Masarykova univerzita Filozofická fakulta Ústav románských jazyků a literatur

Stéréotypes liés au verlan : variation diatopique dans le rap français

Tereza Sekaninová Magisterská diplomová práce

Vedoucí práce: PhDr. Alena Polická, Ph.D.

Brno 2012

V Brně 30. listopadu 2012

Prohlašuji, že jsem diplomovou práci vypracovala samostatně s využitím uvedených pramenů a literatury, a že se elektronická verze plně shoduje s verzí tištěnou.

...... Tereza Sekaninová

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Děkuji paní PhDr. Aleně Polické, Ph.D. za cenné rady a připomínky, bez nichž by tato práce nevznikla. Velký dík patří také studentům, kteří se podílejí na tvorbě rapového korpusu RapCor. V neposlední řadě bych chtěla poděkovat mé rodině za to, že mě podporovala po celou dobu mého studia.

3 TABLE DE MATIÈRES

INTRODUCTION ...... 7

I. VERLAN – objet d’étude ...... 10 I.1 Émergence du verlan et son entrée dans des dictionnaires...... 11 I.1.1 De l’argot à l’argot...... 15 I.1.2 Jargon versus argot ...... 18 I.2 Verlan dans le viseur des (socio)linguistes...... 20 I.2.1 « Parler verlan » estil possible ?...... 22 I.3 Dans la perspective des médias – stigmatisation, défavorisation ...... 23 I.4 Intégration des verlanisations dans le français courant ...... 25 I.5 Spécificités des unités lexicales en verlan...... 27 I.5.1 Niveau phonétique...... 28 I.5.2 Niveau morphosyntaxique...... 30 I.5.3 Niveau sémantique...... 31 I.6 Fonctions linguistiques du verlan ...... 33

II. RAP FRANÇAIS – domaine de recherche ...... 34 II.1 Liberté, Réalité, Vérité – message du rap et ses thèmes dominants...... 35 II.2 Rap comme une « arme verbale » ...... 38 II.3 Rap, « cri d’une jeunesse »...... 41

III. MÉTHODOLOGIE...... 43 III.1 Élaboration du corpus ...... 43 Interprètes...... 48 Chansons...... 55

IV. VARIABILITÉ DES LEXÈMES EN VERLAN...... 57 IV.1 Variantes graphiques des verlanisations...... 58 Typologie des procédés de codage complexes...... 59 Nature des modifications graphiques...... 63 Verlan à partir des emprunts...... 65

4 IV.1.2 Pseudonymes en verlan...... 67

V. QUESTIONS PRATIQUES DE LA LEMMATISATION DES LEXÈMES EN VERLAN ...... 69 V.1 Variabilité graphique des entrées dans les dictionnaires consultés...... 70 Trait d’union à l’intérieur des verlanisations...... 72 V.2 Filtres et critères de la lemmatisation...... 75 Filtre I...... 76 Filtre II...... 77 Filtre III...... 78 Filtre IV...... 79 V.3 Lemmes des verlanisations et leur structure interne ...... 81

VI. PROCÉDÉS GÉOGRAPHIQUEMENT CIRCONSCRITS...... 86 VI.1 Verlanisations dans les chansons des subcorpus ...... 87 VI.2 Rappeurs et leurs verlanisations...... 93 « Maître de verlan »...... 95 Verlanisation préférée et hapax des subcorpus ...... 99

VII. POSITION ET FONCTION DES LEXÈMES EN VERLAN DANS LES CHANSONS DE RAP FRANÇAIS ...... 104 VII.1 Position des verlanisations dans la structure des chansons ...... 105 VII.2 Fonction du verlan dans les chansons de rap...... 109

EN GUISE DE CONCLUSION : BILAN STATISTIQUE DE LA PARTIE PRATIQUE ...... 113

CONCLUSION...... 114

Liste des tableaux...... 118

Liste des graphes...... 120

Liste des schémas...... 121

5 Liste des cartes ...... 122

Liste des abréviations...... 123

BIBLIOGRAPHIE ...... 124 Articles et monographies...... 124 Thèses et mémoires...... 129 Dictionnaires ...... 129

SITOGRAPHIE ...... 131

Annexe 1 ...... 133 Tableau n°1 : Featurings employant le verlan...... 133 Tableau n°2 : Featurings n’employant pas le verlan ...... 133135 Tableau n°3 : Liste des chansons analysées...... 136145

Annexe 2 ...... 146 Tableau n°1 : Variantes graphiques des verlanisations...... 146150 Tableau n°2 : Dictionnaires et leurs entrées...... 151155 Tableau n°3 : Lemmes des verlanisations...... 156160

Annexe 3 ...... 161 Tableau n°1 : Verlanisations usées par les rappeurs...... 161162 Tableau n°2 : Fréquence des verlanisations...... 163164

6 INTRODUCTION

Le verlan, langage de miroir, jeu de mots, procédé de codage, un des piliers de l’activité argotique, révolte linguistique... Les premières traces de cette transformation verbale datent du XIIe siècle. À travers son histoire, il ne se posait que comme un élément stylistique en littérature ou un élément prétendument opaque pour les noninitiés en acte de communication. Néanmoins, à l’époque relativement récente, le verlan est devenu digne d’une préoccupation sérieuse des (socio)linguistes ainsi que du public non spécialiste, car il a relégué sa fonction cryptique au second plan afin de relever ainsi son rôle du porteur de traits identitaires. Et même si nous nous classions tout au début de notre travail plutôt parmi les non spécialistes, nous avons choisi le « fruit » de cette activité verbale pour l’objet d’étude du présent mémoire de master sous l’impulsion de la directrice Madame Alena Polická, admiratrice enthousiaste de la néologie identitaire chez les jeunes Français aussi bien que les jeunes Tchèques. Depuis longtemps, la complexité du verlan est le sujet principal de nombreux ouvrages. Notre travail renoue indirectement avec le mémoire de Miriama Zoričáková (Synchronie dynamique de la verlanisation dans un corpus de rap) qui s’est focalisée sur la comparaison des modes de codage des lexèmes dans le corpus de 150 chansons de rap français. Nous avons décidé d’élaborer le corpus plus vaste afin de soutenir nos résultats par l’aspect quantitatif. Le rap français est devenu donc le domaine de notre recherche grâce à sa richesse lexicale, notamment en ce qui concerne le vocabulaire substandard qui contient un bon nombre de verlanisations. L’objectif de notre mémoire est de décrire le caractère des expressions verlanisées dans le corpus contenant 270 chansons de rap français, tirées du RapCor. Notre corpus est composé de sorte que nous puissions confronter la nature des verlanisations ainsi que le mode de leur emploi chez les rappeurs français, les uns provenant du Nord, les autres du Sud de la . L’analyse comparative de ces subcorpus limités par le critère géographique nous permettra d’aborder notre objet d’étude dans l’optique territoriale et glossoidentitaire. Par conséquent, nous croyons que notre mémoire pourrait contribuer au dégagement des préjugés attribuant le processus de verlanisations aux jeunes de banlieues défavorisées. Nous avons divisé notre travail en deux parties : théorique et pratique. Dans la première partie, subdivisée en deux chapitres, nous passerons en revue les

7 approches théoriques envers le verlan et le rap français en tant que domaine d’étude linguistique. Le verlan sera présenté par la voie des sphères lexicographique, (socio)linguistique et d’un point du vue du public non spécialiste pour que nous montrions l’hétérogénéité de ses acceptions. De plus, nous aborderons la problématique de la pénétration des verlanisations dans le français courant et nous esquisserons ses spécificités formelles. Finalement, nous tenterons d’indiquer l’importance des fonctions linguistiques du verlan. Dans le passage portant sur le rap français, nous viserons surtout à représenter les nuances entre le rap du Nord et du Sud de la France, d’abord sur le plan thématique et ensuite, sur le plan lexical. Nous terminerons cette partie par la problématique liée au classement de ce genre musical. La seconde partie commencera par la description de l’élaboration du corpus et par une courte présentation des interprètes choisis et des chansons analysées. Ensuite, nous nous préoccuperons de la recherche ellemême qui est fondée sur plusieurs hypothèses : dans le subcorpus des rappeurs provenant du Nord de la France, la fréquence des lexèmes en verlan sera plus haute, les verlanisations nonlexicalisées y seront nombreuses ainsi que les modifications sur le plan graphique. Par contre, dans le subcorpus de leurs confrères provenant du Sud de la France, nous nous heurterons à la quasiabsence des verlanisations et à l’utilisation des lexèmes verlanisés en usage commun, sans modifications graphiques individuelles, supposant que l’attachement identitaire sera minimal dans cette région. Nous tenterons de procéder de sorte que les résultats de l’analyse comparative confirment ou réfutent nos hypothèses et que nous relevions la disparité entre nos subcorpus étudiés. Premièrement, nous ferons un commentaire sur les variantes graphiques des verlanisations et leur repérage. Nous présumons que c’est justement par cette étude que nous arriverons à montrer quel subcorpus est plus riche en lexèmes verlanisés et quelle est la fonction dominante du verlan chez les rappeurs français. Comme la multiplicité des variantes graphiques et des items dans les dictionnaires consultés est au cœur des difficultés de la désambiguïsation, nous expliquerons notre mode de lemmatisation. La méthode proposée deviendra utile à lemmatiser les verlanisations apparaissant dans tout le RapCor et elle permettra ainsi de désambiguïser les variantes graphiques. Nous n’étudierons pas seulement la quantité des verlanisations mais nous observerons également leur structure interne qui pourrait nous aider à dévoiler si les rappeurs préfèrent inventer des termes originaux à emprunter des termes en voie de lexicalisation.

8 Deuxièmement, nous nous focaliserons sur l’occurrence des verlanisations dans les chansons analysées et l’utilisation du verlan par les interprètes. Ces analyses permettrons de se rendre compte d’autres nuances géographiquement circonscrites et ouvriront de nouvelles questions de recherche. Finalement, nous examinerons la position des verlanisations dans la structure des chansons et les fonctions du verlan dans ce domaine musical. Nous supposons que les verlanisations apparaîtront fortement dans des refrains qui se posent comme la partie parfaite pour la diffusion de nouvelles unités lexicale grâce à leur caractère répétitif. En ce qui concerne les fonctions, à notre avis, il se montrera que la fonction identitaire du verlan ne cesse de s’atténuer. Dans le rap français, la fonction dominante sera la fonction ludique. Toutes les données obtenues interpénétront les chapitres brièvement présentés supra. Enfin, il nous semble nécessaire de rappeler que les résultats seront influencés par l’étendue de notre corpus qui est loin d’être représentatif pour le français parlé des jeunes. En fait, nous ne découvrons que les tendances qui existent.

9 I. VERLAN – objet d’étude

Qu’estce que le verlan ? Question simple, pourtant sans réponse laconique à part des Français natifs. Par une minienquête, nous arrivons aux répliques suivantes :

C’est un langage utilisé par les jeunes avec comme particularité de prendre les mots à l’envers ! (étudiante, 20, Orthez)

Cela dénigre la langue française, souvent utilisé par la racaille. (étudiant, 22, Nice)

C’est le fait d’inverser les syllabes d’un mot pour en créer un mot d’argot. (étudiant, 24, Dijon)

C’est le mot qu’on retourne, les syllabes qui voyagent. (étudiante, 25, )

Le verlan c’est l’art de parler à l’envers quand on n’a pas les idées à l’endroit. (étudiant, 26, Reims)

Dans ce chapitre, nous tenterons de présenter le verlan de différents points de vue. Nous avons choisi trois sphères par la voie desquelles nous pouvons prendre connaissance de ce procédé. Nous pensons aux œuvres des lexicographes dont les articles sont variés (§ I.1), aux acquis des (socio)linguistes qui sont préoccupés par ce phénomène langagier à partir des années 1980 (§ I.2) et, en dernier lieu, aux préjugés du public non spécialiste qui stigmatisent fortement le verlan ainsi que les « verlanisateurs » et qui, à notre avis, ont l’influence la plus grande sur l’imaginaire publique (§ I.3). Nous introduirons également les chapitres portant sur l’intégration des verlanisations dans le français courant (§ I.4) et sur les spécificités des unités lexicales verlanisées (§ I.5). À la fin, nous résumerons les fonctions linguistiques du verlan et indiquerons le degré de leur importance (§ I.6).

10 I.1 Émergence du verlan et son entrée dans des dictionnaires

La désignation de notre objet d’étude apparaît au début des années 50 du XXe siècle. Il s’agit de l’inversion du terme (à) l’envers (> [vel]̃ écrit versl’en par Gaston Esnault, verlen par Auguste Le Breton, verlan par les autres)1. C’est justement l’écrivain Auguste Montfort, dit Le Breton, qui l’emploie pour la première fois dans son roman Du rififi chez les hommes publié en 1953. Le Breton est également considéré comme celui qui introduit les verlanisations en littérature.2 Nous notons une brève citation, tirée du roman mentionné audessus, en soulignant les lexèmes verlanisés :

Pour que les caves qui les serraient de trop près n’entravent pas, elle ajouta en verlen : « Qu’estce qu’ils viennent tréfou les draupers à cette heureci ? Pourvu qu’ils fassent pas une flera. Ça serait le quetbou ; j’ai pas encore gnéga une nethu. »3

Même s’il pourrait sembler que le verlan est une pratique relativement contemporaine, il faut noter que la naissance de ce procédé ne coïncide pas avec la naissance de sa dénomination. Les traces de la déformation de type verlanesque les plus anciennes remontent au Moyen Âge. Dans le roman de Tristan et Iseut, qui date du XIIe siècle, le prénom Tristan a été inversé en Tantris. Plus tard, au XVIe siècle, les Bourbons sont appelés Bonbours et par exemple au XIXe, dans le roman Lettre de la Hyène, le toponyme Toulon devient Lontou.4 À raison du précédent, nous pouvons déclarer que le XXe siècle n’est que le siècle du « verlan boom ». Pendant le siècle dernier, nous remarquons plusieurs vagues d’explosion des verlanisations. Nous savons déjà que dans les années 50, les lexèmes verlanisés pénètrent dans la littérature grâce à Le Breton. La popularisation arrive quelques années plus tard. En 1977, Renaud Séchan sort son album Place De Ma Mob et les radios lancent la chanson Laisse béton. Le béton est le verlan du verbe tomber. À

1 JeanPaul COLIN, JeanPierre MÉVEL, Christian LECLÈRE : Dictionnaire de l’argot, Paris, Larousse 1992 (2e éd.), p. 657. 2 Idem. 3 Auguste LE BRETON : Du rififi chez les hommes, Paris, Gallimard 1953, p. 36. 4 Pierre MERLE : Argot, verlan et tchatches, Toulouse, Milan 1997, p. 47.

11 l’aide du verlan, il crée des rimes avec les expressions baston, blouson et ceinturon.5 En 1984, le réalisateur et scénariste Claude Zidi tourne sa comédie policière Les Ripoux qui a deux suites et dont l’action est située au 18e arrondissement de Paris. C’est la transformation verlanesque de pourri qui fait former le titre du film et la désignation d’un policier corrompu. Dans les années 70 et 80, le verlan est couramment employé dans les banlieues parisiennes où il participe à constituer l’identité des jeunes d’origine immigrée. Ultérieurement, dans les années 90, on assiste à l’introduction massive des termes verlanisées dans le langage parlé, surtout grâce aux médias et au mouvement de hiphop. Parallèlement, commencent à paraître les études s’attachant aux particularismes des pratiques langagières des jeunes. La notion de verlan existe depuis plus d’un demisiècle et pénètre petit à petit dans les ouvrages des lexicographes. Les concepts qui lui sont attribués par les différents dictionnaires sont pourtant dans une certaine mesure déroutants. Nous tentons d’illustrer l’hétérogénéité des représentations symboliques en confrontant plusieurs dictionnaires choisis de manière aléatoire. Nous commençons par le Trésor de la langue française informatisé dans lequel le verlan fait son entrée trente ans après sa naissance et qui le définit ainsi :

Verlan : Procédé de codage lexical par inversion de syllabes, insertion de syllabes postiches, suffixation, infixation systématique ; type particulier d’argot qui en résulte.

Le Petit Robert garnit sa nomenclature de l’entrée verlan en 1970. Son édition Le nouveau Petit Robert de la langue français 2008 propose la définition suivante :

Verlan : Argot conventionnel consistant à inverser les syllabes de certains mots (ex. laisse béton pour laisse tomber, féca (café), tromé (métro), ripou (pourri), et, avec altération, meuf pour femme). (p. 2694)

Ce concept considère l’argot comme la catégorie générale dans laquelle appartient notre référent. Nous nous heurtons à la représentation pareille aussi dans un autre

5 RENAUD : Laisse béton, Place De Ma Mob, Polydor 1977.

12 dictionnaire de référence. C’est le Dictionnaire de la langue française de Jean Dubois et al., Larousse 2000 :

Verlan : Argot codé dans lequel on inverse les syllabes des mots. (p. 1994)

Ce ne sont pas seulement les dictionnaires référentiels qui mettent le signe d’égalité abstrait entre l’argot et le verlan. Par exemple dans le dictionnaire encyclopédique Dictionnaire Hachette, édition 2012, nous lisons le suivant :

Verlan : Argot consistant à inverser les syllabes des mots (ex : laisse béton pour laisse tomber). (p. 1689)

En consultant les dictionnaires spécialisés, nous révélons un certain décalage à l’égard de l’incluant. Voyons par exemple le Dictionnaire du français argotique et populaire de François Cradec et JeanBernard Pouy, Larousse 2009, qui affiche :

Verlan : Jargon obtenu par retournement des syllabes d’un mot. (p. 316)

Ce concept se distingue complètement de celui présenté dans le Dictionnaire de l’argot français et de ses origines de JeanPaul Colin, Larousse 1999 :

Verlan : Type de transformation verbale argotique consistant à inverser l’ordre des syllabes, parfois des phonèmes, parfois de segments plus longs, dans un mot. (p. 843)

Finalement, nous notons encore deux définitions de notre objet d’étude : la première est tirée du Dictionnaire du français branché de Pierre Merle, édition du Seuil 1986 et la seconde provient du Dictionnaire de la Zone de Cobra le Cynique, mis en ligne en 2000.

Verlan : Langage basé sur l’inversion de syllabe, plus particulièrement, et pour des raisons de commodité, dans les mots à deux syllabes. [...] Connaît une vogue certaine chez les jeunes. (p. 149 – 150)

13 Verlan : Forme de langage argotique consistant à inverser l’ordre des syllabes ou des phonèmes d’un mot.

Les dictionnaires consultés nous offrent trois incluants distincts : argot, jargon et procédé de création argotique. Il est préférable de dire que le concept proposé par Dictionnaire de l’argot français et de ses origines et par Trésor de la langue française informatisé nous semblent le plus adéquat, car ces deux concepts soulignent que le verlan est une activité de l’argot. Quant aux autres acceptions, elles nous mènent à la question de savoir « qu’estce que l’argot et le jargon ? ». Par conséquent, nous proposons de faire une digression par l’intermédiaire de laquelle nous essaierons d’expliquer la notion d’argot et de jargon. Nous ne partirons pas des articles de dictionnaire mais dans ce caslà, nous préférerons les acquis de la (socio)linguistique.

14 I.1.1 De l’argot à l’argot

La notion d’argot est d’abord le synonyme des mendiants, voleurs et malfaiteurs utilisant leur propre variété de langue qui, à la fin du XVIIe siècle, prend le nom d’argot. La désignation passe donc d’une communauté à leur langage dont la fonction centrale est la fonction cryptique.6 Cette définition historique qui qualifie l’argot de la langue des malfaiteurs et des mendiants est fortement enracinée auprès du public francophone. Denise François, fondatrice de l’argotologie contemporaine, souligne la nécessité de s’affranchir de cette définition car elle ne recouvre pas la multiplicité des formes que celuici (argot) a pu prendre au cours des siècles. On constate, en effet, que ces formes se développent dans toutes les communautés qui [...] cherchent à affirmer la solidarité de leurs membres ou [...] la connivence des initiés7. En rapport avec la diversité des formes, elle propose en outre de parler des argots plutôt que de l’argot qui est, pour elle, un « phénomène purement lexical qui joue des latitudes offertes par une langue déterminée selon des mécanismes qu’on a pu répertorier ».8 La popularisation de l’argot grâce à son introduction dans les œuvres littéraires au cours du XIXe siècle contribue à sa stratification ; chaque communauté utilise ses parlures argotiques qui se caractérisent par des traits distinctifs. En dépit de ces traits, au début du siècle dernier, éclot l’argot commun que Marc Sourdot appelle « trésor lexical argotique »9 ; cet argot commun englobe les éléments caractéristiques de chaque argot et il est compréhensible à quelconque communauté de laquelle il devient indépendant. À ce lieu, nous proposons d’annexer le schéma représentant la naissance de l’argot commun qui peut se poser comme l’insertion des unités lexicales dont la valeur argotique ainsi que la fonction cryptique s’atténuent. Le schéma peut en même temps symboliser le cheminement du vocabulaire argotique au vocabulaire courant.

6 LouisJean CALVET : L’argot, P.U.F. « Que saisje ? », 2007 (3e éd.), p. 5 – 16. 7 Denise FRANÇOIS : « La littérature en argot et l’argot dans la littérature », Communication et langages, n°27, 1975, p. 5. 8 Ibid., p. 6. 9 Marc SOURDOT : « Argot, jargon, jargot », in : Alena PODHORNÁPOLICKÁ (éd.), Aux marges de la langue, Brno, Munipress 2011, p. 18.

15 Schéma n°1 : Naissance de l’argot commun

e XIII siècle fin du XVIIe siècle Argot Argot = = langue des malfaiteurs communauté et des mendiants

fonction cryptique popularisation (surtout grâce à la littérature)

pénétration dans toutes les communautés et couches sociales

XVIIIe siècle

Argots

(aux traits distinctifs) a t t é n u a globalisation des traits semblables t i o n début du XIXe siècle

Argot commun

Le déclin de l’argot traditionnel arrive avec le parler des jeunes de la deuxième génération issue de l’immigration des années 1980. Le vieil argot doit donc faire face à une concurrence de la part de l’ « argot des jeunes de banlieues » qui s’en inspire largement, mais dont les valeurs fonctionnelles ont changé. Les argots à base cryptoludique ont été remplacés par les argots sociaux et un

16 déplacement s’est opéré du centreville [...] vers la périphérie.10 À l’égard des argots modernes, on entend parler d’autres dénominations que Madame PodhornáPolická énumère dans son travail de thèse. Il s’agit de « français nonconventionnel » (renvoyant aux traits argotiques, familiers, populaires et vulgaires), « français branché » (recouvrant les néologismes à la mode mais n’indiquant rien sur les locuteurs), « nouveau français » (enrichi par le verlan) ou « français contemporain des cités » (variété sociogéographique).11 Pour conclure, mentionnons encore que le Grand dictionnaire, Linguistique et sciences du langage (désormais abrégé en GDLSL) caractérise l’argot comme « dialecte sociale », système de signes et de règles syntaxiques utilisé dans un groupe social donné ou par référence à ce groupe.12 On voit également apparaît le terme de « sociolecte » qui est compris comme la variété de langue parlée par une communauté, un groupe socioculturel [...] ou une classe d’âge.13 Les deux ouvrages consultés présentent dans l’article d’argot que ce langage s’enrichit d’un nombre de procédés de création parmi lesquels le GDLSL classe « l’inversion de son ou de syllabes » et Monsieur Calvet « argot « à clés » comme le verlan, les différents javanais ou le largonji ». Ils envisagent donc le verlan comme un type de transformation verbale émaillant l’argot.

10 Alena PODHORNÁPOLICKÁ : Universaux argotiques des jeunes, Analyse linguistique dans les lycées professionnels français et tchèques, Brno, Munipress 2009, p. 61. 11 Ibid., p. 64. 12 Jean DUBOIS et al. : Grand dictionnaire, Linguistique et sciences du langage, Larousse, Paris, 2007, p. 48. 13 Claudine BAVOUX : « Sociolecte », in : MarieLouis MOREAU (éd.), Sociolinguistique, Sprimont, Mardaga 1997, p. 265.

17 I.1.2 Jargon versus argot

Le jargon est un « langage des métiers ». Mais avant de se poser comme un ensemble de mots, le jargon, autant que l’argot, est une activité sociale de communication à l’intérieur d’un groupe,14 comme le proclame Monsieur Sourdot qui se préoccupe de la délimitation des notions en question. En vertu de son article cité et d’un article de Béatrice Turpin (Le jargon, figure du multiple), nous dressons en schéma portant sur les distinctions essentielles entre ces deux types de langages de connivence.

Schéma n°2 : Argot vs jargon

Langage de connivence

Argot Jargon

• parler des groupes sociaux • parler des métiers • fonction cryptique • fonction « économique »

Le jargon vise à faciliter l’acte de communication parce qu’il rend la désignation scientifique compréhensible au récepteur non initié, non spécialiste dans le métier particulier. Pour atteindre cette « clarté », il produit des néologismes de forme en appliquant deux modes de formation : formation par analogie et formation figuré. Il est possible donc de remarquer la coexistence entre le lexique savant et le lexique populaire. Madame Turpin note comme l’exemple démonstratif le domaine de la botanique où nous trouvons les dénominations populaire et française à côté de la terminologie latine.15 Elle soutient également l’importance des associations sémantiques qui relient le sème commun entre les expressions, ce que l’argot n’prévoit pas.

14 Marc SOURDOT : « Argot, jargon, jargot »..., art. cit., p.14. 15 Béatrice TURPIN : « Le jargon, figure du multiple », P.U.F., La linguistique, vol. 38, 2002/1, p. 61.

18

Contrairement, à l’argot qui, partant du vocabulaire usuel opère des séries de transformations sur le signifiant du signe ou des associations sémantiques souvent inattendues (il n’y a rien de commun a priori entre un policier et un poulet), la langue des métiers use souvent de la métaphore de manière que le sème commun entre les deux termes qu’elle relie soit évident. La règle d’association [...] pourrait se paraphraser ainsi : X ressemble à Y. La désignation est neutre, l’aspect référentiel dominant.16

L’autre capacité du jargon, que nous englobons dans la notion de « fonction économique » est la tendance d’accélérer la communication. Au regard de ce fait, les « jargonautes » profitent bien de la troncation. Outre des néologismes de forme, le jargon participe à la création des néologismes de sens en déplaçant la signification des termes courants pour les utiliser au champ professionnel. Quoi qu’il en soit, il en résulte que le jargon double fortement le vocabulaire français officiel.

16 Béatrice TURPIN : « Le jargon... », art. cit., p. 62.

19 I.2 Verlan dans le viseur des (socio)linguistes

Le processus de verlanisation est de façon restreinte lié à l’argot auquel il ne doit pas être confondu. À la fin du § I.1.2, nous avons déjà esquissé le point de vue (socio)linguistique, néanmoins nous ne voulons pas rester seulement au niveau des items des dictionnaires consultés. La partie suivante est consacrée aux opinions de certains spécialistes qui se préoccupent directement ou indirectement de cette problématique. Marc Sourdot examine le verlan sous deux aspects : en tant que produit, il peut se poser comme un argot particulier et en tant qu’activité, il assure l’effet de cryptage. Probablement grâce à sa capacité de renforcer encore plus le déchiffrage de sens, Monsieur Sourdot le classe parmi les piliers de l’activité argotique.17 Vivienne Méla emploie la notion de jeu de langage dont les locuteurs profitent pour échanger la forme des unités argotiques courante et pour la réduire à la fois. À cause de ses spécificités morphosyntaxiques, cette sorte du codage présente une révolte linguistique. Cependant c’est également le phénomène social qui exprime la culture de ses usagers.18 Dans son article Le verlan ou le langage de miroir elle affiche de surcroît que le verlan symbolise un certain nombre de petites et de grandes ruptures – entre jeunes et moins jeunes, sages et moins sages, marginaux et conformistes, et pour beaucoup, entre français et moins français.19 Il a du succès chez les jeunes des cités, surtout des beurs, auxquels il sert d’identification. La fonction identitaire de cette pratique verbale est relevée déjà par Christian Bachmann et Luc Basier. Selon eux, le verlan est un instrument qui aide ses locuteurs, qui sont surtout les adolescents d’origine étrangère installés dans les banlieues de grandes villes, à découvrir leur identité.

La juxtaposition des migrations, la communauté de situation entre Français et étrangers, dans l’exclusion comme dans la révolte, tout cela concourt à une recherche d’identité que marque le langage.20

17 Marc SOURDOT : « Argot, jargon, jargot »..., art. cit., p. 13 – 23. 18 Vivienne MÉLA : « Verlan 2000 », Langue française, Vol. 114 n°1, 1997, p. 16 – 34. 19 Vivienne MÉLA : « Le verlan ou le langage du miroir », Langages, n°101, 1991, p. 94. 20 Christian BACHMANN, Luc BASIER : « Le verlan : argot d’école ou langue des Keums ? », Mots, n°8, 1984, p. 183.

20 Leur parler reflète la réalité socioculturelle où les racines d’étranger influencent la prise de la culture française et il leur facilite de surmonter les obstacles de la vie quotidienne des immigrés. Concernant la langue des jeunes, elle représente le domaine qui mérite l’intérêt de la (socio)linguistique contemporaine. D’abord, elle ne se pose que comme une curiosité mais grâce à la médiatisation, son vocabulaire se déverse dans le français courant. Cette langue avec ses pratiques langagières ainsi que d’autres vecteurs (musique, danse, vêtements, comportement, etc.) est considérée comme un « acte d’identité ». À l’égard de cet acte, JeanPierre Goudaillier parle du mouvement d’identification et d’identisation21, car les jeunes s’expriment ainsi leur appartenance à un groupe portant ses spécificités par rapport à d’autres groupes. Le lexique des jeunes est riche en expressions substandard, néologismes, etc. Les verlanisations y occupent également une partie non négligeable. Monsieur Goudaillier soutient l’opinion que le verlan est une pratique établissant une distanciation effective par rapport à la dure réalité du quotidien, dans le but de pouvoir mieux la supporter. Le lien au référent serait plus lâche et la prégnance de celuici moins forte, lorsque le signifiant est inversé, « verlanisé ».22. Il s’avère qu’en puisant dans les recherches de quelques spécialistes, nous pouvons constater que le verlan n’est pas un simple processus de création argotique. Son utilisation et apparition dans le discours nous devrait mener à la quête des données sur le locuteur ainsi qu’à la question de savoir « pourquoi parletil verlan ? ». Ces indices nous pourraient éclairer la signification de son énoncé parce que la fonction des verlanisations n’est toujours pas cryptoludique. Elles fonctionnent comme un signe d’identification et c’est probablement la raison pour laquelle on entend « parler verlan » dans des quartiers ou des cités défavorisées. Il convient maintenant de faire une digression pour éclairer la question s’il est possible de « parler verlan », car cette tournure apparaît fréquemment dans les travaux consultés. C’est pourquoi nous lui avons dédié le chapitre qui suit.

21 JeanPierre GOUDAILLIER : « Argot(s) et identité(s) », in : KACPRZAK Alicja, GOUDAILLIER JeanPierre (éd.) : Standard et périphérie de la langue, Lask, Leksem 2009, p. 83. 22 JeanPierre GOUDAILLIER : « La langue des cités », Communication et langages, n°112, 1997, p. 104.

21 I.2.1 « Parler verlan » est-il possible ?

Pour commencer, rappelons que le verlan est un processus de transformation des unités lexicales, basé sur l’inversion des syllabes. Du point de vue lexicale, nous devrions être capables de verlaniser n’importe quel terme mais la phrase verlanisée peutelle être compréhensible au récepteur de message ? La réponse vient d’une interview effectuée par Vivienne Méla. L’analyse de son entretien d’une durée de vingt minutes avec un élève de treize ans qui a l’habitude de « parler verlan » apporte les acquis suivants :

En général, dans les récits de Saïd on ne trouve pas plus de 10% de mots en verlan. L’incompréhension du discours vient surtout du fait que ce sont les mots clés qui sont codés [...] le locuteur du verlan a recours également à d’autres types d’argot [...] Cette accumulation de vocabulaire argotique donne l’impression d’un discours tout à fait étranger, alors qu’en réalité, la structure syntaxique de la phrase et la plupart des mots relèvent du français parlé ordinaire.23

Il en résulte que le locuteur du verlan emploie les termes verlanisés mais qu’il ne transforme pas tous les lexies de son discours. En réalité, la verlanisation de tous les mots d’une phrase pourrait aboutir à l’incompréhension absolue même chez ceux qui introduisent les lexèmes en verlan dans leur expression verbale. Nous voyons également que ce sont les expressions clés qui sont mises en verlan. Si elles sont de plus utilisées avec un sens spécialisé, nous pourrions rencontrer de nombreuses difficultés au niveau de l’interprétation. Nous osons de proclamer qu’en théorie, il est possible de « parler verlan » mais personne ne le fait probablement à cause de l’effet que provoquerait son discours ou à cause de l’exigence que cela nécessiterait. Le « parler verlan » ne doit pas être compris littéralement et nous proposons donc de l’égaler à « employer des verlanisation dans son discours ».

23 Vivienne MÉLA : « Parler verlan : règles et usages », Langage et société, n°45, 1988, p. 59.

22 I.3 Dans la perspective des médias – stigmatisation, défavorisation

Le verlan n’est pas seulement la préoccupation des (socio)linguistes mais ce sont en outre les médias (presse écrite, télévision et internet à l’époque actuelle) qui se focalisent sur cette pratique langagière et la langue des jeunes aussi bien que sur les jeunes des cités et les banlieues. Cependant leur regard sur la réalité quotidienne est déformant et simplificateur. Voici la tendance à se concentrer sur les événements bruyants qui ne sont pas en conforme au modèle courant. De cette façon, ils se participent à la stigmatisation, défavorisation et marginalisation en renvoyant à leurs clients des « mythes »24. Il suffit de lire quelques titres de journal pour comprendre que dans la perspective des médias, « les banlieues » sont des espaces hostiles où la loi n’existe pas, les valeurs sont éphémères, le trafic noir fleurit et les voitures ne cessent de flamber. Autrement dit c’est une concentration de problème comme drogue, violence, délinquance, prostitution, échec scolaire, etc. Les habitants de banlieues ont peur de la mafia et de ses représailles d’une part et des jeunes banlieusards de la réputation aussi dangereuse d’autre part.

Dans l’enfer du 93 : « Moi, flic de banlieue » (Le Figaro, JeanPierre Rey, Nadjet Cherigui, 12/12/2011)

Banlieues : Incendie d’un camion le noyau dur de la violence chargé de voitures (Le Monde, Luc Bronner, 02/10/2006) de police (Libération, 04/03/1996) Banlieue, la loi du silence

(L’Express, Pascal Ceaux, Marie Huret, 16/03/2007)

L’insistance sur la dramatisation appartient aux caractéristiques des médias. Il n’est pas en effet étonnant que dans les banlieues, il naît des revendeurs, des consommateurs de drogue et d’autres types de déshérité. Pour s’identifier, ils emploient leur propre langue qui présente, avec tous ses procédés de création, une

24 Grégory DERVILLE : « La stigmatisation des « jeunes de banlieue » », in: Communication et langages, n°113, 1997, p. 104 – 117.

23 menace pour la société française autant que pour euxmêmes. Nadine Morano, femme politique française, appelle aux jeunes pour ne plus parler verlan comme les titres de presse le proclament.

Morano demande aux jeunes musulmans français de ne Morano demande aux jeunes musulmans français de ne plus parler « verlan »»»

(Le Monde, 18/12/2009)

Identité : Nadine Morano contre le verlan Morano contre le « verlan » et

(Le Figaro, 15/12/2009) la « casquette à l’envers »

(Elle, K.M., 15/12/2009)

« Moi, ce que je veux du jeune musulman, quand il est français, c’est qu’il aime son pays, c’est qu’il trouve un travail, c’est qu’il ne parle pas le verlan, qu’il ne mette pas sa caquette à l’envers, »25 a dit Morano pendant le débat sur la compatibilité de l’islam avec la République. Cette affirmation engendre de nombreux stéréotypes liés aux jeunes : défaitiste sans emploi révoltant contre la norme. Son regard sur les jeunes d’origine étrangère fait réagir le porteparole du Parti socialiste Benoît Hamon : « C’est très grave, parce que cela confirme le regard caricatural de plusieurs membres du gouvernement sur la jeunesse de ce pays, avec des amalgames invraisemblables sur les jeunes musulmans. »26 En somme, les médias s’efforcent en premier lieu d’attirer l’attention de leurs clients et il semble qu’ils ne se préoccupent pas trop de conséquences qui sont dans notre cas plutôt négatives. Nous considérons comme un seul mérite la diffusion des verlanisations « dans le monde » par la voie de leurs slogans.

25 Le Monde fr. avec AFP : « Morano demande aux jeunes musulmans français de ne plus parler « verlan » », Le Monde, 15/12/2009. 26 Idem.

24 I.4 Intégration des verlanisations dans le français courant

L’intérêt du public spécialiste ainsi que non spécialiste a l’impact sur la nature des lexèmes verlanisés. Dans le paragraphe précédent, nous avons traité la question de stigmatisation, à la suite, nous passons à l’intégration incontestable des verlanisations dans le français courant, qui aboutit à la perte de l’expressivité et qui se produit surtout à cause de deux processus : lexicalisation et médiatisation. L’acceptation des unités lexicales en verlan se différencie d’un dictionnaire à l’autre. À nos jours, ils apparaissent bien des dictionnaires spécialisés au vocabulaire du français argotique et populaire, dont la nomenclature est pleine de verlanisations. On publie également les dictionnaires de la langue des jeunes à qui l’emploi du verlan est fréquemment attribué et parmi lesquels appartiennent entre autres Comment tu tchatches ! de JeanPierre Goudaillier dont le soustitre annonce qu’il s’agit du dictionnaire du français contemporain des cités, ensuite Bien ou quoi ? de Roland Laffitte et Karima Younsi qui se focalisent sur la langue des jeunes à Ivry et VitrysurSeine, ou Lexik des cités qui est le travail collectif d’un groupe de jeunes originaires d’Évry. Il peut sembler que les mots en verlan ne sont que l’affaire des dictionnaires spécialisés cependant ces termes insèrent aussi dans les dictionnaires de référence. Ces verlanisationsci reçoivent, peuton dire, l’étiquette des termes officiellement lexicalisés ; leur valeur argotique s’atténue considérablement autant que leur connotation expressive.

Le vocabulaire argotique peut d’ailleurs figurer dans des discours ou des situations solennelles ou officielles [...] le vocabulaire argotique se partage assez bien, même si son utilisation ne se fait pas toujours dans les mêmes intentions. C’est ce qui explique l’auto appellation racaille ou caillera des jeunes des cités qui revendiquent ainsi leur statut, ou la reprise par l’institution du vocable beur [...] Le cas du verlan beur peut d’ailleurs expliquer en partie la pénétration de mots argotiques dans la langue : voilà un mot que les politiques peuvent utiliser plus facilement que les mots ou expressions immigrés ou individus d’origine arabe, qui pourraient revêtir une dimension idéologique gênante.27

27 Patrick MATHIEU : La double tradition de l'argot, Vocabulaires des marges et patrimoine linguistique, Paris, L’Harmattan 2008, p. 1314.

25 Nous citons quelques exemples des verlanisations tirés du Petit Robert 2008 qui démontrent leur cheminement des vocabulaires argotiques au registre de langue familière.

Tableau n°1 : Verlanisations dans Le nouveau Petit Robert de la langue française 2008 – exemples Marque Entrée Parution Verlan de... Sens Page lexicographique barjo début XXe jobard fam. Fou, farfelu. 222 Jeune Magrébin Arabe beur v. 1980 fam. né en France 246 avec apocope de parents immigrés. flic Agent de police, keuf v. 1978 fam. 1410 avec apocope policier. Lourd, relou, oue 1994 lourd fam. 2179 dépourvu de finesse. fête teuf 1984 fam. Fête. 2544 avec apocope

La médiatisation provoque les effets pareils. De plus, selon Henri Boyer, la « sollicitude médiatique » participe à « l’intégration dans les imaginaires sociolinguistiques collectifs » dont la « transgression identitaire » et l’ « intégration communautaire » sont deux fonctionnements complémentaires.28 Il est donc évident que les verlanisations ont déjà presque perdu leur fonction cryptique en échange de la fonction identitaire et il paraît que cette dernière est aussi en danger.

28 Henri BOYER : « « Nouveau français », « parler jeune » ou « langue des cités » ? Remarques sur un objet linguistique médiatiquement identifié », Langue française, vol. 114 n°1, 1997, p. 6 – 15.

26 I.5 Spécificités des unités lexicales en verlan

Le processus de verlanisation est fondé sur l’inversion de l’ordre des syllabes, autrement dit, il est question du codage dont le système est décrit dans plusieurs travaux de (socio)linguistique. Pour éviter la réécriture des règles du codage, nous nous référons par exemple à Vivienne Méla (Parler verlan : règles et usages ou Verlan 2000) ou à JeanPierre Goudaillier (Comment tu tchatches !) dont nous avons consulté les travaux pour dresser ce chapitre. Il vaut mieux connaître le système du codage afin de deviner les spécificités des verlanisations. Avant de procéder à elles, il faut encore ajouter que le verlan ne serait pas le « vrai » verlan sans être suivi d’autres procédés de formation, ce qui renforce sa fonction cryptique ainsi que l’expressivité. Dans ces procédés, nous pouvons classer la troncation, le redoublement hypocoristique ou la reverlanisation. Voici quelques exemples tirés du RapCor.

Tableau n°2 : Verlan suivi d’autres procédés de formation – exemples

Procédé de formation Exemple Verlan de... verlan + apocope beu herbe >[bœ] > [bø] > [bø] verlan + apocope + redoublement teuteu shit > [itœ] > [tøi] > [tø] > [tøtø] verlan + apocope + ressufixation tièks quartier > [tjka] > [tjk] > [tjks] femme > [famœ] > [møfa] > [mœf] verlan + apocope + verlan feumeu > [møfœ] > [fømø]

27 I.5.1 Niveau phonétique

Le verlan est une pratique langagière verbale qui s’appuie sur la prononciation. Dans l’article Les années verlan : Une langue morte ?, le rappeur Oxmo Puccino dit :

Il faut qu’il (terme verlanisé) sonne à l’oreille, autant phonétiquement qu’au niveau de l’accent.29

L’auteur de cet article ajoute :

Il suffit de prononcer « beuher » (herbe), « goleri » (rigoler), « vardcre » (crevard) ou « foncedé » (défoncé) pour le sentir : les mots verlans doivent claquer, les sons rebondir, les syllabes s’entrechoquer pour faire jaillir le sens.30

Les expressions en verlan ne sonnent pas de même manière comme le français standard. Elles sont dotées d’un accent de banlieue que LouisJean Calvet caractérise comme l’accent à une articulation très ouverte et très à l’arrière des voyelles et qui tombe sur l’avantdernière syllabe.31 L’impression d’étrangeté du verlan est probablement évoquée aussi par l’apparition du schwa épenthètique (phonème [œ]) auprès des verlanisations dont la forme de départ est un monosyllabe fermé. Voici quelques exemples des chansons du RapCor.

• lourd [lu:] > [lu|œ] > [ø|lu] relou (BON01)

• louche [lu∫] > [lu|∫œ] > [∫ø|lu] chelou (SNI02)

• moche [m∫] > [m|∫œ] > [∫ø|m] > [∫œm] cheum (FLY05)

29 Julien DEMETS : Les années verlan : Une langue morte ?, article pour Even, 2009. 30 Idem. 31 Vivienne MÉLA : « Verlan 2000... », art. cit., p. 27.

28 En plus de cela, l’inversion des syllabes débouche sur la naissance de beaucoup de lexèmes qui commencent par la syllabe ouverte. On ne réalise même pas la liaison avant les expressions dont l’initiale est une voyelle ou semivoyelle.

• barber [ba|be] > [be|ba] bébar (BOO05)

• morceau [m|so] > [so|m] ceaumor (HPK01)

• les ientscli [le|j̃|kli] (LMA01)

• la ive [la|iv] (SNI03)

29 I.5.2 Niveau morphosyntaxique

Le verlan participe à l’économie de langue mais en même temps, il cause les difficultés à reconstruire le sens parce qu’il rend les lexèmes invariables. Comme le verlan est un phénomène ne concernant que le lexique, on respecte les règles syntaxiques lorsqu’on « parle verlan ». Cependant il y a certaines spécificités grammaticales. Quant aux substantifs et adjectifs, le verlan ne distingue pas strictement entre la forme féminine et masculine. Cette dernière représente souvent les deux genres. Nous citons quelques exemples démonstratifs tirés du RapCor en respectant la forme orthographique de la version « pochette » et en indiquant le code de la chanson de source :

• les bourgeois deviennent ouf (SEF02) • elle est foncedé (FAF06) • ils étaient relou (HPO11)

En observant la forme des verbes, nous constatons que premièrement, les désinences de l’infinitif se déplacent à l’intérieur. Deuxièmement, les finales des personnes et des temps s’amalgament. Les formes sont identiques à l’infinitif. Et finalement, à cause de l’inversion, se produit la destruction du radical. Le rôle important appartient donc au contexte qui nous aide à situer le message.

• ça sert à rien de lépar (BOO05) • Quand je téchan, à vingtcinq ans, j’ai toutes mes chances. (SIN07) • Hier, elle a pécho ton cousin sur la poubelle. (FAF06)

Il est évident que les règles de la notation des expressions verlanisées ne sont pas fixes parce que nous avons trouvé des variantes graphiques qui s’accordaient au nombre. Ce fait confirme que le verlan est une pratique verbale, réalisée au niveau des phonèmes.

• les gens sont devenus barges (DIA15) • une bonne image des beurs (FFA01) • le cap des cailleras (DLP15)

30 I.5.3 Niveau sémantique

Le verlan puise dans tous les registres de langue française. Le plus souvent, il déforme les vocabulaires argotiques en les rendant plus obscures. Les unités lexicales codées et les termes non codés sont en relation de synonymie qui n’est pas absolue. Comparons les articles de certaines entrées du Nouveau Petit Robert de la langue française 2008 :

Tableau n°3 : Entrée des lexèmes standard et verlanisés – exemples du Nouveau Petit Robert de la langue française 2008

Marque Entrée Sens Page lexicographique • Qui s’écarte de l’ordre commun, qui est • / • subst. m. inhabituel, qu’on explique mal. / • Ce qui est bizarre bizarre. 260 Qui est dans un état inhabituel et (personnes) incompréhensible. zarbi fam. Bizarre, étrange. 2759

hist. Qui a subit l’énervation. énervé, e Qui se trouve dans un état de nervosité 868

inhabituel. / Qui manque l’énervement. vénère fam. Énervé, en colère. 2686

fam. Agent de police et par ext. Policier. flic Personne qui aime faire régner l’ordre, 1060 par ext. péj. surveiller. keuf fam. Agent de police, policier. 1410

Le concept de certaines verlanisations est précisément limité. Vivienne Méla soutient l’opinion que le mot verlanisé est souvent limité à une seule signification tandis que le mot de départ peut avoir plusieurs sens.32 Dans son article, elle complète son hypothèse de quelques exemples comme :

32 Vivienne MÉLA : « Parler verlan... », art. cit., p. 57.

31 • [reti] est utilisé pour « tirer un portefeuille » et non pour le mouvement de traction en général. • [keblo] désigne l’action du complice du tireur qui se positionne de manière à empêcher la victime de voir qu’on fouille dans son sac. • être [jegri] signifie « être pris en flagrant délit », on ne l’utilise pas pour une saucisse grillé. • [møka] s’applique à la drogue et non pas à la came (camelote) en général. 33

Les verlanisations comprennent l’expressivité forte et leur valeur est d’une teneur argotique, qui diminue à cause de l’infiltration dans le lexique courant et sous l’effet de la lexicalisation et médiatisation (cf. § I.4).

33 Vivienne MÉLA : « Parler verlan... », art. cit., p. 57.

32 I.6 Fonctions linguistiques du verlan

À la fin, nous incluons encore un chapitre afin de résumer des fonctions du verlan auxquelles nous n’avons pas dédié la section particulière mais dont nous avons parlé à travers tous les chapitres précédents. Audessous, nous avons dressé le tableau récapitulatif des fonctions de notre objet d’étude. Nous avons constaté qu’à cause de l’infiltration des lexèmes en verlan dans la langue courante, il s’avère que toutes les fonctions sont d’une certaine façon éphémères. De plus, nous supposons que la sorte des fonctions est moins importante que le rôle qu’elles jouent, nous tentons donc de les estimer en vertu de cette hypothèse. Du critère de départ nous servent quatre fonctions fondamentales qui sont attribuées au verlan. Il s’agit des fonctions identitaire, ludique, cryptique et initiatique.34 Il faut ajouter de surcroît que nous mettons la fonction identitaire au dessus des autres fonctions parce qu’elle est la plus visible, la plus discutable et elle se pose comme la fonction centrale de l’argot moderne. Cette place lui a été cédée par la fonction cryptique, fonction centrale des argots traditionnels.

Tableau n°4 : Importance des fonctions linguistiques du verlan

identitaire * * *

cryptique *

économique

esthétique

initiatique * Critères fonctionnels Critères ludique *

Légende : (* * *) fonction centrale (*) fonction importante () fonction moins importante

34 Christian BACHMANN, Luc BASIER : « Le verlan... », art. cit., p. 172 – 173.

33 II. RAP FRANÇAIS – domaine de recherche

Le rap pénètre dans le territoire français au début des années 1980 des États Unis. D’abord, ce mouvement artistique se popularise par la voie de la danse mais depuis la fin des années 80, l’expression corporelle devient moins importante. Parallèlement, le rap commence à se poser comme le mouvement musical et culturel spécifique. Manuel Boucher affiche dans son ouvrage qu’à l’époque actuelle, le rap porte en lui les souffrances et les revendications de populations opprimées ou stigmatisées.35 Le rap se substitue aux médias pour manifester contre ce véhicule des stéréotypes éculés et défavorisants. L’objectif de ce chapitre est de donner des informations essentielles sur le rap français en tant que domaine de notre recherche. Nous présenterons brièvement des thèmes dominats (§ II.1) ainsi que la langue des rappeurs (§ II.2) et nous tenterons de révéler les différences entre le rap du Nord et du Sud de la France. Nous finirons par mentionner la problématique du classement de ce genre musical, qui n’est pas si évident qu’il pourrait sembler (§ II.3).

35 Manuel BOUCHER : Rap, expression des lascars, Paris, L’Harmattan 1998, p. 32.

34 II.1 Liberté, Réalité, Vérité – message du rap et ses thèmes dominats

Le rap français est le domaine des jeunes immigrés qui trouvent en lui le moyen de s’exprimer. Hugues Bazin confirme même que le hiphop en France n’aurait pas connu d’existence sans la contribution des immigrations (ou particularismes culturels) portée par des jeunes dans un contexte urbain.36 Le rap français vient de la rue et donne une image de sa culture. Le rappeur est le « porte parole du ghetto ou de la banlieue dans laquelle il vit »37. Il en ressort que les contenus sont très contextualisés et leur but est d’informer comme l’annonce d’ailleurs Cyril Trimaille dans son mémoire :

Le rôle informatif du rap apparaît comme central dans la construction du message, et détermine en grande part les contenus très contextualisés des discours.38

Les morceaux reflètent la réalité quotidienne et manifestent le désaccord de l’auteur. Le rappeur peut puiser dans une large gamme de thèmes variés. Cependant trouver le thème d’une chanson peut être troublé à cause de l’intertextualité. Chacun des textes se pose souvent comme un ensemble cohérent et ils exigent par conséquent la vue complexe.

Trouver le thème particulier d’une chanson n’est pas toujours chose aisée principalement lorsque [...] les textes font l’objet d’un travail énorme et sont riches de sens.39

Nous notons quelques thèmes généralisés qui affleurent dans tout le rap français. C’est par exemple :

36 Henri BAZIN : La culture hiphop, Paris, Desclée de Brouwer 2008, p. 273. 37 Manuel BOUCHER, Rap, expression des lascars... op. cit., p. 150. 38 Cyril TRIMAILLE: De la Planète Mars... Codes, langages, identités : étude sociolinguistique de textes de rap marseillais, Mémoire sous la direction de Jacqueline Billiez, Université Stendhal – Grenoble III, 1999, p. 39. 39 Guillaume KOSMICKI : « L’évolution du groupe Iam : un parcours thématique et musical sensé », in. Paroles et musiques à , Les voix d’une ville, Paris, L’Harmattan 1999, p. 96.

35 1) destin d’un rappeur ou son groupe

J’ai jamais squatté la routine et le manque de vie qui se tasse / Sac à dos, à l’arrache, allez hop, j’me casse / J’vais pas laisser ma vie prisonnière de la leur / Quitte à galérer ici, je m’en vais galérer ailleurs / Tchao, tchao, les éducs ! J’me barre ! (Keny Arkana : J’me barre, Entre ciment et belle étoile, 2006, KEN03)

2) origine, immigration

J’suis originaire d’un port d’esclave / J’ai la peau couleur pétrole / Et ça les colons le savent / J’suis comorien et je suis fier de l’être (Soprano : Puisqu’il faut vivre, Puisqu’il faut vivre, 2007, SOP10)

3) rêves, espoir

Mémoires d’immigrés au goût d’amertume / Départ du pays en quête de fortune / Le cœur à la main prêt à tout reconstruire / Pour effacer la misère d’hier à coup d’avenir (Bakar : Mémoires d’immigrés, Rose du béton, 2007, BAK01)

4) identification, identisation

Chez nous on s’ent fout d’être en vogue / On veut juste faire le tour du monde comme Phileas Fogg / On se moque de leur justice on smoke / Le cannabis pour rester peace et pisse / Sur la police en guise de kiss (Lim feat Boulox : Je rap, Délinquant, 2007, LIB01)

5) violence, délinquance

T’es ma vie, t’es ma weed, mes armes et ma bible, / Une fois vide, la bouteille de Jack sert de cible, / Shoote, chérie suis moi, viens on va shooter le shérif / Puis faire des photomatons sur les radars du periph’ (Don Choa feat Zaho : Lune de miel, Jungle de béton, 2007, DOZ01)

6) problématique de l’argent

Je sais pas comment c’est chez vous / ici l’argent fait la loi / les lois sont faites par ceux qui en ont / les autres affûtent leurs dents

36 (Shurik’n : Où je vis, Où je vis, 1998)

7) critique

Ma ville à allure calme et sereine, mais polluée de la politique à la déchetterie (Ali : Observe, Chaos et harmonie, 2005, ALI03)

8) vie quotidienne

Elle a quitté son coin pour devenir mannequin / Elle est dans l’arrière salle à essuyer des ramequins / C’est la vie quotidienne d’une fille belle et sexy / Qui, malgré les aléas, croque à fond dans la vie (MC Solaar : In god we trust, Chapitre 7, 2007, MCS75)

La diversité des thèmes est commune au rap dans le Nord ainsi que dans le Sud de la France et leur tri n’est limité que par le « conteur » luimême. Nous nous rendons compte que globaliser la scène de rap français en Nord et en Sud n’est pas pertinent parce que chaque artiste est un individu ayant ses spécificités. Sa production est influencée par son profil personnel comportant plusieurs facteurs qui l’inspirent (origine ethnique, âge, milieu social, profession, localité où il vit, situation économique, etc.). En fait, nous pouvons remarquer les nuances entre un rappeur marseillais et son collègue parisien d’une part et entre des rappeurs parisiens d’autre part, car leurs textes reproduisent leur individualité qui les diffère des autres.

37 II.2 Rap comme une « arme verbale »

La langue des rappeurs représente un détour du français académique. Même si le rap se situe à michemin entre le texte et le discours, le destin de sa parole est d’être scandée, oralisée. Les doutes sur la capabilité de la langue française de s’accoutumer aux spécificités du lexique de rap disparaissent au premier coup d’oreille et nous dévoilons sa particularité. Les chansons se posent comme un « puits » inépuisable pour les (socio)linguistes grâce à la créativité lexicale des interprètes. C’est un « mélange de langues »40 dans lequel un élément de la langue B (≠ le français) est introduit dans la langue A (= le français) ou modifié selon les dispositions de la langue A (ex. shoot > shooter). Les textes sont pleins de néologismes, emprunts aux langues étrangères, expressions argotiques, familières ou substandard. En examinant l’expression des rappeurs, nous apercevons vite qu’elle s’approche du discours oral plutôt que l’écrit. La version écrite ne maintient que l’énonciation au cours de laquelle les rappeurs ne respectent pas fréquemment les règles. Hugues Bazin le saisit bien dans son ouvrage en écrivant :

[...] le rappeur ne parle pas « mal » à cause de l’ignorance des règles. Les gros mots, l’argot ou le verlan, le choix et l’articulation des mots obéissent au contraire à un ordonnancement étudié.41

Nous pouvons par conséquent supposer que dans le rap, même des fautes ont du sens et l’interprète a des raisons de les utiliser, quoi qu’elles soient formelles (garder le rythme, créer une rime, éviter la cacophonie, etc.) ou symboliques (trait identitaire).

(Oxmo Puccino feat Bauza : Premier suicide, L’amour est mort, 2001)

40 Cyril TRIMAILLE: De la Planète Mars..., op. cit., p. 111. 41 Hugues BAZIN : La culture hiphop..., op. cit., p. 221.

38 Outre que le choix des unités lexicales est soumis à la forme d’une chanson, les expressions usées sont encore relatives à l’identité. En fait, elles construisent cet ensemble de signes qui distinguent un rappeur de l’autre. Et comme dans le cas des thèmes, le choix des lexies subit une influence de plusieurs facteurs. Nous sommes de nouveau en présent de question de savoir s’il y a des nuances entre le Nord et le Sud. Partant de l’opinion de Monsieur Bazin que les « dimensions régionales » participent aux spécificités langagières42, par déduction, nous pouvons amener à la supposition que les rappeurs parisiens ont une prédilection pour le dialecte d’Îlede France tandis que les rappeurs marseillais préférerons le dialecte provençal. Cette confrontation ne s’opère que sur le plan géographique mais aussi sur le plan social. Personnellement, nous y voyons deux causes : la première ressort de la révolte contre la position de la capitale et son dialecte privilégié dès le Moyen Âge, la seconde est liée à la construction de l’identité (comme nous avons déjà mentionné plus haut), au dégoût pour l’imitation et au besoin d’appartenir à un groupe.

(Keny Arkana feat Kalash L’Afro et RPZ : Marseille, L’Esquisse 2, 2011)

D’après Albert Dauzat, les grands centres urbains se posent pour des « foyers d’irradiation linguistique »43 qui contribuent à la naissance des nouveaux mots. Nous considérons donc la diversité lexicale comme la conséquence de l’existence des parlers aux traits dialectaux. Ces derniers portent, en outre, une marque identitaire. Celui qui dit par exemple « on boulègue » plutôt « on se dépêche » émet le même message, mail il indique en même temps autre chose [...] l’affirmation d’une identité marseillaise.44 À l’égard de la diversité du français, nous nous référons également à l’ouvrage d’Henriette Walter (Le français dans tous les sens ou Le français d’ici, de là, de làbas).

42 Hugues BAZIN : La culture hiphop..., op. cit., p. 49. 43 Albert DAUZAT : La géographie linguistique, Paris, Flammarion 1946, p. 58. 44 LouisJean CALVET : « L’endogène, l’exogène et la néologie : le lexique marseillais », in. Paroles et musiques à Marseille, Les voix d’une ville, Paris, L’Harmattan 1999, p. 61.

39 Il s’avère que les conditions géographiques et sociales jouent le rôle non négligeable pendant le tri du lexique. Nous affichons de nouveau que la division du rap en « du Nord » et « du Sud » est sensiblement globalisante. Il est peu probable que l’expression des rappeurs soit identique, car chaque rappeur a son idiolecte dans lequel nous pouvons dévoiler les traits susceptibles de distinguer l’un de l’autre.

40 II.3 Le rap, « cri d’une jeunesse »

Les rappeurs sont de véritables « chroniqueurs » saisissant la vie de la rue, réagissant à la stigmatisation négative de la part des médias et tentant de dégager les gens défavorisés des clichés éculés.

(Disiz la Peste : Jeune de banlieue, Histoires extraordinaires, 2005, DLP11)

Ok j’suis pas le bienvenu mais je suis là J’accuse les médias de violer mon image Avec des clichés fabriquer pour nous humilier

(Kennedy : Bâtard de Français, Cicatrice, 2009, KND02)

Par conséquent, il n’est pas étonnant qu’il naisse la question si le rap est un mouvement musical ou une expression sociale. Les uns disent que le rap symbolise la face dangereuse d’une jeunesse incontrôlable et étrangère45, les autres se penchent sur l’opinion qu’il s’agit d’un nouveau mode d’expression et de communication avec la jeunesse des classes populaires et l’affirmation d’une société multiculturelle.46 Quoi qu’il soit un mouvement artistique ou une révolte de la jeunesse, il est évident que le rap n’est pas seulement les gros mots. Les textes des chansons sont composés de manière soigneuse et ils reflètent l’individualité de l’auteur. Les rappeurs commentent de divers événements via la musique qui leur sert d’un moyen de donner leur avis en public.

(Diam’s : Petite banlieusarde, Dans ma bulle, 2006, DIA18)

45 Manuel BOUCHER : Rap..., op. cit., p. 18. 46 Ibid.

41 Manuel Boucher définit bien le rap en proclamant que c’est un cri, manifestement très fécond, très créatif, imprégné de nombreuses cultures et de techniques modernes, créé par une jeunesse urbaine qui manifeste par son art et par son énergie le fait qu’elle évolue dans un monde sans frontière.47 À notre avis, il a exprimé de cette façon tout ce que le rap représente. Nous apprécions surtout l’emploi du substantif « cri » étant donné que le message du rap est émis avec violence verbale pour que les auditeurs se rendent compte la profondeur de ses messages.

(Disiz la Peste : Une histoire extraordinaire, Histoires extraordinaires, 2005, DLP09)

47 Manuel BOUCHER : Rap..., op. cit., p. 32.

42 III. MÉTHODOLOGIE

La recherche du présent mémoire de master est fondée sur l’étude du corpus issu du RapCor. Le RapCor est le corpus des chansons de rap français créé, sous la direction de Madame Alena Polická, par les étudiants de français à la Faculté des Lettres de l’Université Masaryk de Brno. Et c’est justement le RapCor qui nous sert en majeure partie de source principale à la naissance de notre corpus contenant 270 chansons au total. Du point de vue général, nous pouvons constater que notre recherche est divisée en plusieurs phases :

1) l’acquisition du matériel pour la création du corpus 2) l’étude des textes des chansons choisies 3) le traitement des données 4) la synthèse des conclusions

III.1 Élaboration du corpus

Dans la première phase, nous nous sommes occupée de la création du corpus. Ce dernier est divisible en deux subcorpus : subcorpus n˚1 (chansons de rap du Nord de la France) et subcorpus n˚2 (chansons de rap du Sud de la France). L’élaboration du corpus a été soumise aux critères suivants :

1) critère géographique (Nord – Sud) 2) critère chronologique (2001 – 2011)

En considération du critère géographique, il faut que les deux subcorpus contiennent le nombre de chansons équilibré. Même si le RapCor est riche en chansons de rap du Nord, surtout de la scène d’ÎledeFrance, il est moins fort quant aux chansons de rap du Sud. De plus, il s’avère qu’à cause d’une énorme production du rap français, il serait convenable que nous définissions encore le critère chronologique. Nous nous sommes donc décidée à travailler sur les chansons parues entre les années 2001 et 2011.

43 Le subcorpus n˚1 a été terminé au mois de décembre. Toutes ses chansons ont été disponibles au RapCor au moment de sa création. Ce subcorpus est caractérisé ainsi :

Tableau n°5 : Structure du subcorpus n°1 – Nord de la France

Subcorpus n°1 – Nord Chanson Interprète Lexème* Lemme*

135 15 11898 8065

* L’occurrence des lexèmes ainsi que des lemmes a été générées à l’aide du logiciel Textométrie dont la capacité est de traiter les informations sur le corpus de texte inséré.

Concernant le subcorpus n°2, le RapCor ne nous a offert qu’une soixante dizaine de chansons. Afin d’obtenir le nombre équilibré, nous avons dû traiter quelques chansons par nos soins. Il était nécessaire de :

1) trouver les textes sur l’Internet

Pour trouver les textes des chansons, nous avons consulté les sites

• http://www.rap2france.com/ • http://www.parolesmania.com/

2) corriger et compléter les textes en réécoutant les chansons

Les textes acquis contenaient souvent les fautes qu’il fallait corriger en considération des règles grammaticales du français standard ainsi que des traits caractéristiques de langue des rappeurs. Par ailleurs, les textes manquaient souvent quelques passages chantés que nous avons dûs rendre complets dans la mesure la plus possible. En réécoutant les morceaux, nous nous sommes heurtée à certaines difficultés concernant l’emploi du lexique non standard (termes argotiques, régionalismes, emprunts aux langues étrangères, sigles, etc.). N’étant pas capable de dévoiler les

44 expressions absentes, nous avons noté « XXX » dans le texte ; il s’agit le plus souvent des noms propres ou des unités non lexicalisées. Nous n’estimons pas que ces termes manquants puissent considérablement fausser les résultats de notre recherche.

3) diviser les textes en parties (couplet, refrain, intro, interlude et outro) ainsi qu’attribuer le nom de l’artiste à la voix chantante

La division du texte en couplets, refrains ou, le cas échéant, en d’autres parties ainsi que la connaissance de celui qui chante jouent le rôle non négligeable dans notre recherche. C’est la raison pour laquelle nous avons été forcée de noter ces informations si elles n’étaient pas indiquées.

4) importer les documents Word en Microsoft Office en tant que texte codé (sous format « .txt ») et lemmatiser ces documents à l’aide du logiciel TreeTagger

Tous les documents des chansons complétés sont enregistrés sous format « .doc » mais il nous faut obtenir le format « .txt » pour pouvoir lemmatiser. Nous enregistrons par conséquent les « .doc » en Microsoft Office sous le texte codé en éditant les paramètres du filtre (Europe occidentale ISO88591). Les documents « .txt » sont introduits dans le TreeTagger. Ce logiciel complète chaque expression lexicalisée d’une abréviation morphologique et de son lemme. Ce fichier est enregistré sous format « .ods »

5) corriger et compléter les documents « .ods »

Comme nous avons déjà mentionné, le logiciel TreeTagger complète les lexèmes lexicalisés, néanmoins en ce qui concerne les expressions non lexicalisées, les noms propres, les abréviations, les apocopes, les aphérèses ainsi que les emprunts et le lexique substandard, ceuxci exigent le complètement manuel au cours duquel nous avons consultés les

45 dictionnaires, les sites et les forums français pour trouver le sens le plus juste possible.

6) convertir les « .ods » en « .xlm » et importer les « .xlm » en logiciel Textométrie

Textométrie est l’ensemble des programmes, procédés et règles facilitant le travail avec des corpus textuels, qui est disponible sur le site noté au dessous. Le logiciel traite les documents enregistrés sous format « .xlm » et il aide ses usagers à s’orienter avec aisance, vite et bien dans le grand corpus de texte comme il est le nôtre.

• http://textometrie.enslyon.fr/

Les chansons traitées de cette façon peuvent être introduites dans le RapCor et devenues sa partie intégrante. Nous avons donc d’une part participé à l’élargissement du RapCor et d’autre part atteint le nombre équilibré de chansons de rap du Sud de la France. Le subcorpus n°2 est caractérisé de cette façon :

Tableau n°6 : Structure du subcorpus n°2 – Sud de la France

Subcorpus n°2 – Sud Chanson Interprète Lexème* Lemme*

135 13 13016 8467

* L’occurrence des lexèmes ainsi que des lemmes a été générées à l’aide du logiciel Textométrie dont la capacité est de traiter les informations sur le corpus de texte inséré.

Le subcorpus n°2 englobe soixanteseize chansons qui ont été disponibles au RapCor et cinquanteneuf chansons qui ont été traitées par nos soins et introduites dans le RapCor ultérieurement. Les albums dont les morceaux ne sont pas issus du RapCor sont présentés dans le tableau suivant.

46 Tableau n°7 : Albums non issus du RapCor

Nombre Album Parution Interprète de chansons Block Party 2002 Psy 4 de la Rime 14 L’Esquisse 2 2011 Keny Arkana 16 Puisqu’Il Faut Vivre 2007 Soprano 16 Rap Stories 2007 Faf Larage 13

Quant aux paroles des chansons de Keny Arkana nous les avons trouvées sur son site officiel (http://www.kenyarkana.com/) et nous les considérons comme la version « pochette », officielle. Pour ce qui est les chansons des interprètes restants, nous n’avons eu à la disposition que leurs versions écrites par les admirateurs. Le graphe qui suit schématise le rapport entre le nombre de chansons issues et non issues du RapCor et entre le nombre de chansons avec et sans version « pochette ».

Graphe n°1 : Nature des chansons de notre corpus

total (100%) = 270 chansons

250

200

150

Nombre de chansons de Nombre 100 211

sans VP 50 43 avec VP 16 0 autre source RapCor

Légende : VP → version pochette

47 Il s’avère que les chansons originaires du RapCor occupent la partie prépondérante du nombre total de chansons (78%). Seul 22% remplissent les chansons provenant d’autres sources. À ces dernières appartiennent les chansons sans version « pochette » qui ne sont pas pourtant si nombreuses (16% du nombre total). Finalement, nous ajoutons les données sur tout le corpus.

Tableau n°8 : Structure du corpus – Nord et Sud

Corpus – Nord et Sud Chanson Interprète Lexème* Lemme*

270 28 19595 12354

* L’occurrence des lexèmes ainsi que des lemmes a été générées à l’aide du logiciel Textométrie dont la capacité est de traiter les informations sur le corpus de texte inséré.

Interprètes

Avant de choisir les interprètes, nous avons établi, au nom de la convention, la frontière pour décomposer la scène musicale française en deux parties : Nord et Sud. Le cours de cette démarcation est représenté sur la carte régionale française, située à la page suivante. Les régions qui se trouvent audessus de cette ligne se posent comme « Nord » et comme « Sud » nous considérons celles qui sont au dessous d’elle. Ensuite, nous avons compulsé le site d’Internet de Banlieue Connexion (www.banlieueconnexion.com/france.html) sur lequel nous nous sommes familiarisée avec les rappeurs coreprésentant la scène musicale française. L’avantage de ce site repose sur le regroupement des artistes selon les régions ce qui nous a aidé à nous orienter bien et vite. Finalement, nous avons choisi les interprètes.

48 Carte n°1 : Division de la scène musicale française

NORD

démarcation

SUD

Nous rappelons que notre corpus est représenté par vingthuit interprètes essentiels. Nous les avons choisis suivant les deux critères cités au départ du paragraphe III.1. Les profils des rappeurs ainsi que des groupes de rap sont présentés brièvement dans les tableaux annexés.

49 Tableau n°9 : Rappeurs provenant du Nord de la France

Subcorpus n°1 – Nord Scène musicale Rappeur Vrai nom Année Origine ethnique ABR (département)

Ali Yacine Sekkoumi 1975 marocaine Paris ALI sénégalofranco Booba Élie Yaffa 1976 HautsdeSeine BOO marocaine Diam’s Mélanie Georgiades 1980 francochypriote Essonne DIA Sérigne Disiz La Peste 1978 sénégalobelge Essonne DLP M’Baye Gueye Flynt Julien Vuidard 1977 française Paris FLY

Kennedy Ali Touré 1982 sénégalaise ValdeMarne KND

LIM Salim Lakhdari 1979 algérienne HautsdeSeine LIM

MC Solaar Claude M’Barali 1969 sénégalotchadienne Paris MCS

Oxmo Puccino Abdoulaye Diarra 1974 malienne Paris OXM Abdelkarim RimK 1978 algérienne ValdeMarne RIM Brahmi Benalla Sefyu Youssef Soukouna 1981 sénégalaise SeineSaintDenis SEF

Sinik Thomas Gerard Idir 1980 algérienne Essonne SIN

Légende : Année → année de naissance ABR → abréviation attribuée aux rappeurs

50 Tableau n°10 : Groupe de rap provenant du Nord de la France

Subcorpus n°1 – Nord Hocus Pocus (1995) – HPO Scène musicale Rappeur Vrai nom Année Origine ethnique ABR (département) 20Syl Sylvain Richard – – SYL

Autres membres DJ Greem Loire Atlantique David Le Deunff – Hervé Godard Matthieu Lelièvre Antoine SaintJean Les Sages Poètes De La Rue (1987) – LSP Scène musicale Rappeur Vrai nom Année Origine ethnique ABR (département) Dany Dan Daniel Lakoué – centrafricaine DDA JeanFrançois Melopheelo 1971 béninoise HautsdeSeine MEL Kodjo JeanJacques Zoxea 1974 béninguadeloupéenne ZOX Kodjo Sniper (1997) – SNI Scène musicale Rappeur Vrai nom Année Origine ethnique ABR (département) Tunisiano Bachir Baccour 1979 tunisienne TUN Aketo Ryad Selmi 1980 algérienne AKE Blacko48 Karl Appela 1979 réunionnaise Vald’Oise BLA Autres membres – DJ Boudj49

Légende : Année → année de naissance ABR → abréviation attribuée aux rappeurs • Le champ coloré contient titre du groupe, année de fondation et abréviation attribuée au groupe.

48 Blacko – ancien membre, depuis 2007 il suit la carrière solo. 49 DJ Boudj – ancien membre.

51 Tableau n°11 : Rappeurs provenant du Sud de la France

Subcorpus n°2 – Sud Scène musicale Rappeur Vrai nom Année Origine ethnique ABR (département) Philippe Fragione 1968 italienne BouchesduRhône AKH

Don Choa François Dilhan 1974 – BouchesduRhône DON malgache Faf Larage Raphaël Mussard 1971 BouchesduRhône FAF réunionnaise Fayçal – – – Gironde FAY

Freeman Malek Brahimi 1972 algérienne BouchesduRhône FRE

Kalash L’Afro – 1979 tunisienne BouchesduRhône KAL

Keny Arkana Keny Arkana 1982 argentine BouchesduRhône KEN

L’Algérino Samir Djoghlal 1981 algérienne BouchesduRhône LAL

Soprano Saïd M’Roumbaba 1979 comorienne BouchesduRhône SOP

Légende : Année → année de naissance ABR → abréviation attribuée aux rappeurs

Tableau n°12 : Groupe de rap provenant du Sud de la France

Subcorpus n°2 – Sud Eska Crew (1998) – ESK Origine Scène musicale Rappeur Vrai nom Année ABR ethnique (département) Eska – – marocaine ESK

Autres membres HKidam Loire DJ Wong – DJ Slim Kenhzo Rewind

Fonky Family (1994) – FFA Origine Scène musicale Rappeur Vrai nom Année ABR ethnique (département) Christophe espagnol Le Rat Luciano 1976 BouchesduRhône RAT Carmona martiniquaise

52 Fonky Family (1994) – FFA

Sat l’Artificier Karim Haddouche 1975 algérocorse SAT

Don Choa François Dilhan 1974 – DON

Menzo Mohamed Ali 1975 comorienne MEN

Fel Karim Laoubi – – FEL

Autres membres – Djel Pone

IAM (1989) – IAM Origine Scène musicale Rappeur Vrai nom Année ABR ethnique (département) Akhenaton Philippe Fragione 1968 italienne AKH malgache Shurik’n Geoffroy Mussard 1966 SHU réunionnaise Freeman Malek Brahimi 1972 algérienne FRE BouchesduRhône Autres membres

Kheops – Imhotep Kephren

Psy 4 De La Rime (1995) – PSY Origine Scène musicale Rappeur Vrai nom Année ABR ethnique (département) Kassim Djae 1982 comorienne ALO

Vincenzo Iliassa Issilame 1980 comorienne VIN Saïd BouchesduRhône Soprano 1979 comorienne SOP M’Roumbaba Autres membres – Sya Styles

Légende : Année → année de naissance ABR → abréviation attribuée aux rappeurs • Le champ coloré contient titre du groupe, année de fondation et abréviation attribuée au groupe.

Pendant que nous dressions ces tableaux, il s’est montré qu’il n’était pas facile de trouver certaines données sur les artistes. Nous présumons qu’ils ne veulent pas

53 afficher les informations personnelles comme le vrai nom, l’année de naissance ou l’origine ethnique pour des raisons diverses. Nous avons essayé de contacter une dizaine de rappeurs par la voie de leurs sites d’Internet officiels mais seul Flynt et Eska nous ont répondu. À cette place, nous nous permettons de citer l’extrait de notre correspondance avec le rappeur Eska. Nous mettons en gras la phrase qui a attiré notre attention. Il nous a écrit :

mes origines [...] sont marocaine , kenhzo est bosniaque , hkim est italien , wong est français , rewind est franco algerien et enfin slim est algerienne ! je precise que nous sommes tous français et aucun d entre nous n est banlieusard...

Sa dernière phrase nous incite à réfléchir à la question d’origine ethnique qui paraît sensible pour les personnes issues de la seconde génération d’immigrés. Comme nous avons demandé les données personnelles à Eska, nous lui avons présenté brièvement l’objectif de notre mémoire de master en soulignant la problématique de l’emploi du verlan dans le lexique des rappeurs. Sa remarque sur les banlieusards nous met en évidence que le stéréotype attribuant l’utilisation du verlan aux personnes qui habitent la banlieue est enraciné dans son imagination. Maintenant nous revenons à la structure de notre corpus afin d’afficher encore quelques informations. Nous pouvons constater que l’âge moyen des rappeurs est 35,5 ans. La nuance entre les subcorpus est presque nulle (subcorpus n°1 – 35 ans / subcorpus n°2 – 36 ans). Tous les rappeurs sont de la nationalité française, néanmoins dans la majorité des cas, ils sont d’origine ethnique étrangère, à l’exception du rappeur Flynt qui est « Français de souche ». Chez quatre rappeurs, cette information nous reste inconnue. En ce qui concerne la représentation des régions, il s’avère que dans le subcorpus n°1, tous les interprètes viennent de la région d’ÎledeFrance, seul Hocus Pocus domine en région de Pays de la Loire. Dans le subcorpus n°2, c’est la région de ProvenceAlpesCôted’Azur qui compte d’une représentation majoritaire. Il n’y a que deux interprètes provenant d’autres régions : Fayçal, rappeur d’Aquitaine et Eska Crew, groupe de RhôneAlpes. Finalement nous ajoutons que dans notre corpus, il apparaît bien des chansons avec « featuring » ou « feat. ». Étant donné que les artistes qui participent aux morceaux de nos interprètes essentiels sont nombreux, leur liste se trouve dans

54 l’annexe (Annexe 1, tab. n°1 et 2, p. 133135). Nous y présentons également la liste des sites sur lesquels nous avons cherché les données utiles à dresser les tableaux.

Chansons

Deux facteurs ont déterminé le choix des chansons dont la liste se trouve dans l’Annexe 1 (Annexe 1, tab. n°3, p. 136145). C’était, premièrement, le tri des interprètes, secondement, les limites du RapCor. Il convient de dire que nous avons voulu travailler exclusivement sur les chansons qui font partie du RapCor. Ce corpus comprend de centaines de textes officiels des chansons de rap français, dont nous avons pu choisir. S’il était possible de puiser dans le RapCor, nous l’avons préféré. Dans le cas du subcorpus n°2, nous avons été forcée à procéder à la solution de rechange pour atteindre le nombre équilibré de chansons. Hélas, cette tendance a abouti à la disproportion entre les « minicorpus » de chaque rappeur qui deviendra plus tard l’obstacle qui opposera à la réalisation d’une analyse de bonne qualité (voir § VI.2). Le récapitulatif qui suit présente approximativement les généralités sur les « minicorpus » de chaque interprète essentiels.

55 Tableau n° 13 : Généralitées sur les « minicorpus » des interprètes essentiels

Chansons Chansons Interprète Album Lexèmes de l’album analysées ALI Chaos & Harmonie 14 14 2418 BOO Panthéon 13 12 2205 DIA Dans Ma Bulle 15 14 2549 Les Histoires Extraordinaires DLP 17 13 2063 D’un Jeune De Banlieue FLY J’éclaire Ma Ville 15 7 1389 HPO Place 54 15 12 1714 KND Cicatrice 15 3 656 LIM Délinquant 32 7 1228 LSP Après L’orage 13 7 1405 MCS Chapitre 7 18 12 1493 Subcorpus n°1 – Nord – Nord n°1 Subcorpus OXM L’amour Est Mort 22 13 1961 RIM L’enfant Du Pays 15 5 1378 SuisJe Le Gardien SEF 17 7 1390 De Mon Frère ? SIN Sang Froid 17 5 1085 SNI Trait Pour Trait 15 4 1224 Chansons Chansons Interprète Album Lexèmes de l’album analysées AKH Soldats De Fortune 23 15 3451 Vapeurs Toxiques 17 4 DON 1353 Jungle De Béton 16 3 ESK Instinct De Survie 15 5 831 FAF Rap Stories 14 13 2152 FAY Secret De L’oubli 12 10 2421 FFA Marginale Musique 15 15 2671 IAM 18 9 2357 KAL Cracheur De Flammes 16 1 299

Subcorpus n°2 – Sud – Sud n°2 Subcorpus Entre Ciment Et Belle Étoile 19 6 KEN 3320 L’esquisse 2 20 16 LAL Mentalité Pirate 16 6 1318 PSY Block Party 14 14 2831 SOP Puisqu’Il Faut Vivre 17 16 2280 (KAL, FRE) French Connection ? 2 218 / 198

56 IV. VARIABILITÉ DES LEXÈMES EN VERLAN

Après l’élaboration du corpus, nous avons procédé à la lecture des textes afin de répertorier les lexèmes verlanisés. Bientôt, nous avons remarqué la variabilité graphique de nombreuses verlanisations. Ce chapitre sera consacré à l’étude de ces variantes graphiques, si fréquentes dans notre corpus (§ IV.1). Nous nous focaliserons sur la typologie des procédés de codage plus complexes, sur les modifications graphiques ainsi que sur le verlan à partir des emprunts, car tout cela pose le problème du repérage des verlanisations dont les signifiants sont difficilement perceptibles.

57 IV.1 Variantes graphiques des verlanisations

Avant que de nous prononcer sur la nature des variantes graphiques (abrégé en VG), il serait utile de préciser quelle forme des unités lexicales nous considérons comme cette variante. Il s’agit de la forme dont l’orthographe est proposée par les interprètes euxmêmes dans les versions « pochette », étant sans modification de notre part. Dans notre corpus, nous avons relevé 201 VGs (Annexe 2, tab. n°1, p.146 150) que nous avons réduites par la lemmatisation en 186 variantes50 (abrégé en VG L). Le schéma n°représente le nombre des VGs et des VGLs dans nos subcorpus.

Schéma n°3 : Nombre de variantes graphiques (VGs) et de variantes graphiques – lemmes (VGLs)

Corpus 201 VGs 186 VGLs

Subcorpus n°1 – Nord Subcorpus n°2 – Sud 192 VGs 30 VGs 180 VGLs 27 VGLs

Le nombre total des VGs englobe également les verlanisations comme [kaj], [ts], [zik] et [znεs] que nous estimons comme les verlanisations apocopées de

[kaja], [tspe], [zikmy] et [znεsbi]. Nous nous rendons compte qu’elles peuvent être créées par l’aphérèse à partir des lexèmes non verlanisés (racaille, pétasse, musique, bizness)51. Néanmoins, nous nous penchons pour la première possibilité de création, parce que notre corpus contient les verlanisations des termes en question et que la

50 Même si ces variantes sont lemmatisées, elles ne sont pas encore désambiguïsées. 51 cf. JeanPierre GOUDAILLIER : Comment tu tchatches !

58 troncation de la fin d’un mot est plus fréquente en langue française que la chute de son début.52 Le paragraphe précédent fait voir que le repérage des lexèmes en verlan a été compliqué dès le départ à cause d’un nombre de facteurs. C’étaient surtout l’emploi de plusieurs procédés de formation à la fois, les notations graphiques variétées et/ou le verlan à partir des emprunts aux langues étrangères, ce qui rendaient les signifiants difficilement répertoriables.

Typologie des procédés de codage complexes

La permutation syllabique de type verlanesque est fréquemment suivie d’un autre procédé de formation des unités lexicales. Dans notre corpus, nous avons dévoilé aussi bien les lexèmes simplement verlanisés qu’un nombre important de verlanisations qui ont été suivies (ou précédées) d’un autre procédé de création. Dans le tableau cidessous, nous présentons quelques exemples. Les procédés de formation de chaque variante graphique sont notés dans la liste des VGs des verlanisation. Si le processus n’est pas tellement évident, nous préférerons saisir la transformation sous forme de transcription phonétique (Annexe 2, tab. n°1, p. 146150).

Tableau n°14 : Typologie des procédés de codage complexes exemples

Procédé de formation Variante graphique och, barjot, bledia, caillera, çoncal, VERL deurvi, ouf, péra, renoi, ro, rotteca, scarla, stepo, talfute, zen... barge, beuh, brelic, caille, keuf, maness, VERL + APO skeud, tasse, tess, tièpe, trom, zeil’, zique... VERL + APO + d’un autre procédé teuteu, tiex VERL + RED roro

Synchronie Synchronie VERL + RES rabzouz VERL + VERL carna, rebeu VERL + plusieurs procédés zeb, zonz VERL + chute d’un son bouldé, goutdé, mifa

52 Maurice GREVISSE, André GOOSSE : Le bon usage, grammaire française, Bruxelles, De Boeck & Larcier s.a., 2008 (14e éd.), p. 202 – 203.

59 APH + VERL cainri

APO + VERL cromi, vêtsur Diachronie Diachronie

Légende : VERL → verlan RES → resuffixation APO → apocope APH → aphérèse RED → redoublement hypocoristique

La liste des VGs (Annexe 2, tab. n°1, p. 146150) nous montre que l’usage de plusieurs procédés de formation crée des formes originales, dont les signifiants semblent éloignés des mots de départ. Nous notons quelques exemples pour illustrer les difficultés concernant le déchiffrage des verlanisations. Par exemple dans la chanson Tallac de Booba, nous avons aperçu la désignation zeb (Passemoi la zeb et la boisson Négro, BOO01, subcorpus n°1). Il s’agit du verlan de herbe suivi de trois autres procédés de formation (apocope 1, resuffixation, reverlanisation, apocope 2) :

[εb] > [εbø] > [bøε] (beuher) > [bø] (beu) > [bœz] (beuze) > [bœzø] > [zøbø] > [zœb] (zeb / zeub)

Ensuite, nous pouvons mentionner le terme zonz qui a été employée dans la chanson Génération Scarface d’Ali (La réalité, c’est que les zonz sont pleines, ALI02, subcorpus n°1), No. 10 de Booba (Alors j’serai d’ceux qui faut remettre en zonz, BOO03, subcorpus n°1) et Entre 2 flammes de L’Algérino (te parlent de zonz pour faire décoller leurs ventes, LAL05, subcorpus n°2). Cette variante est à l’origine le prison (verlan, apocope 1, redoublement hypocoristique, apocope 2) :

[piz]̃ > [zp̃ i] (zonpri) > [z]̃ (zon) > [zz̃ ]̃ (zonzon) > [zz]̃ (zonze)

Nous citons encore la reverlanisation du terme beur qui luimême est le verlan d’Arabe. Le rebeu est trouvable dans la chanson La fin de leur monde d’Akhenaton (Nous complexé, si peu sûr de soi, on s’interpelle entre nous comme rital, rebeu ou renoi, AKS01, subcorpus n°2) et Dans la tête d’un jeune Beur de RimK (Depuis la

60 guerre, méprisés, indésirables à la télé y’a des rebeus sur le câble Branchés, RIM02, subcorpus n°1). La naissance de rebeu peut être transcrite ainsi :

[aab] > [aabø] > [bøa] > [bœ] (beur) > [bøø] > [øbø] (rebeu / reubeu)

À partir du tableau Variantes graphiques des verlanisations (Annexe 2, tab. n°1, p. 146150) nous avons créé le graphique qui visualise la représentation des procédés de codage dans le corpus entier. Il en résulte que nos rappeurs utilisaient le plus souvent le verlan ou le verlan apocopé. Le codage plus complexe n’était pas rare.

Graphe n°2 : Structure du procédé de codage (VGL – corpus entier)

2% total (100%) = 186 VGLs 3% 6% VERL 2% VERL + APO

VERL + d'autre procédé 24% de formation VERL + plusieurs 63% procédés de formation VERL + chute d'un son ou modification phonique procédé de formation + VERL

Légende : VGL → variante graphique – lemme VERL → verlan APO → apocope procédé de formation → redoublement hypocoristique, resuffixation, troncation, reverlanisation

En observant la situation au niveau des subcorpus, nous remarquons que dans le subcorpus n°2, le verlan apocopé est plus fréquent que le verlan « simple ». Il est donc probable que les rappeurs du Sud profitent de la fonction économique du verlan plutôt que les rappeurs du Nord. Nous verrons si cette hypothèse sera confirmée au niveau des lemmes.

61 Graphe n°3 et 4 : Structure du procédé de codage (VGL – subcorpus n°1 et 2)

total (100%) = 180 VGLs 6% VERL 3% 1% VERL + APO 24% VERL + VERL

VERL + chute d'un son ou modification phonique 66% VERL + plusieurs procédés de formation

total (100%) = 27 VGLs 7% VERL 11% 36% VERL + APO 4% VERL + VERL

VERL + chute d'un son ou modification phonique VERL + plusieurs procédés 42% de formation

62 Nature des modifications graphiques

Outre l’emploi de plusieurs procédés de création, c’est la notation graphique des verlanisations qui pose d’autres difficultés concernant le décodage des mots de départ. Le tableau cidessous illustre quelques exemples de la problématique en question.

Tableau n°15 : Modifications graphiques

Phonème Graphème Variante graphique Transcription Base c ◦ caille, kaill [kaj] < [kajøa] < [akajø] < [akaj] ◦ racaille [k] k ◦ tierkar, tierquar [tjeka] < [katje] ◦ quartier que ◦ zic, zik, zique [zik] < [zikmy] < [myzik] ◦ musique c [s] ce ◦ tèc’, tèce, tess [tεs] < [tesi] < [site] ◦ cité ss qs [ks] ◦ tiéqs, tiex [tjeks] < [tjeka] < [katje] ◦ quartier x ll ◦ lletsbi, yébis [jebi] < [bije] ◦ billet [j] y ◦ yégri [jegi] < [gije] ◦ grillé in ◦ dreupin [døp]̃ < [pd̃ ø] < [pd̃ ] ◦ peindre [ɛ̃] ym ◦ tymp [tp]̃ < [tpy]̃ < [pyt]̃ ◦ putain ge [] ◦ barge, barje [ba] < [ba] < [ba] ◦ jobard je

Les changements sur le plan graphique visent fréquemment à simplifier l’orthographe (ex. verlan d’africain > [kfi] écrit k’unfri ; verlan de peindre > [døp]̃ écrit dreupin ; verlan apocopé de racaille > [kaj] écrit kaill ; etc.), en même temps, ils posent le problème au décodage. Nous avons mis à l’analyse la liste des VGs dont il résulte que le subcorpus n°1 est plus riche en modifications graphiques que le subcorpus n°2. Il est donc probable que les rappeurs du Nord de la France réaniment la valeur du verlan qu’ils utilisent pour exprimer leur identité. Par contre, les rappeurs du Sud se contentent des variantes en voie de lexicalisation (Annexe 2, tab. n°2, p. 151155). Nous tenons à faire ici un commentaire sur la notation du schwa qui n’a pas non plus d’orthographe unifiée comme on peut voir dans le tableau suivante.

63 Tableau n°16 : Variantes graphiques du schwa

Mot de départ Transcription Notation barbe [bab] > [babø] > [bøba] bebar boîte [bwat] > [bwatø] > [tøbwa] teboi diable [djabl] > [djablø] > [blødja] bledia chnek [nεk] > [nεkø] > [køne] keshné chnouf [nuf] > [nufø] > [fønu] feshnou flambe [flb]̃ > [flbø]̃ > [bøfl]̃ beflan frère [fε] > [fεø] > [øfe] refré louche [lu] > [luø] > [ølu] chelou lourd [lu] > [luø] > [ølu] relou

[ø] > e[ø] > merde [mεd] > [mεdø] > [dømε] demer noir [nwa] > [nwaø] > [ønwa] renoi note [nt] > [ntø] > [tøn] teno phase [faz] > [fazø] > [zøfa] zefa poste [pst] > [pstø] > [støp] stepo rap [ap] > [apø] > [pøa] pera soupe [sup] > [supø] > [pøsu] pesou verre [vε] > [vεø] > [øve] revé arabe [aab] > [aabø] > [bø(a)a] > [bœ] beur disque [disk] > [diskø] > [skødi] skeudi femme [fam] > [famø] > [møfa] > [mœf] meuf fesse [fεs] > [fεsø] > [søfe] > [sœf] seuf fête [fεt] > [fεtø] > [tøfe] > [tœf] teuf herbe [εb] > [εbø] > [bøε] beuher jambe [b]̃ > [bø]̃ > [bø]̃ > [bœ] beuj mère [mε] > [ mεø] > [øme] > [œm] reum moche [m] > [mø] > [ømo]> [œm] cheum [ø] > ( [œ] ) > eu[œ] ) ([ø] > peindre [pd̃ ] > [pd̃ ø] > [døp]̃ dreupin père [pε] > [pεø] > [øpe] > [œp] reup seum [sœm] > [sømø] > [møsø] meusseu sœur [sœ] > [sœø] > [øsø] > [œs] reus

En vertu du tableau supra, il est possible d’exposer quelques règles concernant la notation du schwa dans les textes des chansons de rap français :

1) graphie « e » domine à l’intérieur des mots issus de l’inversion graphique • ex. diable > bledia, louche > chelou, merde > demer

2) graphie « e » apparaît dans les VGs au moment où le signifiant de leur mot de départ se termine en consonne

64 • ex. lourd > relou, noir > renoi, rap > pera

3) graphie « eu » s’emploie notamment pour les verlanisations apocopées • ex. jambe > beuj, moche > cheum, père > reup

Nous pouvons cependant voir quelques variantes qui dévient de nos règles (ex. herbe > beuher (1), seum > meuseu (2)). Ces exceptions pourraient prouver le fait que l’orthographe des verlanisations n’est pas codifiée (rappelons que le verlan est une pratique orale). Parmi les VGs déjà citées, il est possible de trouver un nombre d’exemples qui le confirment.

Verlan à partir des emprunts

Les rappeurs ne puisent pas seulement dans la langue française. Dans le rap, le verlan s’applique en outre sur les emprunts aux langues étrangères ce qui ne nous a pas également facilité le repérage.

Tableau n°17 : Verlanisations des emprunts Mot Verlanisation Emprunt à Procédé de formation Employée par de départ (VG) teshmi Lim (LMA01, sub n°1) allemand schmitt VERL teschmi Lim (LIB01, sub n°1) dealer VERL lerdea Lim (LID01, sub n°1) VERL skunk keskon Booba (BOO03, sub n°1) anglais modification phonique shit VERL APO RED teuteu Ali (ALI08, sub n°1) speed VERL deuspi Sefyu (SEF03, sub n°1) arabe seum VERL meusseu Booba (BOM01, sub n°1) Booba (BOO03, sub n°1) VERL APO italien calibro brolic Lim (LIM01, sub n°1) romani vago VERL gova Sefyu (SEF02, sub n°1)

Même si les verlanisations des emprunts ne sont pas nombreuses, il est incontestable que les rappeurs verlanisent le plus souvent les anglicismes. Dans la majorité des cas, il s’agit des termes qui se rapportent aux drogues. Généralement, nous pouvons constater que le verlan à partir des emprunts n’est pas tellement adopté par les rappeurs de notre corpus. C’est un élément

65 apparaissant dans le lexique de quatre interprètes d’ÎledeFrance. Ce petit acquis souligne pourtant la créativité lexicale des rappeurs provenant de la région parisienne.

Pour conclure, il convient d’annoncer que ce sont juste les variantes graphiques qui reflètent l’individualité des artistes. Les changements apportés sur le plan graphique sont visibles dans le subcorpus n°1 plutôt que dans le subcorpus n°2. Nous pouvons donc proclamer que les rappeurs du Nord de la France sont les « maîtres de verlan », tandis que dans le Sud, nous voyons la tendance à emprunter les verlanisations lexicalisées ; la fonction identitaire semble atténuée au littoral Méditerranéen.

66 IV.1.2 Pseudonyme en verlan

En étudiant les textes, nous avons pu constater qu’à côté de nombreuses VGs, notre corpus contenait également trois pseudonymes en verlan : Keydj, RimK, Scred (Connexion).

C’est sur le terrain que la réalité s’estime / Et les destins se croisent : Dray Joss et les gosses du ghetto / Keydj, J.P., Général, Farid direction Palestine (ALI : La vérité reste la vérité, ALI06, subcorpus n°1)

Vitry – Orly – Camille Groult – DemieLune Zoo – Kéry James – Rim K (RIM feat KER : Intact, RIJ01, subcorpus n°1)

Zone Sensible, Octobre et la Scred (FLY : Mes sources, FLY03, subcorpus n°1)

Même si nous avons décidé de les détacher des statistiques car il s’agit des noms propres, ils font l’objet de ce chapitre. À cet égard, nous ne nous sommes pas cantonnée dans les textes de corpus. Nous avons consulté la liste de nos rappeurs essentiels (voir tab. n°9 – 12, p. 5153), qui nous a montré que chaque rappeur opère sous un nom d’emprunt, sauf Keny Arkana. Trois pseudonymes se manifestent en version verlanisée : 20Syl, RimK, Sefyu. Il s’agit sans exception des prénoms verlanisés des rappeurs du Nord de la France. En vue de trouver au moins un interprète du Sud avec « pseudo » verlanisé, nous avons examiné également les pseudonymes des « featurings » (Annexes 1, tab. n°1 et 2, p. 133135). Nous n’en avons découvert que trois verlanisations : Aty.K, Keurspi, Keydj. Alors que Keydj et Aty.K sont des artistes de la région d’Îlede France, Keurspi est le rappeur d’Aquitaine. Nous savons avec certitude que 32 interprètes de notre corpus proviennent du Sud de la France, seul un rappeur d’entre eux a verlanisé son pseudonyme. En tant que mot de départ lui a servi l’anglicisme speaker dont la variante finale est Keurspi ([spikœ] > [kœspi]). Cette transformation correspond au verlan « simple » avec la modification graphique suivant l’orthographe française. On dirait : rien d’extraordinaire. Cependant Keurspi a prouvé son originalité juste par l’emploi du

67 verlan, de plus dans le pseudonyme. La permutation syllabique de type verlanesque n’est pas tellement caractéristique du Sud de la France ce qui s’affirme déjà dans le cas des variantes graphiques. Par contre, les rappeurs du Nord ne cessent de montrer leur créativité. Il paraît quand même que les pseudonymes en verlan sont plutôt rares parmi les rappeurs français.

Tableau n°18 : Pseudonymes verlanisés

Pseudonyme Procédé À partir de... Transcription Région 20Syl VERL Sylvain [silv]̃ > [vsil]̃ Pays de la Loire Aty.K VERL + RES Katy [kati] > [atik] > [atika] ÎledeFrance Keurspi VERL speaker [spikœ] > [kœspi] Aquitaine Keydj VERL + APO (disc) jockey [doke] > [kedo] > [ked] ÎledeFrance Scred VERL + APO discret [discrε] > [skedi] > [skεd] ÎledeFrance (Connexion) Sefyu VERL Youssef [jusef] > [sefju] ÎledeFrance RimK APH + VERL Abdelkarim [kaim] > [imka] ÎledeFrance

Légende : VERL → verlan RES → resuffixation APO → apocope APH → aphérèse

Il s’avère que le berceau des pseudonymes verlanisés est la région d’Îlede France. Mais notre corpus ne nous permet pas d’évaluer cette problématique de façon plus détaillée parce qu’il n’englobe pas les représentants de toutes les régions françaises. Nous ne déduisons que la diminution des lexèmes en verlan s’effectue au fur et à mesure qu’on s’éloigne de Paris. En plus de cela, il paraît que les rappeurs ont tendance à mettre au verlan les noms propres ou les emprunts à une langue étrangère. Pourquoi verlanisentils leurs prénoms ? Visentils à masquer son étymologie ? Ou, par contre, veulentils souligner que leurs racines se trouvent en dehors de la France et qu’ils ne les abandonnent pas même si leur nationalité est française ? Nous pourrions encore nous poser les questions de ce typeci, mais sans donner la réponse laconique. Pourtant, il est évident que même dans le cas des pseudonymes, la fonction identitaire joue un rôle non négligeable.

68 V. QUESTIONS PRATIQUES DE LA LEMMATISATION DES LEXÈMES EN VERLAN

La multiplicité des variantes graphiques verlanisées pose les difficultés liées à la désambiguïsation. En envisageant de désambiguïser ces variantes et de définir leurs lemmes de façon univoque, nous avons proposé une analyse comparative entre les variantes graphiques du corpus et les entrées des dictionnaires. Cette analyse a fait voir que la lemmatisation ne pouvait pas se faire automatiquement car les dictionnaires consultés ne contenaient pas tous les items recensés. S’ils en contiennent quelquesuns, leurs variantes graphiques diffèrent d’un dictionnaire de référence à l’autre (§ V.1). Ce fait nous a incité à appliquer alors une méthode des filtres qui est susceptible de trancher même les cas les plus complexes (§ V.2). Après l’application de ce processus de filtrage, nous serons finalement capable d’unifier les lemmes dont nous nous préoccuperons la structure interne dans le § V.3.

69 V.1 Variabilité graphique des entrées dans les dictionnaires consultés

Dans l’intention d’unifier les lemmes des VGLs, nous avons décidé de chercher ces formes canoniques dans les dictionnaires suivants :

Tableau n°19 : Dictionnaires consultés pendant la recherche

Titre Abréviation Le nouveau Petit Robert 2008 PR Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française. Trésor de la langue française informatisé TLFi

Dictionnaire de l’argot français et de ses origines DA Comment tu tchatches ! CTT Dictionnaire du français contemporain et des cités. Bien ou quoi ? BQ La langue des jeunes à Ivry et VitrysurSeine. Lexik des cités LC Dictionnaire de la Zone DZ Tout l’argot des banlieues.

Finissant la recherche, nous avons dû constater de ne pas avoir atteint notre but, plutôt le contraire. Les dictionnaires nous ont offert le grand nombre de nouvelles variantes graphiques qui, dans la plupart des cas, se diffèrent des variantes graphiques de notre corpus (Annexe 2, tab. n°2, p. 151155). Quant à la forme graphique des verlanisations, nous pouvons remarquer que même dans les ouvrages de lexicographe, la notation du schwa n’est pas unifiée. Dans ce caslà, les dictionnaires proposent souvent plusieurs entrées comme le montrent quelques exemples notés dans le tableau n°20.

70 Tableau n°20 : Notation du schwa dans les dictionnaires

Dictionnaire Verlan de… Entrée PR beur rebeu / reubeu DA mère rèm / reum (+APO) barbe beubar / bebar DZ beur rebeu / reubeu / robeu père rep / rèp / reup

Ceci n’est pas cependant un seul changement apporté sur le plan graphique. Les différences sont devenues visibles lorsque nous avons comparé les adresses de plusieurs dictionnaires :

• africain : cainf (DA) kainf (LC) • argent : genar (CTT) genhar (DZ) • ça : aç (CTT) ass (BQ) • carotte : rotca (CTT, BQ) rotka (DZ) • chnouf : feuchnou (CTT) fechnou (DZ) • galère : lerga (CTT) lèrega (DZ) • herbe : beuher (CTT) beuhère (DZ) • merde : deumer (CTT) demère (DZ) • niquer : ken (BQ) kène (DZ) • pétasse : taspé (CTT, DZ) tassepé (DZ) • putain : tainp (CTT) timpe (DZ) • speed : despi (LC) deuspi (DZ)

Nous avons déjà mentionné que les entrées se différencient des variantes graphiques révélées de notre corpus (Annexe 2, tab. n°2, p. 151155). Outre les modifications dont les exemples sont notés supra, nous avons découvert une nuance frappante. Nous pensons surtout aux termes verlanisés écrits avec un trait d’union.

71 Trait d’union à l’intérieur des verlanisations

Après l’étude des entrées et des variantes graphiques, nous avons observé que le trait d’union n’apparaît pas dans les verlanisations lexicalisées. Par contre, plus qu’un tiers de VGLs de notre corpus est écrit avec ce signe de ponctuation.

Graphe n°5 : Nombre des verlanisations écrites avec/sans trait d’union

total (100%) = 186 VGl

40%

60% avec « »

sans « »

À la suite de ces paragraphes, nous développons nos hypothèses concernant l’emploi du trait d’union, étant donné que sa fonction mérite notre attention. Premièrement, nous supposons que son utilisation fait comprendre aux lecteurs que probablement ne s’agitil pas de l’expression standard. Il est donc une marque du caractère substandard. Il est utile d’ajouter que tous les termes écrits avec un trait d’union ne peuvent se poser pour la verlanisation ; ce signe graphique peut servir tout simplement à diviser le lexème en deux syllabes.

ex. Il ne s’agit pas de décéder dans la cess / Ou laisser noyer le désespoir dans la dé-spé (Ali : Le chant des sirènes, ALI09, subcorpus n°1)

→ Il semblerait que le terme déspé soit le verlan de speed avec une modification phonique. En réalité, probablement s’agitil de la marque de bière Desperados apocopée.

72 Deuxièmement, il paraît que le trait d’union indique le degré de lexicalisation. Car nous n’avons trouvé aucune entrée écrite avec un trait d’union dans les dictionnaires consultés, nous l’estimons comme la marque de la non/semi lexicalisation. Cette hypothèse s’appuie, en outre, sur les résultats suivants, visualisés par le graphe n°6 :

• 27 VGLs avec « » sont nonlexicalisées • 46 VGLs avec « » se posent comme semilexicalisées • 1 VGL avec « » peut être considérée comme lexicalisée, car son lemme est trouvable dans quatre sur sept dictionnaires consultés

Graphe n°6 : Structure interne des verlanisations écrites avec un trait d’union

1% 15% total (100%) = 74 VGl

37% aucun dictionnaire

1 dictionnaire

24% 2 dictionnaires

3 dictionnaires

4 dictionnaires

23%

La dernière fonction du trait d’union à l’intérieur de nos verlanisations est, à notre avis, de fixer le lieu de l’inversion. Observant la graphie des variantes, nous voyons qu’en remplaçant la syllabe située derrière du signe graphique auxiliaire devant la syllabe initiale, nous obtenons la base. Il est possible de l’appliquer sur tous les exemples à l’exception de trois unités lexicales : manéci, scalap, carna. Pour conclure, nous ajoutons que c’est le subcorpus n°1 – Nord de la France, qui fourmille de VGs contenant le trait d’union. Dans le subcorpus n°2 – Sud de la France, nous n’en avons découvert qu’une : tinma. Il persiste donc l’hypothèse que

73 les rappeurs du Sud travaillent sur les verlanisations en voie de lexicalisation, tandis que leurs confrères du Nord inventent de nouvelles formes.

74 V.2 Filtres et critères de la lemmatisation

La variabilité des entrées nous a empêché de lemmatiser les verlanisations révélées dans notre corpus ainsi que de désambiguïser leurs variantes. Elle nous incite à proposer un processus de filtrage qui nous permettra de résoudre la problématique en question. Cette suite de filtres est quadripartite et passe à l’égard du schéma qui suit.

Schéma n°4 : Succession des filtres

Filtre I Filtre II Filtre III Filtre IV

Légende : La ligne discontinue indique que la position du quatrième filtre n’est pas fixe. Comme il sert à donner la forme canonique aux VGs nonlexicalisées, il est possible d’y procéder soit au début soit à la fin soit au cours du processus de filtrage.

Au cours de chaque partie, nous travaillons sur les dictionnaires dont l’ordre a été établi au début et respecté pendant toute méthode. D’abord nous consultons les dictionnaires de référence (PR et TLFi). Puis nous passons au dictionnaire de l’argot commun (DA) et au dictionnaire du français contemporain et des cités (CTT). Nous avons mis ce dernier audessus d’autres dictionnaires du lexique des cités qui sont utilisés jusqu’à la fin (BQ, LC, DZ). Chaque filtre est constitué de deux critères pour fixer l’ordre des dictionnaires dans le cadre des filtres particuliers. Avant de présenter ces critères de façon plus détaillée et avec des exemples concrets, il convient d’ajouter encore qu’il n’est pas nécessaire de passer par tout le processus. Il est possible que le lemme (abrégé en L) soit déterminé par le premier filtre. Tout est expliqué sur les pages suivantes.

75 Filtre I

Filtre I

L = LPRTLFi (pris dans cet ordre)

ex. zarbi (VGL = zarbi) : 1 LPR = zarbi, LTLFi = x → L = zarbi

LPR LTLFi a 2 ou plusieurs VGL on consulte d’autres dictionnaires et choisit VGL qui est plus fréquente ; celleci = L

ex. rebeu, n. (VGL = rebeu) :

LPR = rebeu / reubeu, LTLFi = x, LDA = rebeu, LCTT = reubeu, LBQ = rebeu,

LLC = rebeu, LDZ = rebeu / reubeu / robeu → rebeu (x5), reubeu (x3), robeu Critères Critères (x1) → L = rebeu 2

N.B. NO de VGL1 = NO de VGL2 = NO de VGLx VGL de dictionnaire de départ placée en 1er lieu = L

ex. vénère, adj. (VGL = vénère) :

LPR = vénère / véner, LTLFi = x, LDA = véner / vénere, LCTT = vénèr, LBQ = x,

LLC = vénèr, LDZ = vénère → vénère (x2), véner (x2) → L = vénère

Légende : L → lemme VGL → variante graphique – lemme LPR / LTLFi / LDA... → lemme du dictionnaire correspondant NO → nombre d’occurrences

Résultat provisoire : 14 lemmes issus du PR53

53 TLFi ne contient que seul mot verlanisé (verlan) qui est à la fois dans le PR.

76 Comme nous n’avions pas attribué les lemmes à chaque variante graphique de notre corpus, nous avons procédé à la deuxième partie du filtrage.

Filtre II

Filtre II

LPRTLFi = x L = LDACTT (pris dans cet ordre)

ex. renoi (VGL = renoi) : 3 LPR = x, LTLFi = x, LDA = renoi, LCTT = reunoi → L = renoi

LDA LCTT a 2 ou plusieurs VG voir le second critère du filtre I Critères Critères

ex. reum (VGL = reum) : 4 LPR = x, LTLFi = x, LDA = rèm / reum, LCTT = reum, LBQ = reum, LLC = x, LDZ = rèm / reum → rèm (x2), reum (x4) → L = reum

Légende : L → lemme VGL → variante graphique – lemme LPR / LTLFi / LDA... → lemme du dictionnaire correspondant

Résultat provisoire : 9 lemmes issus du DA 58 lemmes issus du CTT

À présent, nous disposons de 81 lemmes. Hélas, certaines variantes graphiques manquent encore de leur forme canonique. Nous abordons donc la troisième partie du filtrage.

77 Filtre III

Filtre III

LDACTT = x L = LBQLCDZ (pris dans cet ordre)

ex. ken (VGL = ken) : 5 LPR = x, LTLFi = x, LDA = x, LCTT = x, LBQ = ken, LLC = x, LDZ = kène → L = ken

LBQ LLC LDZ a 2 ou plusieurs VGL voir le second critère du filtre I Critères Critères

ex. beubar (VGL = bebar) : 6 LPR = x, LTLFi = x, LCTT = x, LDA = x, LBQ = x, LLC = x, LDZ = beubar / bebar → beubar (x1), bebar (x1) → L = beubar

Légende : L → lemme VGL → variante graphique – lemme LPR / LTLFi / LDA... → lemme du dictionnaire correspondant

Résultat provisoire : 4 lemmes issus du BQ 5 lemmes issus du LC 21 lemmes issus du DZ

Après troisième filtre, nous sommes parvenue au chiffre 111 Ls. Il nous reste de noter le filtre IV qui sert à lemmatiser les variantes graphiques nonlexicalisées.

78 Filtre IV

Filtre IV

LPRTLFi LDACTT LBQLCDZ = x L = VGL

ex. vileci (VGL = vileci, vilesci) : 7 LPR = x, LTLFi = x, LDA = x, LCTT = x, LBQ = x, LLC = x, LDZ = x → L = vileci

VGL a 2 ou plusieurs formes VGL plus fréquente = L Critères Critères

N.B. Si le nombre d’occurrences des VGLs égalait, on préférera la variante 8 écrite avec un trait d’union afin de marquer le degré de nonlexicalisation. À condition que toutes les VGLs s’écrivent sans trait d’union, le tri du lemme dépend de nousmêmes.

Légende : L → lemme VGL → variante graphique – lemme LPR / LTLFi / LDA... → lemme du dictionnaire correspondant

Résultat provisoire : 48 lemmes non lexicalisés

Nous préférons finalement présenter les résultats obtenus sous forme du graphique.

79 Graphe n°7 : Source des lemmes verlanisés

70 58 60 48 50

40

30 14 21 Nombre de lemmes de Nombre 20 9 4 5 10 0 0 PR TLFi DA CTT BQ LC DZ nl

Dictionnaire

Légende : nl → nonlexicalisé

80 V.3 Lemmes des verlanisations et leur structure interne

Le processus de filtrage nous a aidé à désambiguïser les variantes graphiques et à unifier les lemmes des verlanisations. Grâce à son application, le nombre de VG Ls a été réduit en 159 lemmes (abrégé en L).

Schéma n°5 : Nombre de variantes graphiques – lemmes (VGLs) et de lemmes (Ls) du corpus

Corpus 186 VGLs 159 Ls

Subcorpus n°1 – Nord Subcorpus n°2 – Sud 179 VGLs 27 VGLs 156 Ls 24 Ls

Les résultats obtenus favorisent l’hypothèse que les rappeurs du Nord de la France sont les « maîtres de verlan ». Leur subcorpus nous offre 156 verlanisations parmi lesquelles nous trouvons un grand nombre de Ls nonlexicalisés. Par contre, le subcorpus de leurs confrères du Sud ne contient que 24 lemmes en verlan.

Tableau n°21 : Verlanisations des subcorpus

aç, àl, ap, auch, babtou, barge (adj.), barge (n.), barjo (adj.), barjo (n.), beubar, bébar, beflan, béflan, bégère, beu, beuh, beuher, beuje, beur, bledia, bonchar, bouldé, brelic, brolic, caille, caillera, cainf, cainri (adj.), cainri (n.), cainfri, carna, carpla, ceaumor, cistra, çoncal, croma, croma, cromi, dékis, deumer, deurvi, deuspi, diban, dreupin, duper, enlec, feuchnou, foncedé, garba, genar, golmon, goûtdé, gova, chanmé, chéla, chelou, cheum, iencli, ive, ken, keshné, keskon, keuf, lacelle, lerdea, lècheca, lépar, lerga, lletbi, mainde, manéci, manès, meuf, meusseu, mifa, neltu, nesbi, oide, ouf, ous, pécho, pera, péra, pesou, phonetel, poteca, quarpla, rabza, rabzouz, rainté, rebeu, rébou, rectdi, relou, reufré, reum, renoi, reup, reurti, reus, revé,

Subcorpusn°1 ro, roro, rotca, scalap, scarla, scred, sépa, seuf, skeud, skeudi, steupo, stocma, tainp, talfute, tarba, taspé, tasse, teboi, téc, tékal, téci, téfro, téchan, tèj (se),téma, teno, termon, teshmi, teuf, teuteu, tièks, tièpe, tierquar, tipeu, toncar, trom, vèle (se), vénère, véner, vêtsur, vileci, youvoi, zarbi, zeb, zefa, zeil’, zen, zic, zicmu, zinc, zness, znessbi, zonpri, zonze

81 barge (adj.), barge (n.), beur, caille, caillera, chanmé, foncedé, genar, keuf, lletbi, meuf, pécho, rebeu, renoi, scarla, scred, skeud, tasse, tinma, vénère, verlan, yégri, zic, zonze Subcorpusn°2

Parmi les verlanisations nous avons réussi à dévoiler 3 lemmes qui apparaissent exclusivement dans le subcorpus n°2 : tinma, yégri, verlan. Dans quelle mesure ces verlanisations peuventelles se poser comme la preuve que de nouveaux lexèmes en verlan sont inventés également par les rappeurs du Sud de la France ? Nous avons mis l’accent sur ces trois unités lexicales pour répondre à la question et nous avons remarqué le suivant. tinma : terme nonlexicalisé, utilisé par Taïro, interprète d’ÎledeFrance

Laissemoi me coller contre toi / Montremoi comment tu fais ça / Remue ton corps de haut en bas / Et donnemoi l’énergie jusqu’au tin-ma (Faf Larage feat Taïro : C’est de l’or, FAT01, subcorpus n°2) yégri : verlanisation semilexicalisée, usée par Faf Larage, rappeur marseillais

Une musicale esbroufe, ton flow est pure soupe / Pour des yébis prêts à brader ton son chez Liebig / T’es yégri et aigri, yeah «G», yeah « cee» / Arrête de boire du Hennessee (Akhenaton feat Faf Larage et Veust Lyricist : Comode Le Degueulasse, AFV01, subcorpus n°2) verlan : verlanisation lexicalisée, employée par Fayçal provenant de Bordeaux

Le point névralgique c’est l’Hôtel de Ville Pey Berland / Coin sous tutelle rien de magique c’est un vaudeville en verlan (Fayçal : Belle endormie, FAY02, subcorpus n°2)

82 Il émerge que le terme tinma peut être détaché car il n’a pas été usé par le rappeur du Sud de la France. Quant au verlan, nous ne le considérons pas comme la verlanisation éprouvant l’invention des nouvelles unités lexicales. Il s’agit du lexème généralisé dont l’origine tombe presque dans l’oubli et son emploi dans le texte est de caractère métonymique. La dernière expression qui nous reste est yégri. C’est une verlanisation dont l’entrée est trouvable dans un dictionnaire que nous avons consulté. Sur ce seul argument, nous n’osons pas fonder l’affirmation que les verlanisations nouvelles prennent leur naissance dans le Sud de la France. À présent nous revenons encore à la structure du procédé de codage afin de constater si les rappeurs du Sud profitent vraiment de la fonction économique du verlan.

Graphe n°8 et 9 : Structure du procédé de codage (L – subcorpus n°1 et 2)

total (100%) = 156 Ls total (100%) = 24 Ls 14% 24%

40% 21%

65%

36%

VERL VERL + APO reste VERL VERL + APO reste

Il s’avère qu’après la désambiguïsation des variantes, le verlan « simple » prédomine même chez les rappeurs du Sud de la France. Néanmoins, le nombre des verlanisations apocopées reste haut en comparaison du subcorpus n°1 dans lequel l’écart entre le verlan et le verlan apocopé est plus visible. Pour ces raisons, nous soutenons l’hypothèse que la fonction identitaire, prédominante dans le Nord de la France, s’atténue chez les rappeurs du Sud en faveur de la fonction économique. Finalement, nous faisons une remarque sur la structure interne des verlanisations. À partir du tableau Dictionnaires et leurs entrées (Annexe 2, tab., n°2, p. 151155), il est possible de déterminer le degré de lexicalisation des lexèmes

83 en verlan. Nous avons décidé de les distinguer selon le nombre de dictionnaires dans lesquels les termes apparaissent. Les critères sont suivants :

1) si la verlanisation n’apparaît dans aucun dictionnaire que nous avons consulté, nous la considérons comme non-lexicalisée ; 2) si la verlanisation est trouvable dans un, deux et/ou trois dictionnaires consultés, elle se pose comme semi-lexicalisée ; 3) si la verlanisation fait son entrée dans quatre et/ou plus de dictionnaires consultés, elle peut être estimée comme lexicalisée ; 4) si la verlanisation est présente dans un sur deux dictionnaires de référence consulté, elle est de caractère lexicalisé (et généralisé) sans rendre en compte le nombre de dictionnaires dans lesquels elle figure.

Les résultats obtenus sont présentés dans le tableau cidessous.

Tableau n°22 : Structure interne des verlanisations

Lexicalisée Semi-lexicalisée Non-lexicalisée Nombre de 7 6 5 4 PR + 2 3 2 1 0 dictionnaires Nombre de 0 2 3 14 4 21 38 29 48 verlanisations Total 23 88 48

Légende : PR + 2 → les verlanisations apparaissant dans le PR et dans deux autres dictionnaires consultés

Les résultats attestent que le corpus est le plus riche en verlanisations semi lexicalisées. Elles occupent 54% de nombre total des lemmes en verlan. Il semble donc que les termes lexicalisés sont moins préférés par les rappeurs. Les graphiques cidessous montrent quelles verlanisations sont préférées dans chaque subcorpus.

84 Graphe n°10 et 11 : Structure interne des verlanisations du subcorpus n°1 et 2

total (100%) = 156 Ls total (100%) = 24 Ls

14% 8% 30%

46%

46%

56%

lexicalisée semilexicalisée lexicalisée semilexicalisée nonlexicalisée nonlexicalisée

Il se met en évidence que les verlanisations lexicalisées n’apparaissent pas fortement dans le subcorpus des rappeurs du Nord de la France. Leur créativité langagière est attestée par l’emploi de 47 termes en verlan nonlexicalisés ; la majorité des verlanisations est quand même de caractère semilexicalisé. Par contre, dans le Sud de la France, nous remarquons la tendance d’emprunter les mots en usage ce qui favorise l’hypothèse concernant l’atténuation de la fonction identitaire dans les régions françaises du Sud.

85 VI. PROCÉDÉS GÉOGRAPHIQUEMENT CIRCONSCRITS

Dans les chapitres précédents, nous avons été préoccupée par les variantes graphiques des verlanisations et par leur lemmatisation. Maintenant, nous nous focaliserons d’abord sur l’occurrence des verlanisations dans les chansons (voir § V.1) et ensuite, nous nous concentrerons sur les interprètes (voir § V.2). Notre objectif est de dévoiler d’autres nuances géographiquement circonscrites ou, au moins, d’apporter de nouveaux acquis qui soutiendraient les hypothèses établies. Il est utile de rappeler que l’étendue du corpus fausse les résultats obtenus. Si nous choisissions d’autres chansons et/ou interprètes, probablement arriverionsnous aux acquis différents. Nous voulons donc souligner que les résultats se rapportent exclusivement à notre corpus analysé.

86 VI.1 Verlanisations dans les chansons des subcorpus

Au début de l’analyse, il est préférable d’afficher les données fondamentales sur lesquelles nous travaillerons dans ce chapitre. Il s’agit surtout de nombre des chansons analysées (abrégé en CH) dont la liste se trouve dans l’annexe 1 (Annexe 1, tab. n°3, p. 136145).

Schéma n°6 : Généralités sur le corpus (chansons)

Corpus 270 CHs

Subcorpus n°1 – Nord Subcorpus n°2 – Sud 135 CHs 135 CHs

Nous voyons que le nombre de chansons dans les subcorpus est équilibré. C’était d’ailleurs un des critères auxquels l’élaboration du corpus a été soumise. Après la lecture des textes, il s’est montré que dans notre corpus, la majeure partie des morceaux ne comptent aucun lexème verlanisé comme le visualise le graphe n°10.

Graphe n°12 : Chansons avec/sans verlanisation (corpus entier)

total (100%) = 270 CHs

V ≥ 1 55%

45% CHs V CHs V+ Légende : CH V+ → chanson avec une verlanisation CH V → chanson sans verlanisation

87 Les chansons contenant au moins un lexème verlanisé n’occupent que 45% de corpus. Le nombre de morceaux avec une verlanisation nous a surpris ; nous avons attendu plutôt le résultat inverse. Nous nous sommes mise à étudier l’occurrence des verlanisations dans les chansons des subcorpus. Cette comparaison a fait voir que les résultats affichés à la page précédente étaient fortement influencés par la quasi absence des termes en verlan dans le subcorpus n°2. En fait, les chansons dans lesquelles les rappeurs du Sud de la France ont appliqué le verlan ne couvrent que 11% de nombre total de CHs. Les graphiques qui suivent représentent le rapport entre CHs contenant une verlanisation (V+) et CHs sans verlanisation (V) dans les subcorpus particuliers.

Graphe n°13 et 14 : Chansons avec/sans verlanisation – subcorpus n°1 et 2

total (100%) = 135 CHs total (100%) = 135 CHs

21% 32% CHs V+ CHs V

CHs V+ CHs V 68% 79%

V ≥ 1 V ≥ 1

Les résultats attestent qu’il est possible de rencontrer la chanson V+ dans les deux subcorpus. Pourtant, il est probable qu’elle sera relevée plus vite parmi les chansons des rappeurs du Nord de la France. Dans leur subcorpus, nous avons en effet remarqué 93 CHs V+ / 42 CHs V, tandis que les rappeurs du Sud ne nous ont offert que 29 CHs V+ / 106 CHs V (Annexe 1, tab. n°3, p. 136145). Il en résulte que même si les lexèmes verlanisés pénètrent dans le rap de la France entière, ils ne s’infiltrent pas fortement dans les textes des rappeurs des régions du Sud.

88 Graphe n°15 : Nombre de verlanisations dans les chansons des subcorpus

31 Nord

21

Chanson 19

11 10 11

Sud 5 4 3 2 2 1 2 0 0 123456789

Lemme

Le graphe supra représente le nombre de chansons dans lesquelles les rappeurs ont utilisé une certaine verlanisation. La ligne tracée plus haut visualise la situation dans le subcorpus n°1. Nous pouvons voir que la limite supérieure y est 9 verlanisations. La seconde ligne montre que dans le subcorpus n°2, le maximum ne dépasse pas 6 lexèmes en verlan. Il est évident que les verlanisations n’abondent pas dans le lexique des rappeurs (surtout des interprètes du Sud de la France). Le plus souvent, les morceaux ne contiennent qu’une seule verlanisation. Les mots verlanisés ne se posent pas alors comme l’élément central de la langue des rappeurs ; aucun d’entre nos interprètes ne « rappent verlan ».

Tableau n°23 : Chansons les plus riches en verlanisations

Nombre de Interprète Chanson Abréviation verlanisations DLP Bo gosse DLP14 9 SEF Molotov 4 SEF03 BOO Numéro 10 BOO03 Sub n°1Sub 8 LIM On vit comme des bandits LID01 FAF Ta meuf FAF06 6 AKH La fin de leur monde AKS01 3 Sub n°2Sub ESK Fuyez ESN01

Légende : Sub → subcorpus

89 L’étendue de notre corpus nous permet de citer un exemple éprouvant que l’éloignement de Paris égale approximativement à la diminution de l’occurrence des verlanisations dans le lexique des rappeurs. Nous pensons au groupe Hocus Pocus, classé dans le subcorpus n°1 parce qu’il représente la région de PaysdelaLoire. Il nous semble que c’est justement la position géographique de cette région, qui influence le lexique du groupe. En examinant ses textes, nous avons rencontré un grand nombre d’anglicismes. Cependant, quant aux verlanisations, elles ne sont introduites que dans 6 chansons analysées sur 12, au nombre de 2 verlanisations au maximum (HPO13 – chelou, relou / HPT01 – cainri, scred). Nous avons observé toutes les chansons du corpus et dressé le tableau qui suit pour illustrer combien de chansons de chaque interprète comprend au moins d’une verlanisation.

Tableau n°24 : Chansons avec certaine verlanisation (interprètes)

Subcorpus n°1 Subcorpus n°2 Chansons Chansons Chansons Chansons Interprète Région Interprète Région analysées V+ analysées V+ ALI IF 14 8 AKH PACA 15 4 BOO IF 12 12 DON PACA 7 1 DIA IF 14 8 ESK RA 5 2 DLP IF 13 8 FAF PACA 13 7 FLY IF 7 7 FAY A 10 1 HPO PL 12 6 FFA PACA 15 5 KND IF 3 3 FRE PACA 1 0 LIM IF 7 7 IAM PACA 9 0 LSP IF 7 5 KAL PACA 2 1 MCS IF 12 2 KEN PACA 22 3 OXM IF 13 8 LAL PACA 6 3 RIM IF 5 4 PSY PACA 14 2 SEF IF 7 6 SOP PACA 16 1 SIN IF 5 5 SNI IF 4 4

Légende : IF → ÎledeFrance PL → Pays de la Loire PACA → ProvenceAlpesCôted’Azur RA → RhôneAlpes A → Aquitaine gris → anomalie

90 Les chiffres font voir que chaque rappeur du Nord de la France emploie une verlanisation dans la majorité de ses chansons tandis que les interprètes du Sud n’verlanisent pas fortement. En plus de cela, nous pouvons encore remarquer trois anomalies. Dans le subcorpus n°1, c’est le groupe Hocus Pocus, dont nous avons déjà parlé plus haut, et le rappeur Mc Solaar, « senior » de notre corpus. Les textes de ce dernier sont dotés d’une qualité littéraire. Il travaille sur la sonorité des mots pour atteindre l’harmonie de sons, ce qui est caractéristique de ses textes. Il n’a usé que trois termes verlanisés dans deux morceaux :

MCB02 Des belles meufs m’entourent je me sauve pas non je me sauve pas → jeu de la sonorité, facilité d’articulation ([mœfmtũ ] vs [fammtũ ]), exploitation du glissement sémantique (meuf = jeune fille)

MCB02 Moi j’allais aux Halles juste pour pécho des maxis → jeu de la sonorité ([pupe] vs [pupe])

MCS82 Dislui qu’on flippe ap, dislui qu’on est apte → jeu de la sonorité ([ap] [apte]), facilité d’articulation ([flipap] vs [flippa])

La dernière anomalie se trouve dans le subcorpus n°2, il s’agit du rappeur marseillais Faf Larage. Il a une véritable prédilection pour le verlan ce qui prouve surtout sa chanson Ta meuf (FAF06) contenant 6 verlanisations (caille, caillera, foncedé, meuf, pécho, vénère). Il nous semble que Faf Larage construit son identité en s’opposant à la tendance générale.

FAF08 J’en suis un, alors ma conscience guide ma zik → exploitation de la fonction économique

FAF11 Qu’estce qu’il y a ?! Ouais je suis large mentalité de barge → jeu de la sonorité ([la] [ba])

91 FAF13 Remontez à la source, les bourges qui ont le gen-ar / Les costards qui ont le pouvoir, les juges qui font les canards → créations d’une rime (genar – canards)

92 VI.2 Rappeurs et leurs verlanisations

Comme auparavant, nous commençons par afficher les généralités sur le corpus qui sont utiles dans le présent chapitre. Le schéma cidessous représente le nombre des interprètes essentiels54 (abrégé en I), des rappeurs essentiels55 (abrégé en R) et des featuring56 (abrégé en F).

Schéma n°7 : Généralités sur le corpus (interprètes, rappeurs, featurings)

Corpus 28 Is 36 Rs 48 Fs

Subcorpus n°1 – Nord Subcorpus n°2 – Sud 15 Is 13 Is 19 Rs 17 Rs 31 Fs 17 Fs

L’analyse du corpus au niveau des chansons (cf. tab. n°24, p. 90) éprouve que presque chaque interprète essentiel a employé au moins un lexème verlanisé, sauf le groupe Iam (subcorpus n°2) et le rappeur Freeman (subcorpus n°2). Dans le cas de ces exceptions, nous voulons rappeler de nouveau que le choix d’autres chansons ainsi que le nombre plus grand de chansons analysées apporteraient un autre acquis. Nous appuyons cette supposition sur le fait qu’un morceau d’Iam, datant de 1997, contient quelques lexèmes en verlan :

54 Interprète = rappeur solo et/ou groupe. 55 Rappeur essentiel = rappeur solo et/ou rappeur d’un groupe. 56 Featuring = rappeur participant sur la chanson d’un rappeur essentiel.

93 Poussetoi de là, je fais mes affaires c’est dur à faire / Par là et j’parle à mes scarla / Ce que j’ai à faire sur la Terre frère c’est la guerre aux stéréotypes / J’flaire pas, mon but c’est de pas rester terre-par (Iam feat East et Fabe : L’enfer, L’école Du Micro D’Argent, 1997, disponible dans le RapCor)

Maintenant, nous passons aux rappeurs essentiels. À cet égard, nous avons remarqué que les verlanisations ne sont pas adoptées par tous les rappeurs composant un groupe. C’est par exemple le cas du groupe Sniper (subcorpus n°1) dont seul deux rappeurs sur trois utilisent les termes en verlan. En outre, nous trouvons intéressant d’observer le lexique d’Akhenaton (subcorpus n°2). Dans le collectif du groupe Iam, il évite les verlanisations, par contre, en suivant la carrière solo, il n’hésite pas de les employer. Il semble que dans le premier cas, il respecte le concept du groupe marseillais, alors que comme le rappeur solo, il ne s’abstient pas de ce phénomène langagier.

Graphe n°16 et 17 : Rappeurs essentiels employant/n’employant pas le verlan

total (100%) = 19 Rs total (100%) = 17 Rs

5% Rs V 18% Rs V

95% Rs V+ 82% Rs V+

V ≥ 1 V ≥ 1

Légende : Rs V+ → rappeurs employant le verlan Rs V → rappeurs n’employant pas le verlan

Les graphiques font voir que même dans le Nord de la France, nous rencontrons des interprètes qui n’emploient pas le verlan. Cependant, il paraît que ce

94 ne sont que les exceptions. Dans le subcorpus n°1, nous ne trouvons qu’un seul rappeur dont l’idiolecte n’est pas enrichi par les verlanisations. Il s’agit de Blacko, rappeur du groupe Sniper qui suit actuellement la carrière solo. Nous supposons qu’il n’a pas usé de mots verlanisés parce que la structure formelle de ses textes ne l’avait pas exigé. Il faudrait analyser plus de ses chansons pour que nous puissions proclamer qu’il n’utilise pas du tout cet élément identitaire. La (quasi) absence des verlanisations est caractéristique plutôt du lexique des rappeurs du Sud de la France. Nous avons dévoilé trois rappeur qui n’ont usé aucune verlanisation (Fel, Freeman, Le Rat Luciano) et un grand nombre de ceux avec un seul lexème en verlan (Alonzo, Fayçal, Kalash l’Afro, Menzo, Sat l’Artificier, Vincenzo).

« Maître de verlan » Nous savons déjà que c’est le subcorpus n°1 qui nous a fourni une large gamme de verlanisations et il est probable que parmi les rappeurs du Nord de la France, nous découvrirons le rappeur le plus productif concernant les termes verlanisés. Pour pouvoir effectuer cette enquête, nous avons dû rassembler les paroles de chaque artiste en « minicorpus ». Cette activité s’est compliquée par le fait que quelques rappeurs essentiels étaient en même temps les featurings. Par exemple, Dany Dan est le rappeur du groupe Les Sages Poètes De La Rue et il participe également sur une chanson d’Oxmo Puccino. Tous les mots scandés par Dany Dan et tirés de n’importe quel morceau du corpus ont formé donc son « minisubcorpus ». Cette stratégie a été appliquée aussi au moment où le rappeur essentiel d’un groupe suit la carrière solo et/ou au contraire (p.ex. Soprano, membre du groupe PSY, a sorti plusieurs albums solo). Pendant cette analyse, nous ne mettons à côté ni les featurings qui ont employé une verlanisation (p.ex. Kery James, feat de RimK et d’Oxmo Puccino). Après l’élaboration des « minicorpus », nous avons procédé à l’analyse. Nous avons travaillé sur le logiciel Textométrie qui nous a servi à dresser le récapitulatif des verlanisations utilisées par les artistes (Annexe 3, tab. n°1, p. 161 162). Les tableaux qui suivent représentent l’occurrence des verlanisations dans les

95 « minicorpus » (tab. n°25) et le rapport entre l’utilisation des variantes graphiques et des lemmes (tab. n°26).

Tableau n°25 : Occurrence des verlanisations dans les « minicorpus » des rappeurs et des featurings (*)

Subcorpus n°1 Subcorpus n°2 Rappeur Occurrence Rappeur Occurrence Rappeur Occurrence AKE 8 MCS 3 AKH 4 ALI 14 MEL 1 ALO 1 *BAU 2 *MES 4 DON 3 BLA 0 *NES 2 ESK 4 BOO 42 OXM 8 FAF 13 *BOU 5 *PRA 1 FAY 1 *BRA 3 RIM 11 FEL 0 DDA 3 SEF 16 FRE 0 DIA 14 SIN 10 KAL 1 DLP 23 SYL 8 KEN 2 *DOU 2 TUN 6 LAL 3 FLY 9 *VAI 1 MEN 1 *HIF 4 *ZEL 1 *nd 2 *ISS 1 ZOX 6 RAT 0 *JBR 1 SAT 1 *KER 4 *SHU 1 KND 13 x SOP 2 LIM 18 *TAI 1 *MAL 1 VIN 1

Tableau n°26 : Variantes graphiques – lemme versus lemmes

Subcorpus n°1 Subcorpus n°2 Rappeur VGL L Rappeur VG L Rappeur VGL L AKE 2 3 (+3) LIM 10 5 (+5) AKH 1 3 ALI 6 4 (+5) *MAL 1 0 ALO 1 0 *BAU 1 0 (+1) MCS 0 3 DON 2 1 (+1) BOO 14 17 (+11) MEL 0 1 ESK 1 3 *BOU 1 4 *MES 1 2 (+1) FAF 3 9 (+1) *BRA 1 2 *NES 0 2 FAY 0 1 DDA 1 1 (+2) OXM 2 5 (+1) KAL 1 0 DIA 7 6 (+1) *PRA 1 0 KEN 1 1 DLP 10 10 (+3) RIM 4 5 (+2) LAL 2 1 *DOU 1 0 (+1) SEF 9 6 (+1) MEN 1 0 FLY 4 3 (+2) SIN 3 5 (+2) *nd 0 2 *HIF 2 2 SYL 1 6 (+1) SAT 0 1 *ISS 0 1 TUN 1 2 (+3) *SHU 0 1

96 Subcorpus n°1 Subcorpus n°2 Rappeur VGL L Rappeur VGL L Rappeur VGL L *JBR 1 0 *VAI 0 1 SOP 1 1 *KER 2 1 (+1) *ZEL 1 0 *TAI 0 0 (+1) KND 7 4 (+2) ZOX 2 1 (+3) VIN 1 0

Légende : VGL → variante graphique – lemme L → lemme * → featuring (+ X) → chiffre entre parenthèses indique le nombre de verlanisations non lexicalisées

En général, les résultats des tableaux attestent que les rappeurs du Nord de la France sont capables d’utiliser jusqu’une dizaine de verlanisations dans leurs lexiques. La modification graphique n’est pas rare dans le subcorpus n°1. À notre avis, les variantes graphiques reflètent l’identité du créateur. En vertu de cette hypothèse et en s’appuyant sur les résultats obtenus, nous pouvons soutenir le fait que la fonction identitaire du verlan est dominante dans le Nord de la France. Quant aux rappeurs du Sud, les tableaux nous montrent qu’ils verlanisent peu souvent. S’ils décident d’enrichir les textes de leurs chansons par une verlanisation, ils empruntent sa forme graphique qu’il est possible de trouver dans la nomenclature de divers dictionnaires. Par induction, nous amenons à l’hypothèse concernant l’atténuation de la fonction identitaire dans le Sud de la France. L’occurrence des lexèmes verlanisés varie d’un « minicorpus » à l’autre. Nous préférons rappeler que la structure des corpus de chaque rappeur diffère l’une de l’autre. Par exemple, le « minicorpus » de Kennedy se compose de 656 unités lexicales, par contre, le « minicorpus » de Disiz La Peste est formé par 2063 mots. La disparité de nombres de lexèmes scandés par les artistes complique notre recherche qui n’apportera que les résultats approximatifs. Si nous ne prenons pas en considération le fait mentionné supra, nous pouvons dire que le « Maître de verlan » est Booba, rappeur d’ÎledeFrance. Dans son « minicorpus » apparaissent 42 verlanisations (8 lexicalisées / 21 semi lexicalisées / 13 nonlexicalisées). Il modifie leur notation et il crée ainsi les formes graphiques individuelles. En vertu de ses textes, il est possible de proclamer que le rappeur a profité de toutes les fonctions du verlan. Voici quelques exemples :

BIB01 La routine cro-ma du cro-mi, croismoi, croisy kho → fonction identitaire, ludique, esthétique

97

BOO01 Passemoi la zeb et la boisson Négro → fonction identitaire, cryptique, initiatique

BOO01 J’ai la zik, le zness comme idéal → fonction identitaire, économique

Le deuxième dans l’ordre devient Disiz La Peste, un autre rappeur de la région d’ÎledeFrance, dont le « minicoprus » contient 23 termes verlanisés (6 lexicalisées / 14 semilexicalisées / 3 nonlexicalisées). Son individualité et créativité se manifestent également par les variantes graphiques :

DLP14 Mais c’est qui là-celle / Ouhh !!! C’est la belle Annabelle → fonction identitaire, ludique

DLP17 Mais contre King Kong y’a jamais de gar-ba / Quel tar-ba ditil → fonction identitaire, ludique, esthétique

DLP18 Ce mes est un jeune qui est né / Dans une tess peutêtre → fonction idetitaire, initiatique, économique

Dans le subcorpus n°2, c’est Faf Larage, rappeur marseillais, qui se pose comme le « verlanisateur » le plus productif. À la fin du chapitre VI.1 (voir p. 91), nous avons déjà parlé de son tendance d’opposer à la tendance générale. Dans son « minicorpus » nous avons découvert 13 verlanisations (5 lexicalisées / 7 semi lexicalisées / 1 nonlexicalisées). Il nous semble que dans ses chansons, la fonction identitaire s’atténue en faveur d’autres fonctions :

FAF06 Ta meuf c’est une caille, mec, elle met des coups de tête / Elle fume, elle boit, elle se la pète → fonction économique, exploitation du glissement sémantique, allusion à la stigmatisation

98 FAF11 Ça se passe et des merdes quand j’en sors, ça se tasse / Des fois on dit n’importe quoi pour impressionner des tasses → fonction ludique, création d’une rime

Le groupe de rap lyonnais Eska Crew peut être considéré comme le deuxième grand « verlanisateur » dans le Sud de la France, même si son idiolecte ne contient que 4 verlanisations (2 lexicalisées / 2 semilexicalisées). Ce fait favorise de nouveau l’hypothèse concernant la diminution d’occurrence des verlanisations en fonction du facteur diatopique. Les exemples choisis démontrent la fonction du verlan dans le texte de ce groupe :

ESK02 Je ne conçois pas ma vie sans être un artiste / Ou ma zic sans être un homme l’un sans l’autre me paralyse → fonction économique

ESN01 On nous estime toujours en marge / Du B. Boys au rasta, du punk au scarla, du patient au plus barge → fonction ludique, économique, création d’une rime, allusion à la stigmatisation

Verlanisation préférée et hapax des subcorpus

Après la détermination du grand « verlanisateur » de notre corpus, nous mettons l’accent sur l’objet de notre étude et nous tentons de montrer quelle verlanisation est préférée parmi les rappeurs et au contraire. Pour accélérer cette analyse, nous nous sommes décidée à travailler sur le logiciel Textométrie qui nous fixe la fréquence de chaque lexème. Au moment où nous avons effectué cette recherche, tous les lemmes n’étaient pas encore attribués à chaque variante graphique. Il nous fallait donc faire attention aux homographes et les détacher des résultats obtenus. Nous notons quelques exemples :

99 • as ≠ variante graphique de ça en verlan

ex. On me lit comme un bon jeu de cartes j’suis l’as des as Le pire délit qu’un petit bandit puisse faire hélas (Oxmo Puccino feat Le Célèbre Bauza : Premier suicide, OXC01, sub. n°1)

→ l’as des as : le plus remarquable dans son genre (Petit Robert 2008, p. 151)

ex. Tu n’as que de la poisse, de la rage dans le voix (Sinik : Bonhomme, SIN06, sub. n°1)

→ (tu) as : avoir (2e personne de singulier, présent)

• beurre ≠ variante graphique d’arabe verlanisé (genre féminin)

ex. Y’a plus qu’du sucre sans sucre et des gâteaux sans beurre Du café sans caféine et des cuisines sans odeurs (Diam’s : Cause à effet, DIA17, sub. n°1)

→ beurre : corps gras alimentaire, onctueux, blanc ivoire à jaune d’or, que l’on obtient en battant la crème du lait de vache (Le nouveau Petit Robert 2008, p. 246)

• caille ≠ verlan de racaille avec apocope

ex. À ceux qui galèrent pour donner un peu de caille à la maison, frangin ! (Soprano : Passemoi le mic, SOP09, sub. n°2)

→ caille : APO de caillasse (n.f., argent, Comment tu tchatches, p. 79)

ex. On dit que mon public c’est de la racaille, des ratailles qui marchent cagoulés quand ça caille (Sefyu : Mon public, SEF07, sub. n°1)

100

→ (ça) caille : cailler, v. impers. Il fait froid (Dictionnaire de l’argot français et de ses origine, p. 128)

• ouf ≠ verlan de fou

ex. Pas l’temps d’dire ouf (Booba feat Wayne Wonder : Alter ego, BOW01, sub. n°1)

→ ouf : interj., mod. loc. Il n’a pas eu le temps de dire ouf, de réagir, de faire face à la situation (Le nouveau Petit Robert 2008, p. 1770)

• tasse ≠ verlan de pétasse avec apocope

ex. Petite banlieusarde, loin des strass, tout près de l’impasse Sans le rap, j’aurais sûrement fini buvant la tasse (Diam’s : Petite banlieusarde, DIA18, sub. n°1)

→ boire une tasse, la tasse : avaler involontairement de l’eau en se baignant ; fig. subir des pertes (Petit Robert 2008, p. 2511)

ex. J’ai jamais squatté la routine et le manque de vie qui se tasse Sac à dos, à l’arrache, allez hop, j’me casse (Keny Arkana : J’me barre, KEN03, sub. n°2)

→ (il) se tasse : se tasser (3e personne du singulier, présent), v. pron., fig. fam. Revenir à la normale, après quelque incident (avec un sujet impers.) (Le nouveaux Petit Robert 2008, p. 2512)

En outre, nous avons remarqué que les chansons contiennent parfois de mêmes structures. Si un lexème verlanisé est présenté dans ces passages répétitifs, nous ne le compterons qu’une seule fois. Cette règle s’applique aussi dans le cas de

101 la répétition de mêmes refrains ainsi que d’autres parties. Le tableau suivant présente ces structures répétitives.

Tableau n°27 : Verlanisations dans les structures répétitives

Verlanisation Chanson Structure Répétition beur RIM02 Dans la tête d’un jeune beur 4 caille FAF06 Ta meuf c’est une caille 2 FAF06 Ta meuf c’est trop une caillera 3 caillera SEF07 Mon public est une caillera 4 ken DLP20 J’t’ai ken 4 FAF06 Ta meuf c’est une caille 2 meuf FAF06 Ta meuf c’est trop une caillera 3 LSP11 Les meufs sont toutes belles 3 reufré ALI10 Refré, pourquoi cet air triste 7 revé RIM04 Pour deux mille quatre on enquille les re-vé 3 taspé LSP09 Les tass-pés tapent à l’œil 2 DIJ01 J’rappe pour les tess, j’rappe pour les pav’ 8 téc DIJ01 Pour les tess, je rappe pour les pav’tard 4

Légende : bleue → rappeur du Nord de la France jaune → rappeur du Sud de la France

Après le franchissement des obstacles, nous avons pu noter la fréquence des verlanisations (Annexe 3, tab. n°2, p. 163164). Les lexèmes utilisés le plus souvent sont énumérés dans le tableau infra.

Tableau n°28 : Verlanisations préférées dans les subcorpus

Subcorpus n°1 – Nord téc ken Lemme meuf keuf beur téci zic tasse Fréquence 18 12 9 8 7 6 Subcorpus n°2 – Sud barge (adj.) beur Lemme zic barge (n.) caillera caille x meuf keuf Fréquence 13 4 3 2

102 Nous voyons que dans tous les deux subcorpus, il s’agit surtout des lexèmes apocopés, sauf le téci. Ce résultat éprouve la tendance des rappeurs de profiter fortement de la fonction économique. Il s’est avéré que les rappeurs du Nord de la France n’évitaient pas l’utilisation des verlanisations lexicalisées ainsi que généralisées (comme meuf, keuf, beur). En fait, ce type des termes en verlan, avec les lexèmes semilexicalisés, émaille leurs morceaux le plus souvent. La situation est pareille dans le subcorpus n°2 où les verlanisations préférées sont presque identiques avec celles du subcorpus n°1. Nous pouvons finalement constater que ce sont les verlanisations en usage commun qui sont usées le plus fréquemment par les rappeurs français. Maintenant, nous abordons la question des hapax de nos subcorpus. Le tableau Fréquence des verlanisations (Annexe 3, tab. n°2, p. 163164) nous montre que les hapax abondent surtout dans le subcorpus n°1 comme le visualise le schéma infra. Parmi ces lexèmes n’apparaissant qu’une seule fois dans les subcorpus, nous avons remarqué un grand nombre de verlanisations non lexicalisées. Ce fait témoigne de la créativité lexicale des artistes du Nord de la France. De plus, les résultats attestent de nouveau que les rappeurs du Sud empruntent les verlanisations en usage.

Schéma n°8 : Hapax des subcorpus et leur structure interne

Corpus : 159 Ls

Subcorpus n°1 : 156 Ls Subcorpus n°2 : 24 Ls

108 hapax du subcorpus 16 hapax du subcorpus

10 lexicalisés 6 lexicalisés

55 semilexicalisés 8 semilexicalisés

43 nonlexicalisés 2 nonlexicalisés

Légende : L → lemme

103 VII. POSITION ET FONCTION DES LEXÈMES EN VERLAN DANS LES CHANSONS DE RAP FRANÇAIS

Le dernier chapitre de notre mémoire sera consacré à l’analyse visant à fixer la position des mots verlanisés dans la structure des chansons de rap français (§ VII.1). En outre, nous tenterons d’indiquer l’importance des fonctions du verlan dans ce domaine musical (§ VII.2), supposant que la fonction identitaire sera atténuée. Notre hypothèse sera appuyée sur les exemples concrets, tirés du corpus des chansons analysées.

104 VII.1 Position des verlanisations dans la structure des chansons

Comme auparavant, nous proposons de commencer par le schéma récapitulatif représentant les informations sur le nombre des couplets (abrégé en C), des refrains (abrégé en REF) et d’autres parties (abrégé en AP) des chansons. Afin d’obtenir ces données, nous avons puisé dans le tableau Liste des chansons analysées (Annexe 1, tab. n°3, p. 136145).

Schéma n°9 : Nombre de couplets, de refrains et d’autres parties des chansons

Corpus 700 Cs 290 REFs 299 APs

Subcorpus n°1 – Nord Subcorpus n°2 – Sud 353 Cs 347 Cs 178 REFs 112 REFs 173 APs 126 APs

Il s’avère que les subcorpus sont presque semblables en quantité des couplets. En ce qui concerne les refrains et d’autres parties (intro, inter, outro), nous précisons que les passages répétitifs qui sont homogènes ne sont comptées qu’une seule fois pour éviter de fausser les résultats. À ces généralités, nous joignons encore les graphiques pour visualiser la structure de toutes les chansons des corpus au niveau des couplets.

105 Graphe n°18 et 19 : Structure des chansons – subcorpus n°1 et 2

total (100%) = 135 CHs total (100%) = 135 CHs

1% C5 4% 11% 11% 12% C4 C1 C4 C1

22% C2 C2 30% C3 C3 47% 62%

Au départ de notre recherche, nous nous sommes imaginée que c’est le refrain qui représente la partie parfaite à la diffusion de nouveaux termes et locutions. Nos raisons étaient nombreuses : il se répète plusieurs fois, son rythme et ses mots se gravent dans la mémoire des auditeurs, il est bien mémorisable, il résume souvent l’idée principale de la chanson, etc. Néanmoins, les résultats obtenus n’ont pas confirmé notre présomption. Notre recherche est arrivée à d’autres conclusions comme le démontrent les tableaux suivants.

Tableau n°29 : Parties des chansons avec/sans verlanisation (subcorpus n°1 – Nord)

Autres Titres 135 Couplets 353 Refrains 178 173 parties

Ts V+ 1 Cs V+ 158 REFs V+ 19 APs V+ 6

Ts V 134 Cs V 195 REFs V 159 APs V 167

106 Tableau n°30 : Parties des chansons avec/sans verlanisation (subcorpus n°2 – Sud)

Autres Titres 135 Couplets 347 Refrains 112 126 parties

Ts V+ 1 Cs V+ 20 REFs V+ 3 APs V+ 3

Ts V 134 Cs V 327 REFs V 109 APs V 123

Légende : T → titre C → couplet REF → refrain AP → autre partie V+ → avec une verlanisation V → sans verlanisation

Les verlanisations peuvent être découvertes à travers toute la structure des chansons. Quant aux titres, ils se composent généralement des lexèmes nonverlanisés. Dans notre corpus, nous n’avons aperçu que deux titres contenant une verlanisation : Dans la tête d’un jeun Beur (RIM02, subcorpus n°1), Ta meuf (FAF06, subcorpus n°2). Les expressions utilisées sont les verlanisations officiellement lexicalisées, trouvables dans le Nouveau Petit Robert 2008, ce qui nous permet de dire que la créativité lexicale ne se manifeste pas au niveau des titres des chansons de rap français. Peu souvent, les lexèmes en verlan apparaissent également dans d’autres parties. Seul 3% de leur nombre total sont émaillés par une verlanisation dont 3 sont lexicalisées (meuf, renoi, vénère), 4 semilexicalisées (caillera, ken, nesbi, taspé) et 1 nonlexicalisée (brolic). En comparaison avec les titres et d’autres parties, les refrains paraissent plus riches en termes verlanisés. Pourtant, nous ne pouvons pas dire qu’ils se posent comme le foyer central des verlanisations (8% de REF V+). En lisant les textes des chansons, nous sommes arrivée à l’opinion que ceux qui composent et interprètent les morceaux préfèrent rester clairs dans cette partie résumant l’idée d’une chanson à expérimenter avec le lexique. Cet acquis est valable pour les deux subcorpus. Dans les refrains, nous avons trouvé 24 lexèmes en verlan : 5 lexicalisés (barge, beur, meuf, vénère, zarbi), 14 semilexicalisés (beflan, caille, caillera, cistra, lerga, pera,

107 reufré, reup, reurti, steupo, téc, téci, zic, zinc) et 5 nonlexicalisés (brolic, lerdea, revé, vileci, znessbi). Notre analyse fait alors la preuve qu’il vaut mieux chercher les verlanisations dans les couplets que les chercher dans les refrains ou d’autres parties. Il semble que les couplets offrent de nombreuses occasions de travailler sur le lexique. Le tableau infra montre combien de verlanisations apparaît dans les couplets des chansons analysées.

Tableau n°31 : Nombre de verlanisations dans les couplets

C1 C2 C3 C4 C5 Couplets 61 53 33 1 0

Sub. n°1Sub. Verlanisations 79 70 46 1 0

Couplets 13 9 8 0 x

Sub. n°2Sub. Verlanisations 15 8 5 0

Légende : Sub. → subcorpus

Nous pouvons finalement constater que tous les lexèmes en verlan découverts dans nos subcorpus sont placés dans les couplets. Les résultats obtenus nous montrent encore une curiosité intéressante : l’occurrence des verlanisations commence à diminuer du milieu de la chanson vers sa fin. Nous pouvons présumer que les premiers couplets représentent le véhicule du succès et c’est la raison pour laquelle les rappeurs y mettent toute leur créativité.

108 VII.2 Fonction du verlan dans les chansons de rap

Dans le chapitre I.6 (p. 33), nous avons parlé des fonctions du verlan en indiquant leur importance. À présent, nous essayons de déterminer les fonctions des verlanisations dans les morceaux des rappeurs français. Après la lecture des textes, nous avons commencé à avoir l’opinion que la fonction identitaire, fortement soulignée par les (socio)linguistes, ne jouaient pas le rôle tellement important dans ce domaine musical. Il faut préciser que la fonction identitaire ne disparaît pas ; elle semble affaiblie et cela surtout dans le rap du Sud de la France où l’on ne verlanise pas fréquemment. Il nous semble que les rappeurs emploient les verlanisations qui sont populaires auprès de leur public formé dans la majorité des cas par les jeunes gens à qui ils veulent s’identifier. Comme ils voudraient dire d’être uns d’entre eux. En vue de se distinguer l’un de l’autre, les rappeurs jouent avec les signifiants et créent des variantes graphiques par lesquelles ils s’expriment leur individualité. Malgré ces acquis, nous avons l’impression que dans ce domaine musical, c’est l’importance de la fonction ludique qui devient non négligeable. Nous appuyons cette hypothèse sur les exemples qui suivent. En fait, nous avons aperçu que les lexèmes verlanisés servent à :

1) créer une rime

• Ici ne peut leur rapporter que quelques barres, Tout ça disparaît quelque part, Comme un père noël noir On nous a mis une bête de be-bar. (Ali feat Hifi : Préviens les autres, ALH01, subcorpus n°1)

• On nous estime toujours en marge du B. Boys au rasta, du punk au scarla, du patient au plus barge (Eska Crew feat Nitro : Fuyez, ESN01, subcorpus n°1)

• Le point névralgique c’est l’Hôtel de Ville Pey Berland Coin sous tutelle rien de magique c’est un vaudeville en verlan

109 (Fayçal : La belle endormie, FAY02, subcorpus n°2)

• Tout le monde cherche des brolics On s’arme comme les soviétiques Et on se nique pour moins d’un smic Je t’explique c’est tous illicites (Lim : Intro, LIM01, subcorpus n°1)

• C’est pour l’amour d’un peuple l’amour d’une zik L’amour d’une jeunesse L’amour qu’on palpe avec peur d’fric Mais avec tant d’richesse (Psy4 de la rime feat Saleem : Le son des bandits, PSS01, subcorpus n°2)

• C’est un pour le show les roh et les rohma, Pour les narvalos qui font les croma, Non, je ne fais pas zarma, je fais juste vibrer les tarma Filles ou garçons je vous invite à bouger vos charhma (Sniper : Trait pour trait, SNI02, subcorpus n°1)

2) produire le son qui sonne

• Tu es yégri et aigri, yeah « G », yeah « cee » (Akhenaton feat Faf Larage et Veust Lyricist : Comode Le degueulasse, AFV01, subcorpus n°2)

• A grand V soit les keufs t’accueillent ou le deuil te cueille (Ali feat Macson Escobar : L’impasse, ALE01, subcorpus n°1)

• Bientôt on s’tèje à la plage du bled (Booba feat Mala : Commis d’office, BOM01, subcorpus n°1)

• Ouais je suis large mentalité de barge (Faf Larage : Rap story – part 2, FAF11, subcorpus n°2)

110

• Des millions de tours de Babel s’agitent Pendant qu’en scred, on pirate leurs disquette (Keny Arkana : Au milieu du chaos, KEN21, subcorpus n°2)

• On est barjot et si t’as chaud, tu peux enlever le haut (Les Sages Poètes De La Rue : Tout le monde fait oh !, LSP11, subcorpus n°1)

3) éviter la cacophonie et faciliter d’articulation

• Je suis ni intégré, ni intégriste, j’reste juste intègre Refré, pourquoi cet air triste cette vie n’est juste qu’un test (Ali : Tolérance zéro, ALI10, subcorpus n°1)

• Dix ans d’pratique sur une beuj au bord du gouffre (Booba feat Sir Doum’s: R.A.P., BSD01, subcorpus n°1)

• Passemoi la zeb et la boisson (Booba : Tallac, BOO01, subcorpus n°1)

• Putain d’accent ! J’veux le même dans mes textes, Mais quand j’rappe cainri tout le monde me dit « Who’s next? » (Hocus Pocus feat B.Love et The Procussion : Vocab, HPT01, subcorpus n°1)

• Les gangsters boivent à l’œil. Les tass-pés tapent à l’œil. (Les Sages Poètes De La Rue : Les gangsters boivent à l’œil, LSP09, subcorpus n°1)

• Des belles meufs m’entourent je me sauve pas non je me sauve pas (Mc Solaar feat Black Jack : Sous les palmiers, MCB02)

4) garder le rythme ou la structure syllabique

111 • Préviens les autres car les porcs Viennent de ren|trer| dans| la| tè-ce, Ils veulent nous rentrer dans l’Iard C’est ce qu’ils se sont ren|trés| dans| la| tête (Ali feat Hifi : Préviens les autres, ALH01, subcorpus n°1)

• Je préférais dealer ma zic que d’la coke ou du shit (Fonky Family : Chez nous, FFA13, subcorpus n°2)

• J’ai| des| sou|cis| dans| la| tête, // blo|qué| en| bas| de| la| tèc’ (Kennedy : Oseille, KND03, subcorpus n°1)

• Donc je reste vrai, frais, scred, prêt (Oxmo Puccino : Quand j’arrive, OXM09, subcorpus n°1)

• Regard froid, vénère, sang froid, en l’air tu les envoies, courageux regardetoi ! (Sinik : Bonhomme, SIN06, subcorpus n°1)

• Mou|ssa| vit| qu’a|vec| des| noirs // et| Hus|sein| a|vec| des| beurs (Sefyu : 3ème guerre, SEF05, subcorpus n°1)

112 EN GUISE DE CONCLUSION : BILAN STATISTIQUE DE LA PARTIE PRATIQUE

Schéma n°1 : Nombre de lemmes (Ls) et de variantes graphiques (VGs)

Corpus (12354 Ls ... 100%) 159 Ls ... 1,3% 201 VGs

Subcorpus n°1 – Nord Subcorpus n°2 – Sud (8065 Ls ... 100%) (8467 Ls ... 100%) 156 Ls ... 1,9% 24 Ls ... 0,3% 192 VGs 30 VGs

Graphe n°1 : Degré de lexicalisation des items verlanisés

Subcorpus n°1 – Nord Subcorpus n°2 – Sud

total (100%) = 156 Ls total (100%) = 24 Ls

8% 14% 30%

46%

46%

56%

lexicalisée semilexicalisée lexicalisée semilexicalisée nonlexicalisée nonlexicalisée

113 CONCLUSION

Au début du présent mémoire était un intérêt pour les verlanisations dans le rap français. Étant consciente des préjugés estimant que le verlan est un procédé d’identification, caractéristique pour les alentours banlieusards, nous nous sommes posée la question si la nature et les fonctions des lexèmes verlanisés sont identiques partout en France, indépendamment de la provenance géographique des usagers. En vue de répondre à cette question, nous avons annoté le corpus des chansons de rap français de sorte qu’il soit possible de le soumettre à l’analyse comparative. Ce corpus nous a servi de notre base de recherche et tous les résultats ont été tirés à partir des calculs de cette base textuelle. L’élaboration du corpus était soumise aux critères chronologique (2001 – 2011) et géographique (Nord – Sud de la France). D’un point de départ, nous a servi le RapCor, corpus des chansons de rap, créé par les passionnés de ce genre musical et de la langue des rappeurs à l’Université Masaryk de Brno. Comme le RapCor ne contenait pas toutes les chansons dont nous avions eu besoin, nous avons dû traiter certains morceaux par nos soins. Finalement, nous avons obtenu le corpus qui se compose de 270 chansons et qui se subdivise en deux subcorpus : subcorpus n°1 – Nord de la France, subcorpus n°2 – Sud de la France. Chacun d’entre eux contient 135 chansons. La structure du présent mémoire bipartie. Dans la première partie, nous avons précisé le cadre théorique sur lequel nous nous sommes appuyée au cours de la recherche dont les résultats sont décrits dans la seconde partie. Dans le chapitre I, nous nous sommes focalisée sur les concepts de verlan d’un point de vue lexicographique, (socio)linguistique ainsi que d’un point de vue du public non spécialiste afin de montrer les diverses acceptions possibles de ce phénomène langagière. Les ouvrages des lexicographes, choisis au hasard, nous ont offert trois hyperonymes du mot verlan : argot, jargon et transformation verbale argotique. Seul deux dictionnaires sur huit ont présenté la définition convenable. Les autres dictionnaires ont proposé les concepts déroutants. Pou démontrer que le verlan n’est ni l’argot ni le jargon, nous avons inclus les passages concernant ces deux langages de connivence. Nous avons puisé dans les ouvrages des (socio)linguistes qui prouvent que le processus de verlanisation est lié à l’argot mais qu’il ne faut pas confondre ces deux notions. Le verlan n’est pas un langage en soi. Dans ces travaux,

114 à côté de la question « qu’estce que le verlan ? », nous pouvons fréquemment voir une question liée aux fonctions du verlan. En comparant plusieurs articles et monographies sur cette question, le lecteur se rend compte que le verlan n’est pas un simple jeu de mots ; il fonctionne comme signe d’identification qui enrichit le discours de ses usagers. Tandis que les (socio)linguistes trouvent le verlan intéressant, le public non spécialiste le considère plutôt comme une menace contre laquelle il faut lutter. En plus, à cause de la stigmatisation de la part des médias, les « verlanisateurs » sont présentés comme des délinquants habitant les banlieues. Cependant, les verlanisations s’intègrent incontestablement dans le français courant. Elles perdent leur expressivité, se généralisent et font partie du lexique de presque chaque Français et personne se rend plus compte du procédé de leur création. En vue de déchiffrer le mot de départ d’un lexème verlanisé, il a fallu se familiariser avec les spécificités qui se présentent sur le plan phonétique, morphosyntaxique ainsi que sémantique. À l’instar de Marc Sourdot et de son récapitulatif des critères de l’argot et d’autres parlures, nous avons essayé finalement d’indiquer l’importance des fonctions linguistiques du verlan. Le chapitre II définit le domaine de notre recherche. Comme nous avons travaillé sur deux groupes des rappeurs, constitués de façon à ce que les uns proviennent du Nord, les autres du Sud de la France, nous avons visé à saisir les nuances entre nos subcorpus. D’abord, nous avons fait une remarque sur les thèmes principaux, ensuite nous avons abordé le plan lexical. Nous avons esquissé également la problématique du classement de ce genre musical. La partie pratique est précédée par celle concernant la méthodologie (chap. III) dans laquelle nous avons décrit l’acquisition du matériel et le traitement des chansons pour le RapCor. Nous y avons également présenté les interprètes et les chansons analysées. La partie pratique propose nos observations et nos évaluations qui ont pour l’objectif de faire voir les nuances entre le caractère et la fonction du verlan chez les rappeurs du Nord et du Sud de la France. Le chapitre IV analyse la variabilité des verlanisations. Nous avons mis l’accent sur la typologie des procédés de codage, sur les modifications graphiques et sur le verlan créé à partir des emprunts. La multiplicité des variantes graphiques nous a incité à lemmatiser pour éviter la désambiguïsation. Le chapitre V apporte des preuves que la lemmatisation ne peut pas se faire de façon automatique car les dictionnaires ne contiennent pas tous les

115 items recensés. S’ils en contiennent quelquesuns, leur lemme diffère souvent d’un dictionnaire de référence à l’autre. Nous proposons donc un processus complexe de filtrage et de critères qui nous a aidé finalement à désambiguïser les variantes graphiques et à déterminer leurs lemmes. Le sujet du chapitre VI est une comparaison de l’utilisation des termes verlanisés d’abord au niveau des chansons, puis au niveau des interprètes. Nous avons repérer les chansons les plus riches en verlanisation, les rappeurs les plus/moins productifs, les verlanisations préférées et les hapax des subcorpus. Dans le chapitre VII, nous avons étudié la localisation des verlanisations dans la structure des morceaux et la fonction du verlan dans le domaine musical. Maintenant, nous tentons de résumer nos résultats par rapport à nos hypothèses de départ : la fréquence des verlanisations estelle alors plus haute dans le subcorpus du Nord que dans le subcorpus du Sud de la France où les termes en verlan sont absents ? Les rappeurs du Nord utilisentils alors fortement les verlanisations nonlexicalisées ? Par contre, leurs confrères du Sud, préfèrentils les verlanisations en usage commun ? La créativité sur le plan graphique se manifeste elle plutôt par les interprètes du Nord de la France ? Nous pouvons constater que chacune des hypothèses a été confirmée par notre recherche (voir En guise de conclusion : bilan statistique de la partie pratique, Schéma n°1). L’analyse que nous avons faite a apporté, en outre, d’autres acquis intéressants sur le verlan. L’analyse quantitative a prouvé que les verlanisations abondent dans le lexique des rappeurs du Nord de la France. Ayant observé l’occurrence des termes verlanisés dans les chansons, nous pouvons arriver à la conclusion que leur fréquence diminue au fur et à mesure que l’on s’éloigne de la région d’ÎledeFrance. Hélas, notre corpus n’était pas élaboré de façon qu’il soit possible d’étudier cette problématique plus profondément. Quant au degré de lexicalisation, il s’est avéré que le subcorpus du Nord est riche en verlanisations nonlexicalisées. Nous pouvons dire que rien ne limite la créativité langagière des rappeurs. Au début de notre recherche, nous avons fait l’observation rapide constatant que les rappeurs du Nord de la France évitent les mots en verlan qui sont officiellement lexicalisés et généralisés. Cette présomption ne s’est pas confirmée car les verlanisations usées le plus fréquemment sont justement les expressions de ce typeci. Nous pouvons au moins proclamer que dans

116 le Nord, on invente et emploie les nouvelles expressions verlanisées, tandis que dans le Sud de la France, on a la tendance à emprunter les termes intégrés dans le français courant. L’étendue de notre corpus ne nous a pas vraiment permis d’apprendre si les nouveaux termes verlanisés prennent leur naissance aussi dans le Sud de la France. L’individualité de chaque interprète se manifeste par les modifications graphiques qui sont nombreuses notamment dans le subcorpus du Nord. Les interprètes se servent à la fois des procédés de codage plus complexes et du verlan à partir des emprunts. Les nombreuses variantes graphiques et leur haute fréquence soutiennent l’hypothèse que les verlanisations présentent l’élément fortement identitaire. Nous nous permettons de postuler que la fonction identitaire du verlan s’atténue sous l’influence du facteur diatopique. En vertu de nos résultats, il apparaît que dans le Sud, les rappeurs profitent plutôt de la fonction économique en employant un nombre des verlanisations apocopées. Nous pouvons également résumer que, dans le domaine musical, l’importance de la fonction identitaire semble être aussi important que la fonction ludique. En fait, dans les chansons, le verlan sert souvent à créer une rime, à garder le rythme, à éviter la cacophonie ou à faciliter l’articulation. Dans notre travail, nous avons présenté certaines nuances entre l’utilisation du verlan par les rappeurs français dont les uns proviennent du Nord, les autres du Sud de la France. Pendant que nous avions examiné notre corpus pour répondre à nos hypothèses, de nouvelles questions surgissaient. Nos acquis pourraient se poser comme le point de départ pour une autre recherche. Nous avons mentionné plus haut que notre corpus n’était pas suffisamment large pour observer de façon plus détaillée l’influence du facteur diatopique sur la fréquence des verlanisations dans le lexique des rappeurs. Il serait alors intéressant de vérifier notre hypothèse sur un corpus plus convenable. De même, il ne serait pas sans intérêt de réaliser une recherche orientée exclusivement aux rappeurs du Sud de la France, en vue de découvrir s’ils introduisent quelques néologismes verlanisés. Quoi qu’il en soit, la problématique du verlan et de sa réalisation langagière reste une source inépuisable pour les spécialistes en sociolexicologie.

117 Liste des tableaux

Tableau n°1 : Verlanisations dans Le nouveau Petit Robert de la langue française 2008 – exemples...... 26 Tableau n°2 : Verlan suivi d’autres procédés de formation – exemples...... 27 Tableau n°3 : Entrée des lexèmes standard et verlanisés – exemples du Nouveau Petit Robert de la langue française 2008 ...... 31 Tableau n°4 : Importance des fonctions linguistiques du verlan...... 33 Tableau n°5 : Structure du subcorpus n°1 – Nord de la France ...... 44 Tableau n°6 : Structure du subcorpus n°2 – Sud de la France ...... 46 Tableau n°7 : Albums non issus du RapCor...... 47 Tableau n°8 : Structure du corpus – Nord et Sud...... 48 Tableau n°9 : Rappeurs provenant du Nord de la France...... 50 Tableau n°10 : Groupe de rap provenant du Nord de la France...... 51 Tableau n°11 : Rappeurs provenant du Sud de la France...... 52 Tableau n°12 : Groupe de rap provenant du Sud de la France...... 52 Tableau n° 13 : Généralitées sur les « minicorpus » des interprètes essentiels . 56 Tableau n°14 : Typologie des procédés de codage complexes – exemples ...... 59 Tableau n°15 : Modifications graphiques...... 63 Tableau n°16 : Variantes graphiques du schwa ...... 64 Tableau n°17 : Verlanisations des emprunts ...... 65 Tableau n°18 : Pseudonymes verlanisés...... 68 Tableau n°19 : Dictionnaires consultés pendant la recherche ...... 70 Tableau n°20 : Notation du schwa dans les dictionnaires ...... 71 Tableau n°21 : Verlanisations des subcorpus...... 81 Tableau n°22 : Structure interne des verlanisations ...... 84 Tableau n°23 : Chansons les plus riches en verlanisations ...... 89 Tableau n°24 : Chansons avec certaine verlanisation (interprètes)...... 90 Tableau n°25 : Occurrence des verlanisations dans les « minicorpus » des rappeurs et des featurings (*)...... 96 Tableau n°26 : Variantes graphiques – lemme versus lemmes ...... 96 Tableau n°27 : Verlanisations dans les structures répétitives ...... 102 Tableau n°28 : Verlanisations préférées dans les subcorpus...... 102 Tableau n°29 : Parties des chansons avec/sans verlanisation

118 (subcorpus n°1 – Nord)...... 106 Tableau n°30 : Parties des chansons avec/sans verlanisation (subcorpus n°2 – Sud)...... 107 Tableau n°31 : Nombre de verlanisations dans les couplets ...... 108

119 Liste des graphiques

Graphe n°1 : Nature des chansons de notre corpus...... 47 Graphe n°2 : Structure du procédé de codage (VGL – corpus entier)...... 61 Graphe n°3 : Structure du procédé de codage (VGL – subcorpus n°1)...... 62 Graphe n°4 : Structure du procédé de codage (VGL subcorpus n°2)...... 62 Graphe n°5 : Nombre des verlanisations écrit avec/sans trait d’union ...... 72 Graphe n°6 : Structure interne des verlanisations écrites avec un trait d’union . 73 Graphe n°7 : Source des lemmes verlanisés...... 80 Graphe n°8 : Structure du procédé de codage (L – subcorpus n°1) ...... 83 Graphe n°9 : Structure du procédé de codage (L subcorpus n°2)...... 83 Graphe n°10 : Structure interne des verlanisations du subcorpus n°1 ...... 85 Graphe n°11 : Structure interne des verlanisations du subcorpus n°2 ...... 85 Graphe n°12 : Chansons avec/sans verlanisation (corpus entier) ...... 87 Graphe n°13 : Chansons avec/sans verlanisation – subcorpus n°1 ...... 88 Graphe n°14 : Chansons avec/sans verlanisation – subcorpus n°2 ...... 88 Graphe n°15 : Nombre de verlanisations dans les chansons des subcorpus ...... 89 Graphe n°16 : Rappeurs essentiels employant/n’employant pas le verlan...... 94 Graphe n°17 : Rappeurs essentiels employant/n’employant pas le verlan...... 94 Graphe n°18 : Structure des chansons – subcorpus n°1...... 106 Graphe n°19 : Structure des chansons – subcorpus n°2...... 106

120 Liste des schémas

Schéma n°1 : Naissance de l’argot commun...... 16 Schéma n°2 : Argot vs jargon ...... 18 Schéma n°3 : Nombre de variantes graphiques (VGs) et de variantes graphiques – lemmes (VGLs)...... 58 Schéma n°4 : Succession des filtres...... 75 Schéma n°5 : Nombre de variantes graphiques – lemmes (VGLs) et de lemmes (Ls) du corpus ...... 81 Schéma n°6 : Généralités sur le corpus (chansons) ...... 87 Schéma n°7 : Généralités sur le corpus (interprètes, rappeurs, featurings)...... 93 Schéma n°8 : Hapax des subcorpus et leur structure interne ...... 103 Schéma n°9 : Nombre de couplets, de refrainset d’autres parties des chansons...... 105

121 Liste des cartes

Carte n°1 : Division de la scène musicale française...... 49

122 Liste des abréviations

ABR : abréviation AP : autre partie BQ : Bien ou quoi ? C : couplet cf. : confer CH : chanson CTT : Comment tu tchatches ! DA : Dictionnaire de l’argot et de ses origines DZ : Dictionnaire de la zone ex. : exemple F : featuring GDLSL : Grand dictionnaire, Linguistique et sciences du langage I : interprète IF : ÎledeFrance L : lemme LC : Lexik des cités n° : numéro p. : page PACA : ProvenceAlpesCôted’Azur PL : Pays de la Loire PR : Le nouveau Petit Robert de la langue française 2008 R : rappeur RA : RhôneAlpes REF : refrain sub. : subcorpus tab. : tableau TLFi : Trésor de la langue française informatisé V : verlanisation VG : variante graphique VGL : variante graphique lemme VP : version « pochette » vs : versus

123 BIBLIOGRAPHIE

Articles et monographies

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Dictionnaires

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130 SITOGRAPHIE http://www.persee.fr/web/guest/home http://www.cairn.info/ http://textometrie.enslyon.fr/ http://www.banlieueconnexion.com http://www.rap2france.com http://www.parolesmania.com/ http://www.kenyarkana.com/ http://www.lemonde.fr/ http://www.lefigaro.fr/ http://www.lexpress.fr/ http://www.liberation.fr/ http://www.evene.fr/ http://www.elle.fr/ http://www.myspace.com http://www.planimetrieculturali.org http://www.brainmagazine.com http://www.jukebo.fr http://en.wikipedia.org http://www.billetreduc.com http://musique.arabe.overblog.com http://www.stylehiphop.com http://djsteady.free.fr http://www.elodierama.fr http://en.wikipedia.org http://www.rfimusique.com http://www.booskap.com http://afiavi.free.fr http://www.lavi2rue.com http://eskacrew.skyrock.com

131 http://skeuddealers.com http://madosedeprose.blogspot.com http://www.2kmusic.com http://www.jewandamagazine.com http://www.whosnext.ch http://www.ramdam.com http://rapmarseille.com http://www.enseignemoi.com http://www.musicstory.com http://www.trash92.com http://rapadonf.fr http://fr.wikipedia.org

132 Annexe 1

Tableau n°1 : Featurings employant le verlan

Corpus – Nord et Sud Scène musicale Interprète Vrai nom Année Origine ethnique ABR (département) Boulox Djibi Diop x x HautsdeSeine BOU Bram’s Ibrahim Keita 1973 guinéenne HautsdeSeine BRA Doum’s x x x x DOU Hifi x x martiniquaise HautsdeSeine HIF Issaka x x x HautsdeSeine ISS Jacky Brown Jacky Texeira x capverdienne x JBR Kery James Alix Mathurin 1977 haïtienne ValdeMarne KER Le célèbre Bauza x x malienne Paris BAU SeineSaint Macson Escobar x 1981 zaïroise MES Denis Mala x x x HautsdeSeine MAL Nessbeal Nabil Selhy 1978 marocaine HautsdeSeine NES Princess Aniès 1979 taïwannaise Vald’Oise PRA Ismaël Taïro 1978 francomarocaine Paris TAI JoléMénébhi françaisepolonaise Vaitea x x x VAI italienne Zeler Said Hamani 1983 algérienne HautsdeSeine ZEL

Légende : ABR → abréviation

Tableau n°2 : Featurings n’employant pas le verlan

Corpus – Nord et Sud Scène musicale Interprète Avec... Il s’agit de... (région) Aty.K LIM chanteuse d’origine péruvienne ÎledeFrance rappeur français originaire de Black Jack MCS ÎledeFrance Côte d’Ivoire B.Love HPO x x

Élodie Rama HPO chanteuse d’origine antillaise ÎledeFrance

Expérimental FAY rappeur lyonnais RhôneAlpes tromboniste et arrangeur Fred Wesley HPO (Alabama) américain de jazz et de funk

133 Corpus – Nord et Sud Scène musicale Interprète Avec... Il s’agit de... (région) Houari Marsaoui LIM chanteur algérien (Algérie)

Keurspi FAY rappeur bordelais Aquitaine

Keydj ALI rappeur français ÎledeFrance ProvenceAlpes Léa Castel SOP chanteuse de R’n’B marseillaise Côte d’Azur Léya Massry BOO chanteuse d’origine libanaise ÎledeFrance flûtiste de jazz français originaire ProvenceAlpes Magic Malik HPO de Côte d’Ivoire Côte d’Azur Main Concept KAL groupe de rap étranger (Allemagne) PSY ProvenceAlpes Mino rappeur marseillais SOP Côte d’Azur ProvenceAlpes Moïse PSY rappeur marseillais Côte d’Azur groupe de rap composé de LIM, Movez Lang LIM Cens Nino, Boulox, Le R.A.T., ÎledeFrance Zeler membre du groupe de néo metal Nitro ESK ÎledeFrance français Enhancer artiste de ragga français originaire Nuttea LSP ÎledeFrance de Guadeloupe Piero Battery FAF chanteur de R’n’B français x chanteur, musicien, producteur Omar HPO (Londres) britannique ProvenceAlpes RPZ KEN rappeur marseillais Côte d’Azur rappeur français, membre du ProvenceAlpes Sako PSY groupe Chiens de Paille Côte d’Azur Saleem PSY x x

Slam Mc FAY rappeur bordelais Aquitaine rappeur français d’origine ProvenceAlpes Stone Black PSY sénégalaise Côte d’Azur membre du groupe The Stro The 89th Key HPO (ÉtatsUnis) Procussions auteurcompositeur et interprète Taïriq Keda HPO x originaire de Bordeaux The Procussions HPO groupe hiphop américain (ÉtatsUnis) groupe de world music et de jazz Tribeqa HPO Pays de la Loire français DIA chanteuse de R’n’B d’origine Vitaa RhôneAlpes SIN italienne ProvenceAlpes Veust Lyricist PSY rappeur marseillais Côte d’Azur

134 Scène musicale Interprète Avec... Il s’agit de... (région) Vorass FAY rappeur bordelais Aquitaine rappeur français d’origine Wallen ALI ÎledeFrance marocaine artiste jamaïcain de reggae et de Wayne Wonder BOO (Jamaïque) R’n’B chanteuse de R’n’B de la Zaho DON x nationalité algérienne

Source principale http://www.banlieueconnexion.com http://fr.wikipedia.org http://www.rap2france.com

Source secondaire http://www.myspace.com http://www.planimetrieculturali.org http://www.brainmagazine.com http://www.jukebo.fr http://en.wikipedia.org http://www.billetreduc.com http://musique.arabe.overblog.com http://www.stylehiphop.com http://djsteady.free.fr http://www.elodierama.fr http://en.wikipedia.org http://www.rfimusique.com http://www.booskap.com http://afiavi.free.fr http://www.lavi2rue.com http://eskacrew.skyrock.com http://skeuddealers.com http://madosedeprose.blogspot.com http://www.2kmusic.com http://www.jewandamagazine.com http://www.whosnext.ch http://www.ramdam.com http://rapmarseille.com http://www.enseignemoi.com http://www.musicstory.com http://www.trash92.com http://rapadonf.fr

135 Tableau n° 3 : Liste des chansons analysées

Subcorpus n°1 – Nord Ali : CHAOS & HARMONIE (2005) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Rappel à l’ordre 1 6 ALI01 Génération Scarface 2 3 intro ALI02 L’impasse 3 6 ALE01 (feat Macson Escobar) Observe 2 2 outro ALI03 Golden boy 2 2 ALI04 Oraison funèbre 2 1 + 1 ALI05 La vérité reste la vérité 3 2 ALI06 Chaos et harmonie 2 2 intro ALI07 Préviens les autres 2 4 intro ALH01 (feat Hifi) Langage venimeux 1 0 ALI08 Le chant des sirènes 2 2 ALI09 Sang froid 3 4 AKW01 (feat Keydj et Wallen) Tolérance zéro 3 1 + 1 + 1 ALI10 A.M.O.U.R. 3 3 intro ALI11 BOO : PANTHÉON (2004) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Tallac 1 0 outro BOO01 Le Mal par le Mal 2 2 BOO02 Commis d’office 4 2 intro / outro BOM01 (feat Mala) No. 10 3 3 intro BOO03 Hors-saison 3 4 outro BOO04 R.A.P. 3 6 intro BSD01 (feat Sir Doum’s) Baby 3 7 intro / outro BON01 (feat Nessbeal) La faucheuse 3 3 intro / outro BOO05 Mon son 3 2 BOO06 Alter ego 2 1 outro BOW01 (feat Wayne Wonder) Pazalaza pour sazamuser 3 0 BIB01 (feat Issaka et Bram’s) Avant de partir 2 3 intro BLM01 (feat Léya Massry) DIA : DANS MA BULLE (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) La boulette 3 8 intro / outro DIA07 Ma France à moi 3 4 outro DIA08

136 DIA : DANS MA BULLE (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Feuille blanche 3 2 + 1 outro DIA09 Jeune demoiselle 4 3 intro / outro DIA10 Car tu portes mon nom 3 8 outro DIA11 Marine 4 5 + 1 outro DIA12 Dans ma bulle 3 8 outro DIA13 Par amour 5 4 outro DIA14 Big up 3 5 outro DIA15 Confessions nocturnes 1 0 intro / outro DIV01 (feat Vitaa) T.S. 3 2 + 1 outro DIA16 Me revoilà 4 3 inter / outro DIJ01 (feat Jacky Brown) Cause à effet 2 3 DIA17 Petite banlieusarde 1 0 DIA18 DLP : LES HISTOIRES EXTRAORDINAIRES D’UN JEUNE DE BANLIEUE (2005) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Intro 1 0 DLP08 Une histoire extraordinaire 3 3 intro / outro DLP09 Inspecteur Disiz 3 3 intro / outro DLP20 Fuck you Part I 3 5 intro / outro DLP10 Jeune de banlieue 3 6 + 1 DLP11 Lyly 3 3 intro / outro DLP12 Mélissa 3 6 intro DLP13 Bo gosse 3 3 intro DLP14 La fille facile 2 1 + 1 DLP15 Miss Désillusion 2 7 DLP16 Interlude Mc Pikachou 1 0 DLP17 Fuck you Part II 3 2 intro / outro DLP18 Outro 1 0 intro / outro DLP19 FLY : J’ÉCLAIRE MA VILLE (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) 1 pour la plume 2 3 FLY01 J’éclaire ma ville 2 0 intro / inter / outro FLY02 Mes sources 2 2 inter FLY03 Ça fait du bien d’le dire 2 2 + 1 outro FLY04 Notre existence 2 6 intro FLY05 Rien ne nous appartient 3 3 intro / inter FLY06 Tourner la page 1 0 FLY07 HPO : PLACE 54 (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois)

137 HPO : PLACE 54 (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Place 54 1 0 intro HPO09 Quitte à t’aimer 3 8 + 1 HPM01 (feat Magik Malik) Smile 2 1 + 1 + 1 HOM01 (feat Omar) Recyclé 3 15 HPF01 (feat Fred Wesley et Stro the 89th Key) Normal 3 3 + 5 intro HPO10 Vocab 3 6 HPT01 (feat T.Love et The Procussions) Mr Tout le monde 2 5 outro HPO11 intro / inter A, B / Tournée 3 0 HP012 outro Touriste 3 3 + 3 HPE01 (feat Elodie Rama et Tribeqa) Je la soul 2 8 HPK01 (feat Taïriq Keda) Histoire d’une VHS 3 7 HPO13 Voyage immobile 1 0 HPO14 KND : CICATRICE (2009) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Bâtard de Français 3 4 intro / outro KND02 Oseille 3 1 + 4 intro / outro KND03 Cicatrice 3 3 KND04 LIM : DÉLINQUANT (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Intro 2 0 intro / inter / outro LIM01 Si on réussit 2 3 intro LIZ01 (feat Zeler) intro (2x) / On vit comme des bandits 3 4 LID01 (feat Denver) outro (2x) Mon mec s’est fait péter 3 9 intro / inter LMA01 (feat Movez Lang et Aty.K) J’ai trop 3 6 intro LML01 (feat Movez Lang) Je rap 3 4 LIB01 (feat Boulox) Outro 1 0 LIM02 LSP : APRÈS L’ORAGE (2002) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Après l’orage 3 3 intro / inter LSP08 Les gangsters boivent à l’œil 3 3 intro / inter LSP09 Oubliemoi 3 4 intro LSP10 Dis-moi la vérité 3 5 intro LSN01 (feat Nuttea)

138 LSP : APRÈS L’ORAGE (2002) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Tout le monde fait oh ! 3 3 intro / outro LSP11 No one to care 3 4 intro / inter / outro LSP12 Leçon de vie pour avancer 3 8 intro LSP13 MCS : CHAPITRE 7 (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Intreau 1 0 MCS72 Carpe diem 3 3 MCS73 Da Vinci Claude 3 1 + 1 + 2 MCS74 In god we trust 2 2 outro MCS75 Coup d’œil dans le métro 3 2 + 1 MCS76 Si on t’demande 3 12 MCS77 Sous les palmiers 3 4 MCB02 (feat Black Jack) Mollah Solaar 3 3 MCS78 L’auberge du Bouleau Blanc 2 5 MCS79 Avec les loups 2 3 MCS80 Merci 1 0 MCS81 intro / inter (2x) / Impact avec le diable 3 0 MCS82 outro OXM : L’AMOUR EST MORT (2001) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Quand j’arrive 3 4 intro / outro OXM09 Demain peut-être 4 6 OXM10 Le tango des belles dames 3 4 OXM11 J’ai mal au mic 2 3 OXM12 Le laid 2 2 intro OXM13 Ghettos du monde 3 6 + 2 intro / inter / outro OXM14 S 136.35 3 5 outro OXM15 Premier suicide 3 2 OXC01 (feat Le Célèbre Bauza) Faisle pour moi 3 4 intro OXM16 (feat Keity Slake) À ton enterrement 3 5 outro OXD01 (feat Dany Dan) Mine de cristal 3 2 intro OXM17 L’amour est mort 1 0 OXM18 Impasse désillusion 2 1 OXM19 (feat Kery James) RIM : L’ENFANT DU PAYS (2004) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Portrait 3 3 outro RIM01 Dans la tête d’un jeune Beur 2 4 outro RIM02

139 RIM : L’ENFANT DU PAYS (2004) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Au tournant 3 3 intro / outro RIM03 (feat Janice Leca) Je m’adapte 3 3 + 1 RIM04 Intact 4 4 RIJ01 (feat Kery James) SEF : SUISJE LE GARDIEN DE MON FRÈRE ? (2008) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Suis-je le gardien de mon frère ? 3 4 intro / outro SEF02 Molotov 4 3 4 SEF03 Le journal 3 4 SEF04 3ème guerre 3 0 intro / inter A, B, C SEF05 Au pays du zahef 3 3 intro SEF06 Mon public 3 4 SEF07 Sans plomb 93 3 4 SEF08 SIN : SANG FROID (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Autodestruction 3 6 SIN04 Mon pire ennemi 3 6 outro SIN05 Ne dis jamais 3 4 intro / outro SIV01 (feat Vitaa) Bonhomme 3 3 intro SIN06 La cité des anges 3 4 intro SIN07 SNI : TRAIT POUR TRAIT (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Dans mon monde 3 3 SNI01 Trait pour trait 3 3 SNI02 Donne tout 3 8 SNI03 La France (Itinéraire d’une polémique) 3 4 intro / inter / outro SNI04 Subcorpus n°2 – Sud AKH : SOLDATS DE FORTUNE (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Soldats de fortune 3 4 AKH15 Alamo 2 2 outro AKH16 Troie 3 3 intro / outro AKH17 (feat Sako) Vue de la cage 2 4 outro AKP01 (feat PSY) Canzone di malavita 2 4 intro AKH18 intro (2x) / outro L’école de samba 3 3 AIV01 (feat Iam et Veust Lyricist) (11x) Déjà les barbelés 2 2 intro ASK01 (feat Sako)

140 AKH : SOLDATS DE FORTUNE (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Dans la cité 2 2 AMV01 (feat Moïse et Veust Lyricist) Bien paraître 2 4 AIS01 (feat Iam et Sako) Comode Le Dégueulasse 3 4 intro (2x) AFV01 (feat FAF et Veust Lyricist) La fin de leur monde 2 0 AKS01 (feat Shurik’n) Bronx river 2 3 outro AKH23 Do it, do it, do it 2 3 ASK02 (feat Sako) Crèverie haut de gamme 2 14 AKF01 (feat FRE) Quand ils rentraient chez eux 3 3 AKH21 (feat Toko) DON : VAPEURS TOXIQUES (2002) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Apocalypse 3 3 inter DON01 Petit Bordel II 3 4 outro DON02 Vapeurs Toxiques 3 3 DON03 Aaah 3 2 DON04 DON : JUNGLE DE BÉTON (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Lune de miel 3 5 intro DOZ01 (feat Zaho) Anesthésie général 3 3 intro DON05 Ghetto Youth 3 6 intro / outro DON06 ESK : INSTINCT DE SURVIE (2005) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Introductif 1 1 outro (3x) ESK01 E.S.K.A. 3 6 outro ESK02 Ma vie c’est 3 12 intro / outro ESK03 Fuyez 3 6 outro ESN01 (feat Nitro) Liberta 3 3 intro ESK04 FAF : RAP STORIES (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Le soul dans le sang 2 6 intro / outro FAF03 Millionnaire 3 4 intro FAF04 Pas le temps 3 1 + 4 intro FAF05 Ta meuf 3 8 inter / outro (2x) FAF06 Rap story (part 1) 1 0 intro FAF07 Demande pardon 2 5 FAF08

141 FAF : RAP STORIES (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) C’est pas ma faute 3 3 FAF09 C’est de l’or 3 5 intro / inter FAT01 (feat Taïro) intro / inter A, B / Prise d’otage 3 0 FAF10 outro Une faveur 2 3 FAP01 (feat Piero Battery) Rap story (part 2) 1 0 intro FAF11 intro / inter A, B / Le brancheur 3 3 FAF12 outro Qui on est 3 6 intro FAF13 FAY : SECRETS DE L’OUBLI (2009) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Le sentier de l’écriture 2 4 FAY01 La belle endormie 2 2 FAY02 Fragments de vies 3 0 FAK01 (feat Keurspi et Slam Mc) La morale d’un candide 3 3 intro / outro FAY03 Carnets du soussol 2 2 FAY04 (feat Ilyes) Vraies liaisons et lesions 2 2 intro / outro FAY05 Arabesques 3 3 FAV01 (feat Vorass et Experimental) Mon ange gardienne 3 3 intro FAY08 Rapsodies (feat JDay, Dilem, Clyde, Dreck, 2 2 FAJ01 Nordine L’Archer, So et Drago) In articulo mortis 2 2 FAY09 FFA : MARGINALE MUSIQUE (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Les affaires reprennent 4 3 outro FFA01 C’est plus comme avant 3 3 intro FFA02 La guerre 4 8 FFA03 Le quartier 2 2 inter FFA04 Comme on débarque 4 3 FFA05 C’est ça ou rien 4 2 FFA06 C’est tout ce qu’on a 4 6 FFA07 1984 - fallait que je le dise 1 0 outro FFK01 (feat KAL) Marginale musique 4 4 intro FFA08 Le plus grand des voyous 4 0 FFA09 On s’invite 4 4 intro FFA10 Dans les yeux 4 0 FFA11 Ils le savent 4 3 FFA12

142 FFA : MARGINALE MUSIQUE (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Chez nous 4 2 intro FFA13 Cherche pas 4 5 FFA14 IAM : REVOIR UN PRINTEMPS (2003) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Lâches 3 0 intro / outro IAM40 Armes de distraction massive 2 6 intro / outro IAM39 Visage dans la foule 2 6 IAM45 Ici ou ailleurs 3 3 intro IAM41 (feat Syleena Johnson) Tiens 2 4 outro IAM43 Fruits de la rage 2 4 intro / inter / outro IAM36 Murs 3 6 intro / outro IAM38 21 04 2 3 intro / outro IAM37 Aussi loin que l’horizon 3 6 intro (2x) / outro IAM46 KAL : CRACHEUR DE FLAMMES (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Cracheur de flammes 3 3 KAL01 KEN : ENTRE CIMENT ET BELLE ÉTOILE (2006) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) La missile suit sa lancée 1 0 KEN01 J’viens d’l’incendie 4 0 KEN02 J’me barre 3 4 outro KEN03 Sans terre d’asile 3 4 KEN12 Entre les lignes : Une goutte de plus 1 0 KEN13 Prière 1 0 KEN14 KEN : L’ESQUISSE 2 (2011) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Buenos dias 1 0 intro KEN16 J’arrive du monde de demain 2 4 intro / outro KEN17 Marseille 3 3 intro / outro KKR01 (feat KAL et RPZ) intro / inter A, B, C / V pour vérités 4 0 KEN18 outro Je passe le salut 3 2 + 1 KEN19 Hors game 3 3 KEN20 Au milieu du chaos 1 0 outro (2x) KEN21 Freestyle du maquis 3 5 KEN22 À la vibe et mektoub 3 2 intro / inter / outro KEN23 Nature sauvage 2 2 intro KEN24 Petit soldat 3 3 intro / outro KEN25

143 KEN : L’ESQUISSE 2 (2011) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Planquezvous 3 4 + 1 KEN26 Une décennie d’un siècle 3 2 outro KEN27 Old school dédicace 1 0 KEN28 À l’ombre des jugements 2 4 KEN29 Odyssée d’une incomprise 1 0 KEN30 LAL : MENTALITÉ PIRATE (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) L’envie de vaincre 3 0 LAL01 Fleur fanée 3 3 outro LAL02 L’enfant de Marseille 4 3 LAL03 Le chant des pirates 3 4 intro A, B / outro LAL04 Entre 2 flammes 2 2 outro LAL05 Johnny Hama 2 0 LAL06 PSY : BLOCK PARTY (2002) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Voici 1 0 intro PSY01 Le son des bandits 3 1 inter / outro PSS01 (feat Saleem) Sale bête 3 7 intro PSY02 On naît, on vit, on meurt 3 7 PMA01 (feat Mino, LAL et Stone Black) Classic 3 4 PSY03 Terre promise 2 2 outro PSY04 Block party 2 6 PSY05 L’enjeu 2 6 outro PSY06 Repère les collabos 3 5 inter (4x) PSY07 La vengeance aux 2 visages 3 1 outro PSY08 2 sortie 3 8 intro PSY09 À cœur ouvert 2 2 outro PSY10 Tchao tchao 3 6 intro / inter / outro PSY11 Jamais j’oublierai 2 7 PSY12 SOP : PUISQU’IL FAUT VIVRE (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Donc 1 0 SOP01 Le divan 1 0 SOP02 Mélancolique anonyme 3 2 intro / inter / outro SOD01 (feat DIA) Bombe humaine 2 0 outro SOP03 Halla halla 2 3 intro / inter / outro SOP04 Dans ma tête 1 0 SOP05 Moi j’ai pas 2 3 outro SOP06

144 SOP : PUISQU’IL FAUT VIVRE (2007) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) La famille 3 5 intro / inter (4x) SOL01 (feat Léa Castel) Tant que dieu 3 5 SOM01 (feat Mino) Juste faisle 3 4 intro SOR01 (feat Le Rat Luciano) À la bien 3 1 + 3 intro SOP07 Welcome 3 7 inter / outro SPY01 (feat PSY) Parlemoi 2 4 intro / outro SOP08 Ferme les yeux et imaginetoi 3 4 outro SOB01 (feat Blacko) Passemoi le mic 3 2 outro SOP09 Puisqu’il faut vivre 1 0 SOP10 Album FRENCH CONNECTION (2003) Couplet Refrain Titre Autre partie ABR (nombre) (x fois) Watcha gonna do 2 2 intro / inter FAM01 (FAF feat. Main Concept) Crève la faim 2 2 intro FRK01 (FRE feat K.Rhyme Le Roi et Massive Toene)

Légende : intro → introduction inter → interlude outro → outro / coda ABR → abréviation attribuée à une chanson en gras → chanson avec un lexème verlanisé

145 Annexe 2

Tableau n°1 : Variantes graphiques des verlanisations

Abréviation Procédé de Variante graphique VGlemme Mot de départ morph. formation57 as as pron. VERL ça àl àl adv. VERL là ap ap adv. VERL pas och och adj. VERL chaud babtou babtou n. VERL toubab barge, barges, barje barge, barje adj. VERL + APO barge, barges, barjes barge, barje n. VERL + APO jobard barjot barjot adj. VERL barjots barjot n. VERL bebar bebar n. VERL barbe bébar bébar v. VERL barber beflan beflan n. VERL flambe béflan béflan v. VERL flamber béger béger v. VERL gerber beu beu n. VERL + APO beuh beuh n. VERL + APO herbe beuher beuher n. VERL beuj beuj n. VERL + APO jambe [aab] > [aabø] beur, beurre, beurs beur n. arabe > [bøa] > [bœ] bledia bledia n. VERL diable bonchar bonchar n. VERL charbon VERL + chute bouldé bouldé v. d’une voyelle débouler brelic brelic n. VERL + APO calibre brolic, brolics brolic n. VERL + APO calibro caille, kaill caille, kaill n. VERL + APO caillera, racaille caillera, cailleras, caillesra n. VERL caillera [afik]̃ > cainf cainf n. africain [k̃fi] > [kf]̃ cainri cainri adj. APH + VERL américain cainri cainri n. APH + VERL carna carna n. VERL + VERL arnaque cardpla cardpla n. VERL placard Abréviation Procédé de Variante graphique VGlemme Mot de départ morph. formation

57 Si le processus n’est pas évident, nous préférons saisir la transformation sous forme de transcription phonétique.

146 ceauxmor ceaumor n. VERL morceau chanmé chanmé adj. VERL méchant chéla chéla v. VERL lâcher chelou chelou adj. VERL louche cheum cheum adj. VERL + APO moche cistesra cistera n. VERL raciste çoncal çoncal n. VERL caleçon croma croma n. VERL maquereau croma croma adj. VERL macro cromi cromi n. APO + VERL microphone dékiss dékis n. VERL kisdé demer demer n. VERL merde deurvi deurvi n. VERL videur deuspi deuspi adj. VERL speed diban diban n. VERL bandit dreupin dreupin v. VERL peindre duper duper adj. VERL perdu enlec enlec v. VERL + APO enculer feshnou feshnou n. VERL chnouf foncedé, foncedé, foncedé adj. VERL + chute défoncé foncedé d’une voyelle garba garba n. VERL bagarre genar genar n. VERL argent golmon golmon adj. VERL mongol VERL + chute goutdé goutdé adj. d’une voyelle dégoûté gova gova n. VERL vago iencli, ientscli iencli, ientcli n. VERL client ive ive n. VERL vie ken ken v. VERL + APO niquer keshnés keshné n. VERL chnek keskon keskon n. VERL skunk keuf, keufs keuf n. VERL + APO flic k’unfry k’unfry n. VERL africain làcelle làcelle pron. VERL cellelà lerdea lerdea n. VERL dealer lècheca lècheca n. VERL calèche lépar lépar v. VERL parler lerga lerga n. VERL galère lletsbi, yébis lletbi, yébi n. VERL billet mainde mainde adv. VERL demain manéci manéci n. VERL cinéma maness maness n. VERL + APO meuf, meufs meuf n. VERL + APO femme Abréviation Procédé de Variante graphique VGlemme Mot de départ morph. formation

147 meusseu meusseu n. VERL seum VERL + chute mifa mifa n. d’une consonne famille neltu neltu n. VERL tunnel nessbiz, nezbi nessbiz, nezbi n. VERL business oide oide n. VERL doigt ouf ouf adj. VERL fou ous ous n. VERL sou pécho pécho v. VERL choper pera, pera pera, pera n. VERL rap péra péra v. VERL rapper pesou pesou n. VERL soupe phonetel, phonetel, phonetel n. VERL + APO téléphone phonetel potka potkas n. VERL capote VERL + chute quarpla quarpla v. d’une syllabe placarder [(le)zaab] > rabza rabza n. [abza] les arabes [(le)zaab] > rabzouz rabzouz n. [abza] + RES rainté rainté n. VERL terrain [aab] > [aabø] rebeu rebeu n. > [bøa] > [bø] arabe + VERL rébou rébou adj. VERL bourré rectdi rectdi adj. VERL direct relou, relous relou adj. VERL lourd refré, refrè, refrès refré, refrè n. VERL frère reum reum n. VERL + APO mère renoi renoi n. VERL noir reup reup n. VERL + APO père reurti, reurti, reurti, reurti, reursti, rortis n. VERL tireur rorti reuss reus n. VERL + APO sœur revé revé n. VERL verre ro ro n. VERL or roro roro n. VERL + RED rotteca rotteca n. VERL carotte [paskal] > scalap scalap n. [skalap] > pascal [skalpa] scarla, scarlas scarla n. VERL lascar scred scred adj. VERL + APO discret sépa sépa v. VERL passer seufs seuf n. VERL + APO fesse Abréviation Procédé de Variante graphique VGlemme Mot de départ morph. formation siquemu siquemu n. VERL musique

148 skeud skeud n. VERL + APO disque skeudi skeudi n. VERL stepo stepo n. VERL poste stockma, stockma, stockma adj. VERL mastoc stockma talfute talfute n. VERL futal tarba tarba n. VERL bâtard tasspés tasspé n. VERL pétasse tass, tass’, tasses tass, tass’, tasse n. VERL + APO tebois teboi n. VERL boîte tèc’, tess, tèce, tèc’, tess, tèce, tèce, téces n. VERL + APO cité tèce, téce técal técal v. VERL calter téci, téci téci, téci n. VERL cité téfro téfro v. VERL frotter téchan téchan v. VERL chanter tèje (se) tèje (se) v. VERL jeter (se) téma téma v. VERL mater tenos teno n. VERL note termon termon v. VERL monter teshmi, teschmi teshmi, teschmi n. VERL schmitt teuf, teufs teuf n. VERL + APO fête VERL + APO + teuteu teuteu n. RED shit VERL + APO + tiéqs, tiex tiéqs, tiex n. RES quartier tièpe tièpe n. VERL + APO pitié tierquar, tier tierquar, tierquar, tierkar n. VERL quartier quar, tierkar tinma tinma n. VERL matin tipeu tipeu adj. VERL petit toncar toncar n. VERL carton trom, trôme trom, trôme n. VERL + APO métro tymp tymp n. VERL + APO putain vèle (se) vèle (se) v. VERL lever (se) VERL + chute vénère, vénères vénère adj. d’une voyelle énervé VERL + chute vénère vénère v. d’une voyelle énerver verlan verlan n. VERL (à) l’envers vêtsur vêtsur n. APH + VERL survêtement vileci, vilesci vileci n. VERL civile yégri yégri v. VERL griller youvoi youvoi n. VERL voyou zarbi zarbi adj. VERL bizarre Abréviation Procédé de Variante graphique VGlemme Mot de départ morph. formation [εb] > [εbø] > zeb zeb n. herbe [bøε] (beuher)

149 > [bø] (beu) > [bœz] (beuze) > [bøzø] > [zøb] zefa zefa n. VERL phase zeil’ zeil’ n. VERL + APO oseille zen zen n. VERL nez zic, zik, zique zic, zik, zique n. VERL + APO musique zinc zinc n. VERL + APO cousin zness zness n. VERL + APO business znessbi znessbi n. VERL sonpri sonpri n. VERL [pizõ] > [zõpi] prison zonz zonz n. > [zõ] (zon) > [zõzõ] (zonzon) > [zõz] (zonz)

201 186 TOTAL

Légende : morph. → morphologique jaune → variante graphique n’apparaissant que dans le subcorpus n°2 grise → variante graphique apparaissant dans les deux subcorpus

150 Tableau n°2 : Dictionnaires et leurs entrées

VGL PR TLFi DA CTT BQ LC DZ as x x x aç ass x asse àl x x x àl x al al ap x x x ap ap x ap och x x x auch auch auch auche babtou x x x babtou babtou babtou babtou barge barge x barge barge x x barge barje barge barge x barge barge x x barge barje barjot barjot barjo x x x x barjo barjo barjot barjot barjo x x x x barjo barjo beubar bebar x x x x x x bebar bébar x x x bébar x bébar bébar beflan x x x x x x beflan béflan x x x béflan x x béflan béger x x x x x x bégère beu x x x x x x beu beuh x x x x x x x beuher x x x beuher x x beuhère beuj x x x x x x beuje beur beur x beur beur x x beur bledia x x x x x x x bonchar x x x x x x x bouldé x x x x x x x brelic brelic x x x brelic x x brelique brolic x x x x x x x caille x x x caille x x caille kaill caillera caillera x x x caillera caillera x caillera kaïra cainf x x cainf cainf x kainf cainf cainri x x x cainri x x x cainri x x x cainri x x cainri carna x x x carna x x carna cardpla x x x carpla x x x ceaumor x x x ceaumor x x x chanmé x x x chanmé chanmé chanmé chanmé chéla x x x x x x chéla chelou x x x chelou cheulou chelou chelou cheum x x x cheum cheum x cheum

151 VGL PR TLFi DA CTT BQ LC DZ cistera x x cistra cistra x x cistera çoncal x x x x x x x croma x x x x x x croma croma x x x x x x x cromi x x x x x x x dékis x x x dékis x x dékis demer x x x deumer x x demère deurvi x x x deurvi x x x deuspi x x x x x despi deuspi diban x x x x x x x dreupin x x x x x x x duper x x x x x x x enlec x x x x x x x feshnou x x x feuchnou x x fechnou foncedé x x x fonc(e)dé x x foncedé foncedé garba x x x x x x x genar x x x genar x x genhar golmon x x x golmon x x golmon goutdé x x x goûtdé x x x gova x x x gova x x gova iencli x x x x x x iencli ientcli ive x x x x x x ive ken x x x x ken x kène keshné x x x x x x x keskon x x x x x x x keuf keuf x keuf keuf keuf keuf keuf k’unfri x x cainfri cainfri x x cainfri làcelle x x x x x lacelle lacelle lerdea x x x x x x x lècheca x x x x x x x lépar x x x x x x x lerga x x x lerga x x lèrega lletbi x x x x x x x yébi mainde x x x x x x x manéci x x x x x x x maness x x x manès x x x meuf meuf x meuf meuf meuf meuf meuf meusseu x x x x x x x mifa x x x x x x mifa neltu x x x x x x x nessbiz x x x nesbi x x nesbi nezbi

152 VGL PR TLFi DA CTT BQ LC DZ oide x x x x x x oide ouf ouf x x ouf ouf ouf ouf ous x x x x x x x pécho pécho x x x pécho pécho pécho peucho pera x x x pera x pera peura pera péra x x x x x x x pesou x x x x x x x phonetel x x x x x x phonetel phontel potka x x x poteca x x poteca quarpla x x x x x x x rabza x x x rabza x x rabza rabzouz x x x x x x rabzouz rainté x x x x x x x rebeu rebeu rebeu x rebeu reubeu rebeu rebeu reubeu reubeu robeu rébou x x x x x x x rectdi x x x x x x x relou relou x relou relou x x relou refré x x x reufré x x reufré refrè rèm rèm reum x x reum reum x reum reum renoi x x renoi reunoi renoi renoi renoi rep reup x x x reup x reup rèp reup reurti reurti x x x reurti x x reurti rorti reus x x x reus reusse x reusse revé x x x x x x x ro x x x x ro x x roro x x x roro roro roro roro rotteca x x x rotca rotca x rotka scalap x x x x x x x scarla x x x scarla scarla x scarla scred x x x x x scred scred sépa x x x x x x x seuf x x x seuf x seuf seuf siquemu x x zicmu zicmu x x zicmu skeud x x x skeud x x skeud skeudi x x x x x x x stepo x x steupo x x x steupo

153 VGL PR TLFi DA CTT BQ LC DZ stockma x x x stocma x x stocma stockma talfute x x x x x x x tarba x x x tarba tarba x tarba tassepé tasspé x x x taspé x x taspé tass tass’ x x x tasse x x x tasse teboi x x x x x x teboi tèc’ tess téce x x x téc x x x tèce téce técal x x x x x tékal x téci x x x téci téci x téci téci téfro x x x x x x x téchan x x x x x x x tèje (se) x x x tèj x tèje tèje téma x x x téma téma x téma teno x x x x x x x termon x x x x x x x teshmi x x x x x x teshmi teschmi teuf teuf x x teuf x x teuf teuteu x x x x x x x tiéqs x x x x tièks tieks x tiex tièpe x x x x x x tièpe tierquar tierquar x x x tierquar tiéquart x tiéquar tierkar tinma x x x x x x x tipeu x x x x x x tipeu toncar x x x x x x toncar trom x x x trom trom x trom trôme tymp x x x tainp x x timpe vèle (se) x x x x x x x vénère véner vénère x vénèr x vénèr vénère véner vénere véner vener vénère x x vénérer vénèr x vénere vénère verlan verlan verlan verlan x x x verlan vêtsur x x x x x x x vileci x x x x x x x

154 VGL PR TLFi DA CTT BQ LC DZ yégri x x x x x x yégri youvoi x x youvoi x x x youvoi zarbi zarbi x zarbi zarbi x x zarbi zeb x x x x x x zeb zefa x x x x x x x zeil’ x x x x x x x zen x x x zen x x zen zic zik zik x x x zic x x zic zique zinc x x x x zinc x zinc zness x x x x x x x znessbi x x x x x x x sonpri x x x zonpri x x zonpri zonz x x x x x zonze zonze TOTAL 14 1 21 75 28 26 98

Légende : VGL → variante graphique – lemme PR → Le nouveau Petit Robert 2008 TLFi → Trésor de la langue française informatisé DA → Dictionnaire de l’argot français et de ses origines CTT → Comment tu tchatches ? BQ → Bien ou qoui LC → Lexik des cités DZ → Dictionnaire de la Zone jaune → variante graphique n’apparaissant que dans le subcorpus n°2 grise → variante graphique apparaissant dans les deux subcorpus

155 Tableau n°3 : Lemmes des verlanisations

Le nouveau Petit Robert 2008 Lemme Définition barge, adj. barge, n. (renvoi à barjo) barjo, adj. adj. / n., fam. Fou, farfelu ; Abrév. Barge barjo, n. n. / adj., fam. Jeune Maghrébin né en France de parents immigrés ; beur, n. aussi rebeu keuf n.m., fam. Agent de police et par ext. Policier meuf n.f., arg. fam. Femme, jeune fille ; Épouse, compagne ouf adj. / n., fam. Fou rebeu, n. n. / adj., fam. péj. Arabe, beur relou adj., fam. Lourd, dépourvu de finesse teuf n.f., fam. Fête vénère, adj. adj., fam. Énervé, en colère n.m., Argot conventionnel consistant à inverser verlan les syllabes de certains mots zarbi adj., fam. Bizarre, étrange (des personnes, des choses) Dictionnaire de l’argot français et de ses origines Lemme Définition cainf adj. / n., Africain cainfri cistra adj. / n., Raciste reum (renvoi à rèm) n. f., Mère renoi n., Personne de race noire steupo n.m., Autoradio véner v., (s’)énerver youvoi n.m., Voyou zicmu n.f., Musique Comment tu tchatches ? Lemme Définition aç pr. dém. neutre, Ça àl adv., Là ap adv. de négation auch adj. (+ emploi substantival), Chaud ; Courageux babtou n.m., Français de souche bébar v.i. / v.t., Voler ; Mentir, mentir à qqn. béflan v.i., Crâner, frimer beuher n.f., Cannabis en feuilles, haschisch brelic n.m., Arme de poing caille n.f., Employé, entre autres, par les jeunes des cités pour se désigner

156 euxmêmes Comment tu tchatches ? Lemme Définition n.f., Un des termes employés, entre autres, par les jeunes des cités pour caillera se désigner euxmêmes cainri, adj. adj. / n.m., Américain cainri, n. adj. / n.m., Américain carna n.f., Arnaque, embrouille carpla n.m., Prison ceaumor n.m., Morceau chanmé adj. (+ emploi adverbial), Méchant ; Beaucoup, énormément chelou adj., Louche cheum adj., Moche dékis n.m., Policier, flic deumer n.f., Merde deurvi n.m., Videur feuchnou n.f., Héroïne foncedé adj., Soûl ; drogué ; Fou genar n.m., Argent golmon n.m., Mongol (insulte) goûtdé adj., Dégoûté gova n.f., Voiture n.f., Situation matérielle (et psychologique, par voie de conséquence) lerga difficile manès n.m., Cinéma nesbi n.m., Affaire (plus ou moins douteuses, voire même illicites), trafic pécho v.i. / v.t., Attraper ; Voler ; Draguer ; Frapper pera n.m., Rap poteca n.f., Capote (préservatif) rabza n., Arabe, maghrébin (en règle générale, de deuxième générationau moins) reufré n.m., Frère ; Copain reup n.m., Père reurti n.m., Voleur à la tire reus n.m., Sœur roro n.m., Or scarla n.m., Vaurien ; Homme, gars (de la cité) seuf n.f. (n.m.), Fesse (cul) n.m., Disque (33T ou Maxi en vinyle ; CD audio) ; skeud (jeune) Fille maigre et particulièrement plate, sans poitrine stocma adj. (+ emploi substantival), Costaud, fort, balèze tainp n.f. Prostituée, putain tarba, n. adj. / n.m., Bâtard n.f., Femme, jeune fille (avec connotation péjorative ; taspé désémantisation par rapport au sens argotique initial ;

157 avec dans certains cas le sens de petite amie) Comment tu tchatches ? Lemme Définition n.f., Femme, jeune fille (avec connotation péjorative tasse mais désémantisation par rapport au sens argotique) téc n.f., Cité téci tèj (se) v. i. / v.t., Jeter téma v.i., Regarder tierquar n.m., Lieu où l’on habite (dans la cité) trom n.m., Métro(politain) zen n.m., Nez zic n.f., Musique zonpri n.f., Prison Bien ou quoi ? Lemme Définition ken v.t. / v.i., VERL de niquer ro n.m., VERL d’or tièks (renvoi à tiéquart) n.m., VERL de quartier n.m., f., VERL de cousin, cousine, c’est à dire soit copain, zinc copine Lexik des cités Lemme Définition despi adv., Rapidement, vite fait ; adj., Rapide lacelle pron. dém., Cellelà scred adj., Discret ; loc. En scred en cachette, discrètement tékal v.i., Partir subitement zonze n.f., Prison Dictionnaire de la Zone Lemme Définition beubar n.f., Barbe beflan n.f., Action consistant à se faire valoir bégère v.i., Vomir beu n.f., Cannabis, chanvre indien beuje n.f., Jambe chéla v.t., Laisser tomber, abandonner croma n.m., Proxénète, souteneur iencli n., Client ive n.f., Vie mifa n.f., Famille oide n.m., VERL de doigt phonetel n.m., Téléphone rabzouz n., Arabe, magrébin

158 Dictionnaire de la Zone Lemme Définition rotka, n. n.f., Petit vol effectué par ruse, arnaque, escroquerie teboi n.f., Boîte de nuit, discothèque teshmi n.m., Policier tièpe n.f., Pitié tipeu n.m., Enfant, petit n.m., Morceau de carton fin roulé servant comme filtre toncar pour fumer des cigarettes de haschisch yégri v.t., Percer à jour, repérer, démasquer zeb n.f., Cannabis, chanvre indien Non lexicalisé Lemme Mot de départ beuh n.f., Herbe (cannabis) bledia n.m., Diable bonchar n.m., Charbon (travail pénible) bouldé v.intr., Débouler brolic n.m., Calibro (revolver) çoncal n.m., Caleçon (colis) croma adj. Macro cromi n.m., Microphone diban n.m., Bandit dreupin v.tr., Peindre duper adj., Perdu enlec v.tr., Enculer garba n.f., Bagarre keshné n.f., Chnek (femme) keskon n.f., Skunk (drogue) lerdea n.m., Dealer (vendeur des drogues) lècheca n.f., Calèche (voiture) lépar v.tr./intr., Parler lletbi n.m., Billet mainde adv., Demain manéci n.m., Cinéma (comédie) meusseu n.m., Seum (haine ; drogue) neltu n.m.,Tunnel ous n.m., Sou (argent) péra v.intr., Rapper pesou n.f., Soupe quarpla v.tr., Placarder rainté n.m., Terrain rébou adj., Bourré rectdi adj., Direct

159 Non lexicalisé Lemme Mot de départ revé n.m., Verre scalap n.m., Pascal (ancien billet de 500 francs) sépa v.tr./intr., Passer skeudi n.m., Disque talfute n.m., Futal (pantalon) téfro v.tr./intr., Frotter téchan v.tr./intr., Chanter teno n.f., Note termon v.intr., Monter teuteu n.m., Shit (haschisch) tinma n.m., Matin vèle (se) v.tr./intr. pron., Lever (se) vêtsur n.m., Survêtement vileci n.m., Civil (policier en civil) zefa n.f., Phase zeil’ n.f., Oseille (argent) zness n.m., Bizness znessbi

Légende : jaune → variante graphique n’apparaissant que dans le subcorpus n°2 grise → variante graphique apparaissant dans les deux subcorpus

160 Annexe 3

Tableau n°1 : Verlanisations utilisées par les rappeurs

Verlanisation Rappeur Variante graphique (lemme) AKE 8 chelou, dreupin, duper, ken, neltu, relou, téce, tiex AKH 4 barge (n.), keuf, rebeu, renoi beuh, bonchar, chanmé, cistera, déspé, quarpla, refré, ALI 14 reus, roro, téce, teuteu, trom / trôme, vénère, zonz ALO 1 zik *BAU 2 técal, teno BLA 0 x àl, bébar, beflan, béflan, beuj, beur, bouldé, brelic, brolic, chelou, cheum, croma, cromi, fechnou, foncedé, genar, goutdé, keskon, keuf, k’unfri, lépar, manéci, BOO 42 meuf, meusseu, nezbi, pécho, péra, pesou, phonetel, relou, renoi, reurti, skeud, tèje (se), teuf, tierkar, vêtsur, zeb, zeil’, zik, zness, sonpri, zonz *BOU 5 keuf, meuf, seuf, stepo, teuf *BRA 3 keuf, tass, téci DDA 4 kaill, despé, meuf, potka, skeudi barge (adj.), beuh, caillera, deurvi, ken, keuf, meuf, DIA 15 phonetel, scred, tass’, tess, téci, tymp, vénère (v.), zen babtou, bledia, caillera, cainf, cainri (n.), carna, çoncal, DLP 23 garba, golmon, ken, keuf, làcelle, maness, meuf, ouf, pécho, scarla, stockma, tarba, tass, tess, tiéqs, toncar DON 3 barge (n.), barje (adj. / n.), despé *DOU 2 lècheca, rorti ESK 4 barge (adj.), keuf, scarla, zik barge (n.), caille, caillera, chanmé, foncedé, genar, yébis, FAF 13 meuf, pécho, tasse, vénère, yégri, zik FAY 1 verlan FEL 0 x FLY 9 och, cheum, cromi, keuf, mainde, pera, refrè, tipeu, zik FRE 0 x *HIF 4 bebar, meuf, tasse, téce *ISS 1 roro *JBR 1 tess KAL 1 zik KEN 2 scred, zik *KER 4 lerga, pera, reup, sépa beuh, beur, cardpla, chéla, meuf, ouf, renoi, refrè,scarla, KND 13 tass’, tèc’, tierquar, vèle (se) LAL 3 caille, zik, zonz barge (adj.), brolic, foncedé, iencli / ientcli, ken, ler LIM 18 dea, lletbi, ous, reurti, rotteca, squeud, tess, téci,

161 teshmi / teschmi, tierquar, vileci, zarbi, znessbi *MAL 1 zik MCS 3 ap, meuf, pécho MEL 1 meuf MEN 1 zik *MES 4 béger, keuf, rabza, scalap nd 2 meuf, vénère (adj.) *NES 2 tasse, tièpe OXM 8 dékis, enlec, meuf, ro, scred, tass’, trom, zique *PRA 1 tasspé RAT 0 x barjot (n.), beur, lerga, meuf, pera, rabzouz, rebeu, RIM 12 rébou, renoi, reum, revé, zinc SAT 1 beur as, beuher, beur, caillera, deuspi, gova, keuf, oide, ouf, SEF 16 reup, stockma, teboi, téci, téma, youvoi, zefa SHU 1 skeud beu, cainri (adj.), foncedé, nessbiz, rainté, téci, téchan, SIN 10 tierquar, vénère SOP 2 beur, zik cainri (adj.), ceaumor, chelou, meuf, rectdi, relou, scred, SYL 8 seuf *TAI 1 tinma TUN 7 croma, demer, diban, ive, mifa, talfute, zinc *VAI 1 meuf VIN 1 zik *ZEL 1 ziquemu ZOX 6 barjot (adj.), ken, keshné, tasspé, téfro, termon

Légende : * → rappeur concomitant du Nord en gras → rappeur concomitant du Sud bleue → rappeur du Nord jaune → rappeur du Sud

162 Tableau n°2 : Fréquence des verlanisations

Fréquence Fréquence Lemme Lemme Sub. n°1 Sub. n°2 Sub. n°1 Sub. n°2 aç 1 0 dreupin 1 0 àl 4 0 duper 1 0 ap 1 0 enlec 1 0 auch 1 0 feuchnou 1 0 babtou 2 0 foncedé 3 1 barge, adj. 1 3 garba 1 0 barge, n. 2 4 genar 3 1 barjo, adj. 1 0 golmon 1 0 barjo, n. 1 0 goûtdé 1 0 bébar 1 0 gova 1 0 beflan 1 0 chanmé 1 1 béflan 1 0 chéla 1 0 bégère 1 0 chelou 3 0 beu 1 0 cheum 3 0 beubar 1 0 iencli 2 0 beuh 3 0 ive 1 0 beuher 1 0 ken 8 0 beuje 1 0 keshné 1 0 beur, n. 7 2 keskon 1 0 bledia 1 0 keuf 12 2 bonchar 1 0 lacelle 1 0 bouldé 1 0 lècheca 1 0 brelic 1 0 lépar 1 0 brolic 4 0 lerdea 1 0 caille 3 2 lerga 1 0 caillera (n.) 4 3 lletbi 1 1 cainf, n. 1 0 mainde 1 0 cainfri, n. 1 0 manéci 1 0 cainri, adj. 2 0 manès 1 0 cainri, n. 1 0 meuf 18 3 carna 1 0 meusseu 1 0 carpla 1 0 mifa 1 0 ceaumor 1 0 neltu 1 0 cistra, n. 1 0 nesbi 1 0 çoncal 1 0 oide 1 0 croma 1 0 ouf 4 0 croma 1 0 ous 1 0 cromi 2 0 pécho 3 1 dékis 1 0 pera 2 0 despi 1 0 péra 1 0 deumer 1 0 pesou 1 0 deurvi 1 0 phonetel 2 0 diban 1 0 poteca 1 0

163 Fréquence Fréquence Lemme Lemme Sub. n°1 Sub. n°2 Sub. n°1 Sub. n°2 quarpla 1 0 téchan 1 0 rabza 1 0 tèj (se) 1 0 rabzouz 1 0 tékal 1 0 rainté 1 0 téma 1 0 rebeu, n. 1 1 teno 1 0 rébou 1 0 termon 1 0 rectdi 1 0 teshmi 2 0 relou 3 0 teuf 2 0 renoi 3 1 teuteu 1 0 reufré 3 0 tièks 3 0 reum 1 0 tièpe 2 0 reup 1 0 tierquar 5 0 reurti 4 0 tinma 0 1 reus 1 0 tipeu 1 0 revé 1 0 toncar 1 0 ro 1 0 trom 3 0 roro 2 0 vèle (se) 1 0 rotka, n. 1 0 véner 1 0 scalap 1 0 vénère 2 1 scarla 2 1 verlan 0 1 scred 3 1 vêtsur 1 0 sépa 1 0 vileci 1 0 seuf 2 0 yégri 0 1 skeud 3 1 youvoi 1 0 skeudi 1 0 zarbi 1 0 steupo 1 0 zeb 2 0 stocma 2 0 zefa 1 0 tainp 1 0 zeil’ 1 0 talfute 1 0 zen 1 0 tarba, n. 1 0 zic 9 13 taspé 1 0 zicmu 1 0 tasse 8 1 zinc 2 0 teboi 1 0 zness 1 0 téc 9 0 znessbi 1 0 téci 6 0 zonpri 1 0 téfro 1 0 zonze 2 1

Légende : Sub. → subcorpus

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