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La chenille de l'hybride au dernier stade larvaire (L5) consomme goulûment des feuilles de copalme d'Amérique jusqu'au pétiole - Cliché P. Goetgheluck

Par Dominique Ades, Raymond Cocault, Robert Lemaître, Robert Vuattoux et Robert Zaun . Graellsia isabelae (mâle) et (femelle) Hybridation réussie Dans la famille des Saturniidés – alias Attacidés – des filles naissent du mariage de l’Isabelle de France et du Papillon lune du Japon. des éleveurs amateurs apportent dont a éclos une seule chenille ainsi leur contribution à la science donnant un mâle parfait. Cette ex- officielle - Insectes s’en fait réguliè- périence nous a amenés à revoir rement l’écho 1 - réalisant parfois notre mode opératoire. des prouesses pour rapprocher dans d’improbables étreintes ■ Conduite des accouplements mâles et femelles d’espèces que la D’un côté d’un filet, des femelles Femelle de l'hybride - Cliché P. Goetgheluck Nature tient autrement éloignées. d’Isabelle qui émettent leur phéro- En 1994, une première tentative mone de rapprochement des es expériences d’hybridation d’hybridation entre mâle de G. sexes. De l’autre, les mâles de la L entre espèces proches mais de isabelae et femelle d’A. artemis n’ a même espèce avec parmi eux une zones géographiques éloignées donné lieu qu’à un seul accouple- femelle de Papillon lune ; leurrés, servent à vérifier qu’il s’agit bien ment malgré une quantité impor- ils tentent alors de copuler avec d’espèces distinctes, auquel cas, tante de femelles présentées. elle. Lors d’une première tentative, soit elles s’avèrent incapables de Trois œufs viables ont été pondus Madame Lune chasse les copuler, soit leur descendance est Messieurs Isabelle à grands coups stérile. Depuis plusieurs années 1 Imago n° 36, Insectes n°89 et n°123, cf biblio d’ailes ou se laissaient tomber

Insectes 34 n°139 - 2005 (4) à leur approche, rendant ainsi nous obtenons 4 chrysalides mâles, impossible tout accouplement. dont une diapausante, et 5 femelles Hypothèse : les femelles Actias parfaitement formées et pesant n’ont pas la même heure d’appel 2 entre 3 et 5 g. Au terme d'un délai que les femelles Graellsia. Ne pou- d’1 mois environ, les mâles naîtront vant décaler ces dernières, nous naturellement, contrairement aux L1 modifions le cycle d’éclairement femelles dont l'émergence sera dé- Jeune chenille de premier stade (L1) de des Actias de façon à le faire coïn- clenchée par une injection d’ecdy- l'hybride - Cliché R. Lemaître cider avec celui, nocturne, et sone. Elles émergeront parfaite- l’heure d’appel de Graellsia. Nous y ment également, sauf la plus parvenons à tâtons, en procédant à grosse qui ne déploiera pas complè- plusieurs décalages par tranches tement ses ailes et présentera une d’une heure, et sommes récom- malformation antennaire. pensés : les deux femelles présen- tées s’accouplent volontiers. ■ Description des imagos Les imagos hybrides sont simi- ■ Conduite des élevages laires à celui que nous avions ob- Cependant, sur la centaine d’œufs tenu antérieurement : les mâles L2 qui seront pondus par la suite, seuls ont les ailes vert jaune et les ner- Au deuxième stade (L2), la chenille s'éclaircit une quinzaine, issus de la même vures de la couleur foncée de et prend une coloration orangée - femelle, se révèleront viables. l’Isabelle. Ces dernières sont Cliché R. Lemaître L’élevage se fera en intérieur sur moins marquées chez les femelles branches de coupées, et la membrane est plus fine (en dans différents modules et bou- papier à cigarette !) que chez les teilles d’élevage. On déplorera parents et vert pâle, ceci étant pro- quelques pertes à la première mue bablement dû à une carence phy- puis en L5 et lors de la nymphose. siologique habituelle. r Les cocons, tissés dans les parties basses des cages d’élevages à la ma- Contact : Robert Lemaître nière Graellsia, auront une struc- 9 rue du Petit-Pas 78610 Le Perray-en-Yvelines. L3 ture intermédiaire entre celles des cocons des géniteurs. Au final, Remerciements à Reinhold Le troisième stade larvaire (L3) se caractérise Höge (Allemagne) qui nous a par l'apparition d'une couleur de fond verdâtre - Cliché R. Lemaître 2 Heure d’appel : instant où les femelles commencent procuré la souche d’A. artemis. à émettre leur phéromones pour attirer les mâles. Bibliographie • D. Ades, R. Cocault, R. Lemaître et R. Vuattoux, Imago n° 36, 1989, 3-7. Obtention de femelles hybrides de Graëlls mâle et Actias luna Linné femelle. • D. Ades, R. Cocault, R. Lemaître et R. Vuattoux et R. Zaun, Insectes n° 89, (2), 1993, 10-11, Hybridation entre Graellsia isabellae Graëlls mâle et Hübner femelle. • D. Ades, R. Cocault, R. Lemaître et R. Vuattoux, Sciences Nat. 81, (1), 1994. Hybridation entre deux Actiens : Graellsia isabellae Graëlls mâle et Actias truncatipennis Sonthonnax femelle. • D. Ades, R. Cocault, R. Lemaître et R. Vuattoux, Lambillionea, XCIV, (2), juin 1994. Hybridations ternaires entre Actiens : Actias isabellae mâle et les hybrides femelles d’Actias luna L. et d’Actias truncatipennis Sonth. • D. Ades, R. Cocault, R. Lemaître et R. Vuattoux, Lambillionea, XCV, (1), mars 1995, 26-30. Hybridation entre Graellsia isabellae mâle et Actias artemis femelle. Un succès… Un sauvetage. ( ) • D. Ades, R. Cocault, R. Lemaître et R. Vuattoux, Insectes n° 123, (4), 2001, 17-18. Hybridation entre Graellsia isabelae (Graëlls) mâle et Actias isis (Sonthonnax) femelle (Lépidoptères, Saturniidae). Mâle de l'hybride - Cliché R. Lemaître

Insectes 35 n°139 - 2005 (4)