Alias Eddie Constantine.Wps
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"Je n'ai jamais aimé le métier d'acteur, j'ai fait cela pour de l'argent. C'était la seule chose que j'aimais... J'avais tout ce que je voulais. D'ailleurs, j'ai horreur de la violence. Et, dans mes films, on m'assommait, ou m'arrosait d'essence, on me ligotait et je m'en sortais vivant. J'étais invincible. James Bond avant 1 James Bond. Les gens dans la rue m'appelaient Lemmy parce qu'il croyaient tous à Lemmy Caution. Et moi, je détestais ça...". Eddie Constantine 2 Dans les années 60 nous regardions avec mon frère à la télévision quand elle fonctionnait les films d’Eddie Constantine puis ensuite en Super 8 sur un projecteur muet qui projetait le film au ralenti en 18 images secondes, le 24 faisant trembler l’image. Constantine nous paraissait un peur ringard à l’époque et pourtant avec le recul il est quand même un comédien qui était tout à fait valable, créant le personnage de Lemmy Caution comme Roger Moore créera le Saint ou Sean Connery James 3 Bond. En plus et à la différence de ses illustres aînés, il chante bien et fera quelques disques qui marcheront très bien dont « l’homme et l’enfant ». Sa période en Allemagne à la fin de sa vie est tout à fait intéressante mais lui aussi a été très vite oublié et ses films aujourd’hui à part quelques chaînes de cinéma du câble ne sont plus visibles du tout, le noir et blanc explique sans doute cela. 4 Ce 29 octobre 1917, sous le soleil de Los Angeles, un petit homme ouvre les yeux et découvre le sourire de Bella et Maurice, ses parents. Pour eux, arrivés tous deux de Russie treize ans plus tôt, ce petit bonhomme représente le plus merveilleux cadeau. Ils l’appelleront Edward Constantine. Plus tard, certains biographes l'affubleront à tort du nom, plus slave, de Constantinewski ! 5 Au cours des années qui suivront, la famille s’enorgueillira d’un autre garçon, Shubert, et de deux filles, Faye et Evelyn. Même s'il s’use les doigts toute la journée à tailler de fausses pierres précieuses qu’il revend à bon marché, Maurice, artisan bijoutier, n'exerce pas un travail très lucratif. Mais le sourire d'Edward est plus précieux que toutes les pierres qu'il use, fussent-elles vraies. Et le père se plaît à dire: "Nous sommes peut-être des zéros mais sûrement pas des médiocres". Dans la maison, on chante, on danse, on 6 s’amuse pour mieux conjurer le sort qui semble s’acharner sur la famille. S’il n’y a pas toujours à manger pour six, chacun y va de sa bonne humeur. Eddie, comme on surnomme affectueusement Edward, fait ses premiers pas dans cette ambiance joyeuse, pleine d’espoirs et de rêves. L’école ne passionne pas l'enfant outre mesure. Il aime davantage, lorsque le budget familial le permet, aller voir les comédies musicales. Un soir, il remarque une énorme bague qui brille au doigt d'un acteur. En sortant, la tête remplie de 7 couleurs et de notes de musique, il se dit que lui aussi, s’il monte sur scène, portera un jour une bague comme celle qu’il vient de voir. Lorsque les ressources ne sont plus suffisantes, la famille fait ses paquets et s’en va sur les routes, traversant d’Est en Ouest les Etats-Unis, espérant à chaque traversée trouver la fortune au bout du chemin. Tout ce petit monde prend le car pour six longues journées et cinq nuits, en chantant tout au long du trajet. Regardant à travers la fenêtre les chevaux 8 majestueux qui galopent dans la prairie, le petit Eddie rêve que, plus tard, lui aussi enfourchera de beaux pur-sang, cheveux au vent, "au loin dans les plaines…" Le cinéma va bientôt faire son entrée dans la vie de la famille Constantine. Le budget de leurs films ne leur permettant pas d’investir dans de vrais bijoux, les producteurs font appel au savoir-faire de Maurice pour confectionner des parures qui doivent faire illusion. Cette manne financière apporte un peu d’oxygène au budget familial, et surtout de la 9 nourriture à mettre sur la table. Et la petite troupe peut encore chanter. Eddie écoute son père répéter sans cesse ses gammes, cet homme pour qui la carrière de chanteur d’opéra n’aura jamais éclaté au grand jour. Eddie aussi voudrait bien chanter mais avec cette voix qui ne veut pas muer… Qu’importe, il écoute les précieux conseils paternels: "il faut travailler, travailler, travailler". Afin d’aider les siens, Eddie accepte mille et un petits boulots, de vendeur de journaux, à assistant-garagiste, en passant 10 par commis dans une épicerie, un travail qui lui permet de ramener de temps à autre quelques fruits et légumes. Il n’est pas rare que Maurice invite un chanteur d’opéra à passer une soirée avec la famille. Ce soir-là, à marquer d’une pierre blanche dans la vie d’Eddie, c’est le 11 tour d'Igor Gorin. À la fin du repas, le célèbre baryton se met à chanter. Maurice en profite pour l'accompagner… Puis vient le tour d’Eddie, dont la voix a enfin mué: c’est une révélation ! Gorin propose à Maurice d’emmener le petit avec lui à Vienne, afin qu’il étudie le chant. Le papa, qui n’a jamais eu la chance de faire carrière, se plaît à rêver que son fils montera un jour sur une scène d’opéra devant des foules éblouies. Pour Eddie, c’est la première traversée de l’Atlantique. A seize ans, il prend la vie comme elle 12 vient… Ses premiers pas dans Vienne, sont pourtant difficiles: il souffre du mal du pays. Mais bien vite il se fait des amis. Les cours de chant et de piano se succèdent à un rythme soutenu. Il lui faut travailler très dur pour parvenir à placer comme il le faut sa voix de basse profonde. Son professeur de chant, Victor Fuchs, le prend sous son aile, le faisant monter pour la première fois sur scène. Tétanisé par le trac, Eddie se met soudain à cabotiner comme un beau diable pour jouer 13 «Méphisto» avec des effets de manche et de cape. Autant dire qu’il fut bien vite remplacé. Pourtant cette représentation n’aura pas été tout à fait inutile: l'adolescent prend conscience qu’une carrière de chanteur d’opéra ne se construit pas en un jour. Et puis, heureusement il y a Mimi, jeune et 14 belle… L’amour, même à cet âge, ça fait passer le temps. Et Vienne devient, au bras de Mimi, une bien jolie ville. Après «Méphisto», Eddie joue encore dans «La flûte enchantée». Deux années vont s'écouler avant son retour aux Etats-Unis, deux années riches d’expériences… A Providence, Eddie retrouve sa famille prise toujours entre son quotidien de pauvreté et les rêves dorés qui l'habitent. Le jeune homme a maintenant 18 ans. Il veut vivre sa vie et travailler. Sa carrière de chanteur d’opéra lui paraît tellement 15 loin; il ne retournera pas à Vienne. Le voilà donc travaillant dans un garage… Pas très reluisant ! Son professeur, Victor Fuchs, ayant fui les persécutions contre les juifs (car nous sommes déjà en 1935), lui propose de l'employer comme secrétaire et baby- sitter de son fils: pas très folichon non plus ! Avec quelques amis, il forme un groupe de chanteurs, les Mousquetaires, une activité qui lui procure du plaisir à défaut de lui donner à manger. Les engagements sont en 16 effet plutôt rares. Dormant sous le ciel étoilé de Central Park, il découvre les nuits fraîches de New-York. "Justement, regarde… Là… Non, sur la gauche… Cette petite étoile qui semble briller un peu plus que les autres… La mienne peut être…" On n’a pas toujours besoin de la voir pour y croire ! Un jour, on ne sait pas trop pourquoi, les engagements tombent sur le bureau de l’impresario des Mousquetaires. C’est à bride abattue que nos “Gascons yankees” traversent les États-Unis, se produisant 17 dans de petites salles. Mais Les mousquetaires finissent par se séparer, et Eddie retourne chez lui, à Los Angeles, la Mecque du cinéma… Il propose ses services au studios. La réponse, à défaut d’être positive, est claire: "Votre visage ne répond pas aux canons de l’esthétique cinématographique moderne". Toutefois, le public étant friand 18 de comédies musicales, les producteurs cherchent des choristes. Et voilà donc Eddie endossant un nouveau costume. De figuration en figuration, il finit par faire de belles rencontres, comme Douglas Fairbanks Jr. Il se lie d’amitié avec Joan Crawford à qui il donne des cours de chant, ou encore John Garfield, qu’il double dans diverses scènes de bagarres. En 1939, lorsque la Seconde Guerre Mondiale éclate en Europe, l’Amérique, se croyant intouchable, cherche l'évasion dans le rêve. Les radios proposent de vrais 19 spectacles musicaux, et qui dit “musique” dit “chanteur”, et qui dit “chanteur” dit “choriste”. Eddie se lance dans l’aventure au Radio City Music Hall de New York… Le jeune homme commence à vivre de sa passion du chant, et c’est bien l’essentiel. Cette activité lui donne l’occasion de croiser la star montante, Frank Sinatra. Au hasard des couloirs du Radio City, il aperçoit, une jeune femme blonde. Lui, d’un naturel si timide, sent son cœur battre la mesure du succès du moment, «Our love».