas, dans cet ouvrage Hautes altitudes exposée. Qui était cet amateur d’art ? remarquablement traduit par Ferda J.G Ballard Un excentrique, un joueur invétéré, un Fidan, qu’enTurc, les verbes «croquer» Éditions Ère, 18 euros 62 LIVRES LITTÉRATURE Un rêve américain Le neuvième roman de Catherine travail et d’efforts. Une famille unie, familiale de plus. On comprend mieux Cusset, qui vit à New York depuis 20 une situation sociale et professionnelle aussi, au regard du parcours de cette ans mais continue d’écrire en français, enviable, une maison confortable, tout mère, les projections qu’elle fait subir à retrace le parcours d’Elena. Née en devrait aller pour le mieux. Ce n’est pas son fils unique Alexandru, pour lequel Bessarabie dans les années 40, orpheline vraiment le cas. Et c’est sans doute là elle a tant rêvé d’un brillant avenir. Et ballotée de ville en région par les aléas que réside la force du roman, dans la l’aversion qu’elle ressent pour Marie, sa de l’Histoire, Elena grandit dans la mise en scène de la fêlure, du manque belle-fille française. Roumanie communiste et antisémite fondateur de tout exil, et de sa Ce roman vient de recevoir le prix de Ceausescu. Amoureuse de Jacob, elle persistance malgré toutes les réussites Goncourt des Lycéens. Sans doute les l’épouse contre l’avis de ses parents matérielles. Le personnage d’Elena- adolescents ont-ils été eux aussi adoptifs et réalise avec lui son rêve Helen s’enrichit de cette insatisfaction sensibles à l’émouvante histoire d’une vie nouvelle au pays de la liberté, profonde qui la caractérise. Et le roman, d’amour de Jacob et d’Elena, sur fond en Amérique. des allées et venues entre les époques. d’une Histoire pas si ancienne mais L’histoire est donc celle d’une femme La structure, qui fait alterner le passé souvent méconnue. déterminée à prendre son destin en Un brillant avenir très récent d’Helen avec les étapes de la FRED ROBERT main, d’une Elena devenue Helen, Catherine Cusset vie antérieure d’Elena, étoffe ce qui d’une intégration réussie à force de éd. Gallimard, 21 euros n’aurait été sans cela qu’une chronique Dans la chair des mots C’est un petit livre, si fin qu’il pourrait tribulations cocasses des guillemets qui servir de marque-page, si léger qu’il se dissimulent sous le texte… C’est à peut se glisser dans n’importe quel sac, partir de la lettre U, après un drame que si lourd de sens qu’il semble vouloir vous devrez découvrir, que le poème est contenir un univers. Reprenant la quête mis en scène selon le schéma de du mot qui résume le monde, Florence l’épopée. «Alors» scande, anaphore Pazzottu se lance dans cette aventure héroïque, les six dernières lettres, totalitaire d’une manière originale, définissant par le vide des négations la usant des grâces désuètes de l’abécédaire nature même du poème avant de lui pour nous conter sa vision de la accorder une ultime définition. création. Le poème, forme allégorique, Cet ouvrage poétique oscille ainsi émerge lettre à lettre, d’une union constamment avec humour entre la sensuelle et débridée. L’érotisme des tentation des paroles définitives du mots qui entrent dans «la densité du maître et un contrepoint ironique, le réel», palpite, dans le jaillissement de S’il tranche, tout enveloppé dans une gangue semences nouvelles qui interrogent, Florence Pazzottu verbale où les mots se font chair. À jouent avec humour et font enrager le Editions Amis d’Inventaire-Invention, déguster… poète. Nous suivons ainsi les 6 euros MARYVONNE COLOMBANI À trente-quatre mains et dix-sept voix Est-ce un livre, est-ce un disque ? Ce l’écrivain trouve alors son aboutis- recueil cultive les deux lectures dans une sement dans le chant, l’appropriation approche toute nouvelle, née à des mots par la voix, tantôt nue, tantôt l’occasion du festival littéraire des accompagnée, dans cette recréation du Correspondances de Manosque. La sens par la lecture de l’autre. Le résultat particularité de cet «objet hybride» est à la fois original et intéressant, il comme le souligne Olivier Chau- nous fait partager quelques mystères de denson, directeur des Correspon- la création, nous interrogeant sur les dances, repose sur l’union de chanteurs choix des artistes qui se dévoilent ici, et d’auteurs contemporains. Dix-sept dans une introspection intime et chanteurs pour dix-sept auteurs… que littéraire à la fois. Il y a des rencontres, rapprochent des pages biographiques parfois fulgurantes, «le hasard, comme communes, des textes et un CD. le souligne Barbara Carlotti, n’existe Chaque texte d’auteur est présenté par pas»! Des moments forts qui nous un autre texte, celui de l’interprète qui amènent à découvrir de petits bijoux de explique son choix, son coup de cœur, Fantaisie Littéraire la littérature contemporaine… à lire et sa fascination, pour celui ou celle dont Editions Le bec en l’air 2008 à écouter ! la langue, le rythme, l’analyse, l’ont Les Correspondances de Manosque- M.C. séduit. Cette reconnaissance de La Poste, 18, 50 euros 63 Méfiez-vous des bébés ! Autant vous prévenir ; une culture norme ; il adore sa maman, qui le lui béton est requise pour lire ce bouquin. rend bien, et déteste son papa -voir Images Comme la mienne ressemble à de la Freud- qu’il a surnommé «le Bouffi». Le confiture, je ne suis pas sûre d’avoir tout fils prodige –rien à voir donc avec les compris… Bon, il s’agit d’un marmot évangiles- est enlevé par une sensibles pas comme les autres. Certes, s’il aime universitaire coincée et mégalomane Depuis 1987 l’association Autres & par-dessus tout le mamelon de sa qui veut lui disséquer le cortex pour Pareils de Martigues a réalisé une maman -voir Mélanie Klein pour les confirmer ses théories. Commence centaine d’expositions, de manifes- histoires de bon et de mauvais sein- et alors une succession d’enlèvements tations culturelles, de publications et fait copieusement dans ses couches, relatée par un bébé attentif et amusé ; coédite une revue avec les éditions Le pour le reste, il n’a rien d’un bambin. les motivations obscures -voir Satan- de Bleu du Ciel. Brigitte Palaggi vit, Doté d’un QI astronomique -autour de l’âme humaine donnent lieu à quelques travaille et pratique l’art photogra- 475-, il lit Barthes, Proust ou Fitzgerald, belles pages de méditations -voir Pascal- phique à Martigues depuis 1976. ce qui peut encore se comprendre, mais érudites et truffées de références. Quatre numéros de la revue sont réunis aussi Thucydide et Xénophon dans le Traduit de l’américain, j’attendrai, sous le titre Parmi d’autres possibles texte ou encore Nietzsche, sans parler quant à moi, une version en français présentant un choix de clichés qui de quelques autres, très connus mais courant dûment annotée pour le couvrent une période de 30 ans. que je n’ai pas lus. S’ajoute à cette conseiller aux lecteurs moyens de Glyphe Photos en noir et blanc aux gris multi- boulimie livresque, une capacité Zibeline. Les autres ne m’ayant pas Percival Everett ples et raffinés, parfois proches des lavis identique à rédiger et un mutisme total. attendu pour le lire ! traduit de l’américain avec des fondus dans lesquels on peut se Voilà le phénomène. SYLVIA GOURION par Anne-Laure Tissut perdre, surtout lorsque l’image montre Côté affectif, il est un peu plus dans la Actes Sud, 21.80 euros le ciel ou l’eau et les mélange tant que l’on ne sait plus ce que l’on voit du réel ou de son reflet, des bords du Rhône ou des nuages. Les photos ne suivent aucun ordre chronologique ou géogra- phique et l’on est parfois amusés par des rapprochements incongrus ou méta- phoriques : certains voisinages laissent rêveurs comme celui d’une belle paire Jusqu’à son dernier souffle de fesses au grain parfait face aux val- lonnements ondoyants d’un paysage Ce recueil de poésies érudit. L’amant caresse ce corps féminin florentin ! D’autres sujets sont déris- amoureuses inédites de Paul épanoui et déjà absent comme il aspire oires: étendages, rideaux de dentelles, Valéry est une surprise à la plénitude de ces formes poétiques chaises de jardin rouillées, bancs de déjà disparues, dans une même pierre sous les arbres, moisissures... savoureuse euphorie un peu mélancolique pour Brigitte Palaggi est attentive au travail Voilà le mallarméen Paul Valéry en une perfection intouchable. Les poèmes du temps, à l’effritement, à la rouille, et disciple pétrarquiste, l’académicien sont vibrants de désirs, d’un érotisme nous offre des images sensibles, souvent impassible et cérébral en amoureux ardent, ils ont la sincérité de quelqu‘un émouvantes. Peu de personnages, fervent ! À 67 ans, donc, Valéry s’offre qui se dénude, le mysticisme de celui quelques vieilles et des enfants, un amour de jeunesse, et pour une qui croit en l’âme comme une forme quelques corps nus et discrets. Une vie, jeunesse, Jeanne Loviton dite Jean féminine et sensuelle de l’esprit. accompagnée de textes d’auteurs amis. Voilier, à qui il écrit plus d’un millier de Mais ils nous rappellent aussi que les CHRIS BOURGUE lettres et plus de cent cinquante jeux de l’amour sont indissociables des poèmes. Leur liaison dure huit ans et jeux poétiques, que nos passions les plus finit avec la guerre, en 1945, lorsque intimes se vivent parce qu’elles se Corona & Coronilla Jeanne rompt pour se marier avec projettent et se formulent dans des Paul Valéry Robert Denoël. Alors Valéry relit et fictions sans âge, et que nos désirs les Editions de Fallois, 22 euros commente une dernière fois ces plus profonds se disent avec les mots des poèmes, avec une ironie douloureuse et autres. tendre, et meurt quelques semaines plus AUDE FANLO tard. Depuis cette relecture, les corona poétiques se transforment en coronilla mortuaires, tandis que la «chair vers l’ombre affreusement recule.» Pour elle, il a retrouvé et décliné toutes les formes du lyrisme -sonnet, odes, ballades, chansons-, il a pastiché Ronsard ou Parmi d’autres possibles Racine, Baudelaire ou Nerval. Pourtant, éditions Le Bleu du Ciel, 20 euros ce florilège n’a rien d’un exercice de style http://autresetpareils.free.fr 64 LIVRES PHILOSOPHIE À vos amours Nous renouons avec kantien, on peut dire que cette affaire sujet, où nous vivotons intellectuel- la question pourquoi ?, du pourquoi n’est plus celle de l’enten- lement sans chercher à nous connaître titre de la jolie collection dement qui va chercher les causes, mais ni à comprendre le monde. Alors le éditions Aléas celle de la raison qui, dans ses envolées désir est souffrance, il est désir parce que des existentielles, se pose des questions qui nous manquons : «mémoire et imagi- Que tous les titres de cette collection se la dépassent. (pas clair ? il fallait lire la nation creusent le réel pour le confronter à proposentdecommencerparlaquestion double page sur Kant de septembre !). une figure qualifiée de complète»… mais pourquoi a de quoi déconcerter : la Se poser la question du «pourquoi illusoire. poser, n’est-ce pas réactualiser l’énigme j’aime» revient donc à se demander : ça Sautons cent pages et interprétons : de des causes finales qui nous épargne de fait quoi à ma vie, qu’y-a-t-il en moi qui cette ignorance peut surgir le maso- comprendre et nous fait fuir la bonne se modifie ? Suis-je dans une quête de chisme ; car pourquoi aimer c’est aussi question, qu’est-ce que ? À quoi bon se liberté ou d’aliénation par l’assouvisse- pourquoi haïr, pourquoi faire mal : demander «pourquoi vivre» si nous ne mentsexuel,ou(purement?) intellectuel peut-être parce que «marqués du signe savons pas ce qu’est la vie ? C’est le et platonique ? De plus «pourquoi de Caïn les hommes ne cessent de manier privilège de la philosophie de poser des aimer» est de la même nature que des signes qui répètent la violence questions déroutantes et, comme l’écrit «pourquoi vivre», or «la raison n’a pas à primitive». Pourquoi aimer Vladimir Biaggi dans l’avant-propos de choisir de vivre mais de s’interroger sur la Et terminons sur des réponses à cette André Simha chacun des volumes de cette collection, meilleure manière de vivre». La question question : pourquoi aime-t-on puisque Ed Aleas, coll Pourquoi ? le «pourquoi» recouvre la «grâce de ces du pourquoi n’est donc pas ici une l’amour qui naît du désir s’éteint avec 12 euros questions infantiles dont la gravité et la recherche des causes premières, mais sa satisfaction ? Voie platonicienne : le radicalité déstabilise et fait chanceler des effets (pour quoi) : l’affaire intro- désir amoureux n’étant qu’une étape l’évidence de ce qui s’impose de fait par ductive et justificative étant réglée, on dans l’ascension vers l’amour de la pure l’épaisseur de l’habitude et le poids de peut continuer la lecture ! beauté, l’amour doit se séparer du désir l’opinion». et le transcender. Voie don juanesque Pourquoi aimer de André Simha est Passion de joie oucommuniste:ilfautdissocierl’amour certainement la question la plus bête de La richesse et l’érudition de ce livre ne et la possession, donc renoncer à la cette collection ! Et d’ailleurs l’auteur quitte pas le fil directeur spinoziste : propriété privée de l’outil de pro- l’avoue : nous aimons pour des raisons l’amour est une passion de joie, et donc duction du désir ; le désir pur refuse obscures et indiscernables ; et puis on une action ; son sens est l’épanouis- toute concession ou repentir ; il est n’a pas le choix d’aimer ou pas ! On sement de notre puissance d’exister. S’il social et non plus exclusif ! serait presque poussé à refermer le livre nous diminue, que nous souffrons, c’est Libre interprétation et (re)belle lecture! à ce stade, comme s’il s’agissait d’une que nous désirons dans le premier genre RÉGIS VLACHOS bonne blague mais… Pourquoi n’est pas de connaissance : celui où l’on vit dans forcement une interrogation sur les l’ignorance des causes qui agissent sur causes mais sur le sens. Dans un langage nous, celuioùnoussommes objetetnon Pèlerinage au musée La charge de Bernard Deloche dans essentiellement celle de catégories ce très amusant exemplaire de pourquoi sociales privilégiées. ne va certes pas nous dégouter d’aller au Le comparse François Mairesse musée ; c’est un pamphlet subtil et marchera sur des œufs pour nous éclectique au titre éloquent : Pourquoi convaincre d’aller au musée, bien (ne pas) aller au musée ? commence par conscient de la stricte composante une attaque en règle de la réalité d’habitus social des motivations de ce muséale, suivie d’une défense par un pèlerinage intellectuel. Forme de comparse dans l’autre moitié de rhétorique bien plus distanciée. l’ouvrage. Bernard Deloche ne né- Intéressants moments sur le rapport glige aucune des pistes qui le poussent problématique avec la société capita- en tant que philosophe et muséologue liste: le musée est-il lieu d’accumulation (à l’apostasie inspirée !), à ne plus aller de valeurs, la muséographie repro- au musée ; de bien belles pages sur l’oxy- duisant en ce siècle les allées d’Ikéa, ou more incarnée qu’est le musée, glorifié bien reste-t-il le fascinant réceptacle comme lieu du plaisir désintéressé, de d’objets vrais présentant le curieux Pourquoi (ne pas) aller au musée ? la délectation, et du grouillement popu- privilège de leur inaliénabilité ? Un rare Bernard Deloche, laire… alors qu’il reproduit l’ordre lieu de calme et d’ennui sans François Mairesse social existant de par sa fréquentation sollicitation marchande ? Comment Ed Aleas, coll Pourquoi, qui reste, par delà les discours républi- glander intelligemment, c’est vrai ça… 12 euros canisant-démocratisant gnan gnan, R.V. 65 La démocratie tue aussi Comment le mensonge peut-il se substituer à la vérité de manière édifiante pour produire des effets de coercition spectaculaires ? C’est tout l’objet de «la propagande médiatique en démocratie», sous-titre de la somme de Chomsky et Herman La fabrication du consentement. Quand la réalité dépasse l’impensable, investigation empirique sur le concept de vérité… C’est un conseiller militaire présent au génocides. Cambodge 1973 :«Les pour des médias indépendants, condi- Pour le répondant français Vietnam qui parle : «Ce qui séduisait tapis de bombes des B-52 ciblaient les tion absolue pour vivre dans une société des analyses de Chomsky, on conseille dans le mouvement révolutionnaire, c’est zones les plus peuplées du Cambodge… réellementdémocratique…et pacifique! vivement les dossiers noirs qu’il représentait une nouvelle forme de des centaines de km2 de terres fertiles à RÉGIS VLACHOS chez Agone - http://survie.org/ société, au sein de laquelle prendrait place forte densité de population» ; c’est la phase -Les-Dossiers-Noirs-.html une nouvelle redistribution des valeurs, et I du génocide, occultée, on ne retiendra notamment du pouvoir, du statut de que la phase II, celle de Pol Pot, guère chacun, aussi bien que des biens plus meurtrière. La destruction du Sud matériels.»«Cette description et ce qu’elle Vietnam par bombardement avant implique fut intégralement soustraite à la l’invasion terrestre : 150 000 morts… vue de l’opinion américaine», et Les victimes sont «indignes d’intérêt» et Chomsky de poursuivre rappelant on n’en parle pas : tout se résume au l’insupportable réalité de l’histoire : combat du monde libre contre le «Une fois les accords de paix défini- communisme… et aujourd’hui contre La Fabrication du consentement tivement dans l’impasse, les États-Unis et le terrorisme : un million d’enfant De la propagande en démocratie leur régime client entamèrent leur œuvre irakiens sont morts des conséquences Noam^ Chomsky – Edward Herman de répression internationale, massacrant de l’intervention. Ed. Agone, coll Contre-Feux, des dizaines de milliers de personnes…» 28 euros Cette somme de Chomsky est une Manipuler la presse analyse méticuleuse des interventions Chomsky et Edward Herman analy- étasuniennes en Amérique centrale sent la manipulation étatique de la (Salvador, Guatemala, Nicaragua) et presse dans la trame infiniment serrée Asie (Vietnam, Laos, Cambodge), et de des dispositifs du pouvoir. Les men- ses répercussions dans les médias amé- songes les plus grossiers y ont plus de ricains. Plus d’un million de morts en valeur de vérité que les faits même : c’est Asie sur la période 1965-1975, 200000 toute la définition de l’aliénation que en Amérique centrale du seul fait de proposait Castoriadis :«Le sujet est l’intervention nord américaine : aucune dominé par un imaginaire vécu comme trace dans les journaux du même plus réel que le réel, quoique non su continent. C’est tout le fonction- comme tel.» Dans La fabrication du nement de la propagande au sein d’une consentement l’horreur des massacres se société démocratique et capitaliste qui conjugue à l’horreur de leur occultation est ici analysé. par la presse. Combat politique pour la vérité alors que constatait Jacques Propagande de mort Bouveresse:«LespenseurscommeChomsky Premier principe, la concentration capi- estiment que la meilleure défense contre le talistique des médias : le marché réussit mensonge, en particulier le mensonge là où les États totalitaires sont échoué ; politique, est, pour commencer, une stratégie sans stratège terriblement effi- connaissance précise des faits concernés ; et cace. Pourquoi une propagande est-elle on peut dire que celle qu’il se donne la nécessaire dans une société développée peine d’acquérir est tout simplement et libre ? S’en étonner revient à oublier impressionnante.»(Peut-on ne pas croire, les deux soubassements ténébreux de Agone, p 157). nos sociétés démocratiques : la nécessité Le moindre éclat de vérité est sous de maintenir l’ordre social, ainsi que la condition politique disait Foucault ; et sauvegarde d’un système capitaliste qui celle de la presse, au premier chef, prise ne va pas de soi. qu’elle est, en sa foi naïve en une objec- Rosa Luxembourg le disait : si les gens tivité possible, dans les rapports de force savaient, le régime capitaliste ne tien- des intérêts économiques de ses pro- drait pas 24 heures ! priétaires et des intérêts de la nation. Il faut donc discréditer toute autre Les vérités de Chomsky, plus étayées forme d’alternative à ce système, et tous que celles de ses détracteurs, sont elles les moyens sont bons. Y compris les aussi politiques et le revendiquent : 66 PHILOSOPHIE ÉCHANGE ET DIFFUSION DES SAVOIRS

La salle des délibérations du Conseil Général était comme d’habitude bondée pour ces soirées d’échange et diffusion des savoirs qui s’articulent cette saison sur le thème de la violence. Elle accueillait le 4 décembre Marcel Gauchet, célèbre auteur du Désenchantement du monde. Le philosophe construit son œuvre autour des rapports problématiques que notre modernité entretient avec un passé fait de religion et de valeurs qui ne se laissent pas facilement oublier. Mais cette soirée, intitulée Sur l’effondrement du sens des savoirs, nous réserva de multiples surprises…

Un sentiment étrange surgit dès les pre- miers mots de l’orateur : est-ce Marcel Gauchet, ou alors Luc Ferry, Comte Sponville ou Finkielkraut qui parle ? «De bons esprits parlent de notion de violence symbolique et je connais trop le sens de la violence réelle pour la prendre vraiment au sérieux.» Précisons que la Violence violence symbolique est un concept sociologique rigoureux : il qualifie un pouvoir non explicite qui parvient à imposer des significations et à les rendre légitimes, en dissimulant les rapports de force qui le rendent effectif : hommes/ femmes ; privilégiés/non privilégiés; symbolique, possédants/salariés. En bref, mettre en cause la violence symbolique, et ce sans aucune expli- cation, c’est d’emblée accréditer la thèse peut avoir une certaine pertinence, c’est d’une société pacifiée et de consensus ; celui de l’expérience que nous faisons c’est-à-dire nier ce que même les aujourd’hui de l’histoire… ce à quoi nous 1 aliénation milliardaires américains admettent . Il participons sans le contrôler.» Cette aurait pour le moins fallu que l’orateur violence, poursuit-il, est d’autant plus s’en explique. forte que nous y participons sans la Mettons en abîme, et constatons une comprendre, et donc qu’elle s’impose à ou crise du première forme de violence symbo- nous. Ce qui est la définition exacte de lique, inhérente à l’exercice : celle de l’aliénation : participer à un processus l’orateur qui impose des idées dans une qui s’impose violemment à nous sans auto-légitimation qui n’a pas à s’expli- que nous en soyons conscient. quer. Il y a toujours des relations de sens ? pouvoir dans les interstices du champ Implicites servitudes social, et par-là même violence ; on ne Le concept est assez lourd pour que l’on s’y attarde, ce que ne Même si, précisera Gauchet, l’aliénation est un concept peut y échapper mais encore faut-il les fait pas l’orateur… N’a t-on pas droit a un exemple de cette hégélien qui signifie le mouvement de l’esprit hors de lui - mettre au jour, les révéler pour les violence symbolique de l’histoire dont il nous parle ? En fait, afin de se remplir de déterminations- et qui ensuite retourne atténuer. Ici, il faut bien qu’il y ait des l’implicite est un des traits de la violence symbolique ; on à un soi qui n’est plus le même. conférences où l’un parle et les autres suppose admises des valeurs par l’autre sans les expliciter, ce Mais est-ce bien la même aliénation que redéfinit Castoriadis écoutent ; mais le rôle de l’intellectuel qui évite d’être compris… et contredit ! Risquons un exemple dans L’institution imaginaire de la société ?«L’aliénation c’est le n’est-il pas d’en être conscient et de d’aliénation : les salariés non imposables admettent souvent discours de l’autre ; le sujet est dominé par un imaginaire vécu tendreàendiminuerleseffetspar l’expli- comme acquis le discours non explicité de la nécessité de comme plus réel que le réel.» Il est crucial que de savoir si citation honnête de concepts pour le baisser les impôts… vraiment le sujet est impliqué dans les processus d’aliénatio; moins polémiques ? Par-delà la forme, l’aliénation soulève un vrai problème philo- en quoi le salarié participe-t-il à la production de l’idéologie L’orateur poursuit : «S’il y a un domaine sophique : est-il sûr que celui qui y est soumis y participe? dominante à laquelle il souscrit et qui lui fait pourtant où cette notion de violence symbolique Dans ce cadre nous sommes dans la servitude volontaire. violence ? Une vraie précision à mener, qui aurait amené au 67

cœur du débat, mais le terrain du réel n’était pas celui de la soirée… Une autre remarque dans la salle : l’âge d’or de la culture européenne a produit les Cette expérience de l’aliénation historique, poursuit Gauchet, met à l’épreuve notre plus grands crimes de masse, ceux du XXe siècle. Réponse ahurissante de Gauchet: intelligibilité du monde et participe à notre impuissance. C’est toute la définition «il faut en finir avec ce dolorisme de notre expérience historique proche, qui nous de la liberté sans pouvoir des modernes. Et le seul sens possible de la liberté est trompe sur la réalité de ce que nous vivons ; et si nous avions une meilleure appréciation «le gouvernement du monde en commun» ; qu’est-ce à dire ? On ne le saura pas. de ce qui s’est passé dans ce siècle, nous aurions une meilleure perspective des difficultés En tout cas l’auteur poursuit sur la liberté : «Il n’y a rien de plus désespérant que nouvelles qui se présentent à nous.» «Et je n’ai pas attendu Sarkozy pour dire cela» l’activisme sans but et la protestation sans proposition qui achève de certifier notre précisera-t-il. impuissance. Très bien pour l’anticapitalisme, mais que met-on à la place ?». Voilà En fait, au Conseil Général ce soir-là, nous avons vécu un grand moment de syn- comment Gauchet disqualifie d’un geste ceux qui expliquent le fonctionnement thèse de ce qui se passe aujourd’hui dans la philosophie. Tout tend à : violent du système capitaliste, et affirment qu’un autre monde est possible. Souvent -cibler la crise de l’éducation sur un problème de valeurs les penseurs dénigrent les explorateurs du réel… -dénoncer toute pratique contestataire de la liberté au profit d’abstractions qui la Que propose donc Gauchet qui soit moins «désespérant» ? «Nous avons à apprendre situent dans un ailleurs métaphysique, paralysant et inoffensif à agir historiquement par un réarmement intellectuel.» Belle formule de philosophe, -restaurer l’histoire dans une dynamique coercitive qui s’oppose au désordre de mais belle contradiction dans l’agir lorsqu’on écrit que ce monde est le seul l’identité contemporaine possible; ce qu’il confirme dans son dernier ouvrage, tout aussi abstrait, qui évacue -critiquer l’histoire qui vise à révéler les crimes des démocraties afin de conjurer tout rapport au réel et au social, affirmant que «nous n’avons plus que du même le dolorisme devant nous»(La révolution moderne p18). -défendre une histoire prescriptive plutôt qu’une histoire-vérité, en escamotant En fait, lors de son intervention, aucun des termes clé sur lesquels il s’appuie n’est la question sociale qui risque de renforcer la lucidité et donc le dolorisme quant à défini : liberté, aliénation, violence symbolique, histoire, révolution restent dans le la réalité de nos démocraties… flou… En bref, on assiste à une décomplexion totale de la pensée qui concourt à renforcer l’ordre dominant et ses injustices ! Acculturation et dolorisme Foucault, vite ! Passons à l’éducation, sujet central de la conférence : «L’éducation offre un concentré RÉGIS VLACHOS des mutations de notre condition historique, elle montre la radicalisation du mouvement de la modernité.» Ce qui signifie, pour le philosophe, que l’éducation révèle le problème de la culture et du savoir dans nos sociétés, qui est la tendance à la décul- i Warren Buffett, l’homme le plus riche du monde, ami de Bill Gates, turation, c’est-à-dire la crise du sens des savoirs. Ceci se remarque exemplairement actionnaire de Coca-Cola et soutien de Barak Obama lors de la dernière campagne dans l’école où, au travers des réformes, les savoirs doivent de plus en plus justifier a déclaré : «Il y a une lutte des classes aux États-Unis, c’est un fait, mais c’est ma classe, leur utilité, ce qui se renforce avec la généralisation des choix optionnels. la classe des riches qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la gagner.» C’est le problème de fond pour Gauchet, qui n’entrera pas dans le champ politique, mot qu’il ne prononcera jamais dans sa conférence. Or, ce sont les pensées réac- tionnaires qui ciblent une crise sur la question des valeurs sans considérer le problème politique : ici la libéralisation du système éducatif, la mise en concurrence et la ghettoïsation des établissements scolaires, le bac à deux vitesses, le recul de l’offre en matière d’éducation publique… ne seront jamais évoqués. Pour Gauchet cette crise du sens et des savoirs a pour cause ce phénomène positif de détraditionnalisation qui commence au XVIIIe siècle lorsque la raison l’emporte sur l’autorité de la tradition ; aujourd’hui nous assistons à l’expression radicale et négative qu’a pris cette détraditionnalisation puisqu’on ne se soumet plus à l’ordre hérité du passé : «C’est la première fois dans l’histoire où pour nous il n’existe plus que du passé mort et muet.» La connaissance dès lors prend un nouveau statut, elle n’a plus qu’une signification individuelle et actuelle. Avant la crise que nous connaissons le passé bénéficiait d’une force qui n’avait pas besoin d’être justifiée. Ainsi cette accultu- ration produit des êtres qui ne savent pas qui ils sont. On pourra s’interroger longtemps sur ce que l’auteur entend par cette crise des valeurs, attendre longtemps des exemples précis de cette déculturation, cette désintellectualisation ; et même s’il certifiera par la suite ne pas être nostalgique de ce passé où les indi- vidus avaient plus de repères, il affirmera que la tradition doit être réinventée. On se demande ce que peut être une tradition réinventée. Par quel miracle conceptuel une tradition qui a une force aliénante et incons- ciente peut-elle disparaître ? Ce qui est inconscient ne s’efface pas… Marcel Gauchet © J. Sassier Contradictions Mais alors, demandera-t-on au philosophe, d’où tirez-vous que les gens sont aujourd’hui plus déculturés, plus désintellectualisés qu’avant ? Tout montre, démocratisation ou massification du système scolaire aidant, que les générations sont plus instruites aujourd’hui qu’hier. Je voulais dire que les individus ont moins de repère identificateurs qu’avant, répond-il. Pourtant le constat de crise du sens semblait aller au- delà… 68 HISTOIRE ET PATRIMOINE MUSÉE DÉPARTEMENTAL DE L’ARLES ANTIQUE L’antiquité voyage

Les richesses du Louvre sortent ; pour Puis la section 3 présentera la maison, riche de certaines il s’agit de la première fois décors raffinés et élégants, quand elle se nomme depuis la fondation du musée en 1793 ! «domus» et appartient à un «dominus» fortuné qui peut présenter à ses invités une luxueuse vaisselle Oklahoma, Seattle, Indianapolis… L’antiquité se fait d’apparat. En opposition à cette image de paix, la star, et part en tournée. L’Amérique, plus gâtée que section 4 expose le thème de l’armée, la force de l’Europe, larges contributions financières obligent, a Rome qui s’affirmera par ses conquêtes, maîtresse bénéficié, dans le cadre des échanges internationaux du monde antique. La partie nommée «esclaves et conduits par le Louvre, de la venue de étrangers», ensuite, permet de mettre en lumière l’exceptionnelle exposition concoctée par Cécile les notions d’«otium» et de «negotium», le loisir et les Giroire et Daniel Roger, conservateurs au affaires, le premier favorisant les arts, le second, le département des antiquités Grecques, Etrusques et travail agricole, l’activité au service de l’état. Romaines du Musée du Louvre. La religion succèdera à cette approche de la société De l’esclave à l’empereur ; L’art romain dans les romaine, répartie entre domaine public avec les dieux Portrait de Livie de Neuilly-le-Réal; Musée du Louvre, Br28 collections du Louvre : cette remarquable manifes- du panthéon officiel, et privé, chaque domus © 2006 Musée du Louvre et AFA/ Daniel Lebée et Carine Deambrosis tation est liée à la réinstallation des salles romaines sacrifiant aux dieux domestiques… Des cultes On vous dira que d’exceptionnelles mesures de du Louvre, dans une perspective muséographique orientaux arrivent à Rome, comme celui d’Isis ou de sécurité ont été prises, qu’un argent fou a été investi actualisée. L’organisation des éléments de Mithra, et trouvent leur place sans heurts. La section dans le transport, la réfection, la restauration de l’exposition correspond à celle qui est prévue pour la VII est consacrée aux rites funéraires qui trahissent certaines pièces : tout ceci participe au caractère nouvelle structure du musée parisien, dont les tant d’éléments de la pensée spirituelle des peuples unique de cette entreprise. visiteurs ont ainsi un avant-goût. pour l’archéologue ou l’historien. Réjouissons-nous plutôt de la chance qui nous est offerte de fréquenter ainsi une période qui n’a pas Une chance rare ! Une grande variété d’œuvres fini de nous éblouir et de nous enseigner. Laissons- Les Provençaux, chance unique en Europe, auront la Cette remarquable exposition joue sur une palette nous transporter par les accents de la Muse de la possibilité de visiter cette exposition, du 20 d’une exceptionnelle variété de supports, statue rhétorique, Polymnie aux chants multiples, qui clôt le décembre 2008 au 3 mai 2009. En effet, Arles de 2m24 de ce citoyen en toge, ou celle si réduite et parcours. Gracieusement pensive, elle nous est la seule ville européenne choisie pour l’accueillir, fine de Mars (20,6cm), terres cuites, vaisselle interroge. De toute cette richesse, saurons-nous et ce grâce au partenariat entre le Musée d’argent et de verre, bijoux, mosaïques, fresques, bas retirer la quintessence ? Départemental de l’Arles Antique et le Musée du reliefs, comme celui que tout le monde a croisé MARYVONNE COLOMBANI Louvre, sous l’égide du Conseil Général 13. Bien sûr, dans ses livres, avec ce nom si incroyable de la capacité d’accueil, quoique importante, ne peut «suovetaurile»!, en fait sacrifice de trois animaux De l’esclave à l’Empereur rivaliser avec celle des instituts américains et 150 mâles, un porc, un mouton et un taureau dans le but L’art romain dans les collections du musée du Louvre pièces au lieu des 180 seront présentées. Cependant de purifier la terre…. Du 20 déc au 3 mai nous aurons le privilège de contempler des œuvres Imaginez la précision et la délicatesse de la mise en Musée départemental de l’Arles Antique qui trop souvent attendent dans les réserves, et place de ces œuvres, déballées une à une avant de 04 90 18 88 88 même des chefs-d’œuvre plus connus qui parlent à trouver sa place dans l’intelligente organisation de ce www.arles-antique.cg13.fr nos souvenirs d’écoliers… musée qui voyage… Un parcours didactique Scenes dionysiaques, Musée du Louvre, P28 © 2006 Musée du Louvre et AFA/ Anne Chauvet Selon les principes mis en œuvre habituellement dans le Musée d’Arles, les pièces de la collection suivent un itinéraire qui présente un panorama de la vie à Rome, de l’esclave au plus haut sommet de la hiérarchie sociale, l’empereur. Présentation qui ne se veut pas exhaustive, mais suggestive. C’est pourquoi l’écart chronologique est assez large, de la fin du Ier siècle avant notre ère (-27, Octave devient Auguste, même s’il ne prend pas le titre d’Empereur, mais seulement de «princeps senatus») jusqu’au Ve de notreère(RomulusAugustuleabdiquadevantOdoacre en 476. Curieuse ironie du sort qui donne au dernier empereur de Rome le nom de son fondateur !). Le parcours thématique articulé en sept sections nous conduira de la section consacrée à l’empereur, ses pouvoirs et une galerie de portraits de la dynastie Julio-Claudienne à celle des citoyens, qui se décline en devoirs publics, et une représentation particulière des femmes et des enfants, en opposition à tous ceux qui, dans la Rome antique n’avaient pas accès à la citoyenneté. PENSÉE DE MIDI HISTOIRE ET PATRIMOINE 69

Lindenberg rappelle qu’en France les traumatismes du 11 septembre et de la présence de Le Pen au deuxième tour de la présidentielle, ont été l’oc- casion d’une mutation du discours. Là aussi, le préjugé devient le vrai, dans un processus de «retour au réel» qui rappelle le discours vichyste. Appuyé sur des constats simplistes et faussés, le discours alors transgresse les tabous : racisme, misogynie, homo- phobie prennent place dans l’espace public ! Ce triomphe discursif ne bénéficie pas pour autant à l’extrême Efflores- droite : c’est le président actuel, avec son ministère de l’identité nationale et de l’immigration, avec sa politique cence des de préférence nationale déguisée, qui en récolte les fruits. Ces idées nauséeuses se diffusent : ni le per- sonnel politique, ni les intellectuels discours ne sont épargnés, y compris à gauche! Thierry Fabre élargit les considé- de haine rations à l’Europe et Daniel Lindenberg Amara Lakhous © X-D.R. fait remarquer combien la déferlante Le 2 décembre, avait lieu, à l’Institut Culturel Italien de Marseille, néo-conservatrice submergeait l’hori- zon intellectuel du vieux continent : une rencontre programmée dans le cadre de l’année européenne une pensée régressive triomphe en du dialogue interculturel sur le thème des désirs de guerre Europe. Les vieilles idées du XIXe et espoirs de paix. siècle sont réactivées pour décrire nos sociétés : la criminalité est Étaient rassemblés, autour de la table les musulmans italiens, comparés à Attristée et désappointée, elle lâche évoquée comme un problème géné- qu’animait Thierry Fabre, Amara des rats. Fondamentalement, cette un constat bien funeste : l’Italie est tique, ou encore l’anti-darwinisme, si Lakhous, écrivain et anthropologue, pensée habille de noblesse les un pays pauvre et ignorant ! Confinés présent aux États-Unis, gagne du Biancamaria Bruno, linguiste et es- préjugés populaires qu’elle érige en au rôle d’experts auprès des médias, terrain... sayiste, Daniel Lindenberg, historien références suprêmes. Mais, poursuit les intellectuels se bornent au com- L’enjeu désormais est d’endiguer le des idées, universitaire et journaliste. notre intervenant, la détestation du mentaire. Ils abandonnent leur rôle reflux de la pensée progressiste, le Poursuivant la thématique esquissée musulman, consécutive au 11 sep- d’agitateurs culturels, de producteurs triomphe de cette pensée anti- au travers de la dernière livraison de tembre, s’inscrit dans un cycle : ce fut d’analyses et d’idées nouvelles! Cette Lumières qui refuse l’universel la Pensée de midi (voir Zib 13), d’abord le marocain des années 40, absence de réflexion permet à des comme catégorie de pensée. Refus Thierry Fabre a sollicité la réaction de violeur, puis l’Albanais voleur des mouvements racistes et xénophobes - qui ne peut qu’amener à un choc ses invités à propos de l’efflorescence années 90, pour en arriver aux gitans comme la Ligue du Nord- de répandre des civilisations… du discours guerrier dans toutes les (les tziganes roumains). La peur de et faire progresser ces thèses dans RENÉ DIAZ strates de la société mondialisée. l’autre est une permanence sur toute l’Italie. Pire, les promoteurs de Amara Lakhous a fait remarquer laquelle vient se greffer le discours ces exclusions ethniques mobilisent combien il fallait prendre garde car guerrier. les couches populaires, les quartiers les mots précèdent souvent la vio- Biancamaria Bruno s’insurge aussi ouvriers et développent une politique Les Rencontres de La Pensée de Midi lence sur les corps. Évoquant ces contre les brûlots de la «Fallaci». Pas du «campanile» (de clocher) qui ont eu lieu les 24 nov à l’IEP d’Aix, discours de haine, il a rappelé les question, pour elle, qu’un intellectuel rejette les étrangers ! le 2 déc à L’ICI de Marseille, écrits orduriers d’Oriana Fallaci sur oublie son statut et déraille ! Dans le domaine des idées, Daniel le 3 déc à la Fac de droit de Toulon 70 SCIENCES ET TECHNIQUES SCIENCES ET CITOYENNETÉ Les lutter contre la pensée magique et l’illusion éso- térique, le progrès de l’humanité est le phare d’Alexandrie. Mais comment orienter le navire pro- para-orthodoxes gressiste de la science sur un repère en perpétuel mouvement ? Comme l’indiquait Hélène Langevin-Joliot, Directrice de Recherche Honoraire au CNRS, présidente de du progrès l’Union Rationaliste, lors de sa remarquable inter- vention intitulée «Où est passée la raison ?», qui dit 20 novembre 2008. Le citoyen Zibernéthique est sollicité. progrès dit mouvement historique de la connais- La question de la responsabilité civile interroge l’humain et son histoire sance. Et qui dit mouvement dit imprévisibilité absolue de sa direction ! Poser une raison préalable sur ses pratiques collectives ; le matin dans le questionnement philo- progressiste aux progrès revient donc à établir un sophique, éthique et politique, l’après-midi dans l’engagement dogmatisme du développement de la connaissance. et la pratique militante immédiate Ce dogmatisme s’oppose au libre mouvement qu’il se targue de canaliser et d’orienter. Le matin à l’Hôtel de Région, ouverture à 9h30 du «la progression de l’humanité vers un terme idéal… Car le mouvement de la connaissance est, comme 6e Forum Sciences et citoyenneté sous la prési- vers le mieux». Le discours introductif de Michel le dirait Camus, condamné à l’absolue liberté. Le dence du philosophe Pierre Le Coz, vice-président Vauzelle, aux accents lyriques, usait de mots si peu scientifique est Ulysse, fils naturel de Sisyphe progres- du Comité National d’Ethique. usités dans la novlangue libérale qu’il réveillait sant sur la pente de son propre savoir et portant un À 14h00, manifestation tout aussi citoyenne pour parfois agréablement chez l’antique lutteur des rocher de connaissance qui tend éternellement à la défense de l’Éducation Nationale et de la Rec- réminiscences de saintes victoires contre cyclopes lui échapper.Le capitalisme a huilé la pente, le mythe herche Scientifique Publique… et autre Circé ! «Injustice», «capitalisme effréné», du progrès scientifique glisse, la pierre philoso- Six ans déjà que la région PACA organise une jour- «concurrence inhumaine», «misère morale», «exploita- phale écrase la tête de Sisyphe et Ulysse, désespéré, née annuelle de réflexion sur le rapport des citoyens tion»… Et aux détours des dunes du verbe, le renonce à son odyssée universelle. avec la connaissance technologique et ses impli- voyageur pouvait parfois même se ressourcer à la fraî- Faut-il pour autant envisager le progrès comme un cations sociétales, aussi bien en tant qu’opérateurs, cheur des mots de «liberté», «conscience», «raison», mythe ? qu’usagers. L’année dernière le forum intitulé Les «démocratie»… Peut-être encore manquait-il au horizons du Savoir s’interrogeait sur les rapports tournant des mots l’oasis d’une «révolution»? complexes entre Sciences, raison, et déraisons. La crise a obscurci les horizons lointains et questionne Progrès mal-gré désormais l’odyssée du savoir en ce qu’il annon- Le progressisme dans toutes les acceptions du con- cerait la régression de l’humanité, ses Charybde et cept a profondément marqué le XXe siècle, pour Scylla, plutôt que l’idéal de son Ithaque. devenir une quasi-religion en sa fin. De l’Union Les paradoxes du progrès, ainsi se prénomme le Soviétique censée se développer sur la base du forum 2008. Un paradoxe allant «à l’encontre de «matérialisme scientifique historique» jusqu’à l’opinion généralement admise» que le progrès serait «l’Union Rationaliste» qui tente toujours de © Tonkin prod. 71

Quoi qu’il arrive, il y a foisonnement des prati- La réalité dépasse Longchamp, site emblématique lié à ques humaines et c’est l’analyse a posteriori de l’affliction l’eau. Remodelée au gré des besoins, certains développements pratiques qui constitue ce Gageure d’appeler au BOYCOTT d’une la Durance, tantôt visible, tantôt qu’on a coutume d’appeler progrès. pseudo «manifestation scientifique» invisible, est une rivière aux visages Par exemple la mécanique quantique marque un sans jamais la citer. Car le paradoxe multiples : axe de circulation et de «progrès» dans les pratiques instrumentales de la du journalisme est que de parler de communication, réservoir d’eau pour physique dans un certain domaine d’application, cette foireuse exposition de Marseille l’alimentation des villes et des terres celui des ordres de grandeur de la constante de serait encore faire publicité à son agricoles, source d’énergie hydrau- Planck. Le «progrès» ne se vérifie que dans le abjection sociale, humaine et poli- lique et industrielle, espace de loisir. développement du champ des pratiques expéri- tique. Notre triste ville est une des Dénaturée, diminuée à des fins d’usa- mentales (appareillages, manipulations...), sa seules de France à avoir accepté ges à l’équilibre fragile, elle n’en reste multiplication, sa complexification. Il n’y a de d’héberger cette déjection spectacu- pas moins une rivière, capable de «valeur» à ce progrès que celui que l’on veut bien laire entre nécrophilie et voyeurisme, générer des crues dévastatrices et y lire philosophiquement, idéologiquement ou réprouvée par le Comité National porteuse de milieux naturels dont la moralement l’instant d’après, lorsqu’on le transcrit, d’Ethique. Ce soir, après la roue de la réhabilitation et la protection consti- lorsqu’on le commente ou qu’on le nomme. fortune… un paf obscène est à la une, tuent aujourd’hui un enjeu majeur. chantait Ferrat. Ce matin, Marseille, Outil de sensibilisation et de question- Subversion des pratiques future capitale européenne de la nement, ce projet est le fruit d’une Des débats du forum, le mot de pratique est culture, propose à 15 euros le peep- collaboration de nombreux acteurs de étrangement absent. On parle de prospectives, de show de cadavres chinois : c’est moins la rivière, parmi lesquels EDF, l’Agence données empiriques, de représentations, de nano- cher, moins procédurier et disponible de l’Eau Rhône-Méditerranée et Corse, objets. Car, comme l’indiquait Christopher Lasch dans la force de l’âge grâce à une la Ville de Marseille et son Muséum dans son remarquable ouvrage Le Moi assiégé espérance de vie qui épargne de n’en- d’histoire naturelle. (Climats éditions), la société technologique libérale terrer que des vieillards ! Les cadavres http://www.museum- réifie le progrès scientifique : la connaissance polymérisés prennent la pose et s’ex- marseille.org/marseille devient un objet presque étranger à l’humain, qui Au programme posent aux regards, sous couvert de _exposition_temporaire.htm n’est concerné ni en tant que sujet désirant, ni en découverte de l’anatomie ! D’ailleurs tant qu’individu citoyen. Zibelecteur, mon ami, pour tes enfants Fêtes et défaites ? Ainsi la maîtrise pratique du monde se transforme, de moins de… trois ans, la série X est Dans le cadre d’une animation de et se réduit à une utilisation subjective d’objets gratuite ! Image lamentable, amère culture scientifique, les Sentiers de irrationnels produits par le monde. L’univers n’est de Marseille. la Connaissance, la ville d’Allauch plus le réel engendré par les pratiques humaines Pour tout renseignement complé- nous propose à l’issue d’une période mais une connaissance extérieure, consommée mentaire, consultez l’article de Pierre éprouvante pour les systèmes digestif, intrinsèquement. La société médiatique transforme Le Coz vice-président du Comité cardiovasculaire et parfois nerveux, les acteurs du monde, y compris les scientifiques, Consultatif National d’Ethique. Et une conférence animée par Pierre- en spectateurs des objets consommables de ce voyez les réactions de nos Zibulons Henri Rolland (Faculté de Médecine monde. traînés à cette expo (page 77) ! de Marseille, Université d’Aix-Mar- Cette objectivation des pratiques ne serait-elle pas seille 2): la bouffe et nos artères, le corrélative à la mise en doute de la réalité du http://www.lemonde.fr/web/ 20 janv à 20h, Espace Robert Ollive à progrès ? Et si le progrès n’était justement rien imprimer_element/ Allauch en entrée libre. Nous devrions d’autre que le développement de la complexité des 0,40-0,50-1126341,0.html tout apprendre sur les pathologies pratiques sociales ? Et si la science c’était seule- des vaisseaux sanguins qui consti- ment la liberté d’Ulysse de guider sa voile où sa tuent la seconde source des dépenses pratique du vent marin le mène ? Et si la création Un bol d’air de santé dans les pays occidentaux, c’était seulement la liberté de Sisyphe de choisir et d’eau fraîche comme le montre un rapport récent comment il pousse son rocher ? Heureusement notre beau Museum de l’OMS. Notre alimentation a été Sans doute faut-il sortir du spectacle des choses d’Histoire Naturelle de Marseille souvent mise en cause dans ces pour se réapproprier concrètement la pratique de lave à l’eau claire les souillures de pathologies et les conseils abondent nos connaissances. Peut-être à nouveau pourrait- notre cité en nous proposant, depuis dans ce secteur. Ce spécialiste de la on se remettre à rêver que le progrès progresse ; le 18 oct jusqu’au 4 janv, l’exposition physiologie du système sanguin peut que pierre qui roule n’amasse pas mousse mais va Durance : la rivière en partage. Réa- certainement nous aider à voir clair plus vite, plus loin, plus longtemps ; que demain lisée par le Musée des Civilisations dans l’impact que peut avoir notre sera plus riche en diversité des pratiques. Que de l’Europe et de la Méditerranée alimentation sur notre santé. demain je pourrai être un Sisyphe heureux et [MuCEM], dans le cadre du Plan Maison du Tourisme Louis Ardissone qu’Ulysse, mon fils naturel, continuera l’Odyssée de Durance Multi-Usages, cette expo- 04 91 10 49 20 la connaissance humaine. Alors seulement nous sition itinérante sur l’eau et ses [email protected] pourrons mourir vivants et heureux. usages dans la Vallée de la Durance YVES BERCHADSKY commence son parcours en PACA par le Muséum de Marseille et le Palais 72 ÉDUCATION ORCHESTRE FRANÇAIS DES JEUNES | AVERROÈS JUNIOR À la baguette ! Qui est l’Autre ? Depuis sa création en 1982 par le Voilà une question que peuvent se poser Ministère de la Culture, l’Orchestre Français des Jeunes offre la pos- les collégiens après les projections des films sibilitédevivreuneexpérience unique du dispositif Averroès junior... Mais ils ont déjà à de jeunes interprètes des Conser- vatoires Supérieurs de Musique: faire trouvé des ébauches de réponses ! partie d’un grand orchestre sympho- Les films ont été choisis par Delphine franco-comorien qui faisait partie de la nique dirigé par un grand chef et Camolli de l’association Tilt. Les Sélection Semaine de la Critique à parfaire ainsi leur formation, et leur primaires ont eu droit au magnifique Cannes cette année. Il est tourné aux connaissance du répertoire, par un Azur et Asmar de Michel Ocelot et un Comores. Djibril prend soin de la travail collectif qui demande concen- programme de 3 films courts a été maison de son frère qui vit à l’étranger. tration et discipline. Chaque année proposé aux collégiens de 6e et 5e. Pendant ce temps un incendie détruit une centaine d’étudiants, sélectionnés sa case. Heureusement que la sur audition, peuvent se former au Des Courts métrages solidarité joue et qu’on l’aide à métier de musicien d’orchestre. dépaysants reconstruire. Ce film met en lumière De très grands chefs se sont succédé Le premier Court, de Hany Tamba, les problèmes de l’émigration : ceux à la direction des jeunes instrumen- est libanais. Beyrouth After Shave qui sont partis ne reviennent pas tistes. Depuis cet été, la baguette est présente un vieux barbier ambulant, toujours et ceux qui restent n’ont pas confiée à l’américain Dennis Russell L'OFJ en répet avec Dennis Russell Davies © X-D.R bavard et généreux, appelé un jour les moyens de vivre décemment. Par Davies dont le répertoire va du baroque au contemporain et auprès de Monsieur Raymond qui vit exemple ils se procurent l’électricité en le parcours de Saint Paul et New York à Stuttgart, Bonn, reclus et taciturne dans sa demeure pratiquant des branchements interdits Vienne, Salzbourg et Paris ! cossue depuis la mort de sa femme. et dangereux : c’est ainsi que les cases Deux sessions ont lieu chaque année, l’une en été, l’autre en De grands portraits de la disparue brûlent ! Ce phénomène a beaucoup hiver. Première étape : préparation par pupitres par des trônent partout et son fantôme intéressé les élèves dont quelques-uns professeurs eux-même musiciens dans les plus grands apparaît souvent pour parler avec son étaient d’ailleurs d’origine comorienne. orchestres ; actuellement ce sont Renaud Déjardin, mari, ce que les enfants ont eu un peu Les films ont été suivis d’un débat avec violoncelliste (révélation de l’Adami en 2000), David Walter, de mal à comprendre : «Elle est pas Salim Hatubou, écrivain et conteur, hautbois, interprète et transcripteur de talent, et Jean- morte, on la voit !», occasion né en Grande-Comore, arrivé à l’âge de Jacques Justafré, cor, musicien contemporain et jazzman. d’expliquer la vivacité de l’amour et du dix ans dans les quartiers Nord de Ensuite travail avec le chef. Puis tournée en France et en souvenir. Marseille. Il effectue un travail de Europe, occasion précieuse et recherchée de voyager et de Petite lumière, film sénégalais de Alain recherches sur la tradition orale et les découvrir d’autres musiciens, d’autres publics. Gomis, met en scène une fillette qui contes de son enfance au cours de Pour la 2e année consécutive, la résidence de l’OFJ est abritée se pose des questions sur la réalité des séjours réguliers aux Comores. Les par le Grand Théâtre de Provence dont les qualités choses et des gens. Une façon de vivre Contes de ma grand-mère, son premier acoustiques et techniques sont appréciées... comme sans sa vie : «C’est moi la reine !» et d’ignorer ouvrage, date de 1994 et il en a une doute les charmes de la vie aixoise ! les autres. Les enfants ont trouvé son dizaine à son actif maintenant. Il anime CHRIS BOURGUE comportement bizarre et auraient des ateliers d’écriture, notamment voulu savoir «la fin». Mais les dans les établissements en zones Simon et Léa ont 20 ans, respectivement contrebassiste expériences sensorielles n’en ont pas ! sensibles. Il rappelle qu’il y a 80 000 etaltiste.Tous2sontenchantésparl’expérience.L’orchestre? Le dernier : La Résidence Ylang-ylang comoriens à Marseille et que la culture ils adorent : «C’est très stimulant ! On découvre les œuvres de Hachimiya Ahamada est un film comorienne provient d’un brassage

en les décortiquant puisque d’abord on travaille par pupitre, Beyrouth after shave de Hany Tamba puis le groupe s’agrandit peu à peu. C’est une formation de très bon niveau qui permet de faire de jolis voyages !». L’OFJ propose aussi des actions dans les établissements scolaires:Musique et Histoire autour de la 8e symphonie de Chostakovitch, composée en 43 pendant le siège de Stalingrad. Mais ils font aussi des concerts de Musique de Chambre dans des Centres de soins palliatifs, des maisons d’Arrêt ou de retraite... Occasions de belles rencontres qui remportent un franc succès !

Concert au GTP le 23 décembre (voir p.33) 73

Azur et Asmar de Michel Ocelot

Hors-jeu entre les cultures africaine, musulmane, malgache... Il parle islamiste interdit aux filles d’assister à un match de foot ! de l’importance de l’éducation et de son projet de Maisons Prétexte ? La promiscuité avec des hommes grossiers (ça à Port- de l’Enfance pour accueillir les enfants dans les villages et jure, les hommes !) n’est pas bonne pour elles ! Alors elles créer du lien social. essaient de se faire passer pour des garçons et ça ne de-Bouc Il évoque son amie Hachimiya Ahamada, née en France marche pas à tous les coups, loin s’en faut ! Elles se re en 1976, qui a découvert à 21 ans le pays d’origine de ses retrouvent sous la surveillance de jeunes appelés qui C’est la 1 année parents : l’Archipel des Comores et a choisi d’orienter son préfèreraient garder leurs vaches et elles leur donnent du fil que Port-de-Bouc travail de mémoire sur les thèmes de l’exil et du à retordre ! Inénarrable scène dans les toilettes évidemment participe à l’opération déracinement. Après avoir réalisé plusieurs documentaires, pas prévues pour des filles, dialogues surréalistes ! Les La Résidence Ylang Ylang est son premier court-métrage de scènes au stade ont été tournées le jour du match et donc grâce à l’enthousiasme fiction en 35mm. D’autres collaborations se feront le réalisateur ne savait pas comment finirait son film ! Fort, et l’énergie de la certainement entre les deux créateurs. non ? Jafar Panahi voulait être au plus près de la réalité, c’est pour cela qu’il n’a tourné qu’avec des non-professionnels. À nouvelle responsable Des Longs métrages qui questionnent la fin, l’Iran gagne, c’est l’allégresse, et tout le monde se de son cinéma Le Deux films ont été proposés qui mettent en lumière la retrouve à danser dans la rue au milieu des embouteillages Mélies, Geneviève ressemblance des adolescents au-delà des frontières dans et des klaxons ! leurs centres d’intérêt, leurs aspirations de liberté par Les questions ont évidemment porté sur l’absence de liberté Houssay rapport au monde qu’on leur impose ! Ce sont le film iranien des filles, l’autorité paternelle et militaire, la ségrégation Zibeline : Comment l’idée vous est- de Jafar Panahi, Hors-jeu, et un film français réalisé par sexiste. Shadi Salam, musicienne et danseuse iranienne elle venue ? Vincent Paronnaud et Marjane Satrapi, à partir de sa d’origine kurde, et Maryam Chemirani, chanteuse franco- Geneviève Houssay : J’ai été BD, Persépolis, dont le succès fut fulgurant. iranienne, ont expliqué que 10% seulement de la population contactée par l’Espaceculture et je Hors-jeu, Ours d’argent au Festival de Berlin 2006, a été était véritablement extrémiste et que le foot était pour les voulais travailler avec la Médiathèque projeté dans l’amphithéâtre du collège Edgard Quinet femmes une façon de lutter pour leur liberté. Elles ont dit qui fait un gros boulot d’initiatives (Marseille) devant deux classes de 3ème. Leur attention et aussi que le foulard n’était pas le problème le plus important culturelles. Il y a une sorte de solidarité leur intérêt ont été exemplaires. Le thème de départ était et qu’il y avait des façons de le porter avec négligence : entre les associations culturelles, et d’un abord facile puisqu’il s’agissait de foot ! Mais les Shadi en a fait la démonstration. La richesse de la culture pas d’argent. Port-de-Bouc est une développements étaient sujets à de nombreuses questions perse a été évoquée et les deux jeunes femmes ont affirmé ville un peu oubliée ! Les enseignants que ne manqueraient de poser les collégiens. leur espoir et leur confiance dans le changement de la des établissements sont aussi très De quoi s’agit-il ?Simplement de filles qui veulent assister en société. La séance s’est terminée en musique. Shadi a joué motivés. fraude au match de qualification de l’Iran contre le Bahreïn de son sétâr, instrument à quatre cordes de la famille du Quelle est la population scolaire et le 8 mai 2005. Pourquoi en fraude ? Parce que la République luth, puis d’un tambourin garni de pièces métalliques au son comment a-t-elle réagi ? extraordinaire, et Maryam a chanté une mélodie qu’elle a La population est très métissée avec Azur et Asmar de Michel Ocelot ensuite traduite. Grand moment d’émotion ! Le principal du des gitans et des magrhébins, et les collège a remercié l’EspaceCulture et les deux artistes pour établissements font partie du dispositif ce moment d’exception dans un collège en «Zone Sensible». Ambition Réussite. Les élèves ont été Shadi Salam participait également à la projection Persépolis très attentifs, ce qu’ils voyaient les duquel. Primé à Cannes en 2007 nos lecteurs en ont renvoyait à leur propre culture. Ils certainement entendu davantage parler ! ont accroché au film et à la musique, CHRIS BOURGUE certains ont chanté avec Shadi. C’était important aussi d’être dans une vraie salle de cinéma, avec une autre ambiance et un autre confort ! ENTRETIEN RÉALISÉ PAR CHRIS BOURGUE 74 ÉDUCATION ALTERNATIVES POSITIVES | PICASSO MÉTAMORPHOSES La lumière des peuples racines Sous le signe de Picasso © Agnès Mellon L’association L’Alternative Positive vient d’organiser un Dès le 6 janvier, le musée Granet, à festival d’actualité, Entre tradition et modernité, dans le Aix-en-Provence, présentera un cadre de la 11e semaine de la Solidarité Internationale. Créée parcours multimédia axé sur en 2005, l’association veut mettre en avant les initiatives qui l’œuvre de Picasso, prélude à l’expo- cherchent à construire un avenir plus harmonieux. Contes, sition estivale Picasso Cézanne. expositions de photos, de peintures, documentaires sur les Intitulé Picasso, Métamorphoses ce jeunes roumains, les sociétés tribales ou des guérisseurs parcours donnera des clés de lecture chamanes ont ouvert des horizons méconnus. Les difficultés sur le procédé de création de Picasso, des Masaïs, qui, dépossédés de leurs terres ont du mal à ses affinités avec Cézanne. Enfants et garder leur mode de vie pastoral, ont été expliquées par adultes seront plongés au cœur du Xavier Peron. Parallèlement une conteuse et un danseur processus créatif, immergés dans un masaï, Anuang’a Fernando (voir page 21), ont témoigné environnement d’images et de sons de la richesse de leurs traditions. sur lesquels ils pourront intervenir L’association n’a pas oublié de s’intéresser aux traditions Edgard Morin, accueille les participants dans les hautes grâce à des capteurs en se promenant marseillaises en projetant le documentaire Paroles de la vallées du Diois, après une heure de marche, histoire de se dans une forêt de tiges interactives au Plaine de Pascal Boyadjian qui fait revivre la mémoire du mettre en jambes et dans l’esprit du lieu, un bâti ancien sur rythme des étapes de la vie artistique quartier avec témoignages des anciens et images d’archives. 4 ha de terres. Il s’agira d’«interroger nos pratiques et nos de Picasso. Puis Éric Julien a captivé le public en racontant sa représentations à la lumière des savoirs des peuples L’objectif est de toucher 15 000 rencontre avec les Indiens des Hauts Plateaux colombiens, racines» comme le dit Eric Julien. scolaires ! 300 projets ont été validés les Kogis, héritiers des traditions précolombiennes. Ceux-ci CHRIS BOURGUE par l’Académie et les classes recevront l’ont soigné et sauvé d’un œdème pulmonaire il y a 22 ans. une valise pédagogique, 100 classes Pour les remercier Éric Julien a créé une association qui Alternative Positive de primaires pourront visiter le rachète des terres pour ces populations dépossédées. À ce www.alternative-positive.org château de Vauvenargues, des jour ce sont près de 2000 hectares que les Kogis ont Ecole de la Nature et des Savoirs ateliers seront proposés… dans la retrouvés et qu’ils ont pu réinvestir en reconstruisant des www.ecolenaturesavoirs.com limite des créneaux disponibles ! Les lieux de prière par exemple. Peu à peu ils reconstituent leur travaux d’élèves seront exposés lors paysage et retrouvent leurs traditions : les hommes tissent de la manifestation C’est sud les végétaux, cousent les vêtements de la tribu, quant aux organisée toutes les années par la ville femmes elles fabriquent des objets, notamment des sacs d’Aix. Zibeline ne manquera pas de aux motifs symboliques précis. suivre tout cela de près, en donnant la Fort de ses contacts répétés avec les Kogis, Éric Julien a parole aux élèves… décidé de créer en France une École de la Nature et des CHRIS BOURGUE Savoirs. Depuis peu ce lieu de recherche et de formation accueille des individus ou des groupes désireux de réfléchir aux principes de développement durable et de les Picasso Métamorphoses expérimenter. Des stages, des séminaires sont proposés. du 6 janvier au 15 décembre 2009 L’École, créée sous le patronage de Jean-Marie Pelt et PRIX LYCÉEN DU LIVRE PACA ÉDUCATION 75 Rencontrer l’écriture L’auditoire était attentif et les questions pertinentes ! Le premier forum du Prix littéraire des Lycéens PACA 2009 a ménagé ses bonnes surprises en Avignon, au Théâtre du Chêne Noir, dès le mercredi 3 déc

Rencontres en live qui vient d’obtenir la nationalité italien- souvenirs personnels en essayant de Le Chêne Noir a accueilli les lycéens ne (voir page 69), est l’exemple même, soigner un malade d’Alzheimer. Il re- de l’Académie Aix-Marseille avec crois- pour les jeunes, du brassage des constitue ainsi des fragments de sants et café pour parler des livres des origines et des cultures. mémoire, la vie des ouvriers des auteurs présents pour ce premier Duog Thu Huong, née au Viet-Nam chantiers navals, atteints de la maladie forum de l’année. en 1947,engagée dans la guerre contre de l’amiante, le souvenir d’un amour De quoi s’agit-il ? D’un prix littéraire les Américains puis contre le régime perdu. Ouvrage plein de nostalgie pour Amara Lakhous décerné par environ 500 lycéens et corrompu de Hanoï, militante pour les un passé qui ressurgit par bribes. éd. Actes Sud - apprentis à l’issue d’une année de Droits de l’Homme, a été assignée à 18 euros lectures d’auteurs contemporains et résidence surveillée durant 10 ans et vivants, et de rencontres avec ces vit exilée en France depuis 2006. Les auteurs en chair et en os au cours de Français, dont Danièle Mitterrand, se deux forums (un pour chacune des sont battus pour sa libération. Dans académies de la Région). Fin mai, les Itinéraire d’enfance, roman en partie lycéens voteront et éliront leurs cham- autobiographique, elle retrace la traver- pions, occasion d’une grande fête avec sée du Vietnam pour rejoindre son présentation de travaux d’élèves et père de la jeune Bê, en compagnie de distribution des prix. son amie, à la fin des années 50, oc- Le projet a été lancé par la Région et casion de croiser toutes sortes de gens l’Agence Régionale du Livre (ARL) et est du monde paysan, du petit peuple et Christian en fonction depuis cinq ans. Chaque de montrer la rigueur du régime. Ce Astolfi établissement travaille en partenariat roman de facture très classique a éd. La chambre Zeina Abirached avec une bibliothèque et une librairie. semblé un peu long aux adolescents à d’échos éd. Cambourakis - Des visites d’imprimeries, d’artisans du cause des descriptions. «Oui il est lent, 14 euros 20 euros livre, des rencontres d’éditeur sont or- assume-t-elle. Le peuple vietnamien est ganisées afin que les différents métiers paysan et cela influence le style. Je suis du livre soient approchés. combattante professionnelle et écrivaine dilettante !» Questions/réponses Originaire de Toulon et ancien travail- Onze délégations de lycéens et ap- leur à l’Arsenal maritime, Christian prentis se sont installées dans la salle Astolfi a lui aussi été interrogé sur la despectacle:lycéesd’Aix-en-Provence, partie «vécue» de son roman Les tam- Brignoles, Gardanne, La Ciotat, Manos- bours de pierre :«Je vole des réalités et Duong Thu que, Marseille, Martigues, Sisteron et je les recompose avec la fiction, je Huong CFA d’Avignon. Pascal Jourdana ouvre traduis un univers, une ambiance.» Ainsi éd. Sabine Efix-Levaray laséanceendonnantquelquesconseils le narrateur, médecin, est-il un «restau- Wespieser éd. Petit à petit – pour la prise de dialogue : «Parlez sans rateur de mémoire» qui retrouve des 24 euros 12,90 euros honte et dites ce que vous pensez !» Amara Lakhous est interrogé sur la façon dont il se moque avec humour du racisme dans son livre déjà célèbre Du côté des vignettes Choc des civilisations pour un ascen- Zeina Abirached, jeune libanaise, frappe un grand coup profs et élèves. Mais c’est la réalité de ce monde ! «Je voulais seur Piazza Vittorio, best-seller 2006 en avec Le jeu des hirondelles. On est tout de suite happé par écrire un livre politique, c’est le cri de l’ouvrier. Si j’étais Italie (voir Zib 8). Dans ce roman, des le dessin noir et blanc, au graphisme rigoureux qui donne infirmier, j’aurais écrit Putain d’hôpital !». Efix a fait des essais gensd’origineetdeculturestrèsdiverses vie au décor de la pièce-refuge et à ses habitants. Beyrouth en couleurs, mais très vite le noir et blanc avec les gris vivent dans un quartier très populaire 1984, la ligne de démarcation surveillée par des francs- dégradés au crayon s’est imposé avec les silhouettes noires de Rome et se rencontrent... dans un tireurs coupe la ville en deux. La petite Zeina a 3 ans et en contre-jour. ascenseur:«Lemécanismeduracisme attend ses parents avec les voisins qui viennent dans cette me laisse perplexe parce qu’on banalise pièce dès qu’il y a une alerte, galerie de portraits attachants Pour finir, les lycéens ont posé des questions d’ordre les événements. Il ne faut pas prendre et émouvants. général: quels conseils donner à un jeune écrivain les racistes au sérieux. L’ascenseur est Le dernier livre a deux auteurs : Jean-Pierre Levaray pour débutant? Quand trouvez-vous votre titre ? Avez-vous des le personnage principal, c’est un lieu le texte adapté de son premier livre Putain d’usine et Efix influences ? Tous les auteurs ont répondu avec application… dans lequel les gens sont obligés de se pour le dessin. C’est l’éditeur qui les a présentés. Tous deux que tout commence par la lecture ! rencontrer, c’est une métaphore !» ont connu le monde ouvrier, et le premier y est encore. CHRIS BOURGUE D’origine kabyle et algérienne, l’auteur, Questions sur le langage cru, grossier qui a surpris quelques 76 EDUCATION LATERNA MAGICA | ZIBULONS

Jouer, créer : la belle vie ! Malgré les mouvements de grève lycéens, passés sous silence d’ailleurs dans la plupart des médias, Ce ne sont pas moins de 7 ateliers, d’environ une quinzaine nos Zibulons sont sortis, et ont écrit, entre deux de participants chaque fois, qui ont ainsi été proposés par l’Association Fotokino et la 5e édition de Laterna Magica manifestations et blocages contre la réforme des Grands et Petits ont pu s’approprier les proprier le récit et l’héroïne après avoir lycées qui se met en place dans la précipitation, mystères des images et jouer les ap- pris connaissance des diverses inter- le flou le plus complet, et le mépris le plus total prentis-sorciers avec feutres, ciseaux... prétations fixes ou animées, de et beaucoup d’imagination ! Le but : nombre d’artistes. À leur tour les parti- des avis des enseignants. Nous remercions donc jouer avec l’Art et se faire plaisir... cipants ont travaillé avec des papiers doublement nos Zibulons pour leurs contributions… À partir de son livre Méli-Mêlons (éd. découpéspourfairegrandirourapetisser Seuil), Séverin Millet a proposé la Alice. Leurs images ont été photogra- réalisation d’un Pêle-Mêle. Chaque phiées, puis montées rapidement pour À cadavres ouverts participant devait dessiner au feutre constituer un petit film : effet son portrait en pied en 3 parties : la saisissant! Certains élèves du Lycée technologique Marie Curie tête, le tronc, les jambes. À la fin de la Un autre atelier a été consacré à l’illus- (Marseille) se sont rendus, avec ou sans leurs professeurs, à séance ils ont échangé leurs parties, tration sonore : 7 enfants ont été l’exposition Our Body (voir page 71). D’autres ont refusé de s’y ce qui était très drôle ! accompagnés dans la création de la Un atelier de Flip Book, plus savam- bande son d’un épisode de La petite rendre. Les avis sont tranchés… ment appelés Folios-copes, a permis taupe du tchèque Znedek Miler (voir Sous le prétexte de nous instruire, cette Je trouve le concept tordu et malsain. La de «s’initier à l’histoire de ce petit ciné page 50) par le groupe Catherine exposition bafoue les droits de l’homme, mise en scène de cadavres me paraît de poche, objet qui est de plus en plus Vincent. Des objets de toutes sortes et exploite une nécrophilie sous-jacente. inappropriée, et la mise en spectacle à la mode et permet de comprendre la ont servi à la réalisation de bruitage et Elle prétend être une confrontation avec malsaine et morbide. Cela ressemble à base du cinéma» comme l’explique les enfants ont imaginé et dit des la mort, mais tout a été fait pour que les un scénario de contre utopie, où des Nathalie Guimard, fondatrice de dialogues interprétés en direct. cadavres aient l’air vivant. On peut douter familles se divertiraient devant la mort… l’association avec Vincent Tuset- Viendront un atelier de cartes à jouer d’ailleurs de son aspect pédagogique, VANESSA CHALVET, BTS MODÉLISME Anrès. Déroulement de l’atelier : on d’après le livre d’Italo Calvino Le son prix élevé allant à l’encontre d’une dessine un story-board de 24 images (il château de destins croisés qui propo- ouverture à tous les publics, et les poses C’est le fait que ce soit des vrais corps y a 24 images à la seconde au cinéma), sera la création de cartes inspirées du parfois ridicules des cadavres ne qui est choquant, mais justement, c’est puis on reprend ces 24 images sur 24 Tarot et un atelier de photomontage. représentant guère l’approche sérieuse ce qui est artistique, puisqu’exposer des feuilles qu’on agrafe; on met une petite Fantaisie, humour et rêves à partir d’un médecin. D’autant qu’administra- morts est hors du commun. L’art est couverture cartonnée et on obtient une d’images fixes ou animées, de quoi tivement aucune preuve n’a été donnée souvent mal jugé, censuré, parce que seconde de cinéma en faisant défiler donner envie de retourner en enfance par Gunther von Hagens de la prove- justement il effraie ou dérange. Et les feuilles. Encadré par 3 animateurs et de s’offrir un regard neuf ! nance des corps : il n’y a qu’un seul justement c’est parfois cela le but… l’atelier a concerné autant d’adultes CHRIS BOURGUE cadavre de fille, et d’après le Comité AMANDINE VOLPI, BTS MODÉLISME que d’enfants ! national d’Ethique le fournisseur de ces Les tout-petits se sont amusés avec corps se situe entre trois camps de Cette exposition au centre des débats deslégumesetdesimagesd’Arcimboldo travaux forcés, en Chine… repousse le tabou de la mort. Bien qu’elle pour réaliser des collages et des JULIETTE RIGHETTI, PREMIÈRE ARTS APPLIQUÉS fasse partie intégrante de la vie, est-il coloriages, avec la référence à un livre Ces ateliers ont eu lieu à la Galerie utile de l’exposer ? En fait cette expo- de jeux italien de Bruno Munari Dis-le Montgrand, au CRDP, aux Variétés Il n’y a rien de spectaculaire dans la mort. sition exploite la tendance actuelle à avec des signes (éd. Danese, 1980). du 3 au 20 décembre La mort est une chose qui s’associe à la repousser les tabous comme objet de Un très intéressant travail sur l’Alice de Films et ateliers pour enfants tout au douleur et à la souffrance, pas au commerce. Les places à 15 euros sont Lewis Carroll a réuni autant d’adultes long de l’année. divertissement. excessives. De plus la télé et les jeux que d’enfants. Il s’agissait de se réap- Le Petit cinéma : www.fotokino.org ELODIE RIGAUD, BTS MODÉLISME vidéos banalisent déjà dangereusement

Mensuel gratuit paraissant Rédactrice en chef Musique et disques Histoire et patrimoine Photographes : Agnès Mellon le deuxième jeudi du mois Agnès Freschel Jacques Freschel René Diaz Edité à 25 000 exemplaires [email protected] [email protected] [email protected] 06 09 08 30 34 06 20 42 40 57 Edité par Zibeline SARL Maquettiste 76 avenue de la Panouse | n°11 Secrétaire de rédaction Musiques et disques Philippe Perotti 13009 Marseille Dominique Marçon Frédéric Isoletta [email protected] Dépôt légal : janvier 2008 [email protected] [email protected] 06 19 62 03 61 06 23 00 65 42 06 03 99 40 07 Directrice de publication Responsable commerciale Agnès Freschel Éducation Cinéma Véronique Linais Chris Bourgue Annie Gava [email protected] Imprimé par Rotimpress [email protected] [email protected] 06 63 70 64 18 17181 Aiguaviva (Esp.) 06 03 58 65 96 06 86 94 70 44 Ont également participé à ce numéro : photo couverture Arts Visuels Philosophie Susan Bel, Armelle Marié, Maryvonne © Agnès Mellon Claude Lorin Régis Vlachos [email protected] Colombani, Marie-Jo Dhô, Sylvia Gou- [email protected] rion, Clarisse Guichard, Dan Warzy, Conception maquette 06 25 54 42 22 Marie Godfrin-Guidicelli, Pierre- Max Minniti Sciences et techniques Yves Berchadsky Alain Hoyet, Christine Rey, X-Ray, Livres Ode Fanlau, Sonia Isoletta Fred Robert [email protected] [email protected] 06 82 84 88 94 Le Cid, poésie dramatique Les Zibulons de l’Olivier Ô rage ! Ô temps perdu ! Ô théâtre Quand pourrai-je rentrer chez moi n’ont pas partagé ennemi ! pour m’effondrer ? N’ai-je donc attendu que pour être notre avis sur Le Cid déçue Mais aussi présenté par la Criée au Et suis-je restée là dans la salle écouter le Cid c’est comme attendre théâtre du Gymnase… enfermée que la mémoire nous revienne Ils s’y sont ennuyés ! Que pour voir notre Cid si mal écouter le Cid c’est comme entendre interprété ? un vieux disque dont les paroles re- montent peu à peu Ôennui! Ôsommeil! mortelle écouter le Cid c’est comme se balader © Bellamy somnolence! dans le parc où on a appris à faire ses Quand Chimène va-t-elle s’arrêter premiers pas… de chialer ? ÉLÈVES DE LA PREMIÈRE L DU LYCÉE L’OLIVIER, MARSEILLE 12E l’idée de la mort, on vit dans un monde Et quand va donc finir la terrible séance, virtuel qui nous détache complètement de cette réalité. Cette exposition sans odeur, exposant des cadavres plastifiés Blanche Neige dans des poses plus vivantes que Mais à cette étonnante fidélité au mortes, nous retire notre humanité, libertine… déroulement de l’histoire il ajoute le grain notre sensibilité. de folie, cette touche si connue qui fera l’intérêt de cet étrange ballet : il le ENGUERRAN BARATOUX, PREMIÈRE ARTS présente comme ode à la sensualité et APPLIQUÉS aux plaisirs ambigus de la chair, Our Body est très instructif niveau représentés notamment par une «belle- anatomie, bien que ces cadavres ne mère» sado-masochiste. Sa collaboration paraissent pas réels. avec Jean Paul Gauthier a sûrement influencé ses choix ! ANISSA ZAGAYE, PREMIÈRE ARTS APPLIQUÉS Blanche Neige, ainsi que les courtisanes, Très originale, cette expo nous donne sont vêtues de costumes blancs et l’occasion d’en savoir plus sur le corps fluides à la connotation érotique évi- humain. dente. De plus le jeu sexualisé entre les danseurs et danseuses est présent tout CYRIL CACCHIANI, PREMIÈRE ARTS APPLIQUÉS au long de la représentation. Malgré tout Certains la verront comme enrichissante ces personnages frivoles et inconstants, © Agnès Mellon au niveau culturel, d’autres comme une la belle-mère entourée de ses deux Si nous avons été étonnés, et touchés, par le classicisme de langoureux félins contorsionnistes atteinte à la dignité humaine. Des cada- Blanche Neige, notre Zibulone y a relevé une «touche vres chinois ont été plastifiés, découpés représente à elle seule l’intrigue posée et mis en scène, comme si la mort Preljocaj» plus crue, et moins inattendue… par cette mise en scène libertine… pouvait avoir un côté artistique qui méri- C’est entre rêves d’enfants et symbo- sants, il fait l’éloge du célèbre conte des tait d’être dévoilé. Ces personnes ont lisme qu’Angelin Preljocaj nous offre l’un frères Grimm durant 2h de spectacle, et vécu, ont eu des familles qui n’ont sans des plus ambitieux de ses ballets. Avec l’on s’émerveille une fois de plus devant EMMA GARDEUR ÉLÈVE DU LYCÉE VAUVENARGUE doute pas eu leur mot à dire dans cette une mise en scène bien plus théâtrale la peau immaculée de blanche neige 1ERE LITTÉRAIRE HISTOIRE DE L’ART affaire… qu’habituellement, et des décors impo- accompagnée de ses 7 «nains» ! MANON OPRATO, PREMIÈRE ARTS APPLIQUÉS

On ne peut pas nier que le fait de payer El Condor passa au lycée Vauvenargues l’entrée d’un cimetière sans pierre tom- Les lycéens qui étaient là ne connaissaient pas Los Calchakis. rythmes, les souffles, la voix, les cordes grattées et pincées ont bale est peu banal ! En tous les cas, si Question de génération sans doute. Hector Miranda, argentin, fait vibrer les murs, nos oreilles, nos entrailles et nos pieds. vous êtes nécrophiles et que vous avez le père fondateur du groupe, s’est donc d’abord fait conteur : le Ensuite, les guitares et les percussions ont presque réussi à portefeuille trop plein, n’hésitez pas ! quintette s’est formé en 1960, s’est donné le nom d’une vallée nous faire voir le Diable en liberté dans la salle des conseils du UGO PIEL, PREMIÈRE ARTS APPLIQUÉS où vivait une fiancée de Miranda, et a traversé le monde sur les lycée… Le concert impromptu s’est terminé sur une étonnante «ailes du Condor» et des disques d’or. Il a ensuite présenté les reprise d’un Kyrie, avant-goût d’un grand projet de messe que Je pense qu’il est intéressant de montrer instruments, au même titre que les membres du groupe : La le groupe prépare avec le chœur de l’Atrium de Chaville et de vrais cadavres au public. Cela lui Kéna, petite flûte en roseau ; Alberto Rodriguez ; le Bombo, l’actrice Marie-Christine Barrault. Chacun est ensuite retourné permet de prendre conscience d’une tambour argentin taillé dans un tronc ; Enriké Capuano ; les en cours, avec un brin d’argentine accroché à la boutonnière. réalité : la mort est de chair. Scandaleux flûtes de pan ; Sergio Arriagaga ; les guitares et mandolines, ou choquant cela provoque une à 4, 6 ou 12 cordes ; Contreras ; et de grandes cosses de Los Calchakis ont donné deux concerts à Aix : le 21 novembre, réaction: il nous faut peut-être voir un flamboyants, converties en percussions. dans le cadre du festival Musica Maestro et le 22 nov., au cadavre à bicyclette pour enfin prendre L’assistance avait mordu à l’hameçon des quelques sons théâtre Vitez, avec le chœur de la Noria. conscience de l’horreur de certains entendus et des paroles déjà chantantes de Miranda. Le chant spectacles que l’on paye. de la Colombe sauvage est monté lentement, à partir d’un LES ÉLÈVES DE SECONDE, OPTION FACULTATIVE HISTOIRE DES ARTS KENZA MOHAMED EL HADJ, BTS MODÉLISME dialogue entre deux flûtes, jusqu’à un moment puissant où les 78 FORMULAIRES D’ADHÉSION ANNUELLE LA RUBRIQUE DES ADHÉRENTS

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à l’amicale et recevez Les Bernardines Pavillon Noir (Aix) Le Greffier de Saint-Yves (Marseille 1er) 4 invitations par représentation 3 invitations pour 2 personnes librairie générale et juridique votre carte de membre pour Séance pour Entity 10 rue Venture une proposition de Bruno Meyssat de Wayne McGregor 5% de réduction le 20 déc à 15h le 18 jan à 17h sur tous les livres le 20 déc à 19h30 04 42 93 48 00 Cochez le type d’adhésion souhaité 4 invitations par soir Librairie Regards (Marseille 2e) pour Macbeth Les Salins (Martigues) Centre de la Vieille Charité Adhésion individuelle (11N°) de Heiner Müller d’après William 8 invitations par représentations 5% de réduction 1 exemplaire mensuel, 1 carte de membre nominative :  Shakespeare pour Questions de goûts sur tous les livres 40 mes Angela Konrad de Georges Appaix L’histoire de l’œil (Marseille 6e) Adhésion familiale (11N°) le 13 jan à 21h le 8 jan à 20h30 25 rue Fontange 1 exemplaire mensuel, le 16 jan à 21h le 9 jan à 21h 5% de réduction …cartes de membre nominatives : 60 Invitations à confirmer la veille de la date 04 42 49 02 00 sur tous les livres (autant de cartes de membres que de personnes choisie avant 17h au 04 91 24 30 40 vivant sous le même toit) OMC Simiane Librairie Imbernon (Marseille 8e) Adhésions collectives (11N°) Théâtre du Gymnase 4 invitations spécialisée en architecture 5 exemplaires mensuels, 1 carte de membre nominative : 60 10 invitations par soir pour Don Juan La Cité Radieuse pour Le jour se lève, Léopold de Serge Cie théâtre Asphodeles 280 bd Michelet, 3ème étage Valetti le 17 jan à 20h30 5% de réduction Adhésions de groupes (11N°) mise en scène de Michel Didym 04 42 22 81 51 sur tous les livres 5 exemplaires mensuels, 5 cartes nominatives : 100 le 16 jan à 20h30 le 17 jan à 20h30 Musicatreize Librairie Arcadia (Marseille 12e) le 20 jan à 20h30 2 invitations pour 2 personnes Centre commercial Saint Barnabé Village le 21 jan à 19h pour le Concert à quai 30 rue des électriciens Nom du groupe ou résa par mail à le 15 jan à 20h 5% de réduction [email protected] et 6 places supplémentaires à 8 € sur tous les livres 04 91 00 91 91 Nom et Prénom de chaque membre : Montévidéo Librairie de Provence (Aix) tarif réduit GRIM 31 cours Mirabeau à toutes les représentations tarif réduit 5% de réduction Profession : 04 91 37 97 35 pour tous les concerts sur tous les livres (10€ au lieu de 12€) Les Bancs Publics O4 91 04 69 59 Librairie Au poivre d’Ane (La Ciotat) 1 place offerte pour 1 place achetée 12 rue des frères Blanchard Adresse postale (1 par groupe) pour tous les spectacles Le Balthazar 5% de réduction 04 91 64 60 00 entrée gratuite sur tous les livres pour tous les concerts du jeudi Le Gyptis 04 91 42 59 57 La Pensée de Midi pour tous les spectacles de la saison vous offre Mail tarif réduit B (15€ au lieu de 24) L’institut culturel italien 3 exemplaires du n° de la revue Le Mépris à toutes les représentations vous offre 5 exemplaires de Tanger, ville frontière 04 91 11 00 91 3 adhésions annuelles 1 exemplaire de Beyrouth, XXIe siècle d’une valeur de 32 €, cette « carte par mail : [email protected] Téléphone Théâtre Vitez (Aix) adhérent » 2 invitations par soir vous donnera accès à tous les services de Le Comité Régional de Tourisme PACA pour Mon corps est nul l’Institut, Vous offre d’Arno Calléja médiathèque et programme culturel. 2 kits de produits de beauté à base d’huile le 13 jan à 20h30 demande par mail : [email protected] d’olive Chèques à libeller à l’ordre de : le 14 jan à 19h ou au 04 91 48 51 94 (gel douche, crème pour le corps et pour le 15 jan à 19h les mains) L’amicale Zibeline le 16 jan à 20h30 Librairie Maupetit (Marseille 1er) par mail : [email protected] au-delà de ce quota d’invitations, La Canebière Adhésions à adresser à : tarif à 8 € pour tous les spectacles 5% de réduction L’amicale Zibeline 04 42 59 94 37 sur tous les livres 76 avenue de la Panouse | n°11 Scène Nationale (Cavaillon) Librairie L’écailler (Marseille 1er) 13009 Marseille 2 invitations par soir 2 rue Barbaroux Si vous souhaitez devenir pour Terrien 5% de réduction partenaires et publier ici de Yannick Jaulin sur tous les livres le 20 jan à 19h vos avantages, écrivez à Les cartes de membres vous seront adressées le 21 jan à 20h30 [email protected] par retour de courrier 04 90 78 64 64