La nuit Bengali

Un téléfilm en trois parties de Nicolas Klotz d’après Mircea Eliade

Avec Hugh Grant, John Hurt, Anne Brochet, Pierre-Loup Rajot

20.40 Samedis 13, 20 et 27 mai 1995

Contact presse: Virginie Doré /Grégoire Mauban - 01 55 00 70 46 / 48 [email protected] / [email protected] internet : www.arte-tv.com Tourné à Calcutta, bousculé par les pressions de la censure indienne, “La nuit Bengali” raconte le corps-à-corps impossible d’un Européen avec une Inde fantasmée. Dans son roman, Mircea Eliade explorait la violence d’un amour contrarié par la religion et les moeurs. En trois épisodes, Nicolas Klotz impose, quant à lui, une découverte amoureuse tout en désirs.

EPISODE 1

llan, jeune ingénieur européen travaille à Calcutta dans la Compagnie de Narendra ASen, important entrepreneur de travaux publics. Il vit dans une pension européenne en compagnie de sa petite amie Guertie, d’un bon copain Harold, et de deux autres amies, Norinne et Clara, tous musiciens ou chanteurs de jazz. Ils s’entendent tous très bien, vont au cinéma, au club de jazz. Ils organisent des soirées, fument un peu d’opium avec des industriels, des ambassadeurs et couchent facilement les uns avec les autres, comme dans les rêves.

Une nuit, un vieil ami d’Allan, Lucien Metz, arrive à Calcutta et rencontre par hasard Allan, ivre mort sur les marches de la pension. Grand spécialiste de l’Asie et un peu paranoïaque, Lucien Metz est reporter pour “Life Magazine” et vient de terminer un reportage sur la Chine, qu’il est obligé de quitter à cause de la guerre. Peu après son arrivée, Lucien s’infiltre dans la vie d’Allan et l’accompagne à un thé chez Narendra Sen, qui habite un peu en dehors de la ville.

Les bengalis n’ouvrent jamais leur maison aux étrangers. La maison est sacrée, l’étranger ne peut-être que profane. Au Bengale, l’Occident n’a pas bonne réputation, mais Narendra Sen est un homme moderne, qui travaille avec l’Occident et a besoin d’Allan.

Sur place, Allan et Lucien rencontre Gayatri, la fille aînée de Narendra Sen. Celui-ci annonce à Allan qu’il va l’envoyer sur un site en pleine jungle de l’Assam pour diriger un chantier de chemin de fer. Lucien Metz, fasciné par la beauté de Gayatri, la photographie, se l’approprie en l’emprisonnant sur son négatif. Quelques heures plus tard, l’appareil photo se brise et Lucien décide de quitter Calcutta, voyant là un mauvais présage. Allan, lui, n’est pas superstitieux et accepte de partir dans la jungle. Quelques semaines plus tard, Allan, qui a contracté la malaria, est renvoyé d’urgence à Calcutta. Il reste 21 jours dans le coma. A son réveil, pour faciliter sa guérison, Narendra Sen invite Allan à loger dans sa maison. EPISODE 2

a maison s’ouvre donc une seconde fois à Allan, qui y passe sa convalescence, L enseignant à Gayatri la maîtrise de sa langue, et s’intégrant petit à petit à la vie familiale. Les amis d’Allan n’apprécient pas l’hospitalité du bengali. Forts de leur certitude dans la supériorité européenne, ils insinuent que Narendra Sen projette de lui faire épouser Gayatri. Gu e r tie, inquiète pour Allan, tente de le faire revenir à Rippon Street, et lui annonce que Norinne, enceinte, va accoucher prochainement. Allan refuse de l’écouter et reste chez Na re n d r a . Peu à peu, Allan et Gayatri tombent passionnément amoureux l’un de l’autre. D’abord réticente, Gayatri s’abandonne à son amour malgré les problèmes familiaux qu’il soulève.

EPISODE 3

Guertie, déçue, décide de quitter Calcutta et d’aller en Chine, en compagnie de G Lucien. La présence d’Allan dans la maison de Narendra Sen devient de plus en plus troublante. Lors d’une promenade, Lilou, la soeur cadette de Gayatri, surprend les deux amoureux en pleine étreinte. Une multitude de signes annonce alors une catastrophe imminente : Lilou sombre dans une crise nerveuse, Narendra Sen est frappé par une maladie des yeux, Khokha, son neveu, espionne...Pourtant l’histoire d’amour d’Allan et de Gayatri continue. Allan annonce à Gayatri son projet de mariage. Elle lui explique que c’est impossible, son père ayant accueilli Allan comme son propre fils. Il est de plus en plus difficile pour eux de vivre cet amour. D’autant que Lilou, par maladresse, en parle à sa mère. Celle-ci réagit immédiatement, en “purifiant” Gayatri. Le lendemain, Narendra Sen demande à Allan de quitter la maison, prétextant une prochaine opération des yeux et le départ de sa famille. Quelques minutes plus tard, Allan quitte la maison sans même avoir eu le temps de dire au revoir à Gayatri. Narendra Sen lui remet une lettre lui intimant l’ordre de ne plus revoir aucun membre de sa famille. Allan retourne à Rippon Street, où le soir même il reçoit des nouvelles de Gayatri... LISTE ARTISTIQUE

Hugh Grant ...... Allan

Suprya Pathak ...... Gayatri

Shabana Azmi ...... Indira Sen

Soumitra Chatterjee...... Narendra Sen

John Hurt ...... Lucien Metz

Anne Brochet ...... Guertie

Pierre-Loup Rajot...... Harold

Steve Potts ...... Steve

Elisabeth Perceval ...... Norinne

Avec les voix de Souad Amidou (Gayatri), Eric Dufaye (Allan), Jean-Claude Carrière (Narendra Sen), (madame Sen), André Wilms (Lucien Metz), Jean-Quentin Chatelin (Khokha), Elisabeth Perceval (Norinne), P.-L. Rajot (Harold), Inès de Médeiros (Guertie).

LISTE TECHNIQUE

Scénario...... Nicolas Klotz en collaboration avec Jean-Claude Carrière

Réalisation ...... Nicolas Klotz

Image...... Emmanuel Machuel

Décors ...... Alexandre Trauner

Musique européenne...... Michel Portal

Musique indienne...... Brij Narayan

Son...... Jean-Pierre Mugel

Equipe technique de Satyajit Ray

Production...... La Sept ARTE, Les Films Plain-Chant, Films A2, avec la participation de Canal +, George Reinhart Production, Soficas Sofimage et Investimage, Centre National de la Cinématographie.

1988 - 3 x 52 minutes NICOLAS KLOTZ

Assistant monteur et monteur sur des films de Gérard Lauzier, Edouard Molinaro, Olivier Assayas... Nicolas Klotz a tourné deux courts métrages, un documentaire musical Pandit Ravi Shankar (avec Ravi Shankar, Satyajit Ray et Yehudi Menuhin) et deux longs métrages : La nuit Bengali puis La nuit sacrée (1993), tournée au Maroc d’après deux romans de Tahar Ben Jelloun, avec Amina et Miguel Bosé.

Interview du réalisateur

tranger, Nicolas Klotz l’a été, à son arrivée aux Etats-Unis puis lors de son retour en E France, comme Mircea Eliade découvrant les Indes. C’est donc l’expérience de “l’étrangeté” qu’il filme : caractère suranné du quartier des Européens à Calcutta, où il ne brosse volontairement que des archétypes et non des portraits. Sous sa caméra, et l’oeil inquisiteur des censeurs indiens, l’érotisme incandescent et soyeux d’Eliade se transfigure en une sensualité mesurée. Le désir s’incarne dans le frôlement des êtres, la caresse de la caméra, l’accroche d’un regard.

Tourner le film à Calcutta, cela voulait dire être très vigilant à ce que vous alliez montrer de cette histoire d’amour? Les Indiens font une différence entre l’écrit et l’image : l’image, c’est la vérité. Il est donc très difficile de tourner là-bas ne serait-ce qu’un baiser. On a dû enlever certaines scènes pour passer la censure. J’ai été soumis aux mêmes conditions qu’un cinéaste indien. Tous les jours, un censeur indien assistait au tournage et donnait son accord à chaque plan, mégotant sur tel détail dans une scène de rue qui donnait une mauvaise image de l’Inde, etc. Nous avons changé le nom de l’héroïne qui était toujours vivante et qui nous a fait douze procès : elle aussi nous accusait de salir l’image de la femme indienne. Soixante ans après l’écriture du roman, qui a fait scandale là-bas, il y a une méfiance si grande qu’il faut ruser pour transgresser les interdits venus de la religion.

Gayatri est-elle femme, déesse, personnage imaginaire ? En tombant amoureux de Gayatri, Allan tombe amoureux du Féminin. Parce qu’en Inde, le féminin est partout. Tout part de la mère : elle désire l’étranger qui entre dans la maison. Pour elle, le mariage est un métier, elle n’est amoureuse que de son état de femme. Comme elle est frustrée, l’étranger ne peut qu’éveiller cet état de désir qu’elle va transmettre à sa fille en lui disant que “Le mouvement est le secret du monde et que les femmes détiennent ce secret dans leur corps”. C’est vraiment une transmission de femme à femme : Gayatri assume ce désir auprès d’Allan, provoque l’étranger, lui répond et Lilou, la petite soeur, écope de l’hystérie qui en résulte. Vous avez appliqué un traitement particulier aux voix de la version française ? Bizarrement la version française me concerne plus que la version anglaise : cela m’a permis d’aller plus loin dans la description des personnages. Tous les acteurs sont doublés par des comédiens de théâtre français, peu habitués au doublage, mais j’ai réservé pour les Indiens des voix très particulières (celle de Jean-Claude Carrière, de Jean-Quentin Chatelin...) qui signent leur étrangeté. Car je ne trouvais pas d’équivalent à l’accent indien dans les accents français. Dans la version anglaise, j’ai été obligé d’imposer une convention : les Indiens, comme les Européens, parlent anglais, mais un anglais à accent, repérable, logique. Il y a beaucoup de ruptures de langues dans ce film; c’est exactement ce qui a marqué ma jeunesse, partagée entre les Etats-Unis, la France et l’Allemagne.

Propos recueillis par Valérie Appert LES COMEDIENS Hugh GRANT cteur au physique de jeune prem i e r , Hugh Grant a été rem a r qué dans Maurice de James AIv o r y, où il tenait le rôle de Clive, jeune aristocrate. C’est ensuite Roman Polanski qui lui offr e un second rôle dans Lune de Fiel, aux côtés de Peter Coyote et d’Emmanuelle Seigner. Il ret r ouve James Ivory pour Les vestiges du jour, en 1994, où loin de son image romantique, il joue un aristocrate anglais proche des idées nazis. Mais c’est Qu a t r e mariages et un enterrem e n t , César du meilleur film étranger 1995, qui le révèle au grand public et lui ouvre les portes de la célébrité. Il joue dans cette comédie de Mike Newell le rôle d’un jeune homme timide, gaffe u r , amoureux et romantique. Depuis ce succès, il a été à l’ a f fiche de Si r è n e s , aux cotés d’Elle Mac Pherson et il tourne en ce moment aux Etats-Unis le remake de Neuf mois le film français de Patrick Braoudé, réalisé par Chris Columbus, avec Robin Wil l i a m s .

John HURT ’est l’un des acteurs anglais les plus distingués et aussi l’un des rares à avoir réussi une C ca rr i è r e européenne autant qu’hollywoodienne. Il débute en 1962, et a tourné depuis dans plus de cinquante films, avec certains des plus grands réalisateurs. On se souvient notamment de lui dans Midnight Express d’Alan Parker, où il jouait le rôle de Max, et pour lequel il est nommé aux Oscars 1978 pour le meilleur second rôle masculin, puis dans Al i e n de Ridley Scott en 1979. En 1980, David Lynch lui propose de jouer John Merrick, dans le film Elephant man, personnage à qui il donne, malgré son apparence repoussante, une dignité et une bonté déchirante. Il est d’ailleurs nommé une nouvelle fois aux Oscars 1980 pour le meilleur acteur pour sa pres t a t i o n . En 1984, il joue le rôle de Winston Smith, dans le film de Michael Radford tiré du roman de Ge o r ges Orwell 19 8 4 . Il y joue un fonctionnaire qui tombe illégalement amoureux. John Hurt donne ici la réplique à Richard Burton dans son dernier grand rôle. Il enchaîne alors les films, to u r ne avec Mel Brooks, Stephen Frears dans The hit, et ret r ouve Michael Radford en 1987 pour Sur la route de Nairob i , un film où il ren c o n t r e Hugh Grant qui y tient un petit rôle. Depuis, John Hurt ne cesse de tourne r , à raison de deux ou trois films par an.

Anne BROC H E T ’est dans Buisson ardent de Laurent Perrin qu’elle fait sa prem i è r e apparition C cinématographique, mais c’est Ma s q u e s , le film de qui permet au grand public d’apprécier ses talents. Elle tourne ensuite dans La maison assassinée de George s Lautner où elle donnait la réplique à Patrick Bruel. En 1988, elle joue dans Tolérance de Pierre- Henri Salfaty, en compagnie de Ruppert Everett et Ugo Tognazzi. Ce sera son premier rôle en costume, une mise en scène qui lui porte chance puisqu’elle jouera Roxane dans le très rem a r qué Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau, aux côtés de Gérard Depardieu et Vincent Perez. Avec Tous les matins du monde de c’est la consécration puisqu’elle reçoit le César du meilleur second rôle pour son interprétation. Elle joue ensuite dans le second film de Jérôme Boivin, Les confessions d’un barjo. En 1994, Anne Brochet joue sous la di r ection de dans Ge r maine et Benjamin, une série diffusée sur ARTE en dé c e m b r e 1994 et dont sera tiré le long métrage Du fond du coeur. On a pu voir la voir derni è r ement dans le film de Benjamin Stora Consentement mutuel. Elle tourne actuellement dans le film de Ronan O’Leaky Dr i f t w o o d . L’AUTEUR

Mircea ELIADE crivain roumain né en 1907 à Bucarest, Mircea Eliade a vécu aux Indes de 1928 à E 1932. Auteur d’une thèse de doctorat sur le yoga, il a enseigné la philosophie à l’Université de Bucarest. Attaché culturel en Europe, il commence, dans les années 40, à écrire directement en français. Son oeuvre comprend des romans : La nuit bengali, Forêt interdite, Le vieil homme et l’officier et des ouvrages sur les religions comme Le sacré et le profane, La nostalgie des origines.

LE DECORATEUR Alexandre TRAUNER rchitecte-décorateur français, né à Budapest (Hongrie) en 1906. A Jeune peintre de talent, il s’installe à Paris après avoir présenté une exposition de ses oeuvres. En 1930, Lazare Meerson le prend pour assistant, Trauner demeure 5 ans avec lui, collaborant à des films comme Le million, A nous la liberté, Quatorze juillet de René Clair, Le grand jeu, La kermesse héroïque de J. Feyder. Très lié avec le groupe de jeunes cinéastes qui gravitent autour du poète Jacques Prévert, il signe son premier décors en 1932 pour L’affaire est dans le sac de Pierre et Jacques Prévert, puis deux autres films L’hôtel du libre-échange (1934), Gribouille de Marc Allégret (1937), et à partir de Drôle de drame (1937) il devient l’un des cinq mousquetaires de la fameuse équipe du “fantastique social” : Prévert, Carné, Trauner, Jaubert (puis Kosma). Alexandre Trauner a créé les décors de plus de 160 films. On reconnaît sa touche particulière, d’un réalisme quelque peu expressionniste dans les films de Marcel Carné Quai des brumes, Hôtel du nord, Les visiteurs du soir et les enfants du paradis. Mais il a aussi travaillé aux Etats-Unis avec Orson Welles sur Othello, avec Howard Hawks, John Huston sur L’homme qui voulait être roi, et Billy Wilder pour La garçonnière, pour lequel il a reçu l’Oscar du meilleur décor en 1961. Véritable patriarche du cinéma français, il montre une jeunesse stupéfiante quand à 80 ans il construit des décors pour Bertrand Tavernier, pour le film Autour de Minuit, et travaille avec Claude Berry et Luc Besson. Alexandre Trauner est décédé en décembre 1993.