Document generated on 09/30/2021 8:19 p.m.

Québec français

La chanson pour mémoire Roger Chamberland

L’errance en littérature Number 97, Spring 1995

URI: https://id.erudit.org/iderudit/44324ac

See table of contents

Publisher(s) Les Publications Québec français

ISSN 0316-2052 (print) 1923-5119 (digital)

Explore this journal

Cite this review Chamberland, R. (1995). Review of [La chanson pour mémoire]. Québec français, (97), 94–95.

Tous droits réservés © Les Publications Québec français, 1995 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/

This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ CHANSON

Roger CHAMBERLAND

La chanson pour mémoire

Beau Dommage tif. Si la presse montréalaise a Rarement a-t-on vu un groupe ou un salué avec grand éclat cette interprète créer de telles attentes chez le soirée mémorable, force est public. Mais , c'est Beau d'avouer que l'album double Dommage : un groupe clé de la décennie que l'on en a tiré, La Sympho­ 1970 qui, après seize ans d'absence, nie du Québec, consacre ces renoue avec la musique et son public. Si nouvel les i nterprétations et re- celui-ci a vieilli et ne porte plus nécessai­ nouvelle l'expérience du rement les cheveux longs, les jeans et les spectacleparla présence sou­ chemises amples, il n'en demeure pas tenue du public. Vingt-six moins qu'il est resté fidèle à sa jeunesse chansons toutes aussi con­ et à la musique qui l'a marqué comme en nues les unes que les autres et témoigne le succès de vente de ce récent qu i ont fait le succès des artis­ album paru en novembre dernier : plus tes présents sont chantées de 100 000 copies écoulées en quelques avec émotion, soutenues par jours, voilà de quoi susciter envie auprès ^U^^'^HV^' l'orchestre symphonique. de ceux et celles qui n'atteindront jamais Certaines piècesqui ont beau­ ces chiffres en carrière. La popularité du coup tourné retrouvent une groupe est-elle garante de la qualité de nouvelle coloration, des ac­ l'album ? Voyons-y de plus près. cents différents et, dans cer­ D'entrée de jeu, l'auditeur n'est pas La Symphonie du Québec tains cas, une profondeur que l'on ne dépaysé : mélodie accrocheuse, arran­ L'année 1994 a sans doute été l'année perçoit pas nécessairement dans la ver­ gements musicaux soignés, harmonies des disques Audiogram : le nouvel al­ sion originale. Je pense ici à la chanson vocales qui, jadis, ont été la marque de bum de Beau Dommage et, surtout, un de Leandre, « Goodbye my Love », dont commerce du groupe, textes qui racon­ dixième anniversaire où les gros canons l'interprétation première m'a toujours tent la réalité urbaine et quotidienne du s'en sont donnés à cœur joie lors du laissé indifférent, mais dont je reconnais milieu montréalais, tout est là pour sé­ spectacle de clôture des Francofolies. Au ici une saveur nouvelle libérée du ton duire et plaire au premier quidam. programme : une quinzaine d'artistes et mielleux qui m'a toujours agacé. C'est Le disque est composé de onze piè­ de groupes, tous de l'écurie Audiogram, dire que les arrangements de Gilles ces : cinq sont écrites par Michel Rivard, des dizaines de musiciens composant un Ouellet, remarquables dans la majorité cinq autres, par Robert Léger (une en orchestre symphonique dirigé par Gilles des cas, ont permis à Leandre de chanter collaboration avec Danièle Faubert) et Ouellet, qui s'est également occupé des cette ballade avec toute l'émotion re­ une, par Marie-Michèle Desrosiers. Il arrangements musicaux, et des techni­ quise. Et ce cas n'est pas isolé : « Je poursuit l'inventaire d'une jeunesse en ciens de tout acabit dirigés par René voudrais voir la mer » de Michel Rivard, quête d'une certaine nostalgie du passé, Richard Cyr, qui s'est chargé de la mise « Le diable avait ses yeux » de Louise des amours heureuses et malheureuses et en scène. Des noms aussi connus que Forestier, « Chanson pourdurertoujours » des paysages urbains. La musique même Michel Rivard, Richard de Richard Séguin et plu­ est empreinte de cette ambiance feutrée Séguin, Paul Piché, sieurs autres gagnent en propice à se faire raconter des histoires Laurence Jalbert, Daniel intensité musicale et ou des états d'âme ; les rythmes sont Bélanger, Jim Corcoran, PICHÉ trouvent une nouvelle ampleur dans l'interpré­ posés, sans excès ni emprunts, et coulent Pierre Flynn, Louise Fo­ SEGUIN de source comme une neige qui tombe­ restier, Rock et Belles ROI K ET BKI.UES ||R tation. rait tranquillement. Avec cette nouvelle Oreilles, SylvieTremblay, TRKWISU. XIÇMK Vl\W\ P>i Cet album double parution, Beau Dommage ne réinvente Leandre, Vilain Pingouin 3ALBERT marque une date impor­ I i ,\|IKI I ! l*Oi!i lit.» Mil pas la chanson québécoise mais ajoute ont interprété, seul ou tante dans la chanson, un nouvel élément à une collection déjà avec d'autres, des pièces BELANGER f »\ MI'IIOWM i m> i invf.OF(*rc car on y retrouve de piè­ fort riche. de leur répertoire respec­ ces majeures du réper-

94 CKllBICfrançais • PRINTEMPS 1995 -NUMÉRO97 toire québécois rehaussées par une or­ font décrocher l'auditeur après 4 ou 5 piè­ EN COMPLEMENT chestration de grand talent. Soulignons la ces. C'est dommage car Mandeville est qualité de la prise de son et de l'équilibre un excellent auteur auquel il manque DE PROGRAMME entre les diverses sections de l'orchestre toutefois suffisamment d'audace pour dont aucune ne domine l'autre. innover au plan musical. Diane Dufresne En route vers l'an 2 000 À la belle de mai Cendrillon kamikaze Gaston Mandeville est sans doute l'un Avec Renaud, « le chanteur énervant » il André Ducharme des auteurs-compositeurs-interprètes les faut s'attendre à tout. Ringard pour plu­ Éditions Mnémosyne, plus méconnus de la chanson québé­ sieurs Français, il bénéficie encore au Montréal, 1994, 142 p. coise. Ses disques paraissent régulière­ Québec d'une audience importante. Son ment sans qu'ils ne reçoivent l'attention récent album, À la belle de mai, présenté Le sous-titre de ce portrait de Diane qu'ils mériteraient et tournent peu à la dans un coffret métallique, nous permet Dufresne écrit par le journaliste André radio, même sur les ondes des stations de renouer avec le Renaud de Morgane Ducharme est fort révélateur de la per­ communautaires qui seraient ses alliées de toi ou de Marchands de cailloux, les sonnalité de cette diva de la chanson naturelles. Son album, En route vers l'an deux disques qui lui ont assuré la noto­ québécoise. « Cendrillon kamikaze »,est 2000, financé par cinq organismes, nous riété au Québec. Au programme de À la un double qualificatif qui lui va à mer­ permet d'entendre onze chansons, tou­ belle de mai : la femme, le père et la fille veille : interprète des grands auteurs clas­ tes issues de la plume de Mandeville, qui qui vieillisent, la répression de l'école, la siques de la chanson québécoise et fran­ police, le chat qui est mort, le trafic de la çaise dans les cabarets de Paris, Diane drogue et la situation socio-politique en Dufresne a acquis, en quelques années, Mànd e v i 1 I e Amérique du Sud, tous ces thèmes servis un véritable statut de vedette, adulée par par des mélodies agréables à l'oreille où un public qui ne lui a jamais fait faux se mêlent diverses guitares, accordéons, bond même si la critique ne l'a pas ména­ piano, trompette, harmonica, flûtes et gée parfois. Son audace et son excentri­ batterie. La force de Renaud ne tient cité vestimentaires sont l'une de ses mar­ certes pas à sa voix, mais à sa façon de ques de commerce, mais on retient dire ses textes dont la poésie et la lucidité également cette voix magnifique qu'elle ne lassent jamais. a su développée et maîtrisée durant tou­ tes ces années de carrière. Ducharme en Akua tuta dresse un portrait honnête, chaleureux et Un dernier mot sur le disque de Kashstin, passionné - peut-on lui reprocher d'aimer Akua tuta qui veut dire « Fais attention ». le style et la personnalité de la personne Fidèles à leurfaçon de faire, les membres à qui il a décidé de consacrer une biogra­ de Kashtin chantent en montagnais et phie ? - dans une édition fort attrayante s'inspirent des rythmes amérindiens pour qui place, parallèlement, aux faits et ges­ donner à leur musique une coloration tes biographiques, des éphémérides ou exclusive. Si les textes nous demeurent des dates importantes de ses spectacles. incompréhensibles à l'écoute - malgré On peut ainsi suivre la carrière de celle les petites notes explicatives imprimées qui est devenue une figure légendaire du sur la pochette-, il n'en demeure pas monde du spectacle et dont on attend moins que l'euphonie linguistique du toujours les nouvelles productions avec montagnais nous retient et nous séduit. impatience. Il est heureux qu'Henri Barras ait fondé cette maison d'édition et cette col­ lection exclusivement consacrée à des portraits d'artistes, dont on annonce les DISCOGRAPHIE prochains titres : Andrée Lachapelle, Louis Lortie et Ginette Laurin. Diane Beau Dommage Dufresne sera bien entourée. Audiogram ADCD 10081. s'est également occupé de toutes les éta­ pes de la production. Mandeville ex­ La symphonie du Québec ploite les thèmes qui lui sont chers : Audiogram, ADCD 10094.

l'amour en première ligne, le monde Gaston Mandeville, moderne avec ses clichés, ses stéréoty­ En route vers l'an 2 000 pes, ses vices et ses tares. À l'écoute, on Les disques Passeport, PAS-CD 1207. a l'impression d'entendre la même chan­ Renaud, son avec diverses modulations musica­ Â la belle de mai les. Entendons bien que ce n'est pas la Virgin 7243 8400202 2. qualité et l'intérêt des textes qui font Kashtin, défaut, mais les mélodies qui semblent Akua tuta sorties du même thème musical et qui Columbia CK 80209.

QUlBICfrançais • PRINTEMPS 1995 «NUMÉRO97 95