Cinquantième 1 anniversaire du Concours national de la Résistance et de la Déportation 11 Mémoire et réflexions

Il y a soIxante-dIx ans QuelQues dates pour se souvenIr

Dans ce numéro de La Lettre, nous débutons cette nouvelle rubrique que nous poursuivrons pendant toute la durée du 70e anniversaire des grands événements ayant marqué la Résistance intérieure de 1941 à 1945. Cette chronologie n’a bien sûr rien d’exhaustif et n’a pour seule ambition que de rappeler quelques grandes dates jalonnant son histoire.

– 1941 – mands tenteront de répliquer, au moment de l’offensive contre l’URSS, en couvrant 21 janvier la tour Eiffel et le palais Bourbon de gigan-

À Nantes, arrestation d’Honoré d’Estienne tesques V. Archives départementales des Yvelines 300W53. d’Orves, chef du 2e bureau de l’État-major de Un V et une croix de Lorraine au pochoir. la Libre, débarqué un mois plus tôt sur 26 mars les côtes bretonnes pour créer le réseau de À , arrestation du linguiste Boris renseignement Nemrod. Condamné à mort, Vildé, responsable de l’organisation dite 6 mai il sera exécuté avec plusieurs de ses compa- « du musée de l’Homme ». En quelques Parachutage à Valençay (Indre) du « ra- gnons le 29 août 1941 au Mont-Valérien. mois, il avait réussi à rassembler en son dio » Georges Bégué, premier agent de sein de nombreux groupes de zone occu- la section F du SOE (Special Operations 22 mars pée et éditait depuis décembre 1940 un Executive), service créé par Churchill à La section française de la BBC lance la journal : Résistance. Si l’organisation est l’été 1940 pour susciter l’action subversive « campagne des V » pour inciter les parti- démantelée et sept de ses membres fu- dans les pays occupés par Hitler. Déjà pré- sans de la victoire anglaise à se manifes- sillés en février 1942 (dont Vildé), beau- sents en France par leurs agents du Mili- ter. Déjà expérimentée pour la Belgique, coup d’autres, comme Germaine Tillion, tary Intelligence et par le soutien du SOE elle rencontre un succès immédiat et du- continueront leur action en se reliant à aux Français libres, les Britanniques créent rable dans les grandes villes. Les Alle- d’autres groupes. avec « F » une section totalement indépen- dante, vouée à la création de réseaux de sabotages et au parachutage d’armes.

27 mai-9 juin Grande grève des mineurs du Nord et du Pas-de-Calais. Lancée avec des motifs de pure revendication sociale, en raison de conditions de travail considérablement aggravées depuis l’occupation, elle touche en quelques jours 100 000 mineurs (80% des effectifs) et prend un sens clairement résistant face à la répression brutale des Allemands inquiets pour l’approvisionne- ment de Paris. 450 peines de prison seront

2 DR prononcées et 250 mineurs déportés à Sachsenhausen. Coll. association Libre Résistance

1. Honoré d’Estienne d’Orves - 2. Boris Vildé - 3. Mémorial de la Section F du SOE 1 3 à Valencay (Indre). © Fonds Honoré d’Estienne d’Orves - Service historiIque de la Marine.

En couverture : 1 - Au lycée Lalande de Bourg-en-Bresse (Ain), échanges entre Pierre Figuet, résistant-déporté, président de l’association 1 Résistance du lycée Lalande et les jeunes lycéens. Ce lycée de l’Ain, décoré de la médaille de la Résistance française,est très attaché à cette période de notre histoire comme en témoigne sa participation régulière au Concours national de la Résistance et de la Déportation, occasion durant toute l’année de rencontres entre les lycées et les résistants. Fondation de la Résistance/Photo Frantz Malassis - 2- Lauréats du Concours 2 3 devant le mémorial de la France combattante au Mont-Valérien. -3 – Lauréats du Concours devant l’entrée du camp de concentration du Struthof. - 4 - Au Cercle militaire de Paris, lors de la réception offerte par les associations de résistants et de déportés, Geneviève de Gaulle- 4 Anthonioz, alors présidente de l’ADIR et , félicitent un lauréat national du CNRD 1996-1997 qui avait travaillé sur le thème des femmes dans la Résistance. © Coll. Archives nationales-site de Paris (photos 2, 3 4).

2 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 Éditorial

s o M M a I r e le Mot du prÉsIdent Mémoire et réflexions - Il y a soixante-dix ans. Quelques dates pour se souvenir...... p. 2 l y a cinquante ans, grâce à Lucien Paye, ministre de l’Éducation - À propos nationale, le Concours national de la Résistance et de la de Louis-Ferdinand Céline...... p. 31 Déportation (CNRD) entrait officiellement dans le paysage 1961-2011. Cinquantième scolaireI français. anniversaire du Concours national de la Résistance Il fut pérennisé l’année suivante par le successeur de Lucien Paye, et de la Déportation. Pierre Sudreau, qui fut, chacun le sait, président de notre Fondation. - L’origine du CNRD. Une volonté associative Voulu et initié quelques années auparavant par la Confédération relayée par l’Éducation nationale...... p. 4 nationale des Combattants Volontaires de la Résistance (CNCVR), - Le « goût de l’histoire ». Le Concours permet qui entendait ainsi participer à la formation civique des jeunes DR la rencontre entre les élèves et des acteurs générations, ce concours, preuve de son dynamisme, n’a jamais d’une histoire toujours vivante ...... p. 12 cessé d’évoluer, épousant les grands changements pédagogiques du système éducatif - Un Concours actuel. Aujourd’hui le français. Ainsi, chaque année, il réunit sur la base du volontariat plus de 40 000 élèves de Concours fonctionne grâce aux enseignants lycées et de collèges, ce qui en fait le premier concours scolaire en terme de participation. et au soutien de multiples partenaires. p. 18 À mi-chemin entre Histoire, Mémoire et formation civique et morale, le CNRD est La vie de la Fondation de la Résistance l’occasion de nombreuses rencontres avec les acteurs de cette période qui permettent aux élèves de découvrir les valeurs sous-tendant l’engagement de leurs aînés, qui sont - La Fondation de la Résistance autant de ferments pour leur vie de futur citoyen. ne perdurera pas sans vous ! ...... p. 25 Depuis 1993, la Fondation de la Résistance s’est engagée à promouvoir ce concours et à L’activité des associations affiliées aider les enseignants et les élèves à le préparer dans les meilleures conditions notamment par la réalisation et la diffusion d’un dossier pédagogique en partenariat avec les - Mémoire et Espoirs fondations de la Seconde Guerre mondiale, les musées, les ministères de la Défense et de de la Résistance ...... p. 26 l’Éducation nationale mais également grâce à la rubrique pédagogique de son site Internet. - AERI ...... p. 28 Après la dissolution de la CNCVR et son intégration au sein de notre Fondation, Livres ...... p. 30 nous sommes plus que jamais attachés moralement à défendre ce concours que nous Hommage considérons comme la pierre angulaire de la transmission de l’Histoire de la Résistance - Claude Hallouin nous a quittés...... p. 31 française auprès de la jeunesse. Activités du Comité À l’occasion de son cinquantième anniversaire, nous avons voulu dresser un bilan non d’animation et de suivi exhaustif de ce concours et de celles et ceux qui l’ont fondé, qui se sont employés et - Les prochaines Journées annuelles s’emploient actuellement à le faire vivre : associations, fondations, musées, témoins mais de la Fondation de la Résistance bien sûr tous les enseignants, qui de génération en génération, font vivre le Concours et dans la Nièvre...... p. 32 auxquels je souhaite rendre un hommage particulier.

Éditeur : Fondation de la Résistance Reconnue d’utilité publique par décret du 5 mars 1993. Sous le Haut Patronage du Président de la République 30, boulevard des Invalides – 75007 Paris Téléphone : 01 47 05 73 69 Télécopie : 01 53 59 95 85 Site internet : www.fondationresistance.org Jacques Vistel Courriel : [email protected] Président de la Fondation de la Résistance Directeur de la publication : Jacques Vistel, Président de la Fondation de la Résistance Directeur délégué de la publication : François Archambault Rédacteur en chef : Frantz Malassis Rédaction : Marc Fineltin, Hervé Guillemet, Bruno Leroux, Frantz Malassis, Jean Novosseloff, Laurence Thibault. Maquette, photogravure et impression : 36nco, Boulogne-Billancourt 92 100. Revue trimestrielle. Abonnement pour un an : 16 €. n° 64 : 4,50 € Commission paritaire n° 1110 A 07588 – ISSN 1263-5707 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 3 Monument , dit le glaive brisé à Chartres. Œuvre conçue et réalisée par le sculpteur Marcel Courbier (DR) 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD 1 – L’origine du CNRD Une volonté associative relayée par l’Éducation nationale

Une histoire en chantier

Retracer l’histoire du Concours depuis sa création présente plusieurs diffi cultés : les sources sont dispersées, lacunaires, souvent peu accessibles, ce qui rend problématique tout travail de synthèse (1).

progressivement imposée. La CNCVR, L’organisation matérielle du Concours dans ses premiers congrès suggère est assumée par la CNCVR et le Réseau d’organiser un prix national, à partir de du souvenir. La visite à Paris, présentée demandes et d’expériences réalisées dans la circulaire du 11 avril comme une

Fonds CNCVR 72AJ - Archives nationales (site de Paris) dans plusieurs départements. En 1961, véritable consécration des lauréats et un La circulaire signée par le ministre de pèlerinage du souvenir, est l’occasion de omme pour les associations l’Éducation nationale Lucien Paye, rédi- « recevoir les prix offerts par les organi- d’anciens résistants, l’histoire gée dans le contexte de la construction sations de déportés résistants et CVR ». du Concours reste encore à faire, à Paris du mémorial de la Déportation, C’est en 1964, avec la célébration du C e nombre de questions demeurant donc comprend donc le lancement d’une sous- 20 anniversaire de la Libération, évé- sans réponse. Les quelques remarques cription nationale, préconise des « cause- nement commémoratif exceptionnel, ci-dessous ne visent donc qu’à retracer ries » à l’occasion de la Journée nationale que le Concours commence à s’inscrire quelques grandes étapes de l’histoire du souvenir des victimes et des héros de durablement dans le paysage scolaire, du Concours, et à engager étudiants et la déportation, et crée un concours annuel en intégrant recherches documentaires, chercheurs à partir à la découverte d’un sur la Résistance, dont la première remise expositions, participations aux commé- champ d’étude riche et multiple. On aura des prix aura lieu à l’occasion de l’inaugu- morations et exposés dans les établis- aussi à cœur de souligner l’importance ration du monument. sements souvent réalisés par d’anciens d’un inventaire à venir des archives Le Concours né en 1961 mêle donc ini- résistants ou déportés. conservées du Concours, notamment tiatives associatives et création institu- Les années qui suivent voient se trans- des travaux d’élèves réalisés depuis 50 tionnelle. Ses contours demeurent assez former ou se créer de nouvelles épreuves, ans, qui constituent une source majeure vagues, avec une dimension départe- notamment les travaux collectifs à partir pour l’étude de la mémoire scolaire de mentale affi rmée, la place des CVR dans de 1979 ou audiovisuels à partir de 2008, la Seconde Guerre mondiale mais aussi les jurys et une participation limitée aux s’élargir sensiblement la composition du pour comprendre l’évolution des pra- élèves de plus de quinze ans. Aucune jury national tandis que les thèmes rete- tiques pédagogiques mises en œuvre sur allusion n’est faite aux formes de parti- nus suivent l’évolution des mémoires ce thème. cipation des candidats, aux critères de de la Seconde Guerre mondiale et de Le Concours de la Résistance et de la sélection des lauréats ou à la composi- l’historiographie.  Déportation, né de la volonté de quelques tion du jury national qui n’est pas cité. associations de résistants et de déportés Celui-ci est constitué de représentants (1) Denis Mazzucchetti a publié en relayées par les pouvoirs publics, vise à d’associations d’anciens résistants ou 2006 à partir de son mémoire de DEA l’origine à associer les jeunes à la com- déportés (CNCVR, UNADIF et Réseau un article consacré à l’histoire du mémoration de la Libération et à promou- du souvenir) et de hauts fonctionnaires Concours dans les Cahiers du Centre voir, quelques années après la défaite du de l’Éducation nationale, qui associent d’études d’histoire de la défense n°28, nazisme, les « idéaux de la Résistance » comme Louis François à leur fonction une téléchargeable en ligne à partir du site dans la jeunesse scolarisée. L’idée de ce légitimité personnelle d’anciens résis- du ministère de la Défense et sur le site concours, récompensée par un prix, s’est tants et déportés, de la Fondation de la Résistance.

4 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 Célébration du souvenir des Déportés et Résistants L’officialisation Circulaire du 11 avril 1961 du CNRD (Affaires générales) avec la circulaire aux Recteurs et Inspecteurs d’Académie. du 11 avril 1961

Pour exalter le sacrifi ce et serait ouvert le 12 mai 1961 dans La circulaire DAG/SAG n° 891 du 11 avril rappeler les souffrances des héros tous les départements aux élèves 1961(1), signée par le ministre de l’Éducation et des martyrs de la déportation un âgés de 15 ans au moins, désireux (2) monument du souvenir sera érigé à d’y participer. Il sera ensuite orga- nationale Lucien Paye , acte fondateur Paris, dans l’île de la Cité. nisé annuellement. du CNRD, est publiée à l’occasion de la Pour permettre son édifi ca- Cette année, le sujet, établi campagne de sensibilisation et de collecte tion et donner à chacun l’occasion par un jury national, sera adressé de se souvenir des heures les plus sous pli cacheté à MM. Les Inspec- de fonds en faveur du mémorial de la pures de la gloire française, une teurs d’Académie chargés de le Déportation de Paris. souscription nationale a été ouverte transmettre aux chefs d’établisse- dans l’ensemble du pays. ment qui en auront préalablement Je crois indispensable d’y fait la demande. Les épreuves se associer tous les élèves des lycées, dérouleront dans les établissements u cours de l’année 1953, le Réseau du Souve- collèges et écoles publiques et de scolaires et les copies seront adres- nir, association d’anciens déportés, formule le centraliser séparément les sommes sées à l’Inspection académique. vœu d’élever à Paris un monument destiné à recueillies dans les établissements Un jury départemental constitué et A perpétuer le souvenir des Français déportés dans les scolaires pour mieux marquer la présidé par l’Inspecteur d’Académie part prise par les jeunes dans la et composé de personnalités quali- camps nazis. Le choix du lieu se porte sur un terrain célébration du souvenir de ceux qui fi ées, notamment des combattants situé dans l’île de la Cité qui est cédé par le conseil leur ont permis de naître et de vivre volontaires de la Résistance et de municipal de Paris. Réalisé par l’architecte Georges- libres. déportés, examinera tous les envois Henri Pingusson (1894-1978), le Mémorial est inau- C’est pourquoi je demande et enverra les meilleurs d’entre eux guré le 12 avril 1962 par le général de Gaulle et donné à MM. les Inspecteurs d’Académie à la Sous-Direction des Affaires de vouloir bien organiser dans tous générales du ministère de l’Educa- à l’État par le Réseau du Souvenir en février 1964. Il les établissements d’enseignement tion nationale, 110, rue de Grenelle est aujourd’hui au centre de la cérémonie annuelle de public de leur département, des à Paris (7e). Ils seront ensuite sou- la Journée nationale du souvenir des victimes et des collectes dont le produit, centralisé mis au jury national. Les lauréats, héros de la déportation, le dernier dimanche d’avril. à l’Inspection académique, sera accompagnés de leur maître seront ensuite versé pour le 1er juin l96l au conviés à Paris, après l’inauguration Sans qu’elles soient mentionnées, les associations Comité national pour l’édifi cation à du monument du souvenir, et visite- ont joué un rôle essentiel dans la création du Concours. Paris d’un monument du souvenir à ront les hauts lieux de la Résistance. La seconde partie de la circulaire, consacrée à la créa- la mémoire des héros et des martyrs Je suis certain que tous les tion de ce qui est alors un « Concours de l’histoire de de la déportation, (compte au Trésor universitaires (1) – dont beaucoup n° 800. – Paierie générale C.C.P. ont pris une part active et brillante la Résistance et de la Déportation » reste imprécise 9000-3 Paris). à la Résistance auront à cœur d’ex- sur son organisation et son fonctionnement. Le règle- Je serais heureux d’être tenu pliquer aux enfants ce qu’elle fut ment est très succinct, on note simplement la mention informé des sommes versées au et ce qu’elle à donné à la France. d’un âge minimum de 15 ans, et l’existence de jurys à Comité par chaque département. Il ne s’agit pas de réveiller des deux niveaux, départemental et national, dont la com- D’autre part, je souhaite haines, mais d’évoquer le souvenir qu’à une date aussi rapprochée que de sacrifi ces très purs et héroïques position reste vague. La conclusion de la circulaire se possible du 30 avril 1961, Jour- dans le combat livré pour que les situe explicitement dans le contexte du rapprochement née des Déportés, une causerie sur jeunes Français puissent vivre libres franco-allemand illustré par les liens noués entre le la Résistance et la Déportation soit et fraternellement unis dans la patrie général de Gaulle et le chancelier ouest-allemand Kon- faite aux élèves pendant les cours retrouvée. de morale ou d’Instruction civique, rad Adenauer, depuis leur rencontre à Colombey-les- pour qu’ils comprennent la raison Lucien PAYE deux-Églises en septembre 1958.  et la portée du geste qu’on leur demande. (1) sous la plume du ministre (1) in Bulletin offi ciel de l’Éducation nationale Enfi n, j’ai décidé qu’un l’’expression « universitaire » concours sur un sujet tiré de l’histoire désigne ici l’ensemble des n° 16 du 24 avril 1961. de la Résistance et de la Déportation enseignants. (2) Normalien, agrégé de lettres, docteur ès lettres, Lucien Paye (1907-1972) fut ministre de l’Éducation Dès le mois d’avril 1961, cette circulaire est diffusée dans nationale de février 1961 à avril 1962, haut représen- une partie de la presse associative, notamment L’Écho de la tant de la France au Sénégal en 1962, ambassadeur Résistance. Revue de la Confédération Nationale des combat- de France à Pékin de 1964 à 1969, et premier prési- tants Volontaire de Résistance, Le Déporté (n° 153), publica- dent de la Cour des comptes. Il présida la commission tion de l’UNADIF-FNDIR et La Voix de la Résistance, Organe de réforme du statut de l’ORTF de 1968 à 1970. du Comité d’Action de la Résistance (n° 60).

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 5 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD

Louis François, résistant, déporté, promoteur du CNRD

Le « franc-tireur institutionnel » qu’était Louis François exerça une action déterminante en faveur du Concours qu’il contribua fortement à établir dans le monde de l’éducation. Les différentes étapes de sa vie et sa personnalité permettent de comprendre comment il a pu réaliser ce véritable tour de force, au regard des particularités du système éducatif d’alors, et comment notamment il a pu contourner les obstacles de toute nature et venant de tous les horizons qu’il a pu rencontrer. Coll. Camille Hermange

e distinguant par « sa taille, son Nommé inspecteur général à son retour prononcé pour les pratiques effectives visage anguleux, ses sourcils en de déportation, il dispose d’une liberté des enseignants dans leur classe et hors S broussaille et sa voix de stentor »(1), d’esprit et d’expression dont il fait preuve de leur classe, en relation avec l’actualité. la forte personnalité de Louis François à maintes reprises, usant de ses multiples S’appuyant sur ces pratiques, soucieux marque ses contemporains, notamment fonctions pour quelquefois déroger au d’adapter le concours de la Résistance et ses élèves ou de manière quelquefois plus devoir de réserve lié à son statut. de la Déportation, dont il préside le jury contrastée les professeurs qu’il rencontra Sa proximité personnelle avec certains national, il agit pour l’introduction d’une lors de ses fonctions d’inspecteur géné- de ceux qui incarnent le pouvoir lui fut utile nouvelle épreuve de « dossiers collectifs » ral. Qualifi é de « sympathique et ardent pour pouvoir lever tel ou tel obstacle admi- en 1979. entraîneur de la jeunesse à Henri IV » dans nistratif, tout en bénéfi ciant aussi de son Promoteur inlassable du développement son rapport d’inspection de janvier 1936 expérience de membre de cabinet minis- de l’éducation civique dans l’enseignement signé de Jules Isaac, il exerce successive- tériel auprés d’André Boulloche à l’Éduca- secondaire, il entend par là non seulement ment à puis à Paris. Attaché à la tion nationale en 1959, à un moment clé les valeurs dont l’éducation dispensée doit laïcité, il demeure lié aux convictions de la pour l’institutionnalisation progressive du être porteuse, mais aussi l’ouverture sur tradition familiale protestante, qui le fai- concours de la Résistance. le monde. Il crée, pour relayer l’éducation sait se prononcer « pour la réforme contre Dans ses fonctions, Louis Fran- civique dans les lycées, les premiers clubs toute une série d’orthodoxies »(1). çois se fait l’adepte et le diffuseur des UNESCO (clubs d’études et de relations Profondément patriote, il est mobilisé « méthodes actives ». Il entend par là le internationales) regroupés en 1956 dans en 1939 et affecté à la 4e division cuiras- dynamisme dans la gestion de la classe, la Fédération française des clubs UNESCO. sée sous le commandement du colonel où l’ancien éclaireur de France, dont il fut Disposant d’une forte légitimité per- de Gaulle dont il devient l’offi cier d’or- président national durant une décennie, sonnelle pour être reconnu par le monde associatif, connaissant les rouages de Enseigner avec les élèves, les mettre en activité, l’administration tout en n’hésitant pas à se dispenser de certains de ses usages, les faire chercher individuellement et collectivement… Louis François permit donc au Concours de la Résistance, une fois celui-ci créé par donnance. Contacté après la défaite par le manifeste ses dons et son goût pour l’ani- les associations, de devenir pleinement réseau dirigé par Gilbert Renault (le colonel mation et le projet collectif. Au tradition- un concours scolaire, tout en gardant son Rémy), il rédige une « revue de la presse nel cours magistral, il préfère enseigner originalité.  parisienne » et un rapport sur l’opinion et avec les élèves, les mettre en activité, les la radio de Londres avec Pierre Brosso- faire chercher individuellement et collec- (1) Article de Dominique Borne et André lette. Arrêté en 1942, il est incarcéré à la tivement, ce qui est alors une démarche Zweyacker in 200 ans d’inspection prison de Fresnes puis au fort de Romain- audacieuse. Il manifeste aussi un intérêt générale, Fayard, 2002. ville, déporté vers l’Allemagne, d’abord à Sachsenhausen puis à Neuengamme, et est libéré le 3 mai 1945. Il demeura mar- Pour en savoir plus sur Louis François, on lira : l’entretien publié dans qué par l’expérience résistante et concen- la revue de l’Association des professeurs d’histoire et de géographie trationnaire, présidant après la guerre par (Historiens et Géographes n° 359, octobre-novembre 1997) et l’éloge pro- fi délité à ses camarades de réseau l’ami- noncé lors de ses obsèques par André Zweyacker, publié dans La Lettre de cale Confrérie Notre Dame Castille. la Fondation de la Résistance n° 29, juin 2002 p 4 à 6.

6 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 Henri Bailly, une force de persuasion au service du CNRD

« Cet homme d’humble origine […] s’était forgé sur l’enclume de la vie. Il y avait en lui de l’audace et du non-conformisme associés à une merveilleuse générosité. C’était un combattant […], un homme passionné à qui les rudes épreuves d’une existence tumultueuse avaient donné un humour acide en même temps qu’une aptitude littéralement inépuisable à nouer des relations sociales. Bref, Henri Bailly était une grande Fonds CNCVR 72AJ - Archives nationales (site de Paris) âme, forte […] et un cœur toujours disposé à s’enfl ammer pour les nobles causes. » (1).

’est en ces termes, partagés par énergie, sa force de persuasion et son tance ». Les premiers prix sont organisés tous ceux qui l’avaient connu, infl uence (2) pour développer le «Prix de la pendant l’année scolaire 1956-1957 dans C qu’André Jarrot, président de Résistance», préfi guration de ce qui est la plus grande improvisation et une totale la CNCVR, rendait hommage à celui qui devenu aujourd’hui le Concours National liberté quant au choix du niveau des élèves fut l’âme de la confédération, assumant de la Résistance et de la Déportation. concernés, de la forme d’épreuve et même pendant 40 ans la fonction de secrétaire Alors que peu à peu l’idée de jouer un de la nature de ses prix ! En mai 1958, lors général. rôle dans la vie politique française dispa- du 3e Congrès national à , Henri Bailly, Né à Paris en 1920 dans une famille raît des préoccupations des dirigeants des constatant qu’il n’existait qu’une trentaine modeste, Henri Guerchon-Bailly com- associations de résistants, leur action se de prix départementaux, demande aux UD mence à travailler à 14 ans comme employé porte sur une autre forme de regénération de généraliser, dans toute la France, l’orga- d’une compagnie d’assurances parisienne. de la société. Ils jugent essentiel que leur nisation de ces prix et réclame la création Dès le début de l’Occupation alle- engagement civique et moral aux valeurs d’un «Prix National de la Résistance» dont mande, il s’engage dans la Résistance. intemporelles soit transmis aux nouvelles il fait adopter le principe. Arrêté une première fois par la police de Vichy, en 1941, il est emprisonné pour 6 mois. Une fois libre, il gagne Lyon à Inviter les jeunes à réfléchir sur les combats l’automne 1942. À cette époque, le mou- des résistants et sur le martyre des déportés… vement Combat est en plein développe- ment dans le département du Rhône ; son générations afi n que « par leur exemple et Lors du 4e congrès de la CNCVR, en 1959, expérience et son sens de l’organisation leur action [soit] assuré la relève des géné- Henri Bailly demande au ministre de l’Édu- l’amenent à devenir un de ses respon- rations, gage de la continuité du pays » (3). cation nationale, après la création dans sables pour la région lyonnaise. Adjoint Ainsi, dès la première Assemblée Géné- 35 départements d’un prix de la Résis- du responsable du groupe des jeunes de rale ordinaire de la CNCVR réunie à Paris tance, d’instituer un « Prix national de la Combat, Henri Bailly est membre du comité les 5 et 6 novembre 1955, Marcel Fivel, Résistance » et que les lauréats soient offi - directeur des Forces Unies de la Jeunesse vice-président de l’UD de Haute-Savoie fait ciellement reçus par le ministre. Enfi n, avec (FUJ) dès leur mise en place. Puis, en avril adopter une motion qui demande notam- le général Jean Ginas, il le fait institutionna- 1943, il devient, avec Louis Rigal, le respon- ment « aux Pouvoirs publics de prendre liser en 1961.  sable national des FUJ. toutes les mesures nécessaires à la réno- Henri Bailly est arrêté pour la deuxième vation de l’enseignement civique et moral (1) « Hommage à Henri Bailly » in Écho fois en juillet 1943 dans l’Isère. Relâché, il à tous les degrés de l’Éducation nationale de La Résistance. n°379, 1993, p. 1. gagne la zone Nord, mais le 3 juin 1944, à et de toutes [les]grandes écoles civiles et Henri Bailly est décédé le 25 février 1993. Paris, il est arrêté à nouveau par la Ges- militaires »(4). À cette occasion, il appelle (2) De 1958 à 1981, il est rattaché à tous tapo. Il est emprisonné puis déporté à toutes les Unions départementales (UD) les cabinets des ministres successifs Buchenwald. Son père, sa mère et son frère à promouvoir « l’organisation de prix de des Anciens Combattants. sont déportés et assassinés à Auschwitz. Civisme et de Morale devant récompenser (3) H. Bailly, Rapport moral du Dès 1954, aux côtés du général Jean les élèves des établissements scolaires 5e congrès national de la CNCVR, Ginas, son président-fondateur, il ne tarde qui se seront distingués dans l’étude des in l’Écho de la Résistance n° 56-57, pas à animer, puis à diriger la CNCVR. questions civiques et morales. » (4) mai-juin 1960, p.12. C’est durant cette période de grande Reprenant cette idée, il mobilise les (4) in Écho de La Résistance. n° 10, activité, qu’Henri Bailly emploie toute son UD invitées à créer des « Prix de la Résis- novembre 1955, p.17

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 7 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD

Les thèmes du Concours national de la Résistance et de la Déportation depuis sa création

Depuis sa création en 1961, le Concours national de la Résistance et de la Déportation a proposé aux générations successives de collégiens et de lycéens des dizaines de thèmes différents. Certaines années, les élèves des collèges et ceux des lycées ont travaillé sur des thèmes différents, avec des références fréquentes aux valeurs civiques portées par la Résistance, envisagées comme partie constitutive de l’identité républicaine contemporaine. L’analyse des thèmes permet de souligner la place prise par le général de Gaulle, dont le rôle est régulièrement rappelé, et de la France Libre. Suivant le rythme des commémorations, notamment de la Libération du territoire, les thèmes retenus font quelquefois explicitement référence à quelques fi gures de la Résistance dont Jean Moulin, en lien avec la célébration de sa disparition (1983 et 1993). Mais c’est davantage à l’action multiforme de la Résistance et à sa mémoire, au rôle des acteurs de celles-ci, que s’attachent bon nombre de thèmes, dont le libellé renvoie souvent à des sujets relevant de plusieurs thématiques. L’évolution des mémoires et de l’historiographie se refl ète partiellement dans le choix des thèmes, notamment ceux concernant la Déportation. Ainsi, envisagée dans un premier temps (1965) sous l’angle unique de la déportation de répression, l’étude de celle-ci s’élargit progressivement à l’ensemble du système concentrationnaire et cite explicitement Juifs et Tziganes (1991).

1961 1968 1973 thèmes sont communs aux « Vous avez entendu parler d’un « Le rôle des femmes dans la Ré- « L’action des jeunes dans la Ré- deux niveaux. événement se rattachant à l’his- sistance. » sistance française. » toire de la Résistance. Faites-en 1977 Classes de troisième : le récit et dites brièvement quels 1969 1974 « La France a été libérée il y a « Les maquis ». sentiments il vous inspire. » « Les Français se sont engagés dans la Résistance non seulement 30 ans, en 1944. Que pensent les Classes de terminale : 1962 pour libérer la Patrie, mais aussi jeunes Français d’aujourd’hui « Que représente pour les jeunes Sujets départementaux. pour restaurer une société respec- du rôle de la Résistance et des d’aujourd’hui l’action de la Ré- tueuse des droits de l’homme. » jeunes d’alors dans ce grand sistance française de 1940 à 1963 événement historique ? » 1944 ? » Concours reporté et fi nalement 1970 annulé. 1975 1978 « Les camps de concentration « La déportation, les camps de Classes de troisième : nazis rassemblaient une société 1964 concentration, la libération des « La Résistance intérieure fut, internationale captive et esclave. « La part prise par la Résistance camps. » pour ceux qui y ont participé, dans la libération du territoire. » Il y a 25 ans, ils furent libérés. un combat volontaire. Quelles Pourquoi furent-ils créés ? Pour- 1976 formes de courage et même 1965 quoi tant de milliers d’hommes « Dans quelle mesure la Résis- d’héroïsme a-t-elle comporté ? » « La déportation pour faits et de femmes s’y trouvaient-ils ? tance intérieure eut-elle besoin, Classes de terminale : de Résistance et le système Que représente cette libération pour exister, se développer, « Le civisme dans la Résistance concentrationnaire nazi. » pour les jeunes d’aujourd’hui ? » agir, combattre et triompher contre l’occupation et l’oppression 1966 d’une aide venue de l’extérieur : et pour la sauvegarde des droits « Les moyens de la lutte clandes- 1971 aide morale, aide fi nancière, de l’homme, de 1940 à 1945. » tine menée par les Résistants de « Le général de Gaulle, chef de aide en hommes et en arme- 1940 à 1944. » la Résistance française (18 juin ment ? » En 1979, à titre expérimen- 1940-8 mai 1945). » tal, les élèves de troisième 1967 À partir de 1977, des thèmes sont invités à présenter un « Les monuments de la Résis- 1972 différents sont souvent pro- « mémoire collectif » inspiré tance (y compris les plaques « La Résistance extérieure du posés pour les deux niveaux. par le thème national. Cette commémoratives).» 18 juin 1940 au 24 août 1944. » Sauf mention contraire les expérience est reconduite en

8 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 1980 pour être défi nitivement fi cacité de l’action clandestine adoptée l’année suivante. pendant la Résistance. » Classes de terminale : 1979 « François Jacob, prix Nobel de Classes de troisième : Médecine, déclarait le 18 juin « Les résistants n’ont pas com- 1980 : “Devant la menace d’as- battu pour la gloire, mais pour servissement, on verra toujours sauver la France et ressusciter la se dresser le petit groupe de liberté. Cependant, leur combat ceux pour qui la paix ne s’achète Depuis 1993, la Fondation de la Résistance réalise un dossier fut héroïque et glorieux. Recher- pas à n’importe quel prix : l’éter- pédagogique, largement diffusé en direction des établisse- chez et faites revivre les actions, nelle poignée de ceux qui, pour ments scolaires, afi n d’aider les élèves préparant le Concours les succès et les revers, les ex- témoigner, sont prêts à se faire national de la Résistance et de la Déportation. ploits des résistants de votre égorger. Pour ceux-là, le 18 juin département. » 1940 restera le symbole de l’es- rieure. Le rôle de Jean Moulin et du Classes de terminale : poir.” François Jacob s’enga- Conseil National de la Résistance. » « En quoi la Résistance a-t-elle gea à 20 ans dans les Forces Classes de troisième contribué à la sauvegarde et Françaises Libres (FFL). Il fut un et de LEP : à la promotion des droits de combattant de la Division Le- « En quoi les héros de la Résis- l’homme ? clerc qui, partie du Tchad, libéra tance tels que Jean Moulin et Le Jury national a choisi le thème Paris en août 1944. Que pensent Pierre Brossolette méritent-ils proposé aux élèves des classes les jeunes d’aujourd’hui de cette que survive leur souvenir ? » terminales en raison du tren- fi délité de François Jacob aux tième anniversaire de la Décla- convictions et aux engagements 1984 ration universelle des Droits de de sa jeunesse ? » « En 1984, nous fêterons le quaran- l’Homme, qui a été célébré le tième anniversaire de la libération 10 décembre 1978. Il est certain En 1982, le Concours est de la France. C’est donc à cette libé- que l’on retrouve, dans cette Dé- ouvert aux classes de pre- ration qu’est consacré le thème du claration, la plupart des objectifs mière. Concours national de la Résistance pour lesquels les résistants ont et de la Déportation 1984. » combattu de 1940 à 1945. » 1982 Classes de première Classes de troisième et de terminale : 1980 et de LEP : « La libération de la France en « Il y a 40 ans, le 18 juin 1940 de « La vie et la mort dans les camps 1944. Comment fut-elle réalisée Londres, le général de Gaulle de concentration nazis. » et quelle part y ont prises respec- vent-ils survivre en notre mémoire lançait son appel à la Résistance. Classes de première tivement les armées alliées, les en cette fi n du XXe siècle ? Résistance en France vaincue, et de terminale : Forces françaises libres venues En quoi importent-ils à notre occupée, opprimée (Résistance « La déportation et les camps de l’extérieur et la Résistance in- avenir ? » intérieure) et dans l’empire co- de concentration fi gurent parmi térieure ? » lonial français (Résistance exté- les pièces maîtresses et les sym- Classes de troisième 1986 rieure). boles redoutables de la domi- et de LEP : Classes de troisième Il y a 35 ans, en mai 1945, la France nation national-socialiste. Où ? « La libération de votre ville, de et de LEP : pouvait, à part entière, participer Pourquoi ? Comment ? » votre département, de votre « Les diverses formes de la Résis- à la victoire des armées alliées et région. » tance intérieure : les réseaux, les contribuer à la libération des der- 1983 mouvements, les maquis. » niers survivants des camps nazis « L’année 1983 sera pour les résis- 1985 Classes de terminale de concentration et d’extermina- tants l’année Jean Moulin. Il y aura « En 1984, nous avons fêté le qua- et de première : tion. Pourquoi ces événements quarante années, en effet, que celui- rantième anniversaire de la libé- « “La France et le monde luttent et historiques méritent-ils de de- ci a unifi é les divers mouvements de ration, dont le général de Gaulle souffrent pour la liberté, la justice, meurer vivants dans la mémoire résistance dans le Conseil National fut pour nous un de principaux ar- le droit des gens à disposer d’eux- des Français ? de la Résistance ; puis, arrêté par la tisans. En 1985, nous célébrerons mêmes. Une telle victoire fran- Les Français de 1980 : Que sa- , il a subi une mort atroce et le quarantième anniversaire de çaise et humaine est la seule qui vent-ils, que pensent-ils de ces courageuse. À tous points de vue, la victoire sur l’Allemagne nazie puisse compenser les épreuves événements ? » Jean Moulin peut être considéré et de la libération des survivants comme l’exemple le plus admirable trop peu nombreux des camps de sans exemple que traverse notre 1981 du résistant. C’est lui qui inspire les concentration. patrie, la seule qui puisse lui ouvrir Classes de troisième thèmes choisis par le jury national. » Pourquoi des faits historiques tels de nouveau la route de la gran- et de LEP : Classes de première que la déportation des résistants deur. Une telle victoire vaut tous « Les conditions matérielles et et de terminale : et leur emprisonnement dans les les efforts et tous les sacrifi ces. morales indispensables à l’ef- « L’unité de la Résistance inté- camps de concentration nazis doi- Nous vaincrons.”

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 9 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD

Cette déclaration du général de faite le 18 juin 1940 par le gé- 1989 intérieure, personnalité choisie Gaulle du 23 juin 1942 explicite néral de Gaulle, à la fi n de son « En quoi les résistants de la soit dans le cadre du départe- les objectifs essentiels pour les- appel historique : “Quoi qu’il ar- Deuxième Guerre Mondiale ont- ment, soit dans le cadre national quels les résistants ont combattu : rive, la fl amme de la résistance ils repris, réanimé la grande (telles que , l’indépendance nationale, la dé- française ne doit pas s’éteindre tradition patriotique, démocra- Jean Moulin, Pierre Brossolette, mocratie et les droits de l’homme. et ne s’éteindra pas. Demain, tique et civique, léguée aux gé- le général Delestraint…) ». Dans quelle mesure les résis- comme aujourd’hui, je parlerai à nérations futures par la Révolu- tants ont-ils gagné ? En quoi les la radio de Londres.” tion Française ? » 1994 jeunes Français sont-ils encore, L’histoire de la Résistance dé- « En 1994 la France célébrera le en 1986, bénéfi ciaire de ces montre l’alternative, plus actuelle 1990 cinquantième anniversaire de sa combats ? Comment peuvent-ils, que jamais, offerte aux sociétés « Le général de Gaulle, chef de libération. Il convient de mesu- de manière différente évidem- humaines par les progrès de la la France Libre et de la Résis- rer les diffi cultés et les dangers ment, assumer les mêmes res- science et de la technique. Celles- tance. » que durent affronter et surmon- ponsabilités ? » ci mettent à leur disposition de ter les résistants et d’expliquer 1991 les raisons pour lesquelles ils puissants moyens de communica- 1987 « La Déportation et les camps s’engagèrent comme volon- tion qui peuvent servir au meilleur « Durant la Deuxième Guerre nazis de concentration. » taires dans ce combat ». Mondiale, de 1940 à 1944, la comme au pire, à la liberté comme à l’asservissement, à la démocra- 1992 presse et la radio (la télévision En 1995, le Concours est ouvert n’existait pas encore) furent uti- tie comme à la dictature. » Classes de première et de terminale : aux classes de Seconde. lisées massivement par les nazis 1988 et les collaborateurs pour leur « Le conseil national de la Ré- Classes de terminale 1995 propagande et, par conséquent, sistance : sa création, son rôle, Classes de seconde, et de première : contre la Résistance. Mais celle- son programme pour la France de première et de terminale : « Les diffi cultés et les dangers que ci sut répliquer : elle créa sa libérée. » « La libération des camps de durent affronter les résistants propre presse clandestine mal- Classes de troisième concentration et d’extermination de l’intérieur. 1° Le recrutement. gré les diffi cultés d’impression et de LEP : nazis par les Alliés victorieux en 2° L’action dans le secret et et de diffusion. Elle fut suscitée, « Les diverses formes de la Ré- 1945 prouve qu’une certaine idée dans l’ombre. 3° Les combats. encouragée, soutenue et même sistance dans votre ville, dans de l’homme constituait l’enjeu 4° La répression menée contre dirigée de façon constante par votre région. » essentiel du confl it. Montrez que les résistants par les occupants la radio “Les Français parlent aux la résistance, sous toutes ses et le régime de Vichy. 5° Les ar- 1993 Français” qui, chaque soir, émet- formes, était porteuse de cette restations et les tortures. 6° Les Classes de première tait de Londres ses messages valeur. Ce combat a-t-il encore emprisonnements. 7° Les exécu- et de terminale : entendus, malgré le brouillage. des résonances aujourd’hui ? » tions et la déportation. » « Pourquoi les Résistants ont-ils Ainsi fut réalisée la promesse Classes de troisième Classes de troisième combattu non seulement contre et de lycée professionnel : et de LEP : l’Allemagne nazie puissance « La capitulation de l’Allemagne « La Résistance extérieure. occupante, mais aussi contre le nazie en 1945 est une victoire 1° Sa naissance, son organisation, gouvernement de “l’État Fran- pour la dignité de l’homme. En son évolution. Le général de Gaulle çais” du Maréchal Pétain ? » vous appuyant sur des docu- à Londres puis à Alger. 2° Les rallie- Classes de troisième ments et des témoignages de ments des divers territoires. 3° Ses et de lycée professionnel : membres de la Résistance et combats. 4° Les débarquements « Relatez la vie et les actions de survivants des camps nazis, en France. 5° Ses relations avec la d’une personnalité ayant joué un dégagez l’enseignement qu’on Résistance intérieure. » rôle important dans la Résistance peut en tirer. » 1996 Classes de seconde, de première et de terminale : « Être jeune dans les années noires (1940-1945). » Troisième et lycée professionnel : « Les jeunes dans la Résistance. » 1997 « Les femmes dans la Résis- tance. »

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Reconnue d’utilité publique par décret du 5 mars 1993. Sous le Haut Patronage du Président de la République N° 43 - décembre 2005 - 4,50 €

1998 ou après leur détention, ou par « Entre les deux guerres mon- des non déportés, vous paraît- Concours National diales, la France a largement elle susceptible de contribuer à de la Concours national Résistance et de la accueilli des immigrés. Quel rôle la transmission de la mémoire de de la Résistance Déportation et de la Déportation 2010 - 2011 ont pu jouer ces étrangers dans ce qui constitue un crime contre 2005-2006 la résistance à l’occupant ? Beau- la personne humaine ? » coup d’entre eux sont morts pour la France, soit au cours d’actions À partir de 2003, les jurys de résistance, soit dans les camps départementaux du Concours de déportation. » peuvent proposer le choix aux candidats participant aux 1999 épreuves individuelles entre « Des plaques, des stèles, des mo- une composition d’une part, et sif joué par la population des diverses, et n’appartenaient pas numents évoquent le souvenir des une étude de documents don- actions de résistance et la mémoire campagnes dans la lutte contre forcément à un mouvement ou nant lieu à des questions et à l’occupant. » un réseau organisé. des victimes des persécutions et la rédaction d’un paragraphe Les recherches des élèves pour- des répressions de la période de argumenté sur un sujet précis 2007 ront porter sur les témoignages 1940 à 1945. Recherchez et com- d’autre part. « Le travail dans l’univers locaux recueillis ou lus. Il leur re- mentez l’histoire de ces femmes, concentrationnaire nazi ». de ces hommes, de ces enfants. » 2003 viendra de présenter les formes « Les jeunes dans la Résis- d’actions prises par cette résis- Depuis 2008, de nouvelles 2000 tance. » tance et d’analyser les valeurs « L’univers concentrationnaire épreuves, dites de « travaux qui sous-tendent de tels actes. » dans le système nazi. Les camps 2004 audiovisuels » portant à six de concentration et d’extermina- « Les Forces Françaises Libres. » le nombre de catégories du 2009 tion font partie intégrante du sys- concours, marquent la prise « Les enfants et les adolescents tème totalitaire nazi. Quels furent 2005 en compte de nouvelles pra- dans le système concentration- « 1945 : Libération des camps et les causes, le fonctionnement et tiques pédagogiques dans les naire nazi. découverte de l’univers concen- les conséquences de ce phéno- classes, liées aux technologies Ce thème peut être l’occasion de trationnaire ; crime contre l’hu- mène concentrationnaire ? » d’aujourd’hui. Les lauréats réfl échir, entre autres, sur le pro- manité et génocide. récompensés pour la réalisa- cessus et les circonstances qui 2001 Ce thème, choisi à l’occasion tion d’un travail exclusivement ont contribué à faire des enfants « Née de réactions spontanées et du soixantième anniversaire audiovisuel reçoivent le prix et des adolescents les victimes du éparses, d’engagements divers, de la Libération des camps de spécial du conseil supérieur système concentrationnaire nazi. la Résistance française a évolué concentration nazis, est destiné de l’audiovisuel (CSA) pour Le sort de ces enfants et adoles- suivant des formes multiples et à permettre une réfl exion sur la la mémoire de la Résistance et cents sera au cœur de l’étude et s’est unifi ée autour de valeurs prise de conscience universelle de la Déportation. de la réfl exion des candidats. communes afi n de libérer le terri- de la réalité concentrationnaire, On pourra prendre en compte l’évo- 2008 toire. Suivant les ressources dont et plus largement, sur l’instau- lution, dans l’après-guerre, du droit « L’aide aux personnes persécu- vous disposerez localement, vous ration de notions juridiques international et national dans le do- tées et pourchassées en France montrerez comment la France internationales, défi nissant les maine de la protection de l’enfance. » Libre et les résistants de l’intérieur notions de crimes contre l’hu- pendant la Seconde Guerre mon- se sont organisés pour aboutir à la manité et de génocide. » diale : une forme de résistance. 2010 victoire. » Ce thème peut être l’occasion « L’appel du 18 juin 1940 du gé- 2006 de réfl échir, entre autres, sur néral de Gaulle et son impact 2002 « Résistance et monde rural. les aspects suivants de la ré- jusqu’en 1945. « Connaissance de la déporta- Ce thème peut être l’occasion sistance. Prisonniers de guerre À partir des circonstances et du tion : la production littéraire et de réfl échir sur la résistance évadés, aviateurs alliés en fuite, contenu de ce texte fondateur, artistique. Recherchez et ana- du monde rural, les rapports résistants pourchassés ou sou- les candidats étudieront la por- lysez des témoignages et des entre la résistance urbaine et le haitant poursuivre le combat tée de l’appel du 18 juin, ainsi documents de différente nature monde rural, la relation des ré- hors de métropole, étrangers que les engagements qu’il a sus- vous permettant d’approfondir sistances avec l’espace rural. réfugiés, Juifs, Tziganes, francs- cités en France, dans l’empire vos connaissances sur l’histoire Les recherches des élèves pour- maçons, réfractaires au STO… français et à l’étranger. » de la déportation et de la résis- ront porter, entre autres, sur ont été aidés par de nombreux tance dans les camps de concen- les aspects de la Résistance Français. Ces sauveteurs, qui 2011 tration nazis. – par exemple les maquis, les ont souvent payé de leur vie des « La répression de la Résis- En particulier, l’étude de produc- refuges, le camoufl age des ré- gestes essentiels de solidarité et tance en France par les autori- tions littéraires et artistiques réa- fractaires et des persécutés d’humanité, venaient de tous les tés d’occupation et le régime lisées par des déportés durant – qui témoignent du rôle déci- horizons, avec des motivations de Vichy. » 

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 11 2 – Le « goût de l’histoire » Le Concours permet la rencontre entre des élèves et des acteurs d’une histoire toujours vivante.

Lucie Aubrac « militante de la mémoire »

Décédée en 2007, Lucie Aubrac fut saluée unanimement comme étant une personnalité phare de la résistance. Son ami Serge Ravanel, compagnon de la Libération, lui rendit hommage en évoquant particulièrement la personnalité d’une « femme dotée d’une énergie et d’une audace hors du commun, capable de soulever des montagnes.[…] Un esprit très indépendant. Elle était persévérante et était douée d’un esprit d’initiative formidable. » (1)

de 1941 à 1943, elle souhaitait lors de d’Enghien, et enfi n, du fait de la carrière ses interventions devant un public sco- internationale de son mari, à Rabat et à laire être présentée comme une simple . Dans ses différents postes, elle résistante. Le mot renvoyait pour elle souhaite entretenir avec ses élèves des non seulement à son activité passée, relations « vivantes et personnelles », mais aussi à son attachement viscéral peu encline à se satisfaire d’un ensei- aux valeurs républicaines qu’elle faisait gnement purement magistral et sou- s’incarner au quotidien par ses actes. Le mis à des règles administratives qui lui

© L’éveil de la Haute Loire. © L’éveil Concours national de la Résistance et de pesaient. Son goût prononcé pour une la Déportation lui a permis de manifes- façon différente d’enseigner est salué a résistante et son parcours sont ter son intérêt pour une histoire vivante, inégalement par les différentes autori- bien connus depuis sa participa- liée dans son esprit à des références tés tout au long de sa carrière. L tion active à la création et à l’ani- civiques essentielles et transmises par Fidèle au mouvement Libération-Sud mation du mouvement Libération-Sud, des méthodes innovantes. qu’elle a animé, elle en devient en 1948 sa participation à l’évasion de son mari Cet engagement est lié sans doute la liquidatrice nationale, chargée notam- Raymond en 1943, son départ mouve- chez Lucie Aubrac à sa propre expé- ment d’établir l’appartenance à l’organi- menté vers Londres. Elle y arrive pré- rience d’enseignante. sation de résistance. Elle siège sans dis- cédée d’une notoriété déjà grande, qui continuer jusqu’aux années 2000 à la lui vaut d’intervenir à plusieurs reprises commission nationale des Combattants sur les ondes de la BBC et d’être la pre- Enseigner et résister Volontaires de la Résistance. mière femme désignée pour siéger à Reçue à l’École normale d’institu- Parallèlement, bien que plus épisodi- l’Assemblée consultative provisoire. trices, bachelière, étudiante à la Sor- quement, elle participe aux travaux du Devenue alors une fi gure incarnant la bonne puis enfi n agrégée d’histoire à 26 Comité d’histoire de la Deuxième Guerre résistance des femmes, elle est même ans en 1938, sa courte carrière la mène mondiale envisageant, sans concréti- l’héroïne d’une bande dessinée anglo- alors successivement à Strasbourg puis ser ce projet, d’écrire une histoire de saxonne Lucie to the rescue publiée au à Lyon en 1941. Suspendue en 1943, elle Libération-Sud. Dès 1945, la période printemps 1946. reprend ses activités professionnelles récente lui a inspiré pourtant la rédac- Cette action résistante marqua dura- après sa réintégration obtenue en 1946 tion « à chaud » d’un court volume publié blement sa vie. Comme le rappelait, en et elle exerce successivement, après en 1945, brève synthèse consacrée à 2007, un enseignant du lycée Édouard une période de disponibilité, dans dif- La Résistance. Naissance et organisa- Herriot à Lyon, où elle avait enseigné férents lycées parisiens puis à celui tion (1), dont l’écho fut cependant limité.

12 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 DR DR Travaux collectifs du collège Henri Barbusse d’Alfortville

Plusieurs fois primés tant au niveau départe- après examen par les jurys départementaux mental que national, les travaux réalisés au ou le jury national, musées ou associations cours des années par les élèves du collège peuvent aussi en conserver des exem- Henri Barbusse à Alfortville (Val-de-Marne) plaires. Certaines copies ont aussi été pu- constituent une source documentaire pré- bliées par la presse associative ou dans les cieuse pour comprendre l’évolution de la comités d’organisation du Concours dans mémoire scolaire de la Seconde Guerre mon- les brochures-palmarès diffusées après la diale et des pratiques pédagogiques mises remise des prix départementaux. À l’échelle en œuvre sur un même thème. locale, les travaux sont fréquemment mis Si les archives de quelques établissements en valeur des travaux dans les musées, scolaires conservent les travaux réalisés, bibliothèques et CDI ou les mairies. DR

Ce n’est que plus tard, et grâce aux tout en prenant la parole comme lors de daire, lui rendent hommage en portant témoignages donnés lors d’entretiens la présentation du thème à la Sorbonne son nom de Béziers à Tourcoing, de publiés, que son parcours et celui de son comme en 2004 sur les Français libres, Morvillars dans le Territoire de Belfort à époux, mais aussi l’histoire de ses cama- rades résistants, touchèrent un plus Elle souhaitait lors de ses interventions large public. Sa notoriété croissante, favorisée par sa capacité à intervenir devant un public scolaire être présentée dans les médias et le succès de son livre comme une simple « résistante »… Ils partiront dans l’ivresse, la mettent sur le devant de la scène publique. elle fait ainsi bénéfi cier un public très Vertou en Loire-Atlantique. L’université nombreux et très divers de ses interven- de Lyon 2 a inauguré en janvier 2008 tions passionnées. en présence de l’am- Témoigner Son attachement au Concours se phithéâtre Lucie Aubrac. Cette forte Elle en fait profi ter le CNRD, partici- manifeste par la création avec son mari personnalité a profondement marqué pant aux travaux de son jury national, d’un prix spécial grâce au versement en l’histoire du CNRD.  correctrice de nombreuses copies des 2001 à la Fondation de la Résistance de élèves participants, intervenant devant l’intégralité des dommages et intérêts (1) in La Lettre de Fondation un auditoire toujours tenu en haleine perçus à l’issue d’un procès, afi n de per- de la Résistance n° 49 de juin 2007. sur le thème annuel, mais ayant surtout mettre la remise d’un prix aux lauréats, (2) Paris, éd. Robert, 1945. à cœur d’en actualiser le message. lycéens et collégiens, concourant dans Ainsi, en 2002-2003 elle effectue la catégorie des devoirs individuels. plus d’une cinquantaine de déplace- L’empreinte marquante de son souve- ments dans toute la France, s’exprimant nir se révèle à son décès en 2007 lors devant des milliers d’élèves et d’ensei- de cérémonies en son honneur orga- Les références à la vie de Lucie gnants qu’elle marque durablement. nisées spontanément dans certains Aubrac sont extraites de la biogra- Ne refusant aucune demande, du plus établissements par les enseignants. phie rédigée par Laurent Douzou modeste établissement scolaire à ceux De nombreux établissements, surtout et publiée chez Perrin en 2009. considérés comme plus prestigieux, des collèges de l’enseignement secon-

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 13 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD

Le « goût de l’histoire » et la transmission de la Mémoire avec le CNRD. Témoignage de Guillaume Agullo, ancien lauréat du CNRD.

es premiers souvenirs relatifs au Concours de la Résistance M et de la Déportation remontent à quelques années en arrière, lors de ma troisième au collège Bellevue de Toulouse. C’était en 1987, et ma professeure d’His- toire, Madame Alauzet, nous avait alors parlé en début d’année d’une épreuve qui © Conseil général de la Haute-Garonne s’organisait autour de la Résistance et de © Conseil général de la Haute-Garonne sa mémoire. Progressivement, au cours du 1 - Guy Marty de retour au kommando d’Ellrich, trimestre, les allusions ont été de plus en encadré et soutenu par les jeunes lauréats plus fréquentes, et l’idée de ce concours a 2 - Pierre Laidet, ancien du camp, témoigne lors du voyage. commencé à germer. Et puis, un matin, nous avons vu arriver dans notre classe trois « héros », trois résis- La transmission s’en trouve radicale- Je suis ainsi devenu progressivement tants qui venaient nous rencontrer. Je me ment changée : se trouver dans les lieux un relais du message des résistants et souviens alors de notre excitation à l’idée mêmes de la souffrance des témoins qui des déportés, en m’inscrivant dans cette de les rencontrer, et de nos questions nous la livrent est une expérience très « famille de mémoire » dans laquelle je me simples et naïves souvent dictées par les forte, et bouleversante. Mais cela fait aussi reconnais. Et c’est ainsi que j’accompagne images des fi lms : « Combien d’Allemands partie des moments qui font grandir et qui et encadre à mon tour les nouveaux lau- vous avez tué ? Est-ce que vous avez fait font prendre conscience du monde qui réats du Concours pour la Haute-Garonne. sauter un pont ? », etc. Face à notre enthou- nous entoure. Ces voyages se poursuivent en effet, et siasme, ils nous ont répondu simplement, Cela n’est un paradoxe qu’en appa- chaque année des résistants déportés (ils et avec beaucoup d’émotion, loin de rence : le Concours de la Résistance et de sont ici encore deux à pouvoir le faire), pui- l’image héroïque que nous avions en tête. la Déportation, et ces voyages de mémoire, sent dans leur courage pour revenir sur ces Et si un mythe s’est alors un peu brisé, en sont en réalité des moyens et des outils qui lieux, et les affronter, afi n de transmettre. tout cas une découverte s’est imposée à permettent de préparer l’avenir. Pour ma Le voyage change tous les ans d’itiné- moi, celle de la nécessité de comprendre part, je revendique fortement d’être de raire pour aller dans les différents camps cette période, dans tout ce qu’elle avait ces « générations de vigilance », déposi- nazis. Il en est un qui résonne toujours d’essentiel y compris pour mon quotidien taires parmi d’autres du message commun autrement en moi, c’est celui de Mauthau- de jeune collégien. C’est d’ailleurs ce qui transmis par les résistants et les déportés : sen, dont je suis membre de l’Amicale. m’a fait me rapprocher de mon grand-père, notre liberté est un bien commun, sûre- C’est le premier dans lequel je suis rentré, lui-même ancien résistant mais dont je ne ment le plus précieux, mais qui reste d’une à 14 ans. C’est là que j’ai perdu beaucoup savais rien. grande fragilité. Ces voyages, ces temps de mes illusions, et où j’ai senti combien J’ai été lauréat du concours pour la de mémoire, ont au moins autant à voir l’Homme pouvait être mauvais. Mais c’est Haute-Garonne en 1987 (puis en lycée avec la transmission de l’histoire, qu’avec aussi l’endroit où j’ai compris, grâce aux en 1990), et j’ai eu alors la chance de l’éducation à la citoyenneté des jeunes déportés, le sens profond de mots tels que participer avec quinze autres lauréats, à auxquels ils s’adressent. Fraternité, Solidarité, Tolérance. un voyage de mémoire en Autriche, pour Je sais pour ma part à quel point le C’est cet héritage-là, acquis au prix de découvrir le camp de concentration de concours de la Résistance de 1987 (le tant de souffrances, et transmis inlassa- Mauthausen et certains de ses komman- thème portait sur la presse clandestine…), blement par les résistants et les dépor- dos annexes. et surtout le voyage de mémoire qui a tés, que nous nous devons de défendre Tous les ans en effet, le Conseil général suivi, m’ont changé. Ils ont en grande par- aujourd’hui. La raison même de l’exis- de la Haute-Garonne, comme d’autres col- tie déterminé mon parcours d’étudiant (ce tence du Concours de la Résistance et de lectivités en France, organise un voyage fut l’histoire, naturellement), puis profes- la Déportation est là, car donner aux nou- du souvenir, afi n que des jeunes puissent sionnel, puisque je suis aujourd’hui res- velles générations les moyens de com- découvrir ces lieux de mémoire en compa- ponsable du Musée départemental de la prendre le passé, c’est leur permettre de gnie de résistants et de déportés. Résistance et de la Déportation à Toulouse. construire un avenir.

14 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 Photos Marc Fineltin. Mardi 18 décembre 2007, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, cinq témoins et deux historiens présentent le thème 2007-2008 : « L’aide aux personnes persécutées et pourchassées en France pendant la Seconde Guerre mondiale : une forme de résistance » devant plus d’une vingtaine de classes des lycées et collèges de Paris et de la région parisienne participant au Concours national de la Résistance et de la Déportation. À la tribune : Mme Joëlle Dusseau, inspectrice générale d’Histoire-Géographie, présidait et animait cet après midi pédagogique, entourée de Mmes Rachel Jaeglé, Odile de Vasselot, Frida Wattenberg et de MM. Angilbert de Franssu et Jean-Raphaël Hirsch, témoins et acteurs de cette forme de Résistance ainsi que des professeurs Laurent Douzou et Philippe Joutard.

Quelques exemples de rencontres témoins-élèves initiées par Mémoire et Espoirs de la Résistance et le Musée de la Résistance nationale

haque année, depuis quinze Lors des débats très riches, témoins du Morbihan, de la Sarthe (cf. articles ans, sous le parrainage des et historiens dialoguent et répondent pages 26 et 27). C Fondations représentées au aux questions posées par une assis- De son côté, dans le Val-de-Marne, jury national du Concours national tance toujours nombreuse de collégiens le Musée de la Résistance nationale à de la Résistance et de la Déportation et lycéens qui montrent, à cette occa- Champigny-sur-Marne, en partenariat mais également de l’Association des sion, la pertinence de leurs interroga- avec le Centre Régional de Documen- Professeurs d’Histoire et de Géogra- tions sur l’engagement des résistants et tation Pédagogique de Créteil (qui phie (APHG), l’association Mémoire des déportés. assure l’animation de la rencontre et la et Espoirs de la Résistance (MER) et En région, de nombreux délégués de mise en ligne d’extraits vidéo) et avec l’Association des Amis de la Fonda- MER participent également à la promo- le soutien matériel du Conseil général tion pour la Mémoire de la Déportation tion du Concours national de la Résis- organise chaque année une réunion (AFMD) organisent à Paris une séance tance et de la Déportation grâce à des de présentation du thème du Concours de présentation du thème du Concours réunions analogues qui se sont tenues national de la Résistance et de la destinée aux élèves des classes de col- notamment dans les départements des Déportation à destination des élèves lèges et lycées. Bouches-du-Rhône, de la Côte-d’Or, du département. 

Le 25 novembre 2009, à Créteil, rencontre autour du thème du CNRD « L’appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle et son impact jusqu’en 1945 ». À la tribune : Stéphane Hessel, Yves Guéna, Éric Brossard, Raymond Aubrac, Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Christian Favier, François-René Cristiani-Fassin. © Musée de la Résistance nationale à Champigny-sur-Marne.

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 15 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD

Une des premières copies primées en 1961

Jean-Philippe Genet, élève en classe de philosophie au lycée Louis Le Grand à Paris.

Parmi les douze lauréats retenus récompensés par le jury national du « prix de la résistance » en 1961 fi gure Jean-Phi- lippe Genet, alors élève au lycée Louis Le Grand à Paris. Aujourd’hui professeur d’histoire médiévale à l’UFR d’histoire de l’université Paris I, il est attaché au lien entre l’université et l’enseignement secondaire et préside la régionale d’Île-de- France de l’Association des professeurs d’histoire et de géo- graphie (APHG). Issu d’une famille d’enseignant, son père Lucien Genet fut notamment inspecteur général d’histoire et géographie, Jean- Philippe Genet composa, suivant le sujet posé, une copie rela- tant un souvenir de la mémoire familiale de la Résistance. S’il ne garde aujourd’hui que peu de souvenirs du Concours pro- prement dit, il conserve d’autant mieux le souvenir du contenu de sa copie que celle-ci évoquait un épisode tragique de l’été 1944 dans le Gers, où se trouvait la maison de sa famille maternelle. Rédigé dans une langue élégante, le devoir du lauréat rend compte à la fois de la narration historique comme forme pré- dominante d’exercice scolaire à cette époque, de l’impor- tance de la mémoire personnelle et familiale des événements comme évocation de l’histoire de la résistance et enfi n de la place essentielle de la répression comme élément constitutif de cette mémoire de la Résistance. © Fondation de la Résistance.

uand on veut passer de la val- La colline du fond est complètement Deux, je crois, réussirent à s’échapper : lée de la Lauze (1), qui se trouve pelée : c’est là d’où vient la Lère. Enfi n, l’un en grimpant dans un arbre, l’autre Qencore en Armagnac, à la val- celle qui fait face au monument est cou- en se jetant au fond d’une mare boueuse lée de la Gimone, où confi nent Com- verte de chênes et de châtaigniers. Un où il put respirer à l’aide d’un roseau. minges et Limagne, on peut emprunter peu plus loin dans la vallée, un espèce Notre maison se trouve de l’autre côté une petite route goudronnée, chose de piton surmonté d’une ferme fortifi ée, de la Lauze, à quelques kilomètres au rare dans la région. Dès qu’on a passé détourne la rivière de sa voie. nord de Meilhan. Elle est entourée de trois la Lauze, une terrible côte vous mène C’est ici qu’est venue s’achever l’odys- ou quatre autres fermes, disséminées le au-dessus d’un espèce de trou. Là, sée d’un groupe de 80 maquisards. long du chemin qui va de Moncorneil sur un peu en contrebas, deux bornes Ils venaient de la vallée du Gers, de l’Arratz à la vallée de la Lauze. A cette blanches marquent l’entrée d’un vaste Mirande et avaient traversé le dépar- époque, je n’étais pas né, et je ne peux champ. A une centaine de mètres, se tement du Gers dans sa moitié. Là, à donc avoir de souvenirs directs. Mais on dresse un mur de lourdes pierres, sur- Meilhan, ils s’étaient arrêtés ; pendant m’a souvent raconté l’événement et je monté d’une large tour. Sur le ciel, se la nuit, les Allemands, munis d’artillerie peux très bien m’imaginer ce qui s’était profi le la silhouette tordue d’un auto- légère, s’étaient camoufl és sur la colline passé. car rouillé. Tout en bas, la source de la d’en face. Le lendemain matin, il y eut Les maquisards étaient arrivés, un soir. Lère, affl uent de la Gimone. Les parois deux ou trois coups de fusils : ainsi, les Ils étaient restés deux jours, et puis ils qui ferment cet espèce de cirque sont maquisards surent qu’ils étaient pris. étaient repartis. Ils s’étaient logés tant très raides. Celle où se trouve le maquis La résistance sur cette colline dénudée, bien que mal dans les dépendances. En est verte, mais un seul arbre s’y dresse. était impossible. Ils furent tous fusillés. outre, ils ne bougeaient pas de crainte de

16 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 Vers quatre heures, l’on vit les trois La patrie d’abord. Oh, il est probable que camions Henschel et le petit canon des- l’homme à la glace n’avait pas été plus loin cendre la côte, et tourner à droite vers que le chef-lieu du département, Auch, de Meilhan. Là, dans la nuit, ils rejoignirent toute façon, pas plus loin que Toulouse. et enveloppèrent les maquisards. Mais il se sentait attaché à la France, sans Il serait inexact de dire que les maqui- avoir besoin d’y réfl échir. Il était Français, sards n’avaient rien laissé chez nous. Ils voilà tout et il luttait pour la France. Il ne avaient laissé une petite glace, ronde, luttait pas contre l’Allemagne, il luttait fêlée. Sur le dos se trouvait un dessin contre le nazisme. Vercors(6) a bien senti le représentant une dame, avec une robe à problème et a bien opéré la subtile distinc- crinoline et avec un de ces chapeaux qui tion entre les deux choses. couvrent les oreilles, du genre de ceux Pour en revenir au maquisard, je me que l’on voit aux femmes de l’époque suis demandé ce qu’il en pensait ce soir- 1830. La femme portait un foulard rouge. là, précisément. Le fond est de teinte ivoire. C’était un des J’ai toujours trouvé la question inso- maquisards qui, avant de partir, l’avait luble, parce que je connaissais l’issue laissée tomber dans le foin de l’étable. de l’affaire. Lui, la devinait-il ? Je ne sais Chaque fois que je vois cette glace, je pas. Peut-être la soupçonnait-il, sans en ne peux m’empêcher de repenser à ces connaître exactement l’échéance. Mais il hommes et beaucoup plus profondément, pouvait toujours espérer, non seulement beaucoup plus intimement que devant le dans ses propres forces, mais aussi dans froid monument de Meilhan. Ce n’est pas celles des autres résistants. Et cet espoir, tellement à leur mort, à leur sacrifi ce, au parce qu’il dépassait sa simple personne sang que je pense. C’est beaucoup plus, à lui, était assez grand pour submerger à leur esprit, à ce qu’ils étaient quand tout le reste et lui rendre confi ance. ils étaient encore vivants. Par exemple, je me suis souvent demandé ce qu’était se laisser voir. En effet, en face de la mai- l’homme à la petite glace pour sac de Comme bien d’autres lauréats, son, il y a un petit ruisseau, et là, une autre dame, car c’est plus l’esprit qui animait Jean-Philippe Genet a les honneurs ferme, devant laquelle il y a une route. Là ces hommes que j’aime évoquer que leur de la publication de sa copie dans la presse associative. Cette presse aussi, il y avait des maquisards. Le second acte fi nal. reste aujourd’hui la seule source soir, une Mercédès vert foncé grimpa D’abord leur résistance, avant toute pour retrouver le contenu des pre- jusque là, puis redescendit. De suite, autre chose, était une révolte : révolte mières copies du Concours. les maquisards partaient, abandonnant contre ce qu’ils désapprouvaient, révolte armes et bagages. Le lendemain matin, qu’ils pouvaient extérioriser dans cette quand ma grand-mère ouvrit les volets, lutte. Beaucoup de Français désapprou- elle vit dans la ferme d’en face, juste sur vaient le fascisme. Mais beaucoup se sont Notes : le perron, un petit canon de campagne contentés de maudire Hitler mentale- (1) L’action décrite se déroule dans la vert. Trois camions Henschel (2) étaient ment, de haïr des S.S. et ont continué leur partie sud-est du département du Gers. garés dans la cour. Puis, vers dix heures, petit train-train, en pestant un peu plus à (2) Henschel : camions militaires de la on vit les soldats vêtus de vert sombre, cause des restrictions alimentaires et des marque Henschel, célèbre fabriquant descendre la paguère (3) et remonter le alertes. Heureusement, certains ont eu le de matériel militaires (engins blindés, moteurs…) ayant participé à l’effort de soulan (4). Ils arrivèrent peu après. Chez courage de leurs opinions : la Résistance guerre de l’Allemagne nazie. nous, les maquisards n’avaient presque s’est alors établie, aidée par l’Angleterre (3) Paguère : versant nord en occitan, rien laissé. Les soldats fouillèrent un peu, et les Français qui, depuis Londres, parti- en général moins exposé au soleil sans plus, puis demandèrent des œufs. cipaient à cette lutte. Tous les Résistants (4) Soulan : versant sud en occitan, Après en avoir gobé une bonne douzaine, ont agi plus par volonté, par raisonne- exposé au soleil ils s’en allèrent. ment, que par hargne ou par haine. Ça, (5) Pont-Audemer : commune du dépar- Chez la voisine, l’affaire avait été plus c’était bon pour le civil qui se faisait pin- tement de l’Eure (Normandie), célèbre grave. En effet, les maquisards avaient cer avec le kilo de beurre envoyé par le pour sa production laitière. abandonné là une dizaine de fusils. Ils cousin de Pont-Audemer (5). Le Résistant (6) Jean Bruller dit Vercors (1902-1991) : étaient au fond de la mare… Mais là était mathématiquement engagé, de par résistant et écrivain, auteur du récit aussi, les soldats allemands retournè- son propre choix, dans cette lutte des Le silence de la mer et co-fondateur des rent quelques meubles, par acquit de forces du bien et du mal. Quel bien avait-il éditions de Minuit, maison d’édition conscience, puis demandèrent des œufs. à défendre ? clandestine sous l’occupation.

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 17 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD 3 – Un Concours actuel Aujourd’hui le Concours fonctionne grâce aux enseignants et au soutien de multiples partenaires

Le jury national du Concours

e jury national du Concours est ministères de la Défense et de l’Éducation composé de représentants des nationale. Il est présidé par Joëlle Dus- L Fondation de mémoire et d’histoire seau, inspectrice générale d’histoire et de (Fondation de la Résistance, Fondation géographie. pour la Mémoire de la Déportation, Fonda- Le jury se réunit à plusieurs reprises tion de la France Libre, Fondation Charles dans l’année, pour discuter et adop- de Gaulle, Fondation pour la Mémoire de ter le thème annuel du CNRD, pour la la Shoah ) d’associations d’anciens résis- correction des devoirs et travaux col- tants et déportés, de personnalités issues lectifs, transmis par les jurys départe- de la Résistance et de la Déportation, mentaux. Ce sont plusieurs centaines d’enseignants du secondaire, d’univer- de copies, dossiers, CD et DVD qui Fonds CNCVR 72AJ- Archives nationales ( site de Paris). sitaires, de représentants d’associations sont ainsi corrigés bénévolement pen- tants et déportés. Après ces correc- œuvrant pour le CNRD (APHG, Fédération dant les mois de l’été par les membres tions, le jury établit le palmarès des des lauréats) et de représentants des du jury, enseignants et anciens résis- lauréats. 

Le rôle des jurys départementaux : l’exemple du Jura

Michel Bodin, professeur d’histoire au lycée Charles Nodier à Dole dans le Jura, docteur ès lettres et sciences humaines, est membre du conseil d’administration du musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon et préside le comité du Concours de la Résistance et de la Déportation du Jura. Il a bien voulu nous présenter brièvement le fonctionnement du Concours dans son département, qui est marqué par une forte participation des élèves.

e Concours national de la Résis- le palmarès départemental fi nal. Ce récompenser les élèves primés au tance et de la Déportation fonc- groupe est placé sous la responsabilité concours, de faire les commandes de L tionne avec deux structures. de l’inspecteur d’académie qui délègue livres et de DVD, d’organiser la céré- La première est une commission ses pouvoirs au président. Une chargée monie offi cielle de remise des prix en de l’Inspection académique présidée de missions règle les questions admi- collaboration avec le conseil général du par un enseignant en activité (Michel nistratives et les relations entre les pro- Jura et d’aider toutes les actions liées Bodin). Elle recrute les professeurs, les fesseurs et la commission, en collabora- au devoir de mémoire ayant un rapport Anciens résistants et déportés et main- tion avec le président. avec la Résistance et la Déportation. Le tenant tous les volontaires pour réfl é- La seconde dépend du Souvenir fran- groupe se réunit une fois par mois et chir aux sujets qui seront proposés à la çais. L’ancien comité animé par les CVR travaille en relation étroite avec la com- commission académique. Elle désigne a souhaité passer le relais à un nouveau mission académique. Il est composé de les trois représentants pour la dite com- groupe. Celui-ci est un comité spécial du membres du Souvenir français et d’An- mission. Elle organise les deux journées Souvenir français fonctionnant comme ciens résistants et déportés. de correction du CNRD. Les corrections les comités du Souvenir français (un Actuellement dans le département se font par petits groupes composés de président, Michel Bodin, un secrétaire, du Jura, la participation des Anciens est professeurs et d’Anciens, ce qui permet un trésorier et leurs adjoints). Ce groupe encore marquée et le CNRD a encore un de croiser les points de vue. Elle établit a pour mission de réunir les fonds pour vif attrait pour les élèves. 

18 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 Le soutien au travail des élèves par les fondations, les associations, les musées et les centres d’archives

haque année, grâce au soutien tions, de musées, d’institutions, des ser- et contribuent fortement au succès de du ministère de la Défense et vices d’archives notamment, des dossiers ces initiatives. C du ministère de l’Éducation documentaires sont édités et des pré- Les Fondations et associations parte- nationale, une brochure pédagogique sentations du thème, associant témoins naires de longue date du CNRD contri- est éditée par la Fondation porteuse du et historiens, sont faites en direction du buent comme par le passé, en fonction thème annuel. public scolaire ou des enseignants. de leur sensibilité propre, à fournir Cette brochure est diffusée largement Plusieurs musées accompagnent documents et conseils, sur leurs sites en direction des établissements sco- avec une exposition spécifi que le thème internet ou dans leurs revues. laires, auprès des associations, et télé- du CNRD. Autant de partenaires qui contri- chargeable sur les sites des Fondations Les collectivités territoriales et les buent tant à l’échelle nationale que de mémoire. services départementaux de l’Offi ce locale à l’animation et au développe- Dans la quasi-totalité des régions et national des Anciens Combattants et ment du CNRD cinquante ans après sa départements, à l’initiative d’associa- Victimes de Guerre (ONAC) soutiennent création. 

En 2010-2011, dans de nombreuses régions et départements, à l’initiative d’associations, de musées, d’institutions, des services d’archives notamment, des dossiers documentaires ont été édités pour aider à la préparation du thème du CNRD : « La répression de la Résistance en France ». Voici quelques exemples reflétant la diversité des sources documentaires ainsi offerte aux candidats. Beaucoup de ces brochures présentent des éléments de réflexion locaux, en liaison avec le thème national.

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1 - Depuis plusieurs années, le musée des Archives municipales de département de la région, où de la Résistance nationale (MRN), Montbéliard et de Saint-Claude et les enseignants, les élèves ainsi présente à Champigny (Val-de-Marne) du Musée de la Résistance et de la que le public peuvent trouver des une exposition temporaire et édite Déportation de Besançon. documents. un dossier pédagogique consacrés 3 - Dossier documentaire proposé 5 - Brochure préparatoire de au thème du CNRD. Un ensemble par les archives départementales l’Association pour la Recherche documentaire en ligne est accessible de l’Hérault en coopération avec sur l’Occupation et la Résistance depuis les sites internet du MRN et du le service éducatif du Centre en Morvan (ARORM) Centre Régional de Documentation régional de la Résistance et de la 6 - À Toulouse, le musée Pédagogique de Créteil. Déportation (CRHRD) à Castelnau- départemental de la Résistance 2 - Recueil de documents commentés le-Lez. et de la Déportation, soutenu par les services éducatifs des 4 - Dans la région des Pays de la par le Conseil général de Archives départementales du Loire, l’ONAC a publié un dossier la Haute-Garonne, réalise Doubs, du Jura, de la Haute- pédagogique à partir des centres traditionnellement un document Saône et du territoire de Belfort, de ressources au sein de chaque de préparation au CNRD.

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 19 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD Remise des prix par les associations de résistants et de déportés aux lauréats nationaux du CNRD, au Cercle militaire de Paris. Assis à la tribune (de gauche à droite) : Jean-Jacques de Bresson, président de l’Association nationale des Médaillés de la Résistance française, Lucie Aubrac, co-fondatrice du mouvement Libération-sud, Jean-Pierre Levy, compagnon de la Libération, co-fondateur du mouvement Franc-Tireur et président du COSOR, André Jarrot, compagnon de la Libération, président de la CNCVR et le révérend-père Michel Riquet, président d’honneur du Réseau du Souvenir. Debout à droite, Maurice Leteuil sera, avec plusieurs camarades de la CNCVR dont France Boudault, La remise des prix aux lauréats Jacques Henriet, Yves Leleux, Jean départementaux et nationaux Mahieu-Villars et Albert Sernissi, un des organisateurs de la réception du Concours offerte aux lauréats par la CNCVR et les associations de résistants et de Après la tenue des épreuves à la fi n du mois de mars, les copies déportés. individuelles et les travaux collectifs des candidats sont examinés Fonds CNCVR 72AJ - Archives nationales (site de Paris) par les jurys départementaux qui établissent un palmarès.

Le 18 juin 1981, Paul Cousseran, haut-commissaire de la République en Polynésie française récompense es lauréats départementaux du visites sur des lieux de mémoire à Paris les lauréats du CNRD dans les jardins Concours sont alors récompensés ou en proche banlieue (mémorial de la de la résidence. Résistant-déporté, L au cours des mois de mai et juin France Combattante au Mont-Valérien, membre de la CNCVR, il avait (en général autour des dates symbo- mémorial de l’Île de la Cité, mémorial de contribué à relancer le Concours en liques du 8 mai et du 18 juin) lors d’une la Shoah, salles consacrées à la Seconde Polynésie française. Il fut également cérémonie solennelle à la préfecture ou Guerre mondiale au musée de l’Armée). vice-président délégué de la Fondation au conseil général. Ce programme est également complété de la Résistance. Présidée très souvent par le préfet ou par diverses initiatives culturelles comme La Dépêche du 19 juin 1981. le président du conseil général, cette un spectacle ou la projection d’un fi lm. Fonds CNCVR 72AJ - Archives nationales (site de Paris) réception organisée avec l’appui du Ainsi, en 2000 les lauréats et leurs ensei- service départemental de l’ONAC per- gnants avaient été invités au spectacle de met de réaffi rmer le caractère civique Robert Hossein « Celui qui a dit Non ». de ce concours. Il est également de tradition qu’ensei- Les lauréats se voient alors remettre gnants et lauréats soient reçus par le des livres et des DVD en rapport avec la chancelier de l’Ordre de la Libération et période, assortis parfois d’un diplôme visitent le musée qui y est associé. rappelant leur participation. Jusqu’en 2005, le protocole ne per- Très souvent des voyages sur des lieux mettant pas aux associations d’offrir aux de mémoire de la Seconde Guerre mon- lauréats des prix lors de la cérémonie diale sont également offerts aux lau- offi cielle avec les Ministres, une récep- réats. tion était organisée par les associations Chaque meilleure réalisation des diffé- de résistants et de déportés. Pilotée par rentes catégories du Concours est ensuite la CNCVR, cette « cérémonie-bis », réu- adressée au jury national qui, au mois nissant de nombreuses personnalités et d’octobre établit le palmarès national. de grands témoins, avait pour cadre les Les lauréats nationaux désignés sont somptueux salons du Cercle militaire de invités à Paris pour deux jours durant Paris. Elle s’achevait par un repas fra- lesquels ils enchaînent de nombreuses ternel, occasion de nombreux échanges

20 Les lauréats nationaux du CNRD 1996-1997 se recueillent dans la chapelle du Mont-Valérien.

© Fondation de la Résistance, photo Frantz Malassis Le 7 février 2007, Pierre Messmer, ancien premier ministre et chancelier de l’Ordre de la Libération reçoit des lauréats nationaux du CNRD 2005-2006 et leurs enseignants au musée de l’Ordre de la Libération. Fonds CNCVR 72AJ - Archives nationales (site de Paris) entre lauréats et témoins présents. de dirigeants d’associations, fédéra- de poursuivre les études et recherches La cérémonie offi cielle de remise des tions et fondations issues de la Seconde que leur participation au Concours les a prix aux lauréats nationaux se déroule Guerre mondiale et des membres du encouragés à entreprendre, de s’impli- presque toujours dans un lieu embléma- jury national. quer dans la transmission de la Mémoire tique de la République : Sorbonne, Sénat, Lors des cérémonies départementales de la Résistance et de la Déportation Hôtel National des Invalides, Institut de ou nationales les lauréats sont informés notamment par la promotion du CNRD.  France. de l’existence de la Fédération nationale Les lauréats se voient remettre leurs des Lauréats du Concours de la Résistance (1) Siège social : 16-18, place Dupleix prix par le ministre de la Défense chargé et de la Déportation (1) qui regroupe des – 75015 Paris. Voir aussi le site de la des Anciens Combattants et le ministre associations départementales. Ils sont Fondation de la Résistance : de l’Éducation nationale, en présence invités à adhérer à ces associations afi n www.fondationresistance.org

© Fondation de la Résistance, photo Frantz Malassis © ministère de la Défense- DMPA, photo Jacques Robert. © ministère de la Défense- DMPA, photo Jacques Robert. ▲ Le 9 décembre 2008, les lauréats nationaux ▲ Le 27 janvier 2004, au grand ▲ Le 15 janvier 2008, dans le du CNRD 2007-2008 visitent le musée de amphithéâtre de la Sorbonne, Luc Ferry, grand salon de l’Hôtel national des l’Ordre de la Libération sous la conduite ministre de la Jeunesse, de l’Éducation Invalides, à la fi n de la cérémonie de son conservateur Vladimir Trouplin. nationale et de la Recherche et Hamlaoui offi cielle, Raymond Aubrac, Mékachéra, secrétaire d’État aux anciens vice-président d’honneur de la À l’occasion du 70e anniversaire de l’appel combattants offrent des prix à une lauréate Fondation de la Résistance, remet le du 18 juin, le jury du CNRD a choisi comme accompagnée de son professeur lors du prix spécial de la Fondation de la thème : « L’appel du 18 juin 1940 du général CNRD 2002-2003. Résistance à une lauréate nationale de Gaulle et son impact jusqu’en 1945 ». En du CNRD 2006-2007. écho à ce thème, la remise offi cielle des prix du Ce prix spécial a été créé en 2001 Concours s’est déroulée pour la première fois par Lucie et Raymond Aubrac de son histoire à Colombey-les-Deux-Églises, qui ont versé à la Fondation les au Mémorial Charles de Gaulle, le vendredi dommages et intérêts perçus à l’issue 26 novembre 2010. Joëlle Dusseau, inspectrice d’un procès. Chaque année, grâce générale d’histoire et de géographie, présidente aux revenus de cette somme, la du jury national (4e en partant de la gauche) Fondation peut récompenser plus est entourée par des lauréates du lycée particulièrement les lauréats des professionnel de Faa’a en Polynésie française. © ministère de la Défense- DMPA, photo Jacques Robert. devoirs individuels.

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 21 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD

Paroles de lauréats départementaux

Témoignages communiqués par Colette Gaidry, présidente déléguée de l’ANACR de Haute Saône et secrétaire du Comité du concours de la Résistance et de la Déportation de Haute- Saône. DR Sous l’Arc de Triomphe après le ravivage de la Flamme.

Voyage à Paris du 28 au 30 mai 2008

Au Mont Valérien où plus de 1 000 contexte de la Libération de Paris » « La crypte nous interroge et nous force résistants ont été fusillés entre 1941 (Aurélie Doucey). à nous demander “Pourquoi ? Comment et 1944, « Nous avons suivi le chemin Leur participation au ravivage de la des hommes ont-ils pu en arriver à de parcouru par les résistants qui partaient Flamme sous l’Arc de Triomphe a été un : telles atrocités, à une telle barbarie ?” au supplice ». (Mathieu Martinet). « moment exceptionnel, très solennel ». Autant de questions qui donnent une Cela « m’a semblé très émouvant. Afi n « Nous étions impliqués dans cette utilité, un sens à tous ces monuments » que je ressente les émotions des résis- cérémonie, par notre présence, ce qui (Alexandre Perrin).  tants avant leur mort, j’ai fermé les yeux, a renforcé cet extraordinaire sentiment lié mes mains derrière mon dos, pensé à de fraternité et de solidarité » (Aurélie une chose tragique comme ils le faisaient Doucey). en marchant vers la mort » (Marine Louis) « Pour moi, raviver la fl amme sur la Ils ont beaucoup apprécié la rencontre tombe du soldat inconnu fut un grand avec Louis Cortot, compagnon de la moment d’émotion…. Imaginez la joie Libération. « Étudier la Résistance en que l’on ressent lorsque votre geste de cours est une chose, mais entendre ce mémoire est reconnu… Faire ce geste qu’un homme vous dit à propos de la symbolique avec le glaive fut un moment résistance qu’il a vécue en est une autre » très fort. Je pensais à tous ceux qui avant (Julie Petitjean). moi ont accompli ce geste depuis 85 ans Il avait une « façon si simple et mo- que se répète chaque jour cette cérémo- deste de raconter son engagement dans nie » (Mégane Mathieu). la Résistance, comme un acte naturel, qui Ils ont été aussi marqués par le allait de soi » (Sophie Garcia et Marine mémorial des Martyrs de la Déportation. Louis). « Nous ne pouvons balayer de notre « Il nous a livré un témoignage porteur mémoire l’image des lieux : la froideur d’espoir, qui fait réfl échir, qui nous fait de la pierre, la nudité de l’endroit nous poser des questions, qui interpelle et qui décrivent les épreuves endurées par tous nous a permis de mieux comprendre le ces martyrs ». (Marine Py).

À Arromanches, à l’arrière-plan les restes du port artifi ciel.

22 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 Voyage sur les plages du débarquement Jacques Vico de Normandie du 28 au 31 mai 2010 Né en 1923 dans le Calvados, résistant au sein e Ils ont visité le mémorial de Caen : « Nous découvrons l’action de la de l’OCM, il s’engage dans la 2 DB après le débarquement Jacques Vico préside l’Union Résistance pendant toute la durée du conflit, ses combats pour aider départementale des Combattants Volontaires les Alliés à reconquérir l’Europe et à réussir l’énorme entreprise que de la Résistance du Calvados et est vice- pouvait être le débarquement » (Valentin Durget). président d’honneur de la Fondation de la L’abbaye d’Ardenne (à côté de Caen) « a été en juin 1944 le théâtre Résistance. d’exécutions de soldats canadiens… Un monument a été érigé dans le Jardin du Souvenir, nous avons eu une pensée pour ces jeunes soldats qui étaient, comme nous l’a bien précisé M. Vico, volontaires pour aller combattre en Europe et envers qui j’ai ressenti une grande admiration » (Valentin). La rencontre avec Jacques Vico les a marqués : C’est « un excellent guide, ancien résistant et fils de déporté, qui pouvait mieux que qui- conque par ses commentaires passionnants nous faire ressentir l’im- mense courage de ceux qui ont souffert jusqu’à la mort pour libérer la France… Ses explications étaient captivantes et je n’en ai pas perdu un mot » (Valentin). « J’ai conscience que le fait d’avoir passé une journée avec ce grand résistant, qui nous a commentés les lieux et les actes © Fondation de la Résistance, Photo Frantz Malassis qui s’y sont déroulés, est une chose précieuse et que c’est un vrai tré- Passeur de mémoire intarissable sur sor d’informations qu’il nous a fourni et je garderai cette journée en la résistance normande et la bataille mémoire toute ma vie » (Mathieu) de Normandie, Jacques Vico organise À Arromanches : « Nous avons eu une visite commentée par un guide régulièrement des visites de l’abbaye qui nous a très bien expliqué le débarquement sur Gold Beach. Nous d’Ardenne mêlant explications historiques avions vue sur les restes du port artificiel » et au musée « les maquettes rigoureuses et émotion du témoin. Centre animées nous ont aidé à comprendre cette journée du 6 juin 1944, qui de résistance actif animé par la famille a rendu la liberté à la France et à l’Europe tout entière » (Mathieu Mar- Vico, l’abbaye d’Ardenne a été le théâtre tinet) de violents combats durant la bataille de « Je trouve important que des jeunes comme nous se rendent sur ces Normandie. lieux de mémoire où des hommes ont donné leur vie pour la liberté. Nous tous, et toutes les générations à venir doivent leur rendre hom- Louis Cortot mage car ils ont fait preuve d’un grand courage ». (Ilham Jaafar).  Né en 1925 en Côte-d’Or, engagé au sein de l’OS puis des FTP, il est fait Compagnon de la Libération par le général de Gaulle à l’Arc de Triomphe le 11 novembre 1944. Louis Cortot est président national de l’Association nationale des anciens combattants et ami(es) de la Résis- tance (ANACR) et membre du Conseil de l’Ordre de la Libération. Fonds CNCVR 72AJ - Archives nationales (site de Paris)

Louis Cortot en compagnie d’un lauréat national lors de la remise des prix de l’année 2000 dans la salle des rencontres de l’institut national des Invalides. DR

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 23 1961 – 2011 – Cinquantième anniversaire du CNRD

Jacqueline Fleury L’importance des rencontres témoins-élèves dans le cadre du CNRD

Quel a été Pourquoi témoigner ? Les associations ont joué un rôle dans votre parcours Dès le retour, le premier but des résis- l’organisation du Concours et la remise pendant la tantes déportées a été l’entraide puis des prix en offrant livres, récompenses, Seconde Guerre progressivement elles ont estimé qu’il fi nancement des voyages aux lauréats. mondiale ? était nécessaire de témoigner individuel- En 1982, le concours s’est « offi cia-

© Fondation de la Résistance, Photo Hervé Guillemet Je suis entrée en lement et collectivement, ceci par devoir lisé », avec l’implication plus forte de 1941 dans le mou- envers leurs compagnes disparues. Il l’Éducation nationale et des associa- vement Défense de la France et dans le fallait témoigner de ce qu’elles avaient tions concernées. J’ai alors représenté réseau Mithridate alors que j’étais encore été, de leurs indicibles souffrances. Et l’ADIR au sein du jury national dont je étudiante. Arrêtés en février 1944, inter- pour moi, le souvenir de mes parents suis toujours un membre assidu. nés à Fresnes mes parents et moi-même était essentiel. Nous devions être les avons été déportés. Ma mère et moi garants de ce qui s’était passé. Qu’est ce qui vous a particulièrement sommes allées à Ravensbrück puis dans marqué dans ces contacts trois kommandos de femmes dépen- Quel rôle joue pour vous avec les jeunes ? dant de Buchenwald où nous avons été le Concours national de la Résistance Je voudrais insister sur les liens très forcées de travailler pour l’industrie de et de la Déportation ? forts que nous avons noués lors de guerre. Contraintes à « une marche de Le Concours a joué et joue un rôle essen- ces voyages organisés jusqu’en 2002 la mort » le 13 avril 1945 jusqu’en Tché- tiel, non seulement dans la transmission pour les lauréats de mon département. coslovaquie où le 9 mai nous avons de notre expérience mais aussi pour Tout d’abord, pendant des années vu l’arrivée des soldats de l’Armée la réfl exion des jeunes sur une partie Rouge, nous avons regagné la France importante de notre Histoire et sur les à Mauthausen, puis au camp du le 30 mai 1945. valeurs que nous avons défendues. Struthof et au musée de la Résistance et À mon retour, je me suis impliquée J’ai eu la chance de participer au dévelop- de la Déportation de Besançon, où nous dans les associations issues de la pement du Concours dès ses débuts. Dès accueillait Denise Lorach sa créatrice, Résistance et de la Déportation, notam- les années 1960, dans mon département et qui a d’ailleurs recueilli beaucoup ment au sein de l’Association nationale des Yvelines, et jusqu’à aujourd’hui, je d’archives versées par notre association. des Anciennes Déportées et Internées me suis exprimée devant les élèves avec Ces contacts avec les jeunes durant de la Résistance (ADIR) créée en 1944 et le soutien des inspecteurs d’académie quelques jours avaient une grande du Souvenir français. J’ai d’ailleurs suc- successifs, organisant aussi des exposi- importance. Ils leur permettaient de voir cédé à mon amie Geneviève de Gaulle à tions, des semaines contre l’oubli dans qu’en dépit de notre expérience passée la présidence de l’ADIR, avant sa disso- certains établissements scolaires et des nous étions des êtres qui pouvions vivre lution en 2006. voyages-pélerinages. normalement.

Le regard de Germaine Tillion sur le Concours

Déjà en 1974, l’ethnologue « […] Maintenir le souvenir d’une période dramatique, où la survie de tout ce qui nous est cher Germaine Tillion, résistante- fut remise en question, ne pas oublier les grands sacrifi ces que cette survie a coûtés, tel était déportée, présidente de le projet du Prix de la Résistance. L’expérience d’Angers nous montre qu’on peut aller au-delà de cette ambition et que, grâce à des rencontres organisées, réfl échies, entre deux généra- l’ADIR, rappelle, dans tions, il est possible de renouveler la pédagogie en donnant vie à une “réfl exion” du passé ; un article consacré à la cette réfl exion (qui fut de tout temps l’aliment intellectuel de chaque génération montante) a préparation du CNRD brusquement perdu, de nos jours seulement, ses contacts avec le présent, et cette rupture, dans le Maine-et-Loire, qui constitue un des grands faits de notre époque, contribue au désarroi contemporain. Les l’importance des relations interrogations libres de témoins – dont la bonne foi et l’information sont sous le contrôle d’un intergénérationnelles groupe cohérent – passionnent les jeunes, en dépoussiérant l’histoire. » nouées à l’occasion de la préparation de ce Concours. Extrait de l’article de G. Tillion « Le Prix de la Résistance à Angers » in Voix et Visages. Bulletin bimestriel de l’ADIR n° 145, novembre-décembre 1974, p. 2

24 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 La vie de la Fondation de la Résistance

La Fondation de la Résistance ne perdurera pas sans vous !

La Fondation de la Résistance a été créée grâce aux dons réunis par ses fondateurs pour constituer sa dotation initiale. Elle a ensuite bénéficié, au fil des ans, de dons et legs d’anciens résistants ou de leurs familles ainsi que d’associations de Résistance qui, en la rejoignant, lui ont fait l’apport de leurs biens. De plus en plus, la Fondation de la Résistance ne peut mener à bien ses missions et engager de nou- veaux projets que grâce au soutien de bienfaiteurs. Aussi, si vous souhaitez témoigner votre volonté de participation à la grande œuvre de mémoire historique et de formation civique qu’a engagée la Fondation, aidez-la par des dons destinés à favoriser ses actions ou à accroître son capital. En effet, ce sont les revenus du capital qui assurent la pérennité de son action. Il existe quatre façons d’aider la Fondation de la Résistance : le don, la donation, le legs et l’assurance-vie.

Le don La donation Il existe quatre types de legs : - le legs universel. Il porte sur la totalité du Vous pouvez donner : Vous souhaitez, de votre vivant, donner à la patrimoine disponible, en dehors de la part - des sommes d’argent, en espèces, par Fondation de la Résistance un bien impor- des héritiers réservataires. chèque, ou par virement postal ; tant comme un bien immobilier, un objet de grande valeur ou une somme importante. - le legs universel conjoint. Il consiste à - des dons en nature, titres de bourse, bijoux, Il vous faut obligatoirement faire enregistrer instituer plusieurs légataires universels, sans objet précieux, tableaux, etc. la donation par un notaire. désignation de part. Vous pouvez alors faire trois types de donations : - le legs à titre universel. Il porte sur une quotité ou partie du patrimoine, ou une - une donation en pleine propriété. Rema rque : catégorie de biens : tout le mobilier, ou tous Vous donnez alors votre bien de façon irré- Il n’est pas nécessaire de recourir à un acte les immeubles. vocable et absolue. notarié pour faire don à la Fondation de la - le legs à titre particulier. Il porte sur un Résistance. - une donation en nue propriété. bien identifié ou identifiable, souvent une En ce qui concerne, par exemple, les titres Vous donnez votre bien, mais vous en avez la somme d’argent déterminée, une maison, un de bourse, il vous suffit de donner ordre à jouissance jusqu’à la fin de votre vie. mobilier particulier. votre banque, ou agent de change d’effec- Par exemple, vous faite don de votre maison tuer un ordre de mouvement au profit de en stipulant que vous continuerez à l’habiter la Fondation de la Résistance en indiquant jusqu’à votre décès. l’ensemble de nos coordonnées. Rema rque : - une donation en indivision ou en mul- Contrairement à la donation, le legs testa- tipropriété. mentaire n’est pas irrévocable. Vous pouvez, Les avantages fiscaux : Vous pouvez donner la quotité d’un bien que à tout moment, modifier votre testament. vous possédez en indivision. Par exemple, Prenez bien soin de préciser que le dernier - l’impôt sur le revenu : vous êtes propriétaire d’une partie d’un testament en date annule toute disposi- Les dons faits à la Fondation de la Résistance domaine agricole, vous pouvez choisir de tion antérieure. Votre notaire saura vous sont déductibles des revenus imposables des donner votre part à la Fondation de la conseiller au mieux. particuliers. La réduction d’impôt est égale à 66% du montant des sommes versées Résistance. Les legs bénéficient du régime privilégié en retenues dans la limite de 20% du revenu faveur des fondations d’utilité publique. Ils imposable. sont exonérés de droits (article 795 CGI), ils Rema rque : reviennent donc en totalité à la Fondation - l’impôt sur les sociétés : Une donation se fait obligatoirement par un de la Résistance sans aucun prélèvement acte notarié; vous ne pouvez donc faire une Les dons d’entreprises sont déductibles à de l’État. donation à la Fondation de la Résistance sur hauteur de 60% des versements pris dans papier libre. Votre notaire rédigera l’acte la limite de 5 pour mille du chiffre d’affaire avec vous et l’authentifiera. Nous vous rappe- hors taxes. lons que la donation est un acte important, L’assu rance-vie - l’impôt sur la fortune (ISF) puisqu’il est irrévocable. La Fondation de la Résistance étant reconnue d’utilité publique, Dans la limite globale annuelle de 45 000 €, les donations sont totalement exonérées de Souscrire un contrat d’assurance-vie est une vous pouvez déduire 75 % des versements droits de mutation, la Fondation prenant le des formules très efficace pour soutenir la effectués, en numéraire ou par dons en plus souvent en charge les frais de notaire. pleine propriété de titres de sociétés cotés, Fondation de la Résistance. Il est possible de au profit de la Fondation de la Résistance. souscrire un contrat d’assurance-vie auprès Cette réduction s’applique aux versements de son assureur, de son banquier, de sa réalisés jusqu’à la date limite de dépôt de la Le legs Caisse d’Épargne ou de la banque postale. déclaration ISF. Elle ne peut pas se cumuler En désignant comme bénéficiaire la Fon- au titre de la même année, avec celle prévue En effectuant un legs au profit de la Fon- dation de la Résistance, vous lui apportez à l’impôt sur le revenu. dation de la Résistance, vous assurerez votre une aide déterminante pour accomplir ses soutien à l’œuvre de la Résistance. missions.

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 25 L’activité des associations affiliées

Mémoire et Espoirs de la Résistance (MER)

1 Photos Marc Fineltin L’automne attendait le printemps…

Le comité d’organisation n’avait pas voulu repousser la séance de lancement du CNRD 1- Les intervenants. pour des enneigements fâcheux, où tous De gauche à droite : MM Jacques Moalic, glissaient et parfois tombaient. Les cinq Jean-Pierre Fondations et les trois associations coorga- Renouard, Mmes nisatrices ont été généreusement accueillies me Joëlle Dusseau, par la proviseure, M Anny Forestier, à son Anny Forestier, lycée Janson de Sailly. Déjà s’y étaient illustrés Marie-Josée des résistants héroïques et parfois martyrs. Chombart Nos orateurs, malgré le verglas et le de Lauwe manque de transports, se révélèrent telle- et M. Benoît Verny. ment émouvants et pédagogues que MER est invitée à nouveau au printemps dans ce lieu illustre. Mme Marie-Josée Chombart de Lauwe, résistante-déportée et présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Dépor- tation, et Mme Joëlle Dusseau, inspectrice générale d’histoire au ministère de l’Éduca- tion nationale et présidente du jury national

du CNRD touchèrent le public composé de Photos Marc Fineltin 3 ou 4 générations. L’ambassadeur Stéphane Hessel résuma 2 - Les élèves très ses évasions, hélas avortées, et sa condamna- studieux venus 2 préparer le CNRD. tion à mort par les nazis ; des anciens élèves de Janson, MM. Jean-Pierre Renouard et me Jacques Moalic, racontèrent leurs souffrances 30 bd des Invalides, M Christine Levisse- Pierre Alviset, massacré à 20 ans par les avec pudeur, l’un à Bergen Belsen, l’autre à Touzé, docteur en histoire et directrice du hordes allemandes en 1944, alors qu’il était Buchenwald. Musée-Mémorial, a traité de la Résistance maquisard, étudiant ès sciences en Sorbonne L’historien, venu (en dépit des problèmes franco-britannique. Comme chaque année, et responsable de l’Action Catholique. Le climatiques) de son lycée d’Orléans, le pro- MER a associé The Royal British Legion, que collège qui porte son nom, rue Monge, et les fesseur Benoît Verny, insista sur le rôle de préside le professeur Roger Thorn. Après la lycées Buffon et Voltaire viendront réciter des l’Abwehr, dans la répression de la Résistance. conférence, nous avons fleuri les statues de sir poèmes et chanter des hymnes à la Résistance. Ce « gang » avait été créé en 1925, la même Winston Churchill et du général de Gaulle. Le recteur Patrick Gérard sera présent, ainsi que année que les SS, et durera vingt ans de triste Le vendredi 29 avril, à 14 heures, MER a Mme Monique Papon, vice présidente du Sénat mémoire. lancé le Récital de Poésie et de Chanson de représentant le président Gérard Larcher, ainsi la Résistance au lycée Janson de Sailly. Le que d’autres hautes personnalités. Le lundi 28 mars, à 14h30, au Mémorial professeur Jean-Pierre Levert, vice-président Du 28 avril au 17 mai, l’exposition « Berty Leclerc-Musée Moulin, nous avons traité un de MER et professeur des Universités en lettres Albrecht résistante » sera présentée en la ville sujet original et troublant : « La reconstruc- supérieures, a organisé cette séance. Le jury du d’Amiens. Cette exposition sera associée à tion de soi après la guerre ». Nous y avons Jeune Poète délivrera ensuite un prix comme celle de l’AFMD sur la Déportation. entendu trois déportés et trois médecins liés en 2010. Le lundi 27 juin, notre AGO annuelle à la Résistance ou à la Déportation dans leur Le jeudi 5 mai à 17 heures, aux pieds de mes se déroulera simplement à la Fondation chair ou leurs sentiments : M Frida Wat- la statue de Watkin, M. François Perrot, r de la Résistance l’après-midi, à 17 heures tenberg et le D Anne-Marie Lefevre-Joffres, président de l’UNADIF, vice-président M. Jean-Louis Crémieux-Brilhac, résistant- ainsi que MM. Renouard, les docteurs André de l’ONACVG et de la FMD, arrêté et historiographe prononcera une conférence sur Fournier et Jean-Raphaël Hirsch. déporté comme étudiant résistant près du l’année 1941 et la Résistance. Le lundi 11 avril à 14 heures, à notre Luxembourg, évoquera ses proches tués par maison-mère, la Fondation de la Résistance, les nazis. Nous penserons avec émotion à François Archambault

26 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 1 Photos Jean Novosseloff

l’aide du Service départemental de l’ONAC, Jeannine Calba déléguée régionale en Bour- gogne a organisé, comme chaque année, un après-midi pédagogique et mémoriel à l’oc- casion du lancement du CNRD (photos 1 et 2). Devant une dizaine de classes des lycées et collèges de la région, trois résistants bour- guignons, victimes de la répression apportaient leur témoignage sur la répression menée par l’occupant et les brigades spéciales de la police 2 française de Vichy. Un dossier documenté, précis

Photos Marc Fineltin et pédagogique réalisé par la Fondation de la Résistance et la délégation de l’ONAC à Dijon a été remis aux élèves et aux professeurs pour les ME R promeut le CNRD ! aider à préparer le Concours, leur rappelant les grandes dates de la répression de la résistance et les lieux martyrs de leur département. Depuis près de quinze ans l’association En région, Jacques Chesnier, délégué des L’association MER, initiatrice à l’échelon Mémoire et Espoirs de la Résistance est un Pays de la Loire, et ses amis ont pour la pre- nationale et régionale de ces réunions, a aussi, acteur actif du lancement chaque année, tant à mière fois initié en novembre au Mans, sous rappelons le, édité depuis plusieurs années Paris qu’en province, du Concours national de la présidence du directeur de cabinet du préfet 22 DVD-Roms comprenant près d’une centaine la Résistance et de la Déportation (CNRD). de la Sarthe et avec le concours de l’inspection de témoignages. La liste est consultable sur Cet après-midi de lancement du Concours pour académique du département et des Centres de note site : www.memoresist.org. Sur simple la région parisienne est toujours organisé à Paris Départementaux de Documentation Pédago- demande ces DVD-Roms sont à la disposition en coopération avec l’association des Amis de la gique (CDDP), un après-midi d’information et des enseignants. Fondation pour la Mémoire de la Déportation de motivation sur le concours à l’attention des De même, sur notre site sont récapitulés et le soutien des cinq Fondations : celles pour la professeurs. André Bessière, résistant-déporté, plus de 3 500 références de travaux universi- Mémoire de la Déportation, de la France Libre, assistait à cette réunion et a témoigné sur la taires concernant la période1939-1945 – dont de De Gaulle, de la Résistance et de la Shoah, répression dont il fut victime et qui le conduira plus de la moitié peuvent être plus aisément et en coopération avec l’APHG. Chaque année, à la Déportation. Intéressante initiative et suc- consultables aux archives départementales. Par cette rencontre citoyenne et scolaire est présidée cès que l’on peut mesurer, sur les deux premiers ailleurs, toujours sur le site de MER sont inscrits par l’Inspectrice générale de l’Éducation nationale mois de 2011, au nombre important de classes à la « page ne les oublions pas » 2 145 fiches de Joëlle Dusseau avec à ses côtés des résistants(es) – des collèges et lycées sarthois s’inscrivant au parcours de résistants qui comportent presque qui témoignent de leur actions dans la Résistance – concours et aux demandes de témoins. 70 000 noms issus de la Résistance intérieure et et des historiens – pour clarifier le champ de l’étude Dans le Midi, notre ami François-René Cris- de la France Libre. du thème et présenter les pistes de recherches pour tiani-Fassin, président du Comité régional du Toutes ces recherches et réalisations se pour- les enseignants et élèves. Mémorial Jean Moulin et délégué de MER pour suivent et ces quelques exemples de rendez-vous, En 2010, pour la région parisienne, le le Vaucluse, a organisé, fin novembre à Marseille, tout au long des premiers mois de cette année, Concours a été lancé première quinzaine de avec les délégations MER des Bouches-du- démontrent la part prise par notre association décembre au lycée Janson-de-Sailly de Paris Rhône, du Var, du Vaucluse et des Alpes de dans ce travail civique, mémoriel et associatif et où son proviseure Anny Forestier a accueilli Haute-Provence, une rencontre avec Daniel l’enracinement de ce concours dans le paysage une dizaine de lycées et collèges. Après que Cordier. Rendez-vous où une demi douzaine scolaire. Fidèle, aux créateurs de ce concours, l’historien Benoît Verny eut évoqué le thème de classes de troisième du collège Simone-de- MER rappelle aux plus jeunes combien la du concours de l’année et brossé le tableau Beauvoir de Vitrolles, transportés avec l’aide richesse des souvenirs de la Résistance et de de l’appareil répressif de l’occupant et de ses du Service départemental de l’Office national la Déportation est présente pour leur servir divers composants, Marie-Josée Chombart des anciens combattants et victimes de guerre d’exemple dans la quotidienneté de leur vie. de Lauwe, Stéphane Hessel, Jacques Moa- (ONAC) étaient présents. Bel après-midi péda- lic et Jean-Pierre Renouard, ont évoqué, à gogique où l’ancien secrétaire de Jean Moulin, Jean Novosseloff tour de rôle, leur parcours de jeunes résis- fidèle à la mémoire du délégué du général de tants réprimés par les nazis qui, aidés par la Gaulle, a apporté son témoignage sur cette police et la de Vichy, les conduisirent répression nazie et vichyste qui fit des dizaines Adhésion : jusqu’aux camps de concentration. À la suite de milliers d’emprisonnés, fusillés et déportés. Si vous voulez donner un avenir de ce lancement, à la demande de plusieurs Patricia Arzel-Mazet, déléguée pour le au devoir de mémoire, adhérez à établissements scolaires, ont été organisés des Morbihan, et Jacques Donne, délégué pour la « Mémoire et Espoirs de la Résistance » ! demi-journées de témoignages avec l’aide de Bretagne, ont présenté le même jour à Saint- Cotisation 30 € (incluant l’abonnement la Fondation de la Résistance. À chaque fois Marcel – haut lieu de la Résistance bretonne – à « Résistance et Avenir »). avait été préparé un dossier sur les pistes de et le lendemain à Sarzeau (Morbihan) puis dans recherches historiques locales pour aider les un collège de Vannes, devant des élèves et leurs Chèque à libeller à « Mémoire et Espoirs élèves. Originalité : à l’initiative d’un collège professeurs le thème du CNRD 2010-2011. me de la Résistance », Place Marie-Madeleine Fourcade, de Montereau (Seine-et-Marne) durant une Pour cette occasion M Chombart de Lauwe, matinée, à la Fondation de la Résistance, des présidente de la Fondation pour la Mémoire 16-18 place Dupleix, 75015 Paris élèves ont réalisé un entretien audiovisuel avec de la Déportation, apportait son témoignage, Courriel : [email protected] deux résistants-déportés (André Bessière et accompagné par l’historien Thomas Fontaine. site internet : www.memoresist.org André Fournier), travail de mémoire vivant, À Dijon début février, dans l’amphithéâtre Tél.: 01 45 66 92 32 et 01 45 66 44 70 instructif et très riche. Aristote de l’université de Bourgogne, avec

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 27 L’activité des associations affiliées

association pour des études sur la Résistance intérieure (aeRi)

Le musée de La Résistance est enFin en Ligne À L'adResse : Http://WWW. museedeLaResistanceenLigne.oRg Vous y trouverez des espaces d’expositions régionales et thématiques. Actuellement, deux expositions sont présentées : l’une sur la Résistance dans la Drôme, l’autre autour de représentations de la Résistance à partir d’une série de gouaches réalisées après-guerre par un résistant drômois, Albert Fié.

Parallèlement à ces deux expositions, des dossiers pédagogiques (niveau collège et lycée) constitués par une équipe d’enseignants et le CDDP de la Drôme, sont disponibles à la demande. Vous découvrirez, à travers ces espaces d’ex- positions des milliers de documents papiers (photos, affiches, journaux clandestins, rapports officiels, lettres, tracts…), archives sonores et vidéos (témoignages, films amateurs d’époque…), DR objets, cartes, textes, se rapportant à la Résistance. Chaque document présenté est accompagné de Carte des paysages extraite de l’exposition sur la Résistance dans la Drôme. sa notice explicative. Elle renseigne l’internaute sur le document lui-même (titre, légende, description matérielle, sources et droits, date du document, Le Musée de la Résistance en ligne dans sa Site portail au service de tous lieu…), son analyse (description et histoire du présentation actuelle est une première étape. document, voire son interprétation), sa place dans D’autres projets d’expositions sont en cours de un contexte plus général, son indexation. Des outils pédagogiques (outils d’analyse préparation : Ces documents accessibles via une exposition d’image, bloc-notes, ateliers pédagogiques…) et - deux expositions régionales : la Résistance en peuvent être également consultés grâce à la contextuels (chronologie, dictionnaire, atlas…) Île-de-France et en Provence-Alpes-Côte-d’Azur. « base média » : base de données de l’ensemble sont également prévus. - des expositions thématiques : l’histoire de la des documents exposés dans le Musée virtuel. Le site s’adresse à tous les publics, notam- Centrale d’Eysses pendant la Seconde Guerre Un moteur de recherche permet d’interroger ment les jeunes. Il peut faire l’objet de tout type mondiale, les organisations juives de Résistance, cette base selon différents critères : recherche d’utilisation, individuelle ou collective, libre ou le Vercors, la Résistance des mineurs… libre, genre (image, son, film, carte, texte), type guidée. Le fait de travailler sur internet donne Toutes ces expositions sont réalisées en lien (affiche, tract, photo, presse clandestine, objet…), de nombreux avantages dans les utilisations avec des partenaires institutionnels (associations, date et lieu. possibles du musée virtuel : musées, centres d’archives…) et historiens com- Sont présentées ici des pièces provenant d’une - ouvrir les collections à tous, sans discrimi- pétents. multitude de fonds (Archives Nationales, archives nation (démocratisation du savoir), départementales, collections des musées, fonds Des outils de recherche - faciliter l’accès (ouverture permanente, associatifs, archives familiales…) en France et performants consultable à distance), à l’étranger. Son ambition est de présenter et de - donner plus de souplesse et de liberté dans faire connaître cette richesse documentaire et les l’exploitation des documents d’archives (plus Une salle de consultation, bientôt disponible, institutions qui les possèdent de contrainte de conservation…), leur mise permettra de référencer dans une base de don- en lumière et leur exploitation à des fins Un site collaboratif nées unique, tout ce qui existe sur la Résistance pédagogiques (notices explicatives…), en perpétuelle évolution en France et à l’étranger (inventaires, ouvrages, - rendre le travail en réseau plus facile (créer brochures, articles, dossiers pédagogiques, catalo- plus de liens entre les partenaires, dynamiser gues d’exposition, institutions…) et de renvoyer Grâce à la rubrique « Participer », chacun, par- les actions, mutualiser les travaux…)… aux instances concernées (musées, fondations, ticuliers ou représentants d’institutions, peut - mettre à disposition des partenaires des associations, centres d’archives, universités...). signaler ses archives ou ses activités en lien avec espaces d’expositions virtuels, exploitables via Une réflexion est en cours sur la pertinence de la la Résistance, qui seront ensuite, après validation, le Musée en ligne et/ou directement dans le mise en ligne d’une base personnes. L’AERI, grâce mises en valeur sur le site et/ou redirigées vers cadre de leurs activités (expositions, ateliers à la réalisation des CD-Roms, a déjà une liste de les organismes compétents. pédagogiques, conférences, cours…). noms de résistants considérable : 50 000 noms Depuis trois mois, date d’ouverture du site, des L’ambition du Musée de la Résistance en sont déjà recensés. L’idée est donc de continuer ce dizaines de personnes ont déjà contacté l’AERI ligne est de devenir le site portail de référence travail. Cette base devra être réservée (accessible pour des demandes de renseignements ou pro- sur le sujet. Chaque internaute travaillant sur uniquement sous code d’accès) dans le respect du cette période, en France ou à l’étranger, devra poser des documents d’archives. (1) droit à l’information édicté par la CNIL . avoir le réflexe de passer d’abord par ce site

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pour ensuite être redirigé vers les structures concernées. Des outils de communication vont-être déve- loppés dans ce sens : espace « Presse », réseaux sociaux, recensement et présentation des struc- tures qui travaillent sur la Résistance (sorte d’annuaire)… Enfin, il doit être aussi et surtout, un outil à la disposition des partenaires qui le souhaitent au service de leurs propres structures. De nombreux médias se sont fait l’écho de l’ouverture au public du Musée de la Résistance en ligne : - télévisions et radios : RFI (Radio France internationale), France Culture, émission «Télé Maquette du numéro 19 du journal matin» (France 2), etc. clandestin Les Étoiles dans l’exposition - presse nationale et internationale : le journal sur la Résistance dans la Drôme. DR allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung, L’Hu- manité, La Croix, Libération, etc. - presse régionale et spécialisée : Micro-hebdo, Le Patriote Résistant, Cfdt Magazine, Romans Mag, La Tribune, Le Crestois, La Drôme, le magazine du Conseil, La lettre de l’ANACR Drôme, Le Dauphiné libéré, Les Allobroges de la Drôme, L’Impartial, etc. - sites web : Educadef, Euranet, site de l’Aca- démie de Caen, site de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, site de France 24, CDI. com (blog du CDI du lycée André Maurois de Strasbourg), Educnet, etc. Une revue de presse complète peut être demandée auprès de l’AERI. D’ici l’été, trois expositions virtuelles vont être mises en ligne, en lien avec les activités et les ressources de l’AERI : - une exposition sur Serge Ravanel, dans le cadre des manifestations qui vont avoir lieu les 18 et 19 août prochain à Toulouse à l’occasion de l’inauguration d’une allée Serge Ravanel. - une exposition sur Défense de la France à partir d’archives privées de certains membres du mouvement, mises à disposition de l’AERI. - une exposition sur les projets des jeunes qui ont participé cette année à l’opération « Valeurs de la Résistance, Valeurs des jeunes aujourd’hui ».

(1) CNIL : Commission nationale de l’informatique et des libertés. Quelques-unes des gouaches Renseignements réalisées après-guerre par Pour toute information, contacter l’AERI Albert Fié. (association loi 1901 d’intérêt général) Collection A. Fié, droits réservés. Association pour des Études sur la Résistance Intérieure, affiliée à la Fondation de la Résistance Siège social et bureaux : 16-18 place Dupleix 75015 Paris Tél. : 01 45 66 62 72 Fax : 01 45 67 64 24 Courriel : [email protected] Site internet : www.aeri-resistance.com

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 292929 Livres

69 002 Lyon – Tél. 04 72 16 93 72), Éditions Éveil et découvertes (34, quai Isabelle Moity-Legrand 184 p., 19 €. Saint Cosme – 71 100 Chalon-sur- Éditions Lacour, VIENTE D Publié pour accompagner l’exposition Saône), 69 p., incluant un CD, 19.95 €. 175 p., 20 € franco de port. PARAÎTRE organisée à Lyon du 31 mars au En vente chez l’auteur : Isabelle 18 septembre 2011, l’ouvrage La vie malgré le ghetto. Moity-Legrand – 4, rue du Rempart La présence de ces titres dans collectif, richement illustré, explore la Marek Edelman. de la ligne 12 – 84 000 Avignon. « vient de paraître » ne saurait représentation de la Résistance dans la Propos recueillis par Paula Sawicka. constituer un conseil de lecture bande dessinée de 1944 à nos jours. Traduit du polonais par Malgorzata Jean Moulin. L’exceptionnelle mais a pour but de tenir informé Nous reviendrons dans un prochain Smorag-Goldberg. collection biterroise. les abonnés de « La Lettre », des numéro sur cette exposition conçue Éditions Liana Levi (1, place Paul Catalogue-inventaire des dessins derniers ouvrages que nous avons par le Centre d’Histoire de la Painlevé – 75 005 Paris), 171 p., 16 €. de Jean Moulin appartenant au reçus au cours du trimestre. Résistance et de la Déportation de musée des beaux-arts de Béziers. Lyon et le Musée de la Résistance Maquis à Brancion (rééd.). Musée des beaux-arts de Béziers, La petite robe à rayures. nationale (Champigny-sur-Marne). Témoignages recueillis par S.F. 112 p. Sylviane Ainardi-Peroz. Effernelli alias Séraphin Éditions du Survenir (107, rue Au cœur de la Préfecture de Préface de Claude Rochat, L’Occupation italienne. Edouard Vaillant – 95 870 Bezons), Police : de la Résistance à la ex commandant Guillaume, Sud-est de la France, 188 p., incluant un CD, 15 € Libération. responsable départemental juin 1940-septembre 1943. 1re partie. Les proto-résistants AS Saône-et-Loire. Comité Jean-Louis Panicacci. Le journal de Francine. D’une vie du Coq Gaulois. La direction de départemental de la Saône-et-Loire Préface de Jean-Marie Guillon, provinciale agréable à la mort en services techniques. Les sapeurs- des Anciens Combattants professeur d’histoire contemporaine déportation (1925-1945). Pompiers de Paris… de la Résistance (ANACR), à l’université de Provence, directeur de l’UMR Telemme. Magdeleine Bommier. Sous la coordination de Luc Rudolph 200 p., 15 € franco de port. Centre d’Histoire et de Mémoire du Préface de Michel Gaudin, Pour se procurer cet ouvrage écrire Presses Universitaires de Rennes, Nord – Pas-de-Calais, La Coupole, préfet de Police. à l’auteur : S.F. Effernelli 439 p., 22 €. 151 p., 13 €. Préface d’Olivier de Sarnez, 71 700 Martailly-lès-Brancion L’ouvrage peut être commandé à président de l’Association nationale Tél. 03 85 51 01 82 Carnets du chef des services La Coupole (BP 284 – 62504 Saint- des médaillés de la Résistance secrets, 1936-1944. Omer cedex – adresse électronique : française. Maquis noirs et faux maquis. Général Louis Rivet. [email protected]). Avant-propos de Jean-Marc Berlière, 1943-1947. Édition annotée et présentée par professeur d’Histoire contemporaine Fabrice Grenard. Olivier Forcade et Sébastien Laurent. Bernard Courtault. Lettres du à l’université de Bourgogne. Éditions Vendémiaire Nouveau Monde éditions Mont-Valérien. « ... cette fois Édition LBM (Tél. 01 48 01 01 01), (156, rue Oberkampf – 75 011 Paris), (24, rue des Grands Augustins – c’est fini, à 8 heures je serai 68 p. 189 p., 18 € 75 006 Paris), 1007 p., 39 €. fusillé… ». 3 novembre 1943. Au cœur de la Préfecture Paris. Le général de Gaulle. Biographie. Jane Audoli-Courtault. Co-édition Ouest France et ministère de Police : de la Résistance Compagnon de la Libération. Yvonne Salmon. de la Défense (DMPA), 71 p., 18 €. à la Libération. Présentations de Jean-Louis e Christine Levisse-Touzé et 2 partie. La Préfecture de Vladimir Trouplin. Crémieux-Brilhac et Chrystel Hug Mémoires de guerre. Tome II. police : une Résistance oubliée Mairie de Paris - comité d’histoire de Éditions des équateurs, 127 p. Février 1941-1945. 1940-1944. la Ville de Paris en partenariat avec + 45 p. de fac-similés, 22 €. le Musée de l’Ordre de la Libération Winston S. Churchill. Sous la coordination Avant que l’aube ne renaisse. Texte établi, présenté et annoté par de Luc Rudolph. et le mémorial du maréchal Leclerc François Kersaudy. Préface Michel Gaudin, de Hauteclocque et de la Libération André Sondag. Éditions Tallandier, 636 p., 29.90 €. préfet de Police. de Paris – Musée Jean Moulin de la Éditions Thélès (Tél. 01 40 20 09 10), Avant-propos de Rémi Kauffer, Ville de Paris, 80 p. 267 p., 18.90 €. De Gaulle. Un destin pour la membre du comité éditorial France (bande dessinée). d’Historia. Le chagrin et le venin. La France Panorama de la régularisation sous l’occupation, mémoire et des unités combattantes Guy Lehideux et Jean-Marie Cuzin, Imprimerie de la direction opérationnelle des services idées reçues. issues des Force françaises avec la collaboration historique de l’Intérieur sur les fronts d’Yves Guéna. techniques et logistiques de la Pierre Laborie. Préface d’Yves Guéna. Préfecture de Police, 131 p. Éditions Bayard, 355 p., 21 €. de la Pointe de Grave, Éditions du Signe (Tél. 03 88 78 91 91), La Lettre de la Fondation reviendra de Royan et La Rochelle 48 p., 12.80 € Les espions de l’armée de l’Air prochainement, dans un dossier (août 1944-octobre 1945). française. thématique de sa rubrique « Mémoire Stéphane Weiss. Mémoire de Master 2e Raphaël Elizé (1891-1945). Jean Danis. et réflexions », sur ce livre qui aborde année, Premier maire de couleur Tome I (1935-1940). Aviateurs un sujet important et présent, depuis mention Histoire, histoire de l’art et de la France métropolitaine. espions et tome II (1940-1942). plusieurs années, au programme archéologie soutenu, en mai 2010, à l’université Lumière Lyon 2 sous la Association Passé simple. Le SR 40, 566 p., 24 €. d’histoire des classes de Terminale. Éditions du Petit pavé Tome III (1943-1945). Réseaux direction de Laurent Douzou, 409 p. (BP 17– 49320 Brissac-Quincé), survivants. Nouveaux réseaux, Face à la persécution. 991 Juifs Cet ouvrage est consultable au centre 218 p., 19 €. 797 p., 27 €. dans la guerre. de documentation de la Fondation de Éditions Hugues de Chivré Nicolas Mariot et Claire Zalc. la Résistance. Traits résistants. La Résistance (Le Gros Chêne – 37 460 Chemillé- Éditions Odile Jacob avec le soutien dans la bande dessinée sur- Indrois) de la Fondation pour la mémoire de Citoyens de l’ombre. de 1944 à nos jours. la Shoah, 302 p., 23.90 €. Raymond Zerline De Gaulle raconté aux enfants. Éditions Persée (29, rue de Bassano Sous la direction d’Isabelle Doré- Absences. Trois « Morts pour la – 75008 Paris et 67, rue Mirabeau – Rivé et de Guy Krivopissko. Raphaël Dargent. Édition Libel (9, rue Franklin – Illustrations Florent Vincent. France » 1871, 1915, 1944. 13100 Aix-en-Provence), 871 p., 28 €. 30 La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 À PROPOS DE LOUIS-FERDINAND CÉLINE Le Haut comité des célébrations nationales, « Je suis au secret dans ma cellule du deuxième que je lirai un article sur dépendant des Archives de France, avait étage de la section allemande de la prison de Fresnes. lui, surgira la vision de retenu le cinquantenaire de la mort de Louis- Le seul contact humain est l’entrée du gardien, un ma cellule de Fresnes et Ferdinand Céline comme devant figurer soldat allemand, qui périodiquement inspecte la cel- des protecteurs nazis de dans le recueil des Célébrations nationales lule. Dès l’ouverture de la porte, il m’a été enjoint de “l’artiste”. 2011, édité sous la houlette du ministère de la me placer du côté opposé, le dos à la fenêtre dont Que faire dans ces Culture. les deux battants sont cloués. J’aperçois aussi deux conditions de secret avec Le 13 janvier 2011, , prési- fois par jour les mains des serveurs de café, de pain environ douze mètres dent de l’association des fils et filles de dépor- et de soupe à travers le guichet de la porte. Il m’est carrés de territoire à tés juifs de France (FFDJF), s’est indigné interdit de lire ou de parler. Le règlement m’a été parcourir ? Essayer de ne dans un communiqué de voir que l’on célèbre spécifié par un sous-officier lors de mon installation. pas ressasser la question lancinante : que savent-ils officiellement le cinquantenaire de la mort de À droite, faisant face à la porte se trouve, comme sur moi et comment l’ont-ils su ? Cela pendant les l’auteur du Voyage au bout de la nuit mais égale- au rez-de-chaussée, un point d’eau avec un petit quatre premiers mois de détention, jusqu’à la révé- ment de pamphlets antisémites virulents. évier ; à gauche, la cuvette des cabinets. Aussitôt lation de la trahison qui m’a conduit là. Je constate Dans son communiqué l’association après mon arrivée, je vois posé auprès des cabinets que le meilleur moyen pour ne pas divaguer est de demandait « le retrait immédiat de ce recueil et un morceau de papier imprimé laissé par mon pré- concentrer mon esprit sur les connaissances acquises la suppression dans celui qui le remplacera des décesseur. Je me baisse pour regarder : il s’agit d’un en classe de mathématiques élémentaires au lycée. pages consacrées à Céline » expliquant que : « La feuillet très chiffonné, à peine lisible, arraché d’un Je peux retrouver les formules d’algèbre, de trigono- République doit maintenir ses valeurs : Frédéric livre. Je parviens à déchiffrer : “tous les souvenirs métrie, de géométrie. J’ai découvert dans la rainure Mitterrand doit renoncer à jeter des fleurs sur la d’amour de la pauvre femme sentaient le hoquet au d’une plinthe une épingle rouillée. Je m’en sers pour mémoire de Céline, comme François Mitterrand vin…” et je distingue un titre en haut du lambeau retrouver les démonstrations et écrire sur le mur de a été obligé à ne plus déposer de gerbe sur la tombe de page : un ouvrage de Céline. Je comprends que la cellule quelques relations caractéristiques, celles de Pétain ». le précédent occupant devait avoir la permission de de « trigo » en particulier. La littérature est une autre Quelques jours plus tard, le ministre de la lire. L’infâme antisémite Céline ayant la faveur des ressource de ma mémoire. Mon penchant pour Culture Frédéric Mitterrand, retirait l’anni- nazis, la bibliothèque de Fresnes devait héberger ses Alfred de Vigny me permet de retrouver beaucoup versaire de la mort de Céline des Célébrations œuvres, merveilleux trésor pour la rééducation des de ses poèmes : “La mort du loup”, “Eloa reine nationales 2011. prisonniers de la section allemande. Le précédent des anges”… Je connais à peu près par cœur Le À l’occasion de cette polémique, nous avons occupant de la cellule en avait distrait cette portion Misanthrope. Il me faut entretenir cette mémoire souhaité porter à la connaissance de nos lec- pour ses besoins. pour ne pas en perdre le contenu et ne pas sombrer teurs un passage des souvenirs de Jean Gavard J’ai conservé cette prose pendant mes dix mois dans l’angoisse journalière. J’ai besoin de l’antidote à intitulé « Louis-Ferdinand Céline et moi : une de détention au secret à Fresnes. Quelle déri- l’ignoble Céline. » promiscuité regrettable »(1). sion : interdiction de lire sauf, “tous les souvenirs Alors qu’il était au secret dans la section d’amour…” Jean Gavard, allemande de Fresnes, privé de lecture, Jean À cette époque, je n’avais lu aucun ouvrage de Une jeunesse confisquée 1940-1945, Gavard n’eut pendant ces dix mois, comble de Céline. Un ami de mon père m’avait parlé de sa édition L’Harmattan, 2007, p. 40-41. l’ironie, qu’une « bribe » d’un livre de Céline production. Je savais aussi où l’avait conduit son comme tout « réconfort ». antisémitisme délirant. Plus tard, chaque fois que (1) Cf compte rendu dans La Lettre de la Fondation FM le nom de Céline sera prononcé devant moi ou de la Résistance n° 52, mars 2008, p. 14. Hommage : Claude Hallouin nous a quittés Né le 19 août 1923 à Vendôme (Loir-et- Claude Hallouin participe aux combats de sein du Centre interna- Cher), Claude Hallouin est en classe prépa- la Libération en Sologne et dans le sud du tional de l’Enfance. ratoire au lycée Henri IV à Paris lorsqu’en Loir-et-Cher. Secrétaire général ad- novembre 1941, il entre au mouvement de À la fi n de l’année 1944, jeune diplômé de joint du Comité d’Action Résistance Les Volontaires de la Liberté, l’École nationale de la France d’Outre-Mer, de la Résistance depuis dirigé par Jacques Lusseyran. Il participe Claude Hallouin commence alors une car- 1988, membre du bu- DR alors à la diffusion du Bulletin du mouve- rière d’administrateur colonial essentielle- reau national de l’Association nationale ment destiné à éclairer l’opinion publique, ment dans l’ancienne Afrique Occidentale des Anciens combattants de la Résistance les Volontaires de la Liberté privilégiant le Française. (ANACR), administrateur-fondateur de la combat des idées et rejetant l’action mili- De 1960 à 1963, on le retrouve administra- Fondation de la Résistance depuis 1993, taire. Il s’emploie également à la confection teur des services du Premier Ministre char- Claude Hallouin a consacré sa retraite à et à la livraison de faux papiers. gé des problèmes d’équipement de radio- ses camarades de Résistance avant de Souhaitant ardemment participer à l’ac- diffusion auprès du cabinet du ministre s’éteindre à Paris en janvier 2011. tion armée, en août 1943, il prend contact des Départements et Territoires d’Outre- Commandeur de la Légion d’honneur et avec les organisations de résistance ar- Mer et du Sahara, puis secrétaire général de l’ordre national du Mérite, chevalier mée du Loir-et-Cher. En avril 1944, il re- de la Société fi nancière de radiodiffusion du Mérite saharien, Claude Hallouin était titulaire de la Croix de guerre 1939-1945 et joint le réseau FFC Vélites-Thermopyles, (Sofi rad) de 1964 à 1982. de la Croix du Combattant volontaire de la au sein duquel il intègre le groupe de sécu- D’abord comme délégué du gouvernement Résistance. rité qui devient, à partir du 6 juin 1944, le (1982-1983) puis comme administrateur- corps-franc Liberté. Au sein de cette unité, trésorier (1984-1996) il s’investit ensuite au Frantz Malassis

La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 64 - mars 2011 31 Les activités du comité d'animation et de suivi

Les Journées annuelles de la Fondation de la Résistance dans la Nièvre, les 7, 8 et 9 octobre 2011

Les Journées annuelles de la Fondation de la Résistance auront lieu dans la Nièvre du 7 au 9 octobre 2011. Le Conseil général de la Nièvre est honoré d’accueillir ces Journées, en mémoire de tous ceux qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, ont combattu pour la liberté.

VENDREDI 7 OCTOBRE Le matin, l’Assemblée du comité d’animation et de suivi se déroulera, à Nevers dans les salles Henriette de Clèves et Mazarin du Palais ducal à Nevers (photo 1). L’après-midi, sera essentiellement pédagogique. 1 Au Palais ducal à Nevers, une évocation de la © Fondation de la Résistance- Photo Frantz Malassis. Résistance nivernaise à partir de témoignages de résistants du département servira de base aux autres générations du feu venues du département, L’après-midi, le parcours se poursuivra par la échanges intergénérationnels avec les collégiens et des régions voisines et nous l’espérons de toute la découverte du maquis Bernard situé sur la com- lycéens présents. Une exposition nourrira également France. mune d’Ouroux-en-Morvan. Une cérémonie et la réflexion de l’après-midi. Parmi les villages-martyrs de Bourgogne, Dun- un moment de recueillement dans le cimetière En soirée, Patrice Joly, président du Conseil les-Places a connu trois journées d’horreur du 26 franco-anglais du maquis Bernard, où 27 tombes général de la Nièvre, aura le plaisir de convier les au 28 juin 1944. La veille, deux villages voisins, sont entretenues permettront de se souvenir de tous participants à une réception dans l’Orangerie de la Montsauche et Planchez étaient attaqués, pillés et les combattants morts pour la Liberté (photo 4). Préfecture à Nevers. pour partie, incendiés. Le maquis Bernard fut fondé en 1943 par le Le 26 juin, le maquis Camille situé près de capitaine Louis Aubin. Il compta jusqu’à 1 200 SAMEDI 8 OCTOBRE Vermot, hameau du village est attaqué par l’ennemi. hommes début septembre 1944. Il est marqué par L’attaque du maquis n’est pas poursuivie, mais les la présence à ses côtés, à partir de juin 1944, à la La journée du 9 octobre sera l’occasion de se troupes s’acharnent sur la population du bourg et fois de l’État-major départemental de la résistance plonger dans l’histoire de la Résistance nivernaise de ses hameaux. nivernaise et des parachutistes anglais du Special grâce notamment à un parcours en car de ses Les hommes du village de Dun-les-Places sont Air Service. sites emblématiques assorti de nombreuses étapes rassemblés sur la place de l’église, suspectés d’être commentées par Hubert Cloix, ancien maqui- des « terroristes ». Après avoir simulé une attaque DIMANCHE 9 OCTOBRE sard du maquis Bernard et président de l’Union de partisans, les Allemands massacrent en fin de départementale des combattants Volontaires de la soirée les hommes devant l’église et sous le porche La matinée sera entièrement consacrée à la visite Résistance du Val-de-Marne. Le lendemain, 27 juin, a lieu le pillage systématique touristique de la ville de Nevers. La matinée débutera par la visite commentée du du bourg. Le 28 juin, certaines maisons choisies sont Musée de la Résistance en Morvan à Saint-Bris- incendiées avant le départ des soldats. Au total, on son situé dans le Parc naturel régional du Morvan compte 27 tués, 70 personnes sans abri, 18 familles

(photo 2) et la projection d’un film documentaire endeuillées sur 827 habitants. © ARORM sur le village-martyr de Dun-les-Places. Nous passerons par Crux-la-Ville où du 12 au 17 août 1944, une bataille a opposé 4 500 Alle- 3 mands appuyés par de l’artillerie et de l’aviation à 800 maquisards encerclés. Ceux-ci, aidés par les FFI du Morvan, décrochèrent après avoir fait subir des pertes sévères à l’armée allemande. Puis, une cérémonie commémorative devant le monument à la mémoire des hommes de Dun- les-Places fusillés le 26 juin 1944 (photo 3) réunira 2 4 © ARORM les associations de résistants et les associations des © ARORM

Vous recevrez dans La Lettre de Fondation de la Résistance du mois de juin les fiches d’inscription aux Journées annuelles dans la Nièvre. Vous pourrez la télécharger sur notre site www.fondationresistance.org à partir de la fin d’avril ou bien les demander en téléphonant au 01 47 05 67 90 (Amélia Polonia-Vaz).

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