Le Texte Intégral De La Décision
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Décision n° 18-DCC-65 du 27 avril 2018 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Zormat, Les Chênes et Puech Eco par la société Carrefour Supermarchés France L’Autorité de la concurrence, Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 15 mars 2018, relatif à la prise de contrôle exclusif des sociétés Zormat, Les Chênes et Puech Eco par la société Carrefour Supermarchés France, et formalisée par un protocole de cession en date du 1er février 2018 ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les engagements présentés les 15 mars et 18 avril 2018 par la partie notifiante ; Vu les éléments complémentaires transmis par la partie notifiante au cours de l’instruction ; Adopte la décision suivante : I. Les entreprises concernées et l’opération 1. La société Carrefour Supermarchés France SAS (ci-après « CSF ») est une filiale à 100 % du groupe Carrefour, lequel est actif dans le secteur du commerce de détail à dominante alimentaire, ainsi que dans la distribution en gros à dominante alimentaire. En France, le groupe Carrefour exploite des hypermarchés, supermarchés, commerces de proximité, cash and carry, sous les enseignes Carrefour, Carrefour Market, Carrefour City, Carrefour Contact, Carrefour Express, Carrefour Montagne, Huit à 8, Marché Plus, Proxi et Promocash. Le groupe Carrefour dispose par ailleurs d’une activité de drive et exploite plusieurs sites marchands sur internet : www.carrefour.fr, www.ooshop.carrefour.fr et www.rueducommerce.fr. Il conclut également avec des sociétés exploitant des magasins de commerce de détail à dominante alimentaire des contrats d’enseigne et d’approvisionnement qui leur permettent d’exploiter leurs points de vente sous l’une des enseignes du groupe Carrefour, de s’approvisionner auprès de ses centrales d’achat, de bénéficier de fournisseurs référencés, de ses conditions d’achat et de services offerts par le groupe Carrefour. 2. Les sociétés cibles sont constituées par trois sociétés : Zormat SAS, Les Chênes SAS et sa filiale Puech Eco SAS, actuellement contrôlées par[confidentiel]. 3. Zormat SAS est propriétaire d’un fonds de commerce de distribution à dominante alimentaire avec station-service, situé à Réquista (12) (ci-après, « le magasin de Réquista »). Le magasin de Réquista est exploité depuis 2014 par la société CVP Distribution1 en vertu d’un contrat de location-gérance conclu avec la société Zormat et d’un contrat d’enseigne Carrefour Market conclu avec le groupe Carrefour. 4. Ce contrat de location-gérance n’est pas de nature à conférer à la société CVP Distribution le contrôle du magasin de Réquista sur une base contractuelle. En effet, « […] Outre le transfert du contrôle de la direction et des ressources, ces contrats doivent se caractériser par une durée extrêmement longue (habituellement sans possibilité de dénonciation anticipée par la partie octroyant les droits contractuels). Seul ce type de contrat peut induire une modification structurelle du marché. Des exemples de tels contrats sont les contrats organisationnels conclus en vertu du droit national des sociétés ou d’autres types de contrats revêtant par exemple la forme de convention de location-gérance des activités, par lesquels l'acquéreur acquiert le contrôle de la gestion et des ressources en dépit du fait que les droits de propriété ou les actions ne sont pas transférés » (soulignement ajouté)2. L’Autorité de la concurrence a ainsi considéré qu’un contrat de location-gérance conclu pour une durée de 5 ans, tacitement renouvelable par période annuelle, était de nature à induire une modification structurelle du marché3. La Commission européenne a, par ailleurs, indiqué qu’« une durée déterminée n'exclut pas la possibilité d'une modification durable du contrôle lorsque [les] accords sont renouvelables »4. 5. Au cas d’espèce, le contrat de location-gérance conclu en 2014 entre les sociétés Zormat et CVP Distribution fixe la durée initiale de la relation contractuelle à un an. Si ce contrat est reconductible pour une durée indéterminée, il prévoit, par ailleurs, la possibilité pour les parties d’y mettre fin avec un préavis de trois mois à l’issue de la période initiale. La durée limitée de la relation contractuelle, sa faculté de dénonciation et la brièveté de son délai de préavis excluent une modification structurelle du marché de nature à conférer à la société CVP Distribution le contrôle du magasin de Réquista sur une base contractuelle, lequel est donc contrôlé par son propriétaire, la société Zormat. 6. Les Chênes SAS est une société holding qui n’a pour objet que le contrôle de la société Puech Eco SAS, laquelle exploite un fonds de commerce de distribution à dominante alimentaire avec station-service, sous enseigne Carrefour Market, situé à Baraqueville (12) (ci-après, « le magasin de Baraqueville »). 7. L’opération, formalisée par un protocole de cession en date du 1er février 2018, consiste en l’acquisition par CSF de 99,99 % du capital de la société Zormat et de 81,60 % du capital de la société Les Chênes5. En ce qu’elle entraîne l’acquisition du contrôle exclusif des sociétés cibles par CSF, l’opération constitue une opération de concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce. 1 La société CVP Distribution est contrôlée par [confidentiel]. 2 Paragraphe 18 de la Communication consolidée sur la compétence de la Commission en vertu du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises. 3 Voir la décision de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-46 du 28 septembre 2009 relative à la prise en location-gérance par la société Distribution Casino France d’un hypermarché détenu par la société Doremi. 4 Paragraphe 22 de la Communication consolidée de la Commission européenne précitée. 5 Le protocole de cession prévoit également l’acquisition de 0,08 % du capital de la société Puech Eco. 2 8. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires hors taxes total sur le plan mondial de plus de 75 millions d’euros (groupe Carrefour : 76 milliards d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2016 ; sociétés cibles : 30,3 millions d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2017). Chacune de ces entreprises a réalisé en France un chiffre d’affaires supérieur à 15 millions d’euros dans le secteur du commerce de détail (groupe Carrefour : 35,9 milliards d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2016 ; sociétés cibles : 30,3 millions d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2017). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne relève pas de la compétence de l’Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle relatifs au commerce de détail mentionnés au II de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique. II. Délimitation des marchés pertinents 9. Selon la pratique constante des autorités de concurrence, deux catégories de marchés peuvent 6 être délimitées dans le secteur de la distribution à dominante alimentaire . Il s’agit, d’une part, des marchés « aval », de dimension locale, qui mettent en présence les entreprises de commerce de détail et les consommateurs pour la vente de biens de consommation et, d’autre part, des marchés « amont » de l’approvisionnement des entreprises de commerce de détail en biens de consommation courante, de dimension nationale. A. MARCHES AMONT DE L’APPROVISIONNEMENT 10. S’agissant des marchés de l’approvisionnement en produits à dominante alimentaire, la Commission européenne7 et les autorités nationales de concurrence8 ont retenu l’existence de marchés de dimension nationale par grands groupes de produits. 11. La pratique décisionnelle européenne et nationale a également envisagé une segmentation de ces marchés en fonction des canaux de distribution (grandes et moyennes surfaces ou « GMS » et restauration hors domicile ou « RHD »)9. 12. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de la présente opération. 6 Voir, par exemple, les décisions de la Commission européenne M.946 Intermarché/Spar du 30 juin 1997, M.991 Promodès/Casino du 30 octobre 1997 et M.1684 Carrefour/Promodès du 25 janvier 2000. Voir également l’arrêté ministériel du 5 juillet 2000 dans l’opération Carrefour/Promodès,les avis du Conseil de la concurrence n° 97-A-14 du 1er juillet 1997, dans l’affaire Carrefour/Cora, n° 98-A-06 du 5 mai 1998, dans l’affaire Casino Franprix/Leader Price, et n° 00-A-06 du 3 mai 2000, dans l’affaire Carrefour/Promodès. Voir également les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 13-DCC-90 du 11 juillet 2013, relative à la prise de contrôle exclusif de la société Monoprix par la société Casino Guichard-Perrachon et n° 14-DCC-173 du 21 novembre 2014 relative à la prise contrôle exclusif de la société Dia France SAS par la société Carrefour France SAS. 7 Voir, par exemple, la décision M.1684 précitée. 8 Lettres du ministre chargé de l’économie C2008-32 Amidis SAGC du 9 juillet 2008, C2007-172 Carrefour Plane Plamidis, du 13 février 2008, C2007-154 Système U Vergali du 3 décembre 2007, C2007-05 Carrefour Sofodis du 26 mars 2007, et C2006-15 Amidis Hamon du 14 avril 2006. 9 Voir, par exemple, la décision n° 13-DCC-90 précitée. 3 B. MARCHES AVAL DE LA DISTRIBUTION 1. LES MARCHES DE SERVICE 13. S’agissant des marchés de la vente au détail des produits à dominante alimentaire, les autorités de concurrence10 ont distingué six catégories de commerce en utilisant plusieurs critères, notamment la taille des magasins, leurs techniques de vente, leur accessibilité, la nature du service rendu et l’ampleur des gammes de produits proposés : (i) les hypermarchés, (ii) les supermarchés, (iii) le commerce spécialisé, (iv) le petit commerce de détail, (v) les maxi discompteurs et (vi) la vente par correspondance.