Étude de cas

Sécheresse 2004 ; 15 (4) : 337-45

Potentialités et statuts de conservation des zones humides du Moyen-Atlas (Maroc), avec référence aux influences de la sécheresse

Lahcen Chillasse1 Résumé Mohamed Dakki2 Le Moyen-Atlas, château d’eau du Maroc par excellence, est la montagne nord- africaine la plus riche en zones humides, notamment en lacs naturels, en rivières et 1 Faculté des sciences, sources fraîches. Ces écosystèmes limniques remplissent des fonctions hydrologi- Département de biologie, ques, socio-économiques et écologiques précieuses à l’échelle du pays, alors que BP 4010, leur biodiversité et leur originalité leur confèrent un intérêt mondial, conformément Beni M’hamed, Meknès, aux critères de la convention de Ramsar relative aux zones humides. Toutefois, la Maroc plupart de ces zones humides sont le siège de dysfonctionnements générés par les activités humaines et accentuées par la sécheresse. Décideurs et scientifiques sont 2 Institut scientifique, unanimes sur l’urgence d’un processus de conservation et de restauration de ces Département de zoologie et écologie milieux. Cet article tente de résumer les caractéristiques et les dysfonctionnements de animale, ces zones humides, tout en apportant des propositions pragmatiques pour une Rue Ibn Battota, gestion durable de ces écosystèmes. BP 703, Rabat-Agdal, Mots clés : Sécheresse, Zones humides, Facteur anthropique, Écosystème limnique. Maroc Summary Potentials and conservation status of the Middle Atlas wetlands (), and the impact of the drought

The Middle Atlas is the most important water reservoir in Morocco. Of all the North-African mountains, it is the richest in wetlands, especially natural lakes, cold rivers and springs. These aquatic ecosystems fulfill significant hydrological, socio- economic and ecological functions, while their biodiversity classifies them as interna- tionally important wetlands, as per the Ramsar Convention. However, most of these wetlands are suffering from several anthropic disturbances, which are amplified by repetitive natural droughts. Decision-makers and scientists are unanimous on the emergency of initiating conservation and restoration processes for these ecosystems. The aim of this publication is to summarise the main potentials and dysfunctions of these wetlands, and to make pragmatic propositions towards a sustainable manage- ment of these ecosystems. Key words: Drought, Wetland areas, Anthropic Factor, Limnologic Ecosystem.

Sécheresse n° 4, vol. 15, décembre 2004 337 e Maroc est considéré comme la Afrique du Nord, et aussi que la prise de Une grande diversité contrée d’Afrique du Nord la mieux conscience gagne du terrain et que les L pourvue en eaux continentales, propositions et tentatives de conservation d’habitats humides compte tenu de la grande variabilité spa- se multiplient. Si les études sont relative- tiale de son environnement physique ment avancées pour une meilleure com- Le Moyen-Atlas, massif montagneux (topographie, géologie, climat, côte préhension de ces enjeux, la mise en allongé sur quelque 350 km du sud-ouest marine...). Ces écosystèmes offrent des œuvre des actions de conservation se au nord-est, occupe une position intermé- habitats écologiques variés, favorisant heurte souvent à des problèmes multiples, diaire entre deux chaînes montagneuses : une grande biodiversité tout en offrant souvent liés à l’absence d’un arsenal juri- le Rif au nord, et le Haut-Atlas au sud dans le même temps des avantages socio- dique efficace et à une demande socio- (figure 1). Il figure parmi les chaînes de économiques non négligeables. économique croissante. Les difficultés ont montagne les mieux arrosées du Maroc Durant les quarante dernières années, été largement exacerbées par les séche- et revêt un grand intérêt hydrogéologi- suite à une exploitation croissante des resses à répétition qui accentuent la fragi- que. Les dénivelés importants et la struc- eaux continentales et phréatiques, le nom- lité de ces milieux. ture relativement complexe des terrains bre et la superficie de ces zones humides calcaires et dolomitiques ont permis la ont sérieusement diminué. Très convoités, Le présent article a pour objectif de faire formation de plusieurs lacs naturels qui ces milieux sont en effet le siège d’intenses mieux connaître les zones humides d’une font la grande originalité de ce massif. activités réductrices (pompage et dériva- région montagneuse réputée comme étant Les facteurs climatiques (précipitations) tion des eaux, surpâturage, pollutions, le château d’eau du Maroc mais qui n’ont particulièrement favorables et la prédo- chasse, pêche...). pas échappé à la dégradation anthropi- minance du karst en font un des grands C’est dire que les enjeux relatifs aux zones que et qui ont subi la forte influence de la réservoirs d’eau souterraine, alimentant humides sont loin d’être négligeables en sécheresse. et régularisant les affluents supérieurs

CEUTA MER MÉDITERRANÉE TANGER TETOUAN

Laou AI HOCEIMA O . NADOR . O ouk uos

R I F ataroa K Oued . Se O O. bou Msoun Oued Za TLANTIQUE FES

OCÉAN A RABAT O. Moulouya Bou-Regreg CASABLANCA

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Oued AS ATL KHENIFRA Oum E r. Rbia MOYEN ERRACHIDIA SAFI O

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Oued Tansill MARRAKECH Tas sa out ATLAS Le Hajeb D. Awa D. Afourgagh HAUT Oued Dad Zerrouka D. Iffer Oued D D. Ifral OUARZAZATE Ifrane r'a Dayet Hachlaf AGADIR O. Beht Ag. Netglouine Oued Souss ATLAS Amghasa Ag. Afennourin Oued Massa Boulman Ain Leuh Guigou O. ANTI Mrirt Ag. Tifomasine Timahdit Ag. Wiwane Aguelmam sidi Ali

O. OumerbiaAguelmam Azegza Dr'a Ag. Oujdir Khénifra Tiguelmamine Ag. Miami Oued ElKbab O. Serou O. Mouglouya Ag. Abekhane Ag. Ait Icheu Boumia Midelt

Figure 1. Carte de répartition des zones humides au Moyen-Atlas.

338 Sécheresse n° 4, vol. 15, décembre 2004 des plus importantes rivières du pays permanentes fraîches (10-18 °C), généra- de formations lacustres est favorisée par (Sebou, Oum Er-Rbia et Moulouya). lement à fort débit [4]. Celles-ci donnent le karst et par l’intense fracturation du Depuis les années 1960, plusieurs tentati- souvent lieu à des ruisseaux frais de mon- causse moyen-atlasique [5]. ves d’inventaire et de description des tagne, mais la prédominance des terrains L’observation régulière (depuis plus de dix zones humides marocaines en général et plats a fait qu’un grand nombre de ans) des berges de ces zones humides a de celles du Moyen-Atlas en particulier ont ruisseaux de sources sont plutôt lents et permis de constater un retrait très sensible eu lieu [1]. Toutefois, ces tentatives sont perdent assez rapidement leur stabilité du niveau de submersion, voire des assè- restées partielles et descriptives, parfois thermique, créant un type particulier d’eau chements occasionnels (lors des années avec des citations de lieux et de noms courante (ruisseaux lents et eurythermes sèches). Des calculs de volume d’eau erronés ou inexistants. L’inventaire le plus d’altitude) bien représenté au Moyen- effectués sur des cartes bathymétriques du récent publié a été présenté dans le Plan Atlas. Quelques aquifères profonds don- lac de Sidi Ali [6] ont mis en évidence une directeur des aires protégées du Maroc nent cependant lieu à des sources chaudes perte de la moitié de ce volume entre [2]. (36 °C à la source Skhouna en aval 1975 et 1995. La typologie des eaux moyen-atlasiques d’Imouzzer des Marmoucha). Le Moyen-Atlas abrite plusieurs dayas (tableau 1) révèle une grande diversité Alimentés à la fois par des sources perma- (mares temporaires) qui s’asséchaient d’habitats, eu égard au schéma simpli- nentes et par la fonte des neiges, la plu- régulièrement, même en dehors des fié de classification établi pour les zones part des ruisseaux étaient permanents, années sèches. Il s’agit en général de humides du Maroc [3]. Les quatre gran- mais les sécheresses et les prélèvements cuvettes karstiques liées à des nappes des catégories d’eaux continentales habi- excessifs d’eau qui ont sévi durant les deux superficielles dont la vidange se fait très tuellement reconnues par les limnologues dernières décennies ont progressivement rapidement. Ces cuvettes hébergent une (eaux stagnantes, eaux courantes et sour- inversé cette situation, générant de plus en faune invertébrée relativement intéres- ces, zones humides artificielles, eaux plus d’oueds temporaires. De nos jours, sante. phréatiques) sont bien représentées et peu- moins du tiers des cours d’eau du Moyen- vent être différenciées en de nombreux Atlas couleraient en permanence. Toute- Zones humides artificielles sous-types en combinant les régimes fois, quelques sources et ruisseaux naturel- hydrologiques et thermiques des eaux. lement temporaires existent dans le Les lacs de barrages et les petits plans Moyen-Atlas oriental et présentent de d’eau piscicoles représentent une bonne Eaux courantes et sources grandes particularités biologiques. proportion des eaux lacustres du Moyen- Atlas. Leur création a débuté dans les Le Moyen-Atlas se distingue des autres Eaux stagnantes années 1930, avec le développement de montagnes marocaines par l’abondance la pêche et de la pisciculture (tableau 3); de ses sources, favorisée par un aquifère Le Maroc compte une trentaine de lacs elle s’est faite au détriment des résurgen- riche ; c’est ce qui explique la forte densité naturels permanents ou semi-permanents, ces, qui leur assurent une eau de bonne de son réseau hydrographique. L’altitude dont la moitié se trouve au Moyen-Atlas qualité. Mais plusieurs barrages ont été élevée de ses reliefs bien arrosés et la (tableau 2). Dans ce massif calcaire, où construits récemment sur les piémonts de prédominance d’eaux phréatiques superfi- les précipitations sont abondantes et en ces montagnes pour répondre aux cielles génèrent une multitude de sources partie sous forme de neige, la genèse besoins agricoles, énergétiques et en eau potable.

Tableau 1. Types de zones humides du Moyen-Atlas (Maroc). Eaux phréatiques Type Explication La prédominance des calcaires et dolo- mies parmi les terrains du Moyen-Atlas a Eaux stagnantes Pièces d’eau continentales sans écoulement superficiel favorisé la création de grottes et de gouf- Lacs de haute altitude Lacs permanents de montagne, froids (pouvant geler sur les rives) en hiver fres dans lesquels circulent des eaux. Dayas Pièces d’eau stagnante, temporaires ou semi-temporaires, avec ou sans végétation Diverses expéditions spéléologiques ont permis de repérer de nombreuses galeries Dayas d’eau douce Dayas aux eaux douces à très légèrement saumâtres karstiques souterraines et plusieurs grottes Sources et eaux courantes Ruisseaux, torrents, rivières, où les eaux s’écoulent dans un sens unique et gouffres, tels que les grottes du Friouat- tou (sud de la ville de Taza), et de Sources Eaux naturelles émergeant directement de la nappe phréatique, à t °C stable Maghlafi (région de Ouaouizaghte). Sources fraîches rhéocrènes Sources froides à fraîches (4-14 °C), permanentes, à écoulement rapide Sources fraîches limnocrènes Sources sans écoulement apparent, en forme de mare d’eau stagnante Sources intermittentes Sources, souvent fraîches, à écoulement temporaire Une faune aquatique riche Cours d’eau frais/froids Cours d’eau permanents, froids à frais (~20 °C en été), souvent de montagne en endémiques

Rapides froids supérieurs Cours d’eau froids/ frais et rapides (torrents...) Le Moyen-Atlas occupe une place privilé- Ruisseaux lents de montagne Cours d’eau lents de montagne, eurythermes (0-25 °C en été) riches en végétation giée parmi les régions marocaines d’inté- Ruisseaux temporaires Ruisseaux s’asséchant en été et régulièrement remis en eau en période pluvieuse, fréquents rêt majeur pour la conservation de la bio- surtout dans les zones où dominent des roches imperméables diversité des zones humides, sachant que celles-ci hébergent en exclusivité plus du Eaux phréatiques Eaux souterraines (sous-écoulement de cours d’eau compris), à l’obscurité ou à l’ombre, à quart de la faune aquatique endémique température stable, et pauvres en matière organique du pays [7]. En effet, celle-ci compte envi- Zones humides artificielles Milieux aquatiques côtiers ou continentaux entièrement créés par l’homme ron 140 taxons, dont le tiers (53 espèces) Lacs de barrages Lacs de barrages, plans d’eaux piscicoles, retenues sur cours d’eau/sources existent dans le Moyen-Atlas (tableau 4). La majorité de ces endémiques sont des

Sécheresse n° 4, vol. 15, décembre 2004 339 Tableau 2. Caractères morphométriques des principaux lacs du Moyen-Atlas. quente les zones humides du Moyen-Atlas (Sidi Ali, Afennourir, Tifounassine, Ifrah, Lacs Altitude (m) S (ha) L (m) l (m) P (m) Pmax (m) Pmoy (m) Azegza, Abekhane et Wiwane) et du sud, ainsi que quelques sites du centre- Aguelmam Sidi Ali 2 050 300 2 200 1200 6 600 37 1,9 Atlantique [11, 12]. Par ailleurs, cette Aguelmam Azegza 1 470 50 1 204 450 2 700 26 3,2 espèce se reproduit régulièrement près de Aguelmam Wiwane 1 630 40 750 250 1 950 14 1,95 trois lacs (Afennourir, Sidi Ali et Tifounas- Tiguelmamine 1 650 13 320 294 1 236 20 4,9 sine). La foulque à crête, rallidé largement Aguelmam Abekhane 1 670 45 906 400 2 156 12 1,58 réparti en Afrique centrale et orientale, est Aguelmam Afennourir 1 796 300 970 612 3 942 1,5 0,07 représentée dans le Paléarctique occiden- Aguelmam Tifounassine 1 913 70 1 250 650 3 700 14 1,48 tal par une petite population partagée essentiellement entre le nord du Maroc et Aguelmam Afourgagh 1 380 12 460 310 1 136 9 2,29 le sud de l’Espagne. Au Maroc, cette Aguelmam Iffer 1 440 6 290 276 846 12 4,42 espèce ne se reproduit que dans certains Dayet Awa 1 460 140 1 255 362 3 400 3 0,22 lacs du Moyen-Atlas (Sidi Ali, Afennourir, Dayet Ifrah 1 650 250 1 620 755 3 886 8 0,44 Tifounassine, Dayet Awa, plans d’eau Aguelmame Mi’ammi 1 460 60 810 330 2 050 2 1,2 Zerrouka et de Sidi Mimoun) et les marais côtiers du nord-ouest (figure 2). S : superficie ; L : longueur ; l : largeur ; P : périmètre ; Pmax : profondeur maximale ; Pmoy : profondeur D’autres oiseaux remarquables sont fré- moyenne. quents aux alentours des zones humides moyen-atlasiques ; il convient de citer le grèbe à cou noir (Podiceps nigricollis),le insectes (33 espèces reparties principa- Richesse ornithologique des lacs pic de Levaillant (Picus vaillantii) et le rou- lement entre les Trichoptères, les Diptè- gequeue de Moussier (Phoenicurcus mous- res et les Coléoptères), suivis par les La diversité des habitats dans le Moyen- sieri), espèces à répartition géographique crustacés (sept espèces, partagées entre Atlas offrait des conditions favorables à la limitée et qui attirent à la fois les scientifi- les Copépodes, les Anostracés et les nidification des oiseaux. En effet, une cin- ques et les ornithologues amateurs. Amphipodes), puis par les poissons. Ce quantaine d’espèces plus ou moins liées dernier groupe fournit un contingent aux zones humides se reproduisaient dans autochtone d’environ 36 espèces, cette région ; mais leur nombre est actuel- parmi lesquelles figurait une truite endé- lement réduit à une trentaine d’espèces [8, Richesses piscicoles mique du lac Sidi-Ali, Salmo pallaryi,et 9]. qui s’est éteinte suite à des déversements Les oiseaux d’eau les plus remarquables Les zones humides du Moyen-Atlas sont de carpes dans ce lac. dans la région sont le tadorne casarca réputées pour leur grande valeur pisci- Parmi la faune aquatique du Moyen-Atlas, (Tadorna ferruginea) et la foulque à crête cole. Leur faune ichtyologique autochtone quelque 70 espèces sont considérées (Fulica cristata) (figure 2). Pour la pre- est relativement pauvre, composée essen- comme rares ou menacées de disparition, mière espèce, il convient de signaler tiellement d’un Salmonidé (Salmo macros- y compris les 53 taxons endémiques. Ce que la moitié de la population du nord- tygma), de trois Cyprinidés (Labeobarbus chiffre est probablement en augmentation ouest de l’Afrique, estimée à 3 000 indi- reini et Varicorhinus maroccanus)et vu la gravité des menaces représentées vidus [10], hiverne au Maroc avec un d’un Cobitidae (Cobitis maroccana), par les perturbations hydrauliques, la pol- millier d’individus en moyenne ; une endémiques nord-africains ou ouest- lution, les activités de loisirs, etc. grande proportion de ces hivernants fré- méditerranéens [7]. En contre-partie, ces

Tableau 3. Les plans d’eau moyen-atlasiques (d’après le Centre national d’hydrobiologie et de pisciculture, Azrou).

Plans d’eau Altit. Superficie Profond. Profond. Vol. Débit Observations (ha) max. (m) moy. (m) (m3) (L/ s) Zerrouka I 1 600 3,5 3 1,5 52 500 200 Plan d’eau à permis spécial Zerrouka II 1 600 4 2,5 1,5 60 000 250 Réserve permanente de pêche Mouali 1 560 1,75 4,2 2 35 000 40 Réserve permanente de pêche Amghass I 1 400 3 2 1,5 45 000 650 Plan d’eau à permis spécial Amghass II 1 400 3,2 3 1,5 48 000 600 Plan d’eau à permis spécial Amghass III 1 400 7 3,2 1,5 105 000 400 Élevage de black-bass Amghass IV 1 200 0,8 1,5 0,8 6 400 30 Élevage de brochet Amghass V 1 200 1,5 1,5 0,8 12 000 30 Réserve permanente pour black-bass Amghass VI 1 200 3 3 1,5 45 000 500 Élevage de brochet Ras El Ma I 1 550 0,5 3 1,5 7 500 200 Parc à géniteurs de truite fario Ras El Ma II 1 550 1 3,4 1,5 15 000 ---- Parc à géniteurs de truite fario Agumghem 940 3,5 4,1 2 70 000 ---- Élevage de black-bass Hachlaf 1 660 14 3,4 2 280 000 200 Plan d’eau à permis spécial Sidi Mimoun 1 530 7,3 3,5 2 146 000 200 Plan d’eau à permis spécial Aïn Marqa 1 470 4,2 4,5 2 84 000 40 Plan d’eau à permis spécial Ribâa 950 2,5 2,8 1,5 37 500 --- Élevage de black-bass

340 Sécheresse n° 4, vol. 15, décembre 2004 Tableau 4. Faune aquatique endémique des zones humides du Moyen-Atlas.

Ordres et Familles Genres et Espèces Distribution géographique Habitats préférés O. Triclades Fam. Dendrocoelidae Acromyadenium maroccanum MA SF, P O. Anostracea Fam. Branchipodidae Tanymastigites brteki MA DDH Tanymastigites jbiletica MA, AA, MM DD, DS O. Copepoda Fam. Cyclopidae Eucyclops hadjebensis MA, HA, R CC Fam. Diaptomidae Mixodiaptomuslaciniatus atlantis MA, HA LH, CFL, DD O. Amphipoda Fam. Gammaridae Gammarus acalceolatus MA LH CFL Gammarus microps MA PG Gammarus rouxi MA CF O Hydracarina Fam. Hydryphantidae Protzia brevipes MA CC Fam. Hygrobatidae Hygrobates paucidentis MA CC Megapus angulatus MA SF Fam. Aturidae Aturus convergens MA CC O.Ephemeroptera Fam. Heptagenidae Rhithrogena ayadi MA CFR Rhithrogena ryszardi MA CFR Ecdyonurus ifranensis MA CF Fam. Leptophlebiidae Choroterpes volubilis R, MA, HA CC O. Odonata Fam. Gomphidae Gomphus simillinus maroccanus MA, R, MN, MM LH, CFL,CC Fam. Cordulegasteridae Cordulegaster princeps MA, HA CFL, CFR O. Trichoptera Fam. Rhyacophilidae Rhyacophila munda oreina R, MA, MN, HA CF,CC Fam. Glossosomatidae Agapetus dakkii MA CF Agapetus dolichopterus MA, MM, HA CFR, SFR Fam. Hydroptilidae Hydroptila mendli mendli HA, MA CC Fam. Hydropsychidae Hydropsyche fezana HA, MA CC, SC Hydropsyche resmineda R, MM, MA, HA CC, LH Cheumatopsyche atlantis MN, MA, OP CC Fam. Polycentropodidae Pseudoneureclipsis Maroccanus R, MN, MA, HA CC, SC Cyrnus maroccanus MA CC, LH Fam. Psychomyidae Tinodes marocanus MA, MN CC, SC Fam. Leptoceridae Sestodes zerroukii MA, HA SC, CC Leptocerus maroccanus MA, HA CC Athripsodes MA CC Triaenodes laamii R, MA CC Setodes acutus MAR, MA, MN, HA CC O. Diptera Fam. Ceratopogonidae Culicoides landouae MA CF Fam. Ephydridae Hydrellia atlas MA LH Discorina mauritanica MA, R LH, CF Parydra flavitarsis R, MN, MA LH O. Coleoptera Fam. Dytiscidae Graptodytes atlantis MA CFL Stictonectes azruensis MA CFL Elmis atlantis MA SFR, CFR Fam. Elmidae Esolus bicuspidatus MA CFL Esolus theryi MA CFR Limnius opacus liovillei MA CFR, CFL Fam.Hydraenidae Ochtebius griotes MA, R CF, CC Ochtebius merinidicus MA CC Ochtebius perpusillus MA SF Ochtebius salinator lanarotis MA CFL O. Salmoniformes Fam. des Salmonidae Salmo pallaryi MA LH O. Cypriniformes Fam. Cobitidae Cobitis taenia maroccana MA, MN CC, CFL Fam. Cyprinidae Barbus magniatlantis MA, HA, OP CC Barbus moulouyensis MA, HA, OP CC Barbus nasus MM, MA CC Varicorhinus maroccanus MM, MA, HA CC, AB

Sécheresse n° 4, vol. 15, décembre 2004 341 60˚N

Key Sites Population Boundaries 50˚W Data deficient sites or sites that have occasionally Sites that regularly support internationally supported internationally important numbers important numbers Well justified 80˚E Has supported 1%-2% of flyway population Has supported 1%-2% of flyway population Uncertain Has supported 2%-10% of flyway population Has supported 2%-10% of flyway population Has supported >100% of flyway population Has supported >100% of flyway population Breeding areas

40˚W

50˚N 0 500 1000 70˚E

km

30˚W

40˚N

60 ˚E

20˚W 30˚N

20˚N 50˚E

40

˚E

30˚E

20˚E 10˚E 10˚W 0˚

Figure 2. Carte de répartition du Tadorne casarca (Tadorna ferruginea) (d’après [11]) et de la foulque caronculée (Fulica cristata) (d’après Chillasse et al.) • C : Tadorne casarca ; > : foulque caronculée. milieux font l’objet d’une importante acti- vité de pêche et de déversements réguliers de poissons allochtones ; l’introduction de ces derniers, démarrée en 1921, a Tableau 5. Liste des espèces de poissons introduites dans les zones humides du Moyen-Atlas. concerné une trentaine d’espèces (tableau 5) d’origines européenne et Fam. des SALMONIDES Fam. des CYPRINIDES nord-américaine [13, 14], dont une quin- Salmo gairdneri Truite arc-en-ciel Cyprinus carpio Carpe commune zaine sont encore acclimatées aux eaux Salmo trutta fario Truite de rivière Rutilus rutilus Gardon naturelles moyen-atlasiques. Les potentialités piscicoles de ces zones Salmo kamloops Truite de rivière Scardinius erytrophtalmus Rotengle humides offrent actuellement une option Salmo klarkii Truite de rivière Phoxinus phoxinus Vairon de premier ordre pour leur valorisation ; la Salmo trutta letnica Truite de lac Tinca tinca Tanche pêche sportive est en effet susceptible de Salvelinus alpinus Omble chevalier Gobio Goujon contribuer, avec l’écotourisme (fondé sur Hucho (Salvelinus) hucho Huchon Ctenopharyngodon idella Carpe chinoise amour blanc les valeurs paysagères des milieux aquati- Salvelinus fontinalis Saumon de fontaine Hypophtlmichthys molitrix Carpe chinoise argentée ques), à faire respecter ces milieux. Thymallus thymallus Ombre commun Aristichtis nobilis Carpe chinoise grosse tête Fam. des ESOCIDES Fam. des POECILIDES Esox lucius Brochet européen Gambusia affinis Gambusie Valeurs culturelles Esox masquinony Brochet américain Fam. des CENTRARCHIDES et socio-économiques Esox niger Brochet américain Micropterus salmoides Black-bass à grande bouche Fam. des PERCIDES Lepomis gibbosus Perche soleil La présence des hominidés dans le Moyen- Perca fluviatilis Perche Pomoxis annularis Calico-bass Atlas remonte au début du Pléistocène, Stizostzedion lucioperca Sandre date à laquelle ont été rapportés des osse- ments humains trouvés près d’un cours Les espèces en caractères gras sont encore acclimatées.

342 Sécheresse n° 4, vol. 15, décembre 2004 Tableau 6. Inventaire des zones humides classées comme sites naturels humaine et une diversification des activités socio-économiques qui se font principale- Nom du Site Statut Carte ment aux dépens des zones humides. En Aguelmam Sidi Ali Dahir portant classement du site Azrou effet, outre les perturbations hydrologi- ques causées par l’usage croissant des Plateau des lacs (plateau d’Ajdir) Dahir portant le classement du site Itzer eaux de surface et souterraines à des fins Aguelmam Azegza Dahir portant classement du site Itzer ménagères, ces milieux subissent une forte Aguelmam Afennourir Site classé (commune de Ain Leuh) Ain Leuh dégradation (pollution, transformation Aguelmam n’Tifounassine Site classé (commune de Timahdit Timahdit d’habitats, dérangements de la faune Aguelmam Ajdir Dahir portant classement du site Itzer reproductrice...) liée principalement à la Sources de l’Oum Er-Rbia Arrêté viziriel ordonnant le classement du site El Hamam présence massive et fréquente de touristes, Lac Wiwane Arrêté viziriel ordonnant une enquête El Hamam de bétail et d’habitants d’agglomérations en vue du classement du site locales. Tiguelmamine (et plateau d’Ajdir) Arrêté directorial ordonnant l’ouverture d’une enquête Itzer Trois groupes d’activités humaines nous en vue du classement des sites paraissent très défavorables au maintien Ifri Ouaska (grotte) Site inventorié et classé Azrou de la biodiversité aquatique. • Ifri Ouberid (grotte) Site classé (commune de Ain Leuh) Azrou Les pompages, les dérivations et le cap- Dayet ’Awa (lac) Lac classé (commune de Dayet awa) Ifrane tage des sources, qui ont connu pendant les vingt dernières années une expansion Dayet Hachlaf (lac) Site classé (commune de Dayet Awa) Ifrane démesurée, liée à l’extension en altitude Dayet Ifrah (lac) Site classé (commune de Dayet Awa) Ifrane des activités agricoles, affectent profondé- Dayet Hachlaf (tumulus) Site classé (commune de Tizguit) Ifrane ment les régimes hydrologiques et thermi- Tahfort (tumulus) Site classé (commune de Tizguit) Ifrane ques des oueds et des sources. Cet impact Oued Taoujdat (tumulus) Site classé (commune de Tizguit) Ifrane se manifeste par une forte baisse des Oued Tizguit (tumulus) Site classé (commune de Tizguit) Ifrane débits (voire des assèchements) et une Tidrine (tumulus) Site classé (commune de Tizguit) Ifrane forte augmentation de la température, ces deux conditions étant intolérables pour la Lac Timlouline (Forteresse de fazzaza) Ville historique découverte près du lac Timlouline en 1998 Khénifra majorité des espèces animales inféodées Ain/oued Maarouf (gisement archéologique) Site classé (province d’) El Hajeb aux ruisseaux de montagne, alors qu’elles provoquent une montée vers l’amont d’espèces de basse altitude. Plusieurs d’eau de la région d’El Hajeb, et dont la neuses, lesquelles sont généralement loin espèces rares ou endémiques des eaux morphologie évoque celle de l’Homo erec- des zones humides. courantes du Maroc disparaissent ainsi tus [15]. Des pierres taillées, des restes de La pêche est exercée dans de nombreux progressivement du Moyen-Atlas. Les pom- peintures rupestres et d’édifices archéolo- points d’eau aménagés spécialement pour pages dans les nappes qui alimentent cer- giques trouvés au voisinage de lacs et de cette activité et repeuplés régulièrement en tains lacs (La’nocer, ’Awa, Afourgagh, rivières témoignent de cultes développés poissons, notamment par la station de Hachlaf, Mi’ammi, Afennourir...) ont forte- aux alentours de ces zones humides [16, pisciculture d’Azrou. Par leur qualité pisci- ment contribué à la baisse de leur niveau, 17]. cole, ces derniers attirent de nombreux laquelle se termine parfois par leur assè- La majorité des zones humides du Moyen- pêcheurs de toutes les régions du Maroc. chement. Outre leur influence sur la biodi- Atlas sont ainsi inscrites dans la liste des Le tourisme dans les zones humides consti- versité, ces impacts réduisent sévèrement sites classés (historiques et/ou naturels) tue une activité prépondérante et généra- les chances de réalisation d’une éventuelle selon la nomenclature du ministère de la trice de revenus pour la population et les stratégie de mise en valeur au profit de la Culture (tableau 6). communes. Ces milieux attirent en effet, pêche sportive ou de l’écotourisme. Actuellement, les activités humaines liées par leur beauté naturelle et leur biodiver- • Les lacs, les rivières, les grandes résur- aux zones humides se sont bien diversi- sité, un nombre considérable de touristes gences et les cascades, considérés comme fiées, avec une nette prédominance du nationaux. Aussi, la création des villes aires d’estivage privilégiées pour les habi- parcours. L’élevage d’ovins et de caprins, d’Ifrane et d’Immouzer du Kandar (pen- tants des grandes villes de la plaine de activité ancestrale très répandue dans le dant les années 1930) n’avait-elle pas Saïs, connaissent depuis plus d’un demi- Moyen-Atlas et représentant pour certains pour objectif, entre autre, de fonder des siècle, un important afflux de visiteurs et de foyers la seule ressource économique, se stations de tourisme de montagne pour campeurs. Cet afflux a pris durant les deux faisait dans cette région selon un rythme familles, pêcheurs et chasseurs. Actuelle- dernières décennies des dimensions qui saisonnier (transhumance) ou de semi- ment, cette activité est pratiquée sous en font une source majeure d’impact, en nomadisme. Actuellement, on constate forme de randonnées, d’excursions, de termes de pollution organique, de produc- une tendance à l’abandon de ces déplace- pique-niques, sans oublier la pêche spor- tion de déchets solides, de dégradation ments, au développement de l’élevage des tive. des habitats naturels et de dérangement bovins au niveau des piémonts et à proxi- Par ailleurs, la plupart des zones humides de la faune (oiseaux nicheurs et mammifè- mité de certaines zones humides. servent actuellement de support éducatif à res). Trois phénomènes essentiels ont Les cultures irriguées concernent essentiel- des actions de sensibilisation par des contribué à ce type de tourisme : (1) la lement le secteur arboricole (olivier, pom- ONG, des chercheurs et des enseignants. facilité d’accès du public, assurée depuis mier, poirier, cerisier...), mais le long de le printemps jusqu’à la fin de l’été par un certains oueds de plaine, la culture des réseau routier qui mène à la quasi-totalité légumes, telle que celle de la pomme de Impacts des sites ; (2) le développement par les terre, prédomine. L’irrigation ne concerne communautés locales de petites infrastruc- qu’exceptionnellement les cultures de À l’instar des autres régions du Maroc, le tures d’accueil (campings, parkings...) et céréales (blé, orge, maïs...) et de légumi- Moyen-Atlas a connu une expansion de petits commerces qui assurent des

Sécheresse n° 4, vol. 15, décembre 2004 343 recettes pendant tout l’été ; (3) des « amé- son aquifère riche, n’a pas échappé à ces Eaux et Forêts et de la Lutte contre la liorations » de l’attractivité des sites par mesures, sachant que celles-ci furent géné- désertification ; le quatrième (site classé), leur artificialisation. Il importe de signaler ralement en faveur des centres urbains de concernant à la fois le patrimoine naturel que plusieurs points d’eau ont subi des la périphérie nord de ce massif. et culturel, relève des compétences du aménagements profonds, avec remplace- Certains cours d’eau et sources ont ainsi ministère des Affaires culturelles. Dans ce ment du couvert naturel par du béton. tari durant les années sèches, alors que les contexte, il convient de préciser que la Le meilleur exemple illustrant l’impact de lacs se sont fortement rétrécis et certains plupart des lacs du Moyen-Atlas sont clas- ce tourisme anarchique est celui de l’oued d’entre eux se sont asséchés à plusieurs sés par ce ministère, alors que certains Tizguit à Ifrane : fortement transformée, reprises, subissant ainsi des pertes écolo- d’entre eux sont des réserves permanentes cette petite vallée accueille dès le mois giques irréversibles et des pertes considé- de chasse et/ou sont inclus dans le Parc d’avril, en particulier pendant les week- rables de leur valeur piscicole. national d’Ifrane (tableau 7). ends et les jours de fête, de 1 000 à 6 000 C’est dire que ces mesures d’urgence ont En parallèle avec ces statuts, plusieurs visiteurs par jour, produisant plusieurs ton- eu un effet multiplicatif (et non seulement espèces animales sont protégées par la nes de déchets solides, organiques et liqui- additif) sur les impacts directs de la séche- législation de la chasse et/ou de la pêche. des. resse. Dans ce cadre, il faut mentionner les deux • En parallèle avec ce tourisme anarchi- Par ailleurs, la sécheresse a certainement espèces d’oiseaux d’eau les plus intéres- que, la fréquentation par le bétail a subi joué en faveur de l’installation en altitude santes du Moyen-Atlas (foulque à crête et une mutation très défavorable aux zones de certaines formes d’agriculture qui, une tadorne casarca), qui se trouvent proté- humides de montagne. Constituant les fois mises en route, ont été contraintes de gées contre la chasse. seuls lieux d’abreuvement, celles-ci furent puiser dans les aquifères déjà affectés par Le processus de classement dans ces sta- exploitées depuis fort longtemps à travers la sécheresse. Aussi, la tendance régres- tuts fut très lent jusque dans les années un système de transhumance où les trou- sive de la transhumance, dont les effets sur 1990 où le Maroc a procédé à l’identifica- peaux séjournaient en montagne pendant les zones humides ont été évoqués tion d’un réseau de 160 sites d’intérêt les 4-5 mois secs. Durant les deux derniè- ci-dessus, n’est-elle due qu’en partie à la biologique et écologique (SIBE), présenté res décennies, où les sécheresses répétées sécheresse. dans un cadre stratégique [1]. Dans cet écourtaient la durée d’enneigement, le inventaire, figurent 84 zones humides, séjour du bétail en montagne fut étalé sur dont 15 % (13 sites) sont dans le Moyen- des périodes de plus en plus longues, pour Statuts de protection Atlas (tableau 7). finir avec la sédentarisation de certains nomades à proximité des points d’eau. Cet inventaire fut suivi de l’identification Cette sédentarisation a entraîné le recours Outre les nombreuses conventions et pro- d’un réseau de zones d’importance pour à des prélèvements d’eau dans la nappe tocoles internationaux que le Maroc a la conservation des oiseaux (ZICO), châ- et à des constructions en solide, en plus de ratifiés et qui sont plus ou moins contrai- peauté par BirdLife International. Fondé la dégradation du couvert forestier et de gnants en matière de protection de la sur des critères d’importance internatio- l’expansion de l’agriculture. nature, la législation marocaine actuelle- nale, ce réseau comprend cinq zones ment offre aux zones humides quatre sta- humides du Moyen-Atlas (tableau 7), tou- tuts de protection. Trois de ces statuts (parc tes identifiées auparavant comme SIBE. Conséquences écologiques national, réserve permanente de chasse et En 2002, le Maroc a entrepris un inven- réserve permanente de pêche) relèvent taire de 20 zones humides dans le but de de la sécheresse des compétences du département des les inscrire sur la liste de la convention de

Les conséquences directes de la séche- resse sur les zones humides résident sur- Tableau 7. Statut de protection des zones humides moyen-atlasiques. tout dans la baisse du niveau des lacs et du débit des rivières, provoquant des crises Sites Statut de protection écologiques plus ou moins aiguës : rétré- LNC RPC RPP RAP SCMN SIBE ZICO SR cissement des habitats, baisse du courant Aguelmam Abekhane 3 et du taux d’oxygène, réchauffement et Aguelmam Afennourir + + + 1 + + forte minéralisation des eaux, eutrophisa- Aguelmam Azegza + + 3 tion du milieu..., avec possibilité de dispa- Aguelmam Mi Ammi 3 rition d’espèces d’eau froide au profit d’espèces thermophiles [18]. Aguelmam n’Tifounassine + 2 + + Sur le plan socio-économique, la séche- Aguelmam Sidi Ali-Ta’anzoult + 2 + + resse a déclenché, entre autres, un exode Aguelmam Wiwane + + + 3 rural qui s’est manifesté par un gonflement Dayet ’Awwa + + 3 + brutal et exagéré des centres urbains, pro- Dayet Iffer 3 voquant ainsi un accroissement inattendu Dayet Ifrah 3 + du volume des eaux usées et de la Oued Guigou à Foum Khnag + demande en eau potable et industrielle ; pendant ce temps, la demande en eau Oued Tizguit 1 d’irrigation n’a pas cessé d’augmenter. Plan d’eau Amghass 3 Pour affronter ces crises sociales, le Maroc Plan d’eau de Zerrouka + + 3 a eu recours à des mesures d’urgence consistant en une mobilisation massive des LNC : lacs naturels classés ; RPC : réserve permanente de chasse ; RPP : réserve permanente de pêche ; RAP : réserves annuelles de pêche ; SCMN : site classé en tant que patrimoine naturel ; SIBE : site d’intérêt biologique eaux de surface et profondes, notamment et écologique : les chiffres 1, 2 et 3 indiquent l’ordre de priorité de protection (urgente, court terme, moyen à travers les pompages et les barrages. Le terme) ; ZICO : zone d’importance pour la conservation des zones humides ; SR : site Ramsar (zone humide Moyen-Atlas, malgré son climat humide et d’importance internationale).

344 Sécheresse n° 4, vol. 15, décembre 2004 Ramsar. Cet inventaire, en cours d’achève- mise en valeur éducative et écotouristique 7. Dakki M. Étude nationale sur la biodiversité : ment, portera la liste des sites Ramsar du des espaces montagnards d’intérêt écolo- faune aquatique continentale (invertébrés et pois- pays à 24, dont deux sont situés dans le gique, avec une participation active des sons). Rabat : Ministère de l’Environnement du Moyen-Atlas : le lac d’Afennourir, inscrit autorités locales. Celles-ci devraient en Maroc ; Programme des Nations unies pour en 1980, et le complexe des deux lacs de plus être éclairées sur les méfaits des amé- l’environnement (PNUE), 1997 ; 117 p. Tifounassine et de Sidi Ali-Ta’anzoult, nou- nagements touristiques irréfléchis effectués 8. Chillasse L, Dakki M, Abbassi M. Les lacs vellement inventoriés dans un même site, aux dépens des sites aquatiques. En effet, naturels du Moyen Atlas, zone d’intérêt majeur comprenant également le Haut-Guigou en l’espoir de voir s’améliorer le sort des pour la conservation de la biodiversité. Procee- aval de sa source principale (Aghbalou points d’eau connaissant une forte fré- dings of First International Conference on Biodi- Aberchane). quentation humaine est lié à cette prise de versity and Natural Resources Preservation, School of Science & Engineering, Al Akhawayn conscience, qui devrait en principe abou- University, Ifrane, May 13-14, 1999. tir à une déclaration des zones humides de Conclusion montagne comme zones non-aedificandi. 9. Chillasse, L. Les oiseaux nicheurs et estivants Enfin, il est probablement temps de réflé- des lacs naturels du Moyen-Atlas. Actes des troi- chir à une promotion de la transhumance, sièmes journées : Oiseaux d’eau et les Zones Il ressort de ce diagnostic que les zones afin d’empêcher l’extension de l’habitat humides au Maroc, Institut Scientifique, Rabat, humides du Moyen-Atlas remplissent des 09-10 juin 2000 (inédit). humain à proximité des points d’eau. Vu le fonctions hydrologiques et socio- rôle de la sécheresse dans la régression de 10. Wetlands International. Waterbird Popula- économiques dont l’impact s’étend à ce mode de vie, n’est-il pas justifié tion Estimates. Third Edition. Wetlands Internatio- l’ensemble du pays ; leurs valeurs écologi- d’inclure cette promotion dans les proces- nal Global Series n°12. Wageningen (The ques et patrimoniales les mettent au rang sus de lutte contre les effets de la séche- Netherlands) : Wetlands International, 2002 ; de zones humides d’importance internatio- resse ? ■ 226 p. nale, notamment pour ce qui est du main- tien de la biodiversité. Ces valeurs sont 11. Derek A, Scott DA, Rose PM. Atlas of Anati- restées malheureusement mal appréciées, dae populations in Africa an Western Eurasia. Références Wetlands International publication 43. Wage- dans la mesure où les impacts subis par ningen (The Netherlands) : Wetlands Internatio- ces milieux ne cessent de s’accroître. nal, 1996 ; 36 p. Les études récentes relatives à la biodiver- 1. Dakki M. In : Hecker N, Thomàs-Vives P, eds. The status of Wetland Inventories in the Mediter- 12. El Agbani MA, Dakki M, Beaubrun PC, sité ont sensiblement contribué à éclairer ranean Region. IWRB Publ. n°38. Slimbridge les gestionnaires sur l’intérêt de ces Thévenot M. L’hivernage des Anatidés (Anati- (Royaume uni): International waterfowl and Wet- dae) au Maroc : effectifs et sites d’importance valeurs et de ces impacts ; il en a résulté lands Research Bureau (IWRB); ICN, 1995 : internationale et nationale. Gibier Faune Sau- une prise de conscience qui s’est matériali- 110-3. vage ; Game Wildl 1996 ; 13 : 233-49. sée par l’affectation d’un statut de protec- 2. Administration des Eaux et Forêts et Conserva- 13. Farthouat JP. Les ressources piscicoles des tion national et/ou international aux sites tion des sols (AEFCS). Plan directeur des aires eaux douces du Maroc. Nature et Forêts 1975 ; les plus importants. Toutefois, la faiblesse protégées du Maroc. Rapport inédit. Rabat : 5 : 5-13. de l’arsenal juridique actuel en matière de AEFCS ; BCEOM-SECA ; Inst.Sci. ; EPHE, Sd ; conservation de la biodiversité et la vol.1-5. 14. Mouslih M. Introductions de poissons et demande incessante des populations vis-à- 3. Dakki M, El Hamzaoui M. Les zones humides d’écrevisses au Maroc. Rev Hydrobiol Trop vis de l’eau, aggravée par des sécheres- du Maroc : rapport national. Rabat : Départe- 1987 ; 20 : 65-72. ses répétées, ne jouent pas en faveur de la ment des Eaux & Forêts et Conservation des Sols ; 15. Geraards D, Amani F, Hublinj J. Le gisement protection souhaitée. Conv. Ramsar ; MedWet, sd , 31 p. pléistocène moyen de l’Ain Maarouf près d’Elha- Aussi, le projet de « loi sur les aires proté- 4. Giudicelli J, Dakki M. Les sources du Moyen jeb, Maroc : présence d’un hominidé. CR Acad gées » élaboré par l’Administration fores- Atlas et du Rif (Maroc) : faunistique (description Sci Paris série II C314, 1992 : 319-23. tière, donne-t-il un espoir de pallier ces de deux espèces nouvelles de Trichoptères), éco- 16 handicaps, sachant qu’il permettra logie, intérêt biogéographique. Bidragen tot de . Ayach A. Histoire de l’Afrique du Nord. d’affecter une réglementation à chaque Dierkunde 1984 ; 54 : 83-100. Paris : Editions sociales, 1964 ; 79 p. site, de mieux mettre en œuvre les plans 5. Martin J. Le Moyen Atlas central étude géo- 17. Camps G. Un mausolée marocain la grande d’aménagement et d’envisager des morphologique. Notes et Mémoires du service bazina du Souk El Gour. Bull Archéol Maroc actions de restauration des zones humi- géologique, n° 258 bis. Rabat (Maroc) : sn, 1960 ; IV : 47-92. 1981 ; 447 p. des. 18. Dakki M. Écosystèmes d’eau courante du En attendant l’approbation de cette loi, les 6. Amhaouch M. Étude physico-chimique et Haut Sebou (Moyen-Atlas) : études typologiques portes restent ouvertes aux actions de sen- ichthyologique des lacs du Moyen Atlas : cas et analyses écologique et biogéographique des sibilisation du public, qu’il est souhaitable d’Ifrah et Sidi Ali. Mémoire de 3e cycle, école principaux peuplements entomologiques. Trav d’accomplir à travers des programmes de nationale forest. ingénieurs, Salé, 1995, 130 p. Inst Sci Rabat série Zool 1987 ; 42 : 1-99.

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