2OO5 saison 2OO6

THÉÂTRE DANSE MUSIQUE MUSIQUES DU MONDE DV8, ph. J. Joyce qu’on puisseexigerd’unthéâtre public. activité,c’estlemoins sentations. Uneforte musiques dumonde,39créations,450repré- 95 programmes dethéâtre, danse,musiqueet le3juillet. pour seterminer La saison2005/2006 Le publicc’estlesuffrage universelenart. Saison 2004/2005 la vieautrement théâtral et l’imaginaire, verbal, dupoète. entre ladurée,presque matérielle,del’acte corps etletexte, entre leprésent et lepassé, La représentation, c’estlarencontre entre le théâtre – de monjugement. trouve plusparrencontre queparl’inquisition Je nemetrouve pas oùjemecherche etme ment rare pourmériterd’être signalé. les moyensdecettepolitique.C’est suffisam- auThéâtre delaVille,apporte bonanmalan, Bons résultatsaidant,laMairiedeParis découlent. public,aveclesresponsabilités quien du maiségalementliberté desartistes, Liberté diversité, fidélité,continuité… programmes –ycomprispargenre –sans de Pas depolitiquesansunnombre important auxparcours desartistes. aux confirmations, auxdécouvertes, Attention touteparticulière vince etàl’étranger. et d’être biendiffusés tantàParisqu’en pro- jets deseréaliserdansbonnesconditions des coproductions, auxpro- pourpermettre Priorité auxcréations,recherche systématique peut-être lanouveauté. lesdifférences, d’apporter et Aux artistes leur preuve. Les principesrestent lesmêmes,ilsontfait avec exigenceetpersévérance. Une politiquesuivie,desaisonensaison, une politique avaelbré c’estpouvoir toutechosesursoi. La vraie liberté, bien vivant : 238000spectateurs. débute le16septembre Jules Renard Montaigne Christophe Rauck Peretti, MichelDidym Omar Porras,MichelRaskine, Thierry De Emmanuel Demarcy-Mota,DanJemmett, : attachante etattachéeauThéâtre delaVille :unevéritableéquipe, Des metteursenscène David Ayala sous leregard admiratifetreconnaissant de Antonin Artaud de sonhaleine. soient chaudsdusouffle del’âmeouhumides Il fautquelesmots,pourêtre poétiques, Michel Rostain jouables. piècesn’étaientpas lesquels certaines Quester, SergeMaggiani, Alain Libolt, Lavant, MariefGuittier, David Ayala, Hugues : Des acteursrares Rimbaud : Des poètes,etnondesmoindres Lewis Furey Déprats Shakespeare : Un seulauteurclassique,leplusgrand vieille dame Hesse comédiens pour :pasmoinsd’unequinzainede Des troupes dant lasaison2005/2006. :plusde100comédienspen- Des comédiens musique par porIgnacioSánchezMejías Llanto Federico GarcíaLorca triomphes de encore, aveclesreprises pourcausede enfin, : Des auteurscontemporains mise enscèneparsonami ment célèbre, iciavecunepiècesansparole inconnus enFrance, en poupe, coté, : Des auteursvivants interrogation dusens […] Autantqueconstruction,lathéâtralitéest exééeet : Deux événements Angelin Preljocaj,MaguyMarin,Odile Duboc : danse danslesannées80,maturité enplus Toujours aprèsavoirbousculé la enforme, Sasha Waltz, Sankai Juku Pina Bausch, Anne Teresa DeKeersmaeker, : sa réputation Théâtre delaVille afaitconnaître etquiontfait lesplusgrands,quele parmi Des artistes, fraîcheur. réchauffe vite,etlaplacechauderetrouve sa fraîche surl’oreiller saurait être « La nouveauté,selonlemotdeStravinski,ne la dansequis’écritouserépète. De saisonensaison,c’estunpeul’histoire de tations. 40 programmes, 26créations,203représen- danse maison aveclacréationdes Marie Chouinard, WimVandekeybus Les créationsattendues de Khan Monteverdi, Sidi LarbiCherkaoui , enduo. Fabrice Melquiot Eugène Ionesco aux Abbesses. , pourêtre chantésurlamusiquede – enbonnescompagnies et ses Montaigne Johny Brown . . . , maisadaptépar Vicente Pradal Rhinocéros , enfinàParis. que larecherche d’uneplace , l’unique,lerévolutionnaire, Illuminations-Coloured plates Katherine Barker et Romane Bohringer, Denis Alain Platel Serge Tranvouez Peter Handke 2 ». Laplacefraîchese . et , Joël Jouanneau Friedrich Dürrenmatt . Deuxnouveaux, Martin Crimp Joubert (1754/1824) Joubert et de et et sonmagnifique . 1 Mladen Materic DV8, MegStuart, et enscènepar Jean Audureau La Visite dela Jean Cocteau de retour àla Jean-Michel Vêpres , fort juste- , fort et et . , misen , encore , levent . Marcia Akram , déjà Arthur sans . de . , , , La virtuosité du mouvement à l’honneur avec, Les richesses musicales de l’Inde, de l’Iran, pour la première fois à , Garry Stewart et du Pakistan toujours sans limite. l’Australian Dance Theatre. Quelques nouvelles destinations : le Liban Vera Mantero et Robyn Orlin ensemble pour avec Ghada Shbeir (chant) – la Bosnie avec un solo. Ljiljana Buttler (chant) – Zanzibar avec Ikhwani Safaa Musical Club – le Yémen avec Des reprises pour cause de triomphes : les chants et danses de la Tihama – la Libye D’avant de Sidi Larbi Cherkaoui et ses amis, avec l’Ensemble de Malouf de la Grande La Chambre d’Isabella de Jan Lauwers, Bâche Jamahiriya – le Bangladesh avec Farida de Koen Augustijnen, Quando l’uomo princi- Parveen (chant) – l’Arménie avec l’Ensemble pale è una donna de Jan Fabre. Shoghaken – le Maroc avec l’Ensemble Ibn Des re-créations emblématiques : Sécheresse Arabi – la Chine avec Liu Fang (pipa). et pluie de Ea Sola, Graine de cumquat de Á signaler tout particulièrement: le duo sitar- Sankai Juku, Noces d’Angelin Preljocaj, violon de Purbayan Chatterjee & Kala Ramnath Docteur Labus de Jean-Claude Gallotta par – le chant khyal de Kaushiki Chakrabarty – le les jeunes danseurs de l’excellent Ballet de saxophone de Kadri Gopalnath. Lorraine. C’est l’heure pour le guitariste et compositeur Hors les murs, dans des théâtres amis, pour Kurt Rosenwinkel (jazz). des lieux plus appropriés à leurs projets actuels : François Verret et Josef Nadj en soli- pas de droits sans obligations taires, Rachid Ouramdane, Boris Charmatz, Christian Rizzo, Peeping Tom. Le droit à la culture, c’est purement et simple- Deux projets « hors norme » : la rencontre ment la volonté d’y accéder. André Malraux d’Emio Greco avec Hanspeter Kyburz, et celle Des prix de place très accessibles. de Maria-Kiran avec Bach. Des formules d’abonnement individuel ou Les Abbesses, un écrin pour la danse in- relais très simples et aux multiples avantages. dienne et le flamenco : Alarmel Valli et Un journal (4 numéros par saison) et un site Madhavi Mudgal, ensemble, Priyadarsini internet pour une information juste et de Govind et Mercedes Ruiz, pour la première qualité. Choisir un spectacle, assister à une fois. création, se prépare, comme se prépare un voyage. L’inclassable et passionnant Wayn Traub pour Une équipe compétente, expérimentée, atten- la suite de sa saga entre opéra, cinéma et tive, pour vous conseiller, vous renseigner, chanson, avec trois pièces : Maria Dolorès, vous servir. Jean-Baptiste, un récital-performance de Jean-Baptiste/Wayn Traub avec 30 musiciens. amitié, fidélité et engagement 46 concerts de musique et musiques du Des associés à la production et la diffusion, monde. des amis : Le Festival d’Automne à Paris, le Centre Pompidou, le Théâtre de la Cité musique – l’excellence Internationale, le Théâtre Paris-Villette, le Une politique d’interprètes – des programmes Théâtre de la Bastille. choisis en toute liberté – des jours et des Des partenaires à l’écoute et en soutien : horaires stimulants, samedis à 17h – des prix Inter, France Musiques, France imbattables, “passeport musical” à 10 euros Culture, FIP, RFI et Mondomix. la place – une fidélité réciproque. Des acteurs de la vie culturelle : les relais, les Les cordes sont à l’honneur : le violon avec enseignants, les abonnés – merci à eux. À Gil Shaham, Fabio Biondi, Midori – le vio- Paris, dans une grande salle, sans un enga- loncelle avec Miklós Perényi, ici chez lui, Truls gement préalable du public sur des projets, Mørk, pour la première fois – deux concerts pas de créations, pas de découvertes, pas de uniques : le Quatuor Takács et l’Ensemble risques artistiques. Musikás pour Bartók, Frank Peter Zimmermann et Christian Zacharias pour allumez le feu Mozart – le piano avec Dezsö Ránki, pour son 13e passage – Café Zimmermann, de retour – La poésie est à la vie ce qu’est le feu au bois. les amis Californiens du Kronos Quartet et Elle en émane et la transforme. Pierre Reverdy New-Yorkais de Bang on a can all-stars, pour Venez, avec les artistes invités, allumer le feu leurs dernières créations – un concert “3 en pour l’espace de quelques instants, voir la vie 1”, qui a révélé tant d’artistes, avec la flûtiste autrement. Alexandra Grot, le pianiste Peter Laul et le Quatuor Ebène. L’intimité et l’excellente acoustique des Abbesses au service de la flûte de Barthold Kuijken, la guitare de Filomena Moretti, les harpes de Janá Bouskova et Marie-Pierre Langlamet, le clavecin de Céline Frisch, et les cordes du jeune Quatuor Tetzlaff. musiques du monde le directeur – une place de choix Gérard Violette

Une image de marque forte et belle, tant en 1 Jacques Rigaud, À propos, Grasset. France qu’à l’étranger – des programmes 2 Bernard Dort, La Représentation émancipée, Actes indispensables à la vie culturelle de Paris. Sud. THEATRE

AU THEATRE DE LA VILLE KATHERINE BARKER création RHINOCÉROS reprise Jean Audureau Eugène Ionesco Serge Tranvouez Emmanuel Demarcy-Mota ILLUMINATIONS – ANTOINE ET CLÉOPÂTRE COLOURED PLATES création Shakespeare création Arthur Rimbaud Lewis Furey Thierry de Peretti

L’HEURE OÙ NOUS NE FACE DE CUILLÈRE création SAVIONS RIEN L’UN DE Lee Hall L’AUTRE création Michel Didym Peter Handke Mladen Materic THEATRE HORS LES MURS AUX ABBESSES WILLIAM BURROUGHS AU THEATRE PARIS-VILLETTE SURPRIS EN POSSESSION DU TOTO LE MÔMO CHANT DU VIEUX MARIN DE d’après Antonin Artaud SAMUEL TAYLOR COLERIDGE David Ayala Johny Brown création Jacques Bioulès Dan Jemmett et Lionel Parlier LA VISITE DE LA VIEILLE DAME Friedrich Dürrenmatt Omar Porras reprise

MARCIA HESSE création CINEMA/OPERA/CHANSON Fabrice Melquiot AU THEATRE DE LA VILLE Emmanuel Demarcy-Mota WAYN TRAUB MÈRE & FILS, création Maria Dolorès COMÉDIE NOCTURNE Jean-Baptiste le spectacle reprise Joël Jouanneau Jean-Baptiste le récital création Michel Raskine

GETTING ATTENTION création Martin Crimp Christophe Rauck

LLANTO POR IGNACIO SÁNCHEZ MEJÍAS Federico García Lorca Vicente Pradal Michel Rostain Rhinocéros reprise d’un triomphe EUGÈNE IONESCO EMMANUEL DEMARCY-MOTA

[…] Prenons Rhinocéros. On y vit d’abord une DU 12 AU 26 JANVIER fable brechtienne, donc politique, qui dénon- mise en scène Emmanuel Demarcy-Mota çait le totalitarisme hitlérien ou stalinien. Il est assistant à la mise en scène vrai qu’ici la critique du totalitarisme existe, Christophe Lemaire mais ces hommes et ces femmes qui sous les scénographie Yves Collet yeux de Béranger se transforment en rhinocé- avec la collaboration de Michel Bruguière ros, ne sont poussés ni par la terreur ni par le lumières Yves Collet fanatisme, ni même par l’intérêt, mais par la avec la collaboration de Sébastien Marrey fascination, le vertige de la conformité […] Ce musique Jefferson Lembeye clonage universel, cette mutation généralisée. avec Walter N’Guyen et Arnaud Laurens Chacun se dépouille de soi pour être comme travail corporel Marion Levy tous. Il y a là une fatalité plus génétique que avec Anne Mousselet sociale. costumes Corinne Baudelot Emmanuel Demarcy-Mota, avec une intelli- masques Mirjam Fruttiger gence extrême des ruptures, des séismes, accessoires Laurent Marquès-Pastor éclaire comme nul ne l’avait fait avant lui, ce maquillages Catherine Nicolas renversement cataclysmique où un petit collaboration artistique François Regnault homme effrayé, éperdu, impuissant, se re- conseillère littéraire Marie-Amélie Robilliard trouve seul avec lui-même au cœur d’un avec Hugues Quester, Serge Maggiani, monde où personne ne le reflète, où tout le Valérie Dashwood, Charles-Roger Bour, désavoue et le repousse, l’enferme dans la Sandra Faure, Gaëlle Guillou, Céline Carrère, prison de la solitude […] Stéphane Krähenbühl, Jauris Casanova, Pierre Marcabru, Le Figaro Philippe Demarle, Cyril Anrep, Pascal Vuillemot, Benjamin Egner, […] L’allégorie d’Ionesco est sans ornements. Sarah Karbasnikoff, Olivier Leborgne Elle avance, inexorable. Elle ne dit pas comment et pourquoi au juste chaque habi- Créé au Théâtre de la Ville tant de la ville passe personnellement aux rhi- du 20 septembre au 8 octobre 2004. nocéros, mais c’est d’autant plus fort. La peste brune gagne d’elle-même, elle est contagieuse, et Béranger n’est pas particuliè- Le calme routinier d’une petite ville se trouve rement armé contre, il n’a pas une volonté balayé par l’apparition de rhinocéros, animal spéciale, une intelligence ou une culture spé- fantasmagorique, en qui, progressivement, ciales : il est autre, il échappe à la contagion. les habitants se métamorphosent. Tous sauf La mise en scène d’Emmanuel Demarcy-Mota un, naïf alcoolique, double et porte-parole de est un chef-d'œuvre. La pièce n’est certes pas Ionesco… Lorsque Emmanuel Demarcy-Mota simple, et grâce à lui tout est clair, tout va d’un entreprit de monter Rhinocéros, plusieurs seul trait […]. Il y a une étreinte magique entre s’étonnèrent : qu’est ce qu’un garçon de tren- la pièce et le spectateur. C’est dû, entre autres te ans pouvait bien trouver à cette fable, rare- choses, à une implacable interprétation de ment jouée, qui raconte un monde disparu. tous les acteurs, dont se détachent les trois Car après tout, les dangers liés aux totalita- grands rôles, Hugues Quester (Jean), Serge rismes dénoncés ici par Ionesco ont fait place Maggiani (Béranger), Valérie Dashwood à d’autres. Ce sont justement ces “autres” que (Daisy). le trentenaire a su découvrir, et d’abord le for- Michel Cournot, Le Monde matage presque inévitable imposé par le jeu social. Et comme il possède le don de faire vibrer la machine théâtrale, y compris les comédiens, les spectateurs entrent dans ce Eugène Ionesco labyrinthe infini, et puis y pensent, longtemps. Eugène Ionesco naît en 1909 en Roumanie. En 1911, sa famille l’emmène en France, patrie de […] Emmanuel Demarcy-Mota connaît bien sa mère. En 1916, son père laisse femme et son Ionesco ; au plus fort de l’angoisse, l’au- enfants, repart pour la Roumanie, se remarie. teur, souvent, rit […] Il rit, ici, dans cette méta- Eugène le rejoint en 1922, apprend le roumain, phore écrite à la fin des années 50, au cœur entre à l’université de Bucarest, découvre les de la guerre froide, créée en 1960 par Jean- surréalistes, écrit dans des revues, se marie en Louis Barrault, et qui décrit un monde que 1936, revient en France deux ans plus tard. En l’idéologie totalitaire – communiste, Ionesco 1950, il se fait naturaliser français, Nicolas venait de Roumanie, ou fasciste, la guerre Bataille monte La Cantatrice chauve aux était encore toute proche – gangrène comme Noctambules (aujourd’hui cinéma). En 1951, une inéluctable glaciation […] Marcel Cuvelier crée La Leçon. En 1952, les A.C, Les Échos deux spectacles sont repris à la Huchette où ils sont toujours donnés dans les mêmes mises en […] Il est là le talent premier d’Emmanuel scène. Ionesco écrit beaucoup (Les Chaises, Amédée, Le roi se meurt…), il est l’auteur Demarcy-Mota. Il sait lire. Il n’a pas peur. C’est incontournable, tous le recherchent, de Jean- un meneur. Un chef. Sa lucidité est magni- Louis Barrault (qui crée Rhinocéros en 1960) à fique. C’est bien plus que l’intelligence des Roger Planchon, de Jean-Marie Serreau à textes, la maîtrise du plateau. C’est un don qui Jacques Mauclair entre des centaines d’autres. ruisselle sur la scène en mouvements harmo- En 1970, il est élu à l’Académie française, et nieux […] meurt en 1994. Armelle Héliot, Le Figaro Antoine et Cléopâtre THÉÂTRE CHANTÉ création WILLIAM SHAKESPEARE LEWIS FUREY

la bête et l’homme/La noblesse de la vie/est DU 31 JANVIER AU 4 FÉVRIER de faire comme nous. » livret et musique Lewis Furey Lewis Furey a fait son éducation avec les d’après le texte de William Shakespeare grands opéras de Brecht et Kurt Weill, chez adaptation française Jean-Michel Déprats Bob Fosse, Leonard Bernstein, Gershwin… Il mise en scène Lewis Furey vient avec sa troupe montréalaise : trois musi- assistante à la mise en scène ciens, deux danseurs, six acteurs-chanteurs Élaine Normandeau (pour travailler avec lui, savoir chanter est décor Anick La Bissonnière indispensable !). Dans un espace intemporel, costumes futuriste peut-être, le spectacle prend les Michèle Hamel, Georges Lévesque sonorités d’un théâtre musical aux accents lumières Alain Lortie d’opéra moderne, joué d’un seul trait, concen- direction musicale Stéphane Aubin tré sur une durée de deux heures. chorégraphies Claude Godin « J’ai travaillé le texte de Shakespeare pour en faire sortir les enjeux familiaux, amoureux et avec Sylvie Moreau, Jean Maheux, passionnels, l’ambition des êtres exception- Renaud Paradis, Stéphane Aubin, nels de se réinventer et de se surpasser, les Roxanne Hegyesy, David Laurin, répercussions tragiques… Sur les extraits, j’ai Violaine Paradis composé une partition musicale. » Musique née du langage shakespearien, comme une sorte de lecture parallèle et infi- Antoine et Cléopâtre : drame historique de nie. Ensuite vient la question de la musique Shakespeare qui, ce n’est plus une surprise, shakespearienne en version française, tra- reste depuis près de quatre siècles notre vaillée avec Jean-Michel Déprats jour après contemporain, c’est-à-dire en phase avec le jour, dialoguant au piano et à haute voix, cher- monde tel qu’il se vit, quelle que soit l’époque. chant le mot, le juste mot qui se fond dans le Lewis Furey, librettiste compositeur et metteur rythme et le son. en scène, voit dans cette pièce des person- Le livret de Lewis Furey est divisé en sé- nages hors du commun, qui s’aiment et se quences, chacune porte un titre : L’Éternité déchirent : « La toile de fond est la montée de c’était tes lèvres, Le Temps de la paix univer- l’impérialisme, de la mondialisation, et d’une selle approche , Plutôt un fossé en Égypte, J’ai forme de despotisme familial s’étendant sur rêvé d’un empereur du nom d’Antoine… Et l’ensemble connu du globe. Antoine, puis le dernier : Immortels désirs. Cléopâtre et Octave-César, font et défont le monde. Leurs histoires d’amour et leur jalou- sie sont envahissantes, ravageuses. Nous Lewis Furey sommes au cœur de l’éternel conflit entre Né le 7 juin 1946 au Canada, Parisien inter- l’Occident et l’Orient, au cœur de l’éternelle mittent depuis les années 80, enfant prodige, à incompréhension entre monde nouveau et quatre ans et demi, il étudie le violon et à onze civilisation ancienne. Nous sommes dans la ans joue en soliste avec l’Orchestre sym- chambre à coucher de Cléopâtre ». phonique de Montréal. À quinze ans, il s’en va Rome est encore une république. Un triumvi- à New York, s’inscrit à la Julliard School, sec- rat est censé la diriger, composé de Lepide, tion musique. À vingt ans, il est auteur- compositeur-interprète, enregistre plusieurs Antoine, et Octave-César. albums, compose la musique de films, notam- « Fils adoptif de Jules César, Octave est ment L’Ange et la Femme (1977) Maria jeune, d’une ambition sans limites, sans scru- Chapdelaine (1980) de Gilles Carle, avec pules. Il aime le pouvoir, s’y consacre, c’est sa Carole Laure pour qui il compose une comédie force. Antoine n’a plus d’attrait pour la poli- musicale, Fantastica, et dont il réalise les tique romaine. Il tourne le dos au succès et vidéo-clips. Au cinéma, il met en scène Night s’interroge sur le sens de sa vie. Cléopâtre est Magic avec Leonard Cohen. Il travaille avec la une reine et une dirigeante. Diva immen- compagnie chorégraphique La La La Human sément théâtrale, elle personnifie une culture Steps, compose la musique de Jacky Paradis de la sensualité, de l’indépendance. Elle de Jean-Michel Ribes (Théâtre de la Ville, repousse les frontières, les refuse toutes. » 1978), met en scène la version de Starmania Marc Antoine a quitté son pays pour rester présentée au Théâtre Mogador, Victoire de la près d’elle à Alexandrie, elle qui incarne la Musique, Molière du meilleur spectacle musical poche de résistance à l’expansionnisme 1994. romain. « Leur passion est adulte, “multi-faceted”. Ils Jean-Michel Déprats connaissent leurs charges, savent que de Maître de conférence à l’université de Paris X- leurs actes dépend le sort de millions de Nanterre, il a traduit Le Baladin du monde occi- gens… Savent qu’ils jouent leurs carrières, dental de Synge, Tableau d’une exécution de leur bonheur, leur honneur, leurs vies. Cette Barker, L’Importance d’être constant d’Oscar histoire entremêle inextricablement amour et Wilde (Molière 1996 de la meilleure adaptation) guerre, dans une succession de violences, de entre autres, et surtout une trentaine de pièces trahisons. Effectivement le sort du monde se de Shakespeare, comédies ou drames, dont il joue dans le lit, et pour un baiser, Antoine s’ex- sait restituer les rythmes, les sonorités, pour prime avec la solennité du tribun s’adressant Matthias Langhoff, Bernard Sobel, Georges à son armée : « Ici est mon espace/Les ro- Lavaudant, Jean-Pierre Vincent… Et beaucoup yaumes sont argile/La fange de la terre/Nourrit d’autres. L’heure où nous ne savions rien l’un de l’autre création THÉÂTRE SANS PAROLE PETER HANDKE MLADEN MATERIC

Comme la sonde Voyager portant vers d’éven- er DU 22 MARS AU 1 AVRIL tuels extra-terrestres quelques chansons, mise en scène et scénographie quelques dessins gravés sur disque, bribes Mladen Materic de notre culture, il envoyait son message à cet lumières Bruno Goubert enfant qui n’était pas là, qui était encore dans costumes Bojana Nikitovic un autre monde. » direction musicale Vladimir Petricevic Mladen Materic organise le chaos en suivant collaboration artistique Vesna Bajcetic au plus près le texte de Handke. Difficile de 30 acteurs, danseurs et musiciens faire autrement, si l’on ne veut pas que se perde un déroulement dramaturgique aux Théâtre national de Belgrade/Théâtre Tattoo significations multiples, ruisselant d’ambiguï- tés, de contradictions, et apparemment dé- sinvolte : une sorte de jeu de piste. Avec la « La scène est une place ouverte dans une troupe du Théâtre national de Belgrade, il a lumière claire », indique Peter Handke en cherché, chacun essayant de trouver son ouverture de L’heure où nous ne savions rien propre rythme et la manière de le fondre dans l’un de l’autre. Et là, déambulent, se croisent, l’ensemble. Ils vont, viennent, passent, dispo- sautillent, trébuchent bon nombre d’individus. sant de quelques secondes pour imposer une Plus de cent peut-être : quelques “indéfinis- situation, un sentiment, un état, avant de pas- sables”, un Papageno à cage d’oiseleur, une ser à tout autre chose. Par de brusques arrêts, future femme d’affaires moderne… Ils s’a- une tension des gestes, un moment de bas- gitent en silence. Pas un mot n’est prononcé, cule, une hésitation anxieuse, une galopade n’est échangé. Terrain familier pour Mladen inattendue, se racontent les incertitudes d’une Materic, inventeur d’une forme qui, sans société mal dans sa peau et rageusement devoir rien au mime, ni au théâtre gestuel, ni à accrochée à la vie. la danse, ni au chant, ne passe pas par la « Quelqu’un a dit : “le monde est irréparable”. parole, qui se fait entendre par la stylisation Si on pouvait l’améliorer, depuis tout ce des comportements, par l’acuité des regards, temps, ce serait fait. Mais c’est pourquoi on des sourires, de toutes les expressions sen- continue.» sibles. Depuis Le Jour de fête (1993), jusqu’à Séquence 3 (2005) en passant par Odyssée (1999, présenté aux Abbesses), à plusieurs reprises on a pu remarquer que les person- Peter Handke nages robotisés ne sont pas de son goût. Il naît en 1942, en Autriche. En 1966, sa pièce Chez lui, nous sommes face à des êtres par- Outrage au public provoque un scandale. En 1991, il s’installe en France où son théâtre est faitement vivants, faibles ou forts, loufoques régulièrement mis en scène : Le pupille veut ou terrifiants, ridicules ou séduisants… Des être tuteur créé par Philippe Adrien, La êtres humains, proches parents de ceux ras- Chevauchée sur le lac de Constance, Les gens semblés par Peter Handke, avec qui Mladen déraisonnables sont en voie de disparition, Par Materic a déjà travaillé sur La Cuisine (2001). les villages par Claude Régy. En 1992, Luc Là, de temps en temps fusaient quelques Bondy monte à la Schaubühne de Berlin mots. Ici, pas un seul. Mais, minutieusement L’heure où nous ne savions rien l’un de l’autre, décrite, une agitation au bord de l’affolement, spectacle présenté au Châtelet. Pour le ciné- découpée en plages séparées par des ma, il tourne La Femme gauchère en collabo- “pauses”, et qui, à partir d’un désordre plutôt ration avec Wim Wenders, et co-écrit le scéna- joyeux, montent progressivement vers une rio des Ailes du désir. sorte de folie burlesque, d’exaspération angoissée. Pour Mladen Materic, chaque plage correspondrait à une partie de la jour- Mladen Materic née, et les heures passent, et la lumière Dans les années 80, il fonde le Théâtre Tattoo, change, et personne n’est plus tout à fait le et en 1984 la Scène ouverte Obala qui acquiert même. rapidement une grande importance en « Allant de l’un à l’autre, nous sommes Yougoslavie. Dès 1986, le Théâtre Tattoo tour- quelque part, entre le rien et le tout, entre ne en Espagne, en Italie, en Autriche, en comédie et drame, entre la jeunesse avec sa Allemagne. Au Festival d’Edimbourg, il reçoit le curiosité positive, et la vieillesse avec cette Fringe First Award, et rencontre le directeur du capacité de relativiser les choses, que l’on Théâtre Garonne à Toulouse, qui l’invite en résidence. Il monte en 1993 Le Jour de fête, nomme sagesse. » donné également à Paris au Théâtre de la Il imagine Peter Handke affalé dans un café Bastille (Festival d’Automne). En 1995, Le ciel au bord d’une place bordée d’un côté par une est loin la terre aussi. En 1997, Le Petit grande surface, de l’autre par un marché aux Spectacle d’hiver, en 1999, l’Odyssée donnée légumes, et face à un immeuble de briques aux Abbesses. 2001 marque sa première colla- tristes. boration avec Peter Handke : La Cuisine. « Il m’a parlé de cette place, je l’ai photogra- L’heure où nous ne savions rien l’un de l’autre, phiée. Un endroit où passent tous les habi- est sa première mise en scène à Belgrade tants du quartier. Il m’a dit aussi, quand je lui depuis son installation à Toulouse en 1992. ai demandé d’où venait son titre, qu’il a écrit Entre-temps, il a monté Séquence 3 donné à ce texte pour sa fille avant qu’elle naisse. Paris, au Centre Pompidou. photos Roger-Viollet

1 2 3 les auteurs

1. Arthur Rimbaud photos D. Lewis, Enguerand, J. Robert 2. Antonin Artaud 3. Federico García Lorca 4. Fabrice Melquiot

5. Johny Brown 4 6. Martin Crimp 7. Peter Handke 8. Joël Jouanneau 9. Jean Audureau

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9 photos J.J. Kraemer, D. Boeno

8 William Burroughs surpris en possession du Chant du vieux marin de Samuel Taylor Coleridge JOHNY BROWN DAN JEMMETT création

serais jamais devenu écrivain si ce n’était 21 SEPTEMBRE AU 8 OCTOBRE pour la mort de Joan…” Lui non plus ne s’est texte d’après William Burroughs Caught in jamais pardonné. Possession of the Rime of the Ancient « Je suis tombé sur cette pièce, à un moment Mariner de Johny Brown où je cherchais à oublier mon obsession de la traduction Marie Paule Ramo littérature élisabéthaine. J’ai éprouvé un choc mise en scène Dan Jemmett profond. assisté de Céline Gaudier « J’avoue me sentir généralement en grande scénographie Denis Tisseraud difficulté devant le théâtre contemporain. assisté de Jeanne-Lucie Schmutz Seulement, je connais Johny Brown, nous lumières Arnaud Jung avons travaillé ensemble à plusieurs reprises. vidéo Bruno Deville J’ai été immédiatement emballé par la ma- costumes Sylvie Martin-Hyszka nière dont il a organisé le dialogue des deux avec Carine Barbey, Denis Lavant, langages, celui de Coleridge, celui de Pascal Oyong-Oly… (distribution en cours) Burroughs. » On peut faire confiance à Dan Jemmett, entraîné par Denis Lavant (Burroughs), pour à De Shakespeare à Middleton, de Shake, ver- son tour “organiser” le choc des deux univers sion très personnelle de La Nuit des rois, à flamboyants : Dog Face d’après The Changeling et Femmes « J’ai le sentiment qu’avec son côté déjanté et gare aux femmes, Dan Jemmett ne nous a son impeccable précision, il va apporter au certes pas habitués à un théâtre tranquille- personnage de l’authenticité, une innocence, ment rationnel. Si aujourd’hui, il décide de une forme de tendresse. » s’éloigner des auteurs élisabéthains et de leurs extravagances, c’est pour explorer d’autres formes d’origine plus récente, et tou- Johny Brown jours franchement allumées. Il s’agit là d’une Né en 1961 à Newcastle, il vit à Londres, parti- étrange rencontre imaginée par Johny Brown, cipe au groupe rock The Band of Holy Joly, DJ, musicien, rocker : celle de Samuel avec lequel il a enregistré plusieurs albums Coleridge et de William Burroughs. Le premier pendant les années 80-90, et tourné principale- ment en , en Russie, aux États-Unis. Il se trouve attaché au mât d’un navire sur est également programmateur et présentateur lequel le second voyage (dans tous les sens de radio, auteur dramatique pour le groupe iti- du terme) avec quelques amis pas vraiment nérant Underground Utopia, qui en 2002 crée à nets : le peintre Jean-Michel Basquiat, le gui- Glasgow, William Burroughs caught in posses- tariste punk Johnny Thunders, la féministe sion of the Rime of the Ancient Mariner. À plu- Kathy Acker. Sont également de la partie : la sieurs reprises il a collaboré avec Dan Mort, et la Vie dans la Mort. D’où le titre de la Jemmett, notamment sur Quartet de Heiner pièce : William Burroughs surpris en posses- Müller. sion du Chant du vieux marin de Samuel Taylor Coleridge. Dans la vision de Johny Brown, bien des William Burroughs choses rapprochent les deux poètes, et Né en février 1914 dans le Missouri, il grandit à d’abord un goût affirmé pour les paradis et les Chicago, puis s’en va à New York où il enfers artificiels. Burroughs ne s’en est jamais rencontre Allen Ginsberg, Jack Kerouac. La caché, au contraire. Il en a fait le thème de beat generation est là, pour qui contestation et - son œuvre. Coleridge vivait en un autre drogue ne font qu’un. Ce qui amène Burroughs à voyager, surtout en Amérique latine, et à temps, moins “libéré”. Or, explique Dan Tanger où il écrit Le Festin nu, son œuvre maî- Jemmett, il était un adepte de l’opium, qu’il tresse. Toujours “accro”, il meurt à 83 ans d’une consommait sous forme de laudanum : crise cardiaque. « Un médicament alors recommandé pour calmer les douleurs. Les tranquillisants d’au- jourd’hui étaient inconnus. Mais enfin, il est Dan Jemmett l’un des premiers à avoir osé en parler. Pour Né en 1967 à Londres. Son père, marionnettis- cette raison, il a traîné une perpétuelle culpa- te, a tenu une grande place dans sa vie, y bilité et son existence a été une torture. compris professionnelle. Après avoir suivi son « Tout part d’un poème de Coleridge, Le exemple et essayé les marionnettes, avec la Chant du vieux marin, dans lequel il est ques- troupe Primitive Science dont il est cofon- tion d’un navire suivi tout au long de sa route dateur, il joue Brecht entre autres, et fait par un albatros. Un jour, sans aucune raison, connaître Heiner Müller. À Londres, au Young le vieux marin tire et l’abat. À partir de là, ses Vic, il met en scène un Ubu de Jarry, repris en compagnons meurent l’un après l’autre. De 2000 en version française à Paris. En 2002, plus en plus seul, et jusqu’à la plus extrême aux Abbesses, Shake d’après Shakespeare et solitude, il poursuit son chemin. Quant à La Nuit des rois, (prix de la révélation du Burroughs qui par ailleurs se disait guidé par Syndicat national de la Critique) font découvrir Coleridge quand tout allait mal, il a tué sa son talent pour plonger sans bouée dans les plus folles extravagances élisabéthaines. femme un jour dans un bar, en voulant jouer à Talent confirmé, toujours aux Abbesses, avec Guillaume Tell. Il lui a mis un verre sur la tête, deux adpatations de Middleton : en 2003 Dog a tiré, a raté le verre. Il a écrit : “Je me vois Face, en 2004 Femmes gare aux femmes. affreusement contraint de conclure que je ne La Visite de la vieille dame reprise d’un triomphe FRIEDRICH DÜRRENMATT OMAR PORRAS

[…] L’outrance est probablement le seul lan- DU 18 AU 30 OCTOBRE gage raisonnable pour rendre compte d’une traduction Jean-Pierre Porret histoire aussi effroyable : le consentement de mise en scène Omar Porras toute une communauté humaine à la mise à assistants à la mise en scène mort d’un villageois, dans le seul but de récu- Domenico Carli, Joan Mompart pérer une fortune. Dürrenmatt dénonce la scénographie Fredy Porras, Omar Porras cupidité des hommes, et surtout ce mal décors Fredy Porras contemporain qui tend à fondre la responsa- masques Fredy Porras, Isabelle Matter bilité individuelle dans l’immunité collective costumes Maria Gálvez, Omar Porras […] lumières Mathias Roche Frédérique Meichler, L’Alsace musique et univers sonore José-Luis Asaresi, Andrés García, Ludovic Guglielmazzi, […] Omar Porras, servi par des comédiens Omar Porras parfaits, invente pour cette sarabande gro- avec Claude Barichasse, Jean-Marc Bassoli, tesque de l’irresponsabilité et de la culpabili- Séverine Blanc, Francisco Cabello, té, de la trahison et de la vengeance, de la Camille Figuéréo, Stéphanie Gagneux, compromission avec l’ordre matériel des Philippe Gouin, Fabiana Medina, choses et de l’absence d’idéal, des images Alexandre Vigouroux, Omar Porras, splendides […] Il met en scène en grand illu- Hélène Seretti sionniste l’illusion fatale d’une époque – la nôtre – qui sème la mort au nom de la justice Présenté aux Abbesses du 27 avril au 15 et du progrès. Et la frappe est d’autant plus mai 2004. forte qu’elle porte les masques du théâtre. Fabienne Darge, Le Monde

[…] Ces masques qui collent au visage, Ma sorcière bien aimée, Tel un messie ma- appuyés par des costumes qui surlignent les léfique, La Parade des âmes en peine, Petit traits de caractère, ouvrent grandes les portes meurtre entre amis… à une pantomime à l’ironie grinçante de pan- Quelques titres, parmi ceux des nombreux tins désarticulés par un tragique d’où le divin articles qui ont accompagné la Vieille Dame a été irrémédiablement chassé par le tout en sa visite, depuis la venue du spectacle pouvoir de l’argent […] d’Omar Porras la saison dernière aux Vincent Pion, Le Quotidien de la Réunion Abbesses. Cette dame qui, immensément riche et maintes fois veuve, retrouve le village où elle fut jeune et pauvre, d’où, séduite et […] Jadis on a pu voir dans La Visite de la abandonnée, elle fut chassée, que par ven- vieille dame les prémices de la société de geance, elle a ruiné. Mais sa vengeance, elle consommation contaminant l’Europe qui rele- ne l’a pas totalement savourée. À ses anciens vait ses ruines. Porras, lui, en revient pure- bourreaux, elle va proposer un terrible mar- ment et simplement à la mère, « La femme, ché… Depuis sa création, la pièce a été mon- dit-il, sans laquelle nous ne sommes rien ». tée partout, dans toute la France et au-delà, la C’est vrai, après tout, surtout pour lui car, de version Omar Porras a stupéfié, enthousias- son propre aveu, sa mère dut, elle aussi, en mé, a fait surgir bien des réflexions, bien des semblables circonstances quitter son village émotions, et l’envie de les partager. natal. Une telle implication affective est rare. […] Il y a là, au fond, une gravité qui excède le seul enjeu du théâtre, une revanche par le […] Féroce et sublime histoire d’amour que fils interposé. cette Visite de la vieille dame, du Suisse Jean-Pierre Léonardini, L’Humanité Friedrich Dürrenmatt (1921-1990) créée en 1956, et interprétée depuis par les plus grandes actrices. C’est pourtant en travesti, avec masques et bergamasques, que l’in- Omar Porras carne lui-même, sur le mode grotesque, le C’est à Bogota, que fasciné par le cérémonial metteur en scène colombien Omar Porras. Et baroque des messes colombiennes, il choisit le par on ne sait quelle “farcesque” alchimie, la théâtre et fait son apprentissage de comédien. fable tout entière, montée en très morbide Dans les années 80, il tente l’aventure pari- commedia dell’arte, nourrie en permanence sienne, gagne sa vie avec des spectacles de marionnettes dans le métro. Puis il se fixe à d’un luxuriant baroque latino-américain, n’en Genève où il fonde le Teatro Malandro, avec est que plus terrible, retrouve les accents de lequel il monte en 1993 la première version de la tragédie antique […] La Visite de la vieille dame, de Dürrenmatt, qui Fabienne Pascaud, Télérama le fait connaître en France. Suivent Noces de sang de García Lorca présenté en 1999 aux Abbesses, de même que l’année suivante les Une grande fête des morts. Une mascarade Bakkantes, et en 2004, la seconde version de grinçante dans les éclats de cuivres. Il fallait La Visite de la vieille dame et L’Histoire du sol- l’intelligence et l’audace d’Omar Porras pour dat. Au Théâtre de la Ville, il a présenté Ay ! entendre sous la surface polie de la comédie Quixote en 2002, et El Don Juan en 2005. de mœurs, la sarcastique férocité, la couleur criarde, l’outrance […] Armelle Héliot, Le Figaro Marcia Hesse création FABRICE MELQUIOT EMMANUEL DEMARCY-MOTA

deuil”. Mais est-ce possible, en groupe ? Est- DU 9 AU 26 NOVEMBRE ce que le deuil peut être partagé ? mise en scène Emmanuel Demarcy-Mota « Tous s’agitent autour de la table, se assistant à la mise en scène comportant le plus banalement du monde. Christophe Lemaire Mais le fantastique, le fantasme s’insinue. Dès collaboration artistique François Regnault le début, ils se préparent à déguster des scénographie Yves Collet coquillages, qui deviennent des “êtres entre la avec la collaboration de Michel Bruguière vie et la mort”, à dévorer. Et la femme qui est création sonore Jefferson Lembeye là, que personne ne peut, ne veut voir, et qui costumes Corinne Baudelot les hante, c’est la Mort. maquillages Catherine Nicolas « “La Mort n’a pas de phrase”, ils ne peuvent environnement image Alain Paul Mallard pas en parler, ne peuvent pas dire l’essentiel. avec Alain Libolt, Philippe Demarle, Ils tournent autour du pot, ils se tiennent là, Benjamin Egner, Louis Arene, comme autour d’un grand trou. Comme lors- Marie Armelle Deguy… qu’on creuse un puits. On creuse la terre, on (distribution en cours) guette, on regarde l’eau monter, on reste là, attentifs, pour tout de suite construire la paroi La quatrième pièce de Fabrice Melquiot que de briques, ce doit être immédiat, sinon l’eau monte Emmanuel Demarcy-Mota (après Le s’échappe. Et comme ça, en attendant, on Diable en partage, L’Inattendu et Ma vie de parle de tout et de rien. chandelle présenté en 2004 aux Abbesses) « Ils sont là, réunis pour un souper en souve- porte un nom de femme : Marcia Hesse. Et nir de Marcia, et vont s’en aller. Ils n’en ont pas cette femme encore toute jeune est morte. envie, n’en ont pas vraiment la force, ne Son fantôme parcourt la villa au bord de la peuvent pas faire autrement, c’est elle qui les mer où, pour célébrer à la fois ce qui aurait dû oblige. Elle l’a écrit avant de mourir, et la mère être son anniversaire et les fêtes de fin d’an- va transmettre son vœu, ses ordres. » née, se réunit sa famille. Une famille d’aujour- Ils s’en vont dans la tempête. Ce n’est pas une d’hui, au sens large du terme. Plutôt une tribu, fin, c’est un commencement peut-être. L’adieu composée des parents proches et collaté- au deuil. raux, plus quelques amis. Treize en tout. Histoire de conjurer le sort, à table il y aura Fabrice Melquiot son chapeau à elle, Marcia. C’est à la Compagnie des Millefontaines L’histoire du théâtre est faite d’histoires de qu’Emmanuel Demarcy-Mota rencontre familles, et celle-ci ne faillit pas à la tradition. Fabrice Melquiot, alors comédien. Il a vingt- Elle arrive dispersée, et dans le temps compté deux ans (il est né en 1972) et déjà il écrit, en de ce rituel factice, essaie à toute force de se direction des jeunes publics : Les Petites sentir unie. Et puis bien entendu, elle se Mélancoliques, Les Jardins de Beamon. Peu à déchire à belles dents, mais sans haine, avec peu, l’écriture occupe tout son temps. Il re- une réjouissante vitalité. Comme souvent chez trouve Emmanuel Demarcy-Mota qui monte Le Fabrice Melquiot, la famille se trouve en butte Diable en partage (prix du Nouveau Talent de la SACD, prix Jean-Jacques Gautier du Figaro, à la violence extérieure : la guerre dans Le révélation de l’année pour le Syndicat de la Diable en partage ; la mainmise des regards Critique) et L’Inattendu au Théâtre de la Bastille virtuels sur la vie privée dans Ma vie de chan- puis à la Comédie de dont il vient d’être delle ; ici, une tempête qui isole la villa du nommé directeur, où il fait venir Fabrice monde. Le genre de huis clos qu’aime le Melquiot comme auteur associé, où il crée théâtre, mais bousculé par l’intrusion du fan- Marcia Hesse. Il n’est pas le seul à s’intéresser tastique, par l’invisible présence de Marcia. à cette écriture, traduite en allemand, en espa- Elle est là dans leurs pensées à tous, ils ne gnol, en italien. En 2003, pour la première fois peuvent s’en détacher. la Comédie-Française présente un spectacle Alors, il ne s’agit plus d’un souvenir supplé- pour jeunes publics, et c’est Bouli Miro de mentaire des Atrides ou de La Noce chez les Fabrice Melquiot. petits-bourgeois, chef-d’œuvre burlesque de Brecht tant imité, mais d’une écriture qui, dans sa construction même, définit le caractère Emmanuel Demarcy-Mota singulier de la famille, et de chacun de ses En 1989, naît au lycée Rodin, par la volonté membres. d’Emmanuel Demarcy-Mota, fils de metteur en Les répliques sont brèves, comme si tous se scène et de comédienne, la Compagnie Millefontaines. Après avoir affronté Ionesco, connaissaient suffisamment pour ne pas avoir Pirandello, Wedekind, elle poursuit avec besoin de préciser les arrière-plans. Chacun Léonce et Lena de Büchner au TCA d’Auber- sait de quoi l’autre parle. Ce qui ne les em- villiers. En 1997, en résidence au Forum cultu- pêche pas de glisser sur la pente de ces men- rel du Blanc-Mesnil, elle crée Peine d’amour songes dont personne n’est vraiment dupe. Et perdue de Shakespeare dans une traduction c’est l’un des points qui touchent Emmanuel de François Regnault avec qui travaille alors Demarcy-Mota (voir sa mise en scène des Six Emmanuel Demarcy-Mota, notamment sur Six Personnages en quête d’auteur de Pirandello Personnages en quête d’auteur, créé en 2001 en 2001). au Théâtre de la Ville. En 2002, nommé à la « C’est dans le mensonge, dans la recons- Comédie de Reims, il y fait venir, en tant qu’au- truction des vérités particulières que le théâtre teur associé, Fabrice Melquiot dont il monte Le devient intéressant. Pendant toute la repré- Diable en partage et L’Inattendu, Ma vie de sentation, cette famille, lourde de ses secrets, chandelle (présenté aux Abbesses) et trois de ses non-dits, tente de se reconnaître, de monologues. En 2004, il retrouve Ionesco, trouver son identité pour parvenir à “faire son Rhinocéros, et le Théâtre de la Ville. photos Enguerand, E. Manuel, X. DR

12 3 photos J.-P. Lozouet, M.photos J.-P. Del Curto

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les metteurs en scène 5

1. Emmanuel Demarcy-Mota 2. Michel Rostain 3. Mladen Materic photos Enguerand 4. Omar Porras 5. Christophe Rauck 6. Michel Raskine 7. Serge Tranvouez 8. Dan Jemmett 9. Michel Didym 10.Lewis Furey 11.Thierry de Peretti 6 7 photos J.-P. Lozouet, Enguerand, H. Rosentalski photos J.-P. 8 9 Mère & Fils, comédie nocturne création JOËL JOUANNEAU MICHEL RASKINE

réelle maturité. M’est apparu que le théâtre DU 30 NOVEMBRE AU 17 DÉCEMBRE permet de façon flagrante la rencontre entre de Joël Jouanneau deux générations, entre mère et fils, leur jonc- mise en scène Michel Raskine tion, leur affrontement, quelque chose d’inévi- décor Stéphanie Mathieu table, de fatal. costumes Josy Lopez « Alors quoi ? Hamlet ? C’est trop tôt, et je n’ai lumières Julien Louisgrand pas voulu examiner la liste des pièces traitant avec Marief Guittier, David Mambouch, de ce thème. Donc, j’ai pensé à Joël Michel Raskine, Christian Ruché Jouanneau. Dans l’idée peut-être de prolon- ger et renouveler notre épatante expérience commune sur Kiki l’Indien qui parlait entre Mère & Fils, comédie nocturne, commande de autres, d’une femme et de son gosse. Nous Michel Raskine, metteur en scène, à Joël nous sommes demandés : qu’auraient-ils pu Jouanneau, également metteur en scène, devenir ? Non pas qu’ils reprennent le fil de mais en l’occurrence uniquement auteur. Leur leurs aventures passées. Pas du tout. Ils ont seconde expérience commune, après Kiki été longtemps séparés, se retrouvent, et plus l’Indien, comédie alpine en 1989. Entre- tard arrive le père. temps, en 1998, Olivier Py avait répondu au « Entre eux, il y a un secret. Qui dit retrou- défi avec Théâtres – d’ailleurs présenté aux vailles dit règlement de comptes. Le temps Abbesses en 2000. Pourquoi une commande, d’une nuit, on joue du piano, de l’accordéon, alors que les textes inédits ne manquent pas, on se fait la guerre, on tue quelque chose, le et qu’elle oblige à s’engager avant de savoir si passé, le présent… Et puis la nuit s’achève et le résultat va correspondre à l’attente ? c’est le point du jour. Que va-t-il se passer? » D’abord Michel Raskine s’engage sur des auteurs avec lesquels il peut s’entendre. Joël Jouanneau Ensuite, il obéit à une sorte de pulsion, de Journaliste, prisonnier à Beyrouth, gardé par besoin à un moment donné d’aller vers l’in- un enfant, de retour en France, il écrit Nuit connu. Un inconnu balisé, certes, mais qui d’orage sur Gaza, et se dirige particulièrement sait ? vers le théâtre pour jeunes publics : Kiki l’Indien « Évidemment, ce risque existe toujours. (1989), Mamie Ouate en Papouasie (1990). En Seulement comme je n’ai ni de goût ni de 1981, il découvre David Warrilow au TGP de capacité pour l’écriture, j’évite au moins la ten- St-Denis dans Le Dépeupleur de Beckett, tation de me faire écrivain par procuration. Je monte avec lui En attendant Godot, La m’adresse à des gens qui connaissent mon Dernière bande (1992) et aussi L’Hypothèse travail et je leur demande : “Est-ce que ça t’in- (1987) L’Inquisitoire (1992) de Pinget, Les téresserait d’écrire pour moi ? Et pour tels Enfants Tanner d’après Walser, entre beau- coup d’autres. Nommé en 1989 artiste associé acteurs ?” Car ils sont, je m’en rends compte, au Théâtre de Sartrouville, puis en 1999 codi- au cœur de chacun de mes projets, quel qu’il recteur de Heyoka Jeunesse, et en 2001 du soit. » théâtre devenu centre dramatique national, il y Naturellement, en premier lieu, Michel Raskine reste jusqu’en 2003, continue d’écrire, de pense à Marief Guittier : elle est exception- mettre en scène. Dernièrement : Elfriede nelle. Et puis ils travaillent ensemble depuis Jelinek, Les Amantes au Théâtre Ouvert ; Jean- toujours, depuis le temps – les années 80 ! – Luc Lagarce, Juste la fin du monde, J’étais où ils appartenaient à la Salamandre de dans la maison… à Bussang et à la Cité Gildas Bourdet, Centre dramatique du Nord : Internationale ; Lars Noren, Embrasser les « Le cas de Marief est particulier. Notre rela- ombres au Vieux-Colombier. tion de travail ne cesse de me surprendre, à tous points de vue. Jamais je n’aurais imaginé assumer une telle continuité professionnelle. Michel Raskine De 1973 à 1978, il commence sa carrière avec Qu’au jour d’aujourd’hui nous ne ressentions Roger Planchon en tant qu’acteur, avant de aucune lassitude est tout de même étonnant. rejoindre Gildas Bourdet au Centre dramatique Peut-être parce que de Jean-Paul Sartre à du Nord. Il joue notamment dans Une station Nathalie Sarraute en passant par Manfred service (1985), Les Crachats de la lune (1987), Karge ou Dea Loher, Marguerite Duras ou spectacles invités au Théâtre de la Ville en Robert Pinget, ensemble nous avons exploré 1985 et 1987. Il se lance dans la mise en des auteurs vraiment différents ! Et puis il lui scène, avec Marief Guittier dans Max Gericke arrive de travailler avec d’autres, et justement ou pareille au même de Manfred Karge : en Joël Jouanneau pour qui elle a joué J’étais 1984, 1995 et 2003, continue en 1991 avec dans ma maison… de Jean-Luc Lagarce, au Huis clos de Sartre, L’Épidémie et Un rat qui dernier Festival de Bussang. passe * d’Agota Kristof en 1993. En 1995, « De mon côté, j’ai toujours envie de connaître nommé au Théâtre du Point du Jour à Lyon, il de nouveaux acteurs, l’une des raisons pour monte L’Amante anglaise de Duras, (1996) lesquelles j’aime bien travailler à l’ENSATT Chambres d’amour * d’Adamov (1997), et est (École nationale supérieure des arts et tech- considéré comme « le plus allemand des metteurs en scène français », Au but de niques du théâtre). C’est formidablement revi- Thomas Bernhard (2000), Théâtres* d’Olivier gorant. Donc, comme dernier exercice de la Py, Barbe Bleue, espoir des femmes (2001), dernière promotion, j’ai monté Atteintes à sa Les Relations de Claire * (2003) de Dea Loher. vie de Martin Crimp. J’ai remarqué un élève, À l’ENSATT à Lyon, il a dirigé La Maison d’os David Mambouch, à ce moment charnière de Dubillard (1998), Atteintes à sa vie de Martin entre école et “vraie vie”. Il doit avoir dans les Crimp (2003). vingt-deux ans, garde un aspect extrêmement juvénile, et en même temps témoigne d’une * présenté au Théâtre de la Ville. Getting attention création MARTIN CRIMP CHRISTOPHE RAUCK

Les personnages abordent brutalement les DU 10 AU 28 JANVIER situations. Ils sont ce qu’ils disent au moment traduction en cours où ils le disent : Martin Crimp tient beaucoup à mise en scène Christophe Rauck cette façon d’être, directe jusqu’à la férocité. scénographie et costumes Aurélie Thomas « Il ouvre des portes, pose les problèmes et lumières Olivier Oudiou se refuse à avancer une quelconque solution. vidéo Thomas Rathier Il ne veut rien imposer, et nous devons le création musicale Nehil Bordures suivre dans cette attitude. Nous sommes collaboration chorégraphique aidés en cela par la brièveté de la pièce : une Caroline Marcadet heure trente. Elle ne nous laisse le temps d’in- avec Philippe Bérodot, Clotilde Hesme, sister sur rien. Nous sommes obligés à la rapi- Annie Mercier, Jean-Philippe Meyer, dité, à la précision, à la force de l’essentiel, Thomas Rathier, Philippe Smith… sans pour autant sacrifier à la provocation (distribution en cours) facile. Derrière la rudesse des comporte- ments, il y a des inquiétudes, des doutes, des angoisses, des désirs, une réelle complexité, L’histoire se passe dans un immeuble de la une vraie humanité. banlieue londonienne, l’un de ces endroits où « À la première lecture, je me suis souvenu vivote une population un peu prolétaire, un d’une phrase qu’Ariane Mnouchkine m’a peu petite-bourgeoise, et surtout paumée. On rapportée à propos de son spectacle sur pourrait croire à une “tranche-de-vie”, dans la les immigrés, Le Dernier Caravansérail ; quel- mouvance du théâtre ou du cinéma social bri- qu’un lui a dit : “Nous le savions, maintenant tannique. Si ce n‘est que l’auteur en est Martin nous le ressentons”. Interroger l’actualité en y Crimp, virtuose en l’art de brouiller les pistes. impliquant émotionnellement le public, c’est Preuve immédiate, le titre : Getting attention. l’une des fonctions du théâtre. » Quelque chose comme “attirer l’attention”, alors que le problème est celui d’une petite fille invisible dont l’agonie passe inaperçue. Martin Crimp Sa mère est trop occupée à tenter de séduire Né le 14 février 1956, il suit ses études à pour se sentir vivre, la voisine à en surveiller Cambridge, fait ses débuts de dramaturge en les faits et gestes, le voisin à chercher du tra- 1982, avec Living remains à l’Orange Tree vail… Des gens enfermés, aveuglés, dont Theatre, salle de la périphérie londonienne. En l’histoire se construit autour d’une absence. 1991, il part en résidence à New York. Il écrit Mais deux personnages masqués viennent pour la radio, et collabore régulièrement avec le rapidement interdire toute tentation natura- Royal Court, théâtre réservé aux textes inédits liste. Pourquoi ces masques, forcément contemporains. C’est là qu’en 1991, est créé Getting attention. En 1997, Atteintes à sa vie – effrayants ? Se posant la question, la posant à que Stanislas Nordey met en scène en 2003 Martin Crimp, le metteur en scène Christophe dans une traduction de Christophe Pellet – en Rauck y trouve une référence aux traits 2000, La Campagne que, deux ans plus tard, simiesques, aux visages grimaçants des gui- Luc Bondy monte au Burg Theater de Vienne, gnols et polichinelles de nos jeunes âges. avant de créer en 2004 à Londres Cruel and « J’adore les marionnettes, y compris dans ce tender. Les deux spectacles sont présentés à qu’elles ont de monstrueux. Le monde Paris au Théâtre national de la Colline et aux fabrique des horreurs avec lesquelles Bouffes du Nord. Francophone, Martin Crimp a s’amusent les enfants, cela fait partie de notre adapté notamment Marivaux (Le Triomphe de quotidien. Au-delà de leur banalité, les l’amour), Molière (Le Misanthrope), Genet (Les personnages qui ici se débattent appa- Bonnes), Koltès (Roberto Zucco), Ionesco (Les raissent comme des monstres, indifférents au Chaises). En France, son théâtre est publié aux cauchemar d’une gosse, vivant à côté d’elle Éditions de l’Arche. sans la voir. Ne la voyant pas non plus, le public participe de cet aveuglement, et nor- Christophe Rauck malement se pose des questions. En 1991, il entre au Théâtre du Soleil, joue Les « Martin Crimp, quand je l’ai rencontré, m’a Atrides et la pièce d’Hélène Cixous, La Ville parlé d’un couple âgé, des voisins de ses parjure ou le Réveil des Erinyes, puis en 1996, beaux-parents. Il était fasciné en voyant le avec Silviu Purcarete, L’Orestie. Cette même mari utiliser, pour faire sécher le linge, des année, il fonde sa compagnie Terrain vague pinces avec des harmonies de couleurs très (titre provisoire) avec laquelle il retrouve la Cartoucherie d’Ariane Mnouchkine pour y étudiées : le grand raffinement. Et puis ils ont mettre en scène Le Cercle de craie caucasien déménagé, alors seulement on s’est rendu de Brecht, qui tourne deux ans et est présenté compte que cet homme brutalisait sa femme, au Berliner Ensemble. En 1997, il aborde et qu’à plusieurs reprises, elle avait dû être Shakespeare : Comme il vous plaira, continue emmenée d’urgence à l’hôpital. en 1999 avec La Nuit des rois après un stage « Le sujet de la pièce pourrait fournir un fait auprès de Lev Dodin à Saint-Petersbourg dans divers au Journal de 20h. Mais au lieu d’être le cadre de l’Institut Nomade. En 2000, il monte traité en deux minutes, il laisserait le temps Le Théâtre ambulant Chopalovitch de d’entrer au cœur des choses comme le font Simovitch au Théâtre du Peuple de Bussang aujourd’hui les documentaires qui ne dont il prend la direction en septembre 2002. Il craignent pas de prendre position, multiplient y donne La Vie de Galilée de Brecht, Le Dragon les points de vue. Ici aussi les points de vue d’Evgueni Schwarz, présenté cette saison à la diffèrent et s’affrontent. Les scènes s’entre- Cité Internationale, où son Rire des asticots choquent, se râpent, se frottent l’une à l’autre. d’après Cami avait déjà été accueilli. Llanto por Ignacio Sánchez Mejías FEDERICO GARCÍA LORCA VICENTE PRADAL/MICHEL ROSTAIN

compagnes des toreros ont peur d’assister DU 31 JANVIER AU 11 FÉVRIER aux corridas. Elles attendent. Elles espèrent. oratorio de Vicente Pradal A las cinco de la tarde.… (À cinq heures de mise en scène Michel Rostain l’après-midi…) La phrase hante et scande assistant à la mise en scène Daniel Lecoyer l’ouverture du poème chanté en espagnol scénographie Jean-Pierre Larroche sans surtitre. C’est par la musique, unique- son Nicolas Jobet ment par la musique que Vicente Pradal veut lumières Celso Domeque faire entendre, comprendre, ressentir, le sang costumes Nathalie Trouvé qui coule des paroles de García Lorca (mais chant Maria Luna, Vicente Pradal, sa propre traduction du texte est disponible). Luis de Almería, Chango Manzo ¡Que no quiero verla !… (Non, je ne veux pas musiciens Luis Rigou, Jean-Luc Amestoy, le voir !). La femme se révolte, elle refuse. Ce Hélène Arntzen, Emmanuel Joussemet n’est pas lui, elle ne veut pas, ne veut rien ad- mettre. Ya se acabó… (C’est fini…) Face à Ignacio Sanchez Mejias : mort le 13 août 1934, l’irrémédiable, que peut-elle faire ? Porque te deux jours après avoir été blessé aux arènes has muerto para siempre, como todos los de Manzanares. Torero célèbre, et qui vou- muertos de la Tierra… No te conoce nadie. lait poursuivre son art jusqu’au-delà de ses No. Pero yo te canto. (Parce que tu es mort forces, il appartenait à l’élite intellectuelle pour toujours, comme tous les morts de la espagnole. Il était beau, mélomane, poète, terre… Nul ne te reconnaît. Non. Mais je te tous l’admiraient. En particulier Federico chante). Inoubliable chant qui s’enveloppe García Lorca qui n’avait pu assister à son ul- dans la musique de Vicente Pradal. time corrida et lui dédia ce Llanto. Dou- loureux, somptueux chant funèbre, dans Federico García Lorca lequel est dite l’horreur de la mort. La mort Né le 5 juin 1898 à Fuentevaqueros en telle qu’en elle-même, tragique et définitive. Andalousie, il fait ses études à Grenade où il La seule éternité de ce monde. C’était un peu rencontre le compositeur Manuel de Falla, puis plus d’un an avant que lui-même soit abattu à Madrid où il fait connaissance de Dali et par les phalanges franquistes. Buñuel. En 1919, il écrit sa première pièce Le Le lien entre García Lorca et Vicente Pradal Maléfice de la phalène, et en 1927 connaît son remonte à trois générations, l’arrière grand- premier succès avec Mariana Pineda. L’année père de Vicente ayant été – une photo de clas- suivante est publiée la première version du Romancero Gitano. Invité à l’université de se en témoigne – maître d’école du petit Columbia en 1929, il écrit Un poète à New Federico. Les deux familles se connaissaient, York, revient en 1931 à Madrid, fonde son se côtoyaient. Et puis les Pradal s’exilèrent en théâtre ambulant, La Barraca, qui parcourt les France, à Toulouse, où Carlos, le père, épou- campagnes. 1933 est son année de gloire avec sa une Française. Noces de sang qui triomphe à Buenos-Aires, De double culture, Vicente Pradal a donc La Savetière prodigieuse, Les Amours de don grandi sans malaise aucun dans cette ville où Perlimplin avec Bélise en son jardin, en 1934, s’était réfugiée une importante communauté Yerma et Llanto por Ignacio Sánchez Mejías. espagnole. Entre deux langages, entre deux En 1935, Dona Rosita ou le Langage des pays, il va de l’un à l’autre avec autant de fleurs, son dernier succès avant d’être fusillé naturel que pour traverser la rue. Il est franco- par les franquistes. espagnol et hispano-français. Son père était peintre. Lui, de naissance, appartient à la Vicente Pradal musique : la guitare, le flamenco dont il re- Né en 1957 à Toulouse, musicien, élève du gui- trouve l’esprit et la passion chez le poète tariste flamenco Pepe Habichuela, il joue dans andalou. C’est en terre d’Andalousie que le de nombreux concerts, y compris classiques, et flamenco trouve ses racines, qu’il évolue, rai- dans La Savetière prodigieuse avec Jacques son pour laquelle il continue de vivre. Nichet au Théâtre national de Toulouse. En Alors, pouvait-il en être autrement ? Le Llanto 1994, à partir des poèmes de Jean de la Croix, il compose La Nuit obscure (Grand Prix de de García Lorca pour Ignacio Sánchez Mejías l’Académie Charles-Cros), et en 1996 Le a brûlé le cœur de Vicente Pradal. Longtemps Cantique spirituel. En 1998, Carmen Linares lui il l’a laissé mûrir en lui et s’est décidé à tra- commande L’Apocalypse, la même année est duire en musique les mots du déchirement, et créé Llanto por Ignàcio Sánchez Mejías. En au-delà des larmes et de la peur, l’irrémé- 2000, lui sont commandés L’Amour de loin, et diable solitude de la mort. Il a rassemblé ses en Italie Les Filles d’Ismaël. En 2001, Michel musiciens, est allé trouver Michel Rostain, Rostain crée à Quimper son Pelleas y directeur du Théâtre de Quimper – principale- Melisanda sur les poèmes de Pablo Neruda, et ment consacré aux opéras, aux spectacles en 2004, le Romancero Gitano de García Lorca musicaux – qui a accepté de mettre en scène (présenté aux Abbesses). le spectacle. C’était en 1998, sa première représentation a Michel Rostain eu lieu au Théâtre national de Toulouse. Né en 1942, musicien et metteur en scène, il Depuis, il a sans cesse tourné en Espagne, en fonde en 1978 la compagnie Un théâtre pour la France, au Québec ou à Cuba et vient pour la musique. Depuis 1995, il dirige la Scène natio- première fois à Paris. Un spectacle en quatre nale de Quimper-Théâtre de Cornouaille où il actes, une histoire qui se noue. Vicente Pradal lui arrive de monter des classiques (Lucie de imagine trois hommes allant annoncer la bles- Lammermoor en 2001) mais principalement sure mortelle d’Ignacio à sa femme – ou à sa des œuvres contemporaines, dont certaines maîtresse officielle, la célèbre Argentinita. Les sont nées de ses commandes. les comédiens

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2 3 + de 100 comédiens 1. David Ayala photos D.Agence Corbis, X.DR, J.-P. Bengoa, Delahaye, Lozouet, Delahaye, R. Senera 2. Denis Lavant 3. Romane Bohringer

4 4. Marief Guittier 5. Hugues Quester 6. Alain Libolt 7. Serge Maggiani ph. M. Mustapic , …

5 L’heure où L’heure répétition de , ph. Enguerand La Visite de la vieille dame La Visite

6 , ph. R. Senera Rhinocéros Katherine Barker création JEAN AUDUREAU SERGE TRANVOUEZ

compose une sorte de fresque diversifiée, DU 21 FÉVRIER AU 12 MARS que l’on doit traverser sans perdre le fil. Il mise en scène Serge Tranvouez s’agit, ne l’oublions pas, d’une fable, un conte scénographie Jean-Christophe Choblet noir. lumières matthieu Ferry « L’imaginaire de Kate la fillette, enfante son Michel Zürcher Katherine la mère, femme en révolte absolue costumes Zouzou Leyens contre la société bien-pensante, contre la musique Éric Vinceno morale puritaine. Elle détourne la Bible, élève avec Émilie Beauvais, Cécile Bournay, ses fils dans le culte du mensonge, du crime, Frédéric Cherboeuf, Matthieu Cruciani, d’une intégrale liberté, tout en sachant très Victor De Oliveira, Yoann Demichelis, bien qu’elle les envoie à la mort. Pareille à une Amandine Dewasmes, Serge Gaborieau, Médée anarchiste, elle leur porte un amour Fabrice Gaillard, Julien Geskoff, viscéral, entier, quasi incestueux, une passion Éric Laguigné, Laetitia Lemesle, suicidaire. Elle possède la force et la fragilité Pierre Mignard, Raphaël Pigache, des enfants qui ne connaissent pas de bornes Valérie Thomas, Sandra Rebocho à leurs désirs. » Chaleureuse Katherine Barker, couvant ses quatre fils au cœur d’une société fermée, au Il y avait une fois une femme, chef d’un gang centre d’un monde obscur, mouvant, peuplé de quatre garçons : ses fils. Improbable mais de personnages ambigus prêts à tous les vraie, son histoire inspira à Roger Corman un échappatoires, à toutes les trahisons, et qui film : Bloody Mama avec Shelley Winter, n’affirment leurs croyances que pour se fuir Robert de Niro y faisait ses débuts. Puis à eux-mêmes. Courageuse Katherine Barker Jean Audureau une pièce : À Memphis il y a un qui ose lutter pour ses rêves. Fascinante homme d’une force prodigieuse – créée par Katherine Barker. Antoine Bourseiller en 1966. Plus tard, il la reprit, la modifia, lui donna le nom de la femme : Katherine Barker. Certes, Audureau est loin de Corman, mais de L’Ange bleu à Jean Audureau Mizoguchi en passant par Jean-Luc Godard, il Jean Audureau naît en 1932 à Cholet, meurt était un amoureux du cinéma. Preuve en est la d’une pneumonie en janvier 2002 à Paris. force des images que font naître ses mots. Il y arrive dans les années 50 pour aller Metteur en scène, membre également de la au théâtre et au cinéma, et y vit dans un quasi- anonymat. Il envoie Ë Memphis il y a un commission d’aide à la création, Serge homme d’une force prodigieuse à plusieurs Tranvouez – qui dès son plus jeune âge se metteurs en scène renommés dont Antoine passionnait pour les poètes – eut ainsi l’occa- Bourseiller qui crée la pièce au Festival du sion de lire le manuscrit, tomba sous le Marais 1966. En 1970, Le Manteau d’Arlequin charme, au point de plonger dans l’œuvre publie Le Jeune Homme que Pierre Debauche entière de cet auteur rare. présente en 1972 à Nanterre. En 1983, Jean- Dans son théâtre, et tout particulièrement ici, Pierre Vincent, administrateur général de la on navigue hors du réel. Les espaces oublient Comédie-Française, profite des hésitations du les frontières, les temps se croisent, les per- comité de lecture pour monter Félicité (d’après sonnages vivent sous le regard de récitants Un cÏur simple de Flaubert) avec Denise qui, tels un chœur antique, décrivent et Gence. Beaucoup seront fascinés par commentent leurs actes. Katherine Barker se Audureau, notamment Jean-Louis Thamin qui dédouble, dialogue avec son enfance, avec monte Katherine Barker et sa suite, Hélène, au cette petite fille qu’elle a été. Ce fut le point de CDN de Bordeaux. La dernière œuvre départ de Serge Tranvouez. d’Audureau, L’Élégant Profil d’une Bugatti sous « Ces moments sont très importants, ils la lune (un rêve sur Gilles de Rais) n’a pas encore été portée sur scène. ouvrent une porte sur le monde d’Audureau, qui, à huit ans, avait écrit sa première pièce dans sa chambre tapissée de photos où il édi- Serge Tranvouez fiait son royaume. Toujours, l’imaginaire des Après une licence de Lettres Modernes, Serge enfants l’a fasciné : ils savent faire vivre des Tranvouez se forme comme acteur à l’INSAS à rêves à travers lesquels leur pouvoir devient Bruxelles, puis joue en Belgique et en Suisse. sans limites. Rien ne leur est impossible, rien De retour en France, il fait trois rencontres ne les arrête. Rien n’arrête Audureau qui, avec déterminantes : Antoine Vitez, Didier Gabily et une merveilleuse aisance, va et vient du ly- Joël Jouanneau. Avec Gabily, il participe à la risme à la comédie. Le danger serait de se fondation d’un groupe et joue dans Violences, laisser envoûter par la beauté de son écriture. Des cercueils de Zinc et Enfonçures. Avec Il nous faut aller au-delà, entrer dans le Jouanneau, il est acteur (Par les Villages de tableau, en découvrir les champs névrotiques, Handke) ou co-metteur en scène (Lève-toi et la cruauté et la tendresse infinie que les Marche d’après Dostoïevski, Rimmel de enfants savent exiger. Jacques Seréna). Avec sa compagnie, il s’at- tache d’abord à Claudel ; il monte Partage de « Pour moi, l’histoire se passe dans la tête de Midi, puis sa traduction de L’Orestie d’Eschyle. Kate la fillette, comme si tout existait depuis En 1998, il est metteur en scène associé au toujours. D’ailleurs, entre elle et les récitants, TGP de Saint-Denis. Il y affirme son intérêt la connexion est évidente. Ils participent d’un pour l’écriture contemporaine. Il crée successi- même monde qui, par glissements, de temps vement Gauche-Uppercut de Joël Jouanneau, en temps, interfère avec celui des “vivants”. Agar des Cimetières de Brahim Hanaï, Deux modes de narration se reflètent, Prométhée de Rodrigo García et deux pièces s’unissent, parfois s’opposent. Chaque scène de Koffi Kwahulé, P’tite Souillure et Jaz. Il a offre sa théâtralité particulière. L’ensemble aussi une activité régulière de pédagogue. Illuminations – Coloured plates création ARTHUR RIMBAUD THIERRY DE PERETTI

répétitions ? Par où commencer ? Que racon- er DU 16 MARS AU 1 AVRIL ter aux acteurs qui ne soit pas immédiatement mise en scène Thierry de Peretti contredit par le texte ? assistant Ludovic Virot « Il faut oublier les tactiques propres à la décor Rudy Sabounghi scène, chercher la perception juste, décider lumières Jean-Luc Chanonat violemment d’un ordre (puisqu’il n’y en a pas) costumes Caroline de Vivaise et en changer, trouver les “fréquences” sur création sonore Sylvain Jacques lesquelles la voix et les mots se rencontrent, vidéo David Bersanetti refuser l’harmonie et la fluidité, croire que des apparitions vont se faire et ouvrir les yeux. avec Marie Denarnaud, Alban Guyon, Il faut choisir de laisser vivre le plus longtemps Thibault de Montalembert possible les moments dont nous aurions, avec les acteurs, préalablement dessiné les contours et les suspensions. Guetter les relais Les Illuminations : une quarantaine de courts qui peuvent se faire d’un texte à l’autre, obéir fragments en prose et en vers libres. Ils se à l’intuition d’un ordonnancement caché et nomment Après le déluge, Barbare, Enfances, l’essayer sur le champ, chercher le point où Vies I, II, III, Matinée d’ivresse, Départ… l’écoute se tend, repérer l’endroit où elle s’est Commencés en 1873 – Arthur Rimbaud a dix- perdue, tenter de la prolonger le plus loin pos- neuf ans –, ils sont terminés deux ans plus sible, muscler nos voix et nos intentions pour tard et publiés une première fois en 1886, puis qu’aucun mot ne perde la multitude de direc- peu de temps après sa mort, en 1892 avec tions que le poète lui a donnée. » une préface de Verlaine : « […] D’idée princi- Sur un plateau nu, deux hommes, une femme, pale, il n’y en a pas, ou du moins nous n’y en leur corps, leur peau, leur voix, de la musique, trouvons pas. De la joie évidente d’être un des bruits, les paroles de Rimbaud : les grand poète, tels paysages féeriques, d’ado- Illuminations. rables vagues amours esquissées, et la plus haute ambition (arrivée) de style : tel est le résumé que nous croyons pouvoir oser don- Arthur Rimbaud ner de l’ouvrage […] Si aujourd’hui Thierry de Né à Charleville en 1854, fils d’une mère sans Peretti porte sur scène ces textes incandes- tendresse et d’un père militaire de carrière qui abandonne sa famille en 1860, il est élevé dans cents, c’est pour « passer du temps avec »: les règles religieuses les plus strictes, suit ses « Je cherchais aussi depuis longtemps à études jusqu’à l’âge de quinze ans. Très bon mettre sur scène un texte qui ne soit pas au élève, mais mauvaise réputation. En 1871, il départ écrit pour le théâtre. Je voulais trouver écrit Le Bateau ivre, rencontre Paul Verlaine, un ensemble de fragments ou de pièces où la poète porté sur l’absinthe (alcool aujourd’hui langue serait “tout”. Parce que je me rends interdit), qui laisse sa famille et sa femme compte que c’est la seule chose qui m’inté- enceinte pour partir avec lui en 1872 à Londres. resse vraiment au théâtre : apprendre à parler, Leur liaison dure un an et se termine dans la apprendre à penser. violence à Bruxelles. En 1873, paraît Une sai- « J’avais aussi l’idée “d’éclats” quelque chose son en enfer. En 1874, il se met à étudier les qui ne serait pas “complet” et ne se soucierait langues étrangères, de l’anglais au grec en que de perceptions, de lumière et de son. Et passant par le russe et l’arabe. En 1876, il puis il y avait ces textes de Rimbaud qui ont change de vie, s’en va au Moyen-Orient, tra- toujours été près de moi. Mon père m’en par- vaille dans l’import-export, homme d’affaires lait beaucoup lorsque j’étais enfant et aux occupations douteuses. Il n’écrit plus, c’est le silence jusqu’à sa mort à Marseille le 10 quelques bribes d’Une saison en enfer refai- novembre 1891. saient régulièrement surface dans mon esprit et donc Arthur Rimbaud évidemment ! « C’est la Saison que j’ai d’abord voulu mettre Thierry de Peretti en scène, mais j’avais peur d’une identifica- Après un passage au cours Florent, une bourse tion, de céder trop facilement, à la part trom- de la Villa Médicis hors les murs, Thierry de peuse d’autobiographie. C’est pourquoi j’ai Peretti acteur joue Montherlant (La Ville dont le choisi Illuminations, ces Coloured Plates, l’un prince est un enfant), Claudel (Le Soulier de des titres envisagés par Rimbaud. satin), Tchekhov (La Mouette) et bien d’autres. Au cinéma notamment avec Claude Berri « Illuminations, c’est “tout, tout le temps”, la (Lucie Aubrac), Vincent Ravalec (Une prière vie, l’œuvre, l’accomplissement et l’abandon, vers le ciel), Patrice Chéreau (Ceux qui la “nouvelle harmonie” et le “nouvel amour”. m’aiment prendront le train), Orso Miret (Le « Illuminations pose surtout ce grand mystère, Silence). Au théâtre, sa quatrième mise en cette question centrale et périphérique à la scène, Le Retour au désert de Bernard-Marie fois : “De quoi cela parle-t-il ?”. Il y très peu de Koltès, lui vaut le Prix de la révélation 2001 du métaphores, tout est vrai, tout est illusion Syndicat national de la Critique. Suivent en aussi, mais il faut tout prendre pour “argent 2002 Valparaiso de Don de Lilllo, en 2004 comptant”, il faut croire à tout. Il faut y cher- Gengis parmi les pygmées de Gregory Motton cher ce qu’on ne trouvera de toute façon pas, au Vieux-Colombier où il revient avec Le Rimbaud ne dévoilera jamais ce dont il Mystère de la rue Rousselet de Labiche. Entre- parle… temps, il a monté Richard II de Shakespeare au « Alors comment mettre en scène de telles Théâtre de la Ville. Il vient de réaliser deux “pièces” ? Comment envisager le travail, les moyens-métrages pour le cinéma. Face de cuillère création LEE HALL MICHEL DIDYM

et de la lucidité. Je sais, pour les avoir fré- DU 26 AVRIL AU 20 MAI quentés, ce qui se passe dans les hôpitaux texte français Fabrice Melquiot de gosses. On arrive avec nos pantoufles bor- mise en scène Michel Didym dées de pathos et ils nous entraînent dans scénographie Vincent Tordjman leurs jeux. J’ai été frappé aussi par ce per- avec Romane Bohringer sonnage dont elle parle, le vieux docteur et les souvenirs du camp où les enfants des- sinent des papillons sur les murs des chambres à gaz… Je pense à cette phrase À cause de son visage rond, comme s’il se magnifique : “On peut tuer les enfants, on ne reflétait dans une cuillère, on l’appelle Face de peut pas tuer ce qu’ils ont dans la tête”. cuillère. On la dit “attardée” mais elle est « Ce qui m’attache particulièrement ici, est la capable de faire de tête des calculs insensés, façon dont cette fille encore si jeune réussit à complètement inutiles. Elle n’a pas d’âge, elle parler de la mort, à en évacuer l’angoisse. Elle n’est pas vieille, elle ne le sera jamais, à cause est bien dans la vie, plus pour longtemps d’un cancer. Elle aime l’opéra, et sur un petit peut-être, mais complètement. Il ne s’agit pas magnéto approximatif, écoute Callas. Elle de courage, mais de résistance au malheur. écoute comme si elle voulait se noyer dans Un être humain debout, qui a beaucoup à cette voix qui finit par envahir l’espace et l’es- nous apprendre. » prit, dont le chant raconte des histoires « à propos de la mort et fait voir les choses comme elles sont ». À première vue, elles ne sont pas joyeuses, les choses, entre une mère alcoolique, un père lointain, un vieux docteur Lee Hall qui lui raconte le camp où sa mère à lui, a Né en 1966 à Newcastle, il s’intéresse à l’écri- disparu… ture dramatique à Cambridge où il rencontre Ce genre de situation pourrait faire craindre le Stephen Daldry, futur réalisateur du scénario pire pathos, mais l’auteur de Face de cuillère qui va le rendre célèbre : Billy Elliott (le petit prolo qui voulait danser), film à succès nominé est Lee Hall, scénariste de Billy Elliott (le petit aux Oscars en 2000. En attendant, en 1993 il prolo qui voulait danser). Anglais donc, c’est- va passer des vacances aux États-Unis, y à-dire peu enclin aux attendrissements sur- tombe amoureux, reste un temps à New York. dramatisés. D’autre part, Face de cuillère est À son retour, il se lance dans la radio, connaît Romane Bohringer, fragile et indestructible, le succès en 1996 avec I luv you Jimmy Spud, mystérieuse et irradiante. Enfin, la pièce a été devenu au cinéma Gabriel et moi (il y est ques- adaptée par Fabrice Melquiot, pour le plus tion d’un garçon qui se lie avec l’ange Gabriel grand bonheur du metteur en scène Michel pour avoir des nouvelles de son père mort). En Didym. L’accueil unanime reçu par son spec- 1997, Spoon face Steinberg (Face de cuillère tacle Les animaux ne savent pas qu’ils vont Steinberg, titre complet) confirme son talent et mourir de Pierre Desproges, (donné à deux son succès. Il se partage entre radio et théâtre : reprises aux Abbesses) prouve d’ailleurs qu’il en 1999, Cooking with Elvis, ou la Cuisine sait mettre en valeur la dureté et l’ironie, l’in- d’Elvis au Théâtre de poche Montparnasse souciance heureuse des sujets graves : 2003. Il traduit également Büchner (Léonce et « L’intérêt du texte de Lee Hall tient dans Lena), Brecht (Mère Courage), Goldoni (Arlequin serviteur de deux maîtres), et aujour- l’étrange goût du bonheur qui s’en dégage. Et d’hui vit à Hollywood. puis je trouve très importante la cohabitation de la parole dite et chantée, le va-et-vient entre ce qui se raconte de quotidien, de concret, et l’univers de vibrations, de trouble, Michel Didym d’émotions pures où nous entraîne la magie Après des études à l’École supérieure d’art dra- musicale. » matique de Strasbourg, après un prix de la Villa Michel Didym est un chercheur de textes. Il a Médicis hors les murs, en 1990, en sa Lorraine mis en mouvement “la Mousson d’été” pen- natale, il fonde la Compagnie Boomerang, avec dant laquelle lectures et mises en espace laquelle il monte un répertoire d’auteurs d’inédits se succèdent, puis l’a prolongée et contemporains, dont en 1994 au Théâtre de la étendue à des publics plus adolescents, avec Ville, Botho Strauss, Visiteur. En 1995, il crée la “la Mousson d’hiver”. C’est en cette occasion Mousson d’été qui tient ses assises en août à qu’il a rencontré Face de cuillère. Il est des l’Abbaye des Prémontrés. En 1999, il met en scène Bernard-Marie Koltès : Sallinger aux moments où la violence de chocs affectifs Abbesses, La Nuit juste avant les forêts à Metz. qu’on est mal préparé à affronter, sensibilise Au Festival d’Avignon 2000, c’est Yacobi et aux souffrances et aux manières de les assu- Ledenthal de Hanoch Levin, en 2001 au Vieux- mer. Alors Michel Didym a reçu en plein cœur Colombier le Langue à langue des chiens de le dialogue de la jeune fille avec sa maladie : roche de Daniel Danis. Il fonde la MEEC « Ses paroles sont sans compromis et totale- (Maison européenne des écritures contempo- ment généreuses. En quelque sorte, la ma- raines), accompagnée d’une revue : TC ladie a développé son humanté, accéléré son (Temporairement contemporain). En 2002, il appréhension du monde. Elle n’a plus le met en scène Serge Valletti et Christine Angot temps de se plaindre, de chercher des res- au Théâtre national de la Colline, en 2003 et ponsables, de se cacher derrière les mots, de 2004 aux Abbesses Les animaux ne savent se mentir. Elle possède la force de l’innocence pas qu’ils vont mourir. CINEMA/OPERA/CHANSON Wayn Traub HET TONEELHUIS une aventure, un parcours

théâtre psalmodié et chanté par deux actrices LUN. 6 ET MAR. 7 MARS sorties d’un tableau gothique, une iconogra- 1.Maria Dolorès phie moyenâgeusement crépusculaire et, sur- CINÉMA, OPÉRA, THÉÂTRE plombant le tout, un film de long métrage mise en scène Wayn Traub absolument délirant qui enchevêtre la fiction et le réel, le mythe et le présent, dans un MER. 8 MARS extraordinaire labyrinthe où aucun fil ne se perd tout à fait. Sur scène, une bergère de 2.Jean-Baptiste reprise Dieu convaincue d’avoir vu la Vierge Marie, et LE SPECTACLE - CINÉMA, OPÉRA, THÉÂTRE une mère supérieure à qui on ne la fait pas. mise en scène Wayn Traub Sur pellicule, une Marie-couche-toi-là (mais VEN. 10 ET SAM. 11 MARS pas seulement), comédienne suivie comme son ombre par une caméra indiscrète, entou- 3.Jean-Baptiste création rée d’étonnants personnages : un obscur LE CONCERT - RÉCITAL, PERFORMANCE « poète des femmes » à la fatuité caverneuse, musique Wim De Wild un vieux metteur en scène aux mains bala- Wayn Traub chant deuses, etc. Wayn Traub construit et découd avec 30 musiciens de l'Orchestre VRO ce labyrinthe de situations au fil d’un montage (Vlaams Radio Orkest ) stupéfiant. On parlera, si l’on veut, de ciné- théâtre sans circonscrire tout à fait la vertigi- neuse mise en abîme d’une représentation Décidément, la création chorégraphique et proliférante. théâtrale en Belgique n’en finit pas d’épater. Jean-Baptiste (présenté au Théâtre de la Ville Après Anne Teresa De Keersmaeker, Jan en juin 2005) vient confirmer et amplifier, dans Fabre, Jan Lauwers et Wim Vandekeybus les ressorts d’une fable composite, la prodi- dans les années 80, les Ballets C. de la B. gieuse capacité qu’a Wayn Traub de tracer un d’Alain Platel et consorts, puis le groupe tg chemin novateur parmi les arts de la scène, et Stan, la compagnie De Onderneming, la sa faculté à tisser l’étoffe d’une histoire, à mille « fabrique » Victoria, Thomas Hauert et lieues des habituelles ficelles narratives. Mais quelques autres (la liste est loin d’être exhaus- ce n’est pas tout. En filigrane de la « pièce » tive) les années suivantes, voici qu’un nouvel Jean-Baptiste, est née la « créature » Jean- olibrius arrive sans crier gare. Comme beau- Baptiste, soit un chanteur au visage andro- coup de ses prédécesseurs, Wayn Traub n’a gyne, à la voix de haute-contre, qui élève sur pas vraiment un cursus cousu de fil blanc… l’orchestration du compositeur Wim De Wilde Ni barre classique, ni conservatoire : aux la figure d’un artiste « mélancolique et soli- années d’enfance confinées dans un internat taire ». Ce chanteur mystique et fictif, porteur catholique flamand, sanctionnées par la d’un message d’amour et de charme, Wayn découverte adolescente des écrits d’Antonin Traub envisage sérieusement de le faire gran- Artaud et d’autres hérétiques, succéderont dir comme « un phénomène hors norme dans des études de cinéma et d’histoire de l’art. le paysage de la musique commerciale Une expérience de mime corporel plus tard, il actuelle » parce que, dit-il, « nous sommes rédige à 26 ans un Manifeste du théâtre de convaincus que le public éprouve le besoin l’animalité (sa bible jusqu’à aujourd’hui) où de renouer avec des émotions nobles et sin- l’impétrant proclame : « Le théâtre, c’est la cères, de belles mélodies simples sur des métamorphose, la libération, le sacrifice de arrangements solides, l’apport des composi- soi-même, c’est mourir afin de pouvoir recom- tions orchestrales et des artistes porteurs mencer de rien ». Son nom de naissance d’une vision… » Curé des arts, comme l’a (Geert Bové) passe à la trappe, Wayn Traub qualifié la presse belge à ses débuts, Wayn (patronyme forgé à partir du nom de jeune fille Traub est-il est train de prêcher le vrai, ou bien de sa mère) passe à l’attaque. Exposition la fiction a-t-elle d’ores et déjà commencé ? d’écussons, fusils et têtes de cerfs (au Vooruit Toujours est-il que le « récital » de Jean- de Gand, en 1999), solo de danse entouré de Baptiste, chanteur rituel, est d’ores et déjà en 40 chats, performances plutôt iconoclastes, chantier, avec orchestre d’une trentaine de création d’une pièce avec Jane Birkin, réalisa- musiciens et CD à la clé. En toute liberté, tion de courts métrages, « l’animal Wayn Wayn Traub nous mène en bateau dans de Traub » guette sa proie. Ce sera Maria sacrés méandres… Dolorès, en 2002. Du jamais vu ! Un étrange Jean-Marc Adolphe

3 1 photos Ph. Deprez

2 THÉÂTRE HORS LES MURS : AU THÉÂTRE PARIS-VILLETTE Toto le Mômo D’APRÈS ANTONIN ARTAUD DAVID AYALA mise en scène Jacques Bioulès et Lionel Parlier

je ne cherche l’incarnation. Je ne suis pas DU 4 AU 22 OCTOBRE Antonin Artaud, je ne fais pas semblant de d’après les textes préparatoires à la confé- l’être. Il était unique, inoubliable, et avant tout rence du Vieux-Colombier, Histoire vécue un immense écrivain. Un jour, sur France d’Artaud Mômo, et des Cahiers de Rodez Culture, dans un débat à propos du cinquan- (extraits) tième anniversaire de sa mort, j’ai entendu imaginé et interprété par David Ayala quelqu’un dire que quand on ouvre les lumières Serge Oddos, Jacques Bioulès Cahiers de Rodez, on se trouve face à une somme littéraire faramineuse. À une page, on a l’impression de lire du saint Jean de la Croix, C’est un grenier tout sombre, ou bien une à la suivante Nietzsche, ensuite Baudelaire… cave. Un endroit secret, avec des lampes de C’est vrai. Son écriture est vertigineuse. Il toutes sortes qui dispersent des traces de invente, ne connaît pas de barrière, obéit à sa lumières fantomatiques, avec des chaises nécessité vitale : écrire, dire. » creuses de toutes tailles, aux longues jambes « La conférence du 13 janvier renversera les filiformes. S’y asseoir représente un exploit. choses à condition d’évoquer le réel », écrivait On peut y grimper, comme l’homme qui est là, Artaud. Et si ce soir-là il n’a pas été entendu, et s’accroche, tente de s’y installer, passe au aujourd’hui est offerte l’occasion d’écouter travers, affronte l’inconfort avec une patience Toto le Mômo. animale. Tendre fauve perdu, il prend en lui les phrases magnifiquement bouleversantes, écrites il y a plus de soixante ans par Antonin Antonin Artaud Artaud alors qu’il préparait la conférence du Né en 1895 à Marseille, Antonin Artaud y passe 13 janvier 1947 au Vieux-Colombier, ce sa jeunesse. Dès 18 ans, et à plusieurs fameux soir où il quitta la scène au bout d’à reprises, il est interné pour troubles mentaux peine une heure, face à un public on ne peut avant de trouver une rémission sur la scène. plus branché et déconcerté. Acteur avec Lugné Poe, Dullin, Pitoeff, au ciné- ma avec Dreyer, il écrit, rejoint les surréalistes, Pour l’heure, c’est donc David Ayala qui, se passionne pour le théâtre balinais découvert corps et âme, s’empare des mots d’Artaud. à l’Exposition Coloniale de 1931, qui lui inspire Non pas ceux de la conférence elle-même, son Théâtre de la Cruauté. En 1935, il part pour mais ceux des brouillons, auxquels s’ajoutent le Mexique. De 1939 à 1943, il est de nouveau plusieurs extraits des Cahiers de Rodez écrits interné. En 1944, paraît Le Théâtre et son pendant l’Occupation dans l’asile dirigé par le double, où se cherche « la violence des pein- docteur Ferdière. tures de Van Gogh ». 1947 est l’année de sa David Ayala reprend son spectacle Toto le conférence au Vieux Colombier, et celle où il Mômo – créé en 1997, poursuivi jusqu’en enregistre à la radio avec Roger Blin, Pour en 2000 – et retrouve ses metteurs en scène finir avec le jugement de Dieu, longtemps inter- Jacques Bioulès et Lionel Parlier. Une sorte dit d’antenne. L’année suivante est celle de sa de retour sur soi après cinq ans de voyages mort. chez d’autres auteurs. Mais avec celui-ci, les rapports sont différents, fraternels en somme. David Ayala Il y a de quoi être surpris de la part d’un gar- Né en 1969, élève au conservatoire de çon tout ce qu’il y a plus sainement vivant, , il entre aux Ateliers du Hangard, costaud, sans la moindre ressemblance phy- travaille avec de nombreux metteurs en scène, sique avec l’image hallucinée d’Artaud : dont Lionel Parlier. Il est le Père Ubu avec Dan « Mais pour moi, il est un guide. Il m’a prati- Jemmett, qu’il retrouve également dans Dog quement initié à la littérature. Il me fascinait et Face. En 1996, il fonde la Compagnie la Nuit en même temps me faisait peur. Je trouvais remue, et se lance dans l’aventure de Toto le dans son écriture un formidable espace Mômo. d’imagination et un rapport immédiat avec le corps, le corps en action. » Avant le théâtre, David Ayala pratiquait l’athlé- Jacques Bioulès tisme. Il lui en est resté, sur scène, une sorte Né en 1941, il suit les cours de Jacques Lecoq, de tranquillité musclée, de douceur presque devient assistant d’Antoine Bourseiller, fait un stage avec Roger Planchon au TNP, fonde en plus effrayante que la nervosité déjantée habi- 1965 le Théâtre du Hangar à Montpellier où il tuellement appliquée à Antonin Artaud. Les met en scène des auteurs de tous les temps et anecdotes ne manquent pas, c’est vrai, pour ses propres textes. confirmer cette image. De son existence, on a surtout retenu les dérapages, les voyages, la drogue, les séjours en hôpitaux psychia- Lionel Parlier triques, les électrochocs, les délires, la quasi- Acteur, il joue Pinget, Claudel, Racine, Beckett. clochardisation intellectuelle – et matérielle – Metteur en scène, il monte Euripide, Synge, de cet homme réellement hors du commun, et Ramuz, Molière… Et du théâtre musical, des qui ne pouvait rien faire que d’intense. C’est opéras, en France et au-delà, notamment en pourquoi justement, David Ayala et ses met- Suisse. Depuis 1994, il dirige le Théâtre de teurs en scène ont voulu déborder la légende, l’Arc, atelier professionnel de recherche et et vraiment, faire entendre l’auteur : d’expérimentation. « Faire entendre le texte pour lui-même. J’y retrouve quelque chose de ma colère et je m’en sers pour la dire, mais à aucun moment ANNE TERESA DANSE DE KEERSMAEKER création 2006 création AU THEATRE DE LA VILLE PINA BAUSCH ANGELIN PRELJOCAJ création 2005 création Les 4 Saisons… création Empty Moves (part I) - Noces AUX ABBESSES AKRAM KHAN ROBYN ORLIN SIDI LARBI CHERKAOUI VERA MANTERO Zero degrees création Hey dude... I have talent... I'm just waiting for God... création LLOYD NEWSON DV8 PHYSICAL THEATRE KOEN AUGUSTIJNEN Just for show création Bâche reprise EA SOLA ALARMEL VALLI Sécheresse et pluie Vol.2 re-création MADHAVI MUDGAL Samanvaya création GARRY STEWART AUSTRALIAN DANCE THEATRE MERCEDES RUIZ Held Dibujos en el aire MAGUY MARIN JAN FABRE Umwelt création Quando l’uomo principale è una donna reprise WIM VANDEKEYBUS Puur création JEAN-CLAUDE GALLOTTA BALLET DE LORRAINE ODILE DUBOC Docteur Labus re-création Rien ne laisse présager de l’état de l’eau création PRIYADARSINI GOVIND bhârata natyam création SANKAI JUKU USHIO AMAGATSU MARIA-KIRAN création 2005 création Bhârata/Bach création Kinkan shonen re-création DANSE HORS LES MURS ALAIN PLATEL AU CENTRE POMPIDOU Vespers création RACHID OURAMDANE MARIE CHOUINARD Cover création création 2005 création EMIO GRECO MEG STUART Double points : + création création 2006 création AU THEATRE DE LA CITE INTERNATIONALE SIDI LARBI CHERKAOUI PEEPING TOM DAMIEN JALET Le Salon LUC DUNBERRY JUAN KRUZ DIAZ FRANÇOIS VERRET Tokyo Musil création DE GARAIO ESNAOLA D’avant reprise JOSEF NADJ JAN LAUWERS Last Landscape création La Chambre d’Isabella reprise CHRISTIAN RIZZO Needlapb “Autant vouloir le bleu du ciel et GRACE ELLEN BARKEY m’en aller sur un âne.” Chunking création AU THEATRE DE LA BASTILLE SASHA WALTZ BORIS CHARMATZ création 2005 création Régi création DANSE AU THEATRE DE LA VILLE , ph. J.-C. Carbonne Angelin Preljocaj

THEATRE DE LA VILLE • TARIF B Preljocaj, compagnie qu’il fonde en 1984, chorégraphiant pour les plus grands ballets mondiaux, cet amoureux insatiable du mouve- Angelin ment n’aime rien tant que s’aventurer sur des terres inconnues ou défier la tradition. Il ose se Preljocaj confronter aux chefs-d’œuvre du répertoire, BALLET PRELJOCAJ qu’il expurge des dorures ternes de la convention pour en retrouver l’éclat tranchant. DU 27 SEPT. AU 8 OCT. 1er PROG. Artiste engagé, il n’hésite pas non plus à se frotter aux épines, même les plus aiguës, qui Les 4 Saisons… CRÉATION écorchent l’humain : le décervelage télévisuel “chaosgraphie*” Fabrice Hyber (Personne n’épouse les méduses*), l’état d’ur- musique Vivaldi, Les Quatre Saisons gence (Helikopter *), l’animalité du désir (Le 12 danseurs Sacre du printemps*) la matrice de la vie * Écriture du chaos. (Near Life Experience*), la haine (N), l’infanti- e DU 4 AU 15 AVR. 2 PROG. cide (Le Songe de Médée)… Ses visions incandescentes déploient une danse vitale, (part I) (2004) Empty Moves essentielle, où la voracité des pulsions s’exas- création sonore John Cage, Empty words père dans le dessin complexe d’une écriture 4 danseurs rigoureusement ciselée. Pour le vingtième anniversaire de sa compa- (1989) Noces gnie, installée à Aix-en-Provence depuis musique Igor Stravinski, Noces 1996, Angelin Preljocaj revient au Théâtre de 10 danseurs la Ville qui accompagne ses créations depuis 20e anniversaire de la compagnie et 1987. Le chorégraphe explore un des plus ouverture de son nouveau lieu de création célèbres concertos : Les Quatre Saisons de et de diffusion à Aix-en-Provence, le Vivaldi. « Peut-on effacer ”l’entachement” qu’a Pavillon noir. connu cette musique, au final, si sensuelle- ment météorologique ? » Avec la complicité L’ÉPREUVE DU CORPS du plasticien Fabrice Hyber, il creuse les Une question, obstinée, exigeante, rôde à zones d’ombre et les secrets de cette partition l’orée de toute nouvelle création d’Angelin si souvent dévoyée en mélodie téléphonique. Preljocaj : « Que peut le corps ? ». Écrire, les Jaillissement, exaltation, suspension, vibra- yeux grands ouverts sur le monde, dire ses tion… Ses Saisons brouillent les interférences tourmentes, ses fracas, ses beautés fu- et embrasent les forces tumultueuses qui rieuses, avec le stylet du geste, la puissance régissent le cycle du temps. C’est également expressive de la chair. Pour lui, la danse est par la relecture d’un grand classique que un art de combat, un défi aux limites du corps, s’ouvre le second programme : Noces, sur les une plongée dans les failles du présent. Sans notes enfiévrées de Stravinski. Créée en doute cette ardeur farouche fut-elle aiguisée 1989, sa version, empreinte d’accents slaves, par le destin de sa famille albanaise happée exacerbe la sauvagerie et le tragique de ces dans les violences de la guerre, et par l’oppo- épousailles dominées par la brutalité ma- sition de ses parents à sa vocation. Ce fils chiste. Empty Moves (part I) (2004) joue en d’émigrés a grandi en résistance, affûtant son revanche sur l’essence du mouvement et la style, racé, incisif, au fil d’un parcours initia- déstructuration du phrasé chorégraphique sur tique transfrontière. Il commence par le clas- la musique répétitive de John Cage. Sensuel, sique, découvre le contemporain avec Karin pulsionnel ou abstrait, le corps reste au cœur Waehner, parfait son apprentissage aux États- de la bataille… Unis avec Merce Cunningham, puis, de retour Gwénola David en France, avec Viola Farber et Dominique Bagouet. Aujourd’hui, à la tête du Ballet * 10 coproductions et 3 accueils au Théâtre de la Ville. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 11 AU 16 OCT. Akram Khan AKRAM KHAN DANCE COMPANY Sidi Larbi Cherkaoui BALLETS C. DE LA B. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 20 AU 29 OCT. Zero degrees CRÉATION duo dansé par Akram Khan et Sidi Larbi Cherkaoui Lloyd Newson musique Nitin Sawhney sculpteur Antony Gormley DV8 Physical Souvent la danse est cette alchimie qui conci- Theatre lie des énergies opposées, opérant au cœur même du mouvement le mélange de matières Just for show CRÉATION en fusion. Il y faut, certes, de l’incandescence. 10/11 danseurs Sidi Larbi Cherkaoui et Akram Khan ont l’un et avec le Festival d’Automne à Paris l’autre ce tempérament et cette qualité. L’ardeur et la sveltesse se combinent en Sidi Le nom même de sa compagnie, DV8 (soit Larbi Cherkaoui dont l’expressivité est un feu deviate/dévier en V.O.) créée en 1985, est une à fleur de peau – feu à la fois noir et trans- profession de foi : pour Lloyd Newson être sur parent dont il fait la sève d’une arborescence scène signifie prendre des risques, qu’ils fluide. Akram Khan, simultanément formé au soient esthétiques ou physiques, brouiller les kathak indien et à la danse contemporaine, frontières entre danse et théâtre et, par- transporte pour sa part dans la syncope des dessus tout, faire passer des idées. Loin de rythmes la double énergie tranchante et son Australie natale où il étudia la psychologie veloutée qui forme la ligne claire d’un jeu avec puis la danse, Lloyd Newson impose son la vitesse et qui, cependant, libère un temps regard sur le monde, notre monde. Sa cosmique délié de l’urgence. L’un et l’autre compagnie est à son image, protéiforme et donnent ainsi consistance à une sorte de engagée. On a pu découvrir dans de précé- grâce contemporaine, non plus vécue comme dentes créations des jeunes partageant l’af- une évasion hors de la chair mais au contraire fiche en harmonie avec une vraie lady à l’âge scellée en son for intérieur : une grâce non respectable (Diana Payne-Myers) ou un dan- plus éthérée mais exacerbée. seur sans jambes (David Toole). Mais ces Sur des musiques du compositeur Nitin tranches de vie n’empêchent pas Lloyd Sawhney, forgeron d’un alliage sonore entre Newson de se montrer tel qu’il est : un remar- l’Orient et l’Occident, et dans le voisinage quable homme de théâtre doublé d’un ci- d’une sculpture de l’artiste britannique Antony néaste accompli. Au final, le but ultime de Gormley, fasciné par le corps-environnement, DV8 est toujours de toucher le public au cœur. Akram Khan et Sidi Larbi Cherkaoui ont déci- Just for show est une nouvelle étape dans une dé de faire pour la première fois, avec Zero œuvre riche de ces individualités réunies. Une degrees, œuvre commune. Le « degré zéro » dizaine de danseurs, des projections vidéos est ici synonyme de matière originelle, encore et du texte pour questionner une société du indistincte ; source initiale et noyau commun paraître où la forme est plus importante que le d’antagonismes tels que « la vie et la mort, le fond, où les mensonges joliment emballés clair et le foncé, l’ordre et le chaos ». Éclosion cachent des vérités moins belles à (sa)voir. sans cesse recommencée du vivant dont les Lloyd Newson se demande enfin si l’appa- deux danseurs-chorégraphes apprivoisent, rence et les images n’ont pas pris le dessus au-delà de leurs affinités et différences, l’ex- sur le réel de nos vies. Il sait trop bien, médias quise et troublante dynamique. aidant, qu’aujourd’hui chacun entend réécrire Jean-Marc Adolphe son histoire, du passé au présent. Ce futur vir- , ph. C. Van der Burght , ph. C. Van Akram khan/S. L. Cherkaoui , ph. J. Joyce DV8

tuel vaut-il le prix que certains sont prêts à payer ? On connaît l’habilité du chorégraphe à manier des sujets brûlants sans démagogie

aucune, simplement avec le sens du corps en ph. Cl. Le-Anh mouvement, parfait vecteur d’énergies qu’il

redécouvre sans cesse. En exergue de Just Ea Sola, for show, Lloyd Newson place cette phrase de Otto Rank : « To be able to live, one needs illu- sions », (Pour être capable de vivre, chacun a besoin d’illusions). Il est urgent de croire aux illusions de DV8 Physical Theatre. Philippe Noisette

DV8 AU THÉÂTRE DE LA VILLE juin 97 Bound to please juin 99 The Happiest Day of my life oct. 03 Cost of living

THEATRE DE LA VILLE • TARIF A nature, des rituels et du théâtre traditionnel, mais aussi du Viêt-nam d’aujourd’hui et de sa DU 7 AU 10 NOV. RE-CRÉATION modernité. Les « dames paysannes », qu’elle met en scène sont les figures anonymes d’un Ea Sola peuple, ces héros du quotidien, gardiens du Sécheresse et pluie Vol. 2 temps aux portes du présent. Depuis, dix ans ont passé et les jeunes avec le Ballet national de Hanoï artistes vietnamiens ont grandi dans la paix. 16 danseurs, 5 musiciens, 1 compositeur En choisissant de recréer cette pièce avec les danseurs du Ballet national de Hanoi, Ea Sola ENTRE MÉMOIRE ET DEVENIR réalise un original travail de transmission En 1995, un insolite objet apparaît dans le autour de la mémoire de guerre et de la non- paysage chorégraphique : Sécheresse et violence. De l’image au corps, du mouvement pluie, première création contemporaine à la voix, l’écriture de la pièce suit une même vietnamienne signée Ea Sola. Un manifeste. partition de musique traditionnelle. Mais Cette révolution est le fruit d’un long, patient et arrangements sonores et projections visuelles obstiné travail de reconstruction. Toute l’ambi- évoquent un paysage différent. Dans ce vo- tion artistique d’Ea Sola est liée à son pays, lume 2, la chorégraphe interroge le nouveau qu’elle a dû quitter adolescente avant de pou- Viêt-nam, ce qu’il advient de son identité et de voir y retourner au début des années 90, et son histoire sous l’influence de la « globalisa- d’initier ce délicat projet qui repose sur la tion ». Les gestes évoluent sous un autre mémoire collective d’un peuple et le trauma- regard, celui de la jeunesse. tisme de la colonisation et des guerres qu’il a Irène Filiberti traversées. Durant quatre ans, la chorégraphe arpente son sol, à la recherche de ses ori- gines et de la culture de son pays. Avec une EA SOLA AU THÉÂTRE DE LA VILLE vingtaine de femmes entre 50 et 70 ans, elle mai 97 Il a été une fois invente une façon de chorégraphier qui s’ins- mai 99 Voilà, voilà pire des gestes de la terre et du rapport à la mai 01 Requiem ph. L. Greenfield Australian Dance Theatre, Australian Dance

THEATRE DE LA VILLE • TARIF A pace du studio (et non sur scène), sur un immuable fond blanc, des danseurs épinglés DU 15 AU 19 NOV. en plein vol. Avec elle, l’éphémère devient icône, temps suspendu dans l’élan capturé. Garry Stewart Délaissant l’espace minutieux de son studio de prise de vues, Lois Greenfield se risque ici Australian sur le plateau, chasseresse de papillons-dan- seurs dont elle projette instantanément la vie aérienne. Au 1/2000e de seconde, la danse Dance Theatre est ici ciselée à même l’énergie qui la pro- Held 10 danseurs pulse, impeccables et implacables figures d’un corps insatiable. POUR LA 1RE FOIS À PARIS J.-M. A. photographies en direct Lois Greenfield

Sans forcer le cliché, on pourrait convenir qu’une certaine danse anglo-saxonne n’a pas renoncé à vouer un culte ici quelque peu THEATRE DE LA VILLE • TARIF A tombé en désuétude (hors ballet classique) à la pure virtuosité du mouvement. De l’anglais DU 22 AU 26 NOV. Michael Clark, qui défraya la chronique à la fin des années 80 avec ses ballets à la touche Maguy Marin punk, au nouveau prodige Russell Maliphant COMPAGNIE MAGUY MARIN – CENTRE (qui a récemment enrôlé Sylvie Guillem) en CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL DE RILLIEUX-LA-PAPE passant par le turbulent Earl Lloyd Newson ; du canadien Édouard Lock, dont les folles Umwelt 9 danseurs CRÉATION vrilles jadis sublimées par Louise Lecavalier se sont récemment muées en vertigineuses AU MIROIR DES SENS figures sur pointes, à la vitesse ciselée d’un Depuis un quart de siècle, May B. de Maguy Akram Khan, ce sont là quelques exemples Marin, chef-d’œuvre de l’absurde contempo- d’une danse prompte à se projeter dans l’inouï rain inspiré de Beckett, aura tourné sur la pla- de la « performance » corporelle. C’est dans nète entière. Au moment même où la carrière cette lignée à haute densité que s’inscrit, venu de ce spectacle s’arrête, Umwelt se hisse à des antipodes, l’Australian Dance Theatre diri- présent au même niveau d’enjeu esthétique et gé depuis 1999 par le chorégraphe Garry philosophique. La chorégraphe y agit en ar- Stewart, féru de multimédias et de robotique. tiste des défis, au prix de nouvelles batailles Avec des danseurs rompus aux techniques d’Hernani. les plus spectaculaires (classique, contempo- En front de scène, un cordon produit seul, rain, break, arts martiaux…), la chorégraphie contre des cordes de guitare, un unique devient ici l’époustouflante prouesse de corps accord obsédant. La danse abandonne montés sur ressorts, dont l’engagement phy- l’avant du plateau où peu à peu s’entassent sique est un défi audacieusement lancé à la des débris de chimères scénographiques. gravité et à la pesanteur. Held, spectacle avec Mais c’est au fond, en lisière des coulisses, lequel l’Australian Dance Theatre aborde pour battant doucement dans un vent puissant, la première fois Paris, met en jeu toutes ces qu’est disposé un somptueux jeu de miroirs qualités sous le regard affûté de Lois souples. Greenfield. Depuis près de trente ans, cette Dans leurs interstices en mouvement, appa- photographe américaine, habituée des pages raissent et disparaissent les neuf interprètes. du Village Voice, de Time ou de Rolling Stone, Ils orchestrent une fantastique pavane répéti- a forgé un style bien à elle, cadrant dans l’es- tive et furtive, incessant défilé de figures en mirage, saisissantes. L’œil capte des frag- THEATRE DE LA VILLE • TARIF B ments, présences gommées, scènes enfuies, DU 29 NOV. AU 3 DÉC. duos, trios, dans les atours du rêve, la gravité du sens et le miroitement des surprises. Ici la beauté ne peut que se montrer morcelée, Wim défaite, au souffle d’une époque d’utopies rui- nées et d’images vaines, et pourtant fasci- Vandekeybus nante. Époque que nous passons « à jouer du ULTIMA VEZ- KVS possible sans le réaliser. À aller jusqu’à l’épui- (THÉÂTRE ROYAL FLAMAND, BRUXELLES) sement des possibilités. Un épuisement qui 13 acteurs/danseurs CRÉATION renonce à tout ordre de préférence et à toute Puur organisation de but ou de signification ». musique David Eugene Edwards Étourdissant d’intelligence, tourbillonnant et Fausto Romitelli d’élégance, éclatant de trempe, Umwelt tisse textes P. F. Thomése et Ultima Vez le réseau des illusions qui isole la splendeur film de Wim Vandekeybus des êtres dans un temps saturé de mondiali- té, miné de vacuité. Étreintes survoltées, chevauchées ébourif- Gérard Mayen fées, jaillissements charnels : la danse de Wim Vandekeybus exulte, bataille, s’abandonne. Elle trahit les émois de la chair, s’engouffre dans les abîmes de l’âme et soudain s’épanche en vertiges mélancoliques. Depuis presque vingt ans*, le chorégraphe d’Ultima Vez n’en finit pas de forer le vernis policé de ph. J.-P. Maurin ph. J.-P. la conscience pour caresser la part obscure qui nous agite : l’amour, le sexe, le rêve, la mort. Son écriture, onirique, puissante, suit les fougues de l’instinct animal, les blessures du Maguy Marin, désir, et s’ébat rageusement dans les fantas- magories d’un imaginaire luxuriant : le Flamand possède la magie insomniaque des conteurs… Mêlant la danse, le théâtre et le cinéma, il trame le secret du vivant en fictions heurtées de la destinée humaine où l’élan vital conjure la fièvre noire des visions du néant. Avec Puur, il puise dans les anciens mythes et excise les tumeurs sanieuses de notre époque : massacre d’innocents, purification ethnique, aliénation au pouvoir, souffrance du deuil, peur de l’inconnu… Autant de tragédies trop souvent silencieuses qui lacèrent l’hu- manité et ébranlent notre « innocence » au plus intime. La gestuelle sculptée par les vibrations intérieures des danseurs, les mots du Néerlandais P. F. Thomése, les sonorités ombrageuses de David Eugene Edwards (du groupe 16 Horsepower) tout comme les images projetées sur le plateau, tressent les fils d’une histoire universelle. Wim Vandekeybus (photographe de formation) réalise ici l’osmose entre la scène et l’écran. Puur, fresque crépusculaire pour 13 dan- seurs, tonne comme un acte de résistance face à la violence du monde. G. D. * Un parcours que le Théâtre de la Ville accompagne depuis 1990. ph. J.-P. Stoop ph. J.-P. Wim Vandekeybus, ph.T. Valès/Enguerand ph.T. Sankai Juku,

coule ? De l’abandon à la pesanteur où la verticale se source ? Des coulés et rebondis- sements en lesquels le groupe bouillonne ? Il ph.Enguerand faudra se rafraîchir, toujours et encore, à ce cours de la danse en sa course. G. M. Odile Duboc,

THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 15 AU 30 DÉC. Sankai Juku THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 6 AU 10 DÉC. CRÉATION Ushio Amagatsu DU 15 AU 21 DÉC. 1er PROG.

Odile Duboc CRÉATION CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL DE création 2005 FRANCHE-COMTÉ-BELFORT 7 danseurs Rien ne laisse présager DU 27 AU 30 DÉC. 2e PROG. de l’état de l’eau Kinkan shonen RE-CRÉATION (Graine de cumquat) conception Odile Duboc et Françoise Michel Incontestablement, Ushio Amagatsu pose sur 10 danseurs scène un geste artistique qui puise autant à la danse qu’à la poésie et à la philosophie. Le DU FLUX, DONT LA DANSE DÉCOULE tout dans un même mouvement et l’évidence « Elle est blanche et brillante, informe et d’une pensée libre qui a trouvé dans la choré- fraîche, passive et obstinée dans son seul graphie son mode majeur. C’est à travers le vice : la pesanteur […] corps, instrument d’émotions aux mille […] Elle s’effondre sans cesse, renonce à nuances dont Ushio Amagatsu traverse les chaque instant à toute forme, ne tend qu’à couches les plus intimes, qu’il a raffiné sa s’humilier, se couche à plat ventre sur le sol […] compréhension de lui-même et du monde. Ce On pourrait presque dire que l’eau est folle, à maître du butô, mouvement chorégraphique cause de cet hystérique besoin de n’obéir japonais né dans les années 50, n’a de cesse qu’à la pesanteur… » depuis près de trente ans de nous transporter Odile Duboc aime citer Francis Ponge, pour dans des sphères mentales et sensibles inex- évoquer sa nouvelle grande pièce Rien ne plorées. Pour ce nouveau programme, il laisse présager de l’état de l’eau. Elle n’est pas reprend sa pièce fondatrice Kinkan shonen de ces artistes qu’impressionne la girouette (Graine de cumquat), conçue en 1978, dans des tendances. Croisant les lumières-univers laquelle il rêvait du mystère des origines au de Françoise Michel, la chorégraphe invente diapason de son enfance passée au bord de des plastiques d’états de corps au monde, la mer. Pour la première fois, il transmet son puisées à la pensée des éléments fondamen- rôle, qu’il a découpé en trois partitions, à trois taux : air, terre, feu, et eau. Imperturbable et interprètes. Parallèlement, il propose une nou- sûre, son œuvre parut abstraite quand la velle pièce pour sept danseurs dont le titre, danse des années 80 se payait de surenchère comme à son habitude, n’apparaîtra et ne visuelle. Intense et fine, elle paraît si dansante, sera connu que quelques semaines avant la quand la pensée chorégraphique s’est faite création du spectacle. Plus que jamais proche plus conceptuelle. de lui-même dans son absolue singularité, il y Ainsi Odile Duboc articule-t-elle un propos fouille cette notion fondatrice et insaisissable dans son époque, comme un repère essen- qu’est le temps. Chaque seconde, dans son tiel. Et on trouve quelque chose de la défer- intemporalité, représente à elle seule une lante, dans l’allant des énergies nombreuses goutte d’éternité dont Amagatsu compte bien rassemblées pour de patients mois de prépa- extraire l’essence même d’un être au monde, ratifs de Rien ne laisse présager de l’état de ici et maintenant. l’eau. Qu’en est-il du flux dont la danse dé- Jeanne Liger nuances. Alain Platel, chorégraphe des polyphonies bigarrées, ne pouvait trouver

, ph. X. DR là meilleure invitation à célébrer l’essence des singularités humaines, non comme di- vision à l’infini d’identités irréconciliables, Alain Platel mais comme humus d’une appartenance commune, chorale, au mystère du monde. J.-M. A.

ALAIN PLATEL AU THÉÂTRE DE LA VILLE fév. 96,97 La Tristeza complice mai 98 Iets op Bach fév. 00 Iets op Bach mai 00 Tous des indiens (Arne Sierens)

THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 28 FÉV. AU 4 MARS Marie Chouinard COMPAGNIE MARIE CHOUINARD création 2005 CRÉATION THEATRE DE LA VILLE • TARIF EXCEPTIONNEL 10 danseurs DU 16 AU 25 FÉV. Profondément païenne, parfois même héré- Alain Platel tique ; animiste en diable et tellurique dans BALLETS C. DE LA B. son énergie, Marie Chouinard peut à juste titre considérer la danse comme « un vibrant Vespers CRÉATION appel à la liberté d’être ». En d’autres circons- musique Monteverdi, Les Vêpres tances, la formule semblerait banale, gratuite- 10 danseurs/10 chanteurs et musiciens ment incantatoire. Mais toute l’œuvre de la en coproduction avec l’Opéra national chorégraphe canadienne en dit au contraire la de Paris pertinence. De 1978 à 1990, c’est exclusive- ment en solo qu’elle élabore un vocabulaire Avec un brio où grâce et trivialité imbriquent tout à fait personnel, aux confins de la perfor- leurs racines, Alain Platel a déluré la danse mance, faisant de son propre corps la forge contemporaine – comme seule avant lui, Pina malicieuse d’une beauté incandescente, cata- Bausch l’avait entrepris –, faisant cabaret lysant un mouvement viscéralement orga- d’un théâtre des corps livrés à l’audace de nique. Consacrée à New York par un Bessie leurs débords. En poète du désordre, il a Award en 2000, après avoir constitué sa semé pour longtemps, avec les fresques compagnie dix ans plus tôt, Marie Chouinard pagailleuses des Ballets C. de la B., l’insolente a su transmettre et communiquer à des inter- vitalité d’une humanité de bric et de broc. Il a prètes totalement investis une vision de la trouvé le juste ton d’une théâtralité de la danse profondément ancrée dans un corps déglingue, heureusement affranchie, cepen- souterrain, archaïque, qui continue de mode- dant, d’un réalisme social auquel certains ler nos pulsions de vie. Le Cri du monde, esprits grincheux voulaient le réduire. pièce cataclysmique, et Chorale, tout en Abordant enfin quelques-uns des sommets du cadence de souffles et de voix, sont deux des répertoire musical, il a donné forme, sur le vif spectacles emblématiques grâce auxquels le d’une verve expressive haute en couleur, à public du Théâtre de la Ville a pu découvrir – une sorte d’opéra contemporain fort éloigné et plébisciter – la densité d’un univers choré- des conventions du genre. Convoquant la graphique à nul autre pareil. Sans doute sera- musique de Purcell (transposée à l’accor- t-on surpris d’apprendre que la prochaine déon) dans La Tristeza complice, il a réédité création de Marie Chouinard, dévoilée à la de semblables aventures en compagnie de prochaine Biennale de Venise, fera la part Jean-Sébastien Bach avec le tumultueux Iets belle aux pointes de la danse classique. Sur op Bach, puis de Mozart dans le récent – et les sonorités électroacoustiques de Louis tout aussi intrépide – Wolf. Sa prochaine créa- Dufort, mais aussi sur les Variations Goldberg tion se profile dans les chaudes couleurs de de Bach, la chorégraphe déploie une palette Monteverdi. Le madrigaliste italien, précur- de variations sur « l’exercice de la liberté ». e e Entre ce qui entrave le mouvement et ce qui seur de l’opéra au tournant des XVI et XVII siècles, avait déjà inspiré voici quelques parfois le crée, la frontière est parfois ténue : années le mémorable Ottone, Ottone d’Anne pointes, donc, mais aussi prothèses, bé- Teresa De Keersmaeker. La chorégraphe avait quilles, harnais, cordes, figurent pour Marie alors puisé dans Le Couronnement de Chouinard tout un attirail disciplinaire qui peut Poppée les fils chatoyants d’une fresque riche aussi devenir source de jeu et de plaisir. Avec en surprises. Alain Platel, pour sa part, jette une préoccupation constante qui traverse l’ancre dans Les Vêpres de la Vierge, monu- toute son œuvre : explorer, encore et toujours, ment d’art sacré publié par Monteverdi à le mystère insoluble du corps et du vivant, Venise en 1610. Sans affectation religieuse, leurs fragrances à la fois subtiles et extrava- gageons que le chorégraphe saura trouver la gantes, somptueuses et sauvages. façon de transposer dans un certain paro- J.-M. A. xysme expressif les psaumes, antiennes et Magnificat qui charpentent ces Vêpres. Monteverdi y joue à merveille d’une palette où chœur et orchestre déposent de multiples ph. M. Chouinard Marie Chouinard,

THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 15 AU 18 MARS

Meg Stuart ph. D. Meienberg DAMAGED GOODS

création 2006 CRÉATION Meg Stuart, musique Hahn Rowe 9 danseurs

Il y a du corps, encore… Le cauchemar d’une société prophylactique, qui formerait autour des individus une bulle sanitaire les préser- vant de toute infection, de toute agression extérieure, de toute contamination, en bref de tout contact, tel que Meg Stuart et Benoît Lachambre l’évoquaient récemment dans une séquence de Forgeries, love and other mat- ters, est un fantasme mortifère. Déjouer l’an- nomades du monde, qu’elle sédentarise à goisse du contemporain, que trahissent les Berlin le temps volontairement long d’un labo- logiques sécuritaires qui hantent le champ ratoire de création imprégné du dehors, Meg politique comme l’espace intime, c’est ne pas Stuart s’attaque aux peurs qui nous in- craindre de s’y frotter. Si l’on a pu qualifier de toxiquent. Le meilleur remède n’est-il pas de « danse du désastre » les premiers spec- s’auto-intoxiquer, par exemple en jouant à se tacles de Meg Stuart, c’est bien que la choré- faire peur, en ridiculisant la terreur et le senti- graphe américaine, aujourd’hui installée en ment de catastrophe, par une mise en scène Europe, choisissait de ne pas ignorer, dans sa exagérée des formes de la monstruosité ? Ce quête de mouvement, les secousses, ravages sont-là quelques-unes des pistes de jeu et fragmentations à l’œuvre dans les sociétés qu’explore aujourd’hui une Meg Stuart ma- modernes. Un corps ne se construit pas à licieusement sereine, critique et lucide mais l’exclusion de ce qui l’entoure. En danse, il en cependant confiante dans une promesse de est tout particulièrement le réceptacle, parfois vie dont le corps demeure le laboratoire même le sismographe de tremblements en- artisanal. core souterrains. J.-M. A. En leitmotiv d’un texte écrit pour la compagnie MEG STUART AU THÉÂTRE DE LA VILLE Damaged Goods, le critique et dramaturge Jeroen Peters interroge : « How to give jan. 96 No one is watching discourse back to the body ? » (Comment res- nov. 97 Crash Landing @ Paris tituer au corps son discours ?) Loin d’une « fic- fév. 98 Splayed mind out tion abstraite » dont le corps serait l’essence mars 99 Appetite désincarnée, Meg Stuart prône une « proximi- fév. 02 Alibi té sensorielle » avec ce qui affecte nos juin 03 Visitors Only repères, paupérise nos expériences et désen- mars 05 Forgeries, love and other matters chante nos horizons. Avec neuf danseurs, (au Théâtre de la Cité Internationale) ph. Enguerand S. L. Cherkaoui, D. Jalet…

THEATRE DE LA VILLE • TARIF B piciennes. Sur une rotonde de briquettes trône l’ombre d’un échafaudage, métaphore DU 4 AU 15 AVR. 2e PROG. de nos mémoires en chantier où se fondent vestiges d’avant et d’après : cette pièce col- Angelin lective oscillera entre désir de construction et tentation de déconstruction, entre ferveur Preljocaj sacrée et insolence profane. Les corps s’en- BALLET PRELJOCAJ roulent, se déplient, s’imbriquent et s’entre- choquent. Chacun apporte à la conversation Empty Moves (part I) (2004) son vocabulaire gestuel et son style chorégra- création sonore John Cage, Empty words phique. Duos magnétiques, figures giratoires, 4 danseurs sauts élastiques se muent en postures chris- tiques, tango voluptueux ou numéros de Noces (1989) transformisme. D’avant procède par digres- musique Igor Stravinski, Noces sions et renversements au gré de cocasses 10 danseurs saynètes : match de foot improvisé, défilé mili- tant sous banderole ou encore procession de voir article p. 22 la mariée… Ce boy’s band audacieux singe avec humour les intégrismes et esquisse un tableau mosaïque bien de notre temps. G. D. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B * D’avant a été coproduit et présenté par le Théâtre DU 25 AU 29 AVR. de la Ville en octobre 2002. Sidi Larbi Cherkaoui Damien Jalet THEATRE DE LA VILLE • TARIF B Luc Dunberry DU 3 AU 6 MAI REPRISE Juan Kruz Diaz Jan Lauwers De Garaio Esnaola NEEDCOMPANY D’avant REPRISE La Chambre d’Isabella BIS !!!! 9 interprètes Ils sont quatre, personnalités pétulantes et danseurs talentueux qui se sont rencontrés à LE BONHEUR DES SENS l’occasion d’une tournée. Présentation : Sidi À 94 ans, elle porte en elle un siècle d’histoire, Larbi Cherkaoui, Belgo-Marocain, et Damien une vie d’aventures. Elle a le ton léger, une Jalet, Belge, féru d’ethnomusicologie, issus présence souveraine, la voix rugueuse et le des fameux Ballets C. de la B. ; Luc Dunberry, rire éclatant. Isabella Morandi, derrière ses Canadien, et Juan Kruz Diaz de Garaio lunettes noires, a perdu la vue mais ne Esnaola, Espagnol, également chanteur, tous manque pas de visions. Entourée de ses deux créatifs interprètes de Sasha Waltz. Et proches, elle est en visite parmi ses souve- ces quatre-là prétendent former… Un « boy’s nirs, suivant le fil capricieux de sa mémoire. band médiéval » ! Projet un brin farfelu au pre- Reconstitution lacunaire que ses partenaires mier abord. Mais ô combien réjouissant ! En se chargent de compléter, contredire, embel- témoigne le formidable succès lors de sa lir. Sentinelles attentives aux pièges de la fic- création au Théâtre des Abbesses*. tion comme aux aspérités du réel, ils se Traversant le répertoire du VIIe au XIIIe siècle, le relaient avec bonheur pour prendre en charge quatuor polyglotte conjugue en virtuose le cette soudaine réapparition de la narration au chant a capella et la danse sous le signe de la théâtre. Une nouvelle voie ouverte par Jan fantaisie et du métissage. Ici, les inflexions Lauwers au sein d’une œuvre sertie de perti- méditerranéennes narguent les accents nences vagabondes, et qui vient encore arabo-andalous, les chœurs grégoriens en- creuser le langage polyphonique et en lacent les mélodies galantes des chansons de constant bouleversement du metteur en cour. Nos trublions jouent autant des réso- scène flamand. nances entre les gestes et les vibrations de la Dans ce rôle cousu main pour son talent, voix qu’ils s’amusent à détourner imageries Viviane De Mynck est l’actrice au sens le plus des bâtisseurs de cathédrale et figurines sul- incarné, fantasque, inattendu du terme. L’une ph. M.Abeele Vanden Grace Ellen Barkey,

des muses de Jan Lauwers qui, depuis les THEATRE DE LA VILLE • TARIF A débuts de la Needcompany qu’il dirige, par- 23 ET 24 MAI tage cette recherche d’un théâtre de l’intuition aux multiples expressions. Par bribes, frag- ments, La Chambre d’Isabella * déploie le Grace Ellen cours sinueux d’un récit charnel et fantaisiste. Entre fiction et réalité se dessine la biographie Barkey d’un personnage puissamment amoureux de NEEDCOMPANY la vie dont la naissance repose sur un secret, Chunking 6 danseurs CRÉATION peut-être même un pieux mensonge. À la façon d’une partition musicale, texte, petites D’origine indonésienne, Grace Ellen Barkey danses et chansons cisèlent les émotions, est une artiste européenne. Après une forma- vers un théâtre de la félicité. I. F. tion en danse à Amsterdam, elle a rejoint la Needcompany de Jan Lauwers, participant à * Coproduite et présentée la saison dernière au la plupart de ses spectacles depuis 1986, y Théâtre de la Ville. apportant une certaine nonchalance sen- suelle, l’allant d’un jeu mutin, mais aussi la braise d’une intensité contenue. Cette « petite musique » intérieure, Grace Ellen Barkey lui a donné une singulière chambre d’écho dans les spectacles qu’elle a chorégraphiés et mis en scène au sein de la Needcompany, mais sous son propre nom, depuis 1992. Avec un zeste de joyeuse folie, elle a développé une ph. M. Vanden Abeele ph. M. Vanden forme de danse-théâtre totalement décom- plexée, où tous les repères habituels (narratifs ou abstraits) ont volé en éclats. Ce fut d’abord

Jan Lauwers, sous l’apparence de fictions plus ou moins autobiographiques (One et Stories), puis en se saisissant de l’imaginaire du conte, que Grace Ellen Barkey a progressivement élabo- ré, la recette de fantasmagories pétillantes. Avec (And), que les spectateurs du Théâtre de la Ville ont pu découvrir en mars-avril 2004 au Théâtre de la Bastille, on se laissait aisé- ment gagner par l’ivresse que procurait un cocktail délicieusement frappé où la danse, le théâtre et la musique concouraient à déborder la trame d’un conte chinois sur lequel régnait une princesse soucieuse de garder sa virgini- té. Dans Few things déjà, à partir du Mandarin merveilleux de Béla Bartók, un parfum d’Extrême-Orient distillait ses saveurs épi- cées. La création de Chunking pourrait bien se nourrir d’une telle veine, même si la choré- graphe signale juste, pour l’heure, que le titre de sa pièce est celui d’une ville en Chine. Mais chunking, ajoute t-elle, est aussi un terme de psychologie : « pour stocker les informations de façon sensée dans la mé- moire, nous devons les diviser en morceaux (chunks) ». Dans la géographie mentale de Grace Ellen Barkey, l’inconscient est un vol- can, et gare à l’éruption ! Il n’est pas sûr qu’à la fin de l’histoire, tous les morceaux soient recollés, mais même en miettes, le puzzle risque fort de ne pas être un jeu de patience. D’autant, nous dit-on, que le légendaire Kill your idols de Sonic Youth sera convoqué pour secouer les corps et faire pétiller leur voltage. J.-M. A. Sasha Waltz, ph. J.-P. Maurin THEATRE DE LA VILLE • TARIF A 25 MAI HORS ABONNEMENT Jan Lauwers NEEDCOMPANY

Needlapb (2006) Il arrive parfois que le succès public de telle ou telle œuvre, et l’audience élargie qu’elle apporte à son auteur, soient fondés sur un malentendu : celui d’une « notoriété » à retar- dement, qui consacre des écritures novatrices alors que celles-ci commencent à se faner, ou en tout cas dont la fraîche vigueur des surgis- sements s’est muée au fil des ans en de reconnaissables figures de style. L’enthousiasme du public qui s’est porté la saison dernière, au Théâtre de la Ville, sur La Chambre d’Isabella de Jan Lauwers, échappe à un tel malentendu. Bien mieux, en n’étant soumis à aucun « racolage » médiatique ou publicitaire, ce succès aura témoigné, dans sa jeunesse même, de la force intacte d’un désir de théâtre renouvelé dans ses formes et ses contenus. Ce succès, enfin, avait ceci de réjouissant à Paris qu’il venait sceller une très longue fidélité entre le « théâtre d’art » de Jan Lauwers et le Théâtre de la Ville, qui a toujours sion du précédent, l’examen d’une autre soutenu et accueilli les réalisations du metteur question, une rupture dans la continuité. en scène de la Needcompany depuis Need to Après avoir sondé les fissures d’une société know en 1987. allemande en proie au chamboulement de la En plus de quinze ans, le « théâtre postdra- réunification, elle s’éloigne du terrain sociopo- matique » de Jan Lauwers a fourni pas mal litique et s’interroge sur ce qui fonde l’être : le de bonheurs, dont la fougue était empruntée corps, dont elle exprime tous les idiomes et à la verve shakespearienne ou puisée aux les mélodies intimes dans une puissante trilo- sources d’un art de friction qui associe les gie (Körper, S et noBody *). Elle s’avance bruits et les corps, les paroles et les mouve- aussi vers une danse plus abstraite, qui trouve ments, les musiques et les lumières. Plasticien son plein épanouissement dans la pureté des d’origine, Jan Lauwers a conquis un épatant Impromptus. La chorégraphe allemande n’en savoir-faire scénique. Mais le « savoir-faire » continue pas moins à empoigner le réel, à n’est pas une fin en soi. Et toujours l’artiste montrer les convulsions de notre temps, avec véritable devrait-il le risquer sur de nouveaux son style bien à elle, où se conjuguent force chemins. Renouant avec l’esprit de « nuits métaphorique des images, sculptées à même d’art » qu’il organisa alors qu’il sortait de l’É- les corps, écriture ciselée du geste, fragilité et cole des Beaux-Arts d’Anvers, les Needlapb vigueur charnelle, trivialité et transcendance. sont pour Jan Lauwers ce laboratoire vivant Sa création 2005 s’aventure encore sur un où prennent corps « des idées, des notes, des autre territoire. Sasha Waltz veut travailler sur ébauches, des pensées éparses », sorte l’individu, tout en revenant à une dramaturgie d’atelier généreusement ouvert au public des plus théâtrale. Elle imagine un espace très émulsions à venir. concret, en permanente mutation, dans une J.-M. A. atmosphère quasi surréelle : un lieu confiné de rencontres et de frottements des individuali- tés. Comme toujours chez elle, l’improvisation se situe au cœur du processus de création. Avec sa nouvelle troupe permanente de 14 danseurs-chorégraphes, elle mène un labora- toire d’observation des métamorphoses de ph. Needcompany l’identité à l’épreuve de l’altérité. G. D.

Jan Lauwers, * Depuis 2000, le Théâtre de la Ville a présenté la majeure partie des créations de Sasha Waltz.

THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 30 MAI AU 10 JUIN CRÉATION THEATRE DE LA VILLE • TARIF B Anne Teresa De DU 10 AU 20 MAI CRÉATION Keersmaeker Sasha Waltz ROSAS SASHA WALTZ & GUESTS création 2006 15 danseurs 14 danseurs création 2005 tryptique sur la musique de Sasha Waltz a décidément l’âme nomade George Benjamin, Dance Figures d’une exploratrice. Depuis plus de dix ans, Béla Bartók, musique pour cordes, percus- elle compose par touches une œuvre poly- sion et célesta chrome qui puise dans des univers radicale- Claude Debussy, Jeux ment différents. De pièce en pièce, elle n’est ni tout à fait la même ni tout à fait une autre. Fase, en 1982 déjà, marquait le commence- Chaque spectacle vient comme la transgres- ment infini d’un chemin déterminé, voire obsti- A. T. De Keersmaeker, ph. P. Goethals ph. L. Philippe Pina Bausch,

né, où le corps joue dans la danse sa maîtrise THEATRE DE LA VILLE • TARIF EXCEPTIONNEL et sa fougue. Ce chemin a posé ses premiers DU 17 JUIN AU 4 JUIL. jalons dans les entrelacs répétitifs de Steve Reich, avant d’épouser les rythmes de Thierry De Mey, de voyager avec Bartók puis Mozart, Pina Bausch Monteverdi, Ligeti et Ysaÿe, Bach, Miles TANZTHEATER WUPPERTAL Davis, et tout récemment la voix de Joan création 2005 CRÉATION Baez, la scansion d’un raga indien et le jazz résidence à Séoul de John Coltrane. Défiant la doxa qui procla- mait que la danse contemporaine s’était Au fil des années, Pina Bausch a redessiné émancipée de la musique, Anne Teresa De une carte du Tendre qui lui est personnelle, Keersmaeker a au contraire renoué, entre autant d’escales chorégraphiques au long danse et musique, un fructueux dialogue ; cours. « On me demande parfois si je me sens donnant à voir la musique, traduisant dans la européenne : mais je ne sais pas où sont les forme chorégraphique – toute gorgée de ses frontières, les limites », dit-elle. De l’Europe du élans et tourbillons, de son flux et de sa respi- Sud (Rome, Palerme et par extension ration – le patient tissage des structures et des Istanbul) à l’Amérique Latine (Rio de Janeiro émotions. Au fil des ans et des pièces, on ou Buneos Aires), la chorégraphe de aurait pu craindre qu’un certain savoir-faire Wuppertal, nomade des temps modernes, dans l’ordre de la composition vienne étouffer s’installe ainsi dans chacune de ces villes l’aventure du « commencement infini ». Mais pour des résidences avec ses danseurs : il non : ce parcours est resté enjoué, et le dia- s’agit alors de s’imprégner des odeurs, des logue des formes, toujours aussi vivant, couleurs, des gestes d’une cité et de ses demeure un chantier bien plus qu’un système habitants. De retour en Allemagne, la compa- de reproduction. Forcément, il y a un secret. gnie se remet au travail pour enfin donner Anne Teresa De Keersmaeker le livre bien forme à ses miracles de représentations. volontiers, à l’approche de sa nouvelle créa- Séoul, capitale d’une Corée du Sud entre tion pour laquelle elle donne à nouveau ren- miracle (mirage ?) high-tech et traditions redé- dez-vous à Béla Bartók (musique pour cordes, couvertes, est cette nouvelle étape. D’un percussion et célesta), mais aussi à Debussy décor aux allures de glacier, imaginé par son et à George Benjamin, un compositeur complice Peter Pabst, la chorégraphe fait, par contemporain qui créera pour l’occasion la magie de projections, une montagne fleurie, Dance Figures. « La composition et le contre- un bord de mer déchaînée, un feu d’artifices point, je ne m’en lasse pas. J’ai encore tel- aussi. Portés par des mélodies coréennes et lement de choses à faire et apprendre », des tambours, les solos des danseurs, sou- confie-t-elle sans fausse modestie… La vent longs, sont comme des respirations, musique est pour elle, depuis longtemps, une artères qui irriguent une pièce d’une infinie ligne de cœur. Revenir inlassablement à ce richesse : peut-être l’une des plus ambitieuse que l’on aime et aimer le faire partager, de la troupe. On rit parfois à ces trouvailles – fondent peut-être le plaisir et la nécessité du comme cette cordée d’alpinistes qui croise un principe de répétition. Avec cette sublime couple de danseurs en pleine parade amou- qualité dont la danse cultiverait le désir : que reuse –, on s’émerveille toujours à cette danse la répétition soit chaque fois différente, qu’elle des signes où chaque détail touche au coeur. soit le ferment qui permette d’essayer de nou- Apaisée, Pina Bausch raconte un peu de cha- velles rencontres. « Je n’ai encore jamais fait cun à travers ces corps qui s’emboîtent, ces de chorégraphie sur des musiques pour mains qui se frôlent, ces courses qui n’en orchestre à part La Nuit transfigurée de finissent pas. Le mouvement ne fait qu’un Schoenberg et Mozart avec Concert Arias », avec une nature retrouvée, ici un tronc remarque Anne Teresa De Keersmaeker, et d’arbre, là des feuilles de salade : à un instant cette nouvelle création en sera, grâce à la du spectacle, des oreillers se mettent à voler. résidence qui la lie à l’Opéra de la Monnaie, Sans effets spéciaux. Une tête vient s’y poser. l’opportunité. Le chemin parcouru dessine le Comme si Pina Bausch détenait la clef de nos pas à venir. songes. J.-M. A. Ph. N DANSE AUX ABBESSES ph. Enguerand Koen Augustijnen,

improbable scénario taillé sur mesure pour DR une autre artiste iconoclaste, Vera Mantero, ph. X. chorégraphe et performer portugaise qui a eu l’audace de demander une danse à Robyn Orlin. De la hardiesse et une même énergie de

Vera Mantero Vera survie, jubilatoire et sauvage, animent les gestes des deux artistes qui ont décidé de créer ensemble cette pièce au sourire grin- çant. Environnée d’objets particuliers, néces- saires et disponibles, Vera Mantero, poétesse ph. J.-P. Lozouet, du corps, dont les images cristallisent le fort impact physique, plastique et littéraire de ses propres pièces, se transforme à vue, sous le Robyn Orlin regard de la chorégraphe sud-africaine.

LES ABBESSES • TARIF A I. F. DU 11 AU 15 OCT. LES ABBESSES • TARIF A Robyn Orlin DU 2 AU 5 NOV. CITY THEATER & DANCE GROUP Koen Vera Mantero Augustijnen O RUMO DO FUMO BALLETS C. DE LA B.

Hey dude... I have Bâche REPRISE D’UN TRIOMPHE talent... I'm just waiting composition, arrangement musical, piano Guy Van Nueten for God... CRÉATION Steve Dugardin chant Hé mec… J’ai du talent… J’attends Dieu Koen Augustijnen, c’est d’abord, pour faire c’est tout… simple, une silhouette, un grand "brin" de gar- solo pour et avec Vera Mantero çon au sourire contagieux, que certains ne manquèrent pas de repérer dans les créations LE SOURIRE DES MOUTONS d’Alain Platel et des Ballets C. de la B. Au sein Mais qui donc connaît Nosingle Smau, cette de ce collectif belge, Koen Augustijnen a su femme de quarante-cinq ans, et la précieuse saisir l’opportunité offerte et présenter ainsi To recette culinaire qui a fait sa réputation et Crush time puis Just another landscape for changé sa vie ? Ce délicieux smiley, un mets some juke-box money, premiers galops d’es- exclusif à base de tête de mouton bouillie, qui sai en tant que chorégraphe. Chez Koen la voit à l’aube de chaque matin prendre le Augustijnen, il y a cet art si délicat du té- train pour la ville et se procurer la friande mar- lescopage, musical tout d’abord avec Bach, chandise qu’elle transporte dans un vieux Schubert et du rock, chorégraphique ensuite, chariot. Lucrative activité que ce commerce danse et haute voltige pour ainsi dire. Bâche, sans corps, boucherie de la pauvreté qui lui a sa troisième pièce impose enfin son talent : permis d’abandonner sa cabane qui brûlait une reprise ici-même aux Abbesses, une belle régulièrement l’obligeant sans cesse à tout tournée européenne. Bâche est un qua- recommencer, et de s’acheter une maison. Un tuor d’hommes qu’accompagne la voix d’un luxe. Nosingle Smau peut être fière. ange, Steve Dugardin chantant Henry Purcell, Sans aucun doute, Robyn Orlin, aura tiré cette et les harmonies de Guy Van Nueten. Koen anecdote de son pays natal, l’Afrique du Sud. Augustijnen a travaillé sur les peurs enfouies Intarissable source de création, de réflexion et en chacun tout autant que sur une belle idée, d’engagement qu’elle met en jeu avec un celle d’une communauté au masculin. Bâche humour décapant dans chacun de ses spec- est ainsi traversé de moments de grâce brute : tacles. Dans Hey dude… I have talent… I’m la procession d’un danseur sur le corps de just waiting for God (traduire : « Hé mec… J’ai ses compagnons d’un soir, un interprète qui du talent… J’attends Dieu c’est tout »), l’in- se "pend" littéralement au cou de l’autre, dé- croyable histoire de Nosingle Smau devient un cidé à ne pas le lâcher comme si sa vie en dépendait. Tayeb Benamara, Ghislain LES ABBESSES • TARIF A Malardier et Ted Stoffer, qui accompagnent DU 23 AU 27 MAI Koen Augustijnen dans cette odyssée de poche, semblent à l’aise dans les extrêmes, laissant çà et là apparaître leur formation Mercedes Ruiz mêlée, classique, hip-hop, cirque ou contem- COMPAGNIE MERCEDES RUIZ porain. Guy Cools, le dramaturge de Bâche, Dibujos en el aire flamenco les prend pour ce qu’ils sont, des sacrés tem- péraments qui dansent et jouent comme ils avec 2 guitaristes, 2 chanteurs respirent et, au final, nous bouleversent. et 2 percussionnistes Ph. N. Native de Jerez, Mercedes Ruiz est devenue à 25 ans le plus bel espoir du flamenco : dans son parcours sans faute, après le temps des cours qu’elle fréquente, vient, en 1986, Semilla flamenca d’Ana Maria Lopez, son pre- mier engagement professionnel. On retrouve par la suite la danseuse en tournée avec ph. S. Anwar Manuel Morao : elle séduit déjà par ce baile intemporel. Mercedes Ruiz n’en oublie pas ses racines et dès qu’elle le peut, fréquente les penas comme les festivals andalous, autant de retours aux sources. En 1998, on l’applaudit dans Vivencias d’Antonio El Pipo. Vont suivre deux rencontres d’importance :

Madhavi Mudgal et Alarmel Valli, Madhavi Mudgal et Eva Yerbabuena pour 5 Mujeres 5, puis Andrés Marín avec Más allá del tiempo, deux artistes flamencos passés par le Théâtre de la Ville. Il était temps alors pour Mercedes Ruiz de se présenter seule en scène : elle signe des spectacles remarqués, Dibujos en el Aire (dessins dans l’air) puis A Antonio Gades, hommage au célèbre maître, disparu il y a peu, qui aura marqué le flamenco de son LES ABBESSES • TARIF A empreinte, et Gestos de Mujer (Gestes de DU 11 AU 15 AVR. femme). De Mercedes Ruiz, on dit que sa siguiriya est fabuleuse : sa danse est alors épurée, lente et solennelle. Son allure, sa robe Alarmel Valli à traîne qu’elle semble manier avec une grâce irréelle, en font une reine flamenca à la dis- Madhavi tinction innée. Enfin son zapateado (la frappe des pieds au sol) remarqué pour sa virtuosité, Mudgal en fait la digne héritière d’une grande lignée de puristes flamencos. Au Théâtre des Samanvaya CRÉATION Abbesses, écrin de rêve pour Mercedes Ruiz, conception, chorégraphie et interprétation elle nous offrira la primeur de sa dernière Alarmel Valli et Madhavi Mudgal création où la passion de la danse s’accorde avec 10 musiciens avec son tempérament flamenco. Ph. N. Du jamais vu ! Deux danseuses traditionnelles indiennes, deux stars incontestées de la scène chorégraphique, décident de partager le plateau le temps d’un spectacle. Il faut , ph. K. Handner s’appeler Madhavi Mudgal et Alarmel Valli pour s’offrir cette parenthèse de jeu dans un emploi du temps qui laisse peu de place aux

expériences inédites. Il faut aussi oser se Mercedes Ruiz confronter l’une à l’autre. Plus aventureuses dans l’âme que crispées sur leur territoire, les deux femmes ont sauté le pas et imaginé un dispositif spectaculaire qui les met respecti- vement en valeur tout en proposant des moments de dialogues. À main droite, Madhavi Mudgal ravit par la sensualité déga- gée, sans l’ombre d’une coquetterie, avec laquelle elle fait décoller l’odissi, danse lyrique originaire de l’État d’Orissa (nord-ouest de l’Inde), vers des sommets de jouissance cho- régraphique. Tout en mouvements de torse, rotations, bonds légers, l’odissi, inspiré par les mouvements de la végétation et des animaux, ruisselle comme de l’eau vive. À main gauche, Alarmel Valli, éblouissante interprète de bhâ- rata natyam, sait aujourd’hui plus que jamais en extraire la saveur intime. Géométrique, tiré au cordeau, le bhârata natyam, né dans le Tamil-Nadu (sud-ouest de l’Inde), dessine une silhouette aux lignes limpides, ébranlée par les rythmes des pieds. On suspend son souffle pour savourer la rareté de ce face-à- face qui ouvre les portes d’une étude compa- rée passionnante des deux styles de danse. J. L. , ph. L. Philippe Jan Fabre

LES ABBESSES • TARIF A DU 30 MAI AU 3 JUIN REPRISE Jan Fabre ph. L. Philippe TROUBLEYN

Quando l’uomo J.-Cl. Gallotta, principale è una donna solo dansé par Lisbeth Gruwez

REPRISE D’UN CHEF-D’ŒUVRE ! Artiste polymorphe, Jan Fabre exhume au scalpel la beauté sauvage ligotée par les rets LES ABBESSES • TARIF A effarouchés de l’ordre moral et le parangon de DU 6 AU 17 JUIN nos icônes aseptisées. Provocateur ? Héré- tique ? Oui, si l’on nomme ainsi ceux qui ré- sistent à la normalisation de la pensée. Cet Jean-Claude esthète frondeur exalte le corps et ses fureurs, ses interdits et ses ravissements, libérant les Gallotta forces primordiales des censures (sensures ?) liquoreuses de la convention. Mais Jan Fabre est aussi un amoureux des femmes. Il sait Ballet leurs mystères, leurs batailles secrètes. Il en cerne les ombres et les éclats avec la finesse de Lorraine du peintre. Quando l’uomo principale è una Docteur Labus RE-CRÉATION donna *, solo dédié à la somptueuse Lisbeth 9 danseurs Gruwez, une de ses danseuses favorites, joue sur les frontières incertaines de l’identité : En 1988, le public passablement émoustillé « Quand l’homme principal est une femme. » découvrait Docteur Labus, nouvelle pièce de Au plus intime de l’homme, la femme ? Jean-Claude Gallotta, ce franc-tireur de la Créature bisexuée en veste et pantalon noir, danse installé à Grenoble, passé par le New Lisbeth Gruwez caresse crânement les billes York vivifiant des années 70 et qui osait réunir sonores qui lui servent d’attributs virils, tandis danseurs, acteurs et musiciens dans son que s’égrainent les accents italiens de Volare, groupe Émile Dubois. Ce docteur Labus, ritournelle que Domenico Modugno composa Gallotta l’avait paraît-il rencontré au Mexique : dans les années 70 en hommage au saut un drôle de gus, marié à 4 femmes en même dans le vide d’Yves Klein. Prélude railleur au temps dans 4 villages différents ! Labus lui prodigieux sabbat qui va suivre… L’andro- raconta sa vie tumultueuse, ses passions, ses gyne étreint violemment le sol et s’emporte émois. Il en résulta un ballet avec des duos et dans une danse effrénée entre les flaques pas mal de libertinage, une danse infiniment d’huile d’olive que des bouteilles suspendues libérée des conventions, un hymne à la vie. répandent goutte à goutte. Bientôt, la matière Jean-Claude Gallotta y reviendra d’ailleurs luisante couvre tout le plateau. L’herma- en1996. Aujourd’hui, c’est au tour du CCN phrodite ôte le costume qui bride sa féminité : Ballet de Lorraine, sous la direction de Didier elle roule dans le liquide, glisse, s’ébroue, Deschamps, de se glisser dans la "peau" du tournoie, sublimement nue, d’une nudité au- Docteur Labus : des quatre actes de la choré- delà du sexe, au-delà de la transgression. graphie d’origine, la fougue initiale est intacte. Ruisselante, sensuelle, l’énergie fulgurante et On retrouve ces pas de deux décalés, ces le geste sculpté, elle a la beauté libertaire dialogues au corps, ces couples de danse d’une vierge guerrière, elle est la béance de jusqu’à « l’épuisement permanent des pas- l’origine du monde. G. D. sions fugitives ». Les interprètes du Ballet de * Créé en avril 2004 au Théâtre des Abbesses. Lorraine se donnent tout entiers à cette parti- tion de sens et de sueur, portés par la musique originale du tandem Henry Torgue et Serge Houppin. La compagnie installée à Nancy ne cesse de surprendre son monde, à l’aise dans les univers variés de Karole Armitage ou de Malou Airaudo, de Russell Maliphant ou du jeune Christophe Béranger. Ce Docteur Labus de Jean-Claude Gallotta, , ph. X. DR , ph. X. DR Claudio Brizi Priyadarsini Govind , ph. J. Gros-Abadie Maria-Kiran

plus que bienvenu dans un répertoire en per- pétuelle évolution, est de ces rencontres mer- veilleuses qui scellent l’histoire d’amour d’une compagnie et d’un chorégraphe. Ph. N.

LES ABBESSES • TARIF A DU 27 AU 30 JUIN MUSIQUE/DANSE Priyadarsini LES ABBESSES • TARIF A Govind 13 ET 14 FÉV. bhârata natyam CRÉATION Maria-Kiran 4 musiciens Claudio Brizi Encore peu connue en France, la danseuse claviorgan indienne Priyadarsini Govind a des chances de ne pas le rester bien longtemps. Originaire Bhârata/Bach CRÉATION de Tanjore, cette experte en bhârata natyam une chorégraphie liturgique qui avait mis sa carrière entre parenthèses rencontre de deux grands arts savants et pour élever ses enfants, a raffiné depuis de sacrés : les œuvres liturgiques et la danse longues années une virtuosité sans appel : la bhârata natyam beauté abstraite de son geste possède un impact émotionnel fort. Sans doute, son avec la participation de Gianfranco Borelli besoin irrépressible de danser, son urgence à violon, alto articuler dans un même élan sa vie d’artiste et de femme, chargent-ils son art d’une saveur Son talent saisissant allié à un esprit d’aven- toute particulière. Élève à Madras des gurus ture aiguisé, distingue d’emblée Maria-Kiran Swamimalai K. Rajarathnam et Smt. Kalanidhi parmi les jeunes interprètes de bhârata Narayanan, elle se révèle aussi libre et vi- natyam. À 24 ans, cette danseuse classique brante dans le nritta (danse pure, très tech- indienne au style vif, dont l’élégance, résultat nique et d’une grande complexité rythmique) d’années d’apprentissage, s’affirme avec un que dans l’abhinaya (danse expressive qui subtil détachement, parsème sa carrière de met en scène les différents personnages d’un jalons créatifs d’une puissante originalité. poème). Face au plus ancien style traditionnel Dans ce duo intitulé Bhârata/Bach, elle par- indien, né il y a quelque deux mille ans dans tage le plateau avec le musicien italien l’État du Tamil Nadu, dont les codes Claudio Brizi, “claviorganiste”* et interprète complexes et stricts exigent une précision fameux de Jean-Sébastien Bach. Sur une idée imparable, sa rigueur et sa vivacité sugges- de Milena Salvini, directrice du Centre tive emportent le morceau. Pour son premier Mandapa à Paris, spécialiste des traditions passage au Théâtre de la Ville, Priyadarsini indiennes et de la musique classique, cette Govind apparaît en solo. Elle a néanmoins pièce prend position sur un terrain inconnu : à demandé à sa complice et amie, la danseuse l’intersection de la liturgie religieuse catho- de bhârata natyam Élisabeth Petit, figure lique et du déroulé d’un spectacle de bhârata fameuse de la danse indienne en France, de natyam puisant ses sources dans l’hin- l’accompagner dans l’élaboration du récital. douisme, de la musique de Bach et des Gageons que le regard affûté et généreux rythmes d’une danse indienne vieille de plus d’Élisabeth Petit saura mettre en valeur les de deux mille ans. Plus qu’une juxtaposition nuances les plus fines de la singularité d’un formelle, il s’agit d’une correspondance spiri- talent. J. L. tuelle entre les différentes étapes des deux cérémonies et surtout l’esprit qui en noue le imagine déjà des frictions chorégraphiques sens profond. En complicité avec Claudio riches de sens, un "en-commun" pour re- Brizi, les différents morceaux de Bach (can- prendre les termes d’Ouramdane, entre tradi- tates, messes et autres œuvres) déroulent le tions brésiliennes et modernité actuelle. Un tapis sur lequel Maria-Kiran (chorégraphiée peu comme une continuité évidente dans par Vidya) égrènera les moments-clefs d’un cette histoire faite de partages et d’échanges récital, évoquant l’ébranlement intime d’une qui scelle l’union fantasmée de la France et du âme en marche vers le divin, qu’on l’appelle Brésil. On retrouvera dans cette aventure Dieu ou Krishna. En quête d’une foi incarnée, quelques fidèles du créateur – Sophie Laly, Maria-Kiran et Claudio Brizi ouvrent un chemin Sylvain Giraudeau, Jean-Michel Hugo ou La résolument unique. J. L. Bourette – ainsi que des nouveaux venus Carlos Antônio dos Santos, Marcos Fauler * Claveciniste et organiste, Claudio Brizi a inventé le Silva de Freitas, Wagner Schwartz et claviorgan, instrument qui associe au clavier du cla- vecin le dispositif des registres de l’orgue. Pedro Pinto. C’est avec eux que Rachid Ouramdane entend élargir ces nouveaux hori- MARIA-KIRAN AU THÉÂTRE DE LA VILLE zons chorégraphiques. Ph. N. fév. 03 bhârata natyam - solo oct. 04 bhârata natyam avec Shantala Shivalingappa , ph. Enguerand Rachid Ouramdane

DANSE HORS LES MURS , ph. S. Laly CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C DU 5 AU 10 JAN.

Rachid Ouramdane Peeping Tom CIE PEEPING TOM

Le Salon 4 danseurs-interprètes 1 mezzo-soprano et 5 musiciens

UNE PROFONDEUR FLAMANDE CENTRE POMPIDOU • TARIF C La vieille dame est emportée vers l’hospice DU 25 AU 29 JAN. mais son époux s’obstine, maladroit, splen- dide carcasse de noble ancêtre en déroute. Autour de lui tout lâche, inexorablement. Rachid Partage furtif des lambeaux de la prospérité passée. Improbables alliances nouées parmi Ouramdane les plus jeunes. Dans Le Salon, une époque ASSOCIATION FIN NOVEMBRE s’éteint, au clair-obscur des maigres passions familiales. Un clan étouffe, tout en rendant ses Cover 4 interprètes CRÉATION derniers feux magnifiques, tels les chants bouleversants de la mezzo-soprano que D’abord interprète remarqué auprès compte l’équipe de Peeping Tom. d’Emmanuelle Huynh, Hervé Robbe, Odile Ce collectif d’artistes flamands est l’un des Duboc, Meg Stuart, Alain Buffard ou Christian derniers satellites nés dans la galaxie Rizzo – des choix qui résonnent comme au- scintillante des fameux Ballets C. de la tant de partis pris forts –, Rachid Ouramdane B./Alain Platel, qui, à l’image d’un big bang a cofondé l’Association fin novembre en 1996 permanent, n’a pas fini d’éclairer l’univers avec Julie Nioche, un « lieu de recherche et scénique européen. Plus particulièrement, de production artistique qui place le corps au chez Peeping Tom, une intense profondeur centre de leurs enjeux respectifs ». Les uni- célèbre la séparation complice du théâtre et vers de Rachid Ouramdane sont riches de de la danse. Sans naturalisme, le premier est rencontres et d’ouvertures, notamment vers sobre, presque glaçant. Sans tapage, la les nouveaux médias numériques. De ces seconde ouvre les brèches où vibre le trop perspectives singulières, un corps démultiplié plein des pensées claquemurées. mais également intime, Rachid Ouramdane Le geste crève la saturation de l’espace. On fait ses sujets d’étude : on l’a vu à l’œuvre n’est pas près d’oublier l’incroyable épanche- dans des projets comme, Au bord des mé- ment d’interminables baisers, zigzaguant au- taphores, + ou – là ou Les Morts pudiques. Sa tour de têtes à la renverse qu’on croirait en nouvelle pièce fait suite à des voyages au train d’être dévissées des corps. Sourdes, des Brésil, pays de tous les possibles. Sensible à chutes convulsives fracassent au sol un cette culture où cohabitent des rites anciens monde épuisé d’apparences. Sous les ors dans une société moderne aux influences fanés du Salon, se lit une dense poésie cho- occidentales, africaines et amérindiennes, le régraphique, étonnamment singulière. chorégraphe a invité des artistes brésiliens à penser avec lui le "métisse contemporain". On G. M. , ph. X. DR Peeping Tom ph. S. Blum

François Verret, CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C DU 14 AU 26 MARS Josef Nadj CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL D’ORLÉANS CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C Last Landscape CRÉATION DU 2 AU 11 MARS François Verret solo dansé par Josef Nadj COMPAGNIE F.V. musique en direct Vladimir Tarasov Tokyo Musil CRÉATION ENTRE MUSIQUE ET DANSE mise en scène et jeu François Verret Last Landscape, ce « dernier paysage » créé images Sylvie Blum, François Verret par Josef Nadj, est le fruit d’une écoute ex- trême, un retour à l’essentiel : « Tout comme Comment figurer l’éclatement du moi, saisir l’environnement sonore de la nature tient par- l’énigme d’une relation amoureuse, d’une fois de la symphonie, la musique en scène me foule, d’une ville, la consistance d’une semble être le plus juste rapport avec le mou- époque ? Chez François Verret, la perception vement ». Aussi le chorégraphe a-t-il imaginé du réel passe par ce questionnement inces- un espace de partage entre Vladimir Tarasov, sant. Aux réponses définitives qui espèrent compositeur et percussionniste et lui-même, l’enclore dans des définitions, il préfère le danseur mais aussi plasticien à ses heures. principe d’incertitude, l’expérimentation, le Dans le théâtre d’ombre et de métamorphose déséquilibre fécond du doute. Autrement dit, où se joue l’ensemble des pièces de Josef scruter le rapport à la réalité, à ses lois, à ses Nadj, un nouveau processus est à l’œuvre. évidences, tâtonner, toujours, encore, pour Plutôt que de s’appuyer sur la vie et les textes frôler l’ombre mouvante d’une vérité, irrémé- d’auteurs choisis, genèse plus habituelle dans diablement temporaire. C’est à cet exercice la démarche de l’artiste, le chorégraphe tra- passionnant que nous convie le chorégraphe vaille exclusivement à partir du corps, de la avec Tokyo Musil, tout à la fois journal intime perception et de la mémoire d’un lieu qu’il fré- d’un périple amoureux dans la capitale japo- quente régulièrement : une terre presque naise, exploration des visages du désir dans vierge – si ce n’est les quelques animaux qui les paysages de notre hypermodernité et la visitent – proche de son village natal, en introspection sur les prismes de la subjecti- Voïvodine, ex-Yougoslavie. Du sol désertique vité. Créé en marge de Chantier Musil*, tra- et argileux jaillit parfois une source à l’origine versée chorégraphique de L’Homme sans de nombreuses légendes. Dans ce paysage qualité de Robert Musil, ce carnet de voyage austère, qui n’aurait accueilli que des peuples reprend les interrogations que distille le des temps lointains aujourd’hui disparus, nulle roman. Au départ, il y a le projet d’un film à trace de civilisation. « Mais pour combien de réaliser à Tokyo, un homme et une femme temps ? », se demande l’artiste. dans une chambre d’hôtel, qui se livrent à l’ex- Les deux silhouettes de clowns qui appa- périence de l’« essayisme perpétuel » selon raissent au début de la pièce, ont un projet l’expression de Musil. Ils parlent, filment, se impossible : transposer le paysage en cherchent, s’aiment, se disputent… Comment tableau, la scène en surfaces et volumes, s’at- capter le mouvement de la vie diffracté par le tacher au geste du peintre, chorégraphier ces regard de nos affects ? Sur le plateau, des petits mouvements élémentaires, archaïques images tissent leurs récits sur trois écrans, se qui précèdent l’œuvre. Entre images et sons, répondent ou s’ignorent, des paroles chu- la mise en scène de Josef Nadj parfois teintée chotent des impressions, des gestes sur- d’ironie, multiplie les variations autour d’une gissent en échos : autant d’éclats d’un réel intention qui tient de la démesure. Un au- morcelé qui s’entrelacent pour recomposer toportrait de l’artiste face au paysage. Le der- le flux des sensations. François Verret, relié nier. De la nature à la composition visuelle par des fils à un pantin, son double, mène la et musicale, tel est le propos de Last danse de cette méditation sensible et Landscape, énigmatique tableau vivant où se exigeante. G. D. cristallisent différentes écritures mais aussi un mystère, celui de l’homme face à la création. * Coproduit et présenté au Théâtre de la Ville en novembre 2003. I. F. , ph. J. Nadj Josef Nadj

l’espace, bien au-delà des habituelles "musique-et-lumières". Le performer fait bouger ces cadres. Pres- tidigitateur de l’existence, bricoleur génial , ph. Enguerand d’une boîte à malices, artiste de l’escamotage et de la dissimulation, jouant de prothèses, de paillettes et de colifichets, il extrait la sub-

Christian Rizzo stance magnétique qui lui fait tutoyer le grandiose pathétique des émotions de star. À couper le souffle. G. M. Le spectacle a été présenté au CND en novembre 2004. , ph. S. Jayet

CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C Boris Charmatz DU 30 MARS AU 4 AVR. Christian Rizzo L’ASSOCIATION FRAGILE “Autant vouloir le bleu du ciel et m’en aller sur un âne.” performance Christian Rizzo traitement du son Gerome Nox installation lumières Caty Olive scénographie et objets Christian Rizzo THEATRE DE LA BASTILLE • TARIF C DANS “PERFORMER” IL Y A FORMES DU 29 MARS AU 8 AVR. Mais pourquoi les titres de pièces de Christian Rizzo sont-ils interminables ? Certes, parce Boris Charmatz que grand lecteur de littérature romanesque, il ASSOCIATION EDNA y puise ces phrases. Mais on aime aussi que ces amples formules suggèrent la mise en Régi 3 danseurs CRÉATION branle de forces au travail. Christian Rizzo est avec Raimund Hoghe, Boris Charmatz avant tout un performer. Il ne produit pas des et Julia Cima pièces comme on organise une fabrication. Il met en place des éléments. Il permet que leur UNE RENCONTRE REMARQUABLE transformation opère. Il ne serait que l’un de Régi. Chorégraphe : Boris Charmatz. Inter- ces éléments. Magicien quand même, exal- prètes : Boris Charmatz, Julia Cima et tant le tourment baroque d’un principe créatif Raimund Hoghe. Cette affiche se suffit de ce gaillardement mis en travers du cours de la peu de mots pour signifier énormément. destinée. Pourtant insaisissable. Quelle fausse évi- Il ne faut donc pas considérer Autant vouloir le dence travaille les promesses de cette ren- bleu et m’en aller sur un âne comme un solo contre remarquable ? Charmatz à l’écriture, de Christian Rizzo. C’est beaucoup plus c’est son rôle. Raimund Hoghe à l’interpréta- vaste. Il en a fait la proposition. Volontiers tion, c’est exceptionnel. Mais tous deux sur le plasticien, il en a architecturé les espaces plateau, avec Julia Cima. Pas si simple, insolites où il apparaît comme sur un plateau- donc… établi, inséré dans un labyrinthe lié aux cou- Raimund Hoghe ? Artiste phénomène, voici lisses arrière. Et les lumières de Caty Olive, plusieurs années qu’il inquiète et fascine, par comme le son live somptueux de Gerome la présence de sa morphologie contrefaite et Nox, constituent des matières chorégra- la ritualisation de ses affects. Minimale et phiques. Elles façonnent physiquement pourtant lyrique, il conduit sa cérémonie au comble d’une autofiction obstinée. Boris LA MUSIQUE DU CORPS Charmatz ? Audacieux à qui tout sourit, il Chez Emio Greco, chorégraphe italien et expérimente savamment une brillante dé- Pieter C. Scholten metteur en scène hollan- construction des ressorts de la représentation dais, chaque spectacle créé en tandem est un spectaculaire. Julia Cima ? Cette danseuse splendide défi poétique où se cristallise la fine est une fidèle de ses recherches. danse, un langage en constante évolution. Au Mais, impossible de chorégraphier Raimund fil des ans, avec la série des Double Point 1 Hoghe comme on le ferait de quiconque, fût- déclinant différents solos et duos sous forme ce le plus libre et sophistiqué des interprètes d’essais chorégraphiques et des pièces de conceptuels. Depuis sa taille de nain émerge groupe comme Conjunto di Nero et Rimasto une démarche géante en singularité. Ne se Orfano 2, les deux artistes ont patiemment présente-t-il pas au regard comme un medium creusé et poli une qualité de mouvement spectaculaire en lui-même, une surface de basée sur des correspondances de percep- projection, une énigme monumentale ? tion. Comme dans Bianco, Rosso ou Extra Peut-on seulement esquisser un cadre intel- dry, leur première trilogie interrogeant les lectuel préalable, qui résiste à l’impact de ce mystères du geste, cette réflexion est parfois qu’il sera là, effectivement, sur le plateau ? simplement liée à une couleur. Plus récem- Investir une présence immédiate, physique- ment à un thème ou une musique, avec ment, et la déplier dans sa complexité à l’infi- Orphée et Eurydice, leur premier opéra, créé ni : le mouvement de la danse s’origine dans en 2004. le vertige de cette définition. Où Charmatz Minimale, condensée ou jaillissante, la danse bougera encore. G. M. fait naître des sensations, éprouver des émo- tions. Elle fait aussi de chaque création une aventure destinée à sculpter de médusantes fictions de chair. À l’origine de leur recherche, une question : « Où et quand le mouvement prend-il sa source ? ». Depuis la rencontre en 2004 avec le compositeur Hanspeter Kyburz, leur explo- ration du mouvement se poursuit avec un troi- sième complice. Né en 1960 au Nigéria, de parents suisses, celui-ci enseigne dans de nombreux studios d’électro-acoustique en , ph. Henkwildschut Allemagne, Autriche et dans son pays d’ori- gine. En parallèle, il a créé une dizaine

Emio Greco d’œuvres depuis le début des années 90. Ses recherches portent sur la perception senso- rielle et croisent des sources d’inspiration variées, sciences, littérature, cinéma. Double Point : +, nouveau dialogue entre danse et musique, met en scène les musi- ciens de l’Ensemble interContemporain et Emio Greco, dansant avec des capteurs fixés sur le corps. Des motifs sonores générés par les impulsions du mouvement sont intégrés à la composition. Immergée dans le monde des gestes, ses intuitions et ses visions, cette par- tition musicale et chorégraphique fait appa- raître un nouveau réseau de signification. L’œuvre, paysage de mouvements dansés, MUSIQUE/DANSE crée en retour son propre environnement CENTRE POMPIDOU • TARIF C musical. Cet original travail d’échange en 9, 10, 11 NOV. HORS ABONNEMENT boucle précède une autre composition de Hanspeter Kyburz, Danse aveugle, pièce Emio Greco créée en 1997. Quintette de musique de EMIO GRECO/PC chambre dont certains effets, rapidité et trans- formation, évoquent le mouvement d’une Hanspeter caméra. I. F. 1 Double point 1 et 2, programme accueilli au Théâtre Kyburz des Abbesses, en 2002. 2 Conjunto di Nero et Rimasto Orfano créations pré- Danse aveugle (1997) sentées au Théâtre de la Ville en 2003 et 2004. de Hanspeter Kyburz avec l’Ensemble intercontemporain (flûte, clarinette/clarinette basse, piano, violon et violoncelle)

Double Points : + , ph. P. Gontier CRÉATION MONDIALE DE LA NOUVELLE VERSION chorégraphie Emio Greco et Peter Scholten solo Emio Greco Hanspeter Kyburz musique Hanspeter Kyburz Ensemble interContemporain 6 musiciens direction Jean Deroyer et informatique musicale IRCAM avec l’IRCAM, l’Ensemble interContemporain, le Festival d’Automne à Paris, Les Spectacles Vivants-Centre Pompidou MUSIQUE

AU THEATRE DE LA VILLE TRULS MØRK violoncelle GIL SHAHAM violon KATHRYN STOTT piano ITAMAR GOLAN piano SCHUMANN - BEETHOVEN - CHOPIN - JANÁCEK DVORÁK - MOZART - PROKOFIEV KRONOS QUARTET DEZSÖ RÁNKI piano FELIPE PÉREZ SANTIAGO - GLENN BRANCA - HAYDN - SCHUMANN - RAVEL - BARTÓK JIM THIRWELL…

CAFÉ ZIMMERMANN MIDORI violon BACH ROBERT MCDONALD piano SCHUBERT - PROKOFIEV- BEETHOVEN

FABIO BIONDI violon KENNETH WEISS clavecin BACH - BIBER - LOCATELLI AUX ABBESSES

QUATUOR TAKÁCS JANA BOUSKOVÁ harpe MARIE-PIERRE LANGLAMET MUZSIKÁS harpe MÁRTA SEBESTYÉN MOZART - C. P. E. BACH - DAMASE - RAVEL - Bartók et ses racines. Quand la musique popu- DE FALLA - BARTÓK laire nourrit la musique savante

3 CONCERTS EN 1 QUATUOR TETZLAFF HAYDN - SIBELIUS - SCHÖNBERG ALEXANDRA GROT flûte REINECKE - STRAVINSKI - DOPPLER BARTHOLD KUIJKEN flûte baroque PETER LAUL piano HAYDN - SCHUBERT EWALD DEMEYERE clavecin QUATUOR ÉBÈNE CARL PHILIPP EMANUEL BACH MOZART - WEBERN - HAYDN CÉLINE FRISCH clavecin Aux sources du jeune Bach violoncelle MIKLÓS PERÉNYI BACH - KERLL - BUXTEHUDE - FROBERGER DÉNES VÁRJON piano BEETHOVEN - PROKOFIEV - SAINT-SAËNS - DEBUSSY/ KOCSIS FILOMENA MORETTI guitare SANZ - BACH - ALBENIZ - DE FALLA - TARREGA FRANK PETER ZIMMERMANN violon CHRISTIAN ZACHARIAS piano MOZART

BANG ON A CAN ALL-STARS artiste invitée Iva Bittova violon PHILIP GLASS - JULIA WOLFE - FRED FRITH - IVA BITTOVA

TARIF D MUSIQUE ph. X. DR AU THEATRE DE LA VILLE Dezsö Ránki, ph. X. DR , ph. R. Davies Gil Shaham, Café Zimmermann

SAM. 1er OCT. 17H Ránki. C’était au Théâtre de la Ville où les deux pianistes sont souvent revenus. Pour son GIL SHAHAM violon treizième concert, Dezsö Ránki propose un programme sous le double signe de la danse piano ITAMAR GOLAN et de l’introspection. L’andante con espres- DVORÁK : Romance en fa mineur op.11, sione de la Sonate en ut majeur H XVI/48 de version pour violon et piano Haydn a des allures de menuet, et le rondo de MOZART : Sonate pour piano et violon en mouvement perpétuel. Le nom même de si bémol majeur, K 454 danse est dans le titre des Davidsbündler- PROKOFIEV : Cinq Mélodies op. 35 tänze de Schumann inspirées par son amour Sonate pour violon et piano n°1 en fa pour Clara. « Toujours à tout moment, plaisir et mineur, op. 80 peine sont liés, restez pieux dans le plaisir et soyez prêts à affronter la peine », avait-il écrit UN ANGE en tête de ce fabuleux kaléidoscope d’états On le croirait descendu d’un tableau de d’âme. « Le plaisir délicieux et toujours renou- Chagall : tout en fraîcheur, en tendresse. velé d’une occupation inutile » d’Henri de Il est joyeux, il est magique. Sa sonorité a les Régnier semble curieusement répondre à cet couleurs féeriques du peintre français d’ori- exergue. Face aux réactions négatives provo- gine russe. Son Stradivarius de 1699 aux quées par ses Valses nobles et sentimentales, nuances infinies peut, dit-il, en faire naître Ravel avait malicieusement serti de cette d’autres encore. Gil Shaham ne perdra jamais phrase l’édition de 1911. Schubert fascinait le son âme d’enfant. Il a la grâce. Sur scène et compositeur français, la valse viennoise aussi. dans la vie. C’est son sixième passage au Les danses et airs populaires d’Europe cen- Théâtre de la Ville où il est venu en 1992 pour trale ont obsédé Bartók. Merveilleusement dif- la première fois. En janvier 2003, il donnait aux fracté, ce matériau irrigue la suite En plein air. Abbesses un inoubliable concert avec Goran « Des œuvres qui ne s’apprivoisent pas en Söllscher à la guitare. À ses débuts, à l’âge de une fois », estime Dezsö Ránki. Exigeant, 17 ans (il en a maintenant 34), on disait déjà intègre il ne les donne au public que quand que la relève des Heifetz et autres « elles remontent d’elles-mêmes à la sur- Francescatti était assurée. Milstein, Stern sont face ». Celles de son programme n’ont pu le également cités dans les récentes critiques faire que par la plus subtile des alchimies. de son dernier disque consacré à Prokofiev. Gil Shaham y interprète entre autres les deux œuvres qu’il joue en deuxième partie de son nouveau programme. En 1925, Prokofiev SAM. 3 DÉC. 17H transcrit pour violon et piano les Cinq Mélodies sans paroles, dédiées à la cantatrice CAFÉ ZIMMERMANN Nina Kochitz. La « diction » de Gil Shaham – BACH : Concerto brandebourgeois n°4, c’est un violoniste conteur – y est parfaite. La en sol majeur, BWV 1049 Sonate n¡1 opus 80 fut achevée en 1946. Concerto pour clavecin, en ré mineur, Selon le compositeur lui-même, « la bise BWV 1052 souffle entre les tombes d’un cimetière dans Concerto pour hautbois, en ut mineur, l’andante assai tandis que l’allegro brusco » BWV 1053 brosse une « bataille sur la glace et l’allegris- Concerto pour deux violons, en ré mineur, simo compte les morts ». Seul le troisième BWV 1043 mouvement andante chante dans la sérénité. Canons Une qualité que possède Gil Saham au plus haut degré. La Romance de Dvorák et la di- TOUS AU CAFÉ ZIMMERMANN ! vine Sonate K 454 de Mozart l’exaltent. C’est la fête ! Pablo Valletti, Céline Frisch, fon- dateurs de l’ensemble créé en 1998, nous y SAM. 19 NOV. 17H invitent avec leur gentillesse et leur charme habituels : « Nous avons enregistré 3 des 6 DEZSÖ RÁNKI piano disques de l’intégrale de la musique orches- HAYDN : Sonate en ut majeur, H XVI/48 trale de Bach. Pour les célébrer, nous avons SCHUMANN : Davidsbündlertänze (Danses choisi nos œuvres préférées, “Les best of” de des compagnons de David) op. 6 nos dernières années. Nous voulions en faire RAVEL : Valses nobles et sentimentales une présentation colorée et varier les BARTÓK : Mikrokosmos – extraits solistes. C’est évidemment ce que nous ima- En plein air, Sz 81 ginons des fameux concerts du Café Zimmermann. » L’historique : celui de Leipzig UN PRODIGE DEVENU ALCHIMISTE qui accueillait les musiciens du Collegium 1972 : Paris découvre médusé deux météores Musicum que Bach dirigea entre 1729 et hongrois de 20 ans, Zoltán Kocsis et Dezsö 1739, ainsi que les philosophes et les intellec- Fabio Biondi, ph. Th. Martinot Alexandra Grot, ph. P. Gérard tuels de toute l’Europe, à l’époque des Lumières, dont l’époustouflante formation, pour la 3e fois au Théâtre de la Ville, ressuscite l’esprit. Champagne d’abord avec le Concerto bran- debourgeois n¡4! Puis l’étonnant BWV 1052, la référence en matière de concerto pour Schumann. « Une pièce de longue haleine, une des plus intenses qui puissent exister », pour Céline qui en est la soliste. Pour Pablo : « Une œuvre en avance sur son temps avec de grands moments presque minimalistes ». Le BWV 1053 fait chanter la voix du bien nommé hautbois d’amour. Poignante dans le douloureux siciliano. Le choix de la dernière œuvre d’un concert est toujours délicat. Ce sera le BWV 1043 : ph. S. J. Sherman « Pour accéder au dialogue inspiré des deux violons, il faut avoir eu le temps d’être bien dans le langage ». Que Pablo ne s’inquiète pas. Dans l’ambiance, Céline et lui nous y

plongent dès le premier accord. 2004, Quatuor Takács

SAM. 10 DÉC. 17H

violon FABIO BIONDI B. Kása KENNETH WEISS clavecin

BACH: Sonate pour violon et continuo, en Muzsikás, ph. sol majeur, BWV 1021 Sonate n° 4 pour violon et clavecin SAM. 21 JAN. 17H obligé, en ut mineur, BWV 1017 BIBER: Passacaille en sol mineur, QUATUOR TAKÁCS pour violon seul BACH: Sonate n°6 pour violon et clavecin MUZSIKÁS obligé, en sol majeur, BWV 1019 MÁRTA SEBESTYÉN Concerto italien pour clavecin, BWV 971 LOCATELLI: Sonate pour violon Bartók et ses racines et continuo, en ré majeur, op. 6 n° 12 Quand la musique populaire nourrit la musique savante ÉLOGE DE L’ÉCHANGE Quatuor à cordes n°4 Le radieux violoniste sicilien fait chaque 4 duos pour violons année le bonheur du Théâtre de la Ville. Il y Sonatina vient pour la seizième fois, la cinquième en Danses roumaines duo. « Une alternance archinécessaire. L’Europa Galante occupe 80% de ma vie. avec les mélodies d’origine C’est gigantesque. Je garde les 20% pour respirer. Mon ensemble a presque 17 ans et JUBILATOIRE sa santé passe par le désir. Après chaque Il était une fois Bartók, l’un des plus grands e récital ou chaque production avec un autre compositeurs du XX siècle, le plus grand de la orchestre, je reviens vers mes musiciens avec Hongrie. Dès 1905, comme Kodály, il par- enthousiasme. » court les campagnes de son pays pour y tra- quer chants, airs, rythmes et danses. Il en a Le claveciniste Kenneth Weiss, professeur au CNSM de Paris, chef d’orchestre, fut de 1990 collecté et transcrit plus de 10 000 qu’il gra- à 1993 l’assistant musical de William Christie. vait sur un phonographe nouveau-né de 50 Il aime les voix. Cela s’entend. C’est un clave- kilos. cin qui chante. En 1997, on put voir, ici même, Ce matériau innerve l’œuvre du maître, au milieu des danseurs de Trisha Brown, l’ar- Muzsikás le connaît bien . Ces “musiciens du tiste américain jouer avec les musiciens du village” – du nom du célèbre groupe hongrois – ont repris le flambeau et sillonnent leur ter- Salon baroque l’Offrande musicale de Bach qu’avait chorégraphiée sa compatriote sous le roir dont ils enregistrent eux aussi sur place les nouveaux trésors. De formation classique, titre MO*. Même expérience pour Fabio Biondi et Europa Galante dans Chair obscur de ces fous de musique traditionnelle mettaient Régine Chopinot en 2002. De nature très dif- en résonance, dans leur CD Bartók album férente, les deux interprètes ont en commun sorti en mars 1999, trois duos pour violon de ouverture d’esprit et liberté. « Kenny ne se Bartók et les airs originels qui les nervurent. laisse pas apprivoiser, il propose, apporte. Un mois plus tard, ils en distillaient les saveurs Immédiatement nous avons eu envie de jouer fruitées, épicées, sur la scène du Théâtre de ensemble et Bach justement. » Ce récital, la Ville où ils reviennent pour la quatrième fois. « conséquence d’un feeling épidermique très Avec le Quatuor Takács, hongrois lui aussi, fort », montre un Bach tantôt allemand tantôt dont c’est le quinzième retour dans cette salle où il avait d’ailleurs donné une intégrale « à l’italienne » comme dans la Sonate BWV Bartók en 1991, ils vont encore plus loin. Le 1019 ou plus encore dans le Concerto italien. Et pour finir, histoire de « prouver que nous ne jeu de miroir amorcé au disque devient ici profitons pas de notre personnalité pour don- fabuleux et concerne trois autres œuvres de ner la même couleur à tout le répertoire », une Bartók . De quoi s’enivrer de mélodies vocales ou instrumentales originelles de toute beauté sonate de Locatelli. Retour à l’italianité origi- nelle. En toute haute voltige. que le génie hongrois transmute plus ou moins. Parfois méconnaissables comme dans * Musicalisches Opfer. son Quatuor n¡4, toujours elles fulgurent. À la source de la musique, effaçant les frontières, ce concert emblématique du Théâtre de la Ville est incontournable. Quatuor Ebène, ph J. Mignot, Peter Laul © JVM Reportage pour flûte. Une bien jolie idée. Le quatuor de Mozart pour flûte, qu’elle jouera avec les Ébène, en est une autre. Dans son souffle tout deviendra lumière.

AU CŒUR DE LA TRADITION RUSSE Grand, massif, le jeune pianiste russe Peter Laul a dans sa présence la fluidité qui irise son nom d’origine estonienne. De ce corps-là, la musique jaillit puissante et mœlleuse. Le sympathique géant aux grands yeux verts est né à Saint-Petersbourg en 1977 dans une famille de musiciens. À 5 ans, il commence le SAM. 4 MARS 15H piano. L’étude devient passion grâce à 3 CONCERTS EN 1 : Alexander Sandler, son seul maître jusqu’à ALEXANDRA GROT flûte l’âge de 25 ans. Pour son premier concert au Théâtre de la Ville, Peter Laul a hésité entre PETER LAUL piano ses deux compositeurs préférés. Schubert ? QUATUOR ÉBÈNE En 1997, il avait triomphé à Brême avec le prix spécial de la meilleure interprétation de Alexandra Grot et Peter Laul Schubert. Scriabine ? Il a gagné le 1er prix du REINECKE : Sonate Undine pour flûte et second Concours international Scriabine de piano, en mi mineur, op. 167 Moscou en 2000. « L’incomparable », STRAVINSKI : Le Chant du rossignol – extrait Schubert, l’emporte. « Je joue toutes ses so- du 1er acte de l’opéra nates, celles de la fin de sa vie sont divines. » Jeu des princesses avec les pommes La grande Sonate D 959, en la majeur, écrite (Scherzo) – extrait de L’Oiseau de feu deux mois avant sa mort, possède la « pure- DOPPLER : Fantaisie pastorale hongroise, té » que Peter Laul aime tant chez ce compo- op. 26 siteur. Du désespoir absolu naît une joie sur- humaine. Un testament. Avant d’en livrer sa Peter Laul propre version, Peter Laul donnera la Sonate HAYDN : Sonate n° 32, en sol mineur, H XVI/44 de Haydn, un autre Autrichien qu’il H XVI/44 préfère à Mozart, « Parce que, comme SCHUBERT : Sonate en la majeur, D 959 Richter, je trouve ses chemins plus inatten- dus. » Avec esprit et intelligence, Peter Laul Quatuor Ébène en a déjà enregistré les surprises dans l’un de MOZART : Quatuor n°1 pour flûte et ses deux premiers compacts. Chaque note y cordes, en ré majeur, K 285 culmine, brille. C’est justement ce qu’il admire (avec Alexandra Grot) dans les interprétations du chef d’orchestre WEBERN : Six Bagatelles pour quatuor à allemand Wilhelm Furtwängler. Pour lui, plus cordes, op. 9 important encore que Richter, son aîné russe HAYDN : Quatuor en sol majeur, op. 76, de génie. n°1, Erdödy EXCEPTIONNEL SURTOUT À NE PAS MANQUER ! Dense comme le bois dont il porte le nom, le La nouvelle édition de la réjouissante formule Quatuor Ébène crée l’événement à Munich en née en 1994, présente deux Russes sortis de 2004 : premier prix du Concours international la pépinière Juventus, où ils ont eu tout de de l’ARD, le prix du public, deux prix de suite envie de jouer ensemble, et un quatuor meilleure interprétation et le prix de la français. Fondation Karl Klinger ! 22-26 ans ! Quatre tout jeunes gens débor- LA FLÛTE ENCHANTERESSE dants de vie. Une intensité présente dans la « C’était du soleil qui allait de la scène vers symbolique de leur nom, que l’altiste Mathieu moi. Alors, je me suis levée pour mieux rece- Herzog aime développer : « Noble, impu- voir cette lumière très forte qui m’attirait. » Et trescible, l’ébène est le bois des sculptures la petite Alexandra de 8 ans qui découvrait africaines qui nous rappellent les musiciens James Galway, debout en plein parterre d’une de jazz. Utilisé dans beaucoup d’instruments salle de concert à Moscou, dit à sa maman : classiques dont les nôtres, il fait ainsi le lien « Je veux être flûtiste. Faire comme lui ». Plus entre toutes les musiques ». Or Pierre, comme maman. Une maman concertiste avec Gabriel, Mathieu et Raphaël n’ont pas de fron- laquelle elle a cependant continué l’étude du tières. C’est en improvisant au conservatoire piano « car l’approche de la musique avec un régional de Boulogne qu’ils ont eu envie de instrument polyphonique est importante ». faire de la musique de chambre. Le jazz fait Deux ans plus tard, la jeune Russe donnait partie de leur travail de quatuor. Après Eros et son premier récital ! Puis ce furent la célèbre Thanatos réalisé avec le tromboniste Daniel École Gnessine d’enfants surdoués de Casimir, ils ont en projet un disque de stan- Moscou, les compétitions internationales. En dards. 1997, elle remporte le Concours des « Pas typiquement français », dit-on d’eux. Et Jeunesses musicales à Bucarest. Pierre-Yves ça leur plaît. « Amoureux de l’école hongroise Artaud fait partie du jury. Sûr de « son talent des cordes et de la musique en général », ils exceptionnel », il la convainc de se présenter ont su se faire adopter par Gábor Takács à au redoutable concours d’entrée au CNSM de Genève et par le « redouté » György Kurtág à Paris où, admise à l’unanimité dans sa classe, Budapest. elle obtient ses premiers prix. « Sa musicalité Leur programme est viennois. « Nous avons extraordinaire et sa maîtrise parfaite de l’ins- un amour sans borne pour Haydn. Le Quatuor trument » transparaissent en filigrane de son opus 76 n°1 est le deuxième que nous avons programme. La sonate de l’Allemand appris en particulier pour la beauté de son Reinecke raconte avec lyrisme l’histoire mouvement lent, une merveille. » Quant aux d’Ondine, cruelle comme tous les contes. La Bagatelles de Webern, « c’est l’aventure Fantaisie pastorale hongroise tout en panache incroyable d’une espèce d’énorme sympho- de Doppler, l’ami de Liszt, est un point final nie de 3mm 30 de musique atonale écrite il y idéal. Entre ces deux œuvres du XIXe siècle, a 80 ans ». Et pour commencer, Mozart, un deux courtes pièces de Stravinski transcrites autre miracle. M. Perényi, ph. Birgit, F. P. Zimmermann, ph.Th. Martinot Ch. Zacharias, ph. M. Vanappelghem Bang on a can all-stars, ph. N. Ruechel

SAM. 11 MARS 17H proche de mon cœur et de mon sang. Mozart, cela marche ou non, on se jette dans la MIKLÓS PERÉNYI violoncelle musique et cela sonne naturel ou non.» Ce naturel dont parle le violoniste, le pianiste le piano DÉNES VÁRJON possède plus encore aujourd’hui qu’à ses BEETHOVEN: Sonate n°3, en la majeur,op. 69 débuts : « Je me pose moins de questions. PROKOFIEV : Sonate en ut majeur, op. 119 Maintenant c’est là, je fais. J’ai encore plus de SAINT-SAËNS : plaisir à parler ce langage mozartien avec les Sonate n°2, en fa majeur, op. 123 autres. L’essence de Mozart, c’est le théâtre, DEBUSSY – KOCSIS : Petite Suite le dialogue, un jeu de questions et de réponses ». Au centre justement de leur « ON NE VOIT BIEN QU’AVEC LE CŒUR. » travail : « Nous avons plein d’idées. Christian a Comme le Petit Prince de Saint-Exupéry, les siennes, moi les miennes. Nous les Miklós Perényi semble venir d’une autre pla- essayons. C’est passionnant mais pas nète. En coulisse, sur scène, il impressionne toujours facile ! » De ces échanges naissent par son étrange présence aérienne. Même si des interprétations fulgurantes. Elles vont cela a pris un certain temps, il est désormais jalonner le chemin même pris par Mozart. considéré comme l’un des plus grands vio- Deux grandes sonates de la maturité, K 481 et loncellistes, plus encore, l’un des plus grands K 454, encadrent une sonate plus précoce musiciens de notre époque. Il n’élève pas de K 301 Ç et la plus énigmatique de toutes, loups, ne jette pas son instrument dans un lac K 377, avec son petit tango dans le deuxième ou ne joue pas devant le mur de Berlin. Il mouvement » qui réjouit tant Christian rayonne simplement à Budapest, dans son Zacharias. « Aujourd’hui il faut jouer demi nu cercle d’amis qui le vénèrent, Zoltán Kocsis ou avoir un visage de baby doll, regrette Frank en tête. Inutile de passer au crible sa revue de Peter Zimmermann, c’est la maladie de notre presse : pas la moindre confidence person- temps : ce qu’il y autour de la musique est nelle. Musique, uniquement la musique. En plus important que la musique elle même. » 1986, Miklós Perényi, ce fils spirituel de Pablo Tous les deux nous prouvent le contraire. Casals, bouleversait pour la première fois le Merci ! Théâtre de la Ville. Aucune des œuvres de 1 e son nouveau programme, le neuvième, ne 12 concert au Théâtre de la Ville. 2 4e concert au Théâtre de la Ville. doublonne avec les précédents. Fidèle à lui- même, détestant la routine, il fait de ce nou- LUN. 27 MARS 20H30 veau rendez-vous un moment unique. Et quel rendez-vous ! En compagnie de Dénes BANG ON A CAN Várjon, un autre héritier de la tradition hongroise, il convie d’abord Beethoven, sa ALL-STARS Sonate n¡3, jubilatoire. Puis Prokofiev et sa PHILIP GLASS : Music in 5ths sonate écrite en 1949, torrent fantasque JULIA WOLFE : New York qu’apaisent de soudains élans d’amour. Et, FRED FRITH : New York c’est presque un événement tant elle rarement IVA BITTOVA : Elida jouée, la pourtant somptueuse Sonate n¡2 de artiste invitée Iva Bittova violon Saint-Saëns. Pour finir, l’adorable Petite Suite I. Bittova, ph. T. Beran pour piano à quatre mains de Debussy trans- Pour le quatrième passage des Bang on a can crite par son ami Zoltán Kocsis. De all-stars au Théâtre de la Ville, une soirée pas l’Allemagne à la France en passant par la comme les autres ! On peut être sûr, pour Russie, « Monsieur Perényi, s’il vous plaît, commencer, que l’interprétation chauffée à dessine-nous la musique ». blanc des unissons de la Music in 5ths de Philip Glass va décoiffer pas mal d’auditeurs. Composée en 1969, cette œuvre unique en SAM. 18 MARS 17H son genre du minimalisme américain n’a été FRANK PETER que rarement jouée en concert, tant elle constitue un défi que seuls des instrumen- ZIMMERMANN violon tistes du niveau des Bang and a can all-stars CHRISTIAN ZACHARIAS sont capables de relever. Sur une battue ra- piano dicalement régulière, le vertige excitant d’une MOZART: perversion structurelle aussi insidieuse Sonate en mi bémol majeur, K 481 qu’implacable…. Sonate en en sol majeur, KV 301 Après le 11 septembre, nombreux sont les Sonate en fa majeur, K 377 jeunes compositeurs new-yorkais qui tiennent Sonate en si bémol majeur, K 454 à manifester l’attachement qu’ils portent à leur ville. New York, tout simplement, est le titre de MOZART AU SOMMET deux œuvres qui seront données en création Même classe. Même pureté. Christian française. La première, écrite par Julia Wolfe, Zacharias1 et Franck Peter Zimmermann 2 se grande prêtresse de Bang on a can dont elle connaissent depuis une vingtaine d’années . est cofondatrice. La seconde, due à l’inspira- En trio, ils ont beaucoup joué avec Heinrich tion de Fred Frith, guitariste et bricoleur d’ins- Schiff ; en duo, ils ont donné une intégrale truments, né dans le Sussex, qui a fait partie Beethoven en 1999 et le pianiste–chef du légendaire groupe britannique Henry Cow d’orchestre dirige parfois son ami violoniste. avant de se fixer à New York et de se produire Mozart est au centre de leur vie. « Depuis auprès de Bill Laswell et des Residents aussi l’âge de 3 ans, c’est le compositeur le plus bien que de John Zorn et Tom Cora. T. Mørk, ph. X. DR Kronos Quartet, ph. J. Blakesberg Midori/R. McDonald, ph. X. DR

Événement, enfin, qui occupera toute la Le retour annuel du Kronos Quartet est un seconde partie du concert : le fruit de la colla- rituel dont on ne saurait se lasser tant, à boration de Bang on a can avec la chanteuse chaque fois, les quatre virtuoses californiens et violoniste tchèque Iva Bittova dont la per- de l’archet s’ingénient à renouveler l’éventail sonnalité fortement originale ne peut être des œuvres qu’ils donnent à entendre. comparée – en plus jazzy et folk, avec des Le nom de Glenn Branca fera ressurgir accents tziganes – qu’à Meredith Monk, Nina quelques images hautes en couleur dans la Hagen ou Björk. Toute en nuances et quasi mémoire de ceux qui ont eu la chance d’as- intimiste, la suite Elida tranche avec le réper- sister à l’un des deux concerts que le lucifé- toire habituel des fougueux Bang on a can all- rien new-yorkais avait donnés en 1988 et 1994 stars et montre que ces derniers ont plus au Théâtre de la Ville avec son « mur de d’une corde à leur arc. sons » de guitares électriques. Des concerts Daniel Caux pour lesquels les termes de chamanisme et de transe restent les plus appropriés… C’est à SAM. 29 AVR. 17H partir du morceau Lightfield (In Consonance) – extrait de son disque culte pour guitares élec- TRULS MØRK violoncelle triques, The Ascension – que, cette fois, il a conçu un arrangement pour le Kronos piano KATHRYN STOTT Quartet. On peut en attendre beaucoup si l’on SCHUMANN : Trois Fantasiestücke, op. 73 se souvient du brio avec lequel le prince de la BEETHOVEN : Sonate n° 5, en ré majeur, « No Wave » avait écrit la musique pour op. 102 n°2 ensemble de cordes qui accompagnait cer- CHOPIN : Sonate en sol mineur, op. 65 tains moments cruciaux du film de Peter JANÁCEK : Conte (Pohadka) Greenaway, Le Ventre de l’architecte. Figure essentielle de la « musique indus- L’ÉTOILE DES NEIGES trielle » à Londres, puis à New York, qui a créé Il chante, il chante, le violoncelle de Truls son propre label, Self Immolation, et dont l’art Mørk. Un chant ample, libre. Tellement naturel. se veut, selon ses propres termes, un « cri Comme celui de Fischer-Dieskau, modèle du de dégoût » contre la médiocrité ambiante, grand artiste norvégien. C’est que, « du plus le multi-instrumentiste australien James loin qu’il s’en souvienne, il entendait de la Thirlwell, alias Foetus, n’a rien à envier à musique à la maison ». Ses parents étaient Glenn Branca en matière de subversion sulfu- tous deux musiciens professionnels. À 7 ans, reuse. Comment imaginer que le cauchemar Truls Mørk apprend d’abord le piano avec sa du 11 Septembre puisse être absent de sa maman dont il ne comble pas les attentes, pièce New York ? puis, brièvement, le violon avec un professeur C’est encore de la mort – mais envisagée fantôme. Son papa décide alors de lui ensei- cette fois de la façon ludique et bigarrée que gner le violoncelle. Rencontre définitive entre veut la tradition populaire latino-américaine – l’instrument et l’enfant qui décide d’emblée de qu’il sera question avec le CampoSanto (Holy commencer par la Sonate en mi mineur de Ground) du jeune compositeur mexicain Brahms et la Première Suite de Bach et… y Felipe Pérez Santiago. parvient. Force du désir personnel qui accom- D. C. pagne depuis toujours l’hyperdoué presque autodidacte. À 17 ans, il part en Suède à SAM. 20 MAI 17H l’École de musique de la radio où l’excellent Frans Helmerson l’épanouit dans la liberté. MIDORI violon Les premiers prix qui comptent, dont celui du ROBERT MCDONALD piano Concours Tchaïkovski de Moscou, émaillent ses débuts internationaux. Au sommet de son SCHUBERT : Sonatine en ré majeur, D 384 art, le sympathique quadragénaire donne son PROKOFIEV: Sonate n°1, en fa mineur,op. 80 premier concert au Théâtre de la Ville en BEETHOVEN : compagnie de la pianiste anglaise Kathryn Sonate n°7, en ut mineur, op. 30 n°2 Stott, une exploratrice de musiques. Son Domenico Montagnana (Venise, 1723) un vio- FLAMME loncelle rare que lui a acheté la SR-Bank de Fine, flexible, Midori flambe en scène. Évi- Norvège, va en voir de toutes ses sublimes dente comme l’enfant prodige de 11 ans dont couleurs : tendresse des Fantasiestücke de Zubin Mehta dirigea le premier concert. Schumann, profondeur de la 5e Sonate de Généreuse jeune femme de 34 ans, rayon- Beethoven, passion de la Sonate de Chopin, nante de vie. féerie de Pohadka, ballade épique rarement Celle qui apprit le violon avec sa maman, jouée de Janácek. Le portrait de l’artiste. Setsu Goto, ne s’est pas contentée de cultiver son don exceptionnel. Convaincue qu’accé- der à la musique est une chance, elle la donne aux enfants défavorisés ou malades. LUN. 15 MAI 20H30 Elle passe un tiers de son temps dans le développement des associations qu’elle a KRONOS QUARTET créées dans ce but : Midori and Friends à New FELIPE PÉREZ SANTIAGO : York où elle vit, et Music Sharing au Japon. CampoSanto (Holy Ground) “Partager la musique”, elle le fait bien sûr en GLENN BRANCA: Light Field (In Consonance) jouant mais aussi en enseignant. Depuis JIM THIRLWELL : New York 2004, on lui a confié la prestigieuse Heifetz (programme en cours) Music Chair de l’University of Southern California. Elle lit « avec voracité », va au Ravel et les Images hongroises de Bartók font théâtre, prépare une thèse en psychologie. Et partie de toutes celles que Stanley trouve encore le temps de tenir une sorte de Chaloupka, ancien soliste du Los Angeles chronique mensuelle sur son remarquable site Philharmonic, réalisait pour pouvoir jouer avec internet. sa femme, harpiste elle aussi. En solo, Marie- Fait étrange, sa trajectoire internationale Pierre joue une éblouissante Fantaisie pour passe rarement par la France. Son quatrième clavecin de Carl Philipp Emanuel Bach qu’elle récital au Théâtre de la Ville, le premier eut lieu découvrit en 1995 dans la transcription et en janvier 1995, devient encore plus précieux. sous les doigts de Chantal Mathieu : « Un Midori a la grâce de la Sonatine de Schubert, coup de foudre ». Seule à son tour, Jana l’âpre énergie de la Sonate n¡1 de Prokofiev Bousková « danse » la Vie brève de Manuel où elle voit « la prédiction du compositeur sur de Falla. Feu d’artifice. l’avenir de la musique soumis à de dures res- trictions ». En novembre 1801, quelques mois SAM. 5 NOV. 17H avant de composer la Sonate en ut mineur de l’opus 30, Beethoven écrivait : « Pas de repos ! QUATUOR TETZLAFF Je veux saisir le destin à la gueule. Il ne réus- HAYDN : sira sûrement pas à me faire courber la tête Quatuor n° 33, en sol mineur, op. 20/3 tout à fait ». Midori connaît bien cette force de SIBELIUS : Quatuor n° 4, « Voces Intimæ », caractère. en ré mineur, op. 56 SCHÖNBERG : Quatuor n°1, en ré mineur, op. 7 MUSIQUE QUATUOR D’INGRES AUX ABBESSES Que fait le violoniste Christian Tetzlaff * quand il a du temps libre ? De la musique ! Avec sa sœur Tanja, Elisabeth Kuferrath, Allemande elle aussi et Hanna Weinmeister, Autrichienne. Quatre solistes qui se rencontrent en 1994 au ph. P. Skurn ph. P. Gérard ph. P. Festival de musique de chambre de Saint- Gall et décident de jouer ensemble. Leur emploi du temps ne leur permet pas de le

J. Bousková, faire souvent. « 4 ou 5 concerts par an. C’est

M.-P. Langlamet, M.-P. un hobby professionnel. » Et, mot cher au phénoménal violoniste, un plaisir : « Plaisir de dialoguer en concert, plaisir des œuvres. C’est dans le répertoire du quatuor que l’ont SAM. 8 OCT. 17H trouve les plus extraordinaires, les plus concentrées. » Pour qui a vu, senti, l’intensité JANA BOUSKOVÁ harpe physique de l’interprète, son engagement et MARIE-PIERRE LANGLAMET en même temps son immense sobriété, l’ad- harpe jectif n’est pas étrange. Et en parfaite adé- quation avec les œuvres colossales de son MOZART : Sonate pour deux pianos, en ré nouveau programme. « Nous sommes tous majeur, K 448, version pour 2 harpes unis dans l’amour du Quatuor n°1 opus 7 de C. P.E. BACH : Fantaisie pour clavecin, Schönberg, le premier que nous avons joué en mi bémol majeur, Wq 58 (transcription ensemble. C’est un de nos préférés avec celui pour harpe de C. Mathieu) de Sibelius. » Fascinants en effet : « Écrits à la DAMASE : Sonatine pour deux harpes même époque, dans la même tonalité de ré RAVEL : Le Tombeau de Couperin mineur, ils viennent de deux mondes complè- (transcription pour deux harpes tement différents. On y ressent l’atmosphère de S. Chaloupka) dramatique qui précède la première guerre DE FALLA : Danse espagnole n°1 de La mondiale. Mais si la charge émotionnelle est Vida breve la même, la structure ne l’est absolument BARTÓK : Images hongroises (transcription pas. » Celle, classique du Quatuor en sol pour deux harpes de S. Chaloupka) mineur de Haydn est encore plus éloignée. Et pourtant, « on peut y entendre la même co- LE CHANT DES HARPES lère ». Et une autre de ces voix intimes dont le « Ce fut comme Noël » pour Marie-Pierre quatuor de Sibelius porte le nom. Boulever- Langlamet, le jour où sa mère lui propose santes Voces Intimæ. d’apprendre la harpe au conservatoire de Nice. Elle avait 8 ans et dans sa famille per- * Pour la quatrième fois au Théâtre de la Ville. sonne n’était musicien. « Maman avait bien vu que je l’avais adorée dans Les Aristochats. » SAM. 26 NOV. 17H La magie ancestrale de « l’instrument poly- BARTHOLD KUIJKEN phonique par excellence » avait agi. À la flûte baroque même époque, à Prague, en Tchécoslo- vaquie, une autre maman, Libuse Vashalova, EWALD DEMEYERE clavecin harpiste renommée, en enseignait les sorti- CARL PHILIPP EMANUEL BACH : lèges à sa petite Jana âgée de 5 ans. Ainsi Sonate en mi mineur pour flûte et basse naquirent deux des plus belles étoiles de la continue, H. 551/W.124 harpe. Sonate en sol majeur pour flûte et basse Le Théâtre de la Ville où Marie-Pierre continue, H. 554/W.127 Langlamet, soliste de la Philharmonie de Sonate en la mineur pour flûte seule, Berlin, vient pour la 5e fois avait déjà mis la H. 562/W.132 (Berlin, 1747) harpe (et la flûte) au carré, en 2000, en Sonate en ré majeur pour flûte et basse conviant Jana Bousková avec Emmanuel continue, H. 561/W.131 Pahud et Mathieu Dufour. Les Abbesses sont Sonate en mi majeur pour flûte idéales pour l’instrument cristallin au réper- et clavecin obligé, H. 506/W.84 toire raffiné. À l’exception de la délicieuse Sonate en la mineur pour clavecin, Sonatine de Jean-Michel Damase, né en H. 247/W.57/2 1928, le programme se compose de superbes Sonate en sol majeur pour flûte et basse transcriptions. Le Tombeau de Couperin de continue, H. 564/W.133 Quatuor Tetzlaff, ph. A. Yanez B. Kuijken, ph. Th. Martinot Céline Frisch, ph. C. Ruban Filomena Moretti, ph. F. Ferri

“UN GÉNIE ORIGINAL” cinquième, Céline Frisch semble feuilleter Difficile d’être un musicien lorsqu’on est le fils quelques pages du précieux livre. La grande de Jean-Sébastien Bach ! Carl Philipp claveciniste française avait depuis longtemps Emanuel, le deuxième des quatre qui rele- envie de travailler sur la musique allemande vèrent le défi, sut chercher et tracer son du XVIIe siècle. En lisant des piles de partitions, propre chemin. Les 7 œuvres choisies par elle découvre Kerll, organiste à la chapelle Barthold Kuijken sont réparties sur plus de impériale de Vienne : « Au départ, il y a une cinquante années et nous font revivre l’aven- pièce qu’on aime, c’est souvent un petit fil, ture créatrice de celui que l’on appelait à son mais en le tirant on trouve plein de époque, et à juste titre, un « Originalgenie ». connexions. » Elle rencontre alors Froberger, Sept mondes à éclairer, de la précoce Sonate né à Stuttgart, grand voyageur pétri d’in- H 551, inspirée par l’opus 2 de Locatelli, au fluences européennes, et Buxtehude, le grand « dernier et inattendu coup de maître », la maître de Lübeck. Ces compositeurs que Sonate H 564, « toute nouvelle, fraîche, vir- Bach avait étudiés en cachette et qu’il admi- tuose, pleine d’un humour à la Haydn ». Le rait, elle les met en résonance. Les œuvres se grand flûtiste hollandais, quarante ans après répondent, bruissent d’échos. Comme cette le lancement de la révolution des baroqueux, « allemande de la Suite de Buxtehude qui dont il fut, avec ses frères, l’un des pionniers évoque le premier prélude du 2e livre du essentiels, continue de questionner ce réper- Clavier bien tempéré dans une version de jeu- toire avec passion (son légendaire « On n’en nesse ». Bach puisa à bien des fontaines. sait rien ! »). De quelles nouvelles lumières va- Fine sourcière aux yeux bleus, Céline nous y t-il baigner son 9e concert au Théâtre de la mène. e Ville, le 3 dans l’écrin acoustique idéal des * Bach en allemand. Abbesses ? Il revient avec Ewald Demeyere quie fut déjà son complice pour l’extraordi- SAM. 1er AVR. 17H naire concert consacré aux sonates de Jean- Sébastien Bach en 2001. Au cœur de leur pro- FILOMENA MORETTI guitare gramme, ils ont installé deux œuvres solo : SANZ : Danzas Cerbantinas une fougueuse sonate pour clavecin qui BACH : Partita pour violon seul, en ré convient bien « à la richesse émotionnelle et à mineur, BWV 1004 – version pour guitare l’esprit analytique » du jeune claveciniste ALBENIZ : Asturias ; Mallorca ; Sevilla belge ; et la Sonate H 562 qui « avec la Partita DE FALLA : La cancion del fuego fatuo BWV 1013 de son père l’une des deux plus La danza del molinero ; Homenaje grandes pièces pour flûte seule de l’histoire TARREGA : Traviata-fantaisie e de la musique avant le XX siècle ». Ce chef- Recuerdos de la Alhambra ; Gran Jota d’œuvre pourra se refléter dans le miroir de Barthold Kuijken. Il est idéal. DÉESSE « La guitare touche les cordes de l’âme ». SAM. 28 JAN. 17H Filomena Moretti en a la révélation dès l’âge de 5 ans quand ses parents lui offrent une gui- CÉLINE FRISCH clavecin tare comme cadeau d’anniversaire : « Je n’en Aux sources du jeune Bach avais jamais vu. Cela a été un coup de foudre : je l’ai mise contre moi et j’ai vibré avec elle. BACH : Capriccio sopra la lontananza del C’est une sensation inoubliable. » Sa lumi- fratello dilettissimo, BWV 992 neuse trajectoire la conduit du conservatoire Toccata en sol mineur, BWV 915 de en Sardaigne, « la plus belle des Preludio di Bach, en ut majeur, BWV 870b terres mais loin de tout », à où elle Praeludium et Partita del tuono terzo, devient l’âme de la guitare. BWV 833 Tendre, sensuelle ou sacrée, toujours pro- KERLL : Canzona fonde, Filomena s’adresse au cœur de qui Suite en fa majeur l’écoute. Avec une élégance infaillible : Passacaglia « Maintenant la guitare est mon langage, ma BUXTEHUDE : Suite en ut majeur, Bux 226 parole, ma voix. » Une sonorité chaude qui FROBERGER : Toccata II et Suite II du livre sent bon l’Italie. Un naturel, une palette de de 1649 couleurs et une intensité qui impressionnent. PETIT RUISSEAU* DEVIENDRA GRAND Pour un peu on parlerait de puissance : « La À la mort de leurs parents, Johann Christoph guitare ne joue pas fort mais loin. » Elle aime Bach recueille son petit frère Jean-Sébastien citer cette phrase de Segovia que seul un à qui il apprend la musique. La passion de grand interprète peut faire sienne. l’enfant de 10 ans est extraordinaire. Dans une Du XVIIe au XXe siècle, de Gaspar Sanz à Falla, armoire simplement fermée d’un grillage, il la jeune femme effeuille une capiteuse antho- découvre, émerveillé, un recueil d’œuvres logie, airs raffinés, canto jondo où crépite le pour clavier des compositeurs les plus feu des gitans, danses ibériques, cantilènes célèbres de son temps : Froberger, Kerll… émouvantes comme ces Souvenirs de Son frère lui en refuse bizarrement l’accès. l’Alhambra de Tarrega. Et un diamant : la Mais sa petite main pouvait passer à travers Partita pour violon seul BWV 1004 de Bach : les trous du treillis. Et, à la lueur de la lune, il « Cette musique est pour n’importe quel ins- n’avait même pas de bougie, Jean-Sébastien trument. Il suffit de la respecter. » recopie le volume. L’aîné s’en aperçoit, Absolue, Filomena rêve de jouer dans le noir : confisque la reproduction. Jean-Sébastien ne « La lumière aussi fait du bruit et quand on la récupérera qu’après la mort de son frère. joue, on ne cherche pas le bruit. » Peut-être, Pour son nouveau récital aux Abbesses, le mais ce serait dommage : elle est si belle ! MUSIQUES DU MONDE

AU THEATRE DE LA VILLE RAJAN ET SAJAN MISRA GIRIJA DEVI Inde du Nord chant khyal Inde du Nord chant khyal L’ENSEMBLE DE MALOUF CHAURASIA Inde du Nord DE LA GRANDE JAMAHIRIYA flûte bansuri direction Hassan Araibi Libye

GIRIJA DEVI Inde du Nord AUX ABBESSES CHAURASIA raga-s du matin GHOLAM DASTEGUIR HOMAYOUN Afghanistan MEHR ET SHER ALI Pakistan rubâb AND PARTY qawwali CHOTA DIVANA Rajasthan

KAUSHIKI CHAKRABARTY GHADA SHBEIR Liban chant khyal Inde du Nord chants syriaques

IKHWANI SAFAA Zanzibar ASHIQ HASSAN MUSICAL CLUB Azerbaïdjan iranien taarab de Zanzibar artiste invitée Bi Kidudé chant LJILJANA BUTTLER Bosnie Mostar Sevdah Reunion FARIDA PARVEEN Bangladesh chant USTAD BARE FATEH ALI KHAN chant classique Pakistan USTAD SHAFI Pakistan MOHAMMAD FAQIR SALAR AGHILI chant Iran musique soufie du Sind ENSEMBLE IBN ARABI Maroc ENSEMBLE AL-KINDÎ Syrie direction Ahmed El Kheligh musique arabo-turque de l’Empire ottoman LIU FANG Chine ENSEMBLE SHOGHAKEN pipa, guzheng Arménie KADRI GOPALNATH saxophone ENSEMBLE SHAMS Iran musique carnatique Inde du Sud Hamid-Reza Nourbakhsh chant Kéykhosrow Pournazéri tanbur CHANTS DE LA TIHAMA Yémen NASSIMA chant, mandol Algérie voix soufie, voix d’amour, JAZZ AUX ABBESSES six siècles de poésie soufie création KURT ROSENWINKEL guitare PURBAYAN CHATTERJEE Mark Turner saxophone Aaron Golberg piano KALA RAMNATH Inde Joe Martin contrebasse jugalbandi, duo de sitar-violon Ari Hoenig batterie

TARIF D MUSIQUES DU MONDE AU THEATRE DE LA VILLE , photos Sense World Music Girija Devi et Chaurasia

SAM.17 SEPT. 20H30 RAGA-S DU SOIR En ouverture de saison : CHAURASIA deux grands maîtres, flûte bansuri Inde du Nord Girija Devi et Chaurasia pour un Sunil Avchat flûte bansuri week-end musical exceptionnel Vijay Ghate tabla Bhavani Shankar pakhawaj Après deux saisons d’absence, voici Chaurasia de retour au Théâtre de la Ville. Le don du souffle l’habite et hante les âmes. Celui qui n’était en rien destiné à devenir musicien est la référence absolue dans un domaine VEN. 16 ET SAM. 17 20H30 • DIM. 18 SEPT. 11H dont il a fait un royaume partagé par tous ses VEN. 16 SEPT. 20H30 fans et ses innombrables disciples à travers le monde. Impénitent globe-trotter, il a succédé GIRIJA DEVI à Ravi Shankar dans le rôle d’ambassadeur chant khyal Inde du Nord d’exception de la musique indienne. accompagnée au sarangi et tabla Les amples sonorités qu’il insuffle à sa flûte LE CHANT LUMINEUX ET POÉTIQUE DE LA sont un don du ciel : une qualité sonore unique DÉESSE DE BÉNARÈS nous enveloppe, parfaitement ronde et oua- Annonçant l’année dernière que vu son âge tée, d’où ressort une chaleur irradiante tein- elle cesserait de tourner à l’étranger en 2005, tée des couleurs les plus expressives. Dès on ne pouvait que rendre un hommage pari- l’attaque de la première note on ressent sien à la légendaire Girija Devi, après déjà cette spiritualité qui va nourrir son art tout au deux passages au Théâtre de la Ville (1992 et long du concert. Initié au genre dhrupad, 2002). Chaurasia impose d’emblée sa marque, dans Immergée dès l’enfance dans le foisonnement ces courtes figures oscillantes qui viennent intense de la vie religieuse et musicale de chercher et recueillir l’essence et les secrets Bénarès, la dernière chanteuse courtisane de des raga-s, ou dans ces fines volutes qui l’Inde dévoile son cœur. Concentrée, d’une viennent parcourir l’octave supérieure. élégance aérienne, le geste sûr, l’âme à nu, Sa technique inouïe est son œuvre. elle nous touche par sa voix éclatante, à la Inlassablement, cet orfèvre promu génie a densité du cristal. développé un jeu idéal pour imiter la voix au Cette grande dame de soixante-quinze ans plus près, créant une architecture de la pléni- n’a pas cessé d’affiner son art pour atteindre tude. Curieux, ouvert aux autres formes musi- le sommet. La sûreté des tempi et le sens cales, Chaurasia aime puiser dans les mélo- d’une dramaturgie rythmique complètent ce dies folkloriques, d’où sont issus bien des tableau. Bien que merveilleuse chanteuse de raga-s. Sa maîtrise de l’art savant et de ses khyal, Girija reste attachée aux nombreux sources indigènes en font l’artiste le plus genres réputés plus "légers" qui la situent populaire de son pays. C. L. dans la lignée des Siddeswari Devi et Begum Aktar, divines voix des années 50. On y dé- cèle l’empreinte de la ville sainte dans l’ex- pression dévotionnelle et romantique d’un art protéiforme touchant à bien des genres, où DIM. 18 SEPT. 11H RAGA-S DU MATIN Girija Devi apparaît comme une interprète de chant khyal génie. GIRIJA DEVI Ces genres, non plus faciles, sont plus réduits CHAURASIA Inde du Nord ou plus ramassés que le khyal : thumree flûte bansuri romantique, chaiti et kajri, chants d’amour du printemps et de la mousson, dadra au thème Avec la star Kishori Amonkar, Girija Devi sera érotique, holi, variété saisonnière du thumree, la deuxième chanteuse à se produire au bhajan dévotionnel, tarana hypnotique, tappa, Théâtre de la Ville pour des raga-s du matin, condensé redoutable de toutes les tech- et Chaurasia se sent honoré de partager ce niques vocales. concert avec son aînée qu’il admire depuis Christian Ledoux toujours. C. L. de pratique quotidienne témoignent d’une recherche de la perfection tonale, toute vouée à l’exploration émotionnelle et spirituelle des photos X. DR raga-s. La critique indienne, unanime, l’acclame et reconnaît en elle le meilleur espoir du chant khyal. Les éloges que lui ont adressés les Mehr et Sher Ali, Mehr et Sher grands maîtres sont éloquents, d’Alla Rakha, qui assure qu’elle vaut son fils Zakir Hussain, à Pandit Jasraj, tant ému par un concert qu’il voit en elle la seule personnalité capable de lui succéder. Kaushiki Chakrabarty s’initie à la musique dès l’âge de deux ans auprès de sa mère. À dix SAM. 8 OCT. 17H ans, honneur insigne, elle est admise comme disciple du légendaire pédagogue Jnan MEHR ET SHER ALI Prakash Ghosh qui n’a jamais eu une élève si douée. Devenu trop malade, il confie au père AND PARTY qawwali Pakistan de son brillant sujet le soin de compléter son 8 musiciens apprentissage. La jeune chanteuse se fait connaître en Inde et aux USA ces cinq der- DANS LA PLEINE MATURITÉ DE LEUR ART ! nières années. Saison après saison, depuis 20 ans mainte- En janvier 2005, elle reçoit le BBC Award du nant, le Théâtre de la Ville nous propose de meilleur CD de musique d’Asie. On décèle en nouvelles nuances du qawwali punjabi pakis- elle une future Kishori Amonkar, la sensualité tanais. Durant de longues années, ce fut en plus. Son art est le fruit d’un mûrissement d’abord un lotus rare, trop vite englouti dans précoce extrêmement rare : il faut dire qu’elle l’étang world : Nusrat Fateh Ali Khan. Puis dès est philosophe de formation et ne dédaigne 1999, vinrent les petits cousins prometteurs pas écrire. Rizwan et Muazzam Mubarak Ali Khan. En Sa simplicité est aussi touchante que son art 2002, ce fut l’ébouriffant Asif Santoo Khan de capter l’attention des auditoires avec une dont la carrière – toujours essentiellement délicatesse qui incite à une écoute où l’on se enracinée dans les sanctuaires soufis – vogue sent proche de l’artiste. La candeur de son dorénavant à plein vent. Vint ensuite, en 2003, regard attise l’intelligence et le cœur. l’imposant Badar Ali Khan, au style pleinement C. L. assumé. Et voici que cette saison, l’écheveau poursuit son lent déroulement : le Théâtre accueille en son sein les frères Mehr et Sher Ali. S’ils ne ph. X. DR représentent pas le modèle de tous les qawwal-s punjabi-s (bien prétentieux serait celui qui se proclamerait "le meilleur" ou "la

voix"…), le groupe des frères Ali s’est néan- K. Chakrabarty, moins érigé actuellement en l’une des réfé- rences essentielles du qawwali punjabi. Une double coïncidence indiquait déjà un bon augure : tout comme le légendaire chanteur classique Ustad Bare Fateh Ali Khan – que nous aurons le privilège d’apprécier en mars prochain –, les deux frères prodiges sont issus de la féconde cité punjabie de Patiala ; et tout comme Nusrat, la famille Ali s’est établie à Faisalabad après la partition de 1947. Illustres voisinages… Mais leur renommée est d’abord due à leur talent personnel : les deux frères Mehr et Sher sont en effet deux qawwal-s exceptionnels qui SAM. 26 NOV. 17H jouent de leurs timbres complémentaires avec un brio consommé : voix ample et forte de IKHWANI SAFAA Mehr, voix plus douce, presque féminine, de MUSICAL CLUB Zanzibar Sher, qui s’entrelacent aux rythmes magiques taarab de Zanzibar du tabla et aux reprises fringantes du chœur. artiste invitée BI KIDUDÉ chant Ainsi célébré, gageons que le divin amant Mohamed Ilyas sera bien présent dans la salle… premier violon, chant, chef d’orchestre Pierre-Alain Baud Mohamed Othman violon Juma Haj violon Abdallah Mussa qanoun Moh’d Issa Matona oud, violoncelle Sadiq Juma accordéon Abdulaziz Yusuf guitare SAM. 15 OCT. 17H Juma Saidi basse Muhsin Aliy percussion KAUSHIKI CHAKRABARTY Maulidi Mohamed Machaprala chant khyal Inde du Nord percussion, chant accompagnée à l’harmonium et au tabla Rukia Ramadhani chant, chœur Pour la 1re fois en France Fauzia Abdalla chant, chœur

Empressons-nous de venir découvrir cette En arabe, taarab signifie extase, béatitude, chanteuse de vingt-trois ans, fille d’Ajoy dans une acception profane qui renvoie Chakrabarty, dont le célèbre chanteur déclare davantage à la danse ou à la musique qu’aux sans vouloir se vanter qu’elle est meilleure émois mystiques. Depuis un siècle, le taarab que lui ! Il n’a pas tort… La souplesse de sa est la principale musique populaire de la côte voix de miel est hors norme et ses six heures Swahili et de Zanzibar, petite île de légende ph. X. DR Ikhwani Safaa Musical Club,

SAM. 14 JAN. 17H ph. X. DR FARIDA PARVEEN chant 5 musiciens Bangladesh Bi Kiduré, « Quand la peur est absente, l’amour suffit. Le miel se cache au cœur de la fleur, mais l’abeille le sait… », nous murmurent les Baúls. Farida Parveen, issue d’un foyer familial "jamais à court d’amour" (S. Zakaria/M. Zaman) serait-elle donc abeille, extrayant des poèmes fleuris de Lalon Faqir le suc qu’elle transforme en miel apaisant l’âme ? Affectueusement surnommée « Farida apa » – sœur – par ses proches et ses admirateurs, Farida Parveen est une icône au Bangladesh, incarnation vive de l’âme d’une contrée dorée, passionnément aimée : « Amar shonar Bangla, ami tumay bhalo bashi…» « Mon égarée dans l’océan Indien, au large des Bengale doré, je t’aime tant… », nous chante côtes tanzaniennes et kényanes. ainsi Tagore. Créé en 1905 par le sultan de Zanzibar, C’est à tout bout de “chant” que l’on retrouve l’Ikhwani Safaa Musical Club fête donc son cet amour pour la terre bengalie, pour cet centenaire en cette année 2005. Initialement, horizon ample et calme, pour ce regard sécu- cette “Amicale fraternelle” (Ikhwani Safaa) ne lier et compassionnel sur le monde… Or comptait que des hommes et se produisait l’abeille Farida a su trouver les intonations essentiellement à la cour du souverain et justes pour chanter cet infini d’amour, se devant la bourgeoisie commerçante et arabo- muant au fil des ans en chantre incontesté de phile. À partir de la fin des années 1920, Lalon Faqir – ou Lalon Shah –, père de l’an- grâce à la chanteuse Siti Bint Saad (1880- crage soufi des Baúls bengalis. À l’instar de 1950), les femmes ont peu à peu trouvé leur Shah Latif dans le Sindh, la poésie de Lalon place dans le taarab – même si, aujourd’hui puisa dans les villages et les cœurs bengalis encore, elles sont essentiellement chanteuses les mots simples dont il tira la substance ou choristes et ne jouent d’aucun instrument. essentielle, celle qui lie passion humaine et Cette irruption des femmes établira définitive- amour divin, humanité au quotidien et spiri- ment le taarab comme musique populaire car tualité aux horizons infinis… Farida Parveen, il sera désormais chanté exclusivement en en harmonisant pour la première fois ces kiswahili (la langue première des Zanzibari), et poèmes laissés sans notation, en a capté le non plus en arabe comme auparavant. Aux suc musical. influences arabes originelles se sont mêlées Saveur du miel, bonheur de l’écoute, plaisir du petit à petit les racines africaines locales, des regard, confort de l’assise, il ne manquera parfums indianisants apportés par les migra- que le parfum nocturne du jasmin pour trans- tions transocéaniques, et même un soupçon former ce concert en fête des cinq sens… de rythmes latinos à partir des années 1950. Invitée d’honneur de l’Ikhwani Safaa pour ce P.-A. B. concert du centenaire, Bi Kidudé est la figure emblématique de la musique populaire zanzi- bari. Née Fatuma Baraka, son surnom Kidudé (“petite chose”) lui fut donné à sa naissance , ph. X. DR tant elle était une enfant fragile et menue. Bi veut simplement dire “Madame” en swahili.

Cette Madame Piaf zanzibari, venue au Farida Parveen Théâtre de la Ville en 1990, est aujourd’hui une nonagénaire extraordinairement alerte, déchirante et rayonnante d’énergie. Long- temps méprisée par une certaine aristocratie musicale en raison de ses origines modestes, elle jouit désormais d’une reconnaissance unanime et fervente – pour sa personnalité, pour sa voix, pour sa présence scénique et sa générosité, mais aussi parce qu’elle perpétue la tradition révoltée de Siti Bint Saad, qu’elle a connue et dont elle courait les taarab-s dès sa jeunesse. Francis Falceto ph. X.DR ph. P.-A. Baud ph. P.-A. Ens. Shoghaken, Ustad Shafi Mohammad Faqir, ph. X.DR Al-Kindî,

LUN. 23 JAN. 20H30 versant – sindhi – de ce désert du Thar, dont est partie l’épopée gitane. Belle découverte, USTAD SHAFI donc ! P.-A. B. MOHAMMAD FAQIR * Nom donné aux sanctuaires soufis dans le sous- musique soufie du Sind Pakistan continent indien. 6 musiciens SAM. 28 JAN. 17H Voix du « dargah* aux tournesols » depuis Syrie des lunes, Ustad Shafi Mohammad Faqir nous ENSEMBLE AL-KINDÎ musique arabo turque rejoint enfin à Paris ! de l’Empire ottoman création Faqir Mangalhaar, regard lumineux et sourire clair, Shafi entonne en effet depuis près de 30 Julien Jalâl Eddine Weiss qânoun, direction ans le rituel du chant dans ce dargah des Qadri Dalal oud dargah-s situé à Jhok Sharif dans le Sindh Ziad Kadi Amin ney méridional : celui du saint soufi et réformateur Adel Shams El Din riqq social Shaheed Shah Inayat, autre symbole de un chanteur alépin et un chanteur turc l’âme sindhie avec Shah Abdul Latif. Ici, pour 3 instruments turcs (kamantché roumi, le pèlerinage annuel, point de foule bruyante tanbur turc, kudum) et affairée, si commune ailleurs : la plupart des târ azéri pèlerins sont les Maîtres et les disciples des daf et tumbak persans quelque soixante-dix sanctuaires affiliés au verdoyant mausolée de Shah Inayat. Signe de Chaque rendez-vous avec l’ensemble Al-Kîndi l’aura du lieu et de ses musiciens. et Julien Jalâl Eddine Weiss, son fondateur Ustad Shafi Faqir n’est pas issu de Jhok. Il et directeur artistique, est l’occasion de su- vient d’Umarkot, l’ancienne cité du désert du perbes rencontres musicales. En témoigne Thar, à quelques encablures du Rajasthan, là cette nouvelle création qui marquera le 10e où vivent ses proches cousins Manganiyars. passage de l’ensemble au Théâtre de la Ville. Mais que ce soit à Jhok ou Umarkot, là ou Restés retranchés de part et d’autre des fron- ailleurs, peut-être bien ici aussi à Paris, le sen- tières imposées par les États nations pendant suel velouté de sa voix ne peut qu’happer des siècles, les échanges culturels, artis- l’audience de sa magie, la transportant, volup- tiques et musicaux entre les pays situés de tueux voyage, aux confins de l’âme nomade. chaque côté de l’ancien Empire ottoman sont Tapis volant vers 1001 nuitées de rencontres restés bien timides. rêvées avec le Divin Amant… Partant de l’idée que l’esthétique et les inter- Étranges semi-retrouvailles, cependant, pour valles des musiques arabes, turques et per- nous autres quelque peu accoutumés aux sanes étaient sans doute fort semblables à la voix et vibrations des cousins de Shafi Faqir : fin du XVIIe siècle, Julien Weiss a minutieuse- les mélodies, les rythmes, certaines amorces ment travaillé sur un répertoire arabe ancien dans la voix, le jeu instrumental, nous remé- d’Alep, auquel il a mêlé une interprétation ori- morent le Rajasthan tout proche. Et en même ginale de pièces extraites des manuscrits de temps, la fougue, la nostalgie, la tendresse y deux musiciens de Topkapi, la cour du palais sont d’une tout autre saveur, tout autre cou- du sultan. Ces deux personnages, hauts en leur, éveillant un tout autre bonheur… couleur, érudits et raffinés, sont emblé- Après de superbes décennies de Rajasthan, matiques d’Istanbul la cosmopolite : l’un, le le temps est venu, par la grâce de la voix prince chrétien moldave Dimitri Kantemir qui caressante de Shafi Faqir, de lever un coin du représente les terres suzeraines roumaines voile qui couvre encore essentiellement l’autre auprès de la sublime porte du même nom, Kremer et le saxophone de Jan Garbarek – kamancha, qânoun, tambour dhol, dham, flûte de berger shvi et deux voix. L’une féminine, l’autre masculine, tantôt solistes, tantôt réunies dans la complicité d’un duo, parfois a cappella… Pour porter noblement ce réper- toire et le colporter de l’Arménie à l’Europe, en passant par la Russie et le Smithsonian Festival à Whashington. En attendant Paris. Jacques Erwan

SAM. 25 FÉV. 17H ENSEMBLE SHAMS Iran HAMID-REZA NOURBAKHSH chant KÉYKHOSROW POURNAZÉRI tanbur

Tahmourés Pournazéri tanbur l’autre, le chantre juif polonais Albert Sohrab Pournazéri kamantché Bobowski qui a été vendu comme esclave et Hossein Rezaïna daf converti sous le nom de Ali Oufki. Shahab Parang tombak Pour réussir ce pari original et ambitieux, Julien Jalâl Eddine Weiss souhaite réunir pour On serait tenté de croire que le virtuose du la première fois autour de l’ensemble arabe tanbur Kéykhosrow Pournazeri a voulu relever Al-Kîndi de grands maîtres turcs, azéris et un véritable défi en donnant le nom de Shams persans qui laisseront une large place à l’im- à l’ensemble qu’il créa en 1980. Un nom qui provisation. Ils feront résonner tanbur et exclut d’emblée toute médiocrité. Shams en kamantché ottoman aux côtés du ney, luth et persan ne signifie-t-il pas soleil ? N’est-ce pas qânoun arabes afin de retrouver l’interpré- aussi le nom du maître de Rumi, le plus tation la plus juste et la plus raffinée de la renommé des poètes persans ? Pas facile non musique arabe, telle qu’elle devait être jouée plus de porter le tanbur, ce luth très ancien à à Alep durant l’âge d’or de l’empire ottoman. deux ou trois cordes et long manche, jus- Une bien belle façon de réconcilier les qu’alors confiné dans le cercle des derviches traditions ! et le répertoire profane du Kurdistan iranien, au plus haut rang de la musique classique LUN. 20 FÉV. 20H30 persane, à l’égal du târ. C’est pourtant le défi que l’ensemble Shams relève avec brio à cha- ENSEMBLE SHOGHAKEN cun de ses concerts. Arménie 9 musiciens Il faut dire que son fondateur, né en 1944 à Kermanshah dans le Kurdistan iranien, a de LA TRADITION RETROUVÉE qui tenir. Comme son célèbre cousin Shahram Depuis la fin du XIXe siècle, les Arméniens ont Nazeri qu’il a accompagné sur la scène du recensé chants et airs de leur tradition : trente Théâtre de la Ville en 1992, il aime s’entourer mille pièces sont ainsi répertoriées dans d’excellents musiciens, capables de distiller diverses archives. Cette richesse reposait cet art intimement lié à la musique persane : initialement sur une musique modale et mono- l’improvisation et cette intimité si douce entre dique propice à l’ornementation. Elle a ensuite voix et instruments. connu quelques vicissitudes : occidentali- Pour ce concert, Hamid-Reza Nourbakhsh, 40 sation, au XXe siècle, transcriptions poly- ans, fin connaisseur des belles-lettres per- phoniques, fossilisation et apprentissage sanes, ancien élève de Shadjariane et direc- académique imposé par les Soviétiques. teur du conservatoire de musique de Téhéran À Erevan, l’Ensemble Shoghaken (source de depuis 1996, dialoguera avec les cinq instru- lumière) fondé en 1991, figure à la pointe d’un ments qui répondront aux accents de sa voix mouvement né en Arménie post-soviétique, puissante, chaude et veloutée : deux tanburs, en faveur de l’usage de la tradition et d’une aux côtés de Kéykhosrow Pournazeri, son fils interprétation qui lui est conforme. L’écoute de Tahmourès, 28 ans ; au kamantché, vièle à sa musique justifie cette initiative. archet, son deuxième fils, Sohrab, 22 ans, Le répertoire arménien recèle des chants reli- élève de Nourbakhsh pour le chant ; au daf, gieux, dont certains notés depuis le Ve siècle grand tambourin, Hossein Rezaïna, 29 ans, (le christianisme est religion d’État depuis l’an élève de Bijan Kamkar et membre de l’en- 301), les chants poétiques des Ashug, ces semble Shams depuis 96 ; au tombak, troubadours dont la tradition se poursuit du percussion, Shahab Parang, 22 ans, qui a eu XVIIe au XIXe siècle, ainsi que l’ensemble de la comme professeur un frère Kamkar. musique populaire. Celle-ci accompagne les temps de la vie et même la mort. Ses textes Jacqueline Magnier usent de la langue familière. Des éléments païens subsistent dans certains chants. Entre Anatolie et Caucase, ce répertoire varie. Entre est, fief du duduk, et ouest, royaume du oud, également. L’Ensemble Shoghaken puise dans ce riche patrimoine. Il interprète des œuvres héritées , ph. Kamrouz des Ashug tels que Sayat Nova (XVIIIe siècle) et Gusan Sheram (XIXe et XXe siècles), des chants de la tradition populaire (chants d’amour et de mariage, de travail et d’exil, berceuses, chants épiques et patriotiques) sublimes, Hamid-Reza Nourbakhsh déchirants et pathétiques, ainsi que quelques musiques rituelles. Le duduk est le souffle de l’âme, le shvi le chant de l’oiseau. Huit musiciens concourent à la beauté de l’en- treprise : duduk-zurna , tenus par le fondateur du groupe – il a côtoyé le violon de Gidon , © Sense World Music P. Chatterjee et K.P. Ramnath , ph. J.-P. Lozouet , ph. J.-P. Nassima

SAM. 25 MARS 17H modes et des rythmes propres à souligner la force expressive des poèmes. NASSIMA chant et mandol Algérie Après trois ans de travail pour aboutir, elle voix soufie, voix d’amour, enregistre cette œuvre à paraître, et le résultat six siècles de poésie soufie création est magnifique. Sereine et irradiante de joie Noureddine Aliane oud intérieure, Nassima a gagné son pari. Rachid Brahimdjelloul violon C.L. Pierre Rigopoulos daf Mustapha Belkaïd basse Kamel Labbaci ney Khalfa percussions SAM. 1er AVR. 17H

Après deux concerts de chant arabo-andalou PURBAYAN CHATTERJEE sitar donnés Théâtre de la Ville dans une salle KALA RAMNATH violon comble, Nassima la radieuse propose une jugalbandi, duo de sitar-violon création autour de poètes soufis qu’elle médi- Inde du Nord tait avant même de s’installer en France. Il lui Subhankar Banerjee tabla aura fallu l’éloignement du pays natal pour patiemment tisser sa toile : se procurer Popularisé par le violoniste V.G. Jog (voir les d’anciens recueils de poèmes, voire des grandioses albums avec Bismillah Khan, sha- copies de manuscrits provenant de diverses naï et Vilayat Khan, sitar), comme par Ali régions du monde arabe, tous les livres conte- Akbar Khan et Ravi Shankar, le jugalbandi, nant des œuvres des grands poètes voya- duo de solistes, genre apparu dans les geurs, Ibn Arabi, le plus prolixe des auteurs années 50, jouit d’un attrait non encore du monde arabes, et Abou Madyane, tous démenti par le suspens qui en émane. Le deux Andalous du XIIe siècle. Sa surprise est la public est féru d’entendre différentes combi- découverte des écrits de l‘émir Abdelkhader naisons, même les rencontres entre musiques qui, au XIXe siècle, se considérait comme un du Nord et du Sud. disciple d’Ibn Arabi. Un autre Algérien Faisant partie de la fine fleur de la jeune géné- d’importance retient son choix : Ahmed el ration des instrumentistes du Nord très Alaoui, maître à penser des confréries de demandés, Purbayan Chatterjee et Kala Mostaganem. Au cours de ses lectures, elle Ramnath ont donné leur premier duo à Cap découvre que certains poèmes anonymes Town en 2003. Chacun appréciant la musique qu’elle chante dans le répertoire andalou sont de l’autre, ils se sentaient en confiance pour dus à Abou Madyane… mettre leurs jeux en harmonie. La seule mé- La poésie, qui rend compte du vécu intérieur, thode à appliquer dans un face-à-face d’ins- partage avec la mystique une essence inef- trumentistes (qui sont avant tout des solistes) fable et symbolique. Les images poétiques les est d’éviter les écueils, l’ego devant s’effacer plus fortes retiennent l’attention de la chan- pour laisser place à la liberté équitablement teuse. Les chants des muezzins qui la fasci- partagée d’un voyage musical dont on ne naient toute petite bourdonnent encore en elle peut prédire les chemins de traverse qu’il va tandis qu’elle compose, choisissant des prendre. Appartenant à la septième génération d’une nous mène à une sensation proche de la béa- famille de musiciens tamouls du Sud, Kala titude… Leur dernier concert, exceptionnel, Ramnath a choisi la musique du Nord. au Théâtre de la Ville en mai 2004, enregistré Disciple remarquée de Jasraj, elle avait en direct, sortira prochainement en CD dans accompagné le légendaire chanteur au la collection naïve-Théâtre de la Ville. Théâtre de la Ville en 1996. C. L. Purbayan Chatterjee, Bengali de Calcutta, étudie avec son père sitariste, disciple d’Ali Akbar Khan et de Nikhil Banerjee. LUN. 19 JUIN 20H30 Pourvus d’un bagage musical exceptionnel et d’une fine sensibilité, d’une belle présence L’ENSEMBLE DE MALOUF DE scénique, ces deux artistes prometteurs ont LA GRANDE JAMAHIRIYA l’art de se compléter harmonieusement, direction Hassan Araibi Libye prenant soin de jouer les mêmes versions des compositions choisies avec beaucoup d’al- LE MALOUF EN HÉRITAGE. lure. Un régal ! C. L. L’isolement rompu, à nouveau la Libye s’éveille. Son patrimoine musical est riche et recèle genres et styles divers. Appelée aussi là-bas malouf, la tradition arabo-andalouse s’y LUN. 5 JUIN 20H30 perpétue. L’Ensemble de malouf, fondé en 1964, en est l’un des fleurons, apprécié à RAJAN ET SAJAN MISRA l’intérieur du pays comme à l’extérieur. C’est chant khyal Inde du Nord un grand orchestre qui rassemble des musi- accompagnés au tabla et à l’harmonium ciens amateurs, tous talentueux : oud, chant, ney, qânoun, violons, contrebasse et percus- Le duo Rajan et Sajan Misra est comparable sions. Il est dirigé par Hassan Araibi (oud et par son impact esthétique à celui des légen- chant), par ailleurs directeur de l’Institut natio- daires Nazakat et Salamat Ali Khan qui nal de la musique orientale de Tripoli. défrayèrent la chronique dans les années 60. C’est un homme de petite taille, portant l’habit Ici, rigueur et flamboyance vont de pair dans traditionnel et coiffé du tarbouch. Depuis une l’art consommé de deux personnalités cinquantaine d’années, il met son talent au complémentaires. service de la musique. Féru des traditions À Bénarès, ils côtoient les plus grands chan- arabe et libyenne, il inscrit également au teurs et instrumentistes de ce sanctuaire mil- répertoire de l’Ensemble, outre le malouf, lénaire où les distractions sont rares, et ont le “chants ornés” et “mélodies arabes”. « J’ai, loisir d’étudier et de pratiquer sans relâche dit-il, hérité le malouf de mon grand-père, un avec leur père Hanuman Misra et leur oncle sheikh tripolitain. » Il entreprend ensuite des Gopal Misra, l’un des meilleurs joueurs de études musicales au conservatoire de Tunis et sarangi d’alors. approfondit ses connaissances. Il considère Rajan le Magnifique et Sajan le Subtil ont créé cependant que le système musical occidental un style sobre mais haut en couleur, où coule ne convient guère à la musique arabe. « En une sève spirituelle. Libye, observe-t-il, les nubas se distinguent Leur répertoire comprend nombre de compo- de leurs sœurs tunisiennes, algériennes et sitions remarquables par la qualité des marocaines par le rythme et l’ornementation. thèmes abordés (qui proviennent de l’hin- En revanche, les maqamat, les modes, sont douisme philosophique et religieux) comme les mêmes. » par le choix des raga-s qui épousent l’aspect Une occasion rare de découvrir cette va- sacré du dhrupad, ancêtre hiératique du riante originale de la savante musique arabo- khyal. andalouse. J. E. Après le bhara khyal, lent et majestueux, jaillissent des compositions plus vives où brille leur savoir-faire : improvisations mélodiques et rythmiques contrastées, oscillations puis- santes et répétées, phrasés rapides comme des flèches. L’ambitus des basses aux aigus , ph. J. Erwan s’étire, la voix puissante de Rajan est portée au maximum, tandis que celle de Sajan lui répond dans des improvisations d’un style somptueux. Survient alors le tarana aux Hassan Araibi accents rythmiques jubilatoires, suivi d’un thumree romantique et d’un bhajan dévotion- nel dédié à Krishna. L’adoration qu’expriment les frères Rajan et Sajan a fait son œuvre et , © Sense World Music Rajan et Sajan Misra MUSIQUES DU MONDE AUX ABBESSES , ph. Kamrouz K. Rosenwinkel, ph. Ian Gittler Gholam Dasreguir Homayoun

SAM. 1er OCT. 17H SAM. 15 OCT. 17H JAZZ GHOLAM DASTEGUIR KURT ROSENWINKEL guitare HOMAYOUN rubâb MARK TURNER saxophone 4 musiciens Afghanistan AARON GOLDBERG piano JOE MARTIN contrebasse « C’est le chant de la porte qui ouvre sur le ARI HOENIG batterie paradis. » Ainsi Rumi définit le secret de la mélodie du rubâb. Ce luth en bois de mûrier, C’est au début des années 90, aux côtés du à double caisse de résonance, muni de trois vibraphoniste Gary Burton mais aussi et sur- cordes mélodiques et douze à quinze cordes tout au sein de l’Electric Be-Bop Band du sympathiques, était particulièrement popu- batteur Paul Motian, que Kurt Rosenwinkel laire à Hérat, au nord de l’Afghanistan, avant s’est pleinement révélé. Le guitariste améri- que les talibans ne le fassent taire. Mais en cain, la trentaine passée, a très tôt fait ses réalité, il ne s’est jamais tu. Quelques musi- classes de jazz sur les bancs du célèbre ciens ont déjoué l’interdit, sortant dans la clan- Berklee College of Music de Boston, pour destinité les instruments qu’ils avaient réussi à mieux se frotter à la scène de la Grosse dissimuler. D’autres ont choisi l’exil. C’est le Pomme et voler de ses propres ailes. D’où cas du jeune Gholam Dasteguir Homayoun quatre disques sous son nom en quatre ans qui, en 1992, émigre au Pakistan avec toute sur le label Verve, dont le récent et très remar- sa famille. Depuis, il a ouvert à Peshawar l’une qué Deep Song, en quintette avec Joshua des rares écoles de musique afghane dans la Redman, Brad Meldhau, Larry Grenadier et Ali région. Les sonorités du rubâb, aux accents Jackson. Plutôt « antiguitare zéro » qu’hyper- indiens et pakistanais, tiennent du divin lors- guitariste, Kurt Rosenwinkel s’impose plus qu’elles émanent de son doigté léger, tout en comme musicien et compositeur qu’instru- nuances. Avoir eu pour maître Ustad mentiste virtuose. Une grande précision du Mohammad Omar, le “sultan du rubâb” mort phrasé, une belle liberté rythmique, une arti- en 1980, n’est pas étranger à l’excellence de culation exemplaire, un sens de la construc- son jeu aérien. Au Théâtre de la Ville, chacune tion dynamique et de l’architecture complexe, de ses apparitions fut très remarquée : en Kurt Rosenwinkel est un guitariste exigeant, 2001, avec Gholam Mohammad Attai, rubâb ; ondulant et chavirant. Sa musique, libre et en 2002, avec le chanteur Davoud Sarkhokh rigoureuse, est fondée sur le geste et sa spon- et dans un concert mémorable qui réunissait tanéité. Son jeu allie subtilement les sept musiciens dont Abdol Pandchiri et Rahim contraires, puissance et délicatesse, équilibre Takhari, 70 ans. Pour ce sixième concert et mise en péril, souplesse et fermeté. À ses consacré à la musique afghane – le premier compagnons du jour, le saxophoniste ténor en 1995 et le second en 2001 en présence de Mark Turner, le pianiste Aaron Goldberg, le l’inoubliable Ustad Rahim Khushnawaz au contrebassiste Joe Martin et le batteur Ari rubâb – le Théâtre de la Ville donne carte Hoening, il offre un jeu limpide, dynamique et blanche à la jeune génération pour qu’à son tout en nuances. Soit un quintette flamboyant tour, elle révèle ces “secrets du cœur” dont, qui maîtrise toutes les dynamiques du jazz, une fois encore, parle si bien Rumi : tendresse brûlante, intelligence des ruptures, « Ô son du rubâb, d’où viens-tu donc ? entrelacs de virtuosités et de lyrismes, colli- Plein de feu, plein de désordre et plein de sion de traditions et d’improvisation. D’où une trouble ! musique tout en turbulences contrôlées, Tu es l’espoir du cœur et le messager de ce spontanée et structurée, d’une grande et belle désert force d’expression. Tout ce que tu enseignes, ce sont les secrets Franck Médioni du cœur. » J. M. ph. H. Bozzi Chota Divana,

SAM. 12 NOV. 17H ET LUN. 14 NOV. 20H30 Profondément enraciné dans les civilisations du Proche-Orient, il s’est transmis oralement CHOTA DIVANA Rajasthan de génération en génération car il n’existait 9 musiciens et chanteurs aucune notation. Ainsi les mêmes mots s’ac- commodent de diverses mélodies et une LES ENFANTS DU RAJASTHAN même mélodie s’acoquine à différents textes. Les musiciens et poètes des castes Le chant syriaque est minimaliste : il se joue Manghaniyar et Langa du désert du Thar et avec trois, quatre ou cinq notes. C’est géné- de la région de Jodhpur, princiers, insolents ralement une forme brève, un chant simple et de beauté et de virtuosité, possèdent la austère. On l’interprète a cappella. Cepen- majesté de leur environnement : le Rajasthan dant, il arrivait parfois qu’il soit accompagné (mot sanskrit signifiant Pays des princes). d’instruments de percussions : clochette, Cette définition s’applique aussi aux jeunes hochet ou cymbales. Son rythme est libre, enfants de ces castes d’artistes qui portent varié, et repose sur une structure simple. Sa déjà en eux l’une des traditions les plus densité est telle qu’il envoûte l’auditeur. brillantes du continent indien. Ghada Shbeir est née au Liban. À dix-sept L’ensemble Chota Divana (textuellement les ans, elle commence son apprentissage musi- petits Divanas, en référence à l’ensemble cal et intègre peu après l’université libanaise Divana formé, lui, d’adultes) fit son apparition du Saint-Esprit de Kaslik (USEK). Quatre ans dans le cadre de la célébration de l’an 2000. plus tard, elle obtient son diplôme. Tandis Cette année-là, le public français découvrait, qu’elle suit des cours de chant, elle participe notamment au Théâtre des Abbesses, ces aussi à des concerts internationaux et inter- enfants habités par cette brillance des yeux et prète chants traditionnels et religieux. Elle est des mots, par des vocalises suraiguës tentant diplômée de chant et de musicologie de de se frayer un chemin dans le labyrinthe l’USEK. Elle enseigne au sein de cette univer- d’une connaissance musicale complexe. Ces sité ainsi qu’au Conservatoire national et par- jeunes chanteurs, âgés alors d’une douzaine court le monde. De la Pologne au Canada en d’années, accompagnés de leurs aînés et passant par l’Italie et la Grande-Bretagne, elle maîtres, ont charmé par leur virtuosité offre ce chant hiératique, sobre et dépouillé. espiègle et leur maîtrise de leur art, le public Sa voix nue éclate dans toute sa pureté et du Théâtre des Abbesses. séduit d’emblée. Elle emporte l’âme dans une Cette saison, de nouveaux enfants viendront à sorte d’extase sacrée. leur tour déclamer l’effervescence poétique Le répertoire syriaque est composé de chants de ces chants qui peuplent toujours l’exis- brefs, certains durent moins d’une minute. Il tence rituelle et cyclique d’une vie qui s’étend à un éventail de traditions religieuses s’abreuve encore au rythme de la nature, de la chrétiennes : les rites maronite, orthodoxe, terre et des divinités. catholique, chaldéen et byzantin. Un chant De l’ancienne formation, seul le jeune Gazi profond qui invite au recueillement, procure la Khan Junior reviendra. Adolescent à l’époque, paix intérieure et réjouit l’âme. J. E. jeune adulte aujourd’hui, il suit les traces de son père décédé dans les années 80, Bungar Khan, considéré et adulé comme le plus grand chanteur de la caste des Man- ghaniyars. L’art du jeune Gazi Khan a atteint , ph. X. DR une étonnante maturité et, entouré de ses aînés, il s’impose aujourd’hui comme un futur grand maître. Il s’est imprégné des tech- Ghada Shbeir niques vocales hallucinantes de son père ; sa voix en parfaite osmose avec le kamanchiya (la vièle des Manghaniyars) ou l’harmonium, s’élève, sinueuse et saccadée. Alain Weber

SAM. 19 NOV. 17H GHADA SHBEIR chants syriaques Liban

L’EXTASE SACRÉE Le syriaque appartient à la même famille que l’araméen. Du IIIe au XIIIe siècle, il devint la langue littéraire chrétienne. Ancien, son chant précède cependant l’avènement du christia- nisme. Il ne s’inscrit ni dans la tradition musi- cale arabe ni dans celle du chant grégorien. semble avec lequel il effectue des tournées, a fondé une société d’édition et de diffusion de musique traditionnelle en 1995, et, en 1997, a ouvert une école pour encourager les jeunes , ph. M. Karroubi à perpétuer et enrichir le patrimoine. « Je sais que parmi mon peuple, je suis écouté », chante Ashiq Hassan. Une parole qui passera Ashiq Hassan les frontières pour venir jusqu’à nous. J. M.

SAM. 4 MARS 17H ET LUN. 6 MARS 20H30 LJILJANA BUTTLER “The mother of Gypsy soul” MOSTAR SEVDAH REUNION Ilijaz Delic chant SAM. 21 JAN. 17H avec guitares, accordéon, clarinette, violon, percussions Bosnie ASHIQ HASSAN Azerbaïdjan iranien Ashiq Hassan Eskandari chant, sâz À soixante ans passés, “Lilli” Buttler est la Ashiq Ashraf Hosseinpour chant, sâz figure incandescente du sevdah, genre popu- Salman Pourmohammad bâlâban laire emblématique de l’ex-Yougoslavie, art de Ali Gharadâghi dâyrâ vivre et de sentir, à la fois blues et rythm & blues. Adulée dans son pays, cette grande On connaît la république d’Azerbaïdjan qui revient de loin ! s’étend au sud-ouest de la mer Caspienne et Née à Belgrade d’un accordéoniste virtuose sur une partie du Caucase. On connaît moins et d’une chanteuse croate, la « Reine du blues l’Azerbaïdjan iranien, province située au nord- de Mostar » est gitane. Elle joue même du ouest de l’Iran, là où les frontières culturelles piano, chante très tôt, et pieds nus : c’est dans avec son voisin du même nom sont restées sa nature. Cesaria Evora, qu’elle surpasse en poreuses. Province atypique, l’Azerbaïdjan charisme, a célébré la morna ; “Lilli” Buttler iranien possède, au côté du persan, sa propre nous entraîne dans le maelström coloré du langue, l’azéri. Elle est aussi terre des bardes sevdah. âshiqs. Ces musiciens itinérants, conteurs Chez elle, l’amour, l’humour et la tragédie ne d’épopées et de légendes, dastan, jouent un font qu’un. Pressentant le désastre à venir, elle rôle social important : ils annoncent les nou- s’installe en Allemagne avec ses filles. L’idole velles, participent aux festivités et autres de toute la Yougoslavie des années 70, que grands événements de la vie. l’on connaissait sous le nom de Ljiljana Shiq vient de l’arabe qui signifie “amoureux”. Petrovic, disparaît de la scène pendant dix Pas étonnant que ces poètes aiment chanter ans, vivant de menus travaux pour survivre. la nature et les amours, possibles et impos- Un jeune admirateur bosniaque recherche sa sibles. Accompagnés au sâz (luth de 8 à 12 trace pendant deux ans et la convainc d’enre- cordes), au bâlâban (sorte de clarinette), au gistrer un CD à Mostar, port adriatique dont dâyrâ (percussion), ils sont une mémoire elle aimait le pont médiéval alors reconstruit, vivante dont on retrouvera l’écho sur la scène et où elle vécut. du Théâtre de Ville. La paix revenue, “Lilli” retourne régulièrement Ashiq Hassan Eskandari, qui a donné son au pays où personne ne l’a oubliée, jusque nom à l’ensemble, sera de ceux-là. Né en dans les kafanas de Belgrade, ces cafés – 1947, il gagne, encore enfant, Tabriz, la capi- restaurants prisés où l’on danse tard dans la tale de la province, pour devenir tisserand. nuit. Elle apparaît toute en rondeur, presque Mais l’envie d’apprendre le chant le conduit à langoureuse, ses yeux étincelant. Sa voix Téhéran où, deux ans durant, il travaille androgyne et sensuelle nous rappelle celle de comme boulanger pour payer ses études la Grecque Sotiria Bellou et de son vague à musicales. En 1970, sa vie familiale le ramène l’âme. Ses fins de phrases en soupirs évo- à Tabriz où il peut enfin se consacrer à ce qui quent l’envoûtante Oum Kalsoum. Tant d’émo- est devenu sa raison de vivre : l’art des bardes tion à fleur de peau nous fait revivre aussi le âshiqs. Depuis, il a créé, en 1985, un en- monde de Billie Holliday. C.L. ph. X. DR Ljiljana Buttler, SAM. 11 MARS 17H Considéré comme une légende vivante, cette belle âme demeure pourtant trop mésestimée USTAD BARE FATEH ALI KHAN dans son pays. Refusant un exil économique chant classique Pakistan souvent proposé, Ustad Bare Fateh Ali Khan 4 musiciens bataille contre la disparition progressive de la sagesse musicale hindoustanie, essayant non Dernier musicien de la cour du maharadjah seulement de la transmettre au mieux, mais de Patiala, incarnation vive de la flamboyance aussi de la prolonger, de l'élargir vers de nou- du khyal, brillantissime compositeur-interprète veaux horizons. Ses deux fils tentent de de Ragas and Saagas – album qui aura mar- prendre le relais mais la modernité environ- qué bien des âmes vagabondes –, Ustad Bare nante peut être si fracassante... Fateh Ali Khan nous offre un concert au Ne manquez pas cette occasion rare – seul Théâtre des Abbesses. concert français, et peut-être européen Place donc au génie vocal ! Si Ragas and – d'apprécier une voix, une présence Saagas – conçu notamment avec le saxopho- d'exception. P.-A. B. niste Jan Garbarek – indiquait l'à-propos contemporain du Maître, l'axe essentiel de son art demeure ce khyal dont il évoquera avec bonheur quelques arcanes veloutés. Un des rarissimes vieux maîtres encore en vie , ph. S. Kia (et quelle vie ! Quel éclair dans son sourire ! Quelle vitalité dans son regard !), Ustad Bare Fateh Ali Khan incarne à la perfection les brillantes heures de la Patiala gharana, une des principales écoles du chant classique hindoustani... issue de l'exil amoureux de son UstadAli Khan Bare Fateh arrière-grand-père Mian Kalu ! Cette école incorpore dans un saisissant maelström le style lyrique de Delhi, l'impulsivité de Gwalior, la saveur “dhrupadie” de Jaïpur, les taan-s tout en spirale de Rewa... Tout en s'appro- priant l'empreinte des musiques populaires punjabies et celles d'autres régions de l'Inde du Nord... Génie ! ph. X. DR Salar Aghili,

SAM. 18 MARS 17H ensemble de six jeunes musiciens, tous amis d’enfance. Fait exceptionnel en Iran, il regrou- SALAR AGHILI chant Iran pait une majorité de femmes et une seule voix Hamed Fakouri târ masculine, celle de Salar Aguili, épousant à Shervine Mohajer kamantché merveille les modulations du sétâr. Mohsen Sadeghi ney À 28 ans, cet ancien élève de Mohammad Harir Shariat Zadeh daf Reza Shadjarian au conservatoire de Téhéran où il enseigne à son tour, chante avec autant Que ceux qui douteraient encore de la vitalité de plaisir les grands classiques de la poésie de la tradition classique persane se rassurent : persane, Hafez et Rumi, que les contempo- une nouvelle génération de musiciens prend rains, Forough Farrokhzad et Akhavahe Salès. la relève de leurs brillants aînés. En té- À 21 ans, il créait déjà un ensemble, Raz o moignent Salar Aguili et les quatre instrumen- Niaz, avec lequel il parcourt l’Europe. tistes qui l’entoureront lors de ce concert Avec lui : au târ (luth à manche court), Hamed unique. Les cinq trublions ont bien des points Fakouri, un ancien élève de Dariush Tala’i, communs : une solide formation acquise Lotfi et Hossein Alizadeh ; au kamantché (vièle auprès des plus grands maîtres, une fidèle à archet), Shervine Mohajer, un jeune virtuose amitié qui les unit depuis leur adolescence, prometteur ; au ney, cette flûte de roseau si l’audace et l’énergie d’une jeunesse – ils ont chère au poète Rumi, Mohsen Sadeghi ; au tous moins de 30 ans – qui les poussent à daf (grand tambourin), Harir Shariat Zadeh, bousculer les règles de la tradition et à tirer épouse de Salar Aguili, déjà présente en 2002 profit des fructueuses rencontres musicales avec le groupe Âvâyé Douste. effectuées hors de leur pays natal. Jeunesse, harmonie et sensibilité pour un En 2002, le Théâtre de la Ville présentait concert raffiné. J. M. Âvâyé Douste (la mélodie de l’ami), un , ph. X. DR Ensemble Ibn Arabi Ensemble Ibn

LUN. 27 MARS 20H30 ENSEMBLE IBN ARABI Maroc chant, qânoun, oud, ney, violon, bendir Ahmed El Kheligh direction musicale

LA VOIE DE L’AMOUR Le Maroc est un royaume où se perpétuent les traditions. L’Ensemble Ibn Arabi conjugue deux d’entre elles qui se mêlent dans le creu- set de la musique : l’une, soufie, relève de la A.ph. Froots Magazine UK2003 Cronchaw, mystique, l’autre, arabo-andalouse, de la

musique dite “classique”. Ainsi distille-t-il une Lui Fang, musique subtile et raffinée. Le nom de la formation évoque un illustre soufi chrétienne. Depuis la dynastie des Tang (618- des XIIe et XIIIe siècles que ses pérégrinations 907), inscrit dans un ensemble ou soliste, il ont conduit de l’Espagne, où il naquit, à la conserve sa popularité. Caisse en forme de Syrie où il expira. Et c’est à partir du lieu de poire et manche court, tendu de quatre rencontre des adeptes d’une confrérie, une cordes, il compte trente frettes. Son jeu zaouia affiliée à la confrérie darqawiya, que requiert une grande dextérité : la main droite s’est constitué l’Ensemble. dont chaque doigt est armé d’un plectre Outre les noubas, longues suites instrumen- gratte les cordes, la main gauche court sur le tales et vocales, le patrimoine arabo-andalou manche et crée effets de tonalité et nuances. recèle bien d’autres trésors transmis ora- La maîtrise technique permet une virtuosité à lement au fil du temps : style original de canti- caractère descriptif. Le répertoire de cette lation du Coran, chants à la gloire d’Allah et musique de divertissement, transmis de du Prophète, ainsi que ceux propres aux maître à élève au fil des siècles, se partage zaouia. L’Ensemble Ibn Arabi puise dans ce entre la musique dite « militaire » – elle décrit répertoire et interprète des pièces chantées avec vigueur les combats légendaires – et la au sein des zaouia dont les textes, des musique dite « littéraire » – elle s’inspire de poèmes, sont l’œuvre de célèbres soufis : Ibn poésie, de drames historiques et de pay- Arabi, bien sûr, mais aussi, Ibn Al Faridh, Al sages. La nature n’est-elle pas la muse Shushtari, Al Harraq, ou encore Rabia Al éternelle des artistes chinois ? Clair de lune Adawiya… En guise d’introduction à ces sur la rivière ou canards barbotant dans l’eau chants, il offre des improvisations instrumen- froide, Liu Fang crée des paysages sonores tales (taqsim) et des pièces vocales non ryth- quasi cinématographiques. Et c’est à la pein- mées en solo (mawwal). ture qu’elle se réfère pour expliquer le silence : Les six membres de la formation (ney, oud, « Dans la peinture chinoise, il y a des espaces qânoun, violon, bendir et chant) ont fréquenté vides qui concourent à l’harmonie. Ils per- la même zaouia de Tanger et divers conserva- mettent au spectateur de s’inscrire dans le toires marocains. Certains ont étudié la théo- tableau. C’est comme un dialogue. Ainsi, logie. Directeur musical de l’Ensemble, dans la musique, les vides sont l’espace lais- Ahmed El Kheligh est une référence, la voix sé entre les notes et on réalise que le silence des musiques et chants soufis à Radio est plein de musique ». Méditerranée internationale. Tous artistes Liu Fang joue aussi du guzheng, une cithare accomplis, ils ont visité divers pays dont la sur table, tendue de vingt et une cordes, e Libye et l’Inde et partagé le pain de l’amour : devenue, depuis le XIX siècle, un instrument « L’amour n’est rien, s’il n’est pas celui qui soliste. Sa main droite pince les cordes avec anéantit », écrivait Ibn Al Faridh. Des mots un plectre, la gauche les touche produisant que chante aujourd’hui la voix suave du jeune ainsi la hauteur voulue et une variété de Abdellah al Mansour El Kheligh dans la pléni- timbres. tude de son art. J. E. Talent précoce, Liu Fang, née à Kumming, province du Yunnan (Chine méridionale), donne son premier concert dès l’âge de neuf LUN. 8 MAI 20H30 ans. Diplômée du conservatoire de Shangaï en 1993, elle a dix-sept ans et choisit de vivre LIU FANG pipa, guzheng Chine au Canada. Elle poursuit depuis lors une car- rière internationale et offre ainsi les joyaux de LE CHANT DE L’ÂME la musique classique traditionnelle chinoise. Dans sa musique, il y a la turbulence des Son jeu brillant dérive de la douce floraison sons, les tempêtes d’accords et l’éloquence des tons aigus du pipa à l’orage de ces du silence. Et « derrière chaque note, il y a courses éclatantes dont l’intensité, dit-on, l’âme », dit Liu Fang. On ne saurait mieux affir- arracherait des larmes à un maître du mer la profondeur de son art. Celui du pipa, flamenco ! J. E. luth sans doute venu de Perse et mentionné déjà dans des textes deux siècles avant l’ère Ce jour-là, c’est l’heure du qat, ces feuilles légèrement euphorisantes mâchées tout au ph. X. DR long de l’après-midi. Au siège de l’association culturelle locale, c’est aussi le temps de la musique. L’atmosphère est lourde et chargée d’humidité. Un homme appartenant à la tribu

Kadri Golpalnath, des Akhdâm, située au plus bas de la hiérar- chie sociale, Sa’d Al-Yamani, interprète à voix nue un chant des parias, hobari, en une sorte de parler-chanter. Puis deux compères, que l’on dirait tout droit sortis d’un conte oriental, Hâmili’Ubayd Uthman et Yahya Habal, nouent un subtil dialogue : voix et flûte du berger se répondent. C’est le matwah, musique délicate et raffinée. Enfin, un soliste, auquel répond un chœur de quatre voix, offre quelques joyaux du shalla, ces chants d’amour courtois interprétés a cappella. Un répertoire que l’on entend, entre autres, lors des fêtes de mariage. Trois styles, puisés au cœur de la Tihama, que ces huit artistes yéménites offriront au public du Théâtre des Abbesses. J. E.

SAM. 13 MAI 17H KADRI GOPALNATH saxophone, musique carnatique

Kanyakumari violon Inde du Sud , photos J. Erwan accompagné au thavil et à la guimbarde

Fils d’un joueur de nadaswaram (hautbois des temples du Sud), Kadri Gopalnath découvre l’existence du saxophone en 1964 en assis- Tihama chants de la tant à un concert de l’orchestre privé du maharadjah de Mysore, dans l’État du Karnataka dont il est originaire. Le son le charme, la forme l’intrigue, d’autant plus qu’il ne connaît pas le nom de ce petit monstre mystérieux. Pris de passion, il se le procure six mois plus tard. Mais comment utiliser les clés alors qu’aucun instrument indien n’en possède ? L’adolescent têtu doit tout réinven- ter et passe trois années à maîtriser ses gammes sur une centaine de raga-s, sa mère lui prédisant qu’il va en mourir. Depuis, se faisant d’abord apprécier en jouant dans des temples et des petits cercles musi- caux, Kadri a fait du chemin. Cet homme affable, aux yeux volontiers rieurs et pétillants de bonheur, bouge comme un diablotin: on voit qu’il aime la vie, qu’il la prend d’instinct à bras le corps. Aimé et respecté des musiciens traditionnels, il sait toucher toutes les géné- rations par sa présence, son sens de l’inven- tion, sa science rythmique évolutive et un son à la chaleur dorée. Les anciens reconnaissent son adhésion aux canons essentiels de la musique carnatique, avec sa vue élevée et universelle ; les jeunes s’enthousiasment à entendre la musique de leurs aînés suivre les chemins de la modernité. Devenu célèbre, Kadri se produit avec la violoniste Kanyakumari qu’on a pu déjà entendre au Théâtre de la Ville avec son ensemble instru- mental Vadya Lahari, en compagnie d’une veena et d’un… nadaswaram, justement ! C.L.

LUN. 12 JUIN 20H30 CHANTS DE LA TIHAMA Yémen DES TRADITIONS VIVANTES À l’ouest du Yémen, la province de la Tihama s’étend jusqu’aux rives de la mer Rouge. Fondé au XIIIe siècle, Bayt Al-Faqih est un gros bourg. Il abrite un marché connu des ama- teurs de café du monde entier depuis le début du XVIIIe siècle. NOVEMBRE 2005 calendrier THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h MA 1 ME 2 Koen Augustijnen JE 3 Koen Augustijnen SEPTEMBRE 2005 VE 4 Koen Augustijnen THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES SA 5 Quatuor Tetzlaff 17h 20h30 20h30 Koen Augustijnen LU 12 DI 6 MA 13 LU 7 Ea Sola ME 14 MA 8 Ea Sola JE 15 ME 9 Ea Sola Marcia Hesse VE 16 Girija Devi JE 10 Ea Sola Marcia Hesse SA 17 Chaurasia VE 11 Marcia Hesse DI 18 Girija Devi / Chaurasia 11h SA 12 Chota Divana 17h Marcia Hesse LU 19 DI 13 MA 20 LU 14 Chota Divana ME 21 William Burroughs… MA 15 Garry Stewart/ADT Marcia Hesse JE 22 William Burroughs… ME 16 Garry Stewart/ADT Marcia Hesse VE 23 William Burroughs… JE 17 Garry Stewart/ADT Marcia Hesse SA 24 William Burroughs… VE 18 Garry Stewart/ADT Marcia Hesse DI 25 SA 19 Dezsö Ránki 17h Ghada Shbeir 17h LU 26 Garry Stewart/ADT Marcia Hesse MA 27 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… DI 20 Marcia Hesse ME 28 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… LU 21 JE 29 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… MA 22 Maguy Marin Marcia Hesse VE 30 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… ME 23 Maguy Marin Marcia Hesse JE 24 Maguy Marin Marcia Hesse VE 25 Maguy Marin Marcia Hesse SA 26 Ikhwani Safaa 17h Kuijken/Demeyere 17h OCTOBRE 2005 Maguy Marin Marcia Hesse THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES DI 27 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h LU 28 SA 1 G. Shaham/I. Golan 17h Homayoun 17h MA 29 Wim Vandekeybus Preljocaj 1er prog. William Burroughs… ME 30 Wim Vandekeybus Mère & Fils DI 2 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… LU 3 MA 4 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… DECEMBRE 2005 ME 5 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES JE 6 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… VE 7 Preljocaj 1er prog. William Burroughs… 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h SA 8 Mehr et Sher Ali 17h Bousková/Langlamet 17h JE 1 Wim Vandekeybus Mère & Fils Preljocaj 1er prog. William Burroughs… VE 2 Wim Vandekeybus Mère & Fils DI 9 SA 3 Café Zimmermann 17h LU 10 Wim Vandekeybus Mère & Fils MA 11 A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero DI 4 Mère & Fils ME 12 A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero LU 5 JE 13 A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero MA 6 Odile Duboc Mère & Fils VE 14 A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero ME 7 Odile Duboc Mère & Fils SA 15 K. Chakrabarty 17h K. Rosenwinkel 17h JE 8 Odile Duboc Mère & Fils A. Khan/S. L. Cherkaoui R.Orlin / V. Mantero VE 9 Odile Duboc DI 16 A. Khan/S. L. Cherkaoui SA 10 F. Biondi/K. Weiss 17h Conservatoire supérieur de Paris LU 17 Odile Duboc MA 18 La Visite de la vieille dame DI 11 ME 19 La Visite… LU 12 Mère & Fils JE 20 Lloyd Newson/DV8 La Visite… MA 13 Mère & Fils VE 21 Lloyd Newson/DV8 La Visite… ME 14 Mère & Fils er SA 22 Lloyd Newson/DV8 JE 15 Sankai Juku 1 prog. Mère & Fils Lloyd Newson/DV8 La Visite… VE 16 Sankai Juku 1er prog. Mère & Fils DI 23 La Visite… SA 17 Sankai Juku 1er prog. Mère & Fils LU 24 Lloyd Newson/DV8 DI 18 Sankai Juku 1er prog. MA 25 Lloyd Newson/DV8 La Visite… LU 19 ME 26 Lloyd Newson/DV8 La Visite… MA 20 Sankai Juku 1er prog. JE 27 Lloyd Newson/DV8 La Visite… ME 21 Sankai Juku 1er prog. VE 28 Lloyd Newson/DV8 La Visite… JE 22 SA 29 Lloyd Newson/DV8 La Visite… VE 23 répétitions et montage DI 30 La Visite… SA 24 Getting Attention LU 31 DI 25 DÉCEMBRE 2005/ suite THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES LU 26 HORS OCTOBRE 2005 MA 27 Sankai Juku 2e prog. PARIS-VILLETTE ME 28 Sankai Juku 2e prog. LES 20h30 mat 16 h JE 29 Sankai Juku 2e prog. répétitions et montage MURS MA 4 Toto le Mômo VE 30 Sankai Juku 2e prog. Getting Attention ME 5 Toto le Mômo SA 31 JE 6 Toto le Mômo VE 7 Toto le Mômo SA 8 Toto le Mômo DI 9 LU 10 MA 11 Toto le Mômo ME 12 Toto le Mômo JE 13 Toto le Mômo JANVIER 2006 VE 14 Toto le Mômo THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES SA 15 Toto le Mômo 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h DI 16 Toto le Mômo DI 1 LU 17 LU 2 MA 18 Toto le Mômo MA 3 ME 19 Toto le Mômo ME 4 JE 20 Toto le Mômo JE 5 VE 21 Toto le Mômo VE 6 répétitions et montage SA 22 Toto le Mômo répétitions et montage Getting Attention SA 7 Rhinocéros DI 8 LU 9 MA 10 Getting attention NOVEMBRE 2005 ME 11 Getting attention CENTRE POMPIDOU JE 12 Rhinocéros Getting Attention 20h30 VE 13 Rhinocéros Getting attention ME 9 Emio Greco/Hanspeter Kyburz SA 14 Farida Parveen 17h JE 10 Emio Greco/Hanspeter Kyburz Rhinocéros Getting attention VE 11 Emio Greco/Hanspeter Kyburz DI 15 Rhinocéros LU 16 MA 17 Rhinocéros Getting attention ME 18 Rhinocéros Getting attention JE 19 Rhinocéros Getting attention VE 20 Rhinocéros Getting attention SA 21 Takács/Muzsikás… 17h Ashiq Hassan 17h JANVIER 2006 Rhinocéros Getting attention CITÉ INTERNATIONALE DI 22 Rhinocéros Getting attention 20h30 LU 23 U. Shafi Mohammad Faqir JE 5 Peeping Tom MA 24 Rhinocéros Getting attention VE 6 Peeping Tom ME 25 Rhinocéros Getting attention SA 7 Peeping Tom JE 26 Rhinocéros Getting attention DI 8 VE 27 Getting attention LU 9 Peeping Tom SA 28 Al-Kindî 17h Céline Frisch 17h MA 10 Peeping Tom Getting attention DI 29 CENTRE POMPIDOU LU 30 MA 31 Antoine et Cléopâtre Llanto… 20h30 mat 17 h ME 25 Rachid Ouramdane JE 26 Rachid Ouramdane VE 27 Rachid Ouramdane SA 28 Rachid Ouramdane DI 29 Rachid Ouramdane

en noir = théâtre, danse en rouge = musique FEVRIER 2006 MARS 2006/ suite THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h ME 1 Antoine et Cléopâtre Llanto… LU 27 Bang on a can all-stars Ensemble Ibn Arabi JE 2 Antoine et Cléopâtre Llanto… MA 28 L’heure … Illuminations VE 3 Antoine et Cléopâtre Llanto… ME 29 L’heure … Illuminations SA 4 Antoine et Cléopâtre Llanto… JE 30 L’heure … Illuminations DI 5 Llanto… VE 31 L’heure … Illuminations LU 6 MA 7 Llanto… ME 8 Llanto… JE 9 Llanto… AVRIL 2006 VE 10 répétitions Alain Platel Llanto… THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES SA 11 Llanto… 20h30 mat 15 h 20h30 DI 12 SA 1 Chatterjee/Ramnath 17h Filomena Moretti 17h LU 13 Maria-Kiran/C. Brizi L’heure … Illuminations… MA 14 Maria-Kiran/C. Brizi DI 2 ME 15 LU 3 JE 16 Alain Platel MA 4 Preljocaj 2e prog. VE 17 Alain Platel ME 5 Preljocaj 2e prog. SA 18 Alain Platel répétitions JE 6 Preljocaj 2e prog. Katherine Barker Conservatoire DI 19 Alain Platel VE 7 Preljocaj 2e prog. supérieur de Paris LU 20 Ensemble Shoghaken SA 8 Preljocaj 2e prog. MA 21 Alain Platel Katherine Barker DI 9 Preljocaj 2e prog. ME 22 Alain Platel Katherine Barker LU 10 JE 23 Alain Platel Katherine Barker MA 11 Preljocaj 2e prog. A. Valli/M. Mudgal VE 24 Alain Platel Katherine Barker ME 12 Preljocaj 2e prog. A. Valli/M. Mudgal SA 25 Ensemble Shams 17h JE 13 Preljocaj 2e prog. A. Valli/M. Mudgal Alain Platel Katherine Barker VE 14 Preljocaj 2e prog. A. Valli/M. Mudgal DI 26 SA 15 Preljocaj 2e prog. A. Valli/M. Mudgal LU 27 DI 16 MA 28 Marie Chouinard Katherine Barker LU 17 MA 18 ME 19 JE 20 VE 21 répétitions Face de cuillère MARS 2006 SA 22 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES DI 23 LU 24 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h MA 25 Cherkaoui/Jalet… ME 1 Marie Chouinard Katherine Barker ME 26 Cherkaoui/Jalet… Face de cuillère JE 2 Marie Chouinard Katherine Barker JE 27 Cherkaoui/Jalet… Face de cuillère VE 3 Marie Chouinard Katherine Barker VE 28 Cherkaoui/Jalet… Face de cuillère SA 4 3 concerts en 1 15h Ljiljana Buttler 17h Marie Chouinard Katherine Barker SA 29 Truls Mørk/Kathryn Stott 17h Cherkaoui/Jalet… Face de cuillère DI 5 DI 30 LU 6 Wayn Traub 1er prog. Ljiljana Buttler MA 7 Wayn Traub 1er prog. Katherine Barker ME 8 Wayn Traub 2e prog. Katherine Barker JE 9 Katherine Barker VE 10 Wayn Traub 3e prog. Katherine Barker SA 11 M. Perényi / D. Várjon 17h U. B. Fateh Ali Khan 17h Wayn Traub 3e prog. Katherine Barker MAI 2006 DI 12 Katherine Barker THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES LU 13 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h MA 14 LU 1 ME 15 Meg Stuart MA 2 Face de cuillère JE 16 Meg Stuart Illuminations… ME 3 Jan Lauwers Face de cuillère VE 17 Meg Stuart Illuminations… JE 4 Jan Lauwers Face de cuillère SA 18 Zimmermann/Zacharias 17h Salar Aghili 17h VE 5 Jan Lauwers Face de cuillère Meg Stuart Illuminations… SA 6 Jan Lauwers Face de cuillère DI 19 Illuminations… DI 7 Face de cuillère LU 20 LU 8 Liu Fang MA 21 Illuminations… MA 9 Face de cuillère ME 22 L’heure… Illuminations… ME 10 Sasha Waltz Face de cuillère JE 23 L’heure… Illuminations… JE 11 Sasha Waltz Face de cuillère VE 24 L’heure… Illuminations… VE 12 Sasha Waltz Face de cuillère SA 25 Nassima 17h SA 13 K. Gopalnath 17h L’heure… Illuminations… Sasha Waltz Face de cuillère DI 26 L’heure… DI 14 Face de cuillère MAI 2006/ suite THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h 20h30 mat 15 h LU 15 Kronos Quartet HORS MARS 2006 MA 16 Sasha Waltz Face de cuillère CITÉ INTERNATIONALE ME 17 Sasha Waltz Face de cuillère LES 20h30 mat 15 h JE 18 Sasha Waltz Face de cuillère MURS JE 2 François Verret VE 19 Sasha Waltz Face de cuillère VE 3 François Verret SA 20 Midori/ R. McDonald 17h Sasha Waltz Face de cuillère SA 4 François Verret DI 21 DI 5 LU 22 LU 6 François Verret MA 23 Grace Ellen Barkey Mercedes Ruiz MA 7 François Verret ME 24 Grace Ellen Barkey Mercedes Ruiz ME 8 JE 25 Jan Lauwers/Needlapb Mercedes Ruiz JE 9 François Verret VE 26 Mercedes Ruiz VE 10 François Verret SA 27 Mercedes Ruiz SA 11 François Verret Conservatoire DI 12 DI 28 supérieur de Paris LU 29 LU 13 MA 30 De Keersmaeker Jan Fabre MA 14 Josef Nadj ME 31 De Keersmaeker Jan Fabre ME 15 JE 16 Josef Nadj VE 17 Josef Nadj SA 18 Josef Nadj DI 19 Josef Nadj JUIN 2006 LU 20 Josef Nadj THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES MA 21 Josef Nadj ME 22 20h30 20h30 mat 15 h JE 23 Josef Nadj JE 1 De Keersmaeker Jan Fabre VE 24 Josef Nadj VE 2 De Keersmaeker Jan Fabre SA 25 Josef Nadj SA 3 De Keersmaeker Jan Fabre DI 26 Josef Nadj DI 4 LU 27 LU 5 Rajan et Sajan Misra MA 28 MA 6 De Keersmaeker Gallotta/ B. de Lorraine ME 29 ME 7 De Keersmaeker Gallotta/ B. de Lorraine JE 30 Christian Rizzo JE 8 De Keersmaeker Gallotta/ B. de Lorraine VE 31 Christian Rizzo VE 9 De Keersmaeker Gallotta/ B. de Lorraine SA 10 De Keersmaeker Gallotta/ B. de Lorraine DI 11 Gallotta/ B. de L. AVRIL 2006 LU 12 Chants de la Tihama CITÉ INTERNATIONALE MA 13 Gallotta/ B. de Lorraine 20h30 ME 14 Gallotta/ B. de Lorraine SA 1 Christian Rizzo JE 15 Gallotta/ B. de Lorraine DI 2 VE 16 Gallotta/ B. de Lorraine LU 3 Christian Rizzo SA 17 Pina Bausch Gallotta/ B. de Lorraine MA 4 Christian Rizzo DI 18 Pina Bausch 17h LU 19 Ensemble de Malouf MA 20 Pina Bausch ME 21 Pina Bausch MARS 2006 JE 22 Pina Bausch THEÂTRE DE LA BASTILLE VE 23 Pina Bausch Conservatoire supérieur de Paris SA 24 Pina Bausch 21h DI 25 ME 29 Boris Charmatz LU 26 Pina Bausch JE 30 Boris Charmatz MA 27 Pina Bausch Priyadarsini Govind VE 31 Boris Charmatz ME 28 Pina Bausch Priyadarsini Govind JE 29 Pina Bausch Priyadarsini Govind AVRIL 2006 VE 30 Priyadarsini Govind THEÂTRE DE LA BASTILLE 21h SA 1 Boris Charmatz DI 2 LU 3 Boris Charmatz JUILLET 2006 MA 4 Boris Charmatz THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES ME 5 Boris Charmatz 20h30 20h30 JE 6 Boris Charmatz SA 1 Pina Bausch VE 7 Boris Charmatz DI 2 Pina Bausch 17h SA 8 Boris Charmatz LU 3 Pina Bausch MA 4 Pina Bausch prix des places • programme distribué par les hôtesses • pourboire interdit l’équipe • places numérotées (sauf exception) TARIF A théâtre, danse NORMAL 1re cat. 23 e 2e cat. 16 e Gérard Violette directeur re e Brigitte Giuliani assistante de direction JEUNES 1 et 2 catégorie ...... 11,5 e

ADMINISTRATION Michael Chase administrateur TARIF B théâtre, danse Marie-Christine Chastaing chef service paie NORMAL 1re cat. 26 e 2e cat. 17 e Solen Le Guen adjointe de l'administrateur JEUNES 1re et 2e catégorie ...... 13 e ARTISTIQUE Serge Peyrat directeur adjoint à la programmation TARIF C hors les murs Antoine Violette directeur technique NORMAL 17/14 e à la communication 1 seule catégorie...... Jacques Erwan conseiller musiques du monde JEUNES 1 seule catégorie.... 11,5/9,5 e Georges Gara conseiller musique Soudabeh Kia conseillère musiques du monde TARIF D COMMUNICATION Anne-Marie Bigorne secrétaire générale musique, musiques du monde, chanson Jacqueline Magnier relations presse, publicité NORMAL 1 seule catégorie...... 16 e et documentation Marie-Laure Violette relations presse, iconographie JEUNES 1 seule catégorie...... 11,5 e Elisa Santos invitations

RELATIONS AVEC LE PUBLIC TARIF exceptionnel Lydia Gaborit responsable du service NORMAL 1re cat. 30 e 2e cat. 23 e Florence Thoirey-Fourcade re e Corinne Soulié JEUNES 1 et 2 catégorie...... 23 e

RELATIONS PUBLIQUES "JEUNES" (étudiants, enseignement…) JEUNES : moins de 27 ans ou étudiant Isabelle-Anne Person responsable du service (justificatif obligatoire) Maud Rognion

LOCATION Marie Katz responsable du service Ariane Bitrin location ACCUEIL Natacha Reese responsable du service COMMENT RÉSERVER ? ACCUEIL DES ABBESSES (artistes et public) Delphine Dupont responsable du service • par téléphone 01 42 74 22 77 TECHNIQUE du lundi au samedi de 11h à 19h Serban Boureanu directeur technique Jean-Michel Vanson directeur technique adjoint aux caisses : Jean-Marie Marty régisseur général • Claude Lecoq directeur de scène THEATRE DE LA VILLE Jean-Claude Paton sous-chef machiniste Manuel Sanchez chef cintrier 2 place du Châtelet, Paris 4 Frédéric Duplessier chef électricien Charles Deligny sous-chef électricien du mardi au samedi de 11h à 20h Didier Hurard chef accessoiriste (lundi de 11h à 19h) Pierre Tamisier chef service son Alain Frouin régisseur du son Victor Koeppel régisseur du son LES ABBESSES Marion Pépin chef habilleuse 31 rue des Abbesses, Paris 18 TECHNIQUE DES ABBESSES du mardi au samedi de 17h à 20h Alain Szlendak directeur technique Patrice Guillemot régisseur général Georges Jacquemart régisseur son • par correspondance :

ENTRETIEN SÉCURITÉ 2 pl. du Châtelet 75180 Paris Cedex 04 Jacques Ferrando chef de service Christophe Frade

IMPRIMERIE QUAND RÉSERVER ? Robert Ainaud LOCATION PRIORITAIRE ISSN 0248-8248 • DIRECTION, ADMINISTRATION : cartes places à 2, places aux jeunes : 16 quai de Gesvres 75180 Paris Cedex 04, Tél. : 01 48 87 54 42 directeur de la publication : Gérard Violette 28 jours à l'avance, jour pour jour maquette : Maurice et Juliette Constantin correcteur : Philippe Bloch (7 jours de location réservée) Imprimerie STIPA : 8 rue des Lilas 93189 Montreuil Cedex Tél. : 01 48 18 22 50 • LOCATION NORMALE 21 jours à l'avance, jour pour jour renseignements tél. 01 42 74 22 77 www.theatredelaville-paris.com individuels

les abonnements les abonnements individuels jeunes THEATRE-DANSE MOINS DE 27 ANS OU ÉTUDIANT * • 4 spectacles minimum THEATRE-DANSE •10 spectacles minimum •3 spectacles minimum PASSEPORT MUSICAL PASSEPORT MUSICAL • 8 places minimum, • 8 places minimum, 4 programmes minimum 4 programmes minimum tarifs préférentiels abonnement ABONNEMENT THEATRE-DANSE MUSIQUE… jeune jeune 4 spect. 10 spect. 3 spect. pass. mus. tarif normal tarif normal 1re catégorie 1re catégorie 1re catégorie catégorie unique 1re catégorie toutes catégories TARIF A 14,5 e 11,5 e 10 e - 23 e 11,5 e TARIF B 17 e 14 e 11,5 e - 26 e 13 e TARIF C 12,5 e 10,5 e 10 e - 17 e 11,5 e TARIF D 10 e 10 e 10 e 10 e 16 e 11,5 e TARIF EXC. 23 e 19,5 e 19,5 e - 30 e 23 e tarifs préférentiels hors abonnement 2 places à tarif préférentiel par abonné(e) sur tous les spectacles dans la limite des places disponibles. HORS ABONNEMENT THEATRE-DANSE MUSIQUE… jeune 4 spect. 10 spect. 3 spect. pass. mus. ttes catégories ttes catégories ttes catégories ttes catégories TARIF A 12,5 e 12,5 e 10 e 12,5 e TARIF B 14 e 14 e 11,5 e 14 e TARIF C 11,5 e 11,5 e 10 e 11,5 e TARIF D 10 e 10 e 10 e 10 e location 21 JOURS A L’AVANCE, JOUR POUR JOUR journal envoi à domicile du journal, 4 numéros par saison. librairie, disques tarifs préférentiels sur les disques et les livres.

la carte (22 e) la carte (8 e) places à 2 places aux jeunes1

tarifs préférentiels cartes 2 places à tarif préférentiel sur tous les spec- tacles dans la limite des places disponibles. CARTES THEATRE-DANSE-MUSIQUE jeune places à 2 places aux jeunes tarif normal tarif normal toutes catégories toutes catégories 1re/2e catégorie toutes catégories TARIF A 12,5 e 10 e 23/16 e 11,5 e TARIF B 14 e 11,5 e 26/17 e 13 e TARIF C 11,5 e 10 e 17 e 11,5 e TARIF D 10 e 10 e 16 e 11,5 e TARIF EXC. 23 e 19,5 e 30/23 e 23 e location prioritaire par correspondance : 5 SEMAINES, JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation ; par téléphone et aux caisses : 28 JOURS, JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation (7 jours de location réservée). journal envoi à domicile du journal, 4 numéros par saison. librairie, disques tarifs préférentiels sur les disques et les livres. 1 MOINS DE 27 ANS OU ÉTUDIANT: justificatif obligatoire relais

Vous devenez relais en prenant l'initiative de regrouper au minimum 10 per- sonnes intéressées à souscrire un abonnement au Théâtre de la Ville pour un minimum de 3 spectacles. Ces 10 personnes sont alors des abonnés relayés. Le relais a la possibilité de mêler public adulte et jeune dans un même abon- nement et ainsi de bénéficier des tarifs relais et relais jeunes.

les abonnements les abonnements relais relais jeunes MOINS DE 27 ANS OU ÉTUDIANT THEATRE-DANSE THEATRE-DANSE • 3 spectacles minimum, • 3 spectacles minimum, • 10 places minimum/spectacle 10 places minimum/spectacle PASSEPORT MUSICAL PASSEPORT MUSICAL • 3 programmes minimum, • 3 programmes minimum, • 10 places minimum/programme 10 places minimum/programme

tarifs préférentiels abonnement relais ABT RELAIS THEATRE-DANSE MUSIQUE pass. mus. jeune 3 spect. jeune 3 spect. pass. mus. jeune tarif normal tarif normal TARIF A 11,5 e 8 e --23 e 11,5 e TARIF B 14 e 8 e --26 e 13 e TARIF C 10,5 e 8 e --17 e 11,5 e TARIF D 10 e 8 e 10 e 8 e 16 e 11,5 e TARIF EXC. 19,5 e 19,5 e --30 e 23 e

Si le relais a communiqué les coordonnées de ses abonnés relayés : tarifs préférentiels hors abonnement relais L’abonné relayé peut demander aux services relations publiques une carte d’abonnement personnalisée lui donnant l’avantage suivant : 2 places à tarif préférentiel par abonné(e) sur tous les spectacles dans la limite des places disponibles. HORS relais relais jeunes ABONNEMENT toutes catégories toutes catégories TARIF A 12,5 e 10 e TARIF B 14 e 11,5 e TARIF C 11,5 e 10 e TARIF D 10 e 10 e

location 21 JOURS A L’AVANCE, JOUR POUR JOUR journal envoi à domicile du journal du Théâtre de la Ville à chaque abonné relayé les groupes les groupes jeunes 10 places minimum/spectacle MOINS DE 27 ANS OU ÉTUDIANT 10 places minimum/spectacle

À partir du mois de septembre, la réservation pour les groupes est limitée aux spectacles ayant lieu en septembre-octobre dans la limite des places disponibles. Dès le mois de novembre, la réservation pour les groupes s’étend à tous les spectacles de la saison dans la limite des places disponibles.

e la carte liberté relais 40 la carte Carte réservée aux comités d’entreprise et aux associations, qui permet de bénéficier de tarifs préférentiels et d’une réservation sans contrainte de nombre fixe de places par représentation, dans la limite des places dispo- nibles (conditions particulières de location).

tarifs préférentiels groupes et carte liberté relais

THEATRE-DANSE- MUSIQUE carte jeune groupes groupes jeunes liberté relais tarif normal tarif normal toutes catégories toutes catégories toutes catégorie 1re/2e catégorie toutes catégories TARIF A 12,5 e 8 e 12,5 e 23/16 e 11,5 e TARIF B 14 e 8 e 14 e 26/17 e 13 e TARIF C 11,5 e 8 e 11,5 e 17 e 11,5 e TARIF D 10 e 8 e 10 e 16 e 11,5 e

pour vous conseiller, vous renseigner, vous servir 2

RELATIONS AVEC LE PUBLIC RELATIONS PUBLIQUES “JEUNES” comités d’entreprise, associations, relais jeunes, étudiants, groupes d’amis enseignement Lydia Gaborit, responsable du service ; Isabelle-Anne Person Florence Thoirey-Fourcade ; Maud Rognion Corinne Soulié tél. 01 48 87 54 42 tél. 01 48 87 54 42 suivi personnalisé et mise en organisation de manifestations place d’actions pédagogiques autour des spectacles, forums, avec chacun des relais visites du Théâtre… intéressés

souscription, choix des dates, règlements 2

LOCATION RELAIS Marie Katz, responsable du service ; Ariane Bitrin tél. 01 48 87 43 05 (ligne directe) - fax 01 48 87 09 81

renseignements, formulaires Formulaires d’abonnements individuels et relais : - dans le hall du Théâtre de la Ville ; - à télécharger sur www.theatredelaville-paris.com et à envoyer par correspondance; - envoi à domicile sur demande.

2 Jusqu’au 13 juillet et à partir du 26 août. théâtre et danse : partenaires au 30 avril

THÉÂTRE DE LA VILLE ODILE DUBOC RIEN NE LAISSE PRÉSAGER DE L’ÉTAT DE L’EAU Coproduction Centre chorégraphique national de RHINOCÉROS Franche-Comté, Belfort – Théâtre de la Ville, Paris - La Production La Comédie de Reims, CDN – Théâtre de la Filature, scène nationale de Mulhouse. Ville, Paris. SANKAI JUKU CRÉATION 2005 ANTOINE ET CLÉOPÂTRE Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Kitakyushu Production du Théâtre du Nouveau Monde, Montréal. Performing Arts Center (Japon) – Sankai Juku, Tokyo. KINKAN SHONEN L’HEURE OÙ NOUS NE SAVIONS RIEN L’UN DE L’AUTRE Production Sankai Juku, Tokyo. Coproduction Théâtre national de Belgrade – Théâtre Sankai Juku bénéficie du soutien de Toyota et Shiseido. Tattoo,Toulouse – Théâtre Garonne,Toulouse – Théâtre de la Ville, Paris – La Coupole, scène nationale de Sénart – ALAIN PLATEL VESPERS MC2 Maison de la culture de Grenoble. Production de Les Ballets C. De la B. Le Théâtre national de Belgrade est subventionné par le Coproduction Kunst-und Kulturprogram FIFA WM 2006 TM ministère de la Culture de Serbie. – La Monnaie/De Munt, Bruxelles – Le Grand Théâtre de Le Théâtre Tattoo est subventionné par le ministère de la Luxembourg – Opéra national de Paris – RUHRtriennale – Culture – DRAC Midi-Pyrénées, le conseil régional Midi- Théâtre de la Ville, Paris – Staatsoper Unter der Linden, Pyrénées et la ville de Toulouse. Berlin. Avec l’aide de l’AFAA et du Centre culturel français de MARIE CHOUINARD CRÉATION 2005 Belgrade. Production Compagnie Marie Chouinard. ANGELIN PRELJOCAJ LES 4 SAISONS… Coproduction Biennale de Venise– Centre national des Coproduction Festival Montpellier Danse 2005 – Théâtre Arts,Ottawa – Schlossfestspiele,Ludwigsburg – Théâtre de de la Ville, Paris. la Ville, Paris – Whitebird, Portland. Avec le soutien des Nuits de Fourvière-département du Avec l’appui du festival international de danse Rhône. Résidence de création Théâtre de Nice. ImpulsTanz,Vienne. Le Ballet Preljocaj, centre chorégraphique national, est MEG STUART CRÉATION 2006 subventionné par le ministère de la Culture et de la Production Damaged Goods. Communication-DRAC PACA, la région Provence-Alpes- Coproduction Volksbühne am Rosa-Luxemburg-Platz, Côte d’Azur, le département des Bouches-du-Rhône, la Berlin – Théâtre de la Ville, Paris – Productiehuis Communauté du Pays d’Aix, et la ville d’Aix-en-Provence Rotterdam-Rotterdamse Schouwburg, Rotterdam. et bénéficie du soutien de la Fondation BNP PARIBAS, Meg Stuart / Damaged Goods bénéficie de l'aide du l’AFAA-Association française d’action artistique-ministère Gouvernement flamand et de la Commission commu- des Affaires étrangères, le Groupe Partouche-Casino nautaire flamande. municipal d’Aix-Thermal. Le Ballet est hébergé à la Cité du Livre depuis 1996. SIDI LARBI CHERKAOUI/DAMIEN JALET… D’AVANT EMPTY MOVES Production Schaubühne am Lehniner Platz, Berlin. Commande et coproduction Biennale nationale de Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Les Ballets C. de danse du Val-de-Marne. la B. – Festival de Marseille – Le Carreau, Forbach. NOCES JAN LAUWERS LA CHAMBRE D’ISABELLA Commande de la Biennale nationale de la Danse du Production Needcompany. Val-de-Marne. Coproduction Festival d’Avignon – Théâtre de la Ville,Paris Coproduction Maison des arts de Créteil – TNDI – Théâtre Garonne, Toulouse – La Rose des Vents, scène Châteauvallon, Toulon – Alpha-FNAC – Arsenal, Metz – nationale de Villeneuve-d'Ascq – Brooklyn Academy of Centre national des arts d'Ottawa – Compagnie Preljocaj. Music, New York – Welt in Basel theaterfestival. Avec l’aide à la création du conseil général du Val-de- Avec la collaboration du Kaaitheater, Bruxelles et de la Marne,du ministère de la Culture et de la Communication- Commission communautaire flamande de la Région direction de la musique et de la danse (Fonds de promo- Bruxelles-Capitale. tion chorégraphique), de l’Adami et de la SPEDIDAM. Needcompany bénéficie de l’aide du ministère de la Avec le soutien du Théâtre du Merlan à Marseille et des Communauté flamande et de La Loterie nationale. services culturels de l'Ambassade du Canada. GRACE ELLEN BARKEY CHUNKING AKRAM KHAN/ SIDI LARBI CHERKAOUI ZERO DEGREES Production Needcompany. Production Akram Khan Company – Les Ballets C. de la B. Coproduction PACT Zollverein, Essen – Festival de Marseille. Coproduction Sadler’s Wells, Londres – Teatro Comunale Avec la collaboration du Kaaitheater, Bruxelles et de la di Ferrara – TorinoDanza – deSingel, Anvers – Hebbel Commission communautaire flamande de la Région Theater, Berlin – Tanzhaus nrw, Düsseldorf – Théâtre de la Bruxelles-Capitale. Ville, Paris – Stadsschouwburg, Rotterdam – Wexner Needcompany bénéficie de l’aide du ministère de la Center for the Arts – National Arts Centre, Canada. Communauté flamande et de La Loterie nationale. La compagnie Akram Khan reçoit l’appui de l’Arts Council England. SASHA WALTZ CRÉATION 2005 Les Ballets C. de la B. reçoivent l’appui du ministère van Coproduction Théâtre de la Ville, Paris. de Vlaamse Gemeenschap, de la ville de Gand, de la ANNE TERESA DE KEERSMAEKER CRÉATION 2006 Province Oost-Vlaanderen et de la Loterie nationale. Production Rosas & De Munt/La Monnaie. LLOYD NEWSON/PHYSICAL THEATRE DV8 JUST FOR SHOW Coproduction Théâtre de la Ville, Paris. Coproduction Romaeuropa Festival et Accademia PINA BAUSCH CRÉATION 2005 Filarmonica, Rome – National Theatre, London – Théâtre Coproduction LG Arts Center – Goethe Institut, Séoul. de la Ville, Paris – Festival d’Automne à Paris – Spielzeiteuropa/Berliner Festspiele, Berlin. Commande du Brighton Festival. Avec le soutien de la Calouste Gulbenkian Foundation et LES ABBESSES du Britisch Council. Un projet associé Artsadmin. WILLIAM BURROUGHS EA SOLA SÉCHERESSE ET PLUIE VOLUME 2 Coproduction Théâtre Vidy-Lausanne E.T.E. – Théâtre de Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Espace, Centre la Ville, Paris – Espace Jean Legendre, Compiègne. culturel français de Hanoi – Opéra Ballet du Viêt-nam – LA VISITE DE LA VIEILLE DAME La Coupole, scène nationale de Sénart, Combs-la-Ville – Production Teatro Malandro. Théâtre d'Angoulême, scène nationale – Le Grand Coproduction Théâtre ForuMeyrin – Maison de la Culture Théâtre de Gronigen, Pays-Bas. de Loire-Atlantique – Théâtre de la Ville, Paris – Equinoxe, GARRY STEWART/AUSTRALIAN DANCE THEATRE HELD scène nationale de Châteauroux – La Comédie de Reims Coproduction Adelaide Festival of Arts – Anchorage avec le soutien de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la Concert Association. culture, et de la Loterie romande. Avec le soutien de l’ARTSA, de l’Australian Council for the Le Teatro Malandro est soutenu par le DIP de l'État de Arts et du department of Foreign Affairs and Trade. Genève et par la ville de Genève – Département des affaires culturelles. MAGUY MARIN UMWELT Coproduction Théâtre de la Ville, Paris - La Maison de la MARCIA HESSE danse de Lyon - Toboggan de Décines – Centre choré- Coproduction La Comédie de Reims-CDN – Théâtre de graphique national de Rillieux-la-Pape. la Ville, Paris. La Compagnie Maguy Marin/Centre chorégraphique MÈRE & FILS, COMÉDIE NOCTURNE national de Rillieux-la-Pape est subventionnée par le Coproduction Théâtre de la Ville, Paris - Théâtre du Point ministère de la Culture et de la Communication-DRAC du Jour, Lyon. Rhône-Alpes, la région Rhône-Alpes, le conseil général Avec le soutien du Théâtre national populaire,Villeurbanne. du Rhône et les communes de Bron, Décines, Rillieux-la- Pape. Elle bénéficie également du soutien financier de LLANTO POR IGNACIO SÁNCHEZ MEJÍAS l’AFAA pour ses tournées internationales et de la Coproduction Théâtre national de Toulouse Midi- Délégation interministérielle à la ville. Pyrénées - Scène nationale de Quimper - un Théâtre pour la musique – La Paloma. WIM VANDEKEYBUS PUUR Avec la participation de la DRAC Midi-Pyrénées, la Production Ultima Vez et KVS (Théâtre Royal Flamand, région Midi-Pyrénées, le conseil général de la Haute- Bruxelles). Coproduction Festival d’Avignon – PACT Garonne et la ville de Toulouse. Zollverein/ Choreographisches Zentrum ZNRW, Essen) – Avec le concours de la Spedidam, la Fondation France Théâtre de la Ville, Paris – Singapore Arts Festival – Télécom et la Caisse d’épargne de Midi-Pyrénées. Cankarjev Dom, Ljubljana. Avec le soutien du programme Culture 2000 de l'Union KATHERINE BARKER européenne. Production déléguée La Comédie de Reims, centre dra- matique national. théâtre danse musique : partenaires radios :partenaires théâtre dansemusique ministèredelaCultureet DRAC Ile-de-France, L’Association fin novembre estsubventionnée parla àlaCulture. secrétariat Dragao del’ÉtatduCéara doMar/Gouvernement – Centre brésiliens:BiennaledeFortaleza, Partenaires Pantin. Centre nationaldeladanse, d’Annecy –Festival dedanseCannes– international scènenationale Pompidou Centre –Bonlieu, vivants, –LesSpectacles Paris Coproduction Théâtre dela Ville, finProductionnovembre. Association RACHID OURAMDANE 19 RUEBEAUBOURG PARIS 4 AU Production déléguée Théâtre Vidy-Lausanne E.T.E. – Théâtre duHangar,Montpellier.Théâtre 95,Cergy-Pontoise Montpellier– Coproduction Compagnie LaNuitremue, LE TOTO 211 AV. JEANJAURÈS PARIS 19 AU HORS LESMURS Avec duCentreMandapa. lacollaboration Production C.I.I.C. MARIA KIRAN/CLAUDE BRIZI Production CCN-BalletdeLorraine. GALLOTTA/BALLETS DELORRAINE J.-CL. Avec deFlandre. lesoutiendu Gouvernement Anvers. enrésidenceaudeSingel, Jan estartiste Fabre Bogotá. Avec deFestival lesupport de Iberoamericano Teatro de –deSingel,Anvers. Paris Coproduction Théâtre dela Ville, Anvers. Production Troubleyn/JanFabre, JAN FABRE Production yMovimiento Arte Producciones S.L. MERCEDES RUIZ nationale. tale etdelaLoterie delaprovince delaFlandreorien- de lavilleGand, Avec duministèredelaCommunauté flamande, l’appui Göteborg Villeneuve –LaRosedes d’Ascq. Vents, Gand–Göteborg Dance& Theatre Festival, Vooruit, Düsseldorf–Kunstencentrum – Berlin Tanzhaus nrw, –Hebbeltheater, Paris Coproduction Théâtre dela Ville, delaB. Production LesBalletsC. KOEN AUGUSTIJNEN Damien Valette Production déléguéeCity Theater &DanceGroup / Paris. de la Ville, Fumo –Festival Danseà Aix –Impulstanz – Wien Théâtre Coproduction City Theater &DanceGroup –ORumodo ORLIN/VERAMANTERO ROBYN conseil général deMoselle. etle LaDRAC-Lorraine, conseil régionaldeLorraine, La CompagnieBoomerang estsubventionnée parle Boomerang. –Compagnie Paris Coproduction Théâtre deLa Ville, FACE DECUILLÈRE Avec deCorse. lesoutiendelacollectivitéterritoriale d’Ajaccio/direction des Affaires culturelles. dePeretti –Compagnie –ville nal deNormandie Thierry centredramatique natio- –ComédiedeCaen, Orléans scènenationale, –CarréSaint-Vincent, Paris la Ville, de – Théâtre Lausanne Coproduction Théâtre E.T.E., Vidy Production déléguéeCompagniedesPetites Heures,Paris. ILLUMINATIONS -COLOUREDPLATES Pontempeyrat. Avec lesoutiendeRegards etmouvements Hostellerie conventionnée parlaDRAC Ile-de-France. compagniedramatique Compagnie Maski Théâtre, national– centredarmatique Comédie Saint-Etienne, centredramatique – nationaldeNormandie Caen, –Comédiede Paris Coproduction Théâtre dela Ville, DUCHÂTELETPARIS 4 2 PL. THEATRE DELA VILLE 2 théâtres THÉÂTRE PARIS-VILLETTE CENTRE POMPIDOU MÔMO QUANDO L’UOMO PRINCIPALE ÈUNADONNA DIBUJOS ENEL AIRE BÂCHE COVER 4 THEATRES BHÂRATA/BACH HEY DUDE... DOCTEUR LABUS 31 RUEDES ABBESSES PARIS 18 LES ABBESSES etentoa el as,Pantin. Centre nationaldeladanse, développement Midi-Pyrénéesetdu chorégraphique duCentrede St-Jacques àSaint-Gaudens, Chapelle dela Avec deColomiers, lesoutiendel’Espacedes Arts ministèredelaCultureetCommunication . France, Ile-de- L’Association fragile estsubventionnée parlaDRAC de Toulouse. desBeaux-Arts Languedoc Roussillon–l’Écolesupérieure de Franche-Comté àBelfort –CCNdeMontpellier- scènenationaledeBrest–CCN Coproduction LeQuartz, Production l’Associationfragile. CHRISTIAN RIZZO àl’étranger.gères) poursestournées ministèredes Affaires étran- çaise d’actionartistique, Ilreçoitl’aidedeL’AFAA (Associationfran- ral duLoiret. leconseilgéné- leconseilrégionalduCentre, d’Orléans, laville DRAC la Centre, théâtre etdesspectacles, du deladanse, Communication-Direction delamusique, ventionné parleministèredelaCultureet estsub- nationald’Orléans Le Centrechorégraphique (Modena). Festival d’Avignon –EmiliaRomagna teatro Fondazione – Coproduction d’Orléans Centrechorégraphique JOSEF NADJ la CultureetdeCommunication-DRAC Ile-de-France. La CompagnieFVestsubventionnée parleministèrede Cergy-Pontoise. scènenationalede Avec lesoutiendeL’Apostrophe, scènenationaledeBlois. – LaHalleauxGrains, Coproduction Grand Théâtre dela Ville deLuxembourg Production CompagnieFV FRANÇOIS VERRET De Mey (Bruxelles). CompagnieMichèle Anne Preljocaj (Aix-en-Provence), Ballet (Gand), delaB. desBalletsC. ck*(Courtrai), Kortrijk- duStadsschouwburg delaNeedcompany (Bruxelles), de, Avec lesoutienduministèredelaCommunauté flaman- Uzès). Toulouse, Marne, Roubaix,Val-de- Dijon, Réseau France desCDC(Avignon, scènenationalede Villeneuve d’Ascq–Le des Vents, Coproduction Tramway Glasgow CityCouncil –LaRose PEEPING TOM 17 BDJOURDAN PARIS 14 AU culture. Fondationsuissepourla Avec lesoutiendePro Helvetia, avecEn collaboration EmioGreco/PC. Paris. Centre Pompidou – Théâtre dela Ville, Festival d’Automne –LesSpectacles àParis Vivants, Coproduction Ircam –EnsembleInterContemporain – : + DANSE AVEUGLE •DOUBLEPOINT EMIO GRECO/HANSPETERKYBURZ phiques. aideauxcompagnieschorégra- Communication, rus,J oc,SnewrdmscJ oe,P Volek, Senseworld music,J. Joyce, K. J. Troussi, Enguerand, Philippe, L. Conte, :B. photos couvertures Pantin. Avec l’aideduCentrenationaldeladanse, et du Théâtre delaBastilleàParis. Maasmechelen duCultureelCentrum Comté àBelfort, nationaldeFranche- duCentrechorégraphique Rome, Avec lesoutiendelaFondazioneNuovi Mecenatide nationalde chorégraphique Tours (accueilstudio). Lyon (résidence decréation)–Centre Les Subsistances, Rome– –Romaeuropa Paris Festival, Théâtre dela Ville, Coproduction BORIS CHARMATZ 76 RUEDELAROQUETTEPARIS 11 AU to,L refed .Vneatee .Bzi M. J.-P Bozzi, XDR Port, Kamrouz, D. Karroubi, H. M. Nadeau, Manas, Vandecasteele, J. T. Anwar, Greenfield, Chouinard,S. L. Stoop, THÉÂTRE DELACITÉINTERNATIONALE THÉÂTRE DELABASTILLE LAST LANDSCAPE LE SALON AUTANT VOULOIR LEBLEUDUCIEL… RÉGI TOKYO MUSIL erz J.-P Deprez, . Maurin, . . photos Birgit Théâtre de la Ville 2 place du Châtelet Paris 4 01 42 74 22 77 theatredelaville-paris.com