Jean ACHEREINER

elaine-De--Watsch

JLe jeune village Des verriers disparus

MONOGRAPHIES LOCALES No 5

Illustration de Marin Jacquet et Nicolas Rabin Photographies de Bruno Estrade et Patrick Bichet

Edité par la Société d'Histoire et d'Archéologie de Lorraine Section de Les opinions rapportées, exprimées ou défendues dans ce livre, le sont sous la seule responsabilité de l'auteur

Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous pays SHAL - Section de Sarrebourg - 1996 A mes quatre enfants: Jérôme, Fabien, Guillaume, Florence A Nadine, mon épouse A mes parents et à mes grands-parents, à mon parrain

" Toute parcelle de sol - de la lune, par exemple - peut-être intéressante en soi, mais son sens profond réside toujours dans la vie qui s'y développe". James A. Michener Préparer l'avenir de la commune, c'est gérer le présent: telle est la mission confiée aux élus par les habitants d'une localité. Les adaptations continuelles et les modifications nécessaires à l'administration de la vie de nos concitoyens constituent la tâche quotidienne et ardue dévolue au maire et au conseil municipal. Pourtant, il est utile, de temps à autre, de marquer un moment d'arrêt, de se rendre compte du chemin parcouru et de trouver des raisons de continuer. Jean Achereiner, auteur de la monographie de Plaine-de-Walsch, a voulu en quelque sorte dresser un bilan de trois siècles d'histoire locale, afin de faire mieux connaître les lieux et les acteurs de la petite région où lui-même puise ses racines. Au cours de la moitié de son existence, soit durant un siècle et demi, le village n'a vécu que par la présence d'une verrerie. Après le départ de celle-ci, la communauté des villageois, durant l'autre partie de son existence, s'est transformée en un village rural du sud mosellan avec une histoire tantôt paisible, tantôt mouvementée. La population, à l'origine, était constituée de familles de verriers venues d'autres sites verriers, toujours en recherche de leur subsistance. En arrivant dans un lieu, ils n'y restaient en général qu'en fonction du travail qu'ils y trouvaient, avant de repartir ailleurs. L'évolution des conditions matérielles, le progrès des sciences et des techniques ont permis à cette population, nomade à l'origine, de se sédentariser, de s'installer définitivement et de donner naissance à une localité moderne en cette fin de XXe siècle. Les difficultés actuelles que rencontrent les jeunes générations pour entrer dans la vie active en amènent beaucoup à quitter leur village natal. Mais cette situation n'est pas nouvelle. L'ouvrage de Jean Achereiner fait état d'autres périodes de notre histoire où, bon gré, mal gré, certains étaient contraints de partir pour chercher ailleurs ce qu'ils ne trouvaient plus sur place. Beaucoup de ceux qui sont partis ont néanmoins gardé le souvenir de leur village natal. Ils y pensent encore avec nostalgie, de même que ceux qui sont restés au village se rappellent de ceux qui sont allés chercher fortune ailleurs ou qui ne sont plus. La monographie de Jean Achereiner veut rendre hommage à tous ceux qui ont apporté leur part dans la construction de notre localité. Elle est un message pour toutes les personnes qui se sont fixées dans ce village niché sur les premiers contreforts vosgiens ou qui en sont parties après y avoir vécu. Enfin, elle est destinée à nos enfants et aux générations futures. A leur tour, ils pourront prendre connaissance des événements qui ont façonné cette bourgade qui dévoile ici ses origines et ses réalisations. Que tous ceux qui ont contribué à la réalisation de cet ouvrage soient remerciés pour avoir apporté à l'auteur les éléments nécessaires à la rédaction de l'histoire de notre village. Ce travail prendra place dans la suite des livres édités par la Société d'Histoire et d'Archéologie de Lorraine, section de Sarrebourg pour témoigner à son tour d'un village à l'histoire qui a contribué pour sa part au développement de la région. Désormais, Plaine-de-Walsch sera mieux connu, donc mieux apprécié. Nous en sommes fiers. Le Maire: Justin LERCH PROLOGUE

Certains villages s'enorgueillissent d'un passé millénaire voire bimillénaire, d'autres ne peuvent se prévaloir que de quelques centaines d'années d'existence. Plaine-de-Walsch est un village récent qui ne compte pas encore 3 siècles d'âge! Profitant de difficultés financières de la famille des comtes de , Dominique VOINIER, maître de la poste de Sarrebourg, avait acquis des terres de la seigneurie de pour y créer vers 1700 une verrerie dite de "la fontaine verte de PLAINE-de-WALSCH". Autour de cette verrerie se groupèrent les logements des verriers, puis ceux des artisans et des cultivateurs. Progressivement, tel un être vivant, l'agglomération évolua, se développa, s'épanouit en cité industrielle puis s'adapta à sa situation actuelle de cité résidentielle. De sa vocation première, restent aussi les magnifiques forêts prévues comme réserve de combustible pour la verrerie. La vallée du Rehtal forme encore de nos jours un cadre boisé idyllique et romantique où l'on a plaisir à découvrir les beautés de la nature et les gorges profondes. On ne peut que féliciter Jean ACHEREINER d'avoir réalisé cette monographie qui conte l'histoire de cette coquette agglomération depuis sa création. Pour ce faire, il a durant plus de cinq ans, inlassablement, fouillé les archives, parcouru le terrain, interrogé les habitants, collecté les illustrations et les témoignages. Dans sa narration se révèle son amour pour PLAINE-de-WALSCH et son besoin de le partager avec le lecteur. Bruno SCHOESER Membre de la S.H.A.L. Vice-président de la section de Sarrebourg DE L'AUTEUR ou Genèse d'une monographie

Depuis mon enfance, les grandes épopées historiques, les civilisations mythiques disparues, l'histoire romancée des monarchies ayant dirigé les grandes nations avaient retenu mon intérêt. De temps en temps, vers 1988, en lisant des écrits à coloration locale et découvrant "Verriers et verreries du Pays de Sarrebourg" d'Antoine STENGER, je tombais sur le chapitre relatant l'existence de la verrerie de Plaine-de-Walsch. Ce fut pour moi une révélation, un déclic, une invitation à me pencher sur un passé qui était proche puisque je venais de m'installer dans cette rue de la Fontaine, Brunnengasse, dont les maisons les plus anciennes avaient été témoins de plusieurs générations de verriers. Je commençais à regarder certaines façades d'un oeil différent, à interroger certaines pierres d'angle portant un nom ou une date, à rechercher au travers des conversations en dialecte avec des personnes âgées des éléments qui pourraient me servir pour reconstituer la trame des siècles passés. A la même époque, lors de promenades avec le Club Vosgien, des historiens locaux m'incitèrent par des explications données à propos d'une borne tribanale ou d'un édicule religieux, ou encore d'un monument disparu, à me mettre en quête pour tenter de donner corps à un ouvrage aussi complet que possible sur notre localité et son histoire. Toutefois, quelque chose me retenait pour me "lancer" dans ce projet: il me semblait que peut-être, sans nul doute même, quelqu'un d'autre pouvait déjà avoir entrepris ce travail. Mais au fil des mois, il s'avérait que j'étais le seul à "oser" épouser ce travail. Un peu à la manière d'un prétendant qui hésite à se déclarer, pensant rencontrer des rivaux, mais qui, dès lors qu'il est seul à pouvoir courtiser l'objet de sa flamme, se jette à corps perdu à lui faire la cour. Et c'était bien le risque que je ne voulais pas prendre: écrire une monographie ne devait pas me soustraire à d'autres obligations, tant au travail qu'en famille ou encore dans la vie sociale. Le tout devenait alors une affaire d'organisation; en rognant sur les loisirs pas toujours judicieusement employés, je trouvais le temps d'interroger les témoins, de fouiller dans les archives, de composer et de rédiger ce texte. Au terme de cinq années, dont de longs moments furent consacrés à donner à ces chroniques une texture et un intérêt pour le lecteur, voici donc que s'achève, du moins pour moi, cette quête d'un passé révolu, cette collecte de faits contemporains et la mise en place de jalons pour nos enfants. PAGES

PREFACE - PROLOGUE - AVANT-PROPOS DE L'AUTEUR - SOMMAIRE - 4 PRELIMINAIRES 9 Chapitre 1 PRESENTATION DE LA LOCALITE 13 1. Situation géographique 13 2. Situation géologique et physique 15 3. Le nom du village 17 4. Toponymie des lieux-dits et des rues 20 5. Les écarts du village 25 6. La forêt communale de Plaine-de-Walsch 29 Chapitre 2 APPROCHE HISTORIOUE 33 1. Considérations pré-historiques 33 2. Au siècle des lumières, émergence d'une localité 37 -La verrerie, creuset du village 37 -La verrerie s'en va, le village demeure 42 -La production verrière de Plaine-de-Walsch 44 -Deux familles illustrent scellent le destin du village 47 3. Histoire du village: XVIIIe et XIXe siècles 52 - L'ancien régime 52 - En marche vers la Révolution 55 - Les remous de la Révolution 61 - De la Révolution à la guerre de 1914-1918 65 - Que se passait-il au village, il y a 100 ans. 71 4. Le XXe siècle. Les conflits mondiaux 77 - Le premier conflit mondial 77 - Le deuxième conflit mondial 87 - Les événements survenus en Afrique du Nord 98 5. Tableau chronologique de 1707 à nos jours. 100 Chapitre 3 LES HABITANTS. REGARDS SUR LA VIE QUOTIDIENNE AU XXe SIECLE 106 1. Le sobriquet "Maikâfer", et les autres surnoms 106 2. Généalogie de Jacques Burgun, un des fondateurs de la verrerie 107 3. Traits de caractère des gens de Plaine-de-Walsch 109 4. Notre langue. "Uns'ri Sproch" 110 5. Quelques aspects de la vie quotidienne du début du siècle à nos jours 112 Chapitre 4 LA COMMUNE ET SES REALISATIONS 133 1. Les armoiries du village 133 2. La commune 133 3. La vie municipale 134 4. La municipalité au 19e siècle. Petites et grandes décisions 149 Chapitre 5 LA VIE ASSOCIATIVE 155 1. Les associations disparues 155 2. Le théatre "paroissial" 156 3. Les mandolines 156 4. De la clique... à la fanfare: 20 ans de musique 157 5. Le "football-club" 158 6. La "section de voltige" 162 7. La "chorale St-Charles" 162 8. Le corps des sapeurs-pompiers 165 9. Les donneurs de sang bénévoles 168 10. La gymnastique volontaire féminine 170 Chapitre 6 LA VIE SCOLAIRE 172 1. L'instituteur autrefois 172 2. La maison d'école 173 3. Les programmes au début du siècle 175 4. Départ pour des études après la communale de 1916 à 1963 175 5. La période scolaire autrefois 176 6. Construction de la "petite école" en 1957 177 Chapitre 7 LA VIE RELIGIEUSE 181 1. La première église 181 2. La nouvelle église 185 3. La merveilleuse histoire des trois cloches de l'église 189 4. Les inscriptions relevées sur les cloches 192 5. Le clocher à bulbe de Plaine-de-Walsch 193 6. La section de Vallérysthal 193 7. Propos sur le premier orgue et sur l'harmonium 195 8. L'orgue de Roethinger en 1923 195 9. Le presbytère 196 10. Le patron de la paroisse: St Charles Borromée 197 11. Les prêtres natifs du village 197 12. Liste des curés 198 13. Les enfants de choeur ou servants de messe 199 Chapitre 8 LES CROIX RURALES: ENIGMES OU TEMOINS? 203 Chapitre 9 SIGNES VISIBLES ET TRADITIONS ORALES. PORTEURS DE MESSAGES DU PASSE. ANECDOTES 212 1. Des monuments qui rappellent la mémoire des Klinglin 212 2. Récits à caractère étrange et inexpliqué 214 3. La légende du Schlampi 218 4. Quand les riches tiraient profit de leur situation 220 5. L'instituteur Louis, amoureux éconduit 220 6. Passages de l'histoire romancée du "Bartel" dans le Rehtal 221 7. L'énigme des pierres dépassant sur les murs pignons 222 8. Les pierres gravées dévoilent l'âge des maisons 223 9. Quelques touches de poésie, par Mme Angélique Schwartz 225 Chapitre 10 SUR LA PALETTE. DERNIERS RAJOUTS AU TABLEAU 228 1. Croyances, dictons et proverbes populaires 228 2. Distractions des enfants au début du siècle 228 3. Liste des membres mineurs de l'Association "Amicale des ouvriers de la verrerie de Vallérythal" 230 4. Les qualifications des enfants mineurs à Vallérysthal en 1907 230 5. Les seigneurs de Lutzelbourg 231 6. Généalogie des Klinglin 232 7. Réflexions sur les noms et les prénoms à partir des mariages du 18e siècle 234 8. Quelques comptines dialectales 238 9. Evolution de la population. Quelques chiffres 239 10. Patronymes relevés dans la liste des élèves depuis 1907. 240 ANNEXES 241 BIBLIOGRAPHIE 258 REMERCIEMENTS 259 POSTFACE 260 A une époque où chacun est submergé par le flot des nouvelles venant de partout, à tout moment et de façon chaotique, n'est-il pas prétentieux, voire sans intérêt, de vouloir se pencher sur l'histoire d'une petite localité qui ne présente parfois aucun attrait même pour ceux qui y résident? Il nous est arrivé à tous, à nous les habitants de Plaine-de-Walsch, d'entendre dire "Quoi, vous êtes de "Pleine de vaches" ou bien "Plaine de oualsch", par des gens qui ironisaient sur un nom qu'ils n'avaient pas encore entendu ou qu'ils voulaient placer Outre-Manche. Ne nous offusquons pas et prenons les Béotiens à contre-pied. Oui, un village au nom aussi étrange - car bien différent de ceux qui se terminent par "dorff', par "", par "ange" ou par "bourg" - un tel village a nécessairement une histoire différente, et c'est ainsi qu'il se différencie des autres, tout en leur ressemblant dans ses traits généraux et caractéristiques. Tout ce qui s'y passe ou qui s'y est passé s'apparente à ce qui arrive, est arrivé, ou arrivera ailleurs : que ce soit dans le bourg voisin, dans un village placé aux antipodes ou dans une grande métropole. Certes, les médias sont toujours là pour faire un grand tapage autour d'une naissance royale, pour décrire in extenso un événement quelconque survenu quelque part sur notre planète. Bien sûr, des historiens talentueux, des chercheurs érudits, des philosophes passionnés, des observateurs méritants nous apprennent ce qui s'est passé à l'aube du monde, ou bien en l'an mil de notre ère, ou bien encore dans un village des Andes situé à 2500 mètres d'altitude, si ce n'est dans une pagode chinoise il y a 300 ans. En professionnels, ces savants décortiquent le peu qu'ils savent pour l'ériger en système de référence, pour en tirer des classifications, somme toute arbitraires, et pour en déduire des modes de pensée, des certitudes qui bien vite seront ébranlées par d'autres découvertes faites par d'autres historiens, d'autres chercheurs, d'autres philosophes et d'autres observateurs. Allons donc, soyons sérieux et réalistes: se pencher sur le passé d'une commune comme Plaine-de-Walsch, située en , elle-même faisant partie de la Lorraine, est instructif à plus d'un titre: - on apprend que si nous nous trouvons en cet endroit, c'est que les générations précédentes nous ont permis de l'être; - on découvre que son histoire est bien ancrée dans l'Histoire (notamment lors des événements de la première et de la deuxième guerre mondiale); - on s'étonne de la richesse de son passé du point de vue économique (l'industrie du verre); - on s'émerveille devant la variété de ses sites naturels (forêts, dénivellements, terres cultivées ou en friches, rochers); - on ne s'ennuie pas en côtoyant les personnes qui ont forgé la mentalité des gens d'ici. Pour toutes ces raisons, j'invite le lecteur à remonter dans le temps et à découvrir, au fil des pages, des moments parfois méconnus, mais toujours dignes d'intérêt, de notre passé, afin de comprendre certaines situations présentes et pourquoi pas, d'y puiser des raisons solides pour être confiant en l'avenir. Comme nous l'apprenons par des historiens et des géographes du XVIIIe et du XIXe siècles, tels Lepage et Durival, notre village n'a commencé à exister qu'en 1707, date à laquelle une verrerie y fut fondée par les seigneurs de Lutzelbourg. On pourrait donc penser que trois siècles à peine nous séparent des pionniers-fondateurs, et que peu d'événements ont dû jalonner l'existence du village, contrairement à d'autres villages et villes des environs dont il est fait mention dès l'époque des Gaulois, puis des Gallo-Romains, durant le Moyen-Age ou à l'époque de la Renaissance. Pour toutes ces cités existant déjà à ces époques, de nombreux vestiges témoignent de leurs importances culturelle et stratégique, ainsi que des occupations quotidiennes des hommes y vivant. Pensons à la villa gallo- romaine de St Ulrich, aux pans de murailles subsistant de l'enceinte fortifiée de Sarrebourg, aux grandes voies de communication romaines, à l'abbaye de Hesse, à l'antique château-fort de Dabo et à celui de Dürrenberg. Jusqu'à ce jour, nulle trace à Plaine-de-Walsch en ces époques reculées; pas l'ombre d'une ancienne forteresse, pas de document écrit faisant mention d'une quelconque activité humaine, aucune vieille poterie ou autre objet manufacturé, rien, mais vraiment rien ne permet de faire vivre notre village avant 1707. Seule une indication du Dr. E. Linckenheld dans le "Répertoire archéologique de l'arrondissement de Sarrebourg" nous apprend l'existence du "Konigstein" (1) qui serait un monument mégalithique, ce qui laisse supposer qu'il y a plus de 2000 ans se trouvaient sur le ban de notre commune des hommes primitifs certes, mais suffisamment organisés pour avoir pu léguer quelque chose à leurs lointains descendants. Peut-être qu'un jour, la découverte d'une pierre taillée, d'une pièce de monnaie en bronze ou d 'un outil en fer rouillé viendra nous révéler davantage. Pour l'instant, nous pouvons toutefois admettre qu'à une époque très reculée, les rochers et les cavités naturelles du Rehtal ont pu servir d'abri et d'habitation à des groupes d'hommes et de femmes qui, dans leurs migrations successives, y trouvèrent des baies et des racines pour se nourrir, de l'eau pour se désaltérer et du bois pour se réchauffer. Cerfs, chevreuils, sangliers et petit gibier leur fournissaient la viande comme aliment, les os pour se fabriquer divers objets et des peaux pour se vêtir. Quand j'étais encore bien jeune, dans un sermon, le Curé Parmentier avait dit "... les hommes préhistoriques qui vivaient dans les grottes du Rehtal...". Ces paroles m'avaient bien intrigué à l'époque, et encore maintenant, je suis convaincu que des hommes ont pu vivre de façon rudimentaire sur le sol de notre village, même si ce n'est pas formellement prouvé. Peut-être qu'un jour, des preuves seront mises à jour... Quand les seigneurs de Lutzelbourg confient à des verriers l'exploitation de leurs "forêts en terrain accidenté" sises sur le ban du village actuel, on peut se tourner vers la définition de Littré qui précise que "la forêt était à l'origine un espace sur lequel on avait prononcé "un ban", une proscription de culture et d'habitation dans l'intérêt de la chasse seigneuriale". Il est tout à fait concevable que ces forêts constituaient des réserves de gibier pour les "Lutzelbourg". De plus, en se rapportant au substantif latin, "foresticus" signifiant "extérieur", on peut aisément se représenter combien le ban actuel - de même que celui des communes limitrophes - pouvait être un territoire isolé des voies de circulation et des centres d'habitation plus anciens. Ce qui ne veut nullement dire qu'aucune habitation ne s'y trouvait. Dans l'ouvrage de Roland Bechmann "Des forêts et des hommes"(2), des indications bien documentées nous apprennent que les forêts au Moyen-Age accueillaient une foule de gens, aussi bien des ermites que des charbonniers, ou encore des petites communautés de paysans qui menaient une vie itinérante, se déplaçant souvent pour trouver leur subsistance sur des terres qui étaient exploitées selon les besoins et les demandes. Les forêts n'étaient pas forcément des futaies aux arbres majestueux, mais bien souvent une succession de taillis, des buissons, des clairières herbeuses permettant l'existence des grands herbivores sauvages - cerfs, chevreuils, daims - et aussi d'animaux domestiques - bovins, caprins, ovins et équins. Porcs et sangliers pouvaient également s'alimenter dans cette végétation sauvage. L'espace forestier constituait une contrée où alternaient buissons, futaies et cultures. C'était donc un "espace dont on a éliminé, extrait, extirpé les arbres, quel que soit le moyen employé, qu'il se soit agi de "exarare" (à la charrue) ou de "exardere" (par le feu)". Cet endroit, appelé essart, "pouvait être soit un défrichement pour constituer des champs permanents, soit un défrichement temporaire permettant de cultiver pendant un an ou deux une parcelle, débarrassée de sa végétation forestière, et qui, ensuite, était rendue à la forêt et exploitée en taillis" (3). L'essartage consistait à couper les arbres, de préférence en hiver. Les meilleurs bois étaient utilisés comme bois d'oeuvre ou de menuiserie, les autres servaient à confectionner des bûches ou des fagots pour la cuisson, le chauffage, la fabrication du charbon de bois, les industries telles que tuilerie, briqueterie, verrerie, poterie, etc... On peut comprendre également que les Lutzelbourg connaissaient bien ces forêts, car, en les cédant à Dominique Voinier pour une exploitation verrière, ils avaient connaissance du point d'eau près duquel pouvait s'implanter un four. Des personnes m'ont affirmé qu'elles avaient entendu dire qu'un couvent (Kloster) se trouvait à l'emplacement du village autrefois. Aucun récit, aucun texte n'est là pour confirmer ces dires. Mais, à une époque lointaine quelques ermites ont peut-être formé ici une petite communauté dont on n'a gardé trace que par la tradition orale. Ainsi qu'il est écrit plus haut, les documents tangibles sur l'existence de notre village ne couvrent qu'environ 300 ans. Malheureusement, du fait de l'incendie du village et notamment de la mairie et de l'église, les archives communales sont parties en fumée lors du bombardement par les Allemands le 20 août 1914. Autrement dit, à part les documents se trouvant déjà aux archives départementales de la Meurthe, à Nancy, rien ne permet réellement de faire revivre le village sur cette période de plus de 200 ans (1707 - 1914). Il reste bien sûr les textes des auteurs cités plus haut (Durival et Lepage), ainsi que la tradition orale qui s'est transmise de génération en génération, avec tous les oublis et toutes les exagérations qu'on trouve généralement dans ce genre de translation. Une autre source d'information, couvrant la période allant de la fondation du village jusqu'à la destruction de ses archives, demeure l'excellent ouvrage d'Antoine Stenger : "Verreries et verriers du pays de Sarrebourg"(4Il y retrace de façon précise et complète les débuts de ce village de verriers qui verra sa verrerie être transférée à Vallérysthal en 1855. Il ne reste de ce temps de prospérité industrielle qu'une plaque portant l'indication "Impasse de la Verrerie" sur le pignon de la maison n° 1 de la dite rue. Dans le dialecte local, que de moins en moins de gens pratiquent, on appelle le site de la verrerie disparue : "le Mttehof' (5), ce qui veut dire "le domaine de la verrerie", mais cette expression ne reflète qu'imparfaitement la période de célébrité que connurent notre verrerie et notre village. Celui-ci continua à se développer et à s'étendre. Des noms de familles disparurent, d'autres apparurent. La vie associative, sous des formes diverses, anima les liens entre villageois et permit les contacts avec les bourgs voisins. Des pages sombres endeuillèrent la population en tuant ses enfants, pendant les conflits de 1914-18, de 1939-45, et durant les événements qui se sont déroulés en Afrique du Nord. Malgré cela, la vie continua, au fil des années, à couler dans ce village éloigné des trépidations de la ville, mais envié pour sa situation dans un écrin de verdure et de forêts. Après ces préliminaires, je vais m'attacher à développer les différents points évoqués précédemment, afin de tirer de l'oubli une partie du passé, de donner la parole aux vestiges et aux écrits et d'expliquer, partiellement du moins, le temps présent. Quant à l'avenir, nul ne sachant de quoi il sera fait, force est d'espérer qu'il permettra à chacun d'être heureux et de communiquer aux générations futures une parcelle de la première lueur jaillie des entrailles du premier four, à l'occasion de la fusion du premier verre de la "verrerie dite la Fontaine Verte de la Plaine de Walsch".

Photo aérienne du village prise en 1990 Assemblage de la carte de la N° 142 et N° 162. Carte réalisée par Ch. Piquet, géographe ordinaire du Roi et de S.A.R. Monseigneur le Duc d'Orléans I. PRESENTATION DE LA LOCALITE

Sur les dépliants touristiques, Plaine-de-Walsch n'est pratiquement jamais signalé. C'est à peine si on mentionne accessoirement le cadre pittoresque du Rehtal. Aucune route de grande fréquentation ne passant sur le ban de la commune, on ne trouve sur les cartes de la petite région du sud-ouest de Sarrebourg que la mention de localités telles que , , Dabo, , Vallérysthal ou . Ces bourgs, outre une population plus nombreuse, bénéficient de la présence sur leur territoire de petites entreprises à caractère artisanal ou industriel, ou encore de sites classés. A Plaine-de-Walsch, rien n'incite le touriste ou même le créateur d'emploi à y faire une halte. Cette vie à l'écart des grands axes de circulation est bien entendu bénéfique à la quiétude de l'endroit. Néanmoins, Sarrebourg se trouvant à moins de 10 km, il est facile de s'y approvisionner ou d'y partir travailler. En outre le village n'est pas un lieu de passage, puisque, pour les habitants des villages situés à des distances plus importantes du chef- lieu d'arrondissement, le chemin leur est plus aisé et moins long en suivant la vallée de la Bièvre par Hartzviller ou en traversant le bois de Niderviller. Le village de Plaine-de-Walsch constitue en quelque sorte une enclave, voire un îlot que les routes contournent. Une route pourtant le dessert sur toute sa longueur, la départementale 96. Venant de Sarrebourg et serpentant jusqu'à en passant par Walscheid, la D 96 traverse le village en s'appelant Grand'rue. A la sortie du village, elle se divise en deux : la D 96 qui descend par le Stossberg en direction de Vallérysthal, et la D 96c qui file vers le hameau du Rehtal où elle est relayée par la D 45 débouchant dans la vallée de la Zorn. Le ban de Plaine-de-Walsch est limitrophe avec ceux de Niderviller, , Dabo, et Brouderdorff. La seule "frontière" vraiment visible avec un autre ban est celle matérialisée par la rue du Stade sur une courte distance. Les autres lignes de séparation sont indiquées par des bornes récentes, datant d'il y a quelques années seulement. La ban s'articule en 3 parties principales : - le village d'origine groupé autour des bâtiments publics tels l'école-mairie, l'église et les commerces disparus de nos jours; - les prés et les champs cultivés avec deux zones habitées: le Stossberg et le Chemin Noir; - la partie boisée du Rehtal, avec un îlot d'habitations, au carrefour des départementales 45 et 97. Ces 3 parties, bien distinctes et se succédant représentent une bande de terrain d'environ 5 kilomètres dans le sens est-ouest; ce qui indique combien la commune, malgré une superficie modeste - tout en étant comparable aux villages voisins - est modelée en fonction de la voie de circulation qui la traverse de bout en bout. Cette voie constitue "l'épine dorsale" du ban.

Ci contre, sur cette carte topographique datée de 1742 figure pour la première fois la localité sous le toponyme de "la plaine de Valche . On peut noter qu'entre Brouderdorff et la verrerie de la plaine de Valche se trouve un lieu désigné sous la vocable "Jardinage". Selon toute vraisemblance, il s'agit du secteur "au grand jardin" figurant encore actuellement sur le cadastre.

On a coutume de parler du "plateau lorrain", vaste zone située entre le bassin parisien et le massif montagneux des Vosges. La région de Sarrebourg se confine à l'extrémité Est du plateau lorrain et atteint les premiers contreforts vosgiens. Plaine-de-Walsch s'étend à mi-chemin sur une ligne nord-ouest/sud-est qui part d'une altitude de 250 m environ à Sarrebourg pour arriver à celle de 558 m au Hochwalsch derrière Walscheid. C'est dire combien le village, qui culmine à 417 m au Rehtal, domine les paysages situés à l'ouest, mais est au pied des hauteurs à l'est. Naturellement, le ban de Plaine-de-Walsch ne constitue pas une surface uniforme: au sein même du village, les descentes et les remontées de la route et des chemins vicinaux indiquent un relief relativement accidenté. De même, les cotes relevées (6) à différents endroits de la commune marquent la variété du relief: 328 m à l'extrémité de la rue de la Fontaine, 334 m près de l'école, 364 m devant le cimetière militaire, 343 m au carrefour du Rehtal, 375 m sur le chemin contournant le Wackenberg, 417 m au point culminant du Wackenberg, 244 m à l'extrémité de la vallée du Rehtal.

Ce n'est pas un hasard si le relief comprend de tels écarts sur des distances de quelques centaines de mètres. La raison tient à la structure géologique du terrain. Pour y voir plus clair, j'ai fait appel à M. Wingert, de Sitifort, qui a étudié la nature des sols dans la région de Sarrebourg. Ses explications m'ont permis de traiter un sujet qui est généralement l'affaire de spécialistes en la matière.

La région de Sarrebourg est globalement issue des formations géologiques du trias, période de l'ère secondaire (7) - celle-là même qui a vu l'apparition des dinosaures. Inclinées en pente douce vers le centre du Bassin Parisien, en direction du Nord-Ouest, trois bandes lithologiques (8) divisent la région. L'inclinaison de ces bandes provient du rehaussement des Vosges hercyniennes, ce qui a amené ces terrains du trias à l'affleurement tels qu'on peut le constater aux endroits érodés.

D'après la carte géologique du pays de Sarrebourg (9), le ban de Plaine-de-Walsch se trouve quasiment en entier sur un sol de type "Muschelkalk inférieur", plus précisément sur un sol de zone moyenne argileuse. Toutefois, en remontant le Rehtal, on peut admirer encore actuellement les corniches du conglomérat principal au fond du ravin. Mais, dès que les jeunes résineux, qu'on a plantés après le déboisement de la vallée du Rehtal, auront atteint la taille de quelques mètres, ces roches seront à nouveau dissimulées jusqu'à la prochaine exploitation massive, c'est-à-dire dans plusieurs décennies.

Pour décrire un peu mieux ce grès coquillier, on peut dire qu'il est "rouge, micacé avec des passés argileux et des zones dolomitiques, contenant des coquillages marins. Le tout a une épaisseur de 9 mètres". Il apparaît, comme indiqué plus haut, dans la gorge du Rehtal CIO). Dans la descente du Stossberg, où des carrières étaient encore exploitées au début du siècle, on décèle des couches typiques du trias inférieur; ce sont des grès bigarrés (Buntsandstein), dont le grès à Voltzia (Voltziensandstein) et les couches intermédiaires (Zwischenschichten).

L'ensemble des terrains cultivés ou boisés du ban de Plaine-de-Walsch ne laisse deviner la composition du sous-sol qu'aux endroits où des failles nettes dévoilent les superpositions des sédiments. Partout ailleurs, l'épaisseur de la terre végétale sur des terrains généralement bien arrosés, apparaît comme étant de composition lourde, ceci étant dû à la présence argileuse qui se concrétise davantage en allant vers Niderviller et sa carrière d'argile de la tuilerie. Néanmoins, l'apport de résidus gréseux venant de l'érosion des roches de grès vosgien descendus des hauteurs situées à l est du ban, a permis un mélange assez heureux qui aboutit à un sol de type intermédiaire, ni trop argileux, ni trop sableux. Cependant, en raison de "détails locaux dus à l'érosion ou au vallonnement de la région, on constate fréquemment la juxtaposition de terrains disparates quant à leur âge et leur nature". Carte de France au 50000e (type 1922) File XXXVI-15 Relevé géologique des environs de Plaine-de-Walsch. Dessiné et publié d'après les levées de 1881, 1882 et 1903, révisé en 1956 par le bureau de recherches géologiques Il est inutile de chercher une origine romaine ou une déformation d'un nom de site du moyen-âge, étant donné que le village n'existait pas à ces époques reculées. Suivons donc simplement la chronologie des appellations, telle que la mentionne H. Hiegel(li \ On y apprend que Flory (12) parle de l'emplacement de notre village sous le nom de Plenterwald ou Plinterwald, pour l'année 1707, date de la création de la verrerie. Dans la première orthographe, on peut y voir : - plenter. du latin plantare, c'est-à-dire planter, jardiner, (...) - et Wald. de l'allemand, la forêt; On aurait donc : la futaie jardinée, autrement dit un endroit où alternent les cultures et les endroits boisés. Une autre explication : - plinter, de l'allemand pliindern, c'est-à-dire piller.saccager (...) - et Wald (cf ci-dessus) On pourrait donc penser à la forêt dévastée, ce qui est possible vu la proximité de la guerre de Trente Ans ou même une cause d'ordre naturel (incendie, tempête). Dès 1714, dans le compte-rendu d'une visite canonique, Bour écrit Blindenwalsch, ce qui se décompose en, - Blind, aveugle, (...) - et Walsch, qui est le nom populaire et raccourci de Walscheid D'après le Dr Heymes, ancien curé de Walscheid, le nom "Walscheid" désigne ce que le lieu est réellement, c'est-à-dire l'endroit frontière de la Gaule et de la Germanie, les limites des Gaulois ou "Walsche" par rapport aux "Germains". Le nom "Walsch" ou "Welsch" désigne les Gaulois appartenant au peuple celte des Médiomatriques qui sont implantés à (Divodurum), dans une grande partie de la Moselle et une partie du Bas-Rhin. Dans son ouvrage sur Walscheid, J.B. Boog note à juste titre que "les Welsch" sont encore de nos jours, dans l'idiome local, les habitants de langue française". Lepage note qu'en 1751, on écrivait Blinderwalch, ce qui n'est pas loin de la graphie précédente. Par contre, en 1772, le même Lepage parle de : Plaine de Walsch. Il faut reconnaître que la transformation est de taille, même si, en partie, on peut la mettre sur le compte de transcriptions successives et maladroites. Ceci se vérifie d'ailleurs chez Durival qui, dans sa description de la Lorraine, en 1779, passe en revue les orthographes précédentes tout en les modifiant à son tour : Blain-de-Valsch, Plein de Valche, Plaindevalche et Plaine de Valche. Dans les cahiers de doléances de 1789, on écrit Blaindevalches, ce qui reprend des éléments des auteurs précédents tout en conciliant probablement l'écrit avec la phonétique. Dorvaux, à la fin du XVIIIème siècle, mentionne Plain-de-Valsch. Dans un texte de l'an XI, on écrit à nouveau Blain-de-Valsch. Lepage indique qu'en 1862, on parle de Plaine-de- Valsch : le "w" de 1772 est redevenu un simple "v". Durant l'occupation prussienne de 1870 à 1918, il est question de Hochwalsch, ce qui montre qu'on a tenu compte du fait de la proximité du village de Walscheid en gardant le suffixe Walsch, et en désignant cet endroit comme une hauteur, grâce au préfixe "hoch". En observant sur une carte d'état-major les relevés des hauteurs, on constate effectivement que le village de Plaine-de-Walsch est situé sur un promontoire plus élevé que les bourgs environnants tels que Niderviller, Brouderdorff, Hartzviller, Troisfontaines et Vallérysthal. Ce n'est que quelques kilomètres plus loin, à Walscheid, que pointent, avec les premiers contreforts vosgiens, des sommets plus élevés. En 1940, on revient à l'écriture du début : Plinterwald. Dès 1945, retour à Plaine-de-Walsch qui est encore l'orthographe actuelle. Certains ont voulu voir dans la graphie Walsch, une déformation de Wald. Je ne le pense pas. De même je ne crois pas que Plaine soit un avatar de plenter ou de Plinter. Le plus simplement, on peut admettre qu 'il y a concordance et coïncidence entre les différentes appellations, mais qu'en fin de compte, c'est bien par rapport à Walscheid qu'on en est venu à faire du Plinterwald (la forêt dévastée) du début du XVIIIe siècle, le nom du village de Plaine-de-Walsch de cette fin du XXe siècle.

1890: l'administraion allemande fait encore figurer le nom de Plaine-de-Walsch, alors qu'en 1895, on en est à Hochwalsch. Chaque parcelle, lieu-dit, rue ou ruelle tire son nom de son usage premier ou d'un fait qui avait marqué les esprits. Certains noms ne figurent sur aucune carte, ni sur le cadastre: ce sont simplement des appellations populaires qui disparaissent progressivement de la mémoire collective en raison de leur forme dialectale qui n'est plus usitée et qui n'est pas passée dans le vocabulaire français. Pour des raisons de commodité, nous utiliserons une classification alphabétique, mêlant dénomination française et allemande selon que l'une ou l'autre est en usage actuellement. Des notes relevées par l'administration allemande en 1941 nous ont permis d'apporter quelques éclairages supplémentaires aux renseignements fournis par les habitants. La rue des Aulnes Il s'agit du chemin bordé par la Erlenhecke03} et qui commence à être viabilisé tout en gardant son charme de chemin champêtre. Dans son prolongement, on parvient au Schindelgraben, réputé pour qu'on y perde le sens de l'orientation, la nuit. La rue du Cimetière Cette ruelle, autrefois appelée le "Birkenweg" (le sentier des bouleaux) permettait de quitter la grande route pour passer derrière le cimetière. Elle formait la frontière naturelle avec le ban de Brouderdorff. A cet endroit, était un petit bois de bouleaux, ce qui explique le nom du sentier y menant. Dannfeld et Dannmatte Ces deux sections ont probablement été des endroits plantés de résineux (cf l'allemand Tanne=sapin). D'après les notes de l'administration allemande, la forêt y aurait été totalement détruite pour en faire des champs à une époque non déterminée. L'Enclos Cette parcelle était autrefois clôturée par des haies. Il s'y trouvait une fontaine propice pour laver le linge. Le Faubourg Comme les grandes villes, Plaine-de-Walsch peut s'enorgueillir d'avoir un quartier qu'on appelle le faubourg. Il s'agit en fait de la partie du village qui s'est rajoutée au delà des logements et des bâtiments de la verrerie. On convient généralement qu'il s'agit des maisons qui sont construites à partir du groupe scolaire, en direction du haut village, (das Oberdorf).

Ancienne construction dont l'usage premier n'est plus connu, se trouvant en bordure de la rue de la Fontaine et le long du Hirtengissel - (Dessin de Nicolas Rabin) La rue de la Fontaine, ou Brunnengasse Son nom vient, bien sûr, du fait qu'elle passe devant l'ancien lavoir-abreuvoir, dont l'eau courante était très utile au milieu du village, notamment à l'époque de la verrerie. La rue de la Fontaine part de la route principale, en bas du Kirchberg et serpente entre les maisons jusqu'au chemin privé menant à la ferme Esch (au lieu dit Oberviller). La rue de la Forêt Appelée actuellement la rue de la Forêt, elle relie la rue principale et la rue de la Fontaine. C'est probablement le plus vieux chemin du vieux village, le long duquel s'étaient établis les premiers verriers.

La rue de la Forêt actuellement Haut de la Haie Cet endroit était appelé "Am Buchbaum", c'est-à-dire "au hêtre". Un grand hêtre s'y dressait jusqu'en 1914, et les enfants l'auraient brûlé en faisant du feu dans son tronc creux. Le Hirtengassel La numérotation de cette ruelle fait désormais partie de celle de la rue de la Fontaine, et bien peu de personnes se souviennent encore que s'y trouvait le "Hirtenhiesel", c'est-à-dire la maison du gardien de troupeaux. Hohnau Cette parcelle semble désigner un secteur sujet à la dérision, mais aucune explication sérieuse de cette dénomination ne nous a été fournie. Le Hühnerberg, ou le mont des poules C'est un simple lieu-dit sur une portion de route comprise entre l'église et la route descendant vers les garages Ambry. L'origine de ce nom est incertaine : peut-être y avait-il plus de ces gallinacés sur la chaussée à cet endroit qu'ailleurs ? Le Holtzschlag La traduction de ce toponyme : la coupe de bois. En bordure du bois des Foeschen, l'endroit aurait été jusqu'en 1890 un lieu de pâturage pour les porcs, avant d'être planté de sapins. La rue des Jardins Cette appellation récente est en partie incomplète, car cette rue mène vers ce qu'on appelle encore les "Haneftgarten", c'est-à-dire les jardins où l'on cultivait du chanvre, les chènevières. Une traduction plus fidèle aurait donné rue des Chènevières. Au grand Jardin Cette parcelle a fort probablement servi dès l'origine aux cultures potagères des premiers habitants. Le Kirchberg Il s'agit d'une montée un peu raide qui passe devant l'église. Langfeld Ce secteur était principalement destiné à la culture de céréales et de pommes de terre. La rue des Roses En dialecte, cette rue était appelée "Fuchsgasse", c'est-à-dire la rue du renard. La nouvelle appellation n'est nullement fantaisiste, car il existait en bordure de cette rue une parcelle appelée "Au jardin des roses" (en dialecte, "im Rosengarten"). Curieusement, dans le parler populaire, on la nommait également "Hirtengarten", c'est-à-dire le jardin des bergers qui aurait été mis à la disposition des pâtres communaux. Voilà qui nous mène loin de la dénomination de "Rue du Renard", bien vivace dans la tradition orale, mais dont la raison est pour le moins embrouillée. Les gens d'ici pensent qu'autrefois les renards sortaient de la forêt jusque vers les maisons de ce quartier, en quête de nourriture. Une anecdote tirée de la "Saarburger Zeitung" en date du 6 décembre 1884 nous apprend que dans la "Gazette de Lorraine" a été relaté ce qui suit: "Un curieux exploit de chasse a eu lieu dans notre commune et les héros de ce drame ne sont même pas munis d'un permis de chasse... Nommons les M.S. et J.-B.S. Or M.S. a une basse-cour très peuplée... Cependant depuis quelques temps son poulailler se dégarnissait, et lui ne mangeait pas de poulets... Il en parla à son ami J.-B.S. - "Grand naïf, lui dit son ami, c'est le renard qui vient manger tes coqs et tes poulets. Si nous faisions le guet ? - Entendu..." Après 1 heure d'attente et de silence, ils aperçurent comme une ombre qui s'avançait lentement, avec discrétion, s'arrêtant, regardant à gauche et à droite... La moitié du corps était dans l'écurie, l'autre moitié dans la cour. M.S. se précipita sur l'animal qui voulait entrer, le saisit par la queue, serra le corps avec son pied vigoureux, s'écriant : -"C'est le renard ! C'est le renard ! " J.-B.S. se précipita par une autre porte de l'écurie, saisit une fourche, et maintint la bête par le devant. Les 2 amis prirent le renard vivant, lui attachèrent une chaîne au cou et le promenèrent par le village en chantant : "0 ! Wass süss ! La peau est magnifique. On la fera tanner". Une telle aventure semble plausible, mais que ce soit elle qui ait donné son nom à cette rue n'est confirmé par aucun témoignage oral ou écrit.

La Saugass Il s'agit de la partie de la rue de la Forêt se prolongeant après l'intersection avec la rue de la Fontaine. C'était le chemin emprunté par les gardiens de porcs menant leur troupeau à la pâture. C'est là aussi qu'on déversait longtemps les ordures telles que débris végétaux, vaisselle cassée, vieux ustensiles ébréchés, etc... Le Sauwinkel Ce secteur servait probablement au pacage des porcs. Une fontaine y aurait existé pour permettre d'abreuver ces animaux. La rue du Stade Autrefois, on l'appelait "Steingassel", c'est-à-dire le chemin de pierres. Il menait aux carrières de grès, au point de jonction des bans de Plaine-de-Walsch, Troisfontaines et Brouderdorff. De là, son prolongement mène à Hartzviller. Ce chemin aurait également été appelé "Hanfgraben", car il donnait accès aux parcelles où l'on cultivait du chanvre. L'appellation rue du Stade date de l'époque où le stade communal a été implanté, donc en 1976. L'impasse de la Verrerie Cette ruelle rappelle heureusement que c'est de là que démarra une modeste exploitation verrière qui se tailla une réputation au niveau national et par-delà nos frontières, jusqu'en Amérique. Elle a été élargie pour permettre le passage des voitures actuelles. Il faut souhaiter que longtemps encore on se rappellera qu'elle n'était pas une impasse, mais une réelle ouverture pour une industrie prospère. La Wildmatt Dans ce secteur, "la prairie sauvage", des feux follets auraient été observés. Perspective à l'entrée de la rue de la Fontaine pendant la guerre de 1914-18. Les troupes allemandes y sont bien représentées, alors que les ruines de la maison Krémer Pierre-Paul, au fond, rappellent les combats d'août 1914

Au début du 20, siècle, avant le conflit de 1914-18, "vue sur la rue du village". Au fond à droite, l'ancienne église. Photo prise à hauteur de la maison Kuhn à gauche et Eugène Schiby à droite Plan cadastral de 1884 Quand on parle d'un "écart", on pense à un hameau, voire à un bâtiment éloigné de l'agglomération principale, en retrait même de la grande route. Les trois "écarts" de Plaine-de-Walsch, bien que distants du village, sont néanmoins situés le long de la grande route, sauf le Chemin Noir qui n'est qu'une "bretelle" reliant les quartiers de Vallérysthal à la D.96. Le Chemin Noir ou Schwarzerweg : Ce nom subsiste encore actuellement. Ce chemin débute entre le cimetière militaire et le transformateur EDF et constitue un raccourci pour qui veut rejoindre les quartiers de Vallérysthal. Son nom vient probablement des scories et autres déchets des verreries qui y étaient répandus. Comme des arbres le bordaient des deux côtés,l'obscurité s'y installait tôt le soir, de sorte que son appellation semble aller de soi. Une personne âgée m'a affirmé qu'une lampe à huile était allumée chaque soir par le garde-champêtre pour indiquer la voie aux passants qui auraient pu s'égarer. Des deux maisons s'y trouvant au début du siècle, une seule subsiste, portant encore les marques des tirs qui l'avaient criblée en août 1914. La deuxième maison a été démolie pour laisser la place au coquet pavillon de la famille Pierre-Paul Deutsch. Cinq autres maisons s'y sont rajoutées depuis une quinzaine d'années. Ces constructions neuves préfigurent peut-être un futur quartier résidentiel qui pourrait, à terme, être le prolongement du village au- delà de la Haie des Aulnes. Les immeubles Thiébaut et Jung constituent en quelque sorte un écart du Chemin Noir, car ils se placent à la jonction du Chemin Noir et de la départementale 96, en bordure de celle-ci. Une nouvelle maison construite récemment au début du Chemin Noir rapproche un peu plus cet écart du village. Le Stossberg Voici comment est justifiée la dénomination "Stossberg" pour l'écart se trouvant sur la route menant vers Troisfontaines : "Après les maisons du Stossberg, une route en si mauvais état obligeait les personnes à pousser (mitstossen, c'est-à-dire à donner une poussée, "ein Stoss") les charrettes pour épauler les animaux de trait". Neuf habitations jalonnent la descente du Stossberg. A main droite se nichent deux maisons datées de 1910 et de 1906. La première appartient à M. Camille Krummenacker, agriculteur et ancien adjoint au maire de Plaine-de- Walsch. A côté se trouve, accolée la maison de son frère Paul, décédé; cette maison est inhabitée depuis une quinzaine d'années. En face, une maison plus récente, puisque de 1950, est habitée par un cousin des deux frères Krummenacker précédents, Lucien Krummenacker. Les deux maisons citées du côté droit ont été construites à l'emplacement d'un lieu d'extraction de pierres de taille. D'ailleurs la paroi se profile à l'arrière, de même que celles qui se révèlent un peu plus en contre bas, attestant de l'exploitation d'une carrière de grès. En arrivant au terme de la descente du Stossberg, ce sont encore trois maisons qui se trouvent en bordure de la route, alors qu'une autre se cache au fond du vallon, à gauche de la route. A l'extrémité du ban, à la limite de celui de Troisfontaines se dresse une demeure plus imposante, avec plusieurs logements, qu'on appelle "d'Biickerei" (14). La raison en est simple: une boulangerie y fonctionnait, approvisionnant notamment en pain les ouvriers de la verrerie de Vallérysthal et les familles des verriers installées à proximité. Au moins une maison existait encore il y a une dizaine d'années en face de la "Biickerei", mais elle a été démolie pour laisser la place à un entrepôt de l'entreprise de construction Remen. Le Rehtal Le lieu-dit "Rehtal", c'est-à-dire "vallée du chevreuil", est l'écart le plus éloigné du village. "Le carrefour de routes ainsi que le petit hameau portant ce nom ne nichent pas dans une vallée, mais sont situés sur un plateau au seuil des Vosges,sur la commune de Plaine-de-Walsch. Au siècle dernier, ce modeste hameau, datant de 1868, était appelé "Haut de Schlag", d'après Miindel, une déformation de "Holzschlag", c'est-à-dire coupe de bois, et puis Rehbrunnen et enfin Rehtal" (15). Cette présentation du Rehtal sert de prélude à une description poétique de cette belle zone boisée située à l'extrême limite du finage de la commune. L'auteur continue en évoquant les récits légendaires qui s 'y rattachent. Nous en faisons mention à d'autres moments. Pour l'instant, disons que les deux plus imposantes bâtisses remontent à la deuxième moitié du siècle dernier. SOCIETE D'HISTOIRE ET D'ARCHEOLOGIE DE LORRAINE SECTION DE SARREBOURG

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