Archives Fernand Vanlangenhove (Ou Van Langenhove)1
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
1 CEGESOMA/ Centre d’Etudes et de documentation Guerre et Sociétés contemporaines AA MIC 207 AA 1691 Archives Fernand Vanlangenhove (ou Van Langenhove)1 Par François-Xavier Lefebvre (2003), Razvan Nedelcu (2012) et Axelle Toubeau (2015), avec le concours de Fabrice Maerten pour la mise en forme définitive Janvier 2016 Notice biographique Fernand Vanlangenhove est né à Tournai, le 30 juin 1889, dans une famille bourgeoise. Son grand-père, négociant en lin et propriétaire foncier, était un notable flobecquois qui avait été pendant près d’un quart de siècle bourgmestre de sa commune. Son père était titulaire du titre de docteur en droit de l’Université libre de Bruxelles et était juge de paix à Mouscron. Cette généalogie et la position même prise par l’intéressé le firent considérer comme un adepte des idées libérales. Il faut cependant noter que ces idées n’ont que très peu influencé son parcours professionnel en tant que tel. En effet, il a été le chef de cabinet d’un ministre socialiste, et deux ministres catholiques -Theunis et Van Zeeland- auraient voulu lui confier un portefeuille ministériel. Après des études secondaires menées à l’Athénée d’Ixelles, il entre à l’ULB afin d’y assouvir une forte envie de connaissance. Il mène de front, entre 1906 et 1910, une licence en sciences sociales, une licence en sciences politiques et administratives, et des études d’ingénieur commercial. C’est la sociologie qui finit par retenir le plus son attention. En 1910, il entre, en tant que secrétaire scientifique, à l’Institut de Sociologie Solvay, dirigé à l’époque par Emile Waxweiler. Il occupe ce poste jusqu’au début de la guerre. Pendant ces quatre années, il va subir l’influence positive, tant sur le plan moral qu’intellectuel2, d’un tuteur dont 1 Vanlangenhove fit toute sa carrière sous le nom de Van Langenhove, en 2 mots. Cependant, au début des années cinquante, après s’être fait livré un acte de l’état civil, il constata que son nom s’y écrivait d’un seul trait. Suivant son esprit respectueux de la loi, il décida alors de respecter cette orthographe (ce que nous ferons également à travers cet inventaire). C’est pourquoi les bibliographies renseignent des ouvrages sous les deux orthographes. 2Sur le plan moral : "La science doit conduire à l’action et à l’action au service de la société". Sur le plan intellectuel : "la sociologie 'fonctionnelle', qui cherchait à intégrer les données de la biologie - si chère à Vanlangenhove -, de l’ethnologie, de la psychologie […], lui paraissait harmoniser, mieux que tout autre, le besoin du concret, de l’observation scientifique précise, avec les nécessités de l’explication générale". STENGERS (J.), "Notice sur Fernand Vanlangenhove", dans Académie royale de Belgique. Annuaire 1984, Bruxelles, 1984, partie Notices biographiques, p. 135-225, citation tirée de la p. 136. Pour une notice récente et 2 il aura à cœur de préserver la mémoire et la fécondité. C’est à l’Institut de Sociologie que Vanlangenhove commence ses travaux sur la formation et le développement des nationalités. Ainsi, à l’aube de la Grande Guerre, il préparait une thèse sur le sentiment national belge à l’époque de la Révolution brabançonne et sa première publication se rapporte, après une étude sur le terrain, à la nationalité albanaise. La guerre survient alors. Vanlangenhove veut s’engager, ce dont l’en dissuade Waxweiler. Le jeune homme se retrouve au Havre, où il occupe un poste au sein du Bureau documentaire. Y lisant la presse belge et allemande, il est attiré par la problématique des francs-tireurs. De ses lectures et réflexions sortent en février 1916 un livre, Comment naît un cycle de légendes : francs-tireurs et atrocités en Belgique. Cette étude attire l’attention3, car l’auteur y démontre, sur la base de documents ennemis, les mécanismes de la psychologie collective qui ont mené à l’établissement de la légende des francs-tireurs, à une époque où celle-ci est fortement ancrée dans les pensées. Deux autres ouvrages de Vanlangenhove datent aussi de sa période au Havre : La volonté nationale belge en 1830 et Le dossier diplomatique de la question belge. Recueil des pièces officielles, avec notes. Le 26 juin 1916, Waxweiler trouve accidentellement la mort à Londres. Cette nouvelle attriste profondément Vanlangenhove et influence à long terme sa carrière, son activité à l’Institut de Sociologie après-guerre perdant en partie son intérêt, une fois son maître disparu. Mais une autre personne va alors entrer dans la vie du jeune commis. Il s’agit de Paul Hymans qui propose en octobre 1917 à Vanlangenhove de devenir directeur du Cabinet du Ministère des Affaires économiques. C’est le début d’une période de neuf années durant laquelle il allait se spécialiser, comme haut fonctionnaire, dans les questions économiques. De retour en Belgique, il est nommé, en novembre 1918, directeur de l’Office des Etudes économiques du Ministère. Il commence, à la même époque (en 1919), sa carrière académique, dispensant des cours de sociologie, d’économie sociale et de mobilisation des ressources nationales respectivement à l’Ecole de Commerce, à l’Université de Bruxelles et à l’Ecole de Guerre. Cette réussite professionnelle s’accompagne d’heureux événements au point de vue personnel. En 1920, il épouse Melle Nancy Willems, fille du docteur Willems, professeur à l’ULB. De cette union de toute une vie naîtront 2 filles. Sa carrière au Ministère va progresser selon trois étapes. Dans un premier temps, il est affecté à la direction des accords commerciaux. Il mène entre autres les discussions avec la France suite au désistement de dernière minute de Michel Huisman (en 1922), avec l’Allemagne ou encore la Tchécoslovaquie. Ces expériences lui permettent de prendre contact avec un milieu qu’il ne quittera plus, le monde diplomatique. En 1926, Emile Vandervelde en fait son chef de cabinet. Il assume ces mêmes fonctions lorsque Paul Hymans - pour qui il a une très grande estime4- accède au Ministère des Affaires étrangères. une bibliographie à jour sur Fernand vanlangenhove, voir KURGAN-van HENTENRYK (G.), « Vanlangenhove, Fernand », dans Nouvelle Biographie nationale, t.8, Bruxelles, 1997, p. 370-373. 3 Elle fut traduite en anglais, en espagnol, en néerlandais et en allemand. Marc Bloch en fit la critique suivante dans la Revue de Synthèse historique : "En tout temps, la rigueur de sa méthode et la rare intelligence psychologique qui y brille en eussent fait une œuvre de choix. Mais, ce qui la rend proprement admirable, c’est qu’elle ait été écrite […] par un Belge". BLOCH (M.), "Réflexions d’un historien sur les fausses nouvelles de la guerre", dans Revue de Synthèse historique, t. XXXIII, 1921 (paru en mai 1922). 4 Cf. la notice biographique qu’il lui consacre dans l’Annuaire de l’Académie. "Notice sur Paul Hymans", dans Académie royale de Belgique, Annuaire 1971, Bruxelles, 1971. 3 La troisième étape est celle qui occupera le plus longtemps Vanlangenhove (18 ans, jusqu’en fin 19465). En 1929, Hymans lui propose le poste de secrétaire général. Mais Vanlangenhove ne veut pas d’une fonction dont les attributions ne sont qu’honorifiques. Il pose ses conditions et obtient que tous les services de l’administration centrale, ainsi que les secteurs extérieurs, soient placés sous son autorité. Dès lors, "la grande politique, désormais, après le ministre, c’est le secrétaire général"6. Son travail est apprécié si nous nous en référons aux avis donnés par ses différents 'patrons'. Spaak dresse un portrait qui ne traduit pas une relation personnelle forte mais qui insiste sur le sérieux de son collaborateur : "Un homme de toute grande classe…M. Van Langenhove n’était pas un diplomate de carrière, mais il avait les qualités requises pour réussir dans la diplomatie : perspicacité, sagesse, modération, patience. De jugement sûr, il était de bon conseil. Dévoué, affable, fidèle, il possédait en outre un excellent style diplomatique combinant la concission, la clarté, le choix judicieux des mots, l’expression heureuse. J’ai dit bien des fois en plaisantant, mais cette plaisanterie était l’expression d’une vérité, qu’il mettait en langage clair mes idées confuses. Ce fut pour moi une très grande chance de l’avoir à mes côtés"7. Sa carrière au Ministère des Affaires étrangères va s’articuler autour de trois grands dossiers : la politique d’indépendance, la position de la Belgique au début de la Seconde Guerre mondiale, la défense des intérêts belges à l’ONU Le rôle de Vanlangenhove est indiscutable dans la première affaire Vanlangenhove. Dès 1931, Vanlangenhove va travailler de pair avec Hymans dont le discours à la Chambre du 4 mars 1931 sonne, selon le secrétaire général, le début de la mise en place de la politique dite "d’indépendance"8. Celle-ci correspond à une nouvelle interprétation de la notion de neutralité qui n’est plus vue comme une obligation et une garantie mais comme un moyen de rester en dehors des discussions et des compétitions où les intérêts vitaux de la Nation ne sont pas en jeu. C’est dans ce cadre que Vanlangenhove remet en cause l’accord franco-belge9. On en arrive en 1936 à une déliquescence de la situation internationale. L’esprit du Pacte de Locarno est totalement dissipé suite à la réoccupation de la Rhénanie par les armées du Reich10, la tension monte en Espagne et la victoire de l’Italie fascisante sur l’Ethiopie est accréditée. C’est dans ce contexte que Vanlangenhove exhorte Spaak, récemment arrivé au Ministère des Affaires étrangères, d’établir une "politique étrangère d’une complète clarté", c’est-à-dire "une politique de complète indépendance [qui] confère à notre armée et à notre système défensif leur efficacité maximum"11.