Stephen Bosustow Et L'upa
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Document généré le 2 oct. 2021 19:43 Séquences La revue de cinéma Petite histoire du cinéma d’animation Stephen Bosustow et l’U.P.A. Piero Zanotto Cinéma et liberté Numéro 44, février 1966 URI : https://id.erudit.org/iderudit/4538ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) La revue Séquences Inc. ISSN 0037-2412 (imprimé) 1923-5100 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Zanotto, P. (1966). Petite histoire du cinéma d’animation : Stephen Bosustow et l’U.P.A. Séquences, (44), 43–50. Tous droits réservés © La revue Séquences Inc. et Rivista del cinematografo, Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des 1966 services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ petite histoire du cinéma d'animation - Çtepken So M A teu> et i%P.A. Piero Zanotto Tout a commencé un jour de Quel serait son programme? 1941. Jusqu'alors, Disney, après Point d'interrogation auquel fut avoir surmonté les coups de bou apportée une réponse peut-être toir de ses rivaux obstinés, Dave et trop facile. A la fin des jours d'agi Max Fleischer, avair maintenu une tation syndicale, Bosustow lui-mê hégémonie enviable du haut de son me et Robert Cannon (le plus fan empire établi à Burbank. Ce jour- taisiste et le plus original du grou là, pourtant, à cause d'un désaccord pe, décédé en 1964), John Hubley, syndical avec ses employés, il William Hurz, Sterling Sturvenant, congédia le chef des "agitateurs" Bill Scott, etc, s'amusèrent à protes ainsi que treize autres collègues ter contre Disney et ses personna parmi les plus fidèles. Ce fut ainsi ges tout en courbes et en cercles en qu'après sept ans d'activités au noircissant les murs du srudio avec service de 1a Walt Disney Pro de nombreux Donald, Mickey, ductions où il avait collaboré à la nains et petits cochons dessinés seu création de Blanche Neige, de Bam- lement avec des lignes droites. Il bi et de Fantasia, le Canadien Ste apparaissait clairement que leur ci phen Bosustow devint responsable néma d'animation serait orienté — à son tour d'une équipe de "car comme en fait il le fut avec un ré toonists". sultat brillant et une valeur arristi- FÉVRIER 1966 43 que remarquable — en direction geatt ses personnages pour entrer opposée, dans le but de libérer le dans un univers signifié par des genre du cliché disneyen qui vou dessins stylisés qui auraient réjoui lait en faire essentiellement un Sigmund Freud. spectacle destiné aux enfants (et Ce fut dans l'après-guerre, ai-je aux spectateurs restés tels). dit. Mais dès les années '41 à '46, le Bosustow n'imposa aucune règle groupe Bosustow, réuni sous l'égide Il laissa chacun libre de s'expri de l'U.P.A. (United Productions of mer lui-même selon son propre gé America), contribua comme Dis nie. Mais tous, plus ou moins, avec ney, à l'effort de guerre en fabri les autres qui, par la suite, se joi quant des petits films éducatifs gnirent à eux, se situèrent dans un destinés aux forces armées, grâce style qui rappelait le monde irra à Frank Capra. Le metteur en scène tionnel et abstrait d'Emile Cohl, in 1 de l'Extravagant Mr Deeds diri venteur du dessin animé.' * D'autre geait en ce temps-là le service ci part, ils se mirent à l'école d'un nématographique des armées et il courant de caricature moderne et fut ainsi le parrain, entre autres raffinée, de peinture impressionnis films, de Few Quick Facts et Flat te, de mordante inspiration satiri Hatting : le premier concernait la que qui anamorphosait le réel. force de l'armée américaine, l'au Cet art tourné vers les mythes tre était dirigé contre les erreurs anciens et nouveaux de l'Amérique possibles dans les vols aériens. De devenait le porte-parole des défor- 1944 à 1946, l'U.PA. continua la marions mentales dont les Etats- série qui dépassait les thèmes de Unis commençaient à souffrir. En la guerre pour affronter ceux de la cette après-guerre, l'Amérique en politique et de la ségrégation racia trait dans la sphère d'un bien-être le. Hell bent for Election érait un inconditionné mais aliéné par l'anx court métrage de propagande élec iété devanr l'inconnu de la guerre torale en faveur de Roosevelt alors froide, des soucoupes volantes, de que Brotherhood of Men, tiré de vant l'invasion de la technique et l'ouvrage des deux anthropologues de l'automation, en somme devant Ruth Benedict et Gene Weltfish, tout ce qui désormais faisait partie était un violent pamphlet contre les du "futur commencé". C'est dire préjugés raciaux. qu'il s'accomplir une nette sépara tion d'avec le monde "vraisembla En adoptant le dessin impression ble" dans lequel Disney immer- niste réduit à l'essentiel, le gioupe de l'U.P.A. ne voulait pas seule (1) Voir page 55. ment protester artistiquement con- 44 SÉQUENCES 44 tre le style disneyen. Bien que Bo par inconscience, mais parce que sustow eût instauré des méthodes ses défauts physiques rendent sa et des procédés de création totale sérénité invulnérable. ment différents, il poursuivait un Gerald McBoing-Boing et Chris autre but. Pierre Billon affirme que topher Crumpet se meuvent dans le goût du dessin linéaire et celui une sphère psychanalytique. Sur des couleurs comme élément choc un mode différent, ils concrétisent destiné à éveiller 1 emotivité psy les thèses d'Antonioni et des autres chologique dans le spectateur adulte "interprètes" de l'incommunicabili constituaient des recherches plasti té. Gerald ne sait pas parler. Les ques destinées à rendre sensible le uniques sons qu'il émet sont des tragique absurde de tous les aspects "boing-boing" sur chaque ton de de la vie quotidienne. l'échelle vocale. Il remporte des Naissance de Mister Magoo concours à la radio pour la riches se de ses variations phonétiques, En 1948, la Columbia Pictures mais il ne communique pas avec vint en aide à Bosustow et à ses compagnons, pleins de talent et d'i dées mais plus ou moins sans le sou, en agrandissant pour eux son studio de Burbank situé tout près de celui de Disney. Là naquirent d'abord Gerald McBoing-Boing et Christopher Crumpet puis Mister Magoo. Trois personnages aux ca ractères différents, mais représen tant chacun le symbole d'un "tic" psychologico-social. Les deux pre miers, dus à l'invention de Robert Cannon, possédaient des affinités poétiques moins accessibles que cel les qui caractérisaient les actions de Magoo: Magoo, ce petit homme Gerald McBoing-Boing's Symphony myope sinon aveugle (et, parfois aussi, sourd comme un pot) qui les autres. Ses parents réussissent à affronte et vainc les dinosaures de le comprendre en certains cas. la vie contemporaine, les obstacles Quand Gerald se met en contact a- gigantesques, la vilenie, l'égoïsme, vec eux par téléphone, les sons, à les compromis opportunistes, non travers le fil, se redressent; ils de- FÉVRIER 1966 45 viennent des paroles sensées et joutons que, pour certains, Gerald douées de signification. McBoing-Boing et Christopher Christopher Crumpet se trouve Crumpet appartiennent au domai dans une situation analogue à son ne de la schizophrénie. contemporain Gerald Mc-Boing Ce fut la Columbia qui pria Bo Boing. Sauf que parce qu'il se sustow de trouver quelque chose de sent étranger au monde qui l'en plus commercial. Non pas que les toure, il se crée un monde imagi autres "cartoons" n'avaient pas été naire: un éléphant, par exemple appréciés aux Etats-Unis et même qui reste invisible à tous, (excep en Europe, surtout grâce à la té té à son père et à sa mère) lui de lévision. Mais on voulait rejoindre, vient un compagnon de jeu. comme Disney, des groupes plus variés de spectateurs. On pensa a- "Les images et les figures se lors à Mister Magoo, évidente ré meuvent comme celles de Cohl ou incarnation physique (et humoris de Blackton dans un monde vide tique) de W. C. Fields, l'interprète comme une page blanche", écrit Gec hilarant de nombreux films muets dans son Histoire du dessin animé. et sonores, décédé en 1945. Doté "Quand on a besoin d'une échel dans la version originale de la voix le, trois traits de plume suffisent caquetante de l'acteur Jim Backus, à en donner l'idée; quand on veut Mister Magoo devint aussitôt une une chaise, on la représente avec espèce de "voix de la conscience" le moins de lignes possible. Le des pour les Américains qui savaient sin est réduit à l'essentiel, à l'idéo interpréter les mésaventures dont gramme. Chaque film révèle l'in se tirait toujours avec bonheur ce fluence des caricaturistes les plus petit bonhomme insignifiant et sou modernes, surtout anglo-américains. vent présomptueux. Sur un plan plus élevé, nous pou vons faire mention d'une influen Le succès fut immédiat. Telle ce de Modigliani, de Duffy et plus ment qu'il incita la Columbia à encore de Pablo Picasso et de Paul commander à Bosustow et Compa Klee". Mais il ne faut pas s'arrêter gnie un long métrage dont le sujet à ces grands noms.