Bordeaux Pendant L'occupation
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Cours du 22 octobre 2015 BORDEAUX PENDANT L’OCCUPATION I° – La débacle Juin 1940: l'exode vers Bordeaux : alors que l’armée allemande progresse, les autorités françaises battent en retraite. Bordeaux paraît alors hors de portée de la Wehrmacht. En quelques heures, la ville, sous la poussée de l’exode, est envahie et la cohue s’installe. Ministres, parlementaires, fonctionnaires, entreprises... et des centaines de milliers de réfugiés déferlent. En quelques semaines, la population bordelaise passe de 300 000 à 1 million d’habitants. La ville se transforme en une cohue indescriptible. Des milliers de véhicules, de voitures à cheval, de charrettes à bras et de bicyclettes, surchargés de valises, de cartons, de baluchons mal ficelés surmontés de matelas fixés tant bien que mal pour protéger des mitraillages, traversent l’unique pont de Bordeaux. Bordeaux. Le Pont de Pierre. Juin 1940. Les réfugiés envahissent les rues, le port ou stationnent 400 bateaux et bivouaquent dans les parcs et sur les trottoirs. Plus d’un million de repas sont distribués quotidiennement. Mais la pénurie menace, l’eau est rationnée, les hébergements, même de fortune, font défaut. La débâcle frappe également les entreprises : on trouve les 4 000 employés de Peugeot de Sochaux, le personnel de la banque de France avec les réserves en devises, or, titres et valeurs… 1 Les réfugiés attendant à la gare Saint-Jean 2 Bordeaux, capitale de la France : à partir du 14 juin, le gouvernement et l’appareil d’état arrivent de Touraine, de moins en moins sûre. Après la Commune en 1870-1871 et 1914, Bordeaux s’improvise capitale de la France pour la 3 e fois de son histoire. Plus de 1 100 fonctionnaires s’établissent dans la cité où 300 bureaux sont réquisitionnés. Les rues bordelaises envahies de voitures, place de la Comédie. Le président de la République, Albert Lebrun , s’installe dans l’hôtel de préfecture et le président du Conseil, Paul Reynaud , ministre des Affaires étrangères , de la Défense nationale et de la Guerre , dans l’hôtel du commandant de la XVIII e région militaire, deux bâtiments situés rue Vital-Carles, « seule voie calme, barrée par la police ». Albert LEBRUN 17bis, rue Vital Carles, Hotel du préfet. Logement du Président de la République, Albert Lebrun. Lieu des conseils des Ministres. 3 29, rue Vital Carles, Logement de Paul Reynaud, Président du Conseil, Ministre des affaires étrangères, de la Défense nationale et de la Guerre à l'hôtel du Commandant de la 18ème région militaire. Le Vice-Président du Conseil , Chautemps et le secrétaire d'Etat aux Réfugiés, Robert Schumann, sont logés à l'Hotel de Gascogne, rue de Condé. 4 L'Amiral Darlan à l'Hotel de la Marine, 9, Allée de Tourny L'Hotel Splendid, place des Quinconces (allée d'Orléans) est la résidence de nombreux hommes politiques. On y trouve ainsi le Ministre des Finances, Bouthilier l'Ancien Président du Conseil, Edouard Daladier, Le Président du Sénat Jules Jeanneney. Georges Mandel, Ministre de l'Interieur, rue Esprit des lois, locaux administratifs de la Préfecture 5 Plusieurs Ministres à l'Hotel de Sèze, Allée de Tourny Pierre Laval à l'Hotel de Ville Les autres ministères sont hébergés dans divers hôtels particuliers du centre-ville tandis que la Chambre des députés et le Sénat sont éloignés dans des immeubles périphériques et inadaptés. Les gouvernements en exil de Pologne, du Luxembourg et de Belgique trouvent refuge dans le département. Les ambassades et les légations étrangères font escale dans 70 châteaux vinicoles du Bordelais à l’exception de l’Ambassadeur anglais qui a négocié de résider dans son Consulat bordelais. D’interminables files d’attente se forment devant les consulats des pays neutres (Etats-Unis, Espagne, Portugal) et de Grande-Bretagne, lesquels, de toute manière, ne délivrent les visas qu’au compte-gouttes. 6 La capitulation ou l’armistice ? Le sort de la France se joue. Les ministres présents, plus le Général Maxime Weygand qui participe à leurs débats, s’affrontent, fatigués, épuisés nerveusement. Georges Mandel, le ministre de l’intérieur , formule simplement l’opposition. « Le conseil est divisé, il y en a ici qui veulent se battre et d’autres qui ne le veulent pas ». Deux lignes, incarnées par des clans et des hommes, s’opposent sur l’ « issue » de la guerre : la capitulation militaire sur le sol français avec la poursuite de la lutte ou l’armistice. Le Général Weygand Georges Mandel Ceux qui veulent résister sont faibles. Pour entraîner, proposer une stratégie et l’emporter, personne ne s’impose. Albert Lebrun , le Président de la république à l’autorité personnelle quasi nulle, terne et craintif, n’exerce que des pouvoirs formels. De gaulle écrira cruellement que « comme chef d’état, il ne lui a manqué que 2 choses : qu’il fut un chef et qu’il y eut un état ». Paul Reynaud , le Président du Conseil, brillant avocat, remarqué avant la guerre pour son courage, son indépendance d’esprit et sa lucidité, excellent Ministre des finances de Daladier en 1938, dont la nomination a soulevé un vrai espoir en mars 1940, s’est englué. Conseil des ministres du 16 juin 1940 : dans l'après-midi du 16 juin, Paul Reynaud réunit le gouvernement pour lui soumettre le projet d'union des nations française et britannique , conçu par Jean Monnet et que le gouvernement de Churchill vient d'accepter à Londres (où se trouve alors le général de Gaulle). Mais il est refusé par une majorité des présents, et à la place est acceptée la proposition de Camille Chautemps consistant à demander à l'Allemagne ses conditions pour un armistice. Les ministres se divisent alors en une dizaine de partisans de la poursuite de la guerre (Paul Reynaud, Georges Mandel, César Campinchi, Louis Marin...), environ sept fermes partisans de l'armistice (Philippe Pétain, Yves Bouthillier, Jean Prouvost, Jean Ybarnegaray...), et des indécis plutôt marqués par le climat d'effondrement. 7 Jean Monnet Lorsque Churchill est nommé premier ministre du Royaume-Uni le 10 mai 1940, Jean Monnet arrive à le convaincre, dans une note intitulée Anglo-French unity , de l'intérêt d'une union franco-britannique immédiate de la France et du Royaume-Uni avec un seul Parlement et une seule armée, pour être plus forts face à l'Allemagne. De Gaulle , qu’un séjour de quelques heures à Londres a fortifiée dans sa résolution de continuer la lutte, revient avec cette proposition inouïe de traité de fusion franco-britannique en un seul pays, préparée par Monnet et accepté par Churchill , pour apprendre au soir, à l’aérodrome de Bordeaux-Mérignac, que Paul Reynaud avait, dans l'intervalle, donné sa démission et que « le président Lebrun avait chargé le maréchal Pétain de former le gouvernement. Comprenant alors que la capitulation est certaine, de Gaulle décide aussitôt de partir de nouveau pour Londres dès le lendemain matin. Il s'envole le 17 JUIN à 9 h, accompagné du général Spears sur l'avion britannique qui l’avait transporté la veille. Formation du gouvernement Pétain le 16 juin 1940. Camille Chautemps Pétain Paul Baudouin Pierre Laval 8 Pétain sollicite Marquet pour l'Intérieur et Laval à la Justice. Ce dernier exige les Affaires étrangères et refuse le portefeuille qui lui est proposé. Conseillé par François Charles-Roux, alors secrétaire général des Affaires étrangères, soutenu par le général Weygand et le président de la République Albert Lebrun, Pétain ne cède pas, entraînant le retrait de Laval, suivi de celui de Marquet par solidarité. Après la signature de l'armistice, Alibert convaincra Pétain de la nécessité de s'appuyer sur Laval, et les deux hommes intègreront le gouvernement. Composition initiale du gouvernement • Président du Conseil des ministres : Philippe Pétain • Ministre d'État, vice-président du Conseil des ministres : Camille Chautemps (PRS) • Ministres o Garde des Sceaux, ministre de la Justice : Charles Frémicourt o Ministre de la Défense nationale : général Maxime Weygand o Ministre de la Guerre : général Louis Colson o Ministre de la Marine marchande et militaire : amiral François Darlan o Ministre de l'Air : général Bertrand Pujo o Ministre des Affaires étrangères : Paul Baudouin o Ministre de l'Intérieur : Charles Pomaret (USR) o Ministre des Finances et du Commerce : Yves Bouthillier o Ministre des Colonies : Albert Rivière (SFIO) o Ministre de l'Éducation nationale : Albert Rivaud o Ministre des Travaux Publics et de l'Information : Ludovic-Oscar Frossard o Ministre de l'Agriculture et du Ravitaillement : Albert Chichery (PRS) o Ministre du Travail et de la Santé publique : André Février (SFIO) o Ministre des Anciens combattants et de la Famille française : Jean Ybarnegaray (PSF) • Sous-Secrétaires d'État o Sous-secrétaire d'État à la Présidence du Conseil des ministres : Raphaël Alibert o Sous-secrétaire d'État aux Réfugiés : Robert Schuman (PDP) Remaniement du 23 juin 1940 • Ministre d'État : Adrien Marquet jusqu'au 27 juin • Second Ministre d'État, vice-président du Conseil des ministres : Pierre Laval Remaniement du 27 juin 1940 • Ministre de l'Intérieur : Adrien Marquet (qui remplace Charles Pomaret) • Ministre du Travail : Charles Pomaret (qui remplace André Février) • Ministre des Transmissions : André Février (poste nouvellement créé) Fin du gouvernement Le 10 juillet 1940, l'Assemblée nationale réunie à Vichy vote les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Le Régime de Vichy commence alors. Discours du 17 juin 1940 du maréchal Pétain prononcée à la radio française : « - Je fais à la France le don de ma personne » – « - il faut cesser le combat » 9 Le 17 juin, Mandel est arrêté à Bordeaux au « Chapon Fin ». Appel du 18 juin 1940 : l'appel à la résistance du général de Gaulle Le 18 juin 1940 , le général de Gaulle lance son célèbre appel à la Résistance sur les ondes de la BBC depuis Londres : refusant la capitulation de la France face à l’ennemi nazi, le général de Gaulle rejoint Londres afin d’y poursuivre le combat.