Histoire De La Théorie De La Tectonique Des Plaques
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1/12 Histoire de la théorie de la tectonique des plaques 06/06/2011 Auteur(s) : Vincent Deparis Lycée Jean Monnet - Annemasse vincent.deparis(à)neuf.fr Publié par : Olivier Dequincey Résumé Histoire et évolution de la théorie de la tectonique des plaques à partir de celle de la dérive des continents. Table des matières L'hypothèse de l'expansion des fonds océaniques La formulation de la théorie de la tectonique des plaques La tectonique des plaques et la géologie La tectonique des plaques et la Terre Les articles fondateurs de la théorie de la tectonique des plaques et leurs résumés Bibliographie Cet article fait partie de la série de 4 articles écrits par Vincent Deparis et/ou Pierre Thomas et consacrés à l'histoire de la tectonique des plaques : La dérive des continents de Wegener, La découverte de la convection mantellique, Histoire de la théorie de la tectonique des plaquesetLa tectonique des plaques de 1970 à 2011. Avertissement : les images disponibles dans ce dossier ne sont pas libres de droits. Elles proviennent du site de l'USGS, et de la bibliographie. La théorie de la tectonique des plaques a vu le jour à la fin des années 1960. Reprenant les conceptions mobilistes de Wegener, elle les développe et leur fournit une assise théorique solide en s'appuyant sur l'hypothèse alors toute récente de l'expansion des fonds océaniques. Universellement adoptée aujourd'hui, elle constitue le nouveau paradigme des sciences de la Terre. Elle offre un modèle cinématique remarquable des mouvements horizontaux à grande échelle à la surface du globe. Elle fournit un cadre interprétatif cohérent à l'ensemble des phénomènes et structures géologiques : la formation des montagnes, la répartition et la cause des tremblements de terre et du volcanisme, la répartition des faunes et flores fossiles... Enfin, elle montre comment les échanges d'énergie et de matière entre l'intérieur et l'extérieur de la planète sont la cause de tous ces phénomènes. L'hypothèse de l'expansion des fonds océaniques L'hypothèse de la dérive des continents fut présentée par Alfred Wegener en janvier 1912, mais malgré les arguments regroupés, faute d'un mécanisme explicatif satisfaisant, et parce que cela bousculait de nombreuses https://planet-terre.ens-lyon.fr/ressource/histoire-tectonique-plaques.xml - Version du 07/04/21 2/12 idées établies, il ne réussit pas à faire reconnaître sont point de vue. Ses arguments, comme ceux de ses successeurs, reposaient, il est vrai, uniquement sur l'observation des continents : les fonds océaniques, qui représentaient les deux tiers de la surface terrestre et dont la connaissance est cruciale pour appréhender la Terre dans son ensemble, restaient largement inexplorés. La situation évolue au lendemain de la Seconde Guerre mondiale grâce au développement de l'océanographie et des techniques de reconnaissance sous-marine (échosondeur, écoute sismique, détection magnétique). C'est la découverte progressive des fonds marins qui va permettre aux idées mobilistes de s'implanter. Figure 1. Reconstitution, Figure 3. Reconstitution Figure 2. Alfred Wegener (1880- paléogéographique. paléogéographique indiquant les 1930). indices fossiles. Une des premières surprises résultant de l'exploration des fonds marins est la révélation d'une topographie très caractéristique. S'élevant au sein des plaines abyssales, souvent en leur milieu comme dans l'Atlantique, les dorsales océaniques tissent à la surface du globe un réseau de près de 65 000 km de chaînes montagneuses, dominant ces plaines de 2 000 à de 3 000 m, larges de 500 à 1500 km, parfois éventrées par un fossé central, ou « rift ». Les dorsales se signalent non seulement par leur topographie singulière mais aussi par un flux de chaleur élevé ainsi qu'une activité volcanique et sismique. Les fosses océaniques, qui sont les régions les plus profondes des océans (4 à 5 km au-dessous des plaines abyssales), sont également caractérisées par une activité sismique intense. Ces fosses bordent le Pacifique, le Nord-Est de l'océan indien mais sont presque absentes autour de l'Atlantique (sauf au niveau des Antilles et des îles Sandwich du Sud). L'exploration du plancher océanique est à l'origine d'autres découvertes déconcertantes. On a trouvé à cette époque que la croûte océanique, de faible épaisseur (5- 10 km), est composée de roches basaltiques relativement denses (2,8 à 2,9 g/cm3) alors que la croûte continentale, de plus grande épaisseur (30-40 km), est constituée de roches granitiques plus "légères" (~2,7 g/cm3). La faible épaisseur des séries sédimentaires trouvées près des dorsales pose problème. En effet, par dragage à l'aplomb des dorsales on remontait des basaltes ce qui indiquait une faible épaisseur de sédiments, par contre les forages du Glomar Challenger montrent la faible épaisseur générale des sédiments marins : que sont devenus les sédiments entassés depuis l'origine du globe ? Les océans ont donc une importance considérable, non pas à cause de leur étendue, mais parce qu'ils sont géologiquement très différents des continents. Harry Hammond Hess, en 1960 (son article ne paraît cependant qu'en 1962), tente de regrouper cet ensemble de découvertes en une unique hypothèse. Avec une grande analogie avec le modèle de Arthur Holmes présenté trente ans auparavant, il affirme que le manteau terrestre est affecté de larges mouvements de convection et que les dorsales mettent en évidence les courants ascendants et les fosses océaniques les courants descendants. La croûte océanique est continuellement créée au niveau des dorsales. Elle est ensuite entraînée à la surface des cellules de convection, s'éloigne de part et d'autre des dorsales et finit par atteindre les fosses où elle disparaît dans le manteau. La croûte océanique est donc continuellement recyclée et c'est ce qui explique son jeune âge et la faible épaisseur des sédiments qu'elle porte. Les continents, au contraire, à cause de leur relative légèreté, ne peuvent pas retourner dans le manteau. Ils sont condamnés à dériver à la surface de la Terre, ce sont les « mémoires insubmersibles » du globe. Hess précise que les continents se déplacent non en fendant les fonds océaniques comme le suppossait Wegener, mais en étant passivement transportés sur une sorte de tapis roulant. En 1961, Robert Dietz reprend les visions de Hess et introduit l'expression « sea floor spreading » (expansion des fonds océaniques). https://planet-terre.ens-lyon.fr/ressource/histoire-tectonique-plaques.xml - Version du 07/04/21 3/12 Figure 4. Harry Hammond Hess (1906-1969). Figure 5. Modèle de Convection de Hess (1960). Figure 8 de l'article publié en 1962 (voir ci-dessous). L'hypothèse de l'expansion des fonds océaniques, qualifiée par Hess lui-même de "géopoésie", reçoit un statut plus rigoureux grâce aux études géomagnétiques. Le champ magnétique terrestre correspond sensiblement à celui que créerait un énorme aimant dipolaire placé au centre de la Terre. Les mesures magnétiques réalisées au cours des explorations marines montrent cependant des déviations significatives, appelées anomalies magnétiques, par rapport au champ dipolaire. Ces déviations sont attribuées à l'aimantation propre des roches du fond marin. On sait en effet depuis Melloni (1853), puis Bruhnes (1906) que chaque roche volcanique possède sa propre aimantation acquise lors du refroidissement de la lave qui enregistre le champ magnétique terrestre de l'époque. ces déviations du champ magnétique océanique montrent des structures très particulières en formant des bandes d'anomalies positives qui alternent avec des bandes d'anomalies négatives. Ces alignements sont parallèles aux dorsales et disposés symétriquement de part et d'autre de l'axe. L'explication de ce phénomène est donnée indépendamment par Lawrence Morley (1920-), d'une part, et par Fred Vine (1939-) et Drumond Matthews (1931-1997) en 1963, d'autre part. Depuis les travaux de Bruhnes en 1906, on sait que le champ magnétique terrestre possède une orientation qui s'inverse au cours des âges, l'orientation actuelle définissant une orientation dite « normale ». Morley, Wine et Matthews intègrent donc (1) l'existence de ces bandes d'anomalies magnétiques nouvellement découvertes, et (2) les inversions du champs magnétique terrestre global découvertes 60 ans auparavant mais demeurées très « confidentielles » dans le milieu géologique. Ils comprennent et proposent que la croûte océanique, lorsqu'elle est créée au niveau des dorsales, acquiert une aimantation propre en se refroidissant. Elle s'écarte ensuite symétriquement de part et d'autre des dorsales lorsque du nouveau matériau, qui s'aimante à son tour, est injecté au centre. Si l'aimantation survient avec un champ magnétique à orientation normale, l'anomalie induite est positive (l'aimantation fossile des roches s'ajoute au champ ambiant actuel). Si, au contraire, l'aimantation survient avec un champ à orientation inverse, l'anomalie induite est négative (l'aimantation fossile se retranche au champ ambiant). Les linéations magnétiques alternées se comprennent donc par la combinaison de la divergence de la croûte océanique et des inversions du champ magnétique. Les indices de la dérive ne sont donc plus uniquement continentaux mais également océaniques. Source - © 1996 J.W. Kious et R.I. Tilling Source - © 1996 J.W. Kious et R.I. Source - © 1966 J.F. Vine Tilling Cette théorie élégante ne convainc pas immédiatement les scientifiques, mais d'autres études viennent progressivement la confirmer. Ainsi Fred Vine et Tuzo Wilson (1908-1993) montrent en 1966 que l'explication de Morley et de Vine et Matthews n'est pas seulement qualitative mais également quantitative. On peut en effet la relier à l'échelle chronologique des inversions du champ magnétique terrestre, qui vient d'être établie. En associant chaque linéation magnétique aux inversions correspondantes et en supposant que le taux d'ouverture de chaque océan est constant, Vine et Wilson vérifient que la largeur de chaque linéation est bien proportionnelle à la durée entre les deux inversions.