ÈME

5ANNIVERSAIRE0 de la relation Revue des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts diplomatique

N° 861-862 Janvier/Février 2014 et des diplômés de l’Ecole nationale des ponts et chaussées entre la Chine et la France

URBANISATION EN CHINE PRÉSENCES FRANÇAISES Sous le Haut Patronage de M. Arnaud Montebourg Ministre du Redressement productif

JOURNÉE NATIONALE DE L’INGÉNIEUR INGÉNIEURS ET SCIENTIFIQUES DE FRANCE

Artisans du Progrès

ALSACE AQUITAINE AUVERGNE BASSE-NORMANDIE BOURGOGNE BRETAGNE CENTRE CHAMPAGNE-ARDENNE CORSE FRANCHE-COMTE HAUTE-NORMANDIE ILE-DE-FRANCE Innover LANGUEDOC-ROUSSILLON LIMOUSIN LORRAINE MIDI-PYRENEES Entreprendre NORD-PAS-DE-CALAIS PAYS-DE-LA-LOIRE PICARDIE POITOU-CHARENTES PROVENCE-ALPES-COTE-D’AZUR RHONE-ALPES Impression : Azaprim - Crédit photos 123RF Impression 3 avril 2014

www.iesf-jni.org SOMMAIRE

004 - É ditorial 067 - 20 ans en Chine avec Veolia Yves Cousquer Environnement Services 006 - Introduction : Chine, quelques chiffres ZHOU Xiaohua 008 - Le Grand Wuhan : Une coopération 070 - Le développement urbain durable en Chine sino-française exemplaire dans le domaine dope la promotion des expertises de la SADE du développement urbain durable LIU Bo LI Xiansheng 074 - L’efficacité énergétique en Chine 012 - Regards croisés sur l’urbanisation Emmanuel Normant, Javier Gimeno en Chine et en France et Pascal Eveillard Professeur PEI Gang 078 - 3D EXPERIENCity, la modélisation 014 - Le développement durable en Chine, du fonctionnement urbain au service quelque peu à la française du développement urbain durable Pierre Mayet Daniel Marson et Caroline Maurand 017 - La Chine : laboratoire de la ville 081 - Un pont entre la France et la Chine Pierre Clément Armel de la Bourdonnaye 020 - La ville chinoise à la croisée des chemins 084 - Former les cadres territoriaux chinois Clément-Noël Douady Marc Guigon 026 - Partager le savoir-faire français en matière 088 - Formation et sensibilisation, clé de voûte de développement urbain durable des échanges sur la ville, l’architecture, Martin Robain le patrimoine Françoise Ged 029 - Le Grand Wuhan, tête de pont de la coopération franco-chinoise sur le développement urbain 092 - La reconstruction industrielle de la Chine durable et la partition des pouvoirs locaux Caroline Maurand Jean-Claude Lévy 033 - Les gares à grande vitesse et les réseaux 096 - Quelques enjeux de la ville territoire émergente de transport guidés en Chine : au cœur Ion Besteliu et Laurent Mallet d’une urbanisation globale pour de grandes 100 - Villes durables : le dialogue nécessaire agglomérations entre les sociétés européenne et chinoise NI Jincheng Pierre Calame 037 - L’essor des zones aéroportuaires en Chine 104 - Une plateforme d’échanges pour promouvoir Stéphane Séguier et Carol Chen les coopérations franco-chinoises 042 - Le Forum Transport à Haut Niveau de Service, LIU Kaisheng coopération universitaire et professionnelle 107 - La coopération décentralisée en Chine : Jean-François Janin la diplomatie « économique » ? 046 - Mobilité durable et véhicules Vincent Aurez, et Jean-Claude Lévy à motorisation électrique 111 - Coopération institutionnelle et enjeux Jacques Saint-Marc économiques 050 - Vers des innovations en matière Alain Lecomte et Christian Lévy de mobilité durable en Chine 114 - Les défis de la ville chinoise WANG Zhaohua et Erik Grab Etienne Tricaud 055 - Les villes portuaires en Chine 118 - Le Grand Wuhan : Une coopération Michel Savy sino-française exemplaire dans le domaine 059 - La coopération franco-chinoise du développement urbain durable - dans le domaine de l’eau (version Chinoise) Jean-Louis Oliver LI Xiansheng 062 - L’aménagement du lac Liangzi à Wuhan : un projet partagé 122 - Les Ponts en marche Fouad Awada

Ce numéro spécial, à l’occasion du 50ème anniversaire de la relation diplomatique entre la Chine et la France, a été réalisé sous la direction d’URBA 2000, merci à Pierre Mayet, Caroline Maurand, Dominique Fort-Schneider et Léon Hong. 3 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

EDITORIAL

Yves Cousquer Président de l’accord de coopération France-Chine sur le développement urbain durable (2008-2012) Passeurs entre cultures, dans la ronde des temps et des générations…

964-2014, 50 ans, qu’est-ce ? Fort peu dans le temps Le hasard voulut que mon frère et ma belle-sœur fussent 1long des nations, mais pour nous? Beaucoup, une vie les pionniers du programme franco-chinois de mathéma- professionnelle, deux générations, sept présidents dans tiques initié par l’université de Wuhan. Les ayant visités en une France passée de 48 à 66 millions d’habitants, une 1983 j’avais découvert Wuhan et eu le loisir de parcourir Europe devenue l’Union de 28 pays, forte d’un demi-mil- à bicyclette les rives du Lac de l’Est, cher à Mao. Wuhan liard d’hommes. En 50 ans la Chine doublait sa taille jusqu’à avait alors 5 à 6 millions d’habitants, il en a 10 aujourd’hui. 1,4 milliard d’habitants, avec une croissance économique Citroën s’y établissait, les Français s’y comptaient sur inouïe, qui a su devenir la deuxième économie mondiale. les doigts de la main, ils sont un millier aujourd’hui.

La France est la cinquième puissance économique mondia- Ce numéro de PCM illustre la variété et l’intensité des le, rappelait notre Premier ministre Jean-Marc Ayrault, dans échanges culturels, techniques et économiques noués un discours prononcé le 7 décembre 2013 à Wuhan, Chine : dans les trente dernières années entre la Chine et la « Les entreprises françaises sont en pointe au niveau France dans les domaines de l’aménagement des ter- mondial dans les secteurs de la construction et des tra- ritoires, de l’urbain, de l’architecture et des transports, vaux publics, des transports, de l’automobile, des cos- précisément depuis 1985 et le voyage fondateur de Paul métiques, de l’agroalimentaire, mais aussi de l’aéro- Quilès, ministre de l’équipement, qu’accompagnaient nautique, de l’espace, de la pharmacie, de l’énergie ou 40 entreprises partageant sa découverte de la Chine. encore des services aux collectivités, de l’assurance En 1988, le voyage de Pierre Méhaignerie, qui rencon- ou de la banque.... Ces compétences […] sont le fruit tra à le futur n°1 chinois Jiang Zemin, renfor- d’un héritage, d’une culture scientifique, technologique ça les liens créés : s’est fait avec les planifica- et entrepreneuriale faite d’inventions et d’innovations. teurs de l’IAURIF et des architectes français ; le site de Une culture […], un modèle de développement écono- l’exposition universelle de 2010 fut orienté par un exer- mique et social durable, […] que nous souhaitons parta- cice conjoint mené en 2000 avec les Ateliers de Cer- ger avec nos partenaires chinois. Avant tout avec la vil- gy alors présidés par Pierre Mayet ; EDF est toujours un le de Wuhan : nous menons ici avec la municipalité le partenaire électif du programme nucléaire civil chinois. projet d’une ville durable franco-chinoise, développé par Mme Martine Aubry, représentante spéciale du ministre Je n’imaginais pas en 1983, pas plus qu’en 1985 ou des affaires étrangères français pour la relation avec la 1988, la transformation dont serait capable la Chine de Chine. A Wuhan, la plus francophile des villes chinoises, ce Deng Xiaoping, même si elle avait vaincu la grande fami- sont d’abord nos scientifiques, nos ingénieurs, nos indus- ne qui avait suivi le grand bond en avant des années triels qui ont tissé les liens les plus forts [depuis 30 ans] ». 50, puis surmonté les drames de la révolution culturelle.

4 Je fus stupéfait des transformations intervenues quand en tion. Comment coupler densité urbaine et TCSP, marche 1999, nommé président d’ADP, je renouais avec la Chine. et vélo pour rompre avec la domination de la voiture et Dans les 10 ans qui ont suivi, à raison de 3 ou 4 voyages l’étalement urbain ? Quelles technologies déployer pour la annuels pour Paris Tech puis pour l’accord Développe- construction, les services urbains et les processus indus- ment Urbain Durable (DUD), cet étonnement interrogatif triels pour restaurer la qualité de l’air, de l’eau et mieux n’a pas eu de cesse. L’intensité de la croissance du PIB, user de matériaux locaux, recyclables et économes en plus de 10% par an sur 25 ans, a comme corollaire une énergie ? Comment mieux marier l’urbain et le rural quand vitesse de décision et de réalisation quatre fois supérieure l’agriculture devra doubler ses rendements et sans rédui- à la nôtre, y compris pour corriger déséquilibres ou erreurs, re les villages chinois à des femmes, des enfants et des ou affronter de nouveaux défis. Les siens propres - la sur- vieillards – du fait de la migration urbaine des hommes. consommation de terres agricoles et de ressources natu- Comment planifier un développement qui sache mobi- relles pour devenir l’usine du monde, et les inégalités entre liser en priorité et avec équité les ressources locales ? régions, villes et campagnes - et ceux du système mondial, crises bancaires, inégalités croissantes, transition éner- Nous devons faire évoluer nos gouvernances, c’est- gétique et écologique, préservation de la biodiversité … à-dire nos façons de piloter le changement, les adap- tations nécessaires dans nos sociétés respectives, en Les articles de ce numéro de PCM en témoignent : dans la coo- articulant les niveaux de responsabilité, du global au pération chacun apporte le meilleur de soi et chacun apprend local, avec un accent particulier sur les projets-pilo- de l’autre pour servir les intérêts de son pays et de la planète. tes et démonstrateurs ; en favorisant les coopérations décentralisées et le dialogue entre les sociétés, com- Face aux défis du monde, nous devons collectivement me y tend le Forum China-Europa, avec la conscien- innover, inventer, expérimenter. Mais si, par la vitesse de sa ce que ce sont nos modes de vie qui sont en jeu. mue, l’intensité de sa croissance et sa taille, la Chine devient le laboratoire du futur, elle ne peut en être la seule référence. Je conclurai sur un échange dont j’ai été témoin en sep- tembre 2007, à l’Ecole Polytechnique, entre M. Wan Gang, Nous devons confronter nos modèles et nos choix de ministre chinois de la science et de la technologie, avec développement, comme nous l’avions fait à Wuhan en une trentaine d’élèves chinois en grand uniforme. Son long 2010, avec MM. LI Xiansheng, ancien Premier Vice-Gou- échange peut se résumer à la question « Comment pou- verneur de la province du Hubei, en charge du projet du vons-nous le mieux servir notre pays ? » et sa réponse : Grand Wuhan et Tang Kai, ancien Directeur Général de la « En étudiant … et en étant de bons passeurs entre les Planification Urbaine et Rurale du ministère de la construc- cultures ».

5 INTRODUCTION Urbanisation en Chine : présences françaises

QUELQUES CHIFFRES

POPULATION ET ÉCONOMIE MOBILITE ET INFRASTRUCTURES

l Population : 1,35 milliard d’habitants. l Réseau de lignes à grande vitesse : plus de 10 000 km fin 2013 (premier au rang mondial) et 18 000 km à long terme. l PIB : 10% du PIB mondial. l Taux d’équipement automobile : 70 automobiles pour l Croissance économique : +7,8% en 2012 (9,2% en 2011). 1 000 habitants (pour 600 en Europe et 800 aux Etats-Unis).

STRUCTURATION ET DYNAMIQUES URBAINES ÉNERGIE

er l 22 provinces, 663 municipalités et 4 municipalités l 1 consommateur d’énergie de la planète autonomes au rang de province (Shanghai, Pékin, (2300 Mtep en 2010). Chongqing, Tianjin). Mix énergétique en 2010 : 68 % de charbon, 19% de pétrole, 4,5% de gaz naturel. l En 2010 : 50% de la population est urbaine (19% en 1980). l 8,5% d’énergies renouvelables (hydraulique, nucléaire, l En 2010 : 90 municipalités de plus d’1 million d’habitants éolien et solaire). 5 de plus de 10 millions d’habitants. l Objectif en 2020 : part de 15% d’énergies renouvelables. l La terre est propriété de l’État et est mise en concession milliards de m² construits par an en Chine, soit la moitié de ÉVÉNEMENTS la construction mondiale. l Exposition Universelle de Shanghai 2010 : 73 millions de l Prospective : visiteurs. En 2025 : 220 municipalités de plus d’1 million d’habitants 8 de plus de 10 millions d’habitants. l Jeux Olympiques de Pékin 2008 : 7 millions de visiteurs.

PART FRANCAISE EN CHINE CONNECTIVITÉ

l Part de marché de la France dans les importations l Nombre d’internautes : 604 millions (en 2013). chinoises : 1,3% , 5,3% pour l’Allemagne (en 2011). l Nombre d’abonnés à la téléphonie mobile : 1,22 milliard l 1 500 entreprises françaises implantées en Chine, 5000 (en 2013). entreprises allemandes (en 2011). URBA 2000 URBA 2000

6 VOCABULAIRE

Hukou (户口) : Livret d’enregistrement de résidence, important document d’identité indiquant le lieu de naissance, de résidence officiel d’une personne et conditionnant l’accès aux services urbains. Il distingue administrativement les ruraux et les citadins, dans les domaines de la politique démographique, l’accès au logement, les soins médicaux et l’école.

Guanxi (关系) : Terme chinois renvoyant au réseau relationnel d’une personne, correspondant à la famille, les amis proches, les amis des amis, les collègues de travail,… Dynamiques fondamentales de la société chinoise, la constitution et l’usage du guanxi (« faire jouer ses relations ») font partie des incontournables pour y faire des affaires.

L’ÉQUIPE DIRIGEANTE DEPUIS MARS 2013

XI Jinping (习近平) est actuellement le Président de la République populaire de Chine, secrétaire général et président de la Commission militaire centrale du Parti communiste chinois depuis 2012. Gouverneur de la Province du Fujian en 1999, secrétaire du parti dans le Zhejiang entre 2002 à 2007, il devient membre du Comité permanent du bureau politique à partir de 2007. Il est ensuite nommé en 2010 vice-président de la Commission militaire centrale du Parti communiste chinois, préfigurant ainsi de son accession à la plus haute marche du pouvoir. Dans le « Rêve chinois » qu’il promeut, il appelle à une « grande renaissance de la nation chinoise ».

LI Keqiang (李克强) est aujourd’hui le Premier ministre chinois. Plus jeune gouverneur du pays, à la tête de la province du Henan en 1988, il est l’un des promoteurs du concept de société harmonieuse développé par l’ancien président Hu Jintao. En 2007, il devient membre du Comité permanent du bureau politique, avant d’être désigné en 2008 vice-Premier ministre, par l’Assemblée nationale populaire.

7 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER LI Xiansheng Secrétaire général adjoint du Parti Communiste Chinois de Hainan, ancien premier vice-gouverneur de la Province du Hubei, chargé du Grand Wuhan

Le Grand Wuhan Une coopération sino-française exemplaire dans le domaine du développement urbain durable

A l’occasion de l’établissement de la relation diplomatique entre la Chine et la France en 1964, le Premier Ministre ZHOU Enlai et le Président Charles de Gaulle ont désigné la province du Hubei comme le lieu de la coopération sino-française.

epuis la réforme économique pération sino-française, avec les Det l’ouverture à l’étranger de constructeurs Dongfeng et Citroën. la Chine, le Hubei et la France ont établi un lien étroit dans les domai- UN PARTENARIAT nes économique, culturel et institu- STRATÉGIQUE tionnel. Le Hubei et l’Aquitaine sont jumelées, tout comme Wuhan et Pendant cette visite, avec M. Jean- Bordeaux. Lors de sa visite à Bor- Baptiste Michel, je me suis infor- deaux début 2004, le Président HU mé de l’action « voiture électrique » Jintao a souligné la qualité exemplai- du Groupe PSA. Avec M. Jacques re de la coopération entre Bordeaux Saint-Marc, nous avons été reçus et Wuhan. Lorsque je travaillais dans par M. Alain Juppé à Bordeaux. Ils le Hubei, j’en ai porté témoignage et m’ont présenté la politique de la fait avancer la coopération avec la France dans le domaine des véhi- France. Cela m’a permis de rencon- cules électriques et de la mobilité trer beaucoup de responsables fran- durable. Le rapport de cette visi- çais qui sont devenus des vrais amis. te par l’ambassade de Chine en France a été diffusé très largement Je me souviens toujours de ma en Chine. Devenu maire de Wuhan première visite en France en 1999. en 2002, j’ai encouragé les échan- J’étais alors président de l’admi- ges avec notre ville jumelle de Bor- nistration de la zone du dévelop- deaux dans les secteurs de l’édu- pement économique et technolo- cation, de la culture, du sport, de gique de Wuhan, un parc industriel l’architecture, du patrimoine, de regroupant la plus grande coo- la protection de l’environnement.

8 PHOTOS JACQUES SAINT-MARC

Jacques Saint-Marc et LI Xiansheng. Yves Cousquer et LI Xiansheng.

Je rends ici hommage à M. Alain Jup- qui épargne les ressources naturelles comme le Grand Paris, la ligne 14 pé pour sa remarquable contribution. et l’énergie tout en assurant la pro- du métro parisien, l’usine Isseane de A Wuhan, les bâtiments conçus par tection de l’environnement urbain traitement de déchets, la climatisa- des architectes français, les arts et rural. Le 26 novembre 2007, un tion du musée du Louvre et de son français, les grandes marques de accord de coopération sino-fran- quartier, puis, à Lyon, le pôle inter- la mode et la gastronomie françai- çais sur le développement urbain modal de la gare de la Part-Dieu et la se sont omniprésents. Le Hubei est durable a été signé entre le minis- reconversion de la vallée de la chimie. devenu la province où la coopération tère français de l’écologie, du déve- sino-française est la plus dynamique, loppement et de l’aménagement Entre chaque visite technique, où l’investissement français en Chine durables du territoire et le ministère des échanges approfondis ont été a la plus forte intensité, où la popula- chinois de la construction. Cet conduits avec le ministère de l’éco- tion chinoise parle le plus le français accord était l’application de la décla- logie et de l’énergie, des vice-prési- et où la population française est la ration conjointe du même jour sur la dents de Paris et de Lyon ainsi que plus nombreuse. Le Hubei et Wuhan lutte contre le changement climati- son maire, M. Gérard Collomb, les jouent un rôle spécial dans le parte- que. L’accord stipulait qu’un site en responsables des entreprises visitées nariat stratégique sino-français. Fin développement rapide serait rete- avec leurs salariés. Mme Idrac nous a 2007, j’ai été désigné premier vice- nu pour concrétiser ses objectifs. reçus et je la remercie très chaleureu- gouverneur du Hubei, en charge du J’ai émis le souhait que le Grand sement pour son soutien constant. projet Grand Wuhan. C’est une gran- Wuhan soit le site témoin et j’en ai de conurbation constituée par Wuhan fait part à M. Jacques Saint-Marc LE GRAND WUHAN, et huit autres municipalités dans un que je connaissais de longue date. SITE TÉMOIN cercle de 100 km. Le Grand Wuhan est la partie industrielle la plus dyna- En 2009, la secrétaire d’Etat fran- Des coopérations étroites se sont mique et la plus dense du Hubei. Il çaise du commerce extérieur, Mme ensuite nouées entre le Hubei, le couvre le tiers de la superficie du Anne-Marie Idrac, m’a invité pour ministère de l’écologie, de l’éner- Hubei, la moitié de sa population et prendre connaissance des méthodes gie et du développement durable, produit les deux tiers de son PIB. de planification et d’aménagement l’ambassade de France en Chine, durables et a demandé à M. Jac- ses services économiques et de DES ÉCHANGES CONSTANTS ques Saint-Marc d’organiser la visi- coopération culturelle et le Consu- te. J’ai conduit la délégation officielle lat de France à Wuhan, pour pro- La même année, le gouvernement du Hubei en juin 2009. Ma déléga- mouvoir la coopération du Grand chinois a désigné le Grand Wuhan tion a pris connaissance de plusieurs Wuhan à l’échelle des deux États. comme site dit « des deux sociétés » projets et réalisations innovantes, Le 1er février 2010, MM. HE Xinghua

9 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

çais et chinois. À partir d’avril 2010, M. Pierre Mayet, président d’Urba 2000, a dirigé un groupe d’experts français de plus de dix personnes, qui a formé trois groupes mixtes de travail avec les experts chinois.

A l’automne 2010, ces trois équipes mixtes ont planché pendant 15 jours après six mois de travail de concep- tion et d’échanges. Elles ont proposé trois projets de planification. Ceux- ci ont été présentés au jury présidé par MM. Tang Kai1 et Yves Cousquer. La plupart des orientations du rap- port ont été intégrées par l’agence JACQUES SAINT-MARC d’urbanisme chinoise dans l’élabo- Pierre Mayet et LI Xiansheng. ration de ce Master Plan, depuis rendu public et mis en application.

et Yves Cousquer, co-présidents du LE MASTER PLAN LE COLLOQUE Comité de pilotage de l’accord de DU LAC LIANGZI FRANCO-CHINOIS SUR LE DUD coopération DUD, en présence des deux ministres, M. QIU Baoxing et Le lac Liangzi et sa région ont été Le 6 novembre 2010, le gouverne- M. Jean-Louis Borloo, ont retenu le proposés par la partie chinoise com- ment du Hubei et l’ambassade de Grand Wuhan comme site témoin. me premier site de démonstration. France ont saisi l’occasion de la visite Les deux parties sont convenues du Président HU Jintao en France, et Le 13 avril 2010, le ministre du l’ha- que ce Master Plan soit considéré la présence du jury des Ateliers pour bitat et du développement rural et comme le projet inaugural. Situé au organiser un grand colloque franco- urbain de la Chine a transmis offi- cœur du Grand Wuhan, le lac est chinois sur le développement urbain ciellement la décision de ce comi- considéré comme l’un des lacs dont durable et la présentation des projets té conjoint de pilotage. Le Grand la qualité des eaux est la plus pré- des municipalités du Grand Wuhan. Wuhan devenait le site témoin de servée en Chine. D’une superficie l’accord DUD. Sous l’égide de cet d’environ 2085 km² dont plus 225 Plus de 260 personnes, 140 français accord, et à l’occasion de la visite km² d’eau (soit 20% de la superfi- dont 75 entreprises, ont assisté à ce du Président Nicolas Sarkozy le 30 cie de la municipalité de Wuhan), il colloque. Le ministère de l’habitat avril 2010, M. LI Hongzhong, alors est entouré par les municipalités de et du développement urbain et rural gouverneur du Hubei, et M. Jean- Wuhan, Ezhou, Huangshi, Xianning. (MoHURD), la Commission Nationale Louis Borloo, alors le ministre de C’est une réelle difficulté de protéger du Développement et de la Réforme l’écologie et de l’énergie ont signé ses eaux dans cette région très urba- (NDRC), le gouvernement de Hubei, à Shanghai, une lettre d’intention nisée. Le Hubei s’y est assigné un l’ambassade de France, le Consu- précisant les objectifs de coopéra- objectif de développement modéré. lat de France à Wuhan, les experts tion DUD entre le Hubei et la France. Il était impératif d’avoir un plan cohé- français et les représentants des Cette lettre stipule que la coopération rent pour orienter celui-ci. Ce Master entreprises des deux parties y ont portera sur la planification urbaine et Plan est emblématique de cette coo- participé. Après la présentation des l’aménagement durable, les trans- pération exemplaire. Avec un finan- ports, les économies d’énergie, des cement « FASEP », cette démarche

nouveaux matériaux de construction d’ateliers DUD a été mise en œuvre 1 Directeur général de la planification urbaine et la protection de l’environnement. et coproduite avec des experts fran- et rurale du MoHURD

10 résultats du travail des « Ateliers » sont venus prendre connaissance ministre français, a adressé une let- par M. Pierre Mayet, des échanges des projets DUD du Grand Wuhan. tre à son homologue chinois M. LI très approfondis ont eu lieu entre Keqiang. Il y cite la réussite exem- les experts français et chinois dans Ces entreprises, qui font partie des plaire de la coopération des deux la perspective d’une planification et 500 plus grandes du monde, y ont pays dans ce domaine du DUD, et d’aménagement durables, de l’effi- installé leurs centres de décision en particulier le Grand Wuhan. Il pro- cacité énergétique dans la construc- pour la Chine ou pour l’Asie. Conju- pose d’y choisir un site où les deux tion et les transports, de la préser- guant leurs efforts, les deux parties pays pourront coopérer pour réali- vation de la qualité des eaux des ont soutenu la création d’une liaison ser avec les meilleures technologies lacs et du fleuve, du traitement et la aérienne directe par Air France entre une nouvelle ville de très grande valorisation des déchets, du déve- Wuhan et Paris, inaugurée en avril qualité DUD. En France le 25 octo- loppement industriel, illustrant ainsi 2012. Depuis plusieurs années bre 2013, M. LI Hongzhong, secré- les objectifs des « deux sociétés ». nombreux sont les rencontres et les taire général du Comité du PCC pour échanges avec M. Yves Cousquer , la province du Hubei, a signé avec L’ESSOR DES co-président du Comité de pilota- Mme Martine Aubry et M. Philippe INVESTISSEMENTS DES ge du premier accord sino-français Martin, ministre de l’écologie et du ENTREPRISES FRANÇAISES DUD, M. Jacques Saint-Marc, son développement durable un mémo- délégué, le Consulat général, le servi- randum portant sur le projet d’une Les responsables des neuf villes du ce de l’action économique et celui de « ville écologique DUD » au sein du Grand Wuhan ont présenté leurs l’action de coopération de l’ambas- Grand Wuhan. Le DRC du Hubei a projets aux responsables publics, sade de France en Chine, avec Mme signé un plan quinquennal de coo- aux entreprises et aux experts fran- l’ambassadeur, Sylvie-Agnès Ber- pération pour le Grand Wuhan. çais. Le journal Le Monde a publié un mann, et les entreprises. Cette coo- reportage, accroissant ainsi la noto- pération s’intensifie de jour en jour La Chine est entrée dans une nouvelle riété mondiale du Grand Wuhan. A grâce à leur grande disponibilité et à ère appelée « Nouvelle Urbanisa- la suite de ce colloque, les ambas- notre volonté commune de réussite. tion ». Ayant mené à bien les objec- sades des Etats-Unis, de l’Allema- tifs des « deux sociétés », le Grand gne, de la Corée du Sud ont tou- L’APPROFONDISSEMENT Wuhan, avec ses objectifs réussis tes envoyés des délégués de haut DE LA COOPÉRATION y joue un rôle très important. Il pré- niveau dans le Hubei, à la recher- sente ainsi des belles opportunités che d’opportunités de coopération. Le Consulat de France à Wuhan a économiques. Bien que je ne travaille été renforcé avec l’arrivée d’un atta- plus dans le Hubei, son développe- Le Hubei a proposé aux neuf munici- ché DUD. Le 5 juillet 2013, en pré- ment dans cette perspective DUD palités du Grand Wuhan de présenter sence de plusieurs industriels fran- et le succès concret de la coopéra- des projets à l’Agence française de çais et du Hubei, une table ronde tion sino-française me tiennent tou- développement (AFD). Ainsi, le projet conjointe a dressé un premier bilan jours tout particulièrement à cœur. de réhabilitation thermique des bâti- de cette coopération. Mme Martine J’y prête une très grande attention et ments publics de Wuhan a obtenu un Aubry, représentante spéciale pour la espère, jour après jour, en voir pros- prêt AFD de 21M€. Le projet de pôle Chine du ministre des affaires étran- pérer les fruits. intermodal du Terminal 3 de l’aéro- gères, et Mme l’ambassadeur y port Tianhe de Wuhan, bénéficiera assistaient. Les entreprises et agen- d’un prêt de 20M€. Le Grand Wuhan ces françaises y ont présenté leurs devient ainsi mieux connu en France offres donnant ainsi une vision d’en- Vous trouverez l’article de Mon- et en Europe. De nombreux indus- semble des savoir-faire français. Au sieur LI Xiansheng en intégralité triels français s’y intéressent. Ces cours de cette réunion, M. WANG dans sa version chinoise page 118. dernières années, des décideurs de Guosheng, gouverneur du Hubei, grandes entreprises françaises com- et Mme Aubry ont pu échanger me Eurocopter, Schneider Electric, leur vision sur le DUD. Le 24 juillet 在第118页您可以找到李宪生的中文 AREP, Keolis, Egis, Saint-Gobain 2013, M. Jean-Marc Ayrault, Premier 版的文章.

11 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Professeur PEI Gang Président de l’Université Tongji (Shanghai)

Regards croisés sur l’urbanisation en Chine et en France

PEI Gang, professeur en biochimie et Le professeur PEI Gang s’entretient avec PCM. biologie cellulaire, préside l’université Tongji depuis 2007. Diplômé en science et en pharmacie de l’université de PCM : Quel intérêt l’expérience que de la conception des politiques. Shenyang, il a obtenu son doctorat en française de l’urbanisation vous Quant au fond, il s’agit d’un ajuste- biochimie et biophysique à l’université paraît-elle présenter pour un ment permanent du régime social, et de Caroline du nord aux Etats-Unis. Il développement urbain durable en plus encore du régime économique, a été élu membre de l’Académie des Chine ? Réciproquement, que pen- afin de libérer la productivité, accé- sciences de Chine en 1999 et membre sez-vous que la Chine peut ensei- lérer le développement et favoriser de la troisième Académie mondiale gner à la France en la matière ? l’urbanisation. Quant au proces- des sciences en 2001. En qualité sus, il s’agit d’une approche dyna- de président de Tongji, il co préside Professeur PEI Gang : Le modèle mique faite de mesures en temps avec le directeur de l’ENPC, l’Institut français apparu après la secon- réel, d’une analyse des retours et Franco-Chinois d’ingénierie et de de guerre mondiale, alimenté par d’une prise de décision en temps management. le double moteur de l’industrialisa- réel permettant l’ajustement dyna- tion et de l’innovation, pourrait ins- mique des politiques, des straté- pirer la Chine dont le développe- gies et des régimes. Ceci permet ment est fondé principalement sur de répondre rapidement et effica- l’industrie. Le taux d’urbanisation cement à l’évolution de la société. en Chine atteint désormais 50%. Sa Avec le retour d’expérience, un cer- dynamique doit être fondée dans la cle vertueux peut ainsi s’enclencher. durée. Réciproquement, l’appro- che chinoise qui consiste à ajus- PCM : Comment concevez-vous ter les politiques aux enjeux du l’évolution de la gouvernance ter- moment pourrait inspirer le monde. ritoriale des villes (des petites vil- les aux grandes métropoles) ? L’urbanisation de la Chine est étroi- tement liée à l’approfondissement Professeur PEI Gang : La mon- de la réforme économique au niveau dialisation et l’informatisation dans national et à l’ajustement dynami- lesquelles nous baignons font évo-

12 luer l’urbanisation dans une éta- qu’elles proviennent de différents de fournir des lois et modèles expli- pe de « compétition / fusion ». Une secteurs pour nourrir des points catifs des phénomènes sociaux et ville ne « se bat plus toute seule » : de vue différents. Le fonctionne- de les appliquer au développement. les différents niveaux du territoire ment et la gestion de la commu- Ici, le rôle des sciences sociales est urbain en développement se bat- nauté, elle doit savoir fonctionner particulièrement important s’agis- tent « en armée ». Autrement dit, non seulement en mode hiérarchi- sant de la conception des politiques la mondialisation et l’informatisa- que pyramidal, mais aussi en mode et du développement culturel. Les tion sont en train de briser le car- horizontal (diversité et services). réformes des politiques suscitent can de la gouvernance territoriale de nouvelles relations entre les dif- traditionnelle des villes, forçant ain- Le rapport avec les investisseurs et férents partenaires (les aménageurs si leur mutation. Dans ce cadre, l’af- autres gestionnaires privés se pré- et les usagers) qui libèrent la pro- faiblissement de la gouvernance sente sous trois points principaux. ductivité et la développent. Via la administrative territoriale concomi- Tout d’abord, des relations plus conception des régimes, l’allocation tant au renforcement de la coopé- égales, les ressources urbaines et des ressources gagne en efficacité ration des différents niveaux du ter- l’investissement en capital sont et un système d’incitation peut être ritoire est une tendance inexorable. devenus fluides. Tous deux recher- établi. Dans le même temps, il est chent désormais leurs partenaires à également très important de créer Concernant la coopération entre les l’échelle mondiale. Leur conjugaison un environnement culturel riche. diverses autorités, le « savoir-faire » pourrait se faire de façon encore plus l’urbanisation devient crucial. A ce étroite. Ensuite, des coopérations PCM : Selon quels axes l’université titre, la coopération entre les différen- plus étroites, la fluidité s’acquiert chinoise doit-elle faire porter son tes autorités intervenant sur un terri- par le couplage de la ressource et du effort pour aider au développement toire donné est appelée à devenir de capital, partageant la même nature et urbain durable de votre pays ? plus en plus étroite, son contenu de la même destinée. Dans la compéti- plus en plus riche et la méthode de tion à laquelle se livrent les différents Professeur PEI Gang : Par défini- plus en plus diversifiée. Cette coo- systèmes et régimes, la coopération tion, l’université en tant qu’organis- pération pourrait se déployer dans est une condition de survie. Enfin, la me de formation a vocation à innover certains secteurs : ainsi, à l’échelle coopération à distance, avec le déve- avec la conception de nouveaux mondiale, la coopération entre les loppement d’internet et de la logisti- régimes et à former des talents créa- villes pourrait être fondée sur la divi- que, certains investissements n’ont tifs et pragmatiques pour l’avenir sion du travail ou la complémenta- plus de relation directe avec les auto- (l’innovation ayant son propre régi- rité économique. Il faudra non seu- rités locales. Je pense par exemple me). Les professeurs et experts de lement savoir coopérer, mais encore au site Tao bao de Ma Yun, ou enco- l’université doivent sortir du campus savoir communiquer et créer l’am- re à QQ et We chat de Ma Huateng. et coopérer directement avec les biance et l’espace de la coopération. diverses autorités, les entreprises, PCM : Comment concevez- les ONG et les autres instituts, afin de Concernant le développement d’une vous la contribution des scien- participer plus activement à la créa- communauté d’expertise de haut ces sociales à l’éclairage des tion de la ville. Enfin, en tant qu’orga- niveau, la diversité semble essen- objectifs et à la qualité des réa- nisme d’innovation et de recherche, tielle. Elle se manifeste sous trois lisations et de la gestion urbai- l’université doit innover et intégrer les angles : l’origine géographique des nes au sein de cette communau- connaissances et techniques les plus experts, ceux-ci doivent connaître té d’expertise de haut niveau ? avancées. Il faudra qu’elle facilite la non seulement la ville en question, coopération sur différents sujets et mais aussi sa région et d’autres vil- Professeur PEI Gang : Dans le entre les métiers, afin de fournir des les dans le monde. Les compé- développement de la société humai- services raisonnés à la ville en tences des experts, il est essentiel ne, le but des sciences sociales est construction.

13 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Pierre Mayet Président d’Urba 2000 Ancien vice-président du conseil général des Ponts et Chaussées

Le développement durable en Chine, quelque peu à la française

Président d’Urba 2000, Pierre Mayet Le monde devient urbain. Pourra-t-il être durable ? est ingénieur général des Ponts et La Chine détient sans doute la réponse. L’expérience Chaussées. Il a achevé sa carrière au ministère de l’Équipement en tant française présente d’utiles enseignements pour un que vice-président du conseil général pays mis au défi d’une véritable mutation vers un des Ponts et Chaussées. Avec Urba modèle de développement urbain durable. Celui-ci 2000 et dans le cadre de l’accord pourra-t-il être quelque peu à la française ? de coopération franco-chinois de 2007 sur le Développement Urbain Durable (DUD), dont il a été l’un des e développement urbain de la de millions d’habitants, accédant inspirateurs, il met en œuvre des LChine est désormais généralisé ainsi à un modèle de consomma- actions démonstratives sur le territoire à l’échelle de tout le territoire de ce tion comparable au nôtre. L’opti- pilote du Grand Wuhan. pays-continent. Son intensité dépas- misme entourant cette progression se nos expériences, et se déploie au est celui d’une société qui se sait rythme de l’extraordinaire dévelop- appelée à devenir prochainement la pement économique porté par l’in- première puissance économique du vestissement qui voit la croissance monde, présente partout, avec une de son PIB se tenir depuis plus de population dont le poids démogra- 20 à 25 ans à près de 10 % par an. phique va de pair avec un remarqua- ble niveau d’éducation et de forma- Le seuil de 50 % de population urbai- tion, mais aussi qui doit s’adapter ne vient d’être franchi et les prévisions au vieillissement de sa population. conçoivent la réalisation de cette urbanisation jusqu’à accueillir enco- Déjà l’ordre du jour énoncé par le re d’ici 2030 ou 2035 environ 400 nouveau Président Xi Jinping, est millions de citadins supplémentaires. celui de la qualité de vie, le bien-être de la société chinoise. Cet ordre L’URBANISATION AU PLUS du jour avait été précédé par celui FORT DE SA DYNAMIQUE de l’harmonie et comprend des politiques comme celle de l’écono- La Chine devient urbaine avec l’ex- mie circulaire ou les deux orienta- traordinaire émergence d’une clas- tions de l’économie des ressources se moyenne de plusieurs centaines et du respect de l’environnement,

14 D.R.

La Chine devient urbaine avec l’émergence d’une classe moyenne de plusieurs centaines de millions d’habitants.

autant dire celles du développe- ligence stratégique du territoire ». avec et entre les porteurs de projets. ment durable. Cependant, peut-on Notre expérience récente qui, compte Cet effort d’élévation du niveau de dire aujourd’hui que le développe- tenu de la modestie des volumes et la gouvernance des villes se recon- ment urbain en cours peut réelle- des rythmes, ne saurait prétendre nait en France lorsque des person- ment conduire aux équilibres d’un apporter des réponses à l’échelle nalités politiques de premier plan au développement durable ? Peut-on de la Chine, a cependant une sin- niveau national, peuvent témoigner être assuré que les villes en déve- gularité : celle d’avoir connu, 30 à de leur expérience dans l’exercice loppement seront réellement viva- 50 ans avant elle, la même situa- des responsabilités territoriales à la bles avec la qualité de vie à laquel- tion de mutation d’un pays de tra- tête de grandes métropoles comme le aspireront les populations ? C’est dition et à majorité rurale à un pays à Bordeaux, Nantes ou Lille. L’ef- maintenant, que les moyens doi- moderne et urbain. Une autre simi- fort n’est pas achevé, au moment vent être mobilisés, et c’est urgent. litude se trouve dans le fait que la où le Parlement renforce cette gou- Chine, comme la France, a une tra- vernance urbaine en créant l’institu- La Chine montre déjà d’étonnantes dition de gouvernement centralisé, tion des Métropoles, y compris les capacités à répondre aux exigen- reposant sur une forte organisation trois spécifiques du Grand Paris, du ces du développement durable. Il administrative (entre bureaucrates, Grand Lyon et du Grand Marseille. suffit de voir, sur place, avec quelle on se reconnait !). Enfin, nos amis intensité et quelle rapidité sont chinois, n’étant pas insensibles aux L’EXPÉRIENCE FRANÇAISE mises en œuvre de nouvelles solu- qualités et au charme de nos villes, D’UNE URBANISATION MATURE tions technologiques dans le domai- peuvent en venir à prêter attention ne des énergies renouvelables ou à nos politiques de développement Témoin et acteur de l’expérience dans celui des technologies vertes. urbain et d’aménagement du terri- française de l’urbanisation en Fran- Le modèle concret de l’urbanisa- toire et aux savoir-faire associés. ce depuis 1970, les circonstances tion en cours reste celui de l’exten- Nous avons appris que les politiques m’ont fait rencontrer en 2000 des sion périphérique des villes, haute- urbaines et d’aménagement du ter- responsables chinois du développe- ment non durable. Etrangement, la ritoire, énoncées au niveau national, ment urbain. Echangeant nos expé- planification urbaine en Chine n’est ne peuvent être mises en œuvre sans riences, nous avons été sensibles à pas à la hauteur des enjeux et n’a l’émergence d’une meilleure capaci- l’idée que les similitudes des trajec- pas encore forgé les savoir-faire té à porter la vision d’ensemble de toires de l’urbanisation et des problè- que sa pratique nécessite, asso- la ville sur son territoire, et, à assu- mes qu’elles posent, avec un déca- ciant les autorités d’un territoire et rer dans la durée, un véritable pilo- lage de 30 ans, pouvaient mettre les experts (multisectoriels, pluridis- tage des cohérences, coordinations à disposition de la Chine quelques ciplinaires) en une véritable « intel- et compatibilités devant s’établir indications utiles tirées de notre

15 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

comme une utopie. L’accord a été conseil et d’assistance à la maîtrise signé, au niveau où il l’a été, et a fait d’ouvrage urbaine du territoire ; l’ac- sien l’objectif proposé par cette uto- compagnement des autorités publi- pie. Il impose qu’elle débouche sur ques territoriales dans leur recherche une véritable stratégie, c’est-à-dire, de valorisation foncière auprès des l’art (spécialement apprécié dans la investisseurs, aboutissant aux actes culture chinoise) de savoir rassem- de cession foncière et d’autorisation bler, organiser et piloter les moyens d’urbanisme, sur la base de projets dont on dispose pour viser et attein- dont la conception et les conditions dre l’objectif, aussi haut soit-il ; c’est proposent un niveau de qualité jus- un art réaliste qui se juge au résultat. tifiant d’un DUD et le développe- ment d’une conception d’ensemble ESQUISSE D’UNE STRATÉGIE et des moyens d’organisation et de

URBA 2000 régulation d’un véritable « éco-systè- Qualité de vie et bien-être sont des L’objectif est que la Chine puisse me » de la mobilité et des transports. fondamentaux de la société chinoise. avoir un modèle de développement urbain durable (DUD) où l’on puisse La méthode serait de constituer par expérience. Si celle-ci comporte reconnaître quelques traces transpo- ses échanges une véritable commu- des réussites, elle compte aussi des sées de l’expérience française. C’est nauté franco-chinoise d’expertise problèmes mal résolus exigeant des pour cela que le premier choix de territoriale, à la fois « apprenante », efforts de correction très difficiles l’accord franco-chinois pour le DUD chacun apprenant des autres, et (la question des grands ensembles a été celui d’une approche spécifi- en même temps « innovante », par en mal d’intégration urbaine). Cette que de la coopération française, la sa capacité à proposer des nouvel- expérience a créé des savoir-faire, distinguant des autres coopérations les solutions et de nouveaux projets associés à la gouvernance territo- internationales : l’approche territoria- appelés par la mutation vers un DUD. riale, visant à la meilleure prise en le, dont l’expérimentation des appli- L’espoir, l’ambition de cette straté- compte des objectifs d’équilibre du cations se concentre sur un territoire gie française serait alors que, sur développement durable et à la pro- démonstratif, celui du Grand Wuhan. l’exemple et la visibilité en Chine de motion de nouvelles solutions inno- Cette approche doit permettre des ce territoire démonstratif, les capaci- vantes nécessaires pour les atteindre. échanges franco-chinois de savoir- tés et l’excellence technologiques de faire entre les autorités publiques nos entreprises à l’export se trouvent C’est sur cette hypothèse d’un inté- du territoire prenant les décisions, plus directement et plus intensément rêt chinois pour ce qu’il y a de spé- avec et entre les responsables recherchées pour participer à la réa- cifique dans l’expérience françai- des administrations, les experts lisation de projets dont le niveau de se (du fait de son antériorité et de sur lesquels ils s’appuient, et avec qualité garantisse leur valeur durable. nos similitudes) qu’a été conçue et les responsables opérationnels de Le défi français serait que l’urbanisa- conclue la coopération franco-chi- l’aménagement, des services de tion en Chine comporte quelque tra- noise sur le développement urbain transports ou de l’environnement ; ce discrète d’une contribution fran- durable (DUD), d’abord en 2007, c’est créer ainsi un terrain plus fer- çaise à la conception des projets puis renouvelée plus récemment en tile pour le développement des pré- (une french touch légère, mais per- avril 2013, à l’occasion de la premiè- sences de nos entreprises réalisa- sistante) et que des traces substan- re rencontre officielle des deux nou- trices ou gestionnaires de services. tielles et bien concrètes dans les pro- veaux présidents de nos républiques. jets réalisés soient le signe de la La disproportion entre les forces Pour la coopération avec l’expertise vitalité et de la performance de nos engagées dans l’urbanisation de la française sur le territoire démonstra- entreprises. Le défi français, c’est Chine et la modestie de nos œuvres tif du Grand Wuhan, et ailleurs si la que la réponse chinoise à son propre et des ressources que nous pou- démonstration est probante, l’atten- défi, celui de son développement vons engager est telle que formuler tion devra se porter en priorité sur : la urbain durable, puisse apparaître ain- cette hypothèse pourrait apparaître conduite des études et prestations de si quelque peu à la française.

16 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER

Pierre Clément Président Arte Charpentier Architectes La Chine : laboratoire de la ville

Pierre Clément, architecte, professeur L’agence Arte Charpentier Architectes a eu la honoraire à l’ENSA de Paris-Belleville chance d’observer l’évolution architecturale et chercheur associé à l’IPRAUS, ENSA de Paris-Belleville, président de urbaine de la Chine sur une période de trois l’Agence Arte-Charpentier depuis décennies et, dans le même temps, celle aussi de 2011, est diplômé de l’Institut des pouvoir participer activement à la réalisation langues orientales et de l’EHESS. d’œuvres architecturales et urbanistiques Il a commencé sa carrière en Asie. significatives et emblématiques. Architecte au Laos, il travaille à son retour chez Joseph Belmont. Il s’est orienté pendant 20 ans vers l’enseignement et la recherche à u cours de cette longue expé- leurs portes et que les facultés d’ar- l’Institut de l’Environnement, puis au Arience chinoise, nous avons chitecture ont réapparu. En 2010 Centre d’Etudes et de Recherches surtout beaucoup appris sur les déjà, la Chine organisait l’Exposition Architecturales à l’Ecole Nationale savoirs et les savoir-faire, anciens universelle de Shanghai sur le thème Supérieure des Beaux-arts. Il participe et modernes de la Chine ; sa soif « better city, better life » qui témoi- à la création de l’Institut français d’apprendre et sa volonté de for- gnait qu’en trente ans, la Chine se d’Architecture, où il développe dès mer, sa faculté d’adaptation et sa voulait dans ce domaine le laboratoi- 1980, une coopération active avec la capacité à innover et expérimenter. re du monde. En 2012, le Prix Pritz- Chine. Nous illustrerons ici les thématiques ker, « le Nobel de l’architecture », qui constituent, sur la longue durée, était attribué pour la première fois le socle de cette coopération pour à un architecte chinois, Wang Shu. « mieux vivre ensemble » : la ques- tion de l’habitat ; l’existant comme Si, sur la longue histoire de l’huma- ressource, voire comme patrimoi- nité, plus de la moitié des villes du ne ; l’espace public et les équipe- monde ont été construites en Chine, ments culturels ; les villes nouvelles. c’est encore dans ce pays, dans les trente ans à venir, qu’il va falloir UNE LONGUE HISTOIRE construire l’équivalent de quelque 400 villes millionnaires pour accueillir Rappelons que la réforme écono- les flux migratoires dus à l’exode mique s’est mise en place en 1979, rural. Si la Chine est aujourd’hui le que les universités ont alors rouvert « premier atelier du monde », elle est

17 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES ARTE CHARPENTIER ARCHITECTES Au coeur de Shangai dans le district de Luwan, restructuration d’un quartier d’habitations et de commerce.

aussi, dans le champ de la construc- Elle voulait améliorer la qualité de ses chinois du Développement Techni- tion, de l’urbanisme et du paysage, le constructions et diversifier son archi- que du Bâtiment de Pékin, auprès « premier laboratoire de l’expérimen- tecture. C’est alors qu’Arte Charpen- du ministère chinois de la Construc- tation » des technologies du futur et tier a commencé à participer aux tion et la Société d’architecture de de création de nouvelles commu- échanges de coopération culturels Chine, ou encore les municipalités nautés destinées à vivre ensemble. Il et techniques entre la France et la de Pékin , Shanghai, Dalian, Chon- nous faut être capable d’y participer Chine concernant l’architecture, la gqing, Nanning, Zhengzhou, Taiyuan, et il nous apparait comme une évi- ville et l’habitat, initiés par l’Institut Xi’an1, ou Wuhan… C’est ainsi que dence que le partenariat qui se joue Français d’Architecture, l’associa- nous recevions dans l’enseigne- aujourd’hui dans le renforcement de tion Construire en Chine sous l’égi- ment ou dans l’agence à Paris, dès nos relations d’échanges : scien- de du ministère de l’Equipement. le milieu des années 80, les premiers tifiques, culturels, économiques et stagiaires chinois étudiants des pre- industriels, ne peut être que fécond et Au cours de cette période, nous mières générations d’architectes. porteur d’avenir pour nos deux pays. avons parallèlement tissé des liens Ces échanges ont depuis lors pris solides et féconds avec de nom- des formes plus institutionnelles. LA QUESTION DE L’HABITAT breux confrères chinois : profes- C’est ainsi que depuis de nombreu- sionnels, enseignants, chercheurs,

A nos premiers contacts, la Chine étudiants et avec de nombreuses 1 Xi’an, an ancient city in a modern world, des années 80 commençait à s’in- institutions municipales ou nationa- Evolution of the urban form 1949-2000 par terroger sur sa production de loge- les, professionnelles, académiques Pierre Clément ,Bruno Fayolle-Lussac ,Harold Høyem. .Éditions Recherches, collection : Les ments, répétitive et standardisée. et scientifiques, comme le Centre Cahiers de l’Ipraus, Paris, 2007.

18 ses années un partenariat entre l’éco- de d’une expertise étrangère. Nous une démarche nouvelle pour l’ur- le d’architecture de Paris Belleville et sommes, en mai 1994, lauréats du banisme chinois où la place, com- l’université Tongji à Shanghai, permet concours international pour l’Opéra me espace public accessible à tous, de recevoir des étudiants de mas- de Shanghai, qui sera notre première était absente des villes anciennes. ter dans un programme commun2, réalisation emblématique. Le chan- Nous avons eu la chance de partici- qu’ils peuvent poursuivre en thèse tier de l’opéra aura été un grand défi per très en amont à la réflexion pour de doctorat3. En 2002, Arte Char- que nous avons relevé avec ECADI, l’élaboration d’une série de grands pentier a créé une filiale, société de Institut shanghaien. Il nous aura espaces publics majeurs de Pudong. droit chinois, à Shanghai : Charpen- beaucoup appris sur les pratiques tier Architecture Design Consulting. de la maîtrise d’ouvrage, les capa- C’est d’abord la réalisation de Cen- cités et l’inventivité sans limites des tral plazza, la première place moder- L’EXISTANT COMME entreprises et des instituts chinois. ne de la ville chinoise, qui devait RESSOURCE OU PATRIMOINE Nous poursuivrons la réalisation de accueillir l’arrivée du métro souter- grands équipements culturels avec rain et des commerces. Elle était Dans les années 80, une premiè- la construction de l’opéra du Shaanxi entourée du siège de l’administra- re expérimentation de coopération à Taiyuan (2012), dans un quar- tion territoriale déjà en construction franco-chinoise fut engagée avec tier dont nous avons réalisé le plan et du musée des Sciences en pro- la Commission de la Construction d’ensemble ; avec le projet d’un jet. Elle donnait accès au Parc Cen- de la municipalité de Shanghai, sur complexe sportif et culturel com- tral et à l’amorce de l’Avenue du siè- le projet de réhabilitation du quar- prenant un troisième opéra à Xinpu, cle. Vaste carré de 200 mètres par tier Qianjiatang, sur Huaihai Lu. autre ville de cette même provin- 200, elle est bordée par des terras- Cette démarche de réhabilitation ce du Shaanxi. Les autres agences ses qui en définissent les contours. d’un quartier constitué, en refusant françaises s’illustreront aussi dans la politique de destruction complète, ce champ des grands équipements Au moment où se construit cette pla- la tabula rasa, mais en intégrant au culturels, qu’il s’agisse d’ADPI, ce se pose la question de la jonction tissu historique des constructions AREP ou Architecture Studio. entre ce quartier politique et culturel nouvelles, sera reprise vingt ans plus et celui de , centre d’affaires tard sur le quartier de Luwan, iden- LA QUESTION sur le Huangpu. C’est alors que nous tifié comme l’un des secteurs histo- DE L’ESPACE PUBLIC remportons la consultation en propo- riques à préserver et aussi en 2011 sant l’Avenue du siècle (1998-2001) dans la réhabilitation des ancien- C’est à la fin des années 9O qu’ap- d’un seul tenant, identique d’un bout nes usines textiles sur le Huangpu paraît à Shanghai la nécessité de à l’autre sur les 5 km de long et 100 transformées en Centre de la mode. repenser les espaces publics à mètres de large. Elle est organisée en l’échelle métropolitaine. C’est là boulevard urbain, au niveau du sol, Au cours de ces expériences, enco- re trop rares en Chine, s’est confor- 2 Architecture et territoires, DSA Diplôme de spécialisation et d’approfondissement en Architecture, tée une conscience patrimoniale qui architecture et projet urbain, ENSA Paris-Belleville. peut faire de l’existant une ressource, 3 On retiendra parmi les doctorats soutenus sur la Chine à l’IPRAUS, Institut parisien de recherche architecture urbanistique et sociétés, Ecole Nationale Supérieure d’architecture de Paris Belleville, ceux de : qu’il s’agisse de simples bâtiments, Wang Yu, La fabrication des quartiers à la lumière des préoccupations environnementales: étude comparée de monuments, de lieux emblémati- France-Chine, Université Paris –Est, janvier 2013. ques, d’un centre ancien, de simples Shu Yang, Wuhan : aux interfaces ville/eau. Les formes urbaines en mutation, Université Paris- Est Février 2011. quartiers ou d’une rue historique, ou Stéphanie Boufflet, Le processus de renaturation de la capitale chinoise à l’aube des années 2000 : un encore de rivières ou de paysages. “souffle vert” sur Pékin ? mai 2011, Université Paris-Est et Université d’Orléans. Huang Quan Le,Une urbanisation hybride. Métamorphose spatiale et sociale de Shipaï, « village urbain » de Canton en Chine, 1978/2008, janvier 2010, Université de Paris 8. Dans les années 90, les projets se Li Jun, La forme de l’espace urbain de Wuhan pendant la période historique 1861-1949, et pistes pour le développement contemporain. L’approche historique comme guide pour le renouvellement urbain– en diversifient et apparaissent les pre- cotutelle Université de Wuhan / Université Paris 8, Wuhan septembre 2005. miers programmes d’équipement YuYifan,Transformation de l’habitation à Shanghai de 1949 à 2000. Une méthode d’approche de la morphologie, EHESS-Université Tongji, décembre 2003. et de bâtiments publics. C’est le Zhang Liang, La naissance du concept de patrimoine en Chine, Éditions Recherches, Collection : moment où s’exprime la deman- Archithèses, Paris, 2003. Enfin Yang Liu, sur les villes nouvelles de Shanghai en cours (2014).

19 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

en organisant les îlots d’habitation autour de cours-jardins centraux, réinterprétant l’espace de la mai- son à cour et son urbanité à l’échel- le de l’îlot. Le projet a été honoré de la médaille d’or de l’urbanisme. Dans cette même logique de villes structurées autour des problémati- ques environnementales qu’incar- nent les trames « verte » végétale et « bleue » hydraulique, nous déve- lopperons le projet de ville nouvel- le de Nanhui, 1999-2000, toujours à Pudong, celle de Gaoqiao, puis un autre quartier à Luchaogang au débouché terrestre du nouveau port en eau profonde de Shanghai. Durant ces années, de très nombreux projets ont été lancés en Chine, ils DIDIER BOY DE LA TOUR L’opéra de Shanghai. n’ont pas tous abouti. Mais, dans la Chine des années 2000, les transfor- mations sont rapides. Entre la déci- sion de lancer Pudong, en 1992, et avec des croisements de voies défi- poles en transformation, notamment aujourd’hui, il ne s’est écoulé que nissant des places, et non pas com- dans la politique de développement vingt ans et le pari a été tenu, au-delà me une voie rapide, avec des échan- des villes de l’intérieur vers l’ouest. de toutes les prévisions les plus opti- geurs sur plusieurs niveaux. L’avenue mistes. Les projets urbains au cours a été conçue en tenant compte de LES PREMIÈRES VILLES de cette période ont suivi la courbe son urbanité et du plaisir des pié- NOUVELLES de développement de la population tons. Elle est agrémentée de vastes urbaine, comme celle du dévelop- jardins, ouverts ou clos, sur toute sa Parallèlement aux projets menés pement du PIB, et les dimensions longueur. Dans le même temps en dans la ville ancienne de Shanghai des projets ont été considérable- 1999, la municipalité nous confie la sur son tissu constitué, était apparue ment amplifiées. C’est ainsi que nous transformation de la partie centrale la nécessité de développer de nou- avons participé à la consultation pour de la rue de Nankin, celle des grands velles villes et de nouveaux quartiers l’extension de la ville de Zhengzhou, magasins, en rue piétonne. Ce sera expérimentaux annonçant le troi- au Henan, sur le Fleuve Jaune, qui le premier exemple qui servira lar- sième millénaire. C’est ainsi que la devait accueillir quelque 2,5 mil- gement de modèle ailleurs dans les municipalité de Shanghai lance une lions d’habitants supplémentaires. autres villes chinoises. Shanghai en consultation internationale pour la effet deviendra le modèle de réfé- réalisation du quartier de Wanli, en Nous avons eu la chance d’être rence que les autres métropoles 1997-1998, à l’époque au nord- durant trente ans les témoins de ces veulent imiter : quartiers réhabilités, ouest à l’extérieur de la ville. Il devait premières transformations : en 2003 grands équipements culturels, espa- abriter quelque 100 000 habitants et 2005 nous publions nos premières ces publics majeurs : places, gran- sur 200 ha, et être un quartier expé- réalisations en Chine4, en 2012 cel- des avenues, rues piétonnes, enfin rimental sur le plan environnemental. les de la dernière décennie5. Après villes nouvelles. Après quinze années une première décennie shanghaien- d’investissement sur la métropo- Nous remportons ce concours en ne, nous travaillons aujourd’hui sur le shanghaienne, nous suivons le structurant les secteurs autour d’une un grand nombre de villes chinoises : mouvement vers les autres métro- puissante trame verte de parcs, et Wuxi, Suzhou, Wuhan, Pékin, Chon-

20 gqing, Dalian, Taiyuan ou encore Alaer au Xinjia, etc. A Chongqing, nous réalisons « sur la péninsule des pêcheurs », sur 7 km de long, un quartier expérimental respectueux de la topographie et de l’environ- nement où se combinent savoir-fai- re urbanistique chinois et français.

DÉFIS ENVIRONNEMENTAUX ET DIMENSION TERRITORIALE

En 2005, conscients de l’importan- ce des enjeux environnementaux dans le bâtiment et la ville en Chine, nous participions à l’élaboration de l’ouvrage The Sustainable Design Handbook China, High Environmen- tal Quality Cities and Buildings6. Les projets réalisés en Chine, relèvent de nos recherches menées en Fran- ce ou en Chine pour affronter deux défis posés à l’architecture et à l’ar- chitecte aujourd’hui. Le premier est urbain, c’est celui de créer une ville agréable à vivre pour ses habitants, de développer l’urbanité et la convi- vialité par la capacité à vivre ensem- ble, en organisant la mixité sociale et fonctionnelle et l’harmonie dans des espaces publics partagés.

Le second défi est environnemental,

c’est celui de l’économie des res- DIDIER BOY DE LA TOUR sources : l’espace, l’énergie, les La rue de Nankin (Shanghai). matériaux, les ressources naturelles : l’eau, la biodiversité, le végétal et le paysage aux différentes échelles, ment chinoises. Nous avons l’intime et qu’elle a aussi tous les atouts pour celle du bâtiment, comme nous conviction que la Chine est mettre en place les conditions d’épa- l’avons fait à Wuhan pour la Maison aujourd’hui le terrain privilégié des nouissement de l’homme et de la du citoyen, du quartier, de la ville, ou expérimentations les plus innovantes société dans l’espace de la cité. encore du grand territoire, comme nous le faisons pour le Grand Paris7 que nous avons eu l’occasion de 4 Pierre Clément, arte-charpentier, Paris 2003, Editions du Regard. En français. comparer avec le « Grand Z », le del- Pierre Clément, arte charpentier and partnersArchitects, Dalian, 2005. En anglais et chinois. 5 Zhou Wenyi et Pierre Chambron, De l’architecture à la ville, arte charpentier en Chine 2002-2012, Paris, ta du Yangzi de Nankin à Shanghai, IICI Interface, 2012, en français, anglais, chinois. Hangzhou et Ningbo, nouvelle échel- 6 Centre Scientifique et Technique du Bâtiment CSTB à Paris, Serge Salat, éditeur, et le Science and Technology Documentation and Promotion Centre STDPC à Pékin, publié simultanément, en 2006 en le territoriale prise en compte dans anglais en France CSTB, et en en chinois par les Presses de l’Université Qinghua à Pékin. les nouvelles politiques d’aménage- 7 Avec Antoine Grumbach dans l’équipe du Grand Paris Seine Métropole, Paris Rouen Le Havre.

21 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Clément-Noël Douady Urbaniste Professeur invité à l’université de Wuhan La ville chinoise à la croisée des chemins

Clément-Noël Douady, urbaniste Si la forme quadrillée passe pour caractéristique et architecte a retrouvé en Chine la des villes chinoises, la forme organique, adaptée au dynamique qu’il avait connue en France en participant à la création de la ville site, en constitue la plus grande réalité. Le nouvelle de Cergy-Pontoise. Depuis mouvement actuel de normalisation formelle son premier voyage en 1994 avec le menace la diversité et la personnalité même des magistère Aménagement de Paris-1 villes chinoises. La nécessité du développement Paris 8, il retourne régulièrement en durable pourrait ouvrir de nouvelles perspectives. Chine comme professeur invité à l’université de Wuhan. Désormais chercheur associé à Paris, il apporte à l’équipe de recherche Morphocity sa vision des villes chinoises. ’histoire des villes n’est pas linéaire : DES TRENTE GLORIEUSES Lelle est marquée par une succes- AU DÉVELOPPEMENT DURABLE sion de développements et de rup- tures, concrétisant dans l’espace les En France, les Trente Glorieuses phases de développement socio- intervenues dans la seconde moi- économique, mais aussi politique et tié du XXème siècle ont été domi- culturel de la civilisation dans laquelle nées en matière d’urbanisme par la elles s’inscrivent, et dont elles témoi- pensée du Mouvement Moderne, gnent dans la durée. Entre l’Occi- idée progressiste selon laquelle dent, et notamment la France, et l’Homme Nouveau devait dévelop- « l’autre pôle de l’expérience humai- per un nouvel espace urbain, domi- ne » qu’est la Chine (pour reprendre né par la ligne droite et le « poème la formule d’André Malraux), il sem- de l’angle droit », intervenant de ble possible d’identifier des différen- préférence en terrain plat et disso- ces, spécificités remarquables d’un ciant les fonctions (habiter, travailler, côté comme de l’autre, mais aus- etc) entre différents secteurs selon si des correspondances frappan- un zoning porteur d’un ordre sup- tes, les décalages dans le temps posé rationnel. Dans cette perspec- ouvrant sur de possibles échanges tive, les villes transmises par l’his- fructueux entre les uns et les autres. toire étaient condamnées à court

22 D.R. Forme organique, forme régulière (source OSM) A gauche : Shanghai : le boulevard de ceinture reprend la forme « Patatoïde » de l’ancien rempart, et les voies intérieures est-ouest suivent le tracé des anciens canaux. A droite : Xian, ancienne capitale, la ville conserve son ancien rempart rectangulaire, et le maillage orthogonal prescrit par le Kaogongji.

ou moyen terme, comme l’ illustre régulier, prescrit par un texte ancien, tradition culturelle ancienne, dans bien la proposition de Le Corbusier le Kaogongji, qui anticipe en quel- laquelle l’idée de patrimoine concer- dite Plan Voisin, remplaçant à Paris que sorte la pensée du Mouvement ne principalement l’écrit : d’abord tout l’existant historique par un pro- Moderne occidental. On est tenté de l’écriture elle-même, présente en jet quadrillé de tours supposées car- le rattacher au Confucianisme, orga- Chine depuis plusieurs milliers d’an- tésiennes. Cette vision rejoint l’idée nisant une hiérarchie sociale plaçant nées (supériorité durable sur d’autres de « ville régulière », qui ne peut être le peuple sous la conduite du sou- peuples qui n’en disposaient pas), conçue que par un pouvoir fort (mili- verain (et la nature sous celle des mais aussi les textes écrits, fonda- taire ou civil) capable d’assurer sa hommes). Mais bien d’autres villes, teurs du socle culturel historique. mise en œuvre fidèle au fil du temps. notamment les villes d’eau du sud, mais aussi de nombreuses villes du DE LA LITTÉRATURE Aujourd’hui, cette vision dépassée nord, présentent un plan organique, À L’ARCHITECTURE fait place à l’objectif de développe- adapté au contexte géographique ment urbain durable (DUD), dominé local (collines, cours d’eau) qui sem- Le principal « monument historique » par le souci d’économie d’énergie ble plus inspiré du Taoïsme, recher- de Wuhan, la Tour de la Grue Jau- et de préservation de l’environne- che d’une harmonie entre l’homme ne, présentée comme ayant « plus ment; la ville telle que l’histoire nous et le milieu naturel. Aujourd’hui, le de mille ans d’histoire », qui n’a été l’a transmise reprend alors toute sa développement urbain chinois se (re)construite sous sa forme actuelle valeur, et l’urbanisme, loin de l’igno- traduit le plus souvent par des plans qu’en 1987 (après plus d’une demi- rer (voire de la détruire), choisit de la quadrillés, les préceptes du Kao- douzaine de démolitions successi- prendre en compte et de la prolon- gongji étant appliqués sans discer- ves), tire-t-elle sa valeur patrimonia- ger : à la volonté de rupture succè- nement, et aussi bien sur des villes le non du bâti lui-même, mais de la de ainsi l’idée de cohérence (cedant de forme organique, alors même que centaine de poèmes qu’elle a inspirés arma togae). On retrouve ainsi l’idée ce texte ne visait que les capitales depuis treize siècles. À cette notion de « ville organique », adaptée au site et non les autres villes. Les autorités de « patrimoine immatériel », désor- local et prenant en compte l’évolu- s’inquiètent désormais de voir toutes mais reconnue par l’Unesco, s’ajoute tion historique, qui correspond de les villes se ressembler, et l’évolution plus récemment la prise en compte fait à la plupart des villes françaises. s’écarter du développement durable. du patrimoine architectural et urbain. Nombreux sont les monuments qui, L’HÉRITAGE DU PASSÉ La facilité avec laquelle semble s’opé- ayant échappé à la révolution cultu- rer la démolition de quartiers entiers relle, sont désormais d’autant mieux En Chine, les « capitales du nord » dans les villes chinoises en déve- pris en compte que le tourisme en fait (Xi’an, Beijing) présentent un plan loppement peut s’expliquer par une d’appréciables sources de revenus.

23 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

Personnalité organique et mise au carré contemporaine (source CND) A gauche : dans cette ville du nord, la structure d’origine de forme organique constituait son ancienne personnalité. A droite : La même ville « mise au carré » malgré sa forme organique initiale.

Progressivement, cet intérêt nouveau que l’architecture qui se renouvelle le (nouveau Shanghai), je me sens s’étend à l’architecture dite mineure : long des voies : on peut le considérer trop petite ». L’échelle humaine est maisons remarquables, mais aussi comme un authentique composant encore très présente dans de nom- quartiers anciens et villages pittores- du patrimoine urbain, et s’interroger breux sites chinois : des anciens vil- ques. L’histoire y apporte d’ailleurs sur son rôle possible dans la pers- lages préservés (notamment dans sa pierre : parmi les bâtiments pro- pective du développement durable. l’Anhui) aux restes de concessions tégés, certains le sont moins pour étrangères, lilongs et nouveaux vil- leur architecture proprement dite LEÇONS D’ÉCHELLE ET lages ouvriers de Shanghai, ou aux que pour tel épisode historique qui D’ORGANISATION URBAINE hutongs et maisons à cour de Pékin. s’y est déroulé, depuis les dynasties impériales jusqu’aux phases révolu- Le changement d’échelle entre la Après les opérations d’envergu- tionnaires plus récentes (avec parfois ville traditionnelle, à l’échelle du pié- re comme Pudong et bien d’autres la tentation de reconstruire l’édifice ton, et la ville moderne, à l’échelle réalisations récentes consacrées à pour mieux l’adapter à la légende). de la machine automobile, était déjà la circulation automobile, des opé- sensible en France depuis la réno- rations mixtes apparaissent, comme Que serait le patrimoine architectural, vation urbaine et les grands ensem- à Shanghai (à partir d’un sans le réseau des voies dans lequel bles. Il se manifeste aussi en Chine, ancien lilong, faire-valoir piétonnier il s’insère et d’où on le découvre ? et une jeune architecte chinoise a pour une vaste opération voisine), Ce réseau constitue une structure pu déclarer : « À Puxi (le vieux Shan- mais mieux encore Wuhan Tiandi, pérenne, ou du moins plus durable ghai) je me sens bien, à Pudong associant quelques bâtiments de

24 condamné au seul profit du Yang. Comment alors s’étonner, comme on le fait désormais au niveau offi- ciel, que toutes les villes tendent à se ressembler, si l’on applique à toutes une grille par nature anony- me, en effaçant tout ce qui faisait la saveur locale des villes dotées d’une structure originale ? D’autant qu’outre sa valeur de patrimoine, la conservation de la structure histori- que des villes est déterminante en termes de développement durable : effacer l’ancien réseau viaire au pro- fit d’un nouveau maillage quadrillé, c’est aussi effacer les anciens quar- tiers concernés au prix de dépen- ses inutiles de démolition et de reconstruction du patrimoine bâti, alors que l’ancien aurait beaucoup à nous apprendre en termes d’adap- URBA 2000 tation climatique et de vie sociale. L’échelle humaine est encore très présente dans de nombreux quartiers chinois.. La Chine montre une capacité remar- quable de changement de stratégie, et divers signes laissent deviner un patrimoine maintenus, des cafés dans un quartier contigu, selon la intérêt nouveau pour la prise en avec terrasses, restaurants et com- logique intégrée du danwei (uni- compte des tracés les plus originaux merces d’échelle humaine le long té de travail, logement et services). dans les villes qui en tirent leur per- de rues piétonnes, et des immeu- sonnalité : les années qui viennent bles de plus grande hauteur ; le BÂTI ANCIEN ET pourraient nous réserver d’heureu- succès commercial témoigne de DÉVELOPPEMENT DURABLE ses surprises en ce domaine. la valeur humaine, mais aussi éco- nomique, d’une telle démarche. A Dans la perspective du développe- l’échelle de la ville, l’idée prônée par ment durable, des projets urbains BIBLIOGRAPHIE le mouvement moderne du zoning, nouveaux prônent un retour à cet-

séparant les quartiers d’habitat, de te mixité fonctionnelle des quartiers, l Lire la ville chinoise travail et de loisirs (au prix de longs malgré la pesanteur du zoning enco- (l’Harmattan 2011).

déplacements fatigants, coûteux et re pratiqué par de grandes et influen- l Espaces chinois urbains et polluants) connaît encore un grand tes équipes d’urbanisme. La structu- culturels (direction, l’Harmattan succès en Chine, notamment dans re du réseau des rues est un élément 2011).

la périphérie des grandes agglomé- constitutif de la personnalité même l Des villes Yin et Yang (revue rations où prospèrent des opéra- d’une ville, en Chine comme ailleurs. la Jaune et la Rouge, n° Chine tions très spécialisées : îlots d’ha- Curieusement, elle est explicitement avril 2013), ainsi que divers arti- bitat sur plus de 20 ha d’un seul prise en compte dans le cas des vil- cles parus en Chine (en français, tenant, éloignés des nouveaux CBD les quadrillées (comme à Pékin ou anglais ou chinois). (Central Business Districts). Pour- Xi’an), mais semble négligée dans http://clement-noel.douady. tant, une tradition chinoise durable le cas des villes de structure organi- pagesperso-orange.fr/CND- jouait au contraire la mixité urbaine, que, pourtant les plus nombreuses CVreferences.html les entreprises logeant leurs ouvriers dans la réalité ; comme si le Yin était

25 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Martin Robain Président Architecture-Studio Partager le savoir-faire français en matière de développement urbain durable

Martin Robain, diplômé de l’école Architecture-Studio réunit autour des 12 associés nationale des Beaux-Arts de Paris en plus de deux cents architectes, urbanistes, 1969, fonde Architecture-Studio dès 1973. Visiting Professor de plusieurs designers et architectes d’intérieur de vingt-cinq universités dans le monde, il a été nationalités. Dans les années 1990, à l’occasion du enseignant à l’école d’architecture de projet du Parlement européen, l’agence a commencé Bordeaux et à l’école d’architecture à travailler à l’étranger, notamment en Chine. UP8 à Paris. Il est membre de l’Académie d’architecture de Paris, cofondateur de l’AFEX (Architectes ormée sur la base d’une volon- UNE IMPLANTATION français à l’export), de l’A.P.O., Fté d’ouverture et de philoso- EN CHINE DÈS LES ANNÉES 80 de l’Institut européen de maîtrise phie pour une architecture de grou- d’œuvre et du Syndicat de pe, l’agence définit l’architecture et Dans les années 1990 et à l’occasion l’architecture. Il participe à de l’urbanisme comme « un art enga- du projet du Parlement européen, nombreux jurys nationaux et gé dans la société, la construction l’agence a non seulement changé internationaux pour des concours du cadre de vie de l’homme » dont de taille, mais a aussi commencé à d’architecture. les fondements reposent sur le tra- travailler à l’étranger, en particulier en vail en groupe et le savoir partagé, Chine. Nous avions été mis en gar- la volonté de dépasser l’individualité de. Il était, paraît-il, extrêmement dif- au profit du dialogue, transformant ficile d’y construire des bâtiments de l’addition des savoirs individuels qualité. Un commanditaire que nous en un potentiel créatif démultiplié. ne connaissions pas nous a passé commande de son siège social de Elle couvre un vaste champ de réali- 20 000 mètres carrés à Shanghai. sations à travers le monde : hôpitaux, Nous avons conduit le projet essen- bureaux, sièges sociaux, hôtels, loge- tiellement depuis Paris, et le résultat ments, complexes sportifs et commer- fut très beau. C’était la preuve que ciaux, bâtiments d’enseignements, l’on pouvait faire en Chine des réa- écoles, lycées, universités, pro- lisations magnifiques, et même plus grammes d’aménagement urbains, exigeantes qu’en France à certains bâtiments institutionnels, musées, égards. A titre d’illustration, le client théâtres, opéras, équipements nous a appelés un jour, très inquiet, culturels et architecture d’intérieur. constatant que le marbre blanc uti-

26 ARCHITECTE-URBANISTE : AS.ARCHITECTURE-STUDIO

Le centre culturel de Jinan, 380 000m², 2013.

lisé dans le hall avait très légèrement à des espaces de rencontres à ciel duit à l’échelle de la péninsule, s’ins- changé en cours de pose. Nous ouvert. Le volume central connecte crit dans le relief du site et permet nous sommes rendus sur place les cinq immeubles aux différentes une lecture directe du paysage met- pour constater les dégâts : la diffé- fonctionnalités. Les rez-de-chaussée tant en relation fleuves et montagnes. rence était pratiquement invisible. En transparents, aux surfaces libérées, France, personne ne l’aurait décelée. dégagent les vues et permettent Un autre projet a confirmé notre envie Nous avons dû tout changer, sans aux utilisateurs d’appréhender faci- de travailler en Chine, la World Expo quoi nous aurions perdu la face. Cet- lement l’entrée et la sortie. Ce pro- 2010 à Shanghai. La ville avait lan- te attitude nous a fortement impres- jet représente une continuité et une cé un concours sur le thème « better sionnés. Une dizaine d’années plus complémentarité dans le paysage city, better life » pour sélectionner le tard, ce client nous a demandé de déjà construit du centre Zhangjiang projet qui supporterait sa candida- réaliser son nouveau siège, cette Engineering Park. Avec la hardies- ture. Il reposait sur deux idées qui fois de 140 000 mètres carrés… se de sa forme, le nouveau siège nous paraissaient essentielles, tout social de Wison offre une combina- d’abord celle de réfléchir au deve- UN PROJET COMPLÉMENTAIRE toire à l’image de la société. Au sud, nir du site industriel immense (650 il s’ouvre vers la rue Zhongke par une hectares) qui accueillerait l’exposi- Ce projet, récemment livré comprend piazza. Sur le côté ouest, les bâti- tion, situé de part et d’autre du fleu- cinq bâtiments de bureaux, un grand ments ouvrent leurs portes vers la ve Huangpu. Comment ce quartier atrium central… Il révèle l’esprit du rive du fleuve et le paysage alentour. pourrait-il devenir la matrice d’un quartier Zhangjiang en phase de développement urbain après l’évé- création, dont la devise est : « Un VALORISER L’EXPÉRIENCE nement ? Ensuite, celle de l’inscrip- quartier innovant, un quartier char- URBAINE ACQUISE EN FRANCE tion de ce projet dans une logique mant ». La forme du bâtiment expri- de développement durable ? Nous me avec dynamisme les différen- Dès 2002, AS. Architecture-Studio avons gagné le concours en 2001 tes entités du commanditaire. Les conçoit un grand projet à l’échel- et travaillé sur ce projet pendant les façades et la toiture sont conçues le de la ville, en Chine, celui de années qui ont suivi. Cette exposi- en fonction des caractéristiques cli- l’aménagement de la péninsule de tion nous a donné l’occasion de pen- matiques de la région où se trouvent Yuzhong (Chongqing) en bénéficiant ser l’écologie non plus à l’échelle du ces bâtiments, prenant en compte de son expertise des projets urbains bâtiment, mais de la ville. C’est pour- des paramètres fondamentaux telles en France et reprenant une logique quoi notre plan était organisé autour que la lumière et l’orientation, ainsi d’innervation du tissu urbain par un de corridors végétaux, qui survi- que la consommation d’énergie. La réseau de coulées vertes. Un motif vraient à l’exposition et serviraient couverture, vaste toiture, correspond de feuille avec ses nervures, repro- de paysage aux bâtiments futurs.

27 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES ARCHITECTE-URBANISTE : AS.ARCHITECTURE-STUDIO

Le nouveau siège social de Wison, Shanghai, 140 000m², 2013.

DES PROJETS est regroupé autour d’une plaza ville de Wuxi, laquelle comprend le À GRANDE ÉCHELLE destinée à devenir l’un des centres quartier historique Qingming Bridge. vivants de la nouvelle cité. L’archi- Ce dernier est un lieu typique situé Nous travaillons aujourd’hui sur un tecture, taillée comme un cristal, est au long du Grand Canal Qyu reliant projet de centre culturel régional unifiée par une canopée géante en Pékin à Hangzhou, inscrit sur la lis- à Jinan, capitale du Shandong. Le aluminium dont la perforation aléa- te du patrimoine mondial. Le projet bâtiment fera 380 000 mètres carrés toire est modulée par l’usage des a pour objectif de revitaliser le lien et abritera une vaste bibliothèque, locaux se trouvant à l’arrière et dessi- entre la vieille ville et la ville nouvel- un musée national, un musée d’art ne une dentelle dans le ciel de Jinan. le. Cela passe par la création d’un contemporain, ainsi qu’une série En plus de la réalisation de ces pro- corridor écologique jouant le rôle d’équipements (hôtel, restaurants…). jets architecturaux à grande échel- important de continuité entre ces Edifié au cœur de la ville nouvelle le, toujours connectés à l’urbain, deux villes. Tel un réseau de capil- construite autour de la gare du train AS. Architecture-Studio œuvre sur laires s’étendant de l’est à l’ouest, à grande vitesse de l’ouest de Jinan, de grands projets d’aménagements ce corridor irrigue la ville ancienne la capitale du Shandong, le centre durables, à l’échelle de la ville, en et ses pâtés de maisons et la relie culturel est un complexe regroupant Chine. Citons l’exemple de Wuxi, où à la ville nouvelle. Le projet met en trois édifices municipaux majeurs : le successivement, de grandes zones avant l’architecture et le système musée des arts plastiques, la biblio- urbaines sont dessinées ou redes- de cheminement de la ville ancien- thèque et le centre des arts vivants. sinées, qualifiées ou requalifiées : la ne, qui sont respectés au niveau de Ce dernier comprend un théâtre de zone touristique de Nanchang, les l’échelle, des motifs et des textures. 1000 places lié à la maison des asso- abords du grand canal, la baie du lac ciations populaires et des studios de de Lihu et le parc YunheFengGuang. A travers ce nouveau corridor, les répétitions pour les troupes d’opé- visiteurs peuvent vivre à l’échelle de ra, de théâtre, de danse folklorique, DES AMÉNAGEMENTS la ville ancienne et sentir sa coexis- d’acrobates et pour l’orchestre. Un DURABLES À L’ÉCHELLE tence harmonieuse avec la ville nou- centre commercial, une tour abri- DE LA VILLE velle. L’ancien canal devient ainsi le tant un hôtel et des bureaux com- squelette sur lequel se greffent des plètent cet immense complexe cultu- Citons Nanchang Canal Ancient City, événements culturels et des activités rel, parfaitement équipé. L’ensemble zone située dans le périmètre de la commerciales et industrielles.

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DOSSIER

Caroline Maurand Directrice Urba 2000 Le Grand Wuhan Tête de pont de la coopération franco- chinoise sur le développement urbain durable

Caroline Maurand est ingénieur Depuis 2010, le territoire du Grand Wuhan est le diplômée de l’Ecole nationale des site pilote de la coopération entre la France et la travaux publics de l’Etat (ENTPE), et économiste diplômée de l’université Chine sur le développement urbain durable. Ce choix de Paris 1 Panthéon - Sorbonne. a été renforcé en 2013 par l’annonce faite par le Elle a travaillé au Centre d’études gouvernement français d’une volonté d’y construire techniques - CETE Normandie, une ville nouvelle durable franco-chinoise. du ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie sur les questions de planification rba 2000 est présente sur ce un deuxième axe de coopération urbaine et de transport. En 2009, elle a Uterritoire depuis 2010 et oeuvre sur le thème de la mobilité durable rejoint Urba 2000 pour développer les avec la province du Hubei, la muni- et du développement urbain durable. projets de coopération avec la Chine et cipalité de Wuhan et les autres en assure aujourd’hui la direction. municipalités pour y faire émerger Dans le cadre de la coopération des projets assurant un développe- entre la France et la Chine, l’asso- ment international de la métropole. ciation participe à l’organisation du forum franco-chinois sur le Transport Depuis près de 30 ans, Urba 2000 à Haut Niveau de Service (THNS) qui travaille sur les systèmes de trans- se déroule tous les ans à Shanghai. ports intelligents avec le ministère des transports français, la commis- Les travaux conduits depuis six ans sion européenne et les collectivités avec les partenaires chinois ont per- locales. Depuis la signature de l’ac- mis de construire progressivement cord gouvernemental en 2007 entre des concepts se traduisant par des le ministère de l’écologie, de l’éner- projets de mobilité durable dans gie, du développement durable et de des municipalités chinoises. THNS la Mer – MEEDDM (aujourd’hui MED- est devenu, en quelques années, DE et METL) et le Ministry of Hou- une plateforme d’échanges franco- sing, Urban and Rural Developement chinois de discussion entre cher- (MoHURD) sur le développement cheurs, professionnels et services urbain durable dit « accord de coo- des municipalités permettant de pération DUD », nous développons développer des concepts communs.

29 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

LA COOPÉRATION FRANCO-CHINOISE

L’expérience française de planifica- tion urbaine, mûrie depuis les années 1970 et associant l’évolution des ins- titutions des villes, est riche d’ensei- gnements pour les autorités nationa- les et locales chinoises, confrontées à un développement massif et rapi- de de leurs villes. Notre réseau de membres professionnels a fait le choix de participer, dès 2007, à la coopération franco-chinoise sur le thème du développement urbain durable en application de l’accord gouvernemental signé la même année. Ainsi, nous avons accueilli des délé- gations de responsables de villes chinoises, pour leur permettre de prendre connaissance des métho- des de planification française à par- URBA 2000 tir d’exemples concrets. Les échan- ges portent notamment sur les aspects intersectoriels, les modali- tés de gouvernance, les processus de validation et de mise en œuvre des documents de planification. Comparaison entre la France et le Grand Wuhan.

En 2010, le site du Grand Wuhan au sein de la province du Hubei est ses années : le secteur automobile posant les orientations d’une pla- choisi par les deux gouvernements, avec PSA, Renault, Valeo, Faurecia, nification renouvelée. Le périmètre français et chinois, comme site pilote le secteur énergie-environnement concerne la planification d’un impor- de l’« accord de coopération DUD ». avec Alstom, Suez Environnement, tant territoire urbain et naturel de plus Pour confirmer et spécifier ce choix, Schneider Electric, le secteur de la de 1000km² comprenant le grand une lettre de coopération a été logistique, celui de la grande distri- lac, le Lac Liangzi. Urba 2000 a pilo- signée entre le MEEDDM et la provin- bution, BTP, ... c’est la petite France ! té l’organisation d’un « atelier de ce du Hubei en définissant le thème stratégie de développement urbain de la « stratégie de développement LA PLANIFICATION durable », impliquant les experts de urbain durable ». Cet accord est une DU LAC LIANGZI haut niveau d’agences d’urbanisme, première diplomatique car il implique de cabinets d’architectures et de la signature de la France avec une Urba 2000 a conduit la première bureaux d’ingénierie en collaboration province particulière. La province du action de la coopération dévelop- avec des partenaires chinois (admi- Hubei n’est pas n’importe quelle pro- pement urbain durable (DUD) définie nistrations chinoises et universités). vince chinoise pour la France, c’est dans le cadre de cet accord particu- la région qui accueille le tiers des lier avec la province du Hubei. Cette L’objectif est de proposer une planifi- investissements français en Chine ; action a pour objet de commencer à cation durable conciliant le dévelop- de grandes entreprises françaises y mettre en œuvre une démarche de pement urbain avec la préservation sont implantées depuis de nombreu- stratégie territoriale de DUD en pro- de cette réserve d’eau de très grande

30 niveau. Côté passager, le hub mul- timodal que constitue l’aéroport est en cours de déploiement, avec l’arri- vée du réseau intercités et du métro ; aujourd’hui Keolis intervient au niveau de ce hub multimodal de l’aéroport.

Parallèlement à cette planification générale de l’espace aéroportuaire, Urba 2000, ITV et l’Atelier Jaouen ont accompagné les acteurs locaux dans la définition de deux projets de villes nouvelles identifiés dans cet espace et dans la recherche d’inté- rêt d’investissement français pour des développements de projets sur ces sites. Toutes deux se déploient autour des nouvelles gares ferro- viaires d’une ligne de trains interci- tés, reliant l’aéroport au centre-ville

URBA 2000 de Wuhan. L’un des projets de vil- Wuhan : Hub de transport au centre de la Chine. le nouvelle comporte un grand pro- jet d’équipement de tennis qui pour- rait être labellisé « Roland Garros », qualité. Les propositions françaises de la Chine et Wuhan, sa capitale, s’accompagnant d’une académie de ont porté notamment sur la mise en se situe à un peu plus de 1000 km tennis ; ces derniers font l’objet de place d’un parc écologique de natu- de Pékin, Shanghai, Canton, Hong négociations avec les instances de re et campagne (à l’image des parcs Kong, et Chengdu et Chongqing, soit la Fédération Française de Tennis. naturels en France), propositions inté- une zone de chalandise d’un milliard grées par l’Institut de Géosciences, d’habitants ! Cette position géogra- LES PRINCIPES D’UN RÉSEAU en charge de réaliser le document de phique exceptionnelle en fait une pla- DE TRANSPORT DURABLE planification réglementaire. A la suite, ce stratégique pour les activités de les autorités locales nous ont confié fret express aérien, qui s’appuie sur Concernant la mobilité, la muni- des missions d’Assistance à Maîtri- des plateformes transcontinentales. cipalité de Wuhan entre dans une se d’Ouvrage (AMO) et de conseils. nouvelle phase de développement, L’objectif de ces missions est l’ac- Urba 2000 et ses partenaires ITV et avec la mise en service de lignes de compagnement des autorités locales MCA, ont ainsi proposé une stra- métro ; quatre lignes sont en cours dans l’émergence de projets permet- tégie de développement de l’aéro- de construction avec un objectif de tant au Grand Wuhan de devenir une port et de ses abords pour exploiter mise en service d’une ligne par an métropole de dimension internatio- ce potentiel ainsi que les principes à partir de 2012. L’introduction du nale dans une perspective de DUD. d’une planification générale exploi- métro dans les modes de déplace- tant cette position exceptionnel- ments urbains est une transformation LES PRINCIPES DIRECTEURS le et tirant bénéfice des infrastruc- dans l’usage des transports publics. D’UNE AÉROVILLE tures (gare de triage ferroviaire, réseau autoroutier, réseau de lignes La partie française a proposé que Les réflexions se sont portées tout à grande vitesse et de trains interci- cette nouvelle phase de développe- d’abord sur le développement de tés). L’intermodalité route-fer-aérien ment des transports s’accompagne l’aéroport de Wuhan Tianhe. La pro- étant fondamentale pour assurer de réflexions sur la mise en place de vince du Hubei se situe au centre des fonctions de logistique de haut lignes de tramways et de lignes de

31 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES URBA 2000

Aéroville : Projet de schéma de transport.

BRT – bus rapid transit. Elle conduit Hanyang se confirment et d’autres toriales des modalités pour une nou- également à repenser les impacts districts devront suivre le chemin. velle planification urbaine durable. sur la gestion de la voirie et du trafic, pour bien intégrer l’ensemble. Keo- C’est ainsi que s’est progressive- Le site du Grand Wuhan est lis, puis Urba 2000 avec Thales et ment construit un réseau de parte- aujourd’hui confirmé dans la straté- Egis International, ont proposé à la naires, publics et privés, français et gie de coopération entre la France et municipalité de Wuhan de coopé- chinois sur le site pilote du Grand la Chine comme site pilote pour la rer sur ces sujets avec une offre de Wuhan. Le choix de concentrer les mise en œuvre d’une ville nouvelle prestations intégrant l’analyse des actions sur le territoire, de renfor- durable franco-chinoise. Philippe mobilités, la définition d’un plan de cer l’analyse et la compréhension Martin, ministre de l’Ecologie, du déplacement associé à une réorga- de ce vaste ensemble en cours de Développement durable et de l’Ener- nisation de la circulation, la fournitu- métropolisation a permis de consti- gie, et Martine Aubry, représentante re de logiciels de gestion de trafic et tuer un ensemble de ressources pour spéciale du ministre des Affaires des réflexions sur le tramway com- tous les acteurs français impliqués. Etrangères pour le partenariat avec me mode de transport urbain (inté- la Chine, se sont engagés, avec la rêt, concept, insertion urbaine, etc.). UN PROJET DE VILLE province du Hubei, dans la réalisa- NOUVELLE DURABLE tion exemplaire d’une ville nouvelle Aujourd’hui, la municipalité de durable. Cette coopération portera Wuhan s’est engagée dans l’étu- Nous avons a également développé sur la planification urbaine, l’architec- de d’un réseau de tramway com- un premier référentiel pour un déve- ture, les transports, le logement, l’ef- plémentaire au réseau de métro en loppement urbain durable en Chine ficacité énergétique des bâtiments, cours de construction ; les potenti- quelque peu à la française, qui pro- la gestion des déchets, l’éclairage et alités identifiées dans le district de pose aux autorités nationales et terri- la qualité de l’air.

32 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER

NI Jincheng Directeur délégué Economie des transports Direction Stratégie Innovation Recherche et Régulation SNCF Les gares à grande vitesse et les réseaux de transport guidés en Chine : au cœur d’une urbanisation globale pour de grandes agglomérations

NI Jincheng, titulaire d’un DEA L’impact de l’arrivée des TGV sur le développement en économie mathématique et des villes et des métropoles permet de mieux économétrie de l’Université des Sciences Sociales de Toulouse mesurer la rapidité et l’ampleur de ce levier puissant (1987) et du diplôme de statisticien- de l’urbanisation chinoise. économiste de l’Ecole nationale de la Statistique et de l’Administration Economique (ENSAE 1990) a intégré la n Chine, une gare à grande communications, l’eau, la santé SNCF en 1990. Il est intervenu pendant Evitesse est souvent distincte de ou l’éducation, etc. Ces infras- plus de quinze ans dans l’évaluation la gare centrale existante et peut se tructures constituent souvent des des grands projets, notamment situer à première vue dans un quar- réseaux physiques qui transportent ferroviaires en France et à l’étranger ; tier parfois « désert » loin du cen- des flux de personnes, de matières, Grande Bretagne, Italie, Espagne, tre-ville. Cela peut apparaître aber- de l’énergie ou de l’information, etc. Etats-Unis, Taiwan, Hongkong, Chine, rant. Pendant la construction d’une Leur performance détermine la plu- Maroc, Arabie Saoudite, etc. Il a été ligne à grande vitesse, une ville nou- part du temps le niveau du dévelop- directeur du développement des velle peut être construite (logement, pement. En disposant d’infrastruc- régions SNCF de Paris Saint-Lazare et bureaux, réseaux de transport, ser- tures performantes, on dispose d’un de Haute et Basse-Normandie. vices, usines, etc.) autour de la gare moyen efficace permettant de fournir et comprendre des millions d’habi- des services concourant à la crois- tants ! Dans les trente ans à venir, sance économique et à la prospérité. la Chine devrait construire une ville équivalent à plus d’un million d’ha- LA NAISSANCE D’UNE bitants chaque mois pour satis- ENTREPRISE GÉANTE faire le besoin de l’urbanisation. En mars 2013, le ministère des Che- Les infrastructures jouent un rôle mins de fer est démantelé au pro- fondamental et structurant dans le fit d’une administration d’Etat des développement économique d’un chemins de fer, rattachée au minis- pays, d’une région et d’une agglo- tère des Transports et l’entreprise mération. Les projets d’infrastruc- nationale China Railway Corporation tures recouvrent une grande varié- est créée. Cette dernière gérait un té de secteurs d’activité, tels que réseau ferroviaire de 97 840 km à la les transports, l’énergie, les télé- fin 2012, au deuxième rang mondial

33 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES NI JINCHENG

Le TGV à Tianjin. Cette ligne est la première a avoir été construite pour être parcourue à plus de 300 km/h.

après les Etats-Unis. Son effectif une nouvelle ère de l’histoire de la Les premières lignes des réseaux de est d’un peu plus de 2 millions de grande vitesse en termes d’exploi- métro en Chine ont été mises en ser- personnes. La première ligne fer- tation et de matériels roulants, com- vice à Pékin en 1969, à Tianjin en roviaire chinoise dédiée au trans- me le montrent les records quoti- 1984, à Shanghai en 1993. Depuis port des voyageurs a été réalisée en diennement pratiqués sur la ligne. l’an 2000, la construction s’en est 2003. Depuis les Jeux Olympiques accélérée : à la fin 2013, les réseaux de 2008 à Pékin, la construction des L’ESSOR DES RÉSEAUX DE chinois comptent 80 lignes, 2400 LGV s’est accélérée avec en moyen- TRANSPORT GUIDÉ URBAIN km et 1600 stations. Trente-cinq vil- ne 2 000 km de lignes construites les sont concernées et douze autres par an. Pour l’année 2013, la mise en Avec le développement rapide de vont être autorisées à réaliser leurs service de quatre nouveaux tronçons l’économie chinoise, les villes et les projets de métro. Le réseau à terme porte le réseau à 10 436 km, soit citadins augmentent exponentielle- dépassera 10 000 km ! La métropo- de loin le premier au rang mondial. ment. Le système de transport guidé lisation généralisée impose non seu- urbain fortement capacitaire, rapide, lement de rapprocher les aggloméra- La ligne à grande vitesse la plus à bas carbone, accessible, confor- tions entre elles, mais aussi d’assurer remarquable et aussi la plus longue table et en sécurité, est le meilleur la fluidité des déplacements à l’in- au monde (2 298km), inaugurée le moyen pour satisfaire les besoins de térieur même de ces aggloméra- 26 décembre 2012, est celle qui relie mobilité et de déplacement dans les tions. Le rattrapage phénoménal de Pékin à Canton. Le temps de par- grandes agglomérations. Le mar- la construction du réseau ferroviai- cours avec quatre arrêts intermédiai- ché chinois de transport urbain gui- re à grande vitesse et des réseaux res est de 7h59 à comparer aux 22h dé est ainsi devenu, en très peu de de transport guidé urbain en Chine en train classique. Cette ligne ouvre temps, le premier marché mondial. en est une parfaite illustration.

34 2015, période de développement entre 2016 et 2020 et période d’amé- lioration entre 2021 et 2030. Sa sur- face totale prévue est de 1 578 km2 dont 650 km2 de bâti (41%) et 928 km2 d’espaces verts et écologiques. 50% de la surface bâtie sera consa- cré à l’industrie, 25% au logement et 25% aux bureaux et services. Sept Source : NI Jincheng, sur la base des données ONU zones fonctionnelles sont prévues : industrie aéronautique, industries stratégiques, recherche & dévelop- pement, agriculture moderne et URBANISATION ET tive de Chengdu avait une surface de scientifique, industrie manufacturière INFRASTRUCTURES 29,9 km2 en 1949, elle est actuelle- à haut niveau, zone touristique inter- DE TRANSPORT ment de 12 121 km2 dont 515,5 km2 nationale, zone bureaux et services. bâtis englobant neuf districts du cen- A la mise en service du projet à tre-ville, quatre villes-districts et six Entre la ville nouvelle et la ville exis- grande vitesse, le nouveau quar- cantons ruraux pour une population tante, la planification est intégrée en tier intégrant la gare à grande vites- de 14 millions d’habitants en 2010. termes de développement, de ser- se et les réseaux de transport gui- vices publics, de réseaux de trans- dé, notamment le métro, devient un LE HUB DE CHENGDU port, d’administration et d’environ- nouveau centre de l’agglomération nement. Le développement de la ville et peut contenir des millions d’ha- En 2011, le projet d’une ville nouvelle de Chengdu est intimement lié à la bitants ! En conséquence, les gran- de Tianfu a été adopté par l’Etat. province de Sichuan. Durant le dou- des villes ou agglomérations chinoi- Jouxtant le centre-ville existant, cet- zième plan (2011-2015), un grand ses sont devenues multipolaires. te nouvelle ville, dimensionnée pour bond en avant sera réalisé en infras- plus de six millions d’habitants, se tructures avec Chengdu comme Une illustration de ce type de déve- construit en trois étapes : période hub. L’infrastructure ferroviaire sera loppement multipolaire se trouve de démarrage rapide entre 2011 et portée à 6 000 km, soit 11 lignes dans l’exemple de l’extension de la ville existante de Chengdu et la planification de la ville nouvelle de Planification de la ville de Chengdu et réseau ferroviaire Tianfu, juste à côté, intégrant dès le début les réseaux ferroviaires à gran- de vitesse, les emplacements des gares à grande vitesse et les réseaux des transports guidés urbains.

Chengdu est la capitale de la pro- vince du Sichuan. Elle est histori- quement le centre politique, écono- mique, culturel et militaire pour les régions du sud-ouest de la Chine. Depuis la politique de l’ouverture et de la réforme, elle est aussi devenue un hub logistique, scientifique, finan- cier, de télécommunication et de

transport. La municipalité administra- NI SYLVAIN

35 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

dont 360 km dans la ville nouvelle de Tianfu. Le réseau de métro atteindra alors 360 km au total avec 17 lignes. Ce qui s’est passé en Chine depuis plus de trente ans et va se passer dans l’avenir sont assez largement inconnus en France, en particulier en termes de développement éco- nomique, d’urbanisation, de création de villes nouvelles, de planification et de réalisation du réseau ferroviai- re à grande vitesse et de réseaux de transport guidé urbain, etc.

Tous ces phénomènes expérimen- taux méritent d’être observés, étu- diés et théorisés. Les entreprises françaises doivent saisir les opportu- nités offertes par le marché chinois pour se développer. Compte tenu de leur état et vitesse de développe- ment, nous aurons aussi certaine- ment beaucoup à apprendre des URBA 2000 La première ligne ferroviaire chinoise dédiée au transport des voyageurs date de 2003. Chinois pour nous en inspirer, en vue d’améliorer la compétitivité et l’effi- cacité dans ces domaines en France principales reliant d’autres provin- des voyageurs (200 km/h) dont l’une et en Europe. ces. 2 500 km des lignes nouvelles a été inaugurée en mai 2010 entre seront construites dont 2 200 km les cités de la municipalité de Chen- de lignes à grande vitesse. L’in- gdu, le réseau de transport guidé BIBLIOGRAPHIE frastructure autoroutière sera por- urbain, le réseau de transport public

tée à 6 350 km soit 18 autoroutes de surface (lignes de bus structu- l NI Jincheng, Ban ZHENG : reliant d’autres provinces dont 11 rantes et lignes de bus de maillage). Réalités chinoises, passé et autoroutes nouvelles de 3 700 km. avenir, Variances n°43 (02/2012, Cinq gares centrales (et pôles revue des anciens de l’ENSAE) UN DÉVELOPPEMENT d’échanges multimodaux) sont pré- http://ensae.org/ ÉCONOMIQUE vues dans cette planification : qua- docs/2012101042_var43- tre en zone de centre-ville aux qua- web-planche_01-02.pdf

Les réseaux de transports verts à tre points cardinaux de la ville et une l NI Jincheng, bas carbone et respectueux de l’en- dans le centre de la ville de Tianfu. Jean-Pierre Pradayrol, vironnement sont privilégiés dans La tarification et la rentabilité la planification de la municipalité de Le premier tronçon de la ligne 1 du des projetsd’infrastructure, Chengdu et comprennent pour les métro de Chengdu a été inauguré en Variances n°47 (05/2013) transports publics : les lignes à gran- 2010 et la longueur totale du réseau http://www.ensae.org/ de vitesse structurantes (350 km/h ou atteindra 291 km en 2020. Selon le docs/2013121622_var47_ 300 km/h), les lignes à grande vitesse plan du transport guidé de Chengdu, planches-web_27-04.pdf intercités (250 km/h), les lignes rapi- on aura à terme plus de 1 000 km

36 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER

Stéphane Séguier Senior vice-président, en charge du développement commercial, ADPI

Carol Chen Directrice G&W Consulting , Bureau de Guangzhou L’essor des zones aéroportuaires

Les aéroports sont au cœur du développement économique et urbain du monde contemporain. En Chine, les aéroports et les zones aéroportuaires sont à la pointe d’un développement gigantesque sans précédent dans l’histoire.

Stéphane Séguier, diplômé de ar leur dynamisme économi- autour des ports, puis des gares de l’Ecole Supérieure de Commerce Pque, leur disponibilité foncière, chemin de fer, des rocades autorou- de Pau et titulaire d’un MBA à HEC, et les possibilités d’innovation, les tières et des gares TGV, enfin autour a commencé sa carrière dans le aéroports et les zones aéroportuai- des aéroports, carrefours du mon- Groupe Plastic Omnium où il a occupé res apparaissent comme des lieux de global du XXIème siècle. John plusieurs postes de direction. En 2007, privilégiés pour l’invention et la mise Kasarda, universitaire et consultant il rejoint le groupe TIRU, filiale d’EDF, en en œuvre d’un urbanisme dura- américain mondialement connu pour tant que directeur du développement ble. Le groupe Aéroports de Paris, avoir identifié et décrit ce phénomè- et membre du Comex. Il était depuis fort de sa pratique des aéroports et ne, exprime cette idée dans une for- 2011 directeur commercial et membre des développements urbains qu’ils mule éloquente : « Les aéroports du Comex de Vinci Environnement, il a suscitent, de son expérience à l’in- vont façonner les quartiers d’affai- rejoint ADPI en 2013. ternational sur ces thématiques, res et le développement urbain au et de sa familiarité avec le marché 21ème siècle, comme les autoroutes Carole Chen, a plus de 16 ans chinois, est prêt, avec ses parte- l’ont fait au 20ème, les chemins de fer d’expérience en gestion d’aéroports naires, à y apporter sa contribution. au 19ème et les ports au 18ème siècle. » et en conseil aéronautique. Experte en L’histoire urbaine montre que les vil- planification stratégique, en analyse les se sont développées sur les car- LES AÉROPORTS, des politiques et en développement refours, sur les lieux de rupture de CARREFOURS DU MONDE de stratégie commerciale pour les charge, là où se croisent les flux de aéroports et leurs partenaires, voyageurs, de marchandises, d’in- A la fois points d’entrée majeurs des elle a rejoint G&W en 2006. Elle formations… L’essor des villes est hommes et des marchandises, mais est responsable de missions pour directement lié à celui des moyens aussi hubs terrestres connectés à les aéroports. Sa contribution à de transport, dont chaque nouvelle leur région urbaine par un réseau l’article porte sur la description des étape s’accompagne d’une urbani- de transport dense et multimodal AirportCities. sation spécifique: nouveaux quartiers (autoroutes, métros et bus, trains

37 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES ADPI Etude de la Cité de l’Aviation de China Southern Airlines à Canton.

régionaux et à grande vitesse), les crée chaque année plus d’emplois nomène prend toute sa mesure, aéroport attirent les activités liées au que tout autre région de France. à l’échelle d’un continent immen- transport aérien de passagers (com- se au développement nouveau: de merces, gares, bureaux, acteurs du DES PÔLES ESSENTIELS puissants aéroports sont réalisés transport aérien, activités support DE DÉVELOPPEMENT from scratch, et conçus d’emblée comme le catering ou la maintenan- comme des pôles économiques et ce, hôtels, etc.) et celles liées aux John Kasarda a étudié les vingt cinq urbains de métropoles où les fonc- marchandises (gares de fret géné- premiers aéroports des Etats-Unis tions économiques modernes sont ral ou express, zones logistiques et a montré que leurs zones aéro- moins historiquement ancrées : et d’activité qui y sont associées). portuaires ont en moyenne un nom- Dubaï, Inchéon, en sont des exem- D’autres fonctions s’implantent aus- bre d’emplois équivalent à 50% de ples convaincants. La Chine s’inscrit si, attirées par la connectivité de la celui des Central Business Districts dans ce panorama selon ses carac- zone, son exceptionnelle acces- (CBD) des villes correspondantes. téristiques propres, à savoir le gigan- sibilité depuis la région et le mon- Les zones aéroportuaires euro- tisme de son territoire, de sa popula- de : parcs d’exposition, centres de péennes ou américaines se déve- tion, de sa puissance économique. congrès, filiales de sociétés inter- loppent souvent sur des aéroports nationales, centres de R&D, show- anciens et sont en concurrence TRENTE PROJETS rooms, centres de formation, parcs avec des quartiers d’affaire et rési- D’AIRPORTCITIES d’attraction, de loisirs, centres com- dentiels puissants dans la métro- merciaux, etc. Le Grand Roissy, par pole, historiquement antérieurs à Carol Chen, directeur du GCW exemple, place aéroportuaire de l’aéroport, ce qui limite leur essor. Consulting, invitée par Aéroports de l’aéroport Paris Charles-de-Gaulle, En Asie et au Moyen-Orient le phé- Paris à un récent séminaire sur les

38 places aéroportuaires, en a dres- L’EXPÉRIENCE Le Groupe est le premier au monde sé le tableau suivant : la Chine est INTERNATIONALE D’ADP en volume de trafic passager et déve- en train de réaliser le plus énor- loppe sur ses aéroports une activité me investissement en infrastructu- L’évolution va vers une ouverture immobilière soutenue et un projet re de l’histoire. Les aéroports y ont croissante aux investissements et d’AirportCity sur chaque aéroport. une part importante avec 90 nou- intervenants internationaux, à une Celle de Paris Charles de Gaulle, veaux aéroports d’ici 2020, l’agran- prise en compte accrue des préoc- Roissypole, initiée dans les années dissement des aéroports existants, cupations environnementales et de 90, est une des premières AirportCi- soutenus par une croissance rapi- responsabilité sociétale. Souvent, ties au monde. Chacune est située de du trafic. Depuis 2003, la pro- les projets pêchent par manque de sur une gare du futur métro auto- priété des aéroports a été transfé- vision et d’une stratégie claire. Une matique du Grand Paris Express, et rée aux collectivités locales, ils sont assistance internationale serait uti- participe ainsi à la mise en œuvre du gérés comme des entités commer- le pour aider à l’élaboration et à la Grand Paris, projet d’ampleur histori- ciales avec une logique de profit. mise en œuvre d’une stratégie dura- que qui va renouveler profondément ble de développement. ADP porte le la métropole parisienne et refaire de Dans ce contexte, la notion de dura- plus grand intérêt à ces développe- Paris une référence contemporaine bilité est avant tout celle de la ren- ments, au service desquels il met- essentielle de l’urbanisme mondial. tabilité économique, et de ce point tra l’expertise acquise en dévelop- Sur ces emprises, Aéroports de de vue, les gestionnaires d’aéro- pant et en exploitant les aéroports Paris est à la fois propriétaire, amé- ports désirant élargir leurs sources de la région parisienne (Charles- nageur, selon les cas investisseurs, de revenus et les collectivités loca- de-Gaulle, Orly, le Bourget, héli- parfois maître d’œuvre (grâce à son les, percevant l’aéroport comme un port d’Issy-les-Moulineaux, etc.) équipe d’ingénieurs et d’architec- moteur du développement économi- et au travers de ses participations tes), usager, et gestionnaire, exploi- que régional, adhèrent pleinement au dans d’autres aéroports à l’étranger. tant et mainteneur de son patri- concept d’AirportCity et de dévelop- pement urbain de la zone aéropor- tuaire. Chacun des trente premiers aéroports chinois a son projet d’Air- portCity, en phase de programme, de master plan ou de réalisation.

Ces projets sont des projets urbains pouvant porter sur de vastes zones dépassant la centaine de km². Ils comportent des programmes clas- siques du type hôtels, bureaux, centres de congrès et d’exposi- tion, logistique, etc., d’autres sont appuyés sur des industries préexis- tantes, ou résultant de politiques nationales comme en matière d’in- dustrie aéronautique. Concernant le fret, une politique nationale pro- meut un réseau de cargo multimo- dal, sélectionne des sites qui ser- vent de démonstrateur et soutient la mise en place de structures d’accueil

nouvelles stimulant le développe- DATABASE G&W CHINA AVIATION ment, comme les Free Trade Zones. Les 30 plus grands aéroports chinois développent leur projet d’AirportCity.

39 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

moine immobilier propre. Il a donc une expérience exceptionnelle sur LE GROUPE AÉROPORTS DE PARIS le long terme de l’ensemble des aspects de la ville aéroportuaire. Le Groupe, premier au monde en volume de trafic passager, possède, développe et exploite les aéroports de la région parisienne. Paris Charles-de-Gaulle, HUBSTART PARIS REGION, deuxième aéroport européen et 10ème mondial avec 62 millions de passagers en UNE VISÉE INTERNATIONALE 2012, et premier européen pour le fret/courrier avec 2,5 millions de tonnes, siège des hubs d’Air France KLM et hub européen de Fedex, premier aéroport au Aéroports de Paris est partenaire des monde à avoir accueilli une gare TGV. Orly, 2nd aéroport français avec 27 millions développements urbains autour de de passagers. Le Bourget, premier aéroport d’affaires européen. L’héliport ses aéroports. Il est présent dans d’Issy-les-Moulineaux et 10 aérodromes d’aviation générale. la gouvernance du Pôle d’Orly, et Le Groupe a des participations dans Schiphol, l’aéroport d’Amsterdam, TAV membre de Hubstart Paris Region, Airports qui exploite les aéroports turcs et dans d’autres aéroports via sa filiale association qui regroupe les grands ADP Management. acteurs du Grand Roissy, la zone aéroportuaire de Paris CDG, pour en assurer la promotion vers l’inter- prises, universitaires du monde tégie de développement immobilier, national. Il est associé aux accords entier. Ce séminaire, dont la notorié- comme à Toulouse, Nice, Monter- passés avec de grandes places té est internationalement reconnue, rey et bientôt Tampico au Mexique. aéroportuaires mondiales (Mem- s’est tenu en octobre à Paris CDG, Il est aussi impliqué à l’international phis, Atlanta, Inchéon…) et est un avec un focus particulier sur l’Asie, via sa filiale d’ingénierie ADPI, clas- acteur assidu des grandes confé- Carol Chen y est intervenue pour la sée parmi les premières sociétés au rences internationales sur ces sujets. Chine. Il s’attache à promouvoir les monde en ingénierie aéroportuai- Avec Hubstart Paris Region, le grou- zones aéroportuaires dans une pers- re par Engineering News Record. pe organise depuis 2011 un sémi- pective de développement durable. naire annuel consacré aux Places UNE OFFRE GLOBALE Aéroportuaires Durables, qui ras- Le groupe conseille d’autres aéro- semble des professionnels, entre- ports, à leur demande, sur leur stra- Combinant un savoir-faire technique pointu, une parfaite maîtrise de l’ex- ploitation aéroportuaire et une lon- gue expérience des projets interna- tionaux dans des environnements chaque fois différents, ADPI conçoit et encadre la construction de bâti- ments aéroportuaires complexes (aéroports, aérogares, terminaux passagers, tours de contrôle, han- gars avions, centres de maintenan- ce, etc.) et de grands projets urbains (bâtiments diplomatiques, centres culturels et sportifs, etc.). Depuis sa création, le groupe a participé à plus de 500 projets dans 80 pays. Par- mi les plus emblématiques figurent le terminal 3 de l’aéroport interna- tional de Dubaï ou l’usine d’assem- blage de l’Airbus A380 à Toulouse.

PAUL ANDREU ARCHITECT PARIS PAUL Composées d’architectes, d’ingé- L’Oriental Art Center à Shanghai. nieurs et d’urbanistes, les équipes

40 ADPI Etude de l’aménagement du Central Business District de Pékin.

peuvent accompagner un projet rences majeures, notamment en Business District de Pékin, (ou la Cité depuis sa conception initiale jusqu’à Chine, pays dans lequel elle est iden- de l’Aviation à Canton destinée à sa mise en exploitation, avec la tifiée comme un acteur international accueillir l’ensemble des activités de capacité d’intervenir en qualité de majeur du secteur de l’aéroportuaire. China Southern (zone de cargo, cen- conseil, de maître d’œuvre ou d’as- tre industriel, hub commercial, zone sistant à maître d’ouvrage (Project Parmi les références les plus signifi- résidentielle, siège social, centre de Manager), sur tout type d’infras- catives peuvent être citées, les aéro- médias et de recherche, université). tructures, de bâtiments ou d’équi- ports de Sanya, de Shanghai Pudong, pements aéroportuaires. La maîtrise de Pékin, d’Urumqi, de Nanjing ou Le Groupe Aéroports de Paris consi- des grandes échelles, la gestion des de Chongqing, sur lesquels ont été dère avec le plus grand intérêt les flux divers et complexes, la capaci- réalisées des études de planifica- perspectives liées à l’essor des Air- té à intégrer dans ses conceptions tion ou de conception de terminaux. portCities et places aéroportuaires en des contraintes multiples d’ordre Chine. Le groupe s’est organisé pour réglementaire, technique, sécuritaire UNE OFFRE COHÉRENTE proposer une offre globale et cohé- ou environnemental, ainsi que le rente dans ce domaine, allant du souci constant d’aboutir à des solu- Au-delà des aéroports, ADPI comp- conseil sur la stratégie de développe- tions à la fois fonctionnelles et har- te également à son actif le design de ment en amont, au pilotage et à la monieuses, sont autant de compé- bâtiments majeurs tels que le Grand mise en œuvre effective via l’assistan- tences développées par ADPI sur Théâtre National de Chine à Pékin ce à maîtrise d’ouvrage et la maîtrise les plateformes aéroportuaires, et ou l’Oriental Art Center à Shanghai, d’œuvre en urbanisme et ingénierie, dans une approche d’aménagement avec l’architecte Paul Andreu. En pour les aéroports et leurs places ou de reconfiguration de territoires. matière d’urbanisme, les équipes aéroportuaires. Des contacts sont ont eu l’occasion de s’intéresser à établis avec différents acteurs, parte- Active en Asie depuis le début des plusieurs projets emblématiques naires potentiels pour une approche années 80, ADPI y compte des réfé- comme l’aménagement du Central conjointe de ce marché.

41 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Jean-François Janin Chef de la mission Transports Intelligents Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

Le Forum Transport à Haut Niveau de Service, coopération universitaire et professionnelle

Jean-François Janin, ingénieur Le développement économique et l’augmentation général (74), diplômé de Sciences- du niveau de vie font apparaître en Chine des Po Paris, a travaillé aux ministères de l’Environnement et de l’Industrie problèmes de transport et de mobilité très différents à Paris et Clermont-Ferrand avant de ceux que l’on a connus en Europe ou sur le de diriger la Chambre de Commerce continent américain. Le Forum Transport à Haut et d’Industrie de Lille (1986-1997). Il Niveau de Service (THNS) veut être la plate-forme dirige la mission transports intelligents d’échange nécessaire à l’émergence d’une vision depuis 2002. Il représente le ministère à l’association Atec-ITS-France et partagée sur la mobilité urbaine durable dans ce pays. à Ertico-ITS(Europe). Chargé du module intermodalité du mastère ITS de l’ENPC. Il a monté avec l’université ’université de Tongji à Shanghai villes qui la consultent ou qui font de Tongji à Shanghai les premiers Lest renommée pour ses com- appel aux bureaux de conseil dans séminaires en Chine, afin d’attirer pétences en matière de construc- lesquels travaillent ses anciens élè- l’attention des employeurs potentiels tion, d’urbanisme, de transport et ves. Dans la période de prépara- (chinois et français) sur cette formation de gestion des villes. C’est pour tion de l’Exposition Universelle de en double diplôme aux métiers du maintenir ce haut niveau d’exper- 2010 « Better City, Better Life », la numérique pour les transports. tise qu’elle a fait le choix de déve- municipalité de Shanghai a fait un lopper des coopérations internatio- large appel à ces contributions. nales, notamment avec l’Europe, en étant consciente que c’est dans LE FORUM TRANSPORTS la durée que se forgent les doctri- À HAUT NIVEAU DE SERVICE nes et la pratique sur des sujets aussi complexes que la vie en ville. C’est en 2007 que les gouverne- ments français et chinois ont signé Au-delà de la création de program- une déclaration commune sur le cli- mes internationaux pour ses étu- mat et un accord sur le dévelop- diants et de l’implication de ses pement urbain durable. Le Forum professeurs dans des échanges Transport à Haut Niveau de Service académiques, elle a vu l’intérêt d’ap- (THNS) a été lancé en 2008, com- porter de nouvelles idées et de nou- me suite à la participation de délé- veaux contacts professionnels aux gations françaises à des manifesta-

42 SOURCE : UNIVERSITÉ DE TONGJI

La sixième édition du Forum franco-chinois sur le Transport à haut niveau de service (THNS), s’est tenue à Shanghai (Université de Tongji) les 9 et 10 novembre 2013.

tions professionnelles (applications www.urba2000.com/forum-THNS) ville dans les prochaines années ne satellitaires, transports intelligents, Cette plate-forme donne aux étu- peut s’imaginer sans tenir compte dont le congrès mondial ITS à Pékin, diants une possibilité, qui n’est pas des orientations politiques nationales. etc.). L’Institut franco-chinois d’In- si fréquente, d’entendre des person- génierie et de management, struc- nes d’horizons différents s’exprimer Lorsqu’il prend ses fonctions de ture de coopération entre l’univer- sur des sujets complémentaires et secrétaire général du parti en 2012, sité de Tongji, l’ENPC et ParisTech, a certainement déjà contribué à la XI Jinping, indique que le peuple a accueilli le Forum dès l’origine. compréhension des mécanismes à aspire à « une amélioration de l’édu- l’œuvre dans les deux pays dans la cation, de la stabilité de l’emploi, Au sein de l’université, plusieurs création et l’évolution des réseaux des revenus, de la sécurité socia- « collèges » sont impliqués : archi- de transport et de la mobilité. Une le, des soins médicaux, du confort tecture et urbanisme, ingénierie des des plus grandes avancées a cer- des conditions de vie et qu’il souhai- transports, chemins de fer, coopé- tainement été de faire apparaître la te vivre dans un environnement plus ration franco-chinoise. Cette coopé- notion de service là où « les trans- beau ». Les transports sont concer- ration a été un peu difficile à mettre ports » étaient vus, aussi bien par nés par beaucoup de ces attentes de en place, mais elle apparaît mainte- les architectes que par les ingénieurs la société, auxquelles la 3ème session nant comme un facteur de succès en génie civil, comme des objets plénière du comité central du parti, du côté chinois. Du côté français, il matériels à dessiner et à construire. tenue en novembre 2013, a cherché a fallu également quelques années à donner des réponses législatives et pour que la participation de repré- LA POLITIQUE DES administratives concrètes. Il nous est sentants des services de l’Etat (dont TRANSPORTS EN CHINE difficile de comprendre dans le détail les services du Consulat Général les évolutions en cours de disposi- de Shanghai), de collectivités loca- Compte tenu de l’importance des tions juridiques que nous connais- les, d’entreprises (des grandes, en transports pour la vie quotidienne de sons mal et d’orientations qui ne particulier Thales, sponsor depuis tous les citoyens, la politique a une se traduiront que progressivement le départ et Air France depuis trois forte présence dans les décisions. Il par des décisions concrètes, mais ans, mais aussi des très petites), n’est donc pas du tout neutre que les résultats attendus sont annon- de chercheurs et d’enseignants l’institut national pour les transports cés clairement et c’est l’essentiel. soit admise comme naturelle et multimodaux, qui dépend directe- que chacun mesure ce qu’il pouvait ment de la Commission Nationale On parle d’une « société prospère apporter et retirer du « Club Ecomo- pour la Réforme et le Développe- sans excès » pour le 100ème anniver- bilité » qui les réunit à Paris pour sui- ment, ait participé en 2013 au Forum saire du parti en 2021, pour signi- vre les activités du Forum. (http:// THNS. L’évolution de la mobilité en fier que la croissance à deux chiffres

43 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES D.R.

L’évolution de la mobilité en ville ne peut s’imaginer sans tenir compte des orientations politiques nationales.

n’est plus de mise pour les années le domaine fiscal, la réforme por- réseaux et des équipements collec- qui viennent. Il s’agit de faire croître te sur le remplacement de la taxe tifs nécessaires liés à l’urbanisation. le marché intérieur pour s’affranchir sur le chiffre d’affaires par une taxe Ces réformes pourraient être menées des aléas de la demande internatio- sur la valeur ajoutée, ce qui a des sous la forme d’expérimentations nale, qui n’est pas très dynamique conséquences importantes pour les sur des zones pilotes, avec l’ob- en ce moment, et d’inviter « l’ate- activités de service comme les ban- jectif de rendre celles-ci plus dyna- lier du monde » à se transformer en ques, les transports, les prestations miques et plus attractives pour les « laboratoire d’innovation » du mon- d’étude. A l’occasion de ce change- investisseurs nationaux et étrangers. de. Pour cela, il faut faire cesser les ment d’assiette de l’impôt, on pense excès et réformer les structures. à revoir les règles de répartition de Dans le domaine de la protection de son produit entre les niveaux de col- l’environnement, le concept de « Belle DES RÉFORMES À VENIR lectivités territoriales (en supprimant Chine » se traduit par des réglemen- deux sur cinq d’entre eux) de maniè- tations sur les émissions de pollu- On peut citer parmi les excès qui ont re notamment à apporter aux muni- tion des usines et sur les implan- été sanctionnés la condamnation du cipalités des ressources permanen- tations des centrales électriques et ministre des Chemins de fer et l’in- tes liées aux activités économiques de chauffage urbain. L’Est du pays tégration de la puissante administra- qui se développent sur leurs territoi- devrait bénéficier du déplacement tion qu’il dirigeait pour partie dans res. Aujourd’hui ce sont les droits à d’activités consommatrices d’éner- celle du ministère des transports et construire qui sont pratiquement les gie, notamment pour profiter de la pour partie dans une agence. Dans seules sources de financement des disponibilité d’énergie hydraulique.

44 METTRE EN ŒUVRE DES TECHNOLOGIES NUMÉRIQUES

Les épisodes de pollution atmos- phérique de Pékin et Shanghai ont frappé les esprits : ne plus voir le bleu du ciel, porter un masque, lire des articles sur les risques pour la santé, cela pose des questions qui ne peuvent pas rester sans répon- se. On considère que les véhicules sont responsables de plus de 20 % des émissions de particules à Pékin, c’est-à-dire plus que les installa- tions de chauffage (17%). Il est rela- tivement facile d’éloigner les émis-

sions liées au chauffage des villes : URBA 2000 on pense même à la gazéification La limitation du nombre des voitures est en vigueur dans les plus grandes villes, mais de charbon sur le gisement et à un cela ne suffit pas à garantir la fluidité du trafic. transport de l’énergie par pipeline pour alimenter les réseaux de cha- leur. Par contre, les mesures pri- rement mettre en œuvre les tech- lité pour les transports de personnes ses en matière de transport urbain nologies numériques pour maîtri- et les marchandises, qui pourrait être font débat : la limitation du nom- ser ses consommations d’énergie, accompagnée d’indicateurs du type bre des voitures est déjà en vigueur ses émissions de pollution et créer « émissions de CO2 » pour évaluer dans les plus grandes villes, mais des mécanismes de régulation pour et comparer la performance de la chacun peut voir que cela ne suf- assurer le fonctionnement des villes. gestion de trafic en ville en mettant fit pas à garantir la fluidité du trafic. en œuvre des systèmes intelligents. POUR UNE COOPÉRATION Le Forum a commencé à aborder Une des certitudes que l’on peut tirer DURABLE ces questions, en développant des des échanges qui ont eu lieu dans contacts avec plusieurs villes dans les six sessions du Forum, c’est Au cours du Forum THNS, des délé- lesquelles les acteurs n’ont pas les qu’il n’existe pas de solutions dis- gations françaises ont déjà eu l’oc- mêmes relations entre eux qu’à ponibles que la Chine pourrait met- casion de rencontrer des respon- Shanghai. Ces acteurs peuvent trou- tre en place pour résoudre ses pro- sables de villes, d’entreprises et ver un intérêt à participer à ces blèmes en quelques années. On voit d’universités (Wuhan, Chongqing, échanges avec des experts français, bien également que ces problèmes Shenzhen, etc.) pour envisager des chez eux bien sûr, et pourquoi pas, ne se posent pas qu’en Chine et actions de sensibilisation et de for- au Forum THNS. Celui-ci pourrait que nous pourrions aussi largement mation sur des réflexions et recom- contribuer utilement à valoriser les bénéficier des solutions qu’il va falloir mandations du Forum, par exem- coopérations décentralisées dans mettre en place. Ce sont d’ailleurs ple, le principe de « développement lesquelles sont engagées de nom- l’ensemble des métiers du transport orienté par les transports » (TOD) breuses collectivités locales françai- qui sont concernés par ce qui va se consistant à urbaniser en priorité ses, à faire connaître les démonstra- passer dans les années qui viennent les zones qui sont déjà desservies teurs à mettre en place, et les dans ce pays : premier marché du (ou presque) et de profiter de l’effet entreprises qui ont réussi à créer la monde pour les ventes de voitures d’échelle pour valoriser le plus vite confiance. Celles-ci étant au stade depuis 2009, principal constructeur possible par des services plus nom- de la mise en place, elles doivent de chemins de fer, d’aéroports et breux et plus chers les investisse- encore se développer pour pouvoir de villes, la Chine devra nécessai- ments d’infrastructures. L’intermoda- en diffuser l’expérience.

45 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Jacques Saint-Marc Ancien secrétaire général Groupe interministériel mobilités et véhicules électriques

Mobilité durable et véhicules à motorisation électrique

Jacques Saint-Marc, économiste Dans le champ de la mobilité durable, les et urbaniste S.F.U., a été secrétaire coopérations franco-chinoises se révèlent général adjoint du comité interministériel des villes, directeur pragmatiques et fructueuses tant dans le domaine du programme prioritaire transports technique que dans celui des nouveaux services et déplacement de l’Ademe, délégué de déplacement. auprès du président du Comité de pilotage de l’accord franco-chinois sur le développement urbain durable. n 1997, alors qu’il était en Fran- l’électricité comme énergie dans les Ece, au début de la première éta- transports que l’essence. L’utilisation pe de développement des véhicu- de bus urbains électriques est lar- les électriques légers, le ministre gement développée dans de nom- chinois de la science et de la tech- breuses municipalités. Ce sont plus nologie (MoST), a déclaré aux auto- de 5 000 autobus pure electric qui rités françaises comme aux indus- circulent tous les jours et les pre- triels du secteur : « les véhicules à mières bennes à ordures et autres motorisation électrique sont le but engins de voiries sont en cours de ultime de la Chine dans ce domaine lancement. 900 taxis sont en test des transports à trop forte dépen- dans neuf quartiers périphériques dance au pétrole ». Les X, XI et XIIème de Pékin et 300 voitures en temps plans ont confirmé ce choix. Cette partagé au sein des universités. action en faveur des transports ter- Le secteur des transports terrestres restres « bas carbone » se poursuivra en Chine comme dans les autres et s’intensifiera lors du XIIIème plan. pays reste aujourd’hui presque tota- lement dépendant du pétrole. En PREMIERS RÉSULTATS D’UNE 2011, la Chine a consommé 0,14 tep/ ACTION LANCÉE DÈS 1995 habitant dans ce secteur des trans- ports ; l’Europe des 27, 0,58 tep/ Plus de 200 millions de bicyclettes, habitant et les USA, 1,75 (source : cyclomoteurs, tricycles, de véhicu- agence internationale de l’énergie et les très légers circulent quotidienne- MEDDE). En 2012, le parc de véhi- ment. La population connait mieux cules quatre roues est de l’ordre de

46 PHOTOS JACQUES SAINT-MARC

Taxi électrique dans la banlieue de Pékin. Le ministre WAN Gang et Jacques Saint-Marc, université de Tongji.

110 millions d’unités, soit environ notamment de Jean-Yves Helmer, UNE COOPÉRATION 80 véhicules pour 1000 habitants. directeur automobile du groupe SCIENTIFIQUE Ce parc a une structure encore dif- PSA, le premier accord a été élaboré férente de ceux d’Europe occidenta- par Pierre Mayet (vice-président du Lors de sa visite officielle en 2002, la le, la part des véhicules lourds, bus Conseil Général des Ponts et Chaus- ministre de la recherche et des nou- et utilitaires y est supérieure. Il aura sées), le directeur adjoint des nouvel- velles technologies a décidé avec été commercialisé environ plus de 16 les technologies et de leurs industria- son homologue Chinois, de la tenue millions de voitures particulières en lisations du MoST, M. XU Jing ainsi d’un séminaire sur « les nouvelles 2012 contre 2 millions en l’an 2000. que par le professeur WAN Gang, générations de batteries et la solu- Elles sont essentiellement concen- directeur scientifique du programme tion véhicules électriques ». Tenus trées dans les grandes municipali- « véhicules à motorisation électrique en 2004 à Pékin et en 2005 à Bor- tés notamment celles de la côte est. et autres énergies alternatives » qui deaux, ces séminaires sont bâtis à a été nommé fin avril 2007 ministre partir d’une démarche originale : les L’objectif du gouvernement chinois de la science et de la technologie, et attentes et spécifications des uti- est qu’en 2020, au moins 5 mil- renommé en mars 2013. Plusieurs lisateurs finaux. La Poste, la Ratp, lions de véhicules produits soient à ministres se sont rendus en Chine EDF, les villes de Bordeaux, de La motorisation hybride plug in ou pure pour appuyer cette coopération Rochelle, de Paris et leurs homolo- electric. Si tous les pays du monde actualisant cet accord dont Chris- gues chinois dont le State Grid et les s’équipaient de véhicules thermiques tian Pierret, Claudine Haigneré, Fran- municipalités de Pékin, de Shanghai comme l’Europe des 27 (environ 560 çois Loos et Gilles de Robien. Nom- et de Tianjin notamment, ont fait part véhicules pour 1000 habitants au breux sont les responsables chinois, de leurs attentes aux industriels et lieu de 70 à 80 véhicules en Chine politiques centraux et de municipa- équipementiers de l’automobile, aux et 30 pour l’Inde), la consommation lités, de centres de R&D, construc- fournisseurs d’énergie électrique et de produits pétroliers doublerait. teurs, équipementiers qui sont venus aux chercheurs du CNRS comme à en France prendre connaissance ceux de la China Academy of Science DES ACCORDS FRANCO- des savoir-faire et des réalisations. et autres universités et instituts. CHINOIS PRAGMATIQUES Comme bien des villes et entrepri- Ces accords portent sur trois axes : ses de services quotidiens, La Pos- La coopération franco-chinoise por- les échanges sur la réglementation, te française y précisa sa demande te sur toute la gamme de véhicules : les composants clés dont les nouvel- de disposer de plusieurs dizaines deux-roues, tricycles quadricycles les générations de batteries et leurs de milliers de véhicules légers de à moteur, voitures, camionnettes, électroniques, les réalisations et nou- 3m3 de volume utile, 95 km/h de et autobus. En 1996, à l’initiative veaux services de mobilité des villes. vitesse et 150 km d’autonomie.

47 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES JACQUES SAINT-MARC Bus électrique des JO 2008, station d’échange de packs de batterie.

Après celle de 2002 du Professeur 2008, par le vice-président du Tianjin tralisée » de Wuhan, de Bordeaux WAN Gang, la deuxième édition du Institute Power Source, le Professeur et Nankin comportaient un atelier séminaire s’est conclue par la présen- WANG Jiqiang avec le Professeur « mobilité ». La quatrième se tien- tation de cette politique de la Répu- Jean-Marie Tarascon et le Docteur dra en novembre 2014 en Alsace. blique Populaire de Chine au centre Michel Armand (université d’Amiens). de conférence international Pierre Les scientifiques des laboratoires Un séminaire sur les Transports à Mendès-France du ministère des d’Amiens, de Bordeaux, de Nantes, Haut Niveau de Service (THNS) est finances . 70 responsables des admi- de Thiais et de Pau notamment sont organisé chaque année à Shanghai. nistrations et agences françaises, maintenant en constante relation et Une circulaire du 23 janvier 2009 des organismes de recherche, des échangent avec leurs collègues des du MOST et du MOF (ministère des scientifiques, les industriels du sec- doctorants en complément de cycles finances) stipule le développement teur et utilisateurs finaux ont pu pren- de conférences et d’enseignements. de plus de 1000 véhicules électriques dre connaissance de l’avancement dans treize municipalités chinoises. de ce programme-clé pour la Chine. La coopération décentralisée entre les villes est appuyée par les régions, ECHANGES ENTRE Les échanges se sont poursuivis pour la mise en place de nouveaux INDUSTRIELS ET SOCIÉTÉS notamment à l’occasion de conféren- systèmes de transports urbains pro- PUBLIQUES ces internationales sur les batteries pres (Bordeaux et Wuhan, La Rochel- de nouvelles générations présidées le/Nantes et Qingdao, Lyon et Can- La Chine porte un grand intérêt à l’ex- à Biarritz par le Dr. Claude Delmas ton, Paris et Pékin notamment). Les périence de La Poste qui transforme, (ICMCB-Bordeaux) et à Tianjin en séminaires de « coopération décen- au fur et mesure de la disponibilité de

48 l’offre, la totalité de ses flottes, aussi bien deux roues que quatre roues, en véhicules électriques. D’autres coopérations sont amorcées ou confirmées avec Renault, PSA Peu- geot-Citroën, PVI, R&D Industrie, Alstom, TransLohr, Valeo, Miche- lin ainsi que des opérateurs com- me Keolis et des industriels chinois. Des industriels chinois de l’automo- bile sont aussi reçus en France par les constructeurs et équipementiers et des exploitants de transports en commun ou de services comme EDF, La Poste et des collectivités locales (Bordeaux, La Rochelle, Paris etc.)

Au-delà de la réglementation véhicu- le, la Chine s’intéresse aux infrastruc- tures de charge et surtout aux nou- veaux services de mobilité urbaine dont le self-service car à La Rochel- JACQUES SAINT-MARC le et maintenant à Paris. La régle- 7 stations sont en service à Pékin et 10 dans d’autres municipalités. mentation française qui s’est actua- lisée et éprouvée depuis la fin des années 90 afin de faciliter le déploie- des Affaires d’Etat de juillet 2012). vice de type Velo’v ou Vélib, com- ment de ces services est l’objet d’un Les 50 premiers bus électriques de me à Hangzhou ou à Wuhan et intérêt soutenu, que ce soit dans les la zone « zéro émission » des JO de dans bien d’autres municipalités. domaines de la sécurité des bat- 2008 et les 200 de l’Exposition uni- Cette coopération lancée depuis teries, de l’utilisation de l’espace verselle de Shanghai en 2010 se 1997 a permis d’établir des liens public et de la disponibilité de bor- complètent de flottes à Chengdu, de confiance avec nombre des plus nes de charge dont les villes fran- Hangzhou, Hefei, Jinlin, Nankin, hautes autorités chinoises tant poli- çaises sont parmi les mieux dotées. Tianjin, Shenzhen, Xiamen permet- tiques, scientifiques qu’industriels. tant d’éprouver différentes techno- Cette confiance mutuelle facilite et DES NOUVEAUX SERVICES logies de motorisation électrique, de fiabilise les échanges. Elle s’inscrit DE MOBILITÉ QUOTIDIENNE batteries et différents systèmes de dans les programmes de réduc- charge dont l’échange par robots. tion des gaz à effet de serre, de lut- Pour conclure, cette coopéra- te contre le changement climatique tion de plus en plus active valori- La Chine souhaite également une et des pollutions locales. En syner- se le savoir-faire acquis en Fran- coopération dans le domaine des gie avec cette coopération en cours, ce et en Chine depuis 15 ans à « petits véhicules » bien adaptés aux l’accord dans le domaine du déve- travers de nombreuses réalisa- missions de proximité (cf. la caté- loppement urbain durable comporte tions, en adéquation avec la plani- gorie des tricycles, quadricycles à un volet sur le thème « planification fication et le développement urbain. moteur) qu’elle entend privilégier. urbaine, mobilités et transports ». La Poste est, là aussi, un partenaire Pour la Chine, les véhicules à motori- d’expérience avec les 15 000 vélos L’indépendance et l’efficacité éner- sation électrique et énergies alterna- à assistance électrique et ses qua- gétiques du secteur des transports, tives sont l’une de ses douze priorités dricycles légers. La Chine adopte sont un des objectifs stratégiques nationales (cf. la directive du Conseil massivement les vélos en libre ser- communs.

49 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER WANG Zhaohua Vice- président, senior vice-président Michelin Chine

Erik Grab Directeur de la prospective, de l’innovation, du développement durable, Groupe Michelin Vers des innovations en matière de mobilité durable en Chine

L’université Paris-Dauphine et l’équipe Prospective de Michelin ont souhaité développer la recherche universitaire sur les questions de croissance liées à la transition énergétique, en relation avec des pôles de recherche tels que la Chaire Economie du Climat (CEC), initiée et dirigée par Christian de Perthuis.

WANG Zhaohua, après une maîtrise ’équipe « prospective et déve- mique de nos villes, de plus en plus en droit à l’université de Wuhan (1984), Lloppement durable » de Miche- cher et contraignant. La transition poursuit des études de français et lin sous la houlette de Patrick Oli- vers une mobilité durable, intégrant obtient un DEA et un doctorat de va participe à un effort de recherche une baisse drastique des pollutions

droit international (Université Robert destiné à aider les acteurs du sec- urbaines et des émissions de CO2 Schuman-Strasbourg). En 1992, il teur des transports et les respon- liées aux déplacements des per- travaille dans un cabinet d’avocats sables des politiques publiques, à sonnes et des marchandises, sera d’affaires parisien, réussit le CAPA mieux comprendre et donc mieux l’une des modifications structu- en 1995, devient avocat au Barreau anticiper les mutations dans ce sec- rantes des systèmes de transport. de Paris. Il dirige ensuite le bureau de teur et de transformer ce qui appa- Le transport est au cœur de tout Hong-Kong en 1997. Il rejoint la même raît encore aujourd’hui comme une l’écosystème générateur de crois- année l’équipe de Michelin Chine où il contrainte en autant d’opportuni- sance et de progrès humains. La a été, senior legal counsel, chief legal tés d’innovation et de croissance. mobilité ainsi considérée comme counsel, directeur des affaires juridiques durable, devient une notion essen- et affaires publiques. La conviction commune des équi- tielle, inscrite au centre des enjeux pes Prospective de Michelin et de la d’urbanisation, des choix d’infras- Erik Grab, a effectué sa carrière au Chaire Economie du Climat est que tructure, des technologies innovan- sein du Groupe Michelin en occupant le transport, qui représente 24% tes liées à l’énergie et aux motori-

divers postes dans les secteurs des émissions de CO2 issues de la sations. Des choix qui devront être du marketing et de l’innovation de combustion de carburants fossiles, faits pour répondre aux contraintes l’entreprise. Il y a acquis une expérience ne doit pas continuer à être unique- du réchauffement climatique et plus internationale aussi bien en Europe ment considéré comme générateur généralement des progrès à appor- qu’en Amérique du Nord. Il enseigne de pollution et de congestion endé- ter dans nos activités humaines. dans diverses universités et écoles de commerce.

50 MICHELIN

Après Berlin, les équipes du Michelin Challenge Bibendum s’engagent à organiser à Chengdu, en 2014, des discussions sur la mobilité.

UNE INITIATIVE Placées sous la responsabilité scien- le mois de décembre 2012. L’objec- DE RECHERCHE tifique de M. Alain Ayong Le Kama, tif de ce livre blanc était de faire un Professeur à l’Université Paris constat analytique. Pour la premiè- Le 1er septembre 2012, Michelin Ouest, et dans le cadre d’une ini- re fois, un travail académique venait concrétise son engagement dans un tiative de recherche Mobilité dans détailler de façon précise la com- effort partagé de recherche, avec le une société bas carbone (IR3 de plexité des modèles de transport : premier objectif d’aider à compren- la Chaire Economie du Climat), les multiplicité des acteurs publics et dre et anticiper les mutations atten- équipes de la Chaire travaillent en privés, interdépendances sectoriel- dues dans ce secteur. Décrypter la étroite collaboration avec les équi- les, inerties nombreuses liées aux complexité des systèmes de trans- pes de Michelin, et sont chargées infrastructures, parfois aux techno- ports, leurs externalités négatives notamment d’alimenter en conte- logies, aux rythmes de décisions, (pollution, congestion, bruit, etc.) ou nu le prochain Michelin Challenge aux « mille-feuilles » administratifs. positives (sécurité, santé, accessibi- Bibendum qui aura lieu à Chen- lité, connexion et lien social, etc.), les gdu en Chine en novembre 2014. Dans une deuxième partie il est fait inerties liées notamment aux choix état de solutions existant sur l’en- d’infrastructures et à leur finance- LA CHINE AU CŒUR semble des modes de transports ment…C’est in fine, donner des clés DES ENJEUX DE DEMAIN routier, ferroviaire, aérien ou fluvial, de solutions nouvelles. Dans un mon- concernant les hommes et les mar- de où 80% de la population habitera L’équipe s’est donné comme objec- chandises. Des pistes sont étudiées, en ville, la mobilité ne se développe- tif de proposer aux autorités publi- des expériences comme celles du ra que si elle devient plus durable, ques chinoises au travers d’un livre péage urbain de Londres ou de la

réduisant les émissions de CO2 et vert, les technologies gagnantes, taxe Poids Lourds en Allemagne sont la pollution, apportant de nouvelles les politiques publiques ciblées ainsi analysées. Le message est clair, les solutions de transport porteuses des que les instruments économiques au inerties et la complexité sont faites services et des emplois de demain. service d’une mobilité bas carbone. pour être résolues et dépassées. La mutation vers une mobilité bas car- Cette mutation ne peut se faire qu’à En juin 2013, une première publi- bone est inéluctable et elle est réali- l’aide de politiques publiques clair- cation a mis en évidence les instru- sable, elle conditionne la forte urba- voyantes, de nouvelles techno- ments économiques nécessaires nisation des 30 prochaines années. logies, de nouveaux instruments pour mettre en œuvre la transition économiques permettant de finan- vers une mobilité bas carbone. Il L’initiative de recherche vers une cer les infrastructures nécessaires s’agit de l’analyse des contribu- mobilité bas carbone a lancé deux et de nouveaux business models. tions d’un séminaire organisé dès sujets de thèses sur les thèmes :

51 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES MICHELIN Dans un peu moins de 30 ans, le parc automobile mondial aura doublé, près de 2 milliards de voitures circuleront sur les routes.

Quels instruments de régulation sont 2014, RENDEZ-VOUS tion dans les années qui viennent. à la disposition des décideurs locaux À CHENGDU L’ambition du Michelin Challenge des transports pour faciliter la transi- Bibendum est bien de porter une tion vers une société bas carbone ? La présentation de scénarios d’évo- vision globale et de recommander Quelles sont les interactions entre les lutions possibles, à l’horizon 2050, des choix de technologies, de poli- acteurs de la filière automobile (de liés à des problématiques différentes tiques publiques et d’instruments l’amont à l’aval) qui améliorent l’ef- dans les grandes régions du mon- économiques qui vont concrétiser ficacité des outils de régulation car- de, aux choix de politiques énergéti- cette vision dans des écosystèmes bone appliqués au transport routier ? ques et aux contextes économiques innovants. Un focus particulier sera Au long de cette première année permettra d’éclairer les décideurs apporté en novembre 2014 à des d’existence, l’initiative de recher- publics notamment chinois. Ces scé- questions propres au développe- che a fédéré l’une des plus fortes narios correspondent aux grandes ment de l’économie chinoise, et à la communautés d’experts mondiaux, visions énergétiques de l’IEA et éco- nécessaire maîtrise des externalités d’économistes et d’entreprises dans nomiques de l’OCDE. Ils décrivent négatives en rapport avec la très for- le domaine du transport (pétroliers, les actions à mener pour favoriser te urbanisation et avec la nécessité constructeurs automobiles, équipe- les politiques publiques ciblées et les de maintenir une croissance forte. mentiers, compagnies et régies de nouveaux instruments économiques transport, etc.). Cette communauté de transition, l’influence des techno- Les relations étroites qu’entretient le alimente, échange et construit le pro- logies gagnantes et les nouveaux Michelin Challenge Bibendum avec gramme du Livre vert qui sera dévoilé écosystèmes innovants de mobilité, son hôte chinois permettront la valo- à Chengdu, lors de la prochaine édi- portés par une demande sociétale risation de ces deux années d’un tra- tion du Michelin Challenge Bibendum. de mobilité qui sera en forte muta- vail prospectif inédit et d’une colla-

52 boration particulièrement étroite avec la Chaire d’Economie du Climat. LE SOMMET MONDIAL DE LA MOBILITÉ PROPRE, « L’innovation dans la mobilité au ser- SÛRE, CONNECTÉE ET ACCESSIBLE. vice de la croissance et du bien-être Initié il y a près de 15 ans, Michelin Challenge Bibendum est le seul événement en ville » sera le thème du prochain au monde réunissant lors d’un même forum, constructeurs d’automobiles ou Michelin Challenge Bibendum qui de poids lourds, universités, équipementiers, fournisseurs d’énergies, instituts se tiendra à Chengdu en Chine en de recherche, responsables politiques, ONG… pour partager de nombreuses novembre 2014. Cette douzième édi- innovations et une vision commune des transports de demain, plus propres, tion se focalisera sur la manière d’ac- plus sûrs et connectés. Ce rendez-vous itinérant s’arrête sur un continent célérer le progrès grâce au déploie- différent, aborde les spécificités et problématiques qui le caractérisent, sans ment à grande échelle de mesures perdre de vue que les défis majeurs sont devenus mondiaux et que les sources innovantes combinant évolutions d’innovation sont à l’échelle mondiale. Climat, géographie, densité urbaine, technologiques, avancées en termes disponibilité et consommation des ressources énergétiques, promotion de de politiques publiques, instruments la sécurité routière, sont autant de variables prises en considération lors des économiques adaptés et transforma- présentations et échanges qui s’effectuent lors de ce forum. Le Challenge tion des écosystèmes de mobilité. Bibendum réunit tous les acteurs du transport routier qui imaginent, conçoivent et mettent en œuvre les solutions permettant aux véhicules de consommer TRANSFORMER LA MOBILITÉ moins d’énergie et de se déplacer plus proprement.

En d’autres termes, les équipes du Pour en savoir plus : www.michelinchallengebibendum.com Michelin Challenge Bibendum s’en- gagent à organiser à Chengdu des discussions au plus haut niveau sur sées, le Michelin Challenge Biben- Society, UrbanMobility et Mobility in la manière de transformer la mobi- dum a aussi pour vocation de pré- China. C’est au sein de ces espa- lité ; en fournissant aux décideurs parer les évènements du futur et ces transnationaux qui ont pour des outils d’aide à la décision argu- permettre de passer de l’idée à l’ac- vocation de faire émerger les pro- mentés, tenant compte des priorités tion. Des communautés sont en jets collaboratifs entre partenaires exprimées par la demande sociéta- cours de création, dont la vocation et experts, que sont mises en com- le : solutions technologies particu- est de rassembler des profession- mun les bonnes pratiques et exper- lièrement prometteuses, politiques nels et experts de la mobilité dura- tises du monde entier. Les commu- publiques ciblées, nouveaux instru- ble à l’échelle mondiale. L’ambition nautés sont constituées de parties ments économiques et écosystè- est de contribuer à fédérer les for- prenantes publiques ou privées mes innovants ainsi qu’une évalua- ces qui feront la mobilité de demain. autour de thématiques spécifiques tion des bénéfices du déploiement pouvant donner lieu à partenariat. massif de ces solutions à l’échelle DES ESPACES macro-économique et individuelle. TRANSNATIONAUX Le Michelin Challenge Bibendum n’est donc pas seulement un Think Aujourd’hui, la Chine est en forte Cette communauté globale du Chal- Tank mais aussi un Action Tank, sa croissance et son industrie auto- lenge Bibendum constitue une ini- production régulière et participative mobile se développe rapidement, tiative unique. Grâce à l’intégration de livrables en témoigne (définition notamment à Chengdu, une des d’outils collaboratifs puissants, elle de projets, conférences, cahiers des plus importantes villes de l’ouest. permet à ses membres utilisateurs charges, livres blancs, etc.). Il parti- de s’informer et d’échanger sur les cipe à la définition et la mise en place A l’heure du cinquantième anniver- dernières innovations du secteur ou de la mobilité durable des prochai- saire des relations diplomatiques sur les enjeux autour de la mobilité nes décennies. Dans un peu moins entre la France et la Chine, nul dou- routière durable. Six communautés de 30 ans, le parc automobile mon- te que le Michelin Challenge Biben- thématiques se constituent actuel- dial aura au moins doublé, près de 2 dum y trouvera une place de choix. lement : Clean Mobility, Safe Mobi- milliard de voitures circuleront sur les Bien au-delà de ses réussites pas- lity, ConnectedMobility, Mobility & routes. Cette accélération fulgurante

53 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES MICHELIN La Chine est en forte croissance et son industrie automobile se développe rapidement.

est un signe de progrès. Pour la pre- ment. La mobilité due au progrès monde. A la lumière de ce phénomè- mière fois, de nouveaux usagers technique permet des avancées ne d’expansion du parc automobile auront accès à la mobilité. Le bénéfi- sociales. Le Michelin Challenge mondial, on comprend pourquoi les ciaire de cette mobilité pourra se Bibendum est l’occasion de décou- questions des ressources énergéti- déplacer plus facilement et plus loin, vrir que la mobilité qui se profile se ques et de sécurité doivent être trai- accédant ainsi à des ressources dont fera au moyen de véhicules et d’éco- tées à l’échelle globale et avec tous il ne pouvait tirer profit aussi rapide- systèmes adaptés aux régions du les protagonistes concernés.

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54 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER

Michel Savy Directeur Observatoire des politiques et des stratégies de transports en Europe Les villes portuaires en Chine

Michel Savy, professeur à l’université Le développement économique de la Chine durant de Paris Est (Ecole d’Urbanisme de les trente-cinq dernières années est, il est banal Paris et Ecole des Ponts ParisTech), de le répéter, un des faits marquants de l’évolution est en outre chercheur au Lab’Urba, directeur de l’Observatoire des économique et sociale à l’échelle mondiale. politiques et des stratégies de transport en Europe et de son bulletin Transport / Europe. Co directeur du Centre franco- l a revêtu des caractéristiques ter- allant jusqu’au cœur montagneux de chinois Ville & Territoire (universités de Iritoriales particulièrement accen- l’Asie. C’est dans la bande côtière Paris Est et de Nankin), il est membre tuées, notamment le rôle prééminent que se trouvent la plus forte densité du collège de l’Autorité de régulation de quelques villes portuaires majeu- de population et le taux le plus éle- des activités ferroviaires (ARAF). res. Les deux termes, ville et port, se vé d’urbanisation ainsi qu’une lar- Ses travaux portent sur l’économie trouvent ici étroitement liés. Ce n’est ge part de la main d’œuvre indus- et la politique des transports et pas la première fois dans l’histoire, trielle. Le mouvement d’ouverture l’aménagement du territoire. si l’on se rappelle la notion d’éco- aux investissements internationaux nomie-monde de Fernand Braudel, et de libéralisation des marchés dont les pôles dominants furent suc- déclenché en 1978 a eu pour forme cessivement Gênes, Venise, Amster- spatiale emblématique quatre dam, Londres ou New-York, toutes zones économiques spéciales, tou- villes portuaires. Dans la globalisa- tes situées sur la côte, à commen- tion multipolaire actuelle, Canton cer par celle de Shenzhen qui fit et Shanghai, voire Pékin, s’inscri- d’un village de pêcheurs une ville raient ainsi dans cette lignée, mais de 10 millions d’habitants à ce jour. leur trajectoire est-elle durable ? Cette localisation littorale était d’autant plus pertinente que leurs UN DÉVELOPPEMENT activités devaient d’une part s’ap- ÉCONOMIQUE SPATIALEMENT provisionner en matières pre- TRÈS CONTRASTÉ mières largement importées, et, d’autre part, avoir pour débou- La croissance contemporaine chinoi- ché le marché extérieur prioritaire se s’est, dans un premier temps du plutôt que le marché intérieur. La moins, appuyée sur la frange litto- Chine est ainsi devenue « l’atelier rale d’un territoire national immense du monde » dans la globalisation.

55 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES D.R. Le terminal conteneurs en eau profonde de Yangshan dépendant du port de Shanghai (600 millions de tonnes en 2011).

La forte inégalité du développement exploitable à merci. Toutefois, l’in- traité, sept sont aujourd’hui chinois. sur le territoire, entre la côte et l’inté- version de tendance est désormais Le premier est Shanghai (600 millions rieur du pays, eut pour conséquen- un objectif stratégique du gouver- de tonnes en 2011), auquel on peut ce de forts déplacements de main nement chinois, qu’il s’agisse de ajouter son proche voisin de Ningbo d’œuvre, légaux et illégaux, allant l’instauration d’un système élargi de (350 millions de tonnes). Pour des bassins de main d’œuvre dis- sécurité sociale ou du rééquilibrage mémoire, le trafic de Marseille était ponibles vers les zones d’emploi. spatial des activités économiques. de 88 millions de tonnes en 2011. Sur les dix premiers ports mon- LA CROISSANCE DES VILLES La croissance du trafic des ports diaux en nombre de conteneurs, six PORTUAIRES CHINOISES chinois fut nécessairement à l’échelle sont chinois. Le premier est, ici aus- de cette croissance de la production si, Shanghai (32 millions de conte- La « main d’œuvre flottante » des et des échanges. Les investissements neurs EVP (équivalent vingt pieds] en mingong échappant à la contrainte en infrastructures furent considéra- 2011), tandis que Ningbo en traitait de résidence du hukou (que l’on tra- bles, au point qu’au-delà des effets 15 millions. Le trafic du Havre était de duit couramment par passeport inté- de la crise économique en cours, on 2 millions d’EVP pour la même période. rieur) serait de l’ordre de 260 millions décèle un risque de surcapacité ou, de personnes selon le recensement du fait d’une concurrence mal régu- DE VASTES ZONES de 2010. Elle fournit à la croissan- lée entre villes, d’équipements mal D’URBANISATION ce une force de travail particulière- localisés et sous-utilisés. Quoi qu’il ment bon marché, sans couvertu- en soit, sur les dix premiers ports L’ensemble des ports chinois connut re sociale, éloignée de sa famille et mondiaux en termes de tonnage cette expansion et on peut les regrou-

56 per en trois ensembles majeurs : au pole est un lieu de pouvoir politi- craindre l’éclatement d’une bulle Sud, la rivière des Perles (Hong- que, scientifique et culturel, même spéculative. La hausse des salaires, Kong, Canton, Shenzhen), le delta dans les systèmes institutionnels profitable à la main d’œuvre locale, du Yangzi (Shanghai, Ningbo), au dont elle ne serait pas le lieu central. affaiblit la compétitivité des produc- Nord le golfe de la Mer Jaune (Tianjin, tions fondées sur le coût du travail Qinhuangdao, Dalian), sans omettre LES CONTRADICTIONS qui tendent déjà à se déplacer vers des ports intermédiaires importants DE LA CROISSANCE des régions chinoises de l’intérieur comme Qingdao. Tout un chapelet ou vers d’autres pays d’Asie (Viet- jalonne le littoral, de nombreux ports Parmi les attributs des villes mon- nam, Indonésie, Bengladesh, etc.). secondaires relayant les grands diales, la fonction portuaire apparaît ports à travers le feedering. Ce cabo- comme presque nécessaire, Paris L’HISTOIRE CONTINUE … tage maritime est d’un volume tri- et Moscou étant parmi les rares ple du trafic international et assure exceptions. En tout cas, les plus Loin de s’opposer à la redistribu- une part notoire de l’ensemble des grandes villes chinoises, à rayonne- tion géographique de la croissan- transports intérieurs chinois de fret. ment mondial, sont des villes por- ce vers les régions de l’intérieur, les tuaires : Canton, Shanghai et même autorités politiques centrales veulent Ce développement portuaire ne fut Pékin qui, naguère réputé continen- maintenant la systématiser. Les rai- pourtant qu’une composante d’un tale, a désormais son port avec la sons politiques s’ajoutent aux rai- développement urbain bien plus lar- ville de Tianjin, distante de 130 km sons économiques pour réduire ge. Pour citer encore Shanghai, la et accessible par TGV, qui comp- les écarts de développement et de création du nouveau port de Yangs- te 13 millions d’habitants et traite revenus entre provinces. Cette stra- han en pleine baie de Hangzhou et 460 millions de tonnes et 12 mil- tégie rappelle, toutes proportions relié au rivage par le pont de Donghai lions de conteneurs maritimes par gardées, la politique de « décentra- de 32 km est venue relayer la satu- an. Ce modèle a-t-il atteint ses limi- lisation industrielle » mise en œuvre ration du port historique de Waigao- tes ? La croissance des métropo- durant les Trente Glorieuses par les qiao. Mais, simultanément, outre l’aé- les ne va pas sans contradictions. politiques d’aménagement du terri- roport international (où DHL installe toire en France. Investissements et un hub pour le fret aérien), la pénin- La population de la Rivière des Per- croissance touchent désormais Nan- sule de Pudong est devenue une les atteint 60 millions d’habitants, kin, Wuhan, Chongqing, etc. On note vaste zone d’urbanisation multipliant celle de Shanghai 23 millions, celle que ces trois villes sont de grands les quartiers nouveaux, les zones de de Pékin 20 millions. Riche en exter- ports fluviaux sur le Yangzi, avec logistique, de commerce, d’industrie. nalités positives de toutes sortes respectivement des trafics de 151, Elle n’est elle-même qu’une part de (effets d’agglomération, économies 115 et 100 millions de tonnes de la métropole où toutes les activités d’échelle pour les équipements et trafic en 2011. Ce sont aussi d’im- se développent en un système inté- services collectifs, etc.). La crois- portants hubs multimodaux, pour gré : du transport et du traitement sance urbaine engendre aussi des les voyageurs comme pour le fret. des matières premières aux indus- déséconomies d’échelle, une bais- tries high tech, sans omettre l’im- se de la productivité sociale par l’al- Cette réorganisation spatiale néces- mense gamme des services, le négo- longement des distances et des site en effet de puissants réseaux ce, l’industrie financière, les médias, temps de déplacement malgré le interrégionaux de communica- la recherche et l’université, etc. développement des transports col- tion (transport de fret, de person- lectifs, une élévation dangereuse de nes, d’énergie, d’information), et les Le dynamisme de la métropole et a la congestion et de la pollution (rap- investissements en infrastructures fortiori de la ville mondiale, sa capa- portée par les médias chinois eux- sont considérables. Un plan natio- cité à polariser un espace de plus mêmes). Ce modèle de développe- nal de plates-formes logistiques en plus large, implique précisé- ment n’est pas très soutenable… est lancé, car le système d’échan- ment le caractère intersectoriel de ges doit faire de notoires progrès son développement. Sans oublier La hausse des prix de l’immobilier qualitatifs (le coût logistique repré- que, outre l’économique, la métro- pèse sur les revenus, tout en laissant sente quelque 18 % du PIB et le

57 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES LAURENT MIGNAUX/METL-MEDDE

Sur les dix premiers ports mondiaux en nombre de conteneurs, six sont chinois.

pays se classe au 26ème rang mon- RÉFÉRENCES dial selon l’indice de performance

logistique de la Banque mondiale). l Michel Savy, Wang Hongyang, Zhai Guofang (ed.), Territorial Evolution Les grandes villes portuaires ne sont and Planning Solution: Experiences from China and France, Paris, Atlantis pas pour autant délaissées. Au Press, 2010.

contraire, elles accèdent ainsi à un l Liu Xiaoming, Logistique et aménagement du territoire, comparaisons rôle élargi, devenant les têtes de entre la France et la Chine, thèse de doctorat de l’Université de Paris Est, réseau d’un développement maillé 2012.

associant l’intérieur du pays à la l Tang Shuangshuang, L’aménagement du territoire en France pendant la côte. Tout récemment, le gouverne- période d’urbanisation rapide (1945-1970) : évolution et effets, leçons pour ment chinois vient de créer une zone les politiques d’aménagement de la Chine, thèse de doctorat de l’Université franche expérimentale où le yuan de Paris Est, 2013.

serait convertible et les investisse- l Michel Savy, Logistics and the City: the Key Issue of Freight Villages”(avec ments étrangers moins contraints. Liu Xiaoming), in Mackett R., May A., Kii M., Pan H. (ed.), Sustainable C’est à nouveau une ville portuaire, Transport for Chinese Cities, London, Emerald, 2013.

Shanghai, qui a été choisie pour cet- l Michel Savy et June Burnham, Freight Transport and the Modern Economy, te implantation. Une nouvelle phase London, Routledge, 2013. s’ouvre-t-elle ?

58 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER

Jean-Louis Oliver Secrétaire général Académie de l’eau

La coopération franco-chinoise dans le domaine de l’eau

Jean-Louis Oliver, (X 60, ENPC 65), La Chine, soucieuse de poursuivre son ingénieur général honoraire, a effectué développement sans obérer ses ressources sa carrière dans l’aménagement naturelles en eau de façon dramatique et sans régional et urbain, ainsi que dans la gestion des ressources et des usages perturber exagérément son environnement, s’est de l’eau, en alternant des fonctions engagée dans une politique dynamique de gestion de responsabilité entre secteur public intégrée de ses ressources, de lutte contre les et secteur privé, tant en France qu’à inondations et la pollution. l’international, y compris au sein de la Banque mondiale à Washington. Depuis 2004, il est secrétaire général de l’Académie de l’eau et ’expérience française acquise inondations, la lutte contre la séche- administrateur ou membre de multiples Ldans ce domaine, internationale- resse et la désertification, la naviga- associations ou sociétés savantes ment reconnue, représente un apport tion intérieure entre le bassin du fleu- dans ce domaine. particulièrement actif et utile, débou- ve Jaune et celui du Yangtsé, etc. chant sur de nombreuses coopéra- tions bipartites, voire, pourquoi pas L’EAU, UNE PRÉOCCUPATION dans l’avenir, sur des coopérations MILLÉNAIRE tripartites, notamment avec l’Afrique. Sous l’influence de ses célèbres phi- La maîtrise de l’eau, en Chine, est losophes Confucius, Lao Tseu, et de une entreprise multimillénaire. Depuis ses mandarins, administrateurs d’un son héros fondateur légendaire, Yu vaste empire, les Chinois ont été à le Grand, qui, deux mille ans avant l’origine de nombreuses inventions notre ère, lança les premiers cura- liées à l’eau : le plan d’eau, l’écluse à ges du lit du fleuve Jaune envasé sas, le gouvernail axial, la boussole, par le lœss, l’histoire de la Chine, de la brouette, etc., qui, par la route de la ses royaumes et de ses dynasties soie, Venise, Marco Polo et Léonard impériales successives, est jalon- de Vinci, se sont ensuite répandues née de réalisations hydrauliques en Europe. Avec 1/5 de la popula- souvent remarquables, pour déve- tion mondiale, la Chine ne dispose lopper l’approvisionnement en eau, que de 7 % des ressources en eau l’irrigation, la protection contre les de la planète, d’où un faible volume

59 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

d’eau disponible par habitant, 1/4 de des chinoises, la Corée et le Japon. grandes municipalités (Pékin et la moyenne mondiale. Ces ressour- Elle a simultanément cherché à Tianjin), a été retenu pour y conduire ces en eau sont réparties géographi- mieux connaître et à adapter l’expé- un projet pilote. La deuxième phase quement de manière très contras- rience acquise dans ce domaine par de ce projet pilote a fait l’objet d’un tée : abondantes dans les zones les pays industrialisés de plus lon- nouvel accord intervenu en mars méridionales soumises à la mousson gue date en Europe, dont en parti- 2012 lors du VIème Forum mondial et limitées dans les régions du Nord. culier la France. Dans le domaine de de l’eau de Marseille. L’ambassade l’eau, la France possède une expé- de France en Chine, l’Office interna- Ces ressources sont fort inégale- rience largement reconnue au niveau tional de l’eau, les agences de l’eau ment distribuées dans le temps, international, caractérisée par des Seine-Normandie et Rhône, Médi- avec une grande variabilité inter et partenariats entre collectivités loca- terranée, Corse, le Syndicat inter- intra annuelle de la pluviométrie, les et opérateurs professionnels, départemental d’assainissement de entraînant des épisodes récurrents gestionnaires de services publics l’agglomération parisienne (SIAAP) de sécheresse et d’inondations environnementaux (eau, assainis- et l’Etablissement public territo- catastrophiques dont le change- sement, déchets, etc.) et par la ges- rial de bassin (EPTB) Seine Grands ment climatique en cours va aggra- tion intégrée des ressources en eau Lacs collaborent ainsi avec la Com- ver la fréquence et la gravité. Depuis à l’échelle des bassins hydrographi- mission du bassin de Hai, le bureau des siècles, des barrages-réservoirs ques, qui a inspiré la directive-cadre de l’eau de Tianjin, celui de la pro- et de grands transferts d’eau Sud- européenne sur l’eau (DCE). Cet- vince du Hebei, celui de la riviè- Nord ont été réalisés. Aujourd’hui, te approche territoriale et systémi- re Hai, et celui de la rivière Huan. la poursuite du développement éco- que au cœur des enjeux émergents nomique et social de la Chine, pour en Chine, a été développée dans Au printemps 2013, lors de la visite être équilibrée et durable, cherche les travaux de Pierre-Alain Roche, en Chine du président de la Répu- à prendre davantage en compte les gouverneur du Conseil mondial blique Française, il a été signé un aspects environnementaux, en parti- de l’eau et président de l’Associa- nouvel accord relatif à la protection culier la gestion intégrée des ressour- tion scientifique et technique pour de l’environnement comportant un ces en eau, la lutte contre la pollu- l’eau et l’environnement (ASTEE). volet sur l’eau et la lutte contre les tion et la prévention des inondations. rejets de produits toxiques. Tous ces LA COOPÉRATION accords entrent en synergie avec la UNE PROBLÉMATIQUE FRANCO-CHINOISE coopération développée parallèle- CRUCIALE ment par la Chine et l’Union euro- Dans ce contexte, un accord-ca- péenne en cherchant à adapter au Saisissant l’importance des problè- dre a été signé en 2009 entre la contexte chinois les dispositions mes et des enjeux, la Chine a adopté France et la Chine dans le domaine de la directive-cadre sur l’eau et dans les années 1990 deux mesures de l’eau. C’est ainsi qu’en 2010 a de la directive sur les inondations. phares : la première a consisté à rati- été organisé à Wuhan un atelier de fier le Protocole de Kyoto, même si, stratégie de développement urbain LE DÉVELOPPEMENT en tant que « pays en voie de déve- durable portant sur le lac Liangzi, DE LA COOPÉRATION loppement », elle n’est pas tenue de auquel ont notamment partici- réduire ses émissions de gaz à effet pé Urba 2000 et Sogreah/Artelia. L’Agence française de développe- de serre ; la seconde, en 1998, a his- ment (AFD), opérateur-pivot de notre sé symboliquement l’agence natio- Des dispositions opérationnelles ont aide publique au développement, est nale pour la protection de l’environ- été signées en 2011 pour dévelop- présente depuis 2004 en Chine où nement au rang d’un ministère. Elle per une coopération partenariale en elle possède une implantation per- s’est aussi progressivement engagée matière de gestion intégrée et de manente à Pékin. Elle y intervient à l’international dans une diplomatie protection des ressources en eau. dans le cadre d’un partenariat avec de l’environnement, en commençant Le bassin du fleuve Hai, qui, com- le ministère chinois des finances et par normaliser ses relations avec me quatre provinces (Hebei, Shanxi, la commission nationale du dévelop- ses voisins victimes de pluies aci- Hunan, Mongolie intérieure) et deux pement durable et de lutte contre le

60 D.R. Avec 1/5 de la population mondiale, la Chine ne dispose que de 7 % des ressources en eau de la planète.

changement climatique. A travers la prises et des ONG, sous la forme de nomique et social est largement tri- mise en œuvre de partenariats fran- partenariats, d’échanges d’expérien- butaire de l’amélioration de la gestion co-chinois, elle soutient des opéra- ces et de transferts de technologies, des usages (eau potable / assainis- tions pilotes contribuant à l’améliora- concernant notamment le traitement sement, irrigation, industrie, énergie, tion des pratiques et à l’introduction des eaux (eau potable, eaux usées, navigation, etc.) et des ressources de nouvelles technologies, en mobili- eaux industrielles) ainsi que la ges- en eau, souvent transfrontalières. Il sant et en valorisant l’expertise et les tion des installations et des services. s’agirait de mener ces collaborations acteurs français de l’économie verte non seulement avec les pays africains dans le domaine de l’eau. Fin décem- QUEL AVENIR ? francophones avec lesquels la Fran- bre 2012, le cumul des autorisations ce a des liens historiques, mais aussi de l’AFD en Chine s’élevait à environ Nos principales sociétés d’ingé- avec les pays africains anglophones un milliard d’euros pour vingt projets. nierie (Artelia, Egis, Safège, Coyne et lusophones où des perspectives et Bellier, etc.), nos équipementiers nouvelles de partenariats pourraient Au-delà des accords inter-gouverne- (Degrémont, etc.), nos grands opé- se présenter, comme le souhaite le mentaux, et compte tenu de l’impor- rateurs (Veolia Environnement, Suez ministère des Affaires étrangères. tance et de l’urgence des besoins, Environnement, Saur, EDF, etc.) sont Sous l’effet d’un développement conjugués avec une plus large eux-mêmes très actifs sur cet énor- intensif, les inégalités économiques, ouverture internationale, la coopéra- me marché chinois de l’eau en plein sociales et territoriales, tendent à tion franco-chinoise dans le domai- développement. En s’appuyant sur s’accentuer dans ce pays immense ne de l’eau se développe aussi, de l’expérience acquise en commun, la et très peuplé : l’eau, bien physique manière concrète et pragmatique, France, adossée à l’Union européen- vital, constitue, en Chine comme au niveau des collectivités locales, ne, et la Chine pourraient utilement en France et partout ailleurs, un des universités, des grandes écoles proposer des coopérations tripartites puissant facteur de cohésion et de et centres de recherche, des entre- en Afrique où le développement éco- solidarité.

61 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Fouad Awada Directeur général adjoint Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile-de-France Vice-président d’Urba 2000 L’aménagement du lac Liangzi à Wuhan : un projet partagé

Fouad Awada, urbaniste français et Dans le cadre du premier accord de partenariat libanais est installé en France depuis conclu en 2007 entre la Chine et la France sur le 1976. Docteur en urbanisme de l’Ecole développement urbain durable, Urba 2000 a été nationale des ponts et chaussées et architecte DESA (1980), il a exercé l’opérateur d’une session d’ateliers franco-chinois à sa carrière principalement à l’Institut Wuhan fin 2010 portant sur l’aménagement du lac d’aménagement et d’urbanisme de Liangzi à Wuhan. la région Ile-de-France dont il est directeur général adjoint depuis 1998 et directeur du département Urbanisme, rois équipes d’urbanistes ont UNE VISION COMMUNE aménagement et territoires. Il est par Tproposé des solutions permet- DU DÉVELOPPEMENT ailleurs administrateur de l’Ecole des tant de concilier la croissance urbai- Ponts ParisTech et vice-président ne de l’agglomération avec la pré- C’est dans ce cadre que plusieurs d’Urba 2000. servation et la mise en valeur de provinces et villes chinoises, et plu- cette étendue d’eau de 300 km². Les sieurs secteurs d’activité, s’étaient années 2000 ont été pour la Chine, vus assigner dès le début des années comme pour la France et l’Euro- 2000 des objectifs de progrès en pe, celles d’un engagement crois- matière d’environnement (assortis de sant en faveur de l’environnement sanctions) ; c’est dans ce contexte et de la mise en place de politiques que les présidents chinois et français de développement durable. L’arse- ont signé en 2007 un premier accord nal légal, dont les bases remontent de coopération bilatérale sur le thème à la première loi de protection de du développement urbain durable. l’environnement de 1989, n’a cessé de s’étoffer. Le onzième plan quin- La Province de Hubei, et plus par- quennal de développement écono- ticulièrement sa capitale le Grand mique (2006-2011) est venu consa- Wuhan (la municipalité de Wuhan et crer la vision chinoise selon laquelle les 8 municipalités appelées à parti- la préservation de l’environnement ciper à sa métropolisation), avaient était désormais considérée com- toutes les caractéristiques requises me une composante à part entière pour être désignées comme terri- de la modernisation du pays et de toire pilote de cette coopération. son développement à long terme. Wuhan est en effet un lieu d’implan-

62 URBA 2000

La préservation du lac Liangzi est un enjeu majeur pour le développement durable.

tation privilégié de plusieurs entre- à mi-chemin entre Shanghai à l’Est du lac Léman ou le double du bas- prises françaises dont notamment et Chongqing à l’Ouest, et à mi-che- sin d’Arcachon, sur laquelle s’exer- Peugeot PSA, et la province affiche min entre Pékin au nord et Canton au ce une pression urbaine aux origines depuis de nombreuses années une Sud. La ville s’est développée sur un multiples. L’extension continue de la ambition d’exemplarité en matière méandre du fleuve Yang Tsé, dans ville de Wuhan vers le sud, notam- de développement urbain durable, une région plate entourée de monta- ment la zone de développement ou reconnue par la Commission Natio- gnes, un relief responsable de la pré- quartier Optic Valley, dont les limites nale pour la Réforme et le Dévelop- sence de très nombreux lacs aussi ne sont plus qu’à quelques centai- pement pour le projet Grand Wuhan. bien dans le périmètre de la ville nes de mètres des rives du lac. Les (dite des 100 lacs) que dans celui projets d’extension de la municipa- La première action de coopéra- de la province (dite des 1000 lacs). lité d’Ezhou, située à une heure de tion, significative de l’approche rete- train à l’est de Wuhan, qui prévoient nue d’une « stratégie territoriale de Les extensions de la ville ont forte- un contact avec le lac par l’Est. Les développement durable » qui a été ment affecté ce système aquatique. projets d’infrastructure en cours de conduite dans le cadre de cet accord Le lac de l’Est, le plus proche du cen- réalisation sur le couloir sud allant de franco-chinois, a été sans contes- tre, est cerné par l’urbanisation et se Wuhan à Xianning. Ce couloir longe te la tenue de la session d’ateliers trouve en situation d’eutrophisation. le lac Liangzi par l’Ouest. Outre la conjoints en novembre 2010 pour Le lac Liangzi, le plus grand de tous, ligne TGV qui y passe, un train inter- imaginer un aménagement durable se trouve en limite sud-est de la vil- cités y était en construction en 2010. aux abords du lac Liangzi. Cette ini- le. Il est menacé certes, mais avec tiative a été soutenue par un finan- une qualité des eaux qui demeu- Les projets planifiés : en particulier cement du Fonds d’étude et d’aide re relativement bonne, voire excel- un projet d’autoroute devant des- au secteur privé (FASEP). Son opéra- lente dans la partie sud, la moins servir ce couloir sud et traverser une teur désigné fut l’association URBA affectée par les activités humaines. portion du lac en viaduc. Une aqua- 2000 présidée par Pierre Mayet. culture intensive à très fort impact Le choix du site du lac Liangzi com- sur le lac, notamment au nord-est au UNE COOPÉRATION SUR me matière pour cette action de coo- débouché du canal de Channang qui UN SITE EMBLÉMATIQUE pération ne doit rien au hasard. Les relie le lac au Yang Tsé. Outre la pol- Chinois étaient intéressés à voir la lution due à l’élevage des crabes pro- Wuhan, ville préfecture de la provin- manière dont les urbanistes français prement dite, ce secteur se caracté- ce du Hubei, est située à l’épicentre pouvaient se saisir d’un cas d’école rise par un grignotage continu des de la Chine, à la croisée des deux aussi extrême. Car voilà une éten- zones humides. Des projets touristi- axes cardinaux de communication, due d’eau de 300 km², soit la moitié ques en développement : la fréquen-

63 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

des sciences de la terre de l’universi- té des géosciences de Wuhan, entre avril et octobre 2010. La session pro- prement dite s’est déroulée à Wuhan du 24 octobre au 5 novembre 2010.

LES ATELIERS ORGANISÉS PAR URBA 2000

Pour les ateliers, Urba 2000 a mobi- lisé pas moins de 22 experts fran- çais : outre Pierre Mayet et Caroline Maurand pour le pilotage d’ensem- ble, 2 experts transversaux pour le pilotage des groupes de travail, 6 experts référents sectoriels, et 12 experts répartis sur les 3 groupes de travail, ces groupes étant enrichis, côté chinois, par 19 experts chinois coordonnés par le Professeur Li.

Urba 2000 a mobilisé par ailleurs 8 personnalités françaises de pre- mier plan pour participer au jury du 5 novembre 2010 à Wuhan, dont Yves Cousquer, co-président du jury. La partie chinoise a mobilisé de son côté 9 personnalités émi- nentes pour ce jury, dont M. Tang Kai, directeur général de la planifi- cation au ministère de la construc- tion, co-président du jury. Les grou- pes de travail franco-chinois ont ainsi D.R. pu travailler pendant une douzaine Wuhan et la lac Liangzi, plan de situation. de jours sur place, alternant visi- tes de terrain, débats et produc- tion, jusqu’au rendu présenté au jury.

tation de la petite île Liangzi au milieu stratégie de développement urbain LES SOLUTIONS PROPOSÉES du lac est particulièrement intense et durable du Grand Wuhan – le terri- ses effets sont très nets sur la qualité toire du Lac Liangzi ». Elle compor- Deux des trois équipes franco-chi- des eaux. De multiples projets tou- tait notamment la réalisation sur pla- noises qui ont travaillé durant cet- ristiques ont éclos sur les rives, et ce d’une session, celle des Ateliers te session ont eu des approches bon nombre d’autres, dont certains de Wuhan, réunissant pendant 10 convergentes et complémentaires, très importants, sont programmés. jours des experts français et chinois. formalisées sur des registres diffé- Ces ateliers de Wuhan ont fait l’objet rents. L’équipe comprenant Clément- L’action financée par la partie françai- d’un travail de préparation conjoint Noël Douady, Sébastien Giorgis, se avec le concours d’une subven- entre Urba 2000 et l’équipe du Pro- Lina Hawi et Daphné Boret a propo- tion FASEP était intitulée « atelier de fesseur Jiang Feng Li, de la faculté sé une philosophie d’approche ainsi

64 qu’une « boîte à outils » à laquelle les autorités pourront se référer en fonction des situations rencontrées. Le projet montre la manière de valo- riser les lacs urbains (ceux où le front urbain est déjà en contact avec l’eau) ; la manière d’organiser la tran- sition entre l’urbanisation qui avan- ce et le lac, notamment en dévelop- pant des éco-activités en lien avec le lac. Il expose le concept d’agricul- ture en ville, à développer dans les nouveaux villages péri-urbains (poli- tique chinoise des « nouvelles cam- pagnes ») ; la manière de séquencer les stations des moyens de trans- port collectif pour maîtriser leurs effets sur l’urbanisation ; le traite- ment paysager des reliefs qui entou- rent le lac ; l’utilisation des bioma-

D.R. tériaux, l’ancrage dans la culture et le patrimoine. Cette équipe a prôné Principe de transition entre Optic Valley et le lac. l’abandon du projet autoroutier affec- tant le lac et la préservation de tout le territoire situé au sud et au sud- est de tout projet d’infrastructure.

L’équipe comprenant Christian Marion, Karim Ben Meriem et Marissa Plouin a présenté un schéma spatial complet, préconisant en particulier : à l’échelle de la métropole, l’allège- ment de la pression qui s’exerce sur le centre en développant les centres secondaires situés dans un rayon de 60 km, et en les reliant par une roca- de ferroviaire intersectant les trains inter-cités ; le bassin versant du lac serait faiblement occupé par de l’ha- bitat rural et des fonctions touristi- ques en certains points, assurant la transition entre les abords immé- diats du lac et les fronts urbains « apaisés » de l’agglomération cen- trale. Le territoire situé au sud béné- ficierait d’une protection renforcée par un statut de « zone écologique

D.R. exclusive » (véhicules thermiques et Un des panneaux présentés au jury. produits chimiques interdits) ; dans

65 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

site, notamment aux thématiques essentielles des transports et du patrimoine, la découverte par les partenaires chinois du mode opé- ratoire des urbanistes français qui privilégient les approches intégrées et la définition de stratégies globa- les avant d’aborder la définition des projets, la découverte par les urba- nistes français des modes opératoi- res des urbanistes chinois, notam- ment à travers les documents de planification consultés, les maquet- tes de projets, les chantiers visités,

URBA 2000 le dialogue engagé entre plus de Faire du Grand Wuhan un lieu d’expérimentation afin de trouver des solutions aux 20 professionnels français et plus problèmes de la croissance urbaine. de 30 professionnels et décideurs chinois et la capitalisation par Urba 2000 d’une expérience multidimen- le couloir sud enchâssé entre le plus grande permissivité à l’urbani- sionnelle intégrant les approches Yang Tsé et le lac Liangzi en amont sation des abords du lac, préconi- techniques, politiques, logistiques. de Wuhan, l’enjeu est de faire des sant un concept de « villes jardins » De fait, Urba 2000 a continué à localités desservies par les gares ceinturant le lac, avec des densités investir en Chine tout au long des de véritables « cités écologiques », très faibles et des règles très strictes années 2011 à 2013, sur d’autres en particulier Shanpo, à l’extrémi- en matière de construction, de plan- projets dont notamment la pro- té sud du lac, qui pourrait accueillir tation, de modes de déplacement et position de développement de la une université de l’environnement, d’assainissement. A l’est et au nord, place aéroportuaire de Wuhan. un centre de recherche, un marché seule une bande de 30 m demeu- spécialisé dans les produits du ter- rerait inconstructible autour du lac. Le rapport de synthèse établi par roir, etc ; au nord-est du lac, sur le Urba 2000, à la suite de ces ateliers canal Changgang, une stratégie fine L’objectif de ce parti d’aménagement comporte un Titre I qui établit les pre- de réhabilitation environnementale est de créer une offre touristique for- mières propositions d’ordre métho- des quartiers accueillant paysans et tement identifiable, celle d’un « jar- dologique en vue de la mise en œuvre pêcheurs, articulée avec une réforme din du lac Liangzi » offrant un cadre d’une stratégie de développement de l’aquaculture, offrirait un modèle et une expérience touristique unique. urbain durable (DUD). Un Titre II qui de développement davantage res- propose quelques orientations en vue pectueux du système hydraulique. LA COOPÉRATION de la planification du territoire du lac FRANCO-CHINOISE Liangzi qui pourrait prendre la forme La troisième équipe, comprenant d’un « parc écologique de nature et Philippe Jonathan, Pascal Laporte, Les travaux réalisés sur le lac Liangzi campagne du lac Liangzi ». A la suite, Pauline Szwed et Olivier Brouwez ont leur importance propre : la pré- l’équipe chinoise de l’Institut de a convergé avec les deux équipes servation de ce très grand lac est Géosciences a réalisé la planification précédentes sur quelques points, indéniablement un enjeu majeur réglementaire de ce territoire. Un titre notamment ceux concernant la pour le développement durable. III qui, à la demande de la partie sanctuarisation des rives sud et Les bénéfices des ateliers organi- chinoise, rend compte de premières sud-est, et le principe d’aménage- sés par Urba 2000 dépassent large- suggestions pour le développement ments exemplaires en matière d’éco- ment la dimension de ce seul projet. d’autres territoires que le lac Liangzi, logie. Cette équipe s’est cependant Cette expérience a permis l’exten- notamment sur la municipalité de démarquée des deux autres par une sion des réflexions bien au-delà du Xiaogan au contact de l’aéroport.

66 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER

ZHOU Xiaohua Directeur général Veolia Environnement Services (Chine)

Vingt ans en Chine avec Veolia Environnement Services

Ingénieur diplômé de l’université Le cinquantenaire de l’établissement des relations Tongji à Shanghai, ZHOU Xiaohua a diplomatiques entre la Chine et la France coïncide commencé sa carrière à l’Institut de avec la vingtième année d’investissements et de Recherche et de Design au ministère de la Construction en Chine, puis a services entrepris par Veolia Environnement Services été chercheur au CNRS en France. (VES) en Chine. Après un doctorat en France, il rejoint le groupe Veolia Environnement en 1994. Il a été successivement, chef de ingt ans de présence en Chine, au fil des ans ses technologies. Il a projet, puis directeur général de Veolia Vont permis à Veolia Environ- réussi à créer une entente exemplai- Environnement Services en Chine. nement Services d’y devenir un re avec les habitants et les établisse- acteur important dans la gestion ments avoisinants et à contribuer à des déchets (valorisation éner- la réalisation du plan de gestion des gétique, stockage, production déchets solides sur l’île de Taiwan, d’électricité, recyclage) et d’y dif- où le groupe Veolia Environnement fuser ses technologies de pointe. exploite aujourd’hui six usines d’in- cinération d’ordures ménagères. Le développement poursuivi par Veolia depuis deux décennies reflè- UN PREMIER PROJET te véritablement les progrès de la ENVIRONNEMENTAL Chine en matière de protection de l’environnement. L’usine d’inciné- La signature d’un accord de recher- ration de déchets ménagers de che sur l’incinération des déchets Macao, la première sur le territoire entre le groupe Veolia et le ministè- chinois, fut conçue, construite et re de la Construction de Chine en mise en œuvre par Veolia Environ- 1994 a marqué le début d’une coo- nement en 1992. Les quinze ans pération substantielle entre Veolia et d’exploitation réussie font d’elle un la Chine. A l’époque, les établisse- modèle et un exemple en Chine. ments chinois chargés de l’exécu- tion du contrat étaient l’Institut de A partir de sa première usine, celle recherche sur la thermo physique de Shulin, installée à Taipei depuis relevant de l’académie des sciences 1992, le groupe ne cesse d’améliorer de Chine, et l’Institut d’études sur la

67 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES VEOLIA ENVIRONNEMENT SERVICES VEOLIA ENVIRONNEMENT SERVICES Centrale de production d’électricité à partir du biogaz.

construction urbaine, avec le sou- lité technologique. La mise en place centres de stockage de déchets tien financier du ministère français de de ce projet à Likeng fut tourmen- (CSD) à Guangzhou, Foshan, Shan- l’environnement. Le premier projet en tée, mais force est de constater que ghai ainsi que dans celui de Juijiang Chine continentale fut celui de l’usi- la technologie de haute efficacité qui vient d’être mis en service. C’est ne d’incinération de Likeng. Veolia a énergétique utilisée par Veolia dans une technique qui permet d’opti- assisté la municipalité de Guangzhou ce projet a pu introduire en Chine un miser considérablement l’utilisation dans la conception, la construction procédé de traitement des déchets du sol. Les normes de construction et la mise en œuvre de cette usine de ménagers très efficace du point de que s’impose Veolia pour la concep- valorisation énergétique des déchets. vue environnemental. C’est grâce aux tion et la construction des CSD ont Depuis l’approbation du projet à efforts déployés par Veolia à l’épo- également contribué à l’évolution Datansha jusqu’à son implantation à que, visant à préconiser et à optimi- des normes chinoises en la matière. Likeng, les autorisations administrati- ser ce concept, qu’est devenu pos- Veolia est également fier d’avoir mis ves et les travaux ont duré dix ans. Il sible la mise en place de la deuxième en place les premiers projets chinois s’agissait d’un des premiers projets usine d’incinération de Guangzhou. de production d’électricité à partir environnementaux de ce type jamais du biogaz issu des sites d’enfouis- construits sur le sol chinois. L’expé- OPTIMISER L’UTILISATION sement, œuvre pionnière en Chine rience manquait en Chine dans ce DES SOLS dans l’utilisation du biogaz pour pro- domaine et le gouvernement français duire de l’électricité. Actuellement, a apporté son soutien pour l’étude La technique d’enfouissement déve- Veolia occupe la première place en de faisabilité du projet et d’adaptabi- loppée, est celle utilisée dans les Chine en termes de capacité installée

68 dans ce domaine. La zone de déve- loppement de Tianjin, une des figu- res de proue de la réforme chinoise, avait eu du mal au début à attirer les 500 premières entreprises mondia- les, dont un grand nombre désireu- ses de s’y implanter, ont finalement choisi d’investir dans d’autres pays, car la zone n’était pas en mesure de satisfaire leurs exigences environne- mentales. Le bureau de l’environ- nement de la ville de Tianjin a alors décidé, il y a douze ans, de coo- pérer avec Veolia. Cette initiative a été fortement encouragée et soute- nue par le ministère de l’environne- ment chinois. Ces efforts conjoints ont donné naissance à une entrepri- se leader dans le domaine du traite- ment des déchets toxiques ou dan- VEOLIA ENVIRONNEMENT SERVICES VEOLIA ENVIRONNEMENT SERVICES gereux en Chine : Tianjin Hejia Veolia Centre de traitement des déchets dangereux à Tianjin. services environnementaux SARL. Dans un pays limité par la pénurie de ressources naturelles comme la Chine, le développement durable UNE NATION OUVERTE une grande nation ouverte, dyna- passe par le recyclage et la valorisa- AU DÉVELOPPEMENT DURABLE mique et résolument engagée sur tion des déchets. Aussi Veolia a-t-il la voie du développement durable. lancé le projet de démantèlement et Les vingt ans de développement qu’a Grâce à ses nombreux projets pion- de recyclage des navires à Guang- connus Veolia en Chine ont fait de ce niers en Chine, le groupe a introduit dong, conformément aux exigences dernier un témoin privilégié de l’évo- des technologies de pointe et des de la convention internationale de lution de la Chine, qui, pays souffrant concepts nouveaux et a formé un Hong Kong pour le recyclage sûr et de retard technique et de lourdeur grand nombre d’instituts, de four- écologiquement rationnel des navires. institutionnelle, est en train de devenir nisseurs d’équipements et de pres- tataires de services. Plus important encore est l’optimisation du systè- me institutionnel favorisée par l’ar- VEOLIA ENVIRONNEMENT SERVICES EN ASIE rivée d’idées propices à la protec- tion de l’environnement. La France, Présent sur le marché asiatique depuis 1992, VES (Veolia Environnement à travers les activités commerciales Services) a actuellement des activités en Chine, à Hong Kong, à Taiwan, de Veolia, a aussi pu mieux connaî- à Singapour et dans plusieurs pays et régions en Asie. Avec plus de 3000 tre les atouts de la Chine et voir le employés, VES possède un certain nombre d’usines d’enfouissement de potentiel de coopération avec cet- déchets, de centrales de production d’électricité à partir de biogaz, d’usines de te dernière. Je suis convaincu que valorisation énergétique des déchets ménagers et de centres de traitement des les meilleures pratiques européen- déchets dangereux. Le siège asiatique de VES situé à Pékin, est non seulement nes pourront s’introduire davantage la plus grande entreprise privée de gestion des déchets en Asie, mais aussi la en Chine tandis que les atouts de la seule entreprise de la région à fournir des solutions complètes sur la gestion des Chine seront de plus en plus nom- déchets. breux à être accueillis en France. Vive l’amitié franco-chinoise !

69 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

LIU Bo General Manager SADE Le développement urbain durable en Chine dope la promotion des expertises de la SADE

LIU Bo, ingénieur diplômé de Les réseaux d’eau potable et d’assainissement l’université de Tongji et de l’Ecole occupent une grande place dans les infrastructures nationale des ponts et chaussées. urbaines : ils sont les réseaux de la vie d’une ville. Entré à la SADE en 2003 pour un stage à la direction internationale, Dans ce domaine, il s’agit de valoriser des solutions il y est embauché par la suite et alternatives qui impactent moins l’environnement, rejoint la Direction Régionale Île-de- notamment pendant la phase des travaux. France. Il arrive à Shanghai, en 2008 pour devenir General Manager, puis Président de la joint-venture de la SADE en Chine. Depuis 2009, il est en charge ans un contexte d’urbanisation et éco-travaux qui se traduit notam- de la gestion et du développement de Dgalopante en Chine, la notion ment par la systématisation du recy- l’ensemble des activités en Chine. de développement durable incite clage des déblais et la promotion des désormais les gestionnaires de la techniques sans tranchée … Cette ville, notamment dans les métropo- démarche communément déployée les, à valoriser des solutions alter- en France, a également constitué sa natives (techniques sans tranchée marque de fabrique en Chine. Son (TST) ou éco-travaux…) qui impac- expertise en la matière lui a permis tent moins l’environnement : écono- d’y poursuivre son développement mie de consommation de matières et de jouer un rôle de leader dans premières, réduction des pollutions la promotion des techniques sans en gaz à effet de serre, en bruit et en tranchée dans les marchés locaux. poussières, minimisation de la gêne occasionnée aux riverains supportant UNE POLITIQUE DE des travaux pourtant nécessaires. DÉVELOPPEMENT DURABLE La situation actuelle de développe- ment urbain en Chine représente L’entreprise a été créée en 1918 une opportunité formidable pour une pour apporter son concours aux entreprise comme la SADE, spécia- services et aux entreprises de dis- lisée dans les techniques sans tran- tribution d’eau. Des succursales et chée et les solutions innovantes. des agences s’ouvrent dès 1919 : Depuis 1990, l’entreprise a mis en Lyon, Arras, Rouen, Nevers. Un place une politique Chantier Propre bureau d’études est également créé

70 URBA 2000

Il faut valoriser la recherche de solutions alternatives pour préserver l’environnement.

qui facilite le montage des dossiers cédé breveté de traitement in-situ En matière de sécurité, il convient complexes : adduction d’eau, tra- des déblais, qui permet de les trans- de noter que le taux de fréquence vaux de canalisations, rabattement former en matériaux de remblais pour l’entreprise est plus de 50 % de nappes aquifères, etc. Peu à peu, auto-compactant. Pour s’adap- inférieur à celui des entreprises de la SADE développe son implanta- ter à toutes les configurations de son secteur d’activité. La sécurité tion territoriale, fonde ou acquiert chantier, l’entreprise décline désor- au travail ne se négocie pas : elle des filiales en France et à l’étranger. mais ce procédé en deux ver- est un impératif de tous les instants. sions : Recyclor et big-recyclor. Depuis plus de vingt ans, la SADE L’EXPÉRIENCE DES conduit ses chantiers, qui sont pour Dans la continuité des procédés de TECHNIQUES SANS TRANCHÉE la plupart en milieu urbain, dans cet traitement immédiat et in situ, elle esprit, sans affecter la qualité des met en œuvre sur ses chantiers le La SADE a réalisé ses premiers interventions. Il s’agit pour tous les recyclage de l’asphalte. Plus la réfec- chantiers en Chine en 1997 avec collaborateurs de viser le zéro acci- tion de sol est rapide, plus vite la voie la pose d’une conduite d’approvi- dent, de maintenir leurs chantiers est rendue à la circulation. L’entre- sionnement en eau brute de 30 km propres et organisés, d’appliquer prise, adepte de la réfection de sol en acier en DN2400, dans le cadre une démarche écoresponsable et de immédiate, s’est dotée de mini-as- du marché de rénovation et d’ex- mettre en œuvre à chaque fois que phalteuses particulièrement efficaces ploitation pour vingt ans d’une c’est possible des techniques inno- en milieu urbain. Ajoutons l’ensemble usine de traitement d’eau pota- vantes qui minimisent les nuisances des techniques de travaux sans tran- ble d’une capacité de 200 000 m3/ auprès des riverains et des passants. chée (forage dirigé, micro-tunnelier, an de la ville de Chengdu, alimen- tunnelier, close-fit lining, extraction tant en eau 1,85 million d’habitants. COUP DE PROJECTEUR de conduite, fonçage tarière, etc.) et SUR QUELQUES TECHNIQUES le panorama sera presque complet. En 2002, sa maison mère, Veolia Water obtient, pour cinquante ans, Le terrassement par aspiration ou En 2010, ARCET notation a certi- le contrat de délégation de service terrassement doux permet d’in- fié le logiciel Carbone 6, une inven- public pour la gestion de l’eau pota- tervenir avec rapidité et en toute tion SADE, qui est désormais l’outil ble de Pudong, le quartier d’affaires sécurité, notamment à proximité de référence pour le calcul des éco- de Shanghai, créé de toutes pièces des réseaux des concessionnaires nomies d’émission de gaz à l’effet dans les années 1990. Les réseaux très denses en milieu urbain. Inno- de serre sur les chantiers en fonc- à Pudong, en majorité en fonte, vation SADE, Recyclor est un pro- tion des choix techniques opérés. rencontrent aujourd’hui une usure

71 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

ont été renouvelés selon le procédé Close Fit Lining : le tubage par un tube PEHD d’une ancienne canalisa- tion, sans espace annulaire. Depuis 2009, 10km de réseaux d’eau pota- ble ont été réhabilités dans plusieurs zones résidentielles de Pudong par la projection de peinture structuran- te. Cette technique permet d’éviter d’ouvrir les tranchées au plein cœur de la zone de résidences et a réso- lu le problème fréquent de qualité d’eau, « l’eau jaune », en renforçant la structure des tuyaux existants.

En réhabilitation en section visita- ble (diamètre supérieur à 700mm), la solution de joint Amex a rendu une nouvelle vie à une conduite en SADE Tubage GRP DN1600 à Kunming. béton de 13km de long de DN1200 à la ville de Kunming, et à une cana- lisation d’eau brute de DN 1800 à importante due à des problèmes de créée en 2005, intervient pour l’ex- Shanghai. En plein cœur de la ville corrosion. L’expansion démogra- ploitation des 9 500 km du réseau de Nanjing, la réhabilitation, par la phique galopante de Shanghai a en d’eau potable de Pudong, tant en technique du tubage PEHD, d’une effet obligé, à l’époque, les autori- termes de travaux de pose neu- conduite fuyarde en DN 600 de 3km tés à déployer très rapidement leurs ve que de renouvellement pour de long a permis à la régie d’eau de réseaux d’adduction, ceci à un fai- l’amélioration des performances du Nanjing de diminuer les fuites sans ble coût de construction et souvent réseau. La SADE est ainsi la premiè- gêne aux riverains. Grâce à la tech- au détriment de la qualité de pose. re et la seule entreprise française nique sans tranchée-tubage GRP, de travaux implantée durablement la circulation d’un axe principal à Quelque trente ans après, l’objec- en Chine, bénéficiant des qualifica- Kunming (Beijing Road) n’a pas été tif de Shanghai est de renforcer la tions nécessaires pour réaliser tous perturbée lorsque 400 m de tuyau qualité de l’eau distribuée, tout en types d’interventions sur réseaux, de DN 1600 ont été déviés dans gagnant en performance sur la dis- avec des personnels formés. le cadre des travaux de construc- tribution. Les besoins ont donc évo- tion d’une nouvelle station de métro. lué vers des compétences nouvel- Cette joint-venture sino-française est les tant en analyses sur la qualité un laboratoire vivant extraordinaire UN PROJET MAJEUR d’eau, mais aussi en diagnostics pour introduire de nouvelles tech- POUR SHANGHAI structurels des réseaux, en plani- nologies et valoriser les expertises fication et optimisation des inter- françaises. Depuis 2005, l’entrepri- Dans le domaine de la pose de ventions, notamment dans le cadre se poursuit son développement en réseaux neufs, la SADE au travers de de programme de renouvellement. Chine en introduisant sur le marché sa joint-venture, a obtenu en 2009 Autant de sujets parfaitement maî- chinois les techniques sans tranchée. un des lots d’un des projets majeurs trisés et pour lesquels, la SADE de la ville de Shanghai, baptisé Qin- possède des techniques dédiées. Plusieurs techniques ont été uti- gcaosha, pour pérenniser son appro- lisées pour les premières réalisa- visionnement et améliorer la qualité Le canalisateur français, au travers tions en Chine. A Shanghai, 3 km de de l’eau distribuée. Ce projet vise d’une joint-venture sino-française canalisation d’eau potable de DN300 à capter l’eau brute à partir du del-

72 ta du fleuve Yang Tsé et l’achemi- ner par deux conduites en DN 3600 posées sur 6 km jusqu’à une nouvel- le usine de désalinisation/traitement située dans la zone de l’aéroport international, à l’est de Shanghai.

Posé à une profondeur compri- se entre 10 et 15 m, ce réseau est constitué de tubes aciers foncés au tunnelier avec des tirs allant de 150 à 520 m. Sur la section tota- le, six puits d’accès auront été exé- cutés : des ouvrages de 17 m de profondeur et de 24 m de diamè- tre. Les autorités ayant estimé que la consommation en eau dans 10 ans s’élèvera à 2 millions m3/jour, ce projet majeur permettra de répon- dre à 70 % des besoins en eau de la ville de Shanghai d’ici à 10 ans. SADE Tunnelier DN 3600 à Shanghai.

Parallèlement à ces techniques de pose et de réhabilitation, la SADE apporte en Chine son savoir-fai- ter de prendre compte, dans leurs nisation, qui associe la construc- re de gestionnaire de réseaux. Plu- choix, l’intense densité urbaine. Ce tion et l’entretien des infrastructu- sieurs de ses solutions sont déjà constat est encore plus évident dans res souterraines. Récemment, le mises en œuvre sur le réseau d’eau les mégalopoles que sont Beijing ou Premier ministre Li Keqiang a souli- potable local : l’Aquadiag, une uni- Shanghai. Ces réflexions, alliées aux gné qu’il faut renforcer « l’investisse- té mobile de diagnostic de la qua- exigences de développement dura- ment dans les réseaux souterrains » lité de l’eau potable, à fort et bas ble, poussent favorablement les et l’innovation technologique a une débit (turbidité, taux d’usure des techniques sans tranchée qui appor- grande importance dans le cadre tuyaux…), les contrôles de réseaux tent des réponses adaptées en ter- de la restructuration industrielle. par caméras en charge (sans arrêt mes de durée maîtrisée des travaux, d’eau), les détections de fuites. de faible impact sur la circulation, de Pour les gestionnaires des infrastruc- réduction des gênes pour les rési- tures, les techniques sans tranchée Entre 2007 et 2009 pour l’expo- dents et les commerces, de réduc- s’adaptent parfaitement au dévelop- sition universelle de Shanghai et tion des poussières et des nuisances pement urbain rapide en Chine. La ses 74 millions de visiteurs, l’en- sonores, de sécurité, de diminution SADE, depuis sa première implanta- treprise a réalisé le réseau d’eau des risques de dommages à d’autres tion, ne cesse d’introduire et promou- potable du site : 35 km de réseau réseaux concessionnaires, de durée voir ses expertises dans le domaine d’adduction dans des diamètres de vie des ouvrages réhabilités et de de travaux sans tranchée et des tech- compris entre 300 et 1 600 mm. sécurité de l’exploitation des réseaux. nologies vertes (le terrassement par Précisons que sur ce linéaire total, aspiration, traitement des déblais in 6 km ont été posés directement LE DUD DOPE LES situ, tout en s’adaptant au marché dans des galeries techniques. TECHNIQUES SANS TRANCHÉE local. Sa démarche s’inscrit aujourd’hui pleinement dans la politique du gou- Aujourd’hui en Chine, les don- La Chine avance activement dans vernement chinois en matière de neurs d’ordre ne peuvent plus évi- une nouvelle stratégie de l’urba- développement durable.

73 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER Emmanuel Normant Directeur de l’activité isolation, Saint-Gobain Javier Gimeno Délégué général Asie-Pacifique, Saint-Gobain Pascal Eveillard Directeur de la construction durable et des affaires publiques, Saint-Gobain L’efficacité énergétique en Chine

La Chine, deuxième puissance économique mondiale, est le deuxième pays producteur et consommateur d’énergie.

’actuel gouvernement chinois, santes pour accompagner la crois- Lpoussé par les idées de « déve- sance du pays. Les ressources loppement scientifique » et de énergétiques de la Chine sont en « civilisation verte », ainsi que par outre géographiquement très inéga- une société progressivement plus lement réparties : les coûts de trans- consciente des enjeux environne- port entre les lieux de production et mentaux, s’est dit prêt à intensifier de consommation sont gigantes- les efforts pour accélérer la transi- ques. Enfin, les ressources existan- tion vers une industrie moderne, plus tes présentent des coûts d’exploi- économe en énergie. La situation de tation loin d’être compétitifs, et ceci départ étant caractérisée par des en raison d’une géologie complexe déséquilibres notables, le chemin à où les gisements profonds et d’ac- parcourir pour atteindre l’objectif sera cès difficile sont la règle générale. Emmanuel Normant, ingénieur en long et exigeant. Mais l’exemple des chef du corps des Mines, directeur de actions déjà entreprises dans le sec- Sans une stratégie claire et déter- l’activité isolation, pôle produits pour la teur du bâtiment est encourageant. minée, ces déséquilibres vont s’in- construction, Saint-Gobain tensifier notamment à cause du LES DÉSÉQUILIBRES DU mouvement migratoire vers les vil- Javier Gimeno licencié en droit, MBA, DISPOSITIF ÉNERGÉTIQUE les : l’urbanisation est en effet cen- Instituto de Empresa, délégué général sée constituer le principal moteur en Asie-Pacifique. Directeur général Ce dispositif est largement dominé de croissance pour l’économie pen- Produits pour la Construction Asie- par le charbon dont la Chine détient dant les quinze prochaines années. Pacifique, Saint-Gobain une part importante (13%) des réser- Le taux d’urbanisation croîtrait de Pascal Eveillard, diplômé de l’ESCP- ves prouvées et exploitables dans le 50% actuellement à plus de 70% Europe, directeur de la construction monde. En revanche, les réserves vers 2030, quelque dix-huit millions durable et des affaires publiques pour de pétrole et de gaz naturel conven- d’habitants passant chaque année l’activité isolation, Saint-Gobain. tionnels sont manifestement insuffi- de la campagne vers les villes. La

74 URBA 2000

L’urbanisation est censée constituer le principal moteur de croissance pour l’économie pendant les quinze prochaines années.

consommation moyenne d’éner- la conversion des énergies fossiles, énergétique pour les bâtiments en gie par habitant est 3,5 fois supé- la biomasse et les énergies renou- Chine » publié en 2012 par le Glo- rieure en ville qu’à la campagne. velables en gaz hydrogène et des bal Building Performance Network. solutions plus efficaces en termes de Le gouvernement chinois s’est enga- L’efficacité énergétique devient donc stockage et de distribution d’énergie. gé activement dans l’élaboration et une priorité en Chine. Le gouverne- Les industries énergivores (acier, ver- le déploiement d’instruments politi- ment et les acteurs économiques re, etc.) deviennent rigoureusement ques pour améliorer l’efficacité éner- et sociaux se mobilisent pour met- encadrées ; leurs capacités de pro- gétique des bâtiments résidentiels et tre en place un système de produc- duction obsolètes en termes éner- publics neufs. Un système relative- tion et d’approvisionnement stable, gétique et environnemental vont ment complet d’exigences énergéti- économique, propre et sécurisé. être fortement réduites ; l’applica- ques a été mis en place ; grâce aux tion de règlementations et standards contrôles, la conformité avec ces exi- VERS UN NOUVEAU plus exigeants va être contrôlée. gences est obligatoire pour l’accep- DISPOSITIF L’accélération du développement tation finale d’un projet de construc- de villes nouvelles à faibles émis- tion. Selon les données nationales, Des alternatives au charbon sont sions de carbone constitue un axe le taux de conformité avec les exi- promues, en premier lieu l’électricité majeur pour l’administration cen- gences réglementaires s’est consi- hydraulique et nucléaire et les éner- trale et les gouvernements provin- dérablement amélioré au cours des gies renouvelables (solaire et éolien), ciaux. Un projet pilote avec cinq cinq dernières années. Depuis 2006, mais également les gaz de schiste provinces1 et huit municipalités2 il existe deux labels pour l’efficacité dont le pays possède les plus vastes a ainsi démarré avec des objec- énergétique des bâtiments neufs : réserves mondiales ; leur exploitation tifs ambitieux d’éco-quartiers. le premier s’appuie sur des valeurs reste toutefois confrontée à des pro- théoriques calculées dans la phase blèmes structurels sérieux : pénurie L’EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE de conception ; le second s’appuie d’eau, déficit en technologies d’ex- DANS LE SECTEUR DU BÂTIMENT traction, forte densité de population dans les provinces où se trouvent les Depuis le début des années 1980, 1 Guangdong, Liaoning, Hubei, Shaanxi et réserves. Le Plan National pour le la Chine a fait activement la promo- Yunnan Développement des Sciences et des tion de l’efficacité énergétique du 2 ianjin, Chongqing, Shenzhen, Xiamen, Hangzhou, Nanchang, Guiyang et Baoding Technologies prévoit un effort de R&D bâtiment en déployant un éventail 3 Publié en juillet 2012 par GBPN. Copyright considérable dans le domaine éner- de politiques, de règlementations 2012: American Council for an Energy- Efficient Economy (ACEEE) et Global Buildings gétique. Les programmes vont se et de projets ainsi que l’a montré Performance Network (GBPN). ISBN: 979-10- concentrer sur la pile à combustible, le rapport3 « Politiques d’efficacité 91655-01-9

75 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES URBA 2000 La rénovation des logements a joué un rôle très important dans l’amélioration de l’efficacité énergétique.

sur des valeurs réelles de l’efficacité Son objectif est de réduire la quan- ments dans les régions septentrio- énergétique des bâtiments évalués tité d’énergie gaspillée par les utilisa- nales4 a non seulement joué un rôle en phase d’exploitation. Depuis teurs finaux à travers la réforme du très important dans l’amélioration de 2009, le ministère du logement et système de tarification du chauffa- l’efficacité énergétique, mais a éga- du développement urbain et rural ge, la mise en place de mécanismes lement été un moyen important pour (MOHURD) a favorisé la labellisa- de marché, et l’encouragement des améliorer la qualité de vie de popu- tion des bureaux gouvernementaux fournisseurs à améliorer l’efficacité lations urbaines aux faibles revenus et des édifices publics de grande de leurs réseaux de distribution de vivant dans cette partie du pays. taille à travers des projets pilotes. chaleur. Pour l’amélioration de l’ef- De 2006 à 2010, la Chine a rénové ficacité énergétique des bâtiments 182 millions de m² de logements dans PROMOUVOIR LA RÉFORME publics, le gouvernement chinois a ces régions, dont 86 millions pour la DU CHAUFFAGE sélectionné les édifices gouverne- seule année 2010. En 2015, l’ob- mentaux de bureaux, les bâtiments jectif est d’y rénover 400 millions de Depuis les années 1990, le gouver- publics de grande taille et les univer- m² de logements et de continuer à y nement chinois a lancé une série de sités. A la fin de 2010, un large éven- promouvoir la réforme du chauffage. politiques et offert divers types de tail de politiques et de projets a été soutiens financiers pour promou- mis en œuvre sur ces bâtiments, en voir la rénovation thermique des particulier la collecte de données sur

bâtiments existants. La réforme du leurs consommations d’énergie, des 4 Les bâtiments dans les régions chauffage est un élément particuliè- audits et l’affichage des consom- septentrionales représentent plus de 40% de rement important de cette politique. mations. La rénovation des loge- la consommation nationale d’énergie par les bâtiments des zones urbaines

76 LES SPÉCIFICITÉS DES ZONES RURALES QUELQUES CHIFFRES CLÉS

Les bâtiments dans les zones rura- l En 2010, la superficie totale des bâtiments existants en Chine était d’environ les de la Chine représentent envi- 48,6 milliards de m², dont 38,7% situés dans des zones urbaines. ron 60% de la superficie totale des l La Chine construit annuellement environ 1,7 milliard de m² de surface bâtiments. Les moindres niveaux de nouvelle. Entre 2010 et 2020, la Chine va construire 10 à 15 milliards de m² vie et de développement économi- de bâtiments résidentiels dans les zones urbaines, et 10 milliards de m² de que par rapport aux zones urbaines bâtiments publics. expliquent que les consommations l Les bâtiments représentent près d’un cinquième de la consommation totale d’énergie des bâtiments ruraux ont d’énergie primaire de la Chine et de ses émissions de carbone. toujours été beaucoup plus basses l En 2008, la consommation d’énergie primaire des bâtiments en Chine était de que celles des zones urbaines. Les près de 380 millions de tonnes équivalent pétrole (hors biomasse), soit 1,5 fois logements dans les zones rurales en plus qu’en 1996.

Chine sont généralement construits l Les émissions de carbone associées à la consommation d’énergie par les par les agriculteurs eux-mêmes et bâtiments ont atteint 1,260 millions de tonnes en 2008. sont exemptés des systèmes de surveillance et de réglementation des gouvernements centraux et locaux. La performance énergétique des buée à des stratégies de dévelop- poids bien plus significatif. Le nou- bâtiments dans les zones rurales est pement soigneusement planifiées, et veau gouvernement semble avoir la généralement médiocre. Un nombre au soutien fort et constant du gou- ferme volonté d’aller dans une nou- croissant de ménages ruraux utili- vernement central. Les autorités velle direction, et, poussé par une opi- sent les combustibles fossiles dis- chinoises et les experts sont néan- nion publique plus exigeante, devrait ponibles sur le marché tandis que la moins clairement conscients des encourager un modèle de croissan- proportion de la biomasse dans la défis qui restent encore à résoudre, te verte, où la qualité l’emporterait consommation totale d’énergie en notamment la hausse continue de la sur la quantité, et où les contraintes milieu rural ne cesse de diminuer. consommation d’énergie, la néces- environnementales constitueraient En outre, l’utilisation inefficace de la sité d’un processus institutionnalisé un élément clé en termes de choix biomasse gaspille de grandes quan- pour la mise à jour des réglementa- par rapport aux secteurs à privilégier. tités d’énergie et génère une pollu- tions énergétiques, le financement tion environnementale importante. de la rénovation, la lenteur des pro- Le succès des politiques d’efficacité L’amélioration de la performan- grès dans la réforme du chauffage, la énergétique en Chine sera essentiel ce énergétique des bâtiments et formation des acteurs concernés par non seulement pour la sécurité éner- la promotion d’appareils ména- l’efficacité énergétique dans le bâti- gétique et le développement durable gers énergétiquement performants ment, et l’énorme tâche de promou- de la Chine elle-même, mais bel et constituent deux moyens effica- voir l’efficacité énergétique dans les bien du monde entier. Dans ce ces de réduire la consommation zones rurales. Les politiques d’effi- contexte, le groupe Saint-Gobain est d’énergie tout en améliorant les cacité énergétique en Chine ont été déterminé à contribuer à l’objectif milieux de vie des ménages dans développées dans un contexte poli- collectif et à jouer un rôle significatif les zones rurales à travers la Chine. tique, économique et culturel unique. avec son capital de technologie, La Chine va maintenant devoir réus- d’expertise et de savoir-faire. BILAN ET PERSPECTIVES sir à passer d’une situation où le gou- vernement central contrôle étroite- La Chine a réalisé des progrès signi- ment l’utilisation d’énergie et dirige la D’après Politiques d’efficacité énergétique pour ficatifs dans l’amélioration de l’effi- politique énergétique d’une main de les bâtiments en Chine publié en 2012 par le cacité énergétique des bâtiments au fer vers un marché bien plus ouvert Global Building Performance Network. Copyright cours des deux dernières décennies, et libéralisé où les entreprises inter- 2012 : American Council for an Energy- Efficient Economy (ACEEE) et Global Buildings dont une grande partie peut être attri nationales auront probablement un Performance Network (GBPN).

77 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER Daniel Marson Dassault Systèmes Caroline Maurand Directrice d’Urba 2000 3DEXPERIENCity, la modélisation du fonctionnement urbain au service du développement durable des villes

Après avoir accompagné les acteurs industriels des secteurs automobiles et aéronautiques, dans la conception, la gestion et la maintenance de leurs produits, Dassault Systèmes souhaite être aux côtés des acteurs de la ville dans les grandes mutations économiques, environnementales et sociales. Daniel Marson, doctorant de l’université Paris VI dans le domaine « Simulation & HPC» est entré chez a Chine est confrontée à une rés), l’entreprise a introduit l’utilisa- Dassault Aviation en 1979. De 1992 à urbanisation rapide et massive tion de la 3D virtuelle des maquet- 2012, au sein de Dassault Data Services L et les villes chinoises seront les vil- tes numériques, en remplacement il dirige les centres de compétences les du XXIème siècle, des smart cities des maquettes physiques, sur la sur la simulation, l’ingénierie système, dans lesquelles les acteurs publics et globalité des processus de l’en- le soutien logistique puis les secteurs privés pourront construire les inno- treprise, ainsi que le concept de industriels Energie et Aéronautique. En vations de demain et les mettre en plateforme collaborative permet- 2006, il devient Directeur Innovation. œuvre. Ce développement s’accom- tant aux différents métiers de tra- Depuis 2013, Daniel Marson est pagnera de l’émergence de plate- vailler ensemble sur les produits. directeur chez Dassault Systèmes formes et d’outils permettant une chargé du Business Developpement de meilleure gestion globale, urbaine et L’EXPÉRIENCE DE LA VILLE la Plateforme 3DEXPERIENCity. territoriale et une meilleure compré- INTELLIGENTE Caroline Maurand, est ingénieur hension des impacts des dévelop- diplômée de l’Ecole nationale des pements urbains sur notre vie quo- Depuis 2006, nous accompagnons travaux publics de l’Etat (ENTPE), et tidienne et notre environnement. nos clients dans l’utilisation d’une économiste diplômée de l’université Dassault Systèmes, acteur historique nouvelle plateforme « V6 On Line de Paris 1 Panthéon - Sorbonne. Elle a dans le développement des maquet- 3DEXPERIENCE » permettant d’in- travaillé au Centre d’études techniques tes numériques et de la digitalisation, tégrer les futurs usagers dans le pro- (CETE) Normandie, sur les questions propose des plateformes et des outils cessus d’innovation et de création de planification urbaine et de transport. pour accompagner ce mouvement. de produits. C’est en utilisant la 3D En 2009, elle a rejoint Urba 2000 pour Leader mondial dans le domaine d’une manière collaborative, acces- développer les projets de coopération de la digitalisation 3D des produits sible et comprise de tous comme un avec la Chine et en assure aujourd’hui manufacturés et le PLM (gestion du langage universel, que les utilisateurs, la direction. cycle de vie de produits manufactu- leurs partenaires et leurs propres

78 DASSAULT SYSTÈMES DASSAULT

Visualisation 3D de Rennes à travers 3DEXPERIENCity.

clients créent les meilleures innova- ensuite la visualiser, l’analyser, la que du territoire concerné, recons- tions. Dassault Systèmes est ainsi de comprendre et en prévoir l’évolu- truit virtuellement, simulé en termes plus en plus proche des consomma- tion. Elle s’inscrit dans la droite ligne de comportement et enrichi des teurs et des citoyens. Depuis 2009, il de Dassault Systèmes qui consiste données de tous les intervenants. a lancé son laboratoire d’innovation, à harmoniser « le produit, la nature Les aspects sociaux et environ- 3DEXPERIENCity Lab pour adapter & la vie ». Notre approche est donc nementaux sont pris en compte la plateforme aux enjeux urbains. Elle holistique et fédératrice pour tous les pour faciliter l’aide à la décision et regroupe tout le savoir-faire de l’en- acteurs. Tout d’abord, c’est un outil la concertation grâce à la dimen- treprise dans l’utilisation d’environne- de communication par la visualisa- sion collaborative de la plateforme. ments de simulation réaliste destinés tion 3D : la 3D devient l’environne- à l’ensemble des acteurs de la ville ; ment de communication pour tous. FACILITER LE TRAVAIL le citoyen, la ville durable et sa gou- Elle est comprise par l’ensemble des COLLABORATIF vernance durable sont au centre des acteurs et favorise le dialogue, per- services proposés par l’entreprise. met à chacun d’exprimer son point Plateforme ouverte pour accueillir Cette stratégie a été récemment ren- de vue tout en le rendant compré- de nouveaux usages sur de nou- forcée par l’acquisition d’une société hensible par tous via ce langage veaux médias que ce soit pour française, Archivideo, très expérimen- naturel qu’est la 3D. C’est égale- les acteurs de la ville ou pour les tée dans la reconstitution automati- ment un outil d’analyse grâce à la citoyens, elle est orientée « gouver- que et la visualisation des territoires représentation multi-échelle 3D : les nance et citoyen », c’est son objec- en 3D. En associant leurs savoir-faire, acteurs disposent de points d’obser- tif. Elle intègre les offreurs de ser- la plateforme 3DEXPERIENCE avec vation particuliers ou globaux, don- vices à la ville. Nous proposons un les villes en 3D propose ainsi une nant une vision à des échelles dif- socle informatique, une infrastructure plateforme pour l’Expérience de la férentes et permettant de prendre numérique, permettant aux offreurs Ville Intelligente dont le potentiel est en compte les modifications de tou- de services comme aux gouvernants aujourd’hui unique sur le marché. tes sortes des ensembles urbains, et aux citoyens, de greffer des appli- qu’elles soient sociétales, environ- cations de toutes sortes. A savoir, la UNE APPROCHE HOLISTIQUE nementales ou d’infrastructures. visualisation 3D, mais aussi un réfé- C’est ensuite un outil d’aide à la rentiel numérique des bassins de vie. La plateforme 3DEXPERIENCity décision, de revue, de concerta- Pour cela, Dassault Systèmes met à prend comme principe de départ tion : d’une manière similaire à ce disposition la structure d’accueil infor- que la ville est un système complexe qui se pratique dans l’industrie, matique (kit de développement, réfé- dont il convient de prendre en comp- les décisions se prennent à par- rentiel de données, de kit visualisa- te tous les paramètres pour pouvoir tir d’une représentation numéri- tion 3D) permettant aux offreurs de

79 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

sing, Urban and Rural Developement (MoHURD) et le Ministryof Science and Technologie (MoST) ont lancé des projets pilotes dans une vingtai- ne de villes chinoises, dont les princi- pales sont Nanjing, Wuxi, Yangzhou, Taiyuan, Yangquan, Harbin, Daqing, Hefei, Qingdao, Jinan, Wuhan, Xian- gyang, Shenzhen, Huizhou, Chengdu, Xi’an, Yan’an, Yangling and Karamay. Les réflexions à conduire dans ces projets pilotes smart cities compren-

DASSAULT SYSTÈMES DASSAULT nent quatre volets : la planification et Simulation de pollution de l’air. la construction durable, les réseaux d’énergie et leur optimisation, les sys- tèmes de transports et de mobilités service d’y accrocher leurs applica- les collectivités ou les régions et les et les télécommunications. Les villes tions. Une telle plateforme, à laquelle offreurs de services à la ville ou aux pilotes disposent de financements nous associons les meilleures appli- citoyens. Nous fournissons un systè- issus de ministères pour expérimen- cations de nos partenaires, appor- me structuré qui a vocation à devenir ter des processus, méthodologies te une valeur ajoutée et une puis- le référentiel numérique et pérenne de et outils et doivent s’appuyer sur les sance capacitaire importante sans la ville sur lequel se greffent les appli- savoir-faire nationaux et internatio- équivalent aujourd’hui sur le marché. cations de services. Il se transforme naux pour répondre aux objectifs. Enfin, c’est une plateforme agrégati- au fur et à mesure que les données ve, fédératrice de données, à jour, en évoluent. Ainsi, conserver l’histori- Au travers de son expérience et des cohérence avec les SIG et les don- que des informations et en exploiter outils et plateformes développés, nées publiques et privées accessi- la connaissance, fait aussi partie des Dassault Systèmes contribue à la bles : 3DEXPERIENCity permet de fonctionnalités de notre plateforme. gestion urbaine et territoriale avec visualiser toutes les données géo-lo- une capacité de simuler et représen- calisées. La base de la représenta- LA PLATEFORME ter divers scenarii multi-domaines et tion 3D est tirée des données géogra- AU SERVICE DU ainsi d’anticiper l’impact des choix phiques du terrain. Nous y associons DÉVELOPPEMENT DURABLE sur les infrastructures urbaines et ter- toutes les données géo-localisables ritoriales. La transition vers un nou- disponibles et pertinentes issues de Pour résumer, les atouts de la plate- veau modèle de société à construire, SIG publics ou privés. La grande force forme 3DEXPERIENCity sont consti- en France et en Chine, mobilise l’en- de la 3DEXEPRIENCity est de mettre tués par sa capacité à fédérer tous semble des acteurs et contributeurs en contexte ces données et de les affi- les contenus propres à la concep- de domaines multiples et de diffé- cher ensemble, alors qu’elles concer- tion et au fonctionnement de la ville, rents niveaux. La plateforme 3DEX- nent des métiers ou des acteurs dif- à les visualiser, à les croiser et à facili- PERIENCity permet une gestion férents. Elle permet leur partage en ter le travail collaboratif entre tous les holistique et systémique de la ville et y ajoutant la variété des points de acteurs. Pour répondre aux enjeux de des bassins de vie ainsi que de l’en- vue à confronter. D’autre part, la for- développement urbain (accueil de dix semble des paramètres qui les com- ce de cette approche est de dispo- millions de nouveaux urbains dans les posent pour accompagner les inno- ser des données en permanence à villes tous les ans jusqu’en 2020) et vations dans toutes les thématiques jour en provenance des SIG au fur et aux objectifs de réduction des émis- de la ville durable : énergie, sécurité, à mesure qu’eux mêmes évoluent. sions de gaz à effet de serre et de santé, bien-être, loisirs, mobilité, Nous construisons progressivement consommation d’énergie fossile, la urbanisation, patrimoine et habitat, un référentiel numérique des données Chine engagera de nombreux projets éducation et gouvernance et attrac- de la ville pour les citoyens, les villes, de smartscities. Le Ministry of Hou- tivité du territoire.

80 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER

Armel de la Bourdonnaye Directeur Ecole nationale des ponts et chaussées Un pont entre la France et la Chine

Armel de La Bourdonnaye, (X 83, Le développement à l’international est un des axes ENPC 88) ingénieur général, diplômé essentiels de la stratégie de développement de l’école de l’université Pierre et Marie Curie, docteur en mathématiques appliquées des Ponts ParisTech. Dans l’histoire de l’école, les et titulaire de l’Habilitation à diriger relations avec la Chine revêtent une importance les recherches, a débuté sa carrière particulière, qui est amenée à se renforcer davantage. en 1989 comme chercheur (ONERA puis INRIA). En 1999, il est adjoint au chef du service technique de l’énergie électrique et des grands barrages au n raison de l’influence toujours sonnel d’encadrement des entre- sein du Ministère de l’Energie puis Ecroissante de la Chine tant sur prises implantées en Chine aux conseiller au Ministère des Transports, le plan économique que scientifique, sciences de l’ingénieur et au mana- de l’Équipement et du Logement. l’école des Ponts ParisTech a souhai- gement pour répondre aux besoins En 2004, il devient directeur de la té, dès les années 1990, se rappro- de développement économique recherche de l’ENPC. En 2008, il rejoint cher de grandes universités chinoises et social du pays au XXIe siècle. la direction générale pour la recherche de façon à faire rayonner l’excellen- et l’innovation comme chef du ce de la formation d’ingénieur à la L’ÉVOLUTION D’UN département de la coordination et des française et à accompagner l’es- ÉCHANGE FRUCTUEUX politiques transversales, au Ministère sor économique de nos deux pays. de l’Enseignement supérieur et de la La décision stratégique concréti- Recherche. En 1995, sur les recommandations sant ce projet a impliqué les pou- de l’ambassade de Chine, l’école voirs publics, des entreprises et des s’est rapprochée de l’université Ton- institutions académiques de nos gji, renommée dans les domaines deux pays comme l’université Tongji, du génie civil, de l’urbanisme, de l’école des Ponts et ParisTech. Un l’environnement et des transports. établissement de formation scienti- Début 1996, la venue à l’école de fique, technique et professionnelle la présidente de l’université Tongji, de droit chinois à but non lucratif, Madame Wu Qidi a permis de faire financièrement autonome a été créé. émerger le projet de création d’un Les relations de l’école des Ponts institut franco-chinois d’Ingénierie et ParisTech en Chine s’appuient donc de management (IFCIM). Cet insti- sur un partenariat solide avec l’uni- tut aurait vocation à former le per- versité Tongji, se révélant aujourd’hui

81 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES UNIVERSITÉ DE TONGJI Cérémonie de remise des diplômes du programme SIMBA, Université de Shanghaï, le 19 octobre 2013.

particulièrement judicieux compte a été particulièrement dynamique. création, chaque année (en moyen- tenu de l’importance des enjeux du En 1997, sur proposition de Jac- ne) une soixantaine d’étudiants développement durable en Chine et ques Lagardère, alors directeur de bénéficiant d’environ dix ans d’ex- de l’excellence dans ce champ de l’école, la collaboration avec Tongji périence professionnelle. 90% de notre partenaire classé parmi les dix a été élargie à toutes les écoles de ces étudiants travaillent dans des premières universités chinoises dans ParisTech. Les accords portant sur la entreprises étrangères ou des joint le domaine des sciences de l’ingé- création de l’IFCIM ont été signés en venture sino-étrangères importantes nieur (classement de WU Shulian). novembre 1998 entre l’école, Paris- (50% de celles-ci sont classées par Le développement du partenariat Tech et l’université. L’IFCIM a déve- le magazine américain Fortune dans avec Tongji a bénéficié de conditions loppé ensuite très vite ses program- les 500 entreprises les plus impor- favorables dans les années 1990, mes de formation : lancement en tantes). SIMBA a été le premier MBA mais aussi de relations préexistan- 2000 de SIMBA (Shanghai Interna- accrédité en Chine par l’AMBA. tes entre enseignants et chercheurs tional MBA) délivré en Chine par le des deux établissements. Nian-Xian MBA des Ponts avec 45 étudiants Dans le dernier classement annuel Zhou, l’un des professeurs de l’uni- et lancement en 2001 du premier du Financial Times (publié le 21 octo- versité Tongji, avait étudié à l’école programme franco-chinois de forma- bre dernier), notre programme (qui des Ponts ParisTech avant la Secon- tion en transport sanctionné par un a été toujours classé parmi les 100 de Guerre Mondiale. Yu-Jun Cui, master commun « Systèmes intelli- meilleurs MBA au monde) est en pro- de formation ingénieur diplômé de gents de transports ». ParisTech a gression : 74ème sur 99 en prenant la l’université Tongji, était docteur et lancé, par ailleurs, en 2000 le pro- moyenne des trois dernières années. chargé de recherche au CERMES, gramme « 50 ingénieurs » : ses éco- Il occupe également la 10ème place l’un de nos laboratoires. Enfin, le les recrutent des étudiants sélec- mondiale sur le critère « progression vice-président du MBA des Ponts, tionnés dans les neuf meilleures du salaire post MBA » et est premier Edmond Lisle avait une très bonne universités chinoises pour y suivre la au monde pour l’importance de la connaissance de la culture chinoise. formation d’ingénieur au niveau du place des femmes dans son recrute- cycle master et obtenir leur diplôme. ment. Ce MBA a permis de construi- DE NOMBREUX Aujourd’hui, la coopération avec re un réseau d’anciens offrant des PROGRAMMES DE FORMATION l’université Tongji dans le cadre de opportunités importantes de déve- l’IFCIM constitue toujours le cœur de loppement pour ses membres et La mise en place de la coopération nos relations avec la Chine. Le pro- les entreprises où ils travaillent. avec Tongji dans le cadre de l’IFCIM gramme SIMBA accueille, depuis sa Le programme de double mas-

82 ter dans le domaine des trans- dre à un environnement de plus en Chine et en France, dans les domai- ports aboutit à la délivrance de plus concurrentiel et aux deman- nes du génie civil, de l’environne- notre master « Transport et Déve- des des partenaires économiques. ment, des transports, de l’aména- loppement Durable » et du master Aujourd’hui, SIMBA fait face à la gement conduit à faire encore plus de Transport de l’université Tongji. concurrence de nouveaux program- de l’IFCIM un point d’appui privilégié mes, aussi, travaillons-nous avec au développement de la coopération Le programme de double diplôme Tongji à un élargissement du parte- universitaire et scientifique entre nos en formation d’ingénieur a été signé nariat qui permettrait de conforter la pays. Il pourrait alors mieux répon- le 14 novembre 2008 avec l’uni- visibilité internationale du program- dre au défi posé par le développe- versité Tongji. Il s’agissait du pre- me et de renforcer son marketing et ment durable des villes chinoises. mier accord de double diplôme de son attractivité. Le développement ce type. Ce programme s’adresse des accords de double diplôme avec INTERNATIONALISER aux meilleurs étudiants des écoles l’école des Ponts et d’autres écoles L’ÉCOLE concernées de l’université Tongji de ParisTech, comme celui du nom- (parmi les 5% meilleurs de leur pro- bre d’étudiants chinois ayant déci- Le développement d’une coopé- motion). Il a concerné dans un pre- dé de s’engager dans ce nouveau ration sino-française sur ce champ mier temps l’école de génie civil, puis cursus, démontre son attractivité. constitue d’ailleurs une des priori- a été élargi en 2010 au domaine de Il faut toutefois travailler avec notre tés du programme VIVAPOLIS lancé l’environnement et enfin cette année partenaire chinois pour promouvoir par le gouvernement français. Cette au domaine des transports. Avec aussi les opportunités de mobilité en coopération avec la Chine intéres- cet accord nous devons accueillir Chine offertes aux étudiants français se plusieurs laboratoires de recher- chaque année une dizaine d’étu- et développer les partenariats avec che, notamment dans le cadre de diants chinois qui seront ainsi la troi- les entreprises implantées dans ce l’université Paris-Est Marne-la-Val- sième nationalité la plus représen- pays, pour celles étant potentielle- lée dont l’école des Ponts est mem- tée. De son côté, l’université Tongji ment intéressées par des étudiants bre, et des partenaires industriels, accueille chaque année cinq de nos avec une expérience biculturelle. comme ceux qui sont réunis dans étudiants pour des stages scientifi- le pôle de compétitivité Advancity. ques dans ses laboratoires et des La qualité de la formation d’ingé- échanges au niveau de la recherche. nieur « à la française » est recon- Les relations de l’école des Ponts nue par notre partenaire chinois. Il avec la Chine incluent également UNE COOPÉRATION souhaite d’ailleurs développer dans l’ouverture de nouveaux liens avec DYNAMIQUE le cadre de l’IFCIM un programme d’autres partenaires académiques de test de formation conjointe d’ingé- premier plan en Chine. Le lancement L’IFCIM apporte son soutien à la nieurs d’excellence en s’appuyant cette année à l’université de Tsinghua mobilité étudiante au niveau de la à la fois sur le fonctionnement des d’un executive MBA dans le sec- formation en langues, des procédu- accords de double diplôme et teur de l’aéronautique avec l’ENAC res administratives et des bourses de des classes préparatoires dans le et le soutien d’Airbus en témoigne. mobilité. L’Institut a donc été depuis cadre des écoles d’ingénieurs à 15 ans le support efficace de notre la française implantées en Chine. L’internationalisation de l’école, axe coopération avec la Chine. L’évolu- Des formations continues spécia- majeur de son développement, a pris tion très rapide de ce pays, tant au lisées répondant aux besoins de un essor important grâce à nos rela- niveau universitaire et scientifique développement de la Chine pour- tions privilégiées avec la Chine, qu’économique, ainsi que de celle de raient également être mises en notamment au travers de notre par- la coopération universitaire sino-fran- place : cela pourrait notamment tenariat avec l’université Tongji. çaise, doit conduire ses partenaires concerner le champ du développe- Aujourd’hui, notre établissement à travailler ensemble pour construi- ment aéroportuaire en liaison avec continue à avoir pour priorité le ren- re sa stratégie de développement. l’ENAC. L’excellence de l’universi- forcement et le développement de sa La première priorité est de renforcer té de Tongji, de l’école des Ponts politique internationale en direction les programmes actuels pour répon- et d’autres écoles de ParisTech, en de la Chine.

83 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Marc Guigon Responsable d’activités « voyageurs » Union internationale des Chemins de fer

Former les cadres territoriaux chinois

Marc Guigon, ingénieur de l’Ecole La Chine a une politique très active de formation Nationale d’Arts et Métiers (ENSAM), de ses cadres dirigeants. Une coopération avec la a travaillé pour la Datar, en tant France a été nouée avec la Datar pour faire que responsable des politiques françaises des transports, sous connaître la spécificité reconnue de l’expérience l’angle de l’aménagement des française des politiques d’aménagement du territoire territoires : ferroviaire, routes, voies (développement urbain et rural, environnement, navigables, aéroports régionaux. Il écologie et gouvernance à l’échelle des territoires). a été responsable de coopérations intergouvernementales entre la France et la Chine, particulièrement avec la ’organisation administrative LES MISSIONS DE LA CELAP CELAP (China Executive Leadership Lchinoise est hiérarchisée du Academy of Pudong : 浦东干部学 haut vers le bas et fortement décloi- C’est une école récente ouverte à 院) et la Commission nationale du sonnée par secteur d’intervention ; l’été 2005, conçue en 2003 par un développement et de la réforme les délimitations d’administration architecte français, Anthony Béchu. (NDRC). du territoire comportent de nom- Elle compte 200 professeurs et forme breux niveaux territoriaux qui peu- 1 200 personnes par an. Elle forme vent avoir des délégations de pou- principalement les maires de Chine voir très importantes (provinces, (niveau directeur général) et les fonc- municipalités, préfectures, districts, tionnaires ayant un grade supérieur à cantons ruraux, bourgades, villages). celui des maires (gouverneurs, minis- Toutes les responsabilités des divers tres, vice-ministres, chefs d’entrepri- échelons administratifs, territoriaux ses publiques). C’est également un ou sectoriels, sont gérées par des lieu où les grands chefs d’entrepri- fonctionnaires qui, quel que soit leur ses chinois se retrouvent en sémi- grade, et pour pouvoir avoir accès naire pour communiquer leur straté- à d’éventuelles promotions, doivent gie politique, interne et commerciale suivre trois mois de formation tous sur le monde avec les ministres les cinq ans, en temps cumulé. A et vice-ministres en formation. ce titre, la CELAP (China Executive Leadership Academy in Pudong), Ces formations sont concentrées l’école des cadres de Shan- sur des périodes en moyenne de ghai joue un rôle de premier plan. trois semaines auxquelles partici-

84 D.R.

La CELAP est destinée à la formation des cadres supérieurs et cadres du gouvernement.

pent des groupes de 40 à 60 partici- ble des problématiques concernant lie la Datar et la CELAP pour la réa- pants qui proviennent généralement l’aménagement des territoires : politi- lisation d’un programme d’actions de l’ensemble du pays. A la suite de ques des zones rurales, des villes, de concrètes. Tous les ans, un cycle la publication des plans quinquen- l’enseignement supérieur, de la san- de formation a été organisé. De très naux, la CELAP est aussi en char- té, des pôles de compétitivité, des nombreux experts français se sont ge de former les dirigeants de l’en- mutations économiques, du déve- rendus à Shanghai pour présenter les semble du pays pour les politiques loppement durable, des transports, politiques françaises aux dirigeants inscrites dans ces plans : la socié- de l’agriculture, de l’industrie, etc. des provinces chinoises. Il ne s’agit té harmonieuse, le développement évidemment pas de donner des de la société, l’emploi, l’intégration Un comité de pilotage à été consti- leçons aux dirigeants chinois, mais urbain-rural, les politiques agricoles, tué, pour démarrer les coopérations de montrer comment des politiques les politiques économiques, la com- avec les acteurs suivants : Datar, spécifiques ont été mises en œuvre. pétitivité, les politiques de l’énergie, Veolia, Alstom, ministère de l’agri- les villes nouvelles, le développe- culture, DGE, ADETEF, ambassa- L’OBJECTIF DES ment urbain durable, les questions de de Chine, ENA, lycée Jacques FORMATIONS des finances locales, la différence Decour, MAE, ParisTech (ENPC…), entre management public et privé, le Education nationale, Lafarge. Cela La Chine est confrontée depuis plus recrutement des fonctionnaires, etc. a abouti à la définition des thè- d’une décennie à des défis gigantes- mes possibles qui pourraient être ques que les gouvernements succes- LA COOPÉRATION envisagés pour les cadres chinois. sifs tentent de canaliser par des poli- AVEC LA FRANCE tiques directives en évitant autant que La CELAP a ensuite souhaité démar- possible les confrontations sociales. Dans ce cadre, fin 2006 après un an rer un test de formation. Il a été réa- d’existence, l’école a demandé au lisé par Pierre-Alain Roche, ingénieur Parmi ces défis, on peut citer l’exode gouvernement français par le biais général des ponts et chaussées, rural qui aboutit à une explosion des du consulat général de Shanghai de ancien directeur de l’Agence de l’Eau populations urbaines, avec l’aug- concentrer les actions de la France Seine Normandie. Il a présenté à plu- mentation du pouvoir d’achat des vers la CELAP dans une seule main. sieurs reprises une intervention sur classes moyennes qui en résulte, J’ai ainsi, pour le compte de la Datar, la gestion durable de l’eau en Fran- la protection de l’environnement, la coordonné les actions d’ADETEF ce qui a particulièrement été appré- protection sociale et les retraites, etc. (Assistance Technique France), de ciée. En décembre 2008, le préfet L’objectif principal de nos interven- l’ENA et de la Datar sur ce sujet, en Pierre Dartout, délégué de la Datar, tions est de présenter les politiques centrant principalement sur l’ensem- a signé l’accord de coopération qui françaises dans ces domaines.

85 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES D.R. Au premier rang, de gauche à droite : Leo Zhu, chargé de mission des pays francophones (CELAP), Fouad Awada, vice-Président d’Urba 2000, JIANG Haishan, vice président de la CELAP, Marc Guigon, Datar, Dominique Repiquet, membre du CGAAER, maire de Bagé la Ville , l’interprète. Au second rang de gauche à droite : Thierry Bruhat, consultant international, Jean-Yves Ollivier, membre du CGAAER.

Cela peut éventuellement abou- ses dans ces zones. Nous avons habitants. La voie privilégiée de cet- tir à la réalisation de tests de coo- donc réalisé des interventions sur te transformation, aujourd’hui accep- pération décentralisée dans des les politiques agricoles et la ville, tée par les autorités, est la mise en zones limitées, car les dirigeants ainsi que sur l’industrie et la ville. réseau des villes et des campagnes. locaux ont des libertés en la matière. Nous avons réalisé une interven- L’APPORT DES FORMATIONS tion sur les relations entre le pou- L’urbanisation ou la métropolisa- voir central et les collectivités ter- tion appellent des stratégies d’inté- L’urbanisation doit se traduire en ritoriales en France. Ainsi, il s’agit gration urbain/rural. Les nouvelles Chine par un plus grand pouvoir de de transformer des villes largement zones de développement métro- décision donné aux autorités qui conçues comme des îles au sein du politain chinoises doivent assurer assurent l’administration des villes. pays, en des centres de grandes le développement de villes satelli- A ce titre, elle favorisera l’émergence zones dynamiques et complexes. tes en partie pour assurer la fourni- d’une Chine, où les territoires pour- Un des défis est de revoir les déli- ture de services publics améliorés ront exprimer leurs meilleurs atouts, mitations et les statuts administra- dans les vastes zones rurales inclu- au plus près des demandes des tifs, actuellement très fragmentés.

86 des points de vue très contradictoires. LES THÈMES ABORDÉS (ENTRE 2007 ET 2011) La quasi-totalité de nos interventions ont permis à ces dirigeants de regar- La gestion durable de l’eau : Pierre-Alain Roche (CGEDD). Politiques der leurs propres problèmes locaux françaises d’aménagement du territoire : Marc Guigon (Datar). Politiques de sous un jour inattendu. Malheureuse- développement des territoires ruraux en France : Jean-Yves Ollivier (CGAAER). ment, nous n’avons aucune idée des Politiques des transports en France : Marc Guigon (Datar). Développement éventuelles conséquences locales de urbain, expérience française : Fouad Awada (CGEDD, Directeur général nos interventions, mais ce qui comp- de l’IAURIF). Protection des espaces naturels et biodiversité : Michel Badré te, c’est que les dirigeants chinois (CGEDD, président de l’autorité environnementale). Relations entre Etat et puissent se dire qu’il peut exister une collectivités territoriales : Eliane Dutarte (Conseillère à la Datar). 50 ans de autre voie que celle qui était initiale- politiques agricoles en France : Jean-Yves Ollivier (CGAAER). Vers une société ment tracée et que la France, ce n’est durable : Jacques Roudier (CGEDD). Prise en compte de l’agriculture dans le pas uniquement le luxe et le roman- développement urbain : Jean-Yves Ollivier (CGEDD). La maîtrise de l’étalement tisme, mais qu’elle peut être aussi un urbain au profit de terres agricoles : Dominique Repiquet (CGAAER). La partenaire apprécié en Chine pour planification des industries en ville : Thierry Bruhat, consultant international sur son expérience de la dimension ter- les politiques de l’innovation basées sur la coopération entre les entreprises, ritoriale du développement durable. les centres de recherche, les universités et les territoires. Les infrastructures Avec le renouvellement des accords urbaines : Fouad Awada (CGEDD, Directeur général de l’IAURIF). de coopération sur le développement urbain durable conclus au plus haut niveau de l’Etat, cette première contri- bution d’échanges au titre de ce pro- Les dirigeants chinois qui ont suivi dions pas. Certaines de nos inter- gramme de formation ne manquera nos cours ont montré une ouverture ventions ont abouti à des débats vifs pas d’inciter à leur poursuite et à leur d’esprit à laquelle nous ne nous atten- entre les dirigeants qui confrontaient développement . D.R.

Au premier plan : M. JIANG Haishan lors d’une conférence de Pierre-Alain Roche sur la gestion durable de l’eau.

87 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Françoise Ged Responsable de l’Observatoire de l’architecture de la Chine contemporaine

Formation et sensibilisation, clé de voûte des échanges sur la ville, l’architecture, le patrimoine

Françoise Ged, architecte Des programmes fructueux de coopération DPLG, HDR, dirige l’Observatoire s’appuient sur la mise en place de différents modes de l’architecture de la Chine contemporaine, à la Cité de de formation et de sensibilisation pour partager une l’architecture et du patrimoine. même conviction : établir une confiance commune Après un doctorat à l’Ecole des et ouvrir le regard. Hautes Etudes en Sciences Sociales (1997) consacré à la formation et au développement de la ville de Shanghai, es modalités des programmes Lujjazui qui a réuni les équipes de elle soutient son Habilitation à diriger Lvarient selon les objectifs visés Massimiliano Fuksas, ToyoIto, Domi- des recherches à l’Université Paris et les analyses menées au préalable nique Perrault et Richard Rogers 7 sur le patrimoine architectural et en France et en Chine sur les sujets et des urbanistes shanghaiens. urbain en Chine (2001). Elle enseigne concernés, un aller-retour nécessaire notamment au département de chinois et enrichissant de part et d’autre. En CONCEVOIR, PLANIFIER, de Langues ‘O (INALCO), et à l’Institut 1997, l’observatoire de l’architecture GÉRER L’URBANISATION d’Administration des Entreprises de la Chine contemporaine est asso- (Nantes). Elle a été lauréate de la Villa cié à une réflexion interministérielle, Le sujet est toujours d’actualité ! Médicis Hors les Murs (1988). sous la conduite du ministère des En 1992, le ministre de la construc- affaires étrangères, pour proposer tion Hou Jie déclarait que l’urbani- un programme répondant à l’invita- sation serait le moteur du dévelop- tion faite par Jacques Chirac, prési- pement dans la décennie à venir. dent de la République, de former en Face à cette interrogation récurrente France 50 architectes chinois, alors en Chine, les institutions les plus qu’il visitait Pudong à Shanghai. fortunées organisent des missions C’était déjà un site emblématique d’études à l’étranger, pour appren- de la coopération menée entre le dre et comparer procédures et réa- Bureau d’urbanisme de Shanghai, lisations menées, mais ces visites chargé de la planification du territoi- restent le privilège d’une minorité au re et son homologue d’Ile-de-France regard de l’immensité du territoire et dès le milieu des années 1980, puis c’est aussi une minorité qui accède la consultation internationale orga- à l’enseignement des écoles d’ar- nisée en 1992 par le ministère de chitecture, d’urbanisme, de paysa- l’équipement sur le quartier financier ge au sein des grandes universités.

88 D.R. Les Rencontres de Shanghai, à l’université de Tongji, ont réuni plus de 500 professionnels et enseignants-chercheurs venus de Chine et de France à l’issue du programme présidentiel « 150 architectes, urbanistes, paysagistes chinois en France, 1998-2005 ».

Dans ce cadre, comment faire évo- présidentiel ouvert de 1998 à 2000 gères étaient peu nombreuses dans luer des pratiques restées long- à 50 architectes chinois dont le suc- les bibliothèques. Les milieux pro- temps éloignées des sources d’in- cès a amené à un prolongement fessionnels avaient peu d’éléments formation? Les dix ans de fermeture jusqu’en 2005 avec l’ouverture aux d’informations et de comparai- des universités lors de la révolution urbanistes et aux paysagistes, soit son. Or des orientations nouvelles culturelle ont engendré deux types 150 professionnels venus en France. se faisaient jour, Shanghai mon- de décalages : l’absence d’une Un deuxième programme com- trait le chemin en renouvelant ses génération dans le processus de mencé avec le centre du patrimoi- cadres, ouvrant l’accès à des pos- transmission et un déficit d’informa- ne mondial de l’UNESCO en 1997, tes de responsabilité aux jeunes tions sur les réalisations à l’étran- nous a conduits à une coopération anglophones de moins de 40 ans. ger. C’est de fait, un manque mutuel très active axée sur le patrimoine et d’informations car la France dispo- la mise en valeur des centres histo- FAVORISER LES ÉCHANGES se alors de peu de ressources sur riques. Ce sont les modes de for- les mutations urbaines chinoises. mation mis en place dans ces deux En observant ce phénomène, qui programmes adaptés à des objectifs allait se propager ensuite, nous FACILITER LES PASSERELLES différents que nous présentons ici. avons proposé à des jeunes pra- ENTRE LES DEUX PAYS ticiens et enseignants chercheurs Dans les années 1990, se rendre à entre 25 et 35 ans de venir en Fran- Mettre l’accent sur la formation, sur l’étranger pour des professionnels ce pendant trois mois ou un an. L’ob- les échanges entre professionnels, chinois était compliqué en dehors jectif était double : ouvrir le regard de prendre la mesure du temps que des programmes de coopérations, ces jeunes praticiens à de nouvel- requiert la confiance, c’est la straté- alors que le tourisme était peu déve- les pratiques, en France et en Euro- gie développée par le ministère de loppé et les revenus trop faibles. pe, et permettre à leurs hôtes d’avoir la culture et de la communication, Internet n’était pas encore un outil accès à des informations directes avec l’observatoire de l’architectu- de diffusion d’informations, les pho- sur une Chine en pleine mutation. re de la Chine contemporaine. Nous tos ne bénéficiaient pas encore de De fait, l’immersion dans un pays avons appliqué ces principes dans la rapidité de transmission du sup- crée des liens affectifs sur un envi- deux programmes: le programme port numérique et les revues étran- ronnement large (apprentissage de

89 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES D.R. Restitution de l’atelier croisé école de Chaillot-université Tongji, avec les habitants et les autorités. Village de Liang.

la langue, de la cuisine, des modes écoles d’architecture et d’urbanis- une voie d’accès privilégiée, comme de vie, des usages du quotidien…) et me, impliquées directement ou non en témoignent les projets des agen- ce temps privilégié d’apprentissage, dans le Programme, sont frappants1. ces qui se sont impliquées dans ce de découvertes devient un ancra- Une dynamique a été lancée, ensei- programme comme Marc Mimram, ge pour des échanges ultérieurs. gnants, praticiens et étudiants ont l’Arep, AUPC, Architecture Studio, suivi. Faire un stage professionnel en pour n’en citer que quelques-unes2. UN PAYS OÙ L’EXPÉRIENCE Chine était de l’ordre de l’impensé. La coopération sur les centres his- EST POSSIBLE C’est aujourd’hui une demande toriques, l’adaptation du cadre « normale » de la part d’un étudiant bâti et des ensembles urbains aux La stratégie s’est avérée être un réel en France, qui souhaite se frotter succès dans les deux pays. Pour les au pays où l’urbanisation est d’une jeunes venus en France, c’est une ampleur sans précédent. Vérita- 1 Cf Françoise Ged, « Architecture : des étape inoubliable dans leur parcours ble laboratoire pour comprendre les coopérations fructueuses pour les écoles », in Etudier et enseigner la Chine, Gilles professionnel. Apporter cette ouver- enjeux des autres villes de la planète, Guiheux, Sébastien Colin et Delphine Spicq ture du regard a été très positif ; au- la Chine est perçu comme un cen- (dir.), Etudes chinoises, hors-série, Association française d’études chinoises, Paris, 2010 delà des expériences partagées, les tre d’essai où l’expérience est pos- et Architectures/mutations, transformations postes à responsabilité qu’ils occu- sible. Quant aux agences d’architec- urbaines en Chine, Bruno J. Hubert., Ecole Nationale Supérieure d’architecture pent désormais facilitent les relations ture et d’urbanisme en France, dont Paris-Malaquais/ Cité de l’architecture &du avec des établissements français. la stature est très éloignée des ins- patrimoine, Paris, 20122 Les échanges qui se sont noués entre tituts de projets chinois, elles ont eu 2 Voir les études menées par l’Afex, association des architectes français à l’export.

90 besoins des habitants intègrent des problématiques comme le loge- ment social, les transports publics, la transformation des ensem- bles industriels, la réhabilitation.

FORMER LES DÉCIDEURS ET LES TECHNICIENS

Nous avons travaillé ainsi de maniè- re concomitante depuis quinze ans: une formation fine en France, des formations continues sur le terrain, la sensibilisation des médias et des habitants. La formation personnali- sée en France nous a permis de fai- re connaître nos outils et nos moda-

lités d’actions, institutionnelles, D.R. réglementaires, pratiques et théo- Voyage d’études sur la mise en valeur du paysage, du patrimoine et du développement riques et d’avoir ensuite des relais économique des villes du Val de Loire. privilégiés : c’est ainsi qu’un cur- sus sur le patrimoine créé en 2007 à l’université Tongji a instauré un versité Tongji constitue un levier pré- pération. En outre, ces processus partenariat avec l’Ecole de Chaillot. cieux pour sensibiliser les habitants. font l’objet de publications et de Les formations de terrain sont tour- Le choix d’un village en Chine com- documentaires, et ont déjà été rete- nées vers les décideurs et leurs équi- me terrain d’étude, qu’une trentaine nus pour des présentations lors des pes d’ingénieurs, urbanistes, archi- d’étudiants et professeurs des deux trois derniers Forum Urbain Mondial, tectes : expertises et séminaires pays vont examiner par le menu, en 2008 à Nankin, 2010 à Rio et menés dans les villes et villages qui suscite l’intérêt des populations et 2012 à Naples5 et ce qui nous rend sont nos cas d’étude en Chine. En des autorités. Il importe alors d’or- le plus fier de ces travaux de longue France, nous avons la même straté- ganiser la restitution des travaux et haleine, c’est sans doute la création gie, recherchant un parallélisme des des réflexions menées par des expo- d’une expertise partagée avec nos situations et des bonnes pratiques sitions et séminaires4 qui valorisent partenaires, associant valorisation et afin de rendre possible la comparai- ces questionnements. Le regard transmission. son des processus et des acteurs, extérieur que nous apportons devient qui nous permet de mieux connaî- une source d’enrichissement mutuel. tre ainsi le système chinois. Dans les deux cas, associer la presse, L’originalité du processus a fait l’ob- 3 Voir ainsi la diffusion des conférences de les médias est une manière de faire jet d’un film diffusé sous forme d’épi- Wang Shu et des architectes chinois présentés dans l’exposition « Positions » en 2008 par la connaître les enjeux, pratique cou- sodes par la chaîne shanghaienne Cité de l’architecture & du patrimoine. rante de nos partenaires chinois, ICS le samedi à 20 h. La sensibilisa- 4 Cf Apprendre à lire le patrimoine – ateliers croisés en Chine, Ecole de Chaillot/Université et de faire connaître la pluralité tion, commencée dans ce milieu pri- Tongji, Editions de l’Université Tongji, des réalités chinoises en France3. vilégié des étudiants, se propage Shanghai, 2013 et sur le site de la Cité :http:// www.citechaillot.fr/fr/publications/workshops_ depuis trois ans auprès d’un public concours/25118-apprendre_a_lire_le_ SENSIBILISER LES de bénévoles, dans les chantiers patrimoine.html.ainsi que le DVD de l’atelier présenté lors du Forum Urbain Mondial à HABITANTS ET LES MÉDIAS d’été organisés avec l’association Nankin en 2008, http://webtv.citechaillot.fr/ Rempart par la Fondation Ruan Yisan video/atelier-franco-chinois-a-zhaji). Enfin, l’organisation d’ateliers croi- du nom de ce professeur partenaire 5 Pour plus de détails sur cette coopération franco-chinoise, voir le site d’Alain Marinos : sés entre l’école de Chaillot et l’uni- des premières années de notre coo- http://www.alainmarinos.net/

91 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Jean-Claude Lévy Conseiller spécial Ministère des affaires étrangères

La reconstruction industrielle de la Chine et la partition des pouvoirs locaux

Jean-Claude Lévy, historien, Les villes et les pouvoirs locaux jouent leur géographe, journaliste est en charge partition par leur planification et leurs gestions de l’action extérieure des collectivités du territoire, en interaction avec le marché, territoriales entre la France et la Chine au ministère des affaires étrangères. les entrepreneurs, les consommateurs… Il a occupé durant sa carrière diverses fonctions au ministère de l’environnement, de l’équipement a Chine, usine du monde, devient tes planétaires, sociales et écolo- et du tourisme. Il vient d’être chargé Laussi un laboratoire d’une gou- giques. On dit souvent qu’elle est par Pascal Canfin, secrétaire d’Etat vernance écologique par sa recons- l’usine du monde, mais qu’elle en est à la Coopération, d’une mission truction industrielle, l’écologie cir- aussi la poubelle. On néglige toute- de réflexion et de proposition sur culaire expérimentale, activant une fois que, sans trop de turbulences, l’économie circulaire. Il est l’auteur dialectique innovation/obsolescen- son trajet depuis une économie diri- de L’économie circulaire : l’urgence ce, associant les NTIC (Nouvelles gée vers une « économie socialiste écologique ? Monde en transe, Chine Technologies de l’Information et de la de marché » fait d’elle, d’une part en transit, aux Presses de l’Ecole Communication) et les écotechnolo- et depuis trente ans, un laboratoi- nationale des Ponts & Chaussées gies. Les échanges avec nos propres re socio économique étonnamment (2009). pouvoirs locaux nous offrent la pos- ouvert aux quatre vents, d’autre part, sibilité de participer à ce laboratoire. mais plus récemment, une initiative La Chine ne saurait échapper à la jamais tentée de gouvernance éco- crise. Même si l’on chiffre aujourd’hui logique dans le mode de production à environ 400 millions de person- et de consommation contempo- nes le nombre de Chinois qui accè- rain, grâce à une logique de plani- dent à l’usage des biens disponi- fication et à des investissements bles dans les sociétés occidentales, cumulativement exceptionnels. 900 millions d’autres souhaitent les rejoindre pour le partage du gâteau. Le XIIème Plan, puis le XVIIIème Congrès du Parti communiste (fin 2012) vien- DES TENDANCES nent de confirmer pour cinq ans ces ÉCOLOGIQUES orientations. La commission nationa- le d’état pour le développement et la A cette échelle, l’originalité de la réforme s’est attelée depuis le XIème Chine conjugue à la fois des limi- Plan à réaliser une reconstruction

92 URBA 2000

Le XIème Plan s’est engagé à réaliser une reconstruction industrielle respectueuse de l’environnement.

industrielle apte au respect de l’envi- D’abord ébauchées sur de petits « 100 villes chinoises (ou districts) ronnement, grâce à l’écologie indus- territoires : en Europe, au Dane- pilotes pour une économie circulaire ». trielle et à l’expérimentation de ce mark, à Kalundborg, ou au Japon qu’il est de plus en plus convenu de pour ce qui est de l’écologie indus- LA DIALECTIQUE nommer (pas seulement en Chine) trielle, (intéressant principalement le OBSOLESCENCE/INNOVATION « l’économie circulaire » (Cf. « Loi pour cycle de vie des matières utilisées la promotion de l’économie circulai- par les établissements industriels), Pour des raisons d’échelle démo- re », appliquée à Pékin depuis 2009). les expériences locales d’écologie graphique et de graves problèmes industrielle et d’économie circulaire écologiques, la Chine populaire est L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE (par exemple le centre de méthani- absolument sous tension, aux limites EXPÉRIMENTALE sation Ecopal et Lille) sont mainte- de son mode de production linéai- nant tentées dans toute la Chine, sur re actuel : utilisation trop massive de En Chine, l’économie circulaire, par de plus vastes espaces, appliquées ressources naturelles, produits ou opposition à une économie linéai- dans des parcs industriels (écologie investissements surdimensionnés, re1 globalement délétère pour les industrielle), mais aussi à l’échelle consommations massives, donc Chinois et au-delà, pourrait être seu- de districts urbains ou de municipa- déchets massifs, traités avec un coût lement une médecine, qui cherche à lités entières (au moins sous la for- très élevé, voire dangereux et intrai- réduire à la source la production dan- me d’éco parcs urbains et ruraux). tables, de surcroît sous contrainte du gereuse des déchets. Mais il s’agit commerce international. Cette dyna- plus largement encore de modifier La Chine occupe une position très mique ne s’inversera pas par mira- plus radicalement le cycle de vie des avancée dans ces expérimentations : cle. Elle est complexe et tendue, à produits, de réaliser continûment la loi-cadre promulguée fin 2009 s’est la rencontre des coopérations - et l’échange des flux physico chimiques traduite par des « zones » spécifique- autres échanges - avec le reste du résiduels issus des cycles de pro- ment dédiées à l’économie circulai- monde. D’une part, la demande de duction, soit in fine « zéro déchets » re, dans la plupart des grandes villes la Chine, autant que son offre, conti- avec réhabilitation maximale des chinoises. Après cette loi, très récem- ressources utilisées à l’échelle des ment, une circulaire du 4 septembre établissements industriels ou agri- 2013 de la National development 1 « Economie linéaire » : extraire les coles, à celle des filières, à l’échelle and reform commission (NDRC), a ressources, fabriquer, consommer, rejeter … Encore que dans le fonctionnement de la production et de la consom- relancé cette orientation, en formali- traditionnel des systèmes économiques, ce mation, c’est-à-dire au sein de l’en- sant les termes d’une expérimenta- qui était rejeté était généralement récupéré et semble du développement socio- naturellement réintroduit dans les cycles de tion dont la masse critique appellera vie de la flore et de la faune. Exemple : « Dans économique et politique chinois. par la suite à généraliser le modèle : le cochon tout est bon ! »

93 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

nue d’être très forte en termes de au sceau de l’innovation écologi- leurs activités, à collecter de nou- biens de consommation « classi- que, éco technologique et durable. velles données, à passer comman- ques », de qualité souvent médiocre de aux laboratoires de recherche, y et fortement consommateurs en res- L’économie chinoise, dans son compris parfois pour acquérir une sources non renouvelables, en rai- ensemble, exporte par le monde capacité d’interprétation systémi- son de l’état actuel du développe- une dynamique d’échange globale que2 de ces données, notamment ment inégal du territoire chinois, et à la fois négative et positive pour le relatives à l’urbanisme, à la mobi- de l’appétit capitalistique des opé- développement durable, dont l’éco- lité et aux transports (Cf. Trans- rateurs chinois et d’ailleurs. D’autre nomie circulaire, plus avancée en ports de haut niveau de services– part, cette demande est irréversi- Chine qu’ailleurs, désigne néan- THNS), à la biologie et à l’agriculture. blement tournée depuis une dizai- moins le cap économique et social ne d’années vers des recherches positivement envisagé à terme. Les appareils de production répon- avancées et des technologies nou- dent de façon inégale et concur- velles, si possible adaptées aux LE COUPLE rentielle à ce mouvement sans objectifs continus de « reconstruc- ÉCOTECHNOLOGIES / NTIC précédent. Dans ce contexte, « l’in- tion » économique et écologique telligence économique » ne s’est pas de l’appareil de production chinois. Cette recherche « avancée » vers substituée à l’espionnage, mais elle les écotechnologies, l’écologie en est devenue un vecteur industriel L’action extérieure des opérateurs du industrielle et l’économie circu- concurrentiel, assez significatif pour monde entier s’opère ainsi au sein laire est accompagnée, en Chine être pris en considération afin de pro- d’une dynamique chinoise contra- comme partout, par les nouvel- téger la confidentialité des données, dictoire, qui accepte et propose des les technologies de l’information à l’échelle des firmes et à l’échelle échanges d’objets et d’équipement et de la communication (NTIC). des échanges globaux concernant appelés à vite devenir obsolètes, en Partout les industriels sont politique- la souveraineté des Etats. Toutes les antichambre de la déchetterie, en ment conduits à mieux évaluer leurs entreprises, notamment les PME, même temps que la Chine accen- procédés de production, à exami- mais aussi les établissements de tue sa recherche de biens marqués ner les effets environnementaux de taille intermédiaire (ETI), sont toute- fois souvent bien loin de disposer de capacités scientifiques globales, d’in- vestissements, de veille ou de pro- tection. Cela est structurel : le cou- ple éco technologies/NTIC engendre progressivement depuis quinze ans une mutation des dispositifs inter- nationaux, nationaux et locaux de la production et des échanges.

LES POUVOIRS LOCAUX EN PREMIÈRE LIGNE

Les pouvoirs locaux sont, en pre- mière ligne, victimes et acteurs des

2 « La « systémique » est une science qui permet d’aborder des ensembles de sujets ou d’objets non pas isolément, mais dans

SHINGAI TANAKA le mouvement interactif qui les anime et finalement les transforme, d’où le concept écosystèmes validé dans les années 50 du Le cercle ENSÕ comme image de l’économie circulaire. XXe siècle par Tansley, Lindemann.

94 conséquences économiques et d’une reconversion débarrassée du tions, montrent les limites de l’éco- sociales (chômage) ou écologiques fardeau de la surconsommation de nomie linéaire à la chinoise, en même (pollutions aggravées) de la crise qui biens irrécupérables et délétères. temps que les avantages espérés s’est révélée en 2008. Ils se trouvent d’une économie circulaire : en témoi- nécessairement sommés de réparer RECONSTRUCTION gne la circulaire évoquée ci-dessus au coup par coup les dégâts et de INDUSTRIELLE ET sur les « 100 villes pilotes ». On peut prévoir sur le long terme des solu- POUVOIRS LOCAUX alors se demander si les éco-quar- tions plus « vertueuses », via des tiers, éco-villes, éco-cités, plus ou initiatives « bas carbone », d’éco De façon endogène, la reconstruction moins aboutis, annoncent des pla- quartiers ou d’éco villes et plus par- industrielle (pas seulement en Chine) nifications écologiques futures ? ticulièrement en Chine via les expé- affronte donc l’exigence d’apporter Peut-être, dans ce cas, les pouvoirs riences pilotes d’économie circulaire. une réponse dialectique aux contra- locaux, visant à redonner à l’indus- Ils disposent de moyens certaine- dictions qu’elle rencontre. L’obsoles- trie une sorte de dignité appliquée à ment insuffisants, mais non négli- cence, préprogrammée à la faveur une transformation positive du mode geables. Les collectivités territoriales d’innovations, souvent mineures, de production, de consommation et sont partout à la pointe de l’investis- principalement destinées à renouve- d’échanges, maîtriseraient-ils mieux sement public (entre 70 et 80 % en ler « le marché », a pu certainement les orientations et les modalités d’une France comme en Chine). Elles agis- conduire un temps chez nous (les planification territoriale durable. C’est sent plus ou moins déjà pour cibler à Trente Glorieuses, dit-on ici !) à un en cela qu’ils ont une aptitude à pola- l’échelle locale ces investissements. bien-être renouvelé, mais elle a fina- riser de façon nouvelle une économie lement peu à voir avec la « destruc- désuète, ici à bout de forces, ou en Elles prennent de plus en plus en tion créatrice » chère par exemple à Chine en surchauffe, surdéterminée considération la relation éco techno- Schumpeter : bien au contraire, outre partout par la relation quasi exclusive logies/NTIC. En témoigne progres- la destruction des ressources natu- entre l’industrie et la consommation. sivement partout la place des pôles relles, dans un contexte de financiari- de compétitivité et autres « clusters » sation aiguë, c’est le marché lui-mê- Les collectivités territoriales françai- dans la gouvernance du développe- me qui a été détruit. La preuve de ses (environ 70 jumelages) coopèrent ment territorial. Le secteur de l’em- 2008 nous est encore aujourd’hui, amicalement avec la Chine sur une ploi tertiaire en profite déjà, et les administrée. Ce sont les pouvoirs grande diversité de sujets : les éco- éco technologies et NTIC portent un locaux d’une bonne partie des pays les, la culture, le tourisme durable (la développement compatible avec les développés et leurs administrés qui Lozère et le Guizhou), l’université, la contraintes écologiques nouvelles. en font les frais, notamment en ter- recherche, plus récemment l’écono- mes de capacités industrielles et mie, les PME/PMI (Rhône-Alpes/ Le développement territorial est ainsi d’emplois, à tout le moins dans un Shanghai), la filière équine (Pays-de- en partie fonction de l’aptitude des certain nombre de pays européens. Loire/Shandong), l’environnement collectivités territoriales à recher- (Ile-de France /Pékin), etc. Ces cher des choix prospectifs adaptés Le gouvernement chinois affronte ce actions extérieures se déroulent à la au cycle de vie des produits simples challenge de façon dialectique : ce marge, limitées, mais certainement (bien courants de consommation) pays vend par le monde – et chez significatives. Parfois problématique, ou complexes (urbanisme, mobi- lui, des biens courants – parfois de l’action économique des collectivités lité), compatibles avec la deman- qualité médiocre, qui deviendront territoriales, en direction des PMI, est de socio-économique de dévelop- rapidement obsolètes, tandis que désormais partie prenante de notre pent durable, voire avec une visée l’économie circulaire est en revanche diplomatie : le développement dura- d’économie circulaire. Entre rêve programmée (zéro déchets) pour lut- ble y est en tout cas affiché. La et démarche gradualiste effective, ter contre l’épuisement des ressour- reconstruction industrielle des deux on peut imaginer à terme des créa- ces naturelles chinoises, c’est-à-di- pays y est un enjeu de première tions d’emplois tertiaires et indus- re assurer la pérennité du « vivant ». grandeur de part et d’autre, et les triels, correspondant à un paysage A l’échelle locale, un certain nombre pouvoirs locaux ne sauraient en cela économique nouveau, dans le cadre de scandales, d’accidents, de pollu- être ni instrumentés ni exclus.

95 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER Ion Besteliu Directeur Projets Urbains Egis International (IET) Laurent Malet Directeur Stratégie et Développement – Branche Industrie/Energie - Président d’Egis China Quelques enjeux de la ville territoire émergente

250 millions d’habitants sont amenés à se déplacer des zones rurales vers de nouvelles villes au cours des douze prochaines années. L’urbanisation rapide de la Chine nécessitera la mise en œuvre de mesures innovantes de la part des urbanistes et des gestionnaires des villes.

Ion Besteliu, urbaniste, architecte, ans ce contexte, la pratique même souvent les grandes métro- expert en urbanisme et aménagement, Dd’Egis dans le monde et en poles mondiales de l’avant-guerre. travaille depuis 16 ans sur des études Chine met en lumière, utilement, de stratégie urbaine, des schémas quelques tendances d’évolution des L’ÉMERGENCE directeurs, et des projets d’audit et villes à mettre en perspective avec DES GRANDES VILLES évaluation de programmes et politiques l’expérience historique de l’amé- de développement urbain dans plus de nagement du territoire français. Un Les nouvelles villes multimillionnai- 15 pays. dénominateur commun de l’urbani- res posent deux grandes probléma- sation récente des pays émergents tiques. La première, qui n’est pas Laurent Malet, MiM / MBA, a est l’augmentation de la taille des abordée ici, concerne les condi- passé toute sa carrière à travailler villes dans le cadre des armatures tions de vie dans les favelas, slums dans le domaine de l’énergie et des urbaines nationales. Nombre d’éco- ou bidonvilles. La deuxième, d’une problématiques qui y sont liées : nomies émergentes ont connu, importance particulière pour le matières premières, production, durant les trois ou quatre derniè- contexte chinois, est l’impact envi- distribution, etc. Son expérience res décennies, une concentration ronnemental de ces grands pôles de la Chine l’amène à se confronter de leur population dans des villes- d’attraction sur leur arrière-pays. aux problématiques complexes des capitales, villes-portuaires et villes Cette problématique de la durabilité politiques urbaines des territoires chefs-lieux de province. Ces nou- de la ville-région reste peu abordée émergents. Il a été invité à s’exprimer velles villes multimillionnaires, ayant pour les pays émergents, pourtant sur la qualité de l’urbanisation lors du fonction de portes vers le marché l’échelle régionale demeure crucia- dernier forum de Boao. mondial, ont atteint des tailles tout le pour gérer l’urbanisation actuelle. à fait sans précédent dans l’his- Le même « rêve pavillonnaire1» toire urbaine des pays, dépassant qu’aux Etats-Unis ou dans l’Euro-

96 JACQUES SAINT-MARC

L’aspiration des ménages vers le logement unifamilial,devient motrice de l’urbanisation.

pe de l’après-guerre se cristallise au Bien que géographiquement et conséquences ultimes, le paysage sein des sociétés émergentes, au fur culturellement éloignées, les formes provincial, champs et étangs, forêts et à mesure qu’une classe moyenne d’occupation du territoire par éta- et collines est érodé jusqu’à dispari- est en mesure d’exercer ses choix lement suburbain sont structurelle- tion. Ainsi, un lien ancestral entre les de logement sur le marché de l’im- ment assez proches l’une de l’autre. gens et leur espace de vie est perdu. mobilier. L’aspiration des ménages vers le logement unifamilial, pilier Cet étalement urbain basé sur le Bien qu’en pratique, des fragments démontré de l’étalement des villes logement pavillonnaire dépend de parc ou jardin public aient été, dans l’économie de marché, devient d’abord d’une bonne connectivité avec difficulté, préservés, la vision par conséquent motrice de l’urbani- par le réseau routier et autoroutier cohésive du paysage régional est sation. L’échelle de cet étalement est (au moins au début du processus). affectée. Selon ce modèle, tout régionale tout comme son effet sur En liaison avec ce grand mailla- morceau du monde rural et agri- le paysage. En Europe, on déplore ge de transport, l’unité morpho- cole n’a qu’une existence provi- les effets de l’étalement d’une ville logique de base de la ville-région soire, un reste, un terrain vague, moyenne d’un ou deux millions d’ha- émergeante est un réseau viaire à un lot en attente de son édifice. bitants. Ce même effet, pour une vil- arborescence. Cette structure en le de six ou de dix millions d’habi- arborescence est observable dans le Cependant, ceci n’est pas la seule tants, produit une marée de maisons. monde entier, et constitue la maniè- manière d’habiter un territoire. Même re la plus simple et pragmatique des populations importantes peuvent RÊVE PAVILLONNAIRE d’ouvrir des terrains à l’urbanisation. trouver place en préservant à la fois ET SPÉCULATION FONCIÈRE vitalité économique et paysage cultu- EROSION DU PAYSAGE RURAL rel. En France, l’exemple de la Val- Sous la pression de ce rêve pavillon- lée du Rhône, de Lyon à la Camar- naire, et dans une course à la com- L’urbanisation par grande maille et gue, est particulièrement parlant. mercialisation des quartiers « de arborescence génère un paysage De hautes densités de peuplement villas », développeurs et parfois auto- régional composé d’espaces spécia- du territoire sont déployées, dans rités locales ont tendance à gérer le lisés (quartier de villas, parc d’activi- une économie basée sur la recher- paysage régional principalement en tés, etc.) physiquement isolés les uns che-production et les services aux tant que terrain à bâtir. Le paysage, des autres. Le territoire est habité entreprises, sans toutefois effacer anciennement nature habitée, terre sous forme d’une succession d’en- labourée, lieu de vie de la commu- claves, enfilées le long des grands nauté paysanne et sujet de contem- axes du grand réseau de transports plation, devient un vide à remplir. régional. En poussant le modèle à ses 1 Cf. Henri Lefebvre « Le rêve pavillonnaire »

97 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES URBA 2000

Les solutions d’éco quartier sont très prometteuses et sont à prendre avec prudence (Eco quartier Baoshan à Shanghai).

le paysage régional qui, au contrai- paysage dépend également de la nement des agences d’urbanisme, re est valorisé en tant que paysage mise en place d’outils spécifiques qui permet de planifier la coexis- agricole hautement productif (par de planification, de la relation bâti/ tence entre la ville et son paysage. exemple, le paysage des vignobles), non-bâti dans l’espace métropoli- de loisirs, et de tourisme culturel. tain. On pourrait citer les trames ver- LES FORMES URBAINES, tes et bleues régionales, telles que REFLET DES CHOIX DE SOCIÉTÉ FAIRE COEXISTER LA VILLE celles de la région Nord-Pas-de-Ca- ET SON PAYSAGE lais, où, en simplifiant, la croissance Ce n’est pas par coïncidence que ces des villes est prévue dans les inters- exemples de valorisation du paysage La valorisation sociale et économique tices du paysage régional et, vice régional dans l’urbanisation provien- de ce grand paysage régional passe versa, les réseaux urbains s’adap- nent des cultures où une longue tra- d’abord par la politique des trans- tent au paysage et au fonctionne- dition urbaine coexiste avec une forte ports. Le grand paysage ne peut ment des écosystèmes naturels. tradition agricole et un amour du pay- pas devenir un personnage dans sage de la terre labourée, du travail la pièce du développement durable Ces outils spécifiques sont-ils pos- paysan. Une planification hydraulique sans être utilisé en tant qu’espace sibles sans une coopération et une à l’échelle régionale s’ajoute souvent de loisirs, de repos après le travail, coordination entre les administrations au tableau. Tout compte fait, le choix d’espace « curatif » pour de larges publiques locales d’un même terri- d’une forme d’occupation du territoi- catégories de résidents et d’utilisa- toire métropolitain ? Bien entendu re est toujours un choix de société. teurs, et donc sans être accessible que non, et c’est ce soubassement Dans certaines sociétés prospères, par plusieurs modes de transport. de gestion métropolitaine, intégrant notamment les Etats-Unis, le choix Cette coexistence de la ville et du les contrats de ville et le fonction- des ménages et le choix de socié-

98 té ont été résolument orientés vers en termes de construction à énergie ce. Prometteuses dans le sens où l’habitat pavillonnaire, dont l’étale- positive, de technologies de trans- les synergies entre systèmes tech- ment suburbain a été la conséquen- port en commun durables, de traite- nologiques sont en train de donner ce. Cependant, la faible densité de ment durable des eaux usées et des naissance à une approche systémi- la population, par rapport aux densi- déchets, etc, nous acheminent vers que véritablement durable de ville « tés européennes et asiatiques, a per- une situation où aussi bien le modèle productive », où l’ensemble du tis- mis l’étalement sans toutefois inter- intensif, que le modèle extensif d’oc- su bâti génère de l’énergie à réinjec- dire aux citoyens l’accès à l’espace cupation du territoire, celui de « la vil- ter dans le réseau, autant que dans naturel « curatif », aux parcs natu- le radieuse » de Le Corbusier ou celui la ville « écologique » où les cycles rels dont les Etats-Unis ont été les de « broadacre city » de Frank Lloyd technologiques tendent vers des pionniers. Sur le continent européen, Wright, peuvent être rendus dura- symbioses avec les cycles naturels. pour des raisons d’ordre socio-cul- bles et seront amenés à coexister. Eco quartiers à prendre également turel, autant que de densité histori- avec prudence car le saut d’échelle, que du peuplement, on accepte plus LA VILLE RÉGION CONTIENT de la durabilité du quartier à celle de facilement la ville compacte, bien PLUSIEURS ÉCO QUARTIERS la ville-région, n’est pas une simple que le « rêve pavillonnaire » perdure. question de multiplication des projets Cependant, la confrontation ou la Dans ce contexte, les solutions de quartier écologique. La condition dualité entre les modèles n’est plus d’éco quartier sont à la fois très pro- supplémentaire est de savoir valori- de mise. Les innovations actuelles metteuses et à prendre avec pruden- ser, à la grande échelle de la région, la coexistence entre bâti, écosystè- mes et grands espaces naturels. Et donc, de savoir créer les outils de gestion de cette urbanisation du territoire régional en parallèle avec l’effective urbanisation physique.

La ville durable, comme toute autre construction de « ville idéale », s’ac- compagne a fortiori d’un élément d’utopie. La ville durable n’est pas, dans ce sens, très loin de la ville idéale de l’Antiquité et de la Renais- sance européenne, ou des villes modèles tout au long de l’histoi- re de l’urbanisme en Chine. La vil- le durable étant, en grande mesure, un essai de concrétisation d’un futur désirable, harmonieux, exemplaire.

Dans ce sens, la ville idéale du XXIème siècle demeure un projet ouvert. Entre cultures, on pourrait bien par- tager des éléments de technologie ou de gestion du territoire, mais la forme de la ville-région, tout comme la forme du paysage qu’elle épouse sont des synthèses spécifiques, dont

JACQUES SAINT-MARC certains éléments resteront, fort heu- Le choix d’une forme d’occupation du territoire est toujours un choix de société. reusement, encore à édifier.

99 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Pierre Calame Directeur Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de l’homme Villes durables : le dialogue nécessaire entre sociétés européenne et chinoise

Pierre Calame, ingénieur en chef, Les villes, en Europe comme en Chine, sont (X63, ENPC 68) a été pendant vingt ans au cœur d’un mode de vie et de consommation dans la fonction publique, où il a fait de non durable. 2014, c’est aussi le centenaire du la recherche, dirigé un service territorial (Valenciennes), été sous-directeur déclenchement de la première guerre mondiale, fruit à la direction de l’urbanisme et des d’une compétition exacerbée entre les puissances paysages, chargé à la direction des européennes et des ressentiments nés de l’histoire. affaires économiques et internationales (DAEI) des relations avec le Maghreb. Après avoir été Secrétaire général d’Usinor, il a pris la direction en 1988 ’enjeu est aujourd’hui que cette entre les peuples avec les rêves de d’une fondation internationale de droit Lcompétition à l’échelle mondiale revanche qui les accompagnent suisse, la Fondation Charles Léopold ne produise pas les mêmes effets. et lorsque les rapports internatio- Mayer pour le Progrès de l’homme Le dialogue entre les sociétés euro- naux restent dominés par des rela- (www.fph.ch). péenne et chinoise autour de la ville tions interétatiques conduisant, non durable doit contribuer à conjurer ce à rechercher un intérêt commun péril. En 2014, seront célébrés deux des peuples, mais à confronter des anniversaires : le cinquantenaire de soi-disant « intérêts nationaux », la reconnaissance de la République réduits à des rapports de puissan- Populaire de Chine par la France et ce. Or, c’est, à bien des égards, la le centenaire du début de la premiè- configuration mondiale actuelle. re guerre mondiale. La Chine n’a pas été directement concernée par INCERTITUDES ET RISQUES ce conflit. Pourtant cet anniversai- DE MUTATION DU MONDE re est encore plus significatif que le premier lorsqu’on réfléchit au chemin Partout, et en Chine plus qu’ailleurs, de l’urbanisation durable en Chine. l’urbanisation et la montée en puis- La guerre de 14 est en effet le sym- sance d’une classe moyenne s’ac- bole de la catastrophe qui survient compagnent de la diffusion de lorsque l’appétit des puissances modes de vie très consommateurs pour les ressources naturelles du en énergie fossile et en ressources monde s’aiguise, lorsque les res- naturelles non renouvelables. Les sentiments se sont accumulés intenses relations commerciales

100 THINKSTOCK

Les choix de la Chine, en matière de développement durable, sont décisifs pour la planète.

et diplomatiques entre l’Europe et la comme ses chasses gardées. Le ris- Europe, le remarquable rapport sur Chine n’ont pas encore su créer la que existe, qu’ailleurs qu’en Europe la ville « post carbone », récemment compréhension profonde entre les et en Chine, le monde puisse être à la publié par le ministère français de deux sociétés, qui serait si néces- merci d’un événement fortuit comme l’écologie et l’Ademe, sous la direc- saire aujourd’hui pour affronter l’attentat de Sarajevo il y a un siècle, tion de Jacques Theys, montre que ensemble les défis de notre temps. créant une situation où un engrena- seul un scénario de rupture, passant, Du côté chinois, le souvenir des ge fatal pourrait se mettre en place. disons le mot, par un contingente- humiliations passées est vivace, mais On comprend dans ces conditions ment des consommations d’énergie il peut désormais faire place à la fierté l’enjeu décisif que représente pour à l’échelle des territoires, donc par du retour du pays au rang de puis- le monde le modèle d’urbanisation un régime de gouvernance de l’éner- sance mondiale respectée. Du côté chinois. La question est simple : si gie fondé sur des quotas territoriaux européen, avec le relatif déclin des en Europe, malgré la prégnance du et individuels négociables, sera de puissances européennes, le vieux discours sur le développement dura- nature à atteindre l’objectif nécessai- mythe du « péril jaune » sert quel- ble, se perpétue un modèle, le nôtre re de diviser la consommation d’éner- quefois d’exutoire à la peur collec- jusqu’à maintenant (qui est aussi le gie fossile par quatre d’ici 2050. tive nourrie par le chômage, l’implo- modèle américain), fondé sur l’ap- sion des économies et la faiblesse de pétit pour les énergies fossiles et les En Chine, le modèle de développe- la politique étrangère européenne. ressources naturelles non renouve- ment local fondé jusqu’à mainte- Depuis le début du XXIème siècle, c’est lables, ce modèle est impropre à ce nant sur des investissements mas- en effet un climat d’inquiétude qui que la Chine puisse s’en inspirer et sifs et une logique mécanique de s’exprime, que les conclusions des les risques d’un monde dangereux, planification des développements négociations interétatiques comme parce que non durable, s’accrois- urbains reste la règle et il n’est pas Copenhague en 2009 ou Rio+20 en sent. Si, par contre, dans la ligne du certain que les directives du gouver- 2012 n’ont guère permis de dissiper. XIIème plan chinois, la Chine explore nement central suffisent à convain- pour son urbanisation des voies nou- cre les autorités locales de changer Confrontée à un besoin de plus en velles, alors des espoirs sont permis. de cap alors que les villes continuent plus pressant d’énergie fossile et de à ne trouver leur équilibre financier ressources naturelles, la Chine fait UN VIRAGE VERS LA VILLE que grâce à la conversion massive en Asie du sud, en Asie centrale, en « POST-CARBONE » de terres agricoles en sols urbains. Afrique, et en Amérique du Sud, une Comment l’Occident peut-il pré- percée économique et diplomatique. Malheureusement, aussi bien en tendre faire la leçon aux dirigeants Des régions du monde que l’Occi- Europe qu’aux USA et en Chine, le chinois en les accusant de mettre dent considérait jusqu’à présent virage n’est pas vraiment pris. En en danger la planète et les équilibres

101 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

était assumée par les forces politi- LES DOMAINES DE COOPÉRATIONS FRANCO-CHINOISES ques et économiques de l’Europe et POUR GUIDER LES PROGRÈS À ACCOMPLIR de la Chine, elle est à notre portée. J’ai l’honneur de présider ce Forum

l Les outils de connaissance, de contrôle et d’évaluation. depuis sa naissance en 2005. Né du

l Les politiques de cohésion sociale. désir des élites chinoises de mieux

l Les politiques de l’habitat. comprendre la construction euro-

l Les politiques de transport et de gestion de la mobilité. péenne, pressentant qu’elles peu-

l La conception des quartiers et de la planification urbaine d’ensemble. vent en tirer d’utiles leçons pour la

l Les relations entre filières de production et territoires, avec un accent particulier Chine, c’est, depuis 2007, une expé- mis sur l’agriculture et les filières agro-alimentaires. rience unique de dialogue de socié-

l Les politiques de réduction des flux matériels (économie circulaire, substitution té à société, impliquant de part et de services aux biens, politiques d’achat public, traçabilité des filières globales). d’autre la diversité des acteurs et

l La ville intelligente (utilisation des nouvelles techniques de gestion et transmission portant sur un grand nombre de de l’information au service de la transition). sujets d’intérêt commun. Dès 2007,

l L’évolution des systèmes de pensée, des modèles économiques et diffusion comme l’illustre son titre, « Europe de nouveaux modèles, notamment par la formation. et Chine unies par des défis com- muns », la synthèse des 46 ateliers Source : Extrait du blog de Pierre Calame - Villes chinoises et européennes : entr’aidons nous pour conduire organisés dans 23 villes européen- la transition vers des sociétés durables, 22 février 2013. nes a montré qu’au-delà des dif- férences importantes de contexte culturel, politique et économique, les deux sociétés pouvaient se retrou- géostratégiques mondiaux, alors et pas seulement les dirigeants admi- ver sur leurs défis communs. Le rôle que la consommation énergétique nistratifs et politiques locaux ou les des villes dans la transition vers des par habitant des villes européennes, experts ; nourrir la réflexion et l’ac- sociétés durables est l’un d’eux. si l’on prend en compte l’énergie gri- tion des uns et des autres grâce à se incorporée dans les biens impor- un échange approfondi d’expérien- Les échanges actuels entre vil- tés, notamment de Chine, reste bien ces permettant non seulement d’ins- les européennes et chinoises sont supérieure à celle des Chinois ? pirer chacun, mais aussi d’aller à la nombreux et utiles, mais ils res- racine des problèmes en renouve- tent trop souvent cantonnés dans ETABLIR UN DIALOGUE lant la conception même des villes la coopération décentralisée clas- ENTRE VILLES EUROPÉENNES et de l’économie ; contribuer, par le sique. Ils ne permettent pas enco- ET VILLES CHINOISES renforcement des réseaux internatio- re d’aller à l’essentiel, de construire naux de villes et leur focalisation sur les conditions d’un dialogue appro- La conclusion s’impose d’elle-mê- la transition vers des sociétés dura- fondi sur leur rôle dans la transi- me : seul un dialogue approfondi, bles, à faire émerger dans les négo- tion vers des sociétés durables. dans la durée, entre villes européen- ciations internationales un autre nes et villes chinoises, centré sur le mode d’approche où la recherche UNE VISION rôle des villes dans la transition vers en commun de solutions à des défis, ORGANIQUE DE LA VILLE des sociétés durables, est de natu- eux-mêmes communs, l’emporte re à surmonter les contradictions sur l’affrontement des puissances. La Chine contemporaine a adopté la et dangers de la situation actuelle. même méthode que le Japon un siè- Pour être à la hauteur des défis, ce UTOPIE AUSSI cle et demi plus tôt. Elle n’hésite pas dialogue doit réunir trois conditions : GÉNÉREUSE QUE VAGUE à aller chercher partout dans le mon- permettre un dialogue « de société à de les meilleurs exemples, pour les société », faisant naître une compré- L’expérience du Forum China Europa adapter aux réalités chinoises. Elle a hension mutuelle et, pour cela, impli- (www.china-europa-forum), montre considéré qu’elle devait repenser son quer l’ensemble des acteurs sociaux au contraire que, si cette ambition modèle urbain à partir de l’expérien-

102 ECOCITY

Fin septembre 2013, s’est tenu à Nantes le congrès Ecocity des villes durables. La Chine n’hésite pas à aller chercher partout dans le monde les meilleurs exemples, pour les adapter aux réalités chinoises.

ce européenne. Ce qui nous honore aussi un puissant levier de change- bles. Il a révélé un mouvement de et nous oblige. Construire un dialo- ment pour les villes européennes. fond où s’impose progressivement, gue approfondi sur le rôle des villes Fin septembre, s’est tenu à Nantes en lieu et place de la vision « méca- et territoires dans la transition sera le congrès Ecocity des villes dura- niste » qui a dominé au XXème siècle la conception des villes, une vision fondée sur l’analogie avec les sys- tèmes vivants. Les deux caractéris- FONDATION CHARLES LÉOPOLD MAYER tiques essentielles de la gouvernan- POUR LE PROGRÈS DE L’HOMME ce sont alors la capacité à gérer les relations entre les éléments du sys- La Fondation fut une des premières, après Tienanmen, à décider de développer tème, entre les acteurs et entre les des coopérations avec la société chinoise, convaincue que les défis à venir échelles, et la capacité à concilier de étaient mondiaux et que le monde ne se ferait pas sans la Chine. C’est dans le nouvelle manière unité et diversité. prolongement de cette coopération à long terme qu’a été créé en 2005, avec le soutien de la FHP, le Forum China Europa, tentative sans précédent de dialogue Au-delà des discussions techniques, global « de société à société ». L’urbanisation durable en Europe et en Chine est c’est cette vision du monde et de la une des priorités de ce dialogue. gouvernance qui sera au cœur de la coopération entre les villes et territoi- (www.fph.ch) res chinois et européens.

103 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

LIU Kaisheng Fondateur et président Association franco-chinoise du Développement Urbain Durable Une plateforme d’échanges pour promouvoir les coopérations franco-chinoises

LIU Kaisheng diplômé de l’Université A travers le développement d’une plate-forme de Tongji et de l’Ecole des Ponts d’échanges et le rassemblement des talents ParisTech, docteur en modélisation du professionnels, multidisciplinaires et biculturels, transport de l’Université Paris Est au Laboratoire Ville Mobilité et Transport, a l’AFCDUD, en tant que « soft-power », soutient, avec démarré sa carrière à la RATP en 2005 les autres acteurs, les coopérations franco-chinoises au Département Etude & Modélisation. dans le développement urbain durable. En 2008, il rejoint ALSTOM au Département Transport Global Solutions. Un des projets de R&D qu’il a dirigé est récompensé par le Prix ’accord franco-chinois signé les transports, l’urbanisme, le génie Innovation Awards du Groupe en 2011. Len 2007 sur le Développement civil, le Smart City et la finance. Il est depuis System Design Manager Urbain Durable (DUD) favorise la en charge de la conception des sous- coopération et l’échange entre nos NOTRE VISION systèmes et de la gestion technique deux pays. Il s’est fixé l’objectif de ET NOS MISSIONS des projets en France, Afrique du Nord rendre la ville plus harmonieuse et et Moyen Orient. durable, en plaçant le développe- Depuis sa création, notre asso- ment urbain durable au premier plan. ciation cherche à rassembler des talents professionnels, multidisci- Créée dans ce contexte fin 2008 par plinaires et biculturels pour contri- un groupe de chercheurs et d’ingé- buer à l’approfondissement des nieurs chinois en France, l’associa- coopérations franco-chinoises. tion franco-chinoise du développe- Nous croyons aux technologies ver- ment urbain durable (AFCDUD) est tes pour une meilleure vie en ville. une association à but non lucratif Nous nous sommes engagés à (loi 1901), avec comme principa- construire un réseau ouvert, nouer le ambition de participer à la pro- des amitiés, partager des informa- motion du développement urbain tions, échanger des idées et encou- durable conjointement avec les col- rager la créativité. Nos objectifs prin- lectivités locales, les entreprises cipaux sont de construire ensemble et les universités. Elle se concen- une plate-forme d’échanges pour tre sur sept domaines, en particu- contribuer à l’amélioration de la vie lier : l’environnement, les énergies, en société en nous fondant sur les

104 URBA 2000

En Chine, le réseau de l’AFCDUD s’élargit continuellement.

talents de nos membres formés à la ments français et chinois dont le gation de la commission nationale fois en Chine et en France ; de per- ministère de l’écologie, du déve- chinoise pour le développement mettre à nos membres de dévelop- loppement durable et de l’énergie, et la réforme en 2012 et participé per leurs expertises respectives dans l’union des chercheurs et des étu- depuis 2009 au forum annuel fran- le DUD en les impliquant dans cet- diants chinois en France et l’univer- co-chinois sur le Transport à Haut te vague d’urbanisation sans précé- sité de Tongji (voir la liste complè- Niveau de Service (THNS) orga- dent ; désensibiliser et informer le te dans l’encadré, page suivante). nisé par ParisTech, le MEDDE et grand public sur les enjeux du DUD Nos nombreuses actions nous ont l’université de Tongji à Shanghai. au travers de séminaires ouverts amenés à organiser trente-cinq évé- En 2009, nous avons aidé à l’or- que nous organisons régulièrement nements durant les cinq dernières ganisation du sommet international entre les différents acteurs des inno- années, dont ont pu bénéficier plus de « Urbain Mass Transit » à Shan- vations de la ville de demain ; de de 3 500 personnes. Nous avons en ghai et en 2010 assisté le consulat faciliter l’insertion professionnelle particulier organisé dix conférences général de France à Shanghai pour de nos membres encore étudiants. sur les thèmes autour du DUD en fai- l’organisation de la journée DUD Notre vision et nos objectifs nous sant intervenir des spécialistes, des dans le pavillon de France sur le orientent à définir les directions de experts et des gestionnaires. Ces site de l’exposition universelle 2010. développement et les champs d’ap- conférences à accès libre permettent plication. En 2013, l’AFCDUD ras- à la fois de sensibiliser le grand public VISITES ET RENCONTRES semble 220 membres, dont 100% via la vulgarisation et de constituer INTERNATIONALES ont bac + 5 et 25% sont docteurs. un lieu de rencontres et d’échanges Ils sont répartis dans les sept pôles pour les professionnels. Nous avons Nous avons participé au concours et différents secteurs. Ensem- assisté le MEDDE pour l’accueil de sino-français de l’entreprenariat et ble, c’est un réseau de talents, délégations chinoises (ministère de l’innovation organisé par l’as- riche et solide, à même de soute- chinois de la construction, université sociation des Chinois à l’étranger nir durablement les coopérations. de Tsinghua, Centre de recherches pour la création d’entreprise (ACE- sur les transports urbains durables CE) et Sinofrance Pépinière. L’équi- PRINCIPALES ACTIVITÉS de la Chine, municipalités de Shan- pe « Energie & Environnement » a ghai et de Nantongqui souhaitaient remporté le 1er prix en 2009 avec Fondé sur un principe de respect faire des visites de systèmes de un projet innovant sur l’utilisation de et de confiance mutuels et sur la transports multimodaux en France. nouvelles énergies dans les cam- vision commune de nos objectifs, Nous avons participé à la formation pagnes. L’équipe « Eco-quartier » a nous avons établi des relations coo- sur la planification et la gestion des remporté le 2ème prix en 2012 avec pératives avec quatorze établisse- transports urbains pour une délé- un projet d’entreprise de conseil

105 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

technique sur les éco-quartiers. ge d’association compétente, cré- décentralisation dans notre dévelop- L’AFCDUD a organisé sept visites de dible, engageante, dynamique, avec pement. L’AFCDUD a organisé des sites pour nos membres (atelier TGV, des convictions et une vision globa- rencontres et des visites dans ces vil- chantier de l’extension tramway T2, le de développement à long terme. les pour des délégations françaises exposition des 10 projets du Grand composées du ministère des trans- Paris, stations fantômes du métro de PARTAGE D’EXPÉRIENCES ports et d’entreprises. Ces visites ont Paris, musée des égouts de Paris, ET COOPÉRATION permis de rencontrer les décideurs, musée des Arts et métiers, mar- de connaître l’état de développement ché de Rungis, etc.), trois rencon- Le réseau de l’AFCDUD en Chine et de la planification de la ville, d’iden- tres internationales et visites à Chon- s’élargit continuellement grâce à nos tifier les besoins et les principales gqing et Shenzhen avec les autorités membres qui font le choix de retour- problématiques (politique, solution locales, les universités, les entrepri- ner travailler en Chine. Ils facilitent à innovante et formation, etc.), et de ses, sur les trois grands thèmes éco- leur tour la formation de passerelles partager les expériences et le savoir- quartier, transport vert et systèmes avec les interlocuteurs locaux appro- faire français dans ces domaines. de transports intelligents ; et des priés. Nous avons constaté dans Force est de constater que ces villes échanges thématiques sous forme de grandes villes, telles que Chon- possèdent une certaine autonomie d’atelier-métier : transport, génie civil, gqing, Shenzhen et Wuhan, des de décisions appréciable. Les urbanisme … A travers des activités besoins très prononcés en coopé- contacts ayant désormais été éta- de qualité, l’AFCDUD s’efforce de ration franco-chinoise dans le DUD. blis, à nous de savoir garder notre construire et de renforcer son ima- Nous avons adopté une stratégie de dynamisme afin de poursuivre nos actions de coopération en entrete- nant notre relation bilatérale fondée LES PARTENAIRES DE L’AFCDUD sur un désir de compréhension et de Le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE) ; confiance mutuelle. En résumé, pour L’union des chercheurs et des étudiants chinois en France (UCECF) ; Le réussir les coopérations, de notre consulat de France à Shanghai ; La mairie d’Issy-les-Moulineaux ; L’université point de vue, les éléments essentiels de Tongji IFCIM ; L’université de Shenzhen ; L’université de Chongqing, sont: compétences, réseaux, The Institute MBA d’immobilier de Bozhong ; La revue du Mass Urbain Transit compréhension, confiance, convic- (UMT) ; L’agence de développement du Val-de-Marne (ADVDM) ; L’union tion et enthousiasme. Les talents y de Maîtrise d’œuvre (UMO) ; The Sino-French architectural communication jouent un rôle clé et les membres de society (SFACS) ; L’association Tongji France (ATF) ; L’association des chinois l’AFCDUD peuvent y trouver leur à l’étranger pour la création d’entreprise (ACECE) ; France-Chine pour place. Construisons le pont pour l’environnement et l’énergie (FC2E). le succès des coopérations franco- chinoises.

106 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER Vincent Aurez Chercheur, Sciences Po/université de Beida à Pékin Jean-Claude Lévy Conseiller spécial, Délégation pour l’action extérieure des collectivités territoriales, ministère des affaires étrangères La coopération décentralisée en Chine : la diplomatie « économique » ?

Avec la multiplicité des expériences et l’adaptation souple aux spécificités des partenaires-pays, comme la Chine, la coopération décentralisée constitue un levier pour la diplomatie économique dont le potentiel mérite d’être efficacement mobilisé.

Vincent Aurez, diplômé en économie e mouvement est parfois criti- fessionnelle, le co-développement, et en philosophie, a travaillé au Cqué, au regard de ses moyens le développement économique et ministère des Affaires étrangères au limités, mais aussi de son accepta- social durable des territoires concer- sein de la Délégation pour l’action bilité par les populations donatrices. nés, sur l’appui institutionnel, la gou- extérieure des collectivités territoriales. S’il est considérable par l’ampleur vernance, etc. Faible en allocations Auteur de plusieurs études, il conduit et la diversité des actions, autant il de ressources, le volume considé- actuellement une recherche comparée est modeste concernant les finance- rable des jumelages est symptoma- France-Chine sur l’économie et ments consentis. Les projets aidés tique d’une présence des « pouvoirs l’environnement dans le cadre d’un par l’Etat (Délégation pour l’action locaux » dans la sphère diplomati- programme entre Sciences-Po Paris et extérieure des collectivités territoria- que française, affirmant une sorte l’université de Pékin. les du ministère des affaires étran- d’alternative, par rapport aux gran- gères), sur appels à projets, repré- des injonctions de la mondialisation. Jean-Claude Lévy, historien, sentent moins de 0,1% de l’aide géographe, journaliste est en charge publique au développement, mais CONQUÊTE DES MARCHÉS de l’action extérieure des collectivités portent en revanche une experti- ET DÉVELOPPEMENT territoriales entre la France et la Chine se très qualifiée pour la connais- au ministère des Affaires Etrangères. Il sance des contextes locaux, à effet Cette alternative n’est pas étatique, vient d’être chargé par Pascal Canfin, de levier et de cohérence économi- par sa diversité elle est étroitement secrétaire d’Etat à la Coopération, que, ce qui est très appréciable ! liée aux territoires et aux institutions d’une mission de réflexion et de représentatives qui la portent. Dans proposition sur l’économie circulaire. Ces projets de coopération, inscrits l’ensemble, y compris dans l’Afrique dans la durée, portent généralement subsaharienne, malgré une décoloni- sur l’éducation, la culture et l’accès sation pas toujours aboutie (à tout le au livre, la santé, la formation pro- moins dans les esprits), la coopéra-

107 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES ARCHITECTE DENIS DESSUS / RÉGION RHÔNE-ALPES

Le Pavillon Rhône-Alpes a accueilli plus d’un million de visiteurs durant l’exposition universelle de Shanghai en 2010.Situé en plein cœur de la ville, sur la rive de Puxi, le bâtiment éco-construit accueille la boutique « Un air de France à Shanghai », une salle de conférence, le restaurant école Institut Paul Bocuse, et les bureaux d’ERAI (Entreprise Rhône-Alpes International).

tion décentralisée commence à jouer légié de l’accès aux marchés, grâce toires ciblés et d’autre part, en Chine un rôle diplomatique de proximité. à la compétence d’expertise territo- plus qu’ailleurs, la recherche de nou- L’ampleur de l’action extérieure des riale des collectivités (y compris au- veaux marchés, ou la recherche d’in- collectivités françaises, la place que delà de la Chine proprement dite), vestissements chinois en France. l’Afrique y tient, concourt d’ailleurs à associées plus ou moins facilement Les agences de développement sont faire de cette action un cas d’espè- aux actions extérieures des différents mobilisées dans ce sens, en relation ce à valeur relativement exemplaire départements ministériels (géné- avec les fonctions, les compéten- au sein des relations internationales. ralement membres de la CNCD). ces endogènes et les besoins de La coopération décentralisée fran- maîtrise d’ouvrage des collectivités. co-chinoise est plus instructive que DES ACCORDS DE d’autres (effet de masse, d’attractivi- COOPÉRATION CLAIRS Depuis plus de vingt ans, la portée té et d’influence du territoire chinois) institutionnelle et politique de l’action quant aux facteurs économiques qui Un double mouvement porte la coo- des collectivités en Chine est sans y prennent une place de plus en plus pération décentralisée en Chine : cesse légitimée, réaffirmée (les élus décisive. En témoigne l’évaluation de d’une part, comme ailleurs, les locaux y font l’objet d’une hospitalité la coopération décentralisée franco- valeurs humaines, culture, éduca- remarquable que les crises diploma- chinoise, avril 2011, DGM, (cf.www. tion, université, recherche, touris- tiques n’ont jamais affectée). Plus diplomatie.gouv.fr/CNCD). A partir de me, santé, développement durable, récemment, cette action a engendré celle-ci, on peut observer que la coo- gouvernance territoriale et expertises des résultats économiques mesu- pération devient aussi un mode privi- multisectorielles appliquées aux terri- rables en termes d’effet de levier.

108 La légitimité de ce double mou- vement est incontestable, mais il y aurait quelque angélisme à croi- re qu’elle pourrait trouver faci- lement les niveaux d’interven- tion les plus réciproquement avantageux pour les deux parties.

DES PROCÉDURES DE COOPÉRATION

Dans le champ de l’action économi- que, les collectivités des deux par- ties agissent en toute légitimité en tant que donneur d’ordre et maî- tre d’ouvrage (par exemple, via les agences d’urbanisme), à l’intérieur comme à l’extérieur de leur système de production, de consommation et d’échange local, mais cette légitimité active, rémunérée en France, ne l’est pas forcément en Chine, voire se

trouve parfois contestée à l’exporta- D.R. tion par les opérateurs administratifs La Région Ile-de-France a été à l’origine d’une coopération scientifique avec la ville de et économiques. Mais le « métier » Pékin, pour créer un dispositif de surveillance de l’air. d’élu n’est pas dans l’import-export !

Les accords de coopération sont DÉFINIR ET RÉFLÉCHIR ché. La reconstruction industrielle clairs, impliquant les savoir-faire des deux pays y est un enjeu de pre- de maîtrise d’ouvrage, les dimen- Les collectivités territoriales françai- mière grandeur de part et d’autre, et sions de développement durable, ses (environ 70 jumelages) coopè- les pouvoirs locaux ne sauraient en d’aménagement urbain et rural, rent amicalement avec la Chine sur cela ni être instrumentés ni exclus. d’aide aux PME. Les procédures une grande diversité de sujets : les C’est pourquoi l’exemple chinois de coopération le sont moins : il y écoles, la culture, le tourisme dura- et les tensions qui y sont repéra- a problème à l’échelle des niveaux ble (la Lozère et le Guizhou), l’uni- bles devraient conduire à s’interro- administratifs d’intervention qui se versité, la recherche, plus récem- ger non pas sur la légitimité, mais situent au plan micro-économique, ment l’économie, les PME/PMI sur le rôle de la maîtrise d’ouvra- selon des partenariats enchevêtrés (Rhône-Alpes/Shanghai), la filière ge, sur les niveaux d’intervention (entre élus pour un jumelage, entre équine (Pays-de-Loire/ Shandong), des collectivités, ainsi que sur les services administratifs pour certai- l’environnement (Ile-de-France / modalités d’intervention (notam- nes actions, entre opérateurs pour Pékin), etc. Ces actions extérieures ment les cahiers des charges…). d’autres) et d’échelles variables. se déroulent à la marge, limitées, Ils correspondent aux compétences mais certainement significatives. UNE SORTE locales des collectivités, sans homo- DE LABORATOIRE… thétie avec les politiques macro-éco- L’action économique des collecti- nomiques des Etats, sans que soient vités territoriales, en direction des Quelle est la rémunération de l’ex- toujours précisées les compétences PMI, est désormais partie prenante pertise territoriale ? Quelle est sa décisionnelles et financières de cha- de notre diplomatie : le développe- spécificité en regard avec des formes cun dans les accords de coopération. ment durable y est en tout cas affi- plus classiques de la promotion des

109 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

en ce qui concerne leur action exté- rieure, en position d’assistance à maîtrise d’ouvrage vis-à-vis de leurs partenaires. C’est pourquoi, à l’inté- rieur comme à l’extérieur du ministè- re des affaires étrangères, des coor- dinations accrues et des accords conventionnels s’imposent afin de réévaluer la position de la coopéra- tion décentralisée, sa valeur ajou- tée, sa rémunération et la part qu’y prennent toutes les collectivités, conformément à tous les niveaux d’organisation où elle se déroule.

Compte tenu de la diversité des ter- ritoires et des niveaux d’organisation concernés, tandis que le dispositif DAECT/MAE/CNCD fonctionne de

URBA 2000 manière convenable (cf. le récent rap- port de la Cour des comptes), l’idée La Région des Pays de la Loire et la Région Basse-Normandie ont initié depuis de nombreuses années un partenariat privilégié avec la Chine, avec le Fujian pour la d’une sorte de leadership des uns ou Basse-Normandie et le Shandong pour les Pays de la Loire. des autres, vers l’international, res- te encore relativement simpliste, mal arrimée, si l’on considère la diversité des collectivités, ou même la géogra- PME/PMI et du soutien au commer- interrogations et recommandations phie de la construction européenne. ce extérieur ? Comment rémunérer peuvent être retenues par ailleurs. la dépense exogène des agences En revanche, il serait souhaitable de de développement économique ? FAVORISER favoriser une meilleure correspon- Quid du fonctionnement des quinze UNE COORDINATION dance et une coordination appro- bureaux de représentation en Chine ? APPROPRIÉE priée entre les actions extérieures de développement incluant les dimen- En ce qui concerne la Chine, mais De façon générale, la diplomatie sions financières, économiques et certainement au-delà, des ques- économique exercée à l’échelle des sociales telles qu’elles sont générées tions relèveront de plus en plus collectivités territoriales est devenue à l’échelle des SPL et les initiatives de notre dialogue stratégique au une réalité et un facteur de mutation de conquête des marchés, afin que prorata de l’importance des pou- de l’action extérieure des « pouvoirs la légitimité de l’action économique voirs locaux dans la mise en locaux ». Elle se déroule nécessai- et diplomatique des collectivités terri- œuvre du développement durable. rement dans le triangle systémique toriales, désormais avérée, devienne L’exemple de la Chine et du mar- du développement local et des plus aisément et institutionnellement ché chinois n’a aucune valeur de systèmes productifs locaux (SPL). praticable (ministère des affaires modèle. Il a retenu tout particuliè- Elle fait l’objet d’investissements étrangères et ministère des finances rement notre attention à cause de modestes et d’expertises généra- et autres départements ministériels). l’échelle considérée et parce qu’il lement non rémunérées, mais joue joue un rôle de miroir avec d’autres un rôle d’effet de levier significatif. Le cadre de la commission nationale pays émergents. Il constitue surtout de coopération décentralisée est cer- un cas d’école, une sorte de labo- Il est indiscutable que les collectivi- tainement le lieu le plus adéquat pour ratoire dont certaines observations, tés territoriales sont irremplaçables aller dans ce sens.

110 URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES <

DOSSIER Alain Lecomte Président de la troisième section aménagement durable des territoires, Conseil général de l’environnement et du développement durable Christian Levy Inspecteur général de l’administration du développement durable Coopération institutionnelle et enjeux économiques

La volonté de la Chine de promouvoir un nouveau type d’urbanisation « est un projet compliqué mais également une solution aux écarts ville/campagne », a estimé LI Keqiang, Premier ministre chinois. C’est une opportunité pour la France de faire valoir son savoir-faire en matière de développement durable.

Alain Lecomte, a occupé plusieurs es nouvelles autorités chinoises par les accords de l’OMC ; il est par postes de responsabilité en Lont confirmé qu’elles ne souhai- ailleurs considéré comme stratégi- administration centrale et en cabinet taient pas limiter l’urbanisation, mais que pour certains secteurs (énergie ministériel dans les domaines de entendaient s’en servir comme fac- par exemple). Ainsi, la Chine a adop- l’habitat et de l’urbanisme. teur de transformation économique té, en décembre 2010, une loi sur de la Chine. Ainsi LI Keqiang, Pre- l’innovation domestique « indigenous Christian Lévy, a contribué aux mier ministre chinois, a-t-il signé en innovation products » prévoyant que rapports sur la ville durable à novembre 2012 un long texte dans les entités publiques devaient ache- l’international (2012) et sur la mise en Le Quotidien du peuple sur le rôle ter uniquement des produits déve- place d’un institut de la ville durable de l’urbanisation comme « moteur loppés par la Chine et dont le pays (2013). Il a été notamment attaché essentiel » de la future croissance possédait la propriété intellectuelle. commercial à Pékin, directeur de chinoise: « l’urbanisation ne signi- l’urbanisme de la ville de Lyon et fie pas simplement augmenter le directeur départemental et régional nombre de citadins ou agrandir les 1 La réforme du hukou mais aussi la refonte de la propriété collective des terres sont tant, c’est de réaliser une transi- considérées comme des étapes essentielles tion complète du statut de rural à pour une urbanisation durable. Une nouvelle celui d’urbain en termes de struc- politique est à l’essai. Elle pourrait être décisive dans la réussite de la transition ture industrielle d’emplois, de mode urbaine chinoise : début janvier 2013, la de vie et de sécurité sociale »1. première directive prise par le nouveau Comité central du parti est de répertorier et de procéder à l’enregistrement du droit d’usage Le développement urbain durable , des terres en zone rurale, ce qui est vu comme un préalable à un possible accès à la relevant majoritairement de mar- propriété des ruraux. Ils pourraient ainsi mieux ché publics, n’est pas concerné négocier leur installation en ville.

111 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES URBA 2000

Le nouveau défi chinois : maîtriser l’augmentation du nombre de citadins, agrandir les villes dans le respect de l’environnement.

UN CONTEXTE SPÉCIFIQUE pas rédhibitoires, mais nécessitent (gestion des eaux et des déchets, un cadre de coopération solide. transports urbains, intermodalité des En l’absence de localisation de transports de voyageurs, efficacité leurs centres de technologie dans le PERSPECTIVES énergétique des industries et des pays, les entreprises étrangères se bâtiments, réseaux de chaleur, éclai- voient donc contraintes dans l’ac- De nombreuses opportunités exis- rage public, systèmes de surveillan- cès au marché chinois. Pour gagner tent dans les domaines de l’urba- ce environnementale, etc.), notam- des appels d’offres locaux dans les nisme, des services collectifs et de ment pour les «villes moyennes». secteurs stratégiques, elles doivent la recherche. Il s’agit de domaines Par ailleurs, nos entreprises (comme obligatoirement constituer une joint dans lesquels l’expertise française les entreprises allemandes et amé- venture (où elles seront minoritaires) est grande, nos grandes entrepri- ricaines) ont de l’avance dans les et intégrer une part substantielle de ses y occupent des places de lea- «systèmes intelligents». Or, il est à recherche et développement d’ori- ders mondiaux, mais nos entrepri- prévoir une demande pour des villes gine locale. Il en découle des ris- ses de taille intermédiaire (ETI), très durables numériques (smart cities), ques évidents de perte de contrô- dynamiques en France, n’ont pas dans lesquelles les services devront le de telles entreprises, une fois que toujours la taille critique pour sup- être interopérables, et une appéten- le transfert de savoir-faire aura été porter les investissements liés à l’im- ce des autorités pour les nouvelles estimé comme suffisant, que ce plantation de long terme en Chine technologies. Le secteur du dévelop- soit sur les marchés intérieurs ou malgré des exemples de réussites à l’export. Les exemples de réus- prometteuses2. Globalement, l’of- site des groupes français ou alle- fre des entreprises françaises cou- 2 A titre d’exemple les domaines de la gestion intégrés des éclairages publics urbains ou de mands en Chine démontrent tou- vre une grande partie des besoins la surveillance de la qualité de l’air ont donné tefois que ces contraintes ne sont chinois en matière de ville durable lieu à des réussites d’ETI françaises.

112 pement urbain durable est ainsi por- bilité de ce savoir-faire français en urbain durable » par le Comité Stra- teur, à terme, pour la France ; il faut, Chine (pas uniquement dans ce tégique des écos- industries (COSEI) en particulier, anticiper la demande pays, d’ailleurs) qui, jusqu’à pré- - Groupe de travail « Groupe d’ac- pour une offre globale de services. sent, n’était pas considéré comme tions international transversal » (GAIT une filière cohérente. Sa mise en 4) et porté par Ubi France organisant AMÉLIORER LA VISIBILITÉ valeur peut désormais s’appuyer sur et rendant lisible l’offre de l’ensemble DE L’OFFRE FRANÇAISE l’action de plusieurs ministères. Par du savoir-faire français en ce domai- ailleurs, la convergence de l’action ne, notamment celle des entrepri- En dépit de ses qualités, l’offre fran- des structures publiques d’appui à ses de taille intermédiaire ; la valori- çaise n’est pas perçue comme unie l’exportation (Direction générale du sation du savoir-faire français dans le et projette, de ce fait, une image de Trésor, Ubi-France notamment) et domaine des services urbains par la marque moins solide que celle de de celle des organismes impliquant mise en place de « démonstrateurs » nos concurrents. Elle doit donc être les entreprises (Pôle Advancity, l’as- ou vitrines en France (action menée identifiée et perçue par les autorités sociation des éco-entreprises de dans le cadre des investissements chinoises sur des critères de différen- France (PEXE), l’association fran- d’avenir) ; la mise en place en 2014 ciation par rapport aux concurrents3. çaise des entreprises privées (AFEP) d’une « maison de la ville durable » Les entreprises françaises ont pour- etc., renforce la visibilité de notre à Pékin reposant sur l’ association tant de réels atouts à faire valoir : offre économique à l’international. des architectes français à l’export une exigence et des standards éle- (AFEX) et le Centre scientifique et vés en matière de qualité des servi- UN RENOUVEAU technique du bâtiment (CSTB) pré- ces et d’infrastructures publiques ; PERCEPTIBLE sents de longue date en Chine, et l’existence de grands groupes inter- soutenue par un financement du nationaux dans les domaines de la Pour ce qui concerne plus particuliè- (Fonds d’études et d’aide au sec- production d’énergie et des servi- rement la Chine, le renouvellement en teur privé (FASEP) va dans le sens ces urbains ; un savoir-faire recon- avril 2013 de l’accord interministériel d’une meilleure lisibilité des compé- nu dans le domaine de la ges- dans le domaine du développement tences françaises dans les domaines tion déléguée de services urbains ; urbain durable fournit un cadre ins- « bâtiment et conception de la ville » ; une présence en Chine de longue titutionnel à la poursuite des actions l’organisation d’actions groupées, date pour certaines d’entre elles. françaises. Un renouveau est d’ores sur le terrain, des entreprises fran- Plusieurs actions récentes visent à et déjà perceptible avec la mise en çaises, coordonnées par Mme Mar- porter remède au manque de visi- place d’un portail « développement tine Aubry, représentante spéciale du ministre des Affaires étrangères pour le partenariat avec la Chine et la signature, en octobre dernier, d’un procès-verbal relatif au projet fran- co-chinois de nouvelle ville durable sur le territoire du Grand Wuhan. La poursuite dans la durée et l’inten- sification de ces actions seront indis- pensables pour que les entreprises françaises parviennent à occuper, sur ce créneau du développement urbain durable, la place à laquelle elles peuvent prétendre. ANAÏS GADEAU/DICOM/VILLE DE LILLE 3 cf. le rapport « contribution des acteurs Le 25 octobre dernier, Mme Martine Aubry recevait à Lille, une délégation chinoise. publics et privés à la promotion de la ville Cette rencontre a permis la signature d’un projet de ville durable dans la région du durable à l’international », 22 novembre Grand Wuhan. 2012-CGEDD

113 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

DOSSIER

Etienne Tricaud Président Groupe AREP

Les défis de la ville chinoise

Etienne Tricaud, ingénieur en chef La Chine et la France sont deux pays de tradition (X 80, ENPC 85) a commencé sa urbaine très ancienne. Deux pays où les usages et carrière comme ingénieur structure la culture ont façonné la ville, en même temps que dans les bureaux d’études Ove Arup &Partners (Londres) et RFR (Paris). le cadre bâti a façonné les individus et les usages. Chef de projet à la Sncf puis directeur Deux pays où la croissance urbaine récente, par de l’agence des gares à partir de son échelle et sa brutalité, a conduit à de nouvelles 1993, il prend notamment en charge, formes de développement de la ville. le projet de restructuration de la gare Montparnasse. Ce projet sert de laboratoire pour fonder une équipe, une démarche et un vocabulaire e parallèle fait également appa- Le premier défi de la ville chinoi- architectural qu’il développera dans de Craître des différences majeu- se, c’est donc le rythme effréné de nombreux programmes. Il fonde AREP res, essentiellement dues aux tem- sa croissance. D’énormes flots de avec Jean-Marie Duthilleul en 1997. poralités très différentes de ces population issus du monde rural phénomènes aux deux extrémi- viennent se fixer en ville. Parfois, la tés du continent eurasiatique. première installation est très pré- caire, comme pour ces travailleurs LA DENSIFICATION BRUTALE migrants qui se déplacent pour de DU TISSU URBAIN CHINOIS longues périodes loin de leur famille, et qui fournissent aux chantiers et La densification progressive du tissu usines les énormes quantités de urbain que l’on a connue en Fran- main d’œuvre dont ils ont besoin. ce depuis le 18ème siècle n’a vrai- ment débuté en Chine que dans les Quand c’est de façon plus pérenne, années 1990. De même, la formi- les nouveaux citadins emménagent dable expansion de la ville contem- dans des ensembles qui comptent poraine, liée au développement des souvent plusieurs milliers de loge- transports mécanisés, s’est mise ments. Comme dans la France de en place progressivement en Fran- la reconstruction, il faut construi- ce depuis la fin du 19ème siècle, alors re vite et beaucoup. Un architec- qu’elle s’est concentrée en Chine te chinois à la tête d’une agence sur seulement quelques décennies. de 250 personnes me confirmait

114 AREP

Etude de développement d’un nouveau district entre les villes de Shenyang et de Benxi (sept. 2013).

récemment qu’il construisait chaque sés appelés « zones », entre les- A l’intérieur d’un grand maillage rou- année en moyenne 1,5 million de m2 ! quelles on circulera de plus en plus tier conçu et construit par la collecti- vite, ce mode de fabrication de la vil- vité s’organisent ainsi des morceaux DES DYSFONCTIONNEMENTS le s’est appliqué en France depuis de ville, qui peuvent soit reproduire HYPERTROPHIÉS les années 50. En Chine, comme un modèle stéréotypé (c’est hélas exacerbé par la croissance frénéti- souvent le cas d’opérations de loge- Sous l’effet de cette expansion que des villes, ce zoning en accroit ment, façonnées par la recherche de extrêmement rapide, les dysfonc- les dysfonctionnements : fragmen- densité, les règles d’ensoleillement tionnements de la ville contempo- tation du tissu urbain, appauvrisse- et la répétitivité constructive), soit au raine semblent hypertrophiés. En ment de l’espace public, augmenta- contraire ouvrir à des formes urbai- premier lieu, la congestion des sys- tion des besoins de mobilité toujours nes originales (par exemple grâce tèmes routiers devient une ques- insatisfaits… Autant d’éléments qui à la place donnée à la présence de tion majeure. De nombreuses villes vont à l’encontre d’une mission pre- la nature, ou grâce à une réflexion ont beau annoncer fièrement qu’el- mière de la ville : celle de mixer les approfondie sur l’imbrication des les réalisent leur troisième, quatriè- activités et d’intégrer les populations. programmes et l’exploitation de la me ou cinquième périphérique, l’ac- 3ème dimension de la ville, dans un cession à la voiture individuelle croît En germe dans la planification ter- aménagement urbain où les espaces plus rapidement que les réseaux ritoriale, ce phénomène se trouve publics des niveaux souterrains ou d’autoroute (à Pékin, 1000 voitures renforcé par le mode de production aériens acquièrent un rôle majeur). de plus sont déversées chaque jour actuel de la ville chinoise. Selon une dans la circulation !). Et les réseaux pratique très répandue en Asie du RÉFLÉCHIR À UNE VILLE de métro peinent à endiguer les Sud-est, l’aménagement de larges PLUS DURABLE besoins de déplacement quotidien. secteurs est délégué à des opéra- teurs, à la fois aménageurs et pro- Quelle que soit la réussite de tel- Autre dysfonctionnement, rencontré moteurs. Ceux-ci, tout en s’inscri- le ou telle expérience locale, c’est également dans nos villes françai- vant dans un cadre règlementaire, le cadre même de production de ses ; le développement de grandes négocient avec la puissance publi- la ville qui est en cause quand on zones mono fonctionnelles. Issu de que la nature des programmes, et in analyse globalement ses dysfonc- théories imaginant que la ville idéale fine contribuent fortement à donner à tionnements. Et c’est ce cadre qui est celle où l’on a optimisé chacu- la ville et à l’espace public leur forme est aujourd’hui questionné dans la ne des fonctions urbaines (travailler, à l’échelle du quartier, c’est-à-dire à réflexion sur la ville durable, dans de habiter, acheter, se distraire, se culti- l’échelle de plusieurs centaines de nombreux pays à travers le monde. ver…) dans des territoires spéciali- milliers, voire de millions de m2 bâtis. En France, nombreux sont ceux qui

115 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

Trop longtemps réduite à un exercice de démolition aveugle et de recons- truction amnésique, l’intervention sur les tissus constitués des villes peut prendre un autre chemin, com- me en témoignent des opérations récentes à Pékin ou à Shanghai.

Dans ce contexte, que peut appor- ter l’intervention de concepteurs français ? Ces derniers ont été, dans un premier temps, convo- qués pour le prestige de la mar- que France, pays de la haute cou- ture et de la qualité de vie. On leur demandait de l’architecture intelli- gente, belle, porteuse de modernité, acculturée à la civilisation chinoise mais « française ». Aujourd’hui, on leur demande de l’urbanisme. L’heu- re n’est plus à dessiner Washington, AREP Rabat ou Hanoï, comme le firent nos Projet de quartier de logements à Dashilan (Pékin, Chine) - Perspective de nuit sur prédécesseurs. Non que ces expé- les logements (nov. 2012). riences n’aient pas fait leur preuve !

Ces plans d’aménagement ont su dénoncent l’essoufflement du modè- tions posées aux consultants étran- combiner la force d’un modèle et l’in- le de planification urbaine dévelop- gers en témoigne. En forçant un peu telligence des situations. Le bon fonc- pé dans la deuxième moitié du 20ème le trait, on pourrait dire que, s’il y a à tionnement et la qualité de leurs espa- siècle. Les études menées dans le peine 10 ans, c’était aux architectes ces urbains sont reconnus par ceux cadre de la consultation du Grand qu’on s’adressait pour concevoir des qui les pratiquent encore aujourd’hui. Paris, notamment, ont pointé ses iconic buildings censés porter les L’heure est à la réflexion partagée sur carences, et esquissé d’autres attributs de la modernité des villes la ville durable, qui n’a pas de modèle méthodes pour approcher l’aména- chinoises, c’est plus fréquemment unique. Il y a des expériences, notam- gement du territoire métropolitain. aujourd’hui les urbanistes qui sont ment française, d’éco-cités ou d’éco- Ces études rejoignent les recherches sollicités, pour réfléchir au devenir des quartiers, qui constituent autant de conduites à travers le monde sur de quartiers ou des territoires urbains. modèles dont on peut tirer des ensei- nouveaux modèles de croissance gnements. Mais ces modèles ne peu- urbaine plus orientés vers la quali- LA PRISE EN COMPTE DE vent que constituer des références, qui té de vie, plus respectueux des res- LA COMPLEXITÉ URBAINE doivent être confrontées à un contex- sources naturelles, plus équilibrés. te dans lequel le projet va s’ancrer. Regroupées sous le nom de « ville Il faut y voir l’effet d’une prise en durable » ces recherches font écho compte de la complexité et de la URBANISME CONTEMPORAIN aux sensibilités croissantes de nos spécificité des questions urbaines À LA FRANÇAISE ? contemporains aux préoccupations même si la prise de conscience n’est sociétales et environnementales. pas généralisée aujourd’hui. Et, dans L’urbanisme contemporain en Fran- le même mouvement, la transforma- ce a sans doute particulièrement La Chine n’est pas à l’écart de ce tion de la ville historique devient à développé cet élément de métho- mouvement. L’évolution des ques- son tour un sujet de préoccupation. de, qui s’appuie sur l’utilisation du

116 contexte pour créer les conditions enserrent des quartiers aux ruelles préhension du contexte géogra- d’implantation des activités humai- étroites (Hutong), lieux de convivia- phique, environnemental, social et nes. Un contexte, un site, un « déjà lité et de vie communautaire, et aux culturel, la réflexion sur la ville dura- là » qui peut être naturel, rural ou maisons à un seul niveau centrées ble se nourrit aussi de l’analyse des urbain selon le cas, mais qui pré- sur une cour carrée plantée d’ar- relations entre l’évolution des techni- sente toujours des caractéristiques bres (Siheyuan), qui forme l’espace ques et l’évolution des usages. A titre et un potentiel de situation sur lequel de distribution à ciel ouvert de l’habi- d’exemples : la mécanisation des s’appuyer pour favoriser l’émergen- tation familiale. Cette structure a été transports qui a transformé la mobi- ce d’un aménagement durable. fortement impactée par la puissan- lité urbaine, ou, aujourd’hui, le numé- ce et la rapidité des évolutions urbai- rique qui est en train de changer les Ce contexte est d’abord géogra- nes des années 80 et 90. La forme comportements. Il pousse les cita- phique et environnemental. Le site s’est appauvrie : les tours de la ville dins à une multi activité simultanée dans lequel s’implante un nouveau contemporaine se sont posées com- qui à son tour modifie leurs atten- développement urbain est un territoi- me les pièces d’un échiquier géant tes dans l’organisation des espaces re façonné par son relief, par la pré- sur les cases de la ville traditionnelle. publics. Et, demain, les techniques sence de l’eau et de la nature, par de contrôle du confort environne- son climat, son ensoleillement et ses mental vont transformer l’approche vents … et par les activités humaines des espaces ouverts ou bâtis. La qui nous ont précédés. Cette analy- ville durable, chinoise ou française, se d’un territoire fait d’une certaine sera aussi la ville d’un nouvel équi- manière écho à la tradition chinoise libre entre mobile et immobile, entre de Fengshui où les logiques d’implan- virtuel et réel, entre qualité de vie et tation des activités humaines sont intelligence du métabolisme urbain. d’abord issues d’une compréhension profonde des lieux et des paysages. Ainsi la valeur ajoutée française dans la réflexion sur la ville chinoise dura- Ce contexte est aussi social et cultu- ble se situe-t-elle à deux niveaux : rel. On construit une ville pour des tout d’abord, même si certains gens dont les comportements et AREP aspects de la planification territoriale les usages, dont les relations inter- Pékin, l’axe impérial - projet de requa- à la française ont montré leurs limi- lification du site: du site olympique au personnelles, même si elles évo- tes, la France a développé un arsenal nord, aux confins du sud sur 23 km. luent sous l’effet de la mondialisa- d’outils institutionnels, réglementai- tion, restent très liées à une culture res, méthodologiques ou opération- donnée dans une société donnée. Mais si la matrice physique a dispa- nels pour « faire la ville » (développés ru, la mentale demeure. Cette struc- dans certains articles de ce numéro) COMPRENDRE LE CONTEXTE ture urbaine forgée par les siècles a qui s’avèrent extrêmement pertinents SOCIAL ET CULTUREL contribué à façonner la manière d’être et efficaces, et en partie transposa- DE LA VILLE du Pékinois d’aujourd’hui. L’attention bles. Au-delà, si les urbanistes fran- portée aux orientations cardinales, la çais peuvent proposer à leurs confrè- Dans les subtiles dialectiques entre sensibilité aux éléments naturels, la res chinois de partager une approche les usages et la forme de la ville, subtile graduation spatiale du public sensible et raisonnée de la ville dura- entre les mentalités et la structure au privé, la relation au montré et au ble, c’est peut-être parce qu’elle se spatiale de l’environnement bâti, la caché dans la gestion des parcours, nourrit de la longue tradition urbaine pensée et les modes de vie qui ont sont autant d’éléments présents de la France, de la compréhension généré la forme demeurent quand la dans l’inconscient collectif Pékinois, de nos réussites comme de nos forme disparait. Prenons l’exemple et qui continuent à déterminer la rela- erreurs, et sans doute d’un attache- de Pékin. La structure traditionnel- tion de l’individu à l’espace, et de ment particulier aux valeurs de le de la ville est constituée d’un lar- l’individu à l’individu dans l’espace. citoyenneté et de sociabilité dont la ge maillage de voiries primaires qui Profondément ancrée dans la com- ville est porteuse.

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DOSSIER LI Xiansheng Secrétaire général adjoint du Parti Communiste Chinois de Hainan, Ancien premier vice-gouverneur de la Province du Hubei, chargé du Grand Wuhan

武汉城市圈: 中法城市可持续发展合作的成功样本 李宪生

湖北省与法国有着长期友好的交往历史。1964年中法建 交后周恩来总理和戴高乐总统商定,将湖北的省会城市武 汉列为中法两国合作交流的基地城市.

如今,两位伟人的愿望已变成现 我们和盛马克先生一起,在波尔 实。中国改革开放以来,湖北与 多市受到了Alain Juppé先生的热 法国在经贸合作、文化交流、政 情接待,他向我们介绍了法国在 府交往等方面来往密切,湖北省 电动交通工具和可持续交通出行方 与阿基坦大区结为友好省区,武 面的各项政策。中国驻法大使馆将 汉市与法国波尔多市结为友好城 访问成果及时报告中国政府,直接 市。2004年初,胡锦涛主席应邀 推动了新能源汽车在中国的推广。 访问法国波尔多市,曾高度评价该 市与武汉的合作,称之为中法地方 2002年我担任武汉市市长后, 政府友好交流合作的成功典范。 在推动双方经贸交往的同时, 以武汉——波尔多友好城市为平 我在湖北省工作期间,见证并 台,推动双方在教育、文化、 直接推动了湖北与法国全方位 体育、建筑设计、城市文化遗 的合作与交流,并与一批法 产保护、环保等各个领域的交 国朋友结下了深厚的友谊。 流。在此特别要感谢阿兰朱佩 先生,他在推动武汉——波尔多 记得我第一次访法是在1999年,当 友城交往中发挥了重要作用。 时我担任武汉经济经济技术开发区 管委会主任。武汉经济技术开发区 在武汉,法国设计师设计的建 是以中法最大合资项目神龙汽车( 筑、法国艺术、法国时尚品牌、 东风汽车公司与标致雪铁龙公司建 法式大餐随处可见。现在,湖北 立的合资企业)为基础成立的以汽 省已成为中法合作最具活力的地 车制造为主导产业的工业园区。 区、法国在华投资密度最大的地 区、中国汇聚法语人口和拥有在 这次访问期间,在盛马克先生、 居法国人最多的地区,在中法全 米歇尔先生的陪同下,重点考察 面战略伙伴关系中占有特殊地位。 了法国PSA集团的电动汽车项目。

118 PHOTOS JACQUES SAINT-MARC

Jacques Saint-Marc和李宪生 Yves Cousquer和李宪生

2007年底,我调任湖北省委常委、 Idrac女士邀请我赴法国考察可持 情况下,选择大武汉作为示范区. 常务副省长,分管推进武汉城市 续规划的理念和方法,并请盛马克 圈建设的工作。武汉城市圈是以武 先生组织访问。7月,我带领湖北 2010年4月13日,中国国家住建部 汉市为中心,由武汉及周边100公 省政府考察团访问法国,正式开启 同意将武汉城市圈作为中法城市 里范围内的黄石、孝感、鄂州、黄 了武汉城市圈与法国在城市可持续 可持续发展合作协议试点区域。 冈、咸宁、仙桃、潜江、天门9市 发展领域的合作。这次访问期间, 在双方共同努力下,这年的4月30 构成的区域经济联合体。这一区域 考察并详细了解了大巴黎规划方 日,在法国总统萨科奇访华期间, 是湖北产业和生产要素最为密集、 案、巴黎地铁无人驾驶的14号线、 时任湖北省省长李鸿忠与时任法 最具活力的地区,以占全省三分之 巴黎Isseane垃圾处理厂、卢浮宫 国国务部长兼生态、能源、可持 一的土地面积和一半的人口,贡献 及其周边地区空调系统、里昂大型 续发展与海洋部部长让-路易· 了全省约三分之二的生产总值。 公交枢纽、里昂Part-Dieu站改造 博洛,代表双方在上海签署了鄂 项目及化工谷等一大批项目,访问 法城市可持续发展合作意向书。 就在这一年,中国政府批准武汉城 间歇,我们还与法国生态能源部部 市圈为全国资源节约型和环境友好 长、巴黎省和里昂大区的副区长以 双方商定,将武汉城市圈作为 型社会建设综合配套改革试验区。 及里昂市长Gérard Collomb,、受 中法开展城市可持续发展和环 大武汉地区需要统筹采纳实施这一 访的企业家和企业员工等进行了深 境领域合作的示范地区,在 系列新的规划政策和理念。也是在 入交流。在此,我特别要向邀请并 城市规划、交通组织、建筑节 这一年的11月26日,法国生态、 接待我们访法,且不断给予我们支 能、新型建材、环保等领域。 可持续发展及国土整治部与中国建 持的Idrac女士表达诚挚的感谢。 设部签署了《中法城市可持续发展 合作可以通过不同的形式进行: 合作框架协议》。这一协议是对于 这次访问之后,湖北省与法国生 高层互访和技术交流; 同一天发表的中法两国共同抵抗气 态能源和可持续发展部、法国驻 高校提供自发和持久的 候变化宣言的进一步落实。协议明 华大使馆及开展了密切合作,共 教育,实习或研究访问; 确双方将选择若干快速发展的中国 同推动双方在武汉城市圈的合 围绕共同兴趣,尤其在国 城市,作为中法城市可持续发展合 作上升为国家层面的战略合作。 土规划与管治方面,组 作的示范城市。在此背景下,湖北 织学术研讨会和工作组. 省与法方均对在武汉城市圈开展城 大武汉示范区 市可持续发展合作表达了强烈的愿 经过四年多的努力,湖北省政府认 望。同时,我个人也表达了对于大 2010年2月1日,中法框架协议领 为,双方围绕城市可持续发展,在 武汉都市圈成为该试验区的愿望, 导小组的两位主席何兴华先生和 以下方面开展了卓有成效的合作。 并告知相识已久的盛马克先生。 Yves Cousquer先生一起,在两位 部长——中方的仇保兴先生和法方 1、集中双方专家智慧编 2009年,法国外贸部长Anne-Marie 的Jean-Louis Borloo先生出席的 制出台了《大梁子湖生态

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法国驻华大使馆合作,利用胡 锦涛总书记访法及法国专家组 来鄂参与大梁子湖生态旅游度 假区规划编制工作的时机,举 办了中法城市可持续发展论坛暨 武汉城市圈投资项目推介会。

国家住建部、国家发改委和湖北省 政府相关领导,法国驻华大使馆、 法国驻武汉总领事馆相关人员、法 方专家,以及中法企业代表共260 余人出席了论坛,其中法国有140 多位参会者,75家法企。在Mayet 先生 对工作室成果作出展示之 后,中法专家围绕城市可持续发展 和武汉城市圈“两型”社会建设,

JACQUES SAINT-MARC 在城市规划、建筑节能、交通建 Pierre Mayet和李宪生 设、水环境治理、城市垃圾处理、 产业发展等方面进行深入探讨。

旅游渡假区总体规划》。 武汉城市圈九市代表分别介绍 在« FASEP »资金的支持下, 了拟开展合作的项目,并与法国 中方提议将梁子湖及其周边区域作 城市可持续发展(简称DUD) 企业、专家进行了友好互动。 为进行整体规 划合作的首要示范区. 方案与战略工作室投入运 论坛举办期间,法国世界报等媒 转并由中法专家共同合作。 体专门对此次活动进行了报道, 为了务实推进中法城市可持续发展 2010年起,法国城市2000协会主 进一步扩大了武汉城市圈在世界 合作,经过多次沟通,双方同意将 席皮尔·马耶先生带领10余名法 范围的知名度。受此影响,美 大梁子湖生态旅游度假区总体规划 方专家组成的专家咨询组,与中方 国、德国、韩国等驻华大使馆都 作为合作的启动项目。并将其称 专家混编为三个小组,分头开展研 派出高级代表来湖北洽谈,寻找 为“城市可持续发展(简称DUD) 究工作。经过6个月的准备阶段工 在武汉城市圈开展合作的机会。 方案与战略工作室”。梁子湖位于 作后,三个混编小组进行了为期 武汉城市圈的心脏地带,是我国 15天的集中工作,提交了三份不 3、利用法国资金支持开 目前水质保护最好的天然湖泊之 同的概念性规划研究报告。中法城 展了部分节能项目建设。 一。梁子湖总面积约2085平方公 市可持续发展合作指导委员会主席 里,其中水域面积超过225平方公 唐凯先生和伊夫·库斯格先生组 法国开发署贷款是在《中法两国 里(约为武汉市面积的五分之一) 织专家评审委员会,对三份研究报 城市可持续发展协议》和《中法 。梁子湖被武汉、鄂州、黄石、咸 告进行了评审,最后由法方整合三 两国应对气候变化联合声明》框 宁四个大城市包围,在这片快速 份报告,形成了《大梁子湖生态旅 架下,与我国财政部开展的长期 城市化的区域,要保证湖泊不受 游度假区规划编制咨询报告》。 合作,主要为城市可持续发展 侵蚀、水质不受污染,实属不易。 项目建设和相关研究提供资金支 中方规划设计单位在编制规划过 持。具体应用在城市交通、城市 湖北省确立了在保护的前提下适 程中吸纳了法方咨询报告的主体内 规划、低碳经济、可再生能源、 度开发原则,因此,急需编制一个 容。目前,《大梁子湖生态旅游 城市垃圾和污水处理、二氧化碳 科学合理的规划,指导该地区的 渡假区总体规划》已发布实施。 的捕捉与封存;农村再造林、 发展。以编制这个规划作为双方合 保护性农业、农村沼气等方面。 作的启动项目,具有典型示范意 2、成功举办中法城市可持续发展论 义。中法双方都组成了专家组, 坛暨武汉城市圈投资项目推介会。 根据法国开发署对贷款项目的基 中方专家组负责规划具体编制任 本要求,湖北省组织武汉城市圈 务,法方专家组提供专家咨询。 2010年11月6日,湖北省政府和 九市积极申报项目。目前,武汉

120 市既有公共建筑节能改造项目已 获法国开发署2100万欧元低息 贷款。武汉天河机场T3航站楼换 乘中心项目已于2012年4月通过 了法国开发署的审核,将获得不 低于2000万欧元的低息贷款。

4、法国企业掀起了第 二次投资湖北的高潮。

随着中法城市可持续发展合作的深 入开展,武汉城市圈在法国以及欧 盟各国的影响日渐扩大。法国各界 对武汉城市圈的关注度明显提高。 近年来,欧洲直升飞机公司、施耐 德电气公司、阿海普公司、凯奥雷 JACQUES SAINT-MARC 斯公司、索格利公司、圣哥班公司 Anne-Marie Idrac和李宪生 等知名法企对参与武汉城市圈建设 均表达了浓厚兴趣,其高层管理人 员多次来武汉城市圈考察,了解 密切程度与深入程度与日俱增。 一个合适的地块,以便法方依托 城市可持续发展项目的进展情况。 其全方位技术,与中方合作建设 法国驻武汉总领事馆专门设立了 一个可持续发展生态示范新城。 目前,欧洲直升飞机公司、施耐 经济副领事的职务,负责推进城 德电气公司、凯奥雷斯公司等世 市可持续发展合作工作。2013年7 10月25日,湖北省省委书记李鸿 界500强企业均已在武汉设立亚洲 月5日,湖北省政府与法国驻华大 忠率团访问法国,与法国外交部 或中国总部,并已开展城市可持 使馆合作举办了鄂法在城市可持 中国事务特使马蒂娜·奥布里,生 续发展领域的相关业务。在双方 续发展领域合作圆桌会议,法国 态、可持续发展和能源部部长菲利 政府的共同努力下,法航于2012 外交部长高级代表、中国事务特 普·马丁,共同签署关于在武汉城 年底开通了巴黎至武汉的直航 使奥布里女士出席了会议,同时 市圈共建中法可持续生态新城项目 航线,进一步便利了双方往来。 邀请多家法企和湖北的企业参加 的会谈纪要,湖北省发改委与法 会议,会议对2010年鄂法城市可 国生态能源部签署了关于在武汉城 5、政府高层密切交往推 持续发展合作意向书签署以来的 市圈开展城市可持续发展领域合 动双方合作进一步深化。 工作进展情况进行总结交流,同 作的五年行动计划书。政府高层密 时,法国的公司企业也对法国的 切往来,直接推动双方在城市可 中法两国政府对武汉城市圈可持 一些工作方法作出了简要介绍。 持续发展领域的合作不断深化。 续发展领域合作高度重视,双方 保持着持续不断的高层间互访和 王国生省长与奥布里特使在会见 当前,中国已经步入了新型城镇化 交流。时任法国驻华大使白林女 时就进一步深化双方城市可持续 发展的新阶段,武汉城市圈的“两 士、法国财政部公使衔参赞贝 发展合作达成了系列共识。7月24 型”社会建设与实践将在中国新型 吕诺先生、公使衔参赞泰思达先 日,法国总理让-马克·埃罗致信 城镇化中扮演重要角色,并会带来 生,中法城市可持续发展合作协 李克强总理,高度评价了武汉城 巨大商机。我虽然已离开湖北,但 议法方指导委员会主席伊夫·库 市圈作为中法城市可持续发展领 时刻关心湖北的发展,关注中法 斯格、主席代表盛·马克先生多次 域合作示范区对中法在该领域合 双方的合作,期待双方的合作在 到湖北进行沟通和衔接,由于他 作所起的推动作用,赞扬中法双方 武汉城市圈不断结出新的硕果。 们的辛勤付出,以及我们对于合 在该领域合作所取得的成就,并 作成功的共同愿望,双方合作的 希望中方能够在武汉城市圈提供

121 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

LES PONTS EN MARCHE

> JEAN-PAUL TROADEC > LAURENT BUISSON 1972 1987 INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS INGÉNIEUR EN CHEF DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Est à la retraite à compter du 1er janvier 2014. Est nommé (novembre 13) Vice-président ressources et Il était directeur du Bureau d’enquêtes et d’analyses pour moyens de l’Université Paris VI Pierre et Marie Curie. la sécurité de l’aviation civile (BEA). Il était, à l’Université Paris VI Pierre et Marie Curie, directeur général délégué à la recherche et au transfert de techno- > CLAUDE POLY logie. 1973 INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Est à la retraite à compter du 20 janvier 2014. > FLORENCE CASTEL 1990 Il était secrétaire général du Conseil général de l’alimen- INGÉNIEUR EN CHEF DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS tation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), Rejoint (6 janvier 14), Advancy, directrice générale du pôle ministère de l’agriculture. de compétitivité Advancity. Elle était directrice du développement durable et de la qua- > JEAN-MARIE AURAND 1977 lité de la Société du Grand Paris (SGP). INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Est nommé (janvier 14) directeur général de l’Organisation > MICHEL KAHAN internationale de la vigne et du vin (OIV). 1991 INGÉNIEUR EN CHEF DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Il était secrétaire général du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Est nommé (décembre 13) directeur général du groupe Setec. > GILLES BURBAN Il était directeur général délégué de Setec TPI. 1977 INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS > THIERRY DELDICQUE Est nommé (janvier 14) secrétaire général du Conseil géné- 1993 ral de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux INGÉNIEUR EN CHEF DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS (CGAAER), ministère de l’agriculture. Est nommé (décembre 13) directeur adjoint du service à Il était secrétaire général adjoint du Secrétariat général du compétence nationale dénommé : Systèmes d’information ministère de l’agriculture. budgétaire financière et comptable de l’Etat, ministère de l’économie et des finances. > ALAIN FÉMÉNIAS 1981 Il était secrétaire général de l’Agence pour l’informatique INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS financière de l’Etat (AIFE), ministère de l’économie et des Est à la retraite à compter du 1er février 2014. finances. Il était membre permanent de la 5ème section, membre de l’Autorité environnementale, Conseil général de l’environ- > LOUIS GUYOT 1997 nement et du développement durable (CGEDD), ministère INGÉNIEUR DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS de l’écologie. Est nommé (décembre 13) Directeur administratif et finan- cier d’Egis. > PASCAL CHAMBON 1984 Il était membre du directoire, en charge de la direction gé- INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS nérale finances et international de Korian. A rejoint (novembre 13) l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), directeur des services et > MARIE-CLAIRE BOZONNET du système d’information. 2002 INGÉNIEUR EN CHEF DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Il était sous-directeur des études et de la prospective à la direction générale des infrastructures, des transports et de Est- nommée (janvier 14) directrice de la Direction départe- la mer (DGITM) du ministère de l’écologie. mentale des territoires (DDT) de l’Isère. Elle était directrice de la Direction départementale des ter- > RÉMI JOUTY ritoires (DDT) de l’Essonne. 1985 INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS > THIERRY COQUIL Est nommé (décembre 13) directeur du Bureau d’enquê- 2003 tes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile (BEA). INGÉNIEUR EN CHEF DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Il était directeur adjoint de la direction de la sécurité de Est nommé (novembre 2013), directeur général des servi- l’aviation civile (DSAC), Direction générale de l’aviation ci- ces de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur. vile (DGAC). Il en était le DGA.

122 LES PONTS EN MARCHE

> CÉLINE GUILLEMAUT > ANNE-LAURE DE CHAMMARD 2003 2007 INGÉNIEUR DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS INGÉNIEUR DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Est nommée (décembre 13) sales manager, responsable Rejoint (janvier 14) le Bureau Véritas, directeur de la Région de la coordination des réponses aux appels d’offres sur Picardie, Champagne-Ardenne, Bourgogne. des projets HVDC, HVDC projects, Alstom Grid. Elle était adjoint du chef du département des partena- Elle était responsable du contrôle de gestion groupe, chez riats publics privés infrastructures et transports, Direction Alstom. générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), ministère de l’écologie, du développement dura- > VINCENT JECHOUX ble et de l’énergie. 2005 INGÉNIEUR DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS > AMÉLIE COANTIC Est nommé (janvier 14) directeur du cabinet de la la minis- 2007 tre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et INGÉNIEUR DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS de la santé, chargée de la famille. Est nommée (janvier 14) conseillère technique environne- Il en était le directeur adjoint. ment au cabinet du Premier ministre. Elle était adjoint au chef de bureau de la faune et de la flore > OLIVIER PUTOT sauvages à la Direction de l’eau et de la biodiversité (DEB), 2006 INGÉNIEUR DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Direction générale de l’aménagement, du logement et de Est nommé (janvier 14) directeur du Parc Naturel Regional la nature (DGALN), ministère de l’écologie. des Caps et Marais d’Opale. > ADRIEN ALLARD Il était chef du service eau environnement et forêts, Direc- 2013 tion départementale des territoires (DDT) Savoie. INGÉNIEUR DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS Est nommé (décembre 13) à la Direction départementale des territoires (DDT) de la Haute-Saône, chef du service environnement et risques.

DECES > JEAN-PAUL LACAZE INGÉNIEUR GENERAL DES PONTS ET CHAUSSEEES (1954) Est décédé le 12 décembre 2013.

> JACQUES DUFOUR INGÉNIEUR DES PONTS ET CHAUSSEEES (1954) Est décédé le 1er décembre 2013.

> JEAN WENNAGEL INGÉNIEUR GENERAL DES PONTS ET CHAUSSEEES (1941) Est décédé le 1er novembre 2013.

Nous présentons nos sincères condoléances à leur famille.

123 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

LES PONTS EN MARCHE

NOMINATION > JEAN-MARC LACAVE INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS 1980

Est nommé (janvier 14) Président directeur général de Météo France.

Il débute sa carrièe en 1980 à la Direction départementale de l’équipement (DDE) des Deux-Sèvres puis de la Loire-Atlantique.

Il rejoint la direction des routes du ministère de l’équipement en 1998 et en 1991, le cabinet du ministre de l’équi- pement, Louis Besson comme conseiller technique chargé des routes.

Directeur de la direction départementale de l’équipement (DDE) de la Sarthe en 91, puis de la Direction régionale de l’équipement (DRE) de Basse-Normandie en 1997, il est nommé directeur général du port autonome du Havre en 2000.

De 2008 à 2010 il est directeur général, chargé intermodal, audit, assurances, juridique et ressources à la CMA CGM.

NOMINATION

> VALÉRIE METRICH-HECQUET INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS 1988

Est nommée (janvier 14) secrétaire générale du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

Elle débute sa carrière en 1988 au ministère de l’agriculture où elle occupe plusieurs postes.

En 1998 elle rejoint le Secrétariat général du Comité interministériel pour les questions de coopération économi- que européenne (SGCI) où elle est chef du secteur agriculture, alimentation et pêche.

De 2000 à 2002 elle a été conseillère technique agriculture, alimentation et forêt, puis conseillère pour l’agriculture et la pêche au cabinet du Premier ministre Lionel Jospin.

Directrice générale adjointe de la forêt et des affaires rurales au ministère de l’agriculture de 2003 à 2008, elle est nommée directrice générale adjointe des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires de 2008 à 2009.

De 2009 à 2011, elle a été adjointe au directeur général de la prévention des pollutions et des risques au ministère de l’écologie puis directrice départementale des territoires des Yvelines de 2011 à 2012.

124 LES PONTS EN MARCHE

NOMINATION > PATRICE PARISÉ INGÉNIEUR GÉNÉRAL DES PONTS, DES EAUX ET DES FORETS 1982

Est nommé (décembre 13) Vice-Président du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), ministère de l’écologie. du développement durable et de l’énergie.

Rappel de sa carrière : Depuis 2012 Patrice Parisé était Président de la 5ème section, Sciences et techniques, Conseil général de l’envi- ronnement et du développement durable (CGEDD), Vice-Président par interim du CGEDD depuis mars 2013

2008 -2012 : Directeur de l’Institut géographique national (IGN)

2003-2005 : Directeur des routes, ministère de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer

2005-2008 : Directeur général des routes, ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables

2001-2003 : Directeur des programmes aéronautiques civils (DPAC) à la direction générale de l’aviation civile (DGAC)

1997-2001 : Adjoint au directeur des routes, ministère de l’équipement, des transports et du logement

1995 -1997 Directeur adjoint du cabinet du ministre de l’aménagement du territoire, de la ville et de l’intégration, Jean-Claude Gaudin

1993-1997 Conseiller technique au cabinet ministre délégué à l’aménagement du territoire et aux collectivités locales, Daniel Hoeffel

1986-1993 Directeur des garanties et des règlements internationaux à la direction générale du groupe. En 1991, il est nommé directeur général adjoint, chargé du suivi du département international et des grands risques, Société auxiliaire d’entreprises (SAE)

1985-1986 Directeur général adjoint, chargé de l’aménagement et des travaux, Établissement public de la ville nouvelle de Melun-Senart

1982-1985 Chef du bureau des exportations, direction des affaires économiques et internationales du ministère de l’équipement

1980-1981 Chargé de mission aux cabinets des ministres des transports, Joël Le Theule puis de Daniel Hoeffel

1973-1980 Chargé de la subdivision territoriale de Melun, puis de Montereau (en 1975), direction départementale de l’équipement de Seine-et-Marne

Patrice Parisé est membre du conseil scientifique du Laboratoire central des ponts et chaussées (depuis 2003). et membre du conseil d’administration de l’UnIPEF (depuis 2012)

125 > URBANISATION EN CHINE : PRÉSENCES FRANÇAISES

Combattre la pauvreté,c’est d’abord combattre nos préjugés.

Un couple avec 2 enfants gagne, par mois : 1881 € 1341 €

* a Q ll u o m c e a é ll t d e i o ia q n n u s e f d s a ’u o m RSA i 1 SMIC n t il m l ia a le én co s a m + g p A + aides* + aides* e o P a s L v iti + ec on dro 2 de it à en la la fa fam CMU nts ill com es e, l’ plém t d écar entaire. e 37 t est t Pour l’Île-de-France, sources : INSEE, CAF, service-public.fr. 21� oujours (sal d’environ 5 � ison, le revenu aires + 00 entre un ménage au RSA et au SMIC. Par compara allocat Pour combattre la pauvreté, apprenons à la connaître vraiment. ions familiales). Retrouvez ces différents cas de figure sur notre site. ATD Quart Monde vous offre un an d’abonnement à Feuille de route, son mensuel d’actualités contre la misère. www.atd-quartmonde.fr/ID

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