Pat Metheny Unity Group Pat Metheny Guitar, Guitar Synthesizer Ben
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Jazz & beyond Jeudi / Donnerstag / Thursday 15.05.2014 20:00 Grand Auditorium Pat Metheny Unity Group Pat Metheny guitar, guitar synthesizer Ben Williams double bass Chris Potter saxophone Giulio Carmassi keyboards, vocals, percussion, trumpet, guitar Antonio Sánchez drums ~130’ sans entracte / ohne Pause / without intermission No audio or video recording and no photography of any kind is allowed in the hall at any time. This includes cellphones. Madame, Monsieur, Le groupe européen de banques privées, KBL European Private Bankers, s’engage jour après jour à promouvoir la qualité et le savoir-faire dans toutes ses activités. Quoi de plus naturel, dès lors, que de soutenir la création artistique avec qui nous partageons les mêmes valeurs. Banquiers privés, nous sommes d’abord à l’écoute de nos clients. Européens, nous sommes ouverts sur le monde et son patrimoine musical, porteur de cohésion et vecteur de dialogue entre les citoyens de tous les pays où nous sommes présents. À Luxembourg, l’idée que nous avons de notre rôle dans la société nous a conduits à participer à la croissance, en termes de qualité et d’opportunités, de l’offre culturelle de la Place à travers un partenariat avec la Philharmonie. C’est pourquoi notre groupe de banquiers privés européens est particulièrement heureux de vous accueillir ce soir pour le concert exceptionnel du guitariste de jazz Pat Metheny. Je vous souhaite, Madame, Monsieur, une excellente soirée musicale. Yves Stein Group CEO KBL European Private Bankers Le petit Prince du Missouri Pat Metheny Guillaume Bregeras D’abord une silhouette. Puis un regard. Et enfin, un son. Il faut vivre les premières secondes d’un concert de Pat Metheny comme à travers un téléobjectif, en se rapprochant petit à petit, en concentrant son attention sur le sujet principal jusqu’à ce que le paysage qui l’entoure devienne flou. On entre dans ce monde, son monde, comme on entre en amour ou en religion. Sans se retourner. Happé puis ivre, le temps se dilate alors pour ceux qui veulent bien laisser tomber toutes les défenses. C’est qu’il n’est pas si facile de s’abandonner à celui que l’on surnomme depuis plusieurs décennies «le petit Prince du jazz». Le mythe est te- nace, au point d’en devenir suspect pour celui qui n’a pas encore vécu cette expérience. Et toujours aussi miraculeux pour les affi- cionados. Plus de quarante ans de carrière sans aucune traversée du désert, vingt Grammy Awards et des milliers de concerts n’ont pas af- fecté celui qui a déjà gagné sa place au panthéon de la musique américaine. La meilleure preuve? Ce recueil de 400 pages édité en 2000 regroupant les transcriptions de quasiment tous les mor- ceaux qu’il a écrit, depuis son premier album «Bright Size Life» en 1975. Un projet qu’il n’a pas initié, mais auquel il a collaboré et considère comme son «projet le plus excitant depuis (son) pre- mier album». Aucun autre jazzman n’a bénéficié d’une telle idolâtrie dans l’histoire du jazz… Autre marqueur, le regard de ses paires. Il est très compliqué de trouver un musicien pour dire du mal de l’enfant du Missouri. Même ceux qui peuvent apparaître les plus éloignés stylistiquement, comme le saxophoniste et compositeur 4 John Zorn, rallient cette majorité qui pourrait semblée outra- geuse appliquée à d’autres domaines: «Ça remonte à ses premières années au sein du label ECM, lorsque tout le monde écoutait sa mu- sique. Sa passion et sa maîtrise étaient hallucinante… Je retiens aussi sa capacité à transcender le langage d’une musique qui en fait ne m’excite pas tant que ça.» Sur la route Ce respect unanime et transgénérationnel s’explique aussi en grande partie par sa présence sur le terrain, là où les seigneurs du jazz ont écrit l’histoire. Sur scène, le contact est direct, sans filtre. Comme sur un ring, chaque son, chaque regard et chaque mimique sont scrutés. Des micro-moments, aussi brefs qu’ins- tinctifs, qui témoignent de l’implication totale de l’artiste dans la pratique de son art. C’est d’ailleurs là, face aux gens et finale- ment au milieu des siens, qu’il se sent le mieux. «Je préfère de très loin jouer en live», déclare-t-il dans une récente interview pour un magazine américain. Mais la passion n’est pas son unique mo- teur pour passer autant de temps en tournée. Cette présence s’ex- plique par une simple nécessité vitale. Pour exister, il faut être entendu. Et pour être entendu, il faut être vu. C’est en tous cas le paradigme qui a prévalu dans le jazz du 20e siècle. «La clé a été de construire une solide base de fans très tôt, en jouant entre 200 et 300 concerts par an pendant une quinzaine d’années. Je ne vois pas beaucoup de groupes qui se sont engagés en faisant autant de sacri- fices, sans gagner beaucoup d’argent et sur une très longue période pour construire une audience.» Les longues heures de route pour aller d’une salle à une autre ont longtemps façonné le quotidien de Pat Metheny et de son groupe, forcément composé de person- nalités compatibles artistiquement, mais surtout humainement. C’est aussi pourquoi lorsqu’il évoque encore Lyle Mays, son compagnon de route de toujours, ses yeux s’allument encore un peu plus: «Il est mon alter-ego comme Billy Strayhorn était celui de Duke Ellington.» Cet engagement total l’amène tardivement à la paternité, seule autre passion aujourd’hui à ses yeux. Ses trois enfants ont un 5 regard différent sur la musique, et lui offrent une analyse qui le projette dans le temps présent sans ménagement. Comme ce jour où son fils aîné lui déclare au petit déjeuner avoir compris «que toute musique comportant de la guitare électrique était datée du 20e siècle»… Sympathique camouflet pour un père adulé par ail- leurs dans le monde entier. Et pour garder cette ancrage néces- saire dans la vie actuelle, pour ne pas s’isoler d’un monde qui, chaque jour, s’éloigne plus rapidement de celui qu’il était la veille, le guitariste héros s’entoure de jeunes artistes: «Je recherche toujours ce jeune gars qui possède la vision de ce que le jazz pourrait être demain. Qui capte ce qui se passe dans la rue, dans la vraie vie, qui est informé et façonné par l’esprit et les événements du présent.» Se démarquer à tout prix Comme il aime le rappeler dans chacune de ses interviews, «être musicien est difficile. Ce n’est pas simple de jouer année après année tout en apportant des idées neuves». Quel autre moyen alors que de pui- ser ailleurs l’essence de sa créativité? Reconnu pour son talent de compositeur, c’est aussi par sa capacité à dépeindre des uni- vers, lorsqu’il interprète la musique de ses confrères, qu’il se dé- marque. Sa collaboration avec le contrebassiste Charlie Haden dans l’album «Beyond Missouri Sky» en est l’exemple le plus il- lustre. Il reste totalement connecté aux autres, il émaille le pay- sage sonore de touches d’une peinture qui caractérise sa propre patte. Malgré ses interminables tournées, il arrive à suivre le par- cours de ses contemporains, et de ses maîtres. À participer à leurs albums. À exister au-delà de ses propres frontières. Il est le pont entre Jim Hall et Kurt Rosenwinkle, deux guitaristes de jazz distants de trois générations, mais qui ont en commun toute l’at- tention de ce génie créatif. La filiation, on l’aura compris, joue un rôle prépondérant dans sa carrière. Même si elle n’apparaît pas de manière frontale dans sa musique, elle est là. Depuis qu’on s’est mis à le surnommer le nouveau Wes Montgomery, alors qu’il n’avait que 14 ans, dans la banlieue de Kansas City, il cherche sa propre voie: «Je voulais trouver ma propre manière de jouer, comme Miles Davis par exemple. Et il a fallu qu’à un moment donné je m’interdise de reproduire toute 6 attitude musicale qui pouvait me relier à Wes. Mais certains musiciens vivent comme un serpent qui mue et change de peau. Un jour, ils s’af- fichent d’une manière, et le lendemain, c’est différent. Ils peuvent changer de personnalité, de vêtements… Pour moi, c’est tout l’inverse!» Un son Lorsqu’elle tonne, sa voix résonne. Mais jamais autant que lorsqu’il s’exprime musicalement. Et sa meilleure carte d’identité demeure le son. Un son unique qu’il sculpte depuis son enfance, mais qui passe finalement assez peu par l’équipement. Durant longtemps, Pat Metheny s’est interdit toute collaboration ou jam par crainte de «merdouiller», avec ce son justement. «Pendant des années, de 1977 à 1987, je n’ai jamais rien fait sans mon matériel. Je ne participais à rien si je n’avais pas mes amplis et le reste, c’est pour- quoi je n’ai quasiment rien enregistré d’autre que mes propres albums durant cette période. Puis, en 1987, je me suis retrouvé en Union Sovié- tique avec des musiciens locaux qui organisaient une jam session que je ne pouvais pas refuser. Cette nuit-là, j’ai joué avec une guitare polonaise et un ampli tchèque. Quelqu’un avait enregistré cette soirée et m’a remis la cassette le lendemain. Et là, le choc! Je sonnais comme moi-même! De- puis, je ne m’en fais plus trop…» Malgré ce déclic, le guitariste reste un féru d’équipement et de technique. Une obsession que l’on retrouve par exemple dans son Orchestrion, sorte d’instrument de bord ressemblant à une guitare, mais capable de commander d’autres instruments préprogrammés.