VICTOR HUGO, CET INCONNU... DU MÊME AUTEUR : ESSAIS D'art ET D'histoire Le Nouveau Paris
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VICTOR HUGO, CET INCONNU... DU MÊME AUTEUR : ESSAIS D'ART ET D'HISTOIRE Le Nouveau Paris. Daumier. Victor Hugo, artiste. La Vie glorieuse de Victor Hugo. Victor Hugo raconté par ceux qui l'ont vu. Delacroix (3 vol.) Delacroix et sa Consolatrice. L'Art italien. Greco. Gros. Henri Matisse. La Peinture française au XIXe siècle. La Peinture française au XXe siècle. Paris. Versailles. L'Hôtel-Dieu. Constantinople. Mes Pyrénées. ROMANS, NOUVELLES, FOLK-LORE Le Sel de la terre. Mahmadou Fofana. Maripepa. (EN COLLABORATION AVEC MARIE ESCHOLIER) Dansons la trompeuse (prix Northcliffe). Cantegril (prix Vie Heureuse). La Nuit. Quand on conspire. L'Herbe d'amour (Grand prix de littérature de l'Académie française). Gascogne. Au pays de Cantegril. Le Secret de Montségur (en collaboration avec Maurice GARDELLE, à paraître). THÉATRE La Conversion de Figaro (en collaboration avec J.-J. BROUSSON). Cantegril, opéra-comique (musique de Roger-Ducasse). Madame de Luzy (d'après la nouvelle d'Anatole France, en colla- boration avec Eug. BOURGEOIS). POÈMES Vers l'autre rive. RAYMOND ESCHOLIER VICTOR HUGO, CET INCONNU... « Ce sera ma loi d'avoir vécu célèbre et ignoré. » VICTOR HUGO. Paris LES PETITS-FILS DE PLON ET NOURRIT Imprimeurs - Éditeurs - 8, rue Garancière, 6 Copyright 1951 by Librairie Plon. Droits de reproduction et de traduction réservés pour tous pays y compris l'U. R. S. S. A JEAN HUGO en témoignage de grande et fidèle amitié. PRÉFACE Il y a un peu plus de vingt ans, comme je m'apprêtais à publier la Vie glorieuse de Victor Hugo, d'aucuns me mirent en garde contre la vanité d'un sujet si rebattu... Je ne les écoutai point, car mes fonctions de conservateur de la Maison de Victor Hugo et de Hauteville-House, ma connaissance de la précieuse bibliothèque rassemblée et donnée par Paul Meurice à la demeure de la place Royale, et tant d'inédits consultés, me mettaient à même d'éclairer d'un jour nouveau cette grande figure, soi-disant trop connue. Tant et si bien que, comme la collection aujourd'hui épuisée, le Roman des Grandes Existences, où parut ce premier volume, ne comportait aucune note, aucune référence (on en a trop abusé par ailleurs), certains crièrent à l'imposture. C'est ainsi qu'après avoir pris connaissance chez Louis Barthou de tout le dossier — encore inédit — général Hugo- Sophie Trébuchet, je fus amené à visiter Chateaubriant avec M. A. Gernoux, instituteur dans cette ville et le premier à avoir vu clair dans cette ténébreuse affaire. En outre en rela- tion avec les héritiers de La Horie et de Muscar, j'en savais long sur la « brigande » Sophie Trébuchet. Beaucoup plus long, en vérité, qu'Édouard Biré, prototype du cuistre malfaisant, dont l'ouvrage, trop longtemps vanté, sur Victor Hugo — véritable entreprise de démolition — fourmille à chaque page — Paul Berret l'a magistralement démontré — de faux sens, d'inexactitudes et de mensonges délibérés ; Édouard Biré qui, pour donner une bonne leçon au fils de la « mère vendéenne », nous avait travesti celle-ci en tricoteuse, partageant les fureurs terroristes de son grand- père Lenormand, juge au tribunal révolutionnaire de Nantes. Paul Souday, pourtant encore plus hugolâtre qu'hugophile, parut attribuer au domaine de la fantaisie cette « image d'Épi- nal ». Il n'en était rien cependant ; mais mes fonctions de con- servateur de la Maison de Victor Hugo et la nature de mes relations avec les héritiers du grand poète rendaient ma posi- tion délicate et m'obligeaient, en somme, à taire ce que je savais du passé aventureux de la générale Hugo. C'est alors que j'engageai mon ami Louis Guimbaud, l'au- teur de cet ouvrage définitif : Victor Hugo et Juliette Drouet, à faire ce qui m'était interdit, à entreprendre une enquête minutieuse sur les secrètes amours de Sophie « la Brigande » et du général Victor La Horie. Avec son beau volume, si documenté et si frémissant, sur la Mère de Victor Hugo (1), à laquelle les premières pages de ce livre doivent tant, Louis Guimbaud nous a donné un por- trait « au vif », parfaitement véridique, de la Chouanne qui a si fortement marqué, plus encore que la jeune Muse vendéenne de Quiberon, la religion primitive de Ce que me disait la bouche d'ombre et la sauvagerie celtique de Quatre-vingt-treize. Dans ce nouvel ouvrage sur notre grand lyrique, si l'on fait la part belle à Sophie Trébuchet, c'est non seulement parce qu'elle fut une héroïne de roman — à la Balzac (le Balzac des Chouans), c'est encore parce que le vieil Hugo lui est aussi redevable que l'Enfant sublime. De fait, nos grands romantiques, un Lamartine, un Vigny, un Victor Hugo, la qualité de leur génie, de toute évidence, ils le doivent surtout à leur mère. « Pourquoi, dira-t-on, donner pour titre à un tel livre ces quatre mots : Victor Hugo, cet inconnu? » C'est qu'en effet, on s'en avise de plus en plus, nul n'est plus ignoré que Victor Hugo... Déjà, en 1928, après la publication de la Vie glorieuse de Victor Hugo, je fus stupéfait de n'avoir pas enfoncé, comme je l'avais cru tout d'abord, trop de portes ouvertes... Je décou- vris alors, non sans surprise, que si la vie d'Olympio, vie secrète et vie d'aventure, s'il en fût, échappait au plus grand (1) Librairie Plon. nombre, le poète et le prosateur, le politique et le mystique n'étaient pas moins ignorés de ce qu'on appelle l'élite. Depuis, je n'ai fait qu'aller d'étonnement en étonnement... Quand avec une candeur désarmante, une amie comme Lucie Delarue-Mardrus me disait, devant les dessins de Hugo, en effet admirables et dignes des plus grands maîtres : « Quel dommage que Victor Hugo ne s'en soit pas tenu à cela ! », je souriais en songeant que cette charmante Muse normande m'apportait ainsi la preuve qu'elle n'avait jamais lu les Rayons et les Ombres, les Contemplations, Toute la lyre, la Fin de Satan ou Dieu. Quand un Claude Farrère se livrait aux « sorties » que l'on sait, on plaignait simplement ce marin d'ignorer les Travailleurs de la Mer et tant de poèmes sublimes, tant de dessins magnifiques, inspirés par l'Océan, par les phares, par les jetées, par les navires, au petit-fils des Trébuchet, gentils- hommes de fortune. André Gide, lui-même, est revenu sur un « Hélas ! » intem- pestif, en déclarant qu'il ne s'agissait là que d'une boutade. Pour Claudel, s'il a prétendu que Hugo était un « lâche », c'est qu'il ne savait rien de sa conduite héroïque durant les journées de juin et au moment du coup d'État où, quoi qu'on ait pré- tendu, sa tête était mise à prix. Paul Valéry... Au cours d'une conférence à Londres, il lui arriva de médire de telle façon du plus grand de nos poètes que tous ceux qui, là-bas, aiment les lettres françaises en marquèrent leur surprise et leur réprobation. Quelques jours plus tard, j'étais chez l'auteur de Charmes, qui voulait bien m'honorer de son amitié. On s'entretint de la poésie pure — et impure, et cela nous amena à parler de Victor Hugo. Je ne pus celer à Valéry les impressions que sa causerie avait provoquées aux bords de la Tamise... Il se défendit alors — assez mollement, me sembla-t-il, — de ne pas aimer Hugo : — En vérité, me dit le poète de la Jeune Parque, ce qui me rebute en Hugo, c'est son amour du récit... Pour moi, le récit est un genre inférieur et n'a rien à voir avec la poésie pure. Je gardai le silence... et songeai simplement à Homère et à Virgile, à Dante et à Milton... Le récit aurait-il étouffé chez ceux-là toute poésie ? Et d'ailleurs, qui pourrait soutenir, sans méprise, que l'œuvre lyrique de Hugo est vouée seulement au récit ? Plus récemment, sous la signature d'un des princes de la critique, j'eus la surprise de découvrir que Victor Hugo ne saurait être considéré comme un poète de l'amour, « puisqu'il n'a jamais aimé. » Rien ne permettant de mettre en doute la bonne foi de ce critique, on peut se demander, après cela, si ne lui sont point parfaitement étrangères l'œuvre et la vie de Victor Hugo. Aussi bien cette campagne de dénigrement ne date pas d'hier. Si Péguy se posait en admirateur et disciple de Hugo, si Renouvier, pur et grand esprit, consacrait des pages lucides et profondes à la Philosophie de Victor Hugo, que de fois n'ai- je pas entendu, dans le même temps, Anatole France, « pape des sceptiques », tourner en ridicule, Villa Saïd, le Burgrave de la Démocratie accueillant « sous ses ailes », lors de son quatre-vingtième anniversaire, « les jeunes poètes », parmi les- quels l'auteur des Noces corinthiennes? Avant sa grande brouille avec Leconte de Lisle, France, comme son ami Louis Ménard, n'avait-il pas été de ceux qui, familiers du bibliothécaire du Sénat, ne craignaient pas, en sa présence, de dauber sur la stupidité du « père Hugo »? Tant et si bien qu'un jour, Leconte de Lisle lui-même aurait lancé ce fameux apophtegme : « Il est bête comme l'Hima- laya. » Ce propos a-t-il été vraiment tenu par le chef de l'École parnassienne? Je voulus en avoir, un jour, le cœur net et je m'en ouvris à Henri de Régnier, l'un des fidèles de Leconte de Lisle : — N'en doutez pas, me déclara ce noble poète. Ces mots ont bien été prononcés et qui plus est, en ma présence.