ASSEMBLEE NATIONALE DEUXIÈME SESSION TRENTE-CINQUIÈME LÉGISLATURE

Journal des débats

Le mercredi 27 mars 1996 Vol. 35 — N° 3

Président: M. Jean-Pierre Charbonneau Abonnement annuel (TPS et TVQ en sus): 115 S débats de la Chambre — 10 $ Index 325 $ débats des commissions parlementaires 105 $ commission de l'aménagement et des équipements 75 S commission du budget et de l’administration 70 $ commission des institutions 65 $ commission des affaires sociales 60 $ commission de l'économie et du travail 40 $ commission de l’éducation 35 $ commission de la culture 20 $ commission de l’agriculture, des pêcheries et de l’alimentation 5 $ commission de l’Assemblée nationale Achat à l’unité: prix variable selon le nombre de pages Règlement par chèque à l’ordre du ministre des Finances et adressé comme suit: Assemblée nationale du Québec Distribution des documents parlementaires 880, autoroute Dufferin-Monimorency, bureau 195 Québec, Qc GIR 5P3 Téléphone: (418) 643-2754 Télécopieur: (418) 528-0381 Société canadienne des postes — Envoi de publications canadiennes Numéro de convention: 0592269 Dépôt légal: Bibliothèque nationale du Québec ISSN 0823-0102 Débats de l'Assemblée nationale Le mercredi 27 mars 1996 Table des matières

Affaires du jour Affaires prioritaires Reprise du débat sur le discours d’ouverture et sur les motions de censure 79 M. Henri-François Gautrin 79 M. Paul Bégin 81 Mme Madeleine Bélanger 82 M. Robert Kieffer 84 M. Lawrence S. Bergman 85 M. Rémy Trudel 87 M. Russell Copeman 89 Motion de censure 90 M. Michel Bourdon 90 M. Robert LeSage 92 M. Robert Perreault 93 M. Robert Benoit 95 M. Gérard R. Morin 98 M. Léandre Dion 100 Affaires courantes 102 Dépôt de documents 102 Message du lieutenant-gouverneur 102 Crédits pour l’année financière 1996-1997 102 Renvoi à la commission plénière 102 État du rapport et des dépenses encourues pour un mandat spécial octroyant des crédits additionnels au ministère de la Sécurité du revenu 102 Rapport annuel du Secrétariat au développement des régions 103 Bilan de la contribution du gouvernement à l’Année des Nations unies pour la tolérance 103 Questions et réponses orales 103 Effets des crédits déposés sur la création d’emplois 103 Réduction des crédits pour les programmes d’employabilité et d’intégration en emploi 105 Projets favorisant l’employabilité et l’emploi 106 Réduction des crédits pour les programmes de développement commercial, manufacturier, scientifique et technologique 107 Justification des crédits à être périmés 108 Augmentation des crédits alloués au volet Affaires bilatérales et multilatérales du ministère des Relations internationales et de la Francophonie 109 Documents concernant l’octroi de certains contrats par le Secrétariat à la restructuration 109 Transparence dans l’attribution des contrats gouvernementaux 110 Offres de règlement proposées par la Société des alcools du Québec aux clients de Me Pierre Marois 110 Mesures rétroactives touchant certains contribuables qui ont investi dans la recherche et le développement 112 Réponses différées Implantation d’une cimenterie à Port-Daniel 112 Table des matières (suite)

Motions sans préavis 113 Souligner la Journée mondiale du théâtre 113 Mise aux voix 113 Souligner la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale et la Semaine de solidarité avec les peuples en lutte contre le racisme et la discrimination raciale 113 M. André Boisclair 114 M. Christos Sirros 115 Motion d ’ amendement 115 Décision du président sur la recevabilité 116 Mise aux voix 116 Souligner le courage et la détermination de MM. Bernard Voyer et Thierry Petry lors de leur expédition au pôle Sud 116 M. Léandre Dion 117 M. Norman MacMillan 117 Mise aux voix 117 Avis touchant les travaux des commissions 118 Renseignements sur les travaux de l’Assemblée 118 Décision du président sur l’application par les commissions parlementaires de la Loi sur la réduction du personnel dans les organismes publics et l’imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d’organismes publics 119 Affaires du jour Affaires prioritaires Reprise du débat sur le discours d’ouverture et sur les motions de censure 120 M. Norman MacMillan 120 M. Jacques Léonard 122 Mme Claire Vaive 124 Mme Danielle Doyer 125 Avis de débats de fin de séance 127 Reprise du débat sur le discours d’ouverture et sur les motions de censure 128 M. Bernard Brodeur 128 M. François Gendron 129 M. Jean Rochon 132 Mme Cécile Vermette 135 Ajournement 137 DÉBATS DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE 79

Le mercredi 27 mars 1996

(Dix heures cinq minutes) adoptée en 1993 — qui avait comme volonté et comme objectif de réduire la taille de la fonction publique. Et, Le Vice-Président (M. Pinard): À l’ordre, s’il si on regarde à partir du moment où elle a été réelle­ vous plaît! ment appliquée, c’est-à-dire à partir de 1994, on a vu Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir. une inflexion, c’est-à-dire une diminution dans le solde des opérations courantes du gouvernement. Affaires du jour Il n’est pas inutile non plus de rappeler que notre formation politique a toujours demandé l’application et Affaires prioritaires le dépôt d’une loi antidéficit. Ça a été, alors qu’il n’était pas ministre, le député de Westmount—Saint-Louis, qui Reprise du débat sur le discours d’ouverture était à l’époque député de Saint-Louis, qui avait proposé et sur les motions de censure le projet de loi 197, qui avait été considéré, suite aux remarques de ce qui était l’opposition d’alors, qui est le Nous allons débuter les travaux de cette journée gouvernement d’aujourd’hui, comme non recevable. par les affaires du jour. L’Assemblée procédera aux C’était lui qui avait été le premier à proposer une loi affaires prioritaires, soit la reprise du débat sur le dis­ antidéficit. Ça a été, dans la campagne électorale que cours d’ouverture prononcé par M. le premier ministre nous avons faite, un de nos chevaux de bataille. Le chef le 25 mars dernier et sur les motions de censure de M. de l’opposition a constamment offert au gouvernement, le chef de l’opposition officielle et de M. le député de c’est-à-dire: Si vous proposez une loi antidéficit, nous Pontiac. allons la passer, un, deux, trois, immédiatement. Et il Je cède maintenant la parole au député de l’a réitéré hier dans son discours: Le dépôt d’une loi Verdun. M. le député. antidéficit, nous allons l’appuyer. Mais, M. le Président, bien sûr, on va avoir le M. Henri-François Gautrin dépôt du livre de crédits aujourd’hui. Arriver à l’équi­ libre, à la suppression des déficits, ça prend deux cho­ M. Gautrin: Merci, M. le Président. ses. Ça prend, bien sûr, une réduction de dépenses, et, dans ce livre de crédits, on va voir les réductions de Une voix: Ah! dépenses, mais ça veut aussi être un stimulus pour l’aug­ mentation des revenus de l’État. Alors, l’augmentation M. Gautrin: Merci de m’applaudir. J’ai écouté des revenus de l’État, ce n’est pas encore sorcier, il y a avec beaucoup d’intérêt le discours inaugural. J’ai deux manières de le faire, une qui est pernicieuse et écouté avec beaucoup d’intérêt le discours inaugural et l’autre qui est valable. Celle qui est pernicieuse — et je dois dire que, sur un point, c’est-à-dire celui de la vous ne le proposez pas, je suis d’accord avec volonté de réduire le déficit du gouvernement, nous vous — serait d’augmenter les taxes et les impôts. Je sommes d’accord. C’est quelque chose qu’on a toujours crois qu’on a, de part et d’autre, un consensus ici de voulu de ce côté-ci de la Chambre, particulièrement les dire: Les gens sont trop taxés, ils ne peuvent plus, ac­ députés libéraux, arriver à l’équilibre du solde courant. tuellement, supporter d’augmentation d’impôt. Mais il y Ça veut dire quoi? Ça veut dire de faire en sorte qu’on a une manière aussi d’augmenter les revenus, c’est de n’accumule pas des déficits, c’est-à-dire qu’on n’aug­ faire en sorte que plus de gens travaillent, que plus de mente pas la dette, pour une raison très simple, parce gens soient en emploi, que plus de gens soient réelle­ que l’accumulation du déficit est à la fois un poids sur le ment impliqués dans le mécanisme économique pour non budget de l’État — on va voir les crédits aujourd’hui, ce pas être un poids à la société, mais contribuer réellement n'est pas sorcier de savoir que plus de 18 % des dépen­ à la société. ses de l’État, environ, sont consacrées au paiement de la • (10 h 10) • dette — mais aussi parce que ce déficit, cette dette est La critique que je fais actuellement au discours profondément injuste, M. le Président, injuste pour les qui a été proposé hier ou avant-hier par le premier générations qui viennent derrière nous. Un déficit, ça ministre, c’est que je vois peu de mesures ou peu veut dire quoi? Ça veut dire essentiellement de faire d’analyses, à l’heure actuelle, pour régler le problème payer aux générations qui vont nous succéder ce que du sous-emploi. Et le problème du sous-emploi, il est nous dépensons aujourd’hui. très sérieux et il a deux racines. Dans le problème du Donc, dans la volonté de réduction du déficit, sous-emploi, c’est-à-dire le problème des gens qui n’ont nous, les libéraux, c’est un objectif que nous avons pas la chance, qui n’ont pas la possibilité de travailler, toujours eu. Je rappellerai pour mémoire que ce sont vous avez ceux qui ont un certain âge et qui ont été les députés d’arrière-ban, M. le Président, du Parti mis à pied dans des secteurs économiques où on a été libéral qui ont proposé la loi 198 en 1991 — on l’a amené, suite aux changements technologiques, à faire 80 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 des rationalisations et à mettre les gens à pied. Je de Montréal. Il y a ici, parmi mes collègues, un certain prends, par exemple, des mécaniciens de locomotives, nombre de députés de Montréal. Vous savez à quel on en a besoin de moins en moins. Et on ne trans­ point, au Québec, la métropole est le moteur économi­ forme pas quelqu’un qui était un machiniste sur les que principal. Montréal est le moteur économique du locomotives en programmeur en deux temps trois mou­ Québec. Montréal est en difficulté. Montréal est en vements. Ce n’est pas vrai. Ce n’est pas parce qu’on grande difficulté, tant sur le plan du développement va créer des emplois de haute technologie qu’on réglera économique que sur le plan du chômage. Mais Montréal ce problème de sous-emploi des gens qui n’ont pas la a aussi un énorme potentiel. Un énorme potentiel. formation pour occuper les emplois qui sont créés Et ce que j’aurais voulu avoir dans le discours actuellement ou qui n’ont pas l’âge suffisant pour inaugural, actuellement, M. le Président, c'est des mesu­ acquérir cette formation. res concrètes pour soutenir ce dynamisme qu’on voit Alors, M. le Président, ça, c’est un problème de encore revivre à l’intérieur de Montréal dans certains société, c’est un problème qui est vécu par beaucoup de secteurs: dans les secteurs de la culture, ce qu’on appelle Québécois; c’est un problème que vous avez dans votre aussi le secteur de l’immatériel; le secteur de la recher­ comté; c’est un problème que, j’en suis sûr, beaucoup che médicale; le secteur de l’informatique; le secteur de de députés ministériels ont dans leurs comtés aussi; c’est la conception et des télécommunications. Tout un ensem­ un problème que nous avons à Verdun et sur lequel ble de secteurs économiques où Montréal a le potentiel aucune mesure, dans le discours inaugural, n’est prévue d’aller de l’avant, où nous avons, en la métropole, une pour permettre à ces gens qui ont contribué au dévelop­ volonté collective de pouvoir fonctionner ensemble et pement de notre société pendant nombre d’années de où, malheureusement, dans le discours inaugural, à part pouvoir continuer à avoir des emplois correspondants à certaines mesures... leurs qualifications. Donc, une lacune à ce niveau-là. Et je vais être honnête, M. le Président, j’en Parce que si on ne fait rien — et comprenez bien, M. le salue une qu’il faut saluer, c’est l’établissement du fonds Président — pour continuer à maintenir dans l’emploi de 15 000 000 $ pour soutenir la culture. Il y a, à l’inté­ ces personnes-là, elles vont tomber à l’aide sociale ou à rieur du discours inaugural, un choix important en fa­ l’assurance-chômage et seront un poids budgétaire pour veur de la culture. Pour soutenir la vivacité économique l’ensemble de la société. de Montréal, un soutien à la culture est quelque chose Deuxième élément qui n’était pas présent à l’in­ d’absolument important, et je dois reconnaître que ce térieur du discours inaugural, c’est... Bien sûr on nous petit fonds de 15 000 000 $ est un choix dans la bonne demande de faire, dans le réseau de la santé, des com­ direction. Mais on attendait beaucoup plus que cela, on pressions. Il est clair que, si on veut arriver à un équilibre attendait beaucoup plus que cela. Actuellement, ça prend des finances publiques, il va falloir faire des compres­ une volonté politique de la part du gouvernement pour sions. Bien sûr, on nous demande des compressions, mais soutenir les forces vives dans la métropole ou pour être les choix politiques quant au maintien du filet de sécurité en mesure de relancer l’économie de Montréal. Et ça ne ne sont pas présents. Allons-nous maintenir la même prend pas des comités, ça ne prend pas... je m’excuse protection pour tous, c’est-à-dire maintenir l’universalité pour mon ami, le député de Laval-des-Rapides, ça prend des soins pour tous les citoyens du Québec? Ou allons- beaucoup plus qu’un ministre régional, ça prend une nous, au contraire, réduire l’ensemble des services of­ volonté politique de soutenir le moteur économique de la ferts? Parce qu’il n’y a pas de miracle, M. le Président. Si relance du Québec, à savoir la métropole, à savoir on doit diminuer l’ensemble de nos dépenses en santé, il y Montréal. Or, je n’ai vu rien de concret à l’intérieur du a deux manières de le faire. Et j ’attendais, dans le dis­ discours inaugural pour soutenir Montréal. cours inaugural, le choix politique qu’il devait faire. Ou • (10 h 20) • bien vous diminuez le nombre de personnes qui sont Autre point important aussi. Vous savez, M. le accessibles à la gratuité totale, c’est-à-dire que vous avez Président, à quel point le tissu économique du XXle une forme de ticket modérateur ou une manière de partici­ siècle va demander une articulation, une nouvelle mis­ per aux soins, ou bien vous réduisez, vous laissez l’acces­ sion à nos établissements d’enseignement supérieur. sibilité universelle à tout le monde, mais vous réduisez le Dans les pays qui ont réussi ce qu’on appellerait le nombre de services offerts. virage technologique, à devenir des technopoles, il a Alors, là, ce choix politique, ce débat de société fallu une articulation entre le réseau des universités et le qu’on doit avoir si on doit diminuer nos dépenses de réseau des petites et moyennes entreprises de la recher­ santé n’est pas présent à l’heure actuelle dans le discours che qui se constitue, et c’est une vocation nouvelle, une inaugural. J’aurais voulu, M. le Président, qu’on ait au nouvelle interpellation au réseau des universités qui est moins des lignes directrices. Parce que vouloir réduire demandée si on veut avancer dans ce virage du XXle les dépenses de l’État, ça ne se fait pas miraculeuse­ siècle. Or. malheureusement, on continue à financer ment. Il n’y aura pas de miracle à l’intérieur de cela, ça notre réseau d’universités exactement... Et c’est encore va demander des choix politiques, et on aurait voulu dans le discours inaugural, il n’y a rien de changé à ce pouvoir en débattre. niveau-là, on ne répond pas aux questions actuellement L’autre point où on voit peu de préoccupations, du réseau universitaire. On a été pendant une semaine en la métropole. M. le Président, vous n’êtes pas un député commission parlementaire de l’éducation où on a écouté, 27 mars 1996 Débats de T Assemblée nationale 81 dans le cadre de la loi 95, l’ensemble de nos universités nera aux générations à venir l’espoir plutôt que la diffi­ qui font d’énormes percées, d’énormes efforts pour culté des déficits et de l’endettement. La détermination s’adapter au changement et à cette nouvelle vocation, du gouvernement à redresser la situation économique et mais il n’y a rien actuellement pour changer leur mode budgétaire actuelle est de nature à redonner confiance de financement. On continue à financer le réseau univer­ aux citoyens et à faire échec à la morosité et au défai­ sitaire uniquement sur les variations des clientèles étu­ tisme. diantes, avec quelques modifications à la marge. Or, M. Le gouvernement agira sur tous les fronts, de le Président, nos réseaux d’enseignement sont interpellés manière à maintenir notre capacité collective de faire des par cette relance économique. Ce sont des atouts ma­ choix. Dans cet esprit, à la Justice, la table est mise jeurs. La relance de la métropole, M. le Président, va se pour de grands changements. Une intense réflexion, faire parce qu’un des atouts majeurs de Montréal, c’est mise en branle depuis quelques mois, nous permet d’en­ ce réseau de ces quatre universités capables de travailler trevoir la réalisation, à court terme, d’actions qui redon­ ensemble. Or, si on veut soutenir cette relance économi­ neront à la justice ses titres de noblesse et de respect: que de Montréal, on a besoin d’avoir un mode de finan­ accessibilité, transparence, célérité et équité. cement qui correspond à cette nouvelle vocation des J’aimerais donc esquisser brièvement comment la institutions d’enseignement supérieur. Et, ça, je n’ai rien justice saura retrouver son élan en cette fin de siècle. vu à l’intérieur du discours inaugural. Tous les observateurs peuvent constater que de nom­ Vous voyez, M. le Président, autant nous, de ce breux citoyens au Québec ne font malheureusement plus côté-ci de la Chambre, on peut concourir à la volonté respecter leurs droits, je dirais même n’osent plus faire qui fait consensus, je crois, de vouloir arriver dans un respecter leurs droits. La raison pour laquelle ils n'inten­ temps raisonnable — parce qu’il ne faut quand même tent pas de recours judiciaires est simple: ils n’ont pas pas jouer au fou là — à l’équilibre des finances publi­ les moyens de se les payer. Les coûts devenus astrono­ ques, autant nous pensons qu'il est nécessaire certaine­ miques mais aussi la lenteur du processus judiciaire ment de diminuer les dépenses de l’État — et nous avons expliquent en grande partie cette situation. Il est grand voulu agir dans ce sens-là — autant nous regrettons que temps de rétablir l’équilibre dans notre système judiciai­ dans le discours inaugural nous n’ayons pas vu de mesu­ re. Aussi, à l’occasion de cette session, je veux accen­ res concrètes pour la relance de l’emploi. Je vous en ai tuer la lutte contre les abus, les délais injustifiés et, je suggéré un certain nombre, de mesures concrètes. dirais même, dans certains cas, les aberrations dans le Autant nous n’avons pas vu dans le discours domaine de la justice. inaugural cette volonté politique de soutien — je termi­ M. le Président, vous n’êtes pas sans savoir que ne, monsieur, vous me laissez une minute — cette vo­ j’ai, à la dernière session, présenté plusieurs projets de lonté politique de soutien à la métropole, qui est le loi devant l’Assemblée nationale. À cette session, d’au­ moteur économique du Québec, autant nous n'avons pas tres projets de loi viendront s’ajouter pour moderniser vu dans ce discours inaugural cette reconnaissance à notre système judiciaire. Nous avons le potentiel de quel point notre réseau collégial et universitaire est faire, en matière d’administration de la justice, les cho­ interpellé à une nouvelle fonction, non pas seulement, ses de façon fort différente d’il y a 25 ans. Plus particu­ bien sûr, les fonctions traditionnelles de former les lièrement, la réorganisation du travail et les moyens étudiants, mais aussi d’être un partenaire majeur au technologiques nouveaux nous permettent de dégager niveau de la recherche dans la relance économique. une marge de manoeuvre qui fera une grande différence Nous n’avons pas vu ça dans le discours inaugural. au cours des prochains mois. C’est ce qui nous permet­ C’est un discours inaugural sur lequel on peut être d’ac­ tra de bouger. cord sur les objectifs de réduction du déficit mais, mal­ M. le Président, l’accessibilité accrue à la justice heureusement, les moyens concrets, pragmatiques pour demeure un objectif incontournable. Nous pouvons atteindre cet objectif ne sont pas dans le discours inaugu­ atteindre cet objectif. La réforme que j’entends proposer ral, et c’est pourquoi nous allons voter contre le discours prochainement dans le dossier de l'aide juridique a pour inaugural. Merci, M. le Président. but particulièrement de faciliter cet accès à la justice pour un plus grand nombre de citoyens au Québec. Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le J’entends être en mesure de répondre au voeu du pre­ député de Verdun. Je céderai maintenant la parole au mier ministre pour que davantage de personnes puissent ministre de la Justice et député de Louis-Hébert. M. le désormais avoir accès à la justice, et cela, à des coûts député. raisonnables. M. le Président, le constat est unanime. S’il est M. Paul Bégin un domaine où la population attend du législateur un geste concret, c’est bien à l’égard de la justice adminis­ M. Bégin: M. le Président, le Québec, comme trative. Cette justice, celle qui est ou qui devrait être la l’a mentionné le premier ministre à l’occasion du dis­ plus près des citoyens, est devenue un fouillis et le cours d’ouverture de la session, doit retrouver le goût citoyen ne sait plus comment s'y retrouver. C’est pour­ d’oser agir ensemble. Par ces trois mots, le premier quoi le gouvernement a jugé qu’il était urgent d’y mettre ministre nous convie à une grande opération qui redon­ de l’ordre. J’ai proposé une réforme en profondeur qui 82 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 comporte notamment une déjudiciarisation accrue des créant une structure autonome et autofinancée, responsa­ décisions de première ligne, l’instauration d’un seul ble de la gestion des produits de la criminalité et qui tribunal, le Tribunal administratif du Québec, formé à intensifiera encore davantage la lutte à la criminalité, partir du regroupement de la multitude des tribunaux sera présentée. administratifs actuels, la transparence dans les modes de • (10 h 30) • sélection, nomination et renouvellement des membres de Voilà, M. le Président, quelques projets que ces tribunaux et la création d’un conseil de la justice pourront étudier les membres de l’Assemblée au cours administrative qui s’occupera notamment de la discipli­ de la session qui commence. Le ministère de la Justice ne. Pour le citoyen, l’accès à la justice administrative entend faire sa part pour que notre société redevienne sera, en conséquence, simplifié. C’est de cette façon que plus juste et équitable. Je vous remercie de votre atten­ l’on rétablira l’équilibre dans la relation que le citoyen tion, M. le Président. entretient avec l’Etat. En plus de ce projet de loi, une loi d’application de cette réforme sera présentée sous Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le peu. ministre de la Justice. Je céderai maintenant la parole à M. le Président, je vous réfère à mon introduc­ la présidente de la commission de l’aménagement et des tion dans laquelle j’ai abordé le cas où les citoyens ne se équipements et députée de Mégantic-Compton. Mme la tournent plus vers le système de justice pour faire res­ députée. pecter leurs droits, faute de moyens. En effet, aux yeux de la majorité, la justice est inaccessible. Par définition, Mme Madeleine Bélanger la voie accélérée que j’entends proposer, c’est l’allége­ ment de la procédure civile dans le but de diminuer les Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Lundi coûts et les délais que doit actuellement supporter le dernier, le premier ministre a prononcé son discours justiciable pour obtenir justice. J’entends donc proposer d’ouverture. Généralement, un discours d’ouverture doit à cette Assemblée des modifications au Code de procé­ nous donner la direction et les priorités du gouvernement dure civile de façon à ce que la procédure accélérée soit pour les mois à venir. Mais, M. le Président, le premier désormais la règle et non plus l’exception. Les coûts ministre nous a livré, lundi, un discours fleuve, un seront, par le fait même, grandement réduits et les ci­ discours écrit par un gouvernement qui manque d’imagi­ toyens auront ainsi accès à une justice plus rapide. nation, un discours qui, au lieu d’établir des priorités L’obligation alimentaire des grands-parents précises du gouvernement, nous promet mer et monde. prévue à l’article 585 du Code civil, je l’ai dit à maintes M. le Président, c’est un discours qui n’avance reprises, est un problème qui a pris dans notre société rien de nouveau. Aucun nouveau programme, aucune des proportions importantes, et ce, dans un très court nouvelle initiative, le premier ministre ne fait que re­ laps de temps. Sur cette question, vous le savez, je suis prendre à son compte des idées qui font déjà consensus présentement à l’écoute des grands-parents et des famil­ au Québec. Bien oui, M. le Président, ce que demande les monoparentales et je comprends parfaitement le la population depuis l’élection du Parti québécois, c’est désarroi et les inquiétudes qu’ils expriment face à ce de s’occuper des finances publiques et de créer des problème. Il s’agit d’un débat de société où plusieurs emplois. Il est évident, à la lecture du discours inaugu­ valeurs sont remises en question. On doit notamment ral, que le premier ministre a pris le temps de lire le s’interroger, à savoir si cette notion d’entraide familiale programme du Parti libéral de 1994, car on y retrouve doit continuer à être cristallisée dans le Code civil. Nous un grand nombre des promesses faites lundi par le devons écouter ce que les gens ont à dire. Une chose est premier ministre. Je pense, notamment, à l’idée d’une certaine, le statu quo est inacceptable. 11 faut intervenir, loi antidéficit, idée du Parti libéral; à l’assurance- et j’entends proposer une modification législative d’ici médicaments, une autre idée dans le programme du Parti l’ajournement de nos travaux pour la période d’été. libéral; ou à la décision du gouvernement d’aller de Également, je désire attirer votre attention sur un l’avant avec l’implantation des commissions scolaires projet de loi qui vise à rétablir la confiance des citoyens linguistiques. envers l’État. Il s’agit du projet de loi sur l’éthique, la J’aimerais rappeler au gouvernement, M. le probité et l’intégrité des administrateurs publics. Le Président, que c’est le gouvernement libéral qui a inté­ gouvernement en est venu à la conclusion qu’il faut gré des commissions scolaires linguistiques dans la Loi encadrer de façon particulière les rapports que peut avoir sur l’instruction publique. C’est le Parti libéral qui a l’administrateur public à l’égard de l’argent, de l’infor­ créé le comité Kenniff pour conseiller le gouvernement mation, du pouvoir et des influences. Ce projet de loi sur la mise en place de ces commissions scolaires lin­ n° 131 sera rappelé afin que l’Assemblée poursuive son guistiques, mais c’est le Parti québécois qui, à son arri­ adoption au cours de la session qui commence. vée au pouvoir, a mis un frein à l’implantation des La justice doit s’impliquer dans la lutte contre la commissions scolaires linguistiques en attendant de voir criminalité et plus particulièrement contre le blanchiment le résultat du référendum. Encore une fois, le PQ a d’argent. Je suis présentement à élaborer des mesures placé son option avant les besoins de la population. concernant l’administration des biens saisis et des pro­ M. le Président, le premier ministre, depuis son duits de la criminalité. Prochainement, une mesure arrivée à la tête du gouvernement, indique à la population 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 83 qu'il veut oser, qu'il veut agir. Malheureusement, le dans son discours d'ouverture, comme je le disais anté­ premier ministre nous dit maintenant qu'il ne fait que rieurement. Je me réjouis de l’annonce du premier mi­ créer des comités et qu’il reporte à l’automne tout geste nistre que son gouvernement va enfin gouverner à plein concret pour favoriser la relance de l'économie et de temps. l'emploi. Nous, M. le Président, au Parti libéral, nous En ce qui concerne la formation de la main- croyons qu’il est essentiel de s'attaquer aux véritables d'œuvre, le premier ministre nous indique que la minis­ problèmes qui étaient laissés pour compte pendant les tre de l’Emploi et la ministre de l'Éducation doivent 18 premiers mois du mandat du Parti québécois, pen­ présenter une série de mesures conjointes sur des arri­ dant qu’il se consacrait à son option référendaire. Si mages à faire entre l'école et l'entreprise. Le premier nous regardons le bilan du PQ, on se rend compte ministre ne le sait peut-être pas, mais le premier minis­ que la machine gouvernementale était mobilisée par tre précédent a donné ce même mandat à l'ex-ministre l’agenda séparatiste du PQ et que chaque action du de l’Éducation, Jean Garon, il y a 18 mois. Nous som­ gouvernement visait à réaliser son seul véritable objec­ mes toujours dans l'attente. tif, soit la séparation du Québec. De décembre 1994 à Le premier ministre a mis l'accent, dans son septembre 1995, 25 000 000 $ ont été dépensés par le discours, sur les jeunes. Il nous promet que son gouver­ gouvernement pour la promotion de son option. M. le nement va intensifier ses efforts pour l'insertion des Président, je pense que ce 25 000 000 $ aurait été jeunes sur le marché du travail. Cette déclaration beaucoup plus efficace s’il avait été utilisé pour la m’étonne, M. le Président, quand on considère que le création d’emplois. premier ministre leur a réservé si peu de place à sa M. le Président, même une question aussi impor­ conférence socioéconomique. Pour l'immédiat, tout ce tante que la décentralisation a été prise en otage par la que le premier ministre nous annonce, ce sont des cou­ question référendaire. On nous a dit que, sans la souve­ pures dans les services à la population, notamment dans raineté, la décentralisation était impossible. Nous, au la santé, l’éducation, la sécurité du revenu. C’est quand Parti libéral, nous ne croyons pas ces menaces et nous même surprenant que le premier ministre annonce des sommes convaincus que les régions du Québec sont coupures importantes en éducation, alors qu’il nous dit, capables d’assumer de nouvelles responsabilités. Je me et je cite: «Notre action la plus durable et la plus cru­ réjouis donc de voir que le premier ministre s’engage ciale sera notre réforme de l’éducation.» Il est difficile enfin dans cette voie essentielle pour le développement de comprendre comment un gouvernement qui dit que de nos régions. l'éducation est un secteur prioritaire peut couper dans Le premier ministre nous indique que son gouver­ ces budgets quand il sait que déjà l’école n’a pas les nement va gouverner, mais cela ne veut pas dire pour moyens de répondre aux besoins croissants de l’élève. autant que l’option disparaît. Bien non, M. le Président! Probablement l’annonce la plus importante faite L'option séparatiste et l’incertitude politique qui l’ac­ par le premier ministre dans son discours est sa promesse compagne sont encore omniprésentes. Le premier minis­ qu’après 18 mois au pouvoir le Parti québécois va enfin tre a annoncé des mesures pour relancer l’économie et commencer à gouverner le Québec à plein temps. C’est la pour relancer le développement de Montréal. Il doit moindre des choses, M. le Président, puisque le Parti savoir que la meilleure façon de relancer l’économie et québécois a été élu pour gouverner le Québec, pour re­ de faire revivre la métropole, c’est de mettre fin à l’in­ mettre la population au travail, pour réduire le déficit, certitude politique, de renoncer à son projet de sépara­ pour améliorer les services offerts à la population. tion et de travailler pour le renouvellement de la fédéra­ M. le Président, un bref rappel des 18 derniers tion canadienne, conformément au mandat qui lui a été mois s'impose, car, même si on a un nouveau premier confié par la population le 30 octobre dernier. ministre, on ne peut faire abstraction de la période allant Depuis son élection, M. le Président, le Parti du 12 septembre 1994 jusqu'à aujourd’hui. C’est un québécois a perdu une année en ce qui concerne la bilan désolant. Le gouvernement s’est consacré corps et création d'emplois. Le gouvernement n'a rien fait pour âme à défendre et à promouvoir son option alors que de assurer un environnement stable pour le développement nombreux dossiers importants dormaient sur les bureaux de nouvelles entreprises et pour assurer la croissance et des ministres. M. le Président, pour le gouvernement, le développement de celles déjà en opération. M. le Pré­ un des dossiers les plus importants était celui des études sident, quelles mesures concrètes le gouvernement a-t-il commandées par le ministère de la Restructuration, ces annoncées pour améliorer les programmes de formation études qui devaient nous convaincre de l’importance de pour nos travailleurs et nos jeunes? Rien, à date, à part faire la souveraineté. On voit aujourd’hui ce que ça a des promesses d’initiative à venir, mais qui dépendent donné, ces études-là: deux enquêtes du Vérificateur souvent de la bonne volonté du secteur privé. Il est général et une enquête de la Sûreté du Québec, et ceci essentiel que le gouvernement fasse de la création d’em­ d’un gouvernement qui nous a promis transparence et plois et de la formation de la main-d'œuvre sa princi­ ouverture. pale priorité. Nous devons, en tant que société, investir Au cours des 18 derniers mois, M. le Président, en notre avenir, préparer nos jeunes à relever les défis le gouvernement n’a tout simplement pas gouverné, et le du XXIe siècle. premier ministre Bouchard a clairement reconnu ce fait • (10 h 40) • 84 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 M. le Président, nous, du Parti libéral, croyons à nos amis de l’opposition: Où est l’incertitude? Où est que notre système de santé doit subir des transforma­ la crainte? Où est la fin du Québec? tions profondes, mais que ces changements doivent être Je reviens sur les journaux. Alors, au lendemain entrepris dans le cadre d’un plan d’action clair, axé sur du discours inaugural, les journaux, en plus de produire l’avenir. Ce n’est pas en fermant des hôpitaux à gauche leurs propres analyses, reproduisaient les réactions des et à droite et en coupant dans les budgets que nous principaux acteurs sociaux du Québec. Ainsi, Le Soleil assurons un avenir prometteur à notre système de santé. titrait: «Dans le sillage du sommet, les syndicats se Nous avons dénoncé ces fermetures et nous continuerons réjouissent». Ou encore: «C’est axé sur l’action, les à le faire tant et aussi longtemps que le gouvernement du patrons applaudissent». Alors, remarquez bien, j’ai à la Parti québécois n’aura pas clairement établi un plan fois souligné la réaction des syndicats et celle des pa­ d’action détaillant comment il voit notre système de trons. santé pour l’avenir. Quant à La Presse, elle rapportait les propos du Sans doute, le plus grand défi du gouvernement chef de l’opposition lui-même de la façon suivante: est la question des finances publiques. La situation finan­ «Johnson appuiera plusieurs projets de loi». Et elle cière du Québec n’a jamais été aussi inquiétante, et relevait, entre autres, l’appui du chef de l’opposition à l’équilibre des finances publiques est la responsabilité de une loi antidéficit, à une loi sur l’assurance-médicaments tout le monde. Le gouvernement a des choix difficiles à et même son appui au rapatriement du dossier de la faire en définissant ses priorités pour ne pas sacrifier la main-d’œuvre. qualité de nos programmes. Quant à eux, les chroniqueurs affectés aux tra­ En terminant, M. le Président, en tant qu’opposi­ vaux de l’Assemblée nationale soulignaient pour leur tion, nous voulons signaler au gouvernement que nous part la précision — et je souligne — la précision des avons l’intention de collaborer et de travailler pour engagements de notre premier ministre dans son discours l’avancement de nos travaux si les projets mis de l’avant inaugural ainsi que le fait que son discours reprenait les par le gouvernement ont pour objectif d’améliorer la principaux consensus sortis du sommet économique de la situation de nos concitoyens et concitoyennes. M. le semaine dernière. Président, pendant la prochaine session parlementaire et Même Don Macpherson, de la Gazette, écrivait, durant les prochains mois, le Parti libéral s’assurera que dans l’édition du 26 mars: «This is one Bouchard speech les véritables priorités de la population seront au coeur that, for the most part, can’t be criticized for a lack of des débats au Québec. Soyez assuré que nous allons substance. It was the most detailed description in years dénoncer toute tentative du gouvernement qui aurait of a Quebec govemment’s legislative and administrative pour effet d’affaiblir le Québec, que ce soit sur le plan program for a new session of the National Assembly. It économique, politique, culturel ou social. Merci, M. le was a refireshing change ffom the increasingly — et je Président. souligne encore pour nos amis de l’opposition — vague platitudes of recent years.» À ce que je sache, ces dix Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la dernières années, c’est le Parti libéral qui était au pou­ députée de Mégantic-Compton. Je céderais maintenant la voir. Donc, j’en conclus que Don Macpherson faisait parole au député de Groulx. M. le député. référence, évidemment, aux discours inauguraux de l’ancien gouvernement. Évidemment, M. le Président, M. Robert Kieffer certains prétendront que M. Macpherson était biaisé, puisqu’il est connu, évidemment, de tous pour ses ami­ M. Kieffer: M. le Président, à titre de remar­ tiés avec les souverainistes et doit donc être classé parmi que en guise d’introduction, j’aimerais relever deux les cryptoséparatistes. points. Le premier a affaire avec le paradoxe que je Enfin, M. le Président, les journaux nous rappor­ remarque en écoutant d’une part les commentaires taient les premières réactions des grandes agences de formulés par les députés de l’opposition et ce que je lis cotation que sont Standard & Poor’s et Moody’s. On dans les journaux depuis deux jours sur le discours citait, entre autres, Mme Blair, qui est analyste pour inaugural. Les journaux relèvent — et j’y reviendrai un Standard and Poor’s et qui considère positif le fait que petit peu plus en détail tantôt — la consistance, l’im­ les grands acteurs socioéconomiques s’entendent pour pact ainsi que la teneur même du discours inaugural éliminer le déficit et que la cible soit maintenant un vrai quant aux projets que le premier ministre met de zéro et non seulement l’équilibre des opérations financiè­ l’avant, alors que les députés libéraux reviennent res. Alors, à ce qu’on sache, Standard & Poor’s, habi­ constamment avec l’épouvantail de la souveraineté. Et tuellement, pèse assez lourd dans la cotation du crédit du cet épouvantail de la souveraineté, M. le Président, Québec. semble être l’apanage et le propre uniquement des On peut donc, de prime abord, M. le Président, libéraux, puisque, ce matin j’écoutais à la radio que le en conclure que le discours inaugural entraîne dans son Québec, hier, émettait pour 350 000 000 $ d’obliga­ sillage l’adhésion des principaux intervenants socioéco­ tions et, Oh surprise! elles étaient achetées en dedans nomiques du Québec. Doit-on en déduire que notre d’une heure et, Oh deuxième surprise! elles étaient premier ministre s’est attiré ces éloges en distribuant surtout achetées en Ontario. Alors, je pose la question des bonbons à droite et à gauche? La seule façon de 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 85 répondre à cette question, M. le Président, est de vous M. Lawrence S. Bergman présenter révolution du déficit des deux dernières années. En 1994-1995, le gouvernement libéral se M. Bergman: M. le Président, nous sommes, au voyait chassé du pouvoir par la population du Québec Québec, à un tournant névralgique dans notre histoire, et leur léguait, comme témoignage de son efficacité dont l'enjeu se cristallise autour du déficit budgétaire économique, un déficit inégalé de 5 700 000 000 $. actuel, mais qui se joue au niveau proprement politique, Après une seule année de notre gouvernement au pou­ eu égard à notre destin collectif. voir, nous avons ramené ce déficit à 3 969 000 000 $. Comme le disait M. le premier ministre si sou­ L’an prochain, il sera de 3 275 000 000 $, et ainsi de vent dernièrement, il s’agit du climat général, de notre suite, pour s’éteindre complètement au tournant du confiance dans notre capacité de remonter la pente et de millénaire. sortir de la morosité qui plane sur la société québécoise. Donc, M. le Président, c’est à du serrage de Mais, si là est l’enjeu, le diagnostic du gouvernement ceinture que notre premier ministre convie la population pêche par son aveuglement habituel. québécoise. Mais alors, me direz-vous, ne risque-t-on And so, I stand here today, Mr Speaker, not pas de faire face aux mêmes problèmes que ceux aux­ only as the MNA for D’Arcy-McGee to voice the quels est actuellement confronté l’Ontario, à savoir, concerns of my constituents, but also as an MNA from entre autres, les grèves massives des employés des sec­ who has to watch the slow decline of our teurs publics, suivies de mesures de répression violentes beloved city. Investment is down, businesses are de la part des forces policières? Eh bien, il semble que leaving, not only the vaunted head office moves, but non, puisque les échos que nous rapportent à la fois les many small and medium enterprises whose departure sondages et les groupes de pression sont à l’effet que la spells the loss of so many jobs. Indeed, the downward population québécoise est prête à faire les sacrifices spiral of Montréal spells bad news for the entire pro­ nécessaires au rétablissement des finances publiques. vince. Its shrinking tax base and its shrinking economy • (10 h 50) • will have a multiplier effect in inverse proportion to Elle pose cependant des conditions. Les princi­ the positive benefit that would accrue were we headed pales sont les suivantes: transparence, consultation, in the opposite direction. équité, responsabilité et maintien des acquis sociaux de Mais, nous ne nous dirigeons pas vers l’amélio­ base. Ces paramètres, M. le Président, ce sont ceux ration de la situation. Au contraire, les gens ont perdu que le premier ministre a mis de l'avant lors de son confiance. Dans la communauté anglophone et allopho- discours d’assermentation et ce sont ceux-là même qui ne, comme on a malheureusement l'habitude de parler ont présidé à la convocation du sommet économique de depuis trop longtemps maintenant, trop de personnes la semaine dernière. Les risques étaient grands que ce vivent aujourd’hui avec leurs valises faites, prêtes à sommet n’aboutisse à rien de concret. D'ailleurs, le partir à la moindre occasion. Pour la communauté anglo­ chef de l’opposition lui-même le dénonçait quelques phone, la situation est devenue critique. Depuis 20 ans, semaines plus tôt comme étant un simple exercice de plus de 300 000 personnes ont quitté le Québec, dont relations publiques. Et pourtant, M. le Président, au une grande partie venaient de nos rangs et ceux parmi fur et à mesure que l’échéance se rapprochait, les les plus jeunes, les plus dynamiques, les plus instruits, leaders québécois de tout horizon ont accepté de discu­ les plus bilingues de nos membres. ter de déficit, d’emploi et de solidarité sociale. On a La population de nos écoles a diminué de 250 000 vu les Beaudoin, Bérard, Rosenberg s’asseoir à côté à 100 000, mais nous devons affronter des interpréta­ des Larose, Pagé et Godbout et prêter l'oreille aux tions mesquines qui empêchent les personnes de langue jeunes, aux femmes, au secteur de la santé, de l’édu­ anglaise venant investir dans la province d’envoyer leurs cation et du communautaire. Les discussions ont été enfants aux écoles de cette même langue. vigoureuses et les consensus ont exigé de part et d’au­ On déplore aussi l’absence des anglophones dans tre une bonne dose de compromis et d’écoute. Quelque la fonction publique du Québec, mais rien n’est fait, là part, durant ces trois jours, la solidarité collective non plus, pour améliorer la situation. Le premier minis­ québécoise a joué, et il en est ressorti quelques grands tre parle, mais je peux vous répondre, comme Hamlet: consensus et, surtout, M. le Président, la volonté de «Des mots, des mots, des mots.» travailler ensemble à sortir le Québec du marasme. There is something else that is said in Hamlet, to C’est ça, M. le Président, que je ressens quand j’en wit: «Something is rotten in the state of Denmark.» parle à mes électeurs et mes électrices. Alas, the same can be said today of Québec. And what Je terminerai donc, M. le Président, en nous festers goes far beyond the symptoms of our malaise. invitant, tous et toutes, à oser faire preuve d’une plus Certainly there are a number of measures that can be grande solidarité et de la générosité nécessaire à relancer taken to redress particular problems. But the climate of le Québec. Merci. uncertainty, the flatness with which our future unfolds for so many of our citizens has much deeper roots. They Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le lie at the very heart of the Government’s agenda, feed député de Groulx. Je cède maintenant la parole au dé­ on the doubt which the Government’s program inspires puté de D’Arcy-McGee. M. le député. and that no smooth words can allay. 86 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 To give but one example: in his speech to selected record is better than its neighbors’, one can only shake guests at the Centaur Theater, Premier Bouchard one’s head in dismay. Is the Premier telling us that, reiterated the Parti québécois’ commitment to democracy instead of being proud of our record of promoting and the pluralistic nature of its vision of sovereignty. Let educational diversity, we ought to reduce it to a minimal me assure him that no one in the anglophone community baseline of comparison with other provinces? I can has any doubts about Québec’s democratic tradition nor assure the Premier that the cultural and political impact about the pluralistic nature of Québec society. We, who of this change will be disastrous, sending one more live in Montréal, know about that on a daily basis. But message to the vast majority of my constituents who we do have doubts about the Government’s agenda when have built up a thriving educational sector that conforms the Premier can stand up and say that he hopes the rigorously to all Government guidelines and produces anglophone community will abide by the democratic students fully capable of integrating into Québec society, choice of Quebeckers if they vote yes in the next that they are no longer wanted. Is this what is meant by referendum on Québec’s independence. protecting our rights, while whittling a way at the social People hear that and wonder: How come the institutions which guarantee the community survival and Premier does not abide by democratic decisions of the hiding this behind doubtful fiscal arguments? Is this a Québec people who have twice now rejected the separatist way to open up a dialogue? option? Does democracy consist of ignoring the wishes of • (11 heures) • the majority until the majority votes the way you want Il fut un temps où il y avait une communauté him to vote? And what better way for it to achieve its aim anglophone dynamique dans la ville de Québec où nous than to run Québec into the ground, to keep this sommes, ici. Mais elle a connu un déclin, et ce, malgré «neverendum» referendum going until people who can see la garantie de ses droits. Est-ce cela qui attend la com­ no rhyme or reason to this project get sufficiently munauté anglophone de la province de Québec? Y a-t-il discouraged, that they leave in sufficient numbers to une volonté, dans cette province, de garantir que ceci ne assure the PQ of an eventual victory? But, of course, by se produise pas? Il est temps que les gens, partout dans then, Québec will be so impoverished culturally and la province — et cela comprend les dirigeants des entre­ economically that the victory will indeed be hollow. prises et des syndicats, des professeurs, des artistes, des C’est pourquoi, M. le Président, je crois que le journalistes — posent cette question et y répondent ou, moment est venu pour que nous nous posions les ques­ nous aussi, nous déclinerons, malgré la protection des tions difficiles. Quant à ma communauté, il ne s’agit démocratiques «nonobstant». plus de savoir si telle ou telle mesure sera mise sur pied. As for the Government, it has to realize that, as Il s’agit plutôt de savoir si le Québec, tout le Québec, long as people feel that one day they can wake up to no veut encore une communauté anglophone, une commu­ longer live in the country in which they went to sleep, nauté qui a fait et fait toujours partie du Québec par la as long as they fear that they will not die in the country sueur de ses peines, de ses accomplissements et même in which they were born or to which they immigrated de ses défauts. Nous, comme tant d’autres qui ne sont and gave the best of their talents, it is hard to look to pas d’origine francophone de souche — et on me par­ the future with enthusiasm. The young take their clues, donnera cette expression, mais c’est ainsi qu’il est con­ get educated and leave. And the old live in fear. And the venu de parler ici, au Québec — nous avons fait tout drain on our talents and our hopes is no longer restricted pour embrasser le Québec. Dans la vaste majorité, nous to the anglophone community. avons contribué à façonner un visage français à Montréal. There is, of course, one major step the Nos enfants sont devenus bilingues et même nous, les Government can take: bury the referendum issue for a gens de ma génération, avons appris cette langue bien generation and let all of us get on with the job of qu’il y ait certaines contraintes de l’âge qu’on ne peut creating a truly pluralistic and dynamic society, where pas surmonter: mon accent est bien là comme preuve. we will not have constantly to assure each other about Et, cependant, nous sommes fiers de vivre ici et nous our democratic instincts, our goodwill and our tolerance, aimerions tellement savoir que nous pourrons nous because it will be made amply clear by our actions, «tant retrousser les manches pour bâtir un Québec fort et à l’Assemblée nationale que dans les multiples coins de dynamique, un Québec de demain dans un Canada uni. la vie quotidienne», that we are in this boat together, But it is hard to do this when you feel that the and for the long haul, and in it because we want to be in very survival of your community is in danger. And the it, because, for my constituents, as well as for all Government’s inaugural speech did nothing to alleviate Quebeckers, it is the place that we all call «home». this feeling, on the contrary. Senior citizens of all I can assure the Premier that overnight the communities, who have contributed so much to our climate of morosity will change to confidence and the society, will now be told that their health care needs will deficit, that is more than simply economic, which hangs not be totally covered when they vacation out of this over all of us would soon be a thing of the past. Merci, province down south, as so many of our dear senior M. le Président. citizens, who have built this province and this country, do. As to statements about tempering the Government Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le support for private schools on the grounds that Québec’s député de D’Arcy-McGee. Je cède maintenant la parole 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 87 au ministre des Affaires municipales, membre du comité municipalités, pour les collectivités locales et les collec­ ministériel des affaires régionales et territoriales, M. le tivités régionales. C’est ce qu’on appelle le concret de député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. M. le l’application de la décentralisation, mais aussi la face député. positive, le côté jardin, si vous voulez, de toute cette phase d’engagement du gouvernement, c’est le renfor­ M. Rémy Trudel cement des communautés locales. M. le Président, nous avons pris en compte ce M. Trudel: Merci, M. le Président. Le message message qui était lancé à la fin de la décennie 1980 et du premier ministre a été très clair; le gouvernement a qui était contenu dans «Deux Québec dans un». Nous choisi le message de la responsabilité et de la solidarité, ne voulons pas d'un Québec fracturé, nous ne voulons et d’effectuer, de réaliser ces deux grands défis dans la pas d’un Québec qui soit en quelque sorte divisé de société québécoise dans la transparence, dans l’ouverture l’intérieur même. Nous voulons un Québec solidaire, et la collaboration. M. le Président, on l’a bien senti, le un Québec au travail, un Québec qui peut compter sur message qui a été lancé est un message sur le fait que le ses dynamismes locaux, sur ses dynamismes régionaux Québec et ses partenaires, sur l’ensemble du territoire, pour bâtir et développer, et, surtout, faire en sorte vont ouvrir des chantiers. À la grandeur du Québec et que, pour cette jeune génération, il y ait des emplois, dans le monde municipal, cela signifie beaucoup, M. le de bons emplois où on peut se réaliser, ce qui va Président. avoir des effets évidemment sur le développement du Ce que le message inaugural a lancé comme groupe familial au Québec, noyau essentiel s’il en est. invitation, comme possibilité de partage au niveau de ces Et c’est contenu également dans le message du pre­ chantiers de travail, c’est, M. le Président, de prendre mier ministre pour le développement de la société l’angle de la prise en charge par la décentralisation et le québécoise. renforcement des communautés locales et régionales Dans ce message, M. le Président, au niveau du avec un programme d’action, M. le Président, qui pré­ partenariat avec les municipalités du Québec, que faire? cise et définit bien les balises, les éléments qui seront En matière de décentralisation, nous avons été très clairs mis en oeuvre. La prise en charge des collectivités sur le message et sur les étapes qui vont suivre au cours locales parce que nos partenaires sur l’ensemble du des prochaines semaines, des prochains mois et des territoire québécois veulent en être, de ce défi, des prochaines années. D’abord, à la fin de mai, cette ren­ éléments de défi posés par le premier ministre au contre du lac-à-l’épaule, qui avait déjà été mise en moment où il est devenu le chef du gouvernement: branle par le député de Joliette et ministre des Affaires assainissement des finances publiques, création d’em­ municipales à l’époque, pour faire en sorte que nous plois, éducation, culture, développement de la région de puissions concrétiser l’entente d’octobre dernier sur de Montréal et des régions du Québec. Les municipalités véritables objets de réalisation et de développement qui veulent en être, et nous allons nous donner un pro­ pourront être pris en charge par les municipalités et, gramme qui fasse en sorte que nous puissions donner les aussi, y inclure, en matière de développement économi­ outils, les instruments aux collectivités locales et régio­ que et de création d’emplois, les instruments nécessai­ nales pour arriver à cette contribution significative dans res, les activités nécessaires relatives au développement le développement du Québec. économique et de l’emploi. Prise en charge, M. le Président, ouverture de Également, que faire avec ce défi de la décentrali­ chantiers spécifiques. Déjà, vendredi il y a une dizaine sation et du renforcement des communautés locales? Eh de jours, à la première rencontre du ministre des Affai­ bien, M. le Président, ça signifie qu’on va continuer, res municipales avec la Table Québec-municipalités, qu’on va intensifier notre action au niveau de la réalisa­ c’est-à-dire avec les partenaires sur le territoire, nous tion d'un grand nombre d’expériences-pilotes, mais qui avons décidé conjointement de relever ce défi non vont devenir des projets sur le terrain en termes de prise seulement du développement économique, mais de la en charge des communautés locales et des communautés création d’emplois. Nous avons convenu, au moment régionales. Déjà, M. le Président, nous avons 30 dos­ de l’ouverture de cette Conférence sur le devenir éco­ siers, 30 projets sur la table. nomique et social du Québec, que nous allions mettre • (11 h 10) • en oeuvre ce chantier, un chantier spécifique de colla­ N’en citons qu’un, actuellement, qui fait l’objet boration et de développement avec ce que représentent de débats et qui fait l’objet de préoccupations et, surtout, comme potentiel les municipalités, les citoyens et les de volonté de prise en charge du milieu. La communauté citoyennes, et les groupes qui sont dans ces collectivi­ municipale de Batiscan, en Mauricie, nous a indiqué sa tés locales. volonté d’intervenir au niveau du renforcement de la M. le Président, la conséquence pour le gou­ partie du tissu social qui s’appelle l’éducation. Nous vernement, en termes de logique et d’instrumentation, avons déjà des échanges à cet égard, M. le Président, ça veut dire, pour les collectivités locales et régionales, avec le ministère de l’Éducation et nous allons faire en des pouvoirs accrus pour réaliser ce mandat de la créa­ sorte qu’avec la volonté de la communauté, la volonté tion de la richesse. M. le Président, tout cela doit donc de l’UMRCQ, la volonté des partenaires, la volonté du nous permettre de définir de nouveaux outils pour les gouvernement, la volonté de la ministre de l’Éducation 88 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 nous puissions en arriver a une formule de prise en des services municipaux. Mais, je le répète, M. le Prési­ charge qui fasse en sorte que ce sont les enfants, les dent, avec la même prudence à laquelle j’ai invité la familles, les citoyens et les citoyennes qui vont en béné­ ville de Montréal en matière de gestion de l’eau; nous ficier parce que nous aurons pu utiliser les dynamismes allons nous appliquer ce message de prudence et nous au niveau local pour réaliser de tels projets, de telles allons faire en sorte qu’au niveau des sociétés d’éco­ expériences. Bien sûr, M. le Président, on fera ça en nomie mixte nous allons nous assurer que les balises concertation, on fera ça en collaboration avec les instan­ soient extrêmement bien posées, extrêmement claires, de ces concernées, mais on sent déjà la convergence des façon à s’assurer toujours du contrôle du public à volontés pour pouvoir y arriver, et nous serons capables l’égard de ces mandats. M. le Président, et de la possibi­ de fixer les balises pour en arriver aussi évidemment à lité de faire en sorte que le secteur privé soit un allié du des résultats probants. secteur public et non pas évidemment un délestage sans Un autre élément très concret, M. le Prési­ responsabilités. dent — et le premier ministre a, encore une fois, été M. le Président, seulement une minute quand extrêmement transparent, clair, au niveau de ce défi de même pour parler d’habitation. Le gouvernement fédéral la responsabilité et de la solidarité des Québécois et des s’est retiré et nous a laissés tout seuls dans ce secteur. Québécoises partout sur le territoire — c’est tout ce Nous avons continué, malgré ces grandes difficultés qu’on appelle la consolidation des communautés de base. budgétaires, à axer nos programmes de logement au D’autres vont appeler ça «fusion*. D’autres vont appeler niveau social et au niveau de l’habitation sur la rénova­ ça «regroupement*. M. le Président, nous l’avons indi­ tion. Nos programmes Rénove, Achat-Rénovation et qué, nous allons publier, d’ici la fin mai, des instru­ rénovation de vieux quartiers sont vraiment des instru­ ments indicatifs décrivant comment, au Québec, nous ments de collaboration au niveau du développement du pouvons en arriver à consolider un certain nombre de logement social. Nous allons continuer. Mais le gouver­ communautés qui, au fil des années, se sont fractionnées nement fédéral va devoir aussi nous donner les argents en plusieurs unités municipales. qui nous reviennent pour que nous puissions continuer, Nous allons établir les faits, nous allons décrire avec une nouvelle politique qui sera publiée à la fin mai, les incitatifs, nous allons décrire également les consé­ à assumer nos responsabilités en matière de logement quences au plan fiscal, et tout cela va avoir pour résultat social, tout comme nous allons le faire en matière de que les citoyens et citoyennes des communautés concer­ loisirs, de sports et d’activités physiques au Québec, nées pourront choisir en tout état de cause. Non, il n’y puisqu’un nouveau cadre pour ces activités sur le terri­ aura pas, M. le Président, de fusion forcée, de regrou­ toire québécois est en élaboration suite à des consulta­ pement forcé, mais il y aura une description claire, tions nationales auprès de 700 groupes et fédérations transparente, responsable et solidaire des faits pour non spécialisés, et la nomination, cette semaine, d’un comité seulement en arriver à avoir des instruments de gestion d’experts. Nous allons en arriver, là aussi, M. le Prési­ adéquats dans le milieu municipal, mais également s’as­ dent — et je termine là-dessus, bien sûr — à un cadre surer d’une équité au plan fiscal qui soit bien éclairée et renouvelé en matière de sports, de loisirs et d’activités dont on peut se rendre compte au niveau de l’ensemble physiques. des citoyens. Vaste programme, M. le Président? Oui, vaste M. le Président, lorsqu’on parle de: Que faire programme, parce que le gouvernement est à l’action. pour contribuer à ce défi du gouvernement? pour les Il est à l’action avec ses partenaires sur l’ensemble du municipalités, ça veut dire aussi des allégements, au sens territoire québécois, et nous allons partager avec nos de la prise en charge de l’autonomie. A cet égard, j’ai partenaires municipaux, M. le Président, l’organisation l’intention de déposer ici deux projets de loi, par rapport et aussi, il faut le dire, parce que le premier ministre au projet de loi n° 127 qui était déjà inscrit à notre a été très clair, les activités de financement de ces agenda parlementaire, en matière d’allégement des pou­ services avec nos partenaires sur l’ensemble du terri­ voirs, d’allégement des mécanismes administratifs et de toire québécois, parce qu’il s’agit là de services collec­ gestion des municipalités. Pourquoi, M. le Président? tifs. Parce que nous avons consulté, nous avons travaillé avec Transparence, partenariat, instrumentation, auto­ nos partenaires et, dans ce sens-là, avec les partenaires, nomie, responsabilité, voilà le défi, M. le Président, que nous avons convenu que nous aurions une partie des nous nous fixons, au niveau des Affaires municipales, à allégements en ce qui concerne l’aménagement et l’urba­ l’intérieur du message global du gouvernement et du nisme et, d'autre part, au niveau des mécanismes admi­ premier ministre, et nous savons que nous pouvons nistratifs. compter sur nos partenaires, parce que nous misons Même chose au niveau des relations de travail, d’abord sur la responsabilisation et l’équité. Merci, M. le Président. Nous allons introduire, avec le ministre M. le Président. du Travail, des responsabilités et des éléments de propo­ sition pour un rapport équilibré en milieu municipal, et Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le également permettre, avec des balises extrêmement ministre des Affaires municipales et député de Rouyn- sérieuses, M. le Président, avec toute la prudence qui Noranda—Témiscamingue. Je cède maintenant la parole s’impose, l’introduction du secteur privé dans la gestion au député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député. 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 89 M. Russell Copeman Montréal. Mais je regrette, M. le Président, c’est très clair que le ministre des Finances et de l’Économie ne M. Copeman: Merci, M. le Président. M. le vit pas dans le même Montréal où je vis, parce que les Président, on est conviés ici aujourd’hui et dans les jours maisons qui sont à vendre, ce n’est pas pour ajouter une qui suivent pour répondre, répliquer au discours d’ou­ valeur, ce n’est pas pour acheter une maison plus impor­ verture de la deuxième session de notre Parlement pro­ tante, plus grosse, plus impressionnante. Non, M. le noncé par le premier ministre et député de Jonquière, Président, c’est pour liquider des actifs, dans mon com­ M. Lucien Bouchard. M. le Président, j’ai, malheureu­ té, que les maisons se vendent, pour liquider des actifs. sement, été absent lundi, quand le premier ministre a Il n’y a pas de maisons à louer dans Notre-Dame-de- prononcé son discours. Je l’ai suivi attentivement à Grâce aujourd’hui; il est très difficile de trouver des Montréal et j’ai obtenu le texte évidemment. maisons à louer. Vous savez pourquoi, M. le Président? J’aimerais, en première partie de ma réplique, Parce que mes concitoyens veulent du liquide pour être traiter de quelques questions soulevées dans le discours. capables de faire face à l’inconnu engendré par l’option Entre autres, M. le Président, le premier ministre a politique du Parti québécois. annoncé avec beaucoup de fierté la mise en place de M. le Président, tout récemment, la compagnie certains chantiers de travail pour essayer d’étudier et de Zellers a annoncé le transfert de son siège social, situé solutionner éventuellement des problématiques très dans mon comté, vers Toronto, avec une perte d’emplois graves et sérieuses qu’affrontent les Québécois dans leur nette de 300 personnes, le siège social de Zellers situé quotidien. Entre autres, le chantier de travail de la créa­ dans le même quartier de Notre-Dame-de-Grâce que tion d’emplois, qui me semble un sujet très préoccupant l'hôpital Reine Elizabeth. Alors, ce quartier va subir une pour tous les Québécois, et également un chantier de attaque importante: un hôpital qui emploie 1 000 person­ travail sur la relance de Montréal, qui, également, de­ nes fermé le 1er septembre; un siège social qui se trans­ vrait préoccuper tous les Québécois, M. le Président, fère à Toronto grâce en grande partie, M. le Président, à parce que, comme le premier ministre l’a si bien dit, l’instabilité politique. l’économie de Montréal contribue largement à l’éco­ Cette instabilité politique... Mr. Speaker, this nomie québécoise, et qu’un Montréal en santé sera un political instability is affecting very seriously the Québec en santé. English-speaking community of which I am proud to be Le problème, quant à moi, M. le Président, avec a member. There is no question of that in my mind, and ce plan de chantiers, ces plans du sommet de la déci­ there should be no question of that in the mind of any sion, tels que décrits dans le discours inaugural, c’est Member of this House. They can, if they so choose, put qu’on est conviés à prendre des décisions, semble-t-il, their head in the sand and pretend that this problem does dans à peu près sept mois, les 30 et 31 octobre, le 1er not exist, but it is not by that ostrichlike maneuver that novembre. M. le Président, pour moi, député de Notre- the problem will go away. Dame-de-Grâce, dans la région de Montréal, presque le And, Mr. Speaker, I would just like to quickly coeur de Montréal, le centre-ouest de Montréal, il est quote a sentence from the opening speech by inacceptable et, j’en suis convaincu, inacceptable égale­ Mr. Bouchard: «Le dialogue que le gouvernement a vou­ ment pour mes concitoyens qu’on attende sept mois lu engager avec la communauté anglophone du Québec avant de faire adopter des positions et des solutions très est une démarche importante qui a déjà contribué à concrètes pour la relance de l’économie montréalaise et changer le climat de nos relations et qui débouchera sur pour la création d'emplois. Une autre période de sept des résultats concrets au cours des prochains mois.» mois où nous allons étudier, nous allons tenter de créer That’s what the English-speaking community is hopeful un certain consensus, mais, en fin de compte, M. le for, Mr. Speaker, concrete results. I don’t see any, Président, on risque de ne rien faire de concret pour les Mr. Speaker. I will be very surprised and very relieved Montréalais qui cherchent de l’emploi, pour les Québé­ if I see some from this Government. My expectation is cois qui cherchent de l’emploi. Et ça, ça me préoccupe there will be no concrete results to assuage the fear and beaucoup. reassure the fear that is palpable in the English-speaking La problématique de Montréal, M. le Président, community. est très grave. On a juste à penser aux sept hôpitaux Mr. Speaker, a very quick example of the montréalais qui vont fermer leurs portes bientôt. Ce que, difference between words on a piece of paper and moi, je décris, en toute honnêteté et franchise, comme actions: the Leader of my party already indicated une attaque contre le système de santé à Montréal. Je yesterday, Mr. Speaker, that it was interesting that, sais que ce point de vue n’est pas partagé de l’autre côté outside the Centaur Theater, in this House, the de la Chambre, mais, moi, je le considère tel quel. Parliament of Québec, the Premier, in his opening • (11 h 20) • speech, did not say a word in English, not a single Hier, le chef de l’opposition a tenté de décrire word. Is that reassuring for the English-speaking un peu la situation à Montréal en ce qui concerne les community, Mr. Speaker? I think not. maisons à vendre. Si j’ai bien compris la réplique du The Premier’s own parliamentary assistant, the ministre des Finances et de l’Économie, il a dit: C’est Member for Vachon, on the referendum question, a un signe d’activité économique, c’est un bon signe pour question of utmost importance to the English-speaking 90 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 community and to all Quebeckers for that matter, who is son score dans le comté, pour s’assurer que les person­ the self-styled liaison with the English-speaking nes handicapées puissent exercer un vote fondamental et community now, in his remarks on the referendum démocratique au Québec. question, the Member for Vachon, not a word in M. le Président, un dernier mot toujours au cha­ English, Mr. Speaker. From an English-speaking pitre de l’intégration: la question de sécurité du revenu Member of this House, sitting with the Government as a pour les personnes handicapées. Le gouvernement a Member of the Parti québécois, trying to do outreach to semé une certaine inquiétude, M. le Président, dans le the English-speaking community, and he did not deign dossier du transfert des personnes handicapées dites to speak one word in English during the referendum inaptes de la Sécurité du revenu au ministère de la Santé question, Mr. Speaker. Peculiar, to say the least. et des Services sociaux. Ça, c’était contenu dans le M. le Président, dans le bref temps qu’il me discours de M. le premier ministre. Dans son discours reste, j’aimerais parler d’un dossier qui me tient à d’assermentation, le 29 janvier, il a annoncé l’intention coeur, les personnes handicapées, comme critique de du gouvernement de transférer les personnes dites inap­ l'opposition officielle dans le dossier. M. le Président, tes, handicapées, du ministère de la Sécurité du revenu les personnes handicapées réclament, au Québec, une au ministère de la Santé et des Services sociaux. Entre­ meilleure intégration dans leur vie quotidienne. C’est ça temps, la ministre d’État de l’Emploi et de la Solidarité, qu’elles réclament depuis une vingtaine d’années; c’est semble-t-il, pense tout haut en disant que peut-être ces ça, la politique officielle du gouvernement. Il est temps personnes-là seront transférées à la Régie des rentes. Le peut-être, M. le Président, que la Loi assurant l’exercice ministre de la Santé est muet sur la question. Il y a une des droits des personnes handicapées soit mise à jour, ce certaine incohérence dans les démarches du gouverne­ qu’on appelait la loi 9 dans le temps. Elle a été adoptée ment là-dessus, une incohérence qui inquiète beaucoup par le Parti québécois en 1978. Mais ça fait 18 ans, les personnes handicapées bénéficiaires de l’aide sociale. M. le Président, qu’elle n’a pas été mise à jour. Le mi­ lieu a beaucoup changé dans les 18 dernières années, et Motion de censure je pense qu’il est temps de mettre à jour ce projet de loi important pour les personnes handicapées au Québec. À cause de cette incohérence et en terminant, je Je reviens au terme d’intégration, M. le Prési­ fais motion: «Que cette Assemblée blâme le gouverne­ dent. Quand le gouvernement, même du Parti québécois, ment du Parti québécois pour avoir semé l’incertitude et fait de bonnes choses, moi, ça ne me gêne pas de le l’insécurité chez les personnes handicapées bénéficiaires féliciter. Le gouvernement, quand il a entrepris la ré­ de l’aide sociale en faisant preuve d’incohérence dans le forme du processus électoral, a accepté un amendement dossier du transfert de la responsabilité des assistés qui venait de notre côté de la Chambre en ce qui sociaux dits inaptes au travail au ministère de la Santé et concerne l’accès des personnes handicapées aux bureaux des Services sociaux.» Merci, M. le Président. de votation. Je pense qu’on a des exemples très concrets de l’amélioration de l’accès des personnes handicapées Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, votre dans l’exercice de leur droit de vote le jour même du motion est présentée, M. le député de Notre-Dame-de- référendum ou d’une élection. 89,7 % de tous les bu­ Grâce. J’accueille maintenant le député de Pointe-aux- reaux de vote au Québec étaient accessibles, lors du Trembles et vice-président de la commission de l’agri­ dernier référendum, aux personnes handicapées. Mais ça culture, des pêcheries et de l’alimentation. M. le député. veut dire que 10,3 % ne l’étaient pas. C’est vrai, je pense qu’on a fait des progrès, mais il y en a d’autres à M. Michel Bourdon faire. Trente-sept comtés du Québec — et je souligne ça pour mes collègues ici, en Chambre — ont réussi à avoir M. Bourdon: M. le Président, il y a diverses tous leurs endroits de vote et tous leurs bureaux de façons d’être québécois et l’une d’entre elles est d’être votation accessibles aux personnes handicapées. Trente- montréalais. Et je salue le ton du député de Verdun et sept comtés! C’est bon, M. le Président. Mais, pour les du député de Notre-Dame-de-Grâce en disant que des collègues qui sont en Chambre, qui représentent les choses doivent être faites pour que la métropole main­ autres comtés, moi, je leur demande de faire un effort, tienne son rang et sa place au Québec. avec leur directeur ou directrice du scrutin, la prochaine • (11 h 30) • fois, pour s’assurer que tous les endroits de vote seront Mon comté, le comté de Pointe-aux-Trembles, il accessibles. s’agit d’un comté industriel à cause de Montréal-Est où Malheureusement, avec de bonnes nouvelles, il y on retrouve CCR Noranda, Wolverine, Alcatel, Shell et a toujours de mauvaises nouvelles. Trente-sept comtés Pétro-Canada. Ça n’est pas la question de la souverai­ où tous les endroits de vote étaient accessibles. Le pire neté qui fait fuir les investisseurs dans l’est; la société comté au Québec, malheureusement, où 45 % des en­ Coastal du Canada a racheté les actifs de Kemtec, en droits de vote n’étaient pas accessibles, se trouve à être pleine campagne électorale et a repris la production. Les le comté de Fabre. Alors, j’invite le député de Fabre et efforts qui sont consentis dans l’est de Montréal adjoint parlementaire au premier ministre à travailler — 500 000 de population — pour opérer une reconver­ pour qu’au prochain rendez-vous électoral il améliore sion industrielle sont couronnés de succès. Il faut voir et 27 mars 1996 Débats de 1* Assemblée nationale 91 savoir, M. le Président, que les gens qui investissent Montréal sur le marché des exportations. Parce que, investissent au Québec parce que c’est une terre propice. même si le chef de l’opposition, hier, a dit que le Qué­ Le comté que je représente à l’Assemblée nationale bec n'était pas capable d’exporter, il faudrait souligner est un comté exportateur. La production de Wolverine, la que le Québec exporte, bon an mal an, quelque production d’Alcatel, la production de CCR Noranda s’en 30 000 000 000 $ de produits et de services. Le Québec va principalement à l'exportation, et ces personnes, qui ne exporte et doit continuer d’exporter. partagent pas nécessairement l’option souverainiste du Je suis fier, comme Québécois, d’entendre que gouvernement actuel, n’ont pas peur de la question de la Bombardier va réaliser une ligne de chemin de fer aux souveraineté. Les affaires, M le Président, sont les affai­ États-Unis, ce qui fait des emplois à La Pocatière. C'est res, et les investisseurs étrangers respectent le gouverne­ dire que l’économie québécoise est interreliée. Quand ment du cru. Ils investissent là où ils peuvent attendre un Bombardier réussit à vendre des trains aux États-Unis, ça retour raisonnable sur leur investissement, et ce n’est pas a des conséquences favorables pour La Pocatière. Quand l'incertitude sur l'avenir politique du Québec qui les empê­ le groupe Noranda envoie du cuivre se faire transformer, che d’investir. la première transformation, à CCR Noranda, dans l’est J'en parle à l’aise, dans le cas de la société de Montréal, c’est bon pour l’Abitibi où on prospecte et Coastal, c’est l’ancien ministre du Commerce, de la on sort de la terre le cuivre, et c’est bon pour l’est de Science et de la Technologie qui a attiré cet investisseur, Montréal où le groupe Noranda a une de ses usines de et je ne peux que déplorer que, prochainement, on ne le première transformation. reverra plus dans cette enceinte, parce que les efforts Et il y a d'autres atouts dans l'est — ce qui ne qu’il a faits ont été couronnés de succès. Le magazine veut pas dire que je crois que les autres régions du L'actualité titrait récemment: «Le soleil se lève à l'est», Québec n'ont pas des atouts, chaque région doit jouer en parlant de l'est de Montréal. Et je veux dire que c'est ses atouts. Cet atout, c’est la qualité de la main- par la concertation qu'on obtient des résultats. PRO-EST d’œuvre, c'est la proximité du port, et, ça, partition ou regroupe les employeurs, les syndicats, le milieu com­ pas, le port de Montréal va rester le port de Montréal. munautaire, les élus municipaux et attire des industries Et je voudrais saluer, à cet égard, le discours dans l’est de Montréal. À cet égard, je pense que c'est responsable du député de Mont-Royal au moment où il un raccourci de dire que, si on n’enterre pas la question s'adressait à un auditoire anglophone, partisan de la de la souveraineté pour une génération, il n'y a plus partition du Québec. Le député de Mont-Royal leur a personne qui va vouloir investir au Québec. dit, même si ce n’était pas populaire, que le Québec est Si je parle de Montréal, rappelons que l'ouver­ un tout et que le prochain référendum, qui n'est pas ture de la voie maritime du Saint-Laurent a eu des demain mais qui ne sera pas retardé d’une génération, conséquences sur le port de Montréal, et pourtant, en j'en ai la conviction, et qu’on va gagner... que le terri­ 1958-1959, la question de la souveraineté n’était pas à toire du Québec n'est pas négociable. L’ensemble du l’ordre du jour. Les investisseurs investissent là où il est Québec deviendra ou pas souverain, et, à cet égard, je intéressant d’investir. Et, à cet égard, le discours d’ou­ voudrais dire à nos collègues anglophones que les Mont­ verture dit bien qu’il va falloir former la main-d’œuvre réalais se réjouissent qu'on ait quatre universités: deux pour pouvoir s’adapter aux changements rapides de de langue française et deux de langue anglaise. L'Uni­ l’économie québécoise et nord-américaine. versité McGill, l'Université Concordia font partie de La société Coastal me faisait part, peu après notre patrimoine, et, à cet égard, je voudrais dire que si qu’elle a recommencé à produire du métaxylène qu’elle Hugh MacLennan a pu écrire le roman «Deux solitu­ exporte, que la qualité de la main-d'œuvre ne fait pas des», il ne s’agit pas, à Montréal, d’en avoir 80. de doute. À cet égard, je voudrais souligner en passant, À partir de la langue commune, le français, il y a parce que je représente le gouvernement à PRO-EST, moyen de se parler, il y a moyen de réussir ensemble, que l'Institut de chimie et de pétrochimie du cégep de parce que les Montréalais, comme l’ensemble des Qué­ Maisonneuve a formé, depuis trois ans, 348 jeunes, dont bécois, sont des gagnants et ils vont gagner la bataille pour 344 ont trouvé un emploi dans la pétrochimie. C’est pas réduire le déficit. Tout le monde est d’accord là-dessus. mal, c’est une bonne nouvelle, et il faut, même ici, Notre déficit, au Québec, est trop important. Il ne s’agit diffuser les bonnes nouvelles, parce qu’on ne peut pas, pas de le transférer à la prochaine génération et dire: malheureusement, toujours compter sur les députés de Payez-le. Nous, on l’a fait. Il s’agit d’avoir de la responsa­ l’opposition pour les diffuser. bilité au plan fiscal, au plan des dépenses du gouverne­ L’ancien premier ministre, M. , ment. Et je suis convaincu qu’avec un budget mieux équili­ disait, avec raison, que l’est de Montréal vit une recon­ bré, qu'avec les atouts que le Québec a dans toutes les version industrielle. Les industries de l’environnement régions —et la mienne fait partie de l’ensemble du deviennent importantes. On peut les attirer chez nous et Québec — on va réussir, on va gagner le prochain référen­ on va les attirer chez nous. A cet égard, quand on attire dum qui viendra à son heure. Il viendra à son heure. Et je une industrie dans l’est de l’île de Montréal, ce n’est pas termine en disant que mon comté a livré 62 % de oui au au détriment de l’ouest de l’île de Montréal, c’est qu’on dernier référendum et on va essayer de battre cette perfor­ a des atouts qu’il faut faire jouer, et on le fera notam­ mance au prochain. Merci, M. le Président. ment en ayant un commissaire industriel pour l’est de • (77 h 40) • 92 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous re­ entrepreneurs québécois de faire l’effort de mettre en mercie, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Je vais place des programmes d'apprentissage, de stages en maintenant céder la parole à M. le député de Huit. M. le entreprise, d'aménagement du temps de travail et de député. temps supplémentaire. On a également mis sur pied un comité visant la relance de Montréal, qui sera présidé M. Robert LeSage par M. André Bérard, président de la Banque Nationale, afin qu’il apporte un plan pour pouvoir relancer l’éco­ M. LeSage: Merci, M. le Président. Il me fait nomie de la grande région de Montréal. C’est fort habi­ plaisir, M. le Président, d'intervenir aujourd'hui, à la le, M. le Président, de la part du nouveau premier mi­ suite du discours inaugural présenté par le nouveau nistre de faire porter la responsabilité de la création premier ministre. Enfin — on ne l'espérait plus, M. le d'emplois et de la relance de l'économie du Québec sur Président — ce gouvernement a décidé de gouverner. les épaules des entreprises privées et des gens d’affaires C'est l'une des bonnes nouvelles qu'on a entendues du Québec. L'ironie du sort, M. le Président, c’est que depuis fort longtemps. Ils ont enfin compris, M. le ces gens d’affaires, qui constituent le moteur économi­ Président, et ils admettent qu'après 18 mois de pouvoir que du Québec, étaient pourtant les ennemis jurés du leur inaction découlant de leur obsession référendaire n'a gouvernement québécois il n'y a pas très longtemps. De fait que pénaliser les Québécoises et les Québécois, plus, il faut souligner que le premier ministre est dou­ puisque leur niveau de vie n'a fait que se détériorer blement habile parce que, si la relance de l'emploi et de depuis que le Parti québécois est au pouvoir. l’économie ne donne pas les résultats escomptés, il On devrait faire une motion de félicitations au pourra toujours faire porter le blâme sur les autres. nouveau premier ministre du Québec pour... Pour sa part, le premier ministre fait un appel à toutes les sociétés d’État, notamment à Hydro-Québec, Des voix: Bravo! pour mettre sur pied des programmes d’apprentissage visant les jeunes diplômés, un programme, également, M. LeSage: M. le Président, je disais qu'on de stages pour favoriser les emplois d’été pour les étu­ devrait faire une motion de félicitations au nouveau diants du collégial et de l'université. Cette nouvelle premier ministre du Québec... initiative est fort louable, mais il y a un «mais». Après que le stage sera complété ou que le six mois d’appren­ Des voix: Bravo! tissage sera terminé, qu'est-ce qu’il adviendra de ces jeunes? Qu'est-ce qu'ils vont faire ensuite? Vont-ils aller M. LeSage: ...pour avoir découvert que, lors­ à l'assurance-chômage pour se retrouver ensuite sur la qu’on est au pouvoir, il faut gouverner. sécurité du revenu? M. le Président, les Québécois et les Québécoi­ M. le Président, le premier ministre a annoncé la ses, lorsqu’ils élisent un gouvernement, Us ne s'attendent mise sur pied d'un autre comité portant, celui-ci, sur la pas à autre chose qu'à ce que leur gouvernement gouver­ relance de l'économie sociale. C’est la deuxième fois ne. M. le Président, le discours inaugural du premier qu’on annonce ce comité. J'aimerais rappeler aux mem­ ministre est une étape fort importante, puisqu'il com­ bres de cette Assemblée que ça fait plus d'un an que ce porte différentes orientations et des priorités qui seront comité a été annoncé et qu'à ce jour rien n'a été fait au mises de l’avant par le gouvernement. niveau du développement de cette nouvelle économie On s'aperçoit rapidement, dans ce discours du sociale. De plus, il faut être conscient que, pour déve­ trône, qu’en termes de coupures le gouvernement a déjà lopper ce genre d’économie sociale, il faut y mettre le fait des choix très précis qu'il est prêt à appliquer dès temps et beaucoup d'argent, si on veut que cela donne maintenant. Toutefois, au niveau de la création d'em­ des résultats positifs sur la création d'emplois et que ce plois et de la relance économique, tout est reporté à plus soit un succès. Le gouvernement est-il prêt à investir des tard. En effet, M. le Président, on ne trouve aucune sommes importantes dans le développement de cette mesure spécifique pour favoriser la création d'emplois nouvelle économie? Je me pose la question, M. le Prési­ dans l'immédiat. On a choisi de reporter encore une fois dent, surtout quand on connaît l'état des finances publi­ la création d'emplois, d'attendre les travaux du sommet ques. économique qui se tiendra à l'automne prochain avant M. le Président, le premier ministre du gouverne­ d'agir, et c’est désolant, M. le Président. Non seulement ment du Parti québécois prône l'importance de l'équité on reporte la création d'emplois et la relance économi­ et de la solidarité sociale pour la société québécoise. De que à plus tard, mais, également, on fait porter la res­ nombreuses coupures, pour ne pas dire des coupures ponsabilité et le poids de la réussite sur les épaules de draconiennes, ont déjà été effectuées. Et la sécurité du l'entreprise privée et des gens d’affaires. Et je revenu... Et je rappelle que ces coupures entreront en m'explique. vigueur le 1er avril prochain. Pourtant, le premier mi­ Au niveau des entreprises, le premier ministre a nistre vient d'annoncer, malgré son beau discours de annoncé la mise sur pied d’un comité de travail sur la solidarité, de nouvelles coupures qui feront énormément création d'emplois présidé par M. Jean Coutu, phar­ mal aux familles les plus démunies de notre société: macien renommé au Québec, qui demandera aux l’abolition, en tout ou en partie, de l’allocation-logement 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 93 versée aux familles qui vivent de l'aide de dernier re­ elles ont créé de nombreux emplois. On parle également cours. M. le Président, je n'entends pas les députés du de proposer une allocation québécoise unifiée pour gouvernement applaudir sur ce dernier exposé. Il semble l’enfance et la famille. qu'on applaudit quand ça fait notre affaire et qu'on fait M. le Président, j’attire votre attention parce que, les courbettes devant le Conseil des ministres quand ça comme vous le savez, quand on parle de réforme, on fait notre affaire. parle rarement de bonifier le système mais plutôt de le Les familles qui en souffriront, M. le Président, couper. De plus, l’annonce du premier ministre d’une le plus, ce sont celles qui vivent particulièrement dans vaste consultation devant déboucher sur une politique les milieux urbains, tel Montréal. Rappelons, M. le globale des rentes de retraite m'inquiète également. Et Président, que cette allocation-logement avait été mise je ne suis pas le seul, puisque la Fédération de l’âge sur pied justement au nom de l'équité et de la solidarité d'or du Québec vient d’émettre un communiqué, soit le sociale, puisqu’il est beaucoup plus difficile à une fa­ 26 mars, et je cite: «Les personnes âgées craignent que mille de se loger convenablement et à un prix raisonna­ leurs prestations du Régime de rentes soient compromises ble dans les milieux urbains que dans les milieux ruraux. par la réforme du système que promet M. Bouchard.» Et Et, à cet effet, M. le Président, je peux vous parler en je dois admettre qu'ils n'ont pas tort de s'inquiéter, M. le connaissance de cause. J'ai oeuvré dans le domaine Président. Qui dit «réforme», au gouvernement péquiste, municipal pendant une trentaine d'années, plus spécifi­ dit «coupure». quement à Hull, et il me fait plaisir, M. le Président, de En terminant, M. le Président, j'aimerais vous in­ vous souligner, de vous indiquer que, dans la ville de diquer que je partage l'opinion de Mme Lise Bissonnette, Hull, le nombre de logements sociaux est le plus élevé éditorialiste au D evoir, et je la cite: «C’est un discours au Québec au prorata de sa population. inaugural étourdissant mais non éblouissant qu'a livré hier Il me semble, M. le Président, que le gouverne­ le premier ministre du Québec, Lucien Bouchard: une ment actuel devrait poursuivre dans la même veine que constellation de petits projets, ou d'avant-projets ou de l'ex-gouvernement libéral et maintenir la promesse prévisions de projets dont l'addition est trop informe pour électorale qu'il a faite, à la dernière élection générale, dessiner quelque grand "projet de société"» que ce soit. de construire 1 500 logements sociaux par année. L'an Merci, M. le Président. dernier, il y en avait 1 200; l'an prochain, je ne suis pas sûr qu'il y en aura autant, et ce gouvernement, M. le Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous re­ Président, n'avait même pas pensé annoncer quel serait mercie, M. le député de Hull. Je vais maintenant céder le nombre de constructions l'année subséquente. La la parole à M. le ministre de la Sécurité publique. M. le transparence, M. le Président, l'autre façon de gouver­ ministre. ner. Je pense que les Québécois et les Québécoises s’en rappelleront, de cette autre façon de gouverner, M. le M. Robert Perreault Président. • (11 h 50) • M. Perreault: Merci, M. le Président. M. le Pourtant, parallèlement, le premier ministre Président, je pense que les gens qui, aujourd'hui, nous semblait fier d'annoncer des nouvelles mesures d'aide à regardent, comme la grande majorité de nos concitoyen­ la famille. Premièrement, c'est du déjà vu et, deuxième­ nes et concitoyens du Québec, ont accueilli favorable­ ment, M. le Président, ça commence à être le temps, ment le discours inaugural prononcé lundi par le premier puisque aucune mesure, depuis la prise du pouvoir de ce ministre du Québec, M. Lucien Bouchard. J’irais même, gouvernement, n’a été annoncée pour aider les familles M. le Président, jusqu'à affirmer qu’ils ont été, je pen­ québécoises. On parle du dépôt d'un projet de loi sur se, à la fois agréablement surpris et soulagés dans la l’équité salariale, d'un régime de perception automatique foulée même des sentiments d'optimisme et de volonté des pensions alimentaires. Mais, M. le Président, c'est d’action qui ont marqué le sommet de Québec, le som­ du remâché. On parle également d'accorder des correc­ met qui s'est tenu la semaine dernière et qui a débouché tions au traitement fiscal des pensions alimentaires. Ce sur ce consensus de la société québécoise. En effet, le n’est pas une découverte, puisqu'on ne fait que s’harmo­ premier ministre a clairement indiqué que le gouverne­ niser pour donner suite à l’initiative du gouvernement ment ne se cantonnerait pas dans un diagnostic de moro­ fédéral annoncée lors de son dernier budget, le mois sité sur les finances publiques et sur les nécessaires dernier. compressions qui doivent inévitablement accompagner On parle également de développer des services leur assainissement. Oui, M. le Président, il faut faire de garde en mettant l’accent sur les agences et garderies preuve de rigueur, mais cette rigueur n'exclut pas — et à but non lucratif du modèle coopératif. Ici, M. le Prési­ le discours du premier ministre le démontre claire­ dent, il semble que le premier ministre veuille mettre à ment — de prendre tous les moyens nécessaires et d'en­ l'écart l'entrepreneurship au niveau des garderies pri­ treprendre des réformes qui vont donner au Québec cet vées. Pourtant, M. le Président, on sait très bien que ce élan qui lui est indispensable. sont les garderies à but lucratif et les garderies privées Alors, permettez-moi d'abord de me réjouir, qui ont créé le plus grand nombre de places disponibles comme député-ministre de Mercier — une circonscrip­ en garderie dans les dernières années, et, de ce fait, tion qui est située, comme tout le monde le sait bien, au 94 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 1996 coeur même de Montréal — de voir que mon gouverne­ ont porté fruit. Je pense que tout le monde — le premier ment ait décidé d'assurer une véritable relance de la ministre lui-même l’a souligné — au Québec, est à mê­ métropole en créant la commission de développement de me de constater le succès, l'efficacité de l'escouade de la région métropolitaine de Montréal. Il s’agit là d'une Carcajou, de la conjonction des efforts des corps poli­ manifestation sans équivoque d’une volonté politique qui ciers — c’était sans précédent au Québec. Et, nous le permettra au «coeur du Québec moderne» — comme le savons tous maintenant, cette conjonction des efforts a disait lui-même M. Bouchard, pour reprendre ses donné des résultats appréciables dans un domaine qui mots — à Montréal, à la région métropolitaine, de re­ n’est pas toujours facile, la lutte au crime organisé, et trouver sa force et son dynamisme. ces efforts, actuellement, font l’envie de nos voisins qui D’autres réformes également, M. le Président, citent le Québec en exemple dans ce secteur. annoncées dans le discours inaugural, rejoignent les Alors, je pense que l’annonce, par le premier préoccupations maintes fois exprimées par les citoyennes ministre, de la volonté de créer un fonds spécial où on et citoyens de Mercier, qui sont prêts, je pense, comme retrouvera, en quelque sorte, les produits du crime tous les Québécois, à apporter leur contribution à l’effort organisé qui ont été saisis, fonds spécial qui servira collectif d’assainissement des finances publiques et à justement à financer notamment la lutte à la criminalité, participer également à cette nouvelle volonté d’action qui témoigne très nettement de la détermination du gouver­ anime le gouvernement du Québec. nement de poursuivre ce qui a été entrepris dans le Ce comté, on le sait, regroupe avec quelques-uns secteur de la lutte au crime organisé. Et je pense égale­ de ses voisins immédiats une grande partie des centres ment. M. le Président, qu’on fait preuve d’imagination de production et de distribution des activités culturelles en trouvant là des sources nouvelles de financement qui du Québec, et la plupart des artisans de ce secteur y ne pénaliseront pas les contribuables, mais qui vont, au vivent. Or, la mise sur pied, annoncée hier, d’un fonds contraire, directement au coeur des activités du monde d’investissement de la culture et des communications, est de la criminalité. certainement de nature à convaincre que ce gouverne­ • (12 heures) • ment est décidé à reconnaître à ses artisans et à leurs Évidemment, le ministère de la Sécurité publique industries plein statut et à leur donner des moyens de ne s’occupe pas que de la criminalité lourde, son inter­ s’implanter et de croître au même titre que les autres vention porte également sur d’autres secteurs d’activité. industries québécoises. Je pense notamment aux services correctionnels. Nous Les citoyennes et les citoyens de Mercier, M. le avons l’intention, M. le Président — le premier ministre Président, sont aussi des personnes âgées, des femmes y a fait référence — d’insuffler une nouvelle orientation chefs de familles souvent monoparentales, qui ont la en ce qui concerne l’ensemble de notre système carcéral. charge des enfants. Ce sont également des étudiantes et Nous sommes convaincus qu’une réforme s’impose. des étudiants. Je pense que, dans le discours inaugural, On fait souvent référence, et les médias font le gouvernement a clairement démontré qu’il entend souvent référence au crime organisé. Il y a là-dedans, tenir compte de leurs attentes en annonçant notamment parfois, de grandes opérations qui se font. Elles sont l’introduction d’un régime d’assurance-médicaments, fortement médiatisées, mais on oublie trop souvent que l’entrée en vigueur du régime général de perception le crime au Québec — et la criminalité — depuis l’année automatique des pensions alimentaires et le maintien des 1992, est en baisse de plus de 14 %. Il n’est plus nor­ frais de scolarité à leur niveau actuel. mal, M. le Président, qu’on condamne à des peines Des mesures concernant la famille, l’enfance ont d’emprisonnement des gens pour des infractions au Code également été annoncées, sans parler, bien sûr, de la Loi de la sécurité routière, pour des refus de paiement sur l’équité salariale, qui sont des réformes qui sont au d’amende. 11 y a d’autres façons, dans une société civili­ coeur des préoccupations des femmes de mon comté, sée, de régler ces questions-là. mais je pense également de toutes les femmes du Je pense qu’on doit éviter au Québec que notre Québec, M. le Président. système carcéral nous entraîne, que notre action dans ce Or, pour permettre la réalisation de ces réfor­ domaine nous amène sur des terrains qui ressemblent un mes, pour maintenir le cap sur l’assainissement des peu à nos voisins. On me dit que, à l’aube de l’an 2000, finances publiques, vous comprendrez qu’il aura égale­ en Californie, par exemple, le budget consacré aux ment fallu que le ministère dont j’ai la responsabilité, le centres de détention dépassera celui consacré par l’État ministère de la Sécurité publique, apporte lui aussi sa de Californie à l’éducation. Je pense que ce serait, si on contribution à l’effort de rigueur et effectue des com­ devait s’orienter dans ce sens, M. le Président, un cul- pressions budgétaires qui, cependant — et c'est notre de-sac, un échec pour la société, et je crois qu’on doit objectif — ne compromettent jamais la mission première amorcer, dans ce secteur, un virage. du ministère de la Sécurité publique d’assurer la protec­ J’aurai l’occasion bientôt d’expliquer les principes tion de nos concitoyennes et de nos concitoyens. sur lesquels repose cette réforme, et je pense également, C’est pourquoi, M. le Président — et je pense M. le Président, que, bien sûr, elle passera par la néces­ qu’il faut le redire — le gouvernement du Québec et le sité de fermer certains centres de détention. Je com­ ministère dont j’ai la responsabilité vont maintenir leurs prends certaines réactions dans certains milieux, mais je efforts pour faire échec au crime organisé. Ces efforts crois qu’il faut que l’ensemble de la société québécoise 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 95 amorce ce virage si on veut à la fois réhabiliter les gens et l'assurer, comme l'ensemble, je pense, des parlemen­ qui ont été condamnés et, en même temps, préserver taires dans cette salle, de ma plus entière collaboration l'intérêt public. pour faire que nos institutions démocratiques — qu'elles Encore une fois, je voudrais rassurer la population soient ici, au gouvernement, à cette Assemblée, qu'elles du Québec, M. le Président. Il ne s'agit pas de fermer les soient dans nos municipalités, dans nos MRC, dans nos centres de détention au Québec, il ne s'agit pas de mettre commissions scolaires — que les populations qui nous en cause sa sécurité, loin de là. Il s'agit d'une réforme qui entourent reprennent confiance dans ces institutions ne vise que 10 % à la marge de notre système de déten­ démocratiques. Qu'il soit assuré de ma plus grande tion, et, encore une fois, pour des délits mineurs. collaboration pour faire de cette Assemblée nationale Il y a également un secteur d'activité du minis­ une assemblée de tous les Québécois. tère dont j'ai la responsabilité, où le discours du premier M. le Président, dans ce discours que nous avons ministre indique que nous allons pouvoir continuer entendu il y a quelques heures maintenant, il y a quelque l'action entreprise — je pense qu’il y a lieu de s'en chose qui m'a fasciné tout au long de ce long discours. réjouir — et c'est celui des services policiers en milieu C'est comme si le gouvernement, finalement, venait autochtone. Peu de gens le savent, mais le Québec est, d'être élu la veille ou l'avant-veille. On oublie que ce dans ce domaine, un pionnier. Nous avons des ententes gouvernement fut élu il y a maintenant 19 mois. Il y a dans plus de 34 des 54 communautés autochtones et maintenant 19 mois, le peuple du Québec était invité à nous sommes à signer, au cours des prochaines semai­ aller à une élection générale. Quand nos enfants retour­ nes, à finaliser des ententes pour, fort probablement, 14 neront à l'école en septembre, dans quelques mois, ce nouvelles communautés. M. le Président, je pense qu'il gouvernement, M. le Président, sera à mi-mandat; il y y a lieu de se réjouir de nos efforts dans ce secteur-là. aura exactement la moitié du terme de ce gouvernement, Le budget qui est présenté, les crédits qui sont présentés dans quelques mois, quand nous ramènerons nos enfants nous permettront de continuer notre action. Il y va, je à la porte de l’école en septembre; la moitié du mandat pense, de la qualité de nos relations avec les communau­ de ce gouvernement sera terminé. Maintenant, on nous tés amérindiennes, il y va de la paix sociale, il y va de parle, avec un peu d’humour j'espère, de l'urgence notre volonté de responsabiliser l'ensemble des partenai­ d'agir, qu'il nous faut oser, M. le Président. L'urgence res au Québec. d’agir, c'est le lendemain que tu es élu qu'il y a urgen­ Alors, conclusion, M. le Président, vous com­ ce, pas 19 mois après, pas 24 mois, la journée où on prendrez sûrement que, après un tel bilan, il y a lieu, je ramènera nos enfants à l'école, au moment où ils seront pense, que nous nous réjouissions, et je crois que c'est rendus à mi-mandat. avec cette attitude que l'ensemble des Québécoises et des Je vous rappellerai d'ailleurs, M. le Président et les Québécois ont accueilli le discours inaugural, du fait que citoyens qui nous écoutent, que M. Johnson, qui fut pre­ le gouvernement du Québec entende s'engager résolu­ mier ministre du Québec après le départ de M. Bourassa, ment dans la voie de l'action, qu'il le fasse avec des en quelques mois, a posé une quantité de gestes très im­ réformes importantes telles qu'elles ont été annoncées, pressionnants. C'est là qu'on réalise qu'un premier tout en maintenant l'objectif d’une plus grande rigueur ministre a tous les pouvoirs. M. Parizeau avait tous les dans les finances publiques, d'un assainissement des pouvoirs et M. Bouchard a maintenant tous les pouvoirs. finances publiques. Mais non, on a préféré, M. le Président, «référender» Et c'était probablement le côté le plus inattendu, tout l'été. C'est ça qu'on a décidé de faire. On a M. le Président, de ce discours inaugural: à la fois «référendé» tout l'été. On n'a rien géré, on n’a rien garder le cap sur la rigueur et la nécessité d'assainir les décidé pendant 19 mois. Ayant «référendé» tout l'été, je finances publiques, mais, en même temps, lancer un vous dirai franchement que la dactylo du gouvernement message clair de relance d'action auprès de nos contri­ s’est complètement emballée, et, comme aurait si bien buables. Alors, «Oser agir ensemble», M. le Président, dit Maurice Duplessis à une autre époque, les poètes de ce n'est pas qu'un leitmotiv. Je pense que le discours du l'État se sont énervés, M. le Président. Jamais nous premier ministre, le discours inaugural a clairement n’avons vu autant de papiers, de rapports, de discours et démontré que c'était également le programme d'action si peu d’actions dans un gouvernement. du gouvernement du Québec. Je vous remercie, M. le Permettez-moi de vous les citer pour un instant. Président. Ce premier rapport, cette première consultation sur la décentralisation, cette grande opération qu'on a faite Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous re­ juste avant le référendum, bien sûr avec des deniers mercie, M. le député de Mercier et ministre de la Sécu­ publics. Un premier rapport, une première consultation. rité publique. Je vais maintenant céder la parole à M. le Un deuxième rapport, une deuxième consultation, député d’Orford. M. le député. celle sur la souveraineté, qui se terminera au Grand Théâtre de Québec avec presque la fanfare. M. Robert Benoit Ce troisième rapport — et là, il y en avait une multitude — les études Le Hir, lesquelles on questionne; M. Benoit: Merci, M. le Président. Je voudrais sur lesquelles, maintenant, la police provinciale est après d'abord, comme entrée, féliciter notre nouveau président faire une enquête; desquelles on sait maintenant qu'il 96 Débats de T Assemblée nationale 27 mars 1996 fallait faire la génuflexion devant le dogme de la sou­ avait demandé de planter un arbre. Le jardinier s’objec­ veraineté avant d’avoir le contrat. Alors, ces études ta, lui disant: Écoutez, mon cher monsieur, ça prendra Le Hir. 100 ans avant que cet arbre donne un peu d’ombrage à Je continue, M. le Président, ce quatrième votre résidence, avant que cet arbre-là soit mature. Le rapport, cette quatrième consultation: sur la santé. Eh vieil homme lui répondra: Eh bien, dans ce cas, ne bien oui! On est allé dans les régions, on est revenu. perdons pas un instant, plantons cet arbre cet après-midi. Encore hier soir, à Magog, on consultait. Tout est déci­ Eh bien, oui, M. le Président, si on veut avoir des dé, ce n’est pas grave, on consulte. grands projets de société, si on veut aller de l’avant, Cinquième rapport, cinquième consultation: sur n’attendons pas des 19 et des 20 mois, faisons comme ce l’éducation, maintenant. Eh bien oui! Hier, on appre­ vieil homme, plantons cet arbre immédiatement. nait — la consultation n’est pas terminée, mais ce n’est Mais là on a déjà passé pas mal de temps. Arrê­ pas grave — qu’on va couper allègrement dans l’édu­ tons de «référender», M. le Président, arrêtons de cation. Peu importe ce que diront les gens, les décisions «référender». Nous sommes payés, vous et moi, confrè­ sont prises. On consulte, mais les décisions sont prises. res, consoeurs, députés de l'Assemblée nationale, élus Sixième rapport, sixième consultation: sur l’envi­ démocratiquement il y a maintenant 19 mois, nous som­ ronnement. À chaque fois, il faut bien voir qu’on change mes élus pour décider, pour prendre des décisions, non le nom, hein, c’est les états généraux; dans le cas de pas pour tataouiner, M. le Président, avec des manieurs l’environnement, c’est une générique. Il n’y a plus un de décisions. Et, vous savez, on est allé d’états généraux citoyen qui s’y retrouve dans tout ça. Alors, dans le cas en générique, en colloques, en sommets, en commis­ de l’environnement, on n’a pas fait ça le lendemain de sions, mais, tout ça, c’est synonyme, M. le Président, l’élection, c’était décidé pourtant de le faire dans le de ne pas prendre de décision, synonyme de ne pas programme du PQ. On a commencé il y a quelques prendre de décision. mois, on dit que ce sera terminé en décembre. Dans chacun de nos comtés, M. le Président, ce M. le Président, il y a un septième rapport, n’est pas bien, bien mieux. Je vais vous donner un seul septième consultation: sur le loisir. Chez nous, ça a mis exemple, et je pourrais vous en donner des dizaines, au la chicane à peu près dans tout ce qu’il y a d’organisa­ niveau de la santé, un cas simple que vous pourrez tions, entre les gens de l’âge d’or, les scouts. Tout le vérifier. On a un hôpital à Magog puis on a une rési­ monde se chicane suite à cette consultation-là. dence pour personnes âgées adjacente. Alors, les Et la huitième consultation et la plus grande, conseils d’administration, des gens sages, des gens de la M. le Président, celle du référendum. Là, on a trouvé le base, des gens qui veulent que les choses aillent mieux, moyen de séparer le Québec exactement dans le milieu, ont décidé d’unir ces deux entités-là. C’est parfait, on va exactement 50-50, alors qu’un grand leader, dans nos couper des frais d’administration. Tout le monde est sociétés modernes, c’est celui qui doit unir le peuple en d'accord dans le milieu. Alors, on a dit: On va changer arrière d’un projet, pas diviser jour après jour les ci­ le nom, parce que, maintenant, il y a une vocation hos­ toyens d’un pays ou d’une province. Les grands leaders pitalière puis il y a une vocation pour les gens âgés. On contemporains de cette planète ont été capables d’amener va changer le nom. Vous et moi, on va concevoir que ce les gens dans un projet, non pas dans une multitude de n’était pas quelque chose de bien, bien compliqué. projets où on a divisé constamment les citoyens. C’est Alors, on a fait la demande en juillet, au bureau du ça qu’on est arrivé à faire avec cette huitième consulta­ ministre. Aujourd’hui, c’est le 27 mars, M. le Président, tion. je viens tout juste de parler avec le bureau du minis­ • (12 h 10) • tre: bien entendu, ce n’est pas réglé. On me dit mainte­ Ayant «référendé» tout l’été, maintenant on nous nant: Peut-être qu’au mois de mai on aura une réponse, propose une commission itinérante sur la fiscalité et un etc., etc., etc. M. le Président, on me dit aussi que le rapport. On nous propose un plan de travail sur 1er avril, parce que cette décision-là ne s’est pas prise, Montréal qui sera éventuellement déposé en octobre. On dans ce centre hospitalier, parce que la décision n’est nous propose un plan de travail sur l’économie sociale pas prise, le 1er avril, ce n’est pas un état financier qui sera déposé en octobre. On nous propose un plan de qu’on devra produire, mais bien deux états financiers, travail sur l’emploi, M. le Président, qui sera déposé en M. le Président. Et les aviseurs de l’hôpital nous disent octobre. M. le Président, je suis d’accord avec mon que ça pourra coûter entre 25 000 $ et 50 000 $ de plus confrère, le député de Rivière-du-Loup: on va commen­ parce que des décisions ne se prennent pas. cer à travailler au mois de novembre. On a été élus, je Je pourrais vous en donner une multitude de vous le rappellerai, en septembre 1994, M. le Président. décisions comme celle-là, au ministère de l’Éducation, Or, je vais reprendre une phrase d’un politicien qui est au ministère de l’Environnement, à la sécurité sociale, passé ici avant nous: Sur le discours, tout le monde est des décisions qui ne se prennent pas. On a la conjugai­ égal, M. le Président, c’est dans la réalisation d’objectifs son du verbe «agir» au futur seulement, M. le Président. que l’on doit se différencier. Vous savez, notre premier ministre, il va aller M. le Président, c’est John F. Kennedy qui plus loin que ça dans son discours. Il va pousser racontait, à l'Université de Californie, cette petite histoi­ l’euphorie jusqu’à nous dire: Que la mémoire nous serve re. Un vieil homme avait fait venir son jardinier, il lui à bien juger les engagements en regard des résultats. 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 97 M. Bouchard qui dira ça. Quels résultats, M. le Prési­ ques semaines avant l’élection, Le Journal de Montréal, dent? Et la mémoire, eh bien, oui, c’est celle de 19 mois en très grosses lettres, M. le Président... En très grosses maintenant; et les engagements, c’est ceux du program­ lettres dans Le Journal de Montréal, le ministre Brassard me du Parti québécois, avec la photo de M. Parizeau qui disait: Pas de coupures en éducation. Je vous rappellerai nous disait qu’il y avait 225 pages dans son programme que le 14 juillet, c’était, bien sûr, la veille des élections, et qu'il en était tellement fier. Eh bien, c’est ça, les comme le dit si bien la chanson de Félix Leclerc. Eh engagements. Et je rappellerai à notre premier ministre bien, peu importe ce qui a été dit le 14 juillet dans que, oui, il y a de la mémoire et, oui, l’opposition va se Le Journal de Montréal, en très grosses lettres, la veille rappeler, va rappeler à la population ces engagements de des élections, hier, on s’aperçoit, M. le Président, que 225 pages dont à peu près aucun n’est maintenant rete­ des coupures, il va y en avoir des importantes autant au nu. C’est l'incohérence totale, M. le Président. Et je privé qu'au public. Et, si vous êtes un député de comté, vais vous citer quatre exemples précis. vous avez reçu déjà des appels depuis hier. Le premier, le cas des femmes. On connaît M. le Président — et je le dis sans aucune forme tous cette dame, Françoise David, du mouvement... de partisanerie — pour un peuple de 6 000 000 en terre Elle est venue ici devant l'Assemblée nationale. Elle d'Amérique parlant anglais, s’il y a un secteur qu'il ne fut accueillie par un ensemble de députés et de minis­ faut jamais laisser tomber, s’il y a un secteur où il faut tres. M. Parizeau est passé à travers la manifestation. mettre tous les efforts dont nous sommes capables, c’est C’était de toute beauté, à la télévision. Ça, c'est il y celui de l’éducation. Nous sommes vulnérables en terre a quelques mois, M. le Président. Et, maintenant, d'Amérique. Le savoir, l'éducation, le véhicule de nos Mme David, la semaine passée, à cette même heure, valeurs, de nos sciences, de nos arts, tout ça passe par le mercredi dernier, a demandé, alentour de la table, au système d’éducation. Et là, peu importe ce qu'on aura sommet, aux gens du gouvernement: Écoutez, un peu dit le 14 juillet 1994, eh bien, là, on coupe allègrement d’aide pour le sociocommunautaire. Attention aux les têtes et les pieds, M. le Président. Une incohérence coupures dans ce secteur-là. Vous l'avez tellement dit. grossière, malhabile, démesurée, d'abord, bien sûr, pour Vous nous avez accueillies à l'Assemblée nationale. se faire élire, et, maintenant, du papier, des discours et Pas un ministre, M. le Président, a voulu seconder la très peu de réalisations. proposition de Françoise David, cette femme qui, à Le quatrième exemple, M. le Président, l’envi­ bout de bras, avec les femmes du Québec, s'est battue ronnement. J'en suis porte-parole avec fierté. Un pro­ pour des causes qui nous sont chères. gramme de 17 pages. Je l’ai souvent dit, un programme Le deuxième cas, M. le Président, celui des qui me semblait important et sérieux de la part du PQ. jeunes. Les jeunes, au PQ, on les a servis à toutes les Des centaines d'engagements, M. le Président, mais, sauces: péquiste, électorale, référendaire, il n'y avait pas maintenant, dans la réalité, jamais le premier ministre de limite à l’euphorie, M. le Président. Et pourtant, au n'a voulu — et on lui a offert l'occasion plus d'une sommet, 60 % des jeunes du Québec n'étaient pas repré­ fois — dénoncer les essais nucléaires en France. Alors sentés. Tous les jeunes sur l'aide sociale, tous les jeunes que l'ensemble des communautés économiques, l'ensem­ qui travaillent n'étaient pas représentés, seulement deux ble des communautés démocratiques dénonçaient avec représentants du monde universitaire. Ça paraissait bien véhémence ces essais nucléaires, M. Parizeau, jamais, dans le portrait, ça, M. le Président. D'ailleurs, sa n’a voulu le faire, ici dans cette Assemblée, alors que parole la plus sage, ça a été de dire: Quand on aura c'était dans son programme. notre pays. Ah! Là, on a compris pourquoi c'est ces • (12 h 20) • deux-là qui avaient été choisis, M. le Président. Voyons! Les directeurs de santé, la semaine dernière, Eh bien, notre chef a bien résumé la situation dans le M. le Président — c’est pas n'importe qui, ça, les direc­ cas des jeunes. Il a dit: 3 % du temps de parole aux teurs de santé publique, c'est les gens qui s'assurent que jeunes et 100 % de leur devenir et de leur futur. Eh notre santé n’est jamais mise en péril dans cette provin­ bien, nous, les députés libéraux, on est allés au sommet, ce — ont sorti publiquement pour dire au ministre de parallèles avec les jeunes. Notre porte-parole en éduca­ l'Environnement — j’étais pour dire «au ministre de la tion, notre porte-parole en finances publiques, notre Pollution» — que ça n’avait plus d'allure, ça n’avait plus porte-parole en environnement, nous étions présents à d'allure, la pollution agricole, particulièrement en ce qui l'Université du Québec et nous avons côtoyé ces jeunes a trait à la production porcine, M. le Président. Qu'est- dans la manifestation pour leur dire qu'ils avaient rai­ ce qu’ils ont fait depuis 19 mois? Us ont levé le mora­ son. Eux qui s'étaient fait dire qu’ils seraient entendus, toire sur la rivière l’Assomption, où plus de 30 % des écoutés, acceptés par ce gouvernement, eh bien, mainte­ poissons sont difformes, d’après une étude du ministère. nant, ils étaient obligés de manifester dans une tempête Alors, il y a des élections partielles qui s’en viennent incroyable, mercredi dernier, devant l'hôtel Loews, en dans ce coin-ià. Ça ne serait peut-être pas mauvais de pleine tempête, à l'extérieur. Deuxième sujet. lever le moratoire sur la production porcine dans ce Troisième sujet, M. le Président, l’éducation. Je coin-là. vois avec nous le ministre Brassard qui est ici. Je le Et puis, ensuite, la loi sur le droit de produire. salue. Il a été agréable de travailler avec lui à l'époque On nous a annoncé ça. C’est rien pour aider l'environ­ où il était en environnement. Le 14 juillet 1994, quel­ nement, M. le Président. Et ces mêmes gens là, qui 98 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 nous mettent en garde sur de graves problèmes d'envi­ elle est maintenant fermée. Elle fut fermée il y a environ ronnement au niveau de nos rivières et leurs rejets, nous trois semaines. Et peut-être qu’elle rouvrira. On verra disent: Attention! Regardez ce qui s'est passé en Ontario avec le ministre. On lui posera des questions. L’incohé­ récemment: 24 000 ménages qui ont été touchés; les rence, M. le Président. gens ont été obligés de faire bouillir leur eau; on a été Alors, il y aurait tellement d’autres choses à dire, obligé d'organiser des corvées, finalement, et c’étaient mais je finirai en disant qu’il n’y a pas de projet de des situations agricoles semblables aux nôtres. Aux société. Vous vous l’ètes fait dire pendant toute cette États-Unis, 400 000 foyers, dans des situations agricoles commission itinérante sur la souveraineté. Il n’y a pas similaires, ont été mis en péril, M. le Président. À de gouvernement social-démocrate en ce moment au Repentigny — je vois que le ministre des Affaires muni­ Québec. Il n’y a pas de solidarité sociale. Et le ministre cipales est avec nous — on dépensera 25 000 000 S pour de l’Environnement, qui voulait mettre — et je finirai bâtir une nouvelle usine des eaux, M. le Président, pour avec ça — le ministère de l’Environnement en maillot 55 000 habitants. Pourquoi? À cause, en grande partie, vert, bien, je pense qu'il va réussir, hein; tout ce qui va de la pollution agricole. Une incohérence totale, M. le rester au ministère de l’Environnement, M. le Président, Président. ça va être le maillot vert. Merci beaucoup. M. le Président, le premier ministre, M. Bouchard, dans son livre «À visage découvert*, en 1992, Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous et je le cite, en parlant d’environnement, il dit: «Sans remercie, M. le député d’Orford. Je vais maintenant nous en rendre compte, nous avons franchi le seuil de céder la parole à M. le député de Dubuc. M. le député. tolérance de l’écosystème.» C’est le premier ministre qui parle, dans son livre: «Sans nous en rendre compte, M. Gérard R. Morin nous avons franchi le seuil de tolérance de l'écosystème. Il y avait là menace pour l'espèce humaine, dont nous M. Morin (Dubuc): Alors, merci, M. le Prési­ avons tout à coup compris la dépendance par rapport à dent. J’écoutais le député d’Orford dans son interven­ l’équilibre naturel.» tion, au début de son intervention, où il se disait fasciné Et, plus loin, M. Bouchard dira dans son livre: de voir le premier ministre se comporter comme si le «Tout ce qui pouvait ressembler à un projet de société se Parti québécois venait tout juste d’arriver au pouvoir. heurtait à l’obsession du déficit.» Il était ministre de J’étais tout autant fasciné, moi, d'entendre le chef de l’Environnement dans un autre gouvernement, dans un l’opposition dans son intervention, comme s’il n’avait autre... à Ottawa. Et il donne un conseil au ministre de jamais été au pouvoir de sa vie, comme s’il avait totale­ l’Environnement dans son livre. Il dit au nouveau minis­ ment oublié qu'il y a à peine un an et demi il était chef tre de l’Environnement, le député de Laval... Je lui cite du gouvernement. une dernière ligne de son chef, toujours dans le volume Alors, M. le Président, j’entends personnellement de M. Bouchard. Il dit à son ministre: «À défaut d'inter­ m'occuper au volet de création d'emplois, enfin c’est vention du premier ministre, il ne peut pas sortir grand- l’aspect qui me tient le plus à coeur, parce que, au-delà chose. Les ministres ont compris le fonctionnement de de toutes les mesures de compression, de redressement cette république de comptables qui se contentent, le plus des finances publiques, la relance de l'économie m’appa­ souvent possible, de tenir boutique seulement.» raît quand même une chose essentielle si on veut vérita­ Eh bien, c’est ce qu’ont fait les ministres de blement procéder au redressement des finances publi­ l'Environnement. Ils ont compris, dans cette république ques. Mais vous me permettrez quand même de relever de comptables, qu'ils étaient mieux de tenir boutique, quelques propos du chef de l’opposition, de son inter­ parce qu’ils n’avaient ni l’appui du premier ministre, M. vention d'hier. Parizeau, pas plus qu’ils n’ont l'appui maintenant du D’abord, il y a deux grandes accusations à tout le premier ministre, M. Bouchard, au niveau de l'environ­ moins — il y en a eu plusieurs, mais il y en a deux sur nement. lesquelles je veux revenir. D'abord, le chef de l’oppo­ Dix-sept pages. Avant l’élection, dans le pro­ sition a accusé le gouvernement de gouverner en fonc­ gramme du PQ sur l’environnement, je vous donne tion de son option constitutionnelle; et, l’autre accusa­ quelques exemples, encore là. Je pense que les gens qui tion. c’est bien sûr qu’on accusait le premier ministre de nous écoutent à l’heure du midi aiment bien comprendre ne mettre de l’avant aucune mesure concrète reliée à la par des exemples. À la page 45, dans ce programme création d’emplois. D’abord, pour ce qui est de gouver­ électoral, on disait une seule phrase. C’était clair, c’était ner en fonction de son option constitutionnelle, bien, précis. Pour une fois, il y avait une phrase assez claire j’aimerais rappeler ici que, s’il y a un gouvernement qui dans le programme du PQ. Souvent, il y a beaucoup de a gouverné en fonction de son option constitutionnelle, poésie, hein! Et, là, on disait, à la page 45: «Restreindre c’est bien l’ancien gouvernement libéral. C’est drôle de la propriété des sites d’enfouissement au seul domaine le dire, hein! On n’a qu’à se souvenir que le gouverne­ public.» C’est clair, ça, M. le Président. Eh bien, pour­ ment libéral d’alors, devant les multitudes de coupures tant, dans le générique, pas un seul mot. À la page 48: du gouvernement fédéral au niveau des transferts, lâchait «Assurer le recyclage rapide des pneus hors d’usage.» Il à peine un soupir d’impatience. Jusqu’à quel point le y avait une compagnie qui s’occupait de ça au Québec, gouvernement d’alors a dénoncé le refus d'Ottawa de 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 99 faire place au Québec, en termes de formation de la l’école et l’entreprise.» Voilà en ce qui concerne la main-d’œuvre? Même, M. le Président, ce gouverne­ formation et le perfectionnement. ment, à plat ventre devant le gouvernement fédé­ Aussi, il y a d’autres mesures assez directes, et je ral — parce qu’il ne fallait pas dénoncer les attitudes du n’entends pas procéder à toute l’énumération, mais gouvernement fédéral, parce que la position constitution­ quand même quelques-unes, dont une en particulier qui nelle du Parti libéral faisait en sorte qu’il ne fallait pas m’a plu particulièrement, soit celle touchant les sociétés porter atteinte à l’autorité fédérale... Qui ne se souvient d’État. Et je me réfère encore au discours du premier pas du relus d’Ottawa de rembourser la simple facture ministre où il mentionnait qu’«Hydro-Québec, par exem­ du coût du référendum? C’est le présent gouvernement ple, mettra sur pied un programme d’apprentissage du Parti québécois qui, arrivé au pouvoir, a obtenu visant les jeunes diplômés, un programme de stages paiement. Alors, vous savez, lorsqu’un gouvernement, à coopératifs et des emplois d'été pour les étudiants du cause de son option constitutionnelle, n'obtient même collégial et de l’université. Mille jeunes auront ainsi pas le paiement de factures du gouvernement fédéral, il accès au marché du travail. Le gouvernement attend des faut avoir du culot pour reprocher au présent gouverne­ propositions du même type de ses autres sociétés d’État ment de gouverner en fonction de son option constitu­ et demandera à la SGF d’implanter des programmes tionnelle. équivalents dans les — nombreuses — entreprises dont • (12 h 30) • elle est actionnaire.» Voilà un autre exemple de mesures L’autre, bien sûr, l'autre accusation du chef de relativement à moyen terme, voire même à court terme. l'opposition concerne l’absence d’interventions ou de Et un troisième point qui me tient particulière­ mesures concrètes touchant l'emploi. Bon, dans un pre­ ment à cœur, bien sûr, touche le partage du temps de mier temps, il m'apparaît opportun de rappeler que l'es­ travail. Vous savez, M. le Président, lorsqu'on se réfère sor économique et la véritable création d’emplois devront ou qu’on lit un article de la Charte des droits et libertés, toujours provenir de l’entreprise privée. Je pense que où on y lit que toute personne a droit à la sauvegarde de c’est une réalité implacable; comme on le dit, la création sa dignité, de son honneur et de sa réputation, vous de la richesse proviendra toujours du secteur privé. Mais, comprendrez qu'il est très difficile de saisir le sens d'un cela dit, ça ne veut pas dire que le gouvernement n'a pas tel article lorsqu'il y a des milliers, pour ne pas dire des de responsabilités, soit celles de répartir, de procéder à la centaines, de jeunes qui, après avoir obtenu un diplôme répartition des richesses, voire même, du partage du collégial ou universitaire — trois, quatre, cinq ans travail, de mettre en place les conditions les plus favora­ après — se retrouvent devant l'impossibilité d'accéder au bles à la création d’emplois. Alors, en ce sens, je pense marché du travail. Or, qu’en est-il de la dignité et de que le discours inaugural prévoyait un certain nombre de l'honneur? Et aussi de pères et de mères de famille avec mesures pour favoriser une relance économique d'abord, un, deux, trois enfants, qui se voient dans une situation l'élimination du déficit d’ici trois ans. Qu'on le veuille ou non pas de quémander, mais de faire appel au dernier non, tant et aussi longtemps qu’on maintient un tel déficit, recours, alors qu’on sait que: Y «a-tu» quelque chose de il y a une pression telle sur d’éventuelles augmentations plus honorable et de valorisant pour un père ou une d’impôt et de taxes que, automatiquement, ça a un impact mère de famille que de gagner ce qu'il faut pour assurer très négatif sur l'économie québécoise. Alors, je pense l'avenir et le bien-être des enfants? Alors, c'est pour ça que cette volonté, cette détermination à éliminer notre que la responsabilité du gouvernement de répartir la déficit est d'abord, dans un premier temps, un geste très richesse et, par le fait même, répartir, partager, faire positif en termes de relance, de redressement de notre partager le marché du travail... Donc, ça exige un cer­ économie et, par le fait même, ça crée une condition tain nombre de mesures, évidemment, qui sont vite favorable à la création d’emplois. limitées, parce qu’on conviendra que le gouvernement Il y a d'autres initiatives aussi que l’opposition, ne peut imposer à l’entreprise privée mille et une formu­ parce que, possiblement, on n’a pas écouté l’intervention les. Mais, à travers des mesures incitatives, il est possi­ du premier ministre... D’autres conditions touchent en ble pour le gouvernement de susciter un meilleur partage particulier la formation de la main-d’œuvre. Et vous me du marché du travail. permettrez de me référer au texte du premier ministre où 11 y a plusieurs exemples, d'ailleurs, auxquels on il était dit qu’améliorer la situation de l’emploi nécessi­ peut se référer. On se souviendra qu'à la compagnie tait «un effort concerté, composé, en gros, de trois Reynolds, en faisant en sorte que les employés repren­ ingrédients: il faut des femmes et des hommes qui sont nent le temps supplémentaire en congés, ça a eu pour bien préparés pour l’emploi, il faut des emplois et il faut effet de créer un certain nombre d’emplois. Récemment, des instruments qui fassent, le mieux possible, le lien à l’usine Alcan, à Jonquière, dans ma région, suite à une entre les chercheurs et les donneurs d’emplois. entente entre les patrons, le syndicat et suite, aussi, à «La ministre de l’Emploi et la ministre de l’Édu­ une mesure de soutien du gouvernement, l’usine Alcan a cation présenteront les mesures conjointes qu’elles enten­ pu réembaucher environ 7S employés qui avaient été mis dent appliquer pour faire de la formation et du perfec­ à pied depuis quatre ans, donc qui n’étaient plus sur tionnement de la main-d'œuvre, à l’école et au travail, l’assurance-chômage, qui étaient des prestataires d’aide un élément clé omniprésent et permanent de la vie qué­ sociale. Donc, beaucoup de concertation, mais beaucoup bécoise. 11 faudra pour cela un sérieux arrimage entre de possibilités dans le partage du travail. 100 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 19% Il y a les avantages sociaux, M. le Président, qui Alors, M. le Président, il est bien évident, lors­ sont devenus monnayés. Vous vous rappellerez qu’il y a qu’on parle d’une politique de partage, de diminution, un certain temps, lorsque je m’occupais de choses syndi­ de partage du temps de travail et de mesures reliées à cales, nous avons eu à négocier des avantages sociaux, des retraites anticipées, que tout ça doit comporter un en particulier ceux touchant des mesures permettant aux ensemble de mesures dont, en particulier, des mesures employés de préparer leur retraite, soit, à partir de incitatives de la part du gouvernement — parce que, 55, 58, 60 ans, un certain nombre de vacances addition­ pour un bon nombre, ça s’adresse non seulement au nelles, ce qui faisait en sorte que quelqu’un, avant de secteur public, mais aussi au secteur privé — sous forme prendre sa retraite, pouvait se retrouver avec 10, 12, 13, de règlements, de programmes, de la concertation, des 14, 15 semaines de vacances annuellement. Je pense que négociations, et aussi, je pense, d’un certain nombre de c'est une belle façon de préparer quelqu'un à la retraite, mesures coercitives qui auraient pour effet peut-être lorsque nous avons trois mois de congés sur 12. Mais d’amender le Code du travail, voire même de toucher quelle n’est pas ma stupéfaction, M. le Président, de quelque peu la loi sur les normes minimales de travail. constater que, aujourd'hui, la nouvelle mode est au Alors, il y a quand même... Le gouvernement a des monnayage de ces conditions. Alors, imaginez pour un outils, a des possibilités d'intervenir pour faire en sorte instant l'impact que ça peut avoir en termes de non- que le marché du travail soit un peu plus partagé. création d'emplois lorsque des milliers de travailleurs, Enfin, M. le Président, et je terminerai là-dessus, au lieu de vivre les congés négociés, créant par le fait évidemment, ce sont toutes des mesures qui font appel à même un certain nombre d’ouvertures de semaines de beaucoup de concertation, mais le consensus qui s’est travail, se les font payer. C’est un scandale. C'est totale­ dégagé de la dernière conférence me permet de croire ment inadmissible. Évidemment, je suis conscient que la que cette concertation est possible. Alors, je vous possibilité du gouvernement d’intervenir est limitée, remercie. mais quand même. Il y a aussi des situations qui sont dénoncées et Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous re­ dont les solutions ne sont pas faciles, j’en conviens: le mercie, M. le député de Dubuc. Je vais maintenant double emploi et la mise à la retraite. On m’a appris céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le qu’il y avait environ 28 000 employés de la fonction député. publique qui travaillaient et qui étaient âgés de plus de 65 ans. C'est énorme. Parce que, M. le Président, vous M. Léandre Dion savez, le droit au travail doit cesser, il doit être limité par l'absence totale de droit au travail pour les jeunes. M. Dion: M. le Président, aide au développement Alors, je pense qu'il y a une multitude de mesures qui de l'esprit d’entreprise et au démarrage d’entreprises; devront être mises de l'avant pour favoriser peut-être développement et partage de l’emploi; réforme de la des retraites anticipées ou l’obligation pour ceux et fiscalité; élimination du déficit; réforme de la sécurité du celles qui ont acquis tous leurs droits à la retraite de revenu visant la réinsertion en emploi des prestataires; prendre leur retraite. développement de l’économie sociale; développement de Alors, évidemment, en additionnant toutes ces la formation professionnelle; amélioration de l’arrimage mesures, il m’apparaît être possible de partager le travail entre l’école et l’entreprise; développement de program­ parce que... Évidemment qu'on pourrait en faire une mes d’apprentissage pour les jeunes diplômés; réduction question de principe absolu qui dirait qu'à partir du du poids de la réglementation sur les entreprises; déve­ moment où un jeune ne peut avoir accès au marché du loppement de la culture; développement de fonds d’in­ travail il ne peut être admissible qu’un employé fasse du vestissement; développement de l'équité salariale; déve­ temps supplémentaire et qu'un travailleur qui est sur le loppement de la solidarité sociale. Développement, marché du travail depuis 25, 30, 40 ans puisse aller développement, développement. Voilà le langage d’es­ jusqu’à 70 ans. C’est pour ça, d’ailleurs, lorsque, au poir, de confiance et de dynamisme créatif que nous gouvernement fédéral, on parlait de la réforme du Ré­ propose notre premier ministre dans son discours inau­ gime de pensions du Canada et, par le biais, indirecte­ gural. ment, du Régime de rentes du Québec, la possibilité pour régler la situation financière difficile des régimes Des voix: Bravo! de rentes... Eh bien, j'annonce tout de suite mes cou­ leurs, sans aucune réserve, que jamais on ne doit voir M. Dion: Et voilà. M. le Président, que le chef de comme concevable, comme une des façons de remédier l’opposition, de même que sa cohorte, dans leurs répon­ aux difficultés des régimes, le fait de prolonger le temps ses, accusent le chef du gouvernement de ne rien faire, de de travail au-delà de 65 ans. Ça m'apparaît une mesure ne rien proposer. À croire qu’ils n’ont pas écouté le dis­ totalement inacceptable. Et j’espère qu’on n’y arrivera cours du premier ministre. À croire qu'ils n’étaient pré­ pas, parce que, enfin... Il faut que je contrôle, là-dessus, sents que de coips, que leur esprit était ailleurs. les qualificatifs que je serais tenté d’apporter à de telles À moins que ce ne soit par atavisme. Eux qui, mesures. pendant les neuf années de l'immobile gouvernement de • (12 h 40) • Robert Bourassa, dont ils faisaient partie, ont dû se 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 101 contenter de beaux principes. Tout le monde s'en sou­ de la cinquantaine, se sont entendu répondre: Non, vient. M. Bourassa ne prononçait pas un discours, ne malheureusement, vous êtes trop vieux. Imaginez un peu faisait pas une conférence de presse sans proclamer un père ou une mère de famille, habitué à rentrer chez bien haut l'intérêt économique supérieur du Québec, lui ou chez elle le soir, à parler des événements de la pendant que le Québec s'enfonçait dans la récession journée, de ce qu'ils ont fait, des rencontres avec leurs économique, les faillites d'entreprises, le chômage et la amis du travail, imaginez ces gens, d'habitude si fiers désespérance. d'apporter leur salaire pour subvenir aux besoins de Dans la bouche de Robert Bourassa, la formule leurs enfants et qui se retrouvent sans rien, dépendant de de l'intérêt économique supérieur du Québec était mal­ l'aide sociale! Chaque fois qu'ils rencontrent un ami heureusement devenue un mythe qui tenait lieu de réalité dans la rue, ils se font demander: Comment ça va? Ça et qui avait deux fonctions: la première, auréoler Robert va. Qu'est-ce que tu fais? Je n’ai plus d'emploi. Alors, Bourassa d'une réputation de grand économiste et, la tu vis comment? Pour le moment, j’ai l’aide sociale. seconde, faire oublier son inaction, son indécision et la Imaginez! Chaque fois qu'ils rencontrent un ami, c'est la vacuité de son gouvernement. On comprendra alors question qu'on leur pose. Alors, à chaque fois, ils se qu’ après un bain de neuf années dans ces eaux inodores, sentent un peu plus humiliés et ils renouvellent la résolu­ incolores et sans saveur le chef de l'opposition et ses tion de sortir le moins possible, de cacher leur infortune, amis en soient devenus incapables de percevoir autre de faire oublier leur humiliation. Ils se réfugient dans la chose, incapables de percevoir ne serait-ce que le mou­ solitude, maîtresse de l'inaction. M. Lavoie, du Soleil, vement lui-même. En seraient-ils venus à tout ramener à disait hier: «La solitude est le pire ennemi des sans- la couleur de la margarine? emploi.» Et pourtant tout le monde sait que, dans sa pre­ Alors, comment aider ces gens? Chez nous, à mière année, ce gouvernement a créé environ 40 % de Saint-Hyacinthe, nous sommes à mettre au point une tous les nouveaux emplois créés au Canada, qu'il a mis approche nouvelle. En remède à la solitude, nous ras­ en place un système de perception automatique des semblerons les sans-emploi en petites équipes de travail. pensions alimentaires, qu’il a réformé la loi électorale, Je dis bien des équipes de travail. En remède à l'inac­ qu'il a amélioré les remboursements de taxes foncières tion, nous leur confierons la tâche de réaliser un de leurs aux entreprises agricoles, et j'en passe. rêves. Imaginez-vous que, autour d'une table, vous en Quant à notre nouveau premier ministre, il n’y a avez huit. Mettez qu'en moyenne... On a un certain pas deux mois qu'il est en fonction que, déjà, il a réussi nombre de rêves, mais mettez qu'on en aurait chacun à rassembler, autour de la même table, les principaux plus ou moins cinq. À huit, ça fût 40 rêves. Il y en a décideurs du Québec, provenant des milieux syndicaux, certainement un qui est réalisable parmi tous ceux-là! patronaux et communautaires, afin de déclencher un Alors, en remède à l'incompétence qu'on leur colle au grand chantier d'espoir, de renouveau et de réalisations visage en disant qu'ils sont sans expérience ou trop économiques et sociales qui permettront aux Québécoises vieux, nous leur disons: Vous êtes les meilleurs pour la et aux Québécois de regarder de nouveau l'avenir avec tache qu'on vous confie, à cause de votre formation ou à confiance. C'est tout le Québec qui s'engage dans un cause de votre expérience, mais surtout à cause de votre processus de remise en ordre de ses finances et de re­ créativité et de votre volonté de créer votre propre em­ mise en marche de son économie. Voilà ce que nous ploi et de prendre votre place dans la société. Nous les révèle le discours de notre premier ministre. réunirons et nous leur fournirons le support technique «Réformez la fiscalité», me disent les gens, régu­ nécessaire pour réaliser leur rêve. C'est un véritable lièrement, dans mon comté. Voilà ce qu’a annoncé le incubateur d'entreprises, d'emplois que nous mettons en premier ministre. «Arrêtez de donner des subventions place. aux entreprises», ajoutent-ils. Alors, le premier ministre • (12 h 50) • répond, et je cite: «L'ère des subventions aux entreprises Comme vous le voyez, M. le Président, nous est bel et bien terminée.» Et, quand il parle de favoriser avons depuis très longtemps dépassé, dans ce parti, le la créativité et l'innovation au sein de l'entreprise, de niveau des belles paroles. Nous sommes dans l'action recherche et développement, de formation de la main- concrète et quotidienne. Si le chef de l'opposition et ses d'œuvre, d’améliorer l'arrimage entre l'école et l'entre­ amis ne voient pas cela, c'est tout au moins qu'ils ne prise, je puis vous assurer que les gens du comté de sont pas au courant, qu'ils sont mal informés. Alors, je Saint-Hyacinthe, qui sont fiers d'être de la Technopole les invite à sortir un petit peu, à se manifester un peu agroalimentaire, se reconnaissent dans un tel pro­ davantage et à bien s’informer. Peut-être, alors, que gramme. leurs interventions seront un peu plus pertinentes. Quand ils entendent ceci: «Nous nous concentre­ Car c'est là qu’est la grandeur de ce gouverne­ rons sur l’aide à l'entrepreneurship, donc au démarrage ment, M. le Président, c'est là qu'apparaît cette capacité d'entreprises», alors ils sont comblés. Parce que les gens de notre premier ministre, la capacité de faire travailler de Saint-Hyacinthe sont sensibles à la condition des plus tout le monde ensemble, la capacité d'assurer la complé­ démunis, des laissés-pour-compte, de ceux à qui on a mentarité des initiatives créatrices au niveau du terrain, dit, quand ils ont postulé un emploi: Ah, vous êtes trop de chaque comté, comme au niveau de l’ensemble du jeunes et sans expérience; et les autres qui, arrivés près Québec et des divers secteurs de l’activité. 102 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 Comme vous le voyez, M. le Président, tout l’Assemblée nationale les crédits pour l’année finan­ bouge au Québec. Au niveau local: travail en équipes, cière se terminant le 31 mars 1997, conformément aux autonomie, créativité, prise en charge quotidienne du dispositions de l’article 54 de la Loi constitutionnelle développement, par des citoyens et des citoyennes ordi­ de 1867, et recommande ces crédits à la considération naires, d’entreprises et de la création d’emplois et appui de l’Assemblée. de ces gens par les chambres de commerce, par les Alors, M. le ministre d’État de l’Économie et des corporations de développement économique. Alors qu’au Finances. niveau national: concertation des syndicats, des patrons, des milieux communautaires, de la machine bureaucrati­ Crédits pour Tannée financière 1996-1997 que gouvernementale et du monde politique pour mettre de l’ordre dans les finances publiques en protégeant nos M. Landry (Verchères): M. le Président, pour acquis sociaux, pour mettre le Québec en marche sur la donner suite au message de Son Honneur le lieutenant- voie du développement économique et de la création gouverneur, qu’il me soit permis de déposer les crédits d’emplois. pour l’exercice financier se terminant le 31 mars 1997 Il n'y aura pas de trêve que l’objectif ne soit ainsi que les renseignements supplémentaires. atteint parce que, nous le dit notre premier ministre, il s'agit de libérer le Québec de la gangue des déficits et Le Président: Alors, les documents sont déposés. d'une dette stérilisante, de libérer l’énergie créatrice des M. le leader du gouvernement. Québécoises et des Québécois, de libérer la capacité du peuple québécois de faire ses choix et d’assumer son M. Bélanger: M. le Président, je fais motion avenir en toute confiance. Merci, M. le Président. pour déférer les crédits budgétaires 1996-1997 en com­ mission plénière afin que l’Assemblée étudie et adopte, Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je conformément à l’article 280 du règlement, le quart de vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Y a-t-il ces crédits. d'autres intervenants? Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu’à cet après-midi, 1S heures. Renvoi à la commission plénière (Suspension de la séance à 12 h 52) Le Président: Alors, est-ce que cette motion est adoptée. Adopté. Je voudrais à ce moment-ci faire une mise au point comme président de l’Assemblée, parce que, (Reprise à 15 h 3) dans le document qui vient d’être déposé par le ministre d’État de l’Économie et des Finances, il y a également des Le Président: À l’ordre, s’il vous plaît! Mesda­ dispositions budgétaires concernant l’Assemblée nationa­ mes et messieurs, nous allons nous recueillir quelques le. Ces dispositions ne sont que des informations qui ont instants. été transmises entre fonctionnaires, de part et d’autre. La Je vous remercie. Si vous voulez bien vous présidence n’était pas occupée à ce moment-là, et le asseoir. Bureau de l’Assemblée nationale ne s’était pas réuni. Alors, il y aura au cours des prochains jours dépôt officiel Affaires courantes au Bureau de l’Assemblée nationale, qui constitue, en fait, le conseil d’administration de l’Assemblée, des docu­ Alors, nous allons commencer avec les affaires ments. 11 y aura prise en considération par le Bureau de courantes. l’Assemblée et, par la suite, de la même façon que le gou­ Il n’y a pas de déclarations ministérielles. vernement, après avoir pris connaissance de ces crédits, Pas de présentation de projets de loi. les dépose à l’Assemblée; le Bureau fera en sorte que les crédits budgétaires de l’Assemblée nationale pour Tannée Dépôt de documents 1996-1997 soient déposés ici, en Chambre. Alors, cela étant dit, M. le ministre d’État de Au dépôt de documents, nous allons d’abord l’Économie et des Finances. procéder au dépôt des crédits budgétaires pour l’année 1996-1997. M. le ministre d’État de l’Économie et des État du rapport et des dépenses encourues Finances. pour un mandat spécial octroyant des crédits additionnels au ministère de la Sécurité du revenu M, Landry (Verchères): M. le Président, un message du lieutenant-gouverneur, signé de sa main. M. Landry (Verchères): M. le Président, qu’il me soit permis de déposer deux copies de l’état du Message du lieutenant-gouverneur rapport et des dépenses encourues au 22 mars 1996 pour un mandat spécial. Le Président: Alors, veuillez vous lever, s’il vous plaît. Alors, le Très Honorable lieutenant- Le Président: Merci, M. le ministre. M. le mi­ gouverneur de la province de Québec transmet à nistre responsable du Développement des régions. 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 103 Rapport annuel du Secrétariat M. Bélanger: M. le Président, normalement — je au développement des régions comprends que ce n’est pas dans les règlements — elle nous est présentée afin qu’on puisse l’examiner, et nous M. Chevrette: Oui, M. le Président, qu’il me n’avons pas vu cette pétition. Donc, peut-être la présen­ soit permis de déposer le rapport annuel 1994-1995 du ter demain. À ce moment-là, ça nous permettra de pou­ Secrétariat au développement des régions. voir l’évaluer et de donner notre consentement, le cas échéant. Le Président: Alors, document déposé. M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens. Le Président: M. le leader de l’opposition. Bilan de la contribution du gouvernement M. Paradis: Oui, M. le Président. Vous êtes le à l’Année des Nations unies pour la tolérance seul à savoir le vice qui affecte ladite pétition. Si vous pouviez informer cette Chambre s’il s’agit d’un vice de M. Boisclair: M. le Président, j’ai l’honneur de fond ou de forme, on pourrait, à ce moment-là, obtenir déposer le bilan concernant la contribution du gouverne­ le consentement. ment du Québec à l’Année de la tolérance des Nations unies. Le Président: Vous avez raison, M. le... Alors, je vais vous donner l’explication très simple. La pétition Le Président: Alors, document déposé. 11 n’y a ne fait pas référence à une situation que l’on considère pas de rapports de commissions de l’Assemblée. Au comme injuste et dont on demande le redressement. dépôt de pétitions. Oui, M. le leader de l’opposition. Alors, le texte de la pétition ne fait pas référence à ce qui est considéré comme injuste. M. Paradis: Strictement une question d’infor­ mation à dépôt de documents. On sait que, par commu­ M. Paradis: Oui, M. le Président, comme il niqué, le bureau du premier ministre annonçait que, le s’agit d’une question de fond, je vais relever l’offre de 15 mars passé, il était supposé de recevoir un rapport mon bon ami le leader du gouvernement. Nous aviserons sur la double rémunération. Est-ce que ce rapport a été au cours des prochaines heures et il sera possible, à ce remis au Conseil des ministres et est-ce qu’il sera moment-là, si on peut corriger les choses, de présenter transmis à l’Assemblée nationale du Québec? la pétition dès demain. Le Président: M. le leader du gouvernement. Le Président: Très bien. Alors, Mme la députée, il y aura... Est-ce qu’il y a d’autres pétitions, à ce M. Bélanger: M. le Président, je pense que ce moment-ci? Non. n’est pas à cette étape-ci qu'on peut faire ces demandes- Interventions? Il n’y a pas d’interventions. Je ne là. Il va y avoir, à l'étape des renseignements sur les suis pas avisé qu'il y ait une intervention portant sur une travaux de l’Assemblée... À ce moment-là, peut-être le violation de droit ou de privilège ou sur un fait per­ leader de l’opposition pourra me poser cette question. sonnel. Ou encore, s’il veut en faire sa première question à la Alors, avant la période des questions et répon­ période des questions, je suis certain, à ce moment-là, ses, je voudrais vous aviser qu’après cette période orale que le premier ministre se fera un plaisir d’y répondre. M. le ministre du Travail répondra à une question posée le 26 mars dernier par M. le député de Montmorency con­ Le Président: Très bien. Alors, nous sommes cernant l'implantation d'une cimenterie à Port-Daniel. maintenant au dépôt des pétitions. Mme la députée de La Pinière. Questions et réponses orales Mme Houda-Pepin: M. le Président, je de­ Nous en sommes maintenant à la période des mande le consentement de la Chambre afin de déposer questions et des réponses orales. M. le chef de l’oppo­ une pétition émanant de l’école secondaire Antoine- sition. Brossard et signée par 604 pétitionnaires. • (15 h 10) • Le Président: Mme la députée, la pétition, tel Effets des crédits déposés que nécessaire, a été présentée au secrétaire général, sur la création d’emplois mais je suis informé qu’elle n’est pas conforme. M. Johnson: Oui, M. le Président. Depuis quel­ Mme Houda-Pepin: Qu’on fasse une demande ques semaines maintenant, le premier ministre nous de consentement. entretient sur diverses tribunes de, je dirais, son obses­ sion avec la création d’emplois pour répondre aux pro­ Le Président: Alors, est-ce qu’il y a consente­ blèmes de tous nos concitoyens et concitoyennes. Que ce ment pour que cette pétition soit déposée? soit dans des discours avant même son assermentation, 104 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 en décembre dernier, que ce soit à l'occasion de l’asser­ remarquée dans le monde des affaires, est bien au cou­ mentation, que ce soit ici, en Chambre, en réponse à des rant que l’emploi naît de l’investissement. Il y a adé­ questions, à l’occasion de la conférence de la semaine quation directe entre l’investissement privé et l’emploi. dernière, conférence socioéconomique, et de façon très, Et il doit savoir que, dans un climat de morosité où très formelle, là, par écrit, là, lors du discours inaugu­ l’investisseur n’a plus confiance dans les finances publi­ ral, le premier ministre nous a parlé longuement de son ques, où il voit que le gouvernement s’affaisse dans désir de tout faire ce qu’il est possible de faire pour l’intégrité de ses assises financières, il n’investit pas. soutenir l’emploi et la création d’emplois. Alors, voyant le gouvernement qui, pour la première Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire fois depuis, en tout cas, l’époque où le chef de l’oppo­ comment son discours se traduit dans les crédits de sition présidait le gouvernement, assume ses responsa­ dépenses qui ont été déposés tout à l’heure, quel pro­ bilités financières, voici que les investisseurs vont gramme, dans quel ministère, vient soutenir concrète­ commencer à investir au Québec, en particulier ceux ment ses discours, ou est-ce que ses discours ne sont que qui achètent des obligations du Québec. Hier, dans un des discours? rien de temps, le Québec a vendu pour 350 000 000 $ d’obligations au porteur, surtout en Ontario, avec un Le Président: M. le premier ministre. écart qui est réduit par rapport à celui du temps des libéraux, M. le Président. M. Bouchard: M. le Président, lorsqu’on se donnera la peine d’analyser à fond les crédits, on verra Des voix: Bravo! que le gouvernement a réalisé une opération qui est substantielle et fondamentale et qui vise à réduire le M. Johnson: Comment le premier ministre peut- déficit pour permettre de libérer l’argent pour les fins de il réconcilier ce qu’il vient de nous dire avec ce qu’il l’investissement privé, créer un climat d’équité qui va disait hier: que la réduction du déficit, donc la réduction briser, en plus, le climat de morosité, incitant ainsi les des emprunts gouvernementaux stimule la consomma­ gens à investir davantage et à créer de l’emploi. tion, nous disait-il hier. Et, aujourd’hui, ça stimule La première démarche que le gouvernement doit l’investissement, premièrement. Mais, deuxièmement, faire, M. le Président, c’est de récupérer sa liberté de comment... manoeuvre, qui est actuellement extrêmement compro­ mise par des activités de gestion particulièrement répré­ Une voix: ... hensibles comme celles qu’on doit imputer au gouverne­ ment dans lequel le chef de l’opposition a été pendant M. Johnson: Pas du tout. Pas du tout. Justement longtemps président du Conseil du trésor et premier pas. Deuxièmement, je demande encore une fois au ministre. Voici, pour la première fois en 25 ans, un premier ministre, notamment pour les gens à la recher­ gouvernement qui présente un budget, au point de vue che d’emploi, à la recherche d’adaptation de leurs com­ des dépenses, qui réduit véritablement les dépenses de pétences... à accéder au marché de l’emploi, au soutien programmes. aux municipalités, au soutien aux entreprises pour qu’elles créent des emplois de façon directe, comment le M. Johnson: M. le Président, en présumant que premier ministre peut-il pointer du doigt quelque poste le premier ministre, à un moment donné, va changer de de dépenses que ce soit qui démontre que c’est une prio­ disque, il va s’apercevoir que c’est lui qui est premier rité, pour lui et pour le gouvernement, de créer de ministre puis que ça ne donne rien de blâmer ceux qui l’emploi, de faciliter l’accession à un premier emploi, étaient là avant lui, est-ce que... alors que, dans tous les postes qui sont concernés par la Depuis, quand même, le 26 septembre 1994 que création d’emplois, il y a une diminution plutôt qu’une le Parti québécois assume la direction du Québec au augmentation des crédits, contrairement à ce qu’il nous a gouvernement, est-ce que le premier ministre — je vais dit dans le discours inaugural? revenir avec ma question — pourrait nous dire exacte­ ment quels sont les postes de programmes — parce que, M. Bouchard: M. le Président, s’il y a quelqu’un quand même, un discours, ça doit se traduire en déci­ en cette Chambre qui sait que, la création d’emplois, ça sions concrètes — quelles sont les actions concrètes au passe d’abord et avant tout par l’assainissement des soutien de l’emploi et de la création d’emplois sur les­ finances publiques, c’est bien le chef de l’opposition. Et quelles le premier ministre peut nous dire qu’il a porté je croîs que, s’il voulait bien l’admettre, il le reconnaî­ son attention, tout en faisant la lutte au déficit? Autre­ trait immédiatement. ment dit, qu’est-ce qu’il privilégie, finalement, le pre­ Les gens qui cherchent de l’emploi, ils savent très mier ministre: couper dans les sommes qui permettent bien que ce n’est pas du côté du gouvernement qu’ils de soutenir l’emploi ou couper à peu près n’importe où, vont l’avoir. Les gouvernements n’embauchent plus, y compris dans la création d’emplois? nous le savons. Les gouvernements en sont maintenant à rationaliser leurs effectifs, nous le savons bien. Le sec­ M. Bouchard: M. le Président, je pense que le teur privé embauche, la PME crée de l’emploi, et les chef de l’opposition officielle, qui a fait une carrière gens qui cherchent de l’emploi savent maintenant qu’au 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 105 Québec il y aura de l’emploi qui va être créé par le tion des blâmes, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne secteur privé, puisque maintenant nous avons un climat a oublié de mentionner les compressions à l’assurance- d’optimisme qui commence à régner ici. chômage, qui auront comme conséquence l’augmentation du nombre de ménages à l’aide sociale... Parce que, Le Président: Mme la députée de Saint-Henri— dans le fond, c’est ça qu'on anticipe quand on prévoit, à Sainte-Anne. budget quasi égal, M. le Président, une augmentation, pour une année complète, de 23 000 nouveaux ménages Réduction des crédits pour les programmes qui ne seraient pas venus à l’aide sociale n’eût été des d’employabilité et d’intégration en emploi compressions qu’on s’apprête à faire à Ottawa en ma­ tière d’assurance-chômage et qui vont nous coûter Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Un 119 000 000$. membre actuel de l’Assemblée nationale et ancien mem­ bre de la Chambre des communes déclarait: «Quand les Mme Loiselle: M. le Président, après avoir finances...» donné une augmentation de salaire aux fonctionnaires et avoir coupé les gens les plus démunis de la société du Des voix: Ha, ha, ha! Québec, les gens qui se retrouvent déjà sous le seuil de la pauvreté... Mme Loiselle: Eh oui! Ouvrez bien vos oreilles. «Quand les finances vont mal, on frappe sur les M. Bélanger: M. le Président... démunis. Quand le gouvernement gaspille trop, quand il y a une mauvaise gestion des fonds publics, on frappe Le Président: Alors, Mme la députée, en com­ les démunis. C’est assez!» Cette affirmation appartient plémentaire, vous n’avez pas de préambule à faire, vous au premier ministre du Québec, M. le Président. le savez. Alors, Mme la députée, votre question, s’il Pourtant, dans quelques jours, la loi n° 115 vous plaît. entrera en vigueur, et les prestataires de la sécurité du revenu les plus motivés et qui veulent s’en sortir seront Mme Loiselle: M. le Président... Oui, merci punis. En effet, en date du 1er avril prochain, ces per­ beaucoup. Est-ce que... sonnes subiront une coupure de 30 $ à 50 $ sur leur chèque mensuel. Non satisfait de punir les personnes Des voix: Ha, ha, ha! motivées, ce gouvernement s’attaque maintenant aux outils qui leur permettaient d’accéder au marché du Mme Loiselle: ...la ministre de la «So-so- travail en coupant, dans les crédits 1996-1997, tout près solidarité»... de 86 000 000 $ dans les programmes d’employabilité et d’intégration en emploi. Une voix: De quoi? Entre les beaux discours d’espoir et de création d’emplois que l'on nous sérénade, M. le Président, Mme Loiselle: De la «So-so-solidarité», comme depuis quelques semaines, comment le premier ministre vous vous plaisiez à le dire de façon très régulière... du Québec explique-t-il cette coupure de 86 000 000 $, qui ferme la porte à l’accès à l'emploi pour la clientèle M. Bélanger: M. le Président... de l’aide sociale et qui leur coupe tout espoir d'avenir? Mme Loiselle: ...à la marche «Du pain et des Le Président: Mme la ministre d’État à roses»... l’Emploi. • (15 h 20) • Le Président: M. le leader du gouvernement. Mme Harel: Alors, M. le Président, j’aimerais rappeler, M. le Président, aux membres de cette Assem­ M. Bélanger: M. le Président, vous savez qu’on blée et à Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne ne peut désigner un député autrement que par soit ses que l’effort budgétaire total de l’État sera de moins 3 % fonctions ministérielles ou par son comté. de réduction cette année et que, dans le livre des crédits, l’effort réclamé à la mission sécurité du revenu fera moins Le Président: Alors, je ne pense pas que les de 1 %. Pour l'année financière qui commence lundi députés aient quelque point à marquer en dévalorisant prochain, le budget total de l'aide sociale sera, à moins les titres de leurs collègues. Mme la députée, je pense 1 %, le même que cette année. Ça signifie quoi, M. le que votre question, vous pouvez la poser. Très bien. Président? Ça signifie un budget de 4 077 000000$, 42 000 000 $ de moins que le budget de cette année dont Mme Loiselle: M. le Président, quand la ministre les dépenses ont été de 4 119 000 000 $. de la Solidarité arrêtera-t-elle l’hémorragie des coupures à Pourquoi, à ce moment-là, M. le Président, la l’aide sociale, l’hémorragie dans les programmes d’em­ loi n° 115, adoptée en décembre dernier? Parce que, ployabilité et d’intégration à l’emploi, et comment peut- voyez-vous, M. le Président, dans sa généreuse distribu­ elle expliquer à sa clientèle qu’il y a 86 000 000$ de 106 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 moins à la Sécurité du revenu pour leur avenir et pour Le Président: M. le premier ministre. leur donner l’espoir de retourner sur le marché du travail? M. Bouchard: M. le Président, je vais respec­ Une voix: Bravo! Bravo! tueusement contester les chiffres que vient de lancer très frivolement le chef de l’opposition. La ministre d’État Mme Harel: Alors, M. le Président, je voudrais de l’Emploi et de la Solidarité vient de rappeler une immédiatement rétablir les faits. U n’y a pas d’hémorra­ vérité fondamentale, c’est que, dans le budget que nous gie. Quand le budget à la Sécurité du revenu fait présentons, dans les crédits que nous présentons, qui 4 077 000 000$ et qu’il faisait, l’an passé, sont, je le reconnais, extrêmement durs en termes de 4 119 000 000 $, là, je pense, M. le Président, que, dans réduction du déficit et des dépenses, nous avons mainte­ le contexte actuel, c’est là un effort qui est considérable. nu l’effort du gouvernement dans le domaine de l’aide Oui, il y a une façon de ne pas réduire les prestations, sociale et des programmes sociaux. Et je défie le chef de c’est de réduire les prestataires. Et la façon de réduire les l’opposition de démontrer que nous n’avons pas fait un prestataires, c’est de mettre à contribution toutes les effort extraordinaire, par rapport à tout ce que nous énergies et les bonnes volontés du Québec, comme nous avons dû déployer en termes de réduction de dépenses, le faisons présentement dans les chantiers de l’emploi, de pour maintenir les programmes sociaux, la protection l’économie sociale, le chantier de Montréal et celui sur la dont bénéficient les démunis. Le chef de l’opposition fiscalité et le financement des services publics, pour verra que, au chapitre de l’aide au logement, qui est un cesser, M. le Président, cette augmentation effrénée du supplément, là, nous avons dû faire un ajustement pour nombre de prestataires, due évidemment à deux facteurs, faire en sorte qu’il y ait une mise à jour du critère de j’y reviens, la restructuration de l’économie et les coupu­ référence, qui était le coût moyen des loyers en 1993, res à l’assurance-chômage. pour que la référence soit maintenant celle du coût M. le Président, en terminant, je vous dis ceci: moyen des loyers en 1996. Mais, pour le reste, l’ensem­ On consacrera 245 000 000 $ cette année pour des mesu­ ble des crédits qui sont affectés à l’aide sociale et à la res actives, des mesures d’insertion à l'emploi, d’em­ sécurité du revenu ont fait l’objet d'un effort extraordi­ ployabilité et de supplément de revenu de travail. Et je naire de la part du gouvernement. souhaiterais, justement parce que nous allons avoir l’occa­ sion, enfin, au 1er avril, de nous débarrasser du Régime Une voix: Oui! d’assistance publique du Canada —ça, c’est la bonne nouvelle — qui, après 28 ans, est — cependant, la mau­ Le Président: M. le chef de l’opposition offi­ vaise nouvelle — remplacé par le Transfert social cana­ cielle. dien, qui vient nous amputer de 650 000 000$... Mais nous aurons dorénavant, au moins, M. le Président, la M. Johnson: Oui, est-ce que le premier ministre possibilité de bouger là-dedans et de convertir les presta­ peut nous expliquer comment il calcule? Comment il tions en salaires assujettis aux normes du travail. calcule qu’une somme de 139 836 000 $, à la page 13-11 des crédits, de 140 000 000 $, à tout le moins, Le Président: M. le chef de l’opposition offi­ passe à 75 700 000 $? Est-ce qu’il peut nous expliquer cielle, en principale. comment il maintient le soutien à l’employabilité chez les plus démunis et l’accès à l’emploi en passant les Projets favorisant l’employabilité et l’emploi crédits de 140 000 000 $ à 75 000 000 $? Est-ce qu’il pourrait nous expliquer ça, s’il vous plaît? M. Johnson: Oui, M. le Président. J’ai entendu, comme tout le monde, un discours de la députée de Le Président: Mme la ministre d’État à la Solida­ Hochelaga-Maisonneuve qui ne tiendrait pas la route rité et à l’Emploi. cinq minutes dans son comté. Je demanderais maintenant au premier ministre Mme Harel: Alors, M. le Président, j’invite tous comment il réconcilie ce qu’il a toujours dit et ce qu’il a les membres de cette Assemblée, y compris le chef de répété, qu’on ne touche pas.. Je cite le premier minis­ l’opposition, à retenir, à la page 185 du livre des crédits, le tre: «On ne touche pas aux programmes sociaux, dit-il. budget global qui est alloué à la Sécurité du revenu à On devrait tous être liés par un pacte de civilisation, l’égard de l’ensemble de sa mission. Et je voudrais vous d’humanisme et de justice distributive pour ne pas tou­ rappeler ceci, tout simplement, M. le Président. C’est cher aux démunis. Le niveau de protection sociale est qu’il s'agit de la réduction dans le barème de participation, déjà très menacé.» ce dont Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne a Comment réconcilie-t-il ces mots d’une autre parlé justement, c’est-à-dire une réduction qui, en décem­ période et ces excellents sentiments avec la réalité qui bre dernier, a été votée dans cette Assemblée dans le cadre est que la ministre d’État de l’Emploi et de la Solidarité de la loi n° 115, qui s’applique à partir du 1er avril pro­ va couper, dans les projets favorisant l’employabilité et chain, mais qui est déjà adoptée depuis décembre et qui l’emploi, 50 % du budget qui était consacré l’an der­ réduit de 30 $ le barème de participation. C’est là l’expli­ nier? 50 %! cation qui manque au chef de l’opposition. 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 107 M. Johnson: Attends un peu, attends un peu. non pas parce qu’on a amélioré les prestations, mais c'est parce qu’il y a eu plus de prestataires. Alors, il Des voix: Ha, ha, ha! faut peut-être procéder autrement. Et c’est la raison pour laquelle, M. le Président, une réforme majeure de la M. Johnson: Est-ce que... sécurité du revenu est en cours, une réforme majeure de la formation professionnelle est en cours, une réforme Des voix: On est prêt, on est prêt. majeure des allocations familiales et de l’aide aux famil­ les est en cours, une réforme majeure des régimes de M. Johnson: M. le Président, à la ministre et pensions et des revenus de retraite est en cours. Est-ce au premier ministre. Est-ce qu’on peut passer de la que, M. le Président, il ne faut pas changer notre façon page 185 à la page 192? Est-ce qu'on pourrait nous de faire quand on a les résultats que l’on peut constater expliquer pourquoi le gouvernement et le premier mi­ maintenant? nistre, qui veulent absolument assurer de l'emploi, financent l’augmentation du nombre d’assistés sociaux Des voix: Bravo! par la réduction des programmes de soutien à l’emploi et à l’accès à l’emploi, déjà les plus démunis? C’est ça Le Président: M. le chef de l’opposition, tou­ qui se passe. jours en complémentaire. Le Président: Mme la ministre. M. Johnson: Oui, en terminant, M. le Président, au premier ministre qui nous disait avant-hier que l’ob­ Mme Harel: Alors, M. le Président, justement, je jectif de notre société est de léguer l'espoir en héritage à pense bien que, à la page 192, on trouve là des réponses nos jeunes, comment croit-il que de couper les mesures aux questions qui sont posées, notamment la suivante, et de remise en emploi font en sorte que c’est l’espoir qui on aura l’occasion, dans les crédits provisoires, demain, est assuré dont ils peuvent hériter? Est-ce que le premier ici même, dans cette Chambre, de répondre très concrète­ ministre ne trouve pas, au contraire, que ce que ces cré­ ment à ces questions. Et je vous dis qu’il y aura dits démontrent à l’endroit des gens qui cherchent des 245 000 000 $ qui seront consacrés, dans le budget de la emplois, c’est qu’il leur lègue de bloquer l'avenir et de Sécurité du revenu — sans compter le budget de la Société bloquer l’espoir, au lieu qu'ils puissent hériter de québécoise de développement de la main-d’œuvre — aux l’espoir? programmes d’employabilité, d’insertion à l’emploi et de • (15 h 30) • supplément au revenu de travail. Le Président: M. le premier ministre. Le Président: M. le député de Laporte, en prin­ M. Bouchard: ...sur l'aide sociale, c’est de cipale. retourner à l’emploi. Et nous savons actuellement que les mécanismes d'incitation fonctionnent mal. Il y a eu M. Bourbeau: En additionnelle. des efforts, on n'est pas prêt à blâmer le député de Laporte d’avoir fait des efforts, mais, malheureusement, Le Président: En additionnelle. ils n’ont pas atteint les résultats qui étaient visés. Il faut donc établir maintenant des mécanismes nouveaux qui M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que la vont faire en sorte que les gens qui ont de l’aide sociale ministre de l’Emploi pourrait nous expliquer? L’incita­ aient une incitation à retourner à l'emploi. Ça peut se tion au retour au travail étant la pierre angulaire du faire par une réforme fondamentale, par de nouveaux régime d'aide sociale qui existe présentement, comment mécanismes qui seront introduits par la réforme qui sera peut-elle justifier qu’elle coupe la moitié des program­ bientôt annoncée. mes d’employabilité, d'emplois, c'est-à-dire les pro­ grammes qui s’adressent à ceux qui veulent faire un Le Président: M. le député d'Argenteuil, en effort pour sortir de l’aide sociale, alors qu’elle ne principale. coupe pas du tout ceux qui restent à la maison et qui ne veulent rien faire? Réduction des crédits pour les programmes de développement commercial, manufacturier, Le Président: Mme la ministre. scientifique et technologique Mme Harel: Si, M. le Président, l’incitation est M. Beaudet: Oui, merci, M. le Président. Dans la pierre angulaire, comme dit le député de Laporte, de son énoncé au livre des crédits, le gouvernement an­ ce qui est une loi dont il a été l’auteur, alors comment nonce son soutien financier aux secteurs manufacturiers expliquer que cette incitation a mené depuis cinq ans, et commerciaux, au développement de la science, de la M. le Président, à une augmentation de 1 000 000 000 $ technologie et du commerce extérieur. Comme on le à la Sécurité du revenu, puisqu’on est passé de sait, ce programme vise à apporter une aide financière 3000000000$ à 4000000000$ depuis 1988, depuis aux entreprises et aux organismes pour la réalisation de l’adoption de la loi 37, c’est 1 000 000 000 $ de plus et projets qui stimulent la création d'emplois. Les crédits 108 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 1996-1997 s’établissent à 238 000 000 $, soit une dimi­ M. Léonard: M. le Président, je pense qu’au- nution de 112 900 000 $ par rapport aux crédits 1995- jourd’hui nous avons déposé les crédits qui révèlent un 1996, soit une baisse de 32 %. Ma question s’adresse à effort budgétaire de 2 245 000 000 S. Je pense que la ministre déléguée à l’Industrie et au Commerce. Com­ l’opposition actuelle, qui était auparavant au gouverne­ ment la ministre compte-t-elle stimuler l’emploi, tel qu’il ment, n’a jamais réussi à opérer une rationalisation aussi a été soulevé lors du sommet économique de la semaine importante. Le député de Saint-Louis attire l’attention dernière, en coupant, par exemple, le programme d’in­ sur une somme de 250 000 000 $, ou de 275 000 000 $, vestissement au démarrage d’entreprises de plus de pour lesquels nous avons des idées, et ce n’est pas du 50 %, l’aide à certains projets industriels d’intérêt éco­ tout une commande de crédits périmés comme ils en nomique de plus de 7 500 000 $? faisaient lorsqu’ils étaient au gouvernement. Et je pourrais continuer ainsi, toute la kyrielle y est présente. Comment va-t-elle joindre la parole et Une voix: Voilà. les écrits aux gestes concrets, aux actions? Comment va-t-elle oser agir, M. le Président? Comment trans­ M. Léonard: Nous avons ciblé et expliqué qu’une mettre l’espoir avec des crédits du genre? somme de 100 000 000$ devait être réalisée dans la fonction publique, comme il s’est fait, par exemple, dans Le Président: Mme la ministre. le réseau de l’enseignement primaire et secondaire, aux termes de la convention collective où les syndicats ont Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, le accepté de réorganiser le travail pour une somme de gouvernement a opté pour une rationalisation efficace de 100 000 000 $. Nous demandons la même chose, et nous ses programmes, et je pense que l’opposition et le pensons qu’il est très possible de réaliser la même chose député d’Argenteuil ne peuvent pas être contre cette ici, dans la fonction publique, en particulier par des mesu­ rationalisation-là. Et, dans nos crédits, quand vous allez res de départ assisté. Et, là-dessus, nous aurons à rendre les étudier un peu plus en profondeur, vous allez réaliser des choses publiques ultérieurement. que nous avons réduit nos programmes de 125 à 36. Et En ce qui concerne l’autre 150 000 000 $ sur les la raison pour cela, d’une part, c’est parce que la majo­ coûts de fonctionnement, je pourrai y revenir, M. le rité venait à terme et que, d’autre part, la grande majo­ Président, si le député a une question complémentaire, rité avait déjà rencontré ses objectifs. Et nous pensons mais j’ai aussi les explications. qu’il est préférable d’avoir 36 programmes plus effica­ ces, plus ciblés, pour rencontrer les objectifs de dévelop­ Le Président: M le député de Saint-Louis. pement économique. M. Chagnon: Ça tombe bien, M. le Président. Le Président: M. le député de Saint-Louis, en Est-ce que l’autre façon de faire des crédits périmés, M. principale. le Président, fait en sorte que ces 150 000 000 $, puis­ que le président du Conseil du trésor va en parler, vont Justification des crédits à être périmés modifier la façon dont ils ont déjà été faits, lorsqu’on dit que la baisse prévue des dépenses de fonctionnement M. Chagnon: Merci, M. le Président. Au grand dans les crédits 1996-1997 implique des exigences addi­ jeu de la rationalisation des programmes, il semble, à la tionnelles qui seront imposées au ministère pour lecture des crédits, que le président du Conseil du trésor 150 000 000 $? Sans compter, M. le Président, que le a manqué de souffle. Au grand pan de tout notre secteur 100 000 000 $ dont vient de parler le président du public qui devait tomber, selon la déclaration du député Conseil du trésor est l’équivalent du 100 000 000 $ que de Joliette, on retrouve que le député de Labelle a eu l’ensemble des fonctionnaires vont recevoir comme des problèmes à finir son budget de crédits. Il s’est augmentation de salaires, au 1er avril — augmentation gardé, M. le Président, 275 000 000 $ de crédits à être forfaitaire, bien sûr. Mais, pour payer cette augmenta­ périmés en cours d’année. On pensait que l’autre façon tion de salaires de 100 000 000$, le président du de gouverner, nous avait-on dit l’an dernier, faisait en Conseil du trésor devra couper 2 500 têtes. sorte de ne plus jamais amener de ces crédits périmés, d’avoir des enveloppes fermées pour tous les ministères. Le Président: M. le président du Conseil du trésor. Une voix: C’était fini, ça. M. Léonard: M. le Président, il ne s’agit absolu­ Une voix: La page est tournée. ment pas d’une commande de crédits périmés. Les minis­ tères et les chefs des ministères connaissent les montants M. Chagnon: À quand le retour de l’autre façon qui leur sont alloués et auront à les reprendre au cours de de gouverner, M. le Président? l’année. Mais, M. le Président, je dois dire que, lorsque l’ancien gouvernement faisait ses crédits, il finissait en Le Président: M. le président du Conseil du donnant une commande comme ça de 500000000$ de trésor. crédits périmés... 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 109 Une voix: C'est ça. Effectivement, comme tous les ministères, le ministère des Relations internationales contribue à l'ef­ M. Léonard: ...sans savoir ce qu'il faisait et fort du gouvernement pour réduire le déficit global. ce qu'il ferait. Nous savons ce que nous ferons. Nous Nous sommes ici, dans cette Chambre, je pense, tous savons que 73 000 000 $, par exemple, iront aux d'accord pour dire qu'il faut retrouver l'équilibre budgé­ réseaux et 77 000 000 $ iront dans les coûts de fonc­ taire, et le ministère des Relations internationales contri­ tionnement de la fonction publique ou des ministères bue à cet effort. Il y contribue notamment par des cou­ et organismes du gouvernement. Ça, nous le savons et pures majeures, dont 13 100 000 $ dans le réseau de nos nous savons exactement combien et dans chaque délégations à l'étranger, ce qui est considérable, ce qui, ministère. Alors, nous avons ciblé que la priorité était évidemment, coupe dans ce que la députée de La Pinière de réduire les coûts de fonctionnement qui compre­ appelait les tapis rouges. naient, par exemple, les coûts de transport de • (15 h 40) • délégations, etc., et chacun sait ce sur quoi il doit tra­ Ce réseau de délégations fait un excellent travail, vailler. il a été mis sur pied autant par nos amis d'en face que par nous-mêmes. Il nous représente à l'étranger, favo­ Le Président: Mme la députée de La Pinière, en rise notre commerce, favorise nos exportations, présente principale. la vision du Québec, et nous en sommes très fiers. Mais il nous faut rationaliser, et nous l’avons fait. Les pro­ Augmentation des crédits alloués au volet grammes auxquels fait allusion la députée de La Pinière Affaires bilatérales et multilatérales sont des programmes au titre de la coopération, qui nous du ministère des Relations internationales permettent effectivement d’ajouter 1 000 000 $ cette et de la Francophonie année, à même ces coupures que nous faisons, dans l'aide, notamment, aux pays sous-développés et aux pays Mme Houda-Pepin: M. le Président, aux cré­ francophones d’Afrique. Et je pense que, là, il y a un dits déposés en Chambre aujourd'hui pour le ministère devoir de solidarité minimale pour respecter nos engage­ des Relations internationales et de la Francophonie, on ments au sein de la francophonie. note une augmentation de 1 000 000 $ dans le seul volet Affaires bilatérales et multilatérales, alors que le Le Président: M. le député de l’Acadie, en prin­ ministère a été amputé de tout son secteur économi­ cipale. que. Comment le ministre des Relations internationa­ Documents concernant l'octroi de certains les et de la Francophonie peut-il justifier de dépenser contrats par le Secrétariat à la restructuration 1 000 000 000 $ supplémentaires... M. Bordeleau: En principale, M. le Président. Des voix: 1 000 000 $. Hier, le premier ministre a tenté d'utiliser ses pouvoirs de magicien pour faire en sorte que l'affaire Le Hir Mme Houda-Pepin: ...1 000 000$ supplémen­ n'existe plus. Que cela lui plaise ou non, cette réalité taires, notamment dans les cocktails et les tapis rouges, existe malheureusement. C'est son gouvernement, en au moment où on coupe dans les mesures d'employabi­ poste depuis 18 mois, qui en est responsable, et plus lité et que tous les Québécois sont appelés à faire de particulièrement quatre des ministres qui l’entourent grands sacrifices? présentement. Le 8 décembre 1995, la présidente du Conseil du Le Président: M. le ministre des Relations trésor de l'époque, et actuelle ministre de l’Éducation, internationales. déclarait dans cette Chambre, et je cite: «Je suis prête à déposer tous les documents utiles et pertinents à l’en­ M. Simard: M. le Président, je pense que Mme quête du Vérificateur général, et cette enquête nous la députée de La Pinière, qui vient d'être nommée à son amènera à déposer tous les documents utiles et pertinents poste de critique concernant les relations internationales, devant les membres de cette Assemblée après qu'ils a évidemment beaucoup à apprendre, mais nous l'aide­ eurent été enquêtés.» rons au cours des prochains mois. Ma question, M. le Président. Le premier minis­ tre actuel s’engage-t-il à respecter l'engagement pris par Des voix: Ha, ha, ha! la présidente du Conseil du trésor de l'époque, et mem­ bre actuelle de son gouvernement, en permettant le dé­ Le Président: À l'ordre! L'humour et le rire ne pôt de tous les documents dont a fait état, hier, mon col­ sont pas interdits à la période des questions, mais le lègue, le député de Châteauguay, et ce, afin de faire la temps file malgré tout. Alors, M. le ministre. lumière sur les responsabilités politiques des ministres membres du Conseil du trésor? M. Simard: M. le Président, rappelons certains faits qui apparaissent aujourd'hui au livre des crédits. Le Président: M. le premier ministre. 110 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 1996 M. Bouchard: Ce que je comprends, c'est que Le Président: M. le député de Laporte, en princi­ l’opposition officielle aimerait bien avoir une troisième, pale. quatrième, cinquième enquête sur l'affaire Le Hir, qui fait ses délices, mais il y a eu maintenant deux enquêtes Offres de règlement proposées par complètes, dont la dernière débouche sur un complément la Société des alcools du Québec dont nous aurons le résultat, je ne sais pas quand, mais aux clients de Me Pierre Marois incessamment. Je crois que les enquêtes ont été faites, les choses ont été mises à jour, les ministres ont été M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Suite à complètement blanchis et innocentés de tout reproche l’échec de la tentative de privatisation de certaines suc­ dans ce dossier. Même le ministre Le Hir, dont on a dit cursales de la Société des alcools du Québec par le beaucoup de mal, l’a été, et je soumets, M. le Président, gouvernement du Parti québécois en 1985, des poursui­ qu'il n'y a pas lieu d’aller plus loin en ce qui concerne tes judiciaires avaient été intentées contre la Société des la recherche des faits dans ce dossier. alcools du Québec par Me Pierre Marois, ex-ministre péquiste, au nom de certains clients malheureux. Or, à Le Président: M. le député de l'Acadie. la suite du remplacement récent de la majorité des mem­ bres du conseil d’administration de la Société des alcools M. Bordeleau: Oui, en principale, M. le Prési­ du Québec par de nouveaux membres nommés par le dent. gouvernement québécois, nous apprenons que des dé­ marches politiques effectuées par Me Pierre Marois Le Président: En principale? auraient amené l’ex-ministre péquiste de l’Industrie et du Commerce, le député de Prévost, à exercer des pres­ Transparence dans l’attribution sions auprès du conseil d’administration de la Société des contrats gouvernementaux des alcools du Québec pour qu’il augmente le montant des offres de règlement proposées par la Société des M. Bordeleau: En principale. M. le Président, alcools aux clients de Me Pierre Marois. en août 1988, un ex-politicien fédéral mandaté par le Ma question au ministre des Finances est la sui­ gouvernement de l'époque pour rédiger un rapport sur vante: Le ministre des Finances est-il au courant de ces les questions de déontologie et d'éthique politique écri­ démarches de Me Marois auprès du précédent ministre vait ce qui suit, et je cite: «La question de l'adjudication de l’Industrie et du Commerce et peut-il assurer cette des contrats gouvernementaux demeure la plus potentiel­ Chambre qu'aucune nouvelle pression politique n’est lement dangereuse et, en tout cas, celle qui alimente le exercée par Me Marois auprès de lui ou auprès du gou­ plus l'idée négative que beaucoup de gens se font de vernement pour tenter de convaincre le nouveau conseil l’activité politique. C'est là que doit porter une partie d'administration de la Société des alcools du Québec importante de nos efforts, en vue de garantir l’intégrité d’augmenter le montant des offres de règlement aux et la transparence décisionnelle de l’État.» clients de Me Marois? Le premier ministre, par son refus de tenir une commission parlementaire spéciale et de déposer, Le Président: M le ministre d’État à l'Économie comme il vient de le dire, tous les documents relatifs à et aux Finances. cette affaire, est-il toujours d’accord avec le contenu de sa propre déclaration... M. Landry (Verchères): Bon, premièrement, Me Pierre Marois, comme l’appelle le député à juste titre, Le Président: M. le premier ministre. n’est plus membre du Conseil des ministres depuis 15 ans. Il a le droit de gagner sa vie, comme si le député M. Bouchard: Ce n’est pas fini. redevenait notaire... M. Bordeleau: ...je disais, avec le contenu de sa Des voix: Ha, ha, ha! propre déclaration sur les vertus de la transparence dans l’attribution des contrats gouvernementaux ou est-il, M. Landry (Verchères): ...et personne ne pour­ encore une fois, en train de changer d’idée? rait lui reprocher d’instrumenter. Le Président: M. le premier ministre. Des voix: Ha, ha, ha! M. Bouchard: M. le Président, la transparence a M. Landry (Verchères): Deuxièmement, la ré­ été recherchée à l’extrême dans ce dossier, puisque ces ponse à sa question, c'est: Non, je n’ai jamais entendu contrats ont fait l’objet de deux enquêtes par quelqu’un parler des faits passés qu’il vient d’évoquer, mais, pour de totalement indépendant qui ne répond qu’à cette le présent — car il a le droit de s’intéresser aussi au Chambre et qui est le Vérificateur général. Qu’est-ce présent, parce que, s’il nous reporte trop dans le passé, qu’on veut de plus comme transparence, M. le Prési­ ça pourrait nous incliner à nous intéresser à ça nous dent? Tout a été fait dans cette mesure. aussi — pour le présent... 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 111 Des voix: Ha, ha, ha! ce que le ministre des Finances peut nous assurer que de nouvelles pressions ne sont pas faites par le nouveau M. Landry (Verchères): ...cette affaire suit son ministre de façon à ce que les fonds publics, M. le cours. Les administrateurs de la Société des alcools, au Président, soient engagés dans des sommes d'argent que poste de directeur général en particulier, qui n'ont pas le conseil a toujours refusé de payer aux clients de Me été nommés par nous et à qui on ne reconnaît aucune Marois? sympathie politique envers nous, sont en charge du dossier. Nous suivrons leurs avis s’ils nous apparaissent M. Landry (Verchères): Votre question, qui pertinents, et autrement nous prendrons nos responsabili­ vient du fond du coeur, en dit plus long que ma tés. réponse. Le Président: M. le député de Laporte. Des voix: Ha, ha, ha! M. Bourbeau: M. le Président, une question M. Landry (Verchères): 11 y avait, dans votre additionnelle au ministre des Finances. Est-ce que le temps, des pressions, vous venez de l'admettre... ministre des Finances pourrait assurer cette Chambre qu'aucune démarche de nature politique n’est exercée M. Chevrette: Et ils ont résisté. auprès de lui ou auprès du gouvernement par Me Marois • (15 h 50) • pour tenter d'influencer le conseil d'administration de la M. Landry (Verchères): ...et vous avez, dites- Société des alcools du Québec? vous, résisté. La cause est toujours en état. 11 ne faut pas oublier, sur le mode plus sérieux, là, qu’il s'agit d'une M. Landry (Verchères): M. le Président, le cause qui est mue devant notre Cour d'appel et qui peut jour où quelque citoyen du Québec, qu'il soit avocat ou être entendue incessamment. Alors, il faut quand même ne le soit pas, sera empêché de faire des démarches en traiter avec prudence. Je crois vous avoir bien dit politiques auprès des élus, nous ne serons plus en démo­ que, de concert avec les autorités de la Société des cratie. alcools, qui sont les responsables de première ligne de ce dossier, tout sera fait pour que l’intérêt public soit Le Président: M. le député de Laporte. respecté. Parfois, il faut régler; parfois, il faut aller jusqu'au bout du procès; parfois, le moins bon arrange­ M* Bourbeau: M. le Président, dois-je compren­ ment vaut le meilleur procès. Mais il est arrivé que ça a dre de la réponse du ministre des Finances que, effecti­ été l'inverse aussi. Tout ça doit être regardé avec soin vement, un ex-collègue du ministre des Finances fait des et, je le dis, cela sera fait en toute transparence, en toute pressions auprès de lui pour que, à même les fonds équité et dans l'intérêt public. publics, des sommes d'argent additionnelles soient rajou­ tées à des sommes d’argent qui seraient proposées aux Une voix: 11 a l'air d'en savoir pas mal, pour un clients de Me Marois, par des pressions du ministre des gars qui ne sait rien. Finances? M. Bourbeau: M. le Président, au ministre des M. Landry (Verchères): Vous ne devez pas Finances, qui a l’air d'en savoir beaucoup plus que ce comprendre ça. Et, si vous comprenez ça, vous êtes qu’il disait au début: Est-ce que le ministre des dans la plus haute fantaisie. Ma première réponse com­ Finances pourrait bien réaliser que les pressions dont portait tous les éléments qui auraient dû vous donner on a parlé ont été faites sous votre gouvernement, sous satisfaction. Cette affaire suit son cours. Vous avez été le gouvernement présent, là, le gouvernement du Parti 10 ans au pouvoir, vous avez eu tout le temps voulu québécois, par un ministre du gouvernement du Parti pour la régler à la satisfaction de tous et de toutes. Si québécois auprès d'un conseil d'administration qui a nous avons à réparer votre gâchis, nous le ferons refusé, M. le Président, jusqu'à maintenant, qui a consciencieusement, en prenant en compte l'intérêt résisté à ces pressions-là, mais qui a été démis de ses public. fonctions depuis ce temps-là et remplacé par de nou­ veaux administrateurs dont on ne connaît pas, évidem­ M. Bourbeau: M. le Président, puisque l'ancien ment, la réaction future? conseil d'administration avait résisté aux pressions politi­ ques faites sur lui... Des voix: Ah! Des voix: Ha, ha, ha! M. Landry (Verchères): Non. M. le Président, certains fonctionnaires qui, peut-être, n’appréciaient pas M. Bourbeau: Oui, oui. Oui, oui. M. le Prési­ l'ancien ministre m'ont dit, effectivement, que j'en avais dent, à la suite du départ de ces gens-là, nous appre­ appris plus en deux mois que lui en deux ans. nons — je l'ai dit tout à l'heure — que des pressions avaient été faites auprès du conseil d'administration. Est- Des voix: Ha, ha, ha! 112 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 1996 M. Landry (Verchères): Mais, sur cette ques­ flexibilité, puisqu'il va leur permettre d'échelonner les tion et dans ce dossier, je vous le dis, il en va du sort de versements et qu’il va même négocier avec eux à rabais ceux qui sont parties au litige, non pas uniquement les intérêts qui pourraient courir encore. partie étatique et partie Société des alcools, mais vous savez que c'est un regroupement de poursuivants dont Une voix: Bravo! l'intérêt est premier par rapport à celui de leur procu­ reur. Ce n'est pas de leur procureur qu'il s'agit. Il s’agit M. Williams: Additionnelle. d'hommes et de femmes qui ont vécu une période très pénible et qui a duré plus de 10 ans, à cause de l'inac­ Le Président: En dernière complémentaire, M. le tion du gouvernement précédent. Alors, nous allons député. essayer de prendre l'intérêt de ces gens, de prendre l'intérêt public et, éventuellement, de laisser le tribunal Une voix: On aurait dû en acheter. trancher si c'est la meilleure solution. M. Williams: En complémentaire. Oui ou non, Le Président: En principale, M. le député de «yes or no, are you going to go back on your word and Nelligan. are you going to tax these people retroactively? Est-ce que vous allez maintenant radier les recotisations comme Mesures rétroactives touchant certains vous avez dit quand vous étiez membre du Bloc québé­ contribuables qui ont investi dans cois? Oui ou non? la recherche et le développement Le Président: M. le premier ministre. M. Williams: En principale. Merci, M. le Prési­ dent. Un député à Ottawa a écrit, les 6 et 10 juillet ainsi M. Bouchard: À la lumière de ce rapport qui que le 19 septembre derniers, aux contribuables québé­ vient de tomber de la part du comité aviseur qui est cois qui ont investi en toute bonne foi dans le projet de présidé par le président de la Commission des valeurs recherche et de développement, et je cite: «Le Bloc mobilières et par deux avocats fiscalistes de renommée trouve inadmissible ce revirement rétroactif qui pourrait au bureau de McCarthy, je crois, et au bureau de pousser à la faillite environ la moitié des contribuables Létoumeau, Stein, il appert que les modifications appor­ touchés. Ces derniers ont utilisé cette mesure en toute tées par la suite par les deux gouvernements, d'ailleurs, bonne foi et écopent maintenant pour l’incurie du minis­ Ottawa et Québec, sont correctes, équitables et sont tère du Revenu.» Maintenant, ce député est le premier satisfaisantes. ministre du Québec. Le Président: Alors, cette réponse met fin à la... Une voix: Ah non! A l'ordre, s’il vous plaît! Cette réponse met fin à la période des questions et des réponses orales. M. Williams: Ma question est pour le premier ministre: Face à ces mêmes problèmes, face aux mêmes Réponses différées citoyens, face à ce même revirement rétroactif au Qué­ bec, maintenant, M. le premier ministre, avec le pouvoir Implantation d'une cimenterie à Port-Daniel d’agir, entend-il radier les recotisations touchant ces milliers de contribuables de bonne foi? Nous en sommes maintenant à l'étape des répon­ ses différées. M. le ministre du Travail répondra mainte­ Le Président: M. le premier ministre. nant à une question posée le 26 mars dernier par M. le député de Montmorency concernant l'implantation d’une M. Bouchard: M. le Président, nous savons cimenterie à Port-Daniel. M. le ministre du Travail. qu’il s'agit d'un dossier difficile qui a donné lieu à des plaintes de la part d'un groupe d'investisseurs. Ces M. Rioux: M. le Président, il est vrai que, depuis plaintes ont provoqué la création d'un comité aviseur qui plusieurs mois, CIMBEC Canada développe un projet a déposé récemment son rapport et qui a conclu que les d'implantation d'une cimenterie à Port-Daniel en Gaspé- modifications qui ont été apportées par le gouvernement sie. Il est également vrai que le gouvernement du Québec aux cotisations, à la suite de ces pressions, sont correc­ a supporté cette initiative pour des études de préingénie­ tes, qu’elles respectent l’équité, puisque, en particulier, rie, de préfaisabilité au coût de 2 800 000 $: 1 400 000 $ le gouvernement va renoncer à l'intérêt qui court depuis venant du gouvernement et l 400 000 $, du promoteur. 1990 sur les réclamations fiscales, et que même ceux qui Les études ont démontré que le projet était viable. ont déjà payé en vertu de l’ancienne cotisation vont être Deux phases importantes ont été franchies au niveau des remboursés de ces intérêts. Par contre, pour ceux qui, études, au ministère de l'Environnement. Ce qui reste à même, auraient des difficultés à assumer la situation compléter du côté environnemental, c’est le port qu'on actuelle par suite de l’offre récente — l'offre des deux doit construire à Port-Daniel pour les exportations de la gouvernements, d'ailleurs — le gouvernement va user de future usine. 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 113 Je voudrais souligner aussi, pour répondre en­ Le Président: M. le député de Montmorency, core plus précisément à la question du député de Mont­ selon la pratique et le règlement, il n'y a qu'une ques­ morency, que le dossier de la cimenterie Saint-Laurent à tion complémentaire. Je m'excuse, je n’ai pas besoin de Beauport et celui de Port-Daniel en Gaspésie présentent consentement, la règle est claire, il n’y a qu'une ques­ des différences essentielles. Beauport produit pour le tion complémentaire à cette étape-ci. marché intérieur québécois et les Maritimes, alors que le Alors, il n'y a pas de votes reportés. projet gaspésien, c'est pour les marchés américains, européens et l'Est asiatique. Motions sans préavis Il faut dire, M. le Président, qu'il s'agit là, pour nous, en Gaspésie, d’un projet majeur pour attirer des Nous sommes rendus maintenant aux motions investisseurs chez nous, pour effectuer un développe­ sans préavis. Mme la ministre de la Culture et des Com­ ment en région qui est important au chapitre de la créa­ munications. tion d'emplois, et je terminerai en disant, quant à la filière de Beauport, de Saint-Laurent, que le dossier est Souligner la Journée mondiale du théâtre loin d'être terminé, loin d'être fermé. Il ne faut pas s'en inquiéter plus qu'il faut parce que les entrepreneurs eux- Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. Je sollicite mêmes étudient présentement des scénarios pour sauver le consentement de cette Assemblée pour présenter la l’entreprise de Beauport à Québec. motion suivante: «Que les membres de l'Assemblée nationale se joignent à moi afin de souligner la Journée Le Président: M. le député de Montmorency, en mondiale du théâtre, qui nous offre l'occasion privilé­ complémentaire. giée de rendre hommage à tous ceux et celles qui, au Québec, consacrent leur talent et leur énergie à faire du M. Fillon: Oui, M. le Président. Il y a bien théâtre un lieu d'affirmation de notre identité et de notre seulement le ministre du Travail qui n’est pas inquiet des ouverture au monde.» emplois à Beauport. Tout Beauport est inquiet de ses emplois actuellement, M. le Président. Une voix: Bravo! M. le Président, pour la troisième fois j’adresse ma question au premier ministre. Est-ce que Mme Beaudoin: Merci. le premier ministre est conscient que son gouverne­ ment investit 1 400 000 $ pour créer de la concur­ Mise aux voix rence déloyale aux 140 travailleurs de Beauport, qui vont perdre leur emploi parce que le gouvernement ne Le Président: Y a-t-il consentement pour débattre laisse pas libre cours à la concurrence? Et est-ce que de cette motion? Alors, est-ce que cette motion est adop­ le premier ministre est prêt à s’engager à tout faire ce tée? qui est en son pouvoir pour faire en sorte que les 140 travailleurs de Beauport conservent leur emploi, M. le Des voix: Adopté. Président? Le Président: Adopté. Alors, nous en sommes Le Président: M. le ministre d’État de l’Éco­ maintenant à une autre motion sans préavis, celle du nomie et des Finances. ministre délégué aux Relations avec les citoyens. M. le ministre. M. Landry (Verchères): Je pense que mon collègue a bien répondu. Mais, si le député insiste pour Souligner la Journée internationale pour en savoir davantage, les seuls transferts aux entreprises l’élimination de la discrimination raciale et qui restent dans nos budgets sont ceux précisément qui la Semaine de solidarité avec les peuples en lutte supportent soit l’innovation technologique soit l’exporta­ contre le racisme et la discrimination raciale tion, parce que la base industrielle s’accroît par les ventes à l’étranger en dehors du périmètre national, et M. Boisdair: Oui. M. le Président, je sollicite surtout s’il s’agit d’une région économiquement éprou­ le consentement des membres de cette Assemblée afin vée comme celle de la Gaspésie, en tout respect pour la de présenter la motion suivante: «Que l’Assemblée côte de Beaupré qui est un endroit relativement plus nationale souligne la Journée internationale pour l’éli­ prospère. mination de la discrimination raciale tenue le 21 mars • (16 heures) • dernier et la Semaine de solidarité avec les peuples en Si on peut permettre à une entreprise gaspé- lutte contre le racisme et la discrimination raciale sienne de naître et prospérer dans des marchés étran­ tenue entre les 21 et 28 mars sous l’égide des Nations gers sans nuire d’aucune manière à des producteurs unies.» locaux, je pense que les mots «concurrence déloyale» dans la bouche de notre collègue et ami sont largement Le Président: Est-ce qu’il y a consentement? abusifs. Alors, M. le ministre. 114 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 1996 M. André Boisdair la célébration du 21 mars à la Maison de la culture Frontenac, des jeunes Québécois de diverses origines en M. Boisdair: Est-ce que je dois, je présume, secondaire V à l'école Saint-Luc, en venant produire un déposer la... Il n'y a pas de lutrin. spectacle d'improvisation et de musique rap, nous ont M. le Président, je sais que le 21 mars est passé, bien démontré comment ce mélange peut être heureux, mais je voudrais m'assurer que cette Semaine de solida­ mais surtout comment il peut être créatif. rité et que cette Journée internationale ne soient pas Le gouvernement du Québec, donc, condamne passées sous silence. sans réserve le racisme et la discrimination raciale sous Vous le savez certainement, et je pense aussi que toutes ses formes. La Charte des droits et libertés de la tous les membres de cette Assemblée le savent, que cette personne du Québec, promulguée en 1975, reconnaît à Journée a été instituée par les Nations unies afin de tous les individus le droit au plein exercice de ses droits, commémorer le souvenir du massacre de 60 personnes à le droit au plein exercice de ses libertés. Aucune distinc­ Sharpeville, en Afrique du Sud, lors d'une manifestation tion, aucune exclusion ou préférence ne peut entraver pacifique contre l'apartheid. Le 21 mars vise à souligner l’expression de ce droit, notamment celles fondées sur la les efforts des peuples pour éliminer le racisme. Généra­ race, la couleur, la religion ou l'origine ethnique. Une lement, le racisme est un mot qu'on n'aime pas utiliser, déclaration gouvernementale, d'ailleurs ratifiée en 1986, car on a l'impression d'exagérer la situation. Pourtant, invite tous les ministères et tous les organismes à se dans plusieurs sociétés, des symptômes d'intolérance et conformer aux exigences de la Charte. C’est donc prin­ des signes de racisme peuvent émerger. cipalement à travers des mesures visant le rapproche­ Au Québec comme ailleurs, nous ne sommes pas ment, la participation, le respect des droits, la responsa­ à l'abri de l'expression de préjugés et de l’entretien de bilisation de tous les citoyens, de toutes les citoyennes certaines formes de racisme, de discrimination et de et, surtout, l'intégration des immigrants que le gouver­ xénophobie. Ces phénomènes ne se manifestent cepen­ nement a choisi jusqu’à présent de lutter contre la discri­ dant pas toujours ouvertement. Ici comme ailleurs, des mination raciale. préjugés raciaux dans différents secteurs de notre société Maintenant, il nous faut aussi, pour lutter effica­ sont bien présents. Des récentes recherches ont fait état cement contre le racisme et la discrimination, soutenir de certains actes de discrimination raciale dans les do­ plus que jamais, particulièrement dans un contexte éco­ maines de l’emploi, et particulièrement aussi dans le nomique difficile, la participation. Voilà, M. le Prési­ domaine du logement. dent, un engagement de notre gouvernement. Dans cette Tous ici, nous conviendrons qu’il est essentiel veine, en participant à l'Année de la tolérance des Na­ d’éliminer l'ensemble des entraves à la pleine participa­ tions unies, en 1995, le gouvernement du Québec a tion aux différents aspects de la vie sociale qui peuvent clairement indiqué sa conviction qu’une démarche de émerger au sein de certaines institutions sur la base des tolérance peut permettre de mieux vivre ensemble. Cet différentes caractéristiques, que ce soit la couleur, l’ori­ événement, d'ailleurs, a réuni différents partenaires gine ethnique ou nationale d'une partie de la population. ayant à coeur le développement, la solidarité au sein de Il est aussi, me semble-t-il, essentiel d’utiliser la société québécoise. J'ai d'ailleurs, tout à l'heure, l’ensemble des moyens que la technologie met à notre déposé le bilan de cette participation. La sensibilisation disposition pour contrer les manifestations d'intolérance, de la population à une approche de la tolérance et la pour contrer les manifestations de racisme. La violence promotion des valeurs communautaires de respect, de raciste est, heureusement, plutôt marginale au Québec. responsabilité, de dialogue et d'ouverture face aux diffé­ On ne doit pas pourtant banaliser ce phénomène. Présen­ rentes composantes de la société constituent des moyens tement, il y a de la propagande raciste qui est véhiculée pour développer un climat de paix sociale, mais aussi sur le réseau Internet. C’est pourquoi le ministère que je pour établir des relations souples et harmonieuses entre dirige a donc décidé de soutenir un projet de site antira­ tous les citoyens. ciste pour contrer le racisme sur tous les fronts et aussi Je voudrais, en conclusion, M. le Président, vous afin de nous permettre de sensibiliser la population. citer les propos du généticien et philosophe Albert Maintenant plus que jamais, il faut qu’on se le Jacquard, qui s’est adressé à un auditoire de jeunes lors dise avec conviction: la diversité, au Québec, constitue du lancement du site antiraciste sur Internet, le 21 mars pour nous une richesse incontournable, et la contribution dernier. M. Jacquard disait, et je le cite: «Ce qu’exprime de ceux et celles qui, à chaque jour, se joignent à la le racisme est essentiellement un mépris, mépris envers société d'accueil et participent au développement de cette telle personne, justifié non pas par ses caractéristiques, société est remarquable. D’ailleurs, les jeunes, cette mais par son appartenance à un groupe. L’origine de ce génération d’hommes et de femmes à laquelle j’appar­ mépris est une absence de confiance en soi, son aboutis­ tiens, sont sans doute ceux qui sont les plus habitués à sement est une destruction de soi-même. Qu’est-ce qu’un vivre dans ce bouillonnement de diversité. Cette généra­ être humain — demandait M. Jacquard — sinon un ani­ tion a bien compris que, lorsqu’on s’ouvre à la différen­ mal dont la particularité est d'être capable de se ce, lorsqu’on dialogue avec des gens qui sont différents construire lui-même grâce à l’apport des autres? Mon de nous, nous ne nous adaptons pas à eux, plutôt, nous "je" a surgi des "tu” qui m’ont été adressés. "Je" est fait nous enrichissons des différents apports. Ainsi, lors de de liens que je tisse avec les autres, mais le tissage de 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 115 ces liens ne se veut pas sans effort, sans crainte. L’autre racisme nous trouvent tous unis, d’un côté comme de est source à la fois de richesse et de danger. L’échange l’autre, dans notre volonté de les dénoncer, de les ne peut être fructueux s’il n’existe pas un minimum de condamner et ainsi affirmer notre attachement aux va­ confiance en soi et en l’autre.» leurs démocratiques et aux droits humains, M. le Prési­ Je crois, M. le Président, en effet, qu’en nourris­ dent. sant la peur, qu’en nourrissant la méfiance, les stéréoty­ Tous égaux devant la loi, un homme, un vote... pes et les préjugés, on s’empêche d’établir une relation ou une personne, un vote, devrais-je dire, voilà les deux au sens plein du terme. 11 ne s’agit pas donc seulement principes de base de notre vie démocratique, M. le de se côtoyer et de vivre les uns à côté des autres de Président. Aucune tolérance pour les distinctions basées manière civile, sans interaction, chacun sur son territoi­ sur la race ou les origines ethniques, aucune tolérance re, pour établir de véritables relations. pour la promotion des préjugés et de l’intolérance. Voilà • (16 h 10) • aussi deux principes de base quant à un attachement aux Mieux vivre ensemble, c'est d’abord apprendre à valeurs de respect des droits de la personne. Un engage­ respecter l’autre. Chaque société a la responsabilité ment de tous les élus à promouvoir l’acceptation de d’offrir des possibilités égales à tous ses citoyens, à notre pluralisme comme société et de travailler constam­ toutes ses citoyennes et de leur permettre de participer ment à la protection des droits de la personne est essen­ pleinement à la vie sociale, à la vie économique, à la vie tiel dans notre société, surtout en ces temps difficiles culturelle, institutionnelle et associative de la société tant sur le plan politique, tant sur le plan économique, québécoise. C’est avec l’apport de chacun de ses mem­ M. le Président. On sait que c’est là où les germes du bres qu’une véritable communauté solidaire peut se racisme et de la discrimination émergent, M. le Prési­ construire. Le Québec que je souhaite, que j’appelle dent. pour le présent, pour l’avenir, se fait dans l’appréciation La discrimination raciale est quelque chose qui ne de la diversité et de la pluralité, en établissant de vérita­ nous permet pas de nous contenter de nous donner bles liens entre des citoyens et des citoyennes de divers bonne conscience en votant une telle motion une fois par horizons. année, nous disant ainsi qu’il n’y a pas de problème Je voudrais, M. le Président, pour prévenir, pour chez nous. On sait, et le ministre le sait, que la discrimi­ contrer l’émergence du racisme, bien dire que le gouver­ nation raciale ou ethnique, elle se vit tous les jours et se nement ne peut non plus agir seul. Cela doit aussi deve­ manifeste de multiples façons et à plusieurs endroits. nir une responsabilité de tous, une responsabilité de Elle se manifeste à des endroits de travail, elle se mani­ toutes. Le problème est multiforme, est disséminé dans feste dans la recherche d'un logement, elle se manifeste différents secteurs de la société. Chacun a son rôle à dans la recherche d’un emploi, dans des contacts anony­ jouer. J’encourage à cet effet l'ensemble des citoyens à mes que les gens ont entre eux, etc., M. le Président. affirmer leur tolérance zéro à l’égard de tout acte de Nous n’avons pas le droit de nous boucher les yeux et discrimination et de racisme et à établir entre eux des les oreilles pour ne pas entendre ou voir des choses qui liens et échanges empreints de réciprocité et de respect nous troublent et encore moins de s'empêcher de parler mutuel. pour dénoncer et condamner des gestes ou des paroles J'invite donc, M. le Président, tous mes collè­ inacceptables. gues à voter en faveur de cette motion. Je vous remer­ cie. Motion d’amendement Le Président: Merci, M. le ministre. Alors, je C’est ainsi, M. le Président, que je présente la cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion. motion d’amendement suivante à la motion du ministre M. le député. afin que nous tous ici, en cette Chambre, puissions ensemble démontrer que, même quand c’est dans notre M. Christos Sirros propre cour, on n'hésite pas à dénoncer la discrimina­ tion, les préjugés et la promotion de l'intolérance. Et, M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. M. M. le Président, je déposerais l’amendement suivant: le Président, effectivement, chaque année depuis mainte­ Ajouter ce qui suit après les mots Nations unies: «et que nant un bon nombre d'entre elles, on adopte ici, en cette cette Assemblée se dissocie formellement et condamne Chambre, une motion similaire en mémoire, au début, les propos tenus par l’ex-premier ministre du Québec, de ceux qui sont morts à Sharpeville. C’est venu aussi M. , le soir du référendum, concernant symboliser tous les efforts qu'on doit tous et chacun le résultat référendaire et les ethnies». faire pour que jamais nos sociétés dans lesquelles on évolue n’arrivent là où d'autres ont vu des choses arri­ Le Président: À l’ordre, s’il vous plaît! À l’or­ ver, tel qu’à Sharpeville. dre, s’il vous plaît! D’un côté comme de l’autre, M. le Président, Alors, je suspends les travaux quelques instants personne n’a jamais hésité le moindre instant soit à pour vérifier la recevabilité, d’abord, de la motion présenter ce genre de motion, soit à parler en faveur de d’amendement du député de Laurier-Dorion. Le prési­ l’adoption d’une telle déclaration. La discrimination et le dent va délibérer dans la salle des drapeaux. Alors, je 116 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 vous demanderais de respecter le décorum. Le président intervention en présentant son amendement. Donc, va sortir par l’entrée principale et, à ce moment-là, les l’intervention était terminée. Quant à celle de M. le députés pourront vaquer à leurs occupations. député de... (Suspension de la séance à 16 h 16) Le Président: Alors, je m’excuse auprès de mes collègues et du député de Laurier-Dorion. Effective­ ment, c’est l’erreur du président, et je pense que le (Reprise à 16 h 24) débat se termine par la présentation de la motion d’amendement. Le Président: Alors, veuillez vous asseoir. Mise aux voix Décision du président sur la recevabilité Alors, il ne me reste qu’à présenter aux voix cette La proposition d’amendement du député de motion. Est-ce que cette motion est adoptée? Laurier-Dorion vise à modifier ou ajouter un élément à la motion principale. Alors, je voudrais d'abord relire la Des voix: Adopté. motion principale: «Que l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale pour l'élimination de la discri­ Le Président: Adopté. Très bien. M. le député mination raciale tenue le 21 mars dernier et la Semaine de Laurier-Dorion. de la solidarité avec les peuples en lutte contre le ra­ cisme et la discrimination raciale tenue entre les 21 et 28 M. Sirros: Puis-je solliciter le consentement de mars sous l’égide des Nations unies.» tous ces membres qui viennent de voter pour l’autre Le texte de la motion d'amendement du député motion pour qu’on puisse aussi adopter cette motion qui de Laurier-Dorion se lit comme suit: «Que cette Assem­ nous concerne plus directement, étant des élus? «Que blée se dissocie formellement et condamne les propos cette Assemblée se dissocie formellement et condamne tenus par l’ex-premier ministre du Québec, M. Jacques les propos tenus par i’ex-premier ministre du Québec, Parizeau, le soir du référendum, concernant le résultat M. Jacques Parizeau, le soir du référendum, concernant référendaire et les ethnies.» En fait, j'aurais dû ajouter le résultat référendaire et les ethnies.» «et que cette Assemblée», c’est-à-dire que le député de Laurier-Dorion nous propose d’ajouter à la motion Des voix: Non. principale le texte qu’il a présenté. L’article 197 concernant les amendements est Le Président: Est-ce qu’il y a consentement assez clair: «Les amendements doivent concerner le pour... même sujet que la motion et ne peuvent aller à l’encon­ tre de son principe. Ils ne visent qu’à retrancher, à Des voix: Non. ajouter ou à remplacer des mots.» À l’évidence, la pro­ position d’amendement du député de Laurier-Dorion Le Président: Alors... À l’ordre, s’il vous plaît! présente un sujet différent de la motion principale et, La motion du député de Laurier-Dorion n’a pas été dans ce sens-là, compte tenu du texte de l’article 197 de secondée, alors nous allons passer maintenant... Elle n’a notre règlement, il s'agit d’une motion qui est irreceva­ pas été... Je m’excuse, elle n’a pas eu le consentement ble. Le député de Laurier-Dorion peut toujours présenter nécessaire pour être débattue. Voilà! le texte de sa motion comme une autre motion sans Alors, maintenant je reconnais le député de Saint- préavis un peu plus tard soit dans cette séance, soit dans Hyacinthe. M. le député de Saint-Hyacinthe, toujours une séance subséquente. aux motions sans préavis. Alors, je voudrais demander au député de Laurier- Dorion: Est-ce qu’il avait complété son intervention sur la Souligner le courage et la détermination motion principale? Alors... de MM. Bernard Voyer et Thierry Petry lors de leur expédition au pôle Sud M. Sirros: Si vous aviez accepté l’amendement, M. le Président, c’aurait été sur l’amendement. Comme... M. Dion: M. le Président, je sollicite le consente­ ment des membres de cette Assemblée afin de présenter M. Bélanger: M. le Président... la motion suivante: «Que l’Assemblée nationale souligne le courage et la détermination dont ont fait preuve MM. Le Président: À l’ordre! M. le leader du gou­ Bernard Voyer et Thierry Petry lors de leur expédition vernement. au pôle Sud.» M. Bélanger: Question de règlement, M. le Pré­ Le Président: Alors, je comprends qu’il y a sident, ou... De par ma compréhension, il a fini son consentement pour la présentation de cette motion. M. le intervention. M. le député de Laurier-Dorion a fini son député de Saint-Hyacinthe. 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 117 M. Léandre Dion ment de ce courageux périple fait de MM. Petry et Voyer les dixième et onzième explorateurs depuis le M. Dion: Oui. M. le Président, au début de Norvégien Amundsen à réussir à traverser du continent janvier dernier, deux des nôtres, Bernard Voyer et Antarctique jusqu'au pôle Sud en autonomie totale. La Thierry Petry, réalisent un rêve absolument exception­ réalisation de cette expédition est, à juste titre, fascinan­ nel, ils arrivent au pôle Sud à pied. Soixante-trois jours te, mais irréalisable sans l’entraînement et la préparation d'expédition par des températures de -40 °C et des vents technique qui ont duré trois ans. Détermination et cou­ atteignant souvent 100 km à l’heure, 1 500 km de mar­ rage sont, sans contredit, des qualificatifs appropriés che dans la neige et sur la glace, tirant un traîneau de pour ces messieurs. Je salue cet exploit hors du com­ 170 kg, c'est un exploit que Bernard Voyer et Thierry mun, qui constitue une preuve éloquente de motivation, Petry sont les neuvième et dixième à réaliser, exploit de force et de bravoure pour les jeunes comme pour les plus rare que celui de marcher sur la lune, parce qu'ils moins jeunes du Québec et du reste du monde. Merci. sont plus nombreux, ceux qui ont marché sur la lune. Et ceux qui, comme moi, ont eu la chance d’entendre Une voix: Bravo! Bernard Voyer parler de son voyage intérieur au bout de son rêve en sont ressortis grandis par ces appels aux Le Président: Alors, est-ce qu’il y a d’autres sentiments les plus nobles qui nous habitent, parce que, intervenants sur cette motion? pour arriver au pôle Sud à pied, il faut, comme le dit Bernard Voyer lui-même, passer par au-dedans de soi, il Mise aux voix faut y être déjà par la vision, par la confiance et par la détermination. En effet, ce voyage, il a été longuement Alors, je comprends que cette motion est adop­ préparé par des expéditions nombreuses et variées, dont: tée? en 1990-1991, expédition à ski en terre de Baffin, dans l'Arctique canadien; en 1992, traversée intégrale de l’ile Des voix: Adopté. Ellesmere, dans l'Arctique canadien; en 1993, premier Québécois à atteindre le pôle Nord magnétique et, en Le Président: Et vous permettrez au président de mai 1995, premier Canadien à traverser le Groenland à l'Assemblée nationale, qui ne peut pas intervenir dans le pied. débat, de se joindre à cette motion, puisque M. Voyer • (16 h 30) • était un citoyen du comté de Borduas il y a quelque Alors, en janvier 1996, enfin, il réalise, en temps. compagnie de Thierry Petry, le rêve qu’il porte en lui depuis longtemps et pour lequel il s’était soigneusement Des voix: Ha, ha, ha! préparé: gagner le pôle Sud à pied. Par son exploit, Bernard Voyer nous enseigne qu'il ne faut pas craindre Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres motions d'avoir un rêve, un grand rêve, qu’il faut faire confiance sans préavis? M. le député de Saint-Laurent. à ses rêves, qu’il faut prendre les moyens adéquats pour les réaliser et qu'il faut avoir le courage d’aller jusqu'au M. Cherry: Merci, M. le Président. Je sollicite bout de son rêve, parce que le succès, il est là, à portée le consentement de cette Chambre pour déposer la mo­ de main de ceux qui savent aller jusqu’au bout d'eux- tion suivante: mêmes. Aussi, je demande à l'Assemblée nationale de «Que l'Assemblée nationale accepte unanimement féliciter unanimement, comme ça s'est produit tout à et respecte le résultat du référendum du 30 octobre l’heure, MM. Bernard Voyer et Thierry Petry pour leur dernier en réponse à la question suivante qui a été reje­ généreuse contribution à la grandeur du peuple québé­ tée démocratiquement: "Acceptez-vous que le Québec cois. devienne souverain, après avoir offert formellement au Canada un nouveau partenariat économique et politi­ Le Président: M. le député de Papineau, mainte­ que... nant. Des voix: Oui, oui, oui. M. Norman MacMillan M. Cherry: ...dans le cadre du projet de loi sur M. MacMillan: Merci, M. le Président. Je joins l’avenir du Québec et de l’entente signée le 12 juin ma voix à celle de mon collègue de Saint-Hyacinthe car 1995?".» je tiens à souligner à mon tour la détermination et le courage dont ont fait preuve MM. Bernard Voyer et Des voix: Oui, oui. Thierry Petry. Atteindre le pôle Sud en ski, en parcou­ rant 1 500 km en 63 jours, au rythme de 11 heures par Le Président: À l’ordre! Est-ce qu'il y a consen­ jour, en affrontant une température pouvant même at­ tement pour la présentation de cette motion? teindre jusqu’à -89 °C avec les vents, c'est toute une expédition qui mérite notre admiration. L'accomplisse­ Des voix: Non, non. 118 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 1996 Le Président: Il n’y a pas... Est-ce qu’il y a période des questions. Est-ce qu'il est de l’intention du d’autres motions sans préavis? gouvernement de déposer devant les membres de cette Assemblée nationale cet important document? Une voix: Non. Le Président: M. le leader du gouvernement. Le Président: Non? M. Bélanger: M. le Président, dès que ce docu­ Avis touchant les travaux des commissions ment sera disponible, à ce moment-là, je suis certain que le premier ministre jugera si, oui ou non, il devra, dans Alors, nous allons maintenant passer aux avis les plus brefs délais, le déposer. Alors... touchant les travaux des commissions. Je vous avise que la commission de l'Agriculture, des Pêcheries et de Le Président: Très bien. À cette étape-ci, je l'Alimentation... Et je demanderais aux collègues dépu­ voudrais rendre... M. le leader de l’opposition. tés de quitter en silence pour que le président puisse faire les avis correctement. Alors, je reprends: Je vous M. Paradis: De façon à ce qu’on se comprenne avise que la commission de l'Agriculture, des Pêcheries bien, le leader du gouvernement a stipulé que, dès que et de l'Alimentation se réunira aujourd’hui, après les le document sera disponible... Suivant le bureau du affaires courantes, pour une durée d'une heure, à la salle premier ministre, il serait disponible depuis le 15 mars Louis-Joseph-Papineau, afin d'entendre le sous-ministre dernier. Est-ce qu'on peut avoir l'engagement du leader de l'Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation dans du gouvernement qu’il fera les efforts nécessaires pour le cadre de la Loi sur l’imputabilité des sous-ministres et que le document soit déposé à l’Assemblée nationale des dirigeants d’organismes publics. dans les meilleurs délais? Je vous avise également que la commission du budget et de l’administration se réunira en séance de tra­ Le Président: M. le leader du gouvernement. vail demain, jeudi, le 28 mars, de 10 heures à 13 heures, à la salle RC. 161 de l'hôtel du Parlement. M. Bélanger: Il est évident qu’en tant que leader Finalement, je vous avise que la commission du gouvernement je vais m’informer auprès du cabinet de l'Éducation se réunira demain, le jeudi 28 mars, de du premier ministre pour savoir quand ce document sera 10 heures à 13 heures, à la salle Louis-Joseph- disponible. Et, à ce moment-là, évidemment, nous pro­ Papineau, afin de procéder à un mandat d'initiative sur céderons dans les meilleurs délais. la question des nouvelles technologies en éducation. Le Président: Je voudrais juste vous rappeler, Renseignements sur les travaux de l’Assemblée MM. les leaders, l'article 86 concernant les renseigne­ ments sur les travaux de l'Assemblée. Renseignements Maintenant, aux renseignements sur les travaux par le leader du gouvernement: «Le leader du gouverne­ de l’Assemblée, je solliciterais le consentement pour ment peut, d’office ou à la demande d'un député, com­ déroger aux articles 297 et 298 du règlement concernant muniquer à l'Assemblée des renseignements sur ses le moment de l'annonce et celui de la tenue des interpel­ travaux. Les demandes de renseignements doivent porter lations afin que l'interpellation du vendredi 29 mars sur des affaires inscrites au feuilleton.» Alors, ce qui 1996 porte sur le sujet suivant: la situation du transport n'est pas inscrit devrait faire l'objet de questions à la au Québec. M. le député de Pontiac s’adressera alors au période des questions. Si les affaires sont inscrites au ministre des Transports. Ça va? Est-ce qu’il y a consen­ feuilleton, à ce moment-là, les leaders peuvent s'échan­ tement? ger de l'information. M. le leader de l'opposition. Une voix: ... M. Paradis: ...M. le Président, mais, sauf er­ reur, il y avait un projet de loi de déposé concernant la Le Président: Alors, il y a consentement. Main­ double rémunération. Le premier ministre, quant à lui, y tenant, avant de passer aux affaires du jour, je vou­ a fait référence dans le discours du trône qu’il a pro­ drais... M. le leader de l'opposition officielle? noncé ici même, à l’Assemblée nationale. Donc, c’est un sujet d’actualité qui, s'il n’est pas inscrit aujourd’hui au M. Paradis: Oui, un renseignement sur les feuilleton, était inscrit au feuilleton discours du trône, travaux de la Chambre, M. le Président. Comme mon avant-hier. bon ami, le leader du gouvernement, m'a invité à procé­ der à ce moment-ci plutôt qu'au moment de dépôt de Le Président: Je comprends, mais, dans la me­ documents, un ou l’autre pouvait être correct, je res­ sure où ce n’est pas inscrit dans le feuilleton du jour, pecte son choix... Le bureau du premier ministre a vous avez actuellement une période de débat sur le informé la presse et le public qu’il recevrait, le 15 mars message inaugural qui vous permet de questionner le courant, un rapport sur la double rémunération. gouvernement et d’interpeller le gouvernement à cet J’adresse au gouvernement la même question qu’avant la égard-là. 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 119 Alors, à ce moment-ci, je voudrais rendre... M. Certes, la loi 198 crée des obligations pour les le leader du gouvernement. commissions parlementaires. De surcroît, comme il s’agit d’obligations qui émanent de la loi, l’Assemblée M. Bélanger: Juste, M. le Président, pour rap­ ne pourra y déroger ou s’y soustraire d'aucune façon. peler au leader de l’opposition que, évidemment, pour Toutefois, les commissions ont toute latitude requise en que des projets de loi qui ont été déposés lors de la ce qui a trait à l’organisation de leurs travaux relatifs dernière session apparaissent à cette session, il sait, aux mandats découlant de la loi 198. Ce sont les com­ j’en suis certain, que ça prend une motion qui peut missions qui décident quel ministre, quel sous-ministre être déposée dans un délai, je pense, qui est de trois ou dirigeant d’organisme elles vont entendre et à quel jours après la fin du débat sur le discours d’ouverture. moment ils vont être convoqués. En ce sens, les mandats Donc, nous aurons tout le loisir, du côté du gouverne­ découlant de la loi 198 peuvent être qualifiés de mandats ment, à ce moment-là, dans le temps opportun, de législatifs d’initiative ou de mandats de quasi-initiative. déposer cette motion dans laquelle, évidemment, appa­ Par ailleurs, comme la loi 198 ne donne aucun raîtra probablement le projet de loi qui est mentionné. pouvoir ou devoir particulier au président de l’Assem­ Mais, à ce moment-ci, comme vous l’avez mentionné, blée nationale, celui-ci ne peut agir à titre de coordonna­ M. le Président, le projet de loi n’est pas au feuille­ teur des travaux des commissions pour ce qui est de ton. l’application de cette loi. En vertu du paragraphe 116.2° du règlement, c’est la commission de l’Assemblée natio­ M. Paradis: M. le Président, je comprends tout nale qui a le pouvoir de coordonner les travaux des ça. Et, ça, tel que vient de l’exprimer le leader du gou­ autres commissions. Ce pouvoir ne constitue toutefois vernement, ça nous mène après Pâques. Il y a deux pas un moyen pour la commission de l’Assemblée natio­ façons de jouer la transparence. Il y a la façon de dire: nale de saisir les commissions de mandats. Selon le Quand c’est disponible, comme il a répondu tantôt, on le règlement, la saisine des commissions se fait soit par rend public dès que c’est disponible. Ça, c’est une façon l’Assemblée soit par les commissions elles-mêmes. transparente. Il y a l’autre façon où on dit: On utilise le Enfin, le député de Verdun a exprimé le désir que règlement jusqu’à sa limite, et on tient les documents la présidence informe l’Assemblée lorsque les commis­ cachés. Et il a le droit de le faire. sions auront réalisé leur mandat découlant de la loi 198. • (16 h 40) • À cet égard, je lui rappelle que l’Assemblée sera néces­ Le Président: Alors, je vous rappelais simple­ sairement informée à chaque fois qu’un tel mandat sera ment, MM. les leaders, que le règlement prévoit que, réalisé, puisque le rapport de la commission doit obliga­ quand ce n’est pas au feuilleton, on procède autre­ toirement être déposé à l’Assemblée en vertu de l'article ment. 174 du règlement. Alors, voilà, M. le député de Verdun, ce qui Décision du président sur l’application par concerne la demande de directive que vous m’aviez les commissions parlementaires de la Loi sur formulée. la réduction du personnel dans les organismes Nous en sommes maintenant aux affaires du publics et l’imputabilité des sous-ministres jour... M. le député de Verdun. et des dirigeants d’organismes publics M. Gautrin: Une question. M. le Président, je Cela étant dit, cela étant surtout complété, crois que votre directive devrait être adaptée en fonction comme échange, je vais maintenant répondre au député de la loi 198, telle qu’elle a été amendée par le présent de Verdun qui, lors de la séance du 12 mars dernier, a gouvernement. Vous avez fait référence aux articles 1 et demandé à la présidence d'informer l’Assemblée sur 2. Ils ont été abrogés, mais, à mon sens, ça ne change l’application par les commissions de la Loi sur la réduc­ pas l’esprit de votre direction. Mais probablement, pour tion du personne] dans les organismes publics et l’impu­ la rendre conforme à la loi qui a abrogé les articles 1 et tabilité des sous-ministres et des dirigeants d’organismes 2, il serait bon que vous ayez une directive qui corres­ publics, mieux connue sous le nom de loi 198. En cette ponde à la loi actuelle. matière, le député de Verdun est d'avis que la prési­ dence a le devoir de coordonner les travaux des commis­ Le Président: Bien, écoutez, M. le député, com­ sions, et c’était sa demande de directive. prenant que vous ne contestez pas la décision du prési­ Alors, la loi 198 confie aux commissions divers dent mais que vous lui proposez de voir s’il n’y aurait mandats de contrôle parlementaire en ce qui a trait à la pas lieu de la compléter par des éléments additionnels, je réduction du personnel et à la gestion administrative vous donne grâce et on verra s’il y a lieu, effectivement, dans les organismes publics, tel que défini aux articles 1 de corriger ou de modifier la directive. et 2 de la loi. À cet égard, la loi 198 oblige les commis­ sions à convoquer au moins une fois par année, dans le Une voix: C’est seulement de la terminologie. respect de leur champ de compétence, soit un ministre, soit un sous-ministre, soit un dirigeant d’organisme, Le Président: Voilà. Alors, nous nous compre­ selon la nature du mandat qu’ils exercent. nons. 120 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 Affaires du jour Maintenant, M. le Président, une vision en bref de notre région de l’Outaouais. Située dans le sud-ouest Affaires prioritaires du Québec, sur la rive nord de la rivière des Outaouais, encaissée entre l’Abitibi-Témiscamingue au nord-ouest, Reprise du débat sur le discours d'ouverture la région des Laurentides à l’est et la province de l’On­ et sur les motions de censure tario au sud, la région de l’Outaouais possède une topo­ graphie accidentée et diversifiée. Elle se compose no­ Maintenant, nous en sommes rendus aux affaires tamment de vallées, de collines, de rivières, de lacs et du jour, et, puisque nous en sommes au message inaugu­ de forêts. Sur le plan hydrographique, de nombreux ral du premier ministre, il s’agit d’une affaire prioritai­ cours d’eau sillonnent la région, dont un certain nombre re. Nous allons maintenant reprendre le débat sur le se déversent dans la rivière Gatineau, un affluent impor­ discours d’ouverture prononcé par M. le premier minis­ tant de la rivière des Outaouais. tre le 25 mars dernier et sur les motions de censure de Le cadre biophysique façonne tout autant le pay­ M. le chef de l’opposition officielle et de MM. les dépu­ sage que l’économie de l’Outaouais. Le couvert fores­ tés de Pontiac et de Notre-Dame-de-Grâce. tier, compte tenu de son envergure, constitue la princi­ Je suis maintenant prêt à céder la parole à un pale ressource naturelle de la région. Quant aux rivières, autre intervenant, M. le député de Papineau. elles ont historiquement contribué au développement de l’industrie forestière, favorisant le flottage et le transport M. Norman MacMillan du bois. L’activité agricole s’est développée essentielle­ ment au niveau des plaines et de leurs vallées, alors que M. MacMillan: Merci, M. le Président. J’in­ la multitude des lacs et les parcs de Papineau-Labelle et terviens aujourd’hui dans le cadre de la réplique au de la Gatineau génèrent pour leur part des activités discours du premier ministre prononcé le 25 mars der­ récréatives se rattachant à la chasse et à la pêche. nier. Sa position géographique adossée à l’Ontario, M. le Président, notre société vit présentement plus spécifiquement à la capitale nationale, fait en sorte de graves problèmes d’intégration au marché du travail, que l’Outaouais entretient des liens économiques privilé­ qui font en sorte d’exclure une part importante de la giés avec l’Ontario, une situation qui a aussi largement population. Cette exclusion engendre des coûts sociaux modelé et influencé le développement des activités éco­ et économiques énormes, qui entravent le devenir de nomiques de même que le peuplement et l’organisation toute la collectivité. Et plus encore, les problèmes so­ du territoire outaouais. ciaux à cette exclusion, comme la pauvreté, la violence, La région administrative de l’Outaouais se com­ la toxicomanie, touchent des groupes de plus en plus pose d’une communauté urbaine, la CUO, qui recense nombreux de la population et hypothèquent grandement les villes d’Aylmer, de Hull — sauf la partie ouest — de nos chances de se développer convenablement comme Gatineau, de Buckingham et de Masson, ainsi que quatre société. De même, on assiste impuissants au développe­ municipalités régionales de comté — les MRC — soit la ment d’une polarisation aiguë entre gens riches et pau­ MRC des Collines-de-l’Outaouais, de la Vallée-de-la- vres, travailleurs et sans emploi, employés qualifiés et Gatineau, la MRC de Papineau et celle de Pontiac, une non qualifiés. M. le Président, de surcroît, le marché du vaste région qui s’étend sur environ 33 000 km1. travail a tendance à accentuer cette polarisation, même Au niveau démographique, M. le Président, en parmi les gens en emploi. 1991, la population totale de la région était de 288 773 Pour les uns, les salaires sont bons et le temps personnes, une augmentation de l’ordre de 10,7 % supplémentaire ne manque pas. On travaille beaucoup, et depuis 1986. À elle seule, la CUO accapare 71 % de les nombreuses coupures de postes dues aux fusions ou cette population. D’ailleurs, son dynamisme démogra­ aux rationalisations d’entreprises font en sorte que les phique la distingue des autres régions du Québec, puis­ gens qui demeurent en poste voient leur tâche de travail que, entre les années 1981 et 1991, le nombre des nais­ augmenter en conséquence. Pour les autres, c’est plutôt sances a progressé de 27 % contre un mince 2 % pour la précarité, les saisonniers et l’instabilité qui prévalent. le Québec. Pour leur part, la situation des MRC varie Ce sont en quelque sorte les emplois qui sont habituelle­ considérablement. La MRC de la Vallée-de-la-Gatineau ment reliés au secteur tertiaire, liés à la consommation, a vu sa population décroître de 4 %, et celle de Pontiac secteur en progression actuellement. Issus de ces grou­ demeurer relativement stable, à 0,1 %, entre 1986 et pes, une multitude de personnes et d’exclus ne peuvent 1991. Les MRC de Papineau et des Collines connaissent participer pleinement à l’essor de la société, ce qui une croissance démographique avec un taux respectif de contribue d’autant à ralentir la croissance économique et 3,9 % et 42 % au cours de la même période. Quant à la sociale. D’emblée, nous ne pouvons nous résigner à population de la CUO, elle a progressé de 10,4 % pour croire, M. le Président, que c’est sur ces bases que sera s’établir à 201 480 personnes en 1991. construite la société de demain. Nous croyons que de • (16 h 50) • seulement gérer l’exclusion n’est tout simplement pas Au dernier conseil régional, ici, à Québec, les souhaitable ni rentable pour une société moderne comme conférenciers et surtout M. Johnson ont faire ressortir la nôtre. toutes les grandes réalisations du Parti libéral du 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 121 Québec. Ils ont montré à quel point on est collé à ce que À ce sujet, je me permets de faire un petit rappel à M. définit le Québec d’aujourd’hui. On a tous dans nos le premier ministre, M. Bouchard. Il a beau dire que le poches au moins une carte avec notre photo. La carte Canada n’est pas un vrai pays, il a déjà été le vrai am­ d’assurance-maladie, c’est le Parti libéral du Québec qui bassadeur d’un vrai pays. Et puis, avant de se présenter a fait cela. Et l’histoire du Québec n’a pas commencé en à la Chambre des communes, il avait dit mot à mot: «Je 1976. Le Parti libéral du Québec a été de toutes les suis un Canadien. Qui peut en douter? Je suis né Cana­ grandes batailles qui ont fait avancer le Québec. Et, dien et nous sommes Canadiens depuis 1636 au Québec. chaque fois que nous avons fait un nouveau pas ou Je suis fier d’être Canadien.» Il a également dit, à l’épo­ obtenu un autre succès, nous avons fait progresser tous que, que l’indépendance politique du Québec n’était plus les Québécois et Québécoises sans laisser personne ni une solution viable pour le Québec. Est-ce qu’on peut sur les côtes ni en arrière. On a fait tout cela parce que, demander au premier ministre d’en parler à son nouveau chaque fois, on ne s’est pas directement préoccupé de parti? l’État ou du gouvernement ou des institutions, on se En matière de finances publiques, le gouverne­ préoccupait du citoyen, des jeunes, des moins jeunes, de ment a été élu sur la promesse qu’il équilibrerait les ceux qui ne travaillent pas, de ceux qui pouvaient être comptes des opérations courantes en 24 mois. Ça fait un malades et de ceux qui l’étaient. Et ce qu’on a mis sur an et demi qu’ils sont là et un mois et demi que M. pied, chaque fois, c’est parce qu’on se demandait: Com­ Bouchard est assermenté comme nouveau premier minis­ ment allons-nous aider le citoyen du Québec? Comment tre, et on est à la veille d’entendre dire que, à partir du chaque individu va-t-il s’y retrouver? mois de septembre ou à la fin de novembre prochain... Pour nous, les citoyens ne sont pas des clients ou C’est une promesse qui va être réalisée deux ans plus des bénéficiaires de l’État, pour reprendre le vocabulaire tard, ils sont deux ans en retard, M. le Président. bureaucratique. Pour nous, du Parti libéral du Québec, Pourtant, on peut faire des choses en 18 mois. les citoyens sont les propriétaires de l’État. Les citoyens Quand M. Johnson était le premier ministre, on avait québécois sont propriétaires de leur gouvernement et de fait des choses en un mois et demi. En 1994, nous avons leur État. C’est cela qu’il faut avoir à l’esprit chaque mis 24 heures pour décider ce qu’on ferait avec l’Hôtel- fois qu’on prend des décisions, et ce sentiment est par­ Dieu à Montréal, cinq semaines pour la contrebande des tagé partout au Québec. cigarettes, huit semaines pour la Charte des droits des 11 faut discuter aussi de la place du Québec au contribuables et des mandataires du ministère du Reve­ Canada, de l’emploi et des finances publiques, de la nu, à peine 12 semaines pour régler le problème des santé, de l’éducation et, finalement, du Grand Montréal. garderies et attribuer 1 $ l’heure de plus aux éducatrices Notre choix, c’est de contribuer au développement du en garderie. On peut en faire, des choses, en un, deux et Québec et au développement du Canada dans un Québec trois mois. Imaginez en 18 mois, s’ils s’étaient donné la à l’intérieur du Canada. Ça, c’est la première optique de peine, au lieu de s’occuper de leur option. Au lieu de notre programme constitutionnel. Le Parti libéral du ça, il y a eu du marchandage référendaire et les études Québec est un parti résolument québécois, pas moins Le Hir. québécois que l'autre parti, et nos concitoyens, conci­ Tout d’un coup, après 18 mois d’inaction, c'est le toyennes, partout, veulent qu'on s’occupe de la question temps de couper. Ils coupent partout. Les ciseaux sont constitutionnelle, car ça les préoccupe. Ils sentent que le maniés aveuglément. On coupe de la même façon dans problème constitutionnel est un blocage qui détourne les programmes pour l’employabilité, dans l’aide socia­ l’énergie des gouvernements de s’occuper des problèmes le, dans la santé, dans l'éducation, dans l’asphalte. C’est de tous les jours, et il faut donc le régler. du pareil au même pour eux, des chômeurs ou des rou­ Le Parti libéral du Québec a toujours plaidé pour tes. Il doit pourtant y avoir des priorités. On a l’affirmation de notre identité, de l’autonomie du Québec 35 000 000 000 $ de revenus au gouvernement du Qué­ dans les champs qui le concernent et de la place qu’on bec, on peut en faire, des choses. Quand on a un budget doit occuper au Canada au fur et à mesure qu’il change. familial normal, qui a du sens, on ne coupe pas 5 % ou Nous nous sommes toujours consacrés à améliorer 10 % partout: 10 % dans la nourriture, 10 % dans l’union économique canadienne, à faciliter les échanges l'automobile, 10 % dans les vêtements, 10 % dans le à l'intérieur du Canada et sur la scène internationale. Je logement, 10 % dans les sorties de cinéma, 10 % dans vais vous rappeler une évidence. Il y a deux program­ les sorties au restaurant. Il y a des choses essentielles, mes constitutionnels au Québec: il y a le parti qui prône M. le Président, d’autres qui sont très utiles et d’autres, la brisure du pays, la désunion — c’est le Parti québé­ enfin, qui sont souhaitables. Et c’est la même chose cois et son option — et il y a un parti qui prône l’union, quand un gouvernement a des priorités. La priorité, pour le développement du Québec et du Canada à la fois par nous, c’est l’emploi, la santé et l’éducation. des Québécois et Québécoises qui sont des Canadiens et Le Parti libéral du Québec, quant à lui, parce Canadiennes en même temps — c’est le programme qu’il s’est penché et qu’il se penche sur l’avenir du constitutionnel du Parti libéral du Québec. Québec et des jeunes qui sont témoins de nos efforts et Et je dis, finalement, au gouvernement du Qué­ qui y participent, va remettre le citoyen au centre de nos bec de faire attention aussi dans le ton et dans le vocabu­ préoccupations. L’État ne doit pas être sauvé, comme dit laire. On a vu des exemples, depuis quelques semaines. M. Bouchard. Il faut sauver l’État, et, nous, on va 122 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 s’occuper de nos concitoyens et concitoyennes. C’est ça l’occasion de son assermentation, le 29 janvier dernier. que le Parti libéral du Québec doit faire et qu’on doit Parmi ces défis, celui qui occupe la première place est faire, parce que c’est la seule façon, en nous retournant de rendre à l’État québécois sa liberté de mouvement, de vers chacun des 7 000 000 de Québécois et de Québécoi­ lui redonner sa marge de manoeuvre, sa capacité d’in­ ses, de restaurer la cohésion sociale qui nous fait si venter et de voir grand. Et, pour atteindre cet objectif, il cruellement défaut. faut accentuer l'effort de redressement budgétaire pour Notre parti, M. le Président, le Parti libéral du éliminer ce déficit d’ici l'an 2 000 tout en agissant en Québec, a toujours été un parti de coalition, qui regarde faveur de l’emploi; tel est notre défi comme gouverne­ toujours vers l'avenir. Jamais le Parti libéral du Québec ment. n’a choisi de diviser les Québécois pour faire triompher Ce vaste programme interpelle directement le son option ou pour gagner des élections. Et, depuis près Conseil du trésor et son secrétariat. En effet, c’est à de 30 ans, le Parti québécois s’intéresse à ce qui nous nous qu'il incombe de susciter des propositions concrè­ divise entre Québécois, ou ce qui pourrait nous diviser tes pour renouveler les services publics pour les Québé­ entre Canadiens, ou ce qui pourrait nous diviser d'un cois. C’est au Conseil du trésor qu’il revient ensuite de groupe social à l’autre, ou d’un groupe d’âge à l’autre, s’assurer du réalisme financier des propositions des d’une région du Québec à l’autre. Merci, M. le Prési­ ministères et organismes, de les traduire dans le projet dent. de budget des dépenses et, enfin, d’en faire un suivi, rigoureux. Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le L’ampleur des changements requis est telle député de Papineau et critique de l’opposition en matière qu’elle exige des modifications profondes aux façons de de tourisme, sports et loisirs. Je cède maintenant la faire, aux processus de production et à l’organisation du parole à M. Jacques Léonard, président du Conseil du travail de tout le secteur public. Et, encore une fois, trésor, député de Labelle, ministre responsable de c’est aussi le Conseil du trésor qui est interpellé en l'Administration et de la Fonction publique, membre du premier lieu. En vertu de ses responsabilités en matière Comité des priorités, membre du Comité ministériel des d’encadrement de la gestion au sein du gouvernement, affaires régionales et territoriales. M. le député. c’est à nous qu’il revient de définir un nouveau cadre de gestion plus souple, axé davantage sur les résultats et qui M. Jacques Léonard permette aux stratégies de changement et d’adaptation de s’articuler dans l’ensemble du secteur public. M. Léonard: Alors, M. le Président, depuis déjà Cette reconception de notre cadre de gestion ne plus, maintenant, de 25 ans que j’oeuvre en politique, peut se faire en vase clos. 11 faut s’ouvrir aux expérien­ jamais je n’ai senti le Québec aussi déterminé à faire ces des autres gouvernements et s'y investir en concerta­ consensus sur son devenir et sur l’essentiel, et pas néces­ tion avec les ministères et organismes. Et, par ailleurs, sairement dans le sens de ce que vient de dire le député un nouveau cadre de gestion, bien qu’essentiel, n’est pas de Papineau. Enfin! suffisant pour provoquer le changement. 11 faut en être • (17 heures) • le porteur auprès des ministères et des organismes en les Mais j’ai eu le privilège, avant d’assumer mes supportant concrètement dans leurs efforts. Pour amor­ présentes fonctions, d’agir comme ministre au sein des cer ce virage, il faut très rapidement préciser les grandes gouvernements Lévesque et Parizeau, et maintenant au lignes de cette nouvelle vision du rôle du Trésor et de sein du gouvernement de M. Bouchard. J’ai pu, par son secrétariat et, ensuite, nous donner un plan d’action ailleurs, de mon poste de député en cette enceinte, ob­ et de nouvelles façons de faire. Donc, dans cette démar­ server de près les administrations Bourassa et celle du che, j’ai l’intention de jouer mon rôle de direction et chef actuel de l’opposition officielle. Jamais, durant d’orientation en associant étroitement mes collègues du toute cette période, je n’ai senti le Québec, ni le gouver­ Conseil. nement du Québec, si près du but, si près du triple but, Il y aura donc bientôt 25 ans que le Conseil du je dois dire, qui est le nôtre: la souveraineté du Québec, trésor lançait une nouvelle vision de la gestion gouverne­ la santé économique du Québec et l’assainissement, mentale. Un quart de siècle plus tard, une nouvelle comme un prérequis, de nos finances publiques. Cela génération est conviée à définir sa propre vision, une fait maintenant cinq mois que je préside le Conseil du vision adaptée aux enjeux et aux exigences d’au­ trésor. Je me rends compte, jour après jour, de la ri­ jourd’hui. Je vous invite donc à participer tous à cette chesse et de la diversité de l’expertise du personnel de entreprise. notre organisation. Le dévouement que j’ai senti chez Maintenant, M. le Président, il faut agir si l’on toutes les personnes avec qui j’ai pu entrer en contact au veut assurer l’avenir. Le gouvernement veut assurer cours de cette période m’encourage à aborder avec l’avenir des institutions et des services comme celui de confiance les défis que le Conseil du trésor doit relever ses citoyens qui font du Québec une société originale et au cours des prochains mois et des prochaines années. qui procure à tous la sécurité et le bien-être. Des Nous sommes, toutes et tous, conscients de finances publiques saines sont essentielles pour atteindre l’ampleur de ces défis. Le premier ministre les a décrits cet objectif, et c’est pourquoi l’élimination du déficit est avec éloquence dans le discours qu’il a prononcé à l’une des grandes priorités du gouvernement, parce 27 mars 1996 Débats de T Assemblée nationale 123 qu'elle permettra de rétablir l'équité envers les généra­ C'est avec la pleine conscience de la nécessité de tions futures, de redonner au gouvernement la marge de réaliser cet objectif d'éliminer le déficit que les crédits manoeuvre qui lui fait défaut et de restaurer un climat ont été préparés, et, ce faisant, nous progressons rapide­ qui soit favorable à l'investissement et à la création ment dans la solution d'un problème qui mine depuis d'emplois. trop longtemps notre capacité de bâtir une société plus Les crédits 1996-1997 illustrent cette détermina­ prospère et plus généreuse. Les choix à la base de ces tion à réussir ce redressement budgétaire. Ces crédits crédits s'inspirent de grands principes qui nous ont résultent d'une réduction des dépenses de programmes guidés tout au long de leur confection, soit celui de la deux fois plus importante que celle envisagée initiale­ responsabilité pour faire des choix difficiles, celui de ment, mais cela est fait de façon à atteindre l'objectif de l'efficacité pour rendre le secteur public plus perfor­ réduction de déficit fixé d'ailleurs la semaine dernière mant, celui de la transparence pour donner l'heure juste par consensus lors de la conférence socioéconomique. à la population et lui exposer les choix que nous faisons, C'est un effort budgétaire sans précédent de celui de l'équité parce que nous demandons des efforts à 2 200 000 000 $ auquel nous sommes conviés. Depuis tous les groupes de notre société, enfin, celui de la deux décennies, la persistance des déficits a engendré un solidarité parce que nos décisions ont été prises avec le endettement sans cesse croissant, année après année. Les souci de soutenir les plus démunis de notre société. dépenses d'intérêts sur la dette occupent une place tou­ Nous avons articulé nos choix autour de trois jours plus importante dans le budget de l'État. Le Qué­ grands axes: adapter de façon durable nos grands pro­ bec a pris un retard important sur la plupart des provin­ grammes, améliorer l'organisation du travail et diminuer ces canadiennes en matière de redressement des finances les coûts administratifs et, enfin, recentrer le rôle de publiques, continuant à dépenser à un rythme plus élevé l'État. La plupart de nos grands programmes ont été mis que ses voisins. Ainsi, entre 1990-1991 et 1995-1996, la en place dans la foulée de la Révolution tranquille, il y a croissance moyenne des dépenses de programmes du maintenant 30 ans. Notre société a changé, ainsi que Québec, 3,6 %, a été supérieure à celle des provinces l'économie, le marché du travail et nos conditions de vie canadiennes, qui est, elle, de 2,6 %. Pour faire un de tous les jours. Il est devenu impératif non seulement redressement à sa manière, le Québec doit agir mainte­ d'adapter nos services publics aux nouvelles réalités, nant. Tout retard nous entraînerait dans un enlisement mais de le faire d'une façon qu'ils puissent être soutenus budgétaire mettant en péril notre cohésion sociale. C'est à long terme. Et, compte tenu que près de 75 % des pourquoi, au plan des dépenses, les engagements pris dépenses de programmes du gouvernement se retrouvent passaient d'abord par un gel de ces dépenses de pro­ dans les secteurs de la santé, des services sociaux, de grammes, en 1995-1996, et ce résultat sera atteint, et l'éducation, de la culture et de la sécurité du revenu, il même davantage. Pour la première fois depuis au moins importe, en premier lieu, d'infléchir les coûts de ces 25 ans, les dépenses de programmes seront réduites. programmes de façon durable. Dans le secteur de la Les objectifs fixés dans le dernier budget pré­ santé et des services sociaux, la transformation du réseau voyaient, pour 1996-1997, une réduction de 579 000 000 $ se poursuivra et il y aura une révision de la gestion du au-delà des efforts requis pour geler les dépenses de pro­ programme de médicaments visant à favoriser une utili­ grammes. On sait maintenant que cela ne sera pas suffi­ sation plus judicieuse de ceux-ci et un meilleur contrôle sant. Les données rendues publiques récemment par le de leur coût. ministre des Finances indiquent que, depuis le dernier • (17 h 10) • discours sur le budget, un écart de 1 100000000$ s'est Dans le secteur de l’éducation, l’effort portera sur creusé dans les équilibres financiers. Cet écart découle de l'encadrement et les services administratifs de façon à l'impact de la conjoncture économique sur les revenus, de préserver les services directs aux étudiants. la révision à la baisse des bénéfices des sociétés d'État, Dans le secteur de la sécurité du revenu, une mais aussi de la volonté gouvernementale de ne pas haus­ révision majeure prendra place en 1996-1997, notam­ ser le taux de la taxe de vente du Québec. Il fallait donc ment dans le but de favoriser l'intégration à l’emploi. envisager des efforts additionnels du côté des dépenses, et Les autres programmes seront aussi revus. Cette c’est ce que nous avons fait. L'ampleur des mesures de année, ce sera le cas de plusieurs, notamment du régime gestion budgétaire, au-delà du gel des dépenses de pro­ d'aide juridique, dans un objectif de maintien des servi­ grammes, est portée de 579 000 000 $ à 1 079 000 000 $. Il ces essentiels et de diminution des coûts. En matière s'agit d'un effort sans précédent. Les mesures d'économie correctionnelle, il y aura aussi diminution de la capacité réalisées sur les dépenses de programmes, encore une fois, carcérale et recours accru à la communauté et aux res­ sont évaluées à 2245000000$, soit 1 166000000$, sources légères pour favoriser la réinsertion sociale. pour fixer les dépenses au niveau où elles étaient l'an Le gouvernement doit s’assurer aussi que la plus dernier, et une réduction additionnelle des dépenses de grande partie possible de chaque dollar dépensé se tra­ 1 079000000$. Et les gestes du gouvernement font en duise en services aux citoyens. Il doit donc simplifier ses sorte que, pour la première fois depuis un quart de siècle, structures, réduire ses coûts administratifs de même que les dépenses totales, incluant le service de la dette, vont rechercher une organisation du travail moins coûteuse et diminuer, et cela, de 1 200000000$, soit une baisse de plus productive. L’approche de concertation que notre 2,8 %. gouvernement a mise de l'avant dans le domaine des 124 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 19% relations de travail a permis le renouvellement, en 1995, En conclusion, M. le Président, le danger qui de la plupart des conventions collectives applicables dans nous guette ne se trouve pas dans les changements que les secteurs public et parapublic. Les modalités négo­ nous devons faire. Il résiderait plutôt dans l’immobilis­ ciées prévoient une flexibilité accrue de l’organisation du me, dans le refus du changement ou, encore, dans le travail dans l’ensemble du secteur public, flexibilité sur syndrome «pas dans ma cour». laquelle le gouvernement compte pour réaliser ses objec­ Le budget de dépenses 19%-1997 témoigne de la tifs. détermination du gouvernement à éliminer le déficit. Il L’ensemble des efforts des ministères et organis­ s’agit d’un effort sans précédent de 2 200 000 000 $ qui mes visant à revoir les façons de faire se traduisent par permet, pour la première fois depuis 25 ans, de dimi­ une réduction des effectifs requis de 1 948 postes équi­ nuer les dépenses totales du gouvernement. valents en temps complet, sans toucher aux droits des L’élimination du déficit exige un effort qui n’in­ personnes. De la même manière, les dépenses de fonc­ combe pas seulement au gouvernement et à l’Assemblée tionnement des secteurs public et parapublic seront nationale, mais chaque citoyen doit se sentir interpellé et réduites de plus de 500 000 000 $, dont un montant de chaque député doit aussi se sentir interpellé. 150 000 000 $ reste à être identifié par les ministères, organismes et réseaux, mais que chacun connaît. Les Des voix: Bravo! dépenses de transport et de communications, de services professionnels et administratifs, d’entretien et de répara­ Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le tion, de fourniture et d’approvisionnement sont notam­ député de Labelle et président du Conseil du trésor. Je ment visées. cède maintenant la parole à la députée de Chapleau et De façon à faciliter l’introduction de nouveaux critique officielle de l’opposition en matière d’action modes d’organisation du travail, des mesures d’accom­ communautaire. Mme la députée. pagnement seront introduites. Au nombre des mesures envisagées, il y a le renforcement du cadre de gestion Mme Claire Vaive des mesures de départ assisté, la réévaluation du niveau des ressources occasionnelles ou contractuelles ainsi que Mme Vaive: Merci, M. le Président. U me fait de nouveaux accommodements en matière d’aménage­ plaisir aujourd’hui de répliquer au discours inaugural ment du temps de travail. Ces mesures additionnelles prononcé par le premier ministre lundi dernier. Il s’agit, réduiront des coûts de main-d’œuvre de la fonction à première vue, d’un discours fort étoffé qui vise plu­ publique, entraînant une économie de 100 000 000 S qui sieurs champs d'action gouvernementale à la fois. Pour­ correspond à 2 500 ETC. tant il n’en est rien. Quand on y regarde de plus près, Un important allégement des structures gouver­ rien de concret n’émane de ce discours et beaucoup nementales sera réalisé par l’abolition et la fusion d’or­ d’éléments ne sont que du déjà vu. L'incertitude politi­ ganismes gouvernementaux. Une réduction des dépenses que continue de planer au Québec car le premier minis­ de 25 000 000 $ est prévue à cet effet, et le gouverne­ tre n'a pas levé cette hypothèse, et cela reste un frein à ment annoncera chaque mouvement à cet égard au fur et l’investissement et à l’enthousiasme collectif. à mesure qu’il sera prêt à agir. Les orientations qu’entend donner le nouveau Enfin, M. le Président, il nous faut recentrer le premier ministre à son gouvernement sont essentielle­ rôle de l’État. Depuis les années soixante, encore une ment déjà connues des parlementaires et de la popula­ fois, l’État québécois a élargi le champ de ses activités tion: lutte au déficit tous azimuts et pistes d’action afin et en a exercé certaines qui ne relèvent pas de façon de briser la morosité qui plane sur le Québec. aussi convaincante des missions essentielles de l’État. En ce qui a trait au déficit, le récent sommet sur Dans un contexte de rareté des ressources, des remises l’avenir social et économique du Québec aura permis à en question s’avèrent nécessaires. C’est ce que le gou­ l’actuel premier ministre de revenir sur le leitmotiv que vernement a choisi de faire par exemple, l’aide finan­ nous connaissions au Parti québécois à l’élection de cière aux entreprises fait l’objet d’une remise en ques­ 1994, c’est-à-dire de ramener le solde des opérations tion qui se traduit par une importante réduction des courantes à zéro en deux ans. Cet objectif ne cesse pas crédits qui y sont alloués. Les activités de représentation d’étre reporté et rallongé. Alors qu’en septembre 1994 du Québec à l’étranger seront réduites substantiellement tout semblait si facile à régler pour le Parti québécois, pour les réaliser à partir du Québec. maintenant cela devient un exercice douloureux que l’on Il y aura, dans le secteur de la santé et des servi­ doit étendre sur plusieurs années afin de ne pas perdre ces sociaux, un resserrement de la définition de certains des alliés précieux. De toute façon, cette décision services assurés afin de ne plus couvrir le coût des d’équilibrer les finances publiques en quatre ans revient services qui ne sont pas médicalement ou socialement au premier ministre et au gouvernement du Parti québé­ requis. cois. Ce sont eux qui s’exposent à une nouvelle réces­ Des relations de partenariat avec l’industrie sion et ce sont eux qui en seront les premières victimes. seront établies afin d’obtenir un meilleur partage des De notre côté, nous nous efforcerons de dénoncer toute responsabilités et des coûts, notamment dans les secteurs coupure qui affectera directement la qualité des services des ressources naturelles et de l’environnement. auxquels les citoyens et citoyennes ont droit. 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 125 Pour ce qui est de la brèche dans le mur de la citoyennes et citoyens du Québec oeuvrent inlassable­ morosité, pour citer le premier ministre, nous pouvons ment à l’amélioration des conditions de vie de leurs tous et toutes convenir que le premier ministre n’apporte pairs et de leurs proches et ont été totalement oubliés rien de nouveau sous le soleil avec son discours inaugu­ dans le discours inaugural du premier ministre. Us sont ral. Au titre des initiatives de création d’emplois, le plan pourtant au coeur de la solidarité sociale. Us sont pour­ de match du premier ministre est plutôt mince. On tant le ciment de la solidarité sociale. Tous ces services parle, d’entrée de jeu, de la récupération des mesures communautaires et bénévoles ont besoin d’être appuyés actives de l’assurance-chômage et de leur coordination à et supportés. Us offrent des services que le gouverne­ partir de la Société québécoise de développement de la ment ne pourrait se permettre d’offrir à ces citoyens. Et, main-d’œuvre. Cet important dossier sera réglé sous dans des temps comme nous connaissons, où la situaion peu, nous en sommes convaincus de ce côté de la Cham­ de l’emploi n’est pas au mieux et au moment même où bre, si la ministre de l’Emploi s’y consacre activement. le gouvernement s’attaque au déficit, ils ne doivent et ne En deuxième lieu, pour ce qui est des initiatives méritent pas d’être négligés par le premier ministre. de création d’emplois, on parle des départs à la retraite L’action communautaire est hors de prix pour le gouver­ qui vont libérer au cours des prochaines années des nement et, pourtant, le premier ministre la laisse de côté postes d’enseignement primaire et secondaire. Je ferai et parle plutôt de routes et d’environnement. partie de cette liste-là. Nous savions tous déjà que la Je suis profondément choquée et surprise de population enseignante est vieillissante, et les déclara­ l’attitude qu’a prise le gouvernement du Parti québécois tions du premier ministre n’apportent rien de nouveau à à l'égard de ces groupes si précieux. Eux qui ont besoin ce sujet. d'être entendus et appuyés, eux qui ont souvent besoin Troisièmement, on indique que des sociétés de financement, eux qui ont besoin de leadership et de d’État, dont Hydro-Québec, mettront sur pied un pro­ coordination n’ont même pas mérité deux malheureuses gramme d’apprentissage, un programme de stage coopé­ lignes du discours inaugural du premier ministre, qui fait ratif et des emplois d’été pour les étudiants du collégial pourtant près de 20 pages. La création toute récente et des universités. Certaines de ces mesures existent d*un Secrétariat à l’action communautaire et son finance­ déjà. Dans un contexte où on demande à Hydro-Québec ment assuré via les profits des sociétés de casino ne de rationaliser et de réduire ses plafonds de fonctionne­ règlent rien, au contraire. Pourtant il semble que c’est là ment, il apparaît plutôt curieux qu’on lui impose ces que le gouvernement du Parti québécois a décidé de programmes qui auront nécessairement un impact sur sa s'arrêter. rentabilité. Je souhaite, M. le Président, que le discours sur • (17 h 20) • le budget nous permettra de découvrir des mesures Quatrièmement, le premier ministre annonce que spéciales à l’égard des groupes communautaires et que le la société québécoise devra débattre de la question du premier ministre fera tout en son pouvoir pour réaliser départ à la retraite pour les salariés de plus de 65 ans. qu’ils sont les meilleurs alliés de tout gouvernement dans De combien d’emplois parle-t-on ici? En quoi est-ce une le maintien et la survie d’une solidarité sociale au Qué­ initiative pouvant générer de l’emploi? bec. Il y a, en ces matières, des décisions urgentes que Cinquièmement, le premier ministre parle de le gouvernement pourrait prendre. Que j’aimerais que, nommer un plus grand nombre de jeunes aux conseils dans le futur, le premier ministre porte une attention d'administration d’organismes publics. Et voilà, M. le toute spéciale à ces hommes et à ces femmes du Québec Président, à quoi s’arrêtent les initiatives de création qui se préoccupent quotidiennement de solidarité sociale! d’emplois, et bravo pour leur caractère novateur! Je vous remercie, M. le Président. Je pourrais vous faire la nomenclature des mesu­ res concernant l’entreprise, les investissements étrangers, Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la la métropole, les régions, la culture, la santé, l’éduca­ députée de Chapleau et critique de l’opposition offi­ tion, la sécurité du revenu, l’équité, la famille ou encore cielle en matière d’action communautaire. Je cède les institutions publiques et la sécurité. Mais je veux maintenant la parole à la députée de Matapédia et venir à un élément du discours inaugural qu’on a affublé adjointe parlementaire aux ministres responsables de la du titre «La solidarité sociale». Les quelques lignes région du Bas-Saint-Laurent et de la région de la traitant de la solidarité sociale n’ont jamais fait mention Gaspésie—îles-de-la-Madeleine et secrétaire régionale d’une action essentielle et fondamentale dans notre so­ pour la région du Bas-Saint-Laurent. Mme la députée. ciété québécoise. Il s'agit de l’action communautaire et du bénévolat. Mme Danielle Doyer M. le Président, des dizaines de milliers de Québécoises et de Québécois contribuent quotidienne­ Mme Doyer: M. le Président. Dans le discours ment au maintien de cette solidarité sociale. Ces dizaines inaugural, le premier ministre a fait état des difficultés de milliers de Québécoises et de Québécois œuvrent considérables auxquelles les Québécoises et Québécois auprès des plus démunis, œuvrent auprès de familles et seront confrontés dans la prochaine année et les années sui­ d’individus qui connaissent toutes sortes de difficultés, vantes. Ce sera un test pour notre solidarité, ce sera une qu’elles soient économiques ou psychologiques. Ces épreuve pour notre modèle québécois. Mais je partage 126 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 l'analyse du premier ministre, M. Lucien Bouchard, et du sources que nous avons maintenant, et, par «ressources», ministre des Finances, M. , sur la néces­ je ne veux pas dire ressources hydrauliques, forestières ou sité et l’urgence d’agir. D’ailleurs, la petite phrase qu’il a financières. Non, ce sont nos ressources humaines qui citée au début de son discours est toute chargée de sens font notre force, notre dynamisme. Le peuple québécois pour moi: «Osons agir ensemble», a dit le premier ministre est un peuple éduqué, cultivé, riche de traditions diverses, lundi. Car le temps est venu d’agir, c’est un fait, je viens plein de ressort et capable du meilleur et, surtout, de de le dire. Mais c'est le mot «ensemble» qui me touche le solidarité. Là est la source de ma confiance devant les plus. Je vois deux raisons pour utiliser le mot «ensemble», difficultés qui nous affligent. premièrement, tous et toutes, nous aurons à contribuer à • (J 7 h 30) • l’effort collectif dans la mesure de nos moyens; ensuite, et M. le Président, j’ai beaucoup de respect pour les c’est vital à mes yeux, le premier ministre associe des économistes, les actuaires, les fiscalistes et les compta­ partenaires représentatifs de l’ensemble de la société qué­ bles. Mon cher collègue, Jacques Léonard, le sait bien. bécoise à sa démarche. Il parle d’agir maintenant pour assurer l’avenir. Mais, Permettez-moi d’élaborer d’abord sur le second pour une femme comme moi, l’objectif de l’équilibre point. Je reviendrai un peu plus tard sur l'effort que budgétaire a aussi des significations que je qualifierais chacun et chacune aura à faire, notamment dans les de nobles. On ne doit pas oublier nos idéaux sociaux régions. démocrates auxquels l’ensemble des Québécoises et des On ne peut pas ne pas applaudir à l’initiative de Québécois est attaché. Les valeurs de compassion sont M. Bouchard de tenir une conférence socioéconomique très présentes chez nous et doivent continuer à se reflé­ sur le Québec. Avec les résultats obtenus la semaine ter dans nos choix de société. dernière, avec le plan de travail des prochains mois en Je vous citerai un seul exemple de sa signification vue du rendez-vous de l’automne prochain, nous, c’est-à- noble auquel je pense. Beaucoup ici, et j’en suis, sont dire M. Bouchard, le gouvernement et les députés de ce mères ou pères de jeunes adultes qui arrivent sur le côté-ci de la Chambre, nous nous associons aux syndicats, marché du travail. C’est un marché du travail bien patronat, groupes communautaires et plusieurs autres différent de celui que nous avons connu dans les années partenaires du gouvernement — et, bien sûr, quelques-uns soixante et soixante-dix. Nos enfants devront compter qui sont aussi avec les collègues... comme le souligne le d’abord sur eux-mêmes pour s’en sortir. L’État québé­ député Brodeur — alors, groupes communautaires, donc, cois les appuiera par diverses mesures que le premier et plusieurs autres partenaires du gouvernement, associés ministre a annoncées dans son discours. Ces mesures dans un effort collectif pour restructurer notre État, lui s’articulent autour de la préparation à l’emploi, dont redonner une marge de manoeuvre et préserver nos prin­ l’éducation et la formation de la main-d’œuvre. cipaux acquis sociaux. J’ouvre ici une parenthèse. Encore la semaine Ce rendez-vous a une importance capitale pour dernière, le consensus québécois sur le rapatriement des l'avenir de notre société. Ce rendez-vous, donc, oui, il mesures actives de formation de main-d’œuvre a été est important, primordial. Même si le programme peut réaffirmé de manière éclatante. C’était une réponse à un paraître exigeant, nous ne pouvons nous payer le luxe de défi lancé par le ministre Doug Young. M. Young de­ ne pas nous entendre avec nos partenaires. Il en va de vrait se rendre à l’évidence: alors qu’il veut nous diviser notre avenir, car ce rendez-vous de l'automne 1996 va pour mieux régner, nous serrons les rangs. Le gouverne­ en être un qui est décisionnel. Déjà, l’on peut se féliciter ment fédéral, pour des motifs de visibilité et rien d'au­ du consensus dégagé la semaine dernière. Quant à ce qui tre, pour agiter mille et un drapeaux rouge et blanc, veut arrivera l’automne prochain, je m’oblige à être optimiste continuer à intervenir dans un champ de compétence car, que nous soyons parlementaires, dirigeants d’entre­ québécoise. 11 le fait au détriment de la logique, de prises, représentants d’organismes communautaires, quel l’efficacité et surtout de la bonne utilisation des fonds que soit notre rôle dans notre société, nous avons une publics. C’est scandaleux. Cela m'inquiète, car, au lieu responsabilité, plus particulièrement à l’égard de ceux et de s’attaquer aux difficultés qui confrontent nos conci­ celles qui sont plus jeunes et qui feront le Québec de toyens et concitoyennes, Doug Young fait le coq, agite demain, et à l'égard de toute la population, à qui nous son plumage et caquète aux quatre vents un discours usé sommes redevables des choix faits et à faire. sur les responsabilités du fédéral, et patati et patata! Le gouvernement s’est fixé des objectifs ambi­ Nous avons plutôt besoin, M. Young, que vous vous tieux et je souscris pleinement au plan suggéré à l’issue de asseyiez avec Mme Harel, notre ministre de l’Emploi, et la conférence socioéconomique, plan qu’a repris le pre­ discutiez des modalités et d’un échéancier de retour des mier ministre dans le discours inaugural. M. Bouchard et mesures actives d’emploi de façon à ce qu’on rationalise son engagement d’arriver à l’équilibre du budget pour la le système au bénéfice de tous et de toutes. venue du prochain millénaire, j’y souscris. Ce sera J’en appelle au bon sens. Je voudrais bien pou­ difficile, mais j’ai confiance que nous y parviendrons. voir dire que nous nous passerons de l’accord de gens Souvenons-nous que ce n’est pas la première difficulté têtus qui ne veulent rien comprendre, mais il semble que que rencontre le peuple québécois. Nous sommes bien nous en ayons encore pour quelque temps à vivre dans parvenus à survivre à des guerres et à des crises économi­ les palabres stériles causées par un gouvernement éloi­ ques alors que nous ne disposions pas de toutes les res­ gné du citoyen et déconnecté des réalités québécoises. 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 127 Revenons à l’exemple sur les jeunes dont je vous vernement sur cette question. On a commencé à le faire, parlais tout à l’heure. Les jeunes devront donc compter il faut continuer. d’abord sur eux-mêmes. Le gouvernement les aidera à Pour les régions, les temps seront durs aussi. J’en bien se préparer pour le marché du travail, mais il ne veux pour exemple les compressions prévues au minis­ pourra pas tout faire. Dans ce contexte, il ne faudrait tère des Transports. Déjà, les routes secondaires comme pas qu’en plus l’on continue à accroître le fardeau de la les chemins dévolus aux municipalités par la réforme dette, et cela, parce que ce sont ces mêmes jeunes qui Ryan souffrent d’être réparés avec trop peu de moyens. devront rembourser la dette et qui devront donc payer Les ponts sur les petites routes de mon comté et de ma pour notre incapacité à bien gérer. Je ne veux pas, et région sont, encore là, trop fréquemment en mauvais personne, j’ose le croire, ne veut que nos enfants aient à état. 11 nous faudra, dans les prochaines semaines et les payer pour nos erreurs. Cela, c’est ce qu’il y a de noble prochains mois, trouver des mécanismes pour assurer dans l’objectif de régler nos problèmes de déficit et que ces infrastructures nécessaires soient bien entrete­ d'endettement. C’est pour cela même que les bilans du nues. Malgré tout cela, nous aussi, des régions, je puis gouvernement ne sont pas que des colonnes de chiffres vous l’assurer, nous souscrivons à l’objectif de rétablir mais se traduisent en bien-être, en mal-être individuel, sur des bases saines les finances publiques et, j’en suis collectif, en capacité ou incapacité de bouger par rapport tout à fait convaincue, nous réussirons à traverser la aux problèmes vécus, aux grandes missions dont est tempête. responsable l’État québécois. Les prochaines années seront donc décisives. Il y a d’autres parties du discours de M. Avec courage, M. Bouchard sollicite notre collaboration Bouchard qui m’ont frappée; je ne pourrai en aborder au redressement des finances publiques. Mais, derrière que quelques-unes. Pour la population du comté de cela, il y a plus. C’est seulement en rétablissant notre Matapédia, du Bas-Saint-Laurent, plusieurs éléments du crédibilité comme gestionnaires des impôts et taxes discours inaugural revêtent une grande importance. Le perçus auprès des Québécois et des Québécoises que nos premier ministre réaffirme à nouveau que le gouverne­ concitoyens reprendront confiance envers leurs représen­ ment formé par le Parti québécois est convaincu de la tants politiques. nécessité de décentraliser plus de pouvoirs vers les Et puis, M. le Président, il y a toujours la ques­ communautés régionales et locales. Chez nous, cela fait tion du pays. Chez nous, le 30 octobre dernier, dans le longtemps que nous attendons des responsabilités plus Bas-Saint-Laurent, nous avons voté à 59 % pour le Oui, grandes afin de pouvoir agir avec plus d’autonomie sur dans Matapédia, à 64,3 %. Pendant que certains vou­ notre devenir. Je suis contente de voir que bientôt nous draient que les Québécois et les Québécoises gambadent allons y parvenir. Naturellement, le présent gouverne­ dans des feuilles d’érable toujours rouges, on est aux ment ne pourra retourner... ou partager ces pouvoirs prises avec des défis importants, cruciaux. Dans quelque avec des instances locales ou régionales qu’à certaines temps, la question nationale se posera à nouveau de conditions. Depuis des années nous disons qu’il faut façon criante, car, comme je l’ai évoqué tantôt, je crains que le monde municipal fasse un examen de sa capacité que le fédéral ne jette le trouble dans nos projets collec­ à assurer de bons services aux contribuables. Le minis­ tifs, tant ceux de redressement des finances publiques tre des Affaires municipales doit présenter en mai une que ceux de création d’emplois. Les Québécois et les carte des fusions accompagnée de mécanismes incitatifs Québécoises se rendront alors compte, j’en ai la ferme pour favoriser le regroupement de municipalités. Je sais conviction, qu’ils doivent se donner un pays. Cet objec­ que cela heurte bien des cordes sensibles, mais j’encou­ tif est plus que jamais nécessaire, incontournable, et le rage mes concitoyens à examiner les propositions du restera. Je vous remercie, M. le Président. ministre des Affaires municipales avec un esprit d’ou­ verture. Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, En plus de représenter la circonscription de Mme la députée de Matapédia. Matapédia, j’occupe une fonction d’adjointe parlemen­ taire chargée de la région du Bas-Saint-Laurent. À ce Avis de débats de fin de séance titre, j’aimerais ajouter quelques mots. Le premier mi­ nistre a fait la liste des principales mesures que le gou­ Je désire, avant de poursuivre, informer l’Assem­ vernement a prises et entend prendre prochainement blée que j’ai reçu, conformément aux dispositions du pour contribuer au développement régional. Rappelons règlement, une demande de débat de fin de séance de la que le gouvernement s’associe aux fonds d’investisse­ part du député de Montmorency. Ce dernier désire ment locaux, aux fonds de solidarité régionaux et à la poursuivre l’étude du sujet suivant avec le premier mi­ mise en valeur de la forêt. C'est déjà beaucoup, mais le nistre, soit l’étude de faisabilité pouvant conduire à gouvernement fera plus. Depuis des lustres on entend l’implantation d’une cimenterie à Port-Daniel. que les contrôles législatifs, réglementaires ou adminis­ • (17 h 40) • tratifs doivent être allégés pour permettre aux instances Mais, puisque l’Assemblée ne peut procéder à un locales d’agir plus rapidement tout en tenant compte de débat de fin de séance le mercredi, conformément à leurs réalités particulières. J'attache donc une impor­ l’article 308 de notre règlement, ce débat se déroulera tance primordiale à l'engagement renouvelé de ce gou­ demain, le jeudi 28 mars, après les affaires du jour. Cet 128 Débats de T Assemblée nationale 27 mars 1996 avis, je vous le donne conformément à l’article 309, qui particulièrement mon champ de critique, soit la petite et stipule que le président doit rendre sa décision. moyenne entreprise, la semaine dernière, j’ai assisté avec le chef de l’opposition et plusieurs de mes collè­ Reprise du débat sur le discours d’ouverture gues au sommet sur le devenir social et économique du et sur les motions de censure Québec qui faisait, en fin de compte, prélude au dis­ cours inaugural. M. le Président, j’ai été à même de Alors, nous poursuivons maintenant avec le dé­ constater, comme plusieurs l'ont constaté aussi, que le puté de Shefford et critique officiel de l’opposition en sommet... En fin de compte, on en est venu au consen­ matière de petites et moyennes entreprises. M. le sus que, naturellement, le déficit était important à régler député. dans un délai plus ou moins grand, tout dépendant des intervenants, du secteur. Mais il y a aussi un autre... je M. Bernard Brodeur ne dirais pas un consensus, je dirais des faits qui ont découlé du sommet, c’est que le discours sur l’emploi, M. Brodeur: Merci, M. le Président. Comme ou les politiques sur remploi, ou une vision sur l’emploi vous l’avez dit, je suis critique en matière de petites et faisaient l’objet d’improvisation de la part du gouverne­ moyennes entreprises, mais aussi et avant tout, député ment actuel. On a pu détecter exactement la même chose de Shefford. Le premier ministre annonçait hier, dans dans le discours inaugural d’hier. Et, d’ailleurs, suite au son discours inaugural, la fermeture de certains péniten­ sommet de la semaine dernière, on a pu voir dans les ciers, entre autres, la fermeture du pénitencier de journaux, au lendemain du sommet, quelques citations, Rivière-du-Loup. Et je m’en voudrais de ne pas interve­ quelques phrases écrites par la presse québécoise concer­ nir sur ce point-là parce que l’un des pénitenciers tou­ nant les résultats du sommet et qu’on peut facilement chés est dans mon comté, le pénitencier de Waterloo, et, assimiler aux propos du premier ministre lors de son comme je l’ai dit à plusieurs reprises dans mon comté et discours inaugural. Je vais en citer quelques-unes, juste d’ailleurs répété plusieurs fois au ministre de la Sécurité pour imager mes propos, M. le Président. publique, la fermeture de ces pénitenciers doit être faite Jeudi 21 mars, dans La Presse, sous la signature de façon parcimonieuse et avec la plus grande rigueur de Denis Lessard, on voyait, au titre «Création d’em­ possible. Et j’interviens sur ce dossier-là parce que nous plois»; «La conférence s’est terminée sans décisions croyons, les intervenants du comté de Shefford et princi­ précises sur la création d’emplois. Les décisions sont palement de la région de Waterloo, que le pénitencier attendues au prochain sommet, fin octobre.» Donc, on qui fait l’objet de la visée du ministre ne fait pas partie pellete en avant. On pellete en avant, M. le Président. de la cible à viser. On citait aussi... je cite aussi, dans Le D evoir, le titre M. le Président, je profite de l’occasion d’être disait «Beaucoup d’attentes», et on disait plus loin, natu­ ici pour vous dire que, en pleine austérité financière, on rellement, que ces attentes étaient reliées principalement se doit d’évaluer les coûts de fermeture et les coûts à la création d'emplois. On a pu lire aussi, dans d’opération de chacune de ces institutions. Et, par ail­ Le D evoir; «Peu de propositions concrètes pour stimuler leurs, le pénitencier de Waterloo est le pénitencier qui la création d’emplois», et, en sous-titre «La conférence coûte le moins cher aux contribuables québécois. Nous n’aura abouti qu’à l’énoncé de pistes à examiner d’ici la savons tous que la moyenne des frais inhérents à la tenue d’un deuxième sommet cet automne». Donc, on garde d’un détenu est de 144 $ par jour, alors que, au souligne encore que c'est du pelletage en avant. Je cite pénitencier de Waterloo, à cet endroit-là, ça en coûte également cet article de Konrad Yakabuski, du bureau 100 $. C’est le seul centre, réellement, de réhabilitation de Québec du D evoir: «Malgré l’urgence invoquée par le au Québec, un centre moderne. premier ministre Lucien Bouchard de faire disparaître le Donc, comme j’avais fait part de ces remarques "grand nuage de morosité et d’inquiétude", les travaux à l’ancien ministre de la Sécurité publique, le député de de la conférence n’auront abouti qu’à l’énoncé des pistes Laval-des-Rapides, j’en ai fait aussi mention au nouveau prioritaires à examiner d’ici un deuxième sommet so­ ministre, le député de Mercier, et, d’ailleurs, les interve­ cioéconomique, à l’automne.» Donc, M. le Président, nants de la région l’ont rencontré à quelques reprises toujours la même chose, les intervenants médiatiques pour lui faire part de ces recommandations-là. En ne ont, eux, un consensus que le sommet et même le dis­ fermant pas le pénitencier de Waterloo, le gouvernement cours inaugural qu’on a entendu hier n’apportent aucune sauve, en clair, 1 600 000 $ par année. Donc, c’est pour solution au problème de l’emploi. Dans Le Soleil aussi, ça que je demande au gouvernement, et particulièrement la même journée, le jeudi 21 mars, on pouvait lire, sous au ministre de la Sécurité publique, de bien vérifier ces la plume de Hélène Baril; «Ceux qui ont pris part au données et, même, a priori, je lui demanderais de venir débat se sont contentés de dire des généralités sur l’im­ visiter le centre, tout comme l’a fait son prédécesseur. portance de la formation de la main-d’œuvre ou encore Donc, M. le Président, je me permets ces remarques de vanter leurs propres initiatives.» Plus loin, on écrit, parce que le le premier ministre, hier, en a fait mention et je cite: «La proposition syndicale de profiter du som­ dans son discours inaugural. met pour se donner un plan précis de création d’emplois Pour revenir au discours inaugural proprement avec un échéancier et une obligation de résultats est dit, aux généralités, ou, enfin, à ce qui concerne plus restée lettre morte.» 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 129 Donc, M. le Président, de toute évidence, le c’est un plan, le plan Paillé, un plan auquel toute per­ gouvernement a, je dirais, improvisé pour en arriver au sonne, tout entrepreneur qui a un plan, un plan logi­ sommet économique de la semaine dernière, et le dis­ que — c'est facile de préparer un plan logique, M. le cours inaugural d’hier ajoute tout simplement au fait que Président, sûrement que vous avez déjà préparé de ces le gouvernement n*a aucune vision pour la création plans-là pour présenter à une institution financiè­ d’emplois. re — donc, toute demande logique, pour n’importe quel Et j’en viens au fait, M. le Président, parce que type d'emploi. On peut, avec le plan Paillé, partir trois mon dossier concerne justement la PME. Assistant au salons de bronzage sur la même rue, par exemple. Ce sommet, j'ai moi-même pris des notes sur les recomman­ n'est pas de cette façon-là qu'on peut, en fin de compte, dations de plusieurs intervenants économiques, appuyées implanter des emplois structurants dans notre société. à plusieurs occasions par des intervenants d'autres mi­ C'est un système qui est à revoir. lieux, autant d'un milieu social ou du milieu syndical. Les Troisièmement, alléger la réglementation et la recommandations que j'ai prises en note, M. le Président, paperasserie. On aurait pu prendre des mesures pour ce n'est pas la première fois que nous les entendons. Le alléger cette réglementation-là. Dans le système où l'on gouvernement ne peut pas nous dire: Écoutez, on les a vit, chaque entreprise, chaque propriétaire de PME, entendues pour la première fois au sommet économique, presque pour chaque cinq employés, doit en engager un et puis, naturellement, en l'espace d'une semaine, on autre juste pour la paperasse: ce sont des choses, M. le n'aurait pas pu inclure ces mesures-là au discours inaugu­ Président, qui découragent l'employeur ou tout entrepre­ ral. M. le Président, je dois vous dire —puis vous fré­ neur à entreprendre la création d'emplois dans son entre­ quentez toutes sortes de milieux; je sais que vous êtes prise. notaire, une profession très honorable, et vous avez reçu Vous me dites, M. le Président, qu'il ne me reste sûrement des propriétaires de PME dans votre bu­ que quelques minutes. Naturellement, on a des temps reau — ces gens-là ont, en fin de compte, fait des recom­ bien précis, si je veux donner la chance à mes collègues mandations qu'on entend déjà depuis plusieurs années, et d'intervenir. Mais on doit aussi réduire la taxe sur les je les ai divisées en quatre points. Premièrement, les gens salaires. Vous avez été employeur. Vous savez que d’affaires qui étaient sur place, les propriétaires de petites chaque 100 $ que vous payez à votre employé vous et moyennes entreprises, et principalement la Fédération coûte 13,85 $. Naturellement, avec un fardeau si impor­ canadienne de l'entreprise indépendante, qui soumet ou tant, il semble très difficile à la PME de créer d'autres qui donne plusieurs suggestions couramment au gouver­ emplois. Je dois vous rappeler en terminant, M. le nement, en venaient à ces suggestions-là. Président, pour laisser la place à mes collègues, que la Premièrement, ce qu'ils demandent: pas de petite et moyenne entreprise au Québec a créé presque la hausse d'impôts. Pas de hausse d'impôts, naturellement, totalité des emplois durant les 10 dernières années. pour encourager la consommation — et là je salue le fait M. le Président, je suis déçu. Je suis déçu que, que le gouvernement ait retiré son intention d'augmenter dans le discours inaugural de même que dans le dépôt la taxe de vente. Mais, aussi, il faut être conscient que, des crédits ce matin, on n'ait pas retrouvé des mesures lorsqu'on y va d'autres taxes, dont de la tarification, qui auraient pu favoriser à alléger le fardeau de la petite c'est quand même des sommes qui ne sont pas à la et moyenne entreprise et à faire en sorte que le niveau disposition du consommateur. On a entendu parler de d'emploi atteigne un niveau acceptable au Québec. postes de péage ou autres choses. Il faut être conscient Merci, M. le Président. que ces sommes-là, qui sont dépensées, ne seront pas dépensées à la consommation et, donc, n'encouragent Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le pas la création d'emplois. député de Shefford et critique officiel de l'opposition en Il y a un deuxième consensus que, moi, j'ai écrit matière de petites et moyennes entreprises. Je reconnais aussi et qui sort du sommet et qui, en fin de compte, est maintenant le président du caucus ministériel et député aussi inspiré de toutes les interventions des milieux éco­ d'Abitibi-Ouest. M. le député. nomiques depuis plusieurs années, principalement celles auxquelles on donne des subventions. S'il existe un mar­ M. François Gendron ché pour leurs produits, les intervenants sont d'accord pour qu'on donne ces subventions-là, mais non démarrer M. Gendron: Merci, M. le Président. Je veux une entreprise tout simplement parce qu’elle permet prendre les 10 minutes qui me sont imparties. Rapide­ d'obtenir une subvention. Avoir des programmes logi­ ment, le discours inaugural, il faut quand même rappeler ques, des programmes vraiment pour stimuler l'emploi, aux gens qui écoutent nos débats que c’est une pièce des programmes dans des domaines où l'emploi aura une maîtresse pour tout gouvernement responsable. C'est une facilité d'émergence. Aujourd'hui, M. le Président, on a pièce majeure, c’est une pièce significative, parce que, eu aussi des crédits où cette évidence-là n'est pas tenue normalement, c'est à l'intérieur du discours inaugural en ligne de compte. qu'on retrouve les grandes orientations, les grandes • (17 h 50) • lignes qui doivent guider l'action d'un gouvernement, M. le Président, tout ce qu'on a eu du gouverne­ surtout lorsqu'il s'agit d'une nouvelle Législature, et ment, en passant, depuis quelques mois qu'il gouverne, c'est le cas. Le nouveau premier ministre du Québec a 130 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 1996 prononcé un discours inaugural et il a indiqué les gran­ Je pense au chef de l’opposition. Je veux bien des orientations que le gouvernement entendait suivre croire que ça ne va pas bien de ce temps-ci pour lui, dans les prochaines semaines, les prochains mois. mais il n’est pas obligé de dire n’importe quoi. Et il a La constatation qu’on doit faire, c’est: Est-ce que, parlé d’un catalogue, puis, là, dans un catalogue, il y dans un discours inaugural comme ça, il est important et avait telle affaire, telle affaire. Non, ce n’est pas un significatif de rapidement dégager les grands consensus catalogue, parce qu’il serait plus mince qu’Eaton ou sociaux? Nous avions la chance que le discours inaugural Simpson. Mais le discours inaugural, il n’est pas flam­ succède à une conférence avec les principaux intervenants boyant, on ne peut pas mettre une série d’affaires là- socioéconomiques du milieu québécois où, manifeste­ dedans en disant: Mais, écoutez, on est cassé, voici tout ment, quoi qu’on en dise de l’autre côté, il s’est dégagé ce qu’on va faire et ce que ça coûte. Parce qu’il voulait deux orientations majeures. Je veux bien que, dans une avoir le prix, lui, là. Alors, pour un ancien comptable société, il y ait plusieurs créneaux, il y ait plusieurs sec­ gouvernemental, entre guillemets, parce qu'il a été assez teurs d’activité, mais les deux grands constats que n’im­ longtemps au Conseil du trésor, et on sait quels problè­ porte quel politicien le moindrement responsable doit mes ça nous cause, de ce côté-ci... Moi, il m’apparaît, faire aujourd’hui, c’est: Est-ce qu’il est exact que nous M. le Président, très franchement, très honnêtement, on avons une situation de nos finances publiques qui exige de a un discours inaugural qui est teinté de réalisme. Nous toute urgence réparation, correction? La réponse, évidem­ avons affaire à une société en difficulté pour des raisons, ment, est oui. 11 faut en traiter. Est-ce que le discours d’abord, de budget très difficile, qu’on appelle les finan­ inaugural en traite? Oui. J’y reviendrai. ces publiques. On a vécu pendant de nombreuses années Deuxième grand constat: Est-ce qu’on peut, au-dessus de nos moyens. comme société, ne pas offrir de meilleures perspectives Et j’en profite également pour faire un commen­ au niveau des jeunes et de l’emploi? Encore là, vous taire. Je me fais dire régulièrement: Comment se fait-il allez me dire: C’est évident que la réponse et le grand que vous n’avez pas commencé avant? Comment se fait- constat qui a été fait lors de cette conférence, c’est qu’il il que toutes les autres provinces... Parce que, malheu­ faut maximiser les mesures pour améliorer ces deux reusement, compte tenu du résultat référendaire, nous perspectives. Dans un discours inaugural — écoutez, j’ai sommes toujours encore une province, et j’ose espérer assez d’expérience en cette Chambre — c’est évident qu’il n’y a personne qui nous fera le blâme, nous, d’as­ que, de l’autre côté, on nous dit qu’il n’y a rien, puis, pirer à d'autres choses, et c’est pour ça que... N’y de ce côté-ci, on essaie de vous dire que tout est là- pensez pas, là, puis même s’il y avait 15 motions d’an- dedans. Règle générale, ce qui est le plus important, ce noncées là-dessus, on ne renoncerait pas à ce que nous n'est pas tellement cette perception des choses, mais sommes. Et, nous, on est convaincus que le Québec s’en c’est d’aller voir celles et ceux qui vont devoir vivre tirerait mieux s’il était pays, mais on est assez honnêtes avec le discours inaugural: les contribuables, les ci­ pour dire: Là, il y a deux drames: c’est l’économie, les toyens. Et ça, c’est la vieille coutume, la bonne vieille finances publiques, puis l’emploi, puis on travaille là- tradition de ce qu’on appelle le jugement de la presse, dessus. Mais ce n’est pas vrai qu’on va oublier, d'abord, qui, règle générale... on peut être pour ou contre, mais, ce qui ne nous appartient pas plus qu’il faut, là. La règle générale, la presse parlementaire a à qualifier un naissance de plus en plus grande de celles et ceux qui discours inaugural. Et celui que nous avons entendu sont convaincus que le Québec devrait être un pays, ce lundi dernier, il y a à peine deux jours... Je comprends n’esc pas uniquement une affaire du Parti québécois. le malaise de nos amis d’en face. Qu'est-ce que tu veux, Nous, on le porte fièrement, mais c’est dans la société pour une des premières fois, et je fais juste citer rapide­ québécoise puis c’est bien pris, comme on dit, c’est bien ment, les patrons, qu’on appelle le patronat ou le secteur collé, et tant mieux, en ce qui nous concerne. patronal, ils disaient: C’est axé sur l’action, puis les Mais je reviens à ce que je vous indiquais. Quand patrons applaudissent. On tournait la page, puis c'était un discours inaugural permet que, le lendemain, on en marqué: «Les syndicats se réjouissent». En tout cas, je conclue qu’il y a passablement d’éléments qui tiennent n’ai pas vu ça tous les jours, moi, là, parce que, règle compte du réalisme, du pragmatisme et des gestes qu’on générale, il y avait toujours un problème inversé, c’était doit poser comme société eu égard aux finances publi­ inversement proportionnel. Alors, règle générale, si ce ques et à l’emploi, bien, il me semble que, là, on devrait qu’on appelle, règle générale, les travailleurs, les syndi­ arrêter de se répéter, les uns les autres, inversement, et cats ou les gens qui composent avec ce secteur d’activité qu’on devrait regarder cette réalité. là étaient satisfaits, bien, le patronat disait: Ça n’a pas Et, même, il y a une autre vieille pratique qui de bon sens, il n’y a rien à telle place, telle place, telle veut... Allons voir ce que les éditorialistes en ont dit. place. Ça, il me semble que c’est plus teinté d’honnêteté Bien, la plupart des éditorialistes ont été, tout compte et de réalisme, et c’est surtout là-dessus que j’aurais fait, assez élogieux sur le contenu du discours inaugural, aimé entendre des gens, et en particulier de l’autre côté. et je donne un exemple pour contrer l’image du chef de Moi, il me semble que le discours inaugural prononcé l’opposition. Lui, il disait: C’est un catalogue, il n’y a par le premier ministre, c’est un discours franc, c’est un rien en dedans. Bon, bien, je cite juste un éditorial, du discours transparent, c’est un discours réaliste pour un D evoir: «Un discours qui troque les compressions contre gouvernement responsable. un climat d’action par une série de petites mesures 27 mars 1996 Débats de l'Assemblée nationale 131 intelligentes, petites mesures qui correspondent à la foresterie, Sylvico, M. Réjean Bergevin: «Nous désirons réalité de ce qu'on doit faire.» C'est loin de ce qu'on vous souligner que, tout au long du mandat que vous entend de l'autre côté: Il n'y a rien là-dedans, et ainsi de avez exercé comme ministre, vos décisions étaient exem­ suite. Alors, moi, j'arrête là pour le contenu, parce que plaires et d'un niveau d’excellence inégalé depuis plu­ c'est un point que je voulais relever. Un discours inau­ sieurs années.» Ça fait juste un an et quelques mois gural, il a de l'allure quand l'ensemble des principaux qu'on est au pouvoir; avant ça, c'était l’autre côté. Je secteurs de la société concluent le lendemain que les n’ai pas vu de lettres de même, ils ne m’en ont pas éléments sur lesquels il y a lieu d'agir avec rapidité, montré bien, bien. franchise, détermination, sont là, et c'est le cas. Alors, qu'on se ferme la boîte, de l’autre côté, pour dire n'im­ Des voix: Bravo! porte quoi. Deuxième aspect que je voulais traiter, c’est bien M. Gendron: Très rapidement: «Nous désirons sûr que, moi, j'ai été ministre pendant 14, 15 mois, et je vous remercier pour votre Sommet sur la forêt privée, n’accepte pas — et je le dis haut et fort — que j’entende l'établissement d'un programme de forêt habitée, l'ex­ encore un sermon sur la montagne, de l'autre côté, qui cellence des relations avec les bénéficiaires de CAAF, la nous fait accroire qu'on n'aurait fait qu'une chose, réfé- réorientation du mandat de REXFOR, et nous passons render. Moi, j'ai l'impression que j'ai dirigé puis j’ai sous silence plusieurs autres secteurs d’action qui furent l’impression qu'on a pris des actions, et je le prouverai, globalement tout à fait positifs pour le secteur forestier. là, dans les quelques minutes qui me sont imparties, sur Notre évaluation de votre travail est près de la note quelques sujets. Mais, juste dans le secteur dont j’avais parfaite.» J'arrête là, je vais voir de la gêne. la chance d'avoir la responsabilité ministérielle, n’allons L’Association minière du Québec, c’est un secteur pas voir ce que je pense que j'ai fait — ça, ça ne vaut que je connais un peu. Quand ces gens-là ont le culot de pas cher — mais allons voir ce que des gens qui étaient dire qu'on n’a rien fait, qu'on a référendé, êtes-vous au les clientèles qui devaient hériter de l'action du gouver­ courant que 1995 est une année record dans le domaine nement dont je faisais partie, ce qu’ils en pensent. J’ai des mines? Une année record. 1500000000$, ça ne ici — j’en ai plusieurs, mais j'en cite juste quelques- s'est jamais vu depuis 47 ans. 1995, 1 500 000 000 $ dans unes... le domaine des mines. «Sachez sincèrement, M. Gendron, • (18 heures) • que toute l'industrie minière du Québec se souviendra Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, longtemps de votre passage au sein de ce ministère.» M. le député d’Abitibi-Ouest. Vous savez pertinemment Puis, je répète, il n'a pas été long, pas assez long à que, en vertu de l’article 20, les travaux se terminent à mon goût. 18 heures. Alors, je me dois maintenant, pour vous permettre de poursuivre, de demander l'assentiment des Des voix: Ha, ha, ha! membres de cette Chambre. M. Gendron: «Votre grande connaissance du M. Gendron: Bien oui milieu minier et votre implication sans réserve pour le développement des régions du Québec figurent assuré­ Une voix: Consentement. ment en très bonne place à votre tableau d'honneur.» C'est assez pour les mines. M. Gendron: Bien oui. L'Association professionnelle des géologues: «En mon nom personnel, à titre de président de cette Asso­ Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader. ciation, je tiens à vous exprimer toute la reconnaissance et notre appréciation pour le travail exceptionnel que Mme Caron: Je vais solliciter non seulement vous avez accompli pour le secteur des richesses naturel­ votre consentement pour poursuivre l'intervention de les en général et plus particulièrement pour notre secteur mon collègue d'Abitibi-Ouest, mais aussi pour pouvoir des mines.» entendre deux interventions, du côté ministériel, de plus, La Fédération des producteurs de bois. C’est tous M. le Président. des secteurs d'activité ressources, c'est le développement des ressources du Québec. Pour des gens qui n'auraient Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a que référendé, selon nos amis d'en face... «Votre pas­ consentement? sage au ministère aura été marqué sous le signe de la défense des intérêts des Québécois et de leurs ressources Une voix: ... forestières. Vous avez initié des réformes longtemps attendues.» Qui était là avant nous autres? Ha, ha, ha! Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement. Nos amis d'en face, qui se sont tourné les pouces. «À Alors, M. le député d'Abitibi-Ouest. titre de président de la Fédération des producteurs de bois du Québec, j'ai pu apprécier à sa juste valeur tout M. Gendron: Merci, M. le Président. Alors, le travail que vous avez accompli.» Et ainsi de suite, juste un exemple. Je cite ici la Société générale de parce que, je vous le dis, j'en ai eu des centaines. Je 132 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 19% voulais simplement illustrer que, dans le domaine des ma région, que j’aime bien — le nombre de chômeurs ressources, forêts, mines, développement du secteur en Abitibi—‘Témiscamingue a diminué de 2 000, ce qui a énergétique... fait passer le taux de chômage de 12,4 % qu’il était en Peut-être pour varier un peu, j’avais une lettre février 1995, à 10 % en février 19%. Pour des gens qui également de ce secteur-là où on indiquait, dans le do­ référendaient, pour des gens qui n’ont rien fait — et je maine de l’énergie: «Permettez-moi de vous adresser conclus là-dessus, M. le Président, compte tenu du peu mes plus sincères remerciements pour les immenses de temps qu’on a — moi, je pense que, globalement, efforts consentis à l'avancement de l'industrie énergéti­ dans l’année et quelques mois, on a, oui, on a inventé que québécoise, entre autres, par le débat public que une autre façon de gouverner. On a recentré sur des vous avez lancé dès votre entrée en poste.» Et ça va réelles priorités, sauf qu’il y avait un drame, et on ne va donner lieu à une politique énergétique dans pas grand pas commencer avant d’être au pouvoir, c’est de vivre temps. au-dessus de nos moyens, avec un gouvernement qui Moi, je voulais quand même dire qu'on a com­ nous a précédés, pendant neuf ans, avec des taux de pris que, le développement des ressources du Québec, il croissance de 2,9 % à 3 % de rythme de croissance des fallait le faire en supportant souvent des initiatives, dépenses publiques alors que l’inflation était inférieure à comme les actions accréditives, comme le programme de ça. Et ça, ça nous a conduits à un déficit de l’action minérale, le soutien au développement de l’ac­ 5 000 000 000$ ou 6 000 000 000$. C’est évident. . tion minérale, qui a donné des résultats concrets. Et ne pensons pas à s'occuper des régions, ne pensons pas c’est de même qu’on réussit à développer une économie. à s’occuper de Montréal, ne pensons pas à s’occuper du J’ai eu la chance de faire partie d’un gouverne­ Québec tout entier, des jeunes, des personnes âgées et ment actif qui, même dans une période très difficile au de faire des mesures nécessaires, requises, si on ne niveau de l’économie... L’an passé, j’annonçais un commence pas d’abord par assainir nos finances publi­ programme de 100 000 000 $ pour la mise en valeur de ques, avoir un contrôle et montrer aux Québécois et aux la forêt québécoise, 100 000 000 $ pour le développe­ Québécoises que, oui, on est capables de gérer, s’assu­ ment maximal des forêts, axé sur le développement mer, puis, là, on pourra espérer une meilleure suite des durable, avec la collaboration de l’ex-ministre des Finan­ choses pour nous-mêmes, pour le Québec puis le pays. ces, M. Campeau, qui avait compris cette logique que, Merci. pour développer les ressources naturelles du Québec, il est important d'avoir un peu de support financier. Et Des voix: Bravo! tout ça pour des gens qui, supposément... on a eu le malheur d’avoir l’honnêteté de donner suite à un engage­ Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ment qu’on avait pris: si vous nous réélisez, il y aura un député d’Abitibi-Ouest et président du caucus ministé­ référendum. Moi, je n’ai pas honte du référendum. riel J’aurais aimé mieux un résultat différent. Je respecte le Je cède maintenant la parole au député de Char- résultat démocratique, mais je ne suis pas gêné, moi, lesbourg, ministre de la Santé et des Services sociaux, d’avoir fait un référendum, parce que, moi, je suis ministre responsable de la région de Québec, membre du capable de marcher et de mâcher de la gomme en même Comité ministériel des affaires régionales et territoriales temps. et également vice-président du Comité ministériel du Alors, on a été capables de s’acquitter de nos développement social. M. le député. responsabilités ministérielles, et on a des preuves. Je vous donne un exemple au niveau de l’emploi. J’enten­ M. Jean Rochon dais ces gens-là... et j’ai tellement vécu ici longtemps, dans cette Chambre... J’entendais M. Bourassa et son M. Rochon: M. le Président, le discours inaugu­ gouvernement; eux autres, ils disaient toujours la même ral que nous a présenté le premier ministre a annoncé phrase, phrase clé: Nous, on va s’occuper de l’économie des grands dossiers, des grands chantiers qui visent non québécoise et on va créer de l’emploi. Et, en Abitibi, seulement l’assainissement des finances publiques du entre autres, le taux de chômage montait à chaque Québec, mais, bien au-delà, qui visent à rouvrir la voie, année, avec les libéraux. Chaque année, le taux de pour le Québec, à l’intégration du développement social chômage était plus élevé et les gens disaient: Us et du développement économique. Et on sait que le «pourraient-u» sauter une année? on aimerait donc ça développement social intégré au développement écono­ qu’ils ne s’en occupent pas. Peut-être bien que le taux mique va nous assurer une plus grande équité dans la de chômage serait moins grave. répartition de nos richesses et assurer, en bout de ligne, une meilleure qualité de vie et des meilleures conditions Des voix: Ha, ha, ha! de vie pour la population. Or, ce qui se passe dans le domaine de la santé, M. Gendron: Je vous donne un exemple la réforme de ce système, le virage ambulatoire, comme concret, c’est des chiffres. Au Québec, la forte création on l’a appelé, s'inscrit parfaitement dans ces grands d’emplois des derniers mois, soit 63 000 en juillet 1995, dossiers, dans ces grands chantiers, et pourra vraiment 63 000 emplois de plus — mais je donne l’exemple de rencontrer ses objectifs grâce à cet encadrement qui 27 mars 19% Débats de l’Assemblée nationale 133 vient de l’ensemble de l’activité gouvernementale. Parce dans un temps relativement court. Et, le premier minis­ que, même si on entend beaucoup parler surtout des tre y a fait référence dans son discours, on commence hôpitaux, des lits d’hôpitaux qu’on doit fermer, qu’on effectivement à voir maintenant, dans l’ensemble du doit transformer en d’autres ressources, bien au-delà du Québec — et ça sera de plus en plus évident au cours de redéploiement physique des ressources, ce dont il s’agit la prochaine année — et dans les différentes régions, des présentement dans ce chantier, dans ce grand dossier de résultats concrets de ce changement. la réforme du système de santé et des services sociaux, Et j'en donnerai quelques exemples. Pour l’en­ c’est une nouvelle orientation pour mieux responsabiliser semble du Québec, on sait qu’il y a des montants de et les collectivités et les individus, donner à chacun des l’ordre de 57 000 000 S à 58 000 000 $ qui, au cours de moyens pour éviter le plus possible, d’abord, des pro­ la prochaine année, vont être réalloués vers les centres blèmes de santé, pour avoir des moyens pour les régler locaux de services communautaires et vers tous les rapidement quand ces problèmes se présentent. Si c’est services de première ligne qui sont offerts, autant les des problèmes avec lesquels il faut apprendre à vivre, services de santé que les services sociaux. Les organis­ parce qu’il y a certains problèmes de santé qui sont mes communautaires verront une augmentation d’à peu chroniques et qu’on ne peut pas vraiment guérir, bien, il près 10 % des ressources qui leur sont allouées. C’est y a des moyens aujourd’hui par lesquels on peut réassu­ 26 000 000 $ qui seront réalloués vers ce secteur. rer, redonner une autonomie à des gens. Alors, toute Tout le domaine de l’hébergement pour les per­ cette réforme, et ça paraîtra de plus en plus, et ça sera sonnes âgées, principalement, en plus des dépenses de plus en plus en lien avec ce qui va se faire dans les d’immobilisation, verra un ajout net de 40 000 000 $ grands dossiers cette année, va s’orienter vraiment vers pour le fonctionnement des nouveaux lits, des nouvelles une prévention des problèmes et une promotion de la places en hébergement qui deviendront disponibles. santé. C’est quelques exemples. Au total, il y en a pour • (18 h 10) • 180 000 000$ de réallocation de nouvelles ressources, Le lien avec les différents dossiers, qui sont ceux et cela, au-delà, en plus de ce qui doit être absorbé ou de l’éducation, ceux de l’emploi, ceux de l’économie, comprimé à cause des différences de budget et de crédits pour redonner un élan à notre richesse collective, sont qu’on a eues cette année. directement liés et indispensables pour l’amélioration de Donc, je pense que l’ensemble des dossiers et des la santé de la population. On sait, encore une fois, mal­ chantiers va le démontrer autant dans le domaine de gré la grande nécessité d'un système de santé très effica­ l’éducation que dans le domaine de la création d’emplois ce, que, au-delà des services de la santé, ce qui est ou de la sécurité du revenu, on n’en est pas dans des essentiel pour des conditions de vie confortables et pour exercices qui visent uniquement à comprimer, à couper, l’état de santé d’une population, c’est le statut économi­ mais dans des exercices qui, bien au-delà de ça, refont que d’une population. On connaît très bien maintenant la nos systèmes, refont notre façon de faire, modernisent différence qu’il y a entre le cumul des risques qu’on doit nos établissements et nos programmes et nous permettent assumer pour notre état de santé compte tenu du statut vraiment de faire cette relance du Québec vers un déve­ socioéconomique. Et le statut socioéconomique passe par loppement, mais, encore une fois, vers un développe­ l’éducation. On sait que, plus l’instruction est élevée, ment qui sera intégré tant sur le plan social que sur le plus on a des chances de trouver un emploi. Et l’édu­ plan économique, de sorte qu’on évitera de se retrouver cation donne de meilleures chances aussi de trouver un dans une situation où, au sortir d’une crise financière, emploi, donc d’améliorer sa situation économique et son ceux qui étaient en meilleure position auront pu mieux niveau de vie. se défendre à travers la solution de la crise et s’en sorti­ Alors, l’ensemble des dossiers va permettre à ront encore mieux, alors que ceux qui étaient déjà en cette réforme de la santé et des services sociaux d'aller désavantage au début se retrouveront dans une situation bien au-delà d’un redéploiement de ressources physi­ pire à la fin d’une réforme ou d’une transformation. ques, va permettre de faire avec beaucoup plus de succès Un autre élément important du discours inaugural le redéploiement des ressources humaines en offrant une et qu’il faut voir très associé comme un élément essen­ possibilité d'emploi sinon dans le système de la santé, tiel de cette réforme dans le domaine de la santé est celui autour du système de la santé, et va nous amener pro­ de se donner un programme d’assurance-médicaments. gressivement vers un meilleur état de santé et vers une Qu'est-ce que ce serait, essentiellement, un programme amélioration du bien-être de la population. d'assurance-médicaments? C’est, d’une part, de se La transformation qui se passe dans le domaine donner le moyen d’utiliser, pour tous les citoyens, selon de la santé, pour différentes raisons, a eu la chance de leurs besoins, une technologie. Le médicament est une commencer à peu près un an plus tôt, mais ça nous technologie qui est devenue très, très, très efficace dans permet de nous donner confiance dans ce qui s’en vient certains cas, très puissante. C’est pour ça qu’il faut malgré l’énormité des chantiers, malgré l’énormité du l’utiliser avec beaucoup de soin, parce que, comme toute travail, à prime abord. Ça nous a montré, pendant cette technologie très efficace et très puissante, mal utilisée, année, qu’une véritable concertation, que des objectifs ça peut créer des dommages, trop utilisée, ça peut être précis peuvent créer une mobilisation, et une mobilisa­ nocif, mais utilisée de façon adéquate, ça peut être très tion qui permet de faire des changements très importants important, et c’est une des technologies qui permettent 134 Débats de l’Assemblée nationale 27 mars 1996 de diminuer le nombre d’hospitalisations, qui permettent respectant ce qui ont été les bases de notre système de de raccourcir les hospitalisations quand elles sont néces­ santé et de services sociaux, c’est-à-dire qu’on se par­ saires et qui permettent de maintenir des gens de façon tage collectivement -- c’est un de nos grands program­ beaucoup plus autonome dans leur milieu, dans leur mes de solidarité qu on s’est donnés au Québec — selon domicile, grâce à l’adjonction de médicaments efficaces, notre capacité de payer, un service — ça sera le médica­ avec les autres soins et les autres services qui peuvent ment, qu’on ajoute à notre assurance-santé — de sorte être offerts. que, au moment où le besoin se fait sentir, ce médica­ Or, présentement, au Québec, pour différentes ment, comme les autres services de santé et services raisons qu’il serait trop long de rappeler ici, on se trouve sociaux maintenant, sera complètement accessible selon dans un certain déséquilibre, en ce qui regarde notre le besoin, indépendamment de la capacité de payer. On couverture de services de santé et de services sociaux, en n’aura plus ces situations de gens qui se retrouvent n’ayant pas inclus le médicament, sauf pour les personnes forcés de perdre un emploi, forcés de se retrouver fina­ âgées, vers les milieux... On se rappellera qu’on s’est lement sur l’assistance sociale, ou des gens qui veulent donné notre système d’assurance-santé au début des an­ se sortir de l’assistance sociale, mais, devant le coût de nées soixante-dix; ça suivait un système d'assurance- médicaments quand il y a des enfants qui doivent en hospitalisation qu’on s’était donné au début des années prendre régulièrement, quand il y a un conjoint qui est soixante. Au milieu des années soixante-dix, on a donné malade, sont presque empêchés d’en sortir parce que une couverture du médicament à toutes les personnes l’amélioration de leur condition avec un salaire un peu âgées. Par la suite, on a donné, au début des années supérieur à la protection d’aide sociale fait qu’ils ne sont quatre-vingt, une couverture à l’ensemble des gens qui vraiment pas regagnants, il n’y a aucun incitatif pour souffrent de certaines pathologies graves et chroniques eux à aller dans ce sens-là. comme les cancers, la fibrose kystique du pancréas, par Donc, M. le Président, le volet de ce qui est exemple, le sida, maintenant, qu’on peut couvrir. entrepris dans le domaine de la santé et des services Mais c’est seulement à peu près 1 500 000 Qué­ sociaux se trouve vraiment conforté, encadré par l’en­ bécois et Québécoises que les programmes publics peu­ semble des chantiers. L’ensemble de ces chantiers et de vent couvrir présentement. On sait qu’il y a à peu près ces dossiers va vraiment attaquer la santé, l’éducation, 4 500 000 Québécois et Québécoises qui bénéficient l’emploi, les éléments essentiels qui peuvent vraiment d’une forme quelconque d’assurance privée, mais des améliorer les conditions de vie des Québécois, améliorer programmes qui sont très, très, très variables, et, dans notre richesse collective, mieux la partager et assurer à certains cas, c’est un programme qu’on appelle de type l’ensemble des citoyens, des citoyennes, rapidement, «catastrophe», qui permet d’éviter que quelqu’un se dans les prochaines années qui s’en viennent, non seule­ ruine complètement si une maladie grave doit survenir, ment un meilleur état de santé, mais un état de bien-être demandant des médicaments de plus en plus coûteux, et et une qualité de vie qui sera bien meilleure. Et, encore il y a 1 200 000, 1 300 000 citoyens au Québec qui une fois, on a fait la preuve, dans ce cas-ci, dans le n’ont aucune couverture présentement. domaine de la santé et des services sociaux — on l’avait Or, dans la situation actuelle, comme il est es­ fait avant dans d’autres domaines — que, quand on s’y sentiel d’utiliser de façon efficace cette technologie met, avec concertation, en travaillant autant localement qu’est le médicament, comme on est dans une situation que centralement, selon les niveaux d’intervention, on où le coût du médicament... pas seulement le prix mais peut faire des choses, on peut faire des choses surpre­ le coût, qui est la résultante du prix, bien sûr, mais aussi nantes et on peut les faire rapidement quand c’est néces­ de l’utilisation, qui présentement est très difficile à saire. Merci, M. le Président. contrôler et est souvent exagérée et à mauvais escient. • (18 h 20) • Tous les facteurs qui affectent le coût du médicament Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le nous mettent dans une condition où c’est le seul élément ministre de la Santé et des Services sociaux et député de de notre système de santé et de services sociaux pour Charlesbourg. lequel on ne contrôle pas la croissance des coûts. On sait maintenant que les coûts des services professionnels et Mme Caron: M. le Président. des services médicaux, entre autres, sont sous contrôle quant à leur croissance. On a eu des problèmes énormes Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, Mme la pendant plusieurs années à contrôler la croissance des leader. coûts des services hospitaliers, par exemple. Ça aussi, maintenant, c’est sous contrôle. Mme Caron: Oui, M. le Président, je fais mo­ Il y a le médicament, qui, en moyenne, au cours tion, à la suite d’une entente avec l’opposition concer­ des cinq à 10 dernières années, a eu une progression nant l’étude des crédits provisoires et malgré les articles annuelle d’à peu près 9 % à 10 % du coût par année. 49, 50 et 87, pour que nous procédions à l’adoption du Alors, il faut qu’on prenne le contrôle de cette situation- quan des crédits, en vertu de l’anicle 280 de notre là, mais il faut qu’on le fasse, devant une technologie règlement, le jeudi 28 mars 1996, après les affaires qui se développe très rapidement, en ayant un moyen qui courantes, et ce, pendant cinq heures consécutives, avec rende, sur une base universelle, à tout le monde, acces­ une suspension de 18 heures à 20 heures, dans l’ordre sible le médicament pour les mêmes conditions et en suivant: 27 mars 1996 Débats de l’Assemblée nationale 135 «Après les affaires courantes, et ce, pour une ils ont voulu agir mais n’ont jamais osé. On était loin du période de 60 minutes, il y ait échange entre la ministre discours... de la coupe aux lèvres, et tout ce qu’il fallait de la Sécurité du revenu et la députée de Saint-Henri— s’entendre dire, c’était tout simplement que, eux, ils Sainte-Anne, en accordant à un représentant de chaque espéraient faire beaucoup plus, mais on ne savait jamais groupe parlementaire une période maximale de cinq de quelle façon. On vivait beaucoup plus d’espoir en minutes pour des remarques préliminaires ainsi qu’une désespoir, et la population québécoise a vraiment dé­ période de cinq minutes aux députés indépendants; montré, en fait, son verdict lorsqu’elle nous a mis au «Par la suite, pour une période de 60 minutes, il pouvoir, en septembre 1995. Il faut croire que neuf ans y ait échange entre la ministre déléguée à l’Industrie et du gouvernement libéral étaient vraiment de l’usure pour au Commerce et les députés de Shefford et d’Argenteuil, la population québécoise; il était grand temps qu’on en accordant à un représentant de chaque groupe parle­ passe à l’action. mentaire une période maximale de cinq minutes pour des Alors, bien sûr que nous avons fait des choses, remarques préliminaires ainsi qu’une période de cinq bien sûr que nous avons établi de nouvelles solidarités, minutes aux députés indépendants; mais aussi, oui, nous avons toujours un objectif qui n’est «Pour une période de 90 minutes, il y ait échange pas à l’horizon, mais qui est un objectif qui fait partie de entre le ministre de la Santé et des Services sociaux et les nos plus grands défis, c’est celui de faire du Québec un députés de Robert-Baldwin, de Notre-Dame-de-Grâce et pays qui soit souverain et, aussi, capable d’établir des de Jean-Talon, en accordant à un représentant de chaque partenariats avec ses compatriotes. groupe parlementaire une période maximale de cinq Voilà ce pourquoi nous sommes habitués, nous, à minutes pour des remarques préliminaires ainsi qu’une faire des consultations, et nous n’avons pas peur de la période de cinq minutes aux députés indépendants; communication, bien au contraire. Vous vous souvenez, «Finalement, pour une période de 90 minutes, il M. le Président, lorsque nous avons fait des consultations y ait échange entre la ministre de l’Éducation et les sur l’avenir du Québec. Bien sûr, ces gens qui étaient, députés de Verdun et de Marquette, en accordant à un encore une fois, à l’opposition, en l’occurrence leur chef, représentant de chaque groupe parlementaire une période M. Daniel Johnson, ne voulait pas participer à ces confé­ maximale de cinq minutes pour des remarques prélimi­ rences sur l’avenir du Québec, parce qu’il disait que naires ainsi qu’une période de cinq minutes aux députés c’était peine perdue, que c’était perdre son temps, que indépendants. c’était vraiment tout à fait inhabituel, en fait, au Québec, «Aux termes de ces échanges, l’Assemblée se de donner la parole au peuple. Je comprends de leur prononcera sur le rapport de la commission plénière formation et de leur point de vue que, oui, c’est inhabituel ainsi que sur le projet de loi y faisant suite, le tout de donner la parole au peuple québécois, effectivement. conformément à l’article 281 de notre règlement.» Ce sont des diktats de gouvernement. On a connu la main Je propose que nous fassions un ordre de la de Dieu, on a connu, en fait, vous savez, des prédéces­ Chambre de cette motion. seurs qui, eux, savaient dans quelle direction il fallait aller, mais ils étaient les seuls à avoir le pas et les autres Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il consen­ voulaient aller dans une autre direction. tement pour la présentation de cette motion? Et voilà que ça change, voilà que maintenant tout change. Oui, nous avons fait des consultations, et ce que Une voix: Consentement. la population nous a demandé, c’est: Consultez-nous plus souvent; nous avons des choses à vous dire, nous Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement. avons des choses à vous communiquer; nous voulons Cette motion est-elle adoptée? être partie prenante des changements et des aspirations des Québécois et des Québécoises. C’est pourquoi nous Des voix: Adopté. avons, en fait, mis de l’avant ces formes de consulta­ tions. Et nous n’avons pas attendu, M. le Président, tout Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Je re­ simplement la rentrée parlementaire pour recommencer connais maintenant la députée de Marie-Victorin et whip ces consultations, mais ça fait bien longtemps que nous adjointe du gouvernement. Mme la députée. avons mis de l’avant cette pratique. Vous vous souvenez, M. le Président, de l’exer­ Mme Cécile Vermette cice que nous avons fait, l’assainissement des finances publiques. Un groupe de députés, nous avons mis du Mme Vermette: Merci, M. le Président. Je suis temps pendant nos vacances des Fêtes et nous avions heureuse de prendre la parole, parce que, moi aussi, à déjà travaillé à partir de décembre à faire des pistes et à mon tour, je m’associe à mon premier ministre pour réfléchir sur: Comment pouvons-nous assainir les finan­ agir, agir pour assurer l’avenir, agir aussi par solidarité, ces publiques? Et, comme nous étions dans une ré­ agir parce qu’il est grand temps que nous puissions flexion, nous avons élargi cette réflexion et nous avons rebâtir la confiance qui fait défaut actuellement à cette dit: Ce serait beaucoup plus intéressant si l’ensemble des société québécoise. partenaires socioéconomiques de notre collectivité parti­ Bien sûr, je comprends très bien les états d’âme cipaient, eux aussi, à cette réflexion et, en même temps, de nos amis d’en face, parce que, eux, pendant neuf ans, pour qu’on puisse ensemble trouver les pistes de solution 136 Débats de l'Assemblée nationale 27 mars 19% qui favoriseraient de reprendre ce nouveau départ à finances et rééquilibrer ces finances publiques du l’aube de l’an 2000. Et c’est ce qui a été fait, M. le Québec. Et de quelle façon? Nous avons, en fait, de­ Président. Et, à la suite de ces rencontres, bien sûr, il en mandé la collaboration de tous les intervenants, et sur­ ressort toujours des réflexions intéressantes, et c’est ce tout sur une base d’équité sociale et de justice sociale. que nous avons eu dans le discours de reprise de session Vous vous souviendrez, M. le Président, lorsque les avec notre premier ministre, M. Bouchard. Ce qu’il femmes ont fait la marche «Du pain et des roses». Moi, nous dit, c’est: Il faut oser agir ensemble, ne plus rester c’est ce que j’en ai compris. Ça devenait une nouvelle isolé dans sa bulle, ne plus penser que nous sommes les forme d’économie sociale, et l’économie sociale, vous seuls à être capables d’avoir la science infuse, mais que, savez, elle atteint beaucoup de niveaux. Elle ne touche non, justement, c’est par la discussion que jaillit la pas exclusivement les femmes. Elle touche les familles, lumière et c’est par la solidarité qu’on peut passer à elle touche les jeunes, elle touche les personnes âgées, l’action et établir, en fait, de nouvelles façons de faire les gens qui travaillent dans le milieu communautaire. les choses pour relever de nouveaux défis. Et, moi, je pourrais vous dire que, chez nous, en Mon- Alors, vous savez tout comme moi, M. le térégie, nous avons déjà mis de l’avant certaines politi­ Président, quels sont nos nouveaux défis. D’une part, ques d’économie sociale, notamment ce qui faisait suite c’est assainir les finances publiques et, d’autre part, c’est à la marche «Du pain et des roses», chez les femmes. remettre les gens à l’ouvrage au Québec. Ils ont le coeur Nous avons aussi, chez nous, mis une nouvelle à l’ouvrage et le goût à l’ouvrage, mais encore faut-il table sur la nouvelle politique active du marché du tra­ leur donner la chance de pouvoir accomplir, justement, vail et nous faisons un peu à l’exemple de ce qui s’est cette capacité de se mettre à l’ouvrage. Et, bien sûr, fait lors de la consultation socioéconomique ici, à pour le faire, il faut travailler avec les principaux déci­ Québec, au mois de mars, nous faisons un peu à l’exem­ deurs qui sont dans le milieu et qui peuvent faciliter et ple de cet exercice de démocratie. Chez nous, en Monté- créer l’emploi. régie, nous mettons différents intervenants pour regarder Et en ce qui concerne l’assainissement des finan­ comment nous allons pouvoir mettre le Québec à l’em­ ces publiques, je pense que ça nous revient à nous, de ploi. Chez nous, les Montérégiens et les Montérégien- notre gouvernement, de prendre les moyens pour y arri­ nes, je pense que, non, nous n’avons pas l’intention ver. Nous avons, depuis que nous sommes au pouvoir, d’attendre en septembre pour mettre en marche la ma­ réglé une partie du déficit que nous avaient laissé les chine. Mais, bien sûr, des changements d’attitude et de libéraux, en ce sens que vous vous souvenez très bien comportement ne se font pas du revers de la main. Pour que le déficit atteignait, dépassait les 5 000 000 000 $ avoir des résultats heureux, pour avoir des résultats qui lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, et nous nous seront importants, alors, il faut prendre le temps et y sommes arrangés pour que ce déficit soit baissé le plus arriver avec de bons objectifs et les atteindre, mais non possible et qu’il ne dépasse pas, en fait, les pas saupoudrer de la poudre aux yeux, comme nous y 4 000 000 000 S, ce que nous avons fait dans notre avons été habitués pendant neuf mois par l’ancien gou­ premier budget, M. le Président. Et nous avons géré vernement. avec des enveloppes fermées pour ne pas avoir de dépas­ Je vous remercie, M. le Président. sements de coûts dans les différents ministères, et c’était tout un exercice. C’était reprendre complètement ce qui Des voix: Bravo! se faisait antérieurement et c’était donner une orientation complètement différente à la gestion de l’État du Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la Québec. députée de Marie-Victorin et whip adjointe du gouverne­ • (18 h 30) • ment. Compte tenu de l’heure... Alors, M. le Président, quand on nous dit qu’on n’a rien fait... Mais je ne sais pas pourquoi ces gens ne Mme Caron: M. le Président... peuvent accepter le changement. Peu importe le change­ ment qu’on leur propose, ils sont complètement et tou­ Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, jours contre le changement. Bien sûr qu’on ne peut pas Mme la leader adjointe. parler de souveraineté, de voir un Québec différent de ce qu’il pourrait être, toute la force, toute la prospérité Mme Caron: Ha, ha, ha! M. le Président, je fais d’un Québec autonome et souverain. Non, pour eux, motion pour que nous ajournions nos travaux au jeudi 28 c’est beaucoup trop. En fait, ils aiment beaucoup être mars 1996, à 14 heures. plus «réductifs». Ils aiment les choses d’une façon où on peut n’être qu’une province, qu’on ne peut pas, en fin Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader de compte, se sortir d’une certaine forme de léthargie. adjointe, je me dois de vous mentionner que votre mo­ Ce qui est important, dans le fond, c’est de toujours être tion n’est point requise étant donné que l’heure des dans la même sauce et tourner toujours cette même travaux de l’Assemblée est passée et que, à ce moment- sauce-là, et pas d’imagination, d'aucune façon, sans là, j’ajourne de ce fait les travaux à jeudi, le 28 mars, à saveur, sans odeur. 14 heures. Merci. Alors, nous, on a décidé de mettre un peu de piquant, M. le Président. On a osé, en fait, assainir ces (Fin de la séance à 18 h 34)