éduquertribune laïque n° 99 juin 2013

dossier Vers une nouvelle démocratie culturelle ?

éducation L’évaluation en formation histoire L’école de médecine de Bruxelles avant la fondation de l’ULB actualités Jeune prof cherche tuteur à la Ligue Tricot Urbain médias L’économie à la recherche de son storytelling

Publication de la Ligue de l’Enseignement et de l’Éducation permanente asbl 1. Sommaire En Médias Histoire Régionales : Dossier Actualité Focus CULTURELLE ? À Éducation Éditorial

la

vrac

Ligue VERS UNE NOUVELLE DÉMOCRATIE Michel Gheude Michel VerseleMarie Focus Roland Perceval In memoriam ’cnmeàl ehrh Parutions etévénements de sonstorytelling L’économie àlarecherche Stéphane Louryan avant lafondation del’ULB L’école demédecineBruxelles Hanane Cherqaoui Tricot Urbain L’agenda démocratie culturelle Des outilspourunenouvelle Vers unnouveau décret... en Belgique Les prémices desCentres culturels Culture etdémocratie Vers unenouvelle démocratie culturelle ? réalisés parMarie etinterview Dossier Versele Audrey Beaulen L’évaluation enformation Juliette Bossé une nouvelle formation enBelgique ! « Sciences et Techniques dujeu », Valérie Silberberg Jeune prof cherche tuteur p 4 p 24

p 34 p 32 p 29 p 27 p 22 p 20 p 18 p 15 p 14 p 11 p 3 p 9 p 6 à ce numéro: égalementcollaboréOnt mmteam sprl Réalisation assisté par Eric Vandenheede enpage Mise Valérie Silberberg Animatrice Patrick Hullebroeck Direction Roland Perceval Editeur responsable 1000 Bruxelles Rue delaFontaine, 2 permanente asbl l’Éducation etde de l’Enseignement est édité par éduquer Michel Gheude Michel Stéphane Louryan Hanane Cherqaoui Audrey Beaulen Juliette Bossé Valérie Silberberg VerseleMarie Roland Perceval Marie Marie Versele

de larevue Eduquer Roland Perceval, président de la Ligue

In memoriam

Un grand homme nous a quitté. Nous étions célébrations du 150e anniversaire de la Ligue est aujourd’hui peut-être encore plus brûlant nombreux, ce 7 mai, à accompagner Robert en 2014. qu’alors, mais la vision de Robert Lambert Lambert dans son dernier voyage. En tant que Secrétaire général, il travailla est et doit rester un guide sûr éclairant notre Il est très difficile de dire, en quelques lignes, sous trois présidences auxquelles il apporta chemin encore long pour faire triompher e tout ce que la Ligue doit à Robert. toute son expérience, son enthousiasme, sa nos idées. Le 150 anniversaire qui s’annonce gentillesse et son savoir-faire. n’oubliera pas sa lumineuse présence et son Professeur d’histoire à l’École Normale Charles action. Buls de la Ville de Bruxelles (héritière de Dans les conclusions d’un Rapport Moral qu’il l’École Modèle – fondée par la Ligue – qui rédigea en 1986, je ne résiste pas à extraire ce Au revoir Robert ! Tu nous manques devint son école d’application), il fut un qui suit : terriblement. pédagogue unanimement apprécié pour ses « Affirmer que la Ligue se porte bien peut sembler qualités humaines et pédagogiques ; il sut à certains relever de la méthode Coué, à d’autres véritablement donner le goût de l’histoire d’une inconscience imbécile. Il n’en reste pas à ses élèves et suscita de nombreuses moins que les signes du crédit dont elle jouit vocations. viennent en permanence de tous les horizons : En 1980, le 15 mars, il devint Secrétaire pédagogique, scientifique, administratif, général de la Ligue, fonction qu’il exerça associatif, syndical, politique, public et privé CCotisationotisation eett jusqu’en 2003. Il resta ensuite membre du divers. ddonon 20132013 Bureau exécutif. S’il ne convient pas de s’en glorifier, il faut se Si vous n’avez pas encore payé votre Pendant ces 23 années, il se donna de garder toutefois de céder à cette tendance, trop cotisation 2013, merci de le faire dans manière extraordinaire à notre association, en fréquente chez nous, de sous-estimer les effets les meilleurs délais. La cotisation 2013 homme de conviction qu’il était, en défenseur de notre action. Il ne s’agit pas de créer une force est de 20€ minimum. acharné de l’école publique. mais bien d’accroître une force existante, celle de Par ailleurs, faire un don, c’est marquer Sa contribution personnelle fut la Ligue dont l’influence est réelle. (…) votre soutien particulièrement active lors de la création La Ligue veut devenir le lieu de réflexion, de (les dons de 40€ et plus sont déductibles de vos impôts) du CEDEP (Centre d’Étude et de Défense de débat, d’élaboration et de mise en œuvre d’un l’École Publique), de la mise en place des projet d’éducation permanente pour le monde A verser sur le compte : secrétariats régionaux de la Ligue, dans le laïque : qu’elle trouve en elle et autour d’elle BE19 0000 1276 64 12 développement de l’éducation permanente, auprès de ses alliés les ressources pour mener BIC : BPOTBEB1 tout en veillant au bon équilibre entre les cette entreprise fondamentale à bien ! » de la Ligue de l’Enseignement et de l’Éducation permanente, asbl deux buts sociaux de notre institution, lors Toute l’action et tout l’enthousiasme de e rue de la Fontaine, 2 - 1000 Bruxelles des célébrations du 125 anniversaire de la Robert Lambert sont contenus dans ces Communication : cotisation ou don 2013 Ligue en 1989, lors de la publication des deux phrases toujours d’actualité. ouvrages historiques marquant l’évolution de Pour toute information concernant le la Ligue depuis sa création en 1864. Que son exemple et sa force nous suivi de votre affi liation, veuillez contacter soutiennent dans les combats que Laurent Bourgois : Tél. : 02/512.97.81 Il nous quitte en ne laissant que des regrets nous avons à mener pour défendre un Email : [email protected] et, hélas, sans être associé en personne aux enseignement public de qualité : ce combat

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Marie Versele, animatrice du secteur Communication

The HOPE Columbine Memorial Un jour... en 1999 Library, Bibliothèque mémorial Billet d’humeur aux victimes de la fusillade Un appui pour le plus faible La fusillade du Lycée de Columbine Une récente étude menée par le sociologue de la (Colorado), le mardi 20 avril 1999 VUB, Dieter Vandebroek, montre que le poids, la l y a quatorze ans, deux jeunes étudiants de taille et l’image de soi sont socialement inégale- I17 et 18 ans, Eric Harris et Dylan Klebold, ment répartis dans la population belge et corrélés perpétrèrent une des tueries les plus trau- avec le niveau des diplômes. matisantes de l’histoire américaine au sein de leur école, le lycée de Columbine, dans le Tandis qu’un universitaire sur douze chez les Colorado. Munis de pistolets, fusils à pompe, hommes et une sur vingt chez les femmes sont en carabines et couteaux de chasse, ils massa- surpoids, la proportion est de un sur cinq auprès creront, de sang-froid, douze étudiants âgés de la population qui ne dispose pas d’un diplôme de 15 à 18 ans, tueront un professeur et fe- de l’enseignement moyen. De même, la première ront vingt-sept blessés. Suivant un scénario catégorie est en moyenne composée d’individus minutieusement préparé, les deux étudiants plus grands de 3,6 cm chez les hommes et de 2,5 fi niront par se suicider à la fi n de l’opération, cm chez les femmes que les représentants de la se- faisant de cet événement le cinquième mas- conde. De plus, les personnes peu diplômées ont sacre le plus meurtrier perpétré dans une le sentiment que leur corps ne correspond pas à la école aux États-Unis. représentation qu’ils ont d’un corps idéal : ils res- Largement médiatisée, la tuerie secoua le monde entier et créa une réelle psychose sur le terrorisme aux États- sentent négativement leur propre physique. Unis. Cette tuerie permettra pourtant de remettre sur le tapis le nécessaire débat sur le contrôle des armes à feu, la disponibilité de ces armes, la sécurité dans les écoles, ainsi que l’omniprésence de la violence aux États-Unis. Dieter Vandenbroeck en conclut, de façon générale, Diff érentes législations fédérales seront mises en place en 2000, requérant des verrous de sécurité sur les armes à « qu’être beau n’est pas une question de chance sur feu ainsi que l’interdiction de magasins de munitions de grande capacité. S’ensuivit une loi interdisant aux criminels le plan génétique ou de choix individuel, c’est un pri- et aux mineurs d’acheter des armes. vilège social. » (De Morgen, le 16 mai 2013, p.12) Bien que ces lois aient été adoptées, la controverse reste vive aux États-Unis et les tueries continuent à se perpétrer (la dernière en date : la tuerie de Newton, le 14 décembre 2012, faisant 28 morts dans l’école primaire Sandy Hook Si l’école ne peut pas totalement contrecarrer ces dans le Connecticut). Sans réelle réforme des lois sur le port d’armes aux États-Unis, de tels drames continueront à tendances lourdes de l’inégalité sociale, elle peut secouer l’Amérique. Depuis le début de sa présidence, Barack Obama milite ardemment pour une réforme de la loi du moins, étant consciente des eff ets de celle-ci, sur le port d’armes. Combat vain, le sénat campant sur ses positions et rejoignant les puissants lobbys des armes prendre position contre elle et chercher à pallier ou à feu, qui semble invariablement gagner à ce jeu. Terrible aveu d’impuissance face à des lobbys omniprésents et à compenser son impact sur l’évolution des jeunes. superpuissants aux États-Unis... Il y a, à cet égard, tant à faire, que chaque initiative prise, qu’elle soit individuelle, collective ou institu- Concours Citation… tionnelle, est à soutenir, et à mettre au crédit de cette La RTBF vous invite à participer à un concours vidéo ! « Quand les riches se font la guerre, ce vieille tradition de l’école publique, inaugurée par les ensible à la problématique du développement durable, et plus sont les pauvres qui meurent. » Lumières et que formula Condorcet dans ses discours. Sspécialement de l’énergie ? La RTBF lance un nouveau concours Jean-Paul Sartre vidéo qui pourrait vous plaire. Ancré dans le projet européen intitu- Certains argueront que l’école pour tous, même lé « Energy Bits », l’objectif du projet est de sensibiliser le public au quand elle se veut égalitaire, produit de l’inégalité, développement durable, et plus spécialement à une consommation car appliquer un traitement égal à des inégaux ren- énergétique plus responsable. Pour ce faire, chaque élève, classe ou force l’inégalité. Certes. Comme le remarquait déjà école participant peut produire une courte vidéo sur une initiative Condorcet, « il en résultera sans doute une diff érence réalisée en matière d’effi cacité énergétique au sein de son école. plus grande en faveur de ceux qui ont plus de talent Plus d’infofo : www.ebitsvideo.com naturel, et à qui une fortune indépendante laisse la liberté de consacrer plus d’années à l’étude ; mais si cette inégalité ne soumet pas un homme à un autre, si elle off re un appui au plus faible, sans lui donner un maître, elle n’est ni un mal, ni une injustice (…) » (Premier mémoire sur l’instruction publique, §3, éd. Garnier Flammarion) Écoles Des animations « environnement » Que l’école publique soit un appui pour le plus pour l’année scolaire 2013-2014 faible, c’est ce que chacun peut souhaiter. Il faut ous êtes une école bruxelloise ? Vous également le vouloir. Au quotidien et à chaque Vavez envie de faire découvrir les enjeux heure du jour, avec la volonté, encore et toujours, de l’environnement à vos élèves ? Inscrivez- de faire mentir les statistiques. vous dès aujourd’hui aux animations gra- tuites proposées par Bruxelles Environnement Patrick Hullebroeck, directeur pour l’année scolaire 2013-2014. Plus d’info : www.bruxellesenvironnement.be

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Musique Savages - Silence Yourself ttention aux oreilles : bien loin de la pop et de la folk, Savages s’attaque à du rock Anoir, très noir. Aux premiers abords, Savages ressemble à un groupe de fi lles éner- vées, très énervées, comptant bien remettre le rock pur et dur au goût du jour. Voilà un groupe qui porte son nom à merveille ! Arrivées un peu par surprise, ces quatre Londoniennes surprennent en marquant un net retour au rock dur, voire agressif, dans leurs compositions et leurs attitudes. Il y a cette hargne, cette rage et cette noirceur qui fait plaisir à entendre dans le climat musical mielleux du moment. La chanteuse , ancienne chanteuse de John & Jehn, d’une androgynie éton- nante tout en étant perchée sur ses talons aiguilles, crache sa musicalité à travers une voix ferme et une puissance sonore toute en retenue. Jouant comme si c’était le dernier jour de leur vie, leur musique se déploie à en perdre haleine. À travers leur musique, Savages transmet une puissance scénique redoutable, une énergie indéfi nissable propre au rock. Même si Savages évoque les saintes reliques post-punk (Joy Division, Siouxsie, Wire), on est loin du réchauff é, les quatre Anglaises ont leur propre touche musicale et parviennent à en tirer un souffl e neuf. À voir en concert.

Livre jeunesse Exposition Tant que le Loup de Julie Versele et Charlotte Cottereau Ron Mueck à la Fondation Cartier à Paris acques est un petit garçon qui passe ses mercredis avec son grand-père. u 16 avril au 29 septembre 2013, le sculpteur australien JJacques est un garçon comme les autres, il aime jouer et rigoler. Son DRon Mueck expose à la Fondation Cartier pour l’art contem- papy, lui, ne joue plus, mais il connaît une tripotée d’histoires plus capti- porain. Au-delà de l’art hyperréaliste troublant et interpelant vantes les unes que les autres. Le petit garçon se délecte de ces moments de Ron Mueck, cette nouvelle exposition personnelle est la plus passés avec son papy… Jusqu’au jour ou le loup arrivera, le jour où son complète et la plus actuelle de la production de l’artiste qui se papy ne pourra plus lui raconter d’histoires. Car les loups, c’est bien connu, complètera, pour l’occasion, de six œuvres récentes et de trois viennent chercher les papys fatigués pour les emmener rejoindre leur meute, sculptures réalisées spécialement pour l’exposition. Si vous êtes sous la lune étin- de passage à Paris cet été, ne ratez pas cette exposition, les occa- celante, pour enfin sions de voir les œuvres de Ron Mueck sont extrêmement rares. s’endormir. Plus d’info : http ://fondation.cartier.com Sur les traces des peurs enfantines, Tant que le Loup est un livre qui explique, tout en Roman finesse et en dou- A moi seul bien des personnages, de John Irving ceur, la disparition des moi seul bien des personnages est l’histoire d’un amour aînés aux plus jeunes. Ainassouvi. Drôle et touchant, Irving nous off re une approche Délicat et rempli de passionnée et passionnante des sexualités diff érentes dans les an- poésie, ce livre parlera nées 1950. aux plus petits comme Bill est un adolescent qui se cherche. Comme beaucoup d’autres aux plus grands. adolescents de son âge, il cherche sa voie mais surtout son identité sexuelle. Au fi l des pages, on découvre les aventures burlesques et déchirantes de ce narrateur bisexuel, de ce « suspect sexuel » qui Evénement s’eff orcera toute sa vie de devenir « quelqu’un de bien ». u 18 au 23 août 2013, Tout en gardant cet humour teinté de mélancolie, propre à son style DChanGements pour l’égalité, littéraire, Irving trace, dans son dernier roman, une formidable chro- mouvement sociopédagogique, orga- nique de la libération sexuelle de la seconde moitié du vingtième nise ses 42e Rencontres Pédagogiques siècle, évoque les ravages du sida, tout en faisant écho de la guerre d’été (RPé). À cette occasion, ce ne du Vietnam. Aussi cru que drôle, A moi seul bien des personnages sont pas moins de 11 ateliers de 6 ou est, au fi nal, un vrai bon Irving. 3 jours qui sont proposés à tous les acteurs de l’éducation. D’autres acti- Mini news vités, telles qu’une soirée de présenta- tion de la Pédagogie Institutionnelle, uite à une grave crise alimentaire une table ronde sur le thème de la Squi s’est traduite par six mois de formation initiale et continue ainsi famine, près de 260.000 Somaliens, qu’une librairie spécialisée, sont éga- dont une moitié de jeunes enfants, lement proposées. sont morts de faim entre octobre 2010 Plus d’info : et avril 2012 (rapport de l’ONU publié www.changement-egalite.be le jeudi 2 mai 2013).

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Valérie Silberberg, responsable du secteur Communication Jeune prof cherche tuteur

Taux élevé d’abandon des enseignants débutants, conditions de travail diffi ciles, manque d’accompagnement, le début de carrière des professeurs est au centre des préoccupations, aussi bien dans les rangs politiques que dans les médias.

Il faut dire qu’en peu de seignants, rapport de force en Détenir un diplôme temps, deux enquêtes sont ve- partie structuré par les statuts Autre niveau contextuel poin- nues tirer la sonnette d’alarme qui protègent d’autant plus té par la recherche : celui des pour dénoncer ces abandons l’enseignant qu’il a acquis de pouvoirs organisateurs et des trop nombreux, en partie res- l’ancienneté. « (…) plus les no- établissements. Leur taille, leur ponsables du phénomène de vices sont récemment entrés, plus croissance ou déclin en termes pénurie d’enseignants. ils héritent des postes ouverts en d’effectifs, la pyramide des La première recherche a été cours d’année, dont on sait qu’ils âges de leur corps enseignant, menée par le Girsef (UCL). Elle sont moins pérennes. En dé- leur public d’élèves, leur mode révèle que 35% des enseignants coulent des conditions d’emploi d’organisation ou leur culture novices, tous niveaux d’ensei- en moyenne moins favorables : sont autant de paramètres qui gnement confondus, quittent statut de temporaire, bien enten- peuvent peser sur les trajectoires le métier dans les cinq ans. Ce du, mais aussi temps de travail des enseignants débutants. taux varie sensiblement d’un mensuel moindre, et plus grand Interviennent ensuite les va- niveau et d’un type d’enseigne- nombre d’établissements ou de riables individuelles : le genre, ment à l’autre, puisqu’il passe PO fréquentés. »1 l’âge et le diplôme. La troisième de 23,5 % pour les enseignants Les marchés n’offrent égale- variable est celle qui influence le ayant exclusivement fréquenté ment pas les mêmes potentia- plus les trajectoires et les proba- l’enseignement fondamental lités de trajectoires aux ensei- bilités de sortie, les détenteurs ordinaire à 51,4 % pour ceux gnants. De manière générale, d’un diplôme pédagogique ayant travaillé seulement dans les marchés du fondamental ayant des trajectoires nettement les CEFA. Dans l’enseignement proposent des conditions meil- plus stables et durables. secondaire ordinaire, ce taux leures que ceux du secondaire. « Les différences entre déten- est évalué à 44,1 %. Ceci est lié entre autres à la na- teurs et non détenteurs d’un Plus alarmant encore : plus ture des postes, plus souvent diplôme pédagogique sont im- de la moitié de ces sorties à temps plein dans le fonda- portantes, même si les données (19,1%) s’effectue dans la pre- mental. Les marchés bruxel- disponibles tendent à les suréva- mière année de noviciat. lois constituent également des luer : par exemple, le taux de sortie La recherche du Girsef marchés plus porteurs pour les des premiers est près de cinq fois avance diverses causes à ces novices, surtout par rapport aux moindre que celui des seconds à départs précoces. Elle met no- marchés liégeois. La capitale est l’échelle de la 1re année de novi- tamment en avant la lutte iné- même considérée comme la ciat (7,4% contre 35) et trois fois gale entre les cohortes de dé- plus « accueillante » en termes moindre à l’échelle de cinq ans butants et les autres. Il existe un de possibilités de « trajectoires (20% contre 60). Ce faible taux de rapport de force inégale entre stables au cours de la première sortie des diplômés pédagogiques les débutants et les autres en- année d’exercice ». mérite d’être souligné alors qu’est

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codes de l’école, qui sont particu- liers à chaque établissement, les relations avec les collègues… Là, les jeunes enseignants se sentent démunis, voire déconnectés du système scolaire dont ils sont cen- sés être des acteurs. »

Pour un tutorat Des constats importants à prendre en considération dans la réflexion sur la réforme de la formation initiale des ensei- gnants… Réclamé par les syn- dicats lors des dernières négo- ciations sectorielles, un plan d’accompagnement structurel des jeunes enseignants s’im- pose ! Avis partagé par le socio- logue Abraham Franssen : « (…) c’est l’entrée dans le métier qu’il faut repenser. On parle donc d’al- longer la formation avec entrée progressive dans le métier, temps partiels, accompagnements, su- pervisions, etc. Il faut aussi repen- souvent remise en cause l’adap- ploi instable, précaire ». Viennent des programmes, la solitude du ser les articulations carrière-for- tation de leur formation aux im- ensuite le travail de préparation métier et le manque de soutien mation continuée. On voit que pératifs du métier. »2 trop lourd, l’imprécision des des collègues. les enseignants qui tiennent bon En conclusion, les cher- consignes et programmes, le La CSC a aussi demandé à sont ceux qui parviennent à s’ap- cheurs du Girsef estiment qu’il manque d’outils pédagogiques, ceux qui avaient quitté le métier proprier des ressources, avec des est nécessaire que les acteurs la difficulté à planifier les cours, ce qui les avait poussés vers la masters complémentaires, etc. » du monde de l’enseignement la solitude du métier et l’attitude sortie : le stress, le manque de Joan Lismont, président du poursuivent les réflexions sur un des élèves. soutien de la direction et l’atti- SEL (Setca enseignement libre) meilleur accompagnement des L’instituteur se plaint plutôt tude des élèves. a évoqué, toujours pour Le Soir, enseignants débutants, mais ils de la planification des appren- Interviewé dans les colonnes les contours que prendrait ce tu- estiment indispensable de réflé- tissages, du travail de prépara- du Soir du 2 mai dernier, le so- torat. « Il faut que le tuteur soit une chir complémentairement à des tion, de la formation initiale et ciologue Abraham Franssen personne expérimentée et recon- politiques visant à améliorer les du salaire qui n’arrive pas à la fin avance d’autres explications à nue, par l’école ou l’inspection, conditions d’emploi des novices du mois. Le régent (secondaire la fuite des jeunes enseignants. comme étant un ‘très bon prof’, et à réduire les différences entre inférieur) se plaint de l’attitude « Les enseignants sont formés à capable de partager, d’accom- les positions qu’ils occupent par des élèves et des outils pédago- être des acteurs scolaires. Moins pagner. C’est pour cela que nous rapport aux autres enseignants giques. Le licencié (secondaire ou pas du tout aux autres facettes n’avons pas voulu du projet de la sur le marché de l’emploi, de supérieur) évoque un travail de du métier. Il y a la facette sociale, ministre Simonet, qui faisait du manière à ce qu’ils soient moins préparation important, l’emploi c’est-à-dire la gestion de la rela- tutorat une formule d’aménage- traités comme une variable instable et la gestion de la classe. tion aux élèves en tant qu’élèves ment de la fin de carrière. (…) Le d’ajustement du système. La personne venant d’un autre sociologiques et pas seulement en tuteur continuerait à donner cours horizon professionnel et qui a tant qu’élèves. Pour beaucoup, et, pendant une partie de son ho- Un emploi instable et précaire passé un CAP (certificat d’aptitu- c’est une difficulté. Et puis, il y a raire, ferait du tutorat. » Pour le La CSC-enseignement a éga- de pédagogique) pour pouvoir la facette institutionnelle : com- SEL, le tutorat devrait durer lement enquêté pour connaître enseigner, épingle l’imprécision prendre le système scolaire, les deux ans. Le tuteur exercerait les raisons de la fuite des jeunes enseignants. Plus de 600 per- sonnes ont participé au sondage organisé sur le site Internet du Le faible taux de sortie des diplômés pédagogiques syndicat chrétien. Parmi les difficultés éprou- mérite d’être souligné alors qu’est souvent remise en cause vées en début de carrière, la l’adaptation de leur formation aux impératifs du métier. première citée est celle de « l’em-

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son accompagnement entre un tiers-temps et un mi-temps. Le jeune enseignant, quant à lui, verrait son horaire alléger et son temps En bref... devant les élèves diminuer pour permettre du temps de travail avec son tuteur. Cours philosophiques manque plus de 36 000 places dans les quartiers En France aussi, on réfléchit au métier de La Constitution impose à l’école d’organi- identifiés comme déficitaires, tous niveaux professeur. Dès la prochaine rentrée acadé- ser un cours de morale non confessionnelle d’enseignement confondus. », observe l’ADT. mique, une trentaine d’écoles supérieures véritablement neutre. Or, selon la ministre C’est dans le primaire que les places font du professorat et de l’éducation (ESPE) vont Marie-Dominique Simonet, le cours de le plus défaut, « ce qui, dans le futur, devrait voir le jour, soit une par Académie. morale « n’est plus neutre. Il est devenu un accroître d’autant plus le manque de places en Ce projet vise à améliorer les perfor- cours de morale laïque, engagé. » La ministre écoles secondaires dans certains quartiers déjà mances en matière de formation initiale et estime qu’il faut restaurer un « vrai cours de déficitaires. » continuée des enseignants et des person- morale neutre ». Il n’entraînerait pas la dispa- La Libre Belgique, 20/04/2013 nels d’encadrement, ceci de la maternelle rition du cours de morale laïque. Les deux au supérieur. coexisteraient. Et de rappeler sa proposition Maltraitance Dans ce cadre, un Master métiers de l’en- de réforme des cours philosophiques : on Les équipes SOS Enfants de l’ONE (Office seignement, de l’éducation et de la forma- maintiendrait l’organisation actuelle mais de la Naissance et de l’Enfance) ont reçu 5 tion sera créé, avec quatre mentions : pre- l’ensemble des cours (morale, les différentes 293 signalements pour des enfants maltrai- mier degré, second degré, encadrement religions…) comporteraient une série d’élé- tés en 2011, qui ont conduit à 3 704 prises en éducatif, et pratiques et ingénierie de la ments identiques. Ce tronc commun prend charge. Dans 80% des cas, l’auteur de la mal- formation. doucement consistance. Les chefs des cultes traitance se trouve dans la sphère familiale. Des stages favorisant une entrée pro- ont entamé la rédaction de référentiels pour La Libre Belgique, 26/04/2013 gressive dans le métier seront organisés, et chacune des confessions. également un tronc commun portant sur les Le Soir, 17/04/2013 Voile islamique compétences transversales (conduite de la Le Conseil d’État a donné raison à une classe, soutien aux élèves en difficulté, éva- Pour Ecolo, « il est temps que le Parlement enseignante de religion islamique qui s’était luation et orientation). prenne une décision ! » La version des Verts présentée voilée pour donner cours dans une Un exemple à suivre ?... de l’organisation des cours philosophiques : école de Grâce-Hollogne. Il rappelle que les réduire les cours de morale et de religion à 1 maîtres de cours philosophiques ne sont pas 1. Les enseignants débutants en Belgique heure par semaine (contre 2 aujourd’hui) et astreints aux devoirs de neutralité repris dans francophone : trajectoires, conditions d’emploi et consacrer cette 2e heure à un cours qui porte- le décret du 17 décembre 2003 (qui organise positions sur le marché du travail, Les Cahiers de rait que le questionnement philosophique, la la neutralité inhérente à l’enseignement offi- recherche du Girsef, p. 138. citoyenneté active et la compréhension des ciel). Le Conseil d’État rappelle que « pareille 2. Idem, p. 142. différentes religions et de la morale. La pro- manifestation de la part de ces enseignants est position concerne tous les élèves, du primaire inhérente à l’enseignement de cette catégo- au secondaire, et ce, tous réseaux confondus. rie de cours dans la dispensation desquels ils Par ailleurs, l’emploi des enseignants actuel- exercent leurs fonctions. » lement en charge des cours de religion ou Le Soir, 16/05/2013 de morale serait préservé puisqu’ils auraient la possibilité de bénéficier d’une formation Enseignement spécialisé continue en interréseaux. Les nouveaux Les élèves « difficiles à gérer » sont de SSourcesources professeurs seraient, quant à eux, formés à plus en plus souvent renvoyés vers l’ensei-

- Des écoles du professorat encore en chantier, in Le l’enseignement de cette nouvelle matière, gnement spécialisé de type 3 (troubles du Monde, 30 avril 2013 ; dans le cadre de leur formation initiale. comportement et/ou de la personnalité) ou

- Les enseignants débutants en Belgique francophone : La Libre Belgique, 18/04/2013 de type 8 (troubles instrumentaux et de l’ap- trajectoires, conditions d’emploi et positions sur le prentissage). Actuellement, quelque 34 000 marché du travail, Les Cahiers de recherche du Girsef, Boom démographique enfants sont inscrits dans le spécialisé. Selon n°92, avril 2013 ; L’ADT (Agence de développement territo- le Collectif associatif Marguerite, en 15 ans, le

- Éviter la fuite des jeunes profs, in La Libre Belgique, 30 rial) a analysé l’adéquation entre l’offre et la nombre d’élèves intégrés dans le spécialisé avril 2013 ; demande des équipements scolaires (pour s’est accru de 24% au niveau fondamental

- Faut-il faire mettre le jeune prof sous tutorat ?, in Le Soir, les niveaux maternel, primaire et secondaire et de 20% au niveau secondaire. Si de plus 8 mai 2013 ; de l’enseignement public, officiel et libre) en en plus d’enfants qui ne souffrent d’aucun

- Pourquoi le jeune professeur fuit l’école ?, in Le Soir, 19 2010 et à l’horizon 2020. En 2010, à l’éche- handicap sont renvoyés vers l’enseignement avril 2013 ; lon régional, le nombre de places offertes spécialisé, chaque année, des enfants handi-

- Pourquoi les jeunes profs fuient-ils l’école ?, in Le Soir, 2 par les écoles est suffisant pour répondre capés de grande dépendance, notamment mai 2013 ; à la demande. En revanche, l’adéquation autistes, cérébrolésés, polyhandicapés, ne

- Un prof sur 3 quitte l’école dans les 5 ans, in La Libre entre l’offre et la demande est nettement trouvent pas de place dans le spécialisé… Belgique, 3 mai 2013 ; plus déséquilibrée à l’échelon local. « En La Libre Belgique, 17/05/2013

- Sitôt enseignant, sitôt parti !, in Le Soir, 3 mai 2013. effet, par rapport à la demande potentielle, il

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Juliette Bossé, secteur Communication « Sciences et Techniques du jeu », une nouvelle formation en Belgique !

La Haute École Paul-Henri Spaak et la Haute École de Bruxelles inaugurent une formation unique en Belgique : « Sciences et Techniques du jeu », prévue pour la rentrée 2013. Cette formation, organisée en cours du soir, vise à former « des praticiens réfl exifs ludologues, ludothécaires ou ludopédagogues ».

Nous avons rencontré Michel Michel Van Langendonckt : vrir une ludothèque. Van Langendonckt, coordina- Il y a deux motivations conco- Notre seconde motivation est teur pédagogique de la forma- mitantes. En premier lieu, il y a de développer le jeu comme tion, qui nous a parlé du rôle du une demande pressante du mi- « outil », aussi bien pour des ensei- jeu dans la psychologie du dé- lieu. Nous sommes actuellement gnant-e-s, des éducateur-trice-s veloppement et dans la sociali- dans une situation où le métier spécialisé-e-s, que pour des per- sation des individus. Si le jeu fait de ludothécaire existe, mais sous sonnes du milieu paramédical. partie intégrante de l’école et de forme de « coquille vide ». Des On souhaite réunir une réflexion l’enfance, sans doute devrait-on personnes sont « en poste », mais sur le jeu lui-même, ainsi qu’une davantage reconnaitre ses ver- il n’y a pas de formation diplô- réflexion sur l’initiation au jeu, tus en termes d’apprentissage et mante liée à la ludothéconomie. deux aspects très différents. Cette intégrer son étude au sein de la Aujourd’hui, la formation initiale formation est généraliste puisqu’il formation initiale et continue des des ludothécaires est tout à fait y a des cours d’histoire du jeu, de enseignant-e-s… diversifiée : on trouve aussi bien socio anthropologie du jeu, de La formation s’adresse à tout des personnes qui viennent du pédagogie, mais elle a aussi pour bachelier qui souhaite : milieu de la petite enfance, que vocation de s’adapter au projet - promouvoir et utiliser le jeu des personnes qui viennent du de chacun-e des participant-e-s. de manière adéquate dans milieu bibliothécaire, qui sont Chaque participant-e doit avoir son cadre professionnel so- architectes, enseignant-e-s, etc. un projet personnel qu’il-elle dé- cio-éducatif, pédagogique ou La formation que nous mettons veloppera pendant la formation. paramédical ; en place ne délivre pas, à « pro- Si « la sauce prend », on pourra - porter un projet et être respon- prement parler », un diplôme peut-être développer un bac au- sable d’une ludothèque ; de ludothécaire, mais plutôt un tonome à ce moment-là. Pour - travailler en ludothèque ou diplôme de spécialiste en ludo- l’instant cette formation corres- dans un autre secteur du jeu et théconomie, en ludologie, en pond à un master 1. du jouet. ludopédagogie, puisque les fu- tur-e-s participant-e-s ont déjà Éduquer : Selon vous, Éduquer : Quelles sont leur vécu personnel et leur di- quelles sont les vertus du jeu ? les raisons qui vous ont in- plôme de base. Mais cette for- M. V. L. : On sait que le jeu cité à mettre en place cette mation reste, tout de même, le remplit un rôle majeur en psy- formation ? « papier officiel idéal » pour ou- chologie du développement

n° 99 | juin 2013 éduquer 9 actualité

de manière générale. On parle beaucoup jeu. Le septième apport, spécifique au jeu, mation. C’est tout-à-fait le type de réflexion du jeu au niveau de l’enfance, mais on de- réside dans l’attitude ludique qu’il génère. posée sous forme de séminaire. Quant au vrait, en fait, parler de la personne humaine Grâce au jeu, on s’enferme moins facilement couple « compétition/coopération », il est dans son entièreté puisque l’enfant devient dans les problèmes. Le jeu donne un esprit au centre de plusieurs cours. On en a fait adulte. Par exemple, une étude canadienne de distance, de frivolité, une forme de sens une spécialité dans l’analyse des interac- lie le fait d’avoir « bien joué dans son en- de l’humour, parfois une ironie, un décalage tions sociales au niveau du jeu. On montre fance » et l’efficacité au travail. Le jeu entrai- par rapport à la réalité qui nous permet de notamment que les jeux de compétition nerait une capacité à chercher des solutions, mieux vivre. « pure », tels que le « un contre un » ou « une aiderait à avoir un esprit positif, une attitude équipe contre une autre », sont largement ludique face au monde. On distingue deux Éduquer : Quels sont les objectifs de la mis en place dans nos sociétés au détri- types de jeux : les jeux libres et les jeux de formation ? ment d’autres formes de jeux. Par exemple, société. Le jeu libre, qui consiste à utiliser M. V. L. : Il y a une ludosophie qui n’est les jeux de chasse ont toujours existé mais des jouets de façon autonome, en créant pas du tout exploitée. L’objectif de la forma- ont été éradiqués. Ce sont des jeux asymé- ses propres règles, permet le développe- tion est de faire passer ce message. Si La for- triques, c’est-à-dire que les deux camps ont ment personnel et le développement de la mation est théorique, elle est aussi fortement des outils différents, des pouvoirs différents personnalité. Ce type de jeu oblige à être in- axée sur la pratique. Si on veut convaincre et des objectifs différents. Avec ces jeux, on ventif et créatif, il permet de moduler l’envi- quelqu’un d’utiliser quelque chose, il doit est dans une situation qui consacre le fait ronnement à ses propres besoins. C’est une l’essayer. Il faut le sentir. Si l’on n’est pas que la société n’est pas forcement égalitaire étape très importante dans la construction passionné, on n’est pas passionnant. Dans au départ, contrairement à ce que disent les de l’individu, qui s’arrête souvent trop vite une formation comme celle-ci, on joue et, jeux de compétition, fondés sur l’idée que pour laisser la place aux jeux à règles, c’est- après, on partage une réflexion. C’est un tout le monde a sa chance, selon le mythe à-dire aux jeux de société. À ce moment-là, diplôme assez professionnalisant, c’est du américain. Les jeux de chasse disent autre l’individu perd en liberté mais gagne en chose : « Oui, le meilleur gagne, mais cha- socialisation, en culture. Les jeux à règles cun possède ses propres armes. » C’est un sont un apprentissage de la vie en société Le jeu entrainerait rapport au jeu très différent. Par ailleurs, puisqu’on apprend des règles de vie. Cela aujourd’hui, commencent à paraitre des permet de comprendre le fait que l’on n’est une capacité à chercher jeux d’auteurs alternatifs, qui présentent des pas tout seul, que l’on vit avec les autres. mécanismes différents : par exemple, dans le Réaliser cette expérience sous forme de jeu, des solutions, aiderait à « loup garou », les équipes sont cachées, c’est c’est s’exercer de façon indolore à quelque un jeu compétitif mais avec des équipes dis- chose de très difficile. Les jeux sont les mi- avoir un esprit positif, proportionnées. Il s’agit de découvrir « qui roirs de la société. En fonction des cultures, est qui », il y a des incertitudes. Cette mou- on ne propose donc pas les mêmes jeux, les une attitude ludique face vance s’installe au niveau du jeu et renforce mêmes règles. Les jeux à règles sont tout la richesse. C’est sans doute pour cela que ce aussi importants que les jeux libres, ils sont au monde. jeu plaît. Dans cette catégorie, il n’y en pas très complémentaires : encore assez mais de plus en plus. - il y a le jeu jouet d’un côté, « je suis dieu et je créé le monde » en utilisant mon jouet ; « pratico-pratique » mais avec une forma- Éduquer : Qu’en est-il de la place - de l’autre côté, il y a le jeu à règles qui tion sur l’outil. On apprend aussi à accom- du jeu au sein de la formation initiale et socialise. pagner l’enfant dans le jeu, parce que le continue des enseignant-e-s en Fédération Globalement, on peut dire qu’il y a six ap- passage du « jeu libre » au « jeu à règles » est Wallonie-Bruxelles ? ports du jeu qui se répertorient de la façon souvent mal géré. Cet accompagnement est M. V. L. : Il y a des cours ponctuels suivante : mal connu, à la fois par les parents et par les dans la formation des enseignant-e-s, mais Les jeux libres : enseignant-e-s. Les parents préfèrent, par l’étude du jeu n’est pas obligatoire. C’est - un délassement. On joue pour se détendre facilité, mettre l’enfant devant un écran. Le une possibilité parmi d’autres offertes aux ou pour avoir du plaisir, même si c’est un jeu est une promesse de temps partagé. Le étudiant-e-s. Parfois, en psychologie du dé- loisir actif par rapport à la télévision ; rapport au jeu est différent selon les cultures. veloppement, le jeu est approché, mais seu- - la créativité ; Par exemple, en Allemagne, on joue beau- lement un psychopédagogue sur six aborde - l’autonomie dans les « jeux jouets », appri- coup, au moins une fois par semaine. Dans le rôle du jeu. En dehors de cela, la forma- voiser le monde, chaque objet est un jouet les autres pays européens, on joue seule- tion de base ne comprend pas l’étude du potentiel. ment une ou deux fois par an. jeu, y compris en pré scolaire, ce qui, pour Les jeux à règles : moi, est préoccupant. L’étude du jeu n’est - la connaissance, la culture, les savoirs so- Éduquer : Vous dites que les jeux sont pas institutionnalisée et est seulement liée cio-culturels qui nous entourent ; le miroir de la société. Avez-vous des à l’initiative personnelle de chaque ensei- - des compétences transversales que l’on réflexions et des positionnements sur des gnant-e. Le jeu est partout mais il n’est, en demande de développer au niveau des enjeux sociaux actuels, tels que le sexisme fait, prévu nulle part dans la formation, ce classes ; ou l’esprit de compétition, par exemple ? qui me semble incompréhensible. - la socialisation. M. V. L. : Oui, la réflexion autour des sté- Ces six apports ne sont pas spécifiques au réotypes de genre est abordée dans la for- Plus d’information sur : www.iessid.be/stj/stj.html

10 éduquer n° 99 | juin 2013 éducation

Audrey Beaulen, institutrice primaire et maître de morale de formation, actuellement maître de morale et étudiante en master en sciences de l’éducation L’évaluation en formation

Pratique particulièrement complexe, l’évaluation d’une formation soulève de nombreuses questions chez les formateurs : est-ce nécessaire d’évaluer ? Que cherche-t-on à évaluer exactement ? Pourquoi ou pour qui évalue-t-on ? Comment procéder ? Ces nombreuses interrogations ont des causes tantôt négatives, telles que l’absence de repères méthodologiques, tantôt positives, lorsque l’on prend en compte la volonté de placer l’apprenant au centre de son apprentissage et de son autoévaluation.

Rôle de l’évaluation l’ajustement de l’apprenant tion des actions de formation. » Lors d’une formation, en ou du formateur ; Selon Donald Kirkpatrick, il étant attentif aux réactions des 3) le marketing : elle démontre la existe des liens de causalité entre participants et en adaptant son valeur de la formation auprès les différents niveaux. Comme discours en fonction de celles- de la direction. l’expliquent Alain Dunberry et ci, le formateur pratique déjà Céline Péchard3, « c’est parce l’évaluation informelle. Quelle Recentrage théorique : le qu’il y aura eu satisfaction qu’il est alors la plus-value d’une éva- modèle de Kirkpatrick y aura apprentissage ; c’est luation formelle ? Kurt Kraiger1 Donald Kirkpatrick est l’au- parce qu’il y aura eu appren- a identifié trois éléments de teur d’un modèle d’évaluation tissage qu’il y aura changement réponses. de la formation axé sur quatre de comportement ; et c’est parce L’évaluation formelle permet : niveaux. qu’il y aura eu changement de 1) la prise de décisions : elle pro- Selon Santos et Stuart2, « il comportement qu’il y aura résul- cure des indications permet- s’agit du modèle le plus utilisé tats sur l’entreprise. » De plus, se- tant une prise de décisions sur par les professionnels de la for- lon Kirkpatrick, une évaluation l’activité de formation ; mation mais aussi par les cher- complète est une évaluation qui 2) la rétroaction : elle permet cheurs travaillant sur l’évalua- couvre ces quatre niveaux.

Niveau 1 La satisfaction des apprenants Les formés ont-ils apprécié la formation ?

Niveau 2 Les acquis des apprenants Quelles connaissances, habilités, atti- tudes ont été acquises ?

Niveau 3 Les changements perceptibles de Les formés utilisent-ils ce qu’ils ont ap- pratiques pris sur leur lieu de travail ?

Niveau 4 Les changements perceptibles dans Quel est l’impact de la formation sur l’organisation l’organisation ?

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Les limites du modèle de Kirkpatrick Évaluer la satisfaction De nombreuses critiques ont été formu- Il s’agit du niveau le plus fréquemment lées à l’égard de ce modèle : évalué à l’issue d’une formation, générale- - le caractère hiérarchique et causal du mo- ment à l’aide d’un questionnaire. Celui-ci dèle est remis en cause ; peut recouvrir de nombreuses dimensions, - il ne tiendrait pas compte d’une vision l’enjeu étant de sélectionner les éléments plus « moderne » du travailleur en tant pertinents pour ceux qui souhaitent l’éva- qu’acteur de son apprentissage ; luation. Morgan et Casper7 distinguent six - il traiterait insuffisamment du contexte composantes liées à la satisfaction : dans lequel a lieu la formation4 ; - la satisfaction à l’égard de l’instructeur ; - il ne permettrait pas de différencier les ef- - la satisfaction à l’égard de la gestion de fets « à chaud » et « à froid »5 ; la formation ; - il serait peu utile pour prendre une dé- - la satisfaction à l’égard du processus cision quant à l’arrêt, la reconduite ou d’évaluation des apprentissages ; l’optimisation d’une formation, et ne pré- - la satisfaction à l’égard de l’utilité du pro- ciserait pas suffisamment ce qui doit être gramme de formation ; évalué6. - la satisfaction à l’égard du matériel du Pour répondre à cette dernière critique, cours ; Kurt Kraiger a proposé son propre modèle - la satisfaction à l’égard de la structure du (voir tableau Les cibles de l’évaluation) : il cours. énonce ce qu’il faut évaluer et la méthode Pour utiliser à bon escient cette pratique pour y parvenir. Par exemple, les change- d’évaluation, il faut être conscient de ses li- ments chez l’apprenant peuvent être éva- mites, telles que la subjectivité des réponses lués par l’observation de changements des participants, le sérieux avec lequel cognitifs, comportementaux ou affectifs. ceux-ci répondent, la difficulté de s’expri- Les méthodes proposées à cet effet sont mer vis-à-vis de questions préconçues, etc. les tests écrits, les enquêtes, les entrevues ou les échantillons de travaux. Le principal Évaluer les apprentissages intérêt de ce modèle est de fournir des élé- « L’évaluation des apprentissages est im- ments d’analyse et de mesure permettant portante parce que sans elle, il ne saurait y la prise de décisions quant à la subsistance avoir de changement de comportement.8 » « telle quelle » ou la suppression d’une offre Cette pratique consiste, souvent, à vérifier de formation. l’atteinte d’objectifs fixés par le formateur ou D’autres chercheurs ont proposé leurs l’organisation. Pour observer une évolution, modèles, mais ceux-ci souffrent tous d’une demander aux participants de mesurer leurs certaine lourdeur et d’une rigueur métho- acquis avant et après la formation semble dologique excessive (comme, par exemple, pertinent. Cependant, dans la mesure où l’utilisation d’un groupe-contrôle) empê- l’on cherche à accorder une place plus ac- chant le formateur de mener l’évaluation tive à l’apprenant, ce type d’évaluation est à son terme. D’après Dunberry et Péchard, amené à se transformer. la tendance actuelle semble être de favo- riser des pratiques évaluatives simples et Ainsi, afin de placer les participants au adaptées, permettant d’améliorer le dispo- centre de leur démarche de formation, sitif de formation. C’est pourquoi, malgré Geerthuis et al.9 recommandent que ces les nombreuses critiques, en raison de sa derniers, avant la formation : facilité d’application, on privilégie toujours - auto-évaluent l’impact qu’ils attendent de l’utilisation du modèle de Kirkpatrick. la formation sur leurs performances de Comment construire une évaluation travail ; en se référant au modèle de Kirkpatrick ? - pensent à des façons d’augmenter leur motivation ; - réfléchissent aux manières d’apprendre qui leur conviendraient le mieux ; L’évaluation des apprentissages est importante - examinent les éléments qui leur semblent être des freins à leur apprentissage. parce que sans elle, il ne saurait y avoir de Cependant, l’évaluation des appren- tissages ne s’appliquent pas à tous les ap- changement de comportement. prentissages. Cette étape est adaptée à l’acquisition de connaissances déclaratives (connaissance d’un programme informa-

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Les cibles de l'évaluation (Kraiger, 2002)

Cibles Objets Méthodes Raisons

Contenu et Design, livraison, Méthodologies éta- Feedback au design de la validité blies d’élaboration de formateur formation la formation, juge- ment d’expert, comité conseil, évaluation de la satisfaction

Changements Changements cognitifs Tests écrits, enquêtes, Feedback à chez l’apprenant Changements entrevues, échantillons l’apprenant comportementaux de travaux Prise de Changements affectifs décisions

Rendement pour Transfert, résultats, Estimations, enquêtes, Prise de l’organisation performance analyse bénéfices-coûts décisions Marketing tique par exemple), mais pas à l’acquisition sons (temps, subjectivité, résultat difficile- de compétences humaines. ment isolable), ces effets sont difficilement évaluables. Évaluer les comportements et Si tous les organismes ont un intérêt évaluer l’impact de la formation sur certain à évaluer les formations qu’ils pro- l’organisation posent, la mise en œuvre réelle ne laisse pas Ces deux pratiques correspondent respec- de place à l’improvisation. Le processus de tivement au niveau trois et quatre du mo- création de l’outil doit faire la part belle aux Donald Kirkpatrick dèle de Kirkpatrick. Ces deux étapes sont connaissances théoriques et aux expériences Donald Kirkpatrick est un chercheur rarement réalisées en raison de leur com- de terrain. On ne peut donc que conseil- américain. Il a conçu son modèle plexité et de leur lourdeur. Les méthodes ler la mise en place d’une cellule de projet d’évaluation en 1959. Ses principaux d’évaluation sont identiques : questionnaire, « hétérogène » : académicien, professionnel ouvrages sont : enquête, entrevue, etc. de la formation, apprenant, représentant de - Kirkpatrick D.L. and Kirkpatrick J.D. (2006), La première étape, « évaluer les com- l’entreprise cliente… Evaluating Training Programs : The Four portements », correspond à l’évaluation du Levels. San Francisco : Berrett-Koehler ; transfert d’apprentissage. Contrairement 1. Psychologue américain. - Kirkpatrick, D. (1998) Evaluating training pro- aux apprentissages qui sont évalués pen- 2. Cités par Daniel Gilibert et Isabelle Gillet dans grams. San Francisco : Berret-Koehler. dant ou en fin de formation, les comporte- Revue des modèles en évaluation de la formation : ments sont évalués quelques mois après la approches conceptuelles individuelles et sociales, formation, pour laisser le temps à l’appre- Pratiques psychologiques, 16, 2010, p.221. nant d’expérimenter ce nouveau compor- 3. Alain Dunberry et Céline Péchard, L’évaluation de tement. Néanmoins, le thème du transfert la formation dans l’entreprise : état de la question est un sujet complexe, son efficacité ne peut et perspectives, Québec, CIRDEP, 2007. être imputée à la qualité ou la « non-quali- 4. Critique formulée par Bates en 2004. té » de la formation. En ce sens, Dunberry 5. Critique formulée par Beech et Leather, 2007. 10 et Péchard énoncent « qu’une évaluation 6. Critique formulée par Kraiger en 1993. bien faite du transfert et des conditions cri- 7. Cités par Alain Dunberry et Céline Péchard dans tiques qui l’accompagnent devrait amener L’évaluation de la formation dans l’entreprise : état une réflexion impliquant un cercle élargi de la question et perspectives, Québec, CIRDEP, d’acteurs de l’organisation ne se limitant 2007. pas aux seuls formateurs. » 8. Kirkpatrick cité par Alain Dunberry et Céline La dernière étape, évaluer l’impact de la Péchard dans L’évaluation de la formation dans formation, est souvent associée à des don- l’entreprise : état de la question et perspectives, nées chiffrées permettant de justifier l’offre Québec, CIRDEP, 2007. de formation. Les résultats d’une formation 9. Cités par Alain Dunberry et Céline Péchard dans peuvent être multiples : augmentation de L’évaluation de la formation dans l’entreprise : état l’adaptabilité des employés, amélioration de la question et perspectives, Québec, CIRDEP, de l’ambiance de travail, accroissement 2007. de la production, etc. Pour diverses rai- 10. Alain Dunberry et Céline Péchard, op. cit.

n° 99 | juin 2013 éduquer 13 dossier VERS UNE NOUVELLE DÉMOCRATIE CULTURELLE?

Dossier et interview réalisés par Marie Versele, secteur Communication Vers une nouvelle démocratie culturelle ?

La culture n’est ni un luxe, ni un gadget. Élément essentiel du développement de la personne, la culture et ses formes d’expression offrent un autre regard, tant sur le monde que sur soi-même. Aller vers la culture c’est aussi oser franchir des portes, voyager vers l’inconnu… Cependant, l’accès à la culture est constamment mis à mal... À consommer sans modération, la culture a pourtant un prix. Au-delà de l’aspect budgétaire, la question de l’information, de l’accès et du temps qu’elle implique, la culture est-elle accessible ? L’écueil nous guette... En regard de tout cela, la portée émancipatrice de la culture a-t-elle encore sa place dans notre société ? Offre-t-on assez de moyens pour mener à bien les projets élaborés par les institutions culturelles ? Quelles sont les perspectives d’avenir ? C’est, entre autres, pour répondre à ces questions qu’un nouveau projet de décret pour les Centres culturels a été mis en place cette année. Ce dossier tente d’y voir plus clair...

14 éduquer n° 99 | juin 2013 Culture et démocratie

Le politique et le secteur associatif culturel sont continuellement tiraillés entre deux grands paradigmes structurants pour mener à bien leurs projets : la démocratisation de la culture et la démocratie culturelle. Historiquement ancrés dans la politique culturelle, ces deux concepts régissent encore notre manière de voir, proposer et stimuler l’attrait de la culture. Retour sur ces deux concepts clés du paysage culturel et sur leurs impacts dans le monde culturel belge.

Le projet de démocratisation de consommation de l’Art, mais transmission et de la réflexion des de la culture émerge en France, bien un lieu d’échange et de savoirs et de nos identités. » au début des années 1960 sous participation sociale. « L’attitude D’où le souci constant de sou- l’impulsion d’André Malraux. passive, ‘réceptive’ devant des tenir la création, de dévelop- Globalement, le projet de la dé- ‘œuvres’ ou devant les créations per l’accessibilité et l’exercice mocratisation de la culture a actuelles, doit faire place à la cri- des droits culturels, d’initier à pour ambition de donner à tous tique en groupes, à des activités, la découverte et à la pratique un accès à la culture. La démo- par quelque côté, opératives et culturelle, de permettre une cratie culturelle, elle, a pour créatrices, ainsi qu’au déclenche- appropriation des formes et des but que chacun puisse élaborer ment d’expressions personnelles contenus culturels, de susciter sa propre culture et son propre par des actes culturels ou, au la création de lien social et l’ac- rapport à la culture. On a donc moins, à propos des productions tion collective. Comme le sou- deux mouvements inverses : culturelles... »1 C’est ainsi que ligne Vincent De Coorebyter, la avec la démocratisation de la l’État se dotera, dès 1970, d’une culture est réputée « nécessaire et culture, c’est la culture qui va législation spécifique qui orga- bienfaisante pour tous »2, ce qui vers l’homme et s’y adapte ; tan- nisera la reconnaissance et le justifie, d’emblée, l’ensemble dis qu’avec la démocratie cultu- financement public des Maisons des politiques culturelles mises relle, c’est l’homme qui va vers la de la culture et des Foyers cultu- en place. culture et se l’approprie. Ce sont rels (voir texte « Les prémices des deux visions opposées (mais qui Centres culturels en Belgique »). Culture et social se complètent parfois) de l’acti- La culture n’est ni un luxe, ni vité culturelle qui impliquent des Une omniprésence de la un gadget. Élément fondamen- approches d’accès à la culture culture tal du développement de la per- différentes. Les concepts de démocratie et sonne, la culture et ses formes L’effervescence de mai 68 va de démocratisation de la culture d’expression offrent un autre re- diriger le débat de la démocra- influencent encore aujourd’hui gard, tant sur le monde que sur tie et de la démocratisation de la les politiques culturelles belges. soi-même. De fait, la culture joue culture : la priorité ne sera plus la Ainsi, la ministre Fadila Laanan un rôle majeur au sein de la so- “ démocratisation de la culture ” insiste sur l’idée que « s’il importe ciété en tant que vecteur de co- mais bien la “démocratie cultu- de développer un enseignement de hésion sociale, d’analyse critique, relle ” et ce, en promouvant la qualité pour tous nos enfants, il est de conscientisation et de change- participation active des popu- tout aussi nécessaire de garantir à ment. Comme le souligne Fadila lations à la vie et la production tous les citoyens l’accès et la parti- Laanan, « la culture est un instru- culturelles et à la créativité sous cipation à la culture. La culture et ment de cohésion et d’émancipa- toutes ses formes. La culture la création artistique sont un autre tion sociales. Je pense à son apport n’est désormais plus un terrain moteur du vivre ensemble, de la dans la perspective de préserver

n° 99 | juin 2013 éduquer 15 dossier VERS UNE NOUVELLE DÉMOCRATIE CULTURELLE?

l’autonomie de choix et d’action La médiation culturelle : outil plus jeunes à la question de la des individus et des groupes so- d’émancipation création ; des ciaux, ou de construire chacun Face au constat de l’impor- rencontres pour comprendre le monde dont il tance de la culture sur la société entre artistes fait partie, pour y trouver sa place en tant que vecteur d’émancipa- et spectateurs ; et être maître de ses envies et de tion sociale et de développement des tables de sa destinée. » C’est en ce sens collectif et économique, s’est dé- discussions...5 qu’il reste primordial de stimuler veloppée une série de politiques Le but de ces l’ouverture sur le monde et les culturelles se basant sur la média- outils est tou- autres cultures, afin de pouvoir tion culturelle, outil d’accès à la jours de créer offrir des perspectives et s’affran- culture. une proximité chir des alternatives des modèles La médiation culturelle favo- entre la création imposés. rise la participation culturelle, et le public, afin En tant qu’outil d’inclusion so- mais aussi la culture de la par- que les individus de- ciale, la culture joue donc un rôle ticipation pour tous les groupes viennent acteurs de la création, social essentiel, tant au niveau de population en tissant des liens qu’ils y trouvent une source de socio-économique qu’identi- entre la culture et la société. Le plaisir et d’émancipation. Selon taire. De fait, on constate qu’une travail de médiation consiste à Laurence Adam, « grâce à ces plus grande maîtrise de la culture établir un dialogue avec le pu- projets, on touche au but-même (codes, formes d’expression, re- blic, à créer des liens. À travers la de la médiation culturelle : créer présentations) de la société fa- médiation culturelle, on retrouve une vraie rencontre entre les gens L’asbl Article 27 cilite une meilleure insertion l’idée de mettre le public en re- et susciter une vraie modification L’association Article 27 œuvre de l’individu et ce, par le biais lation avec une œuvre, dans de l’espace culturel. » depuis bientôt 15 ans pour d’une identification plus aisée et une situation nouvelle pour lui, sensibiliser et faciliter l’accès l’usage et le partage de repères cela dans le but de lui faire vivre Réalité fi nancière et action à toute forme de culture pour culturels communs. La participa- une expérience esthétique iné- globale toute personne vivant une situa- tion culturelle tendrait également dite. L’idée est de laisser parler Le grand paradoxe des actions tion sociale et/ou économique à augmenter l’estime de soi des les émotions, laisser libre cours menées en médiation culturelle précaire. L’association se base individus et à faciliter leur travail à la parole, au ressenti, sans ju- se pose essentiellement sur les sur l’article 27 de la Déclaration en équipe via la coopération. gement ni contrainte. On parle publics ciblés et les moyens fi- Universelle des Droits de Au niveau scolaire, on alors d’expérience, de rencontre nanciers mis à la disposition l’Homme : « Toute personne a le constate que les pratiques cultu- esthétique qui peut agir sur l’in- des associations. En effet, sur droit de prendre part librement à relles, telles que visiter un musée, dividu en transformant sa vision le terrain, on constate qu’un la vie culturelle de la communau- assister à un spectacle, activités du monde. « Cette expérience es- large public souhaiterait béné- té, de jouir des arts et de participer peu familières aux jeunes de fa- thétique conduit les individus à des ficier de tarifs préférentiels ou au progrès scientifique et aux milles défavorisées, permettent découvertes de leur rapports au de moyens d’accès à la culture, bienfaits qui en résultent. » Le but de travailler sur le silence, la monde et ces découvertes peuvent mais ne peuvent y accéder car d’Article 27 est donc bien de concentration, les émotions et prendre des formes comme la paci- ce public reste considéré comme contribuer à la démocratisation les codes sociaux. La pratique fication avec le monde, mais aussi non prioritaire. De fait, n’entrant culturelle. artistique permet d’engager des la contestation et la révolte. »3 pas dans le moule défini par les Pour mener à bien ce projet, processus éducatifs sur le plan Comme le souligne Laurence actions menées dans le cadre Article 27 travaille en réseau cognitif, émotionnel, esthétique, Adam, directrice de l’association de l’accès à la culture, non affi- avec des partenaires sociaux, et conduit à la formation de com- Article 274, la médiation cultu- lié à un CPAS ou inscrit chez un culturels, et les utilisateurs pétences clés : flexibilité, endu- relle, tout comme l’action de l’as- partenaire social, bref pas assez Article 27. rance, sensibilité, communica- sociation Article 27, « vise l’auto- « pauvre », ce public échappe Article 27 part du postulat tion, esprit d’équipe, gestion des nomie d’un public, d’où l’idée de à toute facilité culturelle. Par que toute personne peut res- conflits, compétences communi- valoriser tant les sorties culturelles contre, un autre public, entrant sentir une émotion face à une catives et sociales. collectives qu’individuelles ». dans les prescrits d’accès à la œuvre d’art quelle qu’elle soit. Les bienfaits liés à la pratique Pour atteindre cette expé- culture, ne souhaite pas toujours L’idée est alors de créer une culturelle ont une conséquence rience esthétique émancipatrice, profiter des politiques d’accès à rencontre entre les partenaires indéniable sur l’aspect so- les associations menant des ac- la culture par manque d’inté- sociaux participant à l’action cio-culturel d’une ville : appor- tions de médiation culturelle rêt, peur de l’inconnu ou par d’Article 27 et les institutions tant des savoirs et des compé- proposent une série d’outils ou manque d’information. culturelles accueillant les usa- tences clés, la pratique culturelle d’actions diverses. On compte Ce constat est lié à la réalité gers d’Article 27, afin de propo- conduit l’individu à l’émanci- ainsi de nombreuses animations budgétaire qui régit la vie des ser une information de qualité pation et à l’acquisition de sa- autour d’un spectacle, d’une ex- associations de médiation cultu- aux associations pour qu’en- voir-faire et de savoir-être pré- position, d’un film ; des outils pé- relle. Souhaitant élargir leur suite, ces dernières fassent le cieux, qui peuvent l’aider à sortir dagogiques permettant de sen- champ d’action, ces dernières relais auprès du public « CPAS ». de l’exclusion sociale. sibiliser les adultes comme les sont bloquées par l’enveloppe Pour plus d’info : www.article27.be

16 éduquer n° 99 | juin 2013 Toute personne a le droit de prendre part librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir des arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent. Article 27 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme

budgétaire qui leur est allouée. L’ambition davantage l’accès à la culture, et de renfor- 1. Henri Janne, L’animation socio-culturelle, espace des associations reste d’ouvrir la culture à un cer l’action menée par les associations et ac- d’affrontement idéologique, cité par Hugues maximum de personnes, mais le manque de teurs culturels par le biais d’un financement Dumont, op. cit., p. 333. moyens financiers les empêche d’atteindre adapté à leurs missions de démocratisation 2. Vincent De Coorebyter, Les centres culturels dans cet objectif. de la culture. Par ailleurs, il reste important la Communauté française de Belgique, CRISP, Par ailleurs, comme le souligne Vincent de stimuler et de soutenir les initiatives fa- 1988, p. 19. Bouzin, animateur - directeur du Centre cultu- cilitant l’accès à la culture via une politique 3. « Regards sur la médiation culturelle à partir de rel Escale du Nord à Anderlecht, « les activités culturelle globale. Tout d’abord, par des l’Article 27 », 2010, p. 62. ou initiatives individuelles au sein des Centres places de spectacles ou d’expositions à prix 4. Entretien accordé lors du débat sur la médiation culturels ne sont pas suffisantes pour porter les réduits, mais également en facilitant l’accès culturelle et l’action d’Article 27 asbl, le jeudi 25 gens vers la culture, pour les amener à adopter géographique des spectateurs tout en leur avril 2013 au Centre culturel Escale du nord à des comportements culturels qui durent. Il faut proposant des événements répondant à leurs Anderlecht. une action globale qui porte l’ensemble de ce centres d’intérêt et leurs préoccupations. 5. Pour plus d’informations à ce sujet, n’hésitez pas à projet. » L’idée est donc bien de savoir « com- Les missions octroyées aux Centres cultu- consulter la page de ressources en fin de dossier. ment établir une cohérence entre tous les sys- rels de la Communauté française cherchent à tèmes existants pour être plus efficace ? » répondre à ces besoins. La suite de ce dossier En regard des bienfaits de la culture au tentera de comprendre la logique politique et sein de la société comme dans la vie de l’in- intellectuelle suivie par ces institutions cultu- dividu, il apparait capital de décloisonner relles aux projets divers et variés.

La culture à l’école : le décret Culture-école L’éducation et la formation restent les premiers lieux d’accès à la culture. Dans ce cadre, l’école joue un rôle central. En tant que lieu d’apprentissage et lieu de sociabilité, l’école reste un canal de transmission des cultures, de savoir-être et de savoir-faire de premier ordre. Le décret Culture-École, qui œuvre à la promotion et au renforcement des collabora- tions entre la culture et l’enseignement, adopté le 24 mars 2006, tente de valoriser et de solliciter cette mission éducative de l’école. La vocation de ce décret est de soutenir les activités culturelles et artistiques dans les écoles (enseignement obligatoire et spécialisé). L’idée est de faciliter les synergies entre le monde de l’Éducation et de la Culture par l’intermédiaire d’initiatives et de projets culturels soutenus par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le décret se base sur quatre axes d’orientation dans les collaborations entre les écoles et les opérateurs culturels : « Axe 1 : par collaboration durable, il faut entendre toute activité culturelle ou artistique répondant à un appel à projets, menée sur une an- née scolaire, essentiellement réalisée durant le temps scolaire, sur base d’une convention de partenariat conclue entre l’école et un opérateur culturel et/ou un établissement d’enseignement partenaire. Axe 2 : par collaboration ponctuelle, il faut entendre toute activité culturelle ou artistique initiée entre une école et un opérateur culturel, ne répondant pas à un appel à projets, pouvant être réalisée pendant ou en dehors du temps scolaire, impliquant la conclusion d’une convention de partenariat. Il est loisible d’introduire deux projets semestriels distincts. Axe 3 : un projet de collaboration s’intégrant dans le cadre des dispositifs développés et mis en œuvre par la Communauté française doit répondre aux objectifs visés à l’article 3 du décret pour bénéficier d’un financement. Axe 4 : le Gouvernement peut conclure des partenariats privilégiés avec certains opérateurs culturels justifiant d’une expérience et d’une notoriété pédagogiques et dont l’action, s’étendant à l’ensemble du territoire de la Communauté française, est accompagnée de productions pédagogiques. Un partenariat privilégié implique un financement pluriannuel dont les modalités sont précisées dans une convention ou un contrat-pro- gramme conclu entre la Communauté française et l’opérateur culturel. »1 Pour plus d’infos : www.culture-enseignement.cfwb.be

1. www.culture-enseignement.cfwb.be/index.php ?id=cult_ens_page1&no_cache=1

n° 99 | juin 2013 éduquer 17 dossier VERS UNE NOUVELLE DÉMOCRATIE CULTURELLE?

Les prémices des Centres culturels en Belgique

On compte actuellement 115 Centres culturels reconnus en Fédération Wallonie- Bruxelles, dont 103 Centres culturels locaux et 12 Centres culturels régionaux. Ces maisons de la culture s’inscrivent dans des structures précises et répondent à des missions bien déterminées. Petit tour d’horizon des politiques qui réglementent les Centres culturels en Communauté française...

Le secteur des Centres cultu- - soutien à la vie associative : Selon le Plan Wigny, les rels est régi institutionnellement en organisant des services Centres culturels doivent remplir depuis plus de quarante ans. Le destinés aux personnes et aux un double rôle : secteur fut défini et soutenu par associations qui favorisent la 1. « favoriser la production cultu- le politique, successivement en réalisation des objectifs des relle des professionnels et sa dif- 1970 puis 1992, afin de mener Centres. fusion (volonté de démocrati- à bien des missions de diffusion sation de la culture) ; mais également de démocratie L’arrêté royal de 1970 : Foyers 2. faciliter la participation active culturelle. culturels et Maisons de la de la population à des manifes- De manière globale, les acti- Culture tations culturelles et dévelop- vités des Centres culturels visent Au début des années 1960, per les talents des amateurs. »2 à remplir diverses missions1 : certaines initiatives locales (ébauche du concept de dé- - création et créativité : en of- créent des services et des pro- mocratie culturelle). frant des temps et des lieux dé- grammes culturels dans l’es- Le 5 août 1970, un arrêté diés à la création, à l’expres- prit des Maisons de la Culture, royal institutionnalise et fixe les sion et à la communication ; développées alors en France. conditions de reconnaissance et - éducation permanente : Ces programmes culturels ne de subvention des Maisons de en fournissant des infor- connaissent pas, à l’époque, la Culture et des Foyers cultu- mations, formations, docu- un franc succès. C’est en 1968 rels présents en Communauté mentations qui participent à que l’impact des Centres cultu- française. une démarche d’éducation rels en Belgique décolle réelle- Sous l’appellation générique permanente ; ment avec le « Plan Wigny » du de « Centres culturels », l’arrê- - diffusion artistique et mise nom de son promoteur, Pierre té marque la distinction entre en valeur du patrimoine : en Wigny, ministre de la Culture Maisons de la culture et Foyers organisant des manifestations française. Ce dernier imagina culturels. Les Maisons de la mettant en valeur les oeuvres un plan culturel territorial avec culture ont principalement un du patrimoine culturel local, la création de 7 Maisons de la rôle de production et de diffu- régional, communautaire, Culture et 20 Centres culturels sion culturelle, tandis que les européen, international et régionaux complétés par des Foyers culturels assurent celui francophone ; Foyers culturels locaux. d’animation culturelle.

18 éduquer n° 99 | juin 2013 communes), deuxièmement, il précise la création de dénominations particulières : on parlera désormais de Centre culturel local (CCL) et de Centre culturel régional (CCR). Leurs missions sont polyvalentes, elles vont du soutien à la vie associative à la diffusion artistique, en passant par l’édu- cation permanente, la création et la créati- vité. Cependant, les anciennes Maisons de la culture se verront attribuer une nouvelle mission, celle de la coordination régionale et de développement de leur action sur un territoire transcommunal (par « bassins » culturels). Globalement, le décret permettra de reconnaître un secteur et sa professionna- lisation. Le principe majeur de ce décret est d’organiser une décentralisation cultu- relle active et une responsabilisation, sur le plan local, des pouvoirs publics locaux et provinciaux. Pierre Wigny En instaurant une reconnaissance du sec- teur, le décret de 1992 a agi positivement sur L’ambition est de créer un espace dédié le terrain et ce, par la création de nouvelles à la culture dans chaque commune franco- structures culturelles. De 72 Centres cultu- phone afin d’optimaliser le paysage culturel rels reconnus en 1992, nous en comptons de la Communauté française. L’arrêté est 115 aujourd’hui. Une évolution qui va de imprégné d’une nouvelle conception de la pair avec une augmentation des budgets culture, héritée de mai 68 et de Malraux, alloués aux Centres culturels : de 4.556.977 dont l’enjeu est plus la participation et l’ex- d’euros en 1991, on est passé à 19.255.082 pression individuelle et collective (la démo- d’euros en 2011 ; ce montant s’élève à cratie culturelle), que l’accès aux œuvres 24.223.000 d’euros en 20123. du patrimoine (la démocratisation de la culture). 1. www.centresculturels.cfwb.be/index. Le texte met également en place une php ?id=6103 gestion conjointe par les pouvoirs publics 2. Pierre Wigny, Plan quinquennal de politique et les représentants associatifs de ces der- culturelle, Ministère de la Culture française, 1968, niers ; un système pluraliste et démocratique Bruxelles, p. 19. innovant. 3. Avant-projet de décret relatif aux Centres La création de ce cadre légal conjoint au culturels, mars 2013. travail de personnalités, telles que Henry Ingberg et Thérèse Mangot, permettra un dé- veloppement impressionnant du secteur : en Les 4P 1987, on comptait pas moins de 60 Centres culturels sur le territoire francophone. Les 4 principes fondateurs du modèle des Centres culturels - les « 4P » : Le décret de 1992 : des Foyers culturels - Parité : dans la gestion (entre les pou- et Maisons de la culture aux Centres voirs publics et les associations) ; dans culturels le financement (entre la Fédération Le décret du 28 juillet 1992 est un texte Wallonie-Bruxelles et les pouvoirs fondateur, qui s’inspire de l’arrêté royal locaux) ; de 1970 régissant les Centres culturels. - Pluralisme : des tendances poli- D’emblée, le décret définit les Centres cultu- tiques ; de la représentation du monde rels comme structures centrales de l’action associatif ; culturelle communale et territoriale. - Participation : des citoyens et des asso- Les grands apports du décret sont ciations à la définition du projet et à la doubles : premièrement, il prévoit une pa- gestion du Centre culturel ; rité de financement des associations par - Polyvalence des missions confiées aux les pouvoirs locaux (soit les provinces et Centres culturels.

n° 99 | juin 2013 éduquer 19 dossier VERS UNE NOUVELLE DÉMOCRATIE CULTURELLE?

Vers un nouveau décret...

Aujourd’hui, le secteur des Centres culturel est toujours régi par le modèle institutionnel mis en place il y a vingt ans. Les Centres culturels mènent sans relâche leur combat vers plus de démocratie culturelle. Éprouvé par vingt ans d’application, le décret du 28 juillet 1992 doit cependant être revu, actualisé et adapté à l’évolution socioculturelle du pays. C’est pourquoi, la Fédération Wallonie-Bruxelles et, plus particulièrement, la ministre de la Culture, Fadila Laanan, mènent une réfl exion globale en vue de modifi er ce décret.

Les vingt années d’application surdéterminé les reconnaissances politiques sociales, d’intégration, du décret de 1992 ont permis de sans prendre en compte les ca- d’éducation ou de formation. faire émerger certaines lacunes ractéristiques des territoires et de Afin de répondre à ces évolu- aux niveaux organisationnel, so- leurs habitants. Cela a abouti no- tions, il était nécessaire d’adap- cioculturel et politique. tamment à une certaine mise en ter la législation. Au niveau organisationnel, concurrence entre Centres cultu- la question des zones territo- rels d’un ou de plusieurs territoires Les grands axes de la réforme riales semble, en effet, poser voisins. » du décret de 1992 quelques problèmes. Comme Au niveau socioculturel, le C’est en partenariat avec di- le souligne Fadila Laanan, « le paysage social a largement évo- vers Centres culturels que Fadila classement en catégories (…) a lué. Par conséquent, les publics Laanan a réévalué les enjeux et leurs attentes se et les missions du décret régis- sont également modi- sant les Centres culturels de la fiés. Aujourd’hui, les Communauté française. C’est Centres culturels font donc en mettant en parallèle face aux nouveaux des hypothèses théoriques et enjeux de la société le travail concret des Centres auxquels ils doivent culturels, que le décret propose répondre. C’est en ce diverses mesures. sens que de nouveaux Le projet de décret met le moyens doivent être doigt sur deux points majeurs : envisagés. le statut des Centres culturels et Au niveau poli- la question territoriale. tique, on a vu émer- Au niveau du statut des ger une réelle prise Centres culturels, le nouveau de conscience de décret affirmera le positionne- l’intérêt de dévelop- ment de tous les Centres cultu- per des projets cultu- rels comme entités structurantes rels dans le cadre des et mobilisatrices du développe-

20 éduquer n° 99 | juin 2013 L’accès à la culture ne doit pas seulement viser les consommations culturelles mais aussi les pratiques et les actions artistiques et citoyennes des professionnels et non professionnels, des jeunes et des adultes, dans tous les milieux de vie individuels et collectifs. Déclaration de Politique Communautaire ment culturel d’un territoire au bénéfice de ancrés dans un ou plusieurs territoires de « À travers l’accès, la pratique et la sensibi- ses populations. C’est à ce titre qu’ils doivent référence, sera encouragée et soutenue. Il lisation aux formes d’expressions culturelles « contribuer à créer les conditions de dévelop- s’agit de favoriser les initiatives des différents et artistiques, ils visent à accroître les capaci- pement de l’exercice des droits culturels des acteurs socioculturels dans une optique tés d’expression et de créativité des citoyens, populations et à diminuer l’incidence des iné- de complémentarité et d’efficacité. Ce ré- seuls ou organisés, dans la perspective de leur galités sociales sur leur exercice »1. seau de coopérations entre Centres cultu- émancipation individuelle ou collective. »3 rel, assurant, dès lors, un maillage cultu- Le nouveau décret garde donc, en Le droit à la culture comme maître-mot rel efficient du territoire de la Fédération toile de fond, les objectifs de développe- À travers ce nouveau décret, le droit à la Wallonie-Bruxelles. ment culturel de la Déclaration de Politique culture est appelé à devenir un référentiel L’idée est également que l’action des Communautaire : « L’accès à la culture ne doit commun aux Centres culturels et, au-delà, Centres culturels s’insère dans des projets pas seulement viser les consommations cultu- à l’ensemble des politiques culturelles. Le existant dans d’autres secteurs d’activités, relles mais aussi les pratiques et les actions décret réaffirme la nécessité du droit à la tels que les programmes de cohésion so- artistiques et citoyennes des professionnels et culture et à l’épanouissement culturel de ciale, les groupes d’actions locales ou tout non professionnels, des jeunes et des adultes, tous. Diverses prérogatives conditionnent autre dispositif communal, régional ou dans tous les milieux de vie individuels et col- ce droit à la culture. Celle-ci doit se faire européen. lectifs »4. Pour ce faire, il est important de dans sa diversité : toutes les formes de l’art, C’est pourquoi, « les centres culturels se- « favoriser, sur le terrain, les convergences de la culture, doivent être présentées via des ront ainsi invités à déterminer leurs objectifs entre les différents acteurs de la culture et les actions de Centres culturels, de soutien à la et leurs priorités d’action à partir d’un dia- coordinations entre niveaux de pouvoir impli- création, d’éducation permanente et de dif- gnostic territorial, en collaboration avec les qués dans le développement culturel, [...] ren- fusion. Ce droit à la culture doit être assuré acteurs qui le souhaitent. »2 La question ter- forcer la participation des publics, la culture par la liberté de création assurée aux ar- ritoriale ne sera pas contraignante pour les de proximité, la recherche de solutions adap- tistes, par la promotion et la conservation Centres culturels, car plusieurs communes tées au milieu de vie des publics. »5 L’ambition des patrimoines et des cultures, par l’accès pourront s’associer pour définir un territoire est donc bien de développer les connais- à la culture (intellectuel et physique), qui et un projet de Centre culturel commun. Cet sances critiques des réalités sociétales, leurs va de pair avec la participation à la culture outil territorial est, par ailleurs, évolutif en capacités d’analyse, de choix, d’action et qui induit la liberté de choix à la culture de tenant compte de l’évolution sociologique, d’évaluation. Une attention particulière sera la part du citoyen, et, enfin, par sa possibi- socio-économique et culturelle du territoire accordée aux groupes les plus défavorisés lité de participer à la prise de décision en d’implantation. socio-économiquement afin de leur assurer matière de politique ou de programmation un accès optimal à la culture. culturelle, devenant, ainsi, partenaire d’un Médiation et éducation permanente Les Centres culturels disposeront de cinq projet culturel global. Les lignes de force de ce nouveau dé- années à dater de l’entrée en vigueur du cret mettent en évidence l’importance d’un nouveau décret pour s’adapter aux dispo- Une culture territoriale droit à la culture pour tous, ainsi que la né- sitions qu’il contient. Au niveau territorial, le nouveau décret cessaire liberté de création. Pour assurer insiste sur la question des partenariats entre l’accès à la culture, les Centres culturels 1. www.centresculturels.cfwb.be/index. Centres culturels, l’action culturelle étant un devront renforcer leur travail de démocra- php ?id=7848 « Suivi de la refonte du décret élément majeur du développement local et tisation et de démocratie culturelle à travers fixant les conditions de reconnaissance et de territorial. La coopération et la transversalité des actions de médiation culturelle. Cette subvention des centres culturels ». entre Centres culturels sont donc les mots médiation s’organisera via des activités ou- 2. Ibidem. d’ordre du nouveau décret. vertes à la réalité contemporaine (intérêts 3. Ibidem. En effet, les territoires de la Fédération et enjeux individuels et sociaux) répondant 4. Ibidem. Wallonie-Bruxelles ne comportent pas tous à des cultures plurielles faisant écho à l’in- 5. Avant-projet de décret relatif aux Centres un Centre culturel. Pour éviter tout biaise- terculturalité moderne et à la diversité des culturels, mars 2013, p. 17. ment dans l’accès à la culture, il est primor- modes d’expression artistiques. dial de voir émerger des partenariats inter- Les actions des Centres culturels devront communaux au sein du secteur. C’est ainsi donc nécessairement être développées que la réalisation de projets participatifs, dans une logique d’éducation permanente :

n° 99 | juin 2013 éduquer 21 dossier VERS UNE NOUVELLE DÉMOCRATIE CULTURELLE?

Des outils pour une nouvelle démocratie culturelle

Pour mener à bien Démocratie culturelle : L’association Marcel Hicter : Œuvrant pour la démocratie leurs missions de Les CPAS et la culture : culturelle, l’association Marcel Les CPAS disposent de divers Hicter a pour objectifs la pro- démocratie culturelle, programmes de participation motion et la sensibilisation à culturelle pour leurs usagers, la démocratie culturelle en les Centres culturels et tels que la lutte contre la frac- Fédération Wallonie-Bruxelles, ture numérique (à travers des en Europe et à l’étranger, par associations culturelles allocations ou en offrant des le travail en réseau, la diffusion lieux disposant d’ordinateurs et la réflexion ; et le développe- font appel à divers connectés à Internet) ou l’in- ment des capacités des indivi- lité des jeunes artistes dans le tervention dans les frais de dus par l’offre de services cultu- but d’enrichir leurs projets de supports d’animations participation à des manifes- rels innovants. Depuis 2000, création en leur permettant de tations sportives ou cultu- l’Association accompagne, pratiquer un dialogue dans la didactiques et ludiques. relles (Article 27...). Le CPAS chaque année, une vingtaine diversité culturelle ; ou encore définit le groupe-cible, formule de projets culturels et parte- le FIDC (Fonds International À côté de ces projets de les projets et met ses usagers nariats écoles/associations à pour la Diversité Culturelle) en contact avec l’offre. Vous Bruxelles dans le cadre du pro- qui vise à favoriser l’émer- démocratie culturelle, pouvez consulter la liste com- gramme « Anim’Action et pro- gence d’un secteur culturel plète des CPAS de Belgique à jets d’école » de la Commission dynamique au niveau natio- d’autres initiatives plus l’adresse suivante : communautaire française. nal et/ou local dans les pays en www.socialsecurity.be Plus d’infos : développement. larges d’accès à la culture www.fondation-hicter.org Plus d’infos sur : Le site Internet : http ://unesdoc.unesco.org ont vu le jour à travers la www.culture.be La Convention sur la diversité Portail sur les actions en ma- des expressions culturelles - Article 27 Belgique. tière culturelle en Belgique UNESCO L’association Article 27 œuvre francophone, ce site regorge La promotion de la diversité et depuis bientôt 15 ans pour Petit tour des ressources d’informations utiles sur l’ac- le développement du dialogue sensibiliser et faciliter l’accès tualité du secteur culturel et ce interculturel constituent les vé- à toute forme de culture pour rencontrées lors de la qui vous est offert en matière ritables enjeux dans le monde toute personne vivant une si- culturelle. actuel et se trouvent au cœur tuation sociale et/ou écono- rédaction de ce dossier… À consulter ! du mandat de l’UNESCO. Pour mique précaire et ce, pour la Plus d’infos : répondre à ces préoccupa- somme de 1,25 euros. www.culture.be tions, l’UNESCO a développé Plus d’infos : www.article27.be divers projets de soutien à la culture, tels que le FIPC (Fonds Pour en savoir plus sur la ré- International pour la Promotion forme sur les Centres cultu- de la Culture) accordant des rels, n’hésitez pas à consulter le bourses à des jeunes artistes site : www.centresculturels.be ou à des pays en voie de déve- loppement ; le programme de Plus d’infos sur la médiation bourses pour artistes UNESCO- culturelle, consultez le site : Aschberg qui favorise la mobi- www.cultureetdemocratie.be

22 éduquer n° 99 | juin 2013 La culture à l’école : programme se décline en deux dispositifs : « Théâtre à l’école » et « Chanson à l’école ». Dans la Région de Bruxelles-Capitale, la Pour plus d’infos : www.artscene.cfwb.be COCOF a mis sur pied le programme « La culture a de la classe », projet de subven- Article 27 : tion de la culture à l’école. Anciennement L’asbl Article 27 a mis sur pied différents Anim’action, le programme propose un outils d’animation suscitant le goût de la partenariat entre le monde culturel et l’en- culture pour les plus petits. En voici deux : seignement bruxellois francophone dans le - le coffre « Petits explorateurs de la culture » but de mettre sur pied des projets créatifs a été créé pour mener des animations pendant le temps scolaire. dans les écoles afin de découvrir la culture Pour plus d’infos : www.cocof.irisnet.be de manière ludique avec des enfants. Le coffre contient plusieurs outils, à modu- fants et adultes) sont à votre disposition. Spectacle à l’École : ler en fonction de vos besoins et du temps L’objectif du programme « Spectacle à disponible ; Décret culture-enseignement : l’École » est de permettre à des enfants et - le TATOUVU est un jeu construit pour re- Si vous désirez obtenir plus d’informations à des jeunes d’assister, dans le cadre sco- venir de façon ludique sur le contenu et sur le décret culture-enseignement, contac- laire, à des spectacles de qualité, tant sur les formes du spectacle ou de la visite sco- tez la Cellule Culture-Enseignement - Eric le plan du fond que de la forme, et, ain- laire. Différentes catégories de questions Frère, Responsable (Bureau 6C061). si, de concourir à leur éducation artistique ont été imaginées : défis créatifs, questions Boulevard Léopold II, 44 / 1080 Bruxelles. et citoyenne. Piloté par la Commission sur le monde artistique, gages et questions Tel : 02/413.32.40 de concertation du spectacle à l’école, le sur la sortie... Deux versions de ce jeu (en-

Tous publics : conditions de revenus. Le but dans la rubrique « Activités est ici de faire la promotion pour tous » du site internet. Musées gratuits chaque 1er des activités organisées par la Plus d’infos : www.mim.be dimanche du mois Communauté flamande. À l’initiative de la Fédération Ces bons sont disponibles soit Cinéma : la Cinematek Wallonie-Bruxelles, pas moins sur le site Internet de la VGC, CINEMATEK organise des de 77 musées en Wallonie et à soit au siège, Sainctelette séances de cinéma gratuites Bruxelles ouvrent leurs portes square, 17 / 1000 Bruxelles. en audiodescription pour per- gratuitement le premier di- Plus d’infos : www.vgc.be sonnes malvoyantes ainsi que manche du mois. leurs accompagnants. Consultez la liste des musées Arsène 50 Plus d’infos : www.cinematek. participants sur le site : www. Arsène 50, c’est la culture à be culture.be moitié prix... Lancé en 2003 à Site Internet : Bruxelles l’initiative de la Fondation pour Théâtre pour enfants : gratuit Le Cultuurwaardebon les Arts, l’objectif d’Arsène 50 Guignolet dans le Parc Le site Internet be.brussels passe À côté du ticket Article 27 est de proposer une vitrine de Assistez tout l’été aux représen- tout ce qui est gratuit à Bruxelles. donnant accès, pour seu- l’offre culturelle bruxelloise tations gratuites de Guignolet Musées, jeux, spectacles, livres, lement 1,25 euros, à divers à moitié prix sur plus de 200 dans le Parc, dans le Parc de sports, promenades..., vous y lieux culturels pour les per- places mises en vente quo- Bruxelles. Programmation in- trouverez certainement une sonnes démunies, la Vlaamse tidiennement. Les places de ternationale de marionnettes mine d’informations utiles. Gemeenschapscommissie a spectacles et concerts à moitié pour les petits et les plus grands. Plus d’infos : www.bruxelles. créé le Cultuurwaardebon. prix sont valables le soir-même Plus d’infos : www.guignolet- irisnet.be/bruxelles-gratuit/ Le Cultuurwaardebon est un de la mise en vente. Le nombre dansleparc.be bruxelles-gratuit bon de réduction de 6,2 euros. de places achetées par per- Il est gratuit et réservé à tous sonne est illimité (en fonction Internet : Les Espaces Publics les habitants de Bruxelles pour de l’offre disponible). La mise à Numériques les lieux culturels subsidiés par jour des places disponibles est Les EPN, Espaces Publics la Communauté flamande. réalisée en temps réel. Numériques, sont des espaces L’avantage, contrairement à Plus d’infos : www.arsene50.be dotés de matériel informatique Site Internet : Gratis in Brussel Article 27, est qu’il est ouvert mis à disposition du grand public Un site qui vous propose, en à tous, francophones comme Concerts au MIM un peu partout dans Bruxelles. néerlandais, toutes les expos, néerlandophones, et ce, sans Le Musée des Instruments de Des initiations et des formations conférences, festivals, manifes- Musique accueille réguliè- à l’informatique y sont égale- tations, concerts, etc. gratuits à rement des concerts gratuits ment proposées. Bruxelles. de divers genres musicaux Plus d’infos : www.bruxelles.iris- www.gratisinbrussel.be L’agenda complet se trouve net.be

n° 99 | juin 2013 éduquer 23 régionales

Charleroi Lieu : Séminaire de Choiseul, 11, Prix : gratuit rue des Sœurs de Charité à Tournai Renseignements et inscriptions : Maud Activité : candidature de Formation à l’œnologie Dufrasne : 04/223.20.20 – maud. partenariat Comenius Regio avec Découvrir le vin par une approche à [email protected] la Ville de Charleroi l’œnologie au travers des différentes En partenariat avec le CRIPEL. Avec le Objectifs : régions vinicoles. Thèmes abordés : soutien de la Région Wallonne. - vise à développer la dimension euro- Le Pinot noir - Italie (Le Piémont) Modules de formation et péenne de l’enseignement scolaire - Champagne. d’accompagnement en insertion en promouvant des activités com- INFOS socioprofessionnelle pour primo- munes de coopération entre les au- Date(s) : 24 septembre, 5 novembre arrivants torités locales et régionales ayant un et 3 décembre 2013 à 19h30 (+/- 3h) INFOS rôle dans l’enseignement scolaire ; à la Maison de la Laïcité – rue des Dates : 6 sessions de 9h à 12h à la - donne l’occasion aux autorités sco- Clairisses, 13 - Tournai Leep-Liège asbl, rue Fabry 19 - 4000 laires de différentes régions de tra- Prix : 71 € pour 3 séances – possibilité Liège. vailler ensemble sur un ou plusieurs d’eff ectuer des remplacements à la 1re session : du lundi 2 au vendredi 13 sujets d’intérêt commun ; séance au prix de 23 € septembre 2013. - aide les régions participantes à déve- Renseignements et inscriptions : 2e session : du lundi 30 septembre au lopper et à échanger les meilleures Section régionale de Tournai de la vendredi 11 octobre 2013. pratiques, à créer des outils visant à LEEP, ASBL 3e session : du lundi 14 octobre au favoriser une coopération transfron- Rue des Clairisses, 13 à 7500 Tournai vendredi 25 octobre 2013. talière durable, et à conférer une ex- Tél. : 069/84.72.03 - Fax : 069/84.72.05 4e session : du lundi lundi 4 novembre périence européenne d’apprentis- Courriel : [email protected] au lundi 18 novembre 2013. sage aux enseignants, aux élèves, 5e session : du jeudi 21 novembre au aux administrateurs des écoles et Liège mercredi 4 décembre 2013. autres. 6e session : du lundi 9 décembre au INFOS Formation en français oral – vendredi 20 décembre 2013. Lieu : Maison de la Laïcité, rue de langue étrangère pour primo- Prix : gratuit France, 31 – 6000 Charleroi arrivants infra-scolarisés Renseignements et inscriptions : Renseignements et inscriptions : INFOS Ayça BAK : 04/223.20.20 – ayca.bak@ Ligue de l’Enseignement et de Dates : du 2 septembre au 20 leeliege.be l’Éducation permanente Charleroi décembre 2013, les lundis, mercredis En partenariat avec le CRIPEL. Avec le Rue de France, 31 à 6000 Charleroi et vendredis, de 9h à 11h30 au chalet soutien de la Région Wallonne. Tél. : 071/53.91.71 - Fax : 071/53.91.81 « Charles Bailly », chemin Michel Renseignements et inscriptions : Courriel : [email protected] Gobiet à 4000 Liège (sur Sainte- LEEP de Liège Walburge). Rue Fabry, 19 - 4000 Liège Hainaut Occidental Prix : gratuit Tel : 04/223.20.20 Renseignements et inscriptions : Courriel : [email protected] Ateliers citoyens : « DéCoNotes » Pierre Etienne : 04/223.20.20 – pierre. Atelier « chorale » [email protected] Luxembourg

agenda Envie de communiquer par le chant ? En partenariat avec le CRIPEL. Avec le Rejoignez notre atelier chant conduit soutien de la Région Wallonne. Stage Dessin par notre animateur Patrick Joniaux Modules de citoyenneté pour Les participants de l’atelier dessin avec humour et convivialité. primo-arrivants expérimentent les pastels, crayons, INFOS INFOS fusains, collages, encre de chine, éco- Dates : 12 septembre, 26 septembre, Dates : 6 sessions de 13h à 16h à la line… les croquis d’attitude, natures 10 octobre, 24 octobre, 14 novembre, Leep-Liège asbl, rue Fabry 19 - 4000 mortes, portraits ou encore composi- 28 novembre et 12 décembre 2013 de Liège. tions personnelles. 13h15 à 15h15 1re session : du lundi 2 au vendredi 13 INFOS Atelier « écriture » septembre 2013. Date(s) : les 1, 2, 3, 4, 5 juillet de 9h Envie d’exprimer ses sentiments, ses 2e session : du lundi 30 septembre au à 12h et de 13h à 16h au 123, rue de émotions, son vécu, ses envies… par vendredi 11 octobre 2013. Sesselich – 6700 Arlon l’écriture ? Cet atelier sera accessible 3e session : du lundi 14 octobre au Prix : 70 € - pensionnés et bénéfi ciaires à partir de septembre/octobre (dates vendredi 25 octobre 2013. d’aide sociale : 50 € encore à déterminer). 4e session : du lundi lundi 4 novembre Stage Poterie Les ateliers sont ouverts à tout public au lundi 18 novembre 2013. Plaques assemblées, montage aux co- adulte amateur et aux bénéficiaires 5e session : du jeudi 21 novembre au lombins, tournage (tours électriques), du CPAS de Tournai mercredi 4 décembre 2013. vous façonnez diverses pièces et les INFOS 6e session : du lundi 9 décembre au voyez évoluer étape par étape. Prix : gratuit vendredi 20 décembre 2013. INFOS

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Date(s) : les 22, 23, 24, 25, 26 juillet de 10h à 12h et pensionnés/ 74 euros non membres INFOS de 13h à 15h à l’ Espace Milan, Caserne Callemeyn Formation : « Musicalité de la parole » Date : le dimanche 8 septembre à 17h sur le plateau – 6700 Arlon Pour prendre conscience de la musicalité de du Théâtre de Verdure de Bougnies Prix : 120 € - étudiants : 95 € votre propre parole afin d’enrichir les possibilités. Prix : gratuit Stage Bijoux Apprendre à rythmer les phrases, à les moduler Formation « Mes attitudes face à un public » Travail avec des fils de cuivre et perles pour créer avec l’intention sous-jacente qui porte à la narra- Pour améliorer votre capacité d’ouverture et des bracelets, colliers, pendentifs, boucles d’oreilles, tion et donne une énergie particulière à la voix. d’écoute. Pour créer une véritable relation avec broches... INFOS votre public - quel qu’il soit - et en faire un INFOS Groupe limité à 12 personnes. partenaire. Date(s) : les 5, 6, 7, 8, 9 août de 10h à 12h au CPAS Formateur : François Vincent, conteur, musicien, INFOS d’Habay – Place Saint-Etienne, 7 – 6723 Habay-la- formateur (Paris) Groupe limité à 12 personnes. Vieille Dates : les 22 et 23 juin 2013 de 10 à 17h à la Maison Formateur : Angel Ramos Sanchez, comédien, Prix : 50 € - pensionnés et bénéfi ciaires d’aide Culturelle et Citoyenne de Quévy, rue des Montrys, 13 humoriste, formateur (Liège) sociale : 30 € à 7040 Asquillies Dates : les 28 et 29 septembre 2013 de 10 à 17h à la Stage Bijoux Prix : 73 euros membres, étudiants, chômeurs, Maison Culturelle et Citoyenne de Quévy, rue des INFOS pensionnés/ 84 euros non membres Montrys, 13 à 7040 Asquillies Date(s) : les 5, 6, 7, 8, 9 août de 14h à 16h au Centre Spectacle : « La terrible vengeance, du Grand Prix : 73 euros membres, étudiants, chômeurs, de l’Ancienne Poste – Place de la Gare, 2 – 6724 Murdoch », conte et musique pensionnés/ 84 euros non membres Marbehan « Corbeau dit au grand Murdoch : raconte-moi une Soirée littéraire et repas Prix : 50 € - pensionnés et bénéfi ciaires d’aide histoire sombre et amère comme la bière que tu Animateur : Jean-Claude Trefois, lecteur, formateur sociale : 30 € bois tous les soirs, je te dirai le secret qui te manque (Manage) Stage Bijoux pour te venger de ton frère. » INFOS INFOS Artiste : François Vincent, conteur, musicien, forma- Date : le mardi 8 octobre 2013 à 19h30 précises au Date(s) : les 19, 20, 21, 22, 23 août de 10h à 12h au teur (Paris) « Salon des Lumières », rue du Miroir n° 23 - 7000 123, rue de Sesselich – 6700 Arlon INFOS Mons Prix : 50 € - pensionnés et bénéfi ciaires d’aide Date : le 22 juin 2013 à 20h à la Maison Culturelle Prix : 17 euros (repas, animation - prix hors boissons) sociale : 30 € et Citoyenne de Quévy, rue des Montrys, 13 à 7040 Formation « Danser son clown » Stage Calligraphie Asquillies Pour partir et plonger en soi, laisser jaillir le meilleur Pour apprendre à utiliser la plume et calame, em- Prix : 5 euros pour les stagiaires et les enfants de de son être, rire, pleurer, gronder, crier, murmurer… bellir des textes et poèmes. moins de 14 ans/ 9 euros pour les autres Danser sa vie… INFOS Exposition Artisama XXII : « J’ai rêvé l’école de INFOS Date(s) : les 19, 20, 21, 22, 23 août de 14h à 16h au demain » Groupe limité à 14 personnes. Centre de l’Ancienne Poste – Place de la Gare, 2 – Cette exposition ouverte à toutes les disciplines est Formatrice : Ingrid Marcq, comédienne, clown, 6724 Marbehan réservée aux artistes amateurs (dans le sens noble metteur en scène (Bruxelles) Prix : 50 € - pensionnés et bénéfi ciaires d’aide du terme) qui respectent le thème imposé. Dates : les 12 et 13 octobre 2013 de 10 à 17h à sociale : 30 € Un prix « du public » et un prix « du jury » sont attri- la Maison de la Laïcité de Frameries, rue de la Renseignements et inscriptions : bués par les organisateurs. Libération, 152 - 7080 La Bouverie LEEP de Luxembourg INFOS Prix : 64 euros membres, étudiants, chômeurs, pen- Rue de Sesselich, 123 à 6700 Arlon Dates : du 10 au 21 juin 2012. Ouvert de 9 à 16h et le sionnés/ 73 euros non membres. Tél. : 063/21.80.81 - Fax : 063/22.95.01 vendredi de 9 à 18h Renseignements et inscriptions : Courriel : [email protected] Prix : gratuit LEEP de Mons Borinage centre Valorisation du Théâtre de Verdure de Rue de la Grande Triperie, 44 à 7000 Mons Mons-Borinage-Centre Bougnies : Tél / Fax : 065/31.90.14 - Patricia Beudin ou Rosalie Exposition de photos Marchica - Courriel : [email protected] Formation : « Mieux se connaître et améliorer INFOS ses relations » Dates : les samedi 7 et dimanche 8 septembre de 14 Namur Le modèle de communication Comcolors permet à 18h (salle à défi nir à Bougnies). d’améliorer sa communication aux autres en appre- Cordiale invitation au vernissage le vendredi 6 Ateliers de la réussite scolaire pour les enfants nant à mieux se connaître et à mieux connaître le septembre à 19h de 5e et 6e primaires ainsi que les 1re et 2e fonctionnement des autres. Prix : gratuit secondaires INFOS Balade contée INFOS Groupe limité à 12 personnes. Avec la collaboration de conteurs, conteuses et Les ateliers sont donnés les lundis et jeudis de chaque Formatrice : Christine Ghysels, licenciée en musiciens expérimentés. mois durant l’année scolaire communication, formatrice certifi ée au modèle INFOS Lieux : Comcolors (Fleurus) Date : le dimanche 8 septembre à 15h • Maison de jeunes de Jambes, Parc Astrid, 21- 5100 Dates : les 22 et 23 juin 2013 de 10 à 17h à la Maison Prix : gratuit Jambes Culturelle et Citoyenne de Quévy, rue des Montrys, 13 Spectacle théâtral • Haute École Albert Jacquard, Département à 7040 Asquillies « La furie des nantis » d’Edward Bond, par un collec- pédagogique, rue des Dames Blanches, 3B - 5000 Prix : 65 euros membres, étudiants, chômeurs, tif théâtral transfrontalier. Namur

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• Rue des Écoles, 5 à Andenne (lundi) LLeses formationsformations à lala LLigue...igue... Prix : gratuit Ateliers d’anglais ou de néerlandais pour ddee juinjuin à sseptembreeptembre 22013013 enfants de 4 à 12 ans Tu as envie d’apprendre l’anglais en t’amusant ? Le 3 juin Le 17 juin Viens nous rejoindre 1 fois par semaine. Pas de Observer un groupe d’enfant : un outil pour Animer un groupe d’enfants avec effi cacité, devoirs, pas de leçons… Et tu vas épater tes co- mieux interagir autorité et bienveillance pains & copines ! Le 6 juin Le 18 juin INFOS La démarche de qualité dans le non Quelles ressources, quelles subventions pour Dates : les samedis matin et mercredis après-midi à marchand mon projet ? Temploux – Jambes - Belgrade Le 7 juin Le 23 juin Prix : 72€ La violence faite aux femmes Promenons-nous dans les bois ! - Attention nouveaux ateliers Le 8 juin L’Arboretum de Tervueren dates encore non confi rmées Sensibilisation à l’ethnopsychiatrie Le 21 septembre Ateliers grandir ensemble : « Le café des parents » Une visite chez Victor Horta et une balade Visite du Louvre-Lens Réseau de coaching et d’aides des jeunes Art Nouveau Le 30 septembre enseignants Le 10 juin Se sensibiliser à l’écoute active Programme de formation à l’intégration citoyenne Economie pour les non-initiés pour les primo-arrivants en Région Wallonne. Le 11 juin Pour en savoir plus sur nos stages et tout notre Renseignements et inscriptions : La communication assertive programme de formations, visitez le site de la LEEP de Namur, rue Lelièvre, 5 à 5000 Namur Le 14 juin Ligue Tél. : 081/22.87.17 - Fax : 081/22.44.53 Lecture rapide et effi cace ➥ www.ligue-enseignement.be Courriel : [email protected] ou L’abc des émotions de l’enfant ou contactez le secteur formation au [email protected] 02/511.25.87

LLeses stagesstages rrésidentielsésidentiels dd’été’été ddee llaa LLigueigue La Ligue de l’Enseignement et de l’Éducation permanente asbl a le plaisir de vous proposer deux périodes de stages rési- dentiels, l’une début juillet et l’autre fin août, en créativité, développement personnel et management associatif, au Domaine des Masures à Han-sur-Lesse, rue des Chasseurs Ardennais, 40, situé dans l’une des plus belles régions de notre pays. Ce centre de dépaysement et de plein air vous séduira par son calme et son milieu naturel exceptionnel. Vous trouverez toutes les informations utiles en nous contactant ou en consultant notre site Internet : PProgrammerogramme

Du lundi 01 au vendredi 05 juillet 2013, vous aurez le choix entre 3 stages :

• Chanter pour le plaisir ! • Voyage au centre de l’être • Carte de vie : « Je fais le point avec moi-même »

Du mercredi 28 au vendredi 30 août 2013, nous vous proposons 4 stages :

• Prendre la parole en public • Prendre soin de soi au quotidien • Mieux connaître, utiliser et préserver sa voix • Comportements difficiles et résistance dans les animations et les formations. Comment interagir avec le groupe ?

Ligue de l’Enseignement et de l’Éducation permanente A.S.B.L. Secteur des formations Rue de la Fontaine, 2 1000 Bruxelles 02/511 25 87 [email protected] www.ligue-enseignement.be

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Hanane Cherqaoui, animatrice de la Ligue de l’Enseignement Tricot Urbain

Dans le cadre des projets transversaux de la Cohésion sociale, le secteur Interculturel de la Ligue participe, chaque année, à un ou plusieurs projets d’une commune bruxelloise. Une de nos animatrices, Hanane Cherqaoui, nous décrit un de ces projets sur la commune de Saint-Gilles. Mais avant cela, nous vous présentons les projets transversaux tels que la Cohésion sociale les défi nit.

« La diversification des flux mi- de New York et qui a fait des grisaille du quotidien. gratoires au cours des dernières adeptes très nombreux et moti- Cet art s’est également appelé décennies a donné à Saint- vés à travers le monde. « Grandma Graffiti », un art qui Gilles un caractère nettement L’art de la rue n’a cessé pourrait rapprocher les grand- cosmopolite. Avec la présence d’évoluer ces dernières années. mères du monde de l’art. d’une centaine de nationalités, Le « street art » s’est étendu à de Les « Kitta Please » sont un la diversité fait désormais par- nombreuses disciplines. Au dé- autre groupe de tricoteuses tie de l’expérience quotidienne but, il y a eu des tags, puis des américaines. Ce sont des filles des saint-gillois. Les différents énormes fresques urbaines. ultra branchées qui n’ont rien groupes et communautés contri- Désormais, de nouvelles de mamies et qui manient les buent de manière significative à formes apparaissent. Des créa- aiguilles avec une habileté hal- la vie sociale, économique et tions originales venant de lucinante. Leur mouvement s’est culturelle de notre commune. ce nouveau style : le « Tricot exporté avec une rapidité éton- Dans ce contexte, le secteur de Urbain » ou encore appelé en nante, et on pouvait admirer des la Cohésion sociale (la coordi- anglais le « Urban Knitting ». œuvres dans de nombreuses nation et ses partenaires asso- Cette initiative a commencé villes, de New York à Pékin, en ciatifs) a développé des projets aux environs de 2005, d’abord passant par Paris et la Suisse. dits transversaux qui ont permis aux États-Unis et par la suite Mais le plus impressionnant de réunir ensemble nombre de dans d’autres pays : Australie, dans ce genre reste le « Yarn- partenaires internes et externes Indonésie, Japon, et puis Bombing » : The Knit Graffiti à la commune et des acteurs de en Europe : France, Suisse, Movement.2 terrain dont les missions et les Angleterre, Belgique, Quelques années plus tard, la objectifs ne sont pas toujours Pays-Bas, etc. capitale française a suivi le mou- les mêmes. Ces projets ont un vement et compte son lot de tri- caractère fédérateur mais es- Lutter contre la grisaille coteurs. Pour eux, les avantages sentiellement évènementiel. »1 L’idée est de recouvrir avec de cet art urbain, c’est d’abord C’est dans ce cadre que nous or- des motifs tricotés, des objets une expression d’un art de la rue ganisons chaque année, à Saint- communs ou même des œuvres qui est moins agressif que le graf- Gilles, les projets suivants : d’art, des monuments... avec fiti ou le tag. - le carnaval ; une multitude de couleurs. En général, les tagueurs - la fête du Printemps ; Ces expositions en plein air sont considérés comme des - le parcours Convivialité. créent une atmosphère chaleu- vandales. Le graffiti est un sa- Cette année, pour la fête reuse et ont pour but d’humani- voir-faire contemporain conno- du Printemps, une association ser le mobilier urbain et de recy- té « jeunes », et même plutôt saint-gilloise a lancé l’idée du cler des bouts de chaussettes, de « jeunes à problèmes ». « Tricot Urbain ». vielles écharpes inutilisées, etc. En recouvrant, ensemble, C’est une mode qui vient Cela permet de lutter contre la jeunes et moins jeunes, des mo-

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numents et des lieux publics, le tricot per- mettra, peut-être, de changer le regard de chacun sur la jeunesse et de promouvoir des modes d’expression respectueux de l’environnement. Ces tricoteurs représentent une philoso- phie très positive qui a pour but d’embellir le mobilier urbain et ne le dégrade en rien car : - il est facile à enlever ; - il n’altère pas la surface du mobilier urbain utilisé ; - il donne une meilleure image des artistes de tricot urbain. C’est ainsi que de magnifiques projets ont vu le jour. Ils ont même été intégrés dans des festivals connus comme le Festival Itinérant de Colportage « Par 4 Chemins » (FICA) organisé par le Conseil Général des Vosges, ou encore, plus proche de nous, le FFI, Festival du film intergénérationnel, à Ottignies-Louvain-la-Neuve. Le FICA, qui a eu une première saison en 2012 , a réuni plus de 200 résidentes de mai- sons de retraite, femmes en parcours d’ in- sertion, collégiens, enfants de classes mater- nelles et primaires , animatrices en maisons de retraite, assistantes sociales, bénévoles... met de déconstruire les stéréotypes liés à teur de liens et de convivialité. Les saisons suivantes ont rassemblé plus de l’âge et au genre. Le fruit de notre collaboration a pour 36 artistes et 123 partenaires (maisons de Lors de nos ateliers à Saint-Gilles, plu- but final de recouvrir le mobilier urbain de retraite, chantiers et ateliers d’insertion, ins- sieurs associations qui n’avaient pas l’habi- la place Bethléem. L’atelier continuera le tituts pour personnes handicapées, écoles, tude de se côtoyer se sont retrouvées au- jour-même de la fête pour toucher d’autres jardins, médiathèques, personnes âgées à tour d’un projet commun qui a rassemblé personnes du quartier et, nous l’espérons, leurs domiciles...). des personnes de toutes les cultures et de permettra de travailler plus sur la richesse tous les âges. Ainsi, des femmes maghré- d’une société multigénérationnelle. Déconstruire les stéréotypes bines, turques, albanaises, portugaises, es- Et qu’y a-t-il de plus beau que « des « En 2012 du 12 au 18 novembre, la ville pagnoles, pakistanaises..., des enfants d’âges mailles » ? Tisser la laine ! Quel meilleur sym- d’Ottignies-Louvain-la-Neuve s’est couverte différents des écoles des devoirs, ont pu se bole pour le vivre-ensemble et la solidarité de laine grâce aux écoles, maisons de repos, réunir plusieurs lundis et mercredis, dans un entre personnes du même quartier ? associations et particuliers qui se sont ren- local ou autour de la Place Bethléem, pour contrés en tricotant. Cet événement a ques- tricoter, échanger des savoirs, des tech- 1. Rapport Mission locale, secteur Cohésion sociale, tionné plusieurs clichés sur la jeunesse et la niques. Échanger des récits de vies, faire FB-janvier 2006. vieillesse, et fait partie du second Festival connaissance, parler de leur culture, ou tout 2. Voir leur site : www.apartmenttherapy.com/ du film Intergénérationnel ! Aujourd’hui, simplement profiter d’un moment de convi- yarn-bombing-the-guerrilla-kni-151393 les bandes de laine ont été reconverties en vialité. Les ateliers n’étaient pas trop longs et 3. www.ffi2012.be/tricoturbain couverture pour des personnes précaires. »3 duraient entre une heure à une heure et de- Le 25 mai, la fête du Printemps aura lieu mie. Mais c’était suffisant pour créer du lien. à Saint-Gilles, et la Ligue participe à cet Nous n’avons pas l’ambition de rivaliser événement avec un projet tricot urbain. avec les grands projets que nous avons dé- Cependant, quelles sont les motivations qui crits plus haut, mais nous restons persuadés ont poussé notre animatrice à choisir ce que c’est un excellent début, et nous nous projet ? inscrivons, pour l’avenir, dans la continui- Nous pensons qu’un tel projet est un té de ce genre d’initiative généreuse et très moyen qui fédère les énergies, une façon positive. de créer des liens intergénérationnels et Le projet qui a eu lieu à Ottignies- interculturels. Louvain-la-Neuve a débouché sur un Café- PPourour ppluslus ddee Le tricot, qui est un savoir-faire tradi- citoyen « Altérez-Vous » qui reprend des tionnel et qui est souvent attribué aux « ma- séances de « tricot thé » pour toutes les per- ttémoignagesémoignages mies », est une technique simple à partager sonnes qui veulent continuer. Les théma- - www.courrierinternational.com/article/2013/01/23/ avec des jeunes et des plus âgés. Cela per- tiques changent, mais le tricot reste fédéra- cherche-mamies-ambitieuses-aimant-le-tricot

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Stéphane Louryan, Professeur ordinaire (anatomie-embryologie) à la Faculté de Médecine de l’ULB, membre de l’Académie Royale de Médecine de Belgique L’école de médecine de Bruxelles avant la fondation de l’ULB

Peu de diplômés de l’Université Libre de Bruxelles savent que la Faculté de Médecine préexistait, sous une forme inachevée, à la fondation de l’université. À cet égard, elle est fondée à se prévaloir de la qualité de « faculté aînée » de l’université.

Les débuts : le collège des est dispensé aux médecins candidats chirur- En 1424 est promulgué un giens, qui subissent acte qui règlemente l’art de un examen profes- guérir. Il institue un examen or- sionnel après deux ganisé par la Ville de Bruxelles ans d’enseigne- et dont le jury inclut tous les ment. Dès 1749, ce médecins gradués par une uni- cours est dispensé versité. Il fallait, de surcroît, être par Paul-Ignace De examiné par le chirurgien officiel Bavay (1704-1758)3. de la Ville et les barbiers les plus Joseph II crée à notoires. Bruxelles les pre- En 1550, Charles Quint inter- mières leçons cli- dit la profession médicale à tous niques. Il procède ceux qui ne sont pas diplômés à la suppression d’une université. La règlemen- de nombreux cou- tation sera complétée en 1617 vents, et expulse par Albert et Isabelle. Peu après, les religieuses de la en 1641, la Ville réorganise le léproserie de Saint- corps médical, et un « collège »1 Pierre, ce qui ren- est placé à sa tête, lequel crée dit l’institution à les premiers cours d’anatomie. l’hospitalisation des Pierre-Joseph Graux (1795-1873) (archives ULB) Le 12 octobre 1733, les magis- malades. Cette dé- trats concèdent, pour cet ensei- cision fut appréciée, gnement, un local de l’Hôtel de car une épidémie L’école de médecine Ville pour y faire des « opérations de dysenterie menaçait la ville. En 1795, nos régions sont an- anatomiques ». C’est ainsi que L’hôpital Saint-Pierre devient nexées par la France. La nou- le 3 juillet 1735, Adrien Charles alors une « annexe » du vieil hô- velle législation distingue les Joseph van Rossum (1705- pital Saint-Jean. docteurs en médecine, les doc- 1798)2, professeur à l’Universi- On y donne des cours de teurs en chirurgie et les officiers té de Louvain, fut désigné. On chirurgie, qui seront inter- de santé. Ceux-ci sont formés lui concéda un squelette pour rompus par la révolution par des écoles départementales l’aider dans sa tâche. Ce cours brabançonne. de médecine, et doivent avoir

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été attachés à des médecins ou des hôpi- taux. Ils subissent des examens d’anatomie, de médecine, de chirurgie et de pharma- cie. Leur mission est de dispenser des soins gratuits aux pauvres. Trois écoles de santé ont été fondées en France en 1794 : Paris, Montpellier et Strasbourg, après dissolution des universités et de leurs facultés de méde- cine en 1792. Entre ces deux dates, la pra- tique médicale était « libre ». La ville de Louvain, menacée par la dis- parition programmée de son université, demande en vain la transformation de sa faculté de médecine en école de santé. En effet, le 19 octobre 1797, l’université est supprimée par décret parce qu’elle ne pou- vait « par sa forme ni par les sciences dont elle s’occupait, être assimilée en aucune manière aux écoles centrales et aux écoles spéciales ». Le 1er mai 1808, trois nouvelles écoles de médecine sont effectivement fondées, mais aucune à Bruxelles. Cependant le 6 janvier 1795, l’administration d’arrondissement de- mande la reprise des cours de chirurgie à La « léproserie » de l’hôpital Saint-Pierre au XVIIIe siècle l’Hôpital Saint-Pierre, mais sans grand effet. En septembre 1798, l’officier de santé fran- çais Jean-Baptiste Terrade (1770-1820) fait cienne cour (palais de Charles de Lorraine5), interne), Dekin (histoire naturelle), Dindal approuver, par la municipalité, l’organisa- pour être déplacés, en 1906, à l’Hôpital (accouchements, maladies des femmes et tion d’une école de chirurgie et d’accouche- Saint-Pierre. des enfants, clinique externe), Terrade (phy- ments, et le droit de « prendre dans les di- En effet, le 2 juillet 1806, Napoléon établit, siologie et opérations) et Verdeyen (matière vers hospices civils les cadavres nécessaires dans les hospices de malades de Bruxelles, médicale et clinique interne). à ses démonstrations »4. D’autres écoles simi- de Gand, d’Amiens, des cours pratiques Le 8 juillet 1809 a lieu une tentative in- laires se développeront à Gand et à Anvers. de médecine, de chirurgie et de pharma- fructueuse d’érection des cours en école de Le but initial de cette école était de pré- cie pour la formation des officiers de santé. médecine, avortée par le ministre Fouché. parer les candidats aux examens des écoles L’enseignement se dispense dans le « grand « officielles ». hospice civil », situé sur l’emplacement de L’ULB En 1802, le préfet se plaint de la qualité l’Hôpital Saint-Pierre. Il comprend 496 lits. Après la défaite de 1815, nous sommes médiocre des médecins dans le départe- Les branches enseignées sont : l’anatomie et en période « hollandaise » . Trois universi- ment, ce qui mène à l’idée de fonder une la pathologie interne, la chimie pharmaceu- tés sont créées (ou recréées) : Gand, Liège école spéciale de médecine à Bruxelles, à tique et la pathologie externe, les accouche- et Louvain. C’est l’occasion de tenter de fer- nouveau non suivie d’effet. Vers 1804, la ments, les maladies des femmes en couches mer l’école. Le 1er octobre 1817, un mémoire philosophie de l’école se modifie : au but et des enfants, la matière médicale et la cli- rédigé par les professeurs de l’école plaide initial de préparer les élèves aux concours nique externe, ainsi que la botanique. Les pour le maintien de celle-ci, ce qui aboutit, se substitue l’objectif de former réellement cours sont gratuits. en 1823, à la transformation des cours pra- des officiers de santé. Les élèves internes sont de garde jour et tiques en une école de médecine (et non plus Le 3 août 1805, l’école fondée par nuit. Parmi les lauréats, on doit citer Louis- de chirurgie). Suivent (déjà) de nombreux Terrade est enfin transformée en établis- Joseph Ghislain Seutin (1793-1862), illustre conflits linguistiques, et enfin la révolution sement public. Terrade en demeure le chirurgien, un des futurs fondateurs de de 1830. L’école survit avec difficulté en président et garde plusieurs chaires : ana- l’ULB, et Pierre-Joseph Graux (1795-1873), raison des conflits internes. C’est la période tomie, physiologie, médecine opératoire, qui devint professeur d’anatomie à l’école où Graux enseigne l’anatomie et Seutin la accouchements, médecine des femmes de médecine, et garda sa chaire lorsque chirurgie. L’administration des hospices sou- et des enfants. Parmi les autres profes- l’université naissante absorba l’école, tient l’école par des efforts matériels, ce qui seurs, on peut citer Jacques-Joseph Caroly et devint même recteur de cette même mène rapidement à des progrès majeurs et (1771-1844), François-Antoine Curtet (1763- université. détermine « l’âge d’or » de l’école. 1830), Verdeyen… Certains sont amenés à Les six premiers professeurs de l’école La suite est bien connue : l’Université de devenir, plus tard, les premiers professeurs « officielle » sont Caroly (chimie physiolo- Belgique, future Université Libre de Bruxelles, de la Faculté de Médecine de la nouvelle gique, pathologie interne), François-Antoine est fondée en 1834. La fusion de l’école de Université. Les cours se donnent dans l’An- Curtet (1763-1830)6 (anatomie, pathologie médecine avec la jeune université est déci-

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dée. Les plus éminents professeurs de l’école des Médecins, et se retira à Termonde. Il mourut intègrent l’université. L’administration des néanmoins à Bruxelles où il était né. hospices met à la disposition de l’université le 4. La salle de dissection fut durablement installée cabinet d’anatomie (futur musée d’anatomie, dans son domicile, dans les « beaux quartiers » encore actif aujourd’hui), de minéralogie, la (294, rue de Loxum, près de l’actuelle Gare bibliothèque, la collection d’instruments, les Centrale), au grand dam des voisins. La laboratoires. commission de santé et de sûreté soupçonna Les hôpitaux Saint-Jean et Saint-Pierre Terrade de ne pas disposer de diplôme valable, et ouvrent leurs portes aux étudiants de l’uni- la police intervint parfois à la demande des voisins versité. Le conseil des hospices supporte le en raison des odeurs pestilentielles. Terrade fut poids financier des progrès des investigations, contraint de passer divers examens devant la de l’asepsie, etc. Commission de Santé, couronnés par un mémoire La faculté de Médecine de l’ULB est ainsi présenté à l’École de Médecine de Paris intitulé née. « propositions médico-chirurgicales », édité à Paris en 1804. . Remerciements : 5. On se souviendra, au passage, que la première localisation de la nouvelle université fut ce même Nous remercions chaleureusement Mme F. Delloye, palais. Retour aux sources… bibliothécaire au service des archives de l’ULB. 6. Ancien élève des Universités de Toulouse et de Turin, chirurgien militaire, François-Antoine Curtet

1. Ce collège, ou du moins son avatar, existe y enseigna l’anatomie à partir de 1906. Il dispensa toujours, il s’agit du « Collège des Médecins de également l’anatomie artistique (ostéologie, l’Agglomération Bruxelloise », qui a actuellement myologie). Il publia divers mémoires sur les un objectif essentiellement culturel et amical. lésions hépatiques, les coliques « venteuses » et les

2. Charles Joseph van Rossum était né à Louvain phénomènes galvaniques.

d’une famille patricienne. Il fut « professeur 7. On signalera que, pendant cette période, Terrade primaire en médecine ». Reconnu « homme devint médecin et chirurgien consultant de la profond dans son art, surtout anatomique » cour des Pays-Bas. par Charles de Lorraine, il publia trois ouvrages imprégnés de scolastique. Il s’agit de : « Disputatio medica de bilis et excretione », par ACJ Van Rossum RRéférenceséférences et Pierre Bernard Hosselet, Typis Aegidii Petri Denique, Louvain 1747, « Disputatio medica bbibliographiquesibliographiques de sanguine », par ACJ Van Rossum et Jacobus Emanuel Van Lierde, même éditeur, 1748, et - Bonenfant AM. L’évolution des hôpitaux bruxellois. « Disputatio de urinis », par ACJ Van Rossum et Bruxelles, sans date, Boehringer. Jean-Louis Bals, même éditeur, 1748. - Colart A. Souvenirs du vieux Saint-Pierre. Bruxelles, 1952,

3. Licencié en médecine de l’Université de Louvain Arscia. en 1737, médecin ordinaire des hôpitaux français - Dickstein-Bernard C. Genèse de l’hôpital universitaire. établis à Bruxelles, ancien démonstrateur public 1834-1935. Rev Méd Bruxelles, 1984 ; 5 : 315-318. d’anatomie et professeur de chirurgie, Paul- - Dhondt P. La situation précaire de l’enseignement Ignace De Bavay débuta sa carrière en procédant supérieur dans les départements belges entre 1795 et à des études chimiques avant de s’engager dans 1815. Revue belge de philologie et d’histoire, 2004 ; 82 : la médecine. Il fut médecin-chef des hôpitaux 935-967. militaires français en 1746. Passionné d’anatomie, - Louryan S, Kinnaert P (sld de). Le pôle santé de l’ULB. il commença ses enseignements en 1749 après Histoire de lieux, de personnages, de découvertes. le départ des troupes françaises, dispensant Bruxelles, 2009, Mémogrames. ses cours en latin, français et néerlandais. Il fut - Merckx A. Les origines de la Faculté de Médecine de l’auteur, entre autres, d’une « Dissertation sur la l’Université Libre. Extrait de la revue de l’Université de fistule à l’anus », Paris an XIII (1805), Imprimerie Bruxelles, n°1, octobre-novembre 1925. Paris, 1925, Didot Jeune, 13 pages, in-4, ainsi que de Weissenbruch. « Méthode courte, aisée et peu coûteuse, utile - Poirier J. L’externat des hôpitaux de Paris (1802-1968). aux médecins et absolument nécessaire, pour la Paris, 2012, Hermann. guérison de plusieurs maladies, comme la toux, - Van Beneden. Bavay, Paul-Ignace De. Biographie l’enrouement, l’asthme, la phtysie commençante, nationale de la Belgique, tome 2. Bruxelles, 1868, la jaunisse et toutes les fièvres intermittentes ». Académie Royale de Belgique. Bruxelles, 1759, Pierre-J de Grieck, rue de l’Evêque. - Wellens-De Donder L. François Antoine Curtet et D’un caractère acariâtre, il se disputa avec certains l’enseignement de la médecine à Bruxelles au début du de ses confrères, reçut une amende du Collège XIXe siècle. Cahiers bruxellois, 1963 ; 8 : 94-119.

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Michel Gheude L’économie à la recherche de son storytelling

La voiture s’arrête. Une dame en descend. La voici qui prend de l’essence à la pompe. Gros plan sur le compteur qui tourne. Plan général de la station-service et zoom sur le prix du 95 sans plomb et du gasoil.

Cette séquence, nous l’avons tion : le mouvement, l’énergie, Un baril à 95 dollars, ça fait vue mille fois. Chaque fois que la vitesse. Comment la télévision combien le litre en euros ? Ne l’essence a augmenté ou dimi- pourrait-elle ne pas se laisser fas- cherchez pas la calculette car nué de quelques centimes, nous ciner par l’or noir d’où ces puis- aurions-nous la réponse à la avons vu la dame descendre de sances sont issues ? Comment, question, nous ne serions pas voiture et faire le plein. Chaque sinon par ces quelques images plus avancés. Entre le prix que fois, nous avons vu le compteur récurrentes extraites de notre demande le paysan pour ses tourner. Comme si le prix de l’es- vie quotidienne, nous ferait-elle produits et celui que le consom- sence était à lui tout seul l’indice sentir la dépendance où nous mateur paye à la caisse du super- des prix à la consommation, le sommes des jeux de pouvoir et marché, la comparaison est pos- baromètre de l’économie et le d’argent que suscite la source tel- sible. Mais d’Arabie saoudite à la scanner de notre niveau de vie. lurique de nos sortilèges ? pompe, le chemin est singulière- Il y a quelque chose de naïf et ment plus tortueux. Le pétrole même d’irritant dans ce chromo La complexité n’a pas d’image n’a pas la même vie économique télévisuel. D’après l’Automo- Depuis que le baril de pétrole que l’artichaut. Pour prendre un bile club de France, le budget a dépassé les 50 dollars pour exemple, de 1999 à 2000, le prix annuel moyen d’une voiture friser les 100 (il est redescendu du Brent a augmenté de 58,8%, de ville qui parcourt environ ces jours-ci à 95 grâce au boum celui du pétrole importé en 12.000 kilomètres est de 4.535 € américain du gaz de schiste), Europe a augmenté de 86% et par an. L’essence représente un les équipes de télévision ont le prix de l’essence a augmenté peu plus de 18% de ce budget, multiplié les micros-trottoirs. de 17%. Le bon sens ne suffit pas soit 835 €. Un ou deux centimes Objectif : montrer quel est l’im- à comprendre le comment et le de plus ou de moins par litre n’a pact de cette augmentation ra- pourquoi de ces chiffres. La té- donc jamais eu d’impact signifi- pide sur notre vie quotidienne. lévision butte sur une de ses dif- catif sur le budget des ménages. Rien de plus illusoire évidem- ficultés majeures : la représenta- Mais ces images pourtant ont ment. Le routier, la mère de fa- tion de la complexité. Il faut s’y leur sens. L’auto, notre auto, est mille et le chauffeur de bus ont résoudre, les images de la dame le symbole de notre prospérité. beau exprimer tour à tour leurs qui fait le plein n’expliquent rien. Elle est notre fierté. Signe exté- inquiétudes, tout nous reste obs- rieur de bien-être sinon de ri- cur, à commencer par ce baril La crise et le sourire du chesse, elle est certes plus banale dont tout le monde ignore qu’il présentateur qu’autrefois, mais reste le car- compte 159 litres. Et dont les La crise des banques s’est rosse des temps modernes. Elle journalistes, dieu seul sait pour- muée en crise des finances pu- est inscrite au cœur des mytholo- quoi, s’échinent à donner le prix bliques. Les États serrent les bou- gies de la société de consomma- en dollars. lons. Ils coupent dans les budgets

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sociaux. L’Angleterre réforme générale n’est pas simple, les tage que nous. En temps normal, une terre aussi étrangère que tout son système d’allocations inconnues nombreuses. Mais le c’est bon signe. L’économie se la Nouvelle-Zélande. Nous ne à la baisse. La Belgique refond sens des choses se résume à plus joue sur une autre scène que la savons rien des débats qui l’ani- son index, limite les allocations de recettes fiscales, moins de dé- nôtre. Elle ne descend jusqu’à ment ni des raisons qui motivent de chômage dans le temps. penses sociales et des emprunts nous que sous forme de petites ce que nos politiques appellent Les impôts, la TVA, les accises publics maintenus à travers tout, séquences rituelles sur le prix de son intransigeance. Et si ce n’est augmentent. Les engagements mais joliment présentés sous l’éti- l’essence ou le taux de chômage. pas l’arbitraire de l’Allemagne, ne sont pas honorés, les règles quette de « grands emprunts po- Mais en temps de crise, ce n’est c’est la dictature des marchés, contractuelles sont modifiées pulaires et citoyens ». pas rassurant. Le présentateur se acteur tout puissant, mais insai- au détriment des citoyens, les Et la dette ? Tout le monde tourne alors vers un journaliste sissable, anonyme et sans visage. détenteurs de certificats verts parle de la réduire, personne ne spécialisé. Un peu de jargon, Il faut s’y résoudre, la télévi- l’ont appris à leurs dépens. Les parle de la rembourser. Elle est un graphique. L’important n’est sion (et avec elle les autres mé- niches fiscales rétrécissent. La irremboursable. Il n’y a que trois pas que nous comprenions, mais dias) ne sait pas (encore) racon- lutte contre les fraudes sociales manières de ne pas rembourser qu’il y en ait un qui ait l’air de ter l’économie. La politique est et fiscales s’intensifie. L’étau se la dette dit Jacques Attali dans comprendre. C’est cela qui ré- un feuilleton. Elle a ses héros, ses resserre sur les paradis fiscaux. un récent numéro Des Paroles conforte, on le voit au sourire scènes de ménage, ses drames, Les payements en cash sont dras- et des Actes de David Pujadas du présentateur quand il passe ses réconciliations. La scène tiquement limités afin de contrer sur France 2 : la croissance, la « à tout autre chose ». économique reste abstraite. Ses une économie souterraine qui guerre, l’inflation. Mélenchon statistiques sont désincarnées. dépasse les 15% de P.I.B. Depuis lui répond à sa manière inimi- La part du mystère Quelques grands patrons mis à la crise chypriote, les dépôts des table : « l’inflation ou la mort ». Dans le commentaire du part, elle n’est représentée par épargnants ne sont plus proté- La guerre, en effet, n’est pas à spécialiste, immanquablement personne, seulement commen- gés. L’Europe discute des règles l’ordre du jour et la croissance, il sera question de l’Europe. tée par quelques économistes de « responsabilisation » des titu- c’est partout sauf en Europe. Cela semble une règle, qu’en dont la présence a pour seul but laires de comptes en banque. Les Reste l’inflation. Bruno Colmant, économie, nos malheurs ne de nous rassurer, jamais de nous États manient un peu la carotte qui n’est pas révolutionnaire, le puissent venir que d’elle et à faire entrer dans une histoire et beaucoup le bâton pour drai- dit de blog en blog. travers elle, de l’Allemagne. dont nous serions partie pre- ner la gigantesque épargne des On aimerait y voir clair sans Malheureusement l’Allemagne nante. Il nous faudrait a minima classes moyennes vers les em- décrypter laborieusement ce nous est aussi mystérieuse un Pierre Bellemare, conteur prunts publics. La BCE maintient que l’on croit comprendre ici, que l’économie. Nos médias de génie, ou un Hubert Reeves, les taux en-dessous du niveau là, et ailleurs, au fil d’informa- connaissent l’échiquier politique capable de métamorphoser l’as- d’inflation et n’exclut pas les taux tions souvent contradictoires. français aussi bien que le nôtre. trophysique en poésie. À défaut, négatifs, de sorte que les États, Dans les médias spécialisés, l’in- Nous suivons jusqu’à la nuance, l’éternelle séquence de la pompe malgré leur niveau de suren- fo économique reste à l’abri de les divergences entre Valls et à essence restera la seule ma- dettement historique, peuvent son jargon, par définition inac- Montebourg, entre Coppé et nière d’exprimer notre crainte continuer d’emprunter en at- cessible aux profanes. Dans les Fillon. De l’Allemagne, nous ne de l’avenir et notre désarroi face tendant de faire – un peu, beau- médias grand public, elle est connaissons qu’Angela Merkel. au chaos qui semble gouverner coup, pas du tout en fonction de prisonnière de clichés politiques On serait bien en peine de citer le monde. Car il y a plus de phi- leurs opinions publiques – ces qu’on devine approximatifs : la même le nom du chef de l’oppo- losophie qu’on ne croit dans le douloureuses réformes qu’on relance ou l’austérité. On a l’im- sition. Au JT, l’Allemagne, cheffe journal télévisé : il ne cesse de dit structurelles, notamment pression très vive que le présen- de file de l’Union et notre princi- nous montrer à quel point nous celle des retraites. L’équation tateur du JT n’en sait pas davan- pal partenaire économique, est ne sommes maîtres de rien.

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publications-événements TRACeS de ChanGements nº 210 Table Ronde Les Cahiers du Développement Durable vient de paraitre ! Quelles formations des Boîte à outils didactique et méthodologique, les Cahiers du DD ont pour ob- Bonnes écoles ? enseignants pour lutter contre les jectif l’intégration du développement durable dans les écoles techniques et Si, comme beaucoup le croient, les inégalités à l’école ? professionnelles. Nés d’initiatives prises dans un certain nombre d’établisse- bonnes écoles sont celles que fré- ments secondaires, ils offrent aux enseignants des informations sur les défis quentent les milieux socioécono- Table actuels de l’humanité et de la planète, des propositions d’actions et d’activi- miques les plus favorisés, il suffit de ronde tés applicables à toutes les filières de l’enseignement qualifiant, de la coiffure WEPION' - 20:00 permettre à tous de les fréquenter. Il 19 aout 2013 à la mécanique. Les Cahiers offrent également un large éventail de sujets à faut donc organiser la mixité sociale, travailler pour les étudiants du supérieur et pour les centres de formations faire entrer dans ces bonnes écoles des professionnelles. élèves de milieux défavorisés qui vont Pour l’heure, leur diffusion dans les établissements démarre. Ils sont dispo- en faire sortir d’autres qui intègreront nibles gratuitement sur simple demande. ces écoles moins bonnes. www.pina-film.de © INFOS Dans ce TRACeS, on découvre de www.cahiers-dd.be. bonnes pratiques dans de mauvaises Quelles formations des enseignants Sur le site, l’ensemble des contenus sont en libre accès. Des séances d’information pour lutter écoles, des idées qu’on porte mais qui contre les inEgalitEs'''' A l'Ecole ? sont prévues dans les semaines à venir. Une formation complète à l’outil est égale- n’en ont pas encore beaucoup défon- ment possible pour les équipes éducatives. cées, des témoignages, l’épisode 3 de L’outil a reçu le soutien de la Région wallonne et de la Fédération Wallo- la saga de l’année… nie-Bruxelles. INFOS La question des formations initiale et Une version en langue allemande est en phase de fi nalisation, elle sera disponible www.changement-egalite.be continue des enseignants est deve- en septembre 2013. nue un enjeu auquel tous les acteurs éducatifs prennent part. Toutefois, les débats portent plus souvent sur la structure que sur les contenus et la méthodologie nécessaires pour atteindre les missions de l’École. En particulier, ChanGements pour l’égali- té s’inquiète du manque de perspec- tive pour former les acteurs de l’école en vue de lutter contre les inégalités scolaires INFOS Le lundi 19 aout 2013 à 20h00 au Centre Culturel Marcel Hicter - La Marlagne Chemin des Marronniers, 26 à Wépion La soirée est ouverte à tous et l’entrée est gratuite - www.changement-egalite.be

« Grandir » Un projet né au printemps 2012, en collaboration avec la compagnie du Campus de la Louvière et le soutien du Délégué Général aux Droits de l’Enfant. Il était une fois Ariane, la maman, et Céleste, sa fille de 9 ans, scolarisée en type 2. Tout se passe très bien pour elles jusqu’au jour où la jeune élève se prend à rêver de lire et d’écrire. C’est alors que les problèmes commencent. Après plusieurs mois de heurts entre l’école et la famille, Ariane décide de scolariser officiellement Céleste à domicile. C’est alors qu’Ariane rencontre la Compagnie du Campus. Et de cette rencontre, nait un projet de théâtre-action. Aujourd’hui, Ariane est devenue Caroline et Céleste est devenue Zoé. Toutes deux sont sur les planches pendant une bonne demi-heure pour évoquer leur histoire et la partager. « Grandir » est un spectacle suivi d’un débat qui doit servir de facilitateur pour une meilleure communication entre tous ceux qui ont l’ambition de mettre en œuvre le meilleur pour tous les enfants. « Grandir » n’est pas une arme mais un outil pour repenser le système scolaire et son rapport à l’enfant (ainsi qu’aux adultes). INFOS Le spectacle tournera pendant 2 ans et sera disponible en Belgique et à l’étranger (francophone) à partir de l’automne 2013. Dès lors, surveillez régulièrement nos annonces, car nous passerons très certainement près de chez vous. Pour les personnes qui désirent accueillir le spectacle, n’hésitez pas à prendre contact, afi n de vous laisser toutes les informations - www.lesenfantsdelachance.org

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