T I T E L Georges Bernanos : Vocation Sacerdotale Et Vocation D'écrivain
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T I T E L Georges Bernanos : vocation sacerdotale et vocation d’écrivain Inaugural-Disseratation Zur Erlangung der Doktorwürde der Philologischen Fakultät der Philosophischen Fakultät der Albert-Ludwigs-Universität Freiburg i. Br. Vorgelegt von Claudia Elena Dinu aus Piatra Neamţ (Romania) WS 06 / 07 0 Erstgutachter : Prof. Dr. Joseph Jurt Zweigutachter : Prof. Dr. Alexandru Călinescu Ggf. Drittgutachter : Prof. Dr. Eva Kimminich / Prof. Dr. Anca Sîrbu Vorsitzender des Promotionsausschusses der Gemeinsamen Kommission der Philologischen, Philosophischen und Wirtschafts- und Verhaltenswissenschaftlichen Fakultät : Prof. Dr. Hans-Joachim Gehrke Datum der Disputation : 2 März 2007 1 Sigles et abréviations BMM = Bernanos et le monde moderne, textes recueillis par Monique Gosselin et Max Milner, Ouvrage publié avec le concours du Conseil Scientifique de l’Université Charles de Gaulle/Lille III le Centre Roman 20/50 et la Délégation aux Célébrations Nationales, Collection UL3 coordonnée par le Conseil Scientifique de l’Université Charles de Gaulle- Lille III, Lille, Presses Universitaires de Lille, 1988. Correspondance I = Georges Bernanos, Correspondance, recueillie par Albert Béguin ; choisie et présentée par Jean Murray, O.P., Tome I (1904-1934), Paris, Plon, 1971 Correspondance II = Georges Bernanos, Correspondance, recueillie par Albert Béguin ; choisie et présentée par Soeur Jean Murray, O.P., tome II (1934-1948), Paris, Plon, 1971 EB = Études Bernanosiennes ÉCRITURE 24 = ÉCRITURE 24, Revue littéraire dirigée par Roland de Muralt, Lausanne, Été, 1985. Essais I = Georges Bernanos, Essais et écrits de combat, I, textes présentés et annotés par Yves Bridel, Jacques Chabot et Joseph Jurt sous la direction de Michel Estève, Paris, Gallimard, 1997. Essais II = Georges Bernanos, Essais et écrits de combat, II, textes établis, présentés et annotés par Yves Bridel, Jacques Chabot, Michel Estève, François Frison, Pierre Gille, Joseph Jurt et Hubert Sarrazin, sous la direction de Michel Estève, Paris, Gallimard, 1997. EUROPE = EUROPE, Revue mensuelle fondée en 1923 par Romain Roland, 73e année, no. 789-790 / Janvier-Février, 1995. GB témoin = Pierrette Renard, Georges Bernanos, témoin, Toulouse, Presse Universitaires du Mirail, 1994. JCC = Journal d’un curé de campagne La Bible = La Bible de Jérusalem, La Sainte Bible traduite en français sous la direction de l’École biblique de Jérusalem, Nouvelle édition entièrement revue et augmentée, 12e édition, Paris, Les Éditions du Cerf, 1988. LEH = Les Enfants humiliés LGC = Les Grands Cimetières sous la lune LGP = La Grande peur des bien-pensants LI = L’Imposture LJ = La Joie MO = Monsieur Ouine 2 NHM = Nouvelle Histoire de Mouchette RLM = La Revue des Lettres Modernes, no. 425-431 : André Malraux 3, influences et affinités, textes réunis par Walter G. Langlois, Lettres Modernes, Paris, Minard, 1975. Satan = Satan et nous SSS = Sous le Soleil de Satan SV = Scandale de la vérité UC = Un Crime UMR = Un Mauvais Rêve 3 Introduction générale Georges Bernanos est un écrivain largement lu et étudié dans l’Europe occidentale mais, malgré les nombreuses études qui lui ont été consacrées dans de nombreux pays européens, il reste très peu étudié en Roumanie. Cette thèse se propose justement d’ouvrir, surtout pour le public roumain, la porte vers un espace fictionnel d’une exceptionnelle profondeur. Selon Gadamer, « quand le texte passe d’un contexte historique ou culturel à un autre, de nouvelles significations lui sont attachées […] Toute interprétation est contextuelle […] Toute interprétation est […] un dialogue entre passé et présent… »1. Pour nous, le travail avec les textes bernanosiens s’est avéré être un vrai dialogue culturel et historique, mais en même temps spirituel, avec un écrivain dont le discours privilégie toujours la dimension communicative. Notre approche s’est nourrie dès le début d’une impression prégnante de déjà vu et senti ; dès la première lecture, la dimension spirituelle a été la plus touchante et la plus pénétrante en devenant le centre du sens perçu dans le texte – un pré-jugé – autour duquel se sont rangées les autres significations. En présentant la distinction qui existe à l’intérieur d’un texte, entre « son sens (meaning), et sa signifiance (significance) ou son application (using) », Hirsch précise « que le sens est singulier tandis que la signification, qui met le sens en relation avec une situation, est variable, plurielle, ouverte, et peut-être infinie. Lorsque nous lisons un texte, qu’il soit contemporain ou ancien, nous relions son sens à notre expérience […]. Le sens est l’objet de l’interprétation du texte ; la signification, de l’application du texte au contexte de sa réception (première ou ultérieure), et donc de son évaluation »2. Il faut reconnaître, dès le début, que notre analyse – comme toutes les autres d’ailleurs – représente un point de vue subjectif, contextuel et évaluatif, mais tout en l’assumant en tant que tel, nous nous proposons de construire un modèle interprétatif cohérent, argumenté et solidement ancré dans le texte interprété, avec la conviction que ce dernier reste la constituante la plus importante de toute analyse critique. La lecture subjective et contextuelle est, en même temps, relationnelle, ne peut pas être indépendante. Cette réalité généralement admise dans la critique littéraire a été affirmée également par la pragmatique. Il y existe deux points de vue importants : l’un qui met l’accent sur la relation avec l’auteur d’un texte et l’autre qui met en valeur la relation avec le texte lui-même. Selon John Austin, « toute énonciation engage un 1 Cf. Antoine Compagnon, Le Démon de la théorie, Littérature et sens commun, Paris, Seuil, mars 1998, p. 66. 2 Ibid., p. 89. 4 acte qui s’appelle illocutoire, comme demander ou répondre, menacer ou promettre etc., qui transforme les rapports entre les interlocuteurs. Interpréter un texte littéraire, c’est d’abord identifier l’acte illocutoire principal accompli par l’auteur, lorsqu’il a écrit ce texte »3. Dans une autre perspective pragmatique « l’interprétation des énoncés n’est pas considérée comme un agencement d’unités douées de sens qu’il suffirait d’identifier et de combiner, mais plutôt comme un réseau d’instructions. […] D’un côté, le texte est „réticent”, c’est-à-dire criblé de lacunes ; de l’autre, il prolifère, obligeant son lecteur à opérer un filtrage drastique pour sélectionner l’interprétation pertinente »4. À côté de ces points de vue linguistiques concernant le travail d’interprétation, il faut mentionner également la perspective de la critique de la réception qui met au centre le lecteur. Antoine Compagnon dans Le Démon de la théorie, Littérature et sens commun, s’arrête sur deux points de vue qu’il considère pertinents pour la description de l’implication du lecteur, ceux de Stanley Fish et de Jauss. Le premier considère qu’« un texte a autant de sens que des lecteurs… Le lecteur se substitue à l’auteur comme critère de l’interprétation »5. Pour ce qui est de Jauss, il « ne fait jamais la distinction entre réception passive et production littéraire (la réception du lecteur qui devient auteur à son tour) » et conçoit « la fusion » de ses célèbres horizons « sous la forme du dialogue, de la question et de la réponse : à tout moment, l’œuvre apporte une réponse à une question des lecteurs »6. L’invocation de ces points de vue montre que la position de chaque lecteur peut être orientée par le texte, mais est sans doute également limitée par celui-ci. Ce sont en fait les ouvertures et les limites d’une approche qui accorde la primauté au texte. Cette primauté est relativisée par la linguiste Catherine Kerbrat–Orecchioni, qui, dans son travail sur l’énonciation, considère qu’« interpréter un texte, c’est tenter de reconstituer par conjecture l’intention sémantico-pragmatique ayant présidé à l’encodage »7. Paul Ricœur fait observer à son tour que « ce ne sont pas non plus les énoncés qui ont un sens ou signifiant, mais ce sont les locuteurs qui veulent dire ceci ou cela »8. Il continue avec un argument de F. Récanati qui fait remarquer que « la situation d’interlocution n’a valeur d’événement que dans la mesure où les auteurs de l’énonciation sont mis en scène par le discours en acte et, avec les 3 Ibid., p. 93. 4 Dominique Maingueneau, L’énonciation littéraire II. Pragmatique pour le discours littéraire, Édition mise à jour, Dunod, Paris, Bordas, 1990, p. 18 et 38. 5 Antoine Compagnon, op. cit., p. 70. 6 Ibid., p. 230 et 233. 7 Catherine Kerbrat-Orecchioni, L’énonciation de la subjectivité dans le langage, Paris, Librairie Armand Colin, 1980, p. 181. 8 Paul Ricœur, Soi-même comme un autre, Paris, Éditions du Seuil, 1990, p. 58. 5 énonciateurs en chair et en os, leur expérience du monde, leur perspective sur le monde à quoi aucune ne peut se substituer »9. Notre analyse qui se fonde sur un regard intérieur porté sur le texte littéraire se propose d’être une bios-graphie (βιος + γραϕη) – une graphie qui devienne une porte d’accès vers le bios – le cœur vivant et réel d’autrui qui est l’auteur du texte littéraire. Beaucoup plus riche nous semble donc être une vision critique qui met au centre la relation profonde et vivifiante dans laquelle le lecteur peut s’impliquer, notamment la rencontre de ce bios, de cette existence autre qui se cache derrière les mots. Ces considérations constituent une sorte de base théorique de notre lecture des textes de Bernanos, nourrie de la conviction (préjugée et soumise aux déterminations spatio-temporelles de notre condition de lecteur) que l’œuvre littéraire en tant que texte se trouve à son tour en relation avec certaines données de la vie intérieure de l’écrivain. Dans les études bernanosiennes, de nombreux critiques ont conçu leurs démarches analytiques à partir d’un point de vue similaire. Quant à nous, l’élément qui nous semble le plus important chez Bernanos, c’est le rapport d’adéquation et de cohérence qui existe entre son œuvre et son évolution spirituelle – en tant que données internes qui s’enchaînent de façon évolutive dans la vie humaine.