VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON

Année 2013 - Thèse n° 01

ACTUALITE SUR LA DEMODECIE FELINE ET PRESENTATION DE CAS CLINIQUES

THESE

Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 19 Février 2013 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire

par

TROUVE Coline Né(e) le 13 Septembre 1985 à Grenoble (38)

2 VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON

Année 2013 - Thèse n° 01

ACTUALITE SUR LA DEMODECIE FELINE ET PRESENTATION DE CAS CLINIQUES

THESE

Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 19 Février 2013 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire

par

TROUVE Coline Né(e) le 13 Septembre 1985 à Grenoble (38)

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4 5 6 Remerciements ______

A Monsieur le Professeur Michel FAURE de la Faculté de Médecine de Lyon

pour m’avoir fait l’honneur d’accepter la présidence de ce jury de thèse. Avec l’expression de mon plus profond respect et de mes plus sincères remerciements.

A Monsieur le Professeur Didier PIN de VetAgroSup campus vétérinaire de Lyon

pour m’avoir proposé ce sujet et m’avoir encadré tout au long de ce travail, pour son implication, sa gentillesse, sa patience et sa disponibilité. Avec toute ma gratitude et mon respect les plus sincères.

A Monsieur le Professeur Gilles BOURDOISEAU de VetAgroSup campus vétérinaire de Lyon

Pour avoir accepté de juger mon travail et de faire partie de ce jury de thèse. Sincères remerciements.

A Monsieur le Docteur Thierry BORD

Pour avoir donné son autorisation à l’utilisation d’un de ses cas cliniques. Sincères remerciements.

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A ma famille

9 10 Table des matières ______

Introduction…………………………………………………………………...23

Partie 1 : Etiologie et pathogénie de la démodécie féline………………...... 25

I. Définition et généralités ...... 27 A. Définition ...... 27 B. Synonymie ...... 27

II. Présentation des parasites ...... 29 A. Description des parasites ...... 29 1. Généralités ...... 29 a) De nombreuses espèces parasitées ...... 29 b) Historique ...... 30 (1) cati ...... 30 (2) Demodex gatoi ...... 31 (3) Demodex species ...... 31 2. Critères taxonomiques ...... 31 3. Critères morphologiques ...... 32 a) Demodex cati ...... 33 (1) L’adulte ...... 33 (a) Le mâle ...... 33 (b) La femelle ...... 34 (2) L’œuf ...... 37 (3) La larve ...... 37 (4) Les nymphes ...... 38 (a) La protonymphe ...... 38 (b) Le deutonymphe ...... 38 b) Demodex gatoi ...... 39 (1) L’adulte ...... 39 (2) L’œuf ...... 42 c) Demodex species ...... 42 (1) Première description ...... 42 (2) Une nouvelle espèce ?...... 42 (3) Dernières actualités ...... 43 d) Rapide comparaison des trois Demodex ...... 45 4. Critères biologiques ...... 46 a) Habitat ...... 46 (1) Quelques rappels anatomiques ...... 46 (a) L’épiderme ...... 46 (b) Les follicules pileux ...... 46 (2) Habitat de Demodex cati ...... 47 (3) Habitat de Demodex gatoi ...... 47 (4) A propos de Demodex species ...... 48

11 (5) Comparaison de l’habitat des Demodex du chat ...... 49 b) Nutrition ...... 49 c) Cycle parasitaire ...... 50 d) Résistance dans le milieu extérieur...... 52 5. Transmission de la démodécie féline ...... 53 a) Transmission interspécifique ...... 53 b) Zoonose ...... 54 c) Contagion intraspécifique...... 54 (1) Demodex cati ...... 54 (2) Demodex gatoi ...... 54 B. Epidémiologie ...... 56 1. Fréquence - Espèces affectées ...... 56 2. Répartition géographique ...... 56 3. Facteurs intrinsèques ...... 57 a) Race ...... 57 b) Sexe ...... 58 c) Age ...... 58 d) Hérédité ...... 59 e) Etat immunitaire ...... 59 4. Facteurs extrinsèques ...... 60 a) L’alimentation...... 60 b) Traitements ultérieurs ...... 60 c) Maladies concomitantes ...... 60 5. Récapitulatif des données biologiques et épidémiologiques ...... 62

III. Pathogénie de la démodécie ...... 63 A. Différentes actions pathogènes des Demodex ...... 63 B. Pathogénie de la démodécie canine ...... 64 1. La démodécie localisée ...... 64 2. La démodécie généralisée du jeune ...... 65 3. La démodécie de l’adulte ...... 68 C. Pathogénie de la démodécie féline ...... 68 1. Pas d’équivalent à la démodécie juvénile ...... 68 2. Une immunodépression acquise nécessaire ? ...... 69 a) A propos de Demodex cati ...... 69 b) A propos de Demodex gatoi ...... 72 D. Pathogénie de la démodécie humaine ...... 73 1. Bref descriptif des parasites ...... 73 a) Généralités ...... 73 b) Localisation et cycle parasitaire ...... 73 c) Epidémiologie et transmission ...... 73 2. Implication des Demodex dans certaines dermatoses humaines ...... 74 a) Généralités ...... 74 b) La rosacée ou l’exemple d’une controverse ...... 75 (1) Relation entre démodécie et rosacée ...... 76 c) Autres localisations ...... 78 3. Actualité sur la pathogénie des Demodex parasitant l’homme ...... 79 a) Action mécanique et antigénique des parasites ...... 79 b) Une immunodépression nécessaire ? ...... 79 c) Existence d’un caractère héréditaire ? ...... 80

12 (1) Rappel d’immunologie ...... 80 (2) Génétique et pathogénie de la démodécie humaine...... 81 (a) Etudes réalisées ...... 81 (b) Hypothèses avancées ...... 82 (c) Schéma récapitulatif ...... 84 d) Association de malfaiteurs ? ...... 85

Partie 2 : Etude clinique, diagnostic et traitement de la démodécie féline...87

IV. Etude clinique ...... 89 A. Présentation et illustration des lésions cutanées rencontrées lors de démodécie ...... 89 1. Alopécie et dépilation ...... 89 2. Erythème ...... 89 3. Séborrhée et comédons ...... 90 4. Lichénification et squamosis ...... 91 5. Croûtes ...... 91 6. Erosions, ulcérations et excoriations...... 92 7. Pustules ...... 93 8. Papules, plaques et nodules ...... 94 9. Otite érythémato-cérumineuse ...... 94 B. Symptomatologie de la démodécie à Demodex cati ...... 95 1. Formes localisées ...... 95 a) Définition...... 95 b) Topographie lésionnelle ...... 96 2. Forme généralisée ...... 96 3. Lésions cutanées ...... 97 (1) Liées à la présence du parasite ...... 97 (2) Consécutives au prurit lorsqu’il est présent ...... 97 C. Symptomatologie de la démodécie à Demodex gatoi ...... 97 1. Topographie lésionnelle ...... 97 2. Nature des lésions ...... 99 D. Cas particulier de l’otodémodécie ...... 99 1. Demodex cati ...... 99 a) Otodémodécie seule ...... 99 b) Otodémodécie liée à une démodécie localisée ou généralisée ...... 101 2. Demodex gatoi ...... 101 E. Complications ...... 101 F. Tableaux récapitulatifs des lésions rencontrées dans les cas publiés ...... 101 1. Démodécie à Demodex cati ...... 102 2. Démodécie à Demodex gatoi ...... 103 3. Démodécie à Demodex species et à Demodex non identifié ...... 104

V. Diagnostic ...... 105 A. Un diagnostic clinique et épidémiologique difficile à réaliser ...... 105 1. Des notions épidémiologiques vagues ...... 105 2. Des signes cliniques communs ...... 105 B. Un diagnostic différentiel nécessaire et vaste ...... 105 a) Diagnostic différentiel avec les dermatoses alopéciantes prurigineuses, bref descriptif ...... 105 (1) Les dermatites allergiques ...... 105

13 (2) Les autres ectoparasitoses ...... 107 (3) Les pyodermites bactériennes ...... 109 (4) La dermatite à Malassezia...... 110 (5) Les troubles du comportement ...... 111 (6) Les maladies auxquelles il faut penser…...... 111 b) Diagnostic différentiel avec les dermatoses alopéciantes non prurigineuses, bref descriptif ...... 112 (1) La dermatophytose ...... 112 (2) Les affections acquises ...... 113 (a) Généralisées ...... 113 (b) Localisées ...... 114 c) Diagnostic différentiel avec les maladies à l’origine d’une otite externe cérumineuse 115 C. Diagnostic expérimental ...... 115 1. Raclage cutané ...... 115 a) Raclage cutané profond : mise évidence de Demodex cati ...... 116 b) Le raclage cutané superficiel : mise en évidence de Demodex gatoi ...... 117 2. Trichogramme ...... 118 3. Biopsie cutanée de surface ...... 119 4. Biopsie cutanée ...... 119 5. L’écouvillonnage auriculaire ...... 120 6. Conduite à tenir...... 120 D. Recherche d’une maladie associée ...... 120 E. Lésions histologiques ...... 121 1. Présentation des lésions histopathologiques rencontrées lors de démodécie ...... 121 a) Concernant l’épiderme et les follicules pileux ...... 121 b) Concernant le derme ...... 122 2. Illustration de certaines des lésions histopathologiques observées lors de démodécie 123 3. Lésions observées lors d’une démodécie à Demodex cati ...... 126 4. Lésions observées lors d’une démodécie à Demodex gatoi ...... 126 5. Récapitulatif des lésions histopathologiques rencontrées dans la littérature ...... 126 a) Démodécie à Demodex cati ...... 127 b) Démodécie à Demodex gatoi et Demodex species ...... 128

VI. Traitement de la démodécie ...... 129 A. Quand traiter ? ...... 129 B. Mesures préliminaires ...... 130 C. Le sulfure de chaux ...... 131 D. L’amitraze ...... 132 1. Pharmacologie ...... 132 2. Toxicité ...... 133 a) Chez le chat ...... 133 b) Chez l’homme ...... 134 3. Mode d’emploi de l’amitraze ...... 134 E. Les lactones macrocycliques systémiques ...... 135 1. Pharmacologie ...... 135 2. Toxicité ...... 136 3.Les milbémycines ...... 136 a) La milbémycine oxime ...... 136

14 (1) Pharmacologie ...... 136 (2) Mode d’emploi ...... 136 b) La moxidectine ...... 137 (1) Pharmacologie ...... 137 (2) Mode d’emploi ...... 137 4. Les avermectines...... 138 a) L’ivermectine ...... 138 (1) Pharmacologie ...... 138 (2) Mode d’emploi ...... 138 b) La doramectine ...... 140 (1) Pharmacologie ...... 140 (2) Mode d’emploi ...... 140 c) La sélamectine ...... 140 (1) Pharmacologie ...... 140 (2) Mode d’emploi ...... 140 F. Autres molécules rencontrées dans la littérature ...... 142 a) La roténone ...... 142 (1) Pharmacologie ...... 142 (2) Mode d’emploi ...... 142 b) Organophosophorés ...... 143 (1) Malathion ...... 143 (a) Pharmacologie ...... 143 (b) Mode d’emploi ...... 143 (2) Fenchlorphos ...... 144 (3) Phosmet ...... 144 c) Rétinoïdes : étrétinate et acitrétine ...... 144 (1) Pharmacologie ...... 144 (2) Mode d’emploi ...... 145 G. Tableaux récapitulatifs des différents traitements et de leur efficacité ...... 146 1. Sulfure de chaux et amitraze ...... 146 2. Les lactones macrocycliques systémiques ...... 147 3. Les autres molécules ...... 147 H. Conclusion sur les traitements… ...... 148 I. Traitement de l’otodémodécie ...... 149 J. Traitements des affections concomitantes ...... 150 K. Suivi thérapeutique ...... 151 L. Prophylaxie ...... 151 M. Pronostic ...... 151

Partie 3 : Présentation de cas cliniques ……………………………………153

Cas clinique numéro 1 : Tommy……………………………………………………………155

Cas clinique numéro 2 : Noisette……………………………………………………………169

Cas clinique numéro 3 : Bambino…………………………………………………………...179

Cas clinique numéro 4 : Colline……………………………………………………………..187

Cas clinique numéro 5 : Minou…………………………………………………………...…199

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Discussion……………………………………………………………………………….…..209

Conclusion……………………………………………………………………215

Bibliographie………………………………………………………...... 217

16 Table des illustrations ______

Table des photos

Photos 1 et 1 bis : Demodex cati adulte. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 35 Photo 2 : Œuf de Demodex cati. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 37 Photos 3 et 4 : Demodex gatoi adulte. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)...... 40 Photo 5 : Demodex species adulte. (Kano et al. 2011)...... 43 Photo 6 : Nombreux Demodex cati au sein de la lumière de l’infundibulum d’un follicule pileux, visualisés sur une coupe histologique. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)...... 47 Photo 7 : Localisation de Demodex gatoi au niveau de la couche cornée, visualisé sur une coupe histologique, avec agrandissement. (Saari et al. 2009)...... 48 Photo 8 : Demodex canis adulte, dans la lumière de l’infundibulum d’un follicule pileux, tête dirigée vers le bas. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 52 Photo 9 : Démodécie localisée chez un chien. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)...... 65 Photo 10 : Démodécie généralisée chez un jeune chien. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 67 Photo 11 et 12 : Dépilation généralisée liée à une démodécie. (clichés unité dermatologie VetAgroSup)...... 89 Photo 13 et 14 : Erythème chez un chat présentant une démodécie. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 90 Photos 15 (A) et (B) : (A) Nombreux comédons sur la face ventrale de l’abdomen. (B) Illustration d’une peau séborrhéique. (clichés unité dermatologie VetAgroSup)...... 90 Photo 16 (A) et (B) : (A) Squamosis, les squames sont visible à l’œil nu. (B) Lichénification au niveau de la face d’un chat présentant une démodécie. Les dermatoglyphes sont accentués. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 91 Photo 17 : Croûte. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 92 Photos 18 (A) et (B) : (A) Erosion. (B) Excoriations au niveau de l’oreille chez un chat présentant une démodécie associée à du prurit. (clichés unité dermatologie VetAgroSup).....92 Photo 19 : Exemple d’ulcération chez un chat démodécique. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 93 Photo 20 : Pustule sur le pavillon auriculaire d’un chat présentant une démodécie. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 93 Photo 21 : Papules situées au niveau du pavillon auriculaire d’un chat démodécique. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 94 Photo 22 : Otite externe érythémato-cérumineuse chez un chat, avec des sécrétions brunes et sèches. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)...... 95 Photo 23 : Lésions observées en région dorso-lombaire chez un chat présentant une dermatite par allergie aux piqûres de puces. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)...... 106 Photo 24 : Lésions localisées sur la tête d’un chat lors d’hypersensibilité alimentaire. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)...... 107 Photos 25 (A) et (B) : (A) Lésions observées sur la tête d’un chat lors de thrombiculose et (B) aspect général du chat. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 108

17 Photos 26 (A) et (B) : (A) Lésions sévères observées lors d’une phtiriose et (B) agrandissement permettant la visualisation des nombreuses lentes. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 109 Photo 27 : Lésions observées lors d’acné féline. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 110 Photos 28 (A) et (B) : (A) Aspect général d’un chat présentant une dermatite à Malassezia et (B) lésions observées en région abdominale ventrale. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 110 Photo 29 : Lésions observées lors de pemphigus foliacé chez le chat. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 112 Photo 30 : Lésions observées lors d’une dermatophytose due à Microsporum canis chez le chat. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 113 Photos 31 (A) et (B) : Lésions observées chez un chat (A) en région abdominale ventrale et (B) en région péribuccale lors d’une dermatite exfoliative liée à un thymome. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 114 Photos 32 (A) et (B) : (A) Réalisation d’un raclage cutané profond chez un chat à l’aide d’une lame de scalpel et (B) observation de la rosée sanguine au niveau de la zone de prélèvement. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 117 Photo 33 : Examen au microscope du produit d’un raclage cutané mettant en évidence Demodex cati. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 117 Photo 34 : Examen au microscope du produit d’un trichogramme et mise en évidence de deux Demodex cati. (cliché Docteur Thierry Bord)...... 119 Photo 35 : Pullulation de Demodex cati au sein de follicules pileux, associée à un œdème et à un discret infiltrat inflammatoire. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 123 Photo 36 : Agrandissement de la photo 44, ciblé sur un follicule pileux composé. (cliché unité dermatologique de VetAgroSup)...... 124 Photo 37 : Pustule contenant des débris de Demodex. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 124 Photo 38 : Furoncle centré sur un Demodex. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)....125 Photo 39 : Folliculite murale d’interface lymphocytaire démodécique, associée à une réaction inflammatoire importante et à de l’œdème. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 125 Photo 40 : Tommy. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 162 Photo 41 : Dépilation sur la face. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 163 Photo 42 : Dépilation au niveau du pavillon auriculaire et lichénification. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 163 Photo 43 : Dépilation en zone ventrale du cou et au niveau des membres thoraciques. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 163 Photo 44 : Dépilation au niveau des membres pelviens. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 163 Photo 45 : Zone nummulaire, alopécique et non inflammatoire localisée entre les omoplates. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 163 Photo 46 : Aspect général de Tommy présentant une démodécie responsable d’une alopécie généralisée. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 163 Photo 47 : Demodex visualisé au microscope après la réalisation de raclages cutanés au niveau du pavillon auriculaire externe et des membres thoraciques. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 164 Photo 48 : Agrandissement d’un des Demodex, les caractéristiques morphologiques étant celle de Demodex cati. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 164 Photo 49 : Repousse du poil sur la face. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 165

18 Photo 50 : Persistance de l’alopécie au niveau des pavillons auriculaires. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 165 Photo 51 : Extension de l’alopécie concernant le thorax et la face ventrale du cou. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 165 Photo 52 : Extension de l’alopécie concernant la face ventrale de l’abdomen et les membres postérieurs. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 165 Photo 53 : Vue rapprochée d’une zone alopécique. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 165 Photo 54 : Aspect général de Tommy. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 165 Photo 55 : Repousse du poil au niveau de la tête. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) Photo 56 : Repousse du poil au niveau des pavillons auriculaires et du cou. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 166 Photo 57 : Repousse du poil au niveau thoracique et abdominal. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 166 Photo 58 : Détail du flanc gauche. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 166 Photo 59 : Repousse du poil en face ventrale de l’abdomen. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 166 Photo 60 : Aspect général de Tommy. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 166 Photo 61 et 62 : Disparition des lésions sur l’ensemble du corps. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 167 Photo 63 : Aspect général de Tommy. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 167 Photo 64 : Noisette. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 176 Photo 65 : Lésions localisées sur l’ensemble de la face. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 177 Photo 66 : Lésion de dermatite pyotraumatique au niveau de la joue droite. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 177 Photo 67 : Erythème et dépilation en région périoculaire et périauriculaire. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 177 Photo 68 : Détail d’une ulcération au niveau du crâne. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 177 Photo 69 : Excoriations et érythème en zone périauriculaire. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 177 Photo 70 : Croûte en face dorsale du cou. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 177 Photo 71 : Aspect général de Noisette. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 178 Photo 72 : Relative stabilité des lésions au niveau de la tête et du cou. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 178 Photo 73 : Alopécie extensive au niveau de l’abdomen ventral. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 178 Photo 74 : Bambino. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 185 Photo 75 : Dépilation érythémateuse isolée sur le chanfrein. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 186 Photo 76 : Erythème et croûtes au niveau du pavillon auriculaire externe. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 186 Photo 77 : Nombreuses papules au niveau du pavillon auriculaire interne. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 186 Photo 78 : Pavillon auriculaire interne érythémateux. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 186 Photo 79 : Lésion dépilée, nummulaire, non inflammatoire, située entre les omoplates. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)...... 186

19 Photos 80 et 81 : Zones dépilées et érythémateuse comportant des croûtes en région périlabiale, observées lors de la première consultation à VetAgroSup. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)...... 198 Photo 82 : Demodex gatoi mis en évidence dans le produit d’un raclage cutané, lors du diagnostic de démodécie effectué 4 ans plus tôt. (cliché Docteur Pierre Relin)...... 198 Photo 83 : Vue de profil de Demodex gatoi. (cliché Docteur Pierre Relin)...... 198 Photo 84 : Minou. (cliché Docteur Thierry Bord)...... 206 Photo 85 : Aspect général de Minou. (cliché Docteur Thierry Bord)...... 207 Photo 86 : Lésion dépilée et érosive au niveau du tronc. (cliché Docteur Thierry Bord)...... 207 Photo 87 : Squamosis sur l’ensemble du tronc. (cliché Docteur Thierry Bord)...... 207 Photo 88 : Dépilations érythémateuses en zone périanale. (cliché Docteur Thierry Bord)...207 Photo 89 : Aspect général de l’observation du produit d’un trichogramme au microscope. Présence de trois Demodex. (cliché Docteur Thierry Bord)...... 208 Photo 90 : Produit d’un trichogramme observé à plus fort grossissement. Présence de deux Demodex. (cliché Docteur Thierry Bord)...... 208 Photo 91 : Demodex identifié comme Demodex cati. (cliché Docteur Thierry Bord)...... 208

20 Table des tableaux

Tableau 1 : Présentation des différentes espèces de Demodex en fonction de l’espèce hôte. D’après (Scott et al. 2001) ……………………………………………………….….….……29 Tableau 2 : Taxinomie de Demodex cati. D’après (Grassé et André 1949) et (Grzimek et Fontaine 1973)………………………………………………………………………….….…32 Tableau 3 : Taille des formes adultes de Demodex cati. D’après (Löwenstein et al. 2005)…36 Tableau 4 : Taille de l’œuf et des différents stades immatures de Demodex cati. D’après (Desch et Nutting 1979)………………………………………………………………………39 Tableau 5 : Taille des formes adultes de Demodex gatoi. D’après (Löwenstein et al. 2005).41 Tableau 6 : Taille des formes adultes de Demodex species. D’après (Löwenstein et al. 2005)...... 44 Tableau 7 : Comparaison de la taille des formes adultes des trois Demodex rencontrés chez le chat. D’après (Löwenstein et al. 2005)……………………………………………………….45 Tableau 8 : Récapitulatif des données biologiques et épidémiologique des Demodex du chat...... 62 Tableau 9 : Récapitulatif des lésions cutanées rencontrées lors de démodécie à Demodex cati...... 102 Tableau 10 : Récapitulatif des lésions cutanées rencontrées lors de démodécie à Demodex gatoi…………………………………………………………………………………………103 Tableau 11 : Récapitulatif des lésions cutanées rencontrées lors de démodécie à Demodex species et à Demodex non identifié………………………………………………………….104 Tableau 12 : Récapitulatif des lésions histopathologiques observées lors de démodécie à Demodex cati………………………………………………………………………………...127 Tableau 13 : Récapitulatif des lésions histopathologiques observées lors de démodécie à Demodex gatoi et Demodex species…………………………………………………………128 Tableau 14 : Recensement des cas de démodécie traités à base de sulfure de chaux ou d’amitraze…………………………………………………………………………………....146 Tableau 15 : Recensement des cas de démodécie traités à base de lactones macrocylciques systémiques………………………………………………………………………………….147 Tableau 16 : Recensement des cas de démodécie traités à l’aide d’autres molécules...... 147 Tableau 17 : Récapitulatif des cinq cas cliniques…………………………………………..209

21 Table des figures

Figure 1 : Représentation schématique d’un Demodex cati femelle en face ventrale (A) et d’un Demodex cati mâle en face dorsale (B). D’après (Desch et Nutting 1979) (Desch et Hillier 2003)...... 35 Figure 2 : Représentation schématique du gnathosoma et du podosoma d’un Demodex cati mâle en vue latérale. D’après (Desch et Nutting 1979) (Desch et Hillier 2003)...... 36 Figure 3 : Représentation schématique de l’œuf et des différents stades immatures de Demodex cati. D’après (Desch et Nutting 1979)...... 39 Figure 4 : Représentation schématique d’un Demodex gatoi femelle en face ventrale. D’après (Löwenstein et al. 2005) (Neel et al. 2007)...... 41 Figure 5 : Représentation schématique d’un Demodex species femelle en face ventrale. D’après (Löwenstein et al. 2005)...... 44 Figure 6 : Comparaison des représentations schématiques des différentes espèces de Demodex femelles rencontrées chez le chat. D’après (Löwenstein et al. 2005)...... 45 Figure 7 : Représentation schématique des différentes localisations de Demodex cati et de Demodex gatoi au sein de la peau...... 49 Figure 8 : Représentation schématique du cycle parasitaire de Demodex canis...... 51 Figure 9 : Représentation schématique de l’existence d’un caractère héréditaire responsable d’une immunodépression de l’immunité à médiation cellulaire lors de démodécie généralisée juvénile chez le chien...... 66 Figure 10 : Schéma récapitulatif des mécanismes immunitaires mis en place en présence de Demodex chez un individu présentant un phénotype résistant...... 84 Figure 11 : Schéma récapitulatif des mécanismes immunitaires mis en place en présence de Demodex chez un individu présentant un phénotype sensible. Développement d’une démodécie clinique...... 84 Figure 12 : Représentation schématique des localisations lésionnelles les plus fréquentes lors de démodécie à Demodex cati, localisée au niveau de la tête...... 96 Figure 13 : Représentation schématique des localisations lésionnelles les plus fréquentes lors de démodécie à Demodex gatoi au niveau de la tête...... 98 Figure 14 : Représentation schématique des localisations lésionnelles les plus fréquentes lors de démodécie à Demodex gatoi au niveau du tronc...... 98

22 Introduction ______

La démodécie féline est une dermatose parasitaire peu fréquente et mal connue des praticiens vétérinaires. Elle est due à plusieurs espèces de Demodex : Demodex cati, Demodex gatoi et une troisième espèce, dont l’existence reste à prouver, Demodex species. C’est une dermatose alopéciante et prurigineuse. Les connaissances actuelles sont limitées et de nombreux aspects de cette maladie restent inconnus. En effet, depuis la publication du premier cas de démodécie féline en 1880 par Megnin, seuls 91 cas ont été rapportés dans la littérature vétérinaire et, contrairement à la démodécie canine, peu de dermatologues s’y sont intéressés.

Le but de ce travail est de rassembler et de synthétiser les connaissances concernant la démodécie féline.

Dans une première partie, nous étudions les généralités concernant la démodécie féline, son étiologie et sa pathogénie. Les connaissances acquises sur la démodécie canine et sur la démodécie humaine, plus étudiées, seront proposées car elles peuvent fournir des pistes de réflexion. Dans une seconde partie, nous développons la symptomatologie, la clinique, le diagnostic et le traitement de la démodécie féline. Ce dernier, bien qu’ayant beaucoup évolué depuis 30 ans, ne fait pas encore l’objet d’un consensus. Enfin, dans une troisième partie, nous présentons cinq cas cliniques que nous comparons aux différents cas publiés dans la littérature.

23 24 Partie 1 ______

Etiologie et pathogénie de la démodécie féline

25 26 I. Définition et généralités

A. Définition

La démodécie féline est une dermatose parasitaire polymorphe, rare, infectieuse, contagieuse dans certains cas, spécifique et non zoonotique, due à la multiplication et à l’action pathogène de diverses espèces d’acariens du genre Demodex : Demodex cati, Demodex gatoi et une troisième espèce dont le nom n’a pas encore été choisi, Demodex species. L’ensemble du cycle de Demodex cati se déroule dans les follicules pilosébacés alors que Demodex gatoi et Demodex species vivent dans la couche cornée de l’épiderme de leur hôte. (Chesney 1989)

Elle se traduit principalement par de l’alopécie, de l’érythème et un prurit d’intensité variable, de quasiment nulle à très forte. Les symptômes de la démodécie du chat peuvent différer en fonction de l’espèce de Demodex mise en cause. Classiquement, lors d’une démodécie à Demodex cati, une alopécie et de l’érythème sont observés alors que, le prurit est un signe clinique majeur, lors de démodécie à Demodex gatoi. (Chesney 1989) Toutefois, ce n’est, en aucun cas, une règle absolue et tous les cas de figure sont envisageables.

La démodécie féline peut se présenter sous deux formes : - la démodécie localisée, habituellement peu extensive - la démodécie généralisée, que l’on considère classiquement associée à une immuno- dépression due à une maladie sous-jacente ou secondaire à un traitement immunosuppresseur.

B. Synonymie

La traduction anglaise de démodécie féline est feline demodicosis.

Différents synonymes ou appellations existent pour la démodécie : - Gale démodécique ou folliculaire ou gale rouge, sachant que ces termes sont à proscrire car la démodécie n’est pas une gale car due à un acarien qui n’est pas un acarien psorique.

27 - Démodécidose, terme parfois employé par les médecins dermatologues - Otodémodécie, terme correspondant à une forme particulière de démodécie à l’origine d’une otite externe. - Pododémodécie, terme correspondant à une atteinte exclusive ou préférentielle des extrémités des membres. (Scott et al. 2001)

28 II. Présentation des parasites

A. Description des parasites

1. Généralités

a) De nombreuses espèces parasitées

Les Demodex sont des acariens de la famille des Démodécidés dont ils constituent l’unique genre. Ces arthropodes parasitent la quasi-totalité des espèces de mammifères, que ce soient des animaux domestiques, de laboratoire ou des mammifères marins, appartenant à huit ordres : les insectivores, les chiroptères, les carnivores, les rongeurs, les lagomorphes, les artiodactyles, les périssodactyles et les primates. (Guaguère 1980)

Parmi les espèces d’intérêt vétérinaire, on peut citer :

Espèce de Demodex Espèce hôte Demodex cati Demodex gatoi Chat (Felis domesticus) Demodex species Demodex canis Demodex cornei Chien (Canis familiaris) Demodex injai Demodex species Furet (Mustela furo) Demodex caviae Cobaye (Cavia porcellus) Demodex aurati Hamster (Cricetus cricetus) Demodex criceti Demodex cuniculi Lapin (Oryctolagus cuniculus) Demodex nanus Rat (Rattus rattus) Demodex ratti Demodex bovis Bovin (Bos taurus) Demodex ghanensis Demodex ovis Ovin (Ovis aries) Demodex caprae Caprin (Capra hircus) Demodex phylloides Porcin (Sus domesticus) Demodex caballi Equin (Equus caballus) Demodex equi Demodex cervi Cervidés (Cervus elaphus) Demodex folliculorum Homme (Homo sapiens) Demodex brevis

Tableau 1 : Présentation des différentes espèces de Demodex en fonction de l’espèce hôte. D’après (Scott et al. 2001)

29 Nous comparerons souvent les Demodex du chat et du chien. Une rapide description de ces derniers est donc nécessaire. Il existe chez le chien, deux espèces différentes de Demodex : ce sont Demodex canis, et deux variants d’une même espèce, Demodex spp forme courte (= Demodex cornei) et Demodex spp forme longue (= Demodex injai). Demodex canis mesure de 150 à 250 μm de long et vit dans les follicules pileux. (Nutting et Desch 1978) Demodex cornei mesure de 113 à 165 μm et vit dans la couche cornée de l’épiderme. (Chesney 2008) Demodex injai mesure de 334 à 361 μm de long et vit dans les follicules pileux et les glandes sébacées. (Desch et Hillier 2003)

b) Historique

(1) Demodex cati

Les Demodex ont été décrits pour la première fois en 1841 par Henle. (Chesney 1989)

Les Demodex les plus étudiés sont ceux de l’homme où deux espèces distinctes ont été découvertes : Demodex folliculorum et Demodex brevis. (Chesney 1989) Les parasites, observés chez les autres espèces, ont, au début, été considérés comme des variétés ou des sous-espèces de Demodex folliculorum et ont donc été nommés d’après ce dernier (Demodex folliculorum spp canis, par exemple). Cette terminologie impliquait une transmission inter-espèce. Ceci a été remis en cause depuis, sachant que, sur la cinquantaine d’espèces de mammifères concernées jusqu’à aujourd’hui, chacune présente sa ou ses propres espèces de Demodex. (Chesney 1989)

Concernant le chat, Leydig, en 1859, est le premier à parler de Demodex. Bien qu’il pressente que ce parasite représente une espèce différente, il ne lui attribue pas de nom spécifique. En 1877, Megnin le baptise Demodex folliculorum spp cati. (Mégnin 1880) En 1919, Hirst donne au parasite un statut spécifique en le nommant Demodex cati. (Hirst 1919) Toutefois, ce n’est qu’en 1979, qu’une description complète en est fournie par Desch et Nutting. (Desch et Nutting 1979)

30 (2) Demodex gatoi

Au cours des études, il a été remarqué que certains mammifères, incluant l’homme et le hamster Mesocricetus auratus, étaient parasités par deux espèces différentes de Demodex. Les auteurs ont ensuite suggéré que la coexistence, de plusieurs espèces de Demodex par espèce hôte, représentait plus la règle que l’exception. (Chesney 1989) Chez le chat, cette prédiction a été étayée lorsqu’un parasite, jusqu’alors inconnu, a été observé. (Conroy 1982) D’autres études ont confirmé l’existence de cette nouvelle espèce de Demodex. (Medleau et al. 1988) (Wilkinson 1983) (McDougal et Novak 1986) (Carlotti et al. 1986) A noter que certains cas antérieurs à cette découverte, présentés comme provoqués par Demodex cati, pourraient être dus à cette autre espèce comme le suggère les photographies illustrant les articles. Cette dernière a été nommée Demodex gatoi. (Chesney 1989)

(3) Demodex species

Enfin, une troisième espèce de Demodex a été mise en évidence chez le chat. Elle est décrite de façon précise, pour la première fois, en 2005 par Löwenstein, qui la rapproche de celle décrite par Chesney en 1988. (Löwenstein et al. 2005) (Chesney 1988) Elle est de nouveau décrite en 2011 par Kano. (Kano et al. 2011) L’existence même de cette troisième espèce est encore discutée et des observations supplémentaires sont nécessaires pour confirmer ou infirmer cette hypothèse. Cette nouvelle espèce ne possède pas encore de nom propre et lorsque nous la citerons, dans cette étude, nous la nommerons Demodex species.

2. Critères taxonomiques

Les Demodex sont des parasites appartenant à l’embranchement des Arthropoda (Arthropodes), au sous-embranchement des (Chélicérates) et à la classe des Arachnida (Arachnides). (Grassé et André 1949) (Grzimek et Fontaine 1973)

31 Ils font partie : - de l’ordre des (Acariens), caractérisé par un corps divisé en trois parties, le gnathosoma, le podosoma et l’opisthosoma, - de la super-famille des Prostigmata (Prostigmates), caractérisée par une paire de stigmates respiratoires situés à la base des chélicères mais difficilement visibles, - de la famille des (Démodécidés), caractérisée par un aspect vermiforme et des pattes atrophiées. (Grassé et André 1949) (Grzimek et Fontaine 1973)

Taxinomie Subdivisions Caractéristiques … et associés … de Demodex cati…

- = métazoaires Embranchement Arthropoda - squelette chitineux - appendices articulés

Sous-embranchement Antennata Chelicerata - chélicères et pédipalpes

Merostoma - respiration trachéale Classe Pentopoda Arachnida

Araneae - corps non segmenté, divisé en 3 Scorpionidae parties, le gnathosoma, le podosoma et Ordre Pseudoscorpionidae Acari l’opisthosoma Uropygidae … - stigmates respiratoires à la base du Cryptostigmata (= Sarcoptoïdea) gnathosoma Mesostigmata (= Gamosoïdea) Super-famille Prostigmata - taille : quelques centaines de μm Metastigmata (= Ixodoïdea) - pattes en 2 groupes Myobiidae Cheyletidae - aspect vermiforme Famille Demodecidae Thrombiculidae - pattes atrophiées Leeuwenhoekiidae Genre Demodex Espèce Demodex cati

Tableau 2 : Taxinomie de Demodex cati. D’après (Grassé et André 1949) et (Grzimek et Fontaine 1973)

3. Critères morphologiques

Les Demodex sont des acariens de petite taille invisibles à l’œil nu. Plus ou moins allongés, vermiformes, ils présentent une morphologie très caractéristique et sont facilement reconnaissables. (Desch et Nutting 1979)

32 a) Demodex cati

(1) L’adulte

(a) Le mâle

La longueur moyenne du mâle est de 181,7 µm, opisthosoma compris, ce dernier représentant environ les 2/3 de la longueur. (Desch et Nutting 1979)

Le gnathosoma, ou rostre, qui correspond à la partie antérieure, est de forme trapézoïdale et il est plus large, 16,1 µm, que long, 14,7 µm. Il porte deux chélicères styliformes et deux pédipalpes à trois articles surmontés de deux minuscules épines dentelées. Il possède de minuscules soies subgnathosomales situées antéro-latéralement par rapport au bord antérieur du bulbe pharyngé, qui est en forme de fer à cheval. Les épines dorsales supracoxales de 2 µm de long, espacées l’une de l’autre de 13 µm, sont dirigées vers la ligne médiane du gnathosoma et sont partiellement encastrées dans la cuticule de celui-ci. (Desch et Nutting 1979)

Le podosoma, qui correspond à la région moyenne, est long de 52,2 µm et large de 26,4 µm. Il porte 4 paires de pattes régulièrement espacées. Celles-ci sont atrophiées et présentent chacune une paire de griffes tarsales, distalement bifides, portant un large éperon dirigé caudalement. L’organe sensoriel, le solénidion, est antéro-dorsal à la griffe dorsale des pattes I et II mais n’existe pas sur les griffes III et IV. Les épimères transversaux des pattes se rejoignent sur le plan médian du podosoma, en face ventrale. L’orifice génital est dorsal et se présente sous la forme d’une étroite fente de 5 µm de long, située dans une protubérance ovale au niveau des pattes II. La paire crâniale des tubercules podosomaux est située entre les pattes I et II et la paire caudale au niveau des pattes II, de part et d’autre de la fente génitale, en face dorsale. Les deux tubercules d’une même paire sont espacés de 12 µm. Le pénis mesure 18,5 µm de long. (Desch et Nutting 1979)

L’opisthosoma qui correspond à la région postérieure mesure en moyenne 114,2 µm de long et 22,4 µm de large.

33 Il est annelé, strié transversalement et se termine en pointe mousse. L’organe opisthosomal, ou proctodeum, de 10 à 13 µm de long s’étend antérieurement à partir d’un pore localisé au 1/5 postérieur de l’opisthosoma. (Desch et Nutting 1979)

(b) La femelle

La longueur totale de la femelle est d’environ 219 µm et l’opisthosoma représente les 2/3 de cette longueur. (Desch et Nutting 1979)

Le gnathosoma, long de 16,2 µm et large de 18,4 µm, ainsi que les structures associées, sont similaires à celles décrites chez le mâle. (Desch et Nutting 1979)

Le podosoma est long de 58,7 µm et large de 27,2 µm. Les pattes et les épimères transversaux présentent les mêmes caractéristiques que chez le mâle. Par contre les paires de tubercules podosomaux dorsaux sont absentes. L’orifice génital femelle correspond à une simple fente longitudinale de 2,9 µm située sur la face ventrale et s’étendant caudalement en arrière des épimères transversaux IV. (Desch et Nutting 1979)

L’opisthosoma, long de 143,9 µm et large de 25,4 µm, présente les mêmes stries transversales et la même terminaison que chez le mâle. Le proctodeum, de même longueur que chez le mâle, s’étend postérieurement depuis un pore situé à la moitié postérieure de l’opisthosoma. (Desch et Nutting 1979)

34

Photos 1 et 1 bis : Demodex cati adulte. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

chélicère 1 : gnathosoma 1 bulbe pharyngé 2 : podosoma 3 : opisthosoma soie subgnathosomale

2 paires de pattes atrophiée épine dorsale 1 supracoxale tubercule podosomal crânial épimères III et IV 2 pénis griffes tarsales tubercule podosomal vulve caudal

oeuf

3 stries transversales

stries transversales 3 pore

proctodeum proctodeum

pore (en face ventrale) extrémité 50 A pointue B µm Figure 1 : Représentation schématique d’un Demodex cati femelle en face ventrale (A) et d’un Demodex cati mâle en face dorsale (B). D’après (Desch et Nutting 1979) (Desch et Hillier 2003)

35 tubercule podosomal caudal

pénis

tubercule podosomal crânial

épine dorsale supracoxale

chélicère

solénidion

4 paires de pattes atrophiées

2 1 20 µm Figure 2 : Représentation schématique du gnathosoma et du podosoma d’un Demodex cati mâle en vue latérale. D’après (Desch et Nutting 1979) (Desch et Hillier 2003)

En μm Mâle Femelle Longueur 14,7 (+/- 1,2) 16,2 (+/- 1,9) Gnathosoma Largeur 16,1 (+/- 1,3) 18,4 (+/- 1,2) Longueur 52,2 (+/- 2,6) 58,7 (+/- 2,6) Podosoma Largeur 26,4 (+/- 2,8) 27,2 (+/- 3,2) Longueur 114,2 (+/- 17,0) 143,9 (+/- 25,4) Opisthosoma Largeur 22,4 (+/- 2,6) 25,6 (+/- 2,7) Corps Longueur 181,7 (+/- 17,9) 219,0 (+/- 27,4) Organe sexuel Longueur pénis - 18,5 (+/- 0,9) vulve – 2,9 (+/- 0,3)

Tableau 3 : Taille des formes adultes de Demodex cati. D’après (Löwenstein et al. 2005)

Comparaison avec Demodex canis : Demodex cati et Demodex canis ont la même morphologie, à quelques différences près : - le rapport de la longueur sur la largeur du corps est moins important chez Demodex canis, lui donnant ainsi une apparence moins élancée. (Chesney 1989)

36 - chez Demodex canis femelle, la vulve est positionnée plus crânialement, son bord antérieur étant situé entre les épimères transversaux IV. (Nutting et Desch 1978) - chez Demodex canis mâle, les deux paires de tubercules podosomaux ainsi que la fente génitale sont situés plus crânialement. La paire crâniale se situe entre les pattes I (entre I et II pour Demodex cati) et la paire caudale entre les pattes II (entre II et III pour Demodex cati). La fente génitale est située entre les patte I et II (en face des pattes II pour Demodex cati).(Nutting et Desch 1978)

(2) L’œuf

L’œuf est mince et de forme ovale, cylindrique. Il fait en moyenne 70,6 µm de long et 20,9 µm de large. Il n’est pas operculé.(Desch et Nutting 1979)

Comparaison avec Demodex canis : L’œuf de Demodex canis est plus long (80 μm) et plus large (30 μm), il est fusiforme, allongé, en forme de citron. Son extrémité postérieure est plus affinée et moins arrondie que son extrémité antérieure. (Nutting et Desch 1978)

Photo 2 : Œuf de Demodex cati. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

(3) La larve

La larve est hexapode comme toutes les larves d’acariens. Allongée en forme de fuseau, elle mesure en moyenne 103,9 μm de long et 16,8 μm de large.

37 Son gnasthosoma ressemble à celui de l’adulte mais en plus mince et sans soies subgnathosomales. La segmentation des pattes n’est pas apparente et chacune se termine par une griffe unique portant 5 dents peu marquées (trifide). Le solénidion et les épimères transversaux sont absents. (Desch et Nutting 1979)

(4) Les nymphes

Les nymphes sont au nombre de deux : la protonymphe issue de la larve et la deutonymphe qui est l’ultime stade pré-imaginal.

(a) La protonymphe

La protonymphe a une morphologie semblable à celle de la larve mais est de taille augmentée, elle mesure en moyenne 134,7 μm de long et 18,3 μm de large. Elle est toujours hexapode mais l’extrémité des pattes présente à ce stade une paire de griffes, trifides. Le solénidion et les épimères transversaux sont toujours absents. (Desch et Nutting 1979)

(b) Le deutonymphe

La deutonymphe est le premier stade octopode. La configuration générale est similaire à celle de la protonymphe en plus large, plus long et plus élancée. Elle mesure en moyenne 194,1 μm de long et 23,8 μm de large. A ce stade, le solénidion et les épimères transversaux sont encore absents. (Desch et Nutting 1979)

38 Œuf (x 400) Larve (x 400) Protonymphe (x 400) Deutonymphe (x 400)

71 μm 104 μm 135 μm 194 μm Longueur moyenne

Figure 3 : Représentation schématique de l’œuf et des différents stades immatures de Demodex cati. D’après (Desch et Nutting 1979)

Œuf Larve Protonymphe Deutonymphe Longueur 70,6 (+/- 3,6) 103,9 (+/-7,8) 134,7 (+/- 11,6) 194,1 (+/- 32,5) (en μm) Largeur 20,9 (+/- 1,4) 16,8 (+/- 2,2) 18,3 (+/- 1,9) 23,8 (+/- 3,3) (en μm)

Tableau 4 : Taille de l’œuf et des différents stades immatures de Demodex cati. D’après (Desch et Nutting 1979).

b) Demodex gatoi

Les informations trouvées dans la littérature se limitent à l’imago et à l’œuf. Nous supposons donc que les différents stades parasitaires sont comparables à ceux décrits chez Demodex cati, mais d’une taille plus petite et de forme plus trapue.

(1) L’adulte

Morphologiquement, Demodex gatoi est très différent de Demodex cati, cependant structurellement, ils restent très semblables.

39 Il est plus petit et plus trapu, avec un opisthosoma plus large et plus émoussé. Il est classiquement comparé à Demodex criceti, qui vit dans les plis de l’épiderme du hamster doré. (Nutting et Rauch 1958) (Morris 1996)

Le mâle mesure environ 90,6 µm de long, alors que la femelle mesure en moyenne 108,3 µm de long. (Desch et Stewart 1999) (Löwenstein et al. 2005)

Les structures et les différents organes décrits sont identiques à ceux de Demodex cati. Le gnathosoma et le podosoma sont organisés de la même manière, seul l’opisthosoma diffère un peu.

L’opisthosoma représente légèrement moins de la moitié de la longueur totale du corps. Il est long de 36,6 µm pour 28,1 µm de large chez le mâle, et long de 42,3 µm pour 30,1 µm de large pour la femelle. (Löwenstein et al. 2005) Il s’élargit caudalement, avant de se terminer par un arrondi, et non en pointe, comme observé chez Demodex cati. Il présente des annulations horizontales espacées approximativement de 2 µm. (Neel et al. 2007)

Photos 3 et 4 : Demodex gatoi adulte. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)

40 chélicère

1 bulbe pharyngé soie subgnathosomale

2 épimères I et II

paires de pattes III et IV

1 : gnathosoma vulve 2 : podosoma 3 : opisthosoma 3

stries transversales

20 µm extrémité arrondie

Figure 4 : Représentation schématique d’un Demodex gatoi femelle en face ventrale. D’après (Löwenstein et al. 2005) (Neel et al. 2007)

En μm Mâle Femelle Longueur 14,5 (+/- 0,2) 15,5 (+/- 0,7) Gnathosoma Largeur 17,9 (+/- 0,3) 19,7 (+/- 0,8) Longueur 39,5 (+/- 1,3) 42,3 (+/- 1,6) Podosoma Largeur 31,3 (+/- 1,0) 33,3 (+/- 1,2) Longueur 36,6 (+/- 4,1) 42,3 (+/- 4,0) Opisthosoma Largeur 28,1 (+/- 1,6) 30,1 (+/- 1,5) Corps Longueur 90,6 (+/- 4,8) 108,3 (+/- 4,4) Tableau 5 : Taille des formes adultes de Demodex gatoi. D’après (Löwenstein et al. 2005)

41 (2) L’œuf

L’œuf est de forme ovalaire. Il est plus petit que celui de Demodex cati. Il est long de 35 à 44 µm pour une largeur de 21 à 35 µm. (Desch et Stewart 1999)

c) Demodex species

Les descriptions morphologiques de Demodex species sont rares et l’existence même de cette 3ème espèce ne fait pas encore consensus.

(1) Première description

Cette nouvelle espèce est décrite une première fois en 1988 par Chesney qui donne quelques indications de taille. Les femelles mesurent en moyenne 148,2 µm et les mâles 143,4 µm. (Chesney 1988)

(2) Une nouvelle espèce ?

Une nouvelle étude, réalisée en 2005 par Löwenstein, fournit quelques indications supplémentaires notamment concernant sa morphologie : - les femelles sont plus longues que les mâles avec une longueur de 174,6 µm alors que ces derniers font 170,8 µm, mais leur différence de taille est moins marquée que dans les deux autres espèces. - ces Demodex sont donc plus courts que Demodex cati mais plus long que Demodex gatoi. La forme de leur corps est plus courte et plus trapue que celle de Demodex cati mais plus mince que celle de Demodex gatoi. - les proportions entre les différentes portions du corps se rapprochent plus de celles observées chez Demodex gatoi avec l’opisthosoma qui représente approximativement la moitié de la longueur totale du corps. - le gnathosoma semble plus long que large chez les mâles et les femelles. Cette description se rapproche de celle de Chesney par la forme du corps et les proportions, mais la longueur est plus importante. (Löwenstein et al. 2005)

L’étude précise que d’autres données devront être collectées pour confirmer l’existence de cette troisième espèce. En effet, une variation de taille et de forme n’est pas un critère

42 suffisant pour considérer qu’il s’agit d’une nouvelle espèce, sachant que les individus d’une même espèce peuvent différer, de taille ou de forme, en fonction de différences mineures observées dans leur habitat (température, qualité de la nourriture, localisation …). (Löwenstein et al. 2005) Bien que l’aspect phénotypique de ces parasites ne suffise pas à en faire une nouvelle espèce, les observations communiquées sont significatives et apportent de nouvelles données pour déterminer la pertinence ou non de l’existence de cette nouvelle espèce. (Löwenstein et al. 2005)

(3) Dernières actualités

Une dernière étude réalisée, en 2011, met à son tour en évidence cette nouvelle espèce de Demodex. (Kano et al. 2011)

Dans cette étude, les données concernant la longueur de ces nouveaux parasites diffèrent de celles observées par Löwenstein, mais se rapprochent de celles décrites par Chesney avec une taille mesurée à 134,4 µm, en moyenne. (Kano et al. 2011)

Les autres observations, en particulier la comparaison avec Demodex cati et Demodex gatoi, sont semblables dans toutes les études publiées à ce jour.

L’existence de cette nouvelle espèce reste incertaine. (Kano et al. 2011)

Photo 5 : Demodex species adulte. (Kano et al. 2011)

43 chélicère 1 bulbe pharyngé soie subgnathosomale

2 4 paires de pattes atrophiées

1 : gnathosoma vulve 2 : podosoma 3 3 : opisthosoma

stries transversales

20 µm

Figure 5 : Représentation schématique d’un Demodex species femelle en face ventrale. D’après (Löwenstein et al. 2005)

En μm Mâle Femelle Longueur 24,3 (+/- 0,8) 25,4 (+/- 1,7) Gnathosoma Largeur 17,6 (+/- 0,8) 18,3 (+/- 0,9) Longueur 58,2 (+/- 0,9) 57,8 (+/- 1,0) Podosoma Largeur 40,4 (+/- 0,9) 40,8 (+/- 1,0) Longueur 88,4 (+/- 0,5) 91,4 (+/- 1,9) Opisthosoma Largeur 40,3 (+/- 1,7) 43,5 (+/- 1,1) Corps Longueur 170,8 (+/- 1,4) 174,6 (+/- 3,3)

Tableau 6 : Taille des formes adultes de Demodex species. D’après (Löwenstein et al. 2005)

44 d) Rapide comparaison des trois Demodex

en μm Demodex cati Demodex gatoi Demodex species Longueur femelle 219,0 108,3 174,6 Largeur femelle 27,2 33,3 43,5 Longueur mâle 181,7 90,6 170,8 Largeur mâle 26,4 31,3 40,4

Tableau 7 : Comparaison de la taille des formes adultes des trois Demodex rencontrés chez le chat. D’après (Löwenstein et al. 2005).

50 μm

Demodex gatoi Demodex species Demodex cati

Figure 6 : Comparaison des représentations schématiques des différentes espèces de Demodex femelles rencontrées chez le chat. D’après (Löwenstein et al. 2005)

45 4. Critères biologiques

a) Habitat

(1) Quelques rappels anatomiques

(a) L’épiderme

L’épiderme du chat est un épithélium malpighien kératinisé, constitué de kératinocytes et de cellules résidentes (cellules de Langerhans, mélanocytes et les cellules de Merkel). Il est formé de 4 couches au sein desquelles les kératinocytes subissent une différenciation appelée cornification ou kératinisation. Ce sont, de la couche la plus profonde à la plus superficielle : - la couche basale - la couche épineuse ou massif de Malpighi - la couche granuleuse - la couche cornée ou stratum corneum : elle est composée d’une strate de kératinocytes dépourvus d’organites, disposés en lamelles très compactes, et d’une partie exfolliative, au sein de laquelle les kétatinocytes se détachent de façon continue, subissant une desquamation, compensée par la multiplication et la migration des kératinocytes basaux. (Scott et al. 2001)

(b) Les follicules pileux

Les follicules pileux sont formés de deux tubes qui s’emboîtent l’un dans l’autre et, au centre desquels, le poil croît. Le tube extérieur est appelé gaine épithéliale externe, elle est en continuité avec l’épiderme. Le tube intérieur est nommé gaine épithéliale interne. Chez le chat, les follicules pileux sont des follicules pileux composés. Ils sont formés : - d’un infundibulum, partie supérieure, qui s’étend jusqu’à l’ostium folliculaire, - de plusieurs isthmes, partie intermédiaire qui s’étend de l’abouchement de la glande sébacée à l’insertion du muscle érecteur du poil, - de plusieurs bulbes pileux qui s’abouchent dans le même infundibulum. C’est la zone qui permet la production du poil. Entre cinq à vingt cinq poils sortent par le même ostium.

L’ensemble du follicule pileux est entouré d’une membrane basale ainsi que d’une gaine conjonctive folliculaire riche en terminaisons nerveuses et en petits capillaires.

46 Le poil est formé au niveau de la base du follicule pileux par la matrice. Il émergera ensuite au niveau de l’ostium folliculaire. (Scott et al. 2001)

(2) Habitat de Demodex cati

Demodex cati est un parasite saprobie de la peau du chat et vit dans les follicules pilosébacés. Il est fréquemment localisé au niveau de l’orifice excréteur de la glande sébacée, sa partie antérieure dirigée vers la profondeur du follicule. C’est un parasite permanent qui effectue l’intégrité de son cycle dans le follicule pilosébacé. Demodex cati est aussi présent dans les follicules pilosébacés ou les glandes sébacées isolées des conduits auditifs externes. (Desch et Nutting 1979).

Épiderme dont couche cornée

Derme

Ostiole Gaine épithéliale externe Lumière de Muscle érecteur l’infundibulum

Section transversale de Demodex

Glande sébacée

Glande sudoripare

Photo 6 : Nombreux Demodex cati au sein de la lumière de l’infundibulum d’un follicule pileux, visualisés sur une coupe histologique. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)

(3) Habitat de Demodex gatoi

Tout comme Demodex cati, c’est un parasite permanent, mais sa localisation est différente. Il vit dans la couche superficielle de l’épiderme, le stratum corneum et plus précisément dans la partie exfoliative de celle-ci.

47 Demodex gatoi a aussi été mis en évidence au niveau du conduit auditif externe. (Conroy et al. 1982)

1 : épiderme 2 : couche cornée Demodex gatoi 3 : derme

2

1

3

1

Photo 7 : Localisation de Demodex gatoi au niveau de la couche cornée, visualisé sur une coupe histologique, avec agrandissement. (Saari et al. 2009)

(4) A propos de Demodex species

L’habitat précis de Demodex species n’est toujours pas connu. Dans les cas où ce parasite a été observé, l’examen histopathologique des lésions cutanées n’a montré aucun parasite et n’a donc pas permis une localisation précise. (Chesney 1988) (Kano et al. 2011) (Löwenstein et al. 2005).

48 (5) Comparaison de l’habitat des Demodex du chat

poils

Demodex gatoi

couche cornée épiderme

derme

glande sébacée

muscle érecteur du poil Demodex cati

Follicule pileux composé

glande sudoripare

Figure 7 : Représentation schématique des différentes localisations de Demodex cati et de Demodex gatoi au sein de la peau.

Il est intéressant de noter que, chez le chat comme chez les autres espèces concernées par la démodécie, les différentes formes de parasites sont adaptées à différentes niches au sein de la peau, la forme allongée étant observée au niveau des follicules pilo-sébacés tandis que la forme plus trapue est retrouvée au niveau de la couche cornée. (Chesney 1989)

b) Nutrition

Demodex cati se nourrit de squames, du contenu cellulaire et surtout de sébum. (Cadiergues et Franc 1995) (Desch et Nutting 1979)

Dans la littérature, certains auteurs avancent que la présence du parasite augmente la production de sébum. Ce mécanisme aboutit à la mise en place d’un véritable cercle vicieux car la multiplication des Demodex est, elle-même, favorisée par la séborrhée, potentialisée par l’hyperplasie des glandes sébacées secondaire à la présence des parasites.

49 L’ensemble de ce processus conduit au comblement progressif du follicule pileux par la kératine (comédons), suivi de la chute du poil (dépilation), puis de la distension et de l’éclatement du follicule (folliculite et furonculose). Précisons que l’augmentation de la production de sébum due à la présence parasitaire n’a jamais été prouvée, mais ce mécanisme permet d’expliquer d’une façon pédagogique et visuelle les effets observés lors d’une démodécie. (Bourdoiseau 2000)

En ce qui concerne Demodex gatoi, son mode de nutrition n’est pas décrit dans la littérature. On peut tout de même considérer qu’il se rapproche de celui de Demodex cati mais sa localisation différente doit être à l’origine de quelques particularités.

Le peu d’information disponible sur Demodex species ne nous permet pas de conclure non plus sur son mode de nutrition.

c) Cycle parasitaire

Le cycle parasitaire complet n’est connu que chez Demodex cati mais, même dans ce cas, de nombreux détails restent inconnus. Le déroulement du cycle est beaucoup mieux documenté chez Demodex canis et, compte tenu de la ressemblance entre les deux parasites, de nombreuses extrapolations sont faites. (Desch et Nutting 1979). Il faut donc considérer ces informations avec précaution mais elles permettent, tout de même, de se rapprocher du cycle réel.

Les Demodex sont des parasites permanents, le cycle infectieux se déroulant entièrement sur l’hôte. On parle de parasitisme obligatoire.

L’accouplement à lieu à la surface de la peau puis les femelles adultes fécondées s’enfoncent dans le follicule pileux pour pondre, tête dirigée vers le bas, tandis que les mâles et les femelles non fécondées meurent. Ces œufs éclosent et donnent naissance à des larves hexapodes qui se transforment en protonymphes hexapodes. Ces dernières muent en deutonymphes octopodes qui gagnent la surface cutanée et permettent la colonisation d’autres follicules pileux. Une fois arrivées sur la peau, les deutonymphes donnent des mâles et des femelles qui s’accouplent. (Cadiergues et Franc 1995)

50

Milieu extérieur

Colonisation Surface de Adultes ♂ et ♀ la peau Fécondation Deutonymphes Deutonymphes Mort des ♂ et des ♀ non- fécondées Protonymphes

Larves Adultes ♀ ovigères

Ponte Derme Œufs

Figure 8 : Représentation schématique du cycle parasitaire de Demodex canis.

La durée du cycle de Demodex cati est inconnue. Chez Demodex canis, cette durée varie selon les auteurs : de 10 à 12 jours ou de 20 à 35 jours (Scott 1979). Mais, quelque soit la durée retenue, le cycle est court, ce qui explique la pullulation rapide dans les follicules pileux. Toutefois, comme c’est un parasite peu mobile, l’extension des lésions cutanées est lente. (Cadiergues et Franc 1995)

51 Lumière de l’infundibulum du follicule pileux

Section longitudinale de Demodex, tête pointant vers le bas du follicule pileux, les 4 pattes étant bien visibles

Glande sébacée

Follicule pileux composé

Glande sudoripare Photo 8 : Demodex canis adulte, dans la lumière de l’infundibulum d’un follicule pileux, tête dirigée vers le bas. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Concernant Demodex gatoi, le cycle parasitaire est inconnu, mais la localisation superficielle des adultes suggère des différences majeures.

Aucune information n’est, à ce jour, disponible concernant la troisième espèce.

d) Résistance dans le milieu extérieur

La résistance dans le milieu extérieur n’a été étudiée dans aucune des espèces de Demodex infectant le chat mais, si l’on se réfère aux données concernant les autres Demodex, ce sont des acariens fragiles qui ne survivent pas dans le milieu extérieur. Hors de leur hôte, ils meurent par dessiccation en quelques heures. (Bourdoiseau 2000)

L’observation précise de Demodex et de ses structures n’est pas facile à cause de cette fragilité. Ils se désagrègent très rapidement après leur mort. Les Demodex de l’homme ont été étudiés en microscopie électronique à balayage pour la première fois en 2005. Le processus pour créer un environnement favorable à leur

52 conservation au-delà de quelques heures est relativement complexe : les échantillons ont été, dans un premier temps, lavés avec un détergent et rincés à l’eau distillée, puis, ils ont été mis sur des lames spéciales avec une bande adhésive en carbone. La température et la pression ont été stabilisées à, respectivement, 5°C et 5 mbar. Les échantillons ont pu être observés sans être recouverts d’eau ou subir une déshydratation. La surface des Demodex a, ainsi pu être conservée et visualisée de façon optimale sans modification post-mortem ou artéfact. (Jing et al. 2005)

5. Transmission de la démodécie féline

a) Transmission interspécifique

Il est admis, aujourd’hui, que les Demodex sont des parasites spécifiques d’espèce. Ainsi, aucune transmission entre espèces animales n’est possible en théorie. Chaque espèce parasitée (le chien, la vache, la chèvre, différents rongeurs,… et même la baleine) possède ses propres Demodex. (Cadiergues et Franc 1995)

Toutefois, certains auteurs n’hésitent pas à remettre en cause cette spécificité suite à la découverte de Demodex gatoi. (Saari et al. 2009) En effet, ce parasite a été mis en évidence tardivement, dans les années 80, alors que Demodex cati a été découvert plus d’un siècle auparavant. Ceci ne prouve absolument pas qu’il n’existait pas chez le chat avant sa découverte mais soulève des interrogations pour certains auteurs. (Saari et al. 2009) Son morphotype est, de plus, différent de celui de Demodex cati et se rapproche plus de celui observé dans d’autres espèces. Certains auteurs évoquent, donc, la possibilité que Demodex gatoi fasse partie de la population commensale de la peau d’une autre espèce de mammifères et qu’il n’ait été, que récemment, introduit chez les chats. (Saari et al. 2009) Ces suppositions restent purement hypothétiques et peuvent être totalement erronées mais il est intéressant de noter qu’un parasite similaire, à corps trapu, a récemment été mis en évidence chez le chien, or, les Demodex qui lui sont spécifiques ont été étudiés à de nombreuses reprises, de façon beaucoup plus poussée que chez le chat depuis de nombreuses années. (Tamura et al. 2001) (Chen 2008) (Chesney 2008) (Saari et al. 2009)

53 b) Zoonose

La démodécie humaine existe mais elle est due à deux espèces propres à l’homme : Demodex brevis et Demodex folliculorum. La démodécie féline, comme toutes les autres, est considérée comme non zoonosique. (Bourdoiseau 2000)

c) Contagion intraspécifique

La contagiosité de la démodécie féline est une question importante et intéressante car, non seulement elle conditionne, en partie, les mesures à mettre en place lorsqu’un diagnostic de démodécie est établi pour un individu vivant avec des congénères, mais aussi, elle permet de mieux connaître les parasites et leur biologie.

(1) Demodex cati

Le mode de transmission de Demodex cati est inconnu.

Chez le chien, la transmission s’effectue par contact direct de la mère aux chiots, durant les trois premiers jours de vie, pendant la tétée, lors du contact du museau des chiots avec les mamelles de la mère. Différentes expériences évaluant les modalités de transmission de Demodex canis entre chiens ont toutes échoué, que ce soit l’administration par voie orale des parasites, l’injection intra- péritonéale ou intra-trachéale de parasites ou le contact direct de chiens démodéciques avec des chiens sains. (Cadiergues et Franc 1995) (Mathet et al. 1996) (Scott 1979) (Héripret 1996) Les similitudes morphologiques et le partage d’un habitat identique entre Demodex canis et Demodex cati peuvent faire penser à un même mode de transmission. La démodécie à Demodex cati est, donc, considérée comme une ectoparasitose très difficilement contagieuse, voire non contagieuse.

(2) Demodex gatoi

La démodécie à Demodex gatoi semble, elle, contagieuse entre des individus partageant les mêmes lieux de vie (essentiellement le couchage) si la pression parasitaire est suffisante. (Saari et al. 2009) (Morris 1996)

54

Le cas d’un chat, cliniquement sain, mis en contact avec deux chats présentant une démodécie à Demodex gatoi, concomitante à une allergie alimentaire traitée par corticothérapie, a été rapporté. Après un temps d’adaptation, lorsque le nouvel arrivant a commencé à partager le lieu de couchage des deux chats, il a présenté des signes cliniques d’alopécie et de prurit. Les examens complémentaires ont confirmé l’hypothèse de démodécie à Demodex gatoi. Chez ce chat, aucune prédisposition n’a été mise en évidence (corticothérapie, maladie sous- jacente) et il semble, donc, que seul le contact rapproché avec des individus fortement parasités ait été responsable de l’apparition de la maladie. (Morris 1996)

Une autre étude, regroupant les cas de chats de six foyers, tend à confirmer que Demodex gatoi est contagieux mais nécessite un contexte précis (pression parasitaire) car les résultats sont variés: - foyer 1, trois chats sur quatre présentent une démodécie à Demodex gatoi et l’ont déclarée au même moment. - foyer 2, un seul chat sur quatre est atteint - foyer 3, les deux chats présents sont touchés, l’un en premier, le second, quelques mois plus tard. - foyer 4, un chat sur deux présente une démodécie - foyer 5, les deux chats sont atteints et ont présenté les signes cliniques en même temps - foyer 6, un seul chat sur six est concerné. Ce cas est un peu particulier, car le chat ne présentait aucun signe clinique suggérant une démodécie. Les Demodex gatoi, en grand nombre et à tous les stades de leur cycle, ont été mis en évidence de façon fortuite lors de la réalisation de raclages cutanés de prévention (recommandation de l’éleveur). Tous les chats ont été traités pour éviter une hypothétique contagion. (Saari et al. 2009)

La possibilité d’une transmission intra-spécifique de Demodex species n’a encore été ni étudiée, ni rapportée.

55 B. Epidémiologie

1. Fréquence - Espèces affectées

Demodex cati est décrit chez le chat. Une étude rapporte le cas de jeunes léopards des neiges, présentant des lésions de dermatite faciale, chez lesquels Demodex cati a été mis en évidence. Ce cas présenterait une transmission inhabituelle entre deux espèces, mais l’identification du Demodex impliqué reste incertaine. Un Demodex spécifique du léopard existe, Demodex leopardi. (Fletcher 1980)

Demodex gatoi et Demodex species n’ont été décrits que chez le chat.

Il est difficile d’estimer la fréquence de la démodécie chez le chat. Le nombre de publications dans la littérature vétérinaire et de cas diagnostiqués en clientèle est faible et nous amène à considérer la démodécie féline comme une dermatose rare. Avant 1988, seuls 35 cas ont été publiés et depuis 1988, 56 cas supplémentaires ont été répertoriés. C’est effectivement un nombre de cas peu important mais ces propos sont à tempérer au vu de sa sous-évaluation probable. En effet, un grand nombre de cas peuvent passer inaperçus. De plus, tous les cas ne donnent pas lieu à une publication. Ceci, pour plusieurs raisons : - la méconnaissance de la maladie par les vétérinaires qui ne la recherchent pas - la guérison possible de la maladie sans traitement (Chesney 1989) - la généralisation de l’utilisation de molécules endectocides comme les avermectines et les milbémycines en traitement, qui permettent de guérir la démodécie même s’il y a eu confusion lors du diagnostic. - l’absence de population de référence et la large distribution géographique

L’otodémodécie est aussi considérée comme une affection rare. Brokis, en 1979, a examiné le cérumen de 507 cas d’otite externe chez des chats et n’a mis en évidence aucune espèce de Demodex. (Chesney 1989)

2. Répartition géographique

Demodex cati est cosmopolite, on le rencontre dans le monde entier. (Chesney 1989)

56

Concernant Demodex gatoi, les études les plus anciennes tendent à montrer que la maladie est rare et rencontrée, le plus souvent, dans des régions enzootiques limitées intéressant le sud et le sud-est des Etats-Unis. (Chesney 1989). Cependant, actuellement, les cas publiés sont de plus en plus nombreux et on considère que la démodécie à Demodex gatoi est une cause relativement fréquente de prurit dans le sud des Etats-Unis et qu’elle est présente dans le reste du monde. Des cas ont, en effet, été signalés en France, en Angleterre, en Australie, en Afrique du sud et en Finlande. (Saari et al. 2009)

A noter que le faible nombre de cas rapportés ne permet pas d’être catégorique.

La répartition géographique de Demodex species reste inconnue.(Neel et al. 2007)

Aucune étude n’a mis en évidence une éventuelle influence de facteurs environnementaux sur la répartition géographique de la démodécie féline. (Chesney 1989)

3. Facteurs intrinsèques

a) Race

Chez le chat, les dermatoses raciales au sens strict sont rares (excepté chez les races créées en fixant des anomalies cutanées, la mutation rex du poil ou l’hypotrichose chez le Sphinx par exemple). Il est aussi important de noter que les chats européens constituent l’essentiel de la population féline, l’échantillonnage de chats de race est donc faible et toujours incomplet. (Guaguère et Prélaud 2000)

L’existence d’une prédisposition de race à la démodécie reste à déterminer. Tout d’abord, force est de constater que le faible nombre de cas rapportés limite la fiabilité des conclusions que l’on pourrait en tirer, d’autant que la race des chats atteints n’est que rarement précisée.

Il apparaît néanmoins, que, lors de démodécie à Demodex cati, la majorité des chats atteints, dont la race est précisée, sont des chats européens à poils courts ou à poils longs (29). Certains cas concernant des chats de race sont également rapportés, mais ils restent peu

57 nombreux. Ce sont deux Siamois (Medleau et al. 1988), un Burmese (Batey et al. 1981) et deux Persans (Guaguère 1993).

Concernant Demodex gatoi, sur l’ensemble des cas de démodécie où la race est précisée, les chats de race sont aussi nombreux (20) que les chats européens à poils courts ou à poils longs (20). Comme dit précédemment, les chats de race sont sous-représentés dans la population féline, et le fait qu’ils soient aussi nombreux que les chats européens à présenter une démodécie est intéressant. Une étude, réalisée en Finlande dans plusieurs foyers propose un exemple concret. Elle présente des cas de chats de race, exclusivement, en précisant que ceux-ci sont minoritaires dans la population féline finlandaise et qu’aucun cas n’a été rapporté chez des chats européens à poils courts. Les races concernées sont les suivantes : Cornish Rex, Burmese, Persan, Siamois et une race exotique non précisée. (Saari et al. 2009) Cela peut suggérer, soit que les chats de race sont plus susceptibles (d’un point de vue clinique) de développer une démodécie à Demodex gatoi, soit que cette affection est une maladie féline émergente et contagieuse, qui a tendance à s’étendre et à prendre de l’ampleur, lorsque de nombreux chats sont réunis. Cette situation est rencontrée dans les élevages, durant les expositions et les concours, ce qui ne concerne quasiment que les chats de race. (Saari et al. 2009) Bien sur, cela nécessite de plus amples investigations.

Les données présentées ci-dessus sont regroupées dans les Tableaux 9, 10 et 11.

Aucune information n’est disponible concernant Demodex species.

b) Sexe

Aucune prédisposition liée au sexe n’a été constatée.

c) Age

Ce facteur ne fait actuellement pas l’objet d’un consensus. Tout comme la race, l’âge n’est pas toujours précisé dans les cas publiés, et aucune tendance ne peut être proposée faute de données suffisantes.

58 Les données présentées ci-dessous sont regroupées dans les Tableaux 9, 10 et 11.

Dans le cas de démodécie à Demodex cati, l’âge des chats est précisé pour 39 individus. Il varie entre 6 mois et 18 ans, avec une moyenne d’un peu plus de 8 ans. Dans le cas de démodécie à Demodex gatoi, l’âge des chats est également précisé dans 39 cas. Il varie entre 3 mois et 13 ans, avec une moyenne d’âge de 4 ans et demi.

A noter, qu’aucun cas équivalent à la démodécie juvénile du chien n’est rapporté chez le chat.

d) Hérédité

Aucune prédisposition héréditaire n’a encore été rapportée chez le chat, contrairement au chien. Rappelons que, chez ce dernier, de nombreux éléments épidémiologiques et cliniques laissent à penser qu’un facteur génétique de sensibilité à la démodécie canine existe : - une prédisposition raciale existe pour la démodécie généralisée juvénile (Shar Peï, West Highlande White Terrier, Scottish Terrier,…) - certaines lignées ou familles de chiens sont atteintes de génération en génération - certaines chiennes (qui peuvent être cliniquement normales) produisent systématiquement des portées au sein desquelles un ou plusieurs chiots développent une démodécie. (Mathet et al. 1996) (Scott et al. 2001) La transmission héréditaire se ferait probablement selon un mode autosomal récessif qui serait variable selon le chien et affecterait l’immunité à médiation cellulaire dirigée contre les Demodex. Ainsi la démodécie généralisée juvénile du chien pourrait être assimilée à une maladie héréditaire. (Mathet et al. 1996) (Muller al. 2001) Aucune équivalence n’a été mise en évidence chez le chat.

e) Etat immunitaire

Il existe très peu d’informations sur la relation entre l’état immunitaire de l’hôte et le développement d’une démodécie féline. Les informations sont beaucoup plus fournies chez le chien.

59 Selon toute vraisemblance, cet état immunitaire est tout de même à prendre en considération. En effet, lors des cas de démodécie généralisée à Demodex cati, les auteurs rapportent, relativement souvent, la présence d’une maladie systémique sous-jacente qui entraînerait une perturbation de l’état immunitaire de l’hôte et faciliterait ainsi la multiplication parasitaire. Ceci est, bien sûr, à prendre avec précaution, sachant qu’une cause sous-jacente n’est pas toujours mise en évidence lors de démodécie généralisée. (Chesney 1989)

La pertinence de cette hypothèse sera étudiée de façon plus approfondie dans la partie traitant de la pathogénie.

4. Facteurs extrinsèques

a) L’alimentation

Les carences nutritionnelles, quantitatives et qualitatives, ont une répercussion sur la peau et sur la qualité du poil mais l’alimentation ne semble jouer aucun rôle dans le développement d’une démodécie. Les cas, où les chats présentent une hypersensibilité alimentaire concomitante à une démodécie, ne traduisent pas de relation entre ces deux maladies. En effet, une corticothérapie est fréquemment réalisée pour traiter le prurit induit par l’hypersensibilité alimentaire. La démodécie est plus probablement secondaire à ce traitement. (Morris 1996)

b) Traitements ultérieurs

L’emploi excessif de médicaments peut être à l’origine du développement d’une démodécie.

De nombreux cas de démodécie suite à l’utilisation de traitements à base de corticostéroïdes sont rapportés. (Carlotti et al. 1986) (Chalmers et al. 1989) Morris (1996) (Lower et al. 2000) (Morris et Beale 2000) (Volgenest 2001) (Mueller 2004) (Saari et al. 2009) (Kano et al. 2011)

c) Maladies concomitantes

La plupart des maladies classiquement associées à la démodécie féline, dont nous discuterons la pertinence plus tard, sont à l’origine d’une immunodéficience par l’intermédiaire de deux mécanismes différents :

60 - par suppression de l’immunité cellulaire ou action sur les lymphocytes T, comme lors de leucose féline (FeLV), de syndrome d’immunodéficience acquise (FIV), de diabète sucré… - par suppression de l’immunité humorale ou action sur les lymphocytes B, comme lors de la leucose féline. (Lagrange 1994)

Cela conforte l’idée que le statut immunitaire de l’hôte joue un rôle dans l’apparition clinique de la démodécie mais l’importance de celui-ci reste obscure. Rappelons, en effet, que la présence d’une immunodéficience est loin d’être la règle. Toutefois, elle n’est pas toujours recherchée. (Chesney 1989)

A noter que certaines maladies sont très fréquentes dans la population féline, en particulier la leucose féline, due au FeLV (Feline Leukemia Virus), et le syndrome d’immunodéficience acquise, dû au FIV (Feline Immunodeficiency Virus). (Chabanne 2010) (Prélaud 2004) Leur association avec la démodécie peut n’être qu’une coïncidence sans relation de cause à effet. De plus le rôle de ces deux virus en tant qu’inducteur d’immunosuppression est de plus en plus minoré.

Les maladies concomitantes rencontrées lors de démodécie sont les suivantes (elles seront détaillées, et leur pertinence sera évaluée, par la suite) :

- lors de démodécies à Demodex cati : le diabète sucré (Scott 1980) (Carlotti et al 1986) (White et al. 1987) (Zerbe et al. 1987) (Guaguère 1993), le syndrome de Cushing (White et al. 1987) (Zerbe et al. 1987), le syndrome d’immunodéficience acquise (Chalmers et al. 1989) (Guaguère 1993) (Morris et Beale 2000) (Johnstone 2002), la leucose féline (Guaguère 1993) (Desch et Nutting 1979) (Scott 1980) (Medleau et al. 1988), le lupus érythémateux systémique (Medleau et al. 1988), le carcinome épidermoïde in situ (Guaguère et al. 1999) (Johnstone 2002), la dermatophytose (Carlotti et al. 1986) (Volgelnest 2001), l’hypersensibilité alimentaire (Morris et Beale 2000) et le xanthome cutané (Volgelnest 2001),

- lors de démodécies à Demodex gatoi : l’hypersensibilité alimentaire (Saari et al. 2009) (Morris 1996) (Morris et Beale 2000), le diabète sucré (Morris et Beale 2000), l’acné

61 féline (Morris et Beale 2000), la toxoplasmose (Medleau et al. 1988), la leucose féline (Medleau et al. 1988) et le syndrome d’immunodéficience acquise (Neel et al. 2007).

5. Récapitulatif des données biologiques et épidémiologiques

Caractéristiques parasite - hôte Biologie Résistance Habitat Nutrition Cycle Pullulation Extension milieu extérieur D squame, follicules pileux (D. cati) contenu parasite permanent rapide lente nulle couche cornée (D. gatoi) cellulaire, E sébum M Transmission

O Interspécifique Zoonose Contagion

D non contagieuse (D. cati) absente non E contagieuse (D. gatoi) Épidémiologie X Fréquence Répartition géographique

rare, mais probablement sous-diagnostiquée cosmopolite Facteurs intrinsèques C Race Sexe Âge Hérédité Statut immunitaire H ? non non ? ? A Facteurs extrinsèques

T Alimentation Traitements Infection ou maladie intercurrente

FIV, FeLV, diabète, syndrome de Cushing, lupus érythémateux systémique, carcinome non corticothérapie épidermoïde in situ, hypersensibilité, acné féline

Tableau 8 : Récapitulatif des données biologiques et épidémiologiques des Demodex du chat.

62 III. Pathogénie de la démodécie

La pathogénie de la démodécie féline est complexe et encore aujourd’hui inconnue.

Pour pallier à ce manque d’information, nous allons résumer les connaissances actuelles à propos de la pathogénie de la démodécie canine à Demodex canis qui a été plus étudiée, bien qu’il reste aussi de nombreuses incertitudes à son propos. Les Demodex étant une espèce homogène, ces informations peuvent nous aider à nous faire une idée de la pathogénie de la démodécie à Demodex cati. Nous soulignerons le cas échéant les différences constatées entre les deux espèces.

La pathogénie de la démodécie à Demodex gatoi reste, quant à elle, une énigme. Il n’existe pas d’étude sur la pathogénie des Demodex à forme courte. Elle ne peut être identique à celle des Demodex à forme élancée, au vu de la localisation différente des parasites. Nous en parlerons donc peu. Tout comme nous ne mentionnerons pas Demodex species, dont l’existence même reste à prouver.

Pour finir, nous développerons la pathogénie de la démodécie humaine qui connaît un regain d’intérêt ces dernières années et qui peut, également, fournir des pistes de réflexion pour la réalisation de futurs travaux sur la démodécie féline.

A. Différentes actions pathogènes des Demodex

L’action pathogène des Demodex se fait selon plusieurs modalités, associées ou non, lors de démodécies : - une action mécanique et irritative, consécutive à la présence, à la pullulation, aux mouvements et à la nutrition des parasites, pouvant être à l’origine de la destruction des follicules pilo-sébacés, - une action antigénique, consécutive à la libération d’antigènes lors des mues, aux produits de dégradation des cellules épithéliales (dont les parasites se nourrissent) et aux produits du métabolisme, qui induit la synthèse d’immunoglobulines et l’activation de lymphocytes T spécifiques,

63 - une action favorisant les infections, que l’on pense secondaire à l’effondrement des structures folliculaires ou à l’immunodépression présente dans les formes graves de la maladie, - une action immunosuppressive, qui n’a pas encore été démontrée chez le chat. (Bourdoiseau 2000)

B. Pathogénie de la démodécie canine

Tout d’abord, il est important de préciser que, bien que de nombreux chiens soient porteurs du parasite, seuls quelques-uns expriment la maladie.

1. La démodécie localisée

La pathogénie de la démodécie localisée demeure inconnue. Les articles traitant de l’immunologie de la démodécie canine s’appuyant, le plus souvent, sur des cas de chiens atteints de démodécie généralisée juvénile ou de l’adulte. De plus, quand la démodécie localisée est considérée, c’est en tant que première étape d’une future démodécie généralisée du jeune. Ainsi la pathogénie de la « vrai » démodécie localisée, qui régresse spontanément chez le chien, n’est pas élucidée. La seule proposition faite, serait que lors de démodécie localisée, l’immunodépression (à caractère héréditaire) serait suffisamment modérée pour permettre, dans la majorité des cas, une guérison spontanée. (Mathet et al. 1996) (Bourdoiseau 2000) Mais existe-t-il réellement une immunodépression ? Le phénomène ressemble à celui des infections par papillomavirus, qui affectent les enfants et guérissent spontanément en quelques mois ou années. Le contact avec le virus, ou le parasite, et le système immunitaire étant réduit, l’activation de ce dernier est lente.

64

Photo 9 : Démodécie localisée chez un chien. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)

2. La démodécie généralisée du jeune

Les individus touchés sont porteurs d’une immunodépression spécifique vis-à-vis du Demodex, à caractère héréditaire vraisemblable, qui affecte, à des degrés divers, l’immunité à médiation cellulaire, alors que l’immunité humorale est normale, voire stimulée. (Lemarie et Horohov 2008) (Héripret 1996)

La dépression concernerait les lymphocytes T cytotoxiques et les lymphocytes auxiliaires, diminuant suffisamment l’intensité de la réponse immunitaire pour favoriser la multiplication du parasite. Les lymphocytes auxiliaires sont, les lymphocytes Th1 (LTh1), sécréteurs de l’interleukine 2 (IL-2) et de l’interferon γ, et les lymphocytes Th2 (LTh2) qui sécrètent l’interleukine 4 et l’interleukine 5. La dualité LTh1 / LTh2 interviendrait peut-être en matière de démodécie. En effet, un déficit en IL-2, imputable à un dysfonctionnement ou à une inhibition des LTh1, et responsable de la généralisation de la démodécie, a été démontré. Une étude a montré que les chiots atteints de démodécie généralisée non compliquée d’infection bactérienne, ont une production en IL-2 significativement réduite par rapport aux chiens sains.

65 L’IL-2 est une cytokine induisant la croissance et la multiplication des LTh1 qui oriente la réponse de l’hôte vers une réponse immunitaire à médiation cellulaire cytotoxique. Au contraire, les LTh2 ont un rôle dans l’immunité à médiation humorale et il a été prouvé que les LTh2 peuvent synthétiser des substances inhibant la croissance de LTh1. Cette étude montre que les chiots démodéciques ont une réponse en LTh1 diminuée (production d’IL-2 faible). Les auteurs concluent à un déséquilibre entre les réponses LTh1 et LTh2 en faveur d’une multiplication des LTh2. Ceci pourrait expliquer que les individus aient une réponse à médiation cellulaire déprimée mais que leur réaction à médiation humorale soit normale. Le facteur sérique sécrété par les LTh2 et responsable de cette immunodépression pourrait être l’IL-4 ou l’IL-5, cette dernière étant moins probable car il n’y a pas d’éosinophilie dans la démodécie. (Lemarie et Horohov 2008) (Spilmont 2004)

Demodex Phénotype A Phénotype B LT Demodex +++ LT

- - - LTh2 LTh1 LTh1 LTh2

+ - + -

LTh2 LTh2 LTh2 LTh1 LTh1 LTh1 LTh2 LTh2 LTh2 LTh1

IL-2 INFγ IL-4 IL-5 IL-2 INFγ IL-4 IL-5

Réponse à médiation Réponse à médiation Réponse à médiation Réponse à médiation cellulaire cellulaire humorale humorale

Chiots sains : équilibre LTh1 / LTh 2 Chiots démodéciques : déséquilibre LTh1 / LTh 2 Figure 9 : Représentation schématique de l’existence d’un caractère héréditaire responsable d’une immunodépression de l’immunité à médiation cellulaire lors de démodécie généralisée juvénile chez le chien.

66 En résumé, la démodécie généralisée du jeune chien serait la résultante d’un déficit héréditaire et spécifique des cellules de la lignée T vis-à-vis de Demodex canis ce qui permettrait au parasite de proliférer et de produire, ou d’induire, une ou plusieurs substances humorales immunosuppressives des lymphocytes T, entraînant une immunodéficience cellulaire permettant la multiplication incontrôlée du parasite. On peut donc conclure à l’établissement d’un véritable cercle vicieux dans la pathogénie de la démodécie canine. (Héripret 1996) (Scott et al. 2001) (Mathet et al. 1996) (Spilmont 2004)

Lors de démodécie avec infection bactérienne secondaire, la dépression concernerait non seulement les lymphocytes T mais aussi les lymphocytes B, inhibant l’ensemble de la réponse, et serait aggravée par des complexes immuns circulants ainsi que par un principe actif d’origine parasitaire doué de propriétés immunodépressives. (Héripret 1996) (Spilmont 2004)

Photo 10 : Démodécie généralisée chez un jeune chien. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

67 3. La démodécie de l’adulte

Les cas observés de démodécie généralisée du chien adulte seraient imputables à une immunodépression acquise, dont la cause n’est toutefois identifiée que dans 75 % des cas environ. Il s’agit d’un syndrome de Cushing spontané ou iatrogène dans plus de la moitié des cas (59%), mais aussi de diabète sucré, de thérapeutique immunosuppressive, de paraistoses internes (dirofilariose ou ehrlichiose), de tumeurs et de leishmaniose dans un cas. (Mathet et al. 1996) (Bensignor et Carlotti 1999) (Prudhomme 2010)

Mais le rôle des tumeurs, des parasitoses internes et de la leishmaniose sont à relativiser, voire improbable, car au vu de la fréquence de ces affections, d’une part il y a rarement de démodécie associée et, d’autre part, il n’est pas étonnant de trouver un chien qui ait, à la fois, une leishmaniose et une démodécie, par exemple. (Dimri et al. 2008)

Dans environ 25% des cas, aucune maladie sous-jacente ou associée ne peut être mise en évidence. Ces cas pourraient être dus à un simple vieillissement du système immunitaire. (Mathet et al. 1996) (Bensignor et Carlotti 1999) (Prudhomme 2010)

C. Pathogénie de la démodécie féline

1. Pas d’équivalent à la démodécie juvénile

Dans un premier temps, il est important de noter, que chez le chat, on ne connaît pas d’équivalent à la démodécie juvénile. Elle peut : - soit ne pas exister, par l’absence de caractère héréditaire favorable à l’établissement d’un cercle vicieux dans la pathogénie de la démodécie féline, - soit régresser spontanément, l’immunodépression chez le chat étant suffisamment modérée pour permettre une guérison spontanée, - soit elle est confondue avec d’autres dermatoses et traitée avec succès malgré l’erreur de diagnostic.

68 De plus, aucun cas de démodécie familiale n’est rapporté chez le chat. L’hérédité n’est, donc, pour l’instant, pas reconnue comme un facteur influant sur la pathogénie de la démodécie féline.

2. Une immunodépression acquise nécessaire ?

C’est encore un sujet de controverse.

La littérature rapporte l’existence fréquente d’une maladie concomitante ou d’un traitement immunossuppresseur qui, étant à l’origine d’une immunodépression, favoriserait une prolifération des parasites et l’apparition d’une démodécie clinique. (Chesney 1989) C’est un fait qui a longtemps été admis sans réelle preuve et, au vu du peu de cas rapportés, il est difficile d’établir des tendances, d’autant qu’aucune recherche n’a été effectuée sur la pathogénie des Demodex du chat.

Ce qui suit n’est, en rien, une preuve, juste une petite réflexion. Les données présentées ci- dessous sont compilées dans les Tableaux 9, 10 et 11.

Lorsque l’on reprend tous les cas publiés depuis 1880, on trouve une maladie concomitante ou l’exitence d’un traitement immunossuppresseur dans (voir Tableau 9 et 10) : - 31 cas sur 45 lors de démodécie à Demodex cati, c'est-à-dire dans 69 % des cas, - 21 cas sur 41 lors de démodécie à Demodex gatoi, c'est-à-dire dans 51 % des cas. .

a) A propos de Demodex cati

Ces données rapprochent la démodécie à Demodex cati de celle à Demodex canis, chez les chiens adultes, où il est admis qu’une immunodépression sous-jacente est présente dans 75 % des cas.

Lorsqu’on détaille les maladies concomitantes, on trouve : - un carcinome épidermoïde in situ dans sept cas. (Guaguère et al. 1999) (Johnstone 2002). Il y a, dans ces cas, développement de la démodécie grâce à l’immunodépression locale qui permet, par ailleurs, l’évolution du carcinome d’origine virale. La découverte de la démodécie est fortuite, le motif de la consultation étant le carcinome,

69 - une thérapeutique immunosuppressive dans huit cas (Carlotti et al. 1986) (Chalmers et al. 1989) (Morris et Beale 2000) (Vogelnest 2001), - un diabète associé à un syndrome de Cushing dans trois cas et un diabète seul dans deux cas (Scott 1980) (Carlotti et al. 1986) (White et al. 1987) (Zerbe et al. 1987), - la leucose féline (due au FeLV) dans six cas (Scott 1980) (Guaguère 1993) (Desch et Nutting 1979) (Medleau et al. 1988). Vu la fréquence de l’infection par ce virus, il n’est pas étonnant de trouver des chats infectés démodéciques (Chabanne 2010). La question à poser, et à laquelle il n’y a, pour l’instant, pas de réponse, est de savoir s’il y a plus de démodéciques dans la population infectée que dans la population normale, - le syndrome d’immunodéficience acquise (dû au FIV) dans quatre cas (Johnstone 2002) (Guaguère 1993) (Chalmers et al. 1989). La même question que pour la leucose féline est posée (Prélaud 2004). De plus, l’action immunosuppressive de ces deux virus semble bien moindre que ce que l’on pensait, - un lupus érythémateux systémique dans un cas (Medleau et al. 1988), - un xanthome cutané dans un cas (Vogelnest 2001), - une infection des voies respiratoires hautes dans un cas (Batey et al. 1981), - une hypersensibilité (non précisée) dans un cas. (Guaguère 1993) Ici encore, vu la fréquence des cas d’hypersensibilité chez le chat et leur traitement à l’aide de corticoïdes, si un lien existait, les cas de démodécie seraient beaucoup plus nombreux,

Certains cas sont particulièrement significatifs et il est possible de lier la maladie concomitante et le développement de la démodécie. Pour les autres cas ce lien est un peu plus ténu.

Développons quelques exemples : - le carcinome épidermoïde in situ : aussi appelée maladie de Bowen, c’est une dermatite dite pré-maligne, caractérisée par le confinement de cellules néoplasiques à l’épiderme sans franchissement de la membrane basale. L’infestation par Demodex cati est confinée aux sites lésionnels du carcinome. La raison de cette restriction apparente des parasites sur des zones de dysplasie épithéliale reste incertaine, mais une immunodéficience cutanée locale due au carcinome pourrait favoriser la multiplication focale des parasites, ce qui est observé chez l’homme lors d’altération de la réponse immunitaire cutanée suite à des tumeurs. (Guaguère et al. 1999) (Johnstone 2002)

70 Ce n’est, de plus, pas une maladie très fréquente, et il est significatif d’observer sept cas de démodécie concomitante, - l’existence d’une thérapeutique immunosuppressive apparaît dans huit cas, ce qui semble relativement significatif. A noter tout de même que de très nombreux chats sont traités à l’aide de corticoïdes et qu’ils ne développent pas tous une démodécie, loin s’en faut. De plus, ces traitements ne sont pratiquement jamais détaillés (dose, fréquence, durée) dans les cas publiés. Ce sont donc des données à considérer avec précaution. - le syndrome de Cushing et le diabète, sont des maladies systémiques, fréquemment liées, à l’origine d’une fluctuation du système immunitaire qui peuvent être à l’origine d’une immunodépression. Bien que ce soient des maladies relativement rares chez le chat, il est étonnant qu’il n’y ait pas plus de cas de démodécie féline concomitante si la relation de cause à effet existe réellement. Les cas qui les rapportent, datent de 1980, 1986 et 1987, époque où la prise en charge et le traitement de ces maladies n’était pas optimal. Aujourd’hui, ces maladies sont diagnostiquées tôt et le traitement est efficace empêchant peut-être une détérioration suffisante de l’état général de l’, nécessaire au développement d’une démodécie (Scott 1980) (Carlotti et al. 1986) (White et al. 1987) (Zerbe et al. 1987), - le lupus érythémateux systémique, rarissime chez le chat, est une maladie d’origine auto-immune chronique où le système immunitaire s’attaque aux tissus conjonctifs du corps dont la peau. Cela peut être un terrain favorable à la multiplication parasitaire, mais comme le traitement en est la corticothérapie, il est difficile de savoir si c’est le lupus érythémateux systémique qui est à l’origine du développement de la démodécie où si c’est la thérapie immunosuppressive (Medleau et al. 1988), - le xanthome cutané est une maladie rarement diagnostiquée en médecine vétérinaire. Elle est due à une hyperlipidémie pathologique à l’origine de lésions granulomateuses typiques touchant la peau, les tissus sous-cutanés, les tendons et les organes internes. Elle est caractérisée par des agrégations nodulaires de macrophages lipidiques et de dépôts de lipides libres, et habituellement associée à une hyperlipidémie à jeun, due à des désordres dans la synthèse, le métabolisme et le transport des lipides. C’est une maladie qui entraîne des modifications cutanées locales, le lien avec le développement d’une démodécie est donc difficile à établir, sauf si la démodécie se développe au niveau des lésions du xanthome (Vogelnest 2001), - concernant la leucose féline (FeLV) et le syndrome d’immunodéficience acquise (FIV), la population féline atteinte est très importante (Chabanne 2010) (Prélaud 2004). Il semble donc logique de rencontrer des chats présentant une démodécie et étant FIV ou FeLV-

71 positifs sans que cela soit plus qu’une coïncidence. Le lien serait plus probant, si une proportion importante de chats étant FIV ou FeLV-positif, présentait une démodécie mais ce n’est pas le cas. Nous ne les considérerons donc pas comme un terrain favorable au développement d’une démodécie, - l’infection des voies respiratoires hautes, diagnostiquée en 1981, n’est pas assez précise pour être prise en compte. De plus les corticoïdes interviennent dans le traitement,

Si on ne conserve que les maladies concomitantes qui semblent avoir un lien possible avec le développement de la démodécie, on obtient 19 cas (carcinome épidermoïde in situ, syndrome de Cushing, diabète, thérapeutique immunosuppressive). C'est-à-dire dans environ 40 % des cas de démodécie à Demodex cati rapportés. On est loin des 75% observé chez le chien adulte. Bien sûr, une cause sous-jacente n’est pas toujours recherchée et les cas rapportés sont trop peu nombreux pour conclure, mais il semble tout de même qu’il y ait une différence avec la démodécie à Demodex canis et la pathogénie décrite chez le chien.

b) A propos de Demodex gatoi

Lors de démodécie à Demodex gatoi, 51 % des cas sont concernés par l’existence d’une maladie concomitante ou d’un traitement immunosuppresseur. Ce sont : - une hypersensiblité alimentaire dans deux cas, sachant que le prurit induit par cette maladie est traité par corticothérapie (Morris 1996), - une thérapeutique immunosuppressive dans dix-sept cas (Chesney 1988) (Lower et al. 2000) (Morris 1996). A considérer avec les mêmes réserves que celles présentées pour la démodécie à Demodex cati, - une leucose féline dans un cas et un syndrome d’immunodéficience acquise dans un cas (Neel et al. 2007) (Medleau et al. 1988), - une toxoplasmose dans un cas (Medleau et al. 1988).

Si nous considérons, comme précédemment, que les cas de leucose féline et de syndrome d’immunodéficience acquise sont une coïncidence, au vu de leur large répartition dans la population féline, et que la toxoplasmose est anecdotique, cela fait 17 cas (40 %) où il existe une cause potentielle au développement de la démodécie. Cette cause, dans chaque cas, est la

72 mise en place d’une corticothérapie. C’est un fait notable, mais à considérer avec réserve si on prend en compte la très large utilisation de corticoïdes comme traitement chez le chat. Tout comme lors de démodécie à Demodex cati, dans 60 % des cas il n’existe donc pas de cause sous-jacente mise en évidence, et nous ne savons pas pourquoi la maladie se développe. Rappelons toutefois que Demodex gatoi est contagieux lorsque la pression parasitaire est suffisamment forte.

D. Pathogénie de la démodécie humaine

1. Bref descriptif des parasites

a) Généralités

Deux espèces de Demodex existent chez l’homme : Demodex folliculorum et Demodex brevis. Ce sont des espèces comparables à celles rencontrées chez le chien. Demodex folliculorum mesure de 200 à 400 μm de long et vit dans les follicules pileux. Demodex brevis, légèrement plus petit, mesure 100 à 200 μm et parasite les glandes sébacées et les glandes de Meibomius. (Akilov et Mumcuoglu 2004)

b) Localisation et cycle parasitaire

Les Demodex sont généralement observés au niveau du front, du nez, du philtrum et de la région des joues en regard des molaires, mais ils peuvent être présents sur l’ensemble du visage et autour des oreilles. Occasionnellement, on les rencontre au niveau d’autres zones corporelles. (Akilov et Mumcuoglu 2004)

Le cycle parasitaire dure de 14 à 18 jours. (Lacey et al. 2009)

c) Epidémiologie et transmission

Selon les études, Demodex folliculorum et Demodex brevis sont présents chez 20 à 100 % de la population. Toutefois, le taux de morbidité de la démodécie humaine ne représente pas plus de 2,1 % de l’ensemble des dermatoses et, chaque année, 39 cas de démodécie pour 100 000 personnes, sont recensés. (Akilov et Mumcuoglu 2003) Aucun Demodex n’a été mis en évidence chez des enfants, en bonne santé, de moins de 10 ans. Ils apparaissent après cet âge et, leur densité augmentant avec l’âge de l’individu, certains

73 auteurs avancent qu’ils sont probablement présents chez 100% des individus âgés. (Lacey et al. 2009)

L’absence de Demodex mis en évidence, chez les enfants avant l’adolescence, ne signifie pas qu’ils ne sont pas présents. La démodécie n’est pas contagieuse chez l’homme, les Demodex doivent donc parasiter les jeunes enfants, mais en faible nombre. Rappelons que chez le chien, la transmission s’effectue uniquement par contact direct de la mère aux chiots, durant les trois premiers jours de vie, pendant la tétée, lors du contact du museau des chiots avec les mamelles de la mère. En extrapolant, nous pouvons supposer l’existence d’un phénomène identique entre la mère et le bébé. Durant la période précédant l’adolescence (10-12 ans), l’augmentation de la production de sébum, sous l’influence des androgènes, est probablement à l’origine d’une augmentation de la population de Demodex, qui les rend détectables lors de la réalisation de biopsies cutanées. Quelques interrogations demeurent pourtant. En effet, tous les nouveau-nés ne sont pas nourrit au sein et il semblerait, que, pour certains auteurs, les Demodex soient mis en évidence chez 100% de la population, à partir d’un certain âge. Soit il existe d’autres modalités de transmission entre la mère et le jeune enfant (ce qui serait étonnant), soit les chiffres d’infestation démodécique chez les personnes plus âgées sont à prendre avec précaution et à minorer.

De plus, la relation entre l’augmentation du nombre d’individus parasités et l’âge, est pour l’instant, méconnue. Certains avancent l’explication d’une colonisation cumulative ou d’une augmentation de la sécrétion de sébum liée à l’âge, favorable au parasite. (Lacey et al. 2009)

2. Implication des Demodex dans certaines dermatoses humaines

a) Généralités

Le rôle pathogène des Demodex chez l’homme est confus et sujet à controverse. Certains le considèrent comme un parasite normal, saprobie, de la peau, en particulier, au niveau du visage. En effet, sa présence fortuite dans de nombreuses biopsies cutanées, est en défaveur d’un rôle pathogène quelconque. (Lacey et al. 2009)

74 De plus, les études histologiques n’ont pas réussi à montrer de lien entre la présence de Demodex et des dermatoses. Pour finir, la réponse clinique de certaines maladies imputées à Demodex à l’application d’un acaricide n’a pas confirmé l’implication étiologique du parasite. (Vollmer 1996)

Néanmoins, depuis quelques années, des auteurs parlent d’un rôle pathogène réel de Demodex. Ils considèrent alors qu’une densité supérieure à cinq Demodex par cm² est un critère pathologique. En effet, lorsque le follicule pileux est fortement infesté et que cette infestation s’accompagne d’une infection bactérienne secondaire, avec ou sans furonculose, des symptômes cliniques apparaissent. (Akilov et Mumcuoglu 2004) A noter que le choix de traduire un critère numérique (densité) en critère pathologique est à considérer avec précaution.

Le rôle pathogène des Demodex a été incriminé dans plusieurs dermatoses : - le pityriasis folliculorum - la rosacée, en particulier la forme glandulaire du rhinophyma - la dermatose granulomateuse périorbitale - la dermatose papulopustuleuse du cuir chevelu - certaines blépharites, incluant le chalazion - certaines folliculites - la dermatite séborrhéique

b) La rosacée ou l’exemple d’une controverse

La rosacée est une dermatite chronique dont les lésions affectent habituellement le centre du visage, principalement les joues, le nez et le menton. Occasionnellement des lésions peuvent toucher les zones exposées au soleil comme la nuque et les oreilles. La rosacée est caractérisée par la présence de petites papules érythémateuses en forme de dômes et par l’apparition de papulopustules au voisinage du front d’avancée érythémateux périphérique. (Lacey et al. 2009)

Elle affecte environ 3% de la population mondiale, les individus touchés ayant entre 30 et 50 ans.

75

Les Demodex ont été impliqués, depuis 1932, dans la pathogénie de la rosacée. Cette implication est aujourd’hui, toujours soumise à controverse. (Forton 2012)

Les articles publiés récemment sont plutôt en faveur d’un rôle pathogène des Demodex. Certains auteurs considèrent, même, qu’ils pourraient être à l’origine de cette dermatose. Mais de nombreux dermatologues sont en désaccord avec ce postulat. Les considérations qui suivent sont donc à prendre avec précaution. Ce ne sont, en effet, que des propositions de réflexion.

Relation entre démodécie et rosacée

Depuis 1993, il a été démontré que, au niveau des joues des patients présentant une rosacée papulopustuleuse, la densité de Demodex est plus importante que celle observée chez des patients sains. Les rosacées papulopustuleuses associées à une densité de Demodex normale sont rares et, pour les auteurs défendant un rôle pathogène des Demodex, probablement liées à des faux négatifs. (Forton 2012) Il a, de plus, été noté une augmentation du nombre de Demodex lors des périodes, printemps et été, où la température augmente, périodes où la rosacée est exacerbée. (Lacey et al. 2009)

Si l’on accepte le fait qu’une densité de Demodex plus élevée est pratiquement toujours présente chez les patients présentant une rosacée, l’origine de cette relation reste inconnue. Soit la réaction inflammatoire observée lors de la rosacée est à l’origine de cette prolifération ou la prolifération de Demodex est à l’origine de cette réaction inflammatoire qui à pour conséquence la rosacée. (Forton 2012)

Les points soulevés ci-dessous sont relatifs à l’origine du processus. Ils sont en faveur d’une origine démodécique de la rosacée mais restent à discuter et à prouver :

- lors d’autres dermatoses faciales à l’origine de lésions hyperkératosiques et inflammatoires (le lupus érythémateux par exemple), les Demodex ne prolifèrent pas. La condition érythématosquameuse ne peut donc pas être à l’origine de cette prolifération (Forton 2012),

76 - la guérison clinique de la rosacée est observée lors de l’utilisation de traitement acaricide, concomitante avec une diminution du nombre de Demodex (Forton 2012),

- considérer l’augmentation de la densité en Demodex comme un épiphénomène, secondaire à une infiltration périfolliculaire n’est pas entièrement satisfaisant. Si on considère les relations entre hôte et microorganisme en médecine, la probabilité que les Demodex soient à l’origine de l’inflammation périfolliculaire est plus importante que l’inverse : en effet les raisons pour lesquelles les parasites proliféreraient au niveau de follicules pileux inflammatoires restent inconnues (Forton 2012),

- l’anatomie des Demodex et l’observation des lésions histopathologiques tendent à montrer que les Demodex peuvent être à l’origine de brèches épithéliales. Par contre, le franchissement actif du mur folliculaire ainsi que la pénétration dans le derme restent du domaine de l’hypothèse (Forton 2012),

- la proportion inverse entre des marqueurs inflammatoires et la densité de Demodex observée chez les patients présentant une rosacée est en faveur d’une origine démodécique de la maladie. A contrario, si la rosacée était une maladie d’origine immunologique comme certains auteurs le suggèrent, les modifications du système immunitaire seraient le point de départ, et favoriseraient la prolifération de Demodex, qui en serait une conséquence. Dans ce cas, nous devrions observer : - une densité de Demodex plus importante lorsque les symptômes inflammatoires sont sévères, - un grand nombre de patient présentant une rosacée sans une infestation importante de Demodex, Or, le contraire est observé : - les plus hautes densités de Demodex sont observées lorsque les symptômes cliniques sont les plus discrets, - presque tous les patients présentant une rosacée (88%) présentent une densité élevée de Demodex (Forton 2012),

Ces différents arguments, la proportion inverse entre marqueurs inflammatoires et la densité de Demodex, les réactions périfolliculaires et granulomateuses initiées par les Demodex, la

77 capacité du parasite à créer des brèches épithéliales, l’absence de prolifération des Demodex dans d’autres dermatoses et l’action d’un traitement acaricide sur les lésions cliniques, sont donc en faveur d’une origine démodécique de la rosacée. (Forton 2012)

Le dernier argument avancé par les défenseurs d’un rôle pathogène des Demodex est le suivant : de nombreux dermatologues reconnaissent le rôle pathogène des Demodex lors de démodécie de type rosacée mais pas lors de rosacée papulopustuleuse. En effet, ils différencient les deux maladies. Or, ceci, d’après les auteurs ne semble pas évident. Tout d’abord les différences cliniques sont relatives : - la taille des pustules est l’une des différences entre les deux dermatoses : lors de rosacée, les pustules observées sont normalement plus grosses que lors de démodécie de type rosacée. Or, en pratique, les patients présentant uniquement de grosses pustules sont rares. Dans la plupart des cas, des pustules de différentes tailles sont observées en même temps. La taille des pustules est liée à la profondeur de l’infiltration, les pustules les plus importantes étant liées aux infiltrats les plus profonds. Certains auteurs avancent que les pustules les plus profondes pourraient être liées à la prolifération de Demodex brevis dans les glandes sébacées, ces parasites étant plus difficiles à mettre en évidence que les Demodex folliculorum. - la présence de squames folliculaires est semble-t-il caractéristique de la démodécie de type rosacée, or elles sont presque toujours observées lors des cas de rosacée papulopustuleuse. (Forton 2012)

Les auteurs rapportent, enfin, que dans leur pratique de tous les jours en cabinet, les cas de rosacée en l’absence d’une forte densité de Demodex sont très rares. Pour eux, la rosacée seule, si elle existe, serait donc une entité très rare, pratiquement jamais observée par les dermatologues. Or, le diagnostic de rosacée est fréquemment établi. Ils en concluent donc que les cas de rosacée papulopustuleuse sont en réalité des cas de démodécie. (Forton 2012)

L’ensemble de ces réflexions est à considérer avec réserve. Rappelons que de nombreux dermatologues considèrent que les Demodex n’ont pas de pouvoir pathogène chez l’homme.

c) Autres localisations

Les Demodex peuvent aussi être observés au niveau des paupières. En 1899, une blépharite est d’ailleurs le premier cas recensé d’une affection associée à la présence de Demodex.

78 Demodex folliculorum est présent au niveau des cils alors que Demodex brevis est observé au niveau des glandes sébacées des cils et des glandes de Meibomius, ces dernières produisant le meibum, composant la couche superficielle du film lacrymal préoculaire. (Lacey et al. 2009)

3. Actualité sur la pathogénie des Demodex parasitant l’homme

a) Action mécanique et antigénique des parasites

Classiquement, il est admis que la présence de Demodex peut, mécaniquement, entraîner l’obstruction des follicules pileux et des canaux des glandes sébacées, induisant une dilatation folliculaire par accumulation de kératine et de sébum. Les débris et les déchets produits par les parasites peuvent déclencher une réaction inflammatoire via une réaction d’hypersensibilité retardée ou une réponse du système immunitaire inné. De plus, lors de l’effondrement de la paroi du follicule pileux, l’exosquelette chitineux des parasites, jusqu’alors partiellement à l’abri du système immunitaire, agit comme un corps étranger et peut être à l’origine de réactions inflammatoires granulomateuses. (Bevins et Liu 2007)

b) Une immunodépression nécessaire ?

Un des facteurs à l’origine du passage à une démodécie clinique est le développement d’une immunodépression primaire ou secondaire. L’immunodépression primaire est la conséquence d’un déficit héréditaire en lymphocytes T. Le lien entre immunodépression secondaire et démodécie a été observé à de nombreuses reprises. Il a été en effet démontré que certaines affections dues aux Demodex se développent préférentiellement chez les individus immunodéprimés. Le pityriasis folliculorum, par exemple, encore appelé démodécie faciale, ne se développe, à l’adolescence, que chez des individus VIH-positif. (Forstinger et al. 1999) Autres exemples, la folliculite éosinophilique et la rosacée ne se développent que chez des patients âgés ou immunodéprimés, en particulier les enfants traités pour leucémie. (Lacey et al. 2009) Ces données sont à rapprocher de celles de la démodécie des chiens adultes.

79 Il a, de plus, été prouvé que les Demodex produisent un facteur humoral à l’origine d’une diminution sélective de certaines populations de lymphocytes T, bloquant la réponse immunitaire locale. (Rufli et Büchner 1984)

Enfin, la prédominance des lymphocytes T dans les infiltrats inflammatoires présents dans les lésions associées aux Demodex renforce l’hypothèse d’un rôle important de la réponse à médiation cellulaire dans la pathogénie de la démodécie. Un dérèglement de cette réponse aurait donc, logiquement, des conséquences importantes. Les lymphocytes T sont, en effet, présents dans 70 % des cas. Les lymphocytes T cytotoxiques peuvent aussi être à l’origine de lésions de l’épithélium folliculaire ou de l’aggravation de lésions pré-existentes.

Cependant, ces constations ne suffisent pas à expliquer pourquoi les Demodex prolifèrent chez certains patients mais pas chez d’autres. Ceci a conduit des chercheurs à envisager l’existence d’une prédisposition génétique pour la démodécie. (Akilov et Mumcuoglu 2003)

c) Existence d’un caractère héréditaire ?

(1) Rappel d’immunologie

Le système HLA désigne le groupe des gènes codants pour les molécules composant le complexe majeur d’histocompatibilité (CMH). Il est situé sur le bras court du chromosome 6. Le CMH est un système de reconnaissance du soi présent chez la plupart des vertébrés. Au niveau moléculaire, cette information génétique est exprimée notamment sous la forme de protéines de surface. Le CMH est composé du CMH de classe 1 (CHM I) et du CMH de classe 2 (CMH II).

Les molécules du CMH I sont présentes sur toutes les cellules nucléées de l’organisme, à l’exception des neurones et des cellules de certains tissus comme la cornée ou les glandes salivaires. Elles sont reconnues par les lymphocytes T cytotoxiques (LTCD8) et servent, avec les molécules de classe I non classiques, de marqueur du soi pour les lymphocytes Natural Killer (NK). Une cellule, infectée ou tumorale, subit des modifications métaboliques à l’origine, entre autres, d’une diminution de l’expression de ces molécules au niveau de la membrane cellulaire. Ces cellules ne sont plus reconnues comme appartenant à l’organisme et

80 déclenchent l’activation des NK, qui les détruisent. Cela permet d’éliminer les cellules anormales qui échappent au système immunitaire dit « classique ».

Le CMH II permet à certaines cellules, appelées cellules présentatrices d’antigènes (CPA), de présenter des peptides d’antigènes aux lymphocytes T naïfs (LTCD4) pour induire une réponse immunitaire. Les CPA sont les cellules dendritiques, les monocytes, les macrophages, les lymphocytes B et les granulocytes éosinophiles et basophiles. Le CMH II peut également être exprimé par certaines cellules de tissus particuliers, comme la moelle osseuse rouge ou le thymus, afin d'éduquer les lymphocytes à la non-reconnaissance des peptides du soi. Un antigène exogène, entré dans la CPA par phagocytose ou pinocytose, est associé aux molécules du CMH II qui sont exprimées à la surface membranaire. Ainsi, le CMH II présente les peptides aux LTCD4 afin d'entraîner leur différenciation en lymphocytes auxiliaires (LTh1, LTh2, etc..). Le CMH II est aussi utile pour les lymphocytes B, après association avec le récepteur des LTh2, afin qu’ils puissent subir une maturation d'affinité et une commutation isotypique.

(2) Génétique et pathogénie de la démodécie humaine

Plusieurs chercheurs se sont intéressés au système HLA et à son implication dans la sensibilité ou la résistance à la démodécie.

(a) Etudes réalisées

Une première étude a été menée, sur certains allèles de locus d’intérêts, A, B et C du système HLA, au cours de laquelle le phénotype de patients présentant une démodécie clinique a été comparé à celui de patients sains. Les résultats sont les suivants : - une relation entre les halotypes Cw2 et Cw4 et la démodécie a été établie. Le risque de développer la maladie est 5 fois plus important pour les patients avec l’halotype Cw2, et 3,1 fois plus important chez ceux présentant l’halotype Cw4. - les individus présentant l’halotype A2 sont 2,9 fois plus résistant à la démodécie. - une corrélation positive a été observée entre les halotypes A3-Cw4, A3-Cw2, A3- B17, A3-B35 et B35-Cw4 et le développement d’une démodécie

81 - l’association des allèles Cw4 et Cw2 dans le génotype des patients démodéciques et la diminution du nombre de NK a été observée. (Akilov et Mumcuoglu 2003)

Une seconde étude sur les mêmes locus, a comparé les réponses du système immunitaire de patients présentant une démodécie clinique et celles de patients sains. Elle donne des résultats similaires : - l’absence de phénotype A2 entraîne une diminution de la concentration des LTCD8 ainsi qu’une diminution de l’activité des leucocytes et une augmentation de la concentration des immunoglobulines A. De plus, les zones touchées par la démodécie sont plus étendues et les formes papuleuses et papulopustuleuse sont plus fréquentes. Le phénotype A2 aurait donc un rôle protecteur contre la démodécie - le phénotype Cw2 serait, au contraire, à l’origine d’une plus grande sensibilité à la démodécie. Les patients l’exprimant montrent une diminution du nombre de LTCD3, une augmentation de l’activité phagocytaire, une densité parasitaire plus importante ainsi que des lésions cutanées plus sévères.(Mumcuoglu et Akilov 2005)

Il est donc admis que certains phénotypes confèrent une plus grande sensibilité à la démodécie. Le tout est de savoir pourquoi.

(b) Hypothèses avancées

Rappelons, que les NK possèdent des molécules de surfaces qui interagissent avec les molécules du CMH I, ces dernières étant à l’origine de l’inhibition de leur activité. En effet, lorsque les récepteurs de surface des NK sont liés à une molécule de CMH I appropriée, appartenant à une autre cellule, des signaux d’inhibitions sont transmis et la cytotoxicité est bloquée. Cela fait partie de la reconnaissance du soi.

En fonction du mécanisme de destruction cellulaire employé, les NK sont classés en deux catégories, les NK1 et les NK2. Les cellules exprimant le phénotype Cw1, Cw3, Cw7 ou Cw8 sont sensibles à la cytolyse provoquée par les NK1 mais pas à celle provoquée par les NK2. Les cellules exprimant le phénotype Cw2, Cw4, Cw5 ou Cw6 sont sensibles à la cytolyse provoquée par les NK2 mais pas à celle provoquée par les NK1. (Falk et al. 1995)

82 L’hypothèse proposée est la suivante : les cellules responsables de l’élimination des Demodex sont les NK2 et les débris de cadavres des parasites sont à l’origine de l’activation de cette sous-population de lymphocytes. Lorsque les phénotypes Cw4 ou Cw2 sont présents, l’activité des NK2 est non seulement dirigée contre les Demodex mais aussi contre les propres lymphocytes de l’hôte qui sont détruits (sensibles car exprimant le phénotype Cw4 ou Cw2). Ceci pourrait être à l’origine de la diminution du nombre de lymphocytes T dans le sang périphérique.(Akilov et Mumcuoglu 2004) De plus, les NK produisent les interleukines IL-12 et IL-15, qui ont plusieurs actions : - l’augmentation de la production d’interferon γ (INFγ) en présence d’IL-2, tout deux produits par les LTh1 - réduction de la synthèse d’IL-4 qui participe au basculement d’une réponse immunitaire à médiation cellulaire (LTh1) à une réponse immunitaire à médiation humorale (LTh2). Les NK sont donc à l’origine d’une rupture de l’équilibre LTh1/LTh2 en faveur des LTh1. (Akilov et Mumcuoglu 2003) Or, il a été démontré que les LTh2 jouent un rôle important dans l’élimination des parasites.(Akilov et Mumcuoglu 2004)

Ainsi, l’expression des phénotypes Cw4 et Cw2, à l’origine d’une destruction des lymphocytes T par les NK2, entraînant une diminution du nombre de lymphocytes T circulant et détournant les NK2 de leur activité contre les Demodex, et la rupture de l’équilibre LTh1/LTh2 en faveur des LTh1 interfèrent avec la lyse des parasites et sont à l’origine de lésions cutanées. Cela facilite donc la survie des Demodex et peut favoriser le passage à une démodécie clinique. (Akilov et Mumcuoglu 2003)

83

(c) Schémas récapitulatifs

LT LTCD8 et autres LTCD4

NK

LTh1 LTh2 NK1 NK2

LTh1 LTh1 LTh1 LTh2 LTh2 LTh2

IL-2 INTγ IL-4 IL-5

+ + -

Réponse à Réponse à médiation médiation Réponse cellulaire humorale immunitaire - Substances humorales locale Derme - - Membrane basale intacte Épiderm e

Figure 10 : Schéma récapitulatif des mécanismes immunitaires mis en place en présence de Demodex chez un individu présentant un phénotype résistant.

LT LTCD8 et autres LTCD4 - Activité dirigée - contre les cellules du soi NK

LTh1 LTh2 NK1 + NK2 LTh2 Déséquilibre LTh LTh LTh LTh1 / LTh2 IL-12 1 1 1 + IL-15

IL-4 IL-5 - IL-2 INTγ Activité dirigée contre les + Emballement de la Demodex limitée + réponse immunitaire locale Réponse à Réponse à Aggravation des lésions médiation médiation humorale cutanées cellulaire Substances humorale - ? exosquelette Derme Rupture de la membrane basaleÉpiderme

Figure 11 : Schéma récapitulatif des mécanismes immunitaires mis en place en présence de Demodex chez un individu présentant un phénotype sensible. Développement d’une démodécie clinique.

84 d) Association de malfaiteurs ?

Le rôle des agents infectieux associés aux Demodex ne peut pas être exclu dans la pathogénie de la démodécie humaine et des maladies qui lui sont actuellement associées. Il a été démontré que les parasites sont vecteurs de certaines bactéries, présentes à leur surface. Staphylococcus albus ou Staphylococcus epidermidis, par exemple, ont été mis en évidence, lors de leur transport de follicule pileux en follicule pileux alors qu’ils étaient absent sur la peau saine. (Lacey et al. 2009) Les superantigènes produits par ce genre de bactérie pourraient jouer un rôle dans le développement de la démodécie et l’apparition de certaines maladies comme la rosacée. Bacillus oleronius a été aussi isolé à l’intérieur de Demodex chez un patient présentant une rosacée papulopustuleuse. (Forton 2012)

Le caractère héréditaire, les mécanismes immunitaires ainsi que le rôle de certains agents infectieux sont autant de pistes à explorer dans le futur pour, un jour, mieux comprendre la pathogénie de la démodécie féline.

85 86 Partie 2 ______

Etude clinique, diagnostic et traitement de la démodécie féline

87 88 IV. Etude clinique

A. Présentation et illustration des lésions cutanées rencontrées lors de démodécie

1. Alopécie et dépilation

L’alopécie est caractérisée par une perte de poils partielle ou totale. Ce mot vient du latin « alopex » (désigne le renard argenté qui, lors de sa mue, devient presque nu). L’alopécie est une diminution de la densité du pelage ou l’absence de pelage par réduction de la longueur ou du nombre des poils. Elle est primaire dans les affections du follicule pileux qui touchent directement la formation ou la croissance du poil telles que la pelade (alopecia areata), les dysplasies pilaires, les alopécies héréditaires ou congénitales. Quand le poil pousse encore mais qu’il se rompt sous l’effet d’un traumatisme (prurit), d’une infection ou d’une inflammation, on parle de dépilations. (Scott et al. 2001)

Photo 11 et 12 : Dépilation généralisée liée à une démodécie. (clichés unité dermatologie VetAgroSup)

2. Erythème

C'est la lésion cutanée la plus courante. L'érythème s'exprime par une rougeur congestive de la peau, localisée ou diffuse, qui s'efface à la vitropression (technique qui consiste à appliquer une lame de verre sur la peau et à observer si la coloration rouge s’estompe ou non).

89 Il est le signe d’une vasodilatation des vaisseaux sanguins du derme superficiel. Chez le chat, la pigmentation de la peau et la pilosité rendent son observation souvent difficile. (Scott et al. 2001)

Photo 13 et 14 : Erythème chez un chat présentant une démodécie. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)

3. Séborrhée et comédons

Un comédon est un follicule pileux dilaté par l’accumulation de sébum et de kératinocytes. (Scott et al. 2001)

La séborrhée est caractérisée par une augmentation anormale de la production de sébum par les glandes sébacées. La peau apparaît luisante. (Scott et al. 2001)

A B

Photos 15 (A) et (B) : (A) Nombreux comédons sur la face ventrale de l’abdomen. (B) Illustration d’une peau séborrhéique. (clichés unité dermatologie VetAgroSup)

90 4. Lichénification et squamosis

Les squames sont des pellicules blanchâtres ou grisâtres, correspondant à une perte plus ou moins importante d'éléments de la couche cornée. On en décrit plusieurs types selon leur épaisseur et leur taille. Les deux types les plus courants, en médecine vétérinaire, sont la squame psoriasiforme, de grande taille, épaisse et amiantacée et la squame pityriasiforme, de petite taille, blanchâtre et pulvérulente. Le squamosis est caractérisé par la perte abondante de squames. (Scott et al. 2001)

La lichénification est un épaississement de la peau, avec accentuation des sillons cutanés ou dermatoglyphes, souvent accompagné d'hyperpigmentation diffuse. C'est le signe majeur d'une inflammation chronique souvent prurigineuse. (Scott et al. 2001)

A B

Photo 16 (A) et (B) : (A) Squamosis, les squames sont visible à l’œil nu. (B) Lichénification au niveau de la face d’un chat présentant une démodécie. Les dermatoglyphes sont accentués. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)

5. Croûtes

Une croûte est composée de sang, de sérum, d’un exsudat ou de pus, asséchés et adhérents à la surface de la peau. Elle est en général secondaire à la rupture, puis, à la dessiccation d'une lésion primaire à contenu liquidien. (Scott et al. 2001)

91

Photo 17 : Croûte. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

6. Erosions, ulcérations et excoriations

Une érosion correspond à une perte épidermique sans atteinte de l’intégrité de la membrane basale (le derme n'est pas atteint). La lésion est souvent suintante mais ne présente pas de saignement. La guérison ne laisse pas de cicatrice en l'absence de complication. (Scott et al. 2001)

Les excoriations sont des lésions épidermiques superficielles (semblables aux érosions) auto- infligées (grattage, mordillement, frottement), d’où leur aspect souvent linéaire. (Scott et al. 2001)

A B

Photos 18 (A) et (B) : (A) Erosion. (B) Excoriations au niveau de l’oreille chez un chat présentant une démodécie associée à du prurit. (clichés unité dermatologie VetAgroSup)

92 Une ulcération est caractérisée par une perte de substance dermique. À la différence de l'érosion, l’ulcération franchit la membrane basale. Lors de la guérison, il y a comblement de la brèche par du tissu conjonctif plus dense (fibrose) qui peut laisser une cicatrice permanente. (Scott et al. 2001)

Photo 19 : Exemple d’ulcération chez un chat démodécique. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

7. Pustules

Une pustule est une petite élévation de l’épiderme, bien circonscrite, d’emblée purulente (accumulation de polynucléaires neutrophiles qui dégénèrent), dont la taille va de quelques millimètres à 1 centimètre. La pustule évolue spontanément vers la collerette épidermique. (Scott et al. 2001)

Photo 20 : Pustule sur le pavillon auriculaire d’un chat présentant une démodécie. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

93 8. Papules, plaques et nodules

Une papule est une petite élévation cutanée d’un diamètre allant jusqu’à 1 cm. C’est une lésion circonscrite, pleine et ferme, souvent rouge ou rosée, pouvant être due à une accumulation de cellules, de fluide, de débris cellulaires kératinisés ou à un dépôt métabolique (mucine, calcium..). Les lésions plus étendues, résultant de la coalescence de plusieurs papules, sont appelées plaques. (Scott et al. 2001)

Un nodule est une élévation cutanée circonscrite, ferme, de plus d’1 cm qui peut s’étendre dans les couches plus profondes de la peau. (Scott et al. 2001)

Photo 21 : Papules situées au niveau du pavillon auriculaire d’un chat démodécique. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

9. Otite érythémato-cérumineuse

Lors d’otite érythémato-cérumineuse, un érythème est associé à une sécrétion excessive de cérumen épais. L’aspect des sécrétions est variable. Elles peuvent être brunes, noirâtres et sèches, ou brunes, claires et épaisses. (Scott et al. 2001)

94

Photo 22 : Otite externe érythémato-cérumineuse chez un chat, avec des sécrétions brunes et sèches. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)

B. Symptomatologie de la démodécie à Demodex cati

Scott, en 1980, propose trois syndromes majeurs associés à la démodécie à Demodex cati (Scott 1980): - une zone unique, ou de multiple zones d’alopécie, plus ou moins bien circonscrites sur la tête, les oreilles et le cou avec parfois, des squames, des croûtes et une pyodermite secondaire - une alopécie, généralisée ou multi-focale, associée à un érythème et à des croûtes, des squames en quantité variable ainsi qu’à une pyodermite secondaire - une otite externe cérumineuse. (Chesney 1989) (Lagrange 1994)

Nous allons détailler ces différentes expressions cliniques.

1. Formes localisées

Sur l’ensemble des cas rapportés au cours des études, 26 présentent une démodécie localisée.

a) Définition

La démodécie localisée est caractérisée par la présence de lésions circonscrites, de faible taille et peu nombreuses, 5 ou 6 environ, qui touchent une zone limitée du corps. (Chesney 1989)

95 b) Topographie lésionnelle

La forme la plus traditionnelle touche la tête et le cou. Les lésions se situent, le plus fréquemment, en région périorbitale et périauriculaire, sur le chanfrein, les lèvres ou la commissure des lèvres. Le pavillon des oreilles ou le bord de la conque auriculaire, le crâne, le front ainsi que le menton et le cou sont, également, souvent atteints. (Chesney 1989)

L’otodémodécie, affecte le conduit auditif externe.

Crâne

Zone périauriculaire

Chanfrein

Zone périoculaire

Zone péribuccale

Zone périauriculaire et conque auriculaire

Zone périoculaire

Chanfrein

Commissure des lèvres menton

cou

Figure 12 : Représentation schématique des localisations lésionnelles les plus fréquentes lors de démodécie à Demodex cati, localisée au niveau de la tête.

2. Forme généralisée

Comme son nom l’indique, les lésions peuvent être observées sur tout le corps. Les régions corporelles ne sont pas toujours touchées simultanément. (Chesney 1989)

Dix-huit cas de démodécie généralisée sont recensés dans la bibliographie.

96 3. Lésions cutanées

Les lésions cutanées sont les suivantes :

(1) Liées à la présence du parasite

- une alopécie avec des zones dépilées circonscrites (64 %), - un prurit très variable en fonction des cas, d’absent à sévère (47 %), - un érythème plus ou moins sévère, qui peut être difficilement visible à cause de la pigmentation et de la pilosité cutanée (24 %), - des croûtes grisâtres ou brunes (40 %), - des érosions et des ulcères (29 %), - une séborrhée pouvant être importante et des comédons (29 %), - une décoloration ou une hyperpigmentation en fonction de l’ancienneté de la dermatose - des papules (20%), - des pustules, - des squames pityriasiformes adhérentes à la peau, - un œdème éventuel.

(2) Consécutives au prurit lorsqu’il est présent

- des excoriations (29 %), - de la lichénification (17 %).

C. Symptomatologie de la démodécie à Demodex gatoi

1. Topographie lésionnelle

Lors de démodécie à Demodex gatoi, les lésions sont observées principalement au niveau de la tête et du cou, les zones les plus touchées étant les régions périauriculaire, périorbitale et péribuccale. (Chesney 1988). La face antéro-médiale des membres antérieurs, l’abdomen et la région inguinale peuvent également être atteints (Morris 1996).

Bien que les lésions causées par Demodex gatoi puissent avoir une distribution similaire à celle des lésions causées par Demodex cati, Demodex gatoi peut aussi être à l’origine de

97 lésions au niveau du tronc, de la face médiale des membres et, plus spécifiquement, au niveau de l’abdomen et des faces ventrale et latérales du thorax. (Neel et al. 2007)

Zone périauriculaire

Zone périoculaire

Zone péribuccale

Zone périauriculaire

Zone périoculaire

Zone péribuccale

cou

Figure 13 : Représentation schématique des localisations lésionnelles les plus fréquentes lors de démodécie à Demodex gatoi au niveau de la tête.

Vue dorsale Vue ventrale Figure 14 : Représentation schématique des localisations lésionnelles les plus fréquentes lors de démodécie à Demodex gatoi au niveau du tronc.

98 Onze cas de démodécie localisée et 28 cas de démodécie généralisée sont recensés dans la littérature.

2. Nature des lésions

Un prurit d’intensité variable est rapporté. Il est plus fréquemment présent que lors de démodécie à Demodex cati (85 %) et est associé aux lésions suivantes : - des croûtes (34 %), - des excoriations ou des érosions (44 %).

Les autres lésions observées sont : - de l’alopécie parfois symétrique (60 %), - de l’érythème (63 %), - des squames, - des papules, - des pustules.

D. Cas particulier de l’otodémodécie

Tout d’abord, il est important de noter que la présence ou l’absence de Demodex dans le canal auditif externe chez les chats sains est aujourd’hui encore sujette à controverse. (Sotiraki et al. 2001). Certains considèrent que leur présence traduit forcement une composante pathologique même s’il n’y a pas de signe clinique d’otite externe.

1. Demodex cati

a) Otodémodécie seule

La démodécie est une cause peu fréquente d’otite externe. Brockis a, en 1979, examiné le cérumen de 507 chats présentant une otite externe et n’a mis en évidence de Demodex chez aucun d’entre eux. (Chesney 1989) Bien que rare, l’otodémodécie doit, tout de même, faire partie des causes à envisager lors d’otite.

99 Quelques cas d’otite externe cérumineuse à Demodex cati, sans présence d’autres lésions cutanées, sont rapportés dans la littérature. (Van Poucke 2001) (Beugnet et Chardonnet 1993) Les symptômes sont frustres et non spécifiques. L’individu peut présenter un port de tête modifié, secouer la tête, se gratter les oreilles, d’où la présence possible d’excoriations sur les pavillons et à la base des oreilles. L’otoscopie révèle généralement une otite bilatérale et erythémato-cérumineuse. Le cérumen est visqueux, de consistance molle, de couleur variable (jaunâtre, cireux, brun, noir,…) et inodore. (Van Poucke 2001).

Une maladie intercurrente ne semble pas être nécessaire au développement d’une otite externe à Demodex. Cependant, dans un cas, le chat présentait une otite externe cérumineuse bilatérale sans autre lésion cutanée mais avec une atteinte viscérale concomitante (atteinte rénale constatée lors de l’euthanasie) et une leucopénie persistante. Il est impossible de savoir si un lien existait entre l’otite, l’insuffisance rénale et la leucopénie persistante.

100

b) Otodémodécie liée à une démodécie localisée ou généralisée

Lorsque la présence de Demodex au niveau auriculaire est attestée sur un individu atteint de démodécie localisée ou généralisée, deux cas de figure se présentent : - soit l’individu présente des signes cliniques relatifs à cette présence, une otite externe cérumineuse bilatérale, par exemple. Bien que ce soit peu fréquent, quelques cas ont été rapportés lors de démodécie généralisée (Chalmers et al. 1989) (White et al. 1987). - soit l’individu ne présente pas d’otite externe. C’est la situation la plus fréquemment observée. La présence des parasites au niveau auriculaire sans signe clinique spécifique est, en effet, rapportée dans la moitié des cas de démodécie localisée et généralisée. Ces observations sont, de plus, probablement en deçà de la réalité. La présence de Demodex cati dans le cérumen n’est pas toujours rapportée, l’écouvillonnage n’étant pas un examen complémentaire systématiquement réalisé par les praticiens en cas de démodécie.(Chesney 1989).

2. Demodex gatoi

Chez le chat, la présence de Demodex gatoi a été observée lors d’otites externes érythémato- cérumineuses (Saari et al. 2009).

E. Complications

Les complications rencontrées le plus souvent sont dues aux proliférations bactériennes et fongiques de surface.

F. Tableaux récapitulatifs des lésions rencontrées dans les cas publiés

Voir ci-dessous les récapitulatifs pour les cas de démodécie à Demodex cati, à Demodex gatoi ou à Demodex species et à Demodex non identifié.

101 1. Démodécie à Demodex cati

Demodex cati

Erosions Papules / Lichénifi Nbre Séborrhée / Age Races Type Alopécie Prurit Érythème Croûtes Pustules Ulcérations Plaques / cation / Cérumen Maladies concomitantes Référence chats Comédons Excoriations Nodules Squames

1 I + Aucune (Megnin 1880)

1 I Aucune (Hirst 1919)

2 10 (1) L (2) + (2) FelV (1) (Desch et Nutting 1979) G (2) FelV (1), D (1) 4 + (1) + (1) (Scott 1980) L (2) 3 1 (3) Ln (3) L (3) + (3) + (3) + (1) Aucune (Fletcher 1980)

1 12 B L + + + + IRH (Cth) (Bathey et al, 1981)

1 3 Ec L + Aucune (Stogdale et Moore 1982)

2 4 / 18 Ec (2) L (2) + (1) + (2) + (1) + (1) + (1) + (1) + (2) Cth / T / D (1), Cth (1) (Carlotti et al, 1986)

2 9 / 11 Ec (2) G (2) + (2) + (2) D/Cu/T (1), D/Cu (1) (White et al, 1987)

1 14 Ec L D/Cu (Zerbe et al, 1987)

2 9 / 11 S (2) G (2) + (2) + (1) FeLV (1), LES (1) (Meldeau et al, 1988)

1 Aucune (Vroom et Koeman 1988)

1 14 Ec G + + + + Aucune (Cowan et Campbell 1988)

2 5 / 7 Ec (2) G (2) + (2) + (2) + (2) + (2) + (1) + (1) + (1) FIV/IRH (1), FIV/Cth (1) (Chalmers et al, 1989) 0,75 / 3 / Ec (4) L (5) FeLV (2), FIV/FeLV (1), Cu (1), D 6 8 / 9 / 12 / + (6) + (3) + (4) + (2) + (3) + (1) + (3) + (1) + (2) + (1) (Guaguere 1993) (1) 13 P (2) G (1) 1 Aucune information disponible Aucune (Yathiraj et al, 1994)

10 / 12 / G (1) 5 Ec (5) + (2) + (1) + (3) + (3) + (5) CE in situ (5) (Guaguere et al, 1999) 13 (2) / 14 L (4) 0,5 / 2 / 4 G (3) 5 Ec (5) + (3) + (4) + (2) + (5) + (1) + (3) HA/Cth (1), Cth (2), FIV/Cth (1) (Morris et Beale 2000) / 10 / 16 L (2) 1 1 El L + + + + Xant/T/Cth (Vogelnest 2001) Ec (2), 3 6 / 14 (2) G (3) + (3) + (3) + (1) CE in situ (2), FIV (1) (Johnstone 2002) El (1) 4,5 / 10 / Ec (2), G (1) 3 + (3) + (3) + (3) + (2) + (3) + (2) +¨(1) + (2) + (1) Cth (1) Cas VetAgroSup 1, 3 et 5 11 C (1) L (2) Tableau 9 : Récapitulatif des lésions rencontrées lors de démodécie à Demodex cati.

102 2. Démodécie à Demodex gatoi

Demodex gatoi

Erosions Papules / Lichénifi Nbre Séborrhée / Age Race Type Alopécie Prurit Érythème Croûtes Pustules Ulcérations Plaques / cation / Cérumen Maladies concomitantes Référence chats Comédons Excoriations Nodules Squames

1 7 Ec L + + Aucune (Trimmier 1966) (Gabbert et Feldman 1 1,5 S L + + + Aucune 1976) 1 9 S G + + Aucune (Conroy et al, 1982)

1 Ec G Aucune (Muller 1983)

1 1 Ec L + + + + + Aucune (Cth) (Wilkinson 1983) (White et Ihrke 1 G Aucune 1983) 1 8 Ec G + + + + Aucune (Carlotti et al, 1986) (McDougal et 1 4 Ec G + + Aucune Novak, 1986) (Meldleau et al, 2 10 / 1 Ec (2) G (2) + (2) + (1) + (1) FeLV (1), Tox (1) 1988) 3 0,5 / 2 / 5 Ec (3) L (3) + (3) + (2) + (2) + (3) + (1) Aucune (Guaguere 1993) G (2) 3* 4 / 4 / 2 S (3) + (3) + (3) + (3) + (1) + (1) + (1) HA/Cth (2), Cth (1) (Morris 1996) L (1) 1 4 Ec G + + + Cth (Lower et al, 2000) 0,25 / 0,5 (2) / Ec (4), El 0,75 / 1,5 / 3,5 G (8) HA/Cth (3), D (1), (Morris et Beale 10 (1), S (2), Cr + (10) + (10) + (10) + (3) + (1) / 7,5 / 8 / 12,5 Af/Cth (2), Cth (2) 2000) (2), H (1) L (2) / 13 1 8 Ec G + + + + + + + + FIV (Neel et al, 2007)

2 (2) / 3 / 4 / 5 Cr (5), B G (8) 10* (3) / 6 / 10 / (2), P (1), S L (1) + (9) + (9) + (9) + (9) + (1) + (1) Cth (6) (Saari et al, 2009) 11 (1) / Ex (1) I (1) G (1) 2* 0,25 / 5 Ec (2) + + Aucune (Beale 2012) I (1) 1 7 Ec L + + + Dpci/Cth Cas VetAgrosup 4 Tableau 10 : Récapitulatif des lésions rencontréeS lors de démodécie à Demodex gatoi.

103 3. Démodécie à Demodex species et à Demodex non identifié

Demodex species

Erosions / Papules / Nbre Séborrhée / Lichénificati Maladies Age Race Type Alopécie Prurit Érythème Croûtes Pustules Ulcérations / Plaques / Référence chats Comédons on / Squames concomitantes Excoriations Nodules 1 5 El L + + + + + + Cth (Chesney 1988)

1 8 Ec G + + + FIV / Mh / D. cati (Löwenstein et al, 2005)

1 13 Ec G + + + Cth (Kano et al, 2011) Demodex non identifié 1 1 I Aucune (Kroutz 1963)

1 G Aucune (White et Ihrke 1983) 1 7 Ec L + + + + + + + Cth Cas VetAgroSup 2 Tableau 11 : Récapitulatif des lésions rencontrées lors de démodecie à Demodex species et à Demodex non identifié.

Légendes utilisées dans les tableaux 9, 10 et 11 :

Race : B = Burmese, C = Chartreux, Cr = Cornish Rex, Ec = Européen à poils courts, El = Européen à poils longs, Ex = Exotique, H = Himalayen, S = Siamois

Type : G = Généralisée, L = Localisée,

Maladie concomitante ou traitement ultérieur : Af = Acné féline, CE in situ = Carcinome épidermoïde in situ, Cth = Corticothérapie, Cu = Syndrome de Cushing, D = Diabète, Dpci = Dermatose prurigineuse idiopathique chronique, FeLV = Leucose féline, FIV = Syndrome d’immunodéficience acquise, HA = Hypersensibilité Alimentaire, IRH = Infection des voies Respiratoires Hautes, LES = Lupus Erythémateux Systémique, Mh = Mycoplasma haemofelis, T = Teigne, Tox = Toxoplasmose, Xant = Xabnthome cutané

* : cas de contagion possible

104 V. Diagnostic

La suspicion de démodécie féline s’appuie sur des éléments anamnestiques et cliniques. Elle doit être confirmée ou réfutée par la mise en œuvre d’examens complémentaires.

A. Un diagnostic clinique et épidémiologique difficile à réaliser

1. Des notions épidémiologiques vagues

Le peu de cas recensés, la large distribution géographique et la mauvaise connaissance du cycle et de la pathogénie des parasites ne permettent pas d’extraire des données épidémiologiques.

2. Des signes cliniques communs

La démodécie féline est une maladie de présentation pléomorphe. Le praticien ne peut donc pas se baser sur des signes cliniques pathognomoniques pour établir son diagnostic.

B. Un diagnostic différentiel nécessaire et vaste

Comme la démodécie est une maladie rare chez le chat, dont les signes ne sont pas spécifiques et comme, de plus, les différentes espèces de Demodex peuvent être à l’origine d’expressions cliniques différentes, le diagnostic différentiel est vaste. L’hypothèse de démodécie doit être émise dès l’observation de signes compatibles afin de ne pas passer à côté du diagnostic.

a) Diagnostic différentiel avec les dermatoses alopéciantes prurigineuses, bref descriptif

La forme prurigineuse de la démodécie doit être différenciée de :

(1) Les dermatites allergiques

La dermatite par allergie aux piqûres de puces (DAPP) : chez le chat, la DAPP est la dermatose prurigineuse la plus fréquente. La présentation clinique n’est pas caractéristique

105 contrairement à celle observée chez le chien. Les individus touchés présentent une dermatite milliaire, une alopécie extensive, des lésions du complexe granulome éosinophilique ou un syndrome prurit et excoriations de la tête et du cou. (Medleau et Hnilica 2006) Le diagnostic repose sur l’anamnèse, la clinique et sur la guérison de l’animal atteint, après la mise en place d’un traitement antipuces rigoureux sur lui, ses congénères ou les animaux en contact dans l’environnement. (Scott et al. 2001)

Photo 23 : Lésions observées en région dorso-lombaire chez un chat présentant une dermatite par allergie aux piqûres de puces. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)

L’intolérance alimentaire : c’est une maladie rare chez le chat, beaucoup moins commune que la DAPP. Les signes cliniques sont peu spécifiques. Une intolérance alimentaire doit être envisagée lors de prurit non saisonnier, en particulier associé à des troubles digestifs. Le prurit peut être généralisé ou localisé à la tête et au cou. Les lésions cutanées sont variables et peuvent inclure de l’alopécie, de l’érythème, de la lichénifaction et des excoriations. On peut observer une dermatite milliaire, des lésions du complexe granulome éosinophilique ou, rarement, une alopécie extensive. Le diagnostic repose sur l’anamnèse, l’examen clinique et la réponse à un régime d’éviction distribué pendant au moins dix semaines, suivi de la réintroduction de l’ancien régime. (Scott et al. 2001)

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Photo 24 : Lésions localisées sur la tête d’un chat lors d’hypersensibilité alimentaire. (cliché unité dermatologie VetAgroSup)

L’hypersensibilité aux piqûres de moustiques : c’est une maladie rare, saisonnière, dans laquelle les lésions apparaissent en été et régressent en automne et en hiver. Le tableau clinique est assez évocateur : le prurit est sévère et les lésions sont habituellement situées sur le chanfrein, les pavillons auriculaires et les paupières. Elles peuvent être symétriques et hypopigmentées ou hyperpigmentées. Les coussinets peuvent, eux aussi, être impliqués : ils sont douloureux et gonflés, présentent des fissures, des ulcérations et un aspect squameux- croûteux. (Scott et al. 2001)

(2) Les autres ectoparasitoses

La gale otodectique : c’est l’acariose la plus fréquente chez le chat. Elle est caractérisée par une otite, le plus souvent bilatérale, érythémato-cérumineuse avec un cérumen sec et brun- noirâtre. Le prurit est intense. Des excoriations rétro-auriculaires et des othématomes sont souvent observés. Des lésions prurigineuses peu spécifiques de la face, du cou et de la région dorso-lombaire sont signalées. Le diagnostic s’effectue à l’examen direct du cérumen ou du produit de raclages cutanés. (Scott et al. 2001)

La cheylétiellose : c’est une acariose méconnue et sous-diagnostiquée. Elle se localise principalement à la tête et au tronc et se caractérise par du prurit, parfois important, un

107 squamosis, des dépilations localisées ou diffuses, un érythème, des papules et des croûtes. Le diagnostic est effectué par l’examen direct du produit de raclages cutanés ou d’un brossage qui met en évidence des œufs collés aux poils ou des parasites. (Scott et al. 2001)

La thrombiculose : c’est une acariose plus ou moins saisonnière, rencontrée en été, en automne, voire toute l’année lors de conditions favorables, due à une larve parasite hexapode. Elle se localise principalement à la tête (dédoublement des oreillons, tempes, cou), au niveau de l’insertion des membres (ars, plis inguinaux) et aux pattes. Elle se caractérise par des dépilations, un érythème, des excoriations, des érosions et des croûtes. Le prurit est souvent intense. Le diagnostic repose sur l’anamnèse, la clinique et la mise en évidence des larves de couleur orangé, soit à l’œil nu, soit à la loupe. (Muller al. 2001)

A

B

Photos 25 (A) et (B) : (A) Lésions observées sur la tête d’un chat lors de thrombiculose et (B) aspect général du chat. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)

La phtiriose : c’est désormais une acariose rare chez le chat car les antiparasitaires externes, utilisés comme antipuces, sont très efficaces sur les poux. Elle ne sévit plus que chez les chats errants ou chez les chatons et les adultes provenant de certains élevages mal entretenus. Les localisations préférentielles sont principalement la face, les pavillons auriculaires et le dos. L’intensité du prurit est variable. Le diagnostic repose sur la mise en évidence macroscopique des poux et des lentes et leur identification macroscopique.(Scott et al. 2001)

108 A B

Photos 26 (A) et (B) : (A) Lésions sévères observées lors d’une phtiriose et (B) agrandissement permettant la visualisation des nombreuses lentes. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)

La gale notoédrique : c’est, aujourd’hui, une maladie inexistante en France. Elle débute initialement sur la tête et les pavillons auriculaires et se caractérise par des dépilations, un érythème, des squames et des croûtes épaisses et adhérentes. Lors d’évolution ancienne, ces lésions s’étendent secondairement aux membres, à l’abdomen et à la région anale. Le prurit est souvent intense. Le diagnostic est réalisé par la mise en évidence des parasites lors de l’examen direct du produit de raclages cutanés. (Scott et al. 2001)

(3) Les pyodermites bactériennes

Les dermatoses bactériennes sont rares chez le chat.

Les pyodermites superficielles : elles surviennent généralement à la suite d’une dermatose sous-jacente (dont la démodécie), d’une maladie générale ou d’un traitement immunosuppresseur. (Scott et al. 2001)

L’acné féline : c’est un trouble primitif de la kératinisation touchant les zones riches en glandes sébacées et se compliquant fréquemment d’infection bactérienne. Les lésions cutanées sont des comédons, des manchons pilaires, des papules, des pustules et des furoncles sur le menton et, parfois, la lèvre supérieure. Le diagnostic repose sur l’examen clinique et

109 l’exclusion des autres causes par la mise en œuvre des examens complémentaires adéquats. (Scott et al. 2001)

Photo 27 : Lésions observées lors d’acné féline. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

(4) La dermatite à Malassezia

Elle est, le plus souvent, secondaire à une cause sous-jacente (dermatite allergique, corticothérapie,…). On observe un érythème, un état kératoséborrhéique, des excoriations, de la lichénifaction et des dépilations. Le diagnostic repose sur l’anamnèse, la clinique et l’examen cytologique d’un calque cutané de surface. (Scott et al. 2001)

B

A

Photos 28 (A) et (B) : (A) Aspect général d’un chat présentant une dermatite à Malassezia et (B) lésions observées en région abdominale ventrale. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)

110 (5) Les troubles du comportement

Les dermatoses liées à des troubles du comportement sont rares chez le chat bien que sous- diagnostiquées d’après certains auteurs. D’autres, au contraire, considèrent que l’incidence de cette maladie est surestimée. Elles se caractérisent par des lésions cutanées auto-induites. Une meilleure connaissance de l’éthologie du chat domestique permet désormais d’en établir le diagnostic positif. Le traitement consiste en la prescription de psychotropes, en l’utilisation de phéromones et de thérapies comportementales. (Scott et al. 2001)

(6) Les maladies auxquelles il faut penser…

Les dermatophytoses : ce sont des dermatoses très fréquentes qui doivent systématiquement être envisagées. Elles sont détaillées dans le chapitre suivant car non prurigineuses la plupart du temps.

Le pemphigus foliacé : c’est une dermatose auto-immune rare caractérisée par des lésions, initialement localisées au niveau du chanfrein et des pavillons auriculaires, à type de pustules qui, en raison de leur fragilité, évoluent en des érosions et des collerettes épidermiques. Des squames et des croûtes sont également présentes. La présence de lésions multiples au niveau du lit de l’ongle, avec un exsudat crémeux, est très évocatrice. Le prurit peut être très important. Cette maladie peut être discrète et localisée mais une généralisation des lésions est possible. Dans ce cas, les individus touchés sont souvent fébriles, anorexiques et abattus (Preziosi et al. 2003). Le diagnostic s’effectue grâce à l’examen cytologique du contenu des pustules et à l’examen histopathologique de biopsies cutanées. (Scott et al. 2001)

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Photo 29 : Lésions observées lors de pemphigus foliacé chez le chat. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Le lymphome cutané : c’est une tumeur rare chez le chat qui survient préférentiellement sur des animaux âgés de plus de 10 ans. Les lésions cutanées, très polymorphes, sont initialement un érythème et un squamosis généralisés, souvent prurigineux. Le diagnostic est histopathologique. (Scott et al. 2001)

b) Diagnostic différentiel avec les dermatoses alopéciantes non prurigineuses, bref descriptif

La forme non prurigineuse de la démodécie doit être différenciée de :

(1) La dermatophytose

Les dermatophytoses se caractérisent par leur très grand polymorphisme clinique, si bien que l’hypothèse de dermatophytose doit systématiquement être envisagée dans le diagnostic différentiel de toutes les dermatoses félines, d’autant plus qu’elles sont très contagieuses et qu’elles ont un caractère zoonotique. Le prurit est très variable, d’absent à important. La lésion la plus typique est une dépilation nummulaire, d’évolution centrifuge, associée à des squames, des croûtes et, parfois, un érythème. Les localisations préférentielles sont la face et l’extrémité distale des membres. Il faut se souvenir que de nombreuses autres formes cliniques, parfois très déroutantes, peuvent être observées. Le diagnostic est établi après examen à la lampe de Wood ou examen direct de poils ou de squames, complété par la culture

112 fongique qui permet de confirmer le diagnostic et d’identifier le genre et l’espèce responsable. (Scott et al. 2001)

Photo 30 : Lésions observées lors d’une dermatophytose due à Microsporum canis chez le chat. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

(2) Les affections acquises

(a) Généralisées

Les dysendocrinies : l’hyperthyroïdie et le syndrome de Cushing spontané ou iatrogène,… dans lesquels l’alopécie fait partie d’un tableau clinique beaucoup plus vaste. Lors de syndrome de Cushing, par exemple, les individus présentent fréquemment une insulino- résistance, une polydipsie, une polyurie, une polyphagie, une léthargie, un relâchement de sangle abdominale, une faiblesse musculaire, de l’obésité et des infections récurrentes des voies respiratoires supérieures et du tractus urinaire. (Scott et al. 2001)

L’alopécie paranéoplasique féline : c’est la manifestation cutanée d’un adénocarcinome pancréatique ou des voies biliaires, souvent métastasé au foie. Les signes cutanés qui, souvent, précédent les symptômes généraux associés au processus tumoral, sont très évocateurs. Ils se caractérisent par l’apparition soudaine d’une alopécie abdominale qui atteint progressivement la face, les membres et les flancs. La chute de poils est complète. La peau prend un aspect vernissé ou brillant, caractéristique, avec, parfois, une pigmentation lenticulaire. Les coussinets plantaires peuvent présenter un décollement dermo-épidermique et

113 être très douloureux. Le diagnostic repose sur l’anamnèse, la clinique, l’examen histopathologique des biopsies cutanées et l’échographie abdominale. (Scott et al. 2001)

B

A

Photos 31 (A) et (B) : Lésions observées chez un chat (A) en région abdominale ventrale et (B) en région péribuccale lors d’une dermatite exfoliative liée à un thymome. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)

L’effluvium (télogène ou anagène) : l’effluvium, qui correspond à une anomalie du cycle folliculaire, est caractérisé par la perte excessive et brutale de poils. Cette situation est communément associée à un événement stressant comme une gestation, une mise-bas, une lactation, une maladie systémique sévère, des épisodes fébriles marqués, un choc, une chirurgie ou certains traitements médicamenteux. L’affection peut être plus ou moins localisée ou généralisée. (Scott et al. 2001)

(b) Localisées

L’alopécie localisée post-injection : elle peut être inflammatoire suite à une réaction immune lors de vaccinations ou non-inflammatoire suite à un effet pharmacologique après l’utilisation de corticoïdes ou de progestagènes par exemple. Elle apparait en général de 2 à 3 mois après l’acte mais ce délai peut être beaucoup plus long. C’est, initialement, une lésion focale qui souligne le site de l’injection mais elle peut s’étendre. La forme généralisée n’a pas été décrite chez le chat. (Vitale et al. 1999)

114 La pelade ou alopecia areata et la pseudopelade : l’alopecia areata est une maladie auto- immune caractérisée par une alopécie, en zones nummulaires bien limitées, non prurigineuses. La pathogénie de cette maladie n’est pas encore entièrement connue chez le chat. La pseudopelade est une alopécie cicatricielle de l’homme, caractérisée par une inflammation lymphocytaire centrée sur l’isthme folliculaire. Un cas a été diagnostiqué chez un chat, d’aspect voisin de celui d’une pelade. (Olivry et al. 2000)

La réalisation d’examens complémentaires est essentielle. En particulier, l’examen du produit de raclages cutanés, profonds et superficiels, devraient être systématiquement effectués lors de toute dermatose, ne serait-ce que pour infirmer une hypothèse de démodécie.

c) Diagnostic différentiel avec les maladies à l’origine d’une otite externe cérumineuse

Les signes cliniques de l’otite externe sont assez caractéristiques : prurit auriculaire à l’origine de frottements de la face, de grattage, de mouvements de la tête ou de réactions d’agressivité, douleur auriculaire vive et mauvaise odeur. Toutefois, l’étiologie est variée et l’otodémodécie doit être différenciée des otites externes cérumineuses rencontrées lors : - d’autres ectoparasitoses (otodectose, thrombiculose) - de dermatites allergiques (cf supra) - de dermatites auto-immunes (cf supra) - de tumeurs (Van Poucke 2001)

C. Diagnostic expérimental

Différents examens complémentaires sont à la disposition du praticien pour lui permettre d’établir le diagnostic de la démodécie.

1. Raclage cutané

Le raclage cutané est, de loin, l’examen complémentaire de choix pour mettre en évidence les Demodex. Sa facilité de réalisation, sa rapidité de lecture et son faible coût en font un test essentiel lors de l’établissement d’un diagnostic de façon raisonnée en dermatologie.

115 a) Raclage cutané profond : mise en évidence de Demodex cati

Son principe consiste en l’examen des contenus folliculaires.

Le diagnostic de certitude de la démodécie repose sur la mise en évidence de nombreux Demodex adultes ou de formes immatures (œufs, larves, nymphes) dans le produit de plusieurs raclages cutanés profonds et réalisés à divers endroits. La découverte d’un Demodex dans un raclage n’est pas diagnostique, car il semble exister de nombreux porteurs sains. Bien que cette situation soit exceptionnelle, elle doit encourager à réaliser d’autres raclages sur plusieurs zones lésionnelles différentes pour confirmer ou infirmer un éventuel diagnostic de démodécie.

La technique de raclage cutané profond est simple : il est conseillé de pincer fortement, entre deux doigts, la zone à racler de manière à exprimer le contenu des follicules pileux et de rendre ainsi la collecte de Demodex plus facile. Le praticien utilise un scalpel, à la lame émoussée, qu’il tient perpendiculairement à la peau et racle celle-ci en appliquant une pression modérée dans le sens de la pousse du poil. Si la zone est couverte de poils, il peut être nécessaire de couper une petite zone de poils pour faciliter la réalisation du raclage. Une astuce consiste à appliquer de l’huile minérale ou du lactophénol, directement sur la peau, juste avant de réaliser le raclage, rendant la collecte de matériel plus facile. Après quelques raclages, la peau devient rosée : les capillaires deviennent visibles et le sang perle. Cette observation visuelle, appelée rosée sanguine, permet de confirmer que le matériel collecté provient d’une profondeur satisfaisante pour permettre la collecte de Demodex cati. Elle signe, en effet, une atteinte dermique. Si le raclage n’est pas réalisé jusqu’à la rosée sanguine, le praticien s’expose à des risques de faux-négatifs.

Le matériel prélevé est déposé dans une goutte d’huile minérale, ou de lactophénol, sur une lame porte objet, bien délayé puis l’ensemble est recouvert d’une lamelle. L’examen du produit de raclage se fait à l’aide d’un microscope, à faible grossissement (généralement x10) et à diaphragme fermé, ce qui permet d’accentuer le contraste et de rendre les parasites plus visibles. Les observations doivent être effectuées rapidement après la réalisation des raclages car les Demodex sont lysés en quelques heures et ne subsiste alors que leur exosquelette. (Mathet et al. 1996) (Scott et al. 2001) (Bensignor et Carlotti 1999) (Guaguère et Prélaud 2000)

116 A B

Photos 32 (A) et (B) : (A) Réalisation d’un raclage cutané profond chez un chat à l’aide d’une lame de scalpel et (B) observation de la rosée sanguine au niveau de la zone de prélèvement. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 33 : Examen au microscope du produit d’un raclage cutané mettant en évidence Demodex cati. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

b) Le raclage cutané superficiel : mise en évidence de Demodex gatoi

Son principe consiste en l’examen des couches superficielles de l’épiderme et permet donc de mettre en évidence Demodex gatoi qui vit dans le stratum corneum.

Contrairement à Demodex cati, Demodex gatoi n’est pas observé dans la peau cliniquement saine. Actuellement, sa découverte est considérée comme toujours anormale.

117 Certaines études suggèrent que Demodex gatoi serait trouvé de façon plus fréquente sur la face latérale de l’épaule. Mais, tout comme lors de la réalisation d’un raclage profond, les raclages superficiels doivent être effectués dans divers endroits pour multiplier les chances de découvrir le parasite. (Saari et al. 2009)

Lors de ces raclages, la rosée sanguine ne doit pas être atteinte, tout d’abord parce qu’elle n’est pas nécessaire en vue de la localisation superficielle de Demodex gatoi, ensuite parce qu’elle rend l’observation des parasites plus difficile, en augmentant l’apport de matériel collecté. Demodex gatoi est en effet moins facile à observer que Demodex cati. Il est plus petit, plus translucide et le nombre de parasites est très variable (souvent ils sont beaucoup moins nombreux que les Demodex cati lors d’infections concomitantes), il est donc important de sélectionner avec précision les zones à étudier pour éviter un faux négatif. (Saari et al. 2009)

Lors de l’observation au microscope, il est encore plus important, dans ce cas, de fermer le diaphragme pour augmenter le contraste dans la mesure où les parasites sont translucides et de petite taille. Les observations se font toujours à faible grossissement. (Saari et al. 2009)

2. Trichogramme

Le but de cet examen est de prélever par épilation une dizaine de poils, saisis à l’aide d’une pince hémostatique ou tout simplement avec deux doigts, et d’observer leur base au microscope après les avoir déposés dans une goutte d’huile minérale ou de lactophénol sur une lame porte-objet puis recouverts d’une lamelle. C’est une méthode moins sensible et utilisable uniquement pour le diagnostic d’une démodécie à Demodex cati. Elle a pour avantage d’être moins traumatisante qu’un raclage cutané profond. Cette méthode est peu réalisée en France mais surtout utilisée aux USA. Toutefois, cette méthode est source de nombreux faux-négatifs. (Muller al. 2001) (Bensignor et Carlotti 1999) (Guaguère et Prélaud 2000)

118

Photo 34 : Examen au microscope du produit d’un trichogramme et mise en évidence de deux Demodex cati. (cliché Docteur Thierry Bord)

3. Biopsie cutanée de surface

La biopsie cutanée de surface est une technique non invasive qui permet de prélever la couche cornée et éventuellement une partie du contenu folliculaire. Elle semble indiquée lors de suspicion de démodécie à Demodex gatoi mais aucune étude ne confirme son intérêt. Cette technique est en effet très peu utilisée en médecine vétérinaire, elle est surtout employée en médecine humaine.

Pour réaliser une biopsie de surface, le praticien dépose une goutte de cyanoacrylate (superglue) sur une lame porte-objet que l’on applique immédiatement sur la zone de peau que l’on souhaite prélever. Elle est laissée en place pendant 30 secondes environ puis elle est délicatement retirée ce qui permet de prélever la couche cornée. Le matériel est ensuite recouvert d’une goutte d’huile minérale et recouvert d’une lamelle. (Scott et al. 2001) (Bensignor et Carlotti 1999) (Guaguère et Prélaud 2000)

4. Biopsie cutanée

L’intérêt de la biopsie cutanée lors de démodécie chez le chat réside, essentiellement, dans l’observation des lésions cutanées microscopiques (contrairement au chien, où elle peut être d’une aide diagnostique dans certains cas). Elle permet bien sûr de mettre en évidence les

119 parasites mais les raclages cutanés profonds et superficiels sont plus sensibles et il n’est pas nécessaire d’avoir recours à l’histopathologie tant que ces derniers n’ont pas été réalisés correctement.

Le plus simple, lors de la réalisation de cette méthode, est de pratiquer une biopsie à l’emporte pièce, ne nécessitant qu’une anesthésie locale, bien qu’il soit aussi possible de pratiquer une biopsie par excision chirurgicale sous anesthésie générale en fonction de la localisation et de la bonne volonté du patient.

Cette technique est plus longue et ne donne un résultat qu’après un certain délai. Elle peut être plus ou moins douloureuse en fonction des conditions de réalisation et laisse des cicatrices. Elle nécessite, de plus, l’examen du prélèvement par un dermatopathologiste ou histopathologiste vétérinaire intéressé par la dermatologie, contrairement aux autres examens complémentaires que tout praticien peut réaliser dans sa clinique. (Mathet et al. 1996) (Guaguère et Prélaud 2000)

5. L’écouvillonnage auriculaire

Dans le cas d’une otite externe cérumineuse, l’examen direct du cérumen, prélevé à l’aide d’une curette, est suffisant. A noter que des Demodex ont été, exceptionnellement, observés lors de raclage de conduit auditif chez des individus ne présentant aucune maladie auriculaire. (Scott et al. 2001) (Guaguère et Prélaud 2000)

6. Conduite à tenir

Considérant l’étendue du diagnostic différentiel et la facilité de réaliser les examens complémentaires permettant d’établir un diagnostic de certitude, les raclages cutanés, profonds et superficiels, devraient être systématiquement réalisés lors de toute dermatose, ne serait-ce que pour infirmer la démodécie.

D. Recherche d’une maladie associée

Comme nous l’avons vu, lors du développement d’une démodécie à Demodex cati et à Demodex gatoi, il peut exister une maladie concomitante. Bien que sa relation avec le

120 développement d’une démodécie clinique soit remise en question, sa recherche reste indispensable, surtout lors de forme généralisée. En effet, traiter la démodécie seule peut ne pas suffire.

E. Lésions histologiques

Les lésions histologiques observées lors de démodécies ne sont pas spécifiques et elles sont rarement sévères, mis à part les cas de furonculose. (Chesney 1989) Malgré la mise en évidence relativement fréquente de parasites, l’histopathologie ne doit pas être utilisée comme outil diagnostique car les raclages cutanés sont beaucoup plus sensibles, mais comme un outil permettant d’approfondir notre connaissance du parasite.

Les lésions, citées dans la littérature, sont rarement présentes toutes à la fois.

1. Présentation des lésions histopathologiques rencontrées lors de démodécie

a) Concernant l’épiderme et les follicules pileux

- Hyperkératose épidermique : augmentation du phénomène de kératinisation des cellules de l’épiderme se traduisant par un épaississement de la couche cornée.(Scott et al. 2001)

- Acanthose : épaississement de l’épiderme, à l’exception de la couche cornée, due à l’augmentation du nombre de cellules épithéliales. Le terme hyperplasie épidermique peut aussi être utilisé. (Scott et al. 2001)

- Atrophie épidermique : diminution de l’épaisseur de l’épiderme, à l’exception de la couche cornée, due à une diminution de la taille des cellules épithéliales. (Scott et al. 2001)

- Hyperkératose folliculaire : augmentation de la quantité de kératine dans la lumière des follicules pileux. Elle peut être un signe de folliculite. (Scott et al. 2001)

- Epaississement des parois folliculaires : épaississement de l’épithélium, à l’exception de la couche cornée, de la paroi des follicules pileux, due à l’augmentation du nombre de cellules épithéliales. (Scott et al. 2001)

121

- Atrophie folliculaire : diminution de l’épaisseur de l’épithélium, à l’exception de la couche cornée, des follicules pileux, due à une diminution de taille des cellules épithéliales. (Scott et al. 2001)

- Spongiose : œdème intracellulaire entraînant la dilatation des espaces ménagés entre les cellules épineuses et pouvant aboutir à la création de vésicules. Une spongiose sévère peut aboutir au décollement localisé de la membrane basale, à l’origine de vésicules sous- épidermiques. (Scott et al. 2001)

b) Concernant le derme

- Folliculite : accumulation de cellules inflammatoires au niveau du follicule pileux. (Scott et al. 2001)

- Périfolliculite : accumulation de cellules inflammatoires autour du follicule pileux, l’épithélium folliculaire restant intègre. (Scott et al. 2001)

- Furonculose : un furoncle correspond à la destruction du follicule pileux par évolution d’une folliculite à l’origine d’un micro-abcès intradermique. Il contient du pus, des restes de poils et de kératine. C’est un mélange épais et compact qui a moins tendance à s’évacuer par l’ostiole. Rapidement, on observe des bulles hémorragiques car du sang issu des vaisseaux voisins se déverse dans le pus : le centre du furoncle devient alors couleur « lie-de-vin ». (Scott et al. 2001)

- Œdème : un œdème du derme est caractérisé par la visualisation de vaisseaux lymphatiques dilatés (non visibles dans de la peau saine), de larges espaces entre les capillaires sanguins et les fibres de collagènes périvasculaires (œdème périvasculaire) ou une disjonction des fibres de collagène du derme (œdème interstitiel). (Scott et al. 2001)

- Folliculite murale lymphocytaire d’interface : lors de folliculite murale d’interface, les lésions sont localisées au niveau de la couche cellulaire basale de l’épithélium folliculaire. L’inflammation périfolliculaire peut être riche ou pauvre en cellules inflammatoires. Dans le

122 cas de la démodécie, la folliculite murale d’interface est majoritairement composée de lymphocytes. (Scott et al. 2001)

- Fibrose : la fibrose est le stade ultime d’un processus inflammatoire intense ou insidieux. Elle est due à l’augmentation du nombre de fibroblastes et de fibres de collagène dans le derme. (Scott et al. 2001)

2. Illustration de certaines des lésions histopathologiques observées lors de démodécie

1 : couche cornée 2 : épiderme 2 1 3 : derme Discret infiltrat inflammatoire 3

Quelques cellules inflammatoires

Fibres de collagène disjointes

Œdème

Très nombreuses sections transversales de Demodex au sein des Poils sections folliculaires (follicule pileux composé) Glande sébacée

Pullulation parasitaire Glande sudoripare

Muscle érecteur

Photo 35 : Pullulation de Demodex cati au sein de follicules pileux, associée à un œdème et à un discret infiltrat inflammatoire. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

123 Cellules inflammatoires Fibres de collagène disjointes

Très nombreuses sections de Poil Demodex au sein d’un follicule pileux composé

Gaines épithéliales externes du follicule pileux composé

Glande sébacée

Lumière de l’infundibulum

Photo 36 : Agrandissement de la photo 44, ciblé sur un follicule pileux composé. (cliché unité dermatologique de VetAgroSup)

Ouverture du follicule pileux : ostiole

Débris de Demodex au sein d’une pustule Couche cornée

Épiderme pus

Derme

Photo 37 : Pustule contenant des débris de Demodex. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

124 Épiderme

Derme

Abcès intradermique : furoncle …

… centré sur un Demodex

Photo 38 : Furoncle centré sur un Demodex. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Couche cornée

Discrètes hémorragies Épiderme

Capillaire dilaté Nombreuses cellules inflammatoires : infiltrat inflammatoire sévère

Sections de Demodex au sein d’un follicule pileux Derme

Folliculite d’interface

Fibres de collagène disjointes Photo 39 : Folliculite murale d’interface lymphocytaire démodécique, associée à une réaction inflammatoire importante et à de l’œdème. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

125 3. Lésions observées lors d’une démodécie à Demodex cati

Les données exploitées sont regroupées dans le Tableau 12.

Au niveau de l’épiderme : les lésions observées sont une discrète hyperkératose épidermique (57 %) accompagnée d’une hyperkératose folliculaire d’intensité variable (19 %), de croûtes (19%) et d’une acanthose discrète à modérée (19 %). Plus rarement on observe une atrophie épidermique, un épaississement des parois folliculaires ainsi qu’une spongiose.

Au niveau du derme : un discret infiltrat inflammatoire périfolicullaire et périvasculaire, composé majoritairement d’histiocytes, de lymphocytes, de polynucléaires neutrophiles ou éosinophiles et de plasmocytes, est noté dans quelques cas. On peut observer, de plus, une folliculite murale d’interface lymphocytaire (23 %) et des lésions de furonculose (19 %) ainsi que des sections de parasites dans la lumière des follicules ou au sein des pyogranulomes dans 85 % des cas.

4. Lésions observées lors d’une démodécie à Demodex gatoi

Les données exploitées sont regroupées dans le Tableau 13.

A l’histopathologie, seule une discrète inflammation dermique, avec présence d’un infiltrat inflammatoire à cellules mononuclées, est rapportée (78 %) ainsi que la présence de Demodex gatoi dans la couche cornée de l’épiderme (57 %). Rappelons que ces derniers sont moins facilement observés que Demodex cati ceci du fait de leur petite taille et de leur transparence. Au niveau de l’épiderme, une hyperkératose épidermique (57 %), et une acanthose variable (50%) sont observées. Plus rarement, on note l’existence d’hyperkératose folliculaire et de spongiose. Les lésions observées sont, si les parasites ne sont pas observés, non spécifiques et peuvent suggérer une réaction d’hypersensibilité. (Saari et al. 2009)

5. Récapitulatif des lésions histopathologiques rencontrées dans la littérature

126 a) Démodécie à Demodex cati

Demodex cati Épiderme et follicules pileux Derme Sections Épaississement de référence Hyperkératose Atrophie Hyperkératose Atrophie Lésions Infiltrat Lésions de Acanthose parois Spongiose Croûtes Inflammation Folliculite Fibrose épidermique épidermique folliculaire folliculaire ulcératives inflammatoire furonculose parasites folliculaires

+ (3) + (3) + (3) + (1) (Fletcher 1980)

(Batey et al, + + + 1981)

(Stogdale et + + Moore 1982)

(Carlotti et al, + + + + (neutrophiles) + 1986)

(White et al, + (2) + (2) + (2) 1987)

(Zerbe et al, + + 1987)

(Medleau et al, + (2) + (1) + (1) + (2) 1988)

(Cowan et + + + + Campbell 1988)

(Chalmers et al, + + + + + + 1989)

(Guaguere + (3) + (3) + (2) + (1) + (3) 1993) Transition abrupte entre épiderme normal et anormal. Dysplasie folliculaire et épidermique de modérée à sévère. Dysplasie épidermique caractérisée par : perte de polarité, taux de division + (Guaguere et al, cellulaire variable, présence de cellules kératosiques isolées. 1999) Cas des Dysplasie épidermique avec hyperplasie pseudocarcinomateuse. Absence d’interruption de la membrane basale. Grande variation de taille des kératinocytes ainsi que de leur noyau. (2) + (1) carcinomes épidermoïdes in Dysplasie épidermique sévère avec perte de l’architecture de l’épiderme normal. Interruption de la membrane basale. Présence de cellules dyskératosiques et d’atypies cellulaires. + situ

(Volgenest Nodules bien délimités. Infiltrat inflammatoire sévère, diffus, intéressant le derme superficiel et le derme moyen (éosinophiles, macrophages, mastocytes, neutrophiles. La présence de Demodex 2001) + dans les follicules pileux, est associée à une hyperplasie folliculaire et une folliculite murale lymphocytaire modérée. Cas xanthome cutané + (neutrophiles, histiocytes, + + + + + + Cas lymphocytes, VetAgroSup 1 mastocytes) Tableau 12 : Récapitulatif des lésions histopathologiques observées lors de démodécie à Demodex cati.

127 b) Démodécie à Demodex gatoi et Demodex species

Demodex gatoi Épiderme et follicules pileux Derme Sections Épaississement de référence Hyperkératose Atrophie Hyperkératose Atrophie Lésions Infiltrat Lésions de Acanthose parois Spongiose Croûtes Inflammation Folliculite Fibrose épidermique épidermique folliculaire folliculaire ulcératives inflammatoire furonculose parasites folliculaires

(Conroy et al, + + 1982)

(Carlotti et al, + + + + 1986)

(McDougal et + + + + + Novak 1986)

(Medleau et al, + + 1988

+ + (Morris 1996)

+ (histiocytes, lymphocytes, + + + + + (Neel 2007) cellules plasmatiques)

(Saari et al, + (5) + (5) + (6) + (6) + (4) 2009) Demodex species Épiderme et follicules pileux Derme Sections Épaississement de référence Hyperkératose Atrophie Hyperkératose Atrophie Lésions Infiltrat Lésions de Acanthose parois Spongiose Croûtes Inflammation Folliculite Fibrose épidermique épidermique folliculaire folliculaire ulcératives inflammatoire furonculose parasites folliculaires

+ (mastocytes et (Chesney 1988) éosinophiles)

+ + + (Löwenstein et al, 2005) Tableau 13 : Récapitulatif des lésions histopathologiques observées lors de démodécie à Demodex gatoi et Demodex species.

128 VI. Traitement de la démodécie

Dans un premier temps, il est important de rappeler qu’il n’existe aujourd’hui toujours aucun produit avec une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour traiter les chats contre la démodécie. Il n’existe pas non plus de recommandation de traitement, les produits utilisés sont variés, autant dans les doses et fréquences d’administration que dans la voie d’administration choisie. De plus, plusieurs molécules sont fréquemment utilisées successivement en fonction des résultats obtenus. Les principes actifs présentés dans cette partie sont ceux qui ont été utilisés, avec plus ou moins de succès, lors des différents cas rapportés dans la littérature.

A. Quand traiter ?

Comme aucune AMM n’existe pour le chat, le praticien doit choisir entre plusieurs molécules, celle qui lui semble la plus efficace (sachant qu’il y a très peu de données) en limitant les effets toxiques, s’il existent.

L’efficacité du produit est appréciée de deux façons, celles-ci étant, bien sûr, liées entre elles : - par sa capacité à diminuer voire à supprimer les signes cliniques de démodécie, - par son pouvoir à détruire les Demodex, ceci étant contrôlé par des raclages réguliers, suite à la mise en place du traitement. (Lagrange 1994)

Le traitement comprend plusieurs composantes :

- Un traitement spécifique : bien que la littérature rapporte certains cas d’individus guérissant spontanément, la plupart des auteurs conseillent de traiter systématiquement avec des substances acaricides. Pour qu’une substance soit active, il est nécessaire qu’il y ait contact entre le produit et les parasites ce qui conduit à l’utilisation de deux présentations différentes : † les traitements externes ou topiques, où le produit diffuse depuis le lieu d’application sur la peau jusqu’aux parasites. Ces traitements sont efficaces sur tous les types de Demodex en raison de la position superficielle de ceux-ci, † les traitements systémiques, où le produit administré par voie orale ou injectable, diffuse jusqu’aux parasites. Ce type de traitement est plus efficace sur Demodex cati que sur

129 Demodex gatoi en raison de la position plus superficielle de ce dernier. (Lagrange 1994) (Spilmont 2004)

- Un traitement non spécifique : il n’est pas destiné à agir directement sur les parasites mais constitue plutôt une thérapie d’appoint, complémentaire. L’infection bactérienne est traitée, soit par l’application d’un shampoing antiseptique associé à un réhydratant cutané sur les lésions ou par l’administration d’antibiotiques. (Lagrange 1994) (Spilmont 2004)

- Un traitement hygiénique avec, au minimum, une tonte large des poils au niveau des lésions et un retrait des croûtes. (Lagrange 1994) (Spilmont 2004)

En fonction du parasite incriminé, quelques précautions sont à prendre : - lors de démodécie à Demodex gatoi, il faut traiter l’individu présentant les signes cliniques et ses congénères, du fait de sa contagion potentielle, - concernant la démodécie à Demodex cati, certains cas localisés peuvent guérir spontanément. Certains auteurs préconisent de traiter dans tous les cas et d’autres considèrent que certaines formes localisées ne nécessitent pas de traitement. Lors des formes généralisées, le traitement est obligatoire ainsi que la recherche d’une maladie concomitante. Dans les cas où elle est mise en évidence, la mise en place de mesures spécifiques est fondamentale sous peine d’essuyer un échec thérapeutique. (Chesney 1989) (Lagrange 1994)

B. Mesures préliminaires

Lors de la prise en charge, certains gestes simples peuvent être réalisés pour améliorer le suivi de l’individu et l’efficacité du traitement : - une tonte est préconisée voire obligatoire. Cela permet d’observer l’étendue réelle des lésions cutanées et leur évolution, ainsi que d’améliorer l’efficacité des topiques utilisés, - une sélection de plusieurs sites de raclages cutanés, représentatifs des lésions, doit être faite et permet de suivre l’évolution de la population parasitaire, les raclages étant faits aux mêmes endroits tous les mois, - sur chaque site, effectuer un comptage des parasites, tous stades confondus (adultes et formes immatures), qui permet d’évaluer l’efficacité du produit utilisé au cours du traitement,

130 - la peau est nettoyée et assainie à l’aide de shampoings antiseptiques, antiséborrhéiques, associés avec un hydratant cutané, - lors de démodécie généralisée, il convient, si elle existe, d’identifier la cause sous jacente. Le recueil d’une anamnèse précise, un examen clinique complet et rigoureux ainsi que la réalisation d’examens complémentaires sont nécessaires. Si aucune affection concomitante n’est trouvée, le vétérinaire doit rester vigilant afin de déceler tout dérèglement apparaissant durant le suivi clinique du chat, - la mise en place d’un traitement, quel qu’il soit, doit se faire en accord avec le propriétaire. La durée du traitement est longue et doit se poursuivre après la guérison clinique, jusqu’à la guérison de l’infection parasitaire, ce qui n’est pas toujours évident à comprendre pour les propriétaires. Il est donc nécessaire d’établir une bonne communication et une bonne coopération entre le praticien et ceux-ci. Il faut bien leur expliquer les modalités du traitement, le coût, l’intérêt d’un suivi régulier, les risques potentiels, aussi bien pour eux que pour le chat et, enfin, présenter un pronostic. Celui-ci peut dépendre de la maladie sous- jacente si elle est présente. (Lagrange 1994) (Spilmont 2004)

Le traitement spécifique de la démodécie repose sur l’emploi de molécules acaricides, soit sous forme topique, soit sur forme systémique.

Les cas rapportés de démodécie féline sont rares et aucun traitement ne fait consensus. Nous listerons donc les différentes molécules utilisées, en les décrivant brièvement et nous présenterons les différents protocoles suivis. Tous les cas sont résumés dans un tableau à la fin de cette partie.

C. Le sulfure de chaux

Le sulfure de chaux est l’un des traitements les plus utilisés, principalement aux Etats-Unis, lors de démodécie féline. (Mueller 2004)

Le sulfure de chaux est utilisé au cours de bains à la concentration de 2 à 4%. Son efficacité est à relier à la localisation superficielle des parasites. Cependant l’odeur désagréable inhérente du sulfure de chaux et sa tendance à colorer les robes claires, sont à l’origine d’une certaine réticence à l’utilisation de la part de certains propriétaires et même de certains praticiens.

131

L’utilisation de ce traitement est rapportée dans 26 cas, les chats présentant des démodécies à Demodex cati dans 8 cas et à Demodex gatoi dans 18 cas. Son efficacité semble satisfaisante. Vingt-quatre chats ont été guéris après 4 à 6 semaines de traitement. Les échecs lors de son utilisation sont : - un chat qui n’a montré aucune amélioration pendant le premier mois de traitement, - un chat qui n’a présenté qu’une guérison clinique, l’examen du produit des raclages cutanés restant positifs. A noter, que deux chats, initialement traité sans succès avec de plus faibles concentrations (respectivement 0,5 et 1%), ont été guéris lorsque cette concentration a été augmentée à 2 %. (Mueller 2004)

Aucun effet secondaire n’a été rapporté. Le port de la collerette est néanmoins recommandé pour prévenir l’ingestion du produit et, ainsi, éviter des ulcérations buccales et des atteintes gastro-intestinales. (Mueller 2004)

Cependant, certaines études, plus récentes, relativisent cette efficacité qui serait limitée dans certains cas. Ces observations suggèrent que, Demodex gatoi pourrait résister aux bains de sulfure de chaux. (Saari et al. 2009)

D. L’amitraze

1. Pharmacologie

L’amitraze est la dénomination commune du N’-(2,4-diméthylphényl)-N-[[(2,4- diméthylphényl)imino]méthyl]-N-méthylméthanimidamide. C’est un acaricide et un insecticide de la famille des formaminidés. Il possède une action acaricide basée sur la perturbation de la transmission nerveuse, en tant qu’antagoniste, au niveau des récepteurs de l’octopamine, qui est un neuro-modulateur. Ses propriétés pharmacologiques incluent l’inhibition de la monoamine oxydase, une activité α2 adrénergique et l’inhibition de la synthèse de prostaglandines. Chez les mammifères, ses effets sont à l’origine d’une élévation de la glycémie due à l’inhibition de la sécrétion d’insuline et à la stimulation de celle du glucagon. (Mathet et al. 1996) (Paradis 1999)

132 La plupart des autres effets secondaires de l’amitraze, dont la sédation, sont attribué à cette activité α2 adrénergique. (Forsythe 2004) L’amitraze possède une AMM chez le chien, depuis 1982 aux Etats-Unis et depuis 1995 en France. Par contre, il ne possède pas d’AMM chez le chat. (Mathet et al. 1996)

2. Toxicité

a) Chez le chat

Certaines études ont évalué la toxicité de l’amitraze chez le chat : - toxicité lors d’application : une étude montre que l’application d’amitraze sur tout le corps d’un chat, lors d’un traitement unique, même si elle est utilisée à une faible concentration (0,0125 %), provoque des effets secondaires légers tels qu’une anorexie transitoire. Ces effets secondaires sont aussi observés chez le chien mais seulement lorsque des concentrations plus élevées sont utilisées. Le chat semble plus sensible à la toxicité de cette molécule. Cela peut être expliqué par le comportement normal de toilettage du chat qui mène probablement à une ingestion substantielle du produit qui s’ajoute à l’absorption percutanée. A noter, que lors de cette étude, aucune collerette n’avait été utilisée pour prévenir l’ingestion du produit par les individus. Aucun effet secondaire n’est observé en cas d’application locale du produit. (Gunaratnam et al. 1983) Cette étude recense comme effets secondaires une anorexie transitoire, une dépression et des selles malodorantes. Ces effets durent en général 24 à 48 heures. Même à la concentration de 0,0125%, l’amitraze peut être à l’origine d’une sédation modérée, d’un ptyalisme et d’un comportement de fuite pendant 12 heures et ceci malgré l’utilisation d’une collerette pendant le bain pour limiter la quantité de produit ingérée par le chat. Des doses plus élevées d’amitraze provoquent, chez le chat, des vomissements et peuvent même être létales en causant un collapsus cardiovasculaire (hypotension et bradycardie). (Gunaratnam et al. 1983)

- toxicité lors d’injections : une autre étude présente les effets d’une intoxication expérimentale à l’amitraze sur des chats, chaque individu recevant 1mg/kg d’amitraze à 1,5%, en intraveineuse. Les signes cliniques observés sont les suivants : sédation, perte de réflexes, hypothermie, bradycardie, bradyarrhytmie, hypotension, bradypnée et mydriase. Certains chats ont, en

133 outre, présenté des vomissements, une diurésie, une salorrhée, des vocalises et une augmentation de l’appétit. Les bradyarrhytmies observées dans l’étude sont soit des bradycardies sinusales, soit des blocs atrio-ventriculaires de type I. Les altérations métaboliques et hormonales sont une hyperglycémie, une hypoinsulinémie et une diminution transitoire du taux plasmatique de cortisol. La numération-formule sanguine et les concentrations d’autres paramètres biochimiques, comme l’urée, la créatinine, les ALAT et les ASAT, n’ont pas subi de modification. (Andrade et al. 2007)

La toxicité de l’amitraze devrait le contre-indiquer comme produit de première intention. Il peut néanmoins être envisagée comme une solution dans le traitement des chats atteints de démodécie généralisée résistants aux autres traitements et pour lesquels le bénéfice potentiel, en utilisant ce produit, surpasse les risques.

b) Chez l’homme

La pénétration cutanée et l’inhalation peuvent conduire le propriétaire à développer des signes d’intolérance. Les différents effets toxiques rapportés sont un rash érythémateux de la face et des bras, des irritations conjonctivales et respiratoires, des nausées, des vomissements et des migraines. Quelques précautions d’emploi sont à respecter : les applications doivent être réalisées dans une pièce correctement ventilée, le manipulateur doit porter une blouse et des gants imperméables et il est conseillé de ne pas toucher le chat jusqu’à ce que celui-ci soit sec. L’amitraze possédant un effet hyperglycémiant insulinosuppresseur, son utilisation par des personnes diabétiques est donc contre-indiquée. (Guaguère 1995) (Bourdoiseau 2000) (Bensignor et Carlotti 1999)

3. Mode d’emploi de l’amitraze

L’amitraze, qui ne possède pas d’AMM pour l’espèce féline, rappelons-le, est utilisé classiquement à la concentration de 0,0125% (Vroom et Koeman 1988) (Saari et al. 2009) (Yathiraj et al. 1994) et à la concentration de 0,025 % (Wilkinson 1983), lors d’application, une à deux fois par semaine.

134

Ce choix de traitement concerne 17 chats : 12 présentant une démodécie à Demodex cati et 5 une démodécie à Demodex gatoi. Tous les individus, sauf deux, ont été guéris en 2 à 4 semaines. Des effets secondaires ont été observés sur un individu qui a présenté une sédation et du ptyalisme après l’application du premier traitement. (Mueller 2004). Les deux chats qui n’ont pas été guéris ont été euthanasiés. (Guaguère 1993)

L’efficacité de l’amitraze semble satisfaisante sur les démodécies à Demodex cati et Demodex gatoi mais les applications sont fastidieuses et prennent beaucoup de temps. Sa toxicité est aussi à prendre en compte lors du choix du traitement.

E. Les lactones macrocycliques systémiques

1. Pharmacologie

Les lactones macrocycliques systémiques sont des agents antiparasitaires issus de la fermentation de différents actinomycètes. Elles ont une activité sur les endoparasites (anthelmintique) et sur les ectoparasites (acaricide et insecticide). Elles sont appelées endectocides.

Elles regroupent deux classes de molécules qui sont étroitement liées : les avermectines (ivermectine, doramectine, sélamectine,…) et les milbémycines (milbémycine oxime et moxidectine). La différence essentielle entre ces deux groupes repose sur la présence, chez les avermectines, d’un radical glucidique (composé disaccharidique) en position C13 absent chez les milbémycines. Ces dernières sont encore appelées avermectines aglycones. (Paradis 1999)

Les lactones macrocycliques possèdent toutes le même mode d’action. Elles se fixent de façon sélective et avec une grande affinité aux canaux chlorure dépendant du GABA (acide γ amino-butyrique) ou du glutamate. Ces canaux sont spécifiques des invertébrés et sont présents dans leurs cellules nerveuses et musculaires. La fixation de la molécule augmente la perméabilité de la membrane cellulaire aux ions chlorure. Ceci induit un afflux de ces derniers dans la cellule et entraîne une inhibition de l’activité électrique des cellules nerveuses, chez

135 les nématodes, et des cellules musculaires, chez les arthropodes. Cette inhibition cause une paralysie non spastique rapide qui aboutit à la mort des parasites. (Paradis 1999)

Les lactones macrocycliques systémiques sont fortement lipophiles. Elles sont stockées dans les tissus graisseux, lentement relarguées, métabolisées et excrétées. Ceci explique leur rémanence. (Forsythe 2004)

2. Toxicité

Les effets indésirables observés lors de l’utilisation de hautes doses de lactones macrocyliques, en particulier l’ivermectine, sont fréquents et traduisent une atteinte du système nerveux. Ils sont très étudiés chez le chien car certaines races y sont particulièrement sensibles (Colley, Berger de Shetland, Bobtail et Berger australien) mais un surdosage est à l’origine d’une toxicité aiguë dans toutes les espèces, dont dont le chat. (Forsythe 2004) (Lewis et al. 1994)

3. Les milbémycines

a) La milbémycine oxime

(1) Pharmacologie

La milbémycine oxime est issue de la fermentation naturelle de Streptomyces hygroscopicus aureolacrimosus. Elle possède des propriétés insecticide, acaricide et anthelminthique. Elle appartient à la famille des antibiotiques macrolides. (Guaguère 1995)

Elle a acquis une AMM pour le traitement de la démodécie généralisée du chien en 2000.

(2) Mode d’emploi

L’utilisation de la milbémycine oxime lors de démodécie féline n’est que très peu documentée dans la littérature. Dans la plupart des cas, la dose, la fréquence d’administration et l’efficacité du traitement ne sont pas précisées. (Guaguère et al. 2004)

136 La milbémycine oxime, à la dose de 2,3 mg/kg une fois par jour, a été utilisée chez un chat présentant un xanthome cutané associé à une démodécie à Demodex cati et à une dermatophytose. Au cour du traitement, le chat a présenté une ataxie modérée des membres postérieurs et la dose a été diminuée à 2 mg/kg, une fois par jour, ce qui a entraîné la disparition de cet effet secondaire. Le traitement a été poursuivi jusqu’à la guérison parasitaire estimée par deux raclages cutanés successifs négatifs, c'est-à-dire, dans ce cas, pendant 12 semaines. (Vogelnest 2001)

Le peu de données et l’absence de recul sur l’utilisation de cette molécule pour traiter la démodécie féline ne nous permettent pas d’évaluer son efficacité. Elle semble efficace sur la démodécie à Demodex cati. On note, tout de même, l’existence d’effets secondaires, une ataxie, résolue après la baisse de la dose de milbémycine oxime prescrite.

b) La moxidectine

(1) Pharmacologie

La moxidectine est un produit de semi-synthèse obtenu à partir de la némadectine, elle-même issue de la fermentation de Streptomyces cyaneogriseus. Elle possède une activité insecticide, acaricide et anthelminthique. (Forsythe 2004)

Elle est utilisée hors AMM chez le chien et chez le chat. La présentation commerciale utilisée en France est la Cydectine® bovin : une solution injectable à 1% pour bovins.

(2) Mode d’emploi

Aucun cas dans la littérature ne rapporte une utilisation efficace de la moxidectine lors de démodécie féline. (Saari et al. 2009)

Cette molécule est le traitement choisi dans les cas traités par l’unité de dermatologie de VetAgroSup. Ceux-ci seront présentés en détails dans la seconde partie. La dose proposée est de 400 μg/kg par voie orale, une fois par jour, jusqu’à la guérison parasitaire estimée par l’obtention de raclages cutanés négatifs, deux mois successifs. Aucun effet secondaire associable à la moxidectine n’a été rapporté suite à cette utilisation.

137

La moxidectine semble être une molécule efficace pour traiter la démodécie chez le chat mais trop peu de cas ont été rapportés pour pouvoir conclure.

4. Les avermectines

a) L’ivermectine

(1) Pharmacologie

L’ivermectine est une avermectine issue de la fermentation de Streptomyces avermitrilis. Elle possède des propriétés insecticide, acaricide et anthelmintique puissantes. (Paradis 1999)

Elle ne possède pas d’AMM chez le chien et chez le chat.

(2) Mode d’emploi

L’ivermectine est utilisée, suivant les cas, à des doses allant de 300 μg/kg/jour (Löwenstein et al. 2005) à 600 μg/kg/jour (Kano et al. 2011), par voie orale. Les autres protocoles rencontrés sont les suivants : 1 mg/kg tous les deux jours, par voie orale et 300 μg/kg par voie sous- cutanée une fois par semaine. (Saari et al. 2009)

Ce choix de traitement concerne 6 chats présentant des démodécies à Demodex cati (1), à Demodex gatoi (4) et à Demodex species (2).

Les différents protocoles et leurs efficacités sont les suivants :

- Lors de démodécie à Demodex cati et Demodex species : • Demodex cati ainsi que Demodex species ont été conjointement mis en évidence chez un chat. Il présentait, en outre, une infection à Mycoplasma haemofelis et au virus responsable du syndrome de l’immunodéficience acquise. Le traitement, à base d’ivermectine, à la dose de 300 μg/kg, une fois par jour, a permis d’éliminer Demodex cati en moins de 2 mois, mais a été inefficace contre Demodex species. Cette différence d’efficacité peut être due : - à une plus grande résistance de Demodex species à la molécule,

138 - à une concentration d’ivermectine trop faible au niveau de l’épiderme. Toutefois, l’ivermectine a été utilisée avec succès lors de démodécie à Demodex gatoi. - à une durée insuffisante du traitement. Il a, en effet, dû être interrompu au bout de deux mois suite à l’apparition de troubles neurologiques sévères. Un traitement à base de doramectine lui a été substitué (600 μg/kg/semaine en injection sous-cutanée) mais le chat est devenu léthargique et a été euthanasié après la seconde injection. (Löwenstein et al. 2005) • Un autre cas de démodécie à Demodex species a été traité avec de l’ivermectine, à la dose de 600 μg/kg, une fois par jour, et le chat a guéri en 4 semaines. Une dose plus importante semble donc être nécessaire pour éliminer Demodex species. La durée du traitement ne semble pas intervenir. A noter que le chat a présenté des convulsions après 4 semaines de traitement. (Kano et al. 2011)

- Lors de démodécie à Demodex gatoi : • Deux chats présentant une démodécie à Demodex gatoi ont été traités, à la dose de 300 μg/kg, par voie sous-cutanée, tous les 14 jours. Aucune amélioration n’a été observée après un mois et demi de traitement. Un autre traitement à base de sélamectine à été mis en place, à la dose de 6 à 12 mg/kg, tous les 14 jours, répété 3 fois, sans plus de succès. Enfin, le choix de l’amitraze, en applications une fois par semaine, à la concentration de 0,0125%, pendant 12 semaines, a permis la guérison des deux individus. (Saari et al. 2009) • Deux autres chats présentant une démodécie à Demodex gatoi ont été traités à la dose de 1mg/kg, tous les deux jours, par voie orale, pendant 10 semaines. Ce traitement faisait suite à des échecs thérapeutiques après l’utilisation de sélamectine (6 à 12 mg/kg une fois) et de moxidectine (dose non précisée). Ce traitement a été efficace et a permis la guérison des deux chats. (Saari et al. 2009)

Aucun effet secondaire n’a été rapporté. (Saari et al. 2009)

L’ivermectine semble donc : - efficace sur la démodécie à Demodex cati, même à faible dose (300 μg/kg), lorsqu’elle est administrée tous les jours,

139 - efficace sur la démodécie à Demodex gatoi lorsqu’elle est administrée à une certaine fréquence : la dose d’1 mg/kg, par voie orale, tous les deux jours, est efficace mais la dose de 300 μg/kg, par voie sous-cutanée, tous les 14 jours, est insuffisante. - efficace sur la démodécie à Demodex species à forte dose (600 μg/kg), une fois par jour.

Et, si la dose et la fréquence d’administration optimales restent inconnues, les effets secondaires, fréquents et sévères, sont, quant à eux, une réalité. (Löwenstein et al. 2005) (Saari et al. 2009) (Lewis et al. 1994)

b) La Doramectine

(1) Pharmacologie

La doramectine est un dérivé de l’ivermectine.

(2) Mode d’emploi

Trois chats atteints de démodécie à Demodex cati ont été traités avec de la doramectine à la dose de 600 µg/kg, par voie sous-cutanée, toutes les semaines, pendant 2 ou 3 semaines. Le traitement a été efficace dans les trois cas : un des chats n’a présenté aucune rechute pendant 4 ans et les deux autres individus ont été euthanasiés 4 et 6 mois après la guérison de la démodécie. Ils souffraient tous les deux de carcinome épidermoïde in situ. Aucun individu n’a présenté d’effet secondaire. (Mueller 2004) (Johnstone 2002)

c) La Sélamectine

(1) Pharmacologie

La sélamectine est un dérivé de l’ivermectine.

(2) Mode d’emploi

L’utilisation de sélamectine comme traitement de la démodécie féline a donné des résultats variables.

140 Dix-sept chats présentant une démodécie à Demodex cati (3) ou à Demodex gatoi (14) ont été traités avec des doses allant de 6,5 à 20 mg/kg, une fois par semaine, par voie sous-cutanée, pendant 6 semaines, sans succès bien qu’une amélioration clinique ait été observée chez 14 chats. (Beale 2001)

Dans une autre étude, trois chats partageant le même environnement et présentant une démodécie à Demodex gatoi, ont été traités à l’aide de sélamectine, à la dose de 6 à 12 mg/kg, tous les mois, pendant 2 mois. Aucune amélioration n’a été notée. La fréquence d’administration a été augmentée à une administration, toutes les deux semaines, et ceci pendant 6 mois. Après cette période, deux des chats ont guéris mais des Demodex sont toujours mis en évidence chez le dernier. Un traitement à base d’amitraze, en applications, à la concentration de 0,0125 %, une fois par semaine, pendant 12 semaines, est mis en place, chez celui qui présente encore des parasites et pour éviter toute nouvelle contamination des deux autres. (Saari et al. 2009)

Un autre chat, présentant une démodécie à Demodex gatoi, a été traité avec succès avec de la sélamectine (dose non précisée), à la fréquence d’une fois par mois pendant 5 mois. (Saari et al. 2009)

Enfin, dans une autre étude, deux chats du même foyer et présentant une démodécie à Demodex gatoi, ont été traités avec de la sélamectine à la dose de 6 à 12 mg/kg, une fois, sans succès. La moxidectine a été essayée sans plus de succès, puis l’ivermectine qui a permis la guérison des individus.

Il est difficile de conclure quoique ce soit concernant cette molécule. A noter que, dans le peu de cas où cette molécule a été efficace, les chats présentaient une démodécie à Demodex gatoi. Aucun effet secondaire n’est rapporté.

141 F. Autres molécules rencontrées dans la littérature

a) La roténone

(1) Pharmacologie

La roténone est une molécule organique, naturellement produite par certaines plantes tropicales. Elle est toxique pour de nombreuses espèces d'animaux. Elle entre dans la composition de nombreux pesticides et insecticides. (Lapointe et al. 2004)

Elle fait aujourd’hui l’objet d’une controverse. Certaines études montrent que l’administration, par injections répétées, de faibles doses, de roténone provoque chez les rats la maladie de Parkinson. À la différence de la plupart des substances neurotoxiques, la roténone possède une toxicité sélective pour les neurones producteurs de dopamine. Sa toxicité proviendrait de son effet inhibiteur du complexe I de la chaîne respiratoire mitochondriale. Elle est donc particulièrement utilisée pour comprendre les mécanismes de la maladie de Parkinson. Dans sa phase initiale, la neurotoxicité de la roténone n'entraîne aucun symptôme. Quand les premiers symptômes apparaissent, les lésions sont déjà irrémédiables. La roténone a une toxicité faible quand elle est administrée par voie orale. (Lapointe et al. 2004) (Betarbet et al. 2006)

Son utilisation est interdite en France depuis 2008.

(2) Mode d’emploi

La roténone a été utilisée dans quatre cas, sous diverses formes : - à 0,75% dans de l’alcool de méthylène, sur un tiers du corps, une fois par jour (Chesney 1988), - en solution huileuse appliquée une fois par jour (Cowan et Campbell 1988) (Gabbert et Feldman 1976), - dans une solution auriculaire, mélangée à de l’huile minérale, deux fois par semaine, chez un chat présentant une otite externe démodécique. (Scott 1980) (Mueller 2004)

Les résultats obtenus sont variés :

142 - deux chats ont été guéris et n’ont présenté aucun effet secondaire (Gabbert et Feldman 1976) (Scott 1980) - un chat n’a pas répondu au traitement et a développé une dermatite de contact. Un traitement à base d’amitraze a alors été mis en place avec succès. (Cowan et Campbell 1988) - le dernier chat est devenu anorexique et abattu, après 4 jours de traitement, et est mort le lendemain, malgré l’arrêt du traitement. (Chesney 1988)

b) Organophosophorés

(1) Malathion

(a) Pharmacologie

Le malathion est un composé organophosophoré parasympathomimétique qui se fixe irréversiblement aux cholinestérases. C’est un insecticide neurotoxique. (Murphy 1967)

Il est peu toxique, comparativement aux autres pesticides organophosphorés, mais il peut tout de même être mortel si la dose d’exposition est importante. A noter que son produit de décomposition, le maloxon est beaucoup plus toxique (60 fois). Outre les effets dus à l’inhibition de l’activité des cholinestérases chez les animaux, il semble que les poumons et le foie puissent subir des dommages lors d’exposition chronique. Le malathion ne s’est pas avéré tératogène chez le rat et le lapin et ce, même à des doses élevées. Par contre, selon certaines études contradictoires, le produit aurait causé de la stérilité en affectant les organes reproducteurs mâles chez la souris et le rat. Le malathion a donné des résultats variés dans des tests de génotoxicité in vitro et in vivo. Toutefois, les doses testées étaient à des niveaux rarement rencontrés lors d’expositions normales. (Murphy 1967)

L'utilisation du malathion est interdite en France depuis 2008.

(b) Mode d’emploi

Du malathion a été utilisé dans un seul cas de démodécie à Demodex cati : l’état du chat a été stabilisé et les signes cliniques contrôlés au moyen d’application d’une solution de malathion à la concentration de 2%, toutes les semaines, mais l’examen du produits des raclages cutanés de contrôle ont monté une persistance de la présence des parasites. (Medleau et al. 1988)

143 (2) Fenchlorphos

Un chat a été traité avec succès avec du fenchlorphos à la concentration de 0,1%, deux fois par semaine. (Stogdale et Moore 1982)

(3) Phosmet

Le phosmet est un insecticide organophosphoré non-systémique, dérivé du phtalimide, utilisé sur les plantes et les animaux. Le phosmet figure sur la liste des substances extrêmement dangereuses de la planification d'urgence des Etats-Unis. (Vargová et al. 1986)

Un chat a été traité avec succès avec du phosmet à la concentration de 0,087%, en une seule application. (McDougal et Novak 1986)

c) Rétinoïdes : étrétinate et acitrétine

A noter que les rétinoïdes ne sont pas utilisés pour traiter la démodécie directement mais qu’ils constituent une option thérapeutique possible pour traiter les carcinomes épidermoïdes in situ. S’ils sont efficaces, la régression des lésions du carcinome épidermoïde in situ entraîne la guérison de la démodécie.

(1) Pharmacologie

Les rétinoïdes représentent une classe de composés chimiques dérivés de la vitamine A. Ils sont utilisés en médecine notamment pour leur activité de régulation de la croissance et de la différenciation des cellules épithéliales. Les rétinoïdes ont de nombreux rôles dans l'organisme : ils sont impliqués dans la vision, la croissance du tissu osseux et l'immunité.

Les molécules utilisées sont des rétinoïdes de deuxième génération, l’étrétinate et son métabolite l’acitrétine.

La structure de base des rétinoïdes est constituée d'un cycle en bout de chaîne, d'une chaîne latérale polyénique et d'un groupe terminal polaire. Le système conjugué formé par l'alternance des doubles liaisons C=C dans la chaîne latérale donne leur couleur aux rétinoïdes

144 (typiquement jaune, orange ou rouge). Par conséquent, beaucoup de rétinoïdes sont des chromophores. La variabilité des chaînes latérales et des groupes terminaux sont à l'origine des différentes classes de rétinoïdes.

Les rétinoïdes stimulent l'épithélium folliculaire et favorisent la prolifération de kératinocytes. Par ailleurs, les rétinoïdes augmentent la perméabilité de la paroi folliculaire aux agents inflammatoires, ce qui accélère l'évolution et in fine la guérison des lésions inflammatoires (papules, pustules...).

Les effets toxiques apparaissent lors de traitements prolongés à haute dose. La toxicité spécifique dépend du temps d’administration et de la concentration d'exposition. Les rétinoïdes peuvent être cytotoxiques en endommageant les membranes cellulaires. Par ailleurs, de nombreux symptômes peuvent se manifester. Chez l’homme, ce sont les suivants : des douleurs articulaires, une anorexie, des lésions cutanées, une chute de cheveux, une hépatosplénomégalie, des saignements, une pseudotumeur cérébrale, voire la mort. Les rétinoïdes sont de plus, des molécules tératogènes. (Napoli 1996)

(2) Mode d’emploi

Les rétinoïdes ont été utilisé comme seul traitement chez trois chats présentant des carcinomes épidermoïdes in situ, associés à une démodécie à Demodex cati, l’infestation parasitaire se limitant aux sites de lésions dues au carcinome. (Guaguère et al. 1999) Le carcinome épidermoïde in situ chez le chat est une maladie multicentrique et les rétinoïdes sont une option thérapeutique qui a été utilisée avec des résultats variables. (Guaguère et al. 1999)

Dans l’étude qui nous intéresse, deux traitements ont été proposés : - étrétinate à la dose de 2 mg/kg, une fois par jour, par voie orale, chez un chat, - acitrétine à la dose de 3 mg/kg, une fois par jour, par voie orale, chez les deux autres. L’efficacité de ces traitements s’est révélée satisfaisante dans deux cas. Elle a été évaluée par la rémission lente et progressive (4 à 6 mois) des lésions dues au carcinome épidermoïde in situ ainsi que par l’absence de Demodex cati lors des raclages cutanés. Cependant, de nouvelles lésions de carcinome épidermoïde in situ sont apparues chez un des chats traités à l’acitrétine, après neuf mois d’utilisation et il a été euthanasié. Aucun effet secondaire n’a été observé. (Guaguère et al. 1999)

145 G. Tableaux récapitulatifs des différents traitements et de leur efficacité

1. Sulfure de chaux et amitraze

Nombre Maladie concomitante Nombre Identification Molécules Posologie de chats ou traitement de chats Référence du parasite inclus immunosuppresseur guéris

2 Demodex cati FIV/Cth (1), FIV/IRH (1) 1 (Chalmers et al, 1989) Demodex cati (2) 3 Demodex gatoi FeLV (2), Tox (1) 3 (Medleau et al, 1988) Un bain à 2% par (1) semaine 3 Demodex gatoi HA/Cth (2), Cth (1) 3 (Morris 1996) Sulfure de chaux 1 Demodex gatoi Cth 1 (Lower et al, 2000) 1 Demodex gatoi Aucune 1 (Saari et al, 2009) Un bain à 1,6% par 1 Demodex gatoi Aucune 1 (Conroy et al, 1982) semaine

Un bain de 0,5 à 2% par HA/Cth (3), D (1), Cth (2), (Morris et Beale 15 Non précisé 15 semaine Af/Cth (1) 2000) Demodex cati (2) Non précisé 3 Demodex gatoi Cth/T/D (1), Cth (1) 3 (Carlotti et al, 1986) (1)

FIV/FeLV (1), FeLV (2), Cu (1), (Guaguere 1993) Non précisé 6 Demodex cati D (1) 4

(Cowan et Campbell Aucune 1 Demodex cati 1 1988)

Amitraze (Vroom et Koeman 1 Demodex cati Aucune 1 Un bain à 0,0125% par 1988) semaine 1 Demodex cati Aucune 1 (Yathiraj et al, 1994)

6 Demodex gatoi Cth (4) 6 (Saari et al, 2009)

Deux bains 0,025% par 1 Demodex gatoi Aucune 1 (Wilkinson 1983) semaine

Tableau 14 : Recensement des cas de démodécie traités à base de sulfure de chaux ou d’amitraze.

Légendes utilisées dans les Tableaux 14, 15 et 16 :

Maladie concomitante ou traitement ultérieur : Af = Acné féline, CE in situ = Carcinome épidermoïde in situ, Cth = Corticothérapie, Cu = Syndrome de Cushing, D = Diabète, Dpci = Dermatose prurigineuse idiopathique chronique, FeLV = Leucose féline, FIV = Syndrome d’immunodéficience acquise, HA = Hypersensibilité Alimentaire, IRH = Infection des voies Respiratoires Hautes, LES = Lupus Erythémateux Systémique, Mh = Mycoplasma haemofelis, T = Teigne, Tox = Toxoplasmose, Xant = Xabnthome cutané

† : mort de l’individu au cours du traitement

146 2. Les lactones macrocycliques systémiques

Nombre Maladie concomitante Nombre Identification Molécules Posologie de chats ou traitement de chats Référence du parasite inclus immunosuppresseur guéris

(Löwenstein et al, FIV/Mh/D. cati 300 μg/kg par jour PO 1 Demodex species 0 (†) 2005)

600 μg/kg par jour PO 1 Demodex species Cth 1 (Kano et al, 2011)

Ivermectine 1 mg/kg tous les 2 2 Demodex gatoi Aucune 2 (Saari et al, 2009) jours PO 300 μg/kg toutes les 2 2 Demodex gatoi Aucune 0 (Saari et al, 2009) semaines SC Demodex cati (1) 6,5 mg/kg par semaine 5 Demodex gatoi Aucune 0 (Beale 2001) (4) Demodex cati (2) Sélamectine 20 mg/kg par semaine 12 Demodex gatoi Aucune 0 (Beale 2001) (10) 6 à 12 mg/kg toutes 5 Demodex gatoi Cth (2) 0 (Saari et al, 2009) les 2 semaines

6 à 12 mg/kg par mois 6 Demodex gatoi Cth (2) 1 (Saari et al, 2009)

Doramectine 600 μg/kg par semaine 3 Demodex cati CE in situ (2), FIV (1) 3 (Johnstone 2002)

Milbémycine 2,3 mg/kg par jour PO 1 Demodex cati Xant/T/Cth 1 (Vogelnest 2001)

oxime 1 mg/kg par jour PO 1 Demodex gatoi Cth (1) 1 Cas 5

Non précisé 2 Demodex gatoi Aucune 0 (Saari et al, 2009)

Moxidectine 400 μg/kg par jour PO 3 Demodex cati Cth (1) 3 Cas 1, 2 et 3

600 μg/kg par semaine 1 Demodex Cati Dpci/Cth (1) 1 Cas 4 SC Tableau 15 : Recensement des cas de démodécie traités à base de lactones macrocycliques systémiques. 3. Les autres molécules

Maladie Nombre Nombre Identification concomitante ou Molécules Posologie de chats de chats Référence du parasite traitement inclus guéris immunosuppresseur (Guaguere et al, CE in situ Etrétinate 2 mg/kg par jour 1 Demodex cati 1 1999) (Guaguere et al, CE in situ (2) Acitrétine 3 mg/kg par jour 2 Demodex cati 1 1999)

À 0,75% par jour 1 Demodex species Cth 0 (†) (Chesney 1988)

(Cowan et Campbell Aucune Roténone Non précisé 1 Demodex cati 0 1988) (Gabbert et Feldman Aucune Non précisé 1 Demodex gatoi 1 1976) Un bain à 2% par 1 Demodex cati LES 0 (Medleau et al, 1988) Malathion semaine

Un bain à 0,1% deux (Stodgale et Moore 1 Demodex cati Aucune 1 Fenchlorphos fois par semaine 1982)

Un bain à 0,087% une (McDougal et Novak Phosmet 1 Demodex gatoi Aucune 1 fois 1986) Tableau 16 : Recensement des cas de démodécie traités à l’aide d’autres molécules.

147 H. Conclusion sur les traitements…

Il est relativement compliqué de conclure sur l’efficacité des différentes molécules utilisées. En effet, il n’y a aucune homogénéité dans les doses et les fréquences d’administration. Aucun protocole n’a été mis en place pour les comparer. On peut, cependant, différencier quatre types de traitements : ceux qui semblent efficaces, ceux qui ne le sont pas, ceux qui sont trop particuliers pour conclure et ceux qui sont dangereux.

Les traitements qui semblent efficaces, sont les suivants : - le sulfure de chaux, une fois par semaine, mais il n’est pas disponible en Europe et n’est utilisé qu’aux Etats-Unis, - l’amitraze, une fois par semaine, mais son utilisation est fastidieuse et sa toxicité réelle, - l’ivermectine lorsqu’elle est utilisée tous les jours à la dose de 600 µg/kg, par voie sous-cutanée, ou tous les deux jours à la dose de 1 mg/kg, par voie orale, - la milbémycine oxime lorsqu’elle est administrée tous les jours, à la dose de 1 à 2,3 mg/kg, par voie orale.

Les traitements qui ne sont pas efficaces sont les suivants : - l’ivermectine, quelque soit la dose, si elle n’est administrée qu’une fois par semaine, - la sélamectine, quelque soit la dose, lorsqu’elle est administrée une fois par semaine ou une fois par mois.

Les traitements trop anecdotiques pour être pris en compte sont ceux mis en place dans les cas où les chats présentent une démodécie associée à un carcinome épidermoïde in situ. Ce sont des situations relativement spécifiques où le développement de la démodécie est uniquement lié à cette maladie. Lorsque des rétinoïdes sont utilisés, la démodécie n’est pas traitée en tant que telle, mais la régression des lésions dues au carcinome épidermoïde in situ entraîne la guérison de la démodécie. (Guaguère et al. 1999) L’utilisation de la doramectine, une fois par semaine, à la dose de 600 µg/kg, n’est elle aussi pas concluante. La régression des lésions dues au carcinome in situ pouvant, à elle seule, être

148 à l’origine de la guérison de la démodécie. Aucune conclusion ne peut donc être avancée. (Johnstone 2002)

Les traitements qui sont déconseillés : l’utilisation des organophosphorés est fortement déconseillée voire interdite dans certains cas. Ceci est lié aux effets indésirables sévères et fréquents rencontrés lors de leur utilisation comme traitement et sachant qu’il existe des alternatives moins dangereuses. Les organophosphorés sont très efficaces contre les Demodex mais tuent également très bien les chats. On remarque d’ailleurs que leur utilisation n’est décrite que dans les cas les plus anciens, à une époque où ces molécules étaient les seules disponibles pour traiter la démodécie.

La principale information à retenir est l’absence de consensus et d’uniformité sur le traitement de la démodécie féline. Les praticiens en sont réduits à la réalisation de traitements expérimentaux dont les résultats sont très variables. Les molécules que nous conseillons sont l’ivermectine ou la milbémycine oxime. La fréquence d’administration est également très importante et nous conseillons une administration quotidienne de la molécule choisie. Enfin, l’amitraze peut aussi être utilisé, en connaissance de cause, avec les précautions nécessaires. . I. Traitement de l’otodémodécie

Le nettoyage du conduit auriculaire est impératif avant tout traitement : - la surface concave du pavillon et l’orifice du conduit doivent être tenus exempts de débris et de poils emmêlés, - le pavillon et la partie visible du conduit auditif doivent être nettoyés avec un coton- tige imbibé, - la partie non visible du conduit auditif doit être nettoyée, soit par le vétérinaire lors de l’examen otoscopique, ce qui permet d’apprécier l’état de la membrane tympanique par la même occasion, soit par le propriétaire par l’instillation d’une solution nettoyante dans le conduit et le massage de la base de l’oreille. (Lagarde 1994)

Après la préparation de l’oreille du chat, les traitements spécifiques décrits dans la littérature, sont les suivants (Lagarde 1994) :

149 - de l’amitraze dilué dans de l’huile minérale, soit avec 1 ml d’une solution d’amitraze à 19,9% dans 30 ml d’huile minérale ou 2 ml d’une solution d’amitraze à 5% dans 20 ml d’huile minérale, - de la roténone. Cette molécule peut être à l’origine d’une dermatite de contact au niveau de l’oreille causant des degrés variables de douleur, de prurit et d’inflammation. Elle est aujourd’hui interdite (Gabbert et Feldman 1976), - de l’ivermectine a été utilisée avec succès dans un cas, celle-ci étant administrée tous les jours dans les deux oreilles. Ce traitement a aboutit à l’élimination des parasites après six semaines de traitement (Van Poucke 2001), - une solution à 0,1 % de milbémycine oxime, - le Canaural®, composé d’acide fusique, de framycétine, de nystatine et de prednisolone a été utilisé dans un cas. C’est un acaricide principalement actif sur Octodectes cynotis. Il a permit une diminution transitoire de la population de Demodex cati, mais celle-ci a ré-augmenté rapidement lorsque la fréquence d’application a été diminuée. Cette rechute peut être attribuée à la durée trop courte du traitement mais la présence de corticostéroïdes dans la préparation limite son utilisation à long terme. (Van Poucke 2001)

Le traitement est renouvelé tous les jours, tous les deux jours ou deux fois par semaine en fonction de la sévérité de l’atteinte auriculaire, jusqu’aucun parasite ne soit plus mis en évidence dans les sécrétions auriculaires, lors d’écouvillonnages de contrôle.

En cas d’infection bactérienne du conduit auditif, l’utilisation d’antibiotique est indiquée par voie générale ou par voie locale.

J. Traitements des affections concomitantes

Le traitement des affections concomitantes ainsi que des complications infectieuses, bactériennes et virales, est nécessaire.

Dans certains cas, le traitement de la maladie concomitante seule, a permis la rémission complète de la démodécie. (Guaguère et al. 1999)

150 K. Suivi thérapeutique

Il est conseillé de réaliser un suivi régulier de l’évolution de la maladie au moyen de raclages superficiels et profonds. Ceci au cours du traitement pour contrôler son efficacité mais aussi après son arrêt pour vérifier que l’individu ne présente pas de rechute. En pratique, on recommande d’effectuer des raclages tous les mois jusqu’à la négativation parasitaire puis de poursuivre pendant deux mois successifs. (Bourdoiseau 2000)

Dans le cas d’une persistance de la démodécie, il se peut que le traitement instauré ne soit pas correctement observé par le propriétaire ou que le protocole choisi ne soit pas optimal. Dans ce dernier cas, le praticien peut envisager d’augmenter la dose, si cela est possible, d’augmenter la fréquence d’administration ou, encore, d’opter pour une autre molécule.

L. Prophylaxie

On sait aujourd’hui que la démodécie à Demodex gatoi est une maladie contagieuse dans un contexte de pression parasitaire précis, quelques précautions sont donc à prendre. Lors de l’introduction d’un nouvel individu dans un effectif, toute dépilation, même discrète, ou tout prurit, même léger, doit faire l’objet d’un raclage cutané. La mise en évidence de Demodex doit conduire à la mise en quarantaine de l’individu jusqu’à guérison de la démodécie. (Saari et al. 2009) (Morris 1996)

M. Pronostic

Le pronostic concernant les démodécies localisées est bon. Lors de démodécie généralisée, il est bon à réservé, selon, en particulier, l’existence ou l’absence d’une maladie concomitante, de sa gravité et de l’existence d’un traitement. (Lagarde 1994) (Chesney 1989)

151 152 Partie 3 ______

Présentation de cas cliniques

153 154 Cas clinique 1 : Tommy, prurit sévère et dépilation généralisée Démodécie généralisée, responsable de prurit ______

I. Anamnèse et commémoratifs

Tommy est un chat mâle, stérilisé, d’environ 10 ans, présenté en consultation (le 22 mai 2011) pour un prurit important et une dépilation généralisée.

A. Commémoratifs

Tommy a été donné à ses propriétaires par leurs voisins, 4 ans auparavant, suite à une cohabitation difficile avec le chien de ces derniers. Depuis, Tommy vit en maison, avec accès à l’extérieur, en compagnie d’un chat. Il est nourri avec des croquettes de supermarché et quelques restes de table. Il est correctement vacciné et traité contre les parasites externes avec du Frontline®, une fois par mois ou tous les mois et demi, avec un arrêt du traitement pendant la période hivernale. Il est irrégulièrement vermifugé. Il n’a jamais voyagé.

Aucun antécédent médical ou chirurgical n’a été rapporté par les propriétaires.

B. Anamnèse

1. Apparition de premiers signes cliniques

Un jour après son rappel de vaccination, Tommy a présenté un prurit en face ventrale du cou suivi d’une dépilation secondaire. Son propriétaire l’a immédiatement traité avec une pipette de Frontline® qu’il a appliquée entre les omoplates. Tous les poils de la zone d’application sont tombés dans les heures qui ont suivi l’application, sans prurit ni grattage. Depuis, le prurit n’a cessé d’augmenter et les dépilations secondaires se sont étendues à la face, aux oreilles, au poitrail, aux quatre membres et aux flancs.

155 2. Premiers traitements

a) Première consultation

Le vétérinaire traitant a mis en place un traitement antibiotique à base de céfalexine (Rilexine®) à la dose de 15mg/kg par voie orale, matin et soir, pendant 8 jours. Aucune amélioration n’a été notée par les propriétaires.

b) Seconde consultation

Un mois après, le traitement antibiotique est stoppé et Tommy reçoit de la prednisolone (Dermipred®) à la dose de 1mg/kg, en une prise, par voie orale, tous les jours pendant une semaine, puis un jour sur deux pendant deux semaines. Ce nouveau traitement n’apporte aucune amélioration clinique.

c) Troisième consultation

Cinq jours après le début de la corticothérapie, le traitement antibiotique, à base de céfalexine est repris, à la posologie initiale, pendant 3 jours, et la corticothérapie est arrêtée.

Cette seconde antibiothérapie se révèle également inefficace : non seulement le prurit ne régresse pas mais, au contraire, il s’intensifie de même que les dépilations qui ne cessent de s’étendre. Tommy est référé en consultation de dermatologie au CHEVAC (Centre Hospitalier d’Enseignement Vétérinaire pour les Animaux de Compagnie).

II. Consultation au CHEVAC de VetAgroSup A. Examen clinique général

Tommy est en bon état général. Il n’est pas déshydraté et sa température rectale est de 39,4°C. Une légère adénomégalie du nœud lymphatique mandibulaire gauche est notée.

L’examen de l’appareil cardio-vasculaire met en évidence des muqueuses roses avec un temps de recoloration capillaire inférieur à 2 secondes. La fréquence cardiaque est de 160 battements par minute avec un rythme régulier. Un souffle systolique apexien gauche de grade III/VI est audible.

156 L’examen de l’appareil respiratoire ne présente pas d’anomalie : la fréquence respiratoire est de 44 mouvements par minute et l’auscultation pulmonaire est claire dans les 2 hémi-thorax. Aucune toux, aucun jetage ou cornage n’est observé.

Le reste de l’examen clinique ne montre pas d’anomalie.

Le propriétaire rapporte une perte d’appétit et une perte de poids de Tommy qui semblent s’améliorer depuis quelques jours.

B. Examen dermatologique

L’examen dermatologique permet de mettre en évidence différentes lésions :

- des zones nummulaires, dépilées, finement squameuses (grandes squames fines psoriasiformes), comportant des comédons, qui s’étendent de façon centrifuge avec un front d’avancée très érythémateux. Les lésions sont coalescentes sur la face, les pavillons auriculaires, le cou et les quatre membres. On note, par ailleurs, des lésions focales sur le tronc,

- un épaississement de la peau sur la face,

- une zone nummulaire, alopécique, non inflammatoire, située entre les omoplates, à l’endroit de l’application du Frontline®,

- deux ulcères atones, symétriques, du bord libre de la lèvre supérieure, en regard de chacune des canines inférieures,

Le deuxième chat de la famille ne présente aucune lésion tout comme les membres humains de la famille.

C. Synthèse anamnestique et clinique

- Chat mâle stérilisé d’environ 10 ans.

157 - Prurit résistant à la corticothérapie évoluant depuis plus d’un mois.

- Lésions dépilées, finement squameuses, coalescentes de la face, des pavillons auriculaires, du cou et des membres, avec présence concomitante de comédons.

- Echec thérapeutique d’un traitement à base de céfalexine.

L’examen clinique de Tommy oriente vers une atteinte folliculaire.

D. Hypothèses diagnostiques

Suite à cet examen clinique, diverses hypothèses diagnostiques sont émises :

- Origine parasitaire : une démodécie ou une dermatophytose.

- Origine inflammatoire : une folliculite murale lymphocytaire.

- Origine paranéoplasique : une dermatite exfoliative liée à un thymome.

- Origine autoimmune : une pseudopelade ou un syndrome lupique.

- Origine infectieuse : un syndrome de prolifération bactérienne ou fongique de surface, secondaire

E. Examens complémentaires

L’établissement du diagnostic nécessite de réaliser certains examens complémentaires.

1. Examens complémentaires immédiats

- L’examen à la lampe de Wood est négatif, rendant peu probable une dermatophytose.

- L’examen d’un calque de la surface de la peau met en évidence des coques en grand nombre.

158

- L’examen du produit de raclages cutanés, des oreilles et des membres antérieurs, révèle de nombreux Demodex, identifiés comme Demodex cati.

2. Examens complémentaires différés

Des biopsies cutanées multiples sont réalisées au niveau des lésions et en périphérie de celles- ci.

L’examen histopathologique des biopsies montre une hyperkératose orthokératosique modérée et un épiderme acanthosique avec développement de crêtes de taille variable.

Le derme superficiel est oedémateux et congestif et le siège d’un infiltrat inflammatoire, moyennement dense, périvasculaire à diffus, composé de polynucléaires neutrophiles, d’histiocytes, de lymphocytes et de mastocytes.

De nombreuses sections de Demodex sont observées au sein des follicules pileux.

Quelques images de dégénérescence hydropique des kératinocytes ainsi qu’une exocytose modérée de lymphocytes est, parfois, observée au sein des parois des infundibulums folliculaires. Des pyogranulomes, centrés sur des reliquats de folicules pileux ou des sections de Demodex, sont présents.

Des images d’adénite sébacée pyogranulomateuse, ainsi que des images d’hidrosadénite suppurée, sont observées.

L’absence d’élément fongique est confirmée après réaction au PAS.

Cet examen histopathologique est diagnostique d’une démodécie ayant évoluée jusqu’au stade de furonculose.

159 F. Diagnostic

Tommy présente donc une démodécie, responsable d’une furonculose, associée à un syndrome prolifération bactérienne de surface, vraisemblablement secondaire.

G. Traitement

Le traitement mis en place est le suivant :

- Antibiothérapie : céfovécine (Convénia®), à la dose de 8 mg/kg, par injection sous-cutanée, une fois.

- Traitement acaricide : moxidectine (Cydectine® injectable Bovin), à la dose de 400 μg/kg, par voie orale, tous les jours jusqu’au contrôle.

- Traitement topique : shampoing et réhydratant cutané (Malaseb®/Ermidra®), deux fois par semaine, jusqu’à la visite de contrôle.

III. Suivi et évolution A. Evolution après 15 jours de traitement

L’examen clinique révèle l’extension de l’alopécie qui concerne, maintenant, l’intégralité de la face ventrale ainsi que le thorax. Cependant une nette amélioration clinique est observée : le poil a repoussé abondamment sur la face et la peau n’apparaît plus érythémateuse, squameuse ou épaissie. Les propriétaires rapportent une diminution du prurit.

Les raclages cutanés mettent encore en évidence des Demodex.

Une nouvelle injection de Convenia® est réalisée et le traitement à base de moxidectine est poursuivi jusqu’au contrôle suivant. La réalisation de shampoings et l’application de réhydratant cutané, une fois par semaine, sont préconisés.

160 B. Evolution après 45 jours de traitement

Une nette amélioration est notée. L’état général de Tommy est bon ainsi que son appétit. Les propriétaires rapportent un prurit très modéré. La repousse du poil s’effectue sur l’ensemble du corps.

Des raclages cutanés sont réalisés et l’examen du produit de raclage montre l’absence de Demodex.

Le traitement à base de moxidectine est poursuivi pendant 1 mois supplémentaire ainsi que le traitement topique (shampoing et réhydratant).

C. Evolution après 2 mois et demi de traitement

Tommy présente un bon état général. Le prurit et les lésions ont disparu.

La moxidectine est arrêtée depuis 15 jours.

Des raclages cutanés montrent l’absence de Demodex.

Les deux derniers raclages cutanés réalisés à un mois d’intervalle étant négatifs, Tommy est considéré comme guéri.

D. Evolution après l’arrêt du traitement

A ce jour, un an et demi après l’arrêt du traitement, Tommy est toujours en bon état général et n’a pas présenté de nouveaux épisodes de prurit ni de dépilations.

161 Identité : Tommy, chat européen, mâle, stérilisé, de 10 ans

Motif de consultation : prurit important et dépilation généralisée évoluant depuis 1 mois

Diagnostic : démodécie à Demodex cati, responsable d’une furonculose, associée à un syndrome prolifération bactérienne de surface secondaire

Cause sous-jacente potentielle : aucune

Traitement : traitement acaricide, moxidectine à la dose de 400 μg/kg, PO, SID, et antibiothérapie

Durée de traitement acaricide : 2 mois

Evolution : guérison de la démodécie, disparition des lésions et du prurit

Conclusion : démodécie primaire responsable du prurit

Suivi : Absence de rechute après 1 an et demi.

Photo 40 : Tommy. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

162 Tommy 1/5 : Première consultation- lésions ______

Photo 41 : Dépilation sur la face. Photo 42 : Dépilation au niveau du pavillon (cliché unité dermatologique VetAgroSup) auriculaire et lichénification. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 43 : Dépilation en zone ventrale du cou Photo 44 : Dépilation au niveau des membres et au niveau des membres thoraciques. (cliché pelviens. unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 45 : Zone nummulaire, alopécique et Photo 46 : Aspect général de Tommy. non inflammatoire localisée entre les (cliché unité dermatologique VetAgroSup) omoplates. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) 163

Tommy 2/5 : Première consultation - résultat des raclages cutanés ______

Photo 47 : Demodex visualisé au microscope après la réalisation de raclages cutanés au niveau du pavillon auriculaire externe et des membres thoraciques. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 48 : Agrandissement d’un des Demodex, les caractéristiques morphologiques étant celle de Demodex cati. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

164 Tommy 3/5 : Evolution après 15 jours de traitement ______

Photo 50 : Persistance de l’alopécie au niveau Photo 49 : Repousse du poil sur la face. des pavillons auriculaires. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 51 : Extension de l’alopécie concernant le Photo 52 : Extension de l’alopécie concernant la face thorax et la face ventrale du cou. ventrale de l’abdomen et les membres postérieurs. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 53 : Vue rapprochée d’une zone Photo 54 : Aspect général de Tommy. alopécique. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

165 Tommy 4/5 : Evolution après 45 jours de traitement ______

Photo 55 : Repousse du poil au niveau de la tête. Photo 56 : Repousse du poil au niveau des (cliché unité dermatologique VetAgroSup) pavillons auriculaires et du cou. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Pho to 57 : Repousse du poil au niveau thoracique et Photo 58 : Détail du flanc gauche. abdominal. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

(cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 59 : Repousse du poil en face ventrale Photo 60 : Aspect général de Tommy. de l’abdomen. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

166 Tommy 5/5 : Evolution après 2 mois et demi de traitement ______

Photo 61 et 62 : Disparition des lésions sur l’ensemble du corps. (clichés unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 63 : Aspect général de Tommy. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

167 168 Cas clinique 2 : Noisette, dermatose prurigineuse chronique Démodécie secondaire, non responsable du prurit observé ______

I. Anamnèse et commémoratifs

Noisette est un chat européen, mâle, stérilisé, de 7 ans, présenté en consultation (le 09 mai 2011) pour une dermatose prurigineuse chronique, évoluant depuis 4 ans.

A. Commémoratifs

Noisette vit en maison avec accès à l’extérieur en compagnie d’un chat. Il mange des croquettes hypoallergéniques Hill’s®. Noisette porte un collier antiparasitaire acheté en grande surface et reçoit, de manière très irrégulière, un insecticide, du Frontline® en spray. Noisette n’est pas vacciné, ni vermifugé. Il n’a jamais voyagé.

Les propriétaires ne rapportent aucun antécédent non dermatologique.

B. Anamnèse

1. Apparition des premiers signes cliniques

Les premiers signes cliniques de sa dermatose prurigineuse sont apparus 4 ans auparavant, lorsque Noisette avait environ 3 ans, et n’ont jamais cessé depuis. Il présente un prurit cervico-facial, qui évolue par crise, à raison d’une crise tous les deux ou trois mois. Lors des crises, son état général est altéré et Noisette est abattu.

2. Premiers traitements

Suspectant une atopie, le vétérinaire traitant a, dans un premier temps, réalisé une désensibilisation contre les graminées, pendant plusieurs mois, sans succès.

169 Les crises ont, ensuite, été traitées avec des injections de corticoïdes qui apportaient une amélioration nette mais temporaire.

II. Consultation au CHEVAC de VetAgroSup A. Examen clinique général

L’examen clinique général ne présente aucune anomalie.

Noisette est en bon état général et n’est pas déshydraté. Sa température rectale est normale. L’examen des appareils cardiaque et respiratoire ne présente pas d’anomalie.

B. Examen dermatologique

L’examen dermatologique montre des lésions sur l’ensemble de la face, sur les pavillons auriculaires et le cou.

Il s’agit d’un érythème, de nombreuses excoriations, d’ulcérations et de croûtes. Sont également notés, un état kératoséborrhéique, une dépilation et une lichénification de la peau.

Noisette présente, de plus, une lésion de dermatite pyotraumatique au niveau de la joue droite.

Les propriétaires ne rapportent aucune contagion au second chat de la maison ou aux humains.

C. Synthèse clinique et anamnestique

- Chat mâle stérilisé de sept ans.

- Prurit cervico-facial évoluant depuis 4 ans.

- Lésions dépilées de la face, des pavillons auriculaires et du cou, avec érythème, croûtes, excoriations et ulcérations.

170 - Lésion de dermatite pyotraumatique de la joue.

- Echec d’une tentative de désensibilisation contre les graminées.

D. Hypothèses diagnostiques

Suite à cet examen clinique diverses hypothèses diagnostiques sont émises :

- Origine parasitaire : une démodécie, une thrombiculose voire une gale notoédrique.

- Origine fongique : une dermatophytose ou une dermatite à Malassezia.

- Origine bactérienne : un syndrome de prolifération bactérienne de surface (absence de lésion typique de folliculite).

- Phénomène d’hypersensibilité : une dermatite par allergie aux piqûres de puces (DAPP) ou une hypersensibilité alimentaire. Cette dernière proposition est peu probable en raison de l’absence de réponse au régime à base d’hydrolysats, proposé depuis plus d’un an. Une dermatose prurigineuse chronique idiopathique peut aussi être suggérée.

E. Examens complémentaires

Des examens complémentaires sont réalisés pour tester les hypothèses diagnostiques :

- l’examen direct de poils épilés au niveau des lésions montre l’absence d’élément figuré,

- l’examen à la lampe de Wood est négatif, rendant peu probable une dermatophytose,

- l’examen du produit de nombreux raclages cutanés met en évidence des Demodex, dont l’espèce n’est pas identifiée,

- l’examen de cytologies de surface montre de rares bactéries et de très rares Malassezia.

171 F. Diagnostic

Le diagnostic est celui d’une démodécie, compliquée d’une prolifération bactérienne et de Malassezia de surface.

Le diagnostic de démodécie établi, il faut préciser l’origine du prurit, démodécique ou autre. Celle-ci pouvant être, de plus, primaire ou secondaire à la corticothérapie administrée depuis 4 ans.

Les complications infectieuses peuvent aussi être primaires ou secondaires à la démodécie, à la corticothérapie ou à une hypersensibilité sous-jacente, comme la dermatite par allergie aux piqûres de puce, par exemple.

G. Traitement

Un traitement contre la démodécie et les complications bactériennes et fongiques est mis en place dans un premier temps. La réalisation de raclages cutanés et de cytologies de surface lors des contrôles permettra d’évaluer son efficacité. En cas de guérison, si le prurit persiste il ne pourra plus leur être imputé et l’exploration d’une hypersensibilité devra être envisagée, la plus probable étant une dermatite par allergie aux piqûres de puce. En effet, les antiparasitaires externes sont administrés de façon très irrégulière par les propriétaires et le régime de Noisette à base d’hydrolysats rend peut probable une hypersensibilité alimentaire.

Le traitement suivant est mis en place :

- Antibiothérapie : céfalexine (Rilexine®) à la dose de 30 mg/kg, par voie orale, en deux administrations, tous les jours, jusqu’à la visite de contrôle.

- Traitement acaricide : moxidectine (Cydectine® injectable Bovin) à la dose de 400 μg/kg, par voie orale, tous les jours, jusqu’à la visite de contrôle.

172 - Traitement topique : shampoing et réhydratant cutané (Malaseb® et Ermidra®), deux fois par semaine, jusqu’à la visite de contrôle.

- la pose de protège-griffes pour éviter une aggravation des blessures auto-infligées.

III. Suivi et évolution

A. Evolution après 1 mois de traitement

Concernant l’observance du traitement, les propriétaires rapportent un arrêt de la céfalexine depuis 1 semaine (Noisette a donc été sous antibiothérapie pendant 3 semaines), la moxidectine étant, quant à elle, toujours administrée. Le shampoing et le réhydratant cutané n’ont été utilisés qu’une seule fois car ils semblaient mal supportés. Les protège-griffes sont restés en place pendant 3 semaines.

Depuis le début du traitement, les propriétaires ont noté, d’une part, une diarrhée avec conservation de l’appétit et de l’état général et, d’autre part, l’apparition de lésions cutanées de l’abdomen.

1. Examen clinique

L’examen clinique général de Noisette ne présente aucune anomalie.

A l’examen dermatologique, on observe une relative stabilité des lésions au niveau de la tête et du cou et une diminution modérée de l’inflammation cutanée.

Une alopécie extensive, localisée à l’abdomen, est présente.

Le prurit est toujours présent.

173 2. Examens complémentaires et conclusion

De nouveaux examens complémentaires sont réalisés :

- l’examen du produit de raclages cutanés montre la disparition des Demodex, indiquant que la démodécie n’est pas la cause du prurit,

- l’examen des cytologies de surface mettent en évidence quelques rares coques et l’absence de Malassezia.

Ces résultats permettent d’éliminer les causes infectieuses, bactériennes, fongiques et parasitaires, du prurit.

Une hypersensibilité doit être, maintenant, envisagée et une dermatite par allergie aux piqûres de puce est explorée dans un premier temps.

3. Traitement

Le traitement proposé est le suivant :

- Traitement topique : shampoing à base de chlorhexidine et de phytosphingosine (Douxo® chlorhexidine micro-émulsion), à faire tous les 3 jours, pendant un mois.

- Traitement antiparasitaire externe: fipronil (Frontline®) à appliquer, sur les deux chats de la maison, trois fois à 15 jours d’intervalle, puis toutes les 3 semaines.

- Traitement insecticide de l’environnement : association de flufenoxuron et de permethrine (Tiquanis habitat®) dans tous les endroits fréquentés par les chats, en particulier les lieux de couchage et les litières.

- Arrêt de la moxidectine.

Noisette n’a pas été revu en consultation au CHEVAC de VetAgroSup.

174 B. Evolution après la dernière consultation

Les propriétaires ont été joint au téléphone et nous ont communiqué les informations suivantes : le traitement antiparasitaire externe et le traitement insecticide de l’environnement ont été mis en place, sans succès. Aucun raclage cutané de contrôle n’a été réalisé. Les lésions se sont aggravées et se sont étendues à l’ensemble du corps. Le prurit, très sévère, a persisté au cours de crises, de plus en plus fréquentes, qui duraient jusqu’à une semaine, au cours desquelles l’intensité du prurit rendait Noisette très agressif à cause de la douleur. Son état général était altéré lors des crises. Noisette a été euthanasié 6 mois après la dernière consultation au CHEVAC de VetAgroSup.

175 Identité : Noisette, chat européen, mâle, stérilisé, de 7 ans

Motif de consultation : dermatose prurigineuse évoluant depuis 4 ans

Diagnostic : démodécie (Demodex non identifié) associée à une prolifération bactérienne et fongique de surface

Cause sous-jacente potentielle : corticothérapie depuis 4 ans

Traitement : traitement acaricide, moxidectine à la dose de 400 μg/kg, PO, SID, antibiothérapie, traitement topique

Durée de traitement acaricide : 1 mois

Evolution : disparition des Demodex, stabilisation des lésions mais persistance du prurit

Conclusion : démodécie secondaire à la corticothérapie, non responsable du prurit

Proposition : exploration de l’hypothèse d’une hypersensibilité

Suivi : absent. Euthanasie suite à une aggravation de lésions et du prurit.

Photo 64 : Noisette. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

176 Noisette 1/2 : Première consultation - lésions ______

Photo 65 : Lésions localisées sur l’ensemble Photo 66 : Lésion de dermatite de la face. pyotraumatique au niveau de la joue droite. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 67 : Erythème et dépilation en région Photo 68 : Détail d’une ulcération au niveau du périoculaire et périauriculaire. crâne. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 69 : Excoriations et érythème en zone Photo 70 : Croûte en face dorsale du cou. périauriculaire. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

177 Noisette 2/2 : Seconde consultation – lésions ______

Photo 71 : Aspect général de Noisette. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 72 : Relative stabilité des lésions au Photo 73 : Alopécie extensive au niveau de niveau de la tête et du cou. l’abdomen ventral. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

178 Cas clinique 3 : Bambino, dermatose prurigineuse chronique Démodécie localisée à la tête et au cou, responsable du prurit ______

I. Anamnèse et commémoratifs

Bambino est un chat chartreux, mâle, stérilisé, de 4 ans et demi, présenté en consultation (le 21 mars 2011) pour une dermatose prurigineuse chronique évoluant depuis son acquisition, 1 an auparavant.

A. Commémoratifs

Bambino a été adopté à la SPA, à l’âge de 3 ans et demi, ses antécédents médicaux sont donc inconnus. Il vit en appartement, en compagnie d’un chat, depuis 6 mois. Il mange des croquettes Royal Canin® hypoallergéniques depuis 5 mois. Bambino est régulièrement traité contre les parasites externes avec de l’Advantage®, une fois par mois et ses oreilles sont nettoyées à l’Epi-otic® une fois par semaine.

B. Anamnèse

1. Apparition des premiers signes cliniques

Les premiers signes cliniques de sa dermatose prurigineuse sont apparus 1 an auparavant. Il a présenté un prurit cervico-facial qui n’a jamais cessé depuis.

2. Premiers traitements

Le vétérinaire traitant a effectué un examen à la lampe de Wood qui s’est révélé positif. Bambino a été mis sous corticoïdes (non précisés) et sous énilconazole (Imavéral®), pendant 1 mois. Ce traitement a apporté une amélioration mais, dès son arrêt, les symptômes ont réapparu. Depuis, les lésions évoluent de manière cyclique et sont toujours localisées à la tête.

179 Bambino porte une collerette depuis presque 1 an.

II. Consultation au CHEVAC VetAgroSup A. Examen clinique général

Bambino est en bon état général. Il n’est pas déshydraté et sa température rectale est normale.

L’examen de l’appareil cardio-vasculaire met en évidence des muqueuses rose pâle et un temps de recoloration capillaire difficilement évaluable. A l’auscultation, un souffle cardiaque pansystolique est entendu, audible à gauche et à droite, de grade III/VI (cardiomyopathie hypertrophique liée à l’obstruction de la chambre de chasse possible). Ces derniers rapportent, de plus, des essoufflements à l’effort. Des examens complémentaires, pour explorer la fonction cardiaque, seront proposés aux propriétaires.

Le reste de l’examen clinique ne montre pas d’anomalie.

B. Examen dermatologique

L’examen dermatologique montre un état kératoséborrhéique généralisé (probablement lié au défaut de toilettage suite au port de la collerette depuis environ 1 an).

Il met, de plus, en évidence différentes lésions :

- un érythème, de petites papules, des croûtes et une dépilation en régions périorbitale et périauriculaire ainsi qu’une lésion similaire, isolée, sur le chanfrein,

- un ulcère atone, débutant, de la lèvre supérieure, en regard du croc inférieur,

- une lésion dépilée, nummulaire, non inflammatoire, entre les omoplates (lésion cicatricielle ancienne probable).

On note, par ailleurs, la présence de cérumen dans les conduits auditifs externes.

180 C. Synthèse clinique et anamnestique

- Chat mâle stérilisé de 4 ans et demi.

- Prurit cervico-facial depuis environ 1 an.

- Zones dépilées en régions périorbitale, périauriculaire et sur le chanfrein, avec érythème, papules et croûtes.

- Cérumen dans les conduits auditifs externes.

- Dermatophytose 2 mois auparavant, traitée à l’aide de corticoïdes et d’énilconazole avec réapparition des symptômes dès l’arrêt du traitement.

D. Hypothèses diagnostiques

Suite à cet examen clinique diverses hypothèses diagnostiques sont émises :

- Origine parasitaire : une démodécie ou une gale otodectique.

- Origine bactérienne : une prolifération bactérienne de surface (corticothérapie et absence d’antibiothérapie).

- Origine fongique : une dermatite à Malassezia ou une dermatophytose (l’association fongicide et corticoïde étant contre-indiquée lors d’un diagnostic de teigne, une rechute est possible).

- Phénomène d’hypersensibilité : une dermatite par allergie aux piqûres de puce, une hypersensibilité alimentaire (peu probable du fait de l’absence de réponse à un régime à base d’hydrolysats depuis 5 mois) ou une dermatose prurigineuse idiopathique.

- Origine comportementale : peu probable, du fait de l’absence de trouble du comportement rapportée par les propriétaires.

181 E. Examens complémentaires

Des examens complémentaires sont réalisés :

- l’examen direct du cérumen montre l’absence d’élément figuré,

- l’examen à la lampe de Wood est négatif, rendant peu probable une rechute de dermatophytose,

- l’examen de cytologies de surface montre l’absence de coque ou de Malassezia,

- l’examen du produit de raclages cutanés met en évidence des Demodex, identifiés comme Demodex cati.

F. Diagnostic

Le diagnostic est celui d’une démodécie à Demodex cati. Le prurit peut être dû à la démodécie ou à une affection concomitante. La démodécie peut être primaire ou secondaire à la corticothérapie antérieure. Si le prurit persiste après l’élimination de la démodécie, l’hypothèse d’une hypersensibilité sera envisagée.

G. Traitement

Le traitement est le suivant :

- Traitement acaricide : moxidectine (Cydectine® injectable Bovin) à la dose de 400 µg/kg, par voie orale, tous les jours jusqu’au contrôle.

- Traitement topique : un spray à base de chlorhexidine et de phytosphingosine (Douxo® chlorhexidine spray), a appliquer tous les jours pendant 1 mois.

182 III. Suivi et évolution A. Evolution après 1 mois de traitement

Le propriétaire a observé une nette amélioration des lésions. Un prurit discret persiste mais ne justifie plus le port de la collerette qui a été retirée depuis une semaine.

1. Examen clinique

Bambino est en bon état général. Le souffle pansystolique est toujours audible lors de l’auscultation cardiaque. Le reste de l’examen clinique général ne présente pas d’anomalie.

A l’examen dermatologique, une nette amélioration des lésions est observée. Une lésion dépilée, en arrière de l’oreille droite, est mise en évidence, ainsi que quelques croûtes.

Le prurit a diminué.

La présence de cérumen est observée les conduits auditifs externes, sans signe fonctionnel associé.

2. Examen complémentaires et conclusion

De nouveaux examens complémentaires sont réalisés :

- l’examen direct du cérumen montre l’absence d’élément figuré,

- l’examen du produit des raclages cutanés montre la disparition des Demodex.

Le traitement est à l’origine d’une diminution du prurit et d’une nette amélioration des lésions. La démodécie est donc considérée comme cause initiale du prurit.

183 3. Traitement

Le traitement proposé est le suivant :

- Traitement acaricide : moxidectine (Cydectine® injectable Bovin) à la dose de 400 µg/kg, par voie orale, tous les jours, jusqu’à la visite de contrôle.

Un rendez-vous en cardiologie est aussi proposé pour explorer l’origine du souffle cardiaque.

Bambino n’a pas été revu en consultation au CHEVAC de VetAgroSup.

B. Evolution après la dernière consultation

Le propriétaire a été joint au téléphone et nous a communiqué les informations suivantes : après l’arrêt du traitement acaricide (absence de précision), aucun raclage cutané de contrôle n’a été réalisé. Les lésions ont disparu mais un prurit discret persiste au cours de crises, peu fréquentes et de courte durée, que le propriétaire associe à des périodes de stress (garde de Bambino par un tiers, changement dans la routine,…). Le propriétaire limite l’apparition des crises en contrôlant au maximum l’environnement de Bambino et les différents facteurs de stress.

184 Identité : Bambino, chat chartreux, mâle, stérilisé, de 4 ans et demi

Motif de consultation : dermatose prurigineuse chronique, localisée à la tête, évoluant depuis 1 ans

Diagnostic : démodécie à Demodex cati

Cause sous-jacente potentielle : corticothérapie pendant 1 mois

Traitement : traitement acaricide, moxidectine à la dose de 400 μg/kg, PO, SID, et traitement topique

Durée de traitement acaricide : au moins 1 mois

Evolution : disparition des Demodex, nette amélioration des lésions et diminution du prurit

Conclusion : démodécie, responsable d’une aggravation d’un prurit préexistant (comportemental ?), secondaire à la corticothérapie

Suivi : persistance d’un prurit discret non exploré après 1 an et 10 mois.

Photo 74 : Bambino. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

185 Bambino : consultation – lésions ______

Photo 75 : Dépilation érythémateuse isolée sur Photo 76 : Erythème et croûtes au niveau du le chanfrein. pavillon auriculaire externe.

(cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 77 : Nombreuses papules au niveau du Photo 78 : Pavillon auriculaire interne érythémateux. pavillon auriculaire interne. (cliché unité dermatologique VetAgroSup) (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 79 : Lésion dépilée, nummulaire, non inflammatoire, située entre les omoplates. (cliché unité dermatologique VetAgroSup)

186 Cas clinique 4 : Colline, dermatose prurigineuse chronique Historique de démodécie localisée, non responsable du prurit observé, dans un contexte de dermatite atopique complexe

______

I. Anamnèse et commémoratifs

Colline est un chat européen, femelle, non stérilisé, de 7 ans présenté en consultation (le 09 mars 2009) pour un prurit des zones péribuccale et périanale.

A. Commémoratifs

Colline a été acquise par ses propriétaires 5 ans auparavant, après l’abandon de l’animal par leurs voisins. Elle vit en appartement en compagnie d’oiseaux en cage. Elle est nourrie avec des croquettes hypoallergéniques Z/D Hill’s®. Colline est traité contre les parasites externes avec de l’Advocate® à raison d’une fois par mois. Des tests de l’infection par le virus de la leucose féline et le virus du syndrome d’immunodéficience acquise se sont révélés négatifs.

B. Anamnèse

1. Apparition des premiers signes cliniques

Les premiers signes cliniques sont apparus 5 ans auparavant, lorsque Colline avait 2 ans et n’ont jamais cessé depuis. Elle présente un érythème et des croûtes au niveau des zones péribuccale et périanale. La localisation des lésions n’évolue pas. Elle présente un prurit sévère et intense qui évolue par crises. Les propriétaires ne rapportent aucun autre trouble.

187 2. Premiers traitements, diagnostic de démodécie

Divers traitement ont été mis en place, mais aucun n’a permis une guérison durable : ils améliorent l’état de Colline, mais toujours temporairement. Des traitements à base d’antibiotique (céfovicine Convenia®, céfalexine Therios®) de corticoïdes (prednisolone Mégasolone®), d’antihistaminique, d’antifongique et d’antiparasitaire ont été mis en place, sans succès. La dose et la durée des différents traitements ne sont pas précisées.

Une biopsie cutanée de la zone péribuccale a été réalisée 4 ans plus tôt. Elle a mis en évidence la présence de Demodex, identifiés comme Demodex gatoi. Un traitement acaricide a été mis en place : milbémicine oxime (Interceptor®) à la dose de 1 mg/kg, par voie orale, une fois par jour, pendant 2 mois et amitraze (Ectodex®), pour lequel la posologie et la fréquence de traitement sont inconnues. Une amélioration a été observée pendant le traitement mais les lésions sont réapparues dès son arrêt.

II. Consultation au CHEVAC de VetAgroSup A. Examen clinique général

Colline présent un bon état général.

L’examen clinique ne met en évidence aucune anomalie.

B. Examen dermatologique

L’examen cutané permet de mettre en évidence différentes lésions :

- des zones dépilées érythémateuses, comportant des papules folliculaires, des excoriations et des croûtes sur l’ensemble de la région périlabiale,

- un érythème, des croûtes et une lichénification discrète sur l’ensemble de la zone périanale et allant jusqu’à l’aine,

188 - des squames sont présentes au niveau des coussinets, ceux-ci étant secs,

- une alopécie extensive de l’abdomen.

C. Synthèse clinique et anamnestique

- Chat européen, femelle, non stérilisé, de 7 ans.

- Prurit sévère et intense, évoluant par crises, depuis 5 ans.

- Dépilations de la région périlabiale avec érythème, papules, excoriations et croûtes ; érythème, croûtes et lichénification de la région périanale.

- Squamosis des coussinets.

- Alopécie extensive de l’abdomen.

- Démodécie traitée avec succès 4 ans auparavant, mais réapparition des lésions.

D. Hypothèse diagnostiques :

Suite à cet examen clinique, diverses hypothèses diagnostiques sont émises

- Origine parasitaire : démodécie, dermatite à Otodectes, voire cheylétiellose ou gale notoédrique.

- Origine fongique : dermatophytose ou dermatite à Malassezia.

- Origine bactérienne : prolifération bactérienne de surface, folliculite / furonculose.

- Phénomène d’hypersensibilité : dermatite par allergie aux piqûres de puces, hypersensibilité alimentaire ou dermatose prurigineuse chronique idiopathique.

189 E. Examens complémentaires

L’établissement du diagnostic, nécessite de réaliser certains examens complémentaires

1. Examens complémentaires immédiats

- L’examen des cytologies de surface, réalisées en régions périlabiale et périanale, montre de rares bactéries.

- L’examen du produit de raclages cutanés ne met en évidence aucun parasite.

2. Examens complémentaires différés

Des biopsies cutanées multiples sont réalisées au niveau des lésions et en périphérie de celles- ci

L’examen histopathologique des biopsies montre :

- en surface, des croûtes, séreuses ou séro-cellulaires, qui recouvrent des ulcérations profondes ; une hyperkératose, orthokératosique et localement parakératosique, modérée ; un épiderme acanthosique, avec formation de crêtes épidermiques irrégulières, et fortement spongique sur toute sa hauteur ; une exocytose modérée de lymphocytes ;

- un derme superficiel, congestif et mucineux, à aspect compact, hyalinisé avec des fibres de collagène fragmentées ; des capillaires du derme superficiel ayant une paroi épaissie, floue, hyalinisée avec des cellules turgescentes, plusieurs zones d’extravasation de globules rouges ; au sein du derme superficiel, un infiltrat inflammatoire périvasculaire, composé essentiellement de mastocytes et de polynucléaires éosinophiles, ainsi que de lymphocytes, plasmocytes, histiocytes et de quelques polynucléaires neutrophiles ;

- des follicules pileux qui ont un aspect proche de la normale, beaucoup étant en phase anagène ;

- une lésion d’adénite sébacée suppurée ;

190

- une absence de parasite et d’élément fongique après réaction au PAS.

Cet examen histopathologique évoque une dermatose eczématiforme, compatible avec une prolifération bactérienne de surface, une dermatite à Malassezia, une hypersensibilité à manifestation cutanée ou une ectoparasitose.

F. Diagnostic

Suite à l’anamnèse, la clinique et les examens complémentaires, l’hypothèse privilégiée est une dermatose prurigineuse de type hypersensibilité, associée à une prolifération bactérienne de surface secondaire.

Pour établir un diagnostic précis, il est nécessaire de tester les trois hypothèses qui restent, de manière systématique et séparément. Un traitement antiparasitaire externe strict doit être mis en place pour la dermatite par allergie aux piqûres de puces. Un régime d’éviction alimentaire doit être mis en place pour l’hypersensibilité alimentaire. Et enfin, l’hypothèse de dermatose prurigineuse chronique idiopathique sera considérée comme diagnostic si toutes les autres sont infirmées.

G. Traitement

Dans un premier temps, l’hypothèse de dermatite par allergie aux piqûres de puces est testée. Le traitement mis en place est le suivant

- Traitement antiparasitaire externe : fipronil (Frontline®), une fois tous les 15 jours jusqu’à la visite de contrôle.

- Traitement insecticide de l’environnement : association de flufenoxuron et de permethrine (Tiquanis Habitat®) dans tous les endroits fréquentés par le chat, en particulier les lieux de couchage et les litières.

191 - Traitement antibiotique : céfalexine (Rilexine®) à dose de 30 mg/kg, par voie orale, en deux prises jusqu’à la visite de contrôle.

- Traitement topique : shampoing et réhydratant cutané (Pyoderm® et Humiderm®) sur les zones lésionnelles, deux à trois fois par semaine, jusqu’à la visite de contrôle.

III. Evolution et suivi A. Evolution après 1 mois de traitement antiparasitaire externe strict

Cinq jours après le début du traitement, les propriétaires rapportent des vomissements, l’antibiothérapie est modifiée : la céfalexine est remplacée par la marbofloxacine (Marbocyl®) à la dose de 2 mg/kg, par voie orale, par jour, jusqu’à la visite de contrôle.

Après un mois de traitement antiparasitaire externe bien conduit (animal et environnement) et en l’absence d’amélioration, l’hypothèse d’une hypersensibilité alimentaire est testée. Comme Colline est déjà sous alimentation à base d’hydrolysats, un régime d’élimination ménager est mis en place pour deux mois.

Le traitement proposé est le suivant :

- Régime d’éviction à base de viande de mouton et de haricots verts pendant deux mois.

- Corticothérapie, uniquement si nécessaire : prédnisolone (Mégasolone®), à dose immunosuppressive de 0,5 mg/kg, par voie orale, par jour, pendant 3 jours.

B. Evolution après un mois et demi de régime d’éviction ménager

Les propriétaires ne rapportent aucune amélioration après 8 semaines de régime, mais, au contraire, une aggravation des lésions.

L’examen clinique général ne montre aucune anomalie.

192 A l’examen dermatologique, on observe des dépilations, de l’érythème, des excoriations et des croûtes en régions périlabiale, périanale et cervicale.

L’absence d’amélioration suite au traitement parasitaire externe et au régime d’éviction ménager, conduit à envisager la dermatose prurigineuse chronique idiopathique comme hypothèse diagnostique majeure.

Le traitement proposé est le suivant :

- Traitement immunosuppresseur : ciclosporine (Atopica®) à la dose de 5 mg/kg, une fois par jour, jusqu’à la visite de contrôle.

- Corticothérapie, le temps que la ciclosporine fasse effet : prednisolone (Megasolone®) à la dose de 1 mg/kg, par voie orale, une fois par jour, pendant 5 jours.

- Traitement antibiotique : marbofloxacine (Marbocyl®) à la dose de 2 mg/kg, par voie orale, par jour, pendant 3 semaines.

- Traitement topique : shampoings et réhydratant cutané (Pyoderm ® ou Allercalm® et Ermidra®), deux fois par semaine, jusqu’à la visite de contrôle.

- Traitement antiparasitaire externe : fipronil (Frontline®), une fois par mois.

- Réintroduction d’une alimentation physiologique.

C. Evolution avec le traitement immunosuppresseur

1. Evolution après 3 mois et demi de traitement - amélioration

Trois mois et demi après la mise en place du traitement immunosuppresseur, une nette amélioration est notée.

Quelques dépilations, un érythème, des croûtes et des papules sont observées au niveau du menton, mais elles ont disparu en région périanale.

193

Les cytologies de surface réalisées mettent en évidence quelques bactéries et Malassezia

Le traitement proposé est le suivant :

- Poursuite du traitement immunosuppresseur : ciclosporine (Atopica®) à la dose de 5 mg/kg, par voie orale, une fois par jour.

- Traitement topique : lingettes à base de chlorhexidine (Douxo lingettes®), une fois par jour et shampoings et réhydratant cutané (Pyoderm ® ou Allercalm® et Ermidra®), deux fois par semaine, sur le menton.

- Traitement antiparasitaire externe : fipronil (Frontline®), une fois par mois.

2. Evolution après 7 mois de traitement – premier épisode de complications infectieuses

Après 6 mois de traitement, une diminution de la posologie de la ciclosporine a entraîné une aggravation de l’état de Colline. La posologie initiale a donc été rétablie.

a) Aggravation des lésions

(1) Examen clinique

Lors de la consultation, Colline est en bon état général et l’examen clinique ne montre pas d’anomalie.

L’examen dermatologique permet de mettre en évidence différentes lésions :

- des zones lichénifiées, érythémateuses, suintantes et croûteuses, et un état kératoséborrhéique en région péribuccale et s’étendant au menton,

- la présence de squames sur l’ensemble du corps,

- un érythème de l’abdomen.

194

(2) Hypothèses diagnostiques

Les hypothèses diagnostiques sont principalement des complications parasitaires (démodécie), bactériennes (prolifération bactérienne de surface) ou fongiques (dermatite à Malassezia).

(3) Examens complémentaires

Des raclages cutanés sont réalisés en zone péribuccale et montrent l’absence de parasite. La réalisation de cytologies de surface, dans la même zone, met en évidence quelques bactéries et Malassezia.

(4) Diagnostic

Le diagnostic est donc : complications d’origine infectieuses de la dermatose prurigineuse chronique idiopathique, maintenant associée à une prolifération bactérienne de surface et Malassezia, toutes deux secondaires.

(5) Traitement

Le traitement proposé est le suivant :

- Poursuite du traitement immunosuppresseur, avec diminution de la fréquence d’administration : ciclosporine (Atopica®) à la dose de 5mg/kg, par voie orale, tous les deux jours jusqu’à la visite de contrôle.

- Antibiothérapie : marbofloxacine (Marbocyl®) 2 mg/kg, par voie orale, une fois par jour jusqu’à la visite de contrôle.

- Traitement fongicide : kétoconazole (Ketofungol®) 10 mg/kg, par voie orale, une fois par jour, au moment des repas, jusqu’à la visite de contrôle.

195 - Traitement topique : shampoing et réhydratant cutané (Pyoderm® /Ermidra®), 2 à 3 fois par semaine.

- Traitement antiparasitaire externe : fipronil (Frontline®), une fois par mois.

b) Stabilisation des lésions après 2 semaines de traitement

Le propriétaire rapporte une amélioration de l’état de Colline. Le prurit est modéré.

L’examen clinique ne montre pas d’anomalie. L’examen dermatologique met en évidence une stabilisation des lésions avec un érythème et une lichénification du menton et de la zone péribuccale, ainsi que la présence de quelques croûtes. Un érythème est, de plus, présent, en région périanale.

Les examens complémentaires ne montrent ni Malassezia ni bactérie.

Les complications, bactérienne et fongique, sont contrôlées et la dermatose prurigineuse chronique idiopathique stabilisée.

Le kétoconazole est arrêté et la marbofloxacine est prolongée pour une semaine. La ciclosporine est, de nouveau, administrée tous les jours. Le reste du traitement demeure inchangé.

c) Amélioration des lésions et contrôle de la dermatose prurigineuse chronique idiopathique après 1 mois et demi

Le propriétaire note une amélioration des lésions.

L’examen clinique ne montre aucune anomalie.

A l’examen dermatologique, Colline présente de petites lésions érythémateuses et lichénifiées à la commissure des lèvres, ainsi que quelques petites croûtes sur le menton. Elle ne présente pas de lésion de la région périanale.

196 La dermatose prurigineuse chronique idiopathique est contrôlée de façon satisfaisante. Les lésions en région périanale ont disparu.

Le traitement est maintenu inchangé, seul le réhydratant cutané est supprimé (application difficile). L’objectif du suivi va être d’espacer progressivement l'administration de la ciclosporine sans provoquer une aggravation des lésions.

3. Evolution depuis 3 ans

A ce jour, le traitement au long court permet un contrôle satisfaisant de la dermatose prurigineuse chronique idiopathique, hormis quelques épisodes d’aggravation dus à des complications infectieuses, bactérienne ou à Malassezia, gérés par l’utilisation de marbofloxacine et de kétoconazole. Ces épisodes ont lieu en moyenne tous les trois mois et sont résolus en deux semaines environ. Le traitement à base de ciclosporine est administré à la dose de 5 mg/kg, par voie orale, deux jours sur trois. Colline est, actuellement, toujours suivie en consultation au CHEVAC de VetAgroSup.

Identité : Colline, chat européen, femelle, stérilisé, de 7 ans

Motif de consultation : dermatose prurigineuse chronique, localisée aux régions périlabiale et périanal, évoluant depuis 5 ans Historique de démodécie à Demodex gatoi, probablement secondaire à une corticothérapie, non responsable du prurit

Diagnostic : dermatose prurigineuse chronique idiopathique

Traitement : traitement immunosuppresseur, ciclosporine à la dose de 5 mg/kg, PO, deux jours sur trois

Durée de traitement immunosuppresseur : plus de 3 ans

Evolution et suivi: contrôle de la dermatose prurigineuse chronique idiopathique depuis 3 ans, avec quelques épisodes de complications infectieuses, bactérienne et à Malassezia.

197 Colline : lésions et résultat de raclages cutanés antérieurs ______

Photos 80 et 81 : Zones dépilées et érythémateuse comportant des croûtes en région périlabiale, observées lors de la première consultation à VetAgroSup.

(clichés unité dermatologique VetAgroSup)

Photo 82 : Demodex gatoi mis en évidence dans le produit d’un raclage cutané, lors du diagnostic de démodécie effectué 4 ans plus tôt. (cliché Docteur Pierre Relin) Photo 83 : Vue de profil de Demodex gatoi. (cliché Docteur Pierre Relin)

198 Cas clinique 5 : Minou, dermatose prurigineuse Démodécie localisée, responsable de prurit ______Avec l’aimable autorisation du Docteur Thierry Bord

I. Anamnèse et commémoratifs

Minou est un chat européen, mâle, non stérilisé, de 11 ans présenté en consultation (le 23 mai 2012) pour une dermatose prurigineuse évoluant depuis un mois et demi.

A. Commémoratifs

Minou vit seul en maison avec accès à l’extérieur. Plusieurs chats sont dans le voisinage et passent régulièrement dans le jardin. Il est traité contre les parasites externes avec du Frontline®, une fois par mois. Il est correctement vacciné.

B. Anamnèse

1. Apparition des premiers signes

Minou présente un prurit modéré, associé à une alopécique et de l’érythème, en face ventrale du cou et sur les faces latérales de l’abdomen, ainsi qu’une dermatite miliaire sur l’abdomen.

2. Premiers traitements

a) Première consultation

Le vétérinaire effectue des examens complémentaires. Le test à la lampe de Wood est négatif et la réalisation de cytologies de surface montre de très nombreux coques intracellulaires. Le traitement, mis en place pour traiter la prolifération bactérienne de surface, est le suivant : céfalexine (Cefaseptin®) à la dose de 15 mg/kg, par voie orale, deux fois par jour, pendant 15 jours.

199 Le traitement antiparasitaire externe est modifié, la sélamectine (Stronghold®), trois fois à 15 jours d’intervalle puis une fois par mois, est choisie et l’environnement est traité avec un insecticide composé d’une association de permethrine, de piperonyl butoxyde et de pyriproxyfène (Parastop®).

b) Seconde consultation

Trois jours après, Minou présente une aggravation du prurit qui devient sévère et intense. Une corticothérapie est mise en place à base de prednisolone (Dermipred®) à la dose de 1 mg/kg par jour, par voie orale, en deux prises, pendant 4 jours. Deux jours après, les propriétaires observent une nette diminution du prurit bien qu’il soit toujours présent. Le traitement antibiotique à base de céfalexine est prolongé jusqu’à guérison complète mais la corticothérapie est arrêtée.

c) Troisième consultation

Une semaine après l’arrêt de la corticothérapie, l’amélioration des lésions cutanées est très nette. Un érythème modéré persiste sur les faces latérales de l’abdomen, mais la dermatite miliaire est guérie ainsi que les lésions érosives du cou. Le traitement antibiotique est prolongé de 10 jours et le traitement contre les parasites externes (Stronghold®) est poursuivi. Un rappel de vaccination (CRPL) est effectué.

d) Quatrième consultation

Dix jours après, les propriétaires rapportent une persistance du prurit sans lésion associée. L’antibiothérapie a été arrêtée trois jours plus tôt. Un changement d’alimentation est proposé pour explorer l’hypothèse d’une hypersensibilité alimentaire à l’origine du prurit. Un régime à base d’hydrolysats est mis en place (DR21 Royal Canin®) pour une période de dix semaines.

Aucune diminution du prurit n’est notée et les propriétaires observent l’apparition de nouvelles lésions. Ceci motive une nouvelle consultation, après trois semaines d’alimentation hypoallergénique.

200 II. Consultation, un mois et demi après les premiers signes A. Examen clinique général

Minou est en bon état général. Il n’est pas déshydraté et sa température rectale est normale.

L’examen clinique ne montre aucune anomalie.

B. Examen dermatologique

L’examen dermatologique permet de mettre en évidence différentes lésions :

- des zones dépilées, érythémateuses, comportant de nombreuses croûtes, en régions lombaire et interscapulaire,

- un érythème anal sévère associé à des comédons et à une alopécie du périnée,

- des squames de l’ensemble du tronc.

C. Synthèse clinique et anamnestique

- Chat européen, mâle, non stérilisé, de 11 ans.

- Prurit cortico-sensible évoluant depuis un mois et demi.

- zones dépilées en régions lombaire, interscapulaire et périanale, avec érythème, croûtes et comédons.

- Squamosis sur l’ensemble du tronc.

- Traitement d’une prolifération bactérienne de surface avec amélioration transitoire du prurit.

- Absence de réponse à un régime à base d’hydrolysats de 3 semaines.

201

D. Hypothèses diagnostiques

Suite à cette évolution clinique, diverses hypothèses diagnostiques sont émises :

- Origine parasitaire : une démodécie voire une cheylétiellose ou une gale notoédrique

- Origine fongique : une dermatophytose ou une dermatite à Malassezia

- Origine bactérienne : un syndrome de prolifération bactérienne de surface

- Phénomène d’hypersensibilité : une dermatite par allergie aux piqûres de puces, une hypersensibilité alimentaire, ou une dermatose prurigineuse idiopathique.

E. Examens complémentaires

Des examens complémentaires sont réalisés :

- l’examen de nombreuses cytologies de surface ne met en évidence aucun coque ou Malassezia,

- l’examen direct des poils, épilés au niveau des régions périanale, interscapulaire et lombaire, met en évidence la présence de nombreux Demodex, identifiés comme des Demodex cati. Aucun autre élément figuré n’est mis en évidence.

F. Diagnostic

Le diagnostic est celui d’une démodécie à Demodex cati.

Il faut maintenant déterminer si la démodécie est ou n’est pas la cause du prurit et, ensuite, si la démodécie est primaire ou secondaire à la corticothérapie réalisée un mois et demi plus tôt.

202 G. Traitement

Le traitement proposé est le suivant :

- Traitement acaricide : milbémycine oxime (Interceptor®) à la dose de 1 mg/kg, par voie orale, une fois par jour, jusqu’à la visite de contrôle.

III. Suivi et évolution A. Evolution après un 1 mois et demi de traitement

Les propriétaires rapportent une aggravation des lésions. Les laboratoires étant, de plus, en rupture de stock pour l’Interceptor®, le traitement est modifié et l’acaricide choisi est la moxidectine (Cydectine® injectable Bovin) à la dose de 400 µg/kg, par voie orale, une fois par jour, jusqu’à la visite de contrôle.

B. Evolution après 2 mois de traitement

Aucune amélioration des lésions n’est observée. Les propriétaires rapportent un problème d’observance de la fréquence d’administration. Au lieu de recevoir de la moxidectine tous les jours, Minou n’est traité qu’un jour sur deux. Le traitement est prolongé à la bonne fréquence.

C. Evolution après 4 mois de traitement

Les lésions ne s’améliorent pas. Les propriétaires rapportent un nouveau problème d’observance du traitement, qui concerne, cette fois, la posologie qui n’a pas été respectée. La moxidectine a été sous-dosée par erreur (environ 200 µg/kg par jour) depuis le changement d’acaricide. Une fois ce problème réglé, Minou a reçu la bonne dose pendant 2 semaines, puis le traitement a été interrompu, une semaine avant la consultation.

Bien que les problèmes d’observance du traitement soient à considérer dans la persistance du prurit et des lésions associées, une recherche d’une maladie concomitante est réalisée. Minou est testé positif au FIV responsable du syndrome d’immunodéficience acquis et négatif au FeLV responsable de la leucose féline.

203

Le traitement est adapté, la dose est augmentée, la fréquence et la voie d’administration sont modifiées : moxidectine à la dose de 600 µg/kg, par voie sous-cutanée, une fois par semaine, jusqu’au contrôle.

D. Evolution après 5 mois de traitement

Une très nette amélioration est notée. Les lésions ont disparu au niveau du cou et en régions périanale, abdominale et interscapulaire. Quelques croûtes sèches sont observées en région lombaire droite. L’examen direct de poils épilés ne met en évidence aucun Demodex.

Le traitement à l’aide de moxidectine, à la dose de 600 µg/kg, par voie sous-cutanée, une fois par semaine, est poursuivi jusqu’à la visite de suivante.

E. Evolution après 6 mois de traitement

Depuis deux semaines, Minou présente de nouveau du prurit. Les deux premières injections hebdomadaires de moxidectine n’ont pas été faites correctement : les propriétaires signalent la présence du produit sur le pelage de Minou. Les deux administrations suivantes, correctement réalisées, calment le prurit les trois jours qui suivent l’injection, celui-ci récidivant après.

Minou présente de nouvelles lésions : des comédons sur le menton, des croûtes en région lombaire et de l’érythème, des excoriations et des ulcérations au niveau de l’abdomen et de la zone axillaire antérieure gauche. La réalisation de trichogrammes et de raclages cutanés met en évidence de nombreux Demodex.

Le traitement acaricide est poursuivi. Un traitement antibiotique à base de céfovécine (Convenia®), à la dose de 8 mg/kg, par voie sous-cutanée, tous les 14 jours, pendant 1 mois, est mis en place.

204 F. Evolution après 7 mois de traitement

Aucune amélioration des lésions n’est notée. Des comédons sont toujours observés au niveau du menton, associés à de multiples zones érosives et ulcérées sur le thorax et sur l’abdomen. Les trichogrammes réalisés mettent en évidence de très nombreux Demodex.

Le traitement acaricide est maintenu mais la fréquence d’administration est augmentée. Minou reçoit donc la dose de 600 µg/kg, par voie sous-cutanée, deux fois par semaine, jusqu’au contrôle prévu un mois plus tard. Minou est actuellement toujours suivi par son vétérinaire traitant.

205

Identité : Minou, chat européen, mâle, non stérilisé, de 11 ans

Motif de consultation : dermatose prurigineuse localisée à la tête et à l’abdomen évoluant depuis 1 mois et demi

Diagnostic : démodécie à Demodex cati

Cause sous-jacente potentielle : aucune

Traitement : traitement acaricide, moxidectine à la dose de 600 μg/kg, SC, une fois par semaine

Durée de traitement acaricide : 7 mois

Evolution : disparition des Demodex, nette amélioration des lésions et disparition du prurit après 5 mois de traitement. Rechute suite à des problèmes d’observance

Conclusion : démodécie primaire responsable du prurit

Suivi : 7 mois. Rechute après 5 mois de traitement. Toujours suivi actuellement.

Photo 84 : Minou. (cliché Docteur Thierry Bord)

206 Minou 1/2 : Première consultation - lésions ______

Photo 86 : Lésion dépilée et érosive au niveau du tronc. (cliché Docteur Thierry Bord)

Photo 87 : Squamosis sur l’ensemble du tronc. (cliché Docteur Thierry Bord) Photo 85 : Aspect général de Minou. (cliché Docteur Thierry Bord)

Photo 88 : Dépilations érythémateuses en zone périanale. (cliché Docteur Thierry Bord)

207 Minou 2/2 : Première consultation- résultats des trichogrammes ______

Photo 89 : Aspect général de l’observation du produit d’un trichogramme au microscope. Présence de trois Demodex. (cliché Docteur Thierry Bord)

Photo 91 : Demodex identifié comme Demodex cati. (cliché Docteur Thierry Bord)

Photo 90 : Produit d’un trichogramme observé à plus fort grossissement. Présence de deux Demodex. (cliché Docteur Thierry Bord)

208 Discussion ______

Synthèse des cas cliniques

Tableau 17 : Récapitulatif des cinq cas cliniques.

209 Légendes du Tableau 17 : Type de lésions : Cer = Cérumen, Com = Comédon, Dep = Dépilation, E ker = Etat kératoséborréhique, Er = Erythème, Exc = Excoriations, Li = Lichénifiaction, Pap = Papule, Sq = Squames, Ul = Ulcération Examens complémentaires : BC = Biopsie cutanée, CS = Cytologie de surface, EDC = Examen direct du cérumen, LW = Examen à la lampe de Wood, RC = Raclage cutané, Tr = Trichogramme Diagnostic : BOG = Prolifération bactérienne de surface, MOG = prolifération fongique de surface (Malassezia) Traitement : AB = Antibiothérapie, PO = par voie orale, SC = par voie sous-cutanée, SID = une fois par jour, Tt = Traitement topique Maladies concomitantes ou traitement ultérieur : Cth = Corticothérapie, Dpic = Dermatose prurigineuse idiopathique chronique

Bref descriptif de l’identité des chats

Quatre des chats concernés sont des Européens à poils courts et le dernier est un chat de race, un Chartreux. Ce sont quatre mâles, dont trois sont stérilisés, et une femelle non stérilisée. Les chats ont respectivement 11 ans, 10 ans, 7 ans pour deux individus et 4 ans et demi. Tout comme dans les cas publiés, il ne semble pas y avoir de prédisposition liée à la race, à l’âge ou au sexe.

Clinique

Ces cas cliniques sont représentatifs de la diversité clinique de la démodécie féline. Les cinq chats présentent des tableaux cliniques différents, illustrant l’absence d’homogénéité dans l’expression de la maladie.

Topographie lésionnelle

La démodécie est généralisée dans un cas et localisée dans les quatre autres. Lorsqu’elle est localisée, les régions touchées sont diverses : - la tête et le cou et, plus précisément, les régions périoculaire, péribuccale et périauriculaire, ce qui est classiquement rapporté dans les cas publiés, - mais aussi, les régions interscapulaire, lombaire et périanale.

Nature des lésions

Tout comme dans les cas décrits dans la littérature, les lésions sont variées et ne sont pas pathognomoniques.

210 Un érythème est observé à chaque fois, associé, suivant les cas, avec des croûtes (4), une dépilation (4), des comédons (2), des squames (2), des ulcérations (1), des excoriations (1), des papules (1), une lichénification (2) et un état kératoséborrhéique (2).

Les formes d’expression du prurit sont diverses : il peut être absent (1), évoluer de façon cyclique au cours de crises où il est intense, alternant avec des périodes où il est quasiment nul (3) et, enfin, il peut être constant mais d’intensité variable, modéré à intense (1).

Cette diversité est retrouvée dans les cas publiés. Ces observations confirment que les vétérinaires praticiens doivent inclure la démodécie dans leur diagnostic différentiel quelque soit la dermatose à laquelle ils font face.

Diagnostic

Le diagnostic a été effectué grâce à l’examen du produit de raclages cutanés multiples dans trois cas, l’examen direct de poils lors de la réalisation de trichogrammes dans un cas et par l’examen histopathologique de biopsies cutanées dans le dernier cas. Demodex cati a été identifié dans trois des cas présentés et Demodex gatoi dans un autre. Les parasites du dernier cas n’ont pas été identifiés. L’identification de l’espèce de Demodex, dans la pratique de tous les jours, n’est pas obligatoire car le traitement, pour l’instant, ne dépend pas de l’espèce incriminée. Néanmoins, pour une meilleure connaissance de la démodécie féline et des particularités inhérentes aux différentes espèces de Demodex impliquées, il faudrait, dans l’idéal, préciser dans chaque cas, l’espèce de Demodex en cause. Nous n’avons observé aucun lien entre les signes cliniques observés et l’espèce de Demodex impliquée.

Complications

Des complications infectieuses secondaires, de type proliférations bactériennes ou fongiques de surface, ont été observées dans trois cas.

Démodécie et prurit

Le lien entre démodécie et prurit, lorsqu’il est présent, est différent en fonction des cas : - la démodécie est responsable du prurit observé dans un seul cas sur quatre,

211 - elle est à l’origine d’une aggravation d’un prurit préexistant dans un cas, la cause primaire n’étant pas identifiée, - elle n’est pas responsable du prurit dans les deux derniers cas, la cause primaire étant une dermatose prurigineuse idiopathique chronique dans un cas et non identifiée dans l’autre.

Existence d’une maladie concomitante ou d’un traitement immunosuppresseur

Une dermatose prurigineuse idiopathique chronique a été diagnostiquée dans un cas. Aucune autre maladie sous-jacente n’a été mise en évidence. Seul un des chats a été testé positif au FIV, responsable du syndrome d’immunodéficience acquise mais, à cause de la large répartition de cette maladie dans la population féline, nous ne la considérons pas comme une cause favorisante.

Trois des chats (dont celui présentant la dermatose prurigineuse idiopathique chronique) ont été traités à l’aide de corticoïdes avant que la démodécie ne soit diagnostiquée. Tout comme dans les cas publiés, l’existence de thérapeutiques immunosuppressives ultérieures semble être une cause favorisante au développement d’une démodécie clinique. Bien sûr, cela est à nuancer, car de très nombreux chats sont traités à base de corticoïdes et très peu d’entre eux présentent une démodécie.

Traitement

Les milbémycines ont été choisies comme option thérapeutique dans nos cas : la moxidectine dans quatre cas et la milbémycine oxime dans un cas. C’est un choix intéressant car très peu de cas publiés y font référence.

Les différents traitements proposés et leur efficacité ont été les suivants : - la moxidectine à la dose de 400 μg/kg, par voie orale, une fois par jour, jusqu’à la négativation parasitaire, contrôlée par des raclages cutanés, deux mois de suite. Ce traitement a été utilisé avec succès dans trois cas, la guérison étant constatée en 4 à 6 semaines, sans rechute. - la moxidectine a aussi été utilisée à la dose de 400 μg/kg, par voie orale, une fois par jour dans un autre cas, mais suite à de nombreux problèmes d’observance du

212 traitement par les propriétaires, la dose, la fréquence et la voie d’administration ont été modifiées : 600 μg/kg, par voie sous-cutanée, deux fois par semaine, et ce, depuis 3 mois. Ce second traitement ne semble pas efficace pour l’instant. Le chat est toujours suivi actuellement. - milbémycine oxime, à la dose de 1 mg/kg, par voie orale, une fois par jour. Ce traitement a été utilisé avec succès dans un cas, la guérison étant constatée au bout de 2 mois, sans rechute.

La moxidectine et la milbémycine oxime sont efficaces dans le traitement de la démodécie féline dans quatre de nos cinq cas. Le dernier cas, toujours traité contre la démodécie actuellement, ne remet pas en question cette efficacité mais traduit plutôt l’importance de l’observance du traitement par les propriétaires ainsi que l’importance de la fréquence d’administration. Tout comme ce qui a été observé dans les cas publiés, une administration quotidienne semble nécessaire à l’efficacité du traitement et, ce, quelle que soit la molécule utilisée.

En conclusion, nous proposons donc les milbémycines comme une option thérapeutique valable lors de démodécie féline, à la dose de 400 µg/kg, par voie orale, une fois par jour pour la moxidectine et à la dose de 1 mg/kg, par voie orale, une fois par jour pour la milbémycine oxime.

213 214 CONCLUSION

La démodécie féline est une dermatose parasitaire probablement sous-diagnostiquée, encore méconnue de la plupart des praticiens vétérinaires. C’est une dermatose rare, infectieuse, contagieuse dans certains cas, d’expression clinique polymorphe, spécifique au chat et non zoonotique due à plusieurs espèces de Demodex : Demodex cati, Demodex gatoi et une troisième espèce, dont l’existence reste à prouver, Demodex species. La démodécie féline est une dermatose alopéciante et prurigineuse : les signes cliniques observés ne sont pas pathognomoniques. Le diagnostic s’effectue grâce à l’anamnèse, la clinique, un diagnostic différentiel rigoureux et la réalisation d’examens complémentaires, le plus pertinent étant l’examen du produit de raclages cutanés. Le traitement, bien qu’ayant beaucoup évolué depuis 30 ans, ne fait pas encore l’objet d’un consensus. La pathogénie de la démodécie féline est inconnue. Des travaux supplémentaires ainsi que la publication d’autres cas sont nécessaires à une meilleure compréhension de cette maladie. La pathogénie de la démodécie humaine et de la démodécie canine, plus étudiées, peuvent fournir des pistes de réflexion. En effet, les Demodex étant des parasites d’un genre très particulier et restant très comparables morphologiquement entre les différentes espèces, des parallèles peuvent être proposés et explorés.

215

216 Bibliographie

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TROUVE Coline

Actualité sur la démodécie féline et présentation de cas cliniques

Thèse d’Etat de Doctorat Vétérinaire : Lyon, le 19 février 2013

RESUME :

La démodécie féline est une dermatose parasitaire probablement sous-diagnostiquée, encore méconnue de la plupart des praticiens vétérinaires. C’est une dermatose rare infectieuse, contagieuse dans certains cas, d’expression clinique polymorphe, spécifique au chat et non zoonotique due à plusieurs espèces de Demodex. La démodécie féline est une dermatose alopéciante et prurigineuse : les signes cliniques observés ne sont pas pathognomoniques. Le diagnostic s’effectue grâce à l’anamnèse, la clinique, un diagnostic différentiel rigoureux et la réalisation d’examens complémentaires, le plus pertinent étant l’examen du produit de raclages cutanés. Le traitement, bien qu’ayant beaucoup évolué depuis 30 ans, ne fait pas encore l’objet d’un consensus. La pathogénie de la démodécie féline est encore inconnue à ce jour. L’étude de la pathogénie de la démodécie canine et de la démodécie humaine, plus étudiées, peut fournir des pistes de réflexion.

MOTS CLES : - Dermatologie - Parasitologie - Chat domestique - Démodécie - Demodex

JURY : Président : Monsieur le Professeur Michel FAURE

1er Assesseur : Monsieur le Professeur Didier PIN 2ème Assesseur : Monsieur le Professeur Gilles BOURDOISEAU

DATE DE SOUTENANCE : 19 février 2013

ADRESSE DE L’AUTEUR : 6, passage du père cohard 38240 MEYLAN

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