Hors Limites
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passages Hors limites Frontières mouvantes, perméables, invisibles L’art de Suisse à Kochi : à la Biennale indienne L’âge de la maturité en Afrique du sud : le projet de mémoire de Mats Staub Opération Iceberg : une initiative en faveur des jeunes musiciens LE MAGAZINE CULTUREL DE PRO HELVETIA, NO 64, 1/2015 FRONTIÈRES 2 LISIÈRES 3 Frontières mouvantes, perméables, invisibles Le récit en images de Matthias Gnehm nous emporte en Chine. Sur la base de ses propres expériences dans l’Empire du Milieu, l’artiste zurichois nous raconte une histoire qui rappelle les diverses façons dont peuvent être vécues les frontières : celles, concrètes, que tracent une terre et une culture étrangères impliquant un ici et un ailleurs, mais aussi les autres, plus subtiles, séparant voir et être vu, image et texte, légalité et illégalité, humour et sérieux. Ce récit en images introduit ainsi une perspective supplémentaire dans ce dossier, une autre réflexion sur les frontières, sur la possibilité de les déplacer et sur leurs répercussions. 2 – 31 DOSSIER 32 HEURE LOCALE New Delhi : Le temps et le fleuve Hors limites Trois artistes suisses ont proposé un regard neuf à la Biennale de Matthias Gnehm a réalisé, tout exprès pour Passages, les illustrations qui Kochi-Muziris. accompagnent ce dossier. Né en 1970 à Zurich, cet artiste a fait des études par Rosalyn D’Mello d’architecture à l’École polytechnique fédérale et travaille depuis 1999 comme bédéiste et architecte indépendant. Parues en allemand et en français, ses 34 Johannesburg : Une année décisive œuvres ont fait l’objet de plusieurs expositions. En 2014, les éditions Hochparterre Pour son projet de mémoire 21, ont publié son huitième album de B. D., « Die kopierte Stadt » (la ville copiée), l’artiste suisse Mats Staub a dont l’action se déroule à Zurich et à Kunming. Les recherches effectuées pour ce interviewé de nombreuses personnes projet l’ont mené jusqu’à la ville interdite de Pékin. L’histoire créée pour Passages sur leur majorité. est une transposition ludique des expériences qu’il y a faites. par Bongani Kona www.matthiasgnehm.ch 36 REPORTAGE La pointe de l’ Iceberg 8 Les lisières, lieux de rencontre 22 De si belles subtilités ! Un regard sur la première année Sur la coexistence paisible des Sur l’intraduisibilité supposée d’existence du programme de communautés par-delà les fron- du dialecte suisse alémanique soutien aux jeunes musiciens pop. tières culturelles et religieuses. et les expériences personnelles par Roderic Mounir (texte) Richard Sennett s’entretient avec de l’écrivain en franchisseur de et Carine Roth (photos) Anne McElvoy frontières linguistiques. par Pedro Lenz 40 ACTUALITÉS PRO HELVETIA 13 Premier rôle pour le spectateur La Quadriennale de Prague Les mises en scène de théâtre 26 Rock à géométrie variable Le Design Day à Bâle « passe-muraille » sont de plus en Le rock et la pop sont devenus Un nouveau blog artistique plus fréquentes. Quelle conséquence efficaces, ils écrivent ainsi une La Biennale de Venise pour le spectateur ? page de la réalité économique et par Alexandre Demidoff sociale de notre temps. 42 PARTENAIRE par Christoph Fellmann Le livre comme paysage 18 Libre et léger comme l’oiseau par Elisabeth Jobin Le simulateur de vol Birdly permet 29 Du labo à la scène une nouvelle forme de divertisse- Un regard vers l’Angleterre où 43 CARTE BLANCHE ment interactif et immersif, ouvrant les frontières entre art et science Les coulisses du texte des possibilités inédites au cinéma. ont tendance à s’estomper. par Michèle Roten par John Gaudiosi par Roland Fischer 44 GALERIE 20 Le mythe Van Gogh 31 Culture et physique des particules Une plateforme pour les artistes Un essai sur la lutte de l’art Le CERN et Pro Helvetia attribuent Transmissions pour reculer les frontières. divers séjours d’atelier dans les par Emile Barret par Laurent Wolf domaines de la culture numérique. Un aperçu. 47 IMPRESSUM 21 De quelles frontières parle-t-on ? Bref retour sur le programme transfrontalier Viavai – Contrab- bando culturale Svizzera–Lombar- dia de Pro Helvetia. SOMMAIRE 6 Où plaçons-nous nos frontières ? Impossible d’échapper aux frontières, qu’on vienne de les dissoudre, qu’on les renforce ou qu’on les redessine. Mais de quelles frontières parlons-nous en fait ? Des frontières nationales qui, hautes parfois de plusieurs mètres, cisaillent un paysage ou qui, à l’instar de celles dans l’espace européen, peuvent se franchir sans qu’on s’en aperçoive ? Des limites de la croissance économique ou des limites de ce qui est pensable et faisable ? Dans son article pour Passages, le critique de théâtre Alexandre Demidoff mentionne, par exemple, l’abolition de plus en plus fréquente de la ligne invisible séparant la scène et l’espace des spectateurs. Le sociologue Richard Sennett plaide pour une plus grande perméabilité des frontières internes de la ville tandis qu’à la suite d’un test sur l’incroyable simulateur de vol Birdly, le journaliste John Gaudiosi, spécialiste des jeux vidéo, imagine que l’avenir du cinéma pourrait bien se trouver dans la technologie des jeux. Enfin, dans son essai, le critique d’art Laurent Wolf évoque les conflits suscités par l’opposition de l’art aux normes courantes et à l’ordre établi et se demande où placer les limites du tolérable. Dans les activités de la Fondation suisse pour la culture aussi, les frontières occupent une place importante. Ainsi Pro Helvetia contribue au franchissement des frontières linguis- tiques en accordant des subsides de traduction et en favorisant les échanges à l’intérieur du pays. La Fondation motive également les domaines de la culture numérique et du design à investir de nouveaux territoires. Quant à son encouragement interdisciplinaire, il associe les secteurs et les disciplines. Et bien entendu, conformément à sa mission, elle fait connaître l’art et la culture de Suisse dans le monde entier et s’engage en faveur d’échanges culturels transnationaux. En vérité, le champ thématique choisi par Passages pour ce numéro est sans limites. Que les quelques sujets ici mis en lumière puissent inspirer de nouvelles conversations et discussions ! Alexandra von Arx Rédactrice en chef de Passages ÉDITORIAL 7 e sourire facile, Richard Sennett a quelque chose d’un Ces frontières des cités modernes, on peut les repérer dans leurs Homer Simpson enclin aux études avec son large crâne aires moribondes, qui ne se limitent pas pour Sennett aux déserts chauve et bombé – « pour ranger ses multiples cer- urbains autour de viaducs mal conçus ou aux zones interdites veaux », dit un collègue sur un ton malicieux. Le pro- environnant les HLM des pauvres. Lorsque je lui demande un fesseur de sociologie à la London School of Economics exemple, il cite le Barbican Estate à Londres, un réseau résidentiel L(LSE) occupe un prestigieux bureau d’angle dans un immeuble ap- d’appartements haut de gamme en bordure du quartier des affaires pelé The Tower, appartenant au petit labyrinthe des bâtiments de et voisin du Museum of London. Les espaces proches du musée, la LSE non loin du Strand. À l’instar de l’homme lui-même, c’est qui attire des milliers de visiteurs, sont « morts, vides ». Il a travaillé un lieu de mélange éclectique, plutôt qu’un refuge dans une tour sur un projet de design visant à y remédier. Au Chili, il a aidé à d’ivoire. Des piles de journaux et de livres bien ordonnées se dé- concevoir une clinique destinée avant tout aux patients à bas ploient sur les étagères, une table est couverte de cartes de visite, revenus. « Nous pensions la mettre au cœur de la communauté, remises par les nombreux voyageurs venus consulter Sennett pour mais ce n’était pas la bonne solution. J’ai réalisé que nous aurions sa vaste expertise dans les divers domaines qui le passionnent : il dû la situer en bordure des quartiers pauvres de la ville, pour que vous parlera aussi bien du milieu de la classe moyenne s’y rende aussi. travail contemporain que de l’amé- Parce que le meilleur moyen d’as- nagement des villes, du sort de la surer que la clinique ait des stan- courtoisie dans les sociétés mo- Les lisières, dards élevés, c’est qu’elle serve aux dernes que de la malédiction des pé- deux communautés et non qu’elle riphériques – révélant au passage sa soit placée loin des quartiers plus prédilection pour le brassage fécond lieux de favorisés. » des idées, comme dans son dernier projet, Theatrum Mundi, qui réunit Un mélange éclectique artistes, planificateurs et décideurs Dans un monde académique ten- pour réfléchir à la façon de rendre rencontre dant à confiner ses intellectuels nos espaces urbains plus agréables. Richard Sennett est aujourd’hui dans des fiefs toujours plus étroits, l’un des plus éminents penseurs de la Sennett affirme la diversité de ses L’exemple des cellules champs de réflexion. Après des Ce qui l’occupe en ce moment ? culture du travail et de la culture des études de civilisation américaine, « Les lignes de rencontre entre villes. Sociologue éclectique, il s’intéresse il s’est rapidement tourné vers les communautés dans les villes », tout particulièrement aux questions le champ naissant des études d’ur- dit Sennett. Il est fasciné par le de la diversité et de la complexité. banisme, combinant son intérêt thème des frontières et de leur im- pour les questions de sociologie, pact sur les États-nations, les villes de culture et d’identité. Les villes et les individus. C’est en tant que propos recueillis par Anne McElvoy le fascinent et l’ont entre autres sociologue qu’il a commencé à pen- conduit à écrire des livres sur ser au fonctionnement des villes, la culture et l’espace publics à avec leurs tensions et leur diversité.