le Parti Democrate Progressiste

En la période allant du 15 Janvier 2011 jusqu’au 15 Septembre 2011

KHAKFAOUI Mohamed SAHBI

Remarques Préliminaires :

*Ce travail ne sera pas un récit historique des évènements qui ont eu lieu depuis le 14 janvier et les réactions du PDP à leur encontre. Ce travail se veut une analyse des lignes de continuité et des lignes de ruptures ainsi que la description de l’activité de ce parti après le changement radical survenu en Tunisie depuis la chute de Ben Ali. Ceci expliquerait l’absence de l’ordre chronologique dans certaines analyses des positions prises par le parti.

*L’auteur de ces lignes est membre du Comité Central du P.D.P. Il était d’une complexité immense que de faire le travail intellectuel nécessaire afin de dissocier l’engagement partisan des nécessités de la neutralité axiologique demandé à tout chercheur face à son objet d’étude. Un discours prononcé par Pierre Bourdieu en 2000 était d’une aide considérable1. Il est au lecteur de décider si, dans l’analyse rationnelle d’un phénomène politique, le champ du passionnel est réduit à son degré le moindre ou pas.

*Il convient également de noter, avant d’entamer l’analyse, que les études des partis politiques et les changements qu’ils subissent s’inscrivent dans une période de temps suffisamment longue afin de bien les apprécier. Les analyses et

1 Pierre BOURDIEU, L’Objectivation Participante, Actes de la Recherche en Sciences Sociales N°150, Décembre 2003, p-p : 43-58. les avis émis dans le cadre de ce travail peuvent s’avérer erronés dans peu de temps. Ainsi, l’on a essayé de faire de ce papier un compte rendu des quelques observations que l’on a pu relever depuis le 15 Janvier.

Introduction La Tunisie vit des évènements considérables depuis que le jeune vendeur ambulant Mohamed BOUAZIZI, le "Jan PALACH" tunisien, s’immola par le feu2. Le départ surprenant du président Ben Ali le 14 Janvier 20113 entra le pays dans une phase transitoire où les acteurs politiques sont appelés à percer un chemin vers une construction démocratique visant l’édification de nouvelles institutions pour passer le pays à une phase où la démocratie serait la règle de la compétition autours du pouvoir.

Dans ce cadre, ce fut un orage qui ébranla le PDP quand sa direction ait décidé de rejoindre le gouvernement formé par annoncé le 17 Janvier 2011. Plusieurs démissions parmi ses membres, la plupart des jeunes cadres, des manifestants qui attaquent ses locaux rue Eve NOHEL, rupture de ses alliances politiques qui duraient depuis des années… Mais aussi une vague d’adhésions sans précédente qui avait mis l’appareil partisan à dos, incapable de répondre à toutes les demandes… Depuis, le PDP avait connu des mutations qui ont changé sa facette.

Ce travail se propose de suivre l’évolution du Parti Démocrate Progressiste depuis le 15 Janvier 2011 jusqu’à la date de la parution de ce travail. Nous procéderons d’abord à un bref récit historique pour mieux présenter cet acteur. Ensuite, et pour mieux cerner les lignes de continuité et de rupture dans le parcours du PDP avant et après le 14 Janvier 2011, nous proposerons un essai

2 “Tunisie: accrochages entre manifestants et forces de l'ordre à Sidi Bouzid” AP, 18-12-2010. 3“ Le president en fuite Ben Ali arrive à Jeddah”, AFP, 15 Janvier 2011. 2 d’analyse des structures de ce parti avant la chute de Ben Ali. Ca sera le référentiel d’une comparaison latente que nous entamerons dans la troisième partie en procédant à l’analyse des positions prises par le PDP depuis le 14 Janvier ainsi que les mutations qu’il vit depuis cette date.

Première Partie : Brève histoire du Parti Démocrate Progressiste

Le Parti Démocrate Progressiste était l’un des partis politiques les plus visibles sous le régime de Ben Ali. Fondé par Ahmed Néjib CHEBBI et plusieurs de ses compagnons issus du mouvement Perspectives-L’Ouvrier Tunisien (un mouvement politique d’extrême gauche considéré comme le principal mouvement d’opposition pendant les années 60 et 70) sous le nom du Rassemblement Socialiste Progressiste, il avait pour but l’unité des forces de gauche. L’annonce de cette fondation fut proclamée le 13 Décembre 19834 mais sans l’obtention de la légalisation officielle. Toutefois, le groupe fondateur du R.S.P. a pu obtenir le droit d’édition d’un journal, Al-Mawkif5, devenu l’organe central du parti.

Après la prise du pouvoir par Zine el-Abidine Ben Ali, le parti s’est rallié au nouveau régime croyant à ses promesses de réformes et de libéralisation du paysage politique. C’est dans ce cadre qu’il signe le Pacte National de 1988, année à laquelle il obtient sa légalisation6. Après les élections de 1989, et malgré la fraude apparente dont le nouveau régime fait preuve, le parti continue dans sa politique de coopération avec les autorités. Ahmed Néjib CHEBBI, son

اﻟﺘﺠﻤﻊ اﻻﺷﺘﺮاﻛﻲ اﻟﺘﻘﺪﻣﻲ، اﻟﻮﺛﺎﺋﻖ اﻷﺳﺎﺳﯿّﺔ، ﺗﻮﻧﺲ، ﻣﻨﺸﻮرات اﻟﺘﺠﻤﻊ اﻻﺷﺘﺮاﻛﻲ اﻟﺘﻘﺪﻣﻲ، ص3. 4 5 Le premier numéro est apparu le 12 Mai 1984. 6 Arrêté du ministre d’Etat chargé de l’intérieur du 12 Septembre 1983, JORT du 30 Septembre 1983, N°65, p : 1342. 3 secrétaire générale se voit même confié la tâche d’envoyé spécial auprès du président yéménite lors de la crise précédant la guerre du Golf en 1990. Les rapports entre le parti et le régime de Ben Ali commencèrent à se détériorer lorsque le pays connait une vaste vague de répression à l’encontre des islamistes du Mouvement Ennahdha. Le R.S.P., à travers son secrétaire général, s’opposa à la solution sécuritaire entreprise par le régime. Jusqu’au départ de Ben Ali, le parti n’est plus revenu au sillage du pouvoir.

Le Rassemblement Socialiste Progressiste participa aux élections législatives de 1994 et de 1999. Malgré la loi électorale qui permettait aux partis d’opposition d’avoir des sièges à la chambre des députés, le R.S.P. fut le seul à ne pas y accéder7.

Deux années avant les élections de 1999, le R.S.P. inaugura une phase où il fait appel à plusieurs personnalités politiques indépendantes afin de participer à des débats dans le cadre d’un forum qui porta le nom de son journal « Al-Mawkif ». Après avoir réussi à former des listes communes pour les législatives portant le nom de l’ « Alliance Démocratique », les débats se sont conclut en 2001 lors du troisième congrès du parti qui a vu son nom changé en le Parti Démocrate Progressiste8.

Le changement du nom du parti fut une annonce d’un changement stratégique radicale qui continua jusqu’après les évènements de Janvier 2011. En abandonnant le volet "socialiste" de son identité pour le remplacer par un autre démocratique et en intégrant des libéraux mais surtout un groupe dissident du Parti des Ouvriers Communiste Tunisien et un autre connu sous le nom des

7 http://www.ipu.org/parline-f/reports/arc/1321_94.htm http://www.ipu.org/parline-f/reports/arc/1321_99.htm 8 Arrêté du ministre de l’interieur du 17 Octobre 2001, JORT du 19 Septembre 2001, N°84, p : 3722. 4

« Islamistes Progressistes »9, le P.D.P. a pris lors de ce congrès un virage idéologique pour passer de la volonté de réunir les forces de gauches à un autre projet visant l’unification des forces démocratiques10.

En 2002, le P.D.P. boycotta le referendum constitutionnel visant un amendement qui avait permis au président Ben Ali de se présenter aux élections présidentielles de 2004 et de 2009. Il avait à ses cotés à ce moment que des mouvances et des partis non reconnus11.

Il en fut de même pour les élections de 2004. Après avoir essayé de présenter son secrétaire général aux présidentielles, pourtant éliminé par la loi électorale, et aux législatives à travers 89 candidats sur 16 circonscriptions, il finira par annoncer son boycotte 3 jours avant le scrutin12 refusant de participer à ce qu’il a appelé "une mascarade électorale"13.

En 2005, Ahmed Néjib CHEBBI entama, à l’occasion du Sommet Mondial de la Société de l’Information, avec 7 autres personnalités de différents bords politiques et idéologiques une grève de la faim qui avait pour revendications la liberté de la presse, la liberté d’organisation et l’amnistie générale14. Un collectif réunissant notamment le P.C.O.T. et le Mouvement Ennahdha fut créer après cette grève de la faim et plusieurs papiers qui ont était discutés portaient sur la condition féminine, la relation entre Etat et religion…

En 2006, lors du 4ème congrès du Parti Démocrate Progressiste, Ahmed Néjib CHEBBI décida de ne pas se représenter au poste de secrétaire général cédant

اﻟﺘﺠﻤﻊ اﻻﺷﺘﺮاﻛﻲ اﻟﺘﻮﻧﺴﻲ ﯾﻌﻘﺪ ﻣﺆﺗﻤﺮه اﻟﺜﺎﻟﺚ" ﺟﺮﯾﺪة اﻟﺤﯿﺎة 2001-06-22 " 9 10 "Un parti politique supprime sa référence au socialisme" AFP, 25-06-2001. 11 "Des opposants rejettent la réforme, appellent au boycott du référendum", AFP, 12-05-2002. 12 Reuters, 21 Octobre 2004. وﻛﺎﻟﺔ ﻗدس ﺑرس إﻧﺗرﻧﺎﺷﯾوﻧﺎل ﺑﺗﺎرﯾﺦ 24 أﻛﺗوﺑر 2004 13 14 “Des personnalités politiques et associatives entrent en grève de la faim”, AFP, 18-10-2005. 5 ainsi sa place à Maya JERIBI devenant ainsi la première femme tunisienne première responsable d’un parti politique15.

Au cours de toutes ces années le journal du parti, al-Mawkif, fut à plusieurs reprises censuré ou empêché d’édition ou de distribution pour avoir tenu un discours critique virulent envers le régime. Il gagnait ainsi une notoriété publique assez importante.

En 2007, Maya JERIBI et Ahmed Néjib CHEBBI entamèrent une grève de la faim suite à des poursuites judiciaires lancées par le propriétaire du local principal du parti au centre de la capitale tunisienne. Jouissant d’un large soutien national et mondial, les deux grévistes finissent par avoir gain de cause et le problème fut résolu16.

Le Parti Démocrate Progressiste continue dans sa ligne d’opposition radicale au régime de Ben Ali. En 2010, il lance une campagne visant la « lutte contre les tentatives de détourner les principes républicains »17 suite aux appels lancés par plusieurs personnalités tunisiennes adjurant le président de la république à se représenter pour un sixième mandat en 2014 six mois seulement après sa réélection en 2009, des élections que le parti boycotta.

Après l’immolation de Mohamed BOUAZIZI le 17 Décembre 2010, la Parti Démocrate Progressiste était très actif au niveau médiatique. Plusieurs de ses membres furent arrêtés par la police tunisienne et deux de ses jeunes militants ont était blessés par bals. Le parti, passant de la contestation des mesures répressives à l’encontre des manifestants à l’appel à la formation d’un

15 Reuters, 25-12-2006. 16 AFP, 20-10-2007. اﺳﻤﺎﻋﯿﻞ دﺑﺎرة، اﻟﻣﻌﺎرﺿﺔ ّ اﻟﺗوﻧﺳﯾﺔ ّﺗﺗﻌﮭد ﺑﺎﻟﺗﺻدي ﻟﺳﯾﻧﺎرﯾوھﺎت "اﻟﺗﻣدﯾد واﻟﺗورﯾث ، ﻣﻮﻗﻊ اﯾﻼف17 http://www.elaph.com/Web/news/2010/7/578144.html 6 gouvernement de salut national, gagna encore plus de notoriété en cette période. Sa secrétaire générale était à la tête des manifestants du 14 Janvier 2011.

Après la fuite du président tunisien et l’appel de Mohammed GHANNOUCHI à la formation d’un gouvernement d’unité nationale, le PDP qui l’accepta, fut l’objet de plusieurs attaques dans la rue à travers des manifestations le ciblant ainsi que le Mouvement Ettajdid (l’autre parti qui accepta la participation au gouvernement de GHANNOUCHI) ce qui lui a valu la perte des plusieurs de ses sympathisants ainsi qu’un nombre considérable de ses jeunes militants.

Deuxième partie : Le PDP avant le 14 Janvier 2011

Dans leur analyse du syndrome autoritaire en Tunisie, M.CAMAU et V.GEISSER avancent l’idée que dans la mesure où toute activité politique, telle qu’elle est connue dans les démocraties occidentale, est réduite à son degré le moindre sous un régime autoritaire, les « formations politiques tunisiennes, s'apparentent à des groupes proto-partisans »18. Cette notion de proto-parti, avancé par Max Weber, décrit les partis politiques créés avant l’instauration du suffrage universel. Il les met en opposition avec les grandes machines politiques encadrant les masses et animées par des professionnels que sont les partis politiques modernes19.

L’analyse de CAMAU et GEISER remonte à 2003. Depuis, la Tunisie avait vécu deux élections et le Parti Démocrate Progressiste avait connu de fortes mutations, un congrès et un changement du premier dirigeant. Du coup, une vérification de la validité de ce caractère "proto" s’impose du moment que ce

18 Michel CAMAU ET Vincent GEISSER, Le syndrome autoritaire, , Presse de la fondation nationale des sciences politiques, 2003, p: 237. 19 Max WEBER cité par Daniel-Louis SEILER, Les Partis Politiques, Paris, Armand Colin, 1993, p : 95. 7 parti se donnait l’image d’un vrai parti politique. Cette idée très présente dans les esprits de ses membres et de ses leaders jusqu’à aujourd’hui nous impose la vérification de sa consistance.

La démarche ordinaire dans ce type d’analyse des partis politiques est de vérifier d’abord le caractère partisan du groupe étudié pour procéder ensuite à une classification selon les différentes typologies proposées par les sciences politiques. Ce plan ne sera pas suivi dans cette première partie. La question qui peut traverser l’esprit de n’importe quel analyste politique qui observait le cas tunisien d’avant le 14 Janvier 2011 est la quasi-tolérance envers des partis politiques farouchement opposés au régime instauré par le parti au pouvoir depuis 1956, le PDP ou même des partis clandestin dans l’imaginaire de l’opposant tunisien, semi-clandestin de fait. Les esquisses d’une réponse possible à cette question nous conduiront d’abord à poser une hypothèse, "Le PDP est un parti politique à l’instar des partis modernes sous les régimes démocratiques" pour passer ensuite à un essai de classification selon la typologie choisie, celle de Maurice Duverger. Nous reviendrons après à la vérification de notre hypothèse à travers la définition des partis politiques, celle de LAPALOMBARA et WEINER pour terminer enfin par la tentative de réponse à la question posée au début de ce paragraphe à partir des éléments recueillis.

I- Parti de masse, parti de cadre : de l’évidence de la classification ou le piège des mécanismes paléo-PDP :

Si Maurice DUVERGER s’est rendu célèbre chez les chercheurs en sciences politiques et les sciences sociales généralement, c’est surtout grâce à la typologie qu’il a présenté pour distinguer les partis de masse des partis de cadre. Ces deux concepts pourraient laisser entendre qu’il s’agit d’une distinction basée sur les données numériques des adhérents à un parti politique quelconque. En 8 fait, c’est une distinction basée sur des dynamiques internes des groupements politiques étudiés. La grille d’analyse de Duverger est fondée sur six caractéristiques : mécanisme d’adhésion, caractères des recrutés, financement, structuration, centralisation ou décentralisation et activités20. C’est à cette grille que nous soumettrons le questionnement autour du PDP d’avant la chute de Ben Ali.

Sous un régime autoritaire, même s’il était partiellement toléré, le Parti Démocrate Progressiste cherchait principalement à faire de l’éducation politique à tous ses membres. Cette éducation, dans un cadre de désengagement général de la vie politique de la part des citoyens tunisiens, visaient principalement à produire une élite, dégager un nouveau personnel politique. Il devait être, à la fois, la substance de l’action sur le terrain mais aussi l’émanation d’une formation purement politique, dénigrant tout aspect idéologique de cette première, mais aussi une sélection du personnel d’opposition au régime du parti unique. Cette formation était assez particulière parmi les partis politiques tunisiens. Le PDP se présentait comme un parti a-idéologique. Il était dans une perspective assez particulière, celle de la fondation d’une ligne se proclamant à la fois du libéralisme politique21, de l’économie de marché22, défendant l’Etat providence23 et le panarabisme24. Dans un pays qui n’a pas connu les clivages qui ont générer les partis politiques européens, il n’existait point de groupes réunissant à la fois ces quatre tendances confondues. Ainsi, qu’un parti s’en

20 Maurice DUVERGER, Les Partis Politiques, Paris, Armand Collin, 1973, p : 84-112. 21 “ la libéralisation du champs de la formation des partis politiques et des associations […]” 1ère revendication de la motion politique du 4ème Congrès. 22 “La liberté d’entreprendre dans les différents domaines de l’économie ainsi que le désengagement étatique de la fixation des prix mis à part des produits de première nécessité” 8ème point des recommandations de la motion économique du 3ème congrès. 23 « Renforcer le rôle des services sociaux attribués aux classes populaires […] telle que la santé, l’éducation et les transports publiques. » 3ème recommandation de la motion sociale du 4ème Congrès. 24« La construction d’un pôle arabe unifié […] relève des défis réels et non seulement d’une aspiration sentimentale ». Motion des affaires étrangère du Congrès de 2001. 9 proclame était un fait presque particulier au PDP25 dont la seule référence était le Mouvement des Démocrates Socialistes au début des années 80, et encore le cadre était très différent de celui dans lequel évoluait le PDP.

C’est ainsi que les membres du parti se plaisait à répéter que leur parti suivait la tendance social-démocrate26, celle des partis de gouvernement de gauche en Europe ou en Amérique latine. Dans ce cadre, l’on peut remarquer une vraie ressemblance avec ces partis.

Les motions du règlement internes du parti27 stipulaient que tous nouveau adhérent « se doit d’allégeance pour le parti en œuvrant pour la réalisation de ses buts et objectifs ». Il doit, par ailleurs, « payer une cotisation annuelle de cinq dinars » 28. Cette cotisation, principalement obligatoire, n’était pas la première des priorités du parti quant à ses membres. Même si théoriquement, le PDP ne vivait que de ces cotisations, en l’absence de tout financement étatique29 ou privé de la part des hommes d’affaires, tous ses adhérents ne le finançaient pas de la même manière. C’était principalement les membres de son bureau politique, de son comité central ou encore les secrétaires généraux de ses fédérations qui remplissaient cette tâche. Son journal Al-Mawqif assurait son autofinancement grâce à ses ventes.

25 Ceci est vrai si l’on considère que le Mouvement Tajdid et le FDTL se voulaient des partis socialistes classiques, que le CPR ne rendait pas possible sa classification sur un échiquier politique classique. ﻋﺒﺪ اﻟﻤﺠﯿﺪ اﻟﻤﺴﻠﻤﻲ، اﻟﻤﺆﺗﻤﺮ اﻟﺮاﺑﻊ ﻟﻠﺪﯾﻤﻘﺮاطﻲ اﻟﺘﻘﺪﻣﻲ : رﺳﺎﻟﺔ أﻣﻞ ﻟﻠﺘﻮﻧﺴﯿﺎت و اﻟﺘﻮﻧﺴﯿﯿﻦ، اﻟﻤﻮﻗﻒ، اﻟﻌﺪد 385، 2006-12-15 26 27 Les motions de règlement interne issus des deux congrès de 2001 et 2006 sont presque identiques. La traduction est de l’auteur vu que toute la littérature du PDP d’avant le 14 Janvier 2011 était rédigée en arabe. Ce n’est qu’à partir de l’après départ de Ben Ali que le parti s’est « ouvert » sur le bilinguisme. A ce propos, le programme électoral du parti fut rédigé en français et ce n’est que trois mois après son annonce qu’il fut publié en arabe. Ceci est une influence directe de la captation de nouvelles élites. Nous y reviendrons un peu plus loin. 28 La montant de la cotisation est resté le même depuis le congrès de 2001 jusqu’à aujourd’hui. 29 L’article 2 du décret 762 de l’année 1999 interdisait aux partis non représentés à la chambre des députés de recevoir la subvention étatique. Le PDP, ainsi que le FDTL n’ont jamais étaient représentés au parlement. 10

D’un autre coté le PDP recrutait ses adhérents principalement parmi trois catégories : les professions libérales30, parmi les syndiqués surtout les enseignants31 et parmi les étudiants syndiqués au sein de l’Union Générale des Etudiants de Tunisie en dehors de la ligne marxiste-léniniste dominante dans cette organisation32. Certes cette liste n’est pas exhaustive mais elle réunie la quasi majorité des membres du Parti Démocrate Progressiste d’avant le 14 Janvier 2011. Ainsi, l’on peut remarquer l’absence de notabilité, d’hommes d’affaires, de cadres étatiques ou encore des chefs d’entreprise publiques privés.

Finalement, et toujours dans le cadre du questionnement auquel on essaye de soumettre le PDP selon la grille proposée par M.DUVERGER, la structuration du parti était une organisation qui obéissait encore à celle héritée de la culture de gauche : Un comité central à la tête du parti mais sans réelle influence puisque tenant ses réunion une fois chaque 3 mois33, un Bureau Politique plus actif en matière de fréquence des réunion mais surtout un comité exécutif composé des membres du Bureau Politique résidant à gérant les affaires courantes du parti mais sans possibilité de révision des décisions du BP34.

Au niveau régional, l’on peut remarquer que malgré le paragraphe concernant les sections, la structure qui correspond aux délégations au niveau de la carte administrative du pays au niveau des motions du règlement interne, la seule structure décentralisée qui était présente pré 14 Janvier, était la fédération, la structure qui correspond aux gouvernorats. Ainsi, l’on peut remarquer que le

30 Ahmed Néjib Chebbi et Néji Gharssali sont avocats, Maya Jeribi est directrice d’un institut de marketing privé, Abdelmajid Mesalmi est médecin, Issam Chebbi est huissier de justice, Chedly Ferah est banquier… (Tous membres du Bureau Politique). 31 Ahmed Bouazzi est professeur universitaire, Mohamed Hamdi, Maher Hanine, Mohamed Hédi Hamda professeurs de lycée, Mouldi Fehem syndiqué du ministère d’agronomie… 32 La déclaration de principe des Jeunes Démocrates Progressistes du 8 Aout 2010. 33 Motions du règlement interne du 3ème et du 4ème Congrès. 34 Ibidem. 11

PDP disposait de 16 fédérations35 sur un ensemble de 24 gouvernorats avec des adhérents sur le reste des gouvernorats mais sans qu’ils soient structurés en fédérations36.

Mais malgré cette présence, l’activité réelle du parti était concentrée sur Tunis la capitale. D’autres fédérations étaient certes très actives37 mais elles ne jouissaient pas du même éclat qu’avaient les activités des leaders du PDP, tous concentrés sur le grand Tunis. En même temps, toutes ces fédérations obéissaient à la ligne politique décidée et imposée par le Bureau Politique ou le Comité Centrale.

Cette analyse très brève (le cadre de cette recherche ne permet pas plus d’étalement dans l’analyse) de ce qu’était le Parti Démocrate Progressiste d’avant le changement survenu début de 2011, nous semble correspondre au schéma présenté par Duverger pour décrire les parti de masse38. Dans la mesure où le PDP avait des conditions assez rigides pour accepter des nouveaux adhérents39, l’absence des élites économiques et des notabilités locales ou nationales, un autofinancement, une volonté de structuration rigide et de discipline interne40 et des activités politiques de contestation qui ne se limitaient pas aux élections, l’on penche à considérer que le Parti Démocrate Progressiste répondait parfaitement aux critères qui faisaient de lui un parti de masse.

35 Le PDP ne disposait pas de fédérations à la Manouba, Zaghouan, Mahdia, Kef, Béja, Kebili, Ariana, Tozeur. 36 Tous les recensements précités étaient réalisés par l’auteur au mois d’Octobre 2010. 37 Notamment Sfax, Gafsa, Gabes et Bizerte. 38 Selon Maurice Duverger, les partis de masse, qu’ils soient petits ou grands, présenteraient les caractéristiques suivantes : un mécanisme statutaire d’adhésion, recrutement ouverts à un grand nombre, autofinancement, une forte structuration avec une forte centralisation, des activités diverses qui ne se limitent pas aux élections. M.DUVERGER, Les Partis Politiques, op.cit., p-p : 84-85. 39 Parrainage de deux membres à titre d’exemple. 40 Selon Maya Jeribi, secrétaire générale du parti, cette structuration n’était pas optimum ni la veille ni le lendemain du 14 Janvier 2011. Entretien avec l’auteur, Rades, 1-08-2011.

12

L’on sait que la typologie de Duverger41 visait surtout à donner des qualificatifs scientifiques aux modes d’organisation des partis de droite qui correspondent aux partis de cadre et ceux de gauche qui sont généralement des partis de masse. Rompant avec son passé socialiste tout en gardant de son ancienne version, le Rassemblement Socialiste Progressiste, son mode d’organisation et de fonctionnement, l’on peut se demander si cette situation était un choix fait délibérément par ses dirigeants ou bien si ce caractère était imposé par le système politique tunisien dans lequel évoluait le PDP et qui le rejetait à cause de ses prises de positions par rapport au pouvoir en place. Sans entrer dans ce volet d’analyse, il nous semble que c’est la composition de ces trois suppositions. Les dirigeants du PDP, dans un climat de scellement de l’activité politique aux sillages du RCD, voulaient un parti ouvert à un plus grand nombre d’adhérent en héritant des structures qu’ils avaient mis en place au début des années 80.

Mais avant de poursuivre l’analyse, revenons à notre hypothèse de départ. Comme toute hypothèse, une vérification est plus que nécessaire surtout avec les affirmations de la presque seule analyse globale de la société politique tunisienne, celle de CAMAU et de GEISSER. Ainsi, la question à laquelle l’on va essayer de répondre dans ce deuxième paragraphe est la suivante : Le Parti Démocrate Progressiste était-il un PARTI POLITIQUE ?

II- Un parti politique avec une fonction tribunitienne

La définition que l’on utilisera dans cette partie de notre recherche sera celle de LAPLOMBARA et WEINER. Selon ces deux auteurs, un parti politique est

41 Une remarque nous semble nécessaire à ce stade. L’on croit que la typologie de Maurice Duverger est dépassée malgré son innovation. D’autres éléments d’analyse ont été intégrés, notamment celles relatives aux partis des pays sous-développés présentés par GEORGES GURVITCH dans son Traité de Sociologie (PUF, 1960), mais l’on a considéré que la typologie de Duverger était bâti sur des critères structurels et c’est l’aspect d’analyse auquel nous nous intéressons dans cette partie. 13 toute organisation qui présenterait « ces quatre caractères : 1.Une organisation durable, c'est-à-dire une organisation dont l’espérance de vie politique soit supérieur à celle de ses dirigeants en place ; 2.Une organisation locale bien établie et apparemment durable, entretenant des rapports réguliers et variés avec l’échelon national ; 3.Le souci de rechercher un soutien populaire à travers les élections ou de toute autre manière ; 4.La volonté délibéré des dirigeants nationaux et locaux de l’organisation de prendre et exercer le pouvoir, seuls ou avec d’autres, et non pas-seulement- d’influencer le pouvoir » 42.

Nous procéderons à la vérification de ces quatre critères un par un :

1- Renouvellement des directions, élargissement des structures et création d’une organisation de jeunes Le Parti Démocrate est toujours dirigé par la plupart de ses fondateurs en 1983. Ahmed Néjib CHEBBI, Abdelatif HERMESSI, Rachid KHECHANA, Mouldi FEHEM… ainsi que les "jeunes" fondateurs Maya JERIBI, Issam CHEBBI et autres sont membres du Bureau Politique du RSP-PDP depuis le premier Congrès du parti tenu en 1992. L’on peut se demander, et les choses se présentant ainsi, si les structures du parti pourraient résister aux départs de ces personnalités. En fait, le PDP connait un phénomène, certes connu par toutes les formations politiques tunisienne mais surtout par ce parti, qui est des vagues de démissions épisodiques, et ce depuis sa création et jusqu’à ce jour43. Ainsi, trois de ses principaux fondateurs avaient démissionné pendant les années 90 : Hafnaoui Ben OTHMANE, Omar MESTIRI et Sihem Ben SEDRINE. Mais d’un autre coté, le parti avait toujours connu des mouvements inverses, des

42 Joseph LAPALOMBARA et Myron WEINER, The Origin and Development of Political Parties, cité in Jean CHARLOT, Les Partis Politiques, Paris, Armand Collin, 1971, p-p : 22-23. L’on utilisera cette définition, la plus admise parmi les chercheurs en sciences sociales. 43 Nous reviendrons à ce phénomène un peu plus loin. 14 mouvements d’adhésions, individuelles ou collectives. Ce fut le cas de Monji de Mohamed KILENI44et les (اﻟﻜﺘﻠﺔ) LOUZ (1994), les Communistes Démocrates Islamistes Progressistes (15-21), le groupe animé par Mohamed GOUMENI45 dans le cadre du forum Al-Mawkef46. Et malgré le départ de ces deux courants notamment le deuxième47, le PDP avait continué son inclusion de plusieurs nouveaux cadres. C’est dans ce sens qu’est allé les nouvelles compositions du comité central et du Bureau Politique issus tous deux du Congrès de 2006. Le rajeunissement des structures48, l’intégration de nouveaux dirigeants dans le Bureau Politique49 mais surtout le choix d’une nouvelle Secrétaire Générale. Lors de ce congrès, Maya JERIBI avait pris la relève d’Ahmed Néjib CHEBBI pour les commandes du parti50. Ainsi, le Parti Démocrate avait rompu avec la direction de son principal fondateur, la personne dont le parcours politique était parfaitement superposé à celui de la formation pour renouveler son leadership tout en gardant l’ancien secrétaire général au premier rang. Le Parti Démocrate Progressiste présentera depuis ce moment la spécificité d’être un parti à deux têtes.

Un autre phénomène qu’avait connu le PDP, c’est celui d’une forte présence de jeunes dans ses rangs et même dans ses structures. Ils étaient « le fer de lance du parti, son avant-garde, la garantie de la survie de ses idéaux intériorisées par les jeunes gens croyant en le projet PDP »51. A noter à ce sujet que les efforts fournis depuis le congrès de 2001 pour la création d’une organisation de jeunes n’ont conclu qu’en Aout 2010.

44 Qui n’avait pas rejoint le parti mais qui avait bien su investir la dynamique partisane qu’avait ammené ce groupe en démissionnant pour créer son propre parti, le Parti Socialiste de Gauche. 45 Qui avait également quitté le parti pour former le sien, le Parti de la Réforme et du Développement. 46 Entretien de l’auteur avec Ahmed Néjib Chebbi, Gammarth, 6-8-2011. 47 http://www.moheet.com/show_news.aspx?nid=250437&pg=37 48 4 des membres du comité central étaient âgés de moins de 30 ans, 14 de moins de 40 ans. 49 Riadh Barhoumi, Maher Hanine, Ahmed Bouazzi, Chedly Ferah, Mohamed Hamdi…. 50 Reuters, 25-12-2006 51 Entretien de l’auteur avec Farhat Hamoudi, secrétaire national des Jeunes Démocrates Progressistes, Le Kram, 10-8-2011. 15

« Il nous était difficile de nous imposer, aux structures de l’UGET, de rassembler des jeunes autour d’un projet a-idéologique. Mais grâce à notre journal, aux positions claires de nos dirigeants et surtout à l’aura de Maya JERIBI et Ahmed Néjib CHEBBI, nous avons vu plusieurs jeunes rejoindre nos rangs. On était en Aout 2010 plus de 300 jeunes membres du PDP 52».

Le Parti Démocrate Progressiste semblait de la sorte pouvoir assurer la succession de ses structures. Que la solution soit de remplir les vides laissés par les démissionnaires par de nouveaux recrus, par la circulation des premières responsabilités au sein de ses instances les plus élevés ou encore par un essai continuel de ramener des jeunes membres à ses rangs, le souci de la relève semblait être toujours présent dans les esprits de ses dirigeants.

2- Des structures régionales fortement actives, peu nombreuses

Le Parti Démocrate Progressiste était présent dans 16 gouvernorats parmi les 24 que compte la Tunisie. Ces fédérations, différentes au niveau de leurs implantations et disproportionnelles dans leurs efficacités, avaient un point en commun : Elles étaient les seuls représentants du PDP dans leurs régions dans la mesure où le parti ne disposait d’aucune structure inférieure à la fédération sur l’échelle organisationnelle. Aucune cellule n’a était créé au sein du parti depuis sa fondation jusqu’à l’après 14 Janvier. C’est l’une des retombées directes de la faiblesse numérique de l’effectif du parti53.

52 Ibidem. 53 Selon CAMAU et GEISSER, le PDP comptait un peu plus de mille adhérents en 2002, ce qui le rendait le parti ayant le plus d’adhérents parmi l’opposition indépendante (Le Syndrome Autoritaire, Op.cit., p : 237) Maya Jeribi parle des alentours de 1500 adhérents (Entretien avec l’auteur, op.cit.). 16

Outre la capitale, la plupart de la direction du parti, les membres de son Bureau Politique, étaient installés dans les régions internes, spécialement celles du sud et du centre-ouest54. Les membres du Comité central représentaient 20 des 24 gouvernorats. Le PDP était ainsi le parti le mieux implanté régionalement parmi toutes les formations de l’opposition indépendante.

3- Le souci de rechercher un soutien populaire à travers les élections ou de toute autre manière

Le Parti Démocrate Progressiste se voulait le leader de l’opposition tunisienne face à Ben Ali. Avec l’ambition de devenir un parti suffisamment représentatif pour pouvoir faire face au régime, il avait deux lignes d’actions dans ce sens : un essai continuel et incessant de regrouper un nombre maximal des autres partis et formations autour d’une plateforme politique. La création du collectif 18 Octobre pour les Droits et les Libertés allait dans ce sens55. La grève de la faim qui était à l’origine de ce collectif a vu la participation du secrétaire général de l’époque, Ahmed Néjib CHEBBI. Le PDP était la seul partie non concernée directement par aucune des revendications de cette grève. Les représentants du parti au sein de ce collectif56 étaient très actifs dans les débats qui ont produits les quatre déclarations appelé par la suite « Notre chemin vers la démocratie »57. Ce collectif résume un peu cette tendance caractéristique du PDP à créer des alliances, temporaires ou plus durables, face au régime58.

54 Après la démission du groupe des Islamistes Progressistes de Mohamed Goumeni, le BP comptait 21 membres. Les membres résidant à Tunis formait le Bureau Exécutif, les autres sont répartis de la sorte : un de Jendouba, un de Sousse, un de Gabes, un de Sfax, un de Sidi Bouzid, un de Tataouine, un de Tozeur (malgré l’absence d’une fédération sur cette région) deux de Médnine et deux de Kasserine. 55 Ce collectif regroupait principalement le Mouvement Ennahdha, le Parti Communiste des Ouvriers de Tunisie, le FDTL (qui l’avait quitté par la suite), les Nasseriens Unionistes de Béchir Essid et quelques indépendants. Malgré l’échec de ce collectif par la suite, il était la première action regroupant autant d’opposant sous l’ère Ben Ali. 56 Monji Louz et Ahmed Néjib Chebbi qui l’avait quitté début 2008. 57 La page Facebook du collectif est toujours existante. Les 4 déclarations y sont toujours. sk=notes?ھﯿﺌﺔ-18-أﻛﺘﻮﺑﺮ- ﻟﻠﺤﻘﻮق-واﻟﺤﺮﯾﺎت-ﺑﺘﻮﻧﺲ/http://www.facebook.com/#!/pages/152411061447958 58 Revoir la partie historique au début de ce papier. 17

L’autre ligne suivie par le PDP, était la contestation face aux agissements et face à la nature du régime du président Ben Ali. Les deux grèves de la faim de 2007 et de 2008 ont marqué une radicalisation de l’action du PDP. L’organe du parti, Al-Mawkif, l’outil principal de cette contestation lui valait un bon nombre de sympathisants. Cet hebdomadaire qui se vendait à plus de 10 000 exemplaires par semaine59, avait plus de notoriété que le parti lui-même. Il lui permettait de toucher plus de populations que l’action politique elle-même. Cette dernière, et sous un régime comme celui de Ben Ali, se résumait à l’organisation presque hebdomadaire de conférences dans les locaux du parti et à quelques manifestations revendicatives le plus souvent brutalement réprimées pas la police. C’est dans ce sens, et devant la presque inefficacité de ces deux méthodes d’actions, réalisés et suivi par "la classe opposante" si ce n’est les membres du parti seulement, que l’organe du parti était le premier moyen de recherche de soutien auprès de la population, et surtout parmi les élites citadines, principale réserve de recrutement du PDP.

« Il était notre voix, il touchait plus de gens que nous pouvions le faire nous même. Avec nos quelques passages sur les chaines étrangères, al-Jazeera principalement, il était la principal source de notre notoriété surtout en relatant nos actions sur le terrain, en présentant les leaders du parti et en parlant de notre vision de la Tunisie »60.

L’on peut dire en conclusion, que le Parti Démocrate Progressiste, conscient de son incapacité à toucher la population toute entière, cherchait principalement un soutien parmi les élites en générant suffisamment de "bruit" capable d’attirer les regards des classes les plus populaires envers son action et ses structures. Sous Ben Ali, c’était sa démarche et sa manière de chercher un soutien populaire.

59 Chiffre donné par Monji Louz, rédacteur en chef du journal. 60 Maya Jeribi, Op.cit. 18

4- La volonté délibéré des dirigeants nationaux et locaux de l’organisation de prendre et exercer le pouvoir

Il était clair qu’aucun parti politique, reconnu ou clandestin, n’avait les moyens nécessaires à la conquête du pouvoir. Le Parti Démocrate Progressiste n’échappait pas à cette règle. Pourtant, l’action du parti, contestataire, principalement politique en traduisant tous les mouvements sociaux et les revendications d’ordre économique en termes politiques, liait les ébauches de la crise par laquelle allait passer la Tunisie à la situation des libertés et au fonctionnement du système politique. Dans sa ligne contestataire, la motion politique de son 4ème congrès de 2006 mentionna : « le régime tunisien avait perdu sa légitimité politique […], sa légitimité constitutionnelle […], l’expansion des prérogatives de la présidence de la république aux dépends des autres pouvoirs […], le recul de tous soutien populaire au profit du régime, […], la paralysie des investissements […], l’apparition des indications d’une crise qui menacerait la paix sociale dans le pays, […] »61. Il avait qualifié la période par la quelle passait la Tunisie par « une période de fin de cycle »62. En posant à la fin de cette motion ce qu’il considérait comme les conditions sine qua non d’une transition démocratique, à savoir la liberté d’organisation, la liberté de presse, l’amnistie générale (les trois revendications du collectif du 18 Octobre fraichement formé à l’époque), l’annulation des amendements constitutionnels du 1 Juin 2002 et l’organisation des élections libres et transparente sous un contrôle international, il avait pour but l’ancrage dans une ligne radicale mais toujours protestataire. Cette motion63, et malgré une analyse profonde de la situation politique de la Tunisie de l’époque, ne posait aucun

61 Motion politique du 4ème congrès du PDP, Tunis-Nabeul, 23-23-24 Décembre 2006. 62 Ibidem. 63 Nous utilisons ce document de part l’importance qu’il revêtit puisque c’est la déclaration qui est censé guidé la ligne politique du parti jusqu’à son prochain congrès. 19 mécanisme capable de réaliser cette transition recommandée pour la ramener sur le terrain du réalisable si ce n’est un éventuel "réveil de conscience des gouverneurs" ou une pression interne exercée par l’opposition démocratique que cette même motion qualifie de « faible et purement contestataire »64. Depuis, le PDP était fidèle à cette motion. Opposition frontale avec le régime mais seulement sur le terrain de la contestation65. La dernière en date fut une conférence nationale contre le prolongement ou le legs du pouvoir66.

D’un autre coté, le Parti Démocrate Progressiste, et comme il l’a fait depuis sa légalisation, continua à afficher sa volonté de participer aux élections présidentielles et législatives organisées par le régime. Ce fut le cas en 1988, 1994, 1999 pour le volet législatif. Pour les élections de 2004 et de 2009, le parti finissais par les boycotter en lui tirant toute légitimité possible et en dénonçant a priori et a posteriori la fraude générale67. La question qui peut se poser les choses se présentant ainsi, c’est comment le PDP participe à des élections tout en ayant considéré que le régime avait perdu tout légitimité politique ou constitutionnel.

« Nous n’avions aucun doute sur les défis électoralistes de ces élections puisqu’il n’y en avait aucun. Nous avons toujours considéré que les élections portaient un défi politique. Elles nous permettaient d’aller vers le peuple, de faire une campagne électorale, de montrer à nos compatriotes qu’un autre model, un model démocratique, était existant et qu’il militait pour une Tunisie meilleure. Et nous avons

64 Ibidem. 65 Sur les pages officiels sur Facebook du PDP http://www.facebook.com/#!/Tunisie.PDP d’Ahmed Néjib Chebbi, http://www.facebook.com/#!/pages/Ahmed-Nejib-CHEBBI/30179433180, ou de Maya Jeribi, http://www.facebook.com/#!/pages/Maya-Jribi-page-officielle/189162827773702, plusieurs vidéos publiées relatent le parcours de ce parti avant le 14 Janvier. En parler tous relèverait de la littérature dont l’analyse peut s’en passer. 66 Conférence organisée le 7 Juillet 2011 aux locaux du PDP. Trois jours après, les premiers appels au président Ben Ali de se représenter aux élections de 2014 apparaissent sur les quotidiens tunisiens. 67 Nous donnons l’exemple des élections de 2009 : AFP, 25-10-2009. 20

toujours boycotté ces élections du moment où même cette opportunité d’action disparaissait »68.

Pour revenir à la conquête du pouvoir, la question étant posée à Maya JERIBI, la Secrétaire Générale du PDP, elle répondit :

« Avant le 14, on n’avait pas dans l’esprit la conquête du pouvoir mais on concurrençait le régime avec un model. C’était le model démocratique face à celui de Ben Ali, le model autoritaire. On voulait montrer que la Tunisie était capable de mieux faire et on voulait être le porte drapeau de ce model. On se voyait toujours partie prenante d’un changement démocratique. Dans notre littérature le mot « transition » était toujours présent. On voulait un combat pour imposer un changement démocratique. Un combat de longue haleine, un combat avec des hauts et des bas afin d’amener le régime à négocier une transition vers la démocratie »69.

Les choses se présentant ainsi, l’on peut nier que le Parti Démocrate avait la conquête du pouvoir comme but de ses actions. De là, et en l’absence de cette 4ème caractéristique indispensable à la qualification d’une formation politique de PARTI, il faut chercher ce qu’était le PDP réellement avant le 14 Janvier 2011.

En posant à Maya JERIBI la question de ce qu’était le PDP avant chute de Ben Ali, la Secrétaire Générale était affirmative : « Un parti c’est des structures, des mécanismes, des leaders, un programme politique et tous cela on l’avait. C’était certes petit, parfois mal fait mais on l’avait pourtant »70. Cette réponse est d’une importance majeure. Elle tire son importance de l’idée que se faisait les

68 Entretien de l’auteur avec Ahmed Néjib Chebbi. Op.Cit. 69 Ibidem. 70 Ibidem. 21 dirigeants du parti de leurs actions. « Nous étions un parti de résistance. Résister à Ben Ali, à sa dictature et à l’autoritarisme de son régime était de faire ce que nous faisions. C’est de la sorte que je qualifierais notre parti : un parti politique sous la dictature »71. Dans le sens où l’imaginaire des acteurs politiques est primordiale dans toute analyse possible, il nous semble que le résultat des trois éléments présentés : 1.Un parti de masse, 2.Une formation qui ne répond qu’aux trois premiers caractères de la définition d’un parti politique, 3.L’imaginaire des dirigeants et des membres aussi pour qui leur formation serait un véritable parti politique évoluant sous la dictature72 nous laisse dire que le PDP était un parti politique avec une fonction tribunitienne.

Qu’est ce que la fonction tribunitienne ? « Une société peut avoir le malheur de connaitre en son sein des clivages, c.-à-d. de fortes hétérogénéités […] politiques qui engendrent des prédispositions à des conflits. Le système politique […] se trouve menacé. Face à cette menace, il a le choix : […] ou réprimer […] soit offrir la possibilité à ces groupes sous-privilégiés d’être défendus et d’avoir un moyen de se protéger contre le système. […] Elle est, selon nous, l’exigence fonctionnelle d’un système politique dans une société qui connaît des clivages. […] des partis politiques chercheront à donner une expression à cette conscience de non-participation au système. Des partis politiques qui seront manifestement hostiles au système pourront donc remplir de façon latente cette fonction tribunitienne »73.

L’on peut considérer ainsi que le Parti Démocrate Progressiste était l’un des espaces libres permettant aux mécontentements face au régime de s’exprimer. Il

71 Ibidem. 72 L’idée est fortement répondue parmi les membres du PDP. 73 Jean CHARLOT, Les Partis Politiques, Paris, Armand Collin, 1971, p : 109. 22 permettait aux quelques fissures du corps opaque du régime Ben Ali de ressortir les bulles d’air qui pourrait nuire à son fonctionnement si elles restaient prisonnières de la pensée unique, de la personne unique, du parti unique, d’entraver le fonctionnement du système. Il ne faut pas comprendre cette explication comme une sorte de "complaisance" de la part du PDP. D’abord, il n’était pas le seul à assurer cette fonction. L’Union Générale des Travailleurs de la Tunisie principalement, le PCOT à travers l’UGET, les tribunes des stades du football tunisien remplissaient cette fonction également. En fait, J.CHARLOT, en parlant toujours de cette fonction tribunitienne, qui couvrirait selon lui les partis « révolutionnaires » antisystèmes lui tire toute « contribution » possible au système politique. « …elle gêne son fonctionnement harmonieux, […] elle est un moyen de vivre avec des clivages […] de les faire exclure de façon permanente ou prolongée de l’exercice des responsabilités et donc des bénéfices du pouvoir »74. Ainsi, le PDP, dans sa lutte contre le régime de Ben Ali, tout en apportant des petits coups qui avaient certes contribué à faire chuter l’autoritarisme, assurait une fonction nécessaire à la survie du système tel qu’il fonctionnait pendant les 23 dernières années.

Conclusion :

Cette première partie, arrivant à sa fin, et malgré sa longueur relative, était indispensable. On ne peut analyser et suivre le parcours du Parti Démocrate Progressiste sans repérer et comprendre son fonctionnement avant le 14 Janvier 2011.

74 Ibidem, p : 110. 23

Contestant le système, assurant l’une des manifestations de la fonction tribunitienne du système autoritaire, le PDP, dans la mouvance de l’opposition démocratique indépendante face au régime du 7 Novembre, était l’un des principaux acteurs politique si ce n’est le plus important. C’est ce qui lui a valu une place avancée dans l’après Ben Ali, le premier épisode de la transition démocratique en Tunisie. Cette deuxième partie suivra l’évolution du Parti Démocrate Progressiste en cette période.

Troisième partie : Le PDP de l’après 14 Janvier

I- Le PDP entre le 17 Décembre et le 14 Janvier

Pendant les événements qui se sont déroulés entre le 17 Décembre 2010 et le 14 Janvier 2011, le Parti Démocrate Progressiste était parmi les formations les plus actives en Tunisie. Son action avait commencé quelques heures après l’immolation par le feu de Mohamed BOUAZIZI. Une réunion de son bureau exécutif avait endossé le gouvernement tunisien la responsabilité des répercussions de cet acte en signalant la disparité dans le partage de la richesse nationale75. Deux jours après, et en rappelant les événements de Redeyef en 2008, le PDP appelait à retirer les forces de l’ordre de la ville de Sidi Bouzid, la libération de tous les détenus dans le cadre de ces évènements, l’amorce d’un dialogue national portant sur l’emploi, la libération de la vie politique ainsi que des réformes politiques et sociales76. Un communiqué du Bureau politique datant du 22 Décembre réaffirmait les mêmes revendications en mettant l’accent sur l’entière responsabilité que porte le gouvernement quant aux origines du mouvement77. Le 24 Décembre, le parti organisa la première conférence de

اﻟﺤﺰب اﻟﺪﯾﻤﻘﺮاطﻲ اﻟﺘﻘﺪﻣﻲ، ﺑﯿﺎﻧﺎت و ﻣﻮاﻗﻒ: ﻣﺎرس 2008- ﻣﺎرس 2011، ﺟﻤﻊ و ﺗﺮﺗﯿﺐ أﺣﻤﺪ ّﺑﻮﻋﺰي، ص ص : 39-38 75 76 Ibidem, p p : 36-37. 77 Ibidem, p p : 35-36. 24 presse pour parler des événements de Sidi Bouzid. Le communiqué de presse qui y était rendu public continua dans le même sens que des deux précédents tout en appuyant les revendications du parti qui étaient basées sur la nécessité de dialoguer avec les partis politiques et les représentants sociaux78. Entre le 28 et le 29 Décembre, deux des dirigeants du PDP furent arrêtés par la police tunisienne, Attia ATHMOUNI, membre du BP installé à Sidi Bouzid79 et Mouldi ZOUABI80, journaliste et membre du Comité Central. Jusqu’au 5 Janvier, l’action politique du PDP était basée sur les appels au gouvernement de suivre une démarche différente quant aux événements de la région du centre de la Tunisie. Il multiplia les communiqués dénonçant les arrestations et "les bastonnades" qu’ont connues ses membres ou les autres activistes politiques (les plus marquantes étaient celles subis par Wissem SGHAIER et Moez ELBEY)81. L’on a pu remarquer également que pendant cette période, plusieurs des membres du PDP intervenaient sur les chaines étrangères spécialement Aljazeera. Selon Maya JERIBI, la direction du parti assurait également le rôle de relai entre ces chaines et les leaders des manifestations (notamment les syndicalistes) qui ravageait en un premier temps Sidi Bouzid et pour toucher presque tout le territoire tunisien quelques jours après82.

« On a joué la carte de la médiatisation en assurant le rôle de relai entre les medias et les leaders des manifestations les syndicalistes. En fait, on avait appris des erreurs de Redeyef 2008. La perception compte beaucoup en politique. Un événement, si profond, si consistant ne vaut rien si les gens n’en sont pas informé. C’est pour cela que dès notre première réunion le 17 Décembre 2010, une heure et demi après l’immolation par le feu de Bouazizi, on avait décidé que nous allions

78 Ibidem, p p : 32-35. 79 Ibidem, p p : 28-29. 80 Ibidem, p p : 27-28. 81 L’auteur a pu compter 22 communiqués sorti dans la période séparant le 17 Décembre et le 14 Janvier. 82 Entretien de l’auteur avec Maya Jeribi. Op.cit. 25

tout faire pour que Sidi Bouzid 2010 ne soit pas un remake de Gafsa 2008, c.-à-d. un mouvement populaire prisonnier dans la souffrance de nos concitoyens qui se sont soulevé contre la dictature et la précarité sans que les autres tunisiens et le monde en entier n’en soit informés à temps de ce qui se passait là-bas »83.

A partir du 5 Janvier 2011 et avec l’accélération des événements et le nombre croissants des victimes de la répression policière, le PDP commença à s’attaquer aux symboles du régime. Il avait dans son viseur en un premier temps le ministère de l’information et le Conseil Supérieur de l’Information84. En continuant à soutenir toutes les formes de contestation que connaissait le pays, il passa à une deuxième vitesse en appelant au limogeage du ministre de l’intérieur le 7 Janvier. Le soir même, l’un des chefs de fil des JDP, Wissem SGHAIER fut enlevé par des policiers en plein centre ville de Tunis pour n’être relâché que 6 jours après85. Après cette arrestation, les jeunes membres du parti furent la cible de plusieurs autres arrestations86. Toujours dans l’accélération des événements de ce début de l’année 2011, le PDP suivait l’élargissement de l’espace des manifestations en haussant le plafond de ses revendications. C’est ainsi que le 9 Janvier 2011, son Bureau Politique appela le président de la République à former un gouvernement de Salut National pour la période allant jusqu’à 2014, et en limitant son programme en cinq points : l’arrêt immédiat des tirs contre les manifestants et ouvrir une enquête afin de juger les donneurs d’ordre de ces tirs, élaborer un model de développement capable d’absorber le chômage, équilibrer le développement régional, lancer les réformes touchant le pouvoir judiciaire, le secteur de la communication et la lutte contre la corruption et enfin amorcer les réformes nécessaires à libérer la vie politique et l’organisation de législatives

83 Ibidem. .Op.Cit. p 23-24 ، ﺑﯿﺎﻧﺎت و ﻣﻮاﻗﻒ: ﻣﺎرس 2008- ﻣﺎرس 2011 84 85Ibidem, p p : 20-21. 86Selon Wissem Sghaier, Farhat Hamoudi et Wassim Bouthouri, membres du secrétariat national des JDP, il y a eu 14 arrestations parmi les jeunes et deux blessés par bals. 26 anticipées. Il joint ces revendications par un appel à toutes les « forces de changement » pour se rallier autour de ces exigences87. Le lendemain, sans réussir à rallier d’autres partis politiques autour de ces revendications, le PDP organisa une réunion inter-partisane avec 6 autres partis et 7 associations toutes et tous non reconnus. Cette réunion était venue suite au massacre perpétré par la police tunisienne à Tella, Kasserine et Regab coutant la vie à plus de 20 personnes. La déclaration commune sortie de cette réunion s’est contentée de réclamer l’arrêt immédiat des tirs sur les manifestants et l’amorce de réformes politiques88. Le 13 Janvier, Ahmed Néjib CCHEBBI rencontre le premier ministre Mohamed GHANNOUCHI, et quelques heures après, la télévision tunisienne passe le 3ème discours de Ben Ali depuis le 17 Décembre 2010.

Dans la vague des réactions aux décisions prises dans les 24 dernières heures du l’ancien président tunisien, le leader du PDP avait tenu deux discours différents l’un de l’autre. En un premier temps, il s’est déclaré être « agréablement surpris » sur la chaine France 2489. En un deuxième temps, et quelques heures après, la position était beaucoup plus nuancée. Sur les ondes de Radio Canada, il déclare que « suite à une crise de confiance entre la société et le pouvoir, il n’y a de garantie pour la réalisation des réformes annoncées par Ben Ali qu’un gouvernement de transition réunissant les figures de l’opposition et des indépendants de la société civile »90. Le soir même, Maya JERIBI refuse de participer à une émission sur la chaine tunisienne officielle. Dans la matinée du 14 Janvier, le ministre des affaires étrangères de Ben Ali, Kamel MORJANE, déclare sur la radio Europe 1 qu’ « avec des gens comme Chebbi, avec le comportement qu’il a eu hier soir, je pense que c’est faisable, je pense même

.Op.Cit p p : 19-20، ﺑﯿﺎﻧﺎت و ﻣﻮاﻗﻒ: ﻣﺎرس 2008- ﻣﺎرس 2011 87 88 Ibidem, p p : 17-18. 89 http://www.dailymotion.com/video/xibrtv_les-reactions-des-politiques-le-13-janvier-a-voir-tunisie_news La vidéo étant montée par des sympathisants CPR, l’on ne peut voir toute la déclaration d’ANC, sauf les 6 premières secondes. 90 http://www.youtube.com/watch?v=LX-y27Z-9OA 27 que c’est normal (à propos d’un gouvernement d’unité nationale) »91. Au moment de cette déclaration, la secrétaire générale du parti était à la tête des manifestants devant le ministère de l’intérieur92.

Ces circonstances ont poussé plusieurs personnes à affirmer qu’un gouvernement d’union nationale fut accordé par Ben Ali aux trois dirigeants de l’opposition qui ont rencontré le premier ministre à savoir Ahmed Néjib CHEBBI, Ahmed BRAHIM et Mustapha BEN JAAFAR. Le Parti Démocrate Progressiste continue à démentir cette information. En revenant à l’ordre chronologique des événements du 14 Janvier 2011, la déclaration de la formation d’un nouveau gouvernement n’est survenue qu’après la dispersion de la grande manifestation de ce jour là93. A ce propos, il faut également rappeler les manifestations de "joie" qu’ont connues les grandes villes de la Tunisie après le dernier discours de Ben Ali. Nous pensons que ces manifestations RCDistes étaient à l’origine du changement du discours de CHEBBI le soir du 13 Janvier et qu’un gouvernement d’union nationale n’était que la dernière tentative qu’un régime essoufflé par deux grandes manifestations, celle de Sfax le 12 Janvier et celle de l’avenue le 14 Janvier, pour se maintenir94.

Après ce récit historique, l’on peut remarquer que l’action du Parti Démocrate Progressiste était double : une pression politique à travers ses dirigeants et une pression sur le terrain à travers la plupart de ses adhérents notamment les membres des Jeunes Démocrates Progressistes. Ainsi, le parti était très actif en cette période. Pourquoi, malgré tous ces efforts le PDP n’a pas était à la tête de

91 http://www.youtube.com/watch?v=RbVelZLF3-o 92 http://www.bladi.net/forum/albums-9028/36504.jpg 93 http://www.youtube.com/watch?v=n9MFOZdrBF0&NR=1 94 Des informations données à l’auteur « out of the record » par des dirigeants du PDP, insistant à leur non publication nous poussent à dire que la rencontre d’ANC avec le premier ministre était infructueuse quant à la croyance à une ouverture possible. Le départ de Ben Ali était la première priorité des dirigeants du PDP depuis les manifestations du 13 Janvier le soir. Dans cette mesure, un éventuel accord avec Ben Ali pour former un gouvernement d’union nationale ne serait que pure chicanerie de compétition politique autour du pouvoir entre d’anciens alliés. 28 ce mouvement populaire ? Le parti qui était à la tête de l’opposition tunisienne avait-il raté la possibilité de conduire ce qui a été appelé le lendemain du départ de Ben Ali "la révolution tunisienne" ? La réponse de Maya JERIBI nous semble très pertinente. Nous la citons en entier :

« On n’était pas un parti populaire avant la révolution. Aucun parti ne pouvait la conduire parce qu’aucun n’était suffisamment implanté pour pouvoir le faire. Et si on n’était pas DEVANT la révolution, ceci ne nous a pas empêchés d’être DANS la révolution. La chose que je peux retenir c’est qu’on était présent dans les esprits des insurgés. Les slogans du pdp étaient presque tous repris dans les manifestations « ﺣﺮﯾّﺎت ﺣﺮﯾّﺎت ﻻ رﺋﺎﺳﺔ ﻣﺪى اﻟﺤﯿﺎة notamment

II- Le PDP à partir du 15 Janvier

Toutes les mutations du PDP commencèrent le samedi 15 Janvier 2011 quand les premiers contacts en vue de la formation d’un nouveau gouvernement ont été établis entre la direction du parti et le premier ministre nommé par le président par intérim Foued MBAZAA après que le brouillard s’est dissipé autour des articles 56 et 57 de la constitution.

Partant du principe que la proposition émanait, à la base de sa direction, le Parti Démocrate Progressiste avait tout de suite accepté la participation à un gouvernement dirigé par Mohamed GHANNOUCHI, premier ministre de Ben Ali pendant 10 ans. Ce gouvernement était censé réunir les chefs des trois partis légaux et indépendants à savoir, le PDP, Tajdid et le FDTL, des indépendants de la société civile telle que Lazhar KAROUI-CHEBBI, Ahmed OUNAIES et Taieb BACOUCHE, trois ministres représentants l’UGTT mais aussi des caciques du RCD.

29

Ces derniers qui ont gardé les principaux ministères laissant aux nouveaux ministres des ministères de services, étaient les plus nombreux (17 ministres appartenaient au RCD)95. Le programme du 1er gouvernement de GHANNOUCHI ne lui a pas épargné un grand mouvement de mobilisation dans la rue allant jusqu’à un sit-in devant les locaux du premier ministère. Ces derniers n’étaient pas les seuls à être attaqués. Il en était de même pour ceux des deux partis ayant enfin participé à ce gouvernement, à savoir le PDP et Tajdid. Des manifestations ont était même organisé pour réclamer à CHEBBI la démission d’un gouvernement considéré comme une continuité du même régime. La "révolution" ayant chassé le dictateur, il fallait se débarrasser de la dictature. Le PDP, le défendant avec ténacité, semblait convaincu de la nécessité d’un gouvernement pareil.

Pour revenir au programme de ce gouvernement, il était basé sur trois axes : l’amnistie générale, la libéralisation de la vie politique et l’organisation, dans un espace de six mois, d’élections présidentielles après une série de réformes des textes juridiques gérant la vie politique. Le PDP, satisfait de ce programme était, avec le mouvement Tajdid, les deux seuls partis en Tunisie à défendre cette démarche.

Le pourquoi de la participation à ce gouvernement

« Mohamed GHANNOUCHI était venu vers nous, nous proposer la participation à un gouvernement qui avait pour programme les mêmes revendications du mouvement démocrate tunisien depuis au moins 5 années. On ne pouvait qu’accepter la participation à une telle action.

95 TAP, 17-01-2011. 30

Passer la Tunisie de la dictature à la démocratie ne pouvait se passer que de la sorte, avec l’application d’un tel programme »96. « Qui est-ce qui représentait l’Etat tunisien le lendemain du 14 Janvier ? Il n’y avait que le président par intérim et son premier ministre qui jouissait du soutien des forces de l’ordre et de l’armée. Personne n’avait la légitimité de se déclarer comme porte parole de la révolution. Il fallait trouver une solution politique, entamer une démarche réformatrice en vue de passer à la démocratie. Avec la main tendue de Mohamed GHANOUCHI, on n’avait pas plus que trois choix. Le premier était de faire confiance totale à cette équipe pour lancer ces réformes. Ce n’était pas possible de leur donner un chèque à blanc comme ce qui a était fait en 1987. Le deuxième, c’était de continuer dans la contestation, d’amener la rue à une confrontation avec l’Etat. Le peuple tunisien ne mérite pas de perdre plus de martyrs. Le troisième choix, c’était de provoquer un vide. Ce vide ne pouvait amener qu’à l’anarchie ou à un gouvernement militaire. Un si bel exploit du peuple tunisien ne méritait pas une fin pareille. Pour assurer la succession de l’Etat, protéger les services publics et assurer un passage calme vers la démocratie, il fallait accepter cette offre de participer aux décisions prises par les conseils ministériels, de contrôler le fonctionnement de ce gouvernement de l’intérieur. On a contribué à préserver l’Etat tunisien de la sorte »97.

A la question « Mais plusieurs de vos concurrents vous reprochent d’avoir divisé la rue. Ne vous était-il pas possible de former un gouvernement avec les autres forces démocratiques, notamment celles réunies autour de la plateforme du Collectif du 18 Octobre ? » La réponse de Maya JERIBI était ainsi :

96 Entretien avec Maya JERIBI, Op.cit. 97 Entretien avec Ahmed Néjib Chebbi, Op.cit. 31

« Un gouvernement révolutionnaire n’a pas eu lieu le lendemain du 14 Janvier. Si on ne l’a pas vu se mettre en place c’est qu’il n’était pas possible. L’opposition tunisienne était déjà divisée et le Collectif 18 Octobre agonisait. Que fallait-il faire à ce moment ? Il ne nous était pas possible de ne pas s’engager dans la démarche réformatrice »98.

L’on peut mal imaginer l’aboutissement des autres scénarios proposés par Ahmed Néjib CHEBBI, mais la démarche entreprise par le Parti Démocrate Progressiste concordait parfaitement avec la vision qu’il avait de la sortie de la crise des jours avant le départ de Ben Ali. L’on peut considérer qu’il était le seul parti tunisien à avoir "une feuille de route" pour les événements qu’a connu la Tunisie. Cette démarche correspondait à un parti réformiste. Le PDP se voulait réaliste et l’on peut considérer que la crainte (fondée pour certain, pur affolement pour d’autres) d’un démantèlement de l’Etat ou d’un gouvernement militaire suite à un vide au pouvoir était l’élément principal de l’accord du parti sur la formation de ce gouvernement.

Ce qui nous intéresse le plus dans cette participation c’est qu’elle a marqué la rupture qui se consacrera plus tard, avec le coté tribunitien de ce parti. Ce premier accès au pouvoir ramènera le PDP sur le terrain des partis aspirant à gouverner, ou comme l’a dit sa secrétaire générale « Le PDP n’est pas opposition par définition »99.

L’on ne peut négliger un point très important dans cette participation. Le Parti Démocrate Progressiste, malgré toutes les défaillances que connaissaient ses structures, était le parti le plus présent en Tunisie et le mieux organisé. Il

98 Antretien avec Maya JERIBI, OP.cit. 99 Ibidem. 32 semblait, comme nous l’avons proposé, le seul parti à avoir une vision clair sur la démarche à suivre en cette période. Avec une figure très charismatique à sa tête, la dernière étape de la démarche proposée par le premier gouvernement de l’après 14 Janvier, à savoir les élections présidentielles, semblait convenir parfaitement à un parti qui avait vite compris que le RCD était fini, qu’aucune personnalité politique n’était en mesure d’être immédiatement plébiscité président de la république. A suivre le rendement de sa direction, avec toutes les dissensions qu’elle avait à traverser (deux membres de son bureau politique démissionnèrent100 ainsi que plusieurs de son comité central101, Abdelmajid MSALLEMI membre du BP exprima même son mécontentement en directe sur deux chaines télévisées) l’on peut constater que les premières préoccupations de la direction du parti était la participation au gouvernement. Mais avec des personnalités avec une expérience politique comme celle qu’ont les membres de cette direction, il est à exclure que les élections présidentielles, une voie certaine vers la création d’un grand parti de gouvernement, étaient absentes de la liste des motivations qui ont conduit le PDP à la participation à ce premier gouvernement102.

Pour revenir au premier gouvernement de GHANNOUCHI, et bien qu’il ait amorcé son programme dès sa première réunion, en l’occurrence amnistie générale et séparation entre l’Etat et le RCD103, il avait suscité une vague de colère de la plupart des forces politiques tunisiennes, emmenant dans leurs contestations une grande partie de l’opinion publique.

Et le PDP n’en était pas épargné. Cette participation avait provoqué de l’incompréhension chez plusieurs des membres du parti les poussant jusqu’à des

100 Riadh BARHOUMI et Chedly FERAH. 101 Hamza HAMZA, Ghassen BEN KHELIFA, Chahine SEFFI… 102 N’oublions pas ANC avait obtenu un ministère qui était un chemin très court vers une notoriété garantie. 103 http://www.businessnews.com.tn/Tunisie-%E2%80%93-D%C3%A9cisions-de-la-premi%C3%A8re- r%C3%A9union-du-gouvernement-dunion-nationale,520,23156,1 33 démissions rendues publiques sur internet104 ou des prises de décisions qui annonçait une fracture dans le corps de ce parti105. Les interventions du représentant du parti au sein du gouvernement n’étaient pas suffisantes pour convaincre les démissionnaires106. En fait, les opposants au sein du parti reprochaient à sa direction ce qu’ils appelaient la précipitation dans la participation mais surtout la disculpation des ministres RCDistes107.

Au-delà de la fragilité des structures du parti, cause principale de plusieurs démissions108, une petite exégèse dans ces dernières permet de constater un discours révolutionnaire allant dans un sens contraire à ce que devrait être l’imaginaire d’un membre d’un parti réformiste109. Preuve d’un échec relatif de l’éducation politique de ses membres, notamment les plus jeunes, ou juste une simple incompréhension d’une position ponctuelle prise par le parti ?

« Le parti était déstabilisé, les mécanismes n’était pas au point pour encadrer ses membres et éviter les quelques démissions qu’on a vu. D’un autre coté, ces démissions étaient compréhensibles. Plusieurs de nos membres avaient du mal à passer de la première ligne de confrontation avec le régime à la participation à un gouvernement dont la plupart des membres représentaient quelques jours

104 Pour n’en donner que quelques exemples : Khaled BOUHAJEB http://www.tunisnews.net/17Janvier11a.htm Riadh BARHOUMI et Hamza HAMZA http://www.tunisnews.net/18Janvier11a.htm un groupe de 8 membres des JDP http://www.tunisnews.net/19Janvier11a.htm 105 C’est ce qu’on peut comprendre du communiqué de la fédération de Gabes du parti. http://www.tunisnews.net/19Janvier11a.htm 106 http://www.youtube.com/watch?v=AlHU6fQjw2k 107 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/13042-Interview-de-Ahmed--Nejib-Chebbi- ministre-du-D%C3%A9veloppement-Local-et-R%C3%A9gional-Vid%C3%A9o.html 108 Des membres du PDP ont évoqué la difficulté qu’avait l’information pour passer des structures décisionnelles au reste des membres du parti causant de multiples incompréhensions. 109 A titre d’exemple, la démission du groupe des 8 : http://www.tunisnews.net/19Janvier11a.htm 34

auparavant ce même régime qu’on voulait éroder depuis des années»110.

Et pourtant, ces démissions n’ont en rien ralentit la marche et l’évolution du parti. Et les tâches semblaient être bien répartis entre les deux principaux dirigeants du parti. Ahmed Néjib CHEBBI, très présent en cette période sur les plateaux télé et radios en tant que ministre du développement régional, attirait vers le PDP plusieurs nouveaux adhérents qui voyait en lui une figure rassurante111. Il était l’expression de la ligne politique adoptée par le parti en cette période. De l’autre coté, Maya JERIBI, secrétaire générale, assurait l’organisation de la nouvelle donne au sein du parti.

« C’est à partir de la matinée du 15 Janvier qu’on a commencé à recevoir des demandes massives d’adhésions. Il fallait les intégrer et trouver les mécanismes nécessaires pour leur inclusion, étant donné que les anciennes structures ne pouvaient répondre aux milliers des demandes d’adhésion qu’on recevait »112.

C’est ainsi que le PDP procéda à une première démonstration de sa nouvelle force deux semaines seulement après le départ de Ben Ali. Un grand meeting organisé par le parti réussira à attirer près de 6000 personnes à la coupole d’El Manzah113. L’ère des meetings massifs fut ouverte dans la nouvelle Tunisie.

Du coté de la rue, les manifestations contre le gouvernement atteignent leurs paroxysmes avec le sit-in de la Kasbah I réussissant à imposer le

110 Entretien avec Maya JERIBI, Ibidem. 111 http://www.aawsat.com/details.asp?section=45&issueno=11777&article=609791 http://www.youtube.com/watch?v=hHD_kypneps 112 Ibidem. 113 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/13019-Le-PDP-ne-perd-pas-son-temps- vid%C3%A9o.html 35 départ de la quasi-majorité des caciques de l’ère Ben Ali114. Dans une intervention sur les ondes d’une radio privé tunisienne, M.JERIBI avait salué ce remaniement ministériel en le plaçant dans le cadre de l’interaction du gouvernement avec la rue. Il était clair qu’avec la nouvelle composition du gouvernement transitoire, le PDP était soulagé d’un fardeau qu’il était seul, avec le Mouvement Tajdid, à porter. Six mois plus tard, Maya JERIBI considère que « rétrospectivement, je continue à défendre notre choix de participer aux deux gouvernements de M.GHANNOUCHI. On n’avait pas d’autres choix pour sauver l’Etat tunisien dans un climat de panique généralisée. La seule chose que je peux dire à ce propos c’est qu’on aurait pu mieux négocier la composition. On avait obtenu qu’aucun des partis clients du régime Ben Ali ne soit présents, ni les plus compromis de ses ministres, mais on aurait pu avoir plus de ministères pour l’opposition, moins de ministres du RCD »115.

B-Le deuxième gouvernement de Mohamed GHANNOUCHI

Après une première période de calme relatif, le deuxième gouvernement formé par M.GHANNOOUCHI commença à subir comme son précédent la colère de la rue. En fait, en l’absence d’une feuille de route claire avec des dates butoirs pour les différentes échéances annoncées notamment celles des élections présidentielles, le disfonctionnement total de la justice transitionnelle, la situation sécuritaire oscillante entre calme et désordre et une composition acceptée au départ et contestée par la suite, un remake de la première action de sit-in à la Kasbah était lancée. Animé surtout par les formations politiques représentées au sein du Conseil de la Protection de la Révolution, ce deuxième grand mouvement de contestation ne se contente pas de contester la formation

114 TAP, 27-01-2011. 115 Entretien avec Maya JERIB, Op.cit. 36 du gouvernement ou son fonctionnement mais s’attaque directement à sa vision de la période transitoire. Cette deuxième vague de protestations pointa les élections présidentielles du doigt et réclama des élections d’une assemblée constituante. C’est dans ce cadre qu’une grande manifestation fut organisée le vendredi 25 Février 2011116. Deux jours après le premier ministre démissionna117. Le PDP, étroitement lié à ce gouvernement à travers ses actions, ses communiqués et les interventions de ses dirigeants, était perçu par tous comme le premier vaincu. S’opposant radicalement à la constitution du Conseil National pour la Protection de la Révolution, il considéra que « ce gouvernement est le seul passage possible pour assurer la transition démocratique »118 en refusant au premier les prérogatives qu’il s’est donné119.

Depuis le mois de Janvier, le parti était parmi les rares formations politiques du pays à défendre une démarche voulant commencer par des élections présidentielles avant des élections d’une assemblée législatives. Avec le départ de GHANNOUCHI, la nomination de Béji CAID-SEBSSI et l’annonce par le président de la République par intérim la suspension de la constitution et l’organisation des élections d’une assemblée constituante, le PDP subit sa première défaite à la première bataille politique de l’après 14 Janvier. Ainsi donc, Ahmed Néjib CHEBBI démissionna du gouvernement transitoire120 sans qu’il y est refus de la nouvelle feuille de route annoncé par le nouveau premier ministre121.

116 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/13368-Kasbah-Monastir-SfaxPartout-les- m%C3%AAmes-revendications.html 117 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/13397-Mohamed-Ghannouchi- d%C3%A9missionne.html .Op.cit. p-p : 8-9 2011-02-15 ﺑﯿﺎﻧﺎت و ﻣﻮاﻗﻒ 118 119 http://www.brisetunisienne.com/2011/02/blog-post_7812.html 120 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/13424-Ahmed-Nejib-Chebbi-Ministre-du- D%C3%A9veloppement-Local-d%C3%A9missionne.html Op.cit. p-p : 5-6 2011-03-07 ﺑﯿﺎﻧﺎت و ﻣﻮاﻗﻒ 121 37

III- Le PDP depuis Mars 2011 :

Cet échec subit par le PDP pouvait marquer le début de la chute finale de ce parti. Pourtant, c’est le contraire qui se produisit. A ce propos, nous nous intéresserons d’abord au financement du parti, aux nouveaux adhérents recueillis ensuite et pour terminer enfin par la stratégie électorale suivi depuis par le PDP.

A-Le PDP et ses militants : Nouveau profil de l’adhérent ou nouveau parti

Il ne nous était pas possible d’obtenir le chiffre exact du nombre actuel des adhérents du PDP. Nous estimons ce chiffre à plus de 25 000 membres (des estimations donnés par des membres de la direction du parti). Ce passage des alentours de 1 500 personnes ayant la carte du parti à un tel nombre avait poussé le parti à élargir ses structures dirigeantes. C’est ainsi que dans une conférence de presse organisée le 5 Aout, Maya JERIBI annonce l’intégration de plusieurs nouveaux cadres aux structures directionnelles du parti122. Le Comité Central passe de 50 membres à 206, le Bureau Politique de 20 membres à 61 et le Comité Exécutif de 6 membres à 15. L’on peut se demander si cet élargissement vise une ouverture sur de nouvelles compétences ou plutôt la création d’une nouvelle osmose entre nouveaux et anciens membres.

Comme tout autre parti vivant une transition démocratique, le PDP avait connu certaines difficultés à faire accepter les nouveaux équilibres créés depuis cette vague d’adhésion aux anciens comme aux nouveaux : Les premiers considérant ayant la légitimité historique, celle de la lutte contre la dictature et de la résistance d’un coté, les nouveaux, avec tous leurs savoir faire, leurs

122 http://www.leaders.com.tn/article/le-pdp-revele-la-nouvelle-composition-de-ses-instances-qui-sont-les- nouveaux-dirigeants 38 compétences sans lesquels le PDP n’aurait peut-être même pas pu établir un programme électoral de l’autre. L’on peut considérer que c’était un choix fait par la direction du parti afin de créer une réserve de nouveaux cadres capable dans un futur proche de prendre la relève surtout en observant que ces nouveaux "recrutements" touchent aussi bien les anciens membres que les nouveaux123.

Vu que le cadre de cette étude ne permet pas de faire une analyse globale des différents niveaux d’appartenance, l’on se contentera de l’analyse de la composition du comité le plus restreint des organes officiels du PDP, c.-à-d. le Comité Exécutif, comité qui se réunit le plus parmi les structures dirigeantes du parti, ayant la tâche de la gestion quotidienne des affaires du parti.

Comme on la déjà vu, 9 nouveaux membres124 rejoignent les 6 anciens125. L’on a pu récolter ces données : *La moyenne d’âge des membres de ce comité est de 53 ans126, 2 des membres sont âgés de moins de 35 ans, 3 sont âgés entre 45 et 50 ans, 5 entre 50 et 60 ans, 5 sont âgés de plus de 60 ans. *3 des membres sont retraités : Un général de l’armée, un professeur d’université et un ingénieur agronome. *9 des membres exercent des métiers libérales : 2 chefs d’entreprises, une directrice d’un centre d’étude privé, un huissier notaire, 2 journalistes, un conseiller fiscal, un banquier et un assureur. *3 des membres sont fonctionnaires : 2 professeurs de lycées et conservateur de bibliothèque. * 2 des membres sont syndiqués, l’un des deux est membre de la direction du syndicat de l’enseignement secondaire.

123 Parmi les 41 nouveaux membres du BP, 21 ont adhéré au parti après le 14 Janvier, 20 l’était avant. 124 Chedly Ferah, Mohamed HAMDI, Iyed DAHMANI, Tijeni ZAYED, (des anciens adhérents), Taieb HOUIDI, Mohamed Salah AYARI, Sahbi GRIRA, Mahmoud SMAOUI, Mahmoud MZOUGHI (des nouveaux adhérents). 125 Maya JERIBI, Monji LOUZ, Issam CHEBBI, Ahmed BOUAZZI, Mouldi FAHEM, Maher HANINE. 126 Le plus jeune ayant 33 ans et le plus vieux ayant 63. 39

*Originaires de régions différentes de la Tunisie, 13 membres sont installés à Tunis.

En observant le profil des nouveaux membres ayant rejoint le parti après le 14 Janvier, l’on peut remarquer qu’ils ont des profils qui n’existaient pas au parti pré 14 Janvier. Une valeur ajoutée à la direction du parti ? Certes. Les deux chefs d’entreprises ainsi que l’assureur et le conseiller fiscal sont reliés étroitement au secteur économique. L’ex général de l’armée apportera sans doute une contribution au programme sécuritaire et défensif du parti, chose quasiment inexistante dans la vision du parti sous l’ère Ben Ali. Quant aux anciens membres du parti rattachés au comité exécutif, il est peu important de chercher derrière leurs profils les causes de leur ascension à ce comité. La direction du parti ayant besoin de nouveaux cadres capables de traiter du politique, c’est dans cela que nous trouvons les causes de l’ouverture sur ces membres. En fait, le fait le plus marquant c’est ce mixage entre trois groupes : les anciens dirigeants ayant de l’expérience en matière de gestion et de pratique politique, les anciens membres du parti qui étaient membres du BP, du comité central ou absents des structures et enfin un troisième groupe qu’on peut appelé de technocrates, sans aucune expérience politique précédente au PDP, ayant contribué activement à l’élaboration du programme électoral. Ce mixage est à l’image de la nouvelle donne au sein du PDP.

Il est prématuré de parler de clivages avant le prochain congrès du parti127 mais nous pensons que le nouveau visage du PDP est et sera le résultat de l’interaction entre ces trois groupes, ayant leurs prolongements dans les profils des autres membres du parti : anciens dirigeants locaux ou nationaux, les anciens membres n’ayant pas accès ou ayant un accès limité au centre des décisions et enfin les nouveaux membres qui pourront s’aligner sur la position

127 Prévu pour le mois de Décembre 2011. 40 des uns ou des autres tout en ayant la possibilité de former un courant autonome au sein du parti.

Le fait le plus marquant qu’on peut relever de la composition de ce comité exécutif, c’est l’absence d’Ahmed Néjib CHEBBI de cette instance. Ceci peut signifier de deux choses l’une : Ou que la prise de décision politique réelle dépasse la plus haute structure du parti ou d’une division des tâches au sein du parti entre le porte drapeau et le chef de fil qu’est CHEBBI et les autres membres de la direction y inclut Maya JERIBI. Si l’on sait que le comité exécutif se réunit à plusieurs reprises par semaine, que les décisions les plus importantes sont prises au sein du Bureau Politique (dont CHEBBI est membre) après débats du Comité Exécutif et que les "politiques" sont les plus nombreux au sein de cette instance, l’on peut considérer que la première supposition n’est pas la plus envisageable.

Quant à la deuxième, l’on peut remarquer toute la marge de liberté offerte à CHEBBI de part l’absence de cette structure. Une marge lui permettant une liberté de déplacement128, une liberté de "parole" quant aux différents sujets de l’actualité politique du pays sans être prisonnier de l’obligation d’un retour à ce comité et une liberté d’élargissement de la toile d’amitié du parti parmi les hommes d’affaires, les experts capables d’apporter conseil au parti ou encore les différents diplomates et hommes politiques dans les pays liés à la Tunisie par des liens commerciaux ou territoriaux129. Il semble que cette division des

128 ANC avait tenu de nombreux meetings dans différentes régions du pays. Quelques vidéos de quelques visites : http://www.youtube.com/watch?v=zmC3PQnlEXY http://www.youtube.com/watch?v=OHD9E2Z1LbY&feature=related 129 L’on a pu remarquer que le PDP, à travers son chef historique jouit d’une certaine reconnaissance au niveau européen. Ceci est expliqué par la qualité des responsables que rencontre ANC lors de ses différentes visites au vieux continent : Roberto MARONI, Gianfranco FINI, Ferdinando CASINI et Valter VELTRONI en Italie : http://www.espacemanager.com/politique/tunisie-nejib-chebbi-en-visite-de-travail-en-italie.html 41

"missions" au sein du PDP est la forme inventé par les dirigeants du parti afin de gérer ce dédoublement du leadership du parti entre JERIBI et CHEBBI : la secrétaire générale avec la tâche d’organiser le parti, d’assurer son fonctionnement d’un coté et la figure la plus charismatique du parti130 assurant le rôle de locomotive avec une marge de liberté lui permettant de définir la vitesse de croisière politique de tout le PDP de l’autre.

Le PDP, et malgré cette montée sans précédent du nombre des adhérents, l’ouverture sur de nouvelles catégories socioprofessionnelles et la captation de nouvelles élites fraichement politisées, connait depuis le 14 Janvier des épisodes quasi-périodiques de démissions surtout parmi ses anciens membres. Comment expliquer ce phénomène ? Comme nous l’avons déjà mentionné, les démissions du PDP semblent être l’une des caractéristiques de ce parti. Si l’on écarte les démissions survenues après les deux échéances internes et majeures vécues par le parti depuis le mois de Juin, à savoir l’élargissement des structures et le choix des candidats du parti pour les élections, expliquées par un mécontentement d’ordre personnel, ces démissions sont un résultat normal des mutations que connait le PDP. Il s’agit en quelque sorte d’une" sélection naturelle". Le nouveau visage du parti, son rythme de croissance et les nouvelles interactions entre ses membres, expulsent toute personne tenant une vision différente, non sur des choix programmatiques mais plutôt des impératifs de ce passage d’un parti assurant une fonction tribunitienne à un parti aspirant remplir une fonction constituante et programmatique. Ainsi, l’explication que nous proposons à ce phénomène est la suivante : le Parti Démocrate Progressiste est en phase

Les membres de la Chambre de l’Industrie et du Commerce de Berlin, des responsables au ministères de l’Industrie et des Affaires Etrangères et Jochaim Hoerster en Allemagne : http://www.espacemanager.com/politique/tunisie-pdp-nejib-chebbi-en-visite-a-berlin.html Jean-François Copé et François Bayrou en France : http://www.businessnews.com.tn/details_article.php?t=533&a=25498&temp=1&lang= Il fut également le représentant de la Tunisie invité par le gouvernement turc pour assister au « Leader of Change Summit » : http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20110314165536/ 130 L’on a pu remarquer que les médias sur lesquels intervient ANC trouvent un peu de mal à le présenter. Il est présenté comme président du parti, son fondateur, membre de son bureau politique... 42 d’évolution vers un parti moderne à l’image de ceux de l’Europe de l’ouest. Même si dans ses statuts il garantit le droit à tout courant de s’exprimer librement, la nouvelle dynamique amorcée après la chute de Ben Ali ne semble pas intégrer le volet de l’organisation de courants concurrentiels autour du pouvoir au sein du parti différente de celle de l’avant 14 Janvier axée sur l’élément idéologique. Les différents conflits qui peuvent surgir au sein du PDP ne sont pas réglés au niveau des structures existantes. Du moment où ce parti ne connait pas des divisions en fractions131 ou pour utiliser le terme plus communs de "courants", les différents mécontentements qui peuvent surgir ne trouvent pas les canaux nécessaires à leurs expressions mise à part la rupture définitive avec le parti.

Le PDP semble encore loin du stade de la maturité nécessaire à ce genre de divisions et de clivages d’autant plus qu’il n’a pas encore exercé le pouvoir, générateur évident des clivages autour des programmes et des visions de la direction de l’Etat. Ceci donc sera explicité lors d’une conquête du pouvoir, chose que le PDP espère et œuvre pour.

B-Stratégie électorale du PDP :

Dès le lendemain du départ de Ben Ali, le Parti Démocrate Progressiste semblait bien comprendre que le pouvoir était vacant et qu’il fallait aller le conquérir. C’est ainsi qu’il rompt définitivement avec sa fonction tribunitienne et commence à s’installer dans une nouvelle, celle constituante et programmatique. Avec l’ambition de devenir un parti qui a « quelque rapport régulier et fondamental avec la structure, la composition et le fonctionnement du régime ou

131 A ce propos voir Giovanni SARTORI, Partis et Système de parti, Bruxelles, Editions de l’université de Bruxelles, 2011, p : 133. Le tableau n°2 présentant les ruptures et les typologies des différentes fractions au sein d’un parti. 43 du système »132. Une fonction pareille ne peut être assurée que par un parti ayant l’ambition de conquérir le pouvoir.

Dans une interview donnée au journal « Al-Charq Al-Awsat » datant du 30 Juin 2011, Ahmed Néjib CHEBBI déclare « Nous sommes prêts à gouverner la Tunisie »133. Le chemin suivi par le PDP vers la date du 23 Octobre peut être appréhendée sous deux angles : le premier consistera à observer le PDP de part sa politique d’autopromotion, le deuxième consistera en l’observation de sa stratégie envers ses concurrents et la place qu’il veut occuper. a-Structures et programme :

Depuis le mois de Janvier, le PDP œuvre à étendre sa présence sur tous les gouvernorats de la Tunisie. Déjà présents sur 16 des 24, la représentation du parti passe de la fédération à la section, structures correspondants aux délégations dans la division administrative de la Tunisie. Et si les dirigeants du PDP parlent aujourd’hui de 264 sections sur les médias, nous pensons que ce chiffre est au dessus de la réalité et que le nombre de ces sections n’est qu’aux environs de 210 sections. En fait, le PDP trouve quelques difficultés à assoir une assise partisane dans certaine gouvernorats. La fédération de Kebili par exemple ne fut formée qu’au début du mois d’Aout. Celle de Zaghouan n’a jusqu'à ce moment de locaux. Idem pour les gouvernorats du Kef et de Béja. Le PDP connait le taux d’adhésion le plus élevé sur le Grand Tunis, les gouvernorats du littoral ainsi qu’aux gouvernorats de Kasserine et de Sidi Bouzid. Les deux dernières fédérations sont passées à l’établissement des cellules, la structure la plus basique dans l’organigramme du parti. Cette installation sur l’ensemble du territoire tunisien vise en premier lieu à recruter la main d’œuvre nécessaire aux

132 Theodore J. LOWI, Party, « Policy and Constitution in America », in CHAMBER and BURNHAM, The Amercian Party Systems, cité in Jean CHARLOT, Les Partis Politiques, Op.cit. p : 102. 133 http://www.aawsat.com/details.asp?section=4&issueno=11902&article=628889&feature 44

élections nationales et le personnel politique capable de représenter le parti aux élections locales. Cette marche vers une forte présence du parti partout dans le pays semble être un processus irréversible, du moins avant les élections de l’Assemblée Constituante.

Dans le cadre de l’extension du parti, il nous semble qu’un point très important dans la politique du parti est à noter à ce stade de la recherche. Il s’agit de l’intégration des anciens RCDistes dans le parti. En fait, et depuis que son leader ait défendu les caciques du régime Ben Ali lors de son passage par le premier gouvernement de GHANNOUCHI, le PDP n’a cessé de plaider mordicus la cause de ceux qu’il appelle "les RCDistes intègres" : CHEBBI s’est déclaré « triste » quant à la manière dont la justice avait traité le dossier de la dissolution du RCD134. Maya JERIBI, lors d’une conférence de presse avait déclaré à propos des destouriens : « Du moment que ces personnes ne sont pas impliquées dans des affaires criminelles, nous sommes pour l’unité du peuple »135. D’autres déclarations d’autres dirigeants qui vont dans le même sens ainsi que l’opposition du PDP à l’article 15 du décret-loi organisant les élections de l’Assemblée Constituante, interdisant aux anciens dirigeants du RCD de se présenter à ces élections laisse croire qu’une vague d’adhésion des anciens membres du parti de Ben Ali a eu lieu au PDP. En fait, et même si l’on a constaté l’existence de quelques uns de ces derniers, leur nombre reste très bas pour toutes les attaques faites contre le parti à ce propos. Les membres du Bureau Politique ayant récemment rejoint le PDP ont été sujets à plusieurs investigations de la part des dirigeants du parti afin de vérifier s’il y a ou pas un éventuel passé destourien.

اﻟﺸﺮوق 14 ﻣﺎرس 2011 134 135 http://www.gnet.tn/revue-de-presse-nationale/pdp/maya-jeribi-nous-sommes-submerges-par-les- demandes-dadhesion/id-menu-958.html 45

En essayant de trouver une explication à ces propos et ces prises de décisions, nous avançons deux idées : la première est que les membres du parti sont bel et bien convaincus de ces prises de position. Ils considèrent, et à de larges proportions, que leur culture démocratique qui les a poussé à défendre les Islamistes du temps de Ben Ali les anime maintenant pour refuser tout politique de vengeance et de rancune. Nous pensons que ce volet est le plus important dans ces prises de positions.

Mais d’un autre coté, et c’est la raison pour laquelle nous évoquons la question des RCDistes dans la partie consacrée à la stratégie électorale, il existe, selon les chiffres de l’ère Ben Ali, deux millions d’ex adhérents au parti destourien. Une masse d’électeurs de ce poids n’est sans doute pas dispensable à un parti qui aspire à gouverner la Tunisie. Il reste à voir, au lendemain des élections du 23 Octobre, si cette politique était fructueuse ou pas.

Le Parti Démocrate Progressiste ne s’est pas contenté des nouveaux recrutements ou des "flirts" avec les anciens membres du RCD, ses bureaux d’études et ses experts avaient rédigé un programme en 120 points, le premier à paraitre parmi ceux des autres partis politiques. L’annonce de ce programme a eu lieu le 20 Mai lors d’un meeting organisé par le parti dans un luxueux hôtel de la capitale où se sont réunis hommes d’affaires, artistes, journalistes et politiques…136 Les 6 chapitres réunissant les 120 propositions137 du parti étaient une démonstration de force qu’a voulue le PDP envers ses concurrents puisque le premier à en proposer mais aussi pour renforcer l’image subliminale d’un parti capable de gouverner chez les citoyens tunisiens. Source de fierté de ses adhérents, il est, depuis son annonce, la principale riposte contre les attaques que subit le parti de la part de ses adversaires. Ainsi, quand un chef d’entreprise fait

136 http://www.leaders.com.tn/article/ahmed-najib-chabbi-devoile-le-programme-electoral-du-pdp 137 http://www.pdp.tn/web/pdfs/Programme%20120%20Propositions%20PDP.pdf 46 de la critique du PDP et de son programme l’objet d’un article publié sur internet138 deux des rédacteurs du programme du parti lui répondent par la même voie pour affirmer que « Oui ! Nous sommes prêts à gouverner ! »139. Le lendemain de l’annonce du programme, une vaste campagne d’affichage urbain était lancée partout en Tunisie. Pour le 24 Juillet, le PDP était visiblement le premier à quitter la ligne de départ. Rien ne semblait gâcher cette marche sauf… Kamel JANDOUBI. b-Bipartisme et vote utile, deux piliers d’une campagne électoral presque réussie

Depuis les premiers sondages effectués en Tunisie140, le PDP se retrouve en situation assez confortable par rapport aux autres partis politiques. Derrière le Mouvement Ennahdha, le PDP était le parti qui le talonnait dans tous les sondages effectués en Tunisie en ayant des scores allant de 12 à 29%141. Ces résultats pouvaient laisser croire que les élections de l’Assemblée Constituante seraient une tête à tête entre le PDP et le les islamistes d’Ennahdha. Le PDP, parti républicain, démocrate et moderniste se retrouvait ainsi en compétition avec l’autre projet, celui des islamistes. Défendant certes sa vision de la société tunisienne, indigné aussi par les pratiques, les agissements et le double discours des islamistes, ceci n’est pas suffisant pour expliquer l’opposition frontale entre

138 http://leaders.com.tn/article/ahmed-nejib-chebbi-au-journal-asharq-al-awsat-nous-sommes-prets-a- gouverner-le-sont-ils-vraiment?id=5629 139 http://www.leaders.com.tn/article/pdp-oui-nous-sommes-prets-a-gouverner http://www.leaders.com.tn/article/reponse-a-m-walid-belhadj-amor 140 Tout nous laisse sceptique quant aux sondages réalisés en Tunisie depuis le 14 Janvier. En fait, le doute autour de ces sondages ne relève pas seulement de la question classique des sciences sociales, les sondages reflètent-ils l’opinion publique ou la forment, mais aussi le professionnalisme des instituts qui les préparent. Le passage d’instituts spécialisés en les sondages commerciaux aux sondages politiques nous parait comme un échec cuisant. Pourtant, nous utiliserons ces résultats paradoxalement important dans l’analyse des équilibres des forces dans le pays. 141 http://www.leaders.com.tn/article/selon-un-nouveau-sondage-la-majorite-destunisiens-n-ont-jamais- entendu-parler-d-un-parti-politique http://www.leaders.com.tn/article/61-des-tunsiens-comptent-adherer-a-un-parti-politique http://www.leaders.com.tn/article/74-des-tunisiens-preferent-le-regime-parlementaire http://www.leaders.com.tn/article/deux-tunisiens-sur-trois-ne-savent-pas-pour-qui-ils-voteraient-sondage 47 les deux formations politiques. Ahmed Néjib CHEBBI semble ne rater aucune intervention médiatique pour critiquer le mouvement islamiste. Leur reprochant l’instrumentalisation politique des mosquées, l’amalgame entre prêche religieuse et pratique politique et l’absence d’un programme clair pour le gouvernement du pays, il multiplie les attaques142 tout en affirmant l’impossibilité que le parti puisse participer à un gouvernement avec Nahdha143. Celui surnommé Néjibullah144 pendant 23 ans change de fusil d’épaule. Les critiques qu’il émet envers les islamistes lui valent d’être traiter d’un nouveau Ben Ali par le secrétaire général d’Ennahdha, Hamadi JEBALI, paroles condamné par le premier145. Maya JERIBI en fait autant que son camarade en dénonçant toujours l’instrumentalisation des mosquées ou le refus des islamistes d’Ennahdha de signer la charte républicaine146. Cette démarche, consolidée par un hyper activisme du PDP qui se prononce sur toute l’actualité politique du pays147, le place comme le principal concurrent du mouvement islamiste en attirant vers lui les intentions du vote utile de tous ceux qui trouve en Nahdha un mouvement rétrograde. Dans ce cadre, JERIBI annonça que son parti espère obtenir deux millions de voix aux prochaines élections148.

142 A titre d’exemples : اﻟﺸﺮوق 8 أﻓﺮﯾﻞ 2011 http://lemhaf.net/ahmed-nejib-echebi-vs-nahdha/ http://www.opinionslibres.net/?p=378 اﻟﺼﺒﺎح 14 أﻓﺮﯾﻞ 2011 http://www.binaanews.net/fiche_article_politique.php?Id=489 143 http://www.majalla.com/arb/2011/06/article185 144 Sofiène Ben HAMIDA, « Néjib Chebbi ou Néjibullah ? », Le Maghreb, 13 Octobre 1989. 145 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/15317-Ahmed-Nejib-Chebbi--Iaydh-Ben-Achour- B%C3%A9n%C3%A9ficie-de-toute-notre-confiance.html 146 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/14091-Instrumentalisation-politique-des- mosqu%C3%A9es--Ennahdha-doit-elle-afficher-sa-position-officielle.html http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/14090-Une-charte-r%C3%A9publicaine-pour- %C3%A9viter-le-d%C3%A9rapage-vid%C3%A9o.html http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/12927-Maya-Jribi---le-dernier-mot-revient-au- peuple-.html 147 A titre d’exemples : Les propos de Farhat RAJHI : http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/14333-Ahmed- N%C3%A9jib-Chebbi--Les-propos-de-Farhat-Rajhi-sont-irresponsables--vid%C3%A9o.html Les événements de Rouheya : http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/14449-Le-PDP- exprime-son-soutien-%C3%A0-l-arm%C3%A9e-nationale.html 148 TAP, 29-07-2011. 48

Ce nouvel équilibre sur la scène politique donnant un avant gout d’un système bipartisan est soudainement arrêté deux jours après l’annonce du programme du PDP, le lendemain du déclenchement de sa campagne d’affichage urbain, avec l’annonce de Kamel JANDOUBI, président de l’Instance Supérieure Indépendante des Elections que l’organisation des élections à la date du 24 Juillet n’était plus possible d’un point de vue technique. Le PDP contesta cette décision et s’y opposa de manière active. A travers les déclarations de ses dirigeants, il essaya d’imposer le maintien de cette première date annoncée pour les élections. L’argument avancé par le parti correspondait parfaitement à son profil. Il fallait absolument réinstaurer la légitimité des dirigeants et ce à travers les élections de l’assemblée constituante149. La préservation de l’Etat, le premier motif de la participation du PDP au premier gouvernement de GHANNOUCHI réapparait encore une fois.

Toutefois, et en regardant ailleurs, le PDP n’était pas le seul à tenir cette position. Le Mouvement Ennahdha en a fait autant. Comment expliquer ce croisement entre les positions des deux nouvelles forces concurrentes ? Si l’on considère que le clivage principal chez les tunisiens qui se sont prononcés sur leurs intensions de vote est celui d’Islamisme/Modernisme, les deux partis concurrents, croyants en leurs hégémonies sur les deux camps avaient considéré que ce report de la date des élections pouvait nuire à cette hégémonie. Pour le PDP, et en l’absence d’un autre parti politique capable de le défier parmi les partis modernistes, savait que la prolongation de la période qui le séparait des élections pouvait nuire à cette image du seul parti pouvant faire face à Ennahdha. L’argument de vote utile, même s’il n’a pas était explicité dans les discours des "pdpistes", existait bel et bien d’une manière latente.

149 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/14541-Ahmed-Najib-Chebbi--%C2%AB-Le- d%C3%A9sordre-m%C3%A8ne-vers-la-dictature-%C2%BB-vid%C3%A9o.html 49

Cette longueur d’avance prise par le PDP sur les autres partis de ce qui s’appelle désormais le centre, le poussa aussi à refuser toute alliance électorale150. Avançant l’argument du mode de scrutin qui bénéficie plus aux "petites" listes plutôt que les "grandes", le PDP avait choisi de faire cavalier seul aux élections tout en affirmant qu’il œuvrerait à la formation d’une large alliance démocratique au sein de l’Assemblée151.

Malgré la volonté d’éviter l’amalgame entre ses propres candidats et les autres en cas d’une alliance électorale, et malgré cette volonté de gagner seul plutôt qu’avec d’autres afin de les réduire en partis satellites dans l’Assemblée Constituante et dans les prochaines assemblées législatives, il nous parait que les premières motivations étaient réellement le mode de scrutin d’un coté et une éventuelle déclaration d’échec et de faiblesse de l’autre en cas d’alliance électorale face au ME.

La donne changea partiellement après le report des élections. La campagne de publicité urbaine du FDTL semble ramener plusieurs personnes à voir que le PDP n’est pas seul dans la position du parti hégémonique du centre. Le vote utile pour le PDP est devenu désormais contesté. Dans les derniers sondages d’opinions, le parti ne talonne plus Ennahdha même s’il conserve toujours la deuxième place. D’un autre coté l’écart entre lui et le FDTL s’est considérablement réduit152.

De la sorte, la campagne électorale du PDP semble donc viser ramener les électeurs sur deux arguments principaux. Le premier, celui de l’opposition aux islamistes. Le second, nouveau, est de démontrer qu’un éparpillement des voix

150 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/13620-A-N%C3%A9jib-Chebbi-nous-n-allons-- pas-nous-allier-avec-d-autres-partis-vid%C3%A9o.html أﺣﻤﺪ ﻧﺠﯿﺐ اﻟﺸﺎﺑﻲ ﻧﺘﻌﮭﺪ ﺑﺘﻜﻮﯾﻦ اﺋﺘﻼف دﯾﻤﻘﺮاطﻲ واﺳﻊ، اﻟﺸﺮوق، 2011-07-20 151 152 http://www.lecourrierdelatlas.com/74610092011TUNISIE-Les-chiffres-du-dernier-sondage-avant-les- elections.html 50 ne peut que servir le ME. Ainsi, le PDP entame sa campagne électorale en ayant deux adversaires : le premier sur l’ensemble de la Tunisie, avec lequel le clivage est celui du projet de société, le Mouvement Ennahdha. Le deuxième, l’éparpillement des voix du centre et son partage entre le PDP et le FDTL. Ce dernier adversaire semble être plus rude puisque la compétition se déroule sur le terrain même du PDP et pas celui de son nouveau concurrent, le FDTL qui semble bien bénéficier de sa position d’outsider.

Pour entamer la compétition, le PDP s’est armé de deux grands atouts. Le premier est bien évidemment ses listes électorales. Le choix des membres des listes était un mélange entre un procédé démocratique de choix des candidats par les bases du parti réunis au niveau des fédération et des nominations provenant du Bureau politique pour les têtes des listes dont les noms étaient proposés par les fédérations. Ces choix ont provoqué plusieurs mécontentements dans plusieurs fédérations du parti. Kairouan, Ben Arous et surtout Bizerte ont connu plusieurs démissions.

L’espace de cette recherche ne permettant pas le traitement des choix faits par le parti liste par liste, nous nous contenteront d’avancer quelques remarques : *La première est celle des anciens et des nouveaux. Sur les 33 premiers candidats, 16 ont récemment rejoint le PDP. Ils sont candidats sur les circonscriptions du littoral sauf le grand Tunis, les circonscriptions du Nord- Ouest et 4 des 6 circonscriptions de l’Etranger.

*La deuxième remarque est relative à la parité entre hommes et femmes. Le PDP qui a une femme au poste de Secrétaire Générale, ne présente que 3 femmes comme têtes de listes. *La troisième remarque est relative à la présence des jeunes. Selon les chiffres donnés par le nouveau directeur politique de la campagne du PDP, Monji

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LOUZ, lors d’une conférence de presse organisée afin de présenter les listes153, 47% des candidats ont moins de 40 ans, 36% ont moins de 35 ans et 22% ont moins de 30 ans. Toutefois, l’on peut remarquer que seulement deux des anciens leaders des JDP figurent dans des positions avancées sur les listes candidates aux élections154.

La deuxième "arme" que le PDP mit en œuvre pour ces élections est sa présence sur le terrain. A travers un système qui jouit d’une autonomie relative par rapport aux structures du parti appelée « Les Tunisiens Volontaires » et constitué principalement des jeunes membres du parti, le PDP s’est lancé depuis le début du mois d’Aout dans des actions de tractages, de porte-à-porte et de promotion de son programme et de son image à travers un contact direct. Cette dynamique est renforcée par plusieurs déplacements effectués par CHEBBI et JERIBI en compagnie des candidats du parti dans différentes circonscriptions155. Reste à savoir si le PDP réussira à faire des démonstrations de forces à travers de grands meetings. Cet exercice réalisé à trois reprises déjà156 et relativement réussi pour un parti a-idéologique pourrait bien être une troisième arme que pourra utiliser le parti dans la période à venir.

Conclusion :

Depuis l’annonce de l’organisation des élections d’une Assemblée Nationale Constituante, le PDP s’intéresse plus pleinement à la vie électorale. Son but est de contribuer partiellement ou beaucoup plus que ça à la construction du nouveau régime politique. Ceci va sans cacher la volonté de gouverner à partir

153 http://www.gnet.tn/temps-fort/le-pdp-devoile-lidentite-de-ses-candidats-a-la-constituante/id-menu- 325.html 154 Nizar BEN HASSAN est troisième sur la liste de Mahdia et Wafa JAOUA est deuxième sur la liste de Sfax 2. 155 La page officielle du PDP sur Facebook publie des photos et des comptes rendus de ces déplacements. 156 Le premier meeting de la coupole d’el Manzah, le deuxième grand meeting, celui de Sfax le 7 Mai et le dernier en date le meeting des JDP à la coupole le 10 Septembre. 52 des élections prochaines et pour toutes celles qui viennent après. Ses appels aux électeurs touchent à toutes les catégories sociales. Si l’on considère les 4 clivages principaux décrits par LIPSET et ROKKAN157, le PDP essaye de rassembler les protagonistes de trois de ces clivages : centre et périphérie, monde rural et société industrielle et urbaine, possédants et travailleurs. Le 4ème clivage, église et Etat, en l’adaptant à une société musulmane, l’on peut le formuler autrement pour le ramener à sécularistes/islamistes, et le PDP semble bien choisir son camp en s’opposant à l’islamisme du Mouvement Ennahdha. Reste à savoir si c’est lié aux impératifs électoraux ou est-ce que ca serait plus durable. Nous soutenons la deuxième hypothèse. Le cas contraire, le PDP perdrait la majeure partie de la base électorale qu’il est entrain d’acquérir. Cette réalité ne semble pas échapper à ses dirigeants.

Le Nouveau PDP récuse donc le dogmatisme idéologique (les prémisses de cette réalité se font sentir depuis 1999 et se sont de plus en plus consacrés depuis). Il se contente d’un fond commun de valeurs, assez large pour réunir autour de lui un maximum de supporters. Il admet la démocratie de masse, la solidarité de groupe, les valeurs de gauche comme celles de droite. Ce nouveau profil correspondrait plus à une catégorie qui n’a pas était décrite par Duverger, inventé après lui pour dépasser sa typologie qui n’intégrait plus la totalité des partis politiques que l’on peut observer. De la sorte, le PDP évolue d’un parti de masse vers un model de parti appelés les "catch-all party"158.

157 Même si ces deux auteurs traitent principalement des partis occidentaux fruits des clivages générés par les deux révolutions industrielle et nationale que n’ont pas connu les pays arabo-musulmans, les 4 clivages nous semble correspondre aux réalités de la vie tunisienne. S. LIPSET et S.ROKKAN, Structures de clivages, systèmes de partis et alignement des électeurs : une introduction, Bruxelles, Editions de l’Université de Bruxelles, 2008, P : 33. 158 Jean CHARLOT, Les Partis Politiques, Op.cit, p-p : 213-217. 53

C-Financement du parti

En un premier temps, l’on a pu constater que les finances du parti avaient considérablement augmentées depuis le départ de Ben Ali. Tout laisse à croire que la figure d’Ahmed Néjib CHEBBI, candidat pressenti aux élections présidentielles, avait ramené plusieurs hommes d’affaires à financer le parti qui soutient la candidature de l’un des plus sérieux prétendants à la magistrature suprême. Et l’on a pu croire que le changement du processus transitoire début mois de Mars pouvait arrêter la contribution de ces hommes d’affaires. Rien n’a changé.

En fait, et comme on l’a déjà mentionné, le PDP qui semblait être le seul concurrent de taille pour face aux islamistes d’Ennahdha, avait continué à être le parti sur lequel pouvait miser ces grands donateurs. Ces nouveaux liens qui se sont établis avec le monde des affaires avaient couté au parti de vastes critiques. Blanchiment d’argent, parti vendu, porte parole de la bourgeoisie, premier outil de conspiration contre la révolution ont était toutes des attaques soulevées sur Facebook et même dans les interventions sur les médias des concurrents du parti. Ces nouveaux liens ont pourtant aidé le parti à s’implanter dans les différentes régions du pays à travers l’ouverture de nouveaux locaux, à se présenter comme un parti réunissant les différentes classes sociales du pays159. Le PDP s’est défendu des critiques avancées et avait présenté l’argument qu’il ne pouvait pas refuser la contribution de n’importe quel tunisien voulant aider la construction démocratique dans le pays tout en affirmant que ses finances ne proviennent que des citoyens tunisiens160.

159 Lors du grand meeting organisé par le PDP à Sfax le 7 Mai, CHEBBI était entouré de Moncef KHMAKHEM un homme d’affaire connu et Mohamed CHAABANE secrétaire générale de l’antenne régionale de l’UGTT. 160 TAP, 25 Juin 2011. 54

Lors du débat au sein de la CISROR autour du décret loi portant sur le financement des partis politiques, le PDP avait refusé le plafonnement du financement par les particuliers. De la même, il avait réclamé la permission aux personnes morales de contribuer à ce financement. Les débats autour de ce décret loi l’avaient même poussé à quitter momentanément l’Instance161 avant d’y revenir162.

Si l’on admet que toute activité politique n’est possible sans argent, il est évident qu’avec toute la confiance de laquelle jouit le PDP dans les milieux des affaires, il a une obligation de résultats dans les prochaines élections et ce à deux niveaux : envers lui-même s’il veut continuer à un être un acteur politique déterminant dans la vie politique tunisienne et envers ses donateurs qui cesseront de l’être en cas d’échec.

161 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/15269-Le-PDP-r%C3%A9affirme-la-suspension- de-ses-activit%C3%A9s-au-sein-du-CISROR.html 162 http://www.mosaiquefm.net/index/a/ActuDetail/Element/15317-Ahmed-Nejib-Chebbi--Iaydh-Ben-Achour- B%C3%A9n%C3%A9ficie-de-toute-notre-confiance.html

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