Hommage À Stockhausen (1928-2007) Gilles Tremblay
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Document generated on 09/30/2021 1:37 a.m. Les Cahiers de la Société québécoise de recherche en musique Hommage à Stockhausen (1928-2007) Gilles Tremblay Les musiques du Québec Volume 10, Number 1, December 2008 URI: https://id.erudit.org/iderudit/1054174ar DOI: https://doi.org/10.7202/1054174ar See table of contents Publisher(s) Société québécoise de recherche en musique ISSN 1480-1132 (print) 1929-7394 (digital) Explore this journal Cite this document Tremblay, G. (2008). Hommage à Stockhausen (1928-2007). Les Cahiers de la Société québécoise de recherche en musique, 10(1), 89–90. https://doi.org/10.7202/1054174ar Tous droits réservés © Société québécoise de recherche en musique, 2008 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ nvention, découverte : Zeitmasse, Gruppen I(pour trois orchestres), le Chant des ado- lescents (un chef-d’œuvre électroacoustique), Hommage à Kontakte, Hymnen, Refrain, Momente, les Klavierstücke, Inori, Stimmung (« Accord »), Stockhausen Mantra, Zyklus, Spiral, Sirius, Helikopter (qua- tuor à cordes) [Helikopter-Streichquartett], (1928-2007) Licht (opéra en 7 jours), Ora Prima/Ascension [Ora Prima, pour la fête de l’Ascension]. Ces Gilles Tremblay quelques titres évoquent un esprit, celui d’un explorateur d’une rare audace. Stockhausen est venu trois fois à Montréal, invité par Musique de notre temps, puis par la Société de musique contemporaine du Québec (SMCQ). Je l’avais rencontré quelque- fois auparavant, notamment en 1957 et 1960 à Darmstadt. Nous assistions à ses cours don- son où l’on retrouvait, entre autres, Pierre nés en allemand. Heureusement, ils étaient Mercure, Clermont Pépin, François Morel, illustrés de nombreux exemples musicaux, Bruce Mather, Jean Papineau-Couture, István ce qui nous permettait d’en saisir les points Anhalt, Claude Champagne, le pianiste David saillants. De plus, il avait généreusement offert Tudor et Maryvonne Kendergi. L’accueil de aux étudiants de langue française de leur faire l’œuvre avait été chaleureux et nous trin- l’après-midi un résumé en français, ce qui avait quâmes tous à cette fraternité conquérante. lieu assis dans l’herbe – décor propice aux Aujourd’hui, en signe de reconnaissance, je me échanges conviviaux. dis qu’il faut continuer cette « libation ». Plus tard, quelques Québécois allèrent étudier avec On a trop souvent associé Darmstadt à Stockhausen à Cologne : entre autres Claude la Mecque du « sérialisme » issu de l’École Vivier et Michel Gonneville, ainsi que la flûtiste de Vienne (Schoenberg, Berg, Webern). Mais Lise Daoust. après la Seconde Guerre mondiale, ce fut aussi, on ne le dira jamais assez, un haut lieu de Fin mars 1958 : création des Gruppen, pour réconciliation franco-allemande et de partage trois orchestres, au Palais des expositions, le international. Parmi les invités de la première Rheinsaal de Cologne. Quelques camarades heure, ne trouve-t-on pas Varèse, et Messiaen, de la classe de Messiaen – dont Gilbert Amy, dont le Mode de valeurs et d’intensités pour compositeur, Daniel Charles, philosophe, et piano fut un point tournant pour Stockhausen ? moi-même – décidèrent de faire le voyage Et l’amitié entre Boulez et Stockhausen ne afin d’assister à une création sans précédent manifeste-elle pas un nouvel état d’esprit ? et, surtout, aux répétitions. Le public était Après une telle guerre, il fallait tourner la page. entouré par trois orchestres. Celui de gauche Rupture non pas avec le passé mais avec des était dirigé par Stockhausen, celui de face, au habitudes séculaires. « Il ne faut pas confon- centre, par Bruno Maderna, celui de droite dre tradition avec mauvaise habitude », disait par Pierre Boulez. À la suite des antiphonies Varèse. À cette nouvelle donne, furent associés de Gabrieli et de Monteverdi quatre siècles les noms de Nono, Berio, Maderna, Pousseur, auparavant, une véritable joute spatiale s’orga- Cage, Ligeti, auxquels, avec plusieurs autres, je nisait, les sons s’interpellant d’un orchestre à joins celui de Serge Garant. l’autre, ou glissant de façon continue au-dessus de nos têtes. Pendant les repos des musiciens, Stockhausen m’a toujours enthousiasmé, les trois chefs, assis les uns en face des autres, mais je ne le suivais pas toujours dans ses fas- répétaient leur gestique silencieuse avec des cinations ésotériques. Malgré cela, la Musique, changements fréquents de tempi indépen- portée par une énergie peu commune, garde dants, véritables défis pour la coordination. Au toujours la priorité. concert, l’œuvre fut jouée deux fois. Entre les Après la première montréalaise de Kontakte, deux, Boulez interpréta lui-même sa troisième une réception avait été organisée à la mai- sonate pour piano. Moments en mémoire. LES CAHIERS DE LA SOCIÉTÉ QUÉBÉCOISE DE RECHERCHE EN MUSIQUE, VOL. 10, NO 1 89 La dernière œuvre dont j’ai pu entendre On ne peut tirer une conclusion : une telle l’enregistrement s’intitule : ORA PRIMA, pour œuvre semble encore en évolution. Il reste orgue, soprano et ténor, commande de la simplement à dire mille fois MERCI, cher cathédrale de Milan pour la fête de l’Ascension. Karlheinz Stockhausen, pour une démesure Le compositeur a écrit qu’à sa mort, il s’imagi- qui est également générosité. Au-delà de la nait monter ainsi vers les cieux… À l’audition, Mort, elle manifeste la Vie. je fus fortement ému : de la totale complexité Gilles Tremblay, décembre 2007 des enchevêtrements chromatiques se déga- geait par moments une résultante extrême- ment simple. Métaphore ? Une sérénité fraîche que ne peut voiler aucune catastrophe. 90 HOMMAGE À STOCKHAUSEN (1928-2007).