« NOUS AVONS POUR ORDRE DE VOUS ÉCRASER »

LA RÉPRESSION CROISSANTE DE LA DISSIDENCE EN

TABLE DES MATIÈRES

TABLE DES MATIÈRES...... 2

1. INTRODUCTION...... 4

2. LA LIBERTÉ D’EXPRESSION ET D’ASSOCIATION DE PLUS EN PLUS RESTREINTE.. 11

2.1 LOIS ET POLITIQUES LIMITANT LA LIBERTÉ D’EXPRESSION ...... 13

2.2 RESTRICTIONS DE LA LIBERTÉ D'ASSOCIATION ET DE RÉUNION ...... 17

3. DE L’ARRESTATION À L’EXÉCUTION : LES SCHÉMAS DE VIOLATIONS DES DROITS HUMAINS...... 22

3.1 LA TORTURE ET LES AUTRES FORMES DE MAUVAIS TRAITEMENTS EN DÉTENTION ...... 23

3.2 DES CONDITIONS DE DÉTENTION DÉPLORABLES ...... 24

3.3 PROCÈS INIQUES...... 25

4. QUI SONT LES CIBLES ? ...... 28

4.1 LES ORGANISATIONS DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS ET LEURS MEMBRES ...... 28

4.2. LES AVOCATS ...... 32

4.3 LES DÉFENSEURS DES DROITS DES FEMMES ...... 36

4.4 MILITANTS POUR LES DROITS HUMAINS ISSUS DE MINORITéS ...... 38

4.5 CINEASTES...... 39

4.6 BLOGUEURS ...... 40

4.7 JOURNALISTES ...... 46

4.8 DIRIGEANTS POLITIQUES ET MILITANTS...... 48

4.9 LES SYNDICALISTES...... 51

4.10 ÉTUDIANTS ET UNIVERSITAIRES...... 53

4.11 PERSONNES LESBIENNES, GAYS, BISEXUELLES ET TRANSGENRES ...... 56

4.12 MINORITÉS ETHNIQUES ET RELIGIEUSES ...... 57

4.13 PERSONNES EN LIEN AVEC L’ORGANISATION IRANIENNE DES MOUDJAHIDIN DU PEUPLE (OIMP) ...... 64

5. AU‐DELÀ DES FRONTIÈRES IRANIENNES ...... 66

6. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS...... 69

NOTES...... 72

4 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » La répression croissante de la dissidence en Iran

1. INTRODUCTION

« Celui qui l’interrogeait lui a dit : "Nous avons pour ordre de vous écraser et si vous ne coopérez pas, nous pouvons faire ce que nous voulons de vous et si nous n’écrivez pas votre déposition, nous vous forcerons à la manger" ».

Mahdieh Mohammadi, épouse du journaliste emprisonné Ahmad Zeidabadi, dans un entretien avec Radio Farda, en septembre 20091

Le 14 février 2011, des milliers d’Iraniens, encouragés par les manifestations de masse qui ont balayé l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, ont défié une interdiction gouvernementale en manifestant à Téhéran et dans d’autres villes. La milice paramilitaire Bassidj et d’autres forces de sécurité ont réagi en tirant sur les manifestants, en leur jetant des gaz lacrymogènes et en les frappant avec des matraques avant d’arrêter un grand nombre d’entre eux. Dans le sillage du renversement des gouvernements autocratiques en Tunisie et en Egypte, les autorités iraniennes ne voulaient prendre aucun risque.

Ce sont les dirigeants de l’opposition et Mir Hossein Mousavi qui ont appelé à manifester par solidarité avec la population de Tunisie et d’Égypte et ces manifestations ont été les premières démonstrations publiques importantes de l’opposition depuis que les autorités iraniennes ont écrasé dans une extrême violence les grandes manifestations qui avaient éclaté et s’étaient poursuivies pendant six mois à la suite des résultats contestés des élections présidentielles en juin 2009, et qui avaient atteint leur point culminant lors de la fête religieuse d’Achoura en décembre 2009.

Apparemment sans ironie, le Guide suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, a célébré les soulèvements en Tunisie et en Égypte, déclarant qu’ils reflétaient un « éveil islamique » fondé sur la révolution iranienne de 19792. Les dirigeants iraniens ont aussi soutenu les Bahreïnites qui manifestaient pour leurs droits3. Cependant, en 2009, l’Iran a exercé une répression sans pitié envers les Iraniens qui exprimaient le même désir que celui des Tunisiens, des Égyptiens et des Bahreïnites manifestant pour leurs droits politiques et la justice sociale. En février 2011, un simple appel à des manifestations de solidarité a suffi pour faire placer Mehdi Karroubi et Mir Hossein Mousavi en résidence surveillée, pour bloquer les sites Internet d’opposition et arrêter des centaines de militants politiques et d’autres personnes.

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Les manifestations qui en ont découlé en 2011 dans plusieurs villes d’Iran ont été dispersées par la force et des mesures supplémentaires ont été prises pour étouffer l’opposition et faire taire les critiques. Un an plus tard, Mehdi Karroubi et Mir Hossein Mousavi sont toujours assignés à résidence et on estime que des centaines de personnes sont encore en prison, simplement pour avoir osé exprimer leur opinion. Pendant ce temps, les forces de sécurité et en particulier la milice Bassidj, continuent d’opérer en toute impunité pour les crimes commis.

Depuis la répression de 2009, les autorités n’ont cessé de renforcer les sanctions à la fois en droit et en pratique, et elles ont resserré leur contrôle sur les médias. Elles ont empêché la tenue de manifestations publiques en utilisant les articles du Code pénal iranien qui rendent les manifestations, les débats publics et la formation de groupes et d’associations considérés comme une menace à la « sécurité nationale » passibles de longues peines d’emprisonnement ou même de la peine de mort. Des avocats ont été emprisonnés en même temps que leurs clients. La diffusion des télévisions étrangères par satellite a été brouillée. Des journaux ont été interdits. Les dissidents et les critiques écrivant dans des journaux ou sur des sites Internet ou s’exprimant dans les médias risquent d’être inculpés d’infractions telles que « propagande contre le régime », « insultes envers un représentant du régime », « diffusion d’informations mensongères dans l’intention de porter atteinte à la sécurité de l’État » ou parfois des « infractions » de « corruption sur terre » ou « inimitié à l'égard de Dieu », des accusations qui peuvent entrainer la peine de mort4. En Iran, la communauté des internautes est sous le coup d’une nouvelle loi relative à la cybercriminalité et les blogueurs entre autres personnes sont conduits en prison. La sévérité des peines prononcées à l’encontre de blogueurs est bien la preuve que les autorités ont peur du pouvoir d’Internet et de la libre circulation des informations vers et hors du pays. Au moment de la rédaction de ce rapport, en février 2012, parallèlement au lancement de la campagne pour les élections parlementaires débutait également une nouvelle vague d’arrestations de blogueurs, de journalistes et d’autres personnes, apparemment pour dissuader les gens de manifester lors de l’anniversaire des manifestations du 14 février ou de chercher à faire ressortir des critiques contre le gouvernement lors des élections parlementaires.

Les organes de sécurité iraniens, en grand nombre et agissant souvent de manière parallèle - dont notamment une nouvelle force de cyber-police - peuvent maintenant surveiller de près les militants quand ils utilisent leurs ordinateurs dans la sphère privée. Ces forces ont limité le débit, et travaillent à la mise en service de serveurs gérés par l’État, de protocoles Internet (IP) spécifiques, de fournisseurs d’accès Internet (ISP) et de moteurs de recherche.. D’innombrables sites web sont bloqués, dont le site d’Amnesty International www.amnesty.org. Il en va de même avec de nombreux sites iraniens et étrangers de réseaux sociaux. Une « cyber-armée »relativement récente et mal connue, qui serait liée aux padsaran (également dénommés « corps des gardiens de la révolution iranienne »), s’est livrée à des attaques sur des sites web iraniens et étrangers, notamment sur les sites Twitter et Voice of America.

Les restrictions qu’imposent les autorités sur Internet servent également à étouffer toutes les critiques venant de l’étranger. Cette politique est complétée par un harcèlement des opposants qui vivent en exil et des arrestations en Iran de proches des critiques ou des journalistes qui vivent à l’étranger. Selon de nouvelles règles, le fait d’entrer en contact avec plus de 60 institutions

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étrangères, organismes de presse et ONG figurant sur une liste constitue désormais un délit.

Les vagues d’arrestations des derniers mois ont ciblé des avocats, des étudiants, des journalistes, des militants politiques et leurs proches, des membres des minorités religieuses et ethniques en Iran, des réalisateurs de cinéma, des militants des droits des travailleurs et des personnes entretenant des rapports à l’international, en particulier avec les médias étrangers comme la branche « BBC Persian »de la BBC. Des dizaines de personnes ont été torturées et emprisonnées, parmi lesquelles figurent des prisonniers d’opinion. Bien d’autres personnes ont été harcelées ou se sont vu interdire toute sortie du territoire.

La répression contre les défenseurs des droits humains s’est intensifiée. Nombre d’entre eux ont été harcelés ou arrêtés et détenus arbitrairement. Certains sont toujours en détention après avoir fait l’objet de procès non équitables au cours de ces dernières années. Beaucoup sont des prisonniers d’opinion. Le Centre de défense des droits humains (CDDH), l’Association pour les droits des prisonniers, Défenseurs des droits humains en Iran ou le Comité des reporters des droits humains ont tous été fermés ou la reconnaissance légale leur a été refusée. Les syndicats indépendants sont toujours interdits et plusieurs membres de syndicats sont emprisonnés.

Les perspectives de ceux qui tombent dans les griffes du système de justice injuste iranien sont encore assombries par l’augmentation du nombre de personnes condamnées à mort et exécutées. En 2011, on a dénombré environ quatre fois plus d’exécutions publiques qu’en 2010 et on estime que des centaines de personnes ont été condamnées à mort l’an dernier. Il y avait au moins trois mineurs parmi les personnes exécutées l’an dernier, bien que l’exécution de personnes de moins de 18 ans au moment des faits allégués soit strictement interdite en vertu du droit international.

Ce rapport fait suite à deux rapports précédents d’Amnesty International : « Iran ; une élection contestée, une répression accrue » publié en décembre 20095, et « From protest to prison: Iran one year after the election » publié en juin 20106. Son objet est de montrer que les atteintes aux droits humains révélées dans ces rapports ont non seulement perduré mais dans certains cas se sont amplifiées ou ont été établies dans le droit.

Ceux qui se retrouvent dans les prisons et centres de détention en Iran subissent fréquemment des actes de torture et d’autres mauvais traitements, qui s’avèrent une pratique courante et très répandue. D’anciens détenus, hommes et femmes, ainsi que des prisonniers qui ont rédigé des lettres ouvertes depuis leurs cellules partout dans le pays rapportent avoir été frappés, notamment sur la plante des pieds, parfois alors qu’ils étaient pendus la tête en bas. Ils disent avoir été brûlés avec des cigarettes et des objets métalliques chauffés. Ils ont décrit comment ils avaient été soumis à des simulacres d’exécution. Ils ont rapporté avoir été victimes de viols, parfois avec des instruments, notamment par d’autres prisonniers, ou menacés de viol. Ils se sont plaints d’avoir été privés de nourriture et d’eau en quantité suffisante, alors que les traitements médicaux étaient souvent délivrés tardivement ou même refusés. Dans de nombreux cas, la torture et les mauvais traitements sont utilisés pour extorquer des « aveux » et il est courant que les tribunaux ne tiennent aucun compte des plaintes pour torture et acceptent comme preuves

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les « aveux » obtenus par ces moyens illégaux.

En Iran, la plupart des procès sont manifestement iniques, en particulier ceux qui sont tenus devant les tribunaux spéciaux comme les tribunaux révolutionnaires, qui se déroulent fréquemment à huis clos. Il est courant que les accusés se voient refuser l’accès à des avocats durant la phase d’enquête préliminaire au procès et souvent même durant le procès, sur la base d’une interprétation restrictive d’une note du Code de procédure pénale. Souvent, les procès, devant des juges qui semblent prononcer les peines selon les instructions des enquêteurs, ne durent que quelques minutes.

Les détenus qui protestent contre l’injustice, la torture ou les effroyables conditions de détention sont parfois transférés dans des prisons éloignées en guise de châtiment ou sont inculpés de nouvelles infractions. Certains sont libérés mais ont l’interdiction de voyager pour empêcher la formation de réseaux internationaux, ou ils sont contraints de fuir par peur d’autres persécutions. Les amis et parents de détenus sont arrêtés ou harcelés dans le but de les dissuader de s’exprimer publiquement au sujet du cas de leur proche ou de faire pression sur les détenus.

Les communautés appartenant aux minorités ethniques d’Iran, notamment les Arabes ahwazi, les Azerbaïdjanais, les Baloutches, les Kurdes et les Turkmènes, continuent de subir des discriminations en droit et en pratique. L’utilisation des langues des minorités sur les lieux de travail contrôlés par l’État et pour l’enseignement dans les écoles reste interdite. Les minorités religieuses sont confrontées à une discrimination et une marginalisation similaires. Les militants qui font campagne pour les droits des minorités sont menacés, risquent d’être arrêtés et emprisonnés, de même que les militants qui mènent campagne contre la discrimination généralisée envers les femmes en droit et en pratique.

Comme le démontrent ces schémas d’abus répétés de longue date, les références récentes faites par les dirigeants iraniens à un « réveil islamique » libérateur durant la révolution de 1979 sont mensongères. Non seulement la torture a perduré après la révolution, mais il en a été de même pour la répression de la différence d’opinion politique.

Les membres d’organisations de gauche et de groupes kurdes en particulier, ainsi que les membres de l'Organisation iranienne des moudjahidin du peuple (OIMP), qui ont tous joué un rôle important dans la révolution, ont été arrêtés en grand nombre après avoir perdu la lutte pour le pouvoir qui a suivi. Des milliers de prisonniers politiques ont perdu la vie aux mains de l’État, qui a exécuté sommairement nombre d’entre eux à partir de 1979, notamment au cours du terrible « massacre des prisons » en 1988.

De vagues « critères de l’islam » inscrits dans la Constitution et ultérieurement dans la législation, ont été utilisés par les autorités pour justifier de nombreuses violations de droits humains. Les droits des femmes en ont rapidement pâti : un code vestimentaire strict a été introduit, il a été décidé que le témoignage d’une femme ne valait que la moitié de celui d’un homme devant les tribunaux, et que les femmes ne recevraient que la moitié des dommages accordés à un homme en cas de blessure ou de décès imputable à un homme, tout cela s’ajoutant au statut inéquitable accordé aux femmes dans le Code civil pour les affaires ayant trait au mariage, au divorce et à la garde des enfants. Les relations sexuelles

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hors mariage ont été rendues passibles de flagellation ou de lapidation à mort. Les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres sont soumises à une discrimination accrue en raison de leur identité et passibles de sanctions sévères en cas de condamnation pour « relations sexuelles consenties ». La discrimination pour des motifs ethniques ou religieux a aussi été inscrite dans la loi, et appliquée dans les politiques et la pratique. Même les « infractions » qui n’étaient pas inscrites dans la loi comme « l’apostasie de l’Islam » pouvaient faire l’objet de poursuites en vertu des dispositions constitutionnelles et législatives exigeant des juges qu’ils utilisent leur connaissance du droit musulman pour rendre leurs décisions dans les cas non prévus par le droit national..

Les rapports d’Amnesty International sur l’Iran depuis 2009 ainsi que des rapports récents publiés par des organes des Nations unies7 apportent des preuves accablantes de la gravité de la situation des droits humains en Iran et contredisent les fréquentes déclarations des autorités, notamment dans le cadre du dialogue avec le Comité des droits de l’homme de l’ONU en octobre 2011, dans lesquelles elles nient toute violation des droits humains et clament que de telles allégations ont une motivation politique.

Les autorités iraniennes s’efforcent à tout prix de barrer le chemin à toute forme d’observation du pays provenant de l’extérieur, notamment en refusant de coopérer avec les mécanismes des droits humains des Nations unies, tout en affirmant respecter leurs obligations internationales. L’Iran bloque neuf mécanismes de l’ONU dont les demandes de visite sont en attente et aucune délégation des procédures spéciales de l’ONU n’a été autorisée à conduire de mission d’enquête depuis 2005. En effet, le gouvernement a expressément refusé d’accepter les recommandations formulées lors de l’Examen périodique universel (EPU) qui appelaient à permettre les visites en février 20108. De la même manière, les organisations internationales de défense des droits humains ne sont pas autorisées à effectuer des visites ; les demandes de visites d’Amnesty International dans le pays pour y mener des recherches sont systématiquement refusées depuis la période ayant suivi la révolution en 1979.

En dépit de la répression brutale contre les militants et les incessantes tentatives visant à bâillonner les blogueurs, les journalistes et les dissidents, de nombreuses personnes en Iran continuent à se mesurer aux tentaculaires ramifications de l’appareil de sécurité, dont certaines s’attaquent désormais au monde virtuel, et à lutter pour leurs droits et leur dignité. Leur courage a été manifeste aux yeux du monde en 2009 quand elles ont été des centaines de milliers à descendre dans les rues et à affluer sur les places de Téhéran et d’autres villes, préfigurant le « Printemps arabe » de 2011.

Le travail de campagne peut porter ses fruits. Si la plus grande partie de ce rapport porte sur la détérioration de la situation des droits humains en Iran, on compte également parfois de bonnes nouvelles, en particulier des libérations de personnes pour qui les membres d’Amnesty International dans le monde entier ont mené des actions. Ces libérations démontrent à quel point l’attention internationale peut faire la différence dans la vie de personnes et de leurs familles, et par conséquent combien il est primordial que la communauté internationale continue à suivre la situation des droits humains en Iran.

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Deux frères, les docteurs Arash et Kamiar Alaei, célèbres chercheurs spécialistes du VIH/SIDA, ont été détenus apparemment en raison des liens qu’ils entretenaient avec des organisations à l’étranger, notamment avec des organisations de la société civile basées aux États-Unis et de leurs critiques concernant les changements dans la politique gouvernementale relative au VIH/SIDA. Ils ont été arrêtés en juin 2008 et condamnés en janvier 2009 respectivement à six ans et trois ans d’emprisonnement pour « coopération avec un gouvernement ennemi ».

Ni l’un ni l’autre n’était engagé politiquement. Ils ont été condamnés à l’issue d’un procès inique où ont été produites des preuves secrètes qu’ils n’ont pas été autorisés à voir ou à contester, et après deux mois de détention préventive sans possibilité de voir un avocat. L’accusation aurait cité la participation des deux frères à des conférences internationales sur le VIH/SIDA comme faisant partie de leur dessein de provoquer une prétendue « révolution de velours » en Iran.

Le docteur Kamiar Alaei a été libéré en 2010 après avoir purgé deux ans et demi de sa peine. Son frère, le docteur Arash Alaei est sorti de prison en août 2011, lorsque quelque 70 prisonniers ont été libérés à l’occasion d’une fête religieuse. Voici un extrait de la lettre que les deux frères ont écrite à Amnesty International en 2011 :

Grâce à votre soutien, nous sommes aujourd'hui libres et en sécurité. Lorsque nous avons reçu le message au sujet de votre campagne par le biais de notre famille, c'était comme si nous recevions du nouveau sang qui a réchauffé nos cœurs et nous a donné de l'énergie pour être forts, supporter la situation et ne pas nous laisser abattre. Nous avons appris de notre expérience en prison que si vous croyez à ce que vous faites, il faut continuer votre travail, qu'il soit apprécié ou non par votre gouvernement… Et vous devez le faire jusqu'au dernier instant de votre vie. Grâce à vos efforts, nous nous réjouissons d'être réunis et nous voulons prolonger votre action en nous faisant la voix des sans- voix, pour ceux qui vivent une situation similaire à la nôtre. Voilà au moins une manière dont nous pouvons transmettre la gentillesse que vous nous avez témoignée… Du fond du cœur, nous vous remercions d'avoir mené campagne pour notre liberté. »

Le temps de l’action Il faut agir de toute urgence pour rompre le cercle vicieux des violations des droits humains en Iran, un cycle qui se nourrit de la quasi-garantie d’impunité pour les auteurs. Le gouvernement doit immédiatement prendre des mesures pour établir l’état de droit, garantir une véritable indépendance du système judiciaire, et faire en sorte que toute personne qui commet des violations de droits humains soit tenue pour responsable de ses crimes. Le gouvernement doit également veiller à ce que la Constitution garantisse la protection des droits humains et interdise la discrimination et les autres violations des droits fondamentaux.

Entre autres, Amnesty International appelle les autorités iraniennes à :

 Libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers d’opinion, soit toutes les personnes détenues uniquement pour avoir exercé sans violence leurs droits internationalement reconnus ;  Amender la législation qui restreint indûment les droits à la liberté

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d’expression, d’association et de réunion, et permettre un débat public ouvert avant les élections parlementaires de mars 2012 ;  Instaurer immédiatement un moratoire sur les exécutions en vue d’abolir la peine de mort.

En l’absence d’organismes indépendants et impartiaux pour enquêter sur les allégations de violations des droits humains et pour apporter réparation aux victimes et aux familles touchées, conformément aux normes internationales relatives aux droits humains, Amnesty International demande également aux autorités iraniennes de :

 Permettre un examen international approfondi de la situation des droits humains en Iran, notamment en autorisant les visites du Rapporteur spécial des Nations unies sur l’Iran en plus des autres mécanismes thématiques des Nations unies relatifs aux droits humains qui ont fait des demandes de visite ainsi que des organisations internationales indépendantes œuvrant pour les droits humains comme Amnesty International.

Amnesty International appelle également la communauté internationale à ne pas laisser les tensions générées par le programme nucléaire de l’Iran ou d’autres évènements dans la région accaparer son attention au détriment de son travail de pression sur les autorités iraniennes pour qu’elles respectent leurs obligations en matière de droits humains, au titre d’un certain nombre de traités internationaux relatifs aux droits humains auxquels l’Iran est partie9. Amnesty International demande en particulier que:

 Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU renouvelle le mandat du Rapporteur spécial sur l’Iran en mars 2012 ;

 La communauté internationale fasse pression sur les autorités iraniennes pour qu’elles accordent au Rapporteur spécial sur l’Iran l’accès au pays et qu’elles tiennent leur engagement à recevoir les mécanismes des Nations unies relatifs aux droits humains qui ont formulé des demandes de visites en Iran.

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2. LA LIBERTÉ D’EXPRESSION ET D’ASSOCIATION DE PLUS EN PLUS RESTREINTE

La législation en vigueur depuis la révolution de 1979 impose des restrictions injustifiées à l’exercice pacifique des droits à la liberté d’expression, de réunion et d’association. C’est notamment le cas de la Loi sur la presse de 1981, du Code pénal, du Code du travail, ainsi que de la Loi sur les partis politiques, les sociétés, les associations politiques et professionnelles et les associations islamiques ou de minorités religieuses reconnues (Loi sur les partis politiques).

Depuis des années, Amnesty International fait état de violations des droits humains relatives à ces lois, lesquelles ont également été critiquées par d’autres observateurs internationaux des droits humains, comme le Comité des droits de l'homme des Nations unies10. En outre, le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression a fait part de son inquiétude quant à la présence, dans le Code pénal et la Loi sur la presse, de nombreuses dispositions limitant la liberté d’opinion et d’expression11.

Dans un rapport publié en décembre 2001, Amnesty International exprimait et illustrait en détails ses préoccupations quant à des lois entravant le droit à la liberté d’expression12. Depuis, les violations décrites dans ce rapport perdurent. Les autorités iraniennes interdisent toujours certaines chaînes de télévision et de radio indépendantes, ainsi que l’utilisation d’antennes paraboliques. Il leur arrive également de brouiller la diffusion d’émissions par satellite depuis l’étranger. Les autorités ont censuré des livres et restreint la quantité de papier fourni à certains éditeurs, afin que ceux-ci ne puissent publier certains ouvrages. Des publications ont été interdites, généralement de façon temporaire, par le Conseil de surveillance de la presse dans l’attente de décisions de justice. Certains déclarent avoir cessé leur activité en raison de la Loi de 1960 sur les restrictions préventives13. Sur certains sujets, le contenu des journaux est réglementé. Des journalistes et des commentateurs ont fait l’objet d’arrestations. D’innombrables Iraniens sont victimes de harcèlement et de persécutions pour avoir exprimé leurs opinions, à l’oral comme à l’écrit.

Toutefois, depuis au moins une décennie, les autorités iraniennes sont extrêmement préoccupées par l'essor d’Internet et la possibilité offerte aux citoyens d’exprimer librement leurs opinions.

Comme d’autres gouvernements répressifs, les autorités iraniennes ont peu à peu mis en place une série de mesures, notamment juridiques, visant à limiter l’accès à Internet depuis l’Iran et à sanctionner les personnes publiant du contenu sur des sites web ou des blogs personnels. De plus, les émeutes post- électorales de 2009 ont démontré l’importance du rôle que jouent les médias sociaux comme Facebook ou Twitter, que ce soit pour organiser des manifestations ou pour signaler des violations des droits humains commises lorsque des manifestations sont réprimées. Depuis, les autorités ont pris des mesures supplémentaires afin d’empêcher la population iranienne de recourir à ces outils pour organiser la dissidence.

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MESURES ADOPTÉES OU EN C OURS D’ÉLABORATION DEPUIS 2001 VISANT À RES TREINDRE DAVANTAGE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION, D’ASSOCIATION ET DE RÉUNION EN IRAN

2001 : Ordre du Guide suprême sur les « politiques globales relatives aux réseaux fournissant des données informatiques ».

2001 : Les « Règles et réglementations pour les fournisseurs de données informatiques » du Conseil suprême de la révolution culturelle donnent au gouvernement le contrôle total d’Internet et limitent le contenu des publications sur le web.

2002 : « Décret sur la Constitution du comité en charge de déterminer les sites Internet interdits ».

2005 : Loi sur la promotion de la culture de chasteté et modestie.

Mai 2006 : L’Agence gouvernementale des technologies de l'information annonce la mise en place prochaine d’une base de données nationale de filtrage pouvant être utilisée pour bloquer l’accès à des sites Internet.

Octobre 2006 : L’organe de réglementation des radio-télécommunications limite à 128 kilobits/seconde la vitesse de connexion et interdit aux fournisseurs de services Internet de proposer des offres haut débit.

2007 : Le ministère de la Culture et de l'Orientation islamique exige que toute personne possédant un site ou un blog s’enregistre auprès des autorités.

2008 : La Loi sur les crimes audiovisuels étend la peine de mort à certaines activités liées à la pornographie.

2009 : Loi sur les cybercrimes (ou Loi sur les crimes informatiques)

2009 : Création d’une « cyberarmée » probablement liée aux pasdaran.

Janvier 2010 : Interdiction de prises de contact avec plus de 60 médias et think tanks étrangers.

Juillet 2010 : Création du Haut conseil du cinéma, un organe contrôlant tous les aspects de la production des films, y compris les sources de financement.

Janvier 2011 : Inauguration de la « force de cyberpolice » à Téhéran, entièrement opérationnelle en janvier 2012.

Projets de loi qui, s’ils sont adoptés tels quels, entrav eraient le droit d’exercer les libertés fondamentales d’expression, d e réunion et d’association :

Projet de loi sur l’établissement et la supervision des organisations non gouvernementales (ONG)

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Projet de loi sur la formation de partis politiques

Projet de loi modifiant le Code pénal

Une grande partie du cadre juridique restreignant la liberté d’expression, d’association et de réunion repose sur des dispositions du Code pénal. Depuis 2007, les quatre premiers livres du Code pénal font l’objet d’une révision par le parlement. En janvier 2012, le Conseil des gardiens, chargé de vérifier la conformité de la législation à la Constitution et au droit islamique, a déclaré qu’aucune disposition du projet ne violait le droit islamique, ouvrant la voie à la mise en application du texte. Une version antérieure du projet de loi qu’a consultée Amnesty International conserve de nombreuses dispositions existantes qui s’avèrent incompatibles avec les obligations de l’Iran aux termes des instruments internationaux des droits humains. Par exemple, cette version prévoit encore la flagellation et l’amputation comme sanctions et continue de pénaliser les relations sexuelles consenties en dehors du mariage, qu’elles soient homosexuelles ou hétérosexuelles. En outre, elle permet toujours aux juges de prendre des décisions en se basant sur leur « savoir », qui peut être leur opinion personnelle. Dans de nombreux domaines, ce projet de loi reste discriminant envers les femmes et les minorités religieuses. Il semble également que l’exécution de mineurs délinquants soit laissée à la discrétion du juge. Enfin, ce projet permettrait le recours à la lapidation en punition de l’adultère en autorisant les juges à citer la loi islamique.

2.1 LOIS ET POLITIQUES LIMITANT LA LIBERTÉ D’EXPRESSION

De nouvelles mesures, adoptées dans le but de limiter la liberté de tout un chacun en Iran d'exercer son droit à la liberté d'expression, trouvent leur ancrage dans des politiques et pratiques bien établies. Le Code pénal, le Code de la presse et d'autres réglementations ont servi de base à une censure vieille de plusieurs décennies sur les articles de presse, ainsi qu'à l'interdiction de journaux et au contrôle de la littérature (factuelle ou fictive), de la télévision, du théâtre, du cinéma et des arts picturaux. En avril 2009, le Code de la presse a été modifié de façon à couvrir le contenu publié sur Internet14 , mais les mesures juridiques énoncées ci-après imposent des restrictions encore plus lourdes.

En vertu du Code de la presse et du Code pénal, les personnes écrivant dans des journaux ou des sites Internet, ainsi que celles répondant à des interviews pour les médias, peuvent être accusées de « diffusion de propagande contre le régime », « outrage à des représentants », « diffusion de propos mensongers dans le but de nuire à la sécurité de l'État », voire de « corruption sur terre » ou d'« inimitié à l'égard de Dieu ».

Les organes de sécurité iraniens, nombreux et souvent parallèles, peuvent désormais surveiller l'activité des militants utilisant leurs ordinateurs personnels depuis leurs domiciles.

Ces dernières années, une « cyberarmée » nébuleuse, semble-t-il liée aux pasdaran, a mené des attaques contre des sites Internet en Iran et à l'étranger, notamment ceux de Twitter et de Voice of America. En janvier 2012, le général de brigade Esmail Ahmadi Moghaddam, chef de la police iranienne, a annoncé que la cyberpolice, instituée un an plus tôt dans le but de « lutter contre la

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cybercriminalité et les réseaux sociaux qui propagent " l'espionnage et les émeutes" », était opérationnelle dans l'ensemble du pays15..

En août 2011, le ministre de la Culture et de l'Orientation islamique a déclaré que le cabinet préparait un projet de loi sur l'ensemble des médias, en vertu duquel les SMS et les CD, au même titre que les blogs et les sites Internet, seraient uniquement régis par la Loi sur la presse16. En janvier 2012, la cyberpolice a publié de nouvelles réglementations exigeant des propriétaires de cybercafés qu'ils s'équipent de caméras de vidéosurveillance et enregistrent l'identité et les coordonnées des clients avant qu'ils n'utilisent les ordinateurs. Ces informations doivent être conservées durant six mois et permettent une nouvelle fois aux forces de sécurité de surveiller les activités des militants17.

Depuis 2001, les autorités iraniennes prennent des mesures de plus en plus fortes pour contrôler l'accès de la population au monde extérieur via les outils et médias électroniques. Elles ont limité le débit de connexion et développent des serveurs, des protocoles Internet spécifiques (IP), des fournisseurs d’accès et des moteurs de recherche gérés par l'État.

L'accès à d'innombrables sites Internet, notamment des réseaux sociaux nationaux et internationaux, est bloqué. C'est le cas du site d'Amnesty International, www.amnesty.org. De nombreux Iraniens utilisent des proxy et des programmes anti-filtres pour accéder à des sites étrangers, mais ceux-ci sont de plus en plus bloqués. Le fait de fournir de tels logiciels ou de former à leur utilisation constitue une infraction pénale.

Les dirigeants iraniens ont fait part de leur volonté de mettre en place, à l'échelle nationale, un intranet conforme aux « principes de l'Islam », qui fonctionnerait parallèlement au Word Wide Web et « le remplacerait dans les pays musulmans de la région18 ». Il semble qu'à travers cette mesure, les autorités aient l'intention d'interdire l'accès au web mondial à la plupart des Iraniens.

Les fournisseurs d’accès à Internet iraniens qui proposent des offres de connexion Internet au public ont l'obligation de se connecter via la Compagnie iranienne de télécommunication, contrôlée par le gouvernement, afin de faciliter le contrôle par l'État19. Les autorités exigent également que ces fournisseurs d’accès enregistrent les sites visités par les utilisateurs20. Selon de récentes instructions, les cybercafés doivent conserver durant six mois des données détaillées relatives à l'identité des clients et aux sites qu'ils visitent21.

De plus, les autorités bloquent les diffusions satellites provenant de l'étranger. L'accès à l'information est également limité puisque les antennes satellites, illégales en Iran, sont confisquées.

Les forces de sécurité surveillent de près les lignes fixes et les services de téléphonie mobile. Les Iraniens pensent souvent être sur écoute et adaptent leurs conversations en conséquence. Les services de SMS auraient parfois été bloqués, en particulier lorsque des manifestations de masse étaient prévues.

La Loi de 2008 sur les crimes audiovisuels - amendement d'une version ultérieure - prévoit la flagellation et la peine de mort pour les producteurs de contenus « obscènes », les producteurs de contenus « destinés à des abus

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sexuels », et les principaux agents de la production de ces contenus, au motif de la « corruption sur terre ». En vertu de l'article 4, les personnes utilisant ces contenus pour faire du chantage à d'autres afin de « forniquer avec eux » seront accusées de viol, ce qui entraîne une condamnation à mort à titre de peine obligatoire. Des dispositions du Code pénal sanctionnent en effet l'adultère et la fornication.

D'autres restrictions de la liberté d'expression ont été imposées par la Loi de 2009 sur les cybercrimes, dans laquelle figuraient beaucoup des restrictions du Code pénal et de la Loi sur la presse, ce qui montre clairement que ces lois s'appliquent aussi à Internet et aux publications électroniques.

Ashkan Delanvar - un étudiant désormais privé de suivre des études en raison de ses opinions politiques - a été, à la connaissance d'Amnesty International, la première personne à être condamnée à une peine d'emprisonnement en vertu de la Loi sur la cybercriminalité, pour avoir fourni un logiciel anti-filtre et une formation à son utilisation. Il a été condamné à 10 mois d'emprisonnement après avoir été reconnu coupable, puis sa peine ait été rallongée en appel22. Craignant pour sa sécurité, Ashkan Delanvar a fui l'Iran avant de purger sa peine. Il est actuellement demandeur d'asile en Europe.

Le droit à l'enseignement a longtemps fait l'objet de restrictions. Des étudiants en étaient privés en raison de leurs croyances ou de leurs activités politiques. Après l'élection présidentielle controversée, la liberté académique a de nouveau été remise en question, les autorités ayant procédé à une purge des universités, notamment en ce qui concerne l'enseignement des sciences sociales. Dans un discours d'août 2009, le Guide suprême déclarait que « l'instruction de ces sciences humaines dans les universités conduira à des doutes et des réserves quant aux croyances et principes religieux. » Les cours de sciences sociales, comme la sociologie et la politique, ont alors été réduits, tout comme les cours sur les droits de l'homme.

Outre ces nouvelles restrictions relatives à la liberté d'expression, les Iraniennes et les Iraniens doivent toujours, lorsqu'ils se trouvent dans l'espace public23, respecter un code vestimentaire obligatoire qui est inscrit dans la législation. Ces dernières années, les autorités ont intensifié leurs efforts pour appliquer la Loi sur la promotion de la culture de chasteté et modestie, ce qui a conduit certaines universités à menacer les étudiants ne respectant pas le code vestimentaire de mettre un terme à leurs études. Toutefois, ce code vestimentaire n'a jamais été clairement défini. Si de nombreuses femmes portent des robes traditionnelles, d'autres ont choisi d'interpréter le code différemment. Celles-ci risquent d'être harcelées par la police ou les forces de sécurité, comme la Milice volontaire, appelée Bassidj, en particulier lors des vagues de répressions estivales, qui se sont intensifiées depuis 2005.

En février 2012, il a été signalé que toutes les fonctionnaires seraient obligées de porter un uniforme spécial, supposé conforme à la « tenue islamique », à compter du 21 mars 2012, premier jour de la nouvelle année iranienne. Selon des rapports provenant d'agences de presse iraniennes, cette politique sera d'abord appliquée à Téhéran, puis étendue à d'autres régions du pays24. Il semble que la mise en application de ce code vestimentaire s'explique également par des raisons politiques et serve à faire taire les dissidents et

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critiques supposés. En février 2011, l'avocate Nasrin Sotoudeh a été jugée et condamnée à payer 500 000 rials25 pour non-respect du code vestimentaire. Elle avait réalisé une vidéo pour accepter un prix pour son travail sur les droits humains en 2008 en Italie, où ses cheveux n’étaient pas couverts. Les autorités iraniennes lui avaient interdit de quitter le pays pour recevoir ce prix en personne. Elle a réalisé cette vidéo depuis son domicile mais ne l'a pas diffusée en Iran. La vidéo a néanmoins été postée sur Internet.

NORMES INTERNATIONALES RÉGISSANT LA LIBERTÉ D'EXPRESSION

La liberté d'expression est g arantie par l'article 19 du Pacte international relatif aux droits civi ls et politiques (PIDCP), qui dispose : « Nul ne peut être inquié té pour ses opinions » et « Toute personne a droit à la liberté d 'expression ; ce droit comp rend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous u ne forme orale, écrite, imprimée ou art istique, ou par tout autre moyen de son choix. » La liberté d'expression ne p eut être restreinte que da ns le cadre du respect des droits ou de la réput ation des autres, ou encore de la protection de la sécu rité nationale, de l'o rdre public, de la santé publique ou de la mora le. Elle doit se conformer à des tests stricts de nécessité et de proportionnalité.

Dans son observation générale n°34 de l'article 19, publiée en septembre 2011, le Comité des droits de l'homme des Nations unies — l'organe officiel chargé de superviser l'interprétation du PIDCP — indiquait clairement que la liberté d'expression s'applique aux contenus audiovisuels et à Internet, ainsi qu'à d'autres formes de communication plus traditionnelles, et couvre :

« l’expression et la réception de communications sur toute forme d’idée et d’opinion susceptible d’être transmise à autrui... discours politique, le commentaire de ses affaires personnelles et des affaires publiques, la propagande électorale, le débat sur les droits de l’homme, le journalisme, l’expression culturelle et artistique, l’enseignement et le discours religieux. »

Le Comité précisait également que les restrictions légales sur la liberté d'expression ne peuvent jamais être invoquées « pour justifier des mesures tendant à museler un plaidoyer en faveur de la démocratie multipartiste, des valeurs démocratiques et des droits de l’homme ».

Le Comité, qui insistait ensuite sur la nécessité d'une pluralité de médias qui ne soient pas placés sous le seul contrôle de l'État, soulignait également que la « trahison » ou les « lois relatives à la sécurité nationale » ne peuvent être invoquées « pour supprimer ou dissimuler des informations sur des questions d’intérêt public légitime qui ne portent pas atteinte à la sécurité nationale ou pour engager des poursuites contre des journalistes, des chercheurs, des militants écologistes, des défenseurs des droits de l’homme ou d’autres personnes, parce qu’ils ont diffusé ces informations », et précisait que « toutes les personnalités publiques, y compris celles qui exercent des fonctions au plus haut niveau du pouvoir politique, comme les chefs d’État ou de gouvernement, sont légitimement exposées à la critique et à l’opposition politique ».

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En ce qui concerne Internet, le Comité déclarait que les interdictions génériques sur le fonctionnement de certains sites et systèmes ne constituent pas des « restrictions licites », et qu'aucune forme de média ne doit faire l'objet d'une fermeture ou d'une interdiction de publier un contenu au seul motif qu'il peut être critique à l'égard du gouvernement ou du système politique et social épousé par le gouvernement.

Le Comité indiquait également que les journalistes et les autres personnes qui veulent exercer leur liberté d’expression (comme des personnes qui veulent se rendre à l’étranger pour assister à une réunion consacrée aux droits de l’homme) doivent normalement être autorisés à quitter, visiter ou entrer dans un pays, y compris dans « les endroits où des violations des droits de l’homme sont dénoncées ».

Le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression a également déclaré qu'Internet « ne doit jamais faire l'objet de restrictions quant à la discussion des politiques gouvernementales et au débat politique, à la publication d’informations sur les droits de l’homme, les activités du gouvernement ou la corruption au sein de celui-ci, à la participation à des campagnes électorales, à des manifestations pacifiques ou à des activités politiques, notamment en faveur de la paix ou de la démocratie, et à l’expression d’opinions et de désaccords, de croyances ou de convictions religieuses, y compris par des personnes appartenant à des minorités ou à des groupes vulnérables26 ».

Outre la relation existant entre la liberté académique et le droit à la liberté d'opinion et d'expression, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels — l'organe officiel chargé de superviser l'interprétation du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) — a déclaré dans son observation générale n°13 que le droit à l'éducation s'accompagne des libertés académiques tant pour le personnel enseignant que pour les étudiants, constatant que « le personnel enseignant de l'enseignement supérieur et les étudiants de l'enseignement supérieur sont particulièrement exposés aux pressions politiques et autres, ce qui sape les libertés académiques27 »

2.2 RESTRICTIONS DE LA LIBERTÉ D'ASSOCIATION ET DE RÉUNION

En janvier 2010, dans le but de marginaliser et d'isoler la population, les autorités iraniennes ont également pénalisé les contacts avec plus de 60 institutions, ONG et médias étrangers. Les mois suivants, de nombreux défenseurs des droits humains ont été détenus, la plupart du temps brièvement.

En octobre 2011, le chef de la police Esmail Ahmadi Moghaddam aurait déclaré que le fait de coopérer avec la BBC ou Voice of America équivalait à collaborer avec l'ennemi et serait « pris au sérieux ». En janvier 2012, il ajoutait que Google n'était pas un moteur de recherche mais un « outil d'espionnage28 ». De plus en plus d'arrestations semblent être motivées par des contacts d'individus avec des médias internationaux.

De telles mesures illustrent la façon dont les autorités poursuivent leurs efforts pour limiter l'influence des organisations de défense des droits humains, que ce

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soit en harcelant et en arrêtant sans cesse leurs membres, ou en les contraignant à cesser leur activité. Le Centre de défense des droits humains (CDDH), l'Association pour les droits des prisonniers, les Défenseurs des droits humains en Iran et le Comité des reporters des droits humains — qui ont déjà dû cesser leur activité ou n'ont jamais été reconnus en dépit d'innombrables tentatives pour être officiellement enregistrés — restent fermés. D'autres organisations professionnelles qui ont critiqué les actions du gouvernement ou dénoncé des violations des droits humains commises à l'encontre de leurs membres, telles que l'Association des journalistes iraniens et la Maison du cinéma (une association regroupant des professionnels de l'industrie cinématographique), ont été fermées par les autorités.

Bon nombre de défenseurs des droits humains se dont déjà retrouvés inculpés de « création ou appartenance à un groupe visant à porter atteinte à la sécurité de l'État ». Tout contact avec des individus ou des institutions à l'étranger peut conduire à des accusations d'« espionnage ». Si « l'infraction » est jugée comme une forme d'« inimitié à l'égard de Dieu », les autorités peuvent condamner une personne à la peine de mort.

LIBERTÉ D'ASSOCIATION ET DE RÉUNION EN IRAN Les libertés de réu nion et d'associa tion sont respectivement garanties par les art icles 21 et 22 du PI DCP. Ces deux droits sont soumis exclusivement aux mêmes restrictions que celles pouvant s’appliquer à la liberté d'expression.

La liberté d’association est garantie par l’article 26 de la Constitution iranienne mais reste limitée par une clause vaguement formulée stipulant que les associations ne doivent pas violer les critères de l’islam ou les bases de la République islamique. Par conséquent, des restrictions limitent les activités des associations, en vertu de l'article 16 de la Loi sur les partis politiques, les sociétés, les associations politiques et professionnelles, et les associations islamiques ou de minorités religieuses reconnues.

Selon le droit du travail, les syndicats indépendants subissent aussi des restrictions de la liberté d'association. On ne peut devenir membre de l'Association du barreau et être autorisé à se présenter à l'élection de son conseil d'administration qu’au terme de procédures de contrôle discriminatoires. L'indépendance de l'association en est limitée, puisque ses membres font l'objet d'une approbation par les instances judiciaires29. L'Association du barreau a également fait les frais de l'introduction de « conseillers juridiques » qui, tenus d'être agréés par les instances judiciaires, ne sont donc pas indépendants30.

La liberté de réunion est garantie par l'article 27 de la Constitution iranienne, selon lequel « l'organisation de réunions et manifestations sans port d’arme est libre ». Mais une fois encore, elle reste limitée par une clause vaguement formulée stipulant que ces réunions et manifestations ne doivent « pas troubler les fondements de l’islam ». L'article 10 de la Loi sur les partis politiques, les sociétés, les associations politiques et professionnelles, et les associations islamiques ou de minorités religieuses reconnues crée une commission qui, en plus d’être chargée de délivrer des licences aux organisations, vérifie que les manifestations demandées par les organisations accréditées sont conformes aux critères de l'article 27 de la Constitution.

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 19 La répression croissante de la dissidence en Iran

Dans ses observations finales de novembre 2011, le Comité des droits de l'homme des Nations unies exprimait son inquiétude quant à l'étendue des restrictions des droits à la liberté de réunion et d'association31. Dans ses recommandations, il exhortait l'Iran à veiller à ce que ces droits soient garantis à l'ensemble de la population sans discrimination, et à libérer immédiatement et sans condition toute personne détenue uniquement pour avoir pacifiquement exercé ces droits, notamment les étudiants, les enseignants, les défenseurs des droits humains (y compris les militants pour les droits des femmes), les avocats et les syndicalistes. Le Comité déclarait également que les autorités iraniennes devaient veiller à ce que soient menées des enquêtes promptes, efficaces et impartiales sur les cas de menaces, de harcèlement et d'attaques visant les membres de ces groupes et, le cas échéant, poursuivre les auteurs de ces actes.

Les autorités iraniennes n'ont malheureusement pas saisi l'opportunité que représentait la révision des quatre premiers livres du Code pénal pour supprimer les restrictions injustifiées de la liberté d'association. En janvier 2012, le Conseil des gardiens a annoncé qu'il n'avait rien trouvé d'incompatible avec la loi islamique dans le projet présenté par le parlement, ouvrant ainsi la voie à une application imminente. Le nouveau Code continue de sanctionner de vagues concepts tels que l’« inimitié à l'égard de Dieu ». L'article en question peut permettre de condamner à mort, au motif d' « inimitié à l'égard de Dieu », toute personne déclarée coupable, en vertu de l'article 498 (livre 5 du Code pénal, qui n'a pas été révisé) de « création d'un groupe, d'une branche ou d'une association visant à porter atteinte à la sécurité de l'État ». L'article 498 indique qu'une telle personne serait punie par deux à 10 ans d'emprisonnement « si elle n'est pas considérée comme un ennemi de Dieu ».

De la même façon, un projet de réforme du Code du travail — qui n'a pour le moment pas été adopté par le parlement — continue lui aussi à nuire à la liberté d'association, puisqu'il interdit la création de syndicats indépendants. Le texte révisé continue également d’octroyer aux organes gouvernementaux chargés de la sécurité et du renseignement le contrôle des candidatures pour les élections pour la direction des comités des organismes de travailleurs.

Le nombre de défenseurs des droits humains exposés aux vagues inculpations mentionnées ci-dessous risque d'augmenter en cas d'adoption du projet de loi sur la création et la supervision des ONG. Si cette loi est adoptée, les réglementations en vigueur se verront remplacées par un cadre réglementaire qui entraînerait la disparition de toutes les ONG indépendantes du pays. Le projet de loi prévoit en effet la création du Comité suprême supervisant les activités des ONG, un organe n'ayant aucune obligation de rendre des comptes. Ce comité serait présidé par le ministère de l'Intérieur et comprendrait, entre autres, des membres du ministère du Renseignement, de la police, du Bassidj (milice volontaire), du Corps des gardiens de la révolution islamique — tous ont déjà fait en sorte d'entraver la liberté d'expression, d'association et de réunion — et du ministère des Affaires étrangères. Le Comité délivrera ou annulera les autorisations d'enregistrement de toutes les ONG et disposera de la plus haute autorité sur leurs bureaux exécutifs. Si la loi est adoptée, les membres d'une ONG qui ne parvient pas à obtenir d'autorisation d'enregistrement ou dont l'autorisation a été annulée courront un risque accru d'être poursuivis. Pour le moment, la loi n'a pas été adoptée. Le Comité des droits de l'homme des Nations unies, qui contrôle le respect des dispositions du

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PIDCP par les États, a affirmé que ce projet de loi devait être retiré32.

Le parlement avait adopté 26 articles du projet de loi mais, à la suite d'objections, il a décidé en avril 2011 de laisser le projet « en suspens » pour trois mois. Toutefois, en janvier 2012, alors qu'a été publiée une version révisée du projet de loi, celui-ci n'avait toujours pas été soumis à débat au parlement. Amnesty International comprend que ce texte révisé servirait de base aux discussions du parlement relatives au projet de loi à l’avenir.

Des partis politiques — en particulier ceux associés aux dirigeants de l'opposition Mehdi Karroubi et Mir Hossein Mousavi — ont été interdits, certains par décision du tribunal depuis 2009, rallongeant ainsi la liste des partis interdits depuis 1979.

De nouvelles restrictions relatives à la formation et aux activités des partis politiques semblent être en cours. Un projet de loi sur la formation des partis politiques a été introduit par la Commission de l'article 10, établie sous l'actuelle Loi sur les partis politiques33. Outre le fait qu'il n'exclut aucune disposition discriminatoire quant aux personnes pouvant créer ou rejoindre un parti politique34, le projet prévoit également la supervision et l'évaluation des partis politiques par la Commission de l'article 10 entre la demande et la délivrance de licence. Il est à craindre que cela entraîne une restriction injustifiée — en violation de la Constitution iranienne elle-même — du droit à la liberté d'association, puisque la Commission de l'article 10 serait habilitée à refuser une licence à un parti politique dont elle n'a pas approuvé les activités lors de la période précédant son enregistrement. De plus, les « mouvements et associations » composés de plus d'un parti nécessiteraient des enregistrements distincts, ce qui crée ainsi un frein supplémentaire à la participation politique35.

En outre, les autorités ont proposé en 2011 la mise en place d'une ségrégation liée au genre dans les institutions d'enseignement supérieur, dont la plupart a dispensé des cours mixtes ces dernières années. En août 2011, il a été signalé que 20 universités limiteraient certains cours — notamment de sociologie, d'histoire, de littérature, de statistiques, d'éducation artistique et de mathématiques — à des étudiants de même sexe au cours de l’année académique suivante36. Ces mesures, tout comme celle imposant aux étudiantes de suivre des cours dans ou à proximité de leurs villes natales, semblent entraîner une réduction du nombre de femmes intégrant l'université (de plus de 60 % en 2007 à moins de 50 % en 2010). Plus tard dans le mois, le ministère de l'Éducation a émis une directive interdisant la mixité dans la plupart des écoles maternelles37. La ségrégation liée au genre règne d'ores et déjà dans les écoles iraniennes.

La liberté de réunion est elle aussi toujours extrêmement restreinte, à l'exception des cas où les autorités souhaitent qu'aient lieu des manifestations. Pour que le ministère de l'Intérieur délivre une autorisation, la Commission de l'article 10 sur la loi sur les partis politiques doit considérer que la manifestation « ne viole pas les principes fondamentaux de l'Islam ». Le projet de loi sur les partis politique conserve cette disposition quant au contrôle anticipé des manifestations par la Commission de l'article 10. Le ministère de l'Intérieur est également habilité à refuser une autorisation pour d'autres raisons. Reste également à déterminer si les autorisations de manifester peuvent être

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sollicitées par des individus, ou uniquement par des partis politiques, des ONG ou d'autres organisations enregistrées38 . Actuellement, les autorités refusent de facto d'autoriser une manifestation perçue comme une expression de dissidence. Par conséquent, les quelques manifestations ayant eu lieu depuis 2009 avaient la plupart du temps été interdites. Les forces de l'ordre emploient généralement des méthodes brutales contre les manifestants n'ayant pas obtenu d’autorisation et recourent souvent à un usage excessif de la force, qui peut parfois s'avérer meurtrier.

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3. DE L’ARRESTATION À L’EXÉCUTION : LES SCHÉMAS DE VIOLATIONS DES DROITS HUMAINS

Même sans être parfait, le cadre légal national de l’Iran gouvernant la détention provisoire devrait a minima offrir une certaine protection contre les arrestations et détentions arbitraires, qui sont interdites par les articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Malgré cela, et en dépit des obligations internationales du pays, des milliers de personnes ont été arrêtées arbitrairement depuis 2009. Nombre de ces personnes ont été victimes de graves violations des droits humains, y compris de détention au secret dans des conditions constituant une disparition forcée, de torture et autres mauvais traitements.

DISPOSITIONS LÉGALES RELATIVES À L’ARRESTATION ET LA DÉTENTION DES PERSONNES La Constitution iranienne, le Code de procédure pénale et la Loi de 2004 relative au respect des libertés légitimes et à la sauvegarde des droits des citoyens stipulent que les arrestations doivent s’opérer sur la base d’un mandat, qui doit contenir les raisons de l’arrestation et qui doit être lu à l’accusé39 à moins que celui-ci ne soit pris en flagrant délit de crime ou de délit. Le Code de procédure pénale iranien40 autorise la police, les bassidjis (miliciens volontaires) et les pasdaran à procéder à des arrestations. Le Conseil suprême de sécurité nationale d’Iran peut également octroyer le même pouvoir à d’autres organes ou agences. Ceci étant, les motifs et les mécanismes restent peu explicites au niveau légal et les autorités n’ont apparemment aucune obligation d’informer le public quant aux nouveaux pouvoirs de certains organes en matière d’arrestation et de détention. Par exemple, d’après la loi, le personnel du ministère du Renseignement n’a pas le droit de procéder à des arrestations, mais ces nouvelles dispositions pourraient très bien désormais lui en avoir donné l’autorisation.

La Constitution iranienne stipule que « les chefs d’accusation doivent, sans délai, être communiqués et expliqués à l’accusé par écrit, et un dossier provisoire doit être transmis aux autorités judiciaires compétentes dans un délai de 24 heures maximum »41. Le Code de procédure pénale, qui réaffirme cette limite de 24 heures42, stipule que le juge peut ordonner une mesure de détention temporaire pour un maximum de deux mois, ce qui permet aux autorités de maintenir des personnes en détention sans inculpation au-delà de la limite des 24 heures43. Le Code donne à l’accusé le droit de faire appel de la décision du juge dans les 10 jours suivant le début de sa détention temporaire, et bien qu’il indique qu’une décision quant au cas du détenu doit être prise dans un délai d’un mois, il permet également au juge de reconduire la mesure de détention temporaire44. Le Code n’établit aucune limite quant au nombre de fois qu’une telle mesure peut être renouvelée.

Le Code de procédure pénale stipule que les détenus peuvent présenter une requête au juge pour être libérés sous caution45. Il est stipulé que la caution doit être proportionnelle au crime et à la sanction dont il est question, et correspondre à la situation de l’accusé et à ses antécédents46.

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Malgré cela, le montant de la caution est souvent extrêmement élevé et disproportionné, ce qui peut forcer la famille du détenu à céder plusieurs titres de propriété. Pour de nombreux détenus arrêtés depuis l’élection de juin 2009, la caution a été fixée à des montants de l’ordre de plusieurs centaines de milliers de dollars des États-Unis. Dans certains cas, les détenus et leur famille sont tout simplement dans l’incapacité de payer de telles sommes, et l’individu continue à croupir en prison.

Le Code de procédure pénale d’Iran fait aussi actuellement l’objet d’une révision. Bien que certaines dispositions du code actuel semblent fournir un certain degré de protection face aux arrestations arbitraires, à la torture et aux autres formes de mauvais traitements, en pratique, certaines notes sont interprétées de façon restrictive et utilisées, par exemple, pour priver les détenus de leur droit à un avocat, à partir de l’arrestation et parfois jusqu’à la fin des interrogatoires. Le projet de Code révisé ne semble pas non plus établir de façon claire quelles agences ont le pouvoir de procéder à des arrestations en Iran.

L’absence de transparence quant à savoir quelles agences ont le droit de procéder à des arrestations facilite les abus et favorise l’impunité. D’après la loi, les individus doivent être détenus dans des installations contrôlées par l’Organisation des prisons. Cependant, en pratique, de nombreuses personnes, et en particulier celles qui sont soupçonnées d’opposition au gouvernement, sont arrêtées sans mandat, ou en vertu d’un mandat d’arrêt général qui ne cite pas leur nom ou n’explique pas pleinement les raisons de l’arrestation. Elles sont ensuite conduites dans des centres de détention dirigés par des organismes de renseignement tels que le ministère du Renseignement ou la branche du renseignement des pasdaran. Il n’est pas rare que des personnes soient détenues au secret pendant des jours, des semaines ou même des mois après leur arrestation sans aucun moyen de comprendre les motifs de leur détention ou de s’y opposer, dans des conditions qui peuvent constituer une disparition forcée. Les familles des détenus sont souvent dans l’incapacité d’obtenir la moindre information concernant le lieu où ils se trouvent, et sont renvoyées de service en service alors qu’elles essaient de savoir si leurs proches sont bel et bien détenus par les autorités.

3.1 LA TORTURE ET LES AUTRES FORMES DE MAUVAIS TRAITEMENTS EN DÉTENTION

Le cadre légal iranien offre une protection limitée face à la torture. L’article 38 de la Constitution interdit la torture si elle est pratiquée « dans le but d’arracher des aveux ou d’obtenir des informations », alors que l’article 39 interdit toute atteinte à la dignité des personnes emprisonnées ou en détention provisoire. L’article 6 de la Loi de 2004 relative au respect des libertés légitimes et à la protection des droits des citoyens stipule par ailleurs que tant qu’une personne accusée est détenue, interrogée ou fait l’objet d’une enquête, les agents responsables de l’application des lois ne doivent pas lui faire de mal, par exemple en lui bandant les yeux ou en la ligotant.

Cependant, la torture est en réalité couramment et largement employée. Les autorités iraniennes ont admis que pour obtenir des informations ou des aveux, les responsables de l’application des lois sont, dans certains cas particuliers,

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24 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » La répression croissante de la dissidence en Iran

autorisés à utiliser des techniques d’interrogatoire qui peuvent causer des souffrances physiques ou mentales lorsqu’ils en reçoivent l’ordre par l’un de leurs supérieurs ou par un autre représentant des autorités 47.

Dans de nombreux cas, la torture et les autres formes de mauvais traitements sont employées pour arracher des « aveux » sous la contrainte. Les méthodes fréquemment dénoncées par les détenus comprennent les passages à tabac, les décharges électriques, l’isolement dans des espaces confinés, la suspension prolongée par les pieds, et le viol ou les menaces de viol sur les hommes comme sur les femmes, y compris avec des outils divers. Les détenus reçoivent aussi fréquemment des menaces de mort, et subissent des parodies d’exécution ; ils font face à des menaces d’arrestation et de torture visant leurs proches et leur famille, à l’arrestation réelle des membres de leur famille ; ils sont soumis à la privation de lumière ou l’exposition constante à la lumière, et à la privation de nourriture et d’eau. Les accusations de torture sont couramment ignorées par les tribunaux et ne font l’objet d’aucune enquête, alors que les « aveux » arrachés sous la torture sont acceptés comme preuves.

En août 2011, le directeur de l’Organisation des prisons a nié toute pratique de la torture dans les prisons sous sa juridiction, mais a sous-entendu que les prisonniers retenus pour interrogatoire pouvaient risquer la torture. Il a fait la déclaration suivante à l’agence d’information semi-officielle Mehr :

« La torture est pratiquée dans les prisons qui sont dirigées par la police et où les prisonniers subissent des interrogatoires en permanence. Mais les prisons iraniennes ne sont pas dirigées par la police ou par les juges. Elles sont dirigées de façon indépendante en tant que branches rattachées à l’Organisation des prisons, sous la supervision du système judiciaire.48. »

3.2 DES CONDITIONS DE DÉTENTION DÉPLORABLES

Des centaines de prisonniers d’opinion et de prisonniers politiques sont détenus dans des prisons surpeuplées, dans des conditions déplorables qui entraînent des problèmes de santé, et sont par la suite privés des soins médicaux dont ils ont besoin. En mars 2011, le directeur de l’Organisation des prisons a indiqué que la population carcérale avait dépassé les 220 000 détenus.

« Durant la période [de 18 mois] suivant mon arrivée au poste de directeur de l’organisation, 55 000 nouveaux détenus sont venus s’additionner au total des prisonniers, alors que pas même 55 mètres carrés d’espace n’avaient été ajoutés au système actuel49. »

Fin juin 2011, Younes Mousavi, membre du Comité Judiciaire parlementaire, aurait déclaré devant le parlement que la surpopulation dans certaines prisons était si grave que les prisonniers devaient dormir dans les escaliers. Il aurait également déclaré que le budget de l’Organisation des prisons était insuffisant pour nourrir et vêtir les détenus, que dans certaines prisons, les détenus étaient forcés de partager une couverture, que certains bâtiments carcéraux n’étaient plus à même de remplir leur fonction, et qu’enfin le système de santé de certains établissements était si déplorable que certains prisonniers devaient faire face à des « conditions médicales inadéquates » pendant leur séjour en prison50.

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 25 La répression croissante de la dissidence en Iran

Certains proches d’un groupe d’environ 600 femmes, qui comprend des prisonnières politiques, transférées en 2011 à la prison de Gharchak (ou Qarchak) près de Téhéran, ont écrit une lettre au directeur de la Commission islamique des droits humains en mai 2011. La lettre décrivait les conditions dans lesquelles les prisonnières étaient détenues et ajoutait que des gardiens avaient battu certaines d’entre elles, qui s’étaient plaintes :

«… Les autorités pénitentiaires de Gharchak refusent de fournir de l’eau et de la nourriture aux prisonniers, et ceux-ci affirment qu’il n’y a pas d’horaire régulier pour les repas et que les autorités pénitentiaires leur servent à manger quand bon leur semble. Les 600 prisonnières n’ont accès qu’à quatre salles de bain et celles-ci sont utilisées par toutes pour prendre des douches, laver les vêtements et laver d’autres objets tels que les assiettes. De plus, l’alimentation en eau est coupée pendant la majeure partie de la journée51. »

« Il n’existe aucune loi dans notre pays et n ous n’avons personne à qui nous adresser pour dénoncer cette absence de lois. Comment se f ait-il que dans un établissement supervisé par l’Organisation des priso ns, n’importe quel membre des pasdaran puisse venir pour tabasser mon fils ? Je suis vraiment attristé pour mon pays quand je vois qu’il fait seulement semblant d e rendre la just ice. Il n’y a pas de lois, aucune autorité pour examiner nos plaintes, et les organisations de défense des droits humains ne font que parler. Rien de tout cela ne viendra en aide aux prisonniers politiques ». Déclaration d’Ahmad Ronaghi Maleki, père d’un blogueur emprisonné, Hossein Ronaghi Maleki, en août 201152.

Hossein Ronaghi Maleki, un blogueur, a été maintenu en isolement cellulaire pendant 376 jours après son arrestation, durant lesquels il a été torturé et a subi d’autres types de mauvais traitements. Il a été condamné à 15 ans de prison à l’issue d’un procès inique, et a mené une grève de la faim pendant environ une semaine en décembre 2011. Sa santé est devenue fragile et il a développé des complications rénales depuis son arrestation. Il a déjà subi au moins quatre interventions. Dans une lettre ouverte au Procureur de Téhéran, Abbas Jafari Dowlatabadi53, il a expliqué qu’il entamait une grève de la faim pour protester contre sa condamnation injuste, contre le refus des autorités de la prison de lui accorder une permission pour raisons médicales, et contre les « pressions physiques et psychologiques » dont il avait été victime depuis son arrestation54.

Hossein Ronaghi Maleki a été battu en prison jusqu’à perdre connaissance par un officier des pasdaran, en août 2011, après avoir rédigé une lettre similaire au Procureur de Téhéran. Il a été conduit à l’hôpital, puis ramené en prison dès qu’il a repris connaissance.

De nombreux autres détenus cités plus bas dans les différentes sections du rapport ont également dénoncé les conditions carcérales déplorables et le refus d’administration de traitement médical.

3.3 PROCÈS INIQUES « Il semblerait que les juges qui président les affaires politiques dans les tribunaux révoluti onnaires soient en f ait des merce naires dont le travail est d’appliquer les politiq ues sécuritaires du ré gime. Souvent,

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ces juges ne possèdent même p as les connaissances ou l’expertise appropriées concernant le conten u de l’affaire qu’ils doivent trait er, n’ont pas lu le dossier de l’affaire, et ne savent en fait p resque rien de l’accusé. Lors de ces p rocès, qui durent à p eine quelques minutes, les juges se c ontentent de poser des questions simples et formelles (questions qui se limitent au nom et à l’adresse de l’accusé, aux chefs d’inculpation, etc.) et ne cherchen t pas à découv rir la v érité ou les motivations sociales de l’accusé. » Behnam Daraeizadeh, avocat de la défense iranien55.

La majorité des procès en Iran sont manifestement inéquitables, en particulier les procès qui se déroulent devant un tribunal révolutionnaire et devant d’autres tribunaux spéciaux comme le Tribunal spécial pour le clergé56. Les tribunaux révolutionnaires sont utilisés pour juger les affaires de crimes contre la sécurité nationale et les crimes définis par la loi relative à la lutte contre les stupéfiants, alors que la Tribunal spécial pour le clergé examine des affaires dans lesquelles sont impliqués des ministres du culte musulman ou leurs fidèles. Les procès menés par des tribunaux révolutionnaires s’effectuent souvent à huis clos. Les accusés se voient couramment refuser le droit de consulter un avocat lors de l’enquête préliminaire, et souvent lors du procès lui-même, d’après une interprétation restrictive d’une note de l’article 128 du Code de procédure pénale. Des dizaines d’accusés ont déclaré à Amnesty International qu’on leur avait dit qu’ils « s’en sortiraient mieux » sans avocat. Les procès ne durent souvent que quelques minutes, et les prisonniers affirment parfois que les juges reçoivent des instructions sur le verdict et la peine de la part du service des renseignements qui a supervisé les interrogatoires. Behman Daraeizadeh, un avocat qui s’est chargé de défendre des clients accusés d’infractions d’ordre politique, partage cette opinion. Il a déclaré que, dans les affaires politiques :

« Des agents du ministère du Renseignement préparent un rapport appelé "circulaire finale". Dans ce rapport, ou cette "circulaire", sont notés les aveux sélectionnés de l’accusé et la manière dont le dossier a été constitué. En même temps, le juge ou magistrat du tribunal chargé de l’affaire dispose de plusieurs options de peines choisies d’avance, et même de recommandations quant à l’augmentation ou la réduction du niveau de la peine57. »

Tandis que certains prisonniers d’opinion ou prisonniers politiques écopent de lourdes peines de prison, d’autres sont condamnés à mort sur la base de chefs d’inculpation vagues liés à la sécurité nationale. Les prisonniers d’opinion détenus pour des raisons non politiques sont parfois eux aussi condamnés à mort et exécutés pour des infractions non définies par la loi, telles que l’« apostasie ». Les autorités iraniennes ne fournissent aucune donnée quant à l’application de la peine de mort, et certains éléments semblent indiquer qu’un très grand nombre d’exécutions est mené en secret. Bien que la loi oblige théoriquement les autorités à prévenir les avocats 48 heures à l’avance, ceux-ci ne sont pas toujours informés de l’exécution de leurs clients, et les familles n’ont pas toujours la possibilité de rendre aux prisonniers une dernière visite, ou même de récupérer la dépouille et les effets de leurs proches après l’exécution. Le nombre d’exécutions publiques aurait été multiplié par quatre en 2011, ce qui semble répondre à une stratégie de terreur visant à dissuader toute protestation. Alors que la répression se renforce contre les opposants au régime, on ne peut exclure le risque de voir croître encore les condamnations à mort et les exécutions58.

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NORMES INTERNATIONALES POUR L’ARRESTATION, LA DÉTENTION ET LE PROCÈS DES INDIVIDUS Les arrestations arbitraires sont interdites par l’article 9(1) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Celui-ci stipule que « Nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n'est pour des motifs, et conformément à la procédure prévus par la loi ». Il stipule également que toute personne privée de sa liberté doit être rapidement informée des raisons de son arrestation et doit pouvoir introduire un recours devant un tribunal afin que celui-ci statue sans délai sur la légalité de sa détention.

Un nombre croissant de traités internationaux, de pratiques de droit coutumier et de jurisprudences identifie les disparitions forcées59 comme des crimes continus tant que le sort des victimes n’a pas été établi et que justice et réparation n’ont pas été accordées60. La jurisprudence internationale reconnaît également que les disparitions forcées constituent un traitement inhumain non seulement pour les victimes, mais aussi pour leurs proches, qui vivent dans l’angoisse sans savoir si leurs amis ou leurs parents sont encore en vie, où ils sont détenus, et de quelle manière ils sont traités.

Bien que l’Iran n’ait pas ratifié la Convention contre la torture, l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques interdit la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. La Commission des droits de l’homme des Nations unies a également statué que « chaque cas de détention secrète est par définition une détention au secret qui, si elle est prolongée, peut faciliter la perpétration de la torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et peut en soi être constitutive de tels traitements ».

L’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques garantit que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi ». Il stipule également que toute personne a le droit de ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable, et de disposer du temps nécessaire pour préparer sa défense.

Le droit à la vie est également garanti par l’article 6 du Pacte, et les Nations unies ont, à de nombreuses reprises, exprimé leur inquiétude face au nombre élevé d’exécutions en Iran, en particulier les exécutions de délinquants juvéniles.

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4. QUI SONT LES CIBLES ?

Les arrestations massives de 2009 ont été suivies de nouvelles vagues d'arrestations. Militants politiques, défenseurs des droits humains, journalistes, blogueurs, membres des minorités ethniques et religieuses et militants pour les droits des travailleurs comptaient parmi les premières cibles. Depuis, des avocats et des réalisateurs sont venus grossir les rangs de prisonniers. Nombre d'entre eux sont des prisonniers d'opinion ou prisonniers politiques et sont incarcérés sans procès ou à l’issue de procès iniques61.

À l'heure où nous écrivons ces lignes, en février 2012, une nouvelle vague d'arrestations de blogueurs et de journalistes a lieu à l'aube des élections parlementaires de mars 201262. Plus de 10 journalistes, écrivains et blogueurs ont été arrêtés pour leur appartenance à des minorités ethniques et religieuses. Plusieurs rapports font état d'Iraniens travaillant à l'étranger pour les médias internationaux, en particulier « BBC Persian » (voir plus loin le chapitre 5), pris pour cible par les services de renseignement des pasdaran.

Des centaines de prisonniers d'opinion et de prisonniers politiques sont actuellement emprisonnés ou en détention. Il est cependant difficile de connaître les chiffres réels à un moment précis. Amnesty International n'est pas en mesure d'établir une liste exhaustive des prisonniers politiques, notamment des prisonniers d'opinion, au vu du secret qui entoure les arrestations et les détentions, de la difficulté à obtenir des informations sur les détenus des prisons hors des grandes villes, du refus de visite aux détenus pour les familles ou les avocats, des pressions exercées sur les familles pour qu'elles ne communiquent pas publiquement quant à l'arrestation de leurs proches, de la pratique des libérations provisoires et du refus des autorités iraniennes de permettre l'accès au pays aux observateurs des droits humains (organisations internationales de défense des droits humains et mécanismes des droits humains des Nations unies, notamment). Toutes les personnes détenues courent le risque d'être victimes de violations des droits humains comme décrit plus haut dans ce rapport.

Ainsi, ce rapport ne peut être considéré comme un état des lieux exhaustif de la répression des libertés d'expression, d'association et de rassemblement, des arrestations arbitraires, des tortures ou des procès inéquitables. Il s'agit d'une ébauche visant à mettre en lumière les schémas de violations et la dureté du sort des personnes détenues ou sous la menace de la détention.

4.1 LES ORGANISATIONS DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS ET LEURS MEMBRES « Quel crime a-t-il commis pour mérite r la torture ? Est-ce un crim e de défendre les droits des ouvriers de l'usine de Haft Tapeh, des m embres du syndicat des chauffeurs, et d'autres organisations ? » Asareh Eyvazi, mère du journaliste et militant des droits humains Abolfazl Abedini Nasr, dans une lettre adressée au responsable du pouvoir judiciaire en avril 201063.

Les défenseurs des droits humains sont toujours la cible d'arrestations arbitraires, de mauvais traitements, de « disparitions » forcées, de condamnations à l’issue de procès iniques et de privation de soins médicaux.

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 29 La répression croissante de la dissidence en Iran

D'autres n'ont plus l'autorisation de voyager à l'international et ne peuvent pas quitter le pays.

Trois membres du Centre de défense des droits humains (CDDH) , Mohammad Seyfzadeh, Mohammad Ali Dadkhah (tous deux membres fondateurs) et Narges Mohammadi, ont été condamnés à de longues peines en 2011. Mohammad Seyfzadeh qui purge une peine de deux ans de prison, et Abdolfattah Soltani, un autre membre fondateur qui attend la fin de son procès, sont détenus à la prison d'Evin à Téhéran. Mohammad Ali Dadkhah a été condamné à une peine de neuf ans d’emprisonnement mais se trouve actuellement en liberté en attendant le verdict de la cour d'appel, trois mois après avoir été détenu.

Narges Mohammadi, directrice générale du Centre de défense des droits humains, a été condamnée en septembre 2011 à 11 ans de prison pour « diffusion de propagande contre le régime » et « appartenance à une organisation visant à porter atteinte à la sécurité du pays ». Dans son verdict, le tribunal révolutionnaire a estimé que les affirmations de Narges Mohammadi selon lesquelles ses activités seraient pacifiques n’étaient que « mensonges » et que son but réel était de ternir la réputation du pays. Elle est pour l'instant en liberté dans l'attente du verdict de son procès en appel qui conteste sa condamnation et la peine encourue.

En mars 2011, la 26ème chambre du tribunal révolutionnaire a condamné le journaliste Abdolreza Tajik à six ans de prison pour « appartenance à un groupe illégal [le CDHH] » et « diffusion de propagande contre le régime ». Son avocat dément son statut de membre actif. Ce verdict a été confirmé en appel en octobre 2011. Après lui avoir rendu visite en prison en juillet 2011, sa sœur Parvin a rapporté ses propos : « Lorsqu'ils m'ont amené, la première nuit de détention, mon amour-propre et ma dignité ont été bafoués en présence du procureur adjoint et de l'interrogateur de la première chambre [du tribunal révolutionnaire] »64. Par la suite, Parvin Tajik a été elle-même condamnée à 18 mois de prison pour « diffusion de propos mensongers dans le but de perturber l'opinion publique » et « diffusion de propagande contre le régime » pour s'être exprimée ainsi.65.

Hadi Esmailzadeh, avocat et membre du Conseil du CDDH aurait été convoqué pour interrogatoire le 12 juillet 2011 pour suspicion de « rassemblement et collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale » et « propagande contre le régime en tant que membre du CDDH ». Tout comme Abdolreza Tajik et Narges Mohammadi, il n'est pas autorisé à voyager.

En 2008, Mohammad Ali Dadkhah, Hadi Esmailzadeh et Abdolfattah Soltani, tous trois membres du CDDH, et Ferideh Gheyrat ont été empêchés, en vertu de critères de sélection discriminatoires, de se porter candidats au bureau central de l'Association du barreau en raison de leurs activités de défenseurs des droits humains. En 2012, malgré la confirmation du bureau actuel de l'Association du barreau qu'ils avaient en réalité les compétences requises pour se présenter à cette élection, Mohammad Ali Dadkhah et d'autres avocats sans liens avec le CDDH ont une nouvelle fois été disqualifiés.

Des membres du Comité des reporters des droits humains encourent également des peines de prison ou ont fui le pays pour leur propre sécurité. Les autorités

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iraniennes ont accusé le Comité des reporters des droits humains d'entretenir des liens avec l l'Organisation des moudjahidin du peuple d’Iran (OMPI), groupe d'opposition illégal dont les membres sont déclarés « monafeghin » (hypocrites) par les autorités iraniennes. Le Comité des reporters des droits humains conteste catégoriquement de tels liens.

En janvier 2011, Navid Khanjani a été condamné à 12 ans de prison à l’issue d’un procès inéquitable devant la 26ème chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran. Il a été déclaré coupable de crimes dans le cadre de ses activités pour des organisations de défense des droits humains pour « avoir suscité un malaise dans l'esprit de la population » et « diffusion de propagande contre le régime ». Après son arrestation en mars 2010, Navid Khanjan a été détenu à l'isolement pendant au moins 23 jours ; il a été battu lors d'interrogatoires et étranglé presque à mort par un responsable de la prison alors qu'il avait les yeux bandés parce qu'il refusait de faire des « aveux » devant une caméra. Membre de la minorité religieuse baha’ie, il est également membre de l'Association contre la discrimination dans l'enseignement (AODE). Au mois d'août 2011, un jugement en appel a confirmé la peine de 12 ans de prison prononcée en première instance et a assorti la peine d’une amende de quatre millions de rials. Fin janvier 2012, toujours en liberté, il a déclaré à Amnesty International être dans l'attente imminente de la réception de son avis d'incarcération validé par les autorités.

Shiva Nazar Ahari et deux autres membres du Comité des reporters des droits humains ont été arrêtés en décembre 2009 alors qu'ils se rendaient aux funérailles du grand ayatollah Montazeri, un dignitaire religieux qui avait critiqué les répressions du gouvernement iranien vis-à-vis de manifestants suite aux élections présidentielles contestées de juin 2009. Détenue dans des conditions s'apparentant à de la torture, elle a été condamnée en septembre 2010 à 74 coups de fouet convertis en une amende et six ans de prison, répartis ainsi : trois ans et demi pour « inimitié à l'égard de Dieu » à purger en exil intérieur à la prison d'Izeh dans la province du Khuzestan, deux ans pour « rassemblement et collusion dans le but de commettre un crime contre la sécurité nationale » et six mois pour « diffusion de propagande contre le régime ». Sa condamnation pour « rassemblement et collusion dans le but de commettre un crime contre la sécurité nationale » a été annulée en appel en janvier 2011. Sa peine a par conséquent été réduite à quatre ans de prison. La cour d'appel a par ailleurs décidé de transférer son exil intérieur de la prison d'Izeh dans la province du Khuzestan vers une prison à Karaj près de Téhéran. Shiva Nazar Ahari a été libérée sous caution en septembre 2010 et reste sous la menace d'une incarcération à tout moment. En janvier 2012, la mère de Shiva Nazar Ahari a été frappée par derrière par un homme alors qu'elle se trouvait dans la rue et a souffert de blessures aux mains et aux genoux. L'homme a ensuite enfourché une moto puis démarré en criant « Mort aux hypocrites66 ». Au moment de la rédaction de ce rapport, Navid Khanjani n'avait pas encore reçu de sommation à purger sa peine et jouissait de sa liberté.

Kouhyar Goudarzi, également membre du Comité des reporters des droits humains, a disparu plusieurs semaines après son arrestation en juillet 2011. Il a été retrouvé détenu à l'isolement à la prison d'Evin où il est resté incarcéré jusqu'à la fin de l'année. Un de ses amis, Behnam Ganji Khaibari, âgé de 22 ans, qui avait été arrêté en même temps que lui et vraisemblablement torturé, s'est suicidé après sa libération en août 2011. Avant sa mort, Behnam Ganji Khaibari

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a déclaré avoir subi des interrogatoires tous les matins et tous les après-midi et des pressions dans le but de faire des « aveux » incriminant Kouhyar Goudarzi.

Le procès de Kouhyar Goudarzi devant la 26ème chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran pour « diffusion de propagande contre le régime lors d'un entretien accordé au magazine Der Spiegel » et « rassemblement et collusion dans le but de commettre un crime contre la sécurité nationale en tant que membre du Comité des reporters des droits humains » a débuté le 20 janvier 2012 en présence de son avocat. La séance initialement prévue le 9 janvier 2012 avait été reportée à la demande de Kouhyar Goudarzi car son avocat n'était pas présent67.

La mère de Kouhyar Goudarzi, Parvin Mokhtare, a été arrêtée le 1er août 2011, soit un jour après son fils. Elle est détenue à la prison de Kerman, dans le sud-est de l'Iran. Elle a été jugée par un tribunal révolutionnaire à Kerman en septembre 2011 pour « diffusion de propagande contre le régime » et « actions contre la sécurité nationale » en raison, semble-t-il, de son soutien à son fils après sa condamnation à un an de prison pour notamment « diffusion de propagande contre le régime » en 2010. Sans accès à un avocat depuis son arrestation, elle a été condamnée à 23 mois de prison en décembre 2011. Des agents officiels de la sécurité nationale lui ont signifié qu'elle n'avait « besoin ni d'avocat ni de défense »68..

Au moins 30 personnes, parmi lesquelles figurent des militants indépendants pour les droits humains et des membres des Défenseurs des droits humains en Iran, ont été arrêtés en mars 2010. L'accès à 20 sites Internet des Défenseurs des droits humains en Iran est restreint par les autorités69. La majorité des personnes interpellées ont été libérées peu de temps après leur arrestation. Parmi les personnes arrêtées, Abolfazl Abedini Nasr, ancien responsable des relations publiques des Défenseurs des droits humains en Iran, journaliste indépendant et militant des droits humains, aujourd'hui âgé de 29 ans, aurait été passé à tabac lors de son arrestation puis à son arrivée à la prison d'Evin.

Abolfazl Abedini Nasr avait déjà été arrêté peu de temps après les élections présidentielles de juin 2009 et incarcéré quatre mois avant d'être libéré sous caution. Après son arrestation en mars 2010, son avocat a été informé de la condamnation d'Abolfazl Abedini Nasr par la première chambre du tribunal révolutionnaire d’Ahvaz suite à son arrestation en juin 2009. Il a été condamné à 11 ans de prison pour « appartenance à une organisation illégale [Défenseurs des droits humains en Iran] » et « diffusion de propagande contre le régime » pour avoir parlé à des médias étrangers et « contacts avec des États ennemis ». Il semble que l'accusation de « contacts avec des États ennemis » soit liée aux affirmations des autorités iraniennes datant de mars 2010 selon lesquelles les Défenseurs des droits humains en Iran auraient été montés par la CIA dans le but d'organiser une révolution « douce » en Iran. Sa condamnation a été confirmée en appel en mai 2010. Abolfazl Abedini Nasr souffre de problèmes cardiaques. Il a besoin de médicaments et d'examens médicaux réguliers. Amnesty International n'est pas en mesure de savoir s'il reçoit les soins médicaux nécessaires en prison.

Le 1er mai 2011, la 28ème chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran a assorti la peine d’Abolfazl Abedini Nasr d'un an de prison supplémentaire pour « diffusion de propagande contre le régime » pour des entretiens accordés à

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différents médias lorsqu'il était responsable des relations publiques des Défenseurs des droits humains en Iran. Cette condamnation a été confirmée en appel au mois de novembre 2011.

Abolfazl Abedini Nasr est également membre du parti pan-iraniste, un parti politique d'opposition interdit qui promeut la solidarité et la réunification des populations d'Iran vivant sur le plateau iranien.

Des militants de la société civile ont quitté le pays pour leur sécurité. À titre d'exemple, Sohrab Razzaghi vit aujourd'hui à l'étranger. Il était directeur du Centre de recherche et de formation pour les organisations de la société civile (également appelé Koneshgaran Davtalab, Institut pour les acteurs bénévoles) dont le but était de renforcer les capacités de la société civile et d'œuvrer pour le développement durable, la démocratie et les droits humains. Le centre a été fermé de force par les autorités en mars 2007 sans aucune explication. Sohrab Razzaghi a enseigné au département de droit et de sciences politiques de l'université Allameh Tabatabaei à Téhéran. Il a été licencié en 2005 lors d'une vague de licenciements et de départs à la retraite forcés visant le personnel universitaire considéré trop réformiste. Il a été arrêté en octobre 2007. Son domicile et ses bureaux ont été fouillés et ses affaires saisies. Il a passé un mois à l'isolement à la prison d'Evin avant sa libération contre une lourde caution.70. Après les élections de 2009, il a été assigné en justice mais ne s'est pas présenté à la cour et a quitté le pays. En janvier 2012, absent du pays, il a été condamné à 20 ans de prison et une lourde amende pour « atteinte à la sécurité de l'État sous la forme d'un groupe visant à renverser le régime », « rassemblement et collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale », « collecte d'informations classifiées dans le but de les transmettre à des étrangers » et « financements illégaux de la part d'organisations internationales ».

4.2. LES AVOCATS

Au moins neuf avocats seraient actuellement maintenus en détention ou emprisonnés en Iran en raison de leur activité professionnelle, d’autres activités pour le respect des droits humains ou l’exercice légitime de leur liberté d’expression. D’autres ont été l’objet de harcèlement et de poursuites et au moins quatre ont quitté l’Iran par crainte d’être persécutés.

Les avocats qui défendent des prisonniers d’opinion ou prisonniers politiques ou qui expriment leurs préoccupations au sujet de la torture et des procédures judiciaires risquent particulièrement d’être persécutés ou arrêtés. Ceux qui ont déjà été arrêtés font l’objet de poursuites qui peuvent rester en attente pendant des mois voire des années, ou ils sont en liberté et attendent le verdict des procédures d’appel contestant des peines d’emprisonnement. Cet état d’incertitude est visiblement une tactique fréquemment utilisée par les autorités iraniennes comme un moyen de réduire au silence les militants politiques et de la société civile.

Abdolfattah Soltani a été arrêté le 10 septembre 2011. Il est actuellement incarcéré et attend la conclusion de son procès pour « diffusion de propagande contre le régime », « création d’un groupe illégal d’opposition au régime [le Centre de défense des droits humains] », et pour « rassemblement et collusion

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avec l’intention de porter atteinte à la sécurité nationale ». Abdolfattah Soltani fait également l’objet de poursuites supplémentaires pour avoir accepté ce que les autorités appellent « un prix illégitime » – le prix international des droits humains de Nuremberg – en 2009, malgré le fait qu’il lui ait été interdit de se rendre en Allemagne pour le recevoir. Abdolfattah Soltani avait déjà été menacé d’une peine de 20 ans d’emprisonnement par des agents du ministère du Renseignement.

Lors d’une conférence de presse des Nations unies en novembre 2011, le secrétaire général du Haut conseil des droits humains du pouvoir judiciaire, Mohammad Javad Larijani, a déclaré qu’Abdolfattah Soltani était détenu en raison de soupçons de « relations avec des groupes terroristes », responsables, a-t-il affirmé, de la mort de plus de 10 000 personnes en Iran. Abdolfattah Soltani a catégoriquement démenti cette allégation, ont expliqué ses proches à Amnesty International, et il a déclaré qu'il souhaitait porter plainte contre Mohammad Javad Larijani.

Un autre éminent avocat, Mohammad Seyfzadeh, purge actuellement une peine d’emprisonnement de neuf ans, réduite à deux ans en appel, pour son rôle dans l’établissement du CDDH. Il a été arrêté en avril 2011 car il aurait tenté de quitter le pays illégalement et il a été incarcéré au centre de détention d’Oroumieh, au nord-ouest de l’Iran, dans des conditions constituant une disparition forcée pendant près de deux semaines. Mohammad Seyfzadeh avait déjà été condamné en octobre 2010 à neuf ans d’emprisonnement pour « création et appartenance à une association visant à porter atteinte à la sécurité nationale [le CDDH] » et pour « diffusion de propagande contre le régime71 ». Il a également été condamné à une interdiction de pratiquer le droit de 10 ans, malgré le fait que seul le Tribunal disciplinaire des avocats puisse prononcer des interdictions d’exercice. En novembre 2011, Mohammad Seyfzadeh a été transféré de la prison à un hôpital inconnu pour une courte période. Malgré le souhait des médecins de le garder en observation, il a été très vite ramené à la prison d’Evin.

Un autre co-fondateur du CDDH, Mohammad Ali Dadkhah a été condamné en juillet 2011 à neuf ans d’emprisonnement pour sa tentative présumée de « renversement sans violence » du gouvernement et « diffusion de propagande contre le régime ». On lui a également interdit d’enseigner le droit et d’exercer comme juriste pendant 10 ans. Par ailleurs, il a été condamné à verser une amende pour possession d’une antenne satellite, ce qui est illégal en Iran. Mohammad Ali Dadkhah a informé Amnesty International en février 2012 que malgré la tenue de l’audience de son recours en appel trois mois auparavant, il n’avait reçu aucune notification concernant la décision72.

Nasrin Sotoudeh, avocate spécialisée dans les droits humains et mère de deux enfants, a été condamnée à 10 ans d’emprisonnement le 9 janvier 2011 pour « atteinte à la sécurité nationale, notamment pour appartenance au Centre de défense des droits humains », auxquels s’ajoute une année supplémentaire pour « diffusion de propagande contre le régime ». De plus, elle n’est plus autorisée à pratiquer le droit ni à quitter le pays pendant 20 ans, interdiction réduite en appel à 10 ans en septembre 2011. La peine d’emprisonnement a également été réduite à six ans en appel.

Bien que Nasrin Sotoudeh ait défendu des membres du CDDH, elle a déclaré ne

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pas être membre elle-même de l’organisation. Les chefs d’accusation semblent concerner son activité professionnelle légitime73. Avant son arrestation, il avait été conseillé à Nasrin Sotoudeh de refuser de défendre la prix Nobel et fondatrice du CDDH, Shirin Ebadi, sans quoi elle en subirait les conséquences.

L’époux de Nasrin Sotoudeh, Reza Khandan, a été interrogé plusieurs fois par les autorités au sujet de son soutien à sa femme. Peu de temps après la condamnation de sa femme, Reza Khandan a été détenu une nuit à la prison d’Evin après s’être rendu à une convocation au bureau du procureur de Téhéran à la prison. Il a été interrogé pendant près de 10 minutes les yeux bandés et sommé de transcrire sur papier deux de ses réponses. Il a été informé qu’on l’accusait de « publication de fausses nouvelles » et « troubles à l’ordre publique » en raison d’une lettre non publiée adressée au bureau du procureur dans laquelle il se plaignait des conditions de détention de Nasrin Sotoudeh. Il a été libéré après paiement d’une caution de 500 millions de rials.

Depuis le 1er novembre 2010, date à laquelle un procureur a affirmé que Javid Houtan Kiyan, représentant légal de Sakineh Mohammadi Ashtiani , était détenu parce qu'on le soupçonnait de posséder trois fausses cartes d'identité ou duplicata, les autorités iraniennes n'ont fourni aucune information sur la situation juridique de ce dernier. D’autres sources ont depuis signalé qu’il pourrait avoir été condamné à quatre ans d’emprisonnement pour diverses infractions, ainsi qu’à une interdiction d’exercer pendant cinq ans après un procès durant lequel il n’aurait eu droit à aucune représentation juridique. La plupart de ces accusations, si ce ne sont toutes, semblent être liées au fait qu’il ait défendu Sakineh Mohammadi Ashtiani, femme condamnée à mort par lapidation pour « adultère en étant mariée », dont le cas a bénéficié d’une attention considérable de la part de la communauté internationale.

Javid Houtan Kiyana été arrêté le 10 octobre 2010 à son cabinet aux côtés de Sajjad Qaderzadeh, le fils de Sakineh Mohammadi Ashtiani ainsi que de deux journalistes allemands qui les interviewaient au sujet de cette affaire. Sajjad Qaderzadeh a été libéré sous caution en décembre 2010 et les journalistes ont recouvré la liberté en février 2011, après avoir été condamnés à payer une amende.

En mars 2011, une lettre attribuée à Javid Houtan Kiyan indique qu'il a été torturé pendant qu'il était à l’isolement à la section 209 de la prison d'Evin du 11 octobre au 12 décembre 2010. Dans cette lettre, Javid Houtan Kiyan a écrit qu’il avait subi de nombreuses brûlures de cigarettes, qu’il avait été passé à tabac à plusieurs reprises avec pour résultat des dents cassées, et qu’on l’aurait laissé dans le froid pendant plusieurs heures, complètement trempé74.

Naghi Mahmoudi, l’ancien représentant légal de Javid Houtan Kiyan, a fui l’Iran en août 2011, craignant pour sa propre sécurité. De par son long travail de plaidoyer pour les défenseurs des droits culturels azéris, il a reçu l’ordre de représenter Javid Houtan Kiyan en mars 2011, peu de temps après une brève rencontre au tribunal de Tabriz en janvier 2011. Naghi Mahmoudi a confirmé à Amnesty International en février 2012 qu’il avait pu le rencontrer une seule fois, en mars 2011, à la prison de Tabriz.

Lors d’entretiens avec des agences de presse75, Naghi Mahmoudi a déclaré, en parlant de l’apparence de Javid Houtan Kiyan : « Je ne pouvais pas en croire

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mes yeux. » Il a ajouté que lors de leur entretien de deux heures, il a remarqué que Javid Houtan Kiyan avait des dents et le nez cassés, qu’il parlait « lentement, d’une voix guère plus audible qu’un murmure ». Naghi Mahmoudi a rapporté que Javid Houtan Kiyan lui avait expliqué avoir été battu pendant plusieurs heures d’affilée, emmené dans une cour les nuits hivernales et laissé dans le froid, complètement trempé des heures durant, ainsi que brûlé aux testicules avec une cigarette. Après cette visite, Naghi Mahmoudi a déclaré qu’il a non seulement reçu une interdiction de visite à son client mais aussi de toute visite dans les prisons de Tabriz.

Selon Naghi Mahmoudi, Javid Houtan Kiyan a comparu devant trois tribunaux différents. Il a comparu devant la 15e chambre du tribunal révolutionnaire à Téhéran, pour « apostasie » en raison de sa traduction d’un livre d’un auteur indien. Les poursuites ont été ultérieurement abandonnées.

Javid Houtan Kiyan a également comparu devant la 104e chambre du tribunal général de Tabriz, pour contrefaçon de documents d’identité. Selon Naghi Mahmoudi, ces poursuites auraient également été abandonnées ultérieurement, mais il affirmait aussi qu’elles pourraient encore être valables. Sa troisième comparution a eu lieu devant la 1ère chambre du tribunal révolutionnaire à Tabriz pour « diffusion de propagande contre le régime ». Il a été condamné à un an d’emprisonnement. Il comparaissait également pour « rassemblement et collusion dans l’intention de porter atteinte à la sécurité nationale », charge qui lui a valu une peine de trois ans d’emprisonnement. De plus, il lui a été interdit d’exercer pendant cinq ans. Naghi Mahmoudi a déclaré que son client pouvait encore avoir à répondre d’une accusation d’espionnage en lien avec l’entrevue accordée aux deux journalistes allemands avec le fils de Sakineh Ashtiani. L’espionnage est passible de la peine de mort en Iran. Les rapports de février 2011 laissent à penser que la cour d’appel aurait retenu une peine de six ans d’emprisonnement contre Javid Houtan Kiyan76.

Marcus Hellwig, un des deux journalistes allemands arrêtés au même moment, a déclaré en février 2012 que les gardiens l’avaient emmené « dans une cellule de torture pour lui montrer ce qu’ils utilisaient pour torturer les prisonniers ». Il a ajouté qu’il avait été battu mais a refusé de parler d’autres aspects de son expérience en prison. Il a également déclaré qu’il entendait d’autres victimes crier tout au long de la journée77.

La critique publique des violations des droits des clients ou le non-respect des procédures judiciaires semble être la raison de l’arrestation de certains avocats.

Farshid Yadollahi et Amir Eslami ont été condamnés en janvier 2011 à six mois d’emprisonnement pour « diffusion de propos mensongers dans le but de perturber l'opinion publique » car ils avaient déposé des plaintes pour dénoncer des agissements illégaux de la part des forces de sécurité alors qu’ils défendaient six clients soufis sur l'île de Kish. Farshid Yadollahi et Amir Eslami ont été à nouveau arrêtés en septembre 2011 aux côtés de 60 autres Soufis, dont deux autres avocats, Afshin Karampour et Omid Behrouzi, dans le cadre d’une vague de répression contre les minorités religieuses. Il semblerait que tous soient encore détenus dans la section 350 de la prison d’Evin et qu’ils aient été inculpés vers la fin du mois de décembre 2011 pour « outrage au Guide suprême », « rassemblement et collusion dans l’intention de porter atteinte à la sécurité nationale », « appartenance à un groupe "déviant" »,

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« diffusion de propos mensongers » et « « avoir suscité un malaise dans l'esprit de la population » ». De nouvelles arrestations de Soufis ont eu lieu depuis.

Mostafa Daneshjou, un autre avocat soufi, a été arrêté par des agents des forces de sécurité en civil dans son cabinet, à Téhéran, le 18 mai 2011. Il a été conduit à la prison de Sari, au nord de l’Iran, pour purger une peine de sept mois d'emprisonnement à laquelle il avait été condamné en janvier 2010. Il avait été reconnu coupable de « diffusion de propos mensongers » alors qu'il représentait deux Soufis de Neka, dans la province du Mazandaran au nord de l’Iran, qui portaient plainte contre une perquisition illégale menée à leur domicile par les forces de sécurité de Mazandaran. Le 15 juin 2011, il a été transféré pendant trois jours dans un camp de réinsertion pour les personnes souffrant de toxicomanie, sans que l'on en sache vraiment les raisons. Son transfert pourrait être lié aux consultations juridiques qu'il offrait gratuitement à ses codétenus de la prison de Sari. Fin octobre 2011, il aurait été transféré à la prison d'Evin et inculpé avec les quatre avocats susmentionnés. Par ailleurs, il semble que sa licence professionnelle lui ait été retirée.

Khalil Bahramian, qui a représenté de nombreux prisonniers politiques, pour certains dans le quartier des condamnés à mort, a été condamné en février 2011 par la 28e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran à 18 mois d'emprisonnement pour « diffusion de propagande contre le régime » et « outrage au responsable du pouvoir judiciaire ». Il a également été condamné à une interdiction de pratiquer le droit pendant 10 ans. Le véritable motif de ces poursuites semble résider dans les critiques qu’il a exprimées publiquement au sujet des lacunes du processus judiciaire dans les affaires de certains de ses clients qui ont été exécutés. Cet homme exerce en Iran depuis 46 ans. Il est libre dans l’attente du verdict de l'appel formé contre sa peine.

4.3 LES DÉFENSEURS DES DROITS DES FEMMES

Plusieurs défenseurs des droits des femmes sont actuellement maintenus en détention ou purgent des peines d’emprisonnement pour leur engagement dans des activités pacifiques. Ils sont souvent inculpés de chefs d’accusation formulés en termes vagues relatifs à des infractions contre l’État. La plupart d’entre eux participent à la campagne « Un million de signatures » (également connue sous le nom de « Campagne pour l’égalité »), mouvement populaire né en 2006 visant à recueillir un million de signatures d’Iraniens pour exiger la suppression des discriminations envers les femmes dans le droit iranien78. Les procédures judiciaires concernant leurs détentions, leurs procès et leurs libérations n’ont pas été respectées. Nombre d’entre eux ont été placés en isolement cellulaire ou n’ont eu droit qu’à un nombre extrêmement limité de visites de leurs familles et avocats. Certains ont été maltraités et se sont vu refuser l’accès aux soins médicaux. D’autres ont été soumis à une interdiction de quitter le pays.

Fereshteh Shirazi, mère de deux enfants et membre de la campagne Un million de signatures, a été arrêtée le 4 septembre 2011 après s’être présentée à une convocation du bureau du ministère du Renseignement à Amol, au nord de l’Iran. Au mois d’octobre 2011, Fereshteh Shirazi a été condamnée à deux

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ans de prison pour « avoir suscité un malaise dans l'esprit de la population en diffusant des informations mensongères » et « outrage aux autorités » sur son blog, auxquels s’ajoute une année supplémentaire pour « diffusion de propagande contre le régime ». De plus, elle n’est plus autorisée à quitter le pays pendant sept ans79. La décision a été confirmée en appel par la Cour d’appel de Mazandaran en janvier 2012. Elle serait actuellement détenue à la prison d’Amol dans de mauvaises conditions.

Mahboubeh Karami a commencé à purger sa peine de trois ans d’emprisonnement (quatre ans avant une réduction de peine en appel) en mai 2011, pour ses activités pacifiques visant à améliorer les droits des femmes. Mahboubeh Karami a été membre de la campagne Un million de signatures depuis sa création et a été directrice de l’unité des femmes de l’Association des droits de l’homme d’Iran (HRA). Plus de 30 membres de la HRA ont été arrêtés en 2010. Lors de son procès devant la 26e chambre du tribunal révolutionnaire, elle a été condamnée pour « appartenance à une organisation illégale [HRA] », « rassemblement et collusion dans l’intention de porter atteinte à la sécurité nationale » et pour « diffusion de propagande contre le régime ».

La famille et les amis de Mahboubeh Karami craignent que ses problèmes de santé ne s’aggravent en prison. Elle souffrait d’une dépression, au moment de son arrestation en mars 2010, qui s’est aggravée durant son incarcération. Elle souffrirait également d’insomnie et de problèmes respiratoires. Libérée sous caution en août 2010, elle est retournée à la prison d’Evin en mai 201180.

Ces femmes ont rejoint d’autres femmes en prison, incarcérées depuis les troubles de 2009. Parmi ces dernières se trouve Ronak Safazadeh, jeune Kurde d’Iran âgée de 25 ans et membre de la Campagne pour l’égalité et de l’organisation de femmes Azar Mehr de . Ronak Safazadeh est actuellement détenue à la prison de Sanandaj dans la province du Kurdistan située au nord-ouest de l’Iran. Elle purge une peine de six ans d’emprisonnement après avoir été condamnée en avril 2009 pour « appartenance à une organisation illégale [le Parti pour une vie libre au Kurdistan, PJAK] » et « diffusion de propagande contre le régime ».

La veille de son arrestation, Ronak Safazadeh s’est rendue à une réunion pour la Journée internationale de l’enfance à Sanandaj, lors de laquelle elle a recueilli des signatures pour la Campagne pour l’égalité. Le lendemain, des agents de sécurité seraient arrivés à son domicile lui confisquant son ordinateur, des copies de la pétition et une brochure publiée pour la campagne, et l’auraient arrêtée.

Amnesty International n’a trouvé aucune preuve d’incitation à la violence ou d’actes violents perpétrés par Ronak Safazadeh et considère qu’elle est une prisonnière d’opinion, détenue uniquement en raison de ses activités pacifiques en faveur des droits humains. Ronak Safazadeh a souffert d’affections dentaires en prison et n’auraient pas reçu les soins médicaux adaptés81.

Zhila Karamzadeh-Makvandi, membre du groupe des Mères du parc Laleh (auparavant connu sous le nom de Mères en deuil) qui lutte contre les exécutions illégales et autres violations graves des droits humains, a été arrêtée au service des passeports à Téhéran le 27 décembre 2011. Zhila Karamzadeh-Makvandi a été emmenée pour purger la peine de deux ans

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d’emprisonnement à laquelle elle avait été condamnée pour « création d’une organisation illégale » et « atteinte à la sécurité de l’État » en raison de ses activités pacifiques. Leyla Seyfollahi et Nader Ahsani – un homme partisan du groupe – ont également été condamnés à des peines de deux ans de prison pour des chefs d’accusation similaires et risquent l’emprisonnement à tout moment. Tous trois avaient été arrêtés en 2010 en raison de leurs activités au nom du groupe. Mansoureh Behkish, également membre des Mères du parc Laleh, a été emprisonnée du 12 juin au 9 juillet 2011 avant d’être libérée sous caution. Son procès a commencé le 25 décembre 2011 pour « diffusion de propagande contre le régime » et « rassemblement et collusion dans l’intention de porter atteinte à la sécurité de l’État par la création du groupe des Mères en deuil ». Entre 1981 et 1988, six membres de la famille de Mansoureh Behkish ont été tués ou portés disparus, dont une sœur, quatre frères et un beau-frère.

4.4 MILITANTS POUR LES DROITS HUMAINS ISSUS DE MINORITES

Les revendications pour plus de droits de la part de militants en faveur des droits des minorités sont réprimées depuis de nombreuses années, dans le cadre d’une opposition armée de la part de certains groupes, en particulier les communautés arabe ahwazi, kurde et baloutche. Les militants qui plaident pour le respect et la protection des droits de leurs communautés, sont victimes d’une discrimination en droit comme en pratique en Iran et risquent de nombreuses violations des droits humains, allant de l’arrestation arbitraire à la peine de mort, à l’issue d’un procès inique, ainsi que des restrictions à la circulation et le déni d’autres droits civils. Ce schéma se perpétue dans le contexte de l’amplification et la généralisation de la répression de la plupart des formes de dissidence contre les politiques du gouvernement.

Kaveh Ghasemi Ker manshahi, un défenseur des droits humains kurde participant à la Campagne pour l’égalité, a été détenu entre février et mai 2010, période pendant laquelle il a passé 80 jours en isolement cellulaire. Son procès pour des accusations relatives à la sécurité nationale a commencé en octobre 2010. En février 2011, il a été condamné à cinq ans de prison, peine réduite en appel à quatre ans. En mars 2011, il a été sommé de purger sa peine, mais il a fui le pays par peur pour sa sécurité. En 2011, il a reçu le prix Hellman- Hammett, remis à des militants des droits humains par Human Rights Watch.

Mohammad Sadiq Kabudvand, un défenseur des droits humains kurde de 49 ans, purge une peine d’un total de dix ans et demi qui lui a été imposée en mai 2008 pour avoir « atteinte à la sécurité de l'État par la création d'un groupe illégal [l’Organisation des droits humains du Kurdistan] ». Pendant qu’il était en prison, d’autres accusations ont été portées contre lui au sujet de ses écrits sur les droits des femmes et sur d’autres questions relatives aux droits humains. Mohammad Sadiq Kabudvand souffre de pathologies des reins et de la prostate, aggravées par les conditions médiocres de détention et par le manque de soins médicaux appropriés. Il a développé des problèmes cardiaques pendant son séjour en prison. Il aurait eu une attaque cardiaque et deux accidents vasculaires cérébraux en prison et aurait d’autres problèmes de santé importants pour lesquels il n’a pas eu de prise en charge médicale adéquate. Depuis son incarcération, Mohammad Sadiq Kabudvand a perdu environ 20 kilos. En janvier 2012, Mohammad Sadiq Kabudvand a été emmené à l’hôpital hors de la prison d’Evin pour être soumis à des examens médicaux, mais son épouse

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Parinaz Baghbani Hassani a indiqué à Amnesty International que son mari avait été ramené en prison malgré les recommandations des médecins pour qu’il reste à l’hôpital.

Said Metinpour, membre de la minorité azérie qui réclame davantage de droits linguistiques et culturels pour sa communauté, est également toujours en prison. Il est journaliste et membre du comité de rédaction des publications hebdomadaires en turc azéri Yarpagh (page) et Moj-eBidari (La vague réveillée) et rédige également son propre blog. A la suite de son arrestation en mai 2007, Said Metinpour a été torturé et puis condamné à une peine de prison de huit ans par la 15ème chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran, après avoir été déclaré coupable d’ « espionnage » et de « diffusion de propagande contre le régime ». Il est détenu à la prison d’Evin. Il souffre de maux de dos intenses mais n’a pas reçu de permission de sortie temporaire pour obtenir des soins médicaux.

4.5 CINEASTES

Dans leurs tentatives pour éliminer toute forme de dissidence et empêcher les voix dissidentes d’être entendues dans le monde extérieur, les autorités iraniennes augmentent progressivement la pression exercée sur l’industrie du film iranienne, mondialement reconnue. Les personnes qui travaillent dans cette industrie ou qui entretiennent des rapports avec elle ont fait l’objet d’arrestations arbitraires au nom de vagues chefs d’inculpation liés à la menace à la sécurité de l’État, et ont été soumises à la torture et autres mauvais traitements. Leur circulation et leur capacité à travailler sont soumises à des restrictions sévères. Les réalisateurs tels que , même s’ils sont pour l’instant libres, pourraient retourner en prison à tout moment après avoir été condamnés à de longues peines. D’autres vivent en exil, comme Mohsen Makhmalbaf et Bahman Ghobadi.

Les réalisateurs ont depuis longtemps démontré leur capacité à contourner les lois de censure existantes dans le pays, qui exigent que les scripts soient examinés avec soin avant le début de la production. Des mesures supplémentaires ont été introduites en 2010. En mai 2010, un représentant du ministère de la Culture et de l’Orientation islamique a annoncé que les Iraniens devaient également obtenir la permission des autorités iraniennes avant de coopérer avec des productions étrangères. En outre, en juillet 2010, le gouvernement a mis sur pied le Haut conseil du cinéma, sous l’égide du président iranien et sous la direction du ministre de la Culture et de l’Orientation islamique, soutenu par six cinéastes progouvernementaux. Il représente la principale source de financement de la production cinématographique. Toutes les activités liées au cinéma dans le pays doivent être coordonnées par ce nouvel organisme, y compris celles de la Maison du Cinéma.

Au cours de l’année 2011, plusieurs professionnels du cinéma ont été brièvement détenus ou ont couru le risque d’être emprisonnés en raison de leurs activités pacifiques relatives à leur travail. Ainsi, l’actrice Marzieh Vafamehr a été arrêtée en juin 2011. Elle a été condamnée autour du 8 octobre à un an de prison et 90 coups de fouet à cause de son apparition dans le film australien My Teheran for Sale, dans lequel elle apparaît au cours d’une scène sans le foulard que les femmes en Iran doivent obligatoirement mettre pour couvrir leur tête.

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Dans une autre scène, on voit son personnage boire de l’alcool, ce qui constitue une infraction criminelle en Iran, même si son mari a démenti le fait qu’elle buvait effectivement de l’alcool. Elle a été relâchée plus tard en octobre après qu’une cour d’appel a réduit sa peine de prison à trois mois et commué la peine de flagellation en une amende de 12 millions de rials, à la suite du tollé international que sa condamnation et la peine infligée avaient provoqué.

Des réalisateurs en liens avec des diffuseurs étrangers tels que la BBC ont été arrêtés et détenus. Cinq réalisateurs de documentaires, Hadi Afarideh, Naser Saffarian, Mohsen Shahrnazdar, Mojtaba Mir Tahmasb et Mehran Zinatbakhsh ainsi que le producteur et distributeur Katayoun Shahabi ont été arrêtés en septembre 2011. Tous ont été détenus dans la section 209 de la prison d’Evin, contrôlée par le ministère du Renseignement, et n’ont disposé que de contacts extrêmement réduits avec leurs familles. À la mi-décembre 2011, tous avaient été libérés sous caution.

Hadi Afarideh, Naser Saffarian, Mohsen Shahrnazdar et Katayoun Shahabi auraient vendu les droits de leurs films à divers diffuseurs, dont la branche perse de la BBC. Les arrestations se sont produites après la diffusion d’un documentaire sur la vie du Guide suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, diffusé sur BBC Persian. La transmission satellite du programme de la BBC était brouillée en Iran.

Plus tôt, le 5 septembre 2011, Mojtaba Mir Tahmasb a été sommé de descendre d’un avion et son passeport a été confisqué alors qu’il tentait de se rendre en Europe pour présenter Ceci n’est pas un film, un film de 75 minutes sur la vie du réalisateur Jafar Panahi depuis sa condamnation en décembre 2010.

En décembre 2010, Jafar Panahi a été condamné à une peine de six ans de prison après avoir été déclaré coupable d’« atteinte à la sécurité de l’État » et de « propagande contre le régime ». Il lui a également été interdit de pratiquer toute activité relative à la réalisation cinématographique pendant 20 ans, de voyager à l’étranger et d’accorder des entretiens à des médias nationaux et internationaux. Sa peine a été confirmée en octobre 2011. Un autre réalisateur de renommée internationale, Mohammed Rasoulof, a été reconnu coupable de chefs d’inculpation similaires et condamné à six ans de prison, peine réduite à un an en appel. En mai 2011, l’interdiction de voyage à l’étranger qui avait été imposée à Mohammed Rasoulof en 2009 a été levée. Au moment de la rédaction, en février 2012, les deux hommes étaient en liberté.

4.6 BLOGUEURS

Avant et depuis 2009, les blogueurs ont été détenus pendant de longues périodes sans accusation ni procès, condamnés à de longues peines à l’issue de procès iniques sur la base de vagues accusations. Ils font l’objet de mauvais traitements, de châtiments imposés par la justice, comme la flagellation, assimilables à des actes de torture. La durée des peines est peut-être révélatrice de la peur des autorités face au pouvoir d’Internet.

On considère qu’Hossein Derakhshan, un blogueur influent parfois surnommé le « père du blog » iranien, a contribué à lancer l’activité de blog en Iran en postant des instructions simples, rédigées en persan, expliquant comment créer

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un site et commencer à écrire des commentaires en ligne. Il a été condamné en septembre 2010 à l’issue d’un procès inique devant la branche 15 du tribunal révolutionnaire, et forcé à rembourser des financement qu’il aurait apparemment reçus de l’étranger82. Une peine a suivi sa condamnation qui reposait sur des accusations formulées en termes vagues liées à la sécurité nationale, dont « collaboration avec des États hostiles », accusation pour laquelle il reçu une peine de dix ans de prison, « insultes au caractère sacré de la religion » pour laquelle il reçu une peine de cinq ans d’emprisonnement, ainsi que « diffusion de propagande contre le régime et en faveur de groupes contre- révolutionnaires » et « création et gestion de sites vulgaires et immoraux », accusations lui ayant valu le reste de sa très sévère peine de 19 ans et demi d’emprisonnement. Son appel n’aurait pas été en sa faveur.

Hossein Derakhshan bénéficie de la double nationalité canadienne et iranienne et s’est rendu en Israël (ce qui constitue un crime en Iran83). Il a rédigé la plus grande partie des contenus de son blog à l’extérieur du pays. Il a été arrêté à son domicile familial le 1er novembre 2008, peu après être retourné en Iran pour rendre visite à sa famille. Toute assistance consulaire lui a été refusée malgré sa double nationalité, car les autorités iraniennes ne la reconnaissent pas. Il a été détenu sans accusation pendant environ 19 mois avant son procès, pendant lesquels on lui a refusé de communiquer avec son avocat et de recevoir des visites régulières de sa famille.

Un autre blogueur, Hossein Ronaghi Maleki (voir la partie 3.2 ci-dessus), a été arrêté le 13 décembre 2009 et purge en ce moment une peine de prison de 15 ans. Cette peine inclut 10 années pour « appartenance au groupe Internet [illégal] Iran Proxy », et une peine inférieure pour « diffusion de propagande contre le régime », « outrage au Guide suprême », et « outrage au président ». Il n’a pas bénéficié d’un procès équitable et n’a pas eu accès à un avocat pour le défendre. Il a déclaré au juge qu’il avait été torturé lors de sa détention provisoire, et le juge aurait répondu qu’il « l’avait mérité ». Il est en mauvaise santé.

En septembre 2011, Somayeh Tohidlou, une blogueuse et militante de l’opposition connue, a reçu 50 coups de fouet pour avoir « outrage au président ». Par la suite, elle a posté un message sur son blog adressé aux personnes qui ont appliqué cette peine. Elle y explique qu’on lui a enchainé les mains et les pieds avant de la fouetter, et déclare : « Soyez satisfaits, car si vous vouliez m’humilier, mon corps entier brûle d’humiliation84 ».

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FAIRE DE LA LUMIERE SUR LES PRISONS IRANIENNES PHOTOGRAPHIES DE CERTAINS DES DETENUS ET DES PRISONNIERS QUI SONT PRESENTES DANS CE RAPPORT.

1. Nasrin Sotoudeh, avoca te verdict en prison après une spécialisée dans la déf ense des révision de son procès . Il a été droits humains et mère de deux condamné à mort pour apostasie enfants, purge en ce mom ent en octobre 2010.© DR une peine de prison de six ans 3. Reza Shahabi, trésorier du qui lui a été imposée en raison syndicat des chauffeurs de bu s de son travail de défen se légale. de Téhéran, est déten u depuis Elle est également s oumise à juin 2010 à la prison d’E vin une interdiction d’exercer le située à Téhéran. Son état de droit et de quitter le p ays pour santé est déplorable et il a mené une durée de di x ans.© plusieurs grèves de la faim pour Payvand.com protester contre le tr aitement 2. Yousef Naderkhani, chrétien médical inapproprié qu’il a converti et pasteur dans une reçu.© DR église évangélique, attend un

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4. Rozita Vaseghi, membre d e la 8. Ahmad Z eidabadi, journaliste et communauté religieuse baha’ie, porte-parole de l’ Association purge actuellement deux peines de iranienne des diplômés, purge prison d’un t otal de 10 ans dans la actuellement les s ix ans de pr ison prison de Vakilabad, à Mashhad, auxquels il a été condam né dans l a dans le nord-est de l’Iran.© DR prison de Rejai Shahr, située dans la 5. L’étudiant Ziaoddin (Zia) Nabavi ville de Karaj dans le nord de l’Iran. purge une peine de 1 0 ans de Il a auss i été condamné à cinq ans prison. Il a é té poursuivi pour avoir d’exil intérieur dans la ville de exercé pacifiquement ses droits à la Gonabad dans le n ord-est de l’Iran liberté d’expression et d’association, et est sous le coup d’une interdiction y compris dans le cadre de ses de toute forme d’activité politique et activités pour le Conseil de défense sociale.© www.kosoof.com du droit à l'éducation.© DR 9. Parastou Dokouhaki, chercheuse 6.Javid Houtan Kiyan, avocat. Il est et militante pour les droits des emprisonné à Tabriz, da ns le nor d- femmes. Elle a ét é arrêtée pendant ouest de l’Iran, apparemment pour une vague d’arrestations avant les des accusations relatives à sa élections parlementaires, au début défense de Sakineh Mohammadi de l’année 2012.© www.kosoof.com Ashtiani, une femme condamnée à 10. Mohammad Sadiq Kabudvand, mort par lapidation.© DR défenseur des droits humains kurde, 7. Sept dir igeants de la minor ité purge une peine d’un tot al de p lus baha’ie d’Iran purgent ac tuellement de 10 ans. Il a de gra ves problèmes des peines de 20 ans de pr ison, de santé pour l esquels il n’a pas imposées pour leu r activités reçu de soin s médicaux adaptés.© pacifiques au nom de la DR communauté baha’ie.© DR

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11. Fereshteh Shirazi, militante pour © Kaveh Kermanshahi les droits des femmes et mère de 15. Abolfazl Abedini Nasr, deux enfants, purge actuellement journaliste freelance et militant des une peine de deux ans et sera it droits humains, arrêté peu de temps détenue dans de mauvaises après les élections p résidentielles conditions dans la prison d’Amol, au iraniennes controversées de jui n nord de l’Iran.© DR 2009. Il purge une peine de 12 ans 12.Abdolfattah Soltani, avocat et de prison à la pr ison d’Evin, à membre fondateur du Centre de Téhéran. © DR défense des droits humains, a été 16. Mahboubeh Karami purge une arrêté le 10 se ptembre 2011 et est peine de trois ans de prison qui lui a actuellement détenu à l a prison été imposée en ra ison de sa d’Evin située à Téh éran dans mobilisation pacifique pour l’attente de l’issue de son procès.© améliorer les droits d es femmes.© DR Campaign for Equality 13. Said Metinpour, journaliste et 17. Heshmatollah Tabarzadi, membre de la minorité azérie, purge secrétaire général du parti interdit, actuellement une pei ne de huit ans le Front pour un Iran démocratique, de prison qu i lui a ét é imposée en purge une peine de ne uf ans de raison de sa défense pacifique des prison.© komitedefa.com droits de la communauté azérie en 18. Ronak Safazadeh, membre de la Iran.© DR minorité kurde d’Iran et de la 14. Kouhyar Goudarzi , membre du « Campagne pour l’ égalité » qui se Comité des reporters des droits bat pour l ’égalité hommes-femmes humains, raccompagné chez lui par dans le droit iranien, purge une sa mère Parvin Mokhtare après sa peine de six ans à la prison libération à l’issu e d’une période de Sanandaj, dans la province du détention antérieure, en 2010. Tous Kurdistan, dans le nord-ouest de les deux ont été arrêtés mi-2011. l’Iran.© Campaign for Equality

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19. La militante pour les droits étudiants islamiques, purge une des femmes, Behareh Hedayat, peine de n euf ans à la prison purge une peine de prison de 10 d’Evin, à Téhéran.© DR ans, qui lui a été imposée en 21. L’avocat Mohammad raison de ses activités Seyfzadeh, membre fondateur pacifiques d’étudiante et de du Centre de défense des droits militante pour les droits humains, purge une peine de humains.© Amin Ahmadian deux ans à la prison d’Evin, à 20. Majid Tavakkoli, membre et Téhéran.© Radio Zamaneh dirigeant de l’Associa tion des

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4.7 JOURNALISTES

Les journalistes qui expriment des opinions contraires à celles des autorités sont persécutés de longue date. Ces dernières années, des dizaines d'entre eux ont été harcelés, arrêtés et emprisonnés au terme de procès iniques. Les journalistes continuent de risquer de faire l’objet de mauvais traitements et d’actes de torture85.

Selon certaines informations, Faranak Farid, journaliste et militante des droits des femmes, aurait été violemment battue après son arrestation le 3 septembre à Tabriz au cours des grandes manifestations contre le dessèchement du lac Oroumieh dans le nord-ouest de l'Iran. Elle en est sortie avec un bras bloqué et a perdu temporairement l’audition d’une oreille. Faranak Farid a été interrogée pendant de nombreuses heures dans un centre de détention de Tabriz. Ses lunettes lui ont été enlevées et elle a été forcée de signer un document qu'elle ne pouvait pas lire. Il se pourrait qu'elle soit accusée d’« outrage au Guide suprême », de « diffusion de propagande contre le régime » et d’« atteinte à la sécurité nationale ». Elle a été libérée sous caution en octobre 2011, mais court toujours le risque de retourner en prison si elle est jugée et reconnue coupable desdits chefs d'accusation. Son procès s'est tenu le 21 février 2012.

Bon nombre de journalistes arrêtés à cause des activités professionnelles non violentes qu'ils ont menées pendant la période ayant précédé et suivi les élections de juin 2009 sont toujours en détention.

Isa Saharkhiz, âgé de 53 ans environ, a été détenu pendant plus de 11 mois sans inculpation ni procès avant d'être condamné, en septembre 2010, à trois ans d'emprisonnement pour « outrage aux dirigeants du pays » et « propagande contre le régime ». Avant son arrestation et en plus de son travail de journaliste, Isa Saharkhiz avait joué un rôle actif dans la campagne électorale de Mehdi Karroubi. Il a été transféré à la prison de Reja'i Shahr, à Karaj, en mai 2010, ce que sa famille considère comme étant une forme de châtiment.

Son état de santé s'est notablement dégradé en raison des sévères conditions de détention de la prison de Reja'i Sharh, et il s'est aggravé encore du fait qu'il ne peut recevoir les soins médicaux appropriés. Isa Saharkhiz avait été passé à tabac au moment de son arrestation en juillet 2009 et, selon certaines informations, sa santé était des plus mauvaises à la fin de 2010 et il a dû subir une intervention chirurgicale pour cause d'hémorragie interne. Il lui a fallu recevoir à nouveau des soins médicaux après la grève de la faim qu'il a menée avec plusieurs autres prisonniers pour protester contre le décès des prisonniers d'opinion et Hoda Saber en mai 201186. En août 2011, Isa Saharkhiz a été condamné à une peine de deux années d'emprisonnement supplémentaires du fait de ses activités de journaliste avant son incarcération. Il a fait appel de cette condamnation ainsi que du verdict87. Haleh Sahabi, militante des droits des femmes et membre de l'organisation des Mères pour la paix est décédée après qu'elle aurait été frappée par un membre des forces de sécurité, le 1er juin 2011, au cours des obsèques de son père, , ancien parlementaire et dirigeant de l'Alliance nationale religieuse (Melli Mazhabi). Elle avait obtenu une permission de sortie pour pouvoir assister à l'enterrement, car elle avait été condamnée à deux ans de prison pour avoir participé pacifiquement à une manifestation en 2009. Hoda

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Saber, prisonnier d'opinion et membre de l'Alliance nationale religieuse, a succombé en prison à une attaque cardiaque le 10 juin 2011 après une grève de la faim menée pour protester contre le décès de Haleh Sahabi. D'après une lettre signé par une soixantaine de ses codétenus, il a été battu et privé de traitement médical approprié avant son décès88.

Ahmad Zeidabadi, âgé de 46 ans environ, journaliste pour Roozonline, une publication en ligne établie en Belgique, et secrétaire général de l'Association des diplômés, qui encourage les réformes et un plus grand respect des droits humains, purge actuellement une peine de six années de détention à la prison de Reja'i Shahr.

Ahmad Zeidabadi a été détenu au secret dans une cellule de la prison d'Evin de 1,5 mètre de long pendant 35 jours, soit depuis le moment de son arrestation jusqu'à celui de son apparition le 8 août 2009 dans un procès collectif « pour l'exemple ». En signe de protestation, il a fait une grève de la faim pendant 17 jours, jusqu'à ce que les médecins le convainquent d'y mettre fin. Il aurait, en outre, été passé à tabac et menacé pendant ses interrogatoires. Il a été condamné en décembre 2009 à six années d'emprisonnement et à cinq années d'exil intérieur, avec interdiction à vie d'exercer toute activité sociale et politique, suite à sa condamnation pour « diffusion de propagande contre le régime » et pour avoir « suscité un malaise dans l'esprit de la population ».

Sa peine a été confirmée en appel en janvier 2010. En mai 2011, il a reçu le Prix mondial de la liberté de la presse UNESCO/Guillermo Cano en reconnaissance de son éminente contribution à la liberté de la presse en Iran, quoiqu'il lui en eut coûté personnellement.

Des tentatives pour entraver la liberté d' expression se poursuivent sous forme d'attaques contre des journalistes, même lorsque ceux-ci sont en prison.

Abdollah Momeni, journaliste et porte-parole de l'Association des diplômés, est aussi apparu dans un « procès pour l'exemple » en août 2009. Il a été condamné à une peine de six années d'emprisonnement en novembre 2009, et un sursis précédent a été révoqué, ajoutant deux années à la peine. En mai 2010, cette peine a été ramenée en appel à quatre ans et 11 mois.

En août 2011, cependant, il aurait été inculpé à nouveau pour « diffusion de propagande contre le régime » et avoir « suscité un malaise dans l'esprit de la population », à la suite de la publication d'une lettre ouverte adressée au Guide suprême en septembre 2010. Il y décrivait son arrestation et son interrogatoire pendant lequel il avait reçu des gaz lacrymogènes, été roué de coups et détenu à l’isolement dans une cellule sale et de dimensions extrêmement réduites. Il décrivait encore comment il avait reçu des menaces contre lui-même et sa famille, comment il avait eu la tête plongée de force dans la cuvette sale des toilettes et avait dû ingurgiter des excréments, et comment il avait été forcé à manger ses imprimés d'interrogatoire pendant le jeûne du ramadan89.

Abdollah Momeni faisait aussi partie du groupe des 26 prisonniers politiques, comprenant des prisonniers d'opinion, qui avait écrit en mai 2011 une lettre ouverte au comité chargé de vérifier l'application de la Loi relative au respect des libertés légitimes et à la protection des droits des citoyens90. Les signataires demandaient qu'une enquête soit menée sur les nombreuses violations,

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constatées depuis l'élection de 2009, de tous les droits protégés aux termes de la loi qu'ils décrivaient91..

En janvier 2012, selon certaines informations, Abdollah Momeni aurait été emmené au service médical de la prison d'Evin pour des maux d'estomac, et le personnel l'y aurait agressé et injurié92.

Bahman Ahmadi Amou'i , rédacteur en chef du quotidien économique Sarmayeh, a également été arrêté à la suite des élections de juin 2009. Un tribunal révolutionnaire de Téhéran l'a condamné, en janvier 2010, à sept ans et quatre mois de détention ainsi qu'à 32 coups de fouet. La peine comprend cinq années pour « collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale », une année pour « diffusion de propagande contre le régime », une année et 32 coups de fouet pour « troubles à l'ordre public » et quatre mois pour « outrage au président ». La peine a été ramenée en appel à cinq années. Il a été temporairement libéré après versement d'une forte caution, mais il a réintégré fin mai 2010 la prison d'Evin, où il se trouve toujours. Les autorités ont fermé Sarmayeh en novembre 2009 et, en décembre 2011, le prisonnier a adressé une lettre ouverte aux parlementaires iraniens dans laquelle il déclarait avoir passé au moins 90 jours à l’isolement cellulaire93.

Une nouvelle vague d'arrestations d'écrivains, de journalistes, de blogueurs et de membres de familles de journalistes iraniens à l'étranger était en cours au moment de la rédaction de ce rapport94. Il semblerait que ces arrestations visent à étouffer les voix critiques qui pourraient s'élever avant les élections parlementaires en Iran en mars 2012. Parmi les détenus figurent Esmail Jafari, journaliste et blogueur spécialisé en droits humains et droit du travail ; Fatemeh Kheradmand, écrivain sur des questions sociales ; Ehsan Houshmand (ou Houshmandzadeh), sociologue et membre de la minorité kurde d'Iran, qui écrit sur les minorités ethniques d'Iran ; Saeed Madani, sociologue, militant politique et membre de l'Alliance nationale religieuse ; Mehdi Khazali, fils de l'ayatollah Abolghasem Khazali, membre du Conseil des gardiens ; Parastou Dokouhaki, chercheuse en questions sociales et culturelles et militante pour les droits des femmes ; Peyman Pakmehr, rédacteur en chef du site Tabri News ; la journaliste Marzieh Rasouli ; Sahamoddin Bourghani, qui écrit pour le site d'informations Irdilomacy ; Said Razavi Faghih, ancien dirigeant étudiant et journaliste, arrêté en Iran à l'aéroport à son retour de Paris ; le journaliste Shahram Manouchehri ; et Mohammad Soleymaninia (ou Soleymani Nia). Certains d'entre eux avaient été relâchés au moment de la rédaction de ce rapport.

4.8 DIRIGEANTS POLITIQUES ET MILITANTS

En février 2011, les autorités ont arrêté des centaines de personnes, dont des militants politiques pour les empêcher de participer à des manifestations de soutien en faveur des mouvements de protestation de Tunisie et d'Égypte. Malgré l'absence d'autorisation, des manifestations se sont quand même tenues dans plusieurs villes, dont Téhéran, Isfahan, Kermanshah et Chiraz. Les forces de sécurité les ont été violemment dispersées et ont procédé à de nombreuses arrestations et tué au moins deux personnes, Sane’ Zhaled, 26 ans, et Mohammad Mokhtari, 22 ans.

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 49 La répression croissante de la dissidence en Iran

Si la plupart des personnes arrêtées semblent avoir été relâchées, certaines ont été condamnées au terme de procès iniques à des peines de prison. Ramin Parchanmi, acteur de télévision renommé, a ainsi été arrêté le 14 février à Téhéran alors qu'il filmait les manifestations. Il a ensuite été reconnu coupable de « participation à un rassemblement illégal » et « troubles à l'ordre public », et condamné à un an de prison.

Mehdi Karroubi et Mir Hossein Mousavi, dirigeants de l'opposition et anciens candidats à la présidence, ont été de facto assignés à résidence avec leurs épouses, peu après avoir demandé l'autorisation d'organiser les manifestations ; cette mesure était toujours en vigueur au moment de la rédaction de ces lignes. Les autorités n'ont pas tenté de les inculper de quelque chef que ce soit, et la décision de les garder assignés à résidence semble être du ressort du Guide suprême.

L'assignation à résidence de facto de Fatemeh Karroubi a pris fin en juillet 2011, lorsque son mari a quitté le domicile du foyer pour emménager dans un appartement relevant du contrôle du ministère du Renseignement95. Mehdi Karroubi a dit à sa femme, à l’occasion d’une visite qu’elle lui a rendue fin décembre, qu'il considérait les élections comme étant une « imposture » et qu'il n'y avait aucune raison d'y participer. Les visites de sa famille lui ont été alors interdites et ce jusqu'en février 2012, date de la rédaction du présent rapport96.

En janvier 2012, un groupe de 39 prisonniers politiques, dont de nombreux prisonniers d'opinion, ont demandé la remise en liberté immédiate et inconditionnelle des deux dirigeants politiques97. Les signataires comprenaient bon nombre des personnes évoquées dans le présent rapport.

Des proches de Mehdi Karroubi, de Mir Hossein Mousavi et d'autres dirigeants de l'opposition politique ont été détenus plusieurs semaines début 2011 avant d'être relâchés, le plus souvent contre le versement d'importantes cautions. Parmi eux se trouvaient Taghi Rahmani, conseiller de Medhi Karroubi lors de l'élection présidentielle de 2009, ainsi que deux proches collaborateurs de Mir Hossein Mousavi détenus pendant plusieurs semaines, Sayed Sadreddin Beheshti et Mohammad-Hossein Sharif-Zadegan. Ce dernier a été libéré sous caution 50 jours après son arrestation.

Fariba Ebtehaj, secrétaire et chef de cabinet de Massoumeh Ebtekar, ancien directeur de l'Organisation iranienne de protection de l'environnement et autrefois vice-président et conseiller de l'ancien président , a lui aussi été détenu pendant plusieurs semaines.

Avant les manifestations de février 2011, certains partis politiques tels que le Front de participation islamique iranien (FPII), l'Organisation des moudjahidin de la révolution islamique (OMRI) et le Parti de la confiance nationale avaient été interdits après les élections de 2009. Cette interdiction est toujours en vigueur et d'autres militants politiques ont été arrêtés depuis lors uniquement en raison de leurs activités politiques pacifiques.

Mohammad Tavassoli, directeur du bureau politique du Mouvement de la liberté, interdit, a été arrêté en novembre 2011, en raison d’une lettre envoyée le mois précédent par 143 militants politiques à l'ancien président Khatami pour l'alerter sur le fait que les élections parlementaires à venir ne seraient ni libres

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ni régulières.

Emad Bahavar, responsable de la branche de jeunesse du parti, purge actuellement une peine de 10 ans à la Section 350 de la prison d'Evin. Il a été condamné en décembre 2010 pour « appartenance au Mouvement de la liberté », « rassemblement et collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale », « diffusion de propagande contre le régime », et « outrage au Guide suprême ». Toute activité médiatique et politique lui a aussi été interdite pendant 10 ans.

L'ancien dirigeant du Mouvement de la liberté, l'octogénaire Ebrahim Yazdi qui est atteint d'un cancer de la prostate, a été condamné à huit ans de prison en décembre 2011. Après son arrestation, en octobre 2010, lors de funérailles célébrées dans une maison particulière d'Ispahan, il a été détenu d'abord à la prison d'Evin puis dans un « centre d’accueil » du ministère du Renseignement, à Téhéran. Il a été libéré sous caution en mars 2011 et a démissionné de son poste de dirigeant du parti. Au moment de la rédaction du présent rapport, il était en liberté dans l'attente du résultat de l'appel de son inculpation et de sa condamnation.

D'éminents opposants politiques, comme Behzad Nabavi, ancien adjoint au ministre, parlementaire et membre fondateur de l'OMRI, étaient toujours en détention au moment de la rédaction du présent rapport. Relâché provisoirement le 16 mars 2010, Behzad Nabavi est retourné en prison fin mai 2010 pour purger le reste de sa peine de cinq ans. Reconnu coupable en novembre 2009, il avait été condamné pour « atteinte à la sécurité de l’État » et « diffusion de propagande contre le régime » à six ans de prison, ramenés en appel à cinq ans après qu'il avait été acquitté de ce dernier chef d'accusation.

Heshmatollah Tabarzadi, 53 ou 54 ans, secrétaire général du Front pour un Iran démocratique, parti interdit par les autorités, purge une peine de neuf ans de prison infligée après son arrestation chez lui à Téhéran en décembre 2009, à la suite des manifestations d'Achoura de la même année. Il a été inculpé pour « outrage au Guide suprême », « diffusion de propagande contre le régime », « rassemblement et collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale », « outrage au président » et « troubles à l'ordre public », et condamné en outre à recevoir 74 coups de fouet. Son arrestation pourrait être due à certains de ses articles et interviews critiquant les autorités et publiés avant et pendant les troubles d'Achoura.

Plusieurs membres du Parti pan-iraniste, interdit, ont été arrêtés en 2011. Hojjat Kalashi, responsable de la branche de jeunesse, et Milad Dehghan, l'un des membres, ont été arrêtés dans la province du Khuzestan en janvier 2011, mais relâchés par la suite. Ils figurent parmi les 10 membres du parti qui auraient été arrêtés au Khuzestan en juin 2011. Reza Kermani, 77 ans, autre membre du parti, a écopé d’une peine d'un an en février 2011, sous l'inculpation d’« atteinte à la sécurité de l’État ». Reza Kermani, qui a de graves problèmes de santé nécessitant des soins médicaux, a commencé à purger sa peine en août 2011.

Ces militants politiques arrêtés depuis 2009 ont rejoint d'autres militants politiques emprisonnés depuis des années. Certains ont été aussi sanctionnés pour leurs activités à l'intérieur de la prison. C'est ainsi qu'Arzhang Davoudi,

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 51 La répression croissante de la dissidence en Iran

directeur du Centre d'éducation culturelle Parto-e Hekmat, à Téhéran, est détenu depuis son arrestation en 2003, car il avait accordé une interview pour un documentaire de télévision filmé illégalement intitulé Forbidden Iran, où il parlait de la situation critique d'alors des prisonniers politiques ainsi que de la mort en détention de Zahra Kazemi, un photojournaliste irano-canadien. Arzhang Davoudi a été détenu au secret pendant trois mois, période au cours de laquelle il a subi des tortures qui lui ont notamment valu des fractures de l’omoplate et de la mâchoire, plusieurs dents cassées ainsi qu’un saignement à l’œil gauche et ont provoqué une surdité. Il a été par la suite condamné à 15 ans de prison sur la base des accusations reposant sur sa participation au documentaire, son rôle dans la création du Mouvement iranien de libération et le « Manifeste pour un Iran laïc » qu'il avait écrit. En 2011, il a été condamné à 14 mois supplémentaires de prison pour « diffusion de propagande contre le régime », « outrage à divers représentants de l'État » et « avoir suscité un malaise dans l'esprit de la population », à cause de déclarations faites depuis sa prison. Sa maison a été confisquée et vendue.

4.9 LES SYNDICALISTES Les syndicats indépendants sont interdits en Iran. Cependant, il existe un petit nombre de syndicats indépendants et d’organisations de soutien aux travailleurs. Leurs membres luttent contre le retrait des subventions, les salaires impayés et les conditions de travail précaires et ils contestent une révision du Code du travail car ils estiment qu’elle aggravera les conditions de travail en Iran. Les chauffeurs de bus et les métallurgistes à Téhéran, les boulangers de la province du Kurdistan, les ouvriers des sucreries au Khuzestan et les enseignants dans tout le pays comptent parmi les plus décidés à lutter pour leurs droits. Sans exception, leurs activités syndicales leur font courir de grands risques98.

Rasoul Bodaghi, membre du Syndicat des enseignants iraniens à Téhéran, et exerçant sa profession depuis 20 ans, a été arrêté en septembre 2009. Il a été condamné pour « diffusion de propagande contre le régime » et « rassemblement et collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale » ; il purge actuellement une peine de six ans. En janvier 2011, une cour d'appel a confirmé la peine de Rasoul Bodaghi et lui a interdit de prendre part à une quelconque activité de la société civile pendant cinq ans. Les membres du Syndicat des enseignants iraniens subissent arrestations et persécutions depuis des années.

Un certain nombre de membres du syndicat des chauffeurs de bus de Téhéran (Sherkat-e-Vahed) ont été condamnés à des peines d’emprisonnement en raison de leurs activités syndicales non violentes. Le président adjoint du Syndicat des travailleurs de la régie des bus de Téhéran, Ebrahim Madadi, purge actuellement une peine de trois ans et demi de prison pour ses agissements présumés « contre la sécurité nationale ». Il a été libéré temporairement pour quelques jours seulement, juste avant l’ouverture de la 15ème réunion régionale de l'Asie et du Pacifique de l’Organisation internationale du travail (OIT) qui se tenait à Tokyo au Japon, le 4 décembre 2011 mais il a été renvoyé en prison le jour même de la clôture de la réunion. Le président du syndicat, Mansour Ossanlu (ou Ossalu), qui purge une peine de cinq ans, a été libéré avant la fin de sa peine en juin 2011, avant l’ouverture de la conférence annuelle de l’OIT à Genève. Il reste en liberté sur la base d’une permission de sortie exceptionnelle .

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Au moment de la rédaction de ce rapport en février 2012, Reza Shahabi, le trésorier du syndicat, attendait le verdict de son procès qui s’est achevé en mai 2011 devant une chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran. Déjà accusé de « diffusion de propagande contre le régime » et de « rassemblement et collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale », selon son avocat, le procureur cherche à ajouter le nouveau chef d’inculpation d’« inimitié à l’égard de Dieu » pour de prétendus contacts avec l’Organisation iranienne des moudjahidin du peuple. Détenu depuis juin 2010, il est toujours dans la section 209 de la prison d’Evin ; il est en mauvaise santé et a mené des grèves de la faim pour protester contre l’absence de soins médicaux dont il est victime.

D’autres membres du syndicat contestent l’interdiction de travailler comme chauffeurs de bus qui leur a été imposée en lien avec leurs activités syndicales.

De la même façon, des dirigeants et membres du syndicat de l'entreprise agroalimentaire sucrière Haft Tapeh ont fait l’objet d‘arrestations et de persécutions pour leurs activités non violentes. Ali Nejati, ancien président du syndicat, a commencé à purger une peine de prison d’un an en novembre 2011. Il a été temporairement libéré en décembre pour raisons médicales et on pense qu’il était libre au moment de la rédaction de ce rapport. Son épouse, Shahnaz Nejati, a été détenue pendant 24 heures fin novembre 2011 pour des raisons inconnues.

D’autres personnes qui œuvrent pour créer des syndicats indépendants en Iran sont aussi ciblées. Au moins cinq membres du Comité pour la création d’organisations de travailleurs ont été arrêtés depuis juin 2010. Behnam Ebrahimzadeh, ouvrier dans une usine qui fabrique des tubes en polyéthylène aurait eu deux côtes fracturées suite aux coups infligés lors de son arrestation en juin 2010. Il a été d’abord condamné à une peine de 20 ans d’emprisonnement en décembre 2010 après avoir été reconnu coupable de « inimitié à l’égard de Dieu » en raison de ses prétendus contacts avec un groupe d’opposition interdit non identifié. Ce verdict a été annulé par la Cour suprême et il a été condamné à cinq ans de prison suite à un nouveau procès où il a été reconnu coupable de « rassemblement et collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale », condamnation confirmée en appel en octobre 2011.

Ayat Niafar, le porte-parole du Comité, a été arrêté en octobre 2011 et libéré sous caution. À Tabriz, un autre membre du Comité, le peintre et décorateur Shahrokh Zamani et quatre autres militants pour les droits du travail, Nima Pour Yaghoub, Sassan Vahebivash, Mohammad Jarahi et Sayed Boyuk Sayedlar – ont tous été arrêtés en juin 2011 et libérés sous caution.

En août 2011, la 1ère chambre du tribunal révolutionnaire de Tabriz a condamné Shahrokh Zamani à 11 ans, Nima Pour Yaghoub à 6 ans, Mohammad Jarahi à 5 ans et Sassan Vahebivash à six mois d’emprisonnement après les avoir reconnus coupables notamment d’« action contre la sécurité nationale en créant ou en étant membre de groupes opposés au système » et « diffusion de propagande contre le régime ». Sayed Boyuk Sayedlar a été acquitté. Les peines ont été confirmées en appel en novembre 2011. Shahrokh Zamani a été arrêté mi-janvier 2012.

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En novembre 2011, il a été notifié à deux membres du comité directeur de l’Union des travailleurs libres d'Iran (Free Workers of Iran Union), Sheis Amani et Sedigh Karimi, qu’ils devaient reprendre leur peine de 30 mois d’emprisonnement. Arrêtés pendant une manifestation à l’occasion de la Journée mondiale du travail, le 1er mai 2008, à Sanandaj, la capitale de la province du Kurdistan, ils avaient été libérés sous caution au bout de 42 jours et jugés ultérieurement.

4.10 ÉTUDIANTS ET UNIVERSITAIRES

Depuis 2009, des professeurs d’université ont été renvoyés ou mis à la retraite d’office et des plans ont été élaborés pour changer les programmes universitaires afin de les rendre plus « islamiques » (voir le paragraphe 2.1 ci- dessus). Par exemple, en mai 2011, il a été rapporté que 150 enseignants expérimentés en administration des entreprises, sociologie, sciences économiques, communication, droit et sciences politiques à l’université Alameh Tabatabei à Téhéran risquaient un renvoi ou une mise à la retraite anticipée99. Depuis 2005, d’autres professeurs avaient été renvoyés. Des universitaires ont été persécutés pour avoir assisté à des conférences à l’étranger et pour leurs relations avec d’autres spécialistes dans leur domaine.

Le professeur d’université, avocat et ancien député Ghasem Sholeh Saadi a été arrêté en avril 2011 pour purger une peine de 18 mois d’emprisonnement infligée en 2006 en lien avec des accusations résultant d’une lettre ouverte critique qu’il avait écrite au Guide suprême en 2002100. Après son arrestation, Ghasem Sholeh Saadi a été également informé qu’une peine d’un an supplémentaire avait été prononcée contre lui, ainsi qu’une interdiction d’enseigner pendant 10 ans et une interdiction de pratiquer le droit pendant 10 ans, apparemment infligées en raison d’entretiens qu’il avait accordés à des médias étrangers. Selon certaines informations, il a été jugé à nouveau le 17 septembre 2011 par un tribunal révolutionnaire qui l’a reconnu coupable d’« outrage au Guide suprême »101 et condamné à une peine supplémentaire de deux ans d’emprisonnement102.

Le 30 janvier 2011, Omid Kokabee, un jeune homme de 28 ans appartenant à l’ethnie turkmène, étudiant en post-doctorat en physique expérimentale à l’université du Texas qui avait auparavant étudié à Barcelone, a été arrêté alors qu’il attendait pour quitter le pays après avoir rendu visite à sa famille. Détenu à l’isolement pendant 36 jours dans la section 209 de la prison d’Evin, il a écrit dans une lettre au responsable du pouvoir judiciaire en juillet 2011 qu’il avait été forcé à signer de faux aveux. Dans sa lettre, il déclarait : « On m’a fréquemment menacé d’arrêter les professeurs d’université en Iran qui m’avaient invité à travailler avec eux sur leurs recherches et avec qui j’avais des intérêts scientifiques communs. On m’a menacé de me remettre à des personnes qui m’interrogeraient de manière plus dure, en me torturant et en me soumettant à des violences physiques, en me privant de nourriture, d’accès aux toilettes et de contact avec le monde extérieur. Ceux qui m’interrogeaient m’ont répété maintes fois que mon père qui n’était pas encore complètement remis d’une opération à cœur ouvert, avait eu une attaque cardiaque à cause de mon arrestation et était hospitalisé. Ils m’ont dit qu’ils me garderaient en détention et à l’isolement, complètement coupé de ma famille jusqu’à ce que mon père meure des conséquences de ces pressions et que je ne le reverrais jamais.

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Ils m’ont dit que ma sœur souffrait aussi de problèmes cardiaques et qu’elle allait mal parce qu’elle subissait une forte pression mentale à cause de mon affaire103. »

Durant les interrogatoires, on lui aurait fait écrire des informations détaillées sur les personnes qu’il avait vues dans les ambassades ou lors de conférences et ceux qui l’interrogeaient lui auraient dit que certaines des personnes rencontrées étaient des agents de la CIA. Dans une lettre, il a également déclaré qu’il avait été contraint d’écrire des réponses à des questions qu’on lui avait posées oralement en laissant des blancs sur le document où les questions seraient ajoutées ultérieurement. Une deuxième lettre a été rendue publique le 10 janvier 2012104. Il y dénonçait l’absence de procès équitable, les pressions exercées sur sa famille et la montée des pressions exercées sur lui depuis sa première lettre.

Son procès, semble-t-il pour « contact avec des pays "hostiles" et réception de "paiements illicites" » a débuté en octobre 2011. Son avocat n’a pas pu le rencontrer depuis son arrestation et n’a pas eu accès au dossier.

Le docteur Rahman Ghahremanpour, directeur du Groupe de recherche sur le désarmement au sein du Centre pour la recherche stratégique (CSR), groupe de réflexion rattaché au Conseil de discernement, a été arrêté en juin 2011, environ au même moment que trois universitaires turcs qui s’étaient rendus en Iran pour assister à un séminaire intitulé « Iran, Turquie et Printemps arabe ». Les universitaires turcs ont été libérés au bout de 13 jours de détention, mais au moment de la rédaction du rapport, Rahman Ghahremanpour était toujours en détention, apparemment sans inculpation ni jugement, peut-être en raison d’accusations d’espionnage. Il avait assisté à des ateliers organisés par un professeur turc sur les élections libres et justes et il avait participé à un groupe d’étude en visite aux États-Unis pour observer les élections.

Le docteur Mohammad Maleki, 78 ans, est l’ancien recteur de l’université de Téhéran et membre fondateur d’une organisation de défense des droits humains. Il souffre d’un cancer de la prostate. Il a été convoqué en janvier 2012 pour commencer à purger une peine de prison d’un an qui lui avait été infligée lorsqu’il a été reconnu coupable de « diffusion de propagande contre le régime ». Il avait été arrêté en août 2009 après avoir refusé de voter et ensuite critiqué le déroulement des élections présidentielles de 2009. Il avait été détenu pendant plus de six mois avant d’être libéré sous caution. En septembre 2011, il a écrit au Rapporteur spécial de l’ONU sur l’Iran, Ahmed Shaheed, décrivant en détail comment il avait été traité en prison. Il a ensuite été interrogé et on lui a interdit de voyager à l’étranger105.

Les étudiants militants qui ont exprimé des opinions contre le gouvernement ou ses politiques ont fait l’objet d’actes de harcèlement, d’arrestations et d’interdictions de poursuite d’études, de manière temporaire et permanente. Certains purgent encore de longues peines qui leur ont été infligées à l’issue de procès non équitables avant et depuis juin 2009. Certains ont été condamnés à la flagellation, une peine constituant un traitement cruel, inhumain et dégradant. En septembre 2011, Peyman Aref, un étudiant militant, a reçu 74 coups de fouet après avoir été reconnu coupable d’ « outrage au président ».

Peyman Aref a été libéré le 10 octobre 2011 au terme de sa peine d’un an de

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prison après l’infliction de sa peine de flagellation. Cependant le 30 octobre 2011, il a été à nouveau arrêté en compagnie de deux femmes alors qu’ils se rendaient sur la tombe de Neda Agha Soltan, une femme tuée au cours des manifestations urbaines de 2009. Il a été conduit à la prison d’Evin, où il a été détenu jusqu’ à sa libération le 12 décembre 2011 suite à ce qui a été rapporté comme un acquittement. Les deux femmes ont été libérées après un jour d’emprisonnement.

L’étudiant Ziaoddin (Zia) Nabavi a été arrêté le 14 juin 2009 peu après avoir participé à une manifestation de masse lors de l’annonce de la victoire électorale du président Ahmadinejad. Il a dit qu’il avait été frappé à coups de poing et de pied, insulté et humilié durant l’interrogatoire qui a suivi. Amnesty International pense qu’il est détenu uniquement en raison de ses activités pacifiques au sein du Conseil de défense du droit à l'éducation, une organisation formée en 2009 par des étudiants à qui il a été interdit de poursuivre leurs études en raison de leurs activités politiques.

En janvier 2010, il a été condamné à 15 ans d’emprisonnement pour « rassemblement et collusion dans l'intention de porter atteinte à la sécurité nationale », « diffusion de propagande contre le régime », « troubles à l’ordre public » et « inimitié à l’égard de Dieu à travers des liens et une coopération avec l’Organisation iranienne des moudjahidin du peuple » ; il doit purger sa peine en exil intérieur à Izeh, dans la province du Khuzestan. Il a aussi été condamné à 74 coups de fouet pour avoir « suscité un malaise dans l’esprit de la population ». En mai 2010, la peine a été réduite en appel à 10 ans sous l’inculpation vague d’« inimitié à l’égard de Dieu » et en septembre 2010, il a été « exilé » à la prison de Karoun, dans la ville d’Ahvaz. Sa peine, particulièrement lourde, semble en partie due au fait que des membres de sa famille sont installés dans les camps tenus par l’Organisation iranienne des moudjahidin du peuple en Irak. Depuis son transfert à Ahvaz, il a fait des révélations sur les conditions de détention extrêmement mauvaises à la prison de Karoun106. Des peines ou des châtiments supplémentaires ont été infligés à un certain nombre de militants étudiants en lien avec les actions qu’ils ont menées pendant qu’ils étaient en détention. Majid Tavakkoli, ainsi que la militante pour les droits des femmes Behareh (aussi Bahareh) Hedayat et Mahdieh Golrou, qui purgent des peines respectivement de huit ans et demi, neuf ans et demi et deux ans pour leurs actions pacifiques en tant qu’étudiants militant pour les droits humains, ont été condamnés en avril 2011 à des peines de prison supplémentaires de six ans pour « diffusion de propagande contre le régime » à cause d’une déclaration à l’occasion de la Journée des étudiants, qu’ils ont écrite conjointement depuis la prison en 2010. Cette déclaration, écrite pour coïncider avec le 16 Azar (7 décembre), anniversaire de la Journée nationale des étudiants, louait les efforts des étudiants iraniens à l’étranger et proclamait que cet anniversaire était une superbe occasion de protéger et de promouvoir le mouvement étudiant. Les peines ont été confirmées en appel en novembre 2011.

Suite à la publication de cette déclaration, Behareh Hedayat a été transférée à « l’aile méthadone » de la prison d’Evin où elle a été interrogée tandis qu’on lui refusait tout contact avec sa famille. Elle a entrepris une grève de la faim pendant une semaine en protestation.

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4.11 PERSONNES LESBIENNES, GAYS, BISEXUELLES ET TRANSGENRES En vertu de la section des Hodoud du Code pénal, les relations sexuelles entre personnes de même sexe sont interdites pour les hommes comme pour les femmes. Les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT) sont d’ores et déjà soumises au harcèlement et à la persécution, au châtiment cruel de la flagellation et risquent même à la peine de mort si elles sont reconnues coupables de relations sexuelles entre personnes de même sexe107. Elles doivent également faire face à l’hostilité de la société qui ne tolère pas les identités sexuelles autres que l’hétérosexualité.

Cette hostilité se reflète au niveau le plus élevé comme le montre la déclaration du président Ahmadinejad à New York en 2007 : « En Iran, il n’y a pas d’homosexuels. » et la réaction du gouvernement iranien face à une question du Comité des droits de l’homme de l’ONU sur la protection des droits des LGBT. Le gouvernement s’est contenté de déclarer que la question était « au-delà du mandat et des sujets englobés par le PIDCP ». Le Comité a rappelé aux autorités iraniennes que la discrimination, les poursuites pénales et le châtiment des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre tombaient clairement dans le champ de compétence du Pacte et il a exhorté les autorités à abolir ou amender toute législation qui autorise ou pourrait entrainer la discrimination, les poursuites pénales et le châtiment des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Le Comité a également exhorté les autorités à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres nécessaires afin d’éliminer et d’interdire la discrimination en raison de l’orientation sexuelle, notamment en ce qui concerne l’accès à l’emploi, au logement, à l’éducation et à la santé, et de garantir que les personnes avec une orientation sexuelle ou une identité de genre différentes soient protégées contre la violence et l’exclusion sociale dans la communauté108.

Amnesty International craint que de nouvelles mesures pour surveiller Internet ne renforcent la surveillance des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres en Iran, entraînant encore davantage de persécutions.

« Un jour, [mon fils] a dit quelque chose qui m’a brisé le cœur. Il a dit "Je commence à oubli er à q uoi ressemble mon père. Dernièrement, quand je rêve de lui, je n’arrive plus à voir son visage" ». Farzaneh Mirvand, épouse de Siyamak Ghaderi109.

Siyamak Ghaderi, ancien journaliste à l’agence de presse d’État, a été condamné à quatre ans de prison, à la flagellation et à une amende en janvier 2011 après avoir été reconnu coupable de « publication de fausses nouvelles » et d’« actes illégaux selon la religion »,. La peine a ensuite été confirmée en appel. Les chefs d’accusation étaient en partie liés à des entretiens avec des personnes de la communauté LGBT qu’il avait mis sur son blog après le discours du président Ahmadinejad à New York. Détenu à l’isolement dans la section 209 de la prison d’Evin où il a subi des interrogatoires pendant plus de 30 jours, il a déclaré dans une lettre écrite depuis la prison qu’il avait été frappé, qu’on lui avait mis de force la tête dans des toilettes sales afin qu’il fasse de faux « aveux110. »

Au moins trois hommes ont été exécutés en 2011 suite à leur condamnation

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pour « sodomie ».Trois autres hommes au moins, accusés d’avoir pris part à des relations sexuelles entre hommes, auraient été condamnés à mort. L’un d’eux, qu’Amnesty International ne connaît que sous le nom de « Ehsan » avait moins de 18 ans au moment des faits présumés.

Ehsan a été arrêté en 2008 à l’âge de 17 ans, après qu’un homme a porté plainte contre lui et deux autres jeunes hommes, prétendant qu’ils avaient tenté de le violer. L’homme a ultérieurement retiré son accusation. Ehsan, qui aurait été torturé pendant presque un mois, a « avoué » ce dont il était accusé, mais devant la cour, il a retiré ses « aveux » et a nié toutes les allégations. Il a été reconnu coupable de « sodomie » par le tribunal général de Fars et condamné à mort. La peine de mort a été confirmée par la 13e chambre de la Cour suprême de Téhéran. Quand il a eu 18 ans, il a été transféré du centre de détention pour mineurs à la prison d'Adelabad à Chiraz. Il est toujours emprisonné à Chiraz bien que son avocat ait demandé que son dossier soit examiné par un jury de la Commission des amnisties et des grâces.

En Iran il n’existe pas de définition d’infraction distincte pour le viol masculin. L’article 111 du Code pénal dispose que « la sodomie entraine l’exécution, à condition que les deux parties, active et passive, soient adultes, saines d’esprit et consentantes » ce qui induit qu’en l’absence de ces caractéristiques, la personne ne sera pas poursuivie pour « sodomie ». Les militants pour les droits des LGBT pensent que dans certains cas, ceci conduit une des parties à une relation sexuelle consentie à prétendre avoir été violée afin d’échapper à l’exécution.

4.12 MINORITÉS ETHNIQUES ET RELIGIEUSES En dépit des garanties constitutionnelles d’égalité, les minorités ethniques et religieuses – qui sont souvent interconnectées – font face à des discriminations généralisées dans la loi comme en pratique. Celles-ci incluent la confiscation des terres et des biens ; la discrimination à l’embauche et les restrictions des droits sociaux, culturels et linguistiques, y compris l’opportunité d’apprendre correctement leur langue maternelle et son usage dans l’enseignement, une demande que la communauté azérie a fréquemment formulée ces dernières années. Les membres de groupes minoritaires peuvent être désavantagés face au système judiciaire pénal s’ils ne savent pas parler correctement le persan, qui est la langue officielle. Cela est particulièrement vrai pour les femmes issues du milieu rural, car elles sont souvent moins bien instruites que les femmes vivant en ville. Les libertés religieuses sont également restreintes : les prières communales font l’objet de restrictions pour les musulmans sunnites, de même que la construction de mosquées dans les grandes villes. Au moins un mausolée de la communauté religieuse Ahl-e Haq aurait été détruit en 2011 par des fonctionnaires iraniens, qui auraient également empêché les fidèles de le reconstruire111.

La persécution des minorités religieuses, y compris les convertis au christianisme, la communauté baha’is, les dignitaires chiites dissidents et les membres des communautés derviche et Ahl-e Haq, a augmenté depuis les élections présidentielles de 2009112. Les non-musulmans, et en particulier la communauté baha’ie, ont été de plus en diabolisés par les autorités iraniennes et dans les médias contrôlés par l’État. En 2011, les appels répétés du Guide suprême et d’autres autorités à combattre les « fausses croyances » – apparemment, il s’agissait d’une allusion au christianisme évangélique, au

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baha’isme et au soufisme – semblent avoir abouti à une recrudescence des persécutions religieuses.

La minorité baha’ie, qui compte entre 300 000 et 350 000 membres, souffre tout particulièrement de la politique de l'État, qui la considère comme une secte « hérétique ». De nombreux articles anti-baha’is ont été publiés, notamment par l’agence de presse nationale, la Islamic Republic News Agency (Agence de presse de la République islamique d'Iran (IRNA), et par d’autres agences ou sites web affiliés au régime ou aux forces de sécurité. Parmi ces autres organes d’information, on peut citer Javan Online, Jahan News, Fars News, l’agence de presse des étudiants iraniens, l’agence de presse coranique d’Iran et l’agence de presse Tabnak.

Fin janvier 2012, plus de 80 baha’is étaient détenus à cause de leurs croyances, parmi lesquels sept représentants dont les peines de 20 ans de prison ont été à nouveau imposées en mars 2011, alors qu’elles avaient été annulées par la décision d’une cour d’appel en 2010. En août 2009, un tribunal révolutionnaire de Téhéran a condamné les sept personnes, Fariba Kamalabadi, Mahvash Sabet, Jamaloddin Khanjani, Afif Naeimi, Saeid Rezaie, Behrouz Tavakkoli et Vahid Tizfahm, sur la base de divers chefs d’inculpation : « espionnage pour Israël », « outrage à des figures religieuses », et « diffusion de propagande contre le régime ». Ils ont rejeté tous les chefs d’inculpation portés contre eux, mais ont tout de même été condamnés à 20 ans de réclusion. L’un de leurs avocats a déclaré à Amnesty International en février 2010 que le dossier des sept accusés était vide et que les accusations étaient infondées.

En septembre 2010, on a annoncé verbalement aux membres du groupe que leur peine avait été réduite à 10 ans de prison après qu’une cour d’appel les avait acquittés de certaines des charges qui pesaient contre eux, dont l’espionnage ; mais aucun d’eux n’a reçu de copie écrite du verdict de la cour. En mars 2011, la peine de 20 ans de prison a été de nouveau prononcée, peut- être suite à un recours déposé par le Procureur général113.

Rozita Vaseghi, membre de la communauté religieuse baha’ie, a été arrêtée le 15 mars 2010 à son domicile de Mashhad, dans la province de Razavi Khorasan, puis condamnée à cinq ans d’emprisonnement pour « appartenance à une organisation illégale visant à porter atteinte à la sécurité du pays » et de « diffusion de propagande contre le régime ». On lui a également interdit de quitter le pays pendant 10 ans. En juillet 2011, alors qu’elle était en prison, elle a été condamnée en outre pour « diffusion d’enseignements baha’is » à une peine de cinq ans de prison supplémentaires.

Rozita Vaseghi a d’abord été maintenue à l’isolement cellulaire pendant six mois, mais elle est à présent détenue avec d’autres prisonniers baha’is dans la prison de Valikabad, à Mashhad. Elle serait en mauvaise santé, aurait perdu beaucoup de poids et souffrirait d’hypotension artérielle.

Des membres de la communauté baha’ie ont créé l'Institut baha'i d'enseignement supérieur en 1987 dans l’optique de proposer des études aux jeunes baha’is auxquels l'État refuse systématiquement l’accès à l’enseignement supérieur. Depuis, les autorités ont régulièrement harcelé l'Institut baha'i d'enseignement supérieur. Plus récemment, environ 39 domiciles reliés au BIHE ont été perquisitionnés en 2011, et au moins 17 membres du personnel et

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professeurs de l’institut ont été arrêtés. Au moins sept de ces personnes, Kamran Mortezaei, Vahid Mahmoudi, Riaz Sobhani, Mahmoud Badava m, Ramin Zibaie, Farhad Sedghi et Noushin Khadem, ont été condamnées à des peines de quatre ou cinq ans de prison, pour « appartenance à la secte déviante des baha’is visant à porter atteinte à la sécurité du pays et à soutenir les intérêts de la secte déviante et ceux d’organisations étrangères ». Les peines de six d’entre eux ont été confirmées en janvier 2012, mais la peine de cinq ans de prison de Vahid Mahmoudi a été suspendue, et celui-ci a été libéré114.

Les chrétiens sont pour la plupart évangéliques ou musulmans convertis et risquent la peine de mort pour « apostasie » bien qu’il ne s’agisse pas d’une infraction définie par la loi iranienne. Ils ont été de plus en plus persécutés ces dernières années, notamment depuis l’élection présidentielle controversée de 2009115.

Farshid Fathi, un chrétien de 33 ans, a été interpellé par la police à son domicile en décembre 2010 et détenu à la prison d’Evin. Il aurait été jugé le 5 février 2012116.

D’autres chrétiens, y compris des enfants, ont été arrêtés fin décembre 2011 à Ahvaz par des policiers cagoulés qui ont fait irruption dans une église pendant le service. Tous ont été par la suite relâchés, à l’exception du pasteur, Farhad Sabokroh, et de deux de ses assistants, Davoud Alijani et Naser Zamen- Dezfuli. Au moment de la rédaction de ce rapport en février 2012, on supposait qu’ils n’avaient toujours pas accès à une représentation légale et étaient détenus à la prison de Karoun, à Ahvaz117.

Yousef Naderkhani (aussi Nadarkhani), converti au christianisme et pasteur dans une église évangélique, a été condamné à mort en octobre 2010 après avoir été reconnu coupable d’apostasie118. Il avait été arrêté en octobre 2009 après avoir protesté auprès des autorités pédagogiques locales car il avait découvert que l’on forçait son fils à lire le Coran à l’école.

En juin 2011, la Cour suprême d’Iran a statué qu’un tribunal d’instance devrait réexaminer certains vices de procédure dans l’affaire, en lui octroyant le pouvoir de décider de la libération ou de l’exécution de Yousef Naderkhani, ou de l’ouverture d’un nouveau procès. Le verdict prévoyait d’annuler la sentence s’il acceptait de renier sa foi chrétienne. Yousef Naderkhani a été jugé de nouveau en septembre 2011 et a refusé de renier ses croyances religieuses. Son avocat a déclaré à Amnesty International le 22 février 2012 que le verdict n’avait pas encore été prononcé et que la cour aurait demandé à l’ayatollah Khamenei de publier une fatwa (décision religieuse) sur la question.

En septembre 2011, une cour d’appel a confirmé une peine d’un an de prison prononcée pour six membres de l’Église d’Iran. Accusés de prosélytisme, ils avaient été condamnés en avril 2011 pour « diffusion de propagande contre le régime ». Lors d’une autre affaire en février 2012, un tribunal aurait interdit pendant un an l’accès aux études universitaires à Fatemeh Nouri, convertie au christianisme119.

Plus de 60 derviches gonabadi (un ordre religieux soufi), ainsi que 12 journalistes travaillant pour Mazjooban-e Noor, un site d’informations derviche gonabadi, ont été arrêtés à Kavar, au sud-ouest de l’Iran, et à Téhéran

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en septembre et octobre 2011. Fin 2011, au moins 11 d’entre eux étaient encore en détention, et la plupart ne pouvaient pas communiquer avec leur avocat ou leur famille. Des manifestations anti-derviches ont eu lieu à Kavar le 3 septembre, et les forces de sécurité ont tiré sur au moins six personnes alors qu’elles essayaient d’entrer à Kavar le 4 septembre pour manifester leur solidarité avec les derviches de la ville. L’une des personnes touchée par les tirs n’a pas survécu. D’autres arrestations ont eu lieu en décembre 2011 et janvier 2012 (voir la partie 4.2).

Amnesty International a publié des informations sur les procès iniques contre les dignitaires religieux chiites, menés sous l’égide du Tribunal spécial pour le clergé depuis 1997120.

Par exemple, Sayed Hossein Kazemeyni Boroujerdi était en passe de devenir un dignitaire chiite. Il était en faveur de la séparation entre la religion et le gouvernement, et organisait des événements publics dans Téhéran, ce qui a conduit à son arrestation. En août 2007, il a été condamné lors d’un procès inique, mené par le Tribunal spécial pour le clergé, à 10 ans de prison en exil, dans la ville de Yazd. Il a également été déchu de son titre d’ayatollah et de son statut de dignitaire, et sa résidence et toutes ses possessions auraient été saisies.

Selon certaines sources en Iran, Sayed Hossein Kazemeyni Boroujerdi a été torturé et a subi d’autres mauvais traitements en de nombreuses occasions depuis son arrestation : il a été battu, jeté contre un mur, filmé à moitié nu, et réveillé dans son sommeil par des jets d’eau glacée.

En août 2009, Sayed Hossein Kazemeyni Boroujerdi a été renvoyé dans la prison d’Evin, où il aurait été agressé et passé à tabac en février 2011 par des gardiens de prison, qui lui auraient également rasé la barbe de force. Sayed Hossein Kazemeyni Boroujerdi est atteint de la maladie de Parkinson et souffre de diabète, d’hypertension artérielle et de problèmes au cœur et aux reins. Les derniers rapports indiquent qu’il aurait perdu la vue d’un œil et qu’il n’a toujours pas été autorisé à quitter la prison pour recevoir des soins médicaux.

Six des disciples de Sayed Hossein Kazemeyni Boroujerdi – cinq femmes, Tayebeh Hosseini, Narges Ghaffarzadeh, Forough Hematyar, Maryam Azimi, Roya Araghi, et un homme, Mohammad Reza Sadeghi – ont été arrêtés en novembre 2010121. Mohammad Reza Sadeghi aurait été torturé et maltraité en détention. Un septième disciple, Mohammad Mehmannavaz, a été arrêté en décembre 2011. Tous ont été libérés en échange d’une très lourde caution. Depuis, l’un d’entre eux au moins a fui le pays, par crainte des persécutions.

Les autorités iraniennes se méfient depuis longtemps des minorités ethniques du pays, y compris les Arabes ahwazis, les Azéris, les Baloutches, les Kurdes et les Turkmènes, qui vivent pour la plupart près des frontières. Certains membres de ces minorités appartiennent à des groupes armés d’opposition qui sont responsables de certaines attaques, comme par exemple le Mouvement iranien de résistance des peuples (également connu sous le nom de Jondallah), un groupe armé baloutche qui a mené des attaques aveugles dans le sud-est du pays, et certains groupes arabes ahwazis. Pendant des années, les organisations kurdes comme le Parti démocratique du Kurdistan d'Iran (KDPI) et le groupe marxiste Komala ont mené une lutte armée contre la République islamique

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d’Iran, même si ces deux groupes ne mènent plus d’attaques à l’heure actuelle. Le Parti pour une vie libre au Kurdistan (PJAK) a été formé en 2004 et a mené des opérations armées contre les forces de sécurité iraniennes, mais a déclaré un cessez-le-feu unilatéral en 2009, bien qu’il soit toujours impliqué dans des affrontements armés avec les forces de sécurité pour des motifs « d’auto- défense ». Ces dernières années, les autorités ont accusé des puissances étrangères, comme le Royaume-Uni ou les États-Unis, d’encourager les sentiments rebelles de ces organisations.

Amnesty International condamne les attaques menées par des groupes armés sur des civils, y compris les hommes politiques et juges locaux, ainsi que les attaques aveugles et disproportionnées, les prises d’otages, et l’exécution d’otages ou de membres captifs des forces de sécurité, qui constituent toutes des violations des principes du droit international humanitaire.

De nombreux membres de minorités ethniques ont également été arrêtés ou harcelés après avoir protesté contre les dégradations de l’environnement dans leurs régions.

Le 18 mai 2011, des membres du ministère du Renseignement ont arrêté Farzad Haghshenas, un militant écologiste kurde âgé de 35 ans, devant son magasin à Marivan, dans la province du Kurdistan. Il a été libéré le 1er octobre après avoir payé une caution d’environ 520 millions de rials. Jusqu’à sa libération, il était détenu en isolement cellulaire dans le centre de détention du service de renseignement de Marivan. Farzad Haghshenas est membre de Sabzchia (Société de la montagne verte) dont l'objectif est de veiller à ce que la campagne autour de Marivan reste propre.

Les membres de la minorité kurde exprimant toute forme de dissension pacifique sont susceptibles d’être accusés d’appartenir à des groupes politiques kurdes illégaux comme KDPI, Komala et PJAK. De telles accusations aggravent le risque qu’ils soient victimes de graves violations des droits humains, y compris la torture et la peine de mort.

Au moins 16 hommes kurdes seraient également dans le couloir de la mort à cause de leur implication supposée dans les activités d’organisations kurdes illégales. Ces hommes sont : Sherko Moarefi, Anvar Rostami, Mostafa Salimi, Hassan Talai, Rashid Akhkandi, Sayed Sami Hosseini, Sayed Jamal Mohammadi, Habibollah Golparipour, Zaniar Moradi, Loghman Moradi, Ali Afshari et son frère Habib Afshari, et Reza Esmaili (Mamadi).

Fin janvier 2012, Amnesty International a reçu des informations contradictoires sur la situation de Zaniar et Loghman Moradi, condamnés à mort en décembre 2010 pour leur appartenance supposée au Komala et pour le meurtre en juillet 2009 du fils de l’imam en charge de la prière du vendredi à Marivan. La plupart des rapports affirmaient que la Cour suprême avait confirmé leur condamnation à mort, tandis que certains affirmaient que le verdict avait été transmis au service du système judiciaire chargé de l’application des peines pour que la peine soit mis en œuvre.

Habibollah Latifi, un étudiant en ingénierie industrielle de l’université d’Ilam, a été condamné à mort le 3 juillet 2008 après un procès inique à huis clos devant le tribunal révolutionnaire de Sanandaj. Habibollah Latifi n’a pas eu droit à une

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représentation légale. Il a été condamné pour « inimitié à l’égard de Dieu » de par son rôle supposé – rôle qu’il nie – dans des attaques sur la ville de Sanandaj revendiquées par le PJAK. Cette condamnation à mort a été prononcée une seconde fois en mai 2011, et Habibollah Latifi risque d’être exécuté à tout moment.

Said Saedi et Yahya Qavami, deux Iraniens kurdes, tous deux membres actifs de la société civile, ont été arrêtés alors qu’ils célébraient l’ajournement de l’exécution de Habibollah Latifi en décembre 2010. Ils sont restés en détention pendant trois mois avant d’être libérés sous caution, pour une somme de 400 millions de rials, saisis sous la forme de titres de propriété. Said Saedi aurait subi de mauvais traitement pendant sa détention aux mains des agents du ministère du Renseignement, puis a été condamné à trois ans de prison ; cette peine a été confirmée en appel, mais il était encore libre au moment de la rédaction de ce rapport.

Membre fondateur de l’Institut de recherche culturelle de l'est du Kurdistan (IRCEK, ou Institut Xorkhelat) que les autorités ont refusé d’enregistrer, Said Saedi a été sans cesse harcelé à cause de ses activités en faveur des droits humains122. D’autres, dont au moins sept proches de Habibollah Latifi qui ont été arrêtés en même temps que lui, auraient tous été libérés, parfois après le versement de cautions exorbitantes, en janvier 2011.

Ali Reza Sepahi Laeenn, un écrivain et poète kurde issu de la minorité de la province de Khorasan, qui travaille pour le bureau des relations publiques de l’université à Mashhad, dans le nord-est de l’Iran, a été arrêté le 30 juillet 2011 à son domicile en ville. En février 2012, il était apparemment toujours détenu sans avoir eu de procès, dans un centre de détention contrôlé par les pasdaran de Mashhad. Il serait accusé d’avoir écrit des poèmes critiquant les autorités, d’avoir soutenu les dirigeants kurdes et d’avoir coopéré avec un des groupes d’opposition kurdes. Ali Reza Sepahi Laeen souffre de diabète, mais on ignore s’il reçoit les soins médicaux dont il a besoin. Sa femme aurait subi en novembre 2011 de terribles pressions de la part des agents du renseignement des pasdaran à Mashhad, afin de l’empêcher de s’exprimer publiquement sur le dur sort de son mari.

Deux militants pour les droits de la minorité des Arabes ahwazis ont été arrêtés fin janvier 2012. Manabi, chanteur, et son frère Hassan Manabi, auraient été arrêtés dans la ville d’Ahvaz. Hassan Manabi aurait été arrêté lors d’une vague d’arrestations d’Arabes ahwazis dans la région. Rien n’indiquait qu’ils avaient été libérés au moment de la rédaction de ce rapport.

Comme de nombreuses autres personnes, les membres de minorités ethniques sont fréquemment soumis à la torture ou à d’autres mauvais traitements après leur arrestation. Le témoignage d’un prisonnier kurde recueilli par Amnesty International décrit ses quatre mois passés en isolement cellulaire dans une pièce minuscule qui était constamment éclairée. Ce prisonnier déclare qu’en plus de « l’abominable solitude de l’isolement cellulaire », la chaleur insupportable avait fait de sa détention un véritable enfer. Il aurait été torturé les yeux bandés, frappé au visage à maintes reprises et insulté verbalement :

« …Ils me menottaient les mains dans le dos, et pendant que j’avais les yeux fermés, ils m’emmenaient dans la salle de torture. Puis ils commençaient à me

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frapper violemment avec un fouet, qui était fait de câble épais, surtout sur la paume des mains, à la tête et sur la plante des pieds. Parfois, ils me cognaient la tête contre un mur. »

Ceux qui cherchent à promouvoir l’identité culturelle et les droits linguistiques des Azéris sont souvent condamnés sur la base de chefs d’accusation vagues, comme « atteinte à la sécurité de l'État en promouvant le panturquisme. »

Le poète Saeed Mughanli, qui est également journaliste et éditeur de Yashmag, un magazine littéraire, a été arrêté le 8 juin 2011. Il aurait été libéré sous caution le 25 septembre 2011, mais les détails de sa libération ne sont pas connus. Il avait été arrêté plusieurs fois auparavant pour ses activités au nom de la communauté azérie.

Environ 70 Iraniens de la communauté azérie auraient été arrêtés le 2 avril 2011, lors de manifestations pacifiques à Tabriz et à Oroumieh appelant les autorités iraniennes à revenir sur la mise en place de barrages sur les rivières et fleuves alimentant le lac Oroumieh (ou Lac Urmia), qui risque de s’assécher. Comme lors de protestations similaires l’année précédente, les manifestants avaient versé des verres d’eau dans les affluents du lac et dans le lac. Ils portaient également des bannières sur lesquelles figuraient des slogans tels que « Détruisez les barrages et laissez l’eau couler dans le Lac Urmia », « Il n’y a plus d’eau dans le Lac Urmia et [si] l’Azerbaïdjan ne se réveille pas maintenant, il sera trop tard », et « Vive l’Azerbaïdjan ! ».

La plupart des personnes arrêtées auraient été libérées sans condamnation après 24 ou 48 heures de détention. Cependant, au moins trois d’entre elles – Jalil Alamdare Milani, Ali Salimi et Said Siyami123 – ont été condamnées à être fouettées, et n’ont été relâchées qu’après l’application de cette sanction. L’un des détenus aurait été torturé par des décharges électriques. D’autres arrestations ont eu lieu en août et septembre 2011.

Ebrahim Rashidi, un militant de la communauté azérie de la ville de Meskinshahr, aurait été arrêté le 24 janvier 2012 à Tabriz par les forces de sécurité, qui se sont présentées sans mandat. D’après certaines informations, il aurait également entamé une grève de la faim pour protester contre ce qu’il nomme sa détention « illégale ». On ignore cependant si, au moment de la rédaction de ce rapport, il poursuivait encore sa grève de la faim. Il avait déjà été arrêté en 2006, et Amnesty International avait lancé une campagne en sa faveur124.

Des dizaines de membres de la minorité arabe ahwazie auraient été arrêtés avant, pendant et après des manifestations qui ont eu lieu le 15 avril 2011, et au moins trois personnes ont été tuées lors d’affrontements avec les forces de sécurité. Les manifestations, dans le cadre de la « journée de la colère » organisée en commun avec d’autres mouvements à travers le Moyen-Orient, marquaient le sixième anniversaire des grandes manifestations pendant et après lesquelles les forces de sécurité avaient tué des dizaines de manifestants et procédé à une vague d’arrestations, marquant ainsi le début d’un cycle de violence et de violations des droits humains.

Au moins quatre Arabes ahwazis seraient morts en détention entre le 23 mars 2011 et la mi-mai 2011, peut-être à la suite de tortures ou d’autres mauvais

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traitements. D’autres ont été hospitalisés, apparemment à cause de blessures causées par la torture ou les mauvais traitements.

Un homme, Ejbareh Tamimi, aurait été arrêté à son domicile suite aux manifestations du 15 avril. Il aurait été soupçonné d’être en contact avec al Arabiya TV et d’avoir fourni à la chaîne certaines informations. D’après les informations reçues par Amnesty International, il est mort dans la prison de Sepidar, à Ahwaz, après avoir subi des tortures visant à lui arracher des « aveux » enregistrés, qu’il n’a pas fournis.

Au moins huit Arabes ahwazis d’Iran, dont Hashem Hamidi, qui n’avait apparemment que 16 ans, ont été exécutés entre le 5 et le 7 mai 2011. Trois d’entre eux auraient été exécutés en public. Les chefs d’inculpation précis qui pesaient contre les condamnés ne sont pas connus d’Amnesty International.

Les autorités iraniennes n’ont pas reconnu avoir exécuté ces hommes. Cependant, un colonel de la police a déclaré le 21 avril 2011 que huit membres d’un groupe qu’il décrivait comme « le groupe terroriste Khalq-e Arab » avaient été arrêtés par les forces de sécurité, et accusés d’avoir tué trois individus, dont un représentant des forces de l’ordre, le 15 avril 2011. Des sources arabes ahwazies affirment que l’arrestation des huit hommes est liée aux manifestations qui ont eu lieu le 15 avril 2011 dans la province du Khuzestan. Dans tous les cas, ils ont été jugés, condamnés et exécutés en trois semaines. Amnesty International ne possède aucune information concernant la plupart de leurs procès, mais Hashem Hamidi aurait été jugé sans être assisté par un avocat, lors d’un procès qui n’aurait duré qu’une dizaine de minutes.

Au moment de la rédaction de ce rapport en février 2012, une vague de répression croissante dans la province du Khuzestan semble avoir abouti à la mort d’au moins deux personnes en détention, et à un total de 50 à 65 arrestations dans au moins trois lieux différents de la province. Certaines arrestations à Shoush, au centre-nord du Khuzestan, semblaient avoir été provoquées par l’apparition de slogans contre les élections peints sur des murs. D’autres arrestations semblaient correspondre à des mesures préventives visant à empêcher tout regroupement d’Arabes ahwazis, que ce soit pour l’anniversaire des manifestations du 14 février ou pour l’ anniversaire de la « journée de la colère » le 15 avril (voir plus haut)125.

4.13 PERSONNES EN LIEN AVEC L’ORGANISATION IRANIENNE DES MOUDJAHIDIN DU PEUPLE (OIMP)

Pendant l’année 2011, un certain nombre d’individus semblent avoir été arrêtés uniquement en raison de leurs liens familiaux avec des membres de l’OIMP. Dans d’autres affaires, des peines disproportionnées semblent également avoir été motivées par les liens familiaux des accusés avec des membres de l’OIMP. L’OIMP, auparavant engagée dans une lutte armée contre le gouvernement iranien, est basée en Irak. Quelque 3 400 réfugiés et exilés iraniens, pour la plupart membres de l’OIMP, vivent au camp d’Ashraf, en Irak, où l’administration de Saddam Hussein leur avait offert l’asile des années avant que celui-ci ne soit renversé par la coalition dirigée par les États-Unis en 2003. Les résidents du camp sont actuellement en train d’être déplacés.

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 65 La répression croissante de la dissidence en Iran

Sept personnes arrêtées le 1er mai 2011, parmi lesquelles Mahmoud Azimi, Hossein Haj Aghaei, Aria Haeri, Ne gar Haeri, Nasser Sod agari, Tahereh Pour-Rostam et Pouyan Sodagari, ont toutes été libérées par la suite. Tous avaient des proches vivant au camp d’Ashraf, et cela semblait être la principale raison de leur arrestation, si ce n’est même la seule.

L’une de ces personnes, Mahmoud Azimi, ancien prisonnier politique dans les années 80 pour son appartenance à l’OIMP, aurait été arrêté après avoir tenté d’organiser, avec l’aide de sa famille, une cérémonie de commémoration pour sa nièce, Nastaran Azimi. Celle-ci faisait partie de la trentaine de réfugiés du camp qui ont été tués le 8 avril 2011 lorsque les forces de sécurité irakiennes ont voulu exercer davantage de contrôle sur le camp d’Ashraf, par un usage excessif la force, tuant plusieurs personnes126.

Environ 70 autres personnes condamnées antérieurement, semble-t-il en raison de leurs liens familiaux avec des réfugiés du camp d’Ashraf, seraient encore en détention.

Parmi ces personnes se trouvent Shabnam Madadzadeh, étudiante dans l’enseignement qui était membre de la branche de Téhéran du Bureau pour le renforcement de l’unité, une organisation étudiante, et son frère Farzad Madadzadeh, chauffeur de taxi. Tous deux ont été arrêtés en février 2009 et condamnés, à l’issue d’un procès inique, à cinq ans de prison en exil, pour « inimitié à l’égard de Dieu par des contacts avec l’OIMP » et « diffusion de propagande contre le régime ». Leurs condamnations semblent liées au fait que certains membres de leur famille appartenaient à l’OIMP ou vivent au camp d’Ashraf.

Amnesty International considère que tout individu détenu sur la seule base des liens que peut avoir sa famille avec des membres de l’OIMP, ou à cause de ses propres opinions politiques, et qui n’a jamais employé ou cautionné la violence, est un prisonnier d’opinion qui doit être libéré immédiatement et sans conditions.

La lourde peine prononcée contre Ziaoddin (Zia) Nabavi (voir la partie 4.10) semble en partie liée au fait que certains membres de sa famille vivent au camp d’Ashraf.

Plusieurs personnes ayant des liens avec l’OIMP ont été condamnées à mort, et quelques-unes ont même été exécutées. Trois partisans supposés de l’OIMP, Ali Saremi, Jafar Kazemi and Mohammad Ali Haj Aghaei, ont été exécutés en Iran en décembre 2010 et janvier 2011. Ces trois hommes avaient été condamnés pour « inimitié à l’égard de Dieu » en raison de leurs contacts avec l’OIMP127. En janvier 2012, Mohammad Javad Lari, un autre partisan supposé de l’OIMP arrêté en 2009, a été condamné à mort une seconde fois, alors que sa condamnation initiale avait été annulée par la Cour suprême. Celle-ci a de nouveau annulé sa condamnation à mort, et a renvoyé l’affaire devant un tribunal d’instance qui a prononcé une peine de deux ans d’emprisonnement. Mohammad Javad Lari aurait par la suite été libéré.

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5. AU-DELÀ DES FRONTIÈRES IRANIENNES

En juillet 1989, à Vienne, puis dans un restaurant de Berlin en septembre 1992, des leaders de l’opposition kurdes ont été assassinés en plein jour. Lors du procès qui a suivi l’attaque de 1992, la cour a conclu que des responsables haut placés du gouvernement iranien étaient responsables des homicides128. Le gouvernement iranien est fortement soupçonné d’avoir orchestré une série d’exécutions extrajudiciaires en-dehors de ses frontières dans les années 80.

Bien que les assassinats de figures de l’opposition à l’étranger semblent avoir cessé au début des années 90, la surveillance, le harcèlement et les menaces continuent.129 Suite à l’élection présidentielle de juin 2009, on a constaté une augmentation du nombre de signalements d’actes de harcèlement et de menaces subis par des ressortissants iraniens vivant à l’étranger.

Ebrahim Mehtari a participé aux manifestations qui ont suivi l’élection de 2009. Il a été arrêté, torturé, et a été victime d’un viol130. Après sa libération, il a fui l’Iran et a bénéficié du droit d’asile en France, où il s’est installé. Tard dans la soirée du 24 mars 2011, il a été attaqué par deux hommes, dont un au moins était iranien. Il a reçu plusieurs coups de couteau dans les jambes, le torse et un bras. Ses agresseurs avaient réussi à lui passer une corde autour du cou lorsque le bruit d’une sirène les a fait fuir. Ebrahim Mehtari est parvenu à entrer dans un hôtel, où le personnel a immédiatement appelé la police. Les policiers l’ont ensuite conduit à l’hôpital.

Quelques jours plus tôt, Ebrahim Mehtari avait participé à un événement au sein du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, au cours duquel des militants des droits humains avaient fait campagne pour que les États votent afin de condamner la situation déplorable des droits humains en Iran. Il avait fourni des détails au sujet des abus sexuels et autres tortures qu’il avait subis. D’après lui, cette attaque a été menée en représailles de son intervention lors de l’événement.

D’autres personnes nous ont rapporté que les autorités avaient arrêté des membres de leur famille, en Iran, pour essayer de leur faire abandonner leurs activités politiques ou militantes à l’étranger. Plus récemment, cette tactique a été étendue aux journalistes vivant à l’étranger.

« Pour tous ceux qui travaillent p our BBC Persian, les intrusions et le harcèlement venant des autorités iraniennes sont devenus de véritables épreuves au quotidien. » Mark Thompson, directeur général de la BBC, 3 février 2012

Le 17 janvier 2012, les autorités iraniennes ont arrêté la sœur d’une employée de BBC Persian et l’ont détenue en isolement cellulaire dans la prison d’Evin à Téhéran. Bien qu’elle ait été finalement libérée sous caution, elle a été forcée de faire des « aveux » devant la caméra. Ses interrogateurs ont contacté sa sœur à l’étranger via Facebook, après lui avoir arraché le mot de passe.

Cette arrestation s’inscrivait dans une vague d’arrestations de blogueurs et de

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journalistes en Iran (voir les parties 4.6 et 4.7). Le 3 février 2012, Mark Thompson, le directeur général de la BBC, a déclaré que d’autres membres des familles d’employés de BBC Persian s’étaient fait confisquer leur passeport et ne pouvaient plus quitter le pays. Il a signalé que les comptes de messagerie ou les comptes Facebook de certains employés de BBC Persian avaient été piratés, tandis que d’autres ont fait l’objet d’une « campagne d’accusations calomnieuses dans les médias officiels iraniens, où on les accusait d’avoir commis de graves agressions sexuelles, d’être des trafiquants de drogue, et de commettre des délits d’ordre financier131. »

Dans un rapport transmis par l’agence d’information Mehr le 7 février 2012, une source anonyme a déclaré qu’« un certain nombre de personnes abusées par les mensonges de BBC Persian network » avait été arrêté en Iran, et accusait ces mêmes personnes « d’être en mission pour rassembler des informations, produire des contenus sous divers formats, et pour recruter, former et préparer au départ les meilleurs employés des médias iraniens ». BBC Persian a nié avoir le moindre employé en Iran.

D’autres militants basés à l’étranger ont déclaré à Amnesty International que la surveillance qui semble être opérée par les services du renseignement d’Iran exerce une forte pression sur eux pour qu’ils modèrent leurs déclarations publiques. L’un de ces militants, qui souhaite rester anonyme, a déclaré à Amnesty International en février 2012 :

« Je me considère comme une victime de la terreur, même si je vis à l’étranger depuis plus de 30 ans. Les services du renseignement ont mis au point des techniques très efficaces pour forcer les gens à s’autocensurer. Je reçois fréquemment des appels téléphoniques, des lettres et des e-mails de la part d’inconnus qui disent « nous savons où vous habitez », ou pire, « nous savons où habite votre famille en Iran ». Mon père, qui vit toujours en Iran, a été convoqué pour interrogatoire en plusieurs occasions lorsque je me suis exprimé contre le gouvernement, et on lui a demandé de me forcer à arrêter. Une fois, ils l’ont même placé brièvement en détention. Parfois, je suis réveillé en pleine nuit par des sueurs froides, de peur que quelque chose lui soit arrivé par ma faute. Je serais beaucoup plus actif si je n’avais pas aussi peur – c’est une forme de contrôle mental. Si j’éprouve autant de difficultés alors que je vis à l’étranger depuis 30 ans, qu’est-ce que cela doit être pour ceux qui viennent de quitter le pays ? Pour certains, c’est vraiment difficile. »

Les personnes qui n’ont pas pu obtenir l’asile risquent également d’être arrêtées si elles retournent en Iran, en particulier s’il s’agit d’un retour forcé, leur demande d’asile étant connue des autorités. Un rapport publié par une agence de réfugiés suisse cite la déclaration d’un juge anonyme :

« Les demandeurs d’asile sont interrogés dès leur retour, qu’ils aient été ou non des militants politiques en Iran ou à l’étranger. S’ils ont essayé de diffuser de la propagande contre l’Iran, ils sont jugés coupables et placés en détention jusqu’à ce qu’un juge décide de leur peine. Ces dernières années, de nombreuses personnes ont essayé de détruire la réputation de l’Iran et cela doit cesser. De telles personnes aident les groupes d’opposition et leur culpabilité est flagrante. Les rapatriés sont donc détenus pendant quelques jours jusqu’à ce que la police puisse s’assurer qu’ils n’ont été impliqués dans aucune activité politique. Si la police peut prouver qu’une personne n’a jamais été active et qu’elle n’a jamais

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rien fait ou dit qui puisse porter atteinte à la réputation de la République islamique, alors elle est libérée. Si une personne était politiquement active en Iran avant son départ, ou l’a été lorsqu’elle vivait à l’étranger, elle doit être jugée et condamnée en fonction de la gravité de ses activités132. »

Ce rapport faisait suite à un article écrit par un ancien juge de la Cour suprême et publié le 17 février 2011 dans le journal Iran, un quotidien publié par le gouvernement iranien. L’article faisait référence à des lois permettant au système judiciaire iranien d’inculper des Iraniens pour des violations supposées de la loi iranienne qui auraient été commises en dehors du territoire, et affirmait que les demandeurs d’asile déboutés pouvaient être poursuivis pour avoir inventé des témoignages au sujet de prétendues persécutions vécues. Le 26 avril 2011, le journal Kayhan, contrôlé par le bureau du Guide suprême, a également rapporté que des Iraniens demandaient l’asile « en prétextant qu’ils soutiennent l’opposition133 ».

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6. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

Ce rapport brosse un état des lieux des violations des droits humains persistantes et généralisées en Iran. Amnesty International craint que cette situation déjà catastrophique puisse encore empirer à l’approche des élections parlementaires de début 2012, et ceci est déjà confirmé par la récente vague d’arrestations dans le pays. Afin d’éviter de nouvelles violations massives des droits humains, il est indispensable que la communauté internationale agisse en faveur des centaines, voire des milliers de prisonniers d’opinion et de prisonniers politiques incarcérés à l’issue de procès non équitables en Iran. Amnesty International lance un appel à la communauté internationale pour que, de toute urgence, elle s’adresse aux autorités iraniennes et veille à ce que celles-ci apportent des réponses aux préoccupations relatives aux droits humains exposées dans ce rapport.

Amnesty International appelle les autorités iraniennes à :

 amender la législation qui restreint indûment les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion, et permettre un débat public ouvert dans la période précédant les élections parlementaires de mars 2012.

Amnesty International demande en particulier, aux autorités de :

 garantir que nul ne sera détenu ou emprisonné uniquement pour l’exercice pacifique de ses droits à la liberté d’opinion et d’expression, d’association et de réunion. Toute personne détenue pour ces raisons doit être libérée immédiatement et sans condition ;

 cesser toute persécution, discrimination, harcèlement et arrestation arbitraire des défenseurs des droits humains, notamment des militants pour les droits des femmes, des avocats, des syndicalistes et des personnes qui cherchent à défendre leurs droits et ceux des autres ;

 garantir que les restrictions légales imposées à la formation et au fonctionnement des partis politiques, des ONG et des syndicats seront levées et renoncer à adopter de nouvelles lois qui restreindraient encore davantage leurs activités ;

 veiller à ce que toutes les infractions soient définies de manière précise et claire dans les textes de loi ;

 prendre des mesures efficaces pour interdire et prévenir toutes les formes de torture et autres formes de traitements cruels, inhumains et dégradants, y compris le retard dans l’administration d’un traitement médical approprié ou le refus de le fournir, et veiller à ce que les personnes soupçonnées d’avoir commis de tels actes fassent l’objet d’enquêtes et soient traduites en justice dans le cadre de procès équitables et sans recours possible à la peine de mort. Les victimes doivent disposer d’un droit juridiquement exécutoire à des réparations conformément aux normes internationales ;

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 Mettre un terme en droit et en pratique à toutes les formes de traitements cruels ou assimilables à la torture, notamment la flagellation, l’amputation, la crucifixion, la lapidation et les blessures infligées délibérément ;

 abroger ou amender toute législation qui autorise ou pourrait entraîner la discrimination, des poursuites et des peines à l’encontre de personnes uniquement en raison de leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou la pratique de relations sexuelles consenties entre personnes adultes consentantes. Les personnes détenues en raison de tels actes ou orientations doivent être libérées immédiatement et sans condition ;

 abroger ou réviser toute législation de nature discriminatoire à l’encontre des minorités ethniques ou religieuses ;

 libérer toutes les personnes détenues uniquement en raison de leur confession, de leur absence de foi, ou de leur changement de confession ; de leur identité ethnique ou religieuse ; ou de leurs activités pacifiques visant à obtenir davantage de droits pour leur communauté ;

 veiller à ce que les procédures judiciaires soient conformes aux normes internationales d’équité des procès, notamment en garantissant que toutes les personnes arrêtées puissent avoir accès à un avocat de leur choix immédiatement après leur arrestation ;

 veiller à ce que nul ne soit contraint à témoigner contre lui-même ou d’autres personnes ou à avouer sa culpabilité, et à ce que de tels « aveux » ne puissent pas être recevables en tant que preuves par les tribunaux, sauf dans le cadre d’une procédure contre une personne accusée de torture ou de mauvais traitements comme preuve que les « aveux » ou autres déclarations ont été ainsi obtenus ;

 abolir les tribunaux révolutionnaires et le Tribunal spécial pour le clergé ;

 Instaurer immédiatement un moratoire sur les exécutions en vue d’abolir la peine de mort ;

 créer des organismes indépendants et impartiaux chargés d’une part d’enquêter sur les violations de droits humains sans délai, de manière approfondie et efficace et d’autre part d’apporter réparation aux victimes et aux familles touchées, conformément aux normes internationales relatives aux droits humains ; et

 permettre un examen international approfondi de la situation des droits humains en Iran, notamment en autorisant les visites du Rapporteur spécial de l’ONU sur l’Iran, des autres mécanismes thématiques de l’ONU relatifs aux droits humains qui ont fait des demandes de visite, ainsi que des organisations internationales indépendantes œuvrant pour les droits humains comme Amnesty International.

Amnesty International appelle les États membres de l’ONU à :  faire tout ce qui est en leur pouvoir pour garantir que le mandat du

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Rapporteur spécial de l’ONU sur l’Iran soit renouvelé durant la session du Conseil des droits de l’homme de février-mars 2012 ;

 faire pression sur les autorités iraniennes afin qu’elles accordent au Rapporteur spécial sur l’Iran l’accès au pays et qu’elles tiennent leurs engagements à recevoir les visites des Procédures spéciales de l’ONU relatives aux droits humains qui ont formulé des demandes de visites en Iran ;

 promouvoir des contacts entre leurs propres parlementaires et les parlementaires iraniens élus en mars 2012 afin de leur rappeler leur responsabilité de garantir la conformité de la législation iranienne avec les normes internationales relatives aux droits humains auxquelles l’Iran est partie.

Traduction réalisée par AI France de : MDE 13/002/2012 “We are ordered to crush you” – Expanding repression of dissent in Iran Mars 2013

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NOTES

1 Amnesty International, Iran: Case sheet: Ahmad Zeidabadi, (Index : MDE 13/042/2010), 3 mai 2010, http://www.amnesty.org/en/library/info/MDE13/042/2010

2 « Grâce à l’Islam et à la révolution islamique, un réveil islamique public se produit aujourd’hui dans la région. Il portera ses fruits comme il les a déjà portés sur certains aspects. » Extraits d’un discours de l’ayatollah Khamenei le 23 avril 2011, cité sur Hamsayeh.net, « Islamic Awakening Sweeping the Region Harbinger of Profound Changes to Follow: Supreme Leader », 24 avril 2011, http://hamsayeh.net/archive/595-islamic- awakening-sweeping-the-region-harbinger-of-profound-changes-to-follow-supreme- leader.html

3 Par exemple, l’ayatollah Ahmad Jannati a déclaré dans un sermon lors de la prière du vendredi à Téhéran en avril 2011 : « Tous les pays islamiques, dans la mesure où ils ne sont pas eux-mêmes impliqués dans le crime, ont la responsabilité de soutenir les Bahreinis dans leur lutte. » Cité par Deurtsche Welle , « Iran's support for Bahrain protesters fuels regional tensions », 15 avril 2011, http://www.dw.de/dw/article/0,,6504403,00.html

4 Les articles 183 à 186 du Code pénal traitent de l’« infraction » de « moharebeh va ifsad fil-arz » ou « inimitié à l'égard de Dieu et corruption sur terre ». Cette expression fait référence à la sourate 5.33 du Coran. Dans le Code pénal, le « crime » de « moharabeh va ifsad fil-arz » est passible de quatre peines possibles découlant du verset coranique : peine de mort, amputation croisée, crucifixion et « bannissement ». Le Code pénal définit ces expressions ainsi : « Toute personne qui a recours aux armes pour causer la terreur, la peur ou pour enfreindre la sécurité et la liberté publiques sera considéré mohareb et corrompue sur terre. Parmi ceux qui sont désignés comme mohareb, on compte les personnes se rendant coupable d’appartenir ou soutenir les organisations cherchant à renverser la République islamique en procurant des armes à cette fin » D’autres références dans les textes de loi nomment d’autres motifs pouvant conduire quelqu’un à être qualifié de mohareb, notamment l’espionnage et la formation de groupes visant à mettre en péril la sécurité de l’État. La « corruption sur terre » n’est pas définie dans le Code pénal. Cependant, plusieurs articles du Code pénal et d’autres textes de loi spécifient que les peines correspondant à l’infraction de « corruption sur terre » peuvent s’appliquer à l’espionnage, certains délits économiques, la résistance armée à l’État, la « création de centres de corruption » et la production de « produits obscènes ». Les personnes accusées d’ « apostasie », qui n’est pas qualifiée en tant qu’infraction dans la législation iranienne, ont également été considérées à certaines occasions comme « corrompues sur terre » et condamnées à mort. Par exemple, le 26 janvier 2011, les autorités iraniennes ont annoncé que Sayed Ali Gharabat avait été exécuté pour « diffusion de la corruption » et « apostasie » à la prison de Karoun, à Ahvaz, après avoir, selon les autorités, affirmé à tort avoir communiqué avec le 12ème Iman. Les musulmans chiites duodécimains pensent que le 12ème Iman est actuellement caché et reviendra sur terre pour apporter la justice. Voir Amnesty International : Iran : Shirin Ebadi, prix Nobel de la paix, et plusieurs organisations de défense des droits de l’Homme réclament un moratoire sur les exécutions en Iran, Index : MDE 13/015/2011), 16 février 2011, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/015/2011/fr. La loi relative à la lutte contre les stupéfiants considère aussi les récidivistes comme « corrompus sur terre » dans certains

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cas.

5 Amnesty International, Iran. Une élection contestée, une répression accrue (Index : MDE 13/123/2009),10 décembre 2009, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/123/2009

6 Amnesty International, Iran. From protest to prison: Iran one year after the election (Index : MDE 13/062/2010), 9 juin 2010, http://www.amnesty.org/en/library/info/MDE13/062/2010.

7 Il s’agit de : Assemblée générale de l’ONU, La situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, rapport du Secrétaire général (Doc ONU : A/66/361), 15 septembre 2011, http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/66/374&referer=/english/&Lang=F et Assemblée générale de l’ONU, Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans la République islamique d’Iran (Doc ONU : A/66/374), 23 septembre 2011, http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/66/374&referer=/english/&Lang=F

8 Les Rapporteurs spéciaux sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; sur l’indépendance des juges et des avocats ; sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression ; et sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, ainsi que l’expert indépendant sur les questions relatives aux minorités ont tous demandé à effectuer des visites en Iran mais n’ont pas reçu de réponse. Les autorités iraniennes ont indiqué qu’elles ne vont pas accéder à la demande de visite formulée par le nouveau Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran. En parallèle, les Rapporteurs spéciaux sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et sur la liberté de religion ou de croyance ainsi que le Groupe de travail sur les disparitions forcées et involontaires ont tous des accords de principe pour se rendre en Iran, mais les autorités iraniennes n’ont proposé aucune date. L’Iran a soumis en retard des rapports à certains organes de traités, mais ses rapports au Comité des droits de l’enfant et au Comité des droits des personnes handicapées n’ont toujours pas été présentés. La situation des droits humains en Iran a été étudiée dans le cadre du processus de l’EPU, ainsi que par le Comité des Nations unies pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale en août 2010, et par le Comité des droits de l’homme des Nations unies en octobre 2011.

9 L’Iran est partie aux principales normes relatives aux droits humains, et notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), le Pacte international relatif aux droits sociaux, économiques et culturels (PIDESC), la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et la Convention des droits de l’enfant. Son non-respect de ses obligations en vertu de ces traités est amplement démontré par les multiples violations de droits humains rapportées dans ce document. Le statut des traités internationaux relatifs aux droits humains ne figure pas dans le système législatif iranien et il n’y est pratiquement jamais fait référence dans la jurisprudence interne. Le Comité des droits de l’homme des Nations unies, qui supervise la mise en œuvre du PIDCP, a déclaré en novembre 2011 que ceci empêche la pleine jouissance des droits inscrits dans le PIDCP, et a appelé l’Iran à garantir la mise en œuvre et l’application effectives des dispositions du PIDCP, quelle que soit la place du Pacte dans le système législatif national.

10 Le Comité des droits de l'homme des Nations unies, dans ses observations finales de 1993, a fait part de son inquiétude quant à l'ampleur des limites imposées à la liberté d'expression, de réunion et d'association, constatant que l'autocensure était omniprésente dans les médias, et que l'exercice de la liberté de réunion et d'association faisait l'objet de strictes restrictions. Voir Comité des droits de l'homme des Nations unies, Observations finales sur la République islamique d'Iran, 1993. De la même façon, en 2011, le Comité des droits de l'homme a constaté avec inquiétude que la liberté de réunion et d'association

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012

74 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » La répression croissante de la dissidence en Iran

était extrêmement limitée, que de nombreux journaux et autres médias avaient été fermés, et que des journalistes et d'autres professionnels des médias avaient été arrêtés. Le Comité était également préoccupé par les restrictions imposées à l'utilisation d'Internet et l'accès aux diffusions par satellite. Il exhortait l'Iran à garantir complètement le droit des médias indépendants à la liberté d'expression et d'opinion, à faire en sorte que les journalistes puissent exercer leur profession sans craindre d'être traduits devant les tribunaux, et à « libérer les journalistes emprisonnés arbitrairement, les réhabiliter et leur assurer une réparation judiciaire effective et une indemnisation ». Enfin, le Comité a déclaré que les autorités iraniennes devaient veiller à ce que la surveillance de l'utilisation d'Internet n'entraîne pas de violation du droit à la liberté d'expression et du droit à la protection de la vie privée.

11 Conseil économique et social des Nations unies, Rapport présenté par M. Ambeyi Ligabo, Rapporteur spécial sur le droit à la liberté d’opinion et d’expression, à la suite de sa mission en Iran (E/CN.4/2004/62/Add.2), 12 janvier 2004, http://aadel.iranhrdc.org/Exe/ZyNET.exe/WRK200000JYY.xml?ZyActionD=ZyDocument&Client=search &Index=IHRDC%20Public%20Documents&File=C%3A%5CZYIMAGE%20DATA%5CINDEX%20DATA %5CPUBLIC%5CXML%5C2009%5C10%5C00000000%5CWRK200000JYY.xml&User=anonymous&P assword=anonymous&ImageQuality=r85g16%2Fr85g16%2Fx150y150g16%2Fi500&Display=hpfrw&Ba ck=ZyActionS&MaximumPages=5&Query=fname%3D%22WRK200000JYY.xml%22

12 Amnesty International, Iran : Le système juridique ne protège pas la liberté d'expression et d'association, (Index : MDE 13/045/2001), publié le 21 décembre 2001, http://amnesty.org/fr/library/asset/MDE13/045/2001/fr/865f62eb-d8ae-11dd-ad8c- f3d4445c118e/mde130452001fr.pdf

13 Il semble que cette loi était uniquement destinée à être utilisée dans des cas exceptionnels afin d'éviter l’« hooliganisme » ou les meurtres. Voir article 19, Memorandum on Media Regulation in the Islamic Republic of Iran, mars 2006

14 Deutsche Welle, « Tasvib-e layeheh janjali-e eslahe-e ghanoun-e matbouaat dar majles », 15 avril 2009, http://www.dw-world.de/dw/article/0,,4178392,00.html

15 AFP, « Iran launches cyber crime unit: police », 23 janvier 2011, http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5hLEy7ykxpOx8VTVkl1-v0zSeaIMw. Le site Internet de la cyberpolice est disponible sur: http://www.cyberpolice.ir/

16 Rapport de la Commission des Affaires culturelles du Majlis dans le journal Etemad, 1er novembre 2011, tel que rapporté par le BBC Monitoring.

17 ISNA, « Oltimatum-e polic be cafinetdaran, Polic-e Fata: 20 dastour-ol-amal baraye cafinet-ha elam shod, cafinet-ha etelaat-e interneti-e karbaran ra sabt konand », 3 janvier 2012, http://isna.ir/ISNA/NewsView.aspx?ID=News-1923707

18 AKI, « Iran: announces new 'halal' Islamic internet », 15 avril 2011, http://www.adnkronos.com/IGN/Aki/English/CultureAndMedia/Iran-Tehran-announces-new-halal- Islamicinternet_311908244227.html et IT Analyze, « Shabakeh-e internet-e halal dar Iran rah andazi mishavad », 15 avril 2011, http://itanalyze.com/articles/2011/04/15/13747.php

19 Open Net Initiative, entrée sur l’Iran de 2009, http://opennet.net/research/profiles/iran#footnoteref17_a7hpeud

20 Les réglementations de 2001 du Conseil suprême de la Révolution culturelle disposent que les fournisseurs d’accès à Internet doivent consigner les activités des utilisateurs pour les communiquer au ministère des Technologies de l'Information et des Communications. Ces informations doivent être approuvées par le ministère de l'Information, les autorités judiciaires et la police. Elles sont susceptibles - sur la demande du Haut Conseil de sécurité nationale ou d'un juge - d'être transmise au ministère du Renseignement. Voir « Access is denied »: A Report on the Status of the Internet in Iran, Iran CSOs Training & Research Centre, novembre 2005, http://www.genderit.org/sites/default/upload/A_Report_on_Internet_Access_in_Iran_2_.pdf

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 75 La répression croissante de la dissidence en Iran

21 RFERL, « Iran Announces New Restrictions For Internet Cafes », 4 janvier 2012, http://www.rferl.org/content/iran_announces_new_internet_restrictions/24442396.html

22 D'abord condamné à quatre mois de prison pour avoir distribué un logiciel conçu pour contourner les restrictions à l'accès à Internet imposées par le gouvernement iranien, et à six mois de prison pour avoir expliqué comment utiliser ce logiciel, Ashkan Delanvar a été acquitté de l'accusation de formation d'un groupe virtuel visant à porter atteinte à la sécurité nationale. La Cour d'appel a confirmé la peine d'un an d'emprisonnement pour « propagande contre le régime », ainsi que la sentence infligée pour la distribution d'un logiciel anti-filtre et l'explication de son fonctionnement. Elle a également annulé son acquittement relatif à la « création de groupes opposés à la sécurité nationale » en raison de groupes Facebook dont il aurait fait partie et a imposé une peine de deux années supplémentaires.

23 L’ayatollah Mohammad Emami-Kashani, membre de l’Assemblée des experts, a déclaré dans un sermon retransmis par la télévision le 4 septembre 2009 que les sciences humaines ne devaient pas être enseignées en Iran à la manière occidentale. Deux jours plus tard, l’Institut des sciences humaines et des études culturelles a annoncé que le Conseil suprême de la révolution culturelle lui avait demandé de réviser le programme de sciences humaines. Voir « Pavhouheshgah-e oloum-e ensani, dorouse oloume ensani ra baznegari mikonad », 6 septembre 2009 http://www.bbc.co.uk/persian/iran/2009/09/090906_ka_universities_humanities.shtml

24 BBC Persian, « Tarh-e poushesh-e Irani-Eslami az Farvardin mah dar Tehran ejra mishavad », 19 février 2012, http://www.bbc.co.uk/persian/rolling_news/2012/02/120219_l31_rln_iran_islamic_clothes.shtml. Les rapports mentionnaient également l'introduction d'un uniforme masculin.

25 Le taux du rial ayant fortement chuté par rapport à celui du dollar des États-Unis au cours des derniers mois, il est difficile de convertir ce montant.

26 Frank La Rue, Rapport du rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, (Doc A/66/290), 10 août 2011, http://daccess-dds- ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N11/449/79/PDF/N1144979.pdf?OpenElement . Ce rapport mentionne également la résolution 12/16 (para. 5 (p) (i)) du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies.

27 Le CDESC a disposé que « Les membres de la communauté universitaire sont libres, individuellement ou collectivement, d'acquérir, développer et transmettre savoir et idées à travers la recherche, l'enseignement, l'étude, les discussions, la documentation, la production, la création ou les publications. Les libertés académiques englobent la liberté pour l'individu d'exprimer librement ses opinions sur l'institution ou le système dans lequel il travaille, d'exercer ses fonctions sans être soumis à des mesures discriminatoires et sans crainte de répression de la part de l'État ou de tout autre acteur, de participer aux travaux d'organismes universitaires professionnels ou représentatifs et de jouir de tous les droits de l'homme reconnus sur le plan international applicables aux autres individus relevant de la même juridiction. La jouissance des libertés académiques a pour contrepartie des obligations, par exemple celles de respecter les libertés académiques d'autrui, de garantir un débat contradictoire équitable et de réserver le même traitement à tous sans discrimination fondée sur l'un ou l'autre des motifs prescrits. » Voir Comité des droits économiques, sociaux et culturels, observation générale n°13, (Doc E/C.12/1999/10), 8 décembre 1999, http://www.unhchr.ch/tbs/doc.nsf/(symbol)/E.C.12.1999.10.Fr?OpenDocument.

28 Agence de presse des ouvriers iraniens (ILNA), « Google motor-e jostojou nist balkeh abzar-e jasousi ast », 10 janvier 2012, http://www.ilna.ir/newsText.aspx?ID=234051

29 Ces restrictions apparaissent dans la Loi de 1997 sur les conditions à remplir pour obtenir une licence d'avocat, qui dispose que les avocats doivent être des musulmans pratiquants et croire en les bases idéologiques de la République islamique. En outre, les avocats ne doivent ni être monarchistes, ni appartenir à des groupes « à dénomination trompeuse » (par exemple, Baha'is), athées, communistes ou d'opposition. En juin 2009, le responsable du pouvoir judiciaire a approuvé de nouveaux règlements relatifs à la loi de 1955 établissant l'indépendance de l'Ordre des avocats. Ils pourraient permettre au pouvoir judiciaire d'approuver ou non l'adhésion au barreau et les demandes de licence professionnelle des avocats, compromettant ainsi l'indépendance de cette organisation. Ces règlements, qui ne nécessitent pas d'approbation parlementaire, ont été contestés par l'Association du barreau et n'ont pas encore été mis en application. Pour plus d'informations, voir Amnesty International, Iran. Des avocats

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76 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » La répression croissante de la dissidence en Iran

de la défense sont privés de liberté, Déclaration publique, (Index AI : MDE 13/093/2010), 1er octobre 2010, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/093/2010/fr. En février 2012, la Cour administrative des juges a empêché 28 candidats de se présenter à l'élection au Conseil. Voir BBC Persian, « Rad-e salahiat-e 28 namzad-e entekhabat-e heya’t-e modireh kanoun-e vokalay-e dadgostari-e Iran », 11 février 2012, http://www.bbc.co.uk/persian/iran/2012/02/120211_l38_iran_bar_assosiation.shtml

30 Loi de 2000 relative au troisième plan de développement économique, social et culturel. L'article 187 stipule que les autorités judiciaires « seront autorisées à confirmer la compétence des diplômés en droit auxquels seront délivrées des autorisations d'ouvrir des cabinets de conseil juridique ». Les conseillers juridiques seront autorisés à plaider devant les tribunaux. Voir Amnesty International, Iran : Le système juridique ne protège pas la liberté d'expression et d'association, (Index AI : MDE 13/045/2001), 21 décembre 2001, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/045/2001/fr.

31 Dans ses observations finales de novembre 2011, le Comité des droits de l'homme exprimait ses préoccupations quant aux strictes limites imposées à la liberté de réunion et d'association, et constatait que l'organisation de marches et rassemblements publics, ainsi que la création d'associations, dépendaient du respect des « principes de l'Islam », lesquels ne sont pas définis par la législation nationale. Le Comité s'inquiétait également des actes de harcèlement et d'intimidation, d'interdiction ou de dispersion par la force de manifestations, et des arrestations et détentions arbitraires de défenseurs des droits humains. Le comité a ajouté que « les défenseurs des droits humains et les avocats purgent souvent des peines d'emprisonnement pour des infractions formulées de manière vague, par exemple "mohareb" (ennemi de Dieu) ou diffusion de propagande contre le régime ». Voir Comité des droits de l'homme, Observations finales du Comité des droits de l'homme : République islamique d'Iran, (UN Doc CCPR/C/IRN/CO/3), 29 novembre 2011, http://www.unhcr.org/refworld/publisher,HRC,,,4ef9a38f2,0.html

32 Comité des droits de l'homme, Observations finales du Comité des droits de l'homme : République islamique d'Iran, (UN Doc CCPR/C/IRN/CO/3), 29 novembre 2011, http://www.unhcr.org/refworld/publisher,HRC,,,4ef9a38f2,0.html

33 Une traduction en anglais du projet de loi est disponible sur le site du Centre de documentation des droits de l'homme en Iran. Voir The parties and associations law reform plan, http://www.iranhrdc.org/english/news/features/1000000018-the-parties-and-associations-law-reform- plan.html

34 Les articles 23 et 25 du projet de loi indiquent que les créateurs et membres de partis politiques doivent faire preuve d'un « attachement pratique à la Constitution de la République islamique d'Iran ».

35 Pour plus d'informations, voir Arseh Sevom, « Islamic Republic of Iran Forcefully Targets Civic and Democratic Organizations », 3 mai 2011, http://www.arsehsevom.net/2011/05/islamic-republic-of-iran- forcefully-targets-civic-and-democratic-organizations/

36 Radio Zamaneh, « Gender segregation underway in 20 Iranian universities », 8 juillet 2011, http://radiozamaneh.com/english/content/gender-segregation-underway-20-iranian-universities

37 37 Radio Free Europe/Radio Liberty, « Iran To Extend Gender Segregation To Preschools », 23 août 2011, http://www.rferl.org/content/iran_separates_sexes_in_preschool/24305334.html

38 Shadi Sadr, « A Legal Analysis on Violation of Rights in the Post-Election Events », juin 2010, http://www.iranhrdc.org/english/publications/legal-commentary/3043-a-legal-analysis-on-violation-of- rights-in-the-post-election-events.html#.USc6Yh0yJOg. L'auteur affirme que seules les organisations enregistrées sous la loi relative aux partis politiques et associations peuvent solliciter une autorisation de manifestation.

39 Article 119 du Code de procédure pénale.

40 Article 15.4 et 15.5.

41 Article 32.

42 Article 24.

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 77 La répression croissante de la dissidence en Iran

43 Article 32.

44 Article 33.

45 Article 132.

46 Article 134. Les familles cèdent souvent un titre de propriété dont la valeur est largement supérieure au montant de la caution fixée par le tribunal, ou payent avec de l’argent liquide. La caution est enregistrée, et toute somme en liquide est déposée sur un compte spécial du ministère de la Justice prévu à cet effet. Le tribunal adresse un ordre au département chargé d’enregistrer les titres de propriété, où le propriétaire vient déposer le titre. Le département bloque toute possibilité de transaction concernant le titre récupéré, et cette décision ne peut être annulée que par un nouvel ordre du tribunal.

47 Réponse des autorités iraniennes à un questionnaire sur l’utilisation et l’application du Code de conduite des Nations unies pour les responsables de l’application des lois, y compris les Principes de base des Nations unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, administrés par la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale des Nations unies. Voir http://www.uncjin.org/Standards/Conduct/ccl/iran.pdf, page 4.

48 Radio Zamaneh, « Prison authorities deny use of torture », 9 août 2011, http://zamaaneh.net/english/content/prison-authorities-deny-use-torture

49 Deutsche Welle, « 220 hezar Irani dar zendanha ba 85 hezar zarfiyat », 3 mars 2011, http://www.dw- world.de/dw/article/0,,6458574,00.html

50 Shargh « 800 nafar dar zendanha-ye 100 nafareh », 27 juin 2011, http://sharghnewspaper.ir/News/90/04/06/3723.html.

51 Kalame « Dar zendan-e Gharchak Varamin, yek faji’eh insani dar hal-e voghou’ ast », 8 mai 2011, http://www.kaleme.com/1390/02/18/klm-57435/

52 Extrait d’une interview avec International Campaign for Human Rights in Iran (Campagne Internationale pour les droits de l’homme en Iran). Voir l’article : « Imprisoned Blogger Severely Beaten by IRGC Forces after Writing a Letter to Tehran’s Prosecutor », 19 août 2011, http://www.iranhumanrights.org/2011/08/ronaghi_beating/ 53 Une traduction en anglais de sa lettre est disponible sur : http://persianbanoo.wordpress.com/2011/12/13/blogger-hossein-ronagi-malekis-letter-to-public- prosecutor-announcing-his-hunger-strike/

54 Hossein Ronaghi Maleki a été transféré à l’hôpital le 19 décembre 2011, et aurait subi une intervention chirurgicale au niveau du rein deux jours plus tard, mais il a été ramené en prison le 23 décembre 2011. Il a refusé d’être conduit à l’hôpital en janvier 2012, pour protester contre le refus des autorités de lui accorder une permission afin de recevoir un traitement médical.

55 Iran Human Rights Documentation Centre, « Legal commentary: A Look at Criminal Procedure in Iran », novembre 2010, http://www.iranhrdc.org/english/publications/legal-commentary/3008-a-look-at- criminal-procedure-in-iran.html#.UThc0dY1HG0

56 Le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire a constaté, suite à sa visite en Iran en 2003, que « par une interprétation extrêmement restrictive de l’article 128 du Code de procédure pénale et de la note n°3 de la loi sur le choix des avocats, les tribunaux révolutionnaires – outre qu’ils n’ont pas de légitimité constitutionnelle – abusent de la possibilité déjà critiquable que leur donnent ces textes d’écarter discrétionnairement les avocats de l’audience dans les affaires visées par cet article, c’est-à- dire celles qui mettent notamment en cause la sécurité intérieure et extérieure de l’État, cas dans lesquels leur présence est la plus nécessaire. Cette dérogation est d’une gravité telle qu’elle confère à ces juridictions le caractère de "juridictions d’exception" ». Le Groupe de travail a recommandé l’abolition des tribunaux révolutionnaires. Voir le rapport du Groupe de travail sur la détention arbitraire, Visite en République islamique d’Iran (15-27 février 2003), (document NU E/CN.4/2004/3/Add.2), 27 juin 2003, http://documents-dds- ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G03/147/78/pdf/G0314778.pdf?OpenElement

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012

78 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » La répression croissante de la dissidence en Iran

57 Iran Human Rights Documentation Centre, « Legal Commentary: A Look at Criminal Procedure in Iran », novembre 2010, http://www.iranhrdc.org/english/publications/legal-commentary/3008-a-look-at- criminal-procedure-in-iran.html#.UThc0dY1HG0

58 Pour de plus amples informations sur le cadre légal gouvernant l’arrestation, la détention, les tribunaux et les lieux de détention en Iran, veuillez vous référer aux précédents rapports d’Amnesty International, en particulier le rapport intitulé « From Protest to Prison: Iran one year after the election » (Index : MDE 13/062/2010), 9 juin 2012, http://www.amnesty.org/en/library/info/MDE13/062/2010/en

59 La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, entrée en vigueur en décembre 2010, définit la disparition forcée à l’article 2 comme étant : « l'arrestation, la détention, l'enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l'État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l'autorisation, l'appui ou l'acquiescement de l'État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi ». L’Iran n’a pas encore ratifié cette Convention.

60 Par exemple, le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires du Haut-commissariat aux droits de l’homme des Nations unies, « Observation générale sur la disparition forcée en tant que crime continu », http://www.ohchr.org/Documents/Issues/Disappearances/GeneralCommentsDisappearances_fr.pdf

61 Un prisonnier d'opinion est une personne qui n';a ni usé de violence, ni préconisé la violence ou la haine, et qui est incarcérée ou dont la liberté de mouvement est restreinte − par exemple à la suite d'une assignation à résidence ;− du fait de ses convictions politiques ou religieuses, pour toute autre raison de conscience ou en raison de son origine ethnique, de son sexe, de sa couleur, de sa langue, de sa nationalité ou de son origine sociale, de sa situation économique, de sa naissance, de son orientation sexuelle ou de toute autre situation. Amnesty International demande leur libération immédiate et sans condition. Les prisonniers politiques peuvent être incarcérés pour des raisons similaires, mais ont usé de violence ou ont préconisé la violence ou la haine. Amnesty International considère que ces personnes doivent bénéficier d'un procès respectant les normes internationales d’équité des procès.

62 Amnesty International, Iran. Vague d'arrestations en amont des élections législatives; (Index : MDE 13/004/2012) 31 janvier 2012, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/004/2012/fr

63 Amnesty International, Iran. Un an après. Libérez les prisonniers d'opinion. Abolfazl Abedini Nasr (Index : MDE 13/039/2010), 3 mai 2010, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/039/2010

64 BBC persian, « Abdolreza Tajik : Dar zendan hatk-e hormat shodeh-am », 24 juin 2010, http://www.bbc.co.uk/persian/iran/2010/07/100724_l17_tajik.shtml 65 Maison des droits humains d'Iran, « Abdolreza Tajik’s Sister Sentenced to 1 ½ Years of Prison », 17 novembre 2010, http://www.rahana.org/en/?p=8059

66 Statut Facebook de Shadi Sadr consulté le 25 janvier 2012

67 Comité des reporters des droits humains, « Court was held on charges of Kouhyar Goudarzi » , 20 janvier 2012, http://chrr.biz/spip.php?article16997

68 Comité des reporters des droits humains, « Parvin Mokhtareh be 23 mah –e habs-e ta’ziri mahkoum shod », http://chrr.biz/spip.php?article16737

69 Les Défenseurs des droits humains en Iran qui agissent depuis quatre ans s'étaient scindés en deux groupes avant la vague d'arrestations. Le premier groupe a conservé le nom de l'association. Son site web (Human Rights Activists News Agency) est accessible à cette adresse : http://www.hra-news.org/. Le deuxième groupe possède son propre site. Initialement connu sous le nom de « Reporters et militants des droits humains en Iran (RAHANA) », il se nomme désormais « Maison des droits humains en Iran ». Le groupe est actif depuis deux ans. Son site Internet est accessible à cette adresse : http://www.rahana.org/

70 Amnesty International, Iran : Amnesty International exige la libération immédiate et sans condition de Sohrab Razzaghi, Index : MDE 13/135/2007), 16 novembre 2007,

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 79 La répression croissante de la dissidence en Iran

http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/135/2007/fr

71Mohammad Seyfzadeh a déclaré que parmi les éléments de sa peine figuraient la création du Centre de défense des droits humains, qui défendait les groupes d’opposition, professeurs, étudiants, etc., les discours prononcés à l’étranger pour les groupes d’opposition et le fait de défendre des personnes de ces groupes, ainsi que les « contacts avec les États-Unis et d’autres pays occidentaux ». Il a ajouté que « la peine évoque le fait que le président des États-Unis et l’Union européenne ont condamné dans des déclarations la fermeture des bureaux du Centre ». Voir Fereshteh Ghazi pour Roozonline, « I Do Not Accept This Political Sentence », 4 novembre 2010, http://www.roozonline.com/english/news3/newsitem/article/i-do-not-accept-this-political-sentence.html

72 Les procès des juges et des avocats pour infractions présumées aux règles de conduite professionnelle se tiennent devant le Tribunal disciplinaire des juges, ce qui n’a pas été appliqué dans le cas de Mohammad Ali Dadkhah.

73 Amnesty International, Le fil, février-mars 2011. Vol. 41, Nº 001, (Index : NWS 21/001/2011), 1er février 2011, http://www.amnesty.org/fr/library/info/NWS21/001/2011/fr

74 Amnesty International a écrit aux autorités iraniennes en mars 2011 pour les exhorter d’enquêter à ce sujet mais n’a pas reçu de réponse jusqu’à ce jour.

75HRA Iran, « Vaziat-e Javid Houtan Kiyan dar goftogou ba Naghi Mahmoudi », 12 septembre 2011, http://www.hra-news.org/2/00/9648-1.html et The Times, « Torture and exile: the fate of lawyers supporting Ashtiani », 8 octobre 2011.

76 HRA-Iran, « Mahkoumiat-e ghati-e Houtan Kiyan vakil-e dadgostari beh shesh sal habs-e ta’ziri », 19 février 2012, https://hra-news.org/00/11398-1.html

77 Bild am Sonntag, « Ich dachte, ich sterbe jetzt. Die machen dich fertig », 5 février 2012, http://www.bild.de/politik/inland/iran/ich-dachte-ich-sterbe-jetzt-1-22457916.bild.html 78Dans ses observations finales, le Comité des droits de l’homme a insisté sur « le grand nombre de défenseurs des droits des femmes ayant été arrêtés et détenus, y compris des volontaires et des membres de la campagne Un million de signatures ».

79Campagne pour l’égalité, « Three Year Mandatory Prison Sentence for Fereshteh Shirazi Upheld in Appeals », 7 janvier 2012, http://www.we-change.org/english/spip.php?article942

80Le 12 décembre 2011, l’Association des droits de l’homme d’Iran, HRA-Iran, a déclaré : « Malgré l’état de santé de Mahboubeh Karami, la Commission médicale de l’organisation des prisons iraniennes a statué qu’elle était en état de purger sa peine. La famille de Mahboubeh a essayé de faire annuler la peine d’emprisonnement en raison de la détérioration de son état de santé mais la Commission médicale a refusé. Par ailleurs, le père de Mahboubeh a été hospitalisé il y a quelques semaines ». Voir HRA-Iran, « Mokhalefat-e commission-e pezeshki ba azadi-e Mahboubeh Karami », 12 décembre 2011, http://hra-news.org/1389-01-27-05-27-21/10664-1.html. Son père est décédé depuis.

81Amnesty International, Submission to the Commission on the Status of Women regarding concerns about the harassment and imprisonment of women, including rights defenders and members of minorities, in Iran (Index: MDE 13/071/2011), 10 août 2011, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/071/2011/en

82 Le montant total s’élevait à 30 750 euros, 2 900 dollars des Etats-Unis et 200 livres sterling, mais les sources dont il les aurait reçues n’ont pas été précisées.

83 Il a été signalé que le parlement iranien aurait augmenté en 2011 les peines relatives aux visites en Israël, les renforçant de trois mois à un maximum de cinq ans de prison. Voir BBC Persian, « Mojazat-e safar-e Iranian beh Israell tashdid shod », 14 novembre 2012, http://www.bbc.co.uk/persian/rolling_news/2011/11/111114_l03_rln_iran_israel_travelling.shtml

84 Le blog de Somaveh Tohidlou est/était disponible sur : http://smto.ir/

85 Selon le Comité pour la protection des journalistes, au 1er décembre 2011, 42 journalistes iraniens étaient détenus ou emprisonnés, et plus de 150 ont été arrêtés depuis les élections de 2009. Voir CPJ,

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012

80 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » La répression croissante de la dissidence en Iran

« Journalistes en prison: une augmentation considérable », https://www.cpj.org/fr/2011/12/journalistes- en-prison-une-augmentation-considerab.php ; et CPJ, « Fear, Uncertainty Stalk Iranian Journalists in Exile » http://www.cpj.org/2012/02/irans-vast-diaspora.php

86 En mai 2010, le Groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire a conclu que la détention d'Isa Saharkhiz était arbitraire et a demandé au gouvernement iranien sa libération immédiate et sans conditions, requête qui est restée sans effet. Cf le Groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire, « Communication addressed to the Government on 8 January 2010: Concerning Mr. Isa Saharkhiz, (Opinion No. 8/2010 (Islamic Republic of Iran)) », http://www.unwgaddatabase.org/un/Default.aspx?LangType=1033

87 International Human Rights Campaign for Human Rights in Iran, « They Keep My Father In Prison For His Criticism of Khamenei, Says Son of Imprisoned Journalist », 10 août 2011, http://www.iranhumanrights.org/2011/08/saharkhiz-sentence/

88 Lettres de prisonniers présentées par Kaleme, « Jam’i az javanan-e zendani-e band-e 350: Sepah-e pasdaran va masoulan-e zendan-e Evin ra moghasser-e shahadat-e Hoda Saber midanim », 12 août 2011, http://www.kaleme.com/1390/05/21/klm-69022/

89 Sa lettre peut être lue sur http://www.iranhumanrights.org/2010/09/letter-momeni-khamanei/

90 Les signataires étaient Mohsen Aminzadeh, Mohsen Mirdamadi, Bahman Ahmadi Amou’i, Abdollah Momeni, Milad Asadi, Abdollah Ramezanzadeh, Emad Behavar, Mostafa Tajzadeh, Mojtaba Tehrani, Ali Jamali, Mohammad Hossein Khourbak, Mohammad Davari, Amir Khosrow Dalirsani, Kayvan Samimi, Esma’il Sahabeh, Mohammad Farid Taheri Ghazvini, Feizollah Arabsorkhi, Behzad Nabavi, Abolfazl Ghadiani, Majid Dorri, Zia Nabavi, Mehdi Karimian Eghbal, Mohammad Reza Moghisseh, Ali Malihi, Mohammad Javad Mozaffar et Hassan Asadi Zeidabadi.

91 Kaleme, « Shekayat-e 26 zendani siyasi az vezarat-e etela’at va sepah-e pasdaran: shakanje shodeh-im », 11 mai 2011, http://www.kaleme.com/1390/02/21/klm-57736/

92 Maison des droits humains en Iran, « Serious concerns for grave health of prisoner Abdollah Momeni », 28 janvier 2012, http://www.rahana.org/en/?p=12316

93 Iranian Journalists, « Pishbini-haye yek rouznameh negar ke be vagheiat peyvast amma monjar be panj sal zendan shod », 18 décembre 2011, http://khabarnegaran.info/article.php3?id_article=648

94 Les arrestations sont recensées dans le rapport suivant : Amnesty International, Iran. Vague d'arrestations en amont des élections législatives, (Index : MDE 13/004/2012), 31 janvier 2012, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/004/2012/fr

95 Vers le 31 juillet, Medhi Karroubi a été transféré dans un petit appartement sous contrôle du ministère du Renseignement. Dans une lettre publiée en septembre sur Sahamnews, le site web de son mari, Fatemeh Karroubi explique qu'il a demandé ce transfert afin d'alléger les restrictions touchant les autres résidents de l'immeuble. La famille cherchait un autre logement qui aurait l'agrément du ministre, lequel avait imposé des conditions strictes, dont l'interdiction de rendre l'adresse publique. La famille de Medhi Karroubi, femme, fils, belle-fille et petits-enfants compris, ont été autorisé à lui rendre visite pour l'Aïd el- Fitr, fête musulmane marquant la fin du Ramadan qui se situait fin août.

96 Radio Zamaneh, « Concern for Opposition Leader under house arrest », 26 janvier 2012, http://www.radiozamaneh.com/english/content/concern-opposition-leader-under-house-arrest

97 Kaleme, « 39 zendani-ye siyasi: ghadam nakhost dar tahghigh-e hakemiat-e melli; azadi mousavi va karroubi ast », 25 janvier 2012, http://www.kaleme.com/1390/11/05/klm-88130/

98 Pour de plus amples informations sur la répression des syndicalistes indépendants, voir Amnesty International, Iran. Déterminés à vivre dans la dignité. Le combat des syndicalistes iraniens pour leurs droits (Index : MDE 13/024/2011), 10 juin 2011, disponible sur : http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/024/2011/fr

99 Radio Zamaneh, « 150 professors to be dismissed or forced into retirement », 22 mai 2011.

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 81 La répression croissante de la dissidence en Iran

Disponible sur http://radiozamaneh.com/english/content/150-professors-be-dismissed-or-forced- retirement

100 Mehr News, « Sholeh Saadi bar asas-e mahkoumiat-e ghabli bazdasht shod », 10 avril 2011, http://www.mehrnews.com/fa/newsdetail.aspx?newsid=1285730 et Amnesty International, Iran: fear of ill treatment or torture, Qasem Sho'leh Sa'di, (Index: MDE 13/006/2003), 4 mars 2003, disponible sur http://www.amnesty.org/fr/library/info/mde13/006/2003/en

101Maison des droits humains en Iran, Ghasem Sholeh Saadi az Evin be dadgah montaghel va mohakemeh shod, 7 septembre 2011, http://www.rahana.org/archives/44441

102 BBC Persian, Sodour-e hokm-e do sal zendan baray-e Ghasem Sholeh Saadi, 4 octobre 2011, http://www.bbc.co.uk/persian/iran/2011/10/111004_l19_rln_iran_prison_sholeh_saadi.shtml

103 Cette lettre est disponible en persan sur http://www.kaleme.com/1390/04/23/klm-65334/.

104 Cette lettre est disponible en persan sur http://www.kaleme.com/1390/10/20/klm-86089/

105 La traduction en anglais de la lettre du docteur Maleki’ est disponible sur Persian2English, I testify to 32 years of crime, 11 septembre 2011, http://persian2english.com/?p=22689

106 Cette lettre en anglais est disponible sur http://en.irangreenvoice.com/article/2011/may/05/3108

107 Selon les articles 110 et 111 du Code pénal iranien, la « sodomie » est passible de la peine de mort. La méthode d’exécution est à la discrétion du juge. Les actes sexuels sans pénétration entraînent des peines de 60 à 100 coups de fouet, mais si un de deux hommes est un non-musulman et est considéré comme la partie active, il risque l’exécution (articles 121, 123 et 124 du Code pénal. L’article 122 dispose que les actes sans pénétration répétés quatre fois et ayant été punis à chaque fois, seront passibles de la peine de mort la quatrième fois. Les relations sexuelles entre femmes sont passibles de 100 coups de fouet ou, lors de la quatrième condamnation, de la peine de mort (articles 129 et 131). Si deux femmes « sont couchées sous la même couverture sans nécessité », elles seront condamnées à moins de 100 coups de fouet, et à la quatrième fois, à 100 coups de fouet (article 134).

108 Voir la page sur l’Iran sur le site Internet du Bureau du Haut Commissariat aux droits de l’homme disponible sur http://www.ohchr.org/FR/Countries/AsiaRegion/Pages/IRIndex.aspx. Il contient des liens vers les rapports de tous les organes de traités de l’ONU, notamment les observations finales du Comité des droits de l’homme

109 Persian2English, « Wife of political prisoner: When I told authorities about the tortures, they laughed at me », 16 novembre 2011, http://persian2english.com/?p=23251

110 La lettre en anglais est disponible sur: http://persianbanoo.wordpress.com/2011/11/26/journalist- siyamak-ghaderi-my-head-was-pushed-into-a-dirty-toilet-to-force-false-confession/ /

111 HRA-Iran, « Security Forces Block Reconstruction of Ahl-e Haqq’s Shrine », 10 décembre 2011, http://www.en-hrana.org/index.php?option=com_content&view=article&id=589:security-forces-block- reconstruction-of-ahl-e-haqqs-shrine&catid=13:religious-minorities&Itemid=13

112 La Constitution iranienne ne reconnaît que l’islam, le christianisme, le judaïsme et le zoroastrisme. Les minorités religieuses qui ne sont pas reconnues par la Constitution, comme les Baha’is, les Ahl-e Haq, sont particulièrement exposées à des discriminations et des persécutions. Les musulmans sunnites, les soufis, les derviches et les musulmans chiites qui s’opposent à la vision étatique conférant une base théologique à la République islamique d’Iran sont aussi susceptibles d’être persécutés.

113 En novembre 2008, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a statué que leur détention était arbitraire et a demandé leur libération immédiate. La décision du groupe de travail peut être consultée à l’adresse suivante : http://www.unwgaddatabase.org/un/Document.aspx?id=2358&terms=(+Iran+

114 Communauté Baha’i internationale, Imprisonment of Baha’i educators, 6 février 2012, http://news.bahai.org/human-rights/iran/iran-update/#educationalprogramme

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012

82 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » La répression croissante de la dissidence en Iran

115 Amnesty International a reçu des informations suggérant qu’au moins 65 chrétiens évangéliques ont été arrêtés entre mars 2008 et mars 2009. Le nombre des arrestations est passé à 152 personnes entre mars 2009 et mars 2010, puis à 232 personnes entre mars 2010 et mars 2011. La plupart des individus ont été détenus pendant moins de 24 heures, mais certains l’ont été pendant plus d’un mois. Voir Christian Solidarity Worldwide, Iran: Summary of Concerns and Recommendations, août 2011, http://dynamic.csw.org.uk/article.asp?t=report&id=142&rnd=0.4813043

116 Mohabat News, « Trial of Farshid Fathi, a Christian prisoner was held », 17 février 2012, http://www.mohabatnews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=4008:trial-of-farshid- fathi-a-christian-prisoner-was-held&catid=36:iranian-christians&Itemid=279

117 Mohabat News, « Condition of Three Detainees arrested in attack on the Assembly of God church of Ahwaz Unknown », 22 janvier 2012 http://www.mohabatnews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=3839:condition-of- three- detainees-arrested-in-attack-on-the-aog-church-of-ahwaz-unknown&catid=36:iranian- christians&Itemid=279, Mohabat News, « Concern over health conditions of Pastor Farhad Sabokroh in prison », 4 février 2012, http://www.mohabatnews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=3921:concern-over- health-conditions-of-pastor-farhad-sabokroh-in-prison&catid=36:iranian-christians&Itemid=279 et Farsi Christian News Network, « Details of the savage attack on The Church of “Assembly of God” in Ahvaz », 22 janvier 2012, http://www.fcnn.com/index.php?option=com_content&view=article&id=2754:details-of-the-savage- attack-on-the-church-of-assembly-of-god-in-ahvaz&catid=127:iranian-christian&Itemid=593

118 L’apostasie n’est pas définie en tant qu’infraction dans le Code pénal iranien. Cependant, certains individus sont parfois condamnés pour cette « infraction » sur la base de travaux ou d’édits religieux par des clercs islamiques de haut rang, conformément à l’article 167 de la Constitution qui demande aux juges d’employer leurs connaissances de la loi islamique pour statuer sur des affaires dans lesquelles aucune loi n’est applicable.

119 Mohabat News, « Iranian Christian convert sentenced to one year of deprivation of education », 7 février 2012, http://www.mohabatnews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=3954:iranian-christian- convert-sentenced-to-one-year-of-deprivation-of-education&catid=36:iranian-christians&Itemid=279

120 Amnesty International, Iran : Des dignitaires religieux chiites victimes de violations des droits de l'homme (Index : MDE 13/024/1997), 2 juin 1997, http://www.amnesty.org/fr/library/asset/MDE13/024/1997/fr/20b62a8a-ea77-11dd-b05d- 65164b228191/mde130241997fr.html

121 Amnesty International, Iran : Des partisans de l'Ayatollah Boroujerdi arrêtés, (Index : MDE 13/112/2010), 14 décembre 2010, http://www.amnesty.org/fr/library/asset/MDE13/112/2010/fr/2fe1dd5b-a995-41ef-9ddb- d128bf1dca65/mde131122010fra.html

122 Amnesty International, Iran: CAS D’APPEL Saïd Saedi et Ajlal Qavami, défenseurs des droits humains et journalistes kurdes (Index: MDE 13/080/2006), 13 juillet 2006, http://www.amnesty.org/fr/library/asset/MDE13/080/2006/fr/18ca0cc1-d411-11dd-8743- d305bea2b2c7/mde130802006fr.html

123 Amnesty International, Iran: Des Azéris arrêtés au cours de manifestations pour un lac, (Index: MDE 13/038/2011), 4 avril 2011, http://www.amnesty.org/fr/library/asset/MDE13/038/2011/fr/d87e28f3- 98a2-4ebe-8bb4-106ce0f9aec1/mde130382011fra.html

124 HRA-Iran, « Ebrahim Rashidii dar hashtomin rooz-e etesab-e ghaza », 31 janvier 2012, http://hra- news.org/1389-01-27-05-27-21/11235-1.html. Des informations sur l’ arrestation de 2006 sont contenues dans le rapport d’Amnesty International, Iran : Détention au secret/ craintes de torture et de mauvais traitements/prisonniers d’opinion présumés (Index: MDE 13/039/2006), 1er avril 2006, http://www.amnesty.org/fr/library/asset/MDE13/039/2006/fr/a209fd84-d43d-11dd-8743- d305bea2b2c7/mde130392006fr.html et dans les rapports de suivi.

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012 « Nous avons pour ordre de vous écraser. » 83 La répression croissante de la dissidence en Iran

125 Voir, par exemple, HRA-Iran, « Dast-e kam 60 tan az shahrvandan-e Arab dar khouzestan bazdasht shodand/ be hamrah-e asami », https://hra-news.org/1389-01-27-05-25-54/11299-1.html, ou Radio Zamaneh, « Widespread arrests in southwestern Iran » , 5 février 2012, http://www.radiozamaneh.com/english/content/widespread-arrests-southwestern-iran ou Iranian Minorities Human Rights Organization, « Three Ahwazi Arabs killed under torture », 5 février 2012, http://www.iranianminorities.org/2012/02/imhro-three-ahwazi-arabs-killed-under.html

126 Le camp d’Ashraf a déjà été attaqué plusieurs fois par les forces de sécurité irakiennes, provoquant la mort de dizaines de résidents et faisant de nombreux blessés. Plus récemment, les troupes irakiennes ont ravagé le camp le 8 avril 2011, en faisant un usage excessif de la force et en tirant à balle réelles sur les résidents. Quelque 36 résidents, dont huit femmes, ont été tués, et plus de 300 autres ont été blessés. Depuis l’assaut d’avril 2011, les autorités irakiennes ont renforcé les contrôles sur les résidents du camp et ont restreint l’accès à certains traitements médicaux. En décembre, les autorités irakiennes ont confirmé officiellement leur intention de fermer le camp.

127 Amnesty International, « L’Iran exécute deux hommes arrêtés durant les troubles de 2009 », 24 janvier 2011, http://www.amnesty.org/fr/news-and-updates/iran-hangs-two-activists-detained-during- 2009-unrest-2011-01-24

128 Amnesty International, Mykonos’ trial provides further evidence of Iranian policy of unlawful state killings, Index : MDE 13/015/1997, 9 avril 1997, http://amnesty.org/fr/library/info/MDE13/015/1997/en

129 Plusieurs gouvernements ont fait référence à la surveillance gouvernementale iranienne, y compris la République fédérale d’Allemagne dans ses rapports annuels du Bureau de la protection de la Constitution de 2002 et 2004 ; et la Suède, dans des rapports de 2003, 2004 et 2009. 130 Une description de son arrestation et des tortures qu’il a subies est contenue dans le rapport d’Amnesty International, Iran. Une élection contestée, une répression accrue (Index : MDE 13/123/2009), 10 décembre 2009, http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE13/123/2009/fr

131 BBC, « The harassment of BBC Persian journalists », de BBC Persian, 3 février 2012, http://www.bbc.co.uk/blogs/theeditors/2012/02/the_harassment_of_bbc_persian.html

132 Organisation suisse d’aide aux réfugiés, « Iran: traitement des requérants d’asile déboutés - Renseignement de l’analyse-pays de l’OSAR », 18 août 2011, http://www.fluechtlingshilfe.ch/herkunftslaender/arabia/iran/iran-behandlung-von-abgewiesenen- asylsuchendenSee Voir page 6 du rapport. Il est attribué à un juge iranien anonyme, lors d’une entrevue datant de juillet 2011.

133 Kayhan News, « Khoda konad fak va famileman nafahmand ma dar inja cheghadr khar shodeh-im », 26 avril 2011, http://kayhannews.ir/900206/2.htm#other208

Amnesty International février 2012 Index : MDE 13/002/2012