Le Front National Mutations De L'extrême Droite Française
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EDITIONS DE L’UNIVERSITE DE BRUXELLES Le Front national Mutations de l'extrême droite française EDITE PAR PASCAL DELWIT SCIENCE PO LITIQUE O P E C N E I C S E U Q I T I L Le Front national Mutations de l'extrerne droite francalse EDITE PAR PASCAL DELWIT DIRECTEUR DE LA COLLECTION« SCIENCE POLITIQUE » Pascal Delwit DERNIERS TITRES PARUS Adherer a un parti. Aux sources de la participation politique, Emilie van Haute, 2009 L'islam a Bruxelles, Corinne Torrekens. 2009 Les voix du peuple. Le comportement electoral au scrutin du 10 juin 2009, edite par Kris Deschouwer, Pascal Delwit, Marc Hooghe et Stefaan Walgrave, 2010 Ord res et desordres au Caucase, edite par Aude Merlin et Silvia Serrano. 2010 La biodiversite sous influence? Les lobbies industriels face aux politlques internationales d'environnement, Amandine Orsini, 2010 Revendiquer le« mariage gay». Belgique, France, Espagne, David Paternotte, 2011 Clivages et families politiques en Europe, Daniel-Louis Seiler, 2011 Party Membership in Europe: Exploration into the anthills of party politics, edited by Emilie van Haute, 2011 Les partis politiques en Belgique, edite par Pascal Delwit, Jean-Benoit Pi let, Emilie van Haute / /> EDITIONS DE L'UNIVERSITE DE BRUXELLES Le Front national. .. Mutations de l'extrerne droite francaise EDITE PAR PASCAL DELWIT SCIENCE POLITIQUE s n o r i r r o a 3)N31)S ISBN 978-2-8004-1519-2 D/2012/0171/7 © 2012 by Editions de l'Universite de Bruxelles Avenue Paul Heger 26 - 1000 Bruxelles (Belgique) [email protected] www.editions-universite-bruxelles.be Im prime en Belgique Introduction Pascal DELWIT L’élection présidentielle du 22 avril 2007 et le scrutin législatif qui l’a suivi ont été une terrible désillusion pour Jean-Marie Le Pen et le Front national. Après avoir dominé l’agenda politique et médiatique durant les années quatre-vingt-dix et créé une secousse dans le système politique lors des élections présidentielles de 2002, le FN était ramené à une expression électorale et un poids politique très modestes. Si Jean-Marie Le Pen enregistre encore un score de 10,4% au premier tour de l’élection présidentielle, le FN passe sous la barre des 5% lors des élections législatives. Seule Marine Le Pen est en mesure de défendre les couleurs frontistes au deuxième tour des élections législatives. Ce résultat, en phase avec le mouvement de déclin observé dans les années 2000, est confirmé au scrutin municipal de 2008 où l’extrême droite française est évanescente. D’aucuns évoquent alors la fin sans gloire de Jean- Marie Le Pen et de son parti. A la veille des élections présidentielles et législatives de 2012, la présentation et le regard sont pourtant tout autres. En janvier 2011, Marine Le Pen a « hérité », en triomphant de Bruno Gollnisch, de la présidence du parti ; trente-neuf ans après l’accession de son père à cette même présidence. Le Front national a opéré une percée aux élections cantonales du printemps 2011 et les enquêtes d’opinion créditent Marine Le Pen de scores oscillant entre 15 et 20% des intentions de vote pour le premier tour de la présidentielle. LE FRONT NATIONAL Intentions de vote pour Marine Le Pen au premier tour de l’élection présidentielle en 2011 25 19 20 1717 17 17 17 17 16 15 10 5 0 juil. juil. juil. juil. juil. mai mai mai juin juin juin juin oct. oct. oct. oct. oct. déc. nov. nov. nov. nov. Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ août août août août sept. sept. sept. sept. Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ 2 9 Ͳ Ͳ Ͳ Ͳ 4 8 1 3 5 6 16 23 30 3 14 21 28 11 18 25 15 22 29 12 19 26 13 20 27 10 17 24 Source : IPSOS. Après le pain noir, le pain blanc ? Les choses sont indubitablement plus nuancées. Dans un environnement européen où l’extrême droite a (re)trouvé des couleurs dans certains Etats – Autriche, Danemark, Finlande, Grèce, Norvège, Pays-Bas, Suède… –, une nouvelle analyse de fond du phénomène frontiste s’imposait, tant il est vrai que le déclin politico-électoral de la deuxième moitié des années 2000 avait asséché les recherches consacrées au Front national. Pour comprendre le « phénomène Front national », onze contributions sont articulées à six grands angles d’analyse. Dans un premier temps, l’histoire presque quarantenaire du Front national est décortiquée à l’aune de quatre phases – la « traversée du désert » (1972-1983), l’enracinement et la consolidation (1983-1999), l’« essoufflement » (les années 2000) et la renaissance possible (2011-) (Delwit). Dans une deuxième étape, Piero Ignazi analyse les sources du modèle français et frontiste pour l’extrême droite européenne, en termes de profil idéologique et d’organisation performante. Ignazi propose ensuite une typologie de l’extrême droite européenne en fonction de ses capacités de pénétrer le système politique et l’exécutif ; de manière directe – participation au gouvernement – ou indirecte – soutien extérieur. Les impacts réciproques pour l’extrême droite et la droite parlementaire sont subtilement examinés. Dans une troisième phase, c’est la dimension organisationnelle du FN qui est scrutée. Grand oublié des travaux consacrés au Front national, Anissa Amjahad et Clément Jadot décomposent le modèle organisationnel du FN et ses évolutions tandis que Birgitta Orfalli analyse les ressorts contemporains de l’adhésion au Front national : le moment initial et ses fondements. Dans un quatrième temps, Gilles Ivaldi examine et explique les mutations programmatiques de même que les socles et les registres identitaires du Front national. INTRODUCTION Le cinquième axe est consacré à la problématique des élections et des alliances politico-électorales. Depuis 1972, Jean-Marie Le Pen et le Front national ont pris part à de nombreux scrutins à tous les niveaux – municipal, cantonal, régional, législatif, présidentiel et européen. Les résultats sont présentés et analysés de manière exhaustive tout comme sont posées les problématiques des alliances et des reports de voix lors des scrutins à deux tours dans un cadre uninominal – élections législatives et cantonales – ou plurinominal – élections municipales et régionales (Delwit). La question des alliances et des reports est une problématique cruciale pour le FN, en difficulté face à la contrainte institutionnelle du droit électoral français. Mais elle l’a été et l’est tout autant pour la droite parlementaire. Pierre Bréchon détaille les rapports complexes et mouvants entre cette droite parlementaire (RPR, UDF, UMP,…) et le Front national. Pour sa part, Nonna Mayer revient sur la lancinante question de « l’électorat frontiste » ou, pour être plus correct, des électorats frontistes. Qui sont les électeurs du Front national ? Comment évoluent-ils ? Comment les appréhender dans la période contemporaine ? Quelles sont leurs motivations et leurs attentes ? Enfin, trois zones de force du Front national, dissemblables dans leur profil, sont très finement observées : le Nord-Pas-de-Calais, par Bernard Dolez et Annie Laurent ; l’Alsace par Bernard Schwengler ; Provence-Alpes-Côte d’Azur par Joël Gombin. Les étapes du Front national (1972-2011) Pascal DELWIT En octobre 2012, le Front national (FN) fêtera son quarantième anniversaire. Si le FN a commencé à marquer les imaginations par sa progression électorale et politique dans la deuxième moitié des années quatre-vingt et dans les années quatre-vingt- dix, l’organisation frontiste a vu le jour bien avant, puisqu’elle est officiellement fondée le 5 octobre 1972, à l’initiative de l’organisation Ordre nouveau. Comment caractériser et jalonner cette histoire quarantenaire du Front national ? Sous l’angle de ses performances politiques, électorales et organisationnelles, quatre temps nous semblent pouvoir être isolés. Le premier est communément qualifié de « traversée du désert ». Cette phase s’étend de la création du parti au 4 septembre 1983, moment où le FN réussit sa première percée politique, symbolique et médiatique lors d’une élection municipale partielle à Dreux. Il décroche 16,72% et intègre pour le deuxième tour la liste RPR-UDF conduite par Jean Hieaux, qui l’emporte aisément (55,33%). La deuxième phase est l’étape de l’enracinement national et local, de la consolidation électorale et politique jusqu’à la scission mégretiste en décembre 1998. Le troisième temps est caractérisé par un fort affaiblissement du Front national, en dépit de la présence de Jean-Marie Le Pen au deuxième tour de l’élection présidentielle de 2002. Son influence électorale et politique est sensiblement amoindrie dans les années 2000. Enfin, l’élection à la succession de Jean-Marie Le Pen, en janvier 2011, présente une rupture, à bien des points de vue, exceptionnelle et a été suivie d’un scrutin cantonal marqué par un renouvellement de bonnes performances du Front national. L’établissement d’une organisation d’extrême droite pérenne en France La droite radicale ou l’extrême droite ont des racines importantes dans l’histoire et la pensée politiques française. Néanmoins, l’opprobre de Vichy et une 12 LE FRONT NATIONAL fragmentation permanente ont longtemps rendu l’extrême droite française peu visible politiquement et sans influence de la libération au début des années quatre-vingt. Deux moments démentent néanmoins partiellement cette perspective : la percée poujadiste aux élections législatives de 1956 et la candidature de Tixier-Vignancour aux élections présidentielles de 1965, les premières tenues au suffrage universel sous la Ve République. Le mouvement poujadiste est une naissance spontanée à partir d’une révolte d’une trentaine d’artisans et de commerçants de Saint-Céré contre des contrôleurs fiscaux 1. Ce faisant, ils lancent un mouvement qui débouche sur la création de l’Union de défense de la création des artisans et commerçants (UDCA) contre une fiscalité jugée excessive. L’UDCA se développe au milieu des années cinquante et investit même le champ électoral avec la présentation de listes de l’Union et fraternité française (UFF) au scrutin législatif de janvier 1956 sous le slogan « Sortez les sortants ! ».