Rapport De L'expert Indépendant Sur La Situation Des Droits De L'homme En
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Nations Unies A/HRC/19/72 Assemblée générale Distr. générale 9 janvier 2012 Original: français Conseil des droits de l’homme Dix-neuvième session Point 10 de l’ordre du jour Assistance technique et renforcement des capacités Rapport de l’expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en Côte d’Ivoire, Doudou Diène Résumé Le présent rapport fait suite à deux visites de l’expert indépendant en Côte d’Ivoire, du 14 au 25 novembre et du 7 au 13 décembre 2011, et vise à rendre compte de l’évolution générale de la situation des droits de l’homme en Côte d’Ivoire et des questions institutionnelles y relatives, enregistrée jusqu’au 26 décembre 2011. Suite à la prestation de serment du Président Alassane Ouattara, la situation sécuritaire s’est progressivement améliorée. Toutefois, la Côte d’Ivoire demeure un pays fragile en phase de convalescence, qui est sorti traumatisé des nombreuses crises qui l’ont affecté au cours de la décennie écoulée. Dans ce contexte, la tenue des élections législatives, le 11 décembre 2011, dans de bonnes conditions techniques selon tous les observateurs, malgré la polarisation liée au transfèrement de l’ancien président Laurent Gbagbo à la Cour Pénale Internationale le 30 novembre 2011 et le boycott des élections par son parti, a marqué un pas important dans le processus progressif de normalisation du pays. Néanmoins, de nombreux défis restent à relever, liés parfois à des causes profondes antérieures à la crise post-électorale notamment le lien entre la problématique d’accès à la terre et les tensions entre communautés, particulièrement dans la partie ouest du pays. Au nombre des défis, on relève entre autres le rétablissement de la sécurité sur l’ensemble du territoire et aux frontières, la réforme du secteur de la sécurité, la restauration de l’État de droit et de la justice, la lutte contre l’impunité, la réconciliation, le renforcement du vivre ensemble et de la cohésion sociale, le récupération par l’État de son espace régalien et le rétablissement de ses services sur l’ensemble du territoire, la relance de l’économie, la lutte contre la pauvreté, la protection/retour/réintégration des populations déplacées et réfugiées. C’est dans ce contexte que l’expert indépendant fait en outre état des principales violations de droits de l’homme qui ont été portées à son attention, notamment des atteintes aux droits à la vie, des actes de torture, des traitements inhumains et dégradants, des arrestations arbitraires, des viols, des atteintes à la liberté d’expression, des rackets et GE.12-10061 A/HRC/19/72 extorsions, des attaques et actes de violence contre des édifices et responsables religieux, des atteintes au droit à l’éducation, au droit à la santé et au droit à l’alimentation. Les tensions intercommunautaires restent vives dans l’ouest du pays et nécessitent des mesures urgentes du Gouvernement afin de faciliter une coexistence pacifique entre les communautés et prévenir des violences intercommunautaires qui souvent débouchent sur de graves violations des droits de l’homme. La plupart des violations des droits de l’homme proviennent moins d’une quelconque complicité de l’État que de ses carences à les prévenir, en raison notamment de la difficulté à reformer le secteur de la sécurité et à restaurer l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire. La lutte contre l’impunité doit demeurer une priorité afin de sortir du cercle vicieux alimenté par le cycle de répétition des violations des droits de l’homme que connaît le pays depuis 1999. Les processus de justice transitionnelle en cours, notamment la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation, doivent s’attaquer aux causes profondes de la crise et s’appuyer sur les victimes des violations des droits de l’homme dans le respect de leurs droits à la réparation et à la non répétition des violations des droits de l’homme. L’impartialité et l’indépendance des mécanismes de justice transitionnels judiciaires et non judiciaires doivent être préservées. Dans cette perspective, il est essentiel de poursuivre les auteurs des violations des droits de l’homme sans distinction de leur appartenance politique, tribale, régionale ou religieuse. La culture profonde du vivre ensemble, élaborée dans la longue durée par l’ensemble du peuple ivoirien, basée sur sa riche diversité ethnique, culturelle et religieuse doit être renforcée et nourrie par le respect des droits de l’homme et des principes et règles de la démocratie. 2 A/HRC/19/72 Table des matières Paragraphes Page Liste des abréviations ....................................................................................................................... 4 I. Introduction ............................................................................................................. 1–8 5 II. Situation générale du pays ....................................................................................... 9−48 6 A. Contexte politique ........................................................................................... 9−14 6 B. Le défi identitaire ............................................................................................ 15−18 7 C. Le défi sécuritaire ........................................................................................... 19−24 7 D. Le défi de la relance économique ................................................................... 25–27 8 E. Le défi de la lutte contre l’impunité ................................................................ 28–48 9 III. Situation des droits de l’homme .............................................................................. 49−85 12 A. Les droits civils et politiques .......................................................................... 49−60 12 B. Les réfugiés et personnes déplacées internes .................................................. 61−66 14 C. Les femmes et les enfants ............................................................................... 67–69 15 D. La situation pénitentiaire ................................................................................ 70–75 15 E. Les droits économiques, sociaux et culturels .................................................. 76−85 16 IV. Conclusion et recommandations ............................................................................. 86−105 17 A. Conclusions .................................................................................................... 86−90 17 B. Recommandations ........................................................................................... 91−105 18 Annexe Liste actualisée des personnes détenues en relation avec la crise post-électorale (19 décembre 2011) .......................................................................................................................... 21 3 A/HRC/19/72 Liste des abréviations BAE Brigade anti-émeute BMO Brigade du maintien de l’ordre CCI Centre de commandement intégré CDVR Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation CECOS Centre de commandement des opérations de sécurité CEI Commission Électorale Indépendante CHU Centre Hospitalier Universitaire CNO Centre-Nord-Ouest CPI Cour Pénale Internationale CRS Compagnie républicaine de sécurité CTK Compagnie territoriale de Korhogo EFA Ecole des forces armées FAFN Forces armées des forces nouvelles FRCI Forces Républicaines de Côte d’Ivoire FDS Forces de défense et de sécurité FPI Front populaire ivoirien HCR Haut-Commissariat aux réfugiés LIDER Liberté et démocratie pour la république LMP La majorité présidentielle MACA Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan MAMA Maison d’arrêt militaire d’Abidjan MFA Mouvement des forces d’avenir PDCI Parti Démocratique de Côte d’Ivoire RDR Rassemblement des Républicains RHDP Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix RSSG Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies RTI Radiodiffusion télévision ivoirienne ONUCI Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire UDPCI Union pour la Démocratie et la Paix 4 A/HRC/19/72 I. Introduction 1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 17/21 du Conseil des droits de l’homme, par laquelle le Conseil a institué un mandat d’expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en Côte d’Ivoire et a demandé à l’expert de lui rendre compte de ses activités à sa dix-neuvième session. 2. Ce rapport porte sur la période comprise entre le 1er novembre et le 26 décembre 2011. Il est le résultat de deux visites en Côte d’Ivoire, la première, du 14 au 25 novembre 2011, et la seconde, du 7 au 13 décembre 2011. Il contient une liste de recommandations adressées au Gouvernement ivoirien et à la communauté internationale. 3. L’expert indépendant tient à remercier les autorités ivoiriennes, qui ont permis que les deux missions se déroulent dans d’excellentes conditions. Au cours de ses missions, l’expert indépendant a été à l’écoute de tous les acteurs concernés afin de recueillir leurs visions et opinions sur la situation des droits de l’homme ainsi que les solutions à envisager pour la renforcer. Dans cette optique, l’expert indépendant a rencontré les plus hautes autorités du pays. Il est reconnaissant au Président de la République, Alassane Ouattara pour la franchise et la clarté de ses observations. 4. L’expert indépendant s’est entretenu avec le Premier Ministre, Guillaume Soro, le Ministre d’État, Ministre des Affaires Etrangères, le Ministre chargé des Droits de l`Homme et des Libertés publiques, le Ministre d’État, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, le Ministre d’État, Ministre de l’Intérieur,