avec les gens qui travaillent sous ses ordres. Le 17 juin, Pierre Bénouville, qui a appris son arrestation et qui en a informé le représentant des mouvements de Résistance en Suisse, le rencon- tre par hasard dans une rue de . Hardy lui raconte qu'il a été arrêté dans le train mais qu'il a réussi à s'échapper. C'est une règle, dans la clandestinité, de se méfier des évadés, qui peuvent avoir été relâchés volontairement pour faire tomber le reste de leur réseau. Bénouville ne se méfie pas du tout de Hardy. Il l'invite même à participer le lendemain 18 juin à une réunion de Combat, avec Baumel et Aubry. Tout le monde n'a pas la même insouciance. Il y a quelqu'un d'autre qui sait que René Hardy est en liberté. C'est , et il s'en étonne, parce qu'il a appris, le 14 juin, que le général Delestraint a été arrêté. Il ne comprend pas comment Hardy, qui avait rendez-vous avec Delestraint, peut se promener dans les rues de Lyon. Jean Moulin ordonne à ses collaborateurs de refuser tout rendez-vous qui serait proposé par Hardy. Jean Moulin est devenu un professionnel de la clandestinité. Si on en croit Daniel Cordier, ce n'est pas le cas de certains dirigeants du mouvement Combat qui vont suggérer à Hardy, dès qu'ils apprennent l'arrestation de Delestraint, d'assister à la réu- nion des responsables militaires qui est prévue pour le lundi 21 juin, à Caluire. Ils insistent : « faut que tu y ailles. » Daniel Cordier nous propose là une autre grille pour comprendre le drame de Caluire— : celle de la fronde qui grondait, dans la Résistance, contre Jean Moulin et des arrière-pensées tactiques des mouvements. Pourquoi les gens de Combat tiennent-ils tant que ça à ce que René Hardy soit présent à Caluire ? Selon Daniel Cordier c'est parce qu'ils croient que Jean Moulin va désigner le rempla- çant du général Delestraint à la tête de l'Armée secrète, et choisir quelqu'un qui la maintiendra dans l'obédience gaulliste. Or, toujours selon l'auteur, l'ambition de Combat est de récupérer le contrôle de l'Armée secrète, et même d'en voir confier le commandement à Frenay. Dans cette hypothèse, ce serait pour avoir un allié et un informateur dans la place, que le réseau Combat aurait envoyé René Hardy à Caluire. René Hardy devant la Cour 1e20 janvier 1947 (à gauche, Al' Garçon) Le 21 juin 1943, à 10 heures du matin, Aubry Classique. Multon va donner plus de 120 résis- der le rendez-vous. Cela semble incroyable. Mais a rendez-vous avec Jean Moulin pour mettre au tants. C'est grâce à lui que la Gestapo va être il est facile de s'en étonner quand on n'a pas vécu point l'ordre du jour de la réunion. La rencontre informée d'un rendez-vous qui doit avoir lieu le sous l'Occupation avec la Gestapo aux trousses. est orageuse. Jean Moulin se plaint que le 9 juin 1943 entre René Hardy et le. général La légèreté. René Hardy, qui s'est mis en route mouvement Combat se soit approprié des armes Delestraint à au métro Muette. René deux jours avant pour être au rendez-vous, est qui venaient d'être parachutées dans la région de Hardy, tout le monde le connaît aujourd'hui. reconnu dans un train de nuit par Multon, qui se Brives. Querelle de boutique en marge de l'His- Ancien cadre de la SNCF, il s'est engagé à rend lui aussi à Paris pour tendre une souricière, toire. Les deux hommes parlent aussi de la Combat, où il est chargé des sabotages et des à la Muette, au général Delestraint. Multon succession du général Delestraint. Aubry soufi- attentats contre les voies ferrées. Il a dirigé la désigne Hardy aux agents de la Gestapo qui gne qu'on ne saurait prendre pour le moment préparation du Plan vert qui prévoit la mise hors l'accompagnent. Hardy est arrêté à Chalon-sur- qu'une mesure conservatoire, et Jean Moulin en d'usage du réseau SNCF le jour J. Il fait partie de Saône et emmené au siège de la Gestapo lyon- conçoit quelque humeur. Aubry se garde bien l'état-major du général Delestraint. C'est un naise l'Ecole de Santé militaire de l'avenue d'informer Jean Moulin que René Hardy va combattant efficace et courageux. Berthelot. Il est relâché dans la nuit du 10 juin, assister à la réunion. Il ne sait pas que Jean L'étourderie. Le rendez-vous a été pris par après avoir promis aux Allemands, selon les Moulin se méfie de Hardy parce qu'il a été arrêté Henri Aubry, officier d'active, chef d'état-major déclarations qu'il a faites à son procès, de les et relâché de façon suspecte. Mais il a vraisem- de l'Armée secrète. C'est un proche de Frenay. Il renseigner sur la Résistance. René Hardy, même blement peur que le chef du CNR ne s'oppose à rédige le message en clair, et il le dépose dans une s'il n'a pas l'intention de trahir, peut être suivi par sa présence pour des raisons politiques. René « boîte aux lettres » surveillée depuis peu par la la Gestapo. Selon les règles de la clandestinité, il Hardy ira donc à Caluire. Derrière lui, il y aura les Gestapo. Il s'en aperçoit trop tard, il oublie de devrait considérer lui-même qu'a est sous tractions avant de Klaus Barbie. prévenir le général Delestraint et de décomman- contrôle allemand. Il reprend pourtant contact FRANÇOIS CAVIGLIOLI 19-25 OCTOBRE 1989/33