Jordi S a Vall
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samedi 15 janvier – 20H | Samedi 15 janvier | Samedi L’Orchestre de Louis Xv Le Concert des Nations Jordi Savall L’Orchestre de Louis XV | Jordi Savall | Le Concert des Nations des Concert | Le Savall | Jordi XV de Louis L’Orchestre samedi 15 janvier – 20H L’Orchestre de Louis Xv suites d’orchestre jean-Philippe rameau (1683-1764) Naïs (1748), Suite d’orchestre Ouverture – Musette tendre – Rigaudons I et II Sarabande – Gavotte pour les Zéphirs Loure – Musette – Tambourins I et II Entrée des Lutteurs et Chaconne Les Indes galantes (1735), Suite d’orchestre Ouverture – Musette en rondeau – Air vif Air des Incas pour la dévotion du Soleil Menuets pour les Guerriers et Amazones I et II Air pour les esclaves africains Air pour les amants qui suivent Bellone Tambourins I et II – Chaconne entracte 2 SAMEDI 15 JANVIER Zoroastre (1749), Suite d’orchestre Ouverture – Passepieds I et II Loure – Airs des Esprits Infernaux I et II Air tendre en rondeau Air grave – Gavotte en rondeau Sarabande Contredanse Les Boréades (1764), Suite d’orchestre Ouverture Entrée des Peuples Contredanse en rondeau Gavottes I et II pour les heures et les Zéphirs Menuets I et II Contredanse très vive Le Concert des Nations Manfredo Kraemer, concertino Jordi Savall, direction Avec la participation de l’Académie du Concert des Nations. Fin du concert vers 22h10. 3 L’Orchestre de Louis Xv Le 12 septembre 1764, Jean-Philippe Rameau s’éteignait à Paris. Son dernier opéra, Les Boréades, venait d’être mis en répétition. Dès que la nouvelle fut connue, la partition disparut des pupitres. L’œuvre ne serait créée sur une scène de théâtre qu’en 1983. Sa musique demeura inconnue du public parisien du siècle des Lumières, dont le goût s’était détourné depuis des années déjà de l’art si singulier du génial compositeur. Si Michel Paul Guy de Chabanon avait pu l’entendre, l’ouverture des Boréades aurait certainement nourri son argumentation pour son Éloge de Rameau, publiée peu après la mort du compositeur. En effet, le philosophe y déclarait : « Parcourez toutes les ouvertures de M. Rameau, l’y trouverez-vous semblable à qui que ce soit ? De l’une à l’autre, il ne se ressemble pas lui-même. » Dans l’ouverture des Boréades, Rameau abandonne la forme de l’ouverture à la française pour un plan en trois mouvements séparés, inspiré de l’ouverture à l’italienne. Il la revêt d’une orchestration virtuose et visionnaire, avec clarinettes et cors, pour dépeindre une atmosphère tempétueuse puis bucolique. Elle s’achève par une brillante évocation cynégétique qui s’enchaîne sans interruption avec la première scène de l’opéra : une chasse royale. Elle démontre toute l’ambition esthétique du véritable créateur du langage symphonique et de l’orchestration moderne. Pour Rameau, l’ouverture doit être liée à l’action de la tragédie, grâce à un procédé de peinture sonore dont l’orchestre fournit la palette colorée et expressive. Chabanon remet pourtant en question la légitimité de ce procédé : « Rien de si dangereux que ce projet formé de peindre, surtout en symphonie. Cette intention ne sert qu’à gêner l’imagination du musicien, à le fixer sur quelques petites ressemblances douteuses auxquelles il sacrifie tout, et à le distraire des recherches de la belle mélodie, qui seule constitue la véritable musique, tient lieu de toutes les peintures, ou, si l’on veut, en est toujours une. » Chabanon prend pour exemple l’ouverture de Naïs. Rameau avait composé cette pastorale héroïque en un prologue et trois actes, sur un livret de Louis de Cahusac, pour commémorer la signature du traité de paix d’Aix-la-Chapelle. Cette œuvre de circonstance fut créée le 22 avril 1749 et avait été reprise en 1764, avec des musiques additionnelles de Berton. Dans l’ouverture, Rameau rompt pour la première fois avec la tradition lulliste pour mieux illustrer la lutte des Titans contre les Olympiens : « L’ouverture de Naïs peint, dit-on, l’attaque des Titans. En ce cas, on doit y entendre les cris séditieux de ces enfants de la Terre ; y voir des rochers déracinés par leurs mains s’amonceler comme des nuages dans la tempête. » Rameau a voulu évoquer ces cataclysmes par une orchestration et une harmonie emplies de violence (que l’on retrouve au début de l’Entrée des lutteurs et à la fin de la Chaconne) : les trompettes et les timbales font retentir des « bruits de guerre » qui font écho aux batailles auxquelles le traité d’Aix-la-Chapelle mettait un terme. Chabanon met en lumière les jeux d’analogies sonores qui permettent à Rameau de « peindre en musique » : « Cette ouverture est, selon moi, une mélodie forte, hardie, et dont le caractère tranchant 4 SAMEDI 15 JANVIER et particulier est renforcé par quelques pratiques d’harmonie extraordinaires. Les personnes, trop peu exercées pour la sentir, la trouvent neuve et fortement pensée, et ils en sont émus : ces intonations âpres et sauvages, ces passages brusqués, cette harmonie hérissée […] semblent une analogie plus que suffisante avec le combat des Titans qui occupe leurs regards. » Malgré ses réticences, Chabanon ne peut que constater la redoutable efficacité expressive d’effets orchestraux aussi spectaculaires. Quelques mois après Naïs, Rameau produisit un nouvel exemple d’ouverture « hors norme » pour son Zoroastre. Cette tragédie en musique en cinq actes, sur un livret de Cahusac, fut créée le 5 décembre 1749. Elle fut révisée en 1756 pour adopter la forme d’un opéra en trois actes. L’ouverture, qui, selon Rameau, « tient lieu de prologue », est soumise à un véritable « programme » lié à l’action de la tragédie. La première section, avec son mouvement oppressant, grave et sombre, de cordes, veut évoquer la tyrannie d’Abramane, tandis que les flûtes plaintives symbolisent la détresse du peuple de Bactriane. La seconde section, de caractère lumineux et serein, évoque l’espoir du philosophe Zoroastre de voir la chute du tyran. L’ouverture s’achève par un mouvement rapide, aux modulations hardies, dépeignant les états d’âme contrastés des différents personnages avant la victoire finale de la lumière sur les ténèbres. Par comparaison avec ces trois compositions où Rameau ne cesse d’explorer de nouvelles voies formelles et expressives, l’ouverture des Indes galantes peut paraître plus conventionnelle. Elle adopte l’organisation bipartite des ouvertures à la française de Lully, avec une première partie grave et solennelle suivie d’une seconde vive et fuguée. L’œuvre n’est pas à proprement parler une tragédie lyrique, mais un « ballet » (genre aujourd’hui dénommé « opéra-ballet ») : « un spectacle composé d’actes différents quant à l’action, mais réunis sous une idée collective comme les sens, les éléments, l’amour », ainsi que le définit Marmontel dans L’Encyclopédie. Les Indes galantes s’ouvrent par un prologue allégorique narrant la rivalité entre Vénus, Amour et la Guerre (Bellone). Dans la seconde entrée, Les Incas du Pérou, Rameau multiplie les tours de force musicaux. Il fait se succéder diverses scènes à grand spectacle où l’orchestre prend une importance inédite, comme une cérémonie religieuse inca (avec son impressionnant Air pour la dévotion du Soleil), une éruption volcanique et un tremblement de terre. Voltaire fut à ce point impressionné par ces pages qu’il dira de Rameau : « Il est fou ; mais je tiens toujours qu’il faut avoir pitié des talents. Permis d’être fou à celui qui a fait l’acte des Incas. » La troisième entrée, Les Fleurs, met en scène des courtisanes persanes. Elle est sans doute la moins frappante du point de vue dramatique, mais la plus riche du point de vue de la danse, et donc en compositions orchestrales. La dernière entrée, Les Sauvages (où apparaissent les Indiens d’Amérique du Nord) n’était pas présente dans la version originale de 1735. Elle fut rajoutée lors de la reprise triomphale de 1736. La célèbre Danse des Sauvages est l’adaptation d’une pièce de clavecin publiée en 1729. Rameau a souvent repris et arrangé dans ses opéras, même tardifs, ses compositions de jeunesse. 5 Ainsi, les Tendres Plaintes, qui figurent dans ses Pièces de clavecin imprimées en 1724, réapparaissent dans Zoroastre sous la forme d’un Air tendre en rondeau pour flûte traversière avec accompagnement de violons. L’arrangement est si harmonieux qu’il laisserait volontiers penser que le compositeur, avant même qu’il n’ait produit ses premières pages orchestrales (elles n’apparurent qu’en 1733 avec son premier opéra, Hippolyte et Aricie), avait déjà à l’esprit au début de sa carrière tous les développements prodigieux qu’il allait apporter à l’écriture symphonique. Denis Morrier 6 SAMEDI 15 JANVIER jean-Philippe rameau Jean-Philippe Rameau (Dijon, 25 septembre 1683-Paris, 12 septembre 1764) a été considéré comme le musicien français le plus important avant le XIXe siècle. Il était le fils d’un organiste de Dijon et sa mère appartenait à la petite noblesse. À l’âge de douze ans, il entra au collège des jésuites et c’est peut-être là qu’il acquit son enthousiasme pour l’opéra – qui l’accompagna toute sa vie –, sachant l’importance que le théâtre en musique revêtait pour les jésuites. Il abandonna rapidement les études générales pour se concentrer sur la musique et, à dix-huit ans, il fit un voyage en Italie pour se former musicalement mais ne dépassa pas Milan et revint quelques mois plus tard en France. Les quarante premières années de sa vie sont peu connues, comme s’il avait eu intérêt à ce qu’il en soit ainsi. Il travailla comme violoniste avec des groupes de musiciens ambulants et comme organiste à Avignon, Clermont, Paris, Dijon, Lyon et de nouveau Clermont.