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’ LE MIROIR

o ® © O o © O PAPIER A CIGARETTES DLLU CH - LACROIX ANGOULÊME I™« I___IVi 1 0 1 23 MARS 1913

ABONNEMENTS I f vt t>a s ï t c ABONNEMENTS: et Colonies : Six mois, 4 fr. ; — U n an, 8 fr. BUREAUX : 18, RUE D ENGHIEN, PARIS Union Postale : S ix mois, 7 fr. ; — Un an, 14 fr.

Fort comme un Turc!

L.es portefaix de Constantinople «ont célèbres pour l’aisance avec laquelle Ils s'accommodent des fardeaux les plus lourds et les plus encombrants. Celui-ci ne fait pas mentir la légende. Ne semble-t-ll pas comme un vivant symbole de celte Turquie, qui porte sans en paraître trop accablée la charge formidable de sa dette et le poids plus lourd encore de malheurs presque sans précédents en l’HIstoIre ? 4 LE MIROI«

La Décadence :: de la Danse::

;a valse me faisait peur, autant par les inévitables collisions que par le fait constaté qu’en tournant en rond comme des tontons, on finissait par avoir mal au cœur. Le boston a été le correctif heureux de ces diverses infortunes, de même que les ligues antialcooliques ont été créées quand on s’est aperçu qu’avec l’exiguïté des logements et l’abondance des bibelots sur les meu­ bles, seule la sobriété pouvait éviter des catastrophes quotidiennes. Le boston permettait de naviguer entre les couples en esquivant par de savants et immédiats à gauche l’abordage ou l’échouement. Le bon danseur de cette époque-là se distinguait par le succès avec lequel il savait éviter à sa danseuse des LA P A V A N E bleus dans le’ dos ou sur les bras et des accrochages de chignons. Je ne sais plus quel est le poète ou le philosophe qui Dans un concours de boston qui eut lieu en 1904, a écrit : « La danse est une poésie muette ». Ce devait on avait synthétisé ce que je dis là en obligeant les DANSE ROMANTIQUE être en tout cas un homme des temps passés, car si ce couples à faire un parcours chronométré entre des vénéré maître assistait aux soirées d’aujourd’hui, bouteilles traîtreusement placées un peu partout sur un tel jugement étonnerait fort de sa part. réglementèrent le boston, créèrent des triple et qua­ le parquet. C’était le steeple-chase remplaçant la Quand l’excellent Henri Beyle notait : « Je voudrais druple bostons, avec plongeons sur les genoux, arrêts course plate. Le vainqueur était celui qui avait en le qu’on prît en France, comme en Allemagne, l’usage sur le talon droit ou gauche, pirouettes sur place. moindre témps tourné autour de tous les obstacles des soirées dansantes, » il ne se doutait pas du résultat On entrait dans l’ère des danses abracadabrantes. sans les renverser avec ses pieds, ceux de sa danseuse des conseils qu’il donnait il y a juste un siècle. Le cake-walk, introduit en France par les Elks, en 1902, ou un mouvement de jupe de celle-ci. L ’expression Ce qui était le charme de ces sauteries d’autrefois, répondait trop bien à ces goûts encore mal définis a danser sur un mouchoir de poche » était un éloge dont Stendhal eut la révélation pendant son séjour à pour ne pas de suite avoir un colossal succès. Je rappel­ suprême et indiquait une maîtrise et une conduite Brunswick, en 1807, c’était cet aimable tourbillon lerai la soirée fameuse du 28 mars 1903 au Nouveau- absolue des escarpins. de couples jeunes, emportés par le rythme joyeux des Cirque, où l’on vit, de minuit à 4 heures du matin, valses et des mazurkas, « chantant avec leurs pieds »‘ La valse à trois temps, celle de Métra, de Strauss devant un jury d’artistes et d’hommes du monde, si j’ose m’exprimer ainsi, la gaieté qui était en eux. et d’Offenbach, était nécessairement sautante, ce que et devant la plus admirable salle de générale que Paris Au fond, la danse n’a jamais été que cela : une les anciens appelaient, du temps des gavottes: la ait jamais connue, une vingtaine de couples dont expression. danse par haut, celle où le pied quittait la terre. quelques professionnels, mais surtout des jeunes gens Quel est celui d’entre nous qui, à dix-huit ans, Le boston, au contraire, était une danse basse ou du meilleur monde, s’essayer sur l’arène aux contor­ en recevant la première lettre d’une cousine adorée, noble, tout comme le menuet. Le pied glissait sur le sions les plus négro-américaines. On avait pris cela n’a pas, tout seul, sur le tapis de sa chambre, s’étu­ parquet sans l’abandonner. Au point de vue des comme un jeu, un divertissement passager, une de ces diant, esquissé un petit pas sautillant en riant à gorge cors aux pieds, dans les salons encombrés d’invités aventures uniques telles qu’il en survient dans la jeu- déployée. trop nombreux et insuffisamment instruits de choré­ îesse de tout homme joyeux de vivre, telles que la Les paroles ne sont pas toujours suffisantes pour dire graphie, le boston était le bienvenu. Il y avait peut- soirée de ce petit cirque de Toulon, où Pierre Loti ce qui se passe en nous. Il y a des gestes qui en racon­ être l’orgueil, mais il n’était pas suivi de l’écrasement I s’exhiba il y a quelque trente ans en maillot d’acrobate. tent beaucoup plus et la danse est de ce nombre. Ce qui distinguait davantage encore le boston de la. Le malheur fut que le cake-walk fut pris au sérieux. C’est la révélation naturelle de la joie. La farandole valse, c’était la différence radicale du mouvement. Dès lors, le Rubicon était passé. Depuis dix ans, on a des moissonneurs, comme le quadrille des lanciers La valse se dansait sur le rythme, le boston sur là importé chez nous toute la pacotille sauvage. Ce n’est sont bien, comme le disait mon vieux philosophe, des mélodie. On disait, en ces jours heureux, que l’on plus nous qui vendons des pièces de bonne toile aux « poésies muettes ». pouvait danser sur n’importe quel air, y compris la nègres; ce sont les nègres qui nous inondent de leurs Je ne sais pas trop à quelle poésie peuvent bien Marche funèbre de Chopin. Rien n’était plus exact. flûtes en bambou décorées de défenses de rhinocéros. faire songer les turkey trott et autres danses de singe Isadora Duncan l’avait prouvé. C’était d’ailleurs, Je ne voudrais point passer pour un moraliste enclin qu’on s’est plu à introduire progressivement dans les beaucoup plus que ses pieds nus, la partie la plus inté­ à la tristesse, mais je me demande si cette évolution salons parisiens et même provinciaux, à moins que ce ressante de ses créations. Alors que toute l’ancienne ne correspond point à celle de l’esprit public. A la jeu­ ne soit à de la poésie cubiste. chorégraphie était basée sur la cadence, les danses nesse d’autrefois, jeunesse enthousiaste, romantique, Ces mœurs nouvelles ont quelque chose d’effarant. nouvelles ne faisaient attention qu’à la phrase musi­ où, jusqu’à vingt ans, l’on écrivait des vers d’amour, On voit de paisibles mères de famille non seulement cale. Le boston, fils de cette conception, interprétait où les jeunes peintres fréquentaient plus le musée du conduire leurs filles à des leçons d’acrobatie transat­ des mélodies sentimentales : Quand l’amour meurt, Louvre que le Salon d’Automne, où Musset arrachait lantique, comme elles les conduiraient entendre les Premier Frisson, etc; le pas traînait là où la voix du des larmes à ses adolescents lecteurs, a succédé une cours d’histoire de l’art, à la Sorbonne, mais encore chanteur aurait tenu la note, le mouvement s’activait jeunesse sceptique, âpre à l’immédiate jouissance, s’extasier devant les contorsions que de méchants quand la romance s’annotait : appassionata. E t cela habile à découvrir les moyens du succès. Les barbouil­ petits jeunes gens (qui, eux, leurs, qui étaient incapables de savent parfaitement ce qu’ils copier un bon dessin, firent font) imposent, sous la lumière avaler au nom de théories nou­ resplendissante des lustres à velles d’art des monstruosités leurs infortunées partenaires dont on ne sait si l’on doit rire C’est d’un comique douloureux. ou pleurer. Les refusés du bac­ A tous petits pas, ces théori­ calauréat, trouvant la rime et ciens des danses (?) nouvelles l’observation de la prosodie tordent les jeunes filles dans trop difficiles, créèrent de soi- leurs bras, les serrent, les ren­ disant poèmes suivant une versent, et l’on fait cercle pour formule qui les dispensait de regarder cela. travailler. Où es-tu, bonne vieille valse Cubisme, futurisme, danse à trois temps de nos ancêtres ? de l’ours ou du kangourou, Où êtes-vous simple et même tout cela part du même prin­ double bostons, valses harmo­ cipe : très peu de pensée, très nieuses dont le ralenti per­ peu d’effort, pas du tout de mettait la grâce des mouve­ cœur; bluff facile qui épate les ments glissants? naïfs qui forment la classe la Certes, il y avait dans ces plus importante parmi les gens valses du siècle dernier une qui n’aiment qu’à se laisser con­ fougue, un mouvement rota­ duire. tif rapide que les appartements Peut-être le vent d’est, qui modernes rendaient infiniment est déjà venu ces derniers temps dangereux. Avec la valse à balayer quelques feuilles mortes trois temps, fondée sur le qui cachaient la belle terre de rythme un, deux, trois, un, France secouera-t-il les volets deux, trois... il arrivait des des salons où la bonne gaieté accidents : on recevait un française, le sain romantisme coup de poing dans l’œil, or; DEUX FIGURES DU "PAS DE L’OURS” des valses brillantes ou lentes démolissaitl’échafaudage d’une commençaient de s’oublier. coiffure féminine en moins de temps qu'il ne faut pour pouvait être très joli parce qu’un sentiment s’y Tout se tient. La pensée de mon vieil ami, le poète ou l’écrire, et ceux qui ont les pieds sensibles se sou­ mêlait. le philosophe dont je ne sais plus le nom : « La danse viennent de dures épreuves. On n’a pas compris cette pensée. Les professeurs de est une poésie muette», mérité d’être méditée : on danse Le boston est né de ce danger. Je me rappelle, danse, qui auraient risqué de mourir de faim si cette encore plus avec son cœur qu’avec ses pieds. quand j’étais petit garçon, que j’attendais générale­ interprétation était devenue générale, c’est-à-dire si Et ce n est pas M110 Zambelli qui me démentira. tout le monde n’avait dansé que suivant son cœur, ment une polka pour inviter une demoiselle, car R e n é P u a u x .

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Un jour de l’année 1884, M. Casanova, professeur sur toutes ses effigies et sur les statues qu’on fera de rhétorique au lycée de Marseille, et qui remplaçait d’elle... momentanément un de ses collègues, professeur de Reine de l’Attitude et princesse dit Geste... Seconde au même lycée, entra dans la classe — Eh l ien, reprend M. Rostand, ce poème, récité et, fort animé, dit aux élèves : ]~ar son auteur devant une salle d’élite acheva de me — Messieurs, je vais vous lire un devoir d’un de vos donner la sympathie, l’acquiescement de ceux qui camarades qui ira loin. avaient assez, sévèrement critiqué jadis la Princesse Et M. Casanova lut aux élèves une composition de lointaine. On attendait de moi une œuvre nouvelle. leur camarade Edmond Rostand. Cette œuvre devait être — le 28 décembre 1897, la Mais ce n’était pas la première fois que pareil hon­ même année, quelques mois après seulement — que la neur arrivait au jeune Rostand. Il était coutumier la Samaritaine Cyrano de Bergerac. qu’on lût en classe ses compositions à voix haute tant Je ne demande point à M. Rostand de me dire ce on y trouvait de talent et de gentillesse. Lui, le jeune que fut la représentation de Cyrano. On sait qu’elle Rostand, il écrivait, pour son plaisir, outre les narra­ fut une date, ]:oiirrait-on dire, unique dans l’histoire tions imposées, des nouvelles et des contes, profusé- du théâtre. Sarcey écrivit : « Un poète nous est né... » inent. Son maître, son modèle était Alphonse Daudet. Et terminait par cette exclamation : « Quel bonheur! Sa joie fut ineffable le jour où il entendit le bon mon­ quel bonheur !... » sieur Casanova dire de lui : « Il écrira des contes Pour demeurer sur le seul terrain des anecdotes, et à comme M. Daudet. » propos de la frénésie de cette première représentation, Venu à Paris, collégien à Stanislas, Edmond Ros­ tand eut pour professeur de rhétorique M. René une significative histoire ma fut contée par Jean Coque- lin, au cours d’une des récentes répétitions, et comme Doumic. Celui-ci disait à son élève : « Vous, Rostand, M. Postand lui avait demandé, en ma présence, de vous ferez du théâtre... » l'aider à compléter ses souvenirs de cette époque Aussi M. Edmond Rostand, de l’Académie Fran­ pour le Miroir... çaise et de qui on a repris Cyrano la semaine der­ Mmo Coquelin avait avec elle, dans sa loge, une nière, garde-t-il une pieuse reconnaissance au profes­ amie que sa fille devait venir chercher à la sortie du seur Casanova, du lycée de Marseille, et au professeur Doumic, du collège Stanislas, ce dernier son collègue, théâtre. Cette demoiselle arriva vers minuit, un peu avant que la représentation fût achevée, et, entrant aujourd’hui, à l’institut. dans le théâtre, se dirigea vers la loge où devait se C’est M. Edmond Rostand lui-même qui veut bien me faire cette espèce de confession. Il ajoute qu’il y a trouver sa mère. Mais elle avait à peine fait quelques quelqu’un encore à qui son inaltérable gratitude fut pas qu’elle fut saisie d’un trouble extraordinaire et, vouée au même titre qu’aux deux premiers bons pro­ comme hors d’elle-même, se précipita vers un contrô­ leur auquel elle cria : phètes. Ce fut M. Auguste Filon, critique littéraire à la Revue bleue, à l’époque où parurent les Musardises. Le « — Monsieur ! monsieur ! que s’est-il donc passé ici? livre était passé presque inaperçu. Seul, M. Filon écrivit: « - - Mais, mademoiselle, répondit ce contrôleur, ïort étonné de l’intense émotion de la jeune fille, on Ce volume n'est pas une bouture ni une fleur, mais un fruit délicieux ; ce n’est pas une promesse, mais une M *” Rostand et son fils Maurice. a joué Cyrano de Bergerac, et c’est un grand triomphe... véritable explosion de talent poétique... E t M. Augustin (Cl. Gerschell.) Et quand elle eut pénétré dans la loge, la jeune fille Filon ajoutait, après avoir évoqué Musset : M. Rostand comprit la cause de son agitation nerveuse. L’atmos­ nous rendra le théâtre en vers. racontée tant de fois... Vous îa savez sans doute, phère de la salle était indicible. La fièvre, le déchaî­ — Quel bien me firent ces trois hommes ! Quel en­ vos lecteurs la savent. De Féraudy ayant lu les nement de tous les enthousiasmes, accrus d’acte en couragement ils me donnèrent ! me dit M. Edmond Deux Pierrots, porta la pièce, un petit acte en vers, ah ! acte, avaient créé « quelque chose » dont la jeune fille, Rostand. Et cependant, avant la critique de M. Augus­ sans prétentions, à M. Jules Claretie, lequel s’enthou­ avait été comme enveloppée... Le fluide, si l’on veut, tin Filon, mes deux autres augures eussent été bien en siasma. Il voulait mettre tout de suite les Deux Pierrots de plusieurs centaines de spectateurs transportés peine de prévoir ce que serait un jour ma carrière lit­ en répétition. Mais il fallait passer par le Comité de avait débordé même de cette salle, ruisselait dans les téraire. Au temps de M. Casanova, je ne rêvais que lecture. Le jour où se réunit le Comité fut justement couloirs, y avait comme assailli la nouvelle venue, d'être conteur. Au temps de M. Doumic, j’ignorais celui où mourut Théodore de Banville. Quel rapport brusquement passée du calme boulevard à la fin de la absolument que j’écrirais uiv jour, non pas même une y eut-il, aux yeux des comédiens, entre la mort de répétition générale de Cyrano de Bergerac. pièce en vers, mais même un poème. Je 11’avais jamais ce poète et l’acte en vers d’im débutant?... Comment Puis ce fut l’Aiglon. Pourquoi l’histoire du petit composé de vers de ma vie. A Stanislas, il y avait dans expliquer?... Us refusèrent les Deux Pierrots. prisonnier de Schœnbrunn tenta-t-elle Edmond Ros­ ma classe un camarade qui, lui, faisait des vers... M. Claretie vint me donner la mauvaise nouvelle. Il tand?... Ah ! avec quels yeux brillants et éblouis je le regardais !. était désolé : « Apportez-moi un autre acte », dit-il. — J’appartenais à une famille plutôt bonapartiste, Un poète !... Ce camarade, au demeurant, est aujour­ « E t moi de répondre : «Je vous en apporterai trois ! » me dit le poète. Je fus toujours républicain, mais mon d’hui notaire, ajoute M. Rostand en souriant. « Et ce furent les Romanesques, lesquels furent joués hérédité me poussait à profondément aimer et admirer Nous sommes dans. le salon d’un appartement que Le 29 mars 1894. Us furent très heureusement accueil­ tout ce qui touche l’Épopée impériale. Enfin, vous le M. Rostand a loué à Paris pour la durée des répétitions lis. Ils me valurent le prix Toirac, que décerne chaque savez, ma femme était la petite-fille du maréchal Gérard. et des représentations actuelles de Cyrano. I,e poète année l’Académie à la meilleure pièce jouée dans l’an­ a bien voulu consentir.à me raconter l’histoire de sa née au Théâtre-Français. J ecrivis Aiglon passionnément. Je le vivais en carrière pour les lecteurs du Mirôir. Nous avons « Le 5 avril 1895, Sarah Bemhardt donna, à la 1 écrivant. A tel point — mais vous croira-t-on si rapidement passé les années d’enfançe. M. Rostand Renaissance, la première représentation de la Prin­ vous dites ce détail? — que le jour où j’en fus au pas­ est né à Marseille le I er avril 1868. Il fitses études dans cesse lointaine. Le mercredi saint de 1897, fut jouée la sage qui se termine par ce vers : le lycée de cette ville, et ce 11’est guère qu’au temps Samaritaine. Quelques semaines après, au cours d’une Et je sais ce que c’est que le sang que je crache... de sa Seconde que commença à se révéler sa vocation. matinée organisée en l’honneur de Sarah Bemhardt, je m’arrêtai d’écrire, fus pris de toux et soudain cra­ Vocation qui devait le mener à l’illustration que l’on mâtinée où les poètes vinrent eux-mêmes réciter leurs chai moi-même quelques gouttes de sang. sait. vers d’admiration ou de gratitude à l’admirable Au sortir de Stanislas, ses études achevées, il entra artiste, je récitai un poème... * * * à l’Ecole de droit et passa sa licence: E n 1890 parut — Qui ne le sait par cœur ! dis-je, interrompant Après VAiglon, ce fut Chantecler... Entre lesdeux son premier livré, les Musardises. M. Rostand. L’un de ses vers reste et restera attaché pièces, M.. Rostand avait été longuement malade, dans M. Rostand était donc devenu poète? au nom de Sarah Bemhardt, comme une couronne au sa propriété d’Ariïaga, à Cambo. Sa maladie fut consi­ M. Rostand était devenu poète... Ah ! mon Dieu, front d’une reine vivante demeure, au long des temps. dérée comme l’aveu dissimulé d’une précoce impuis­ disons lé mot, disons la chose: sance... Que n’écrivit-on par amour. Il avait rencon­ pas ! Que ne croassa-t-on tré dans le monde Mlle Ro- pas. À cette heure, voici semonde Gérard. Elle fai­ que ressuscite C yra n o . sait des vers. M. Rostand L’épreuve va être curieuse. aimait M110 Rosemonde Lo pièce revient dans un Gérard et se sentit piqué moment assez semblable à au vif devant cette jeune celui qu’elle provoqua, pour­ poétesse... « Moi aussi, je rait-on dire. Les idées guer­ ferai des vers, » se dit-il. Et rières flambent dans notre il essaya. atmosphère. Le « panache » .— Mes premiers vers, me danse crânement au casque confie M. Rostand, furent de la France en armes... des vers d’amour à ma fian­ Cyrano va-t-il encore ime cée. Quelques-uns parurent fois être comme l’expression dans les Musardises. J’ai de l’âme collective? Sera-t-il gardé les autres, trop intimes le cri, clair jeté, des actuels ou trop gauches encore. désirs de bataille? Mais, de « Ma fiancée me dit un même que, jadis, Cyrano jour : « Faites une comédie vint réagir contre Ibsen, que nous jouerons ensemble contre Nietzche, contre Zola, dans les salons. » quoi, cette fois, réagira en « J’é c r iv is les D eu x sens contraire, tentera d’op­ Pierrots. poser au goût ancestral rçs- « Ah ! il y a un homme surgi des victoires militai­ aussi, un de ceux qui forti­ res, le subtil resplendis­ fièrent mes premiers pas et sement des triomphes dis­ que je n’aurai point l’ingrati­ crets de la raison et de l’in­ tude d’oublier : c’est de telligence ?... Féraudv. (1 Mais cette histoire fut Les jardins à la française cPArnacia, A n d r é A r n y v e l d e , LE MIROIR

Par Maurice QUERCY

Puis Moussa bondit, me ccu'drit de son corps, criant : " ...tention, liêt’nant ! "

C’était en colonne au Soudan. comme un vaillant Kamélé, ni plus ni moins que dans Assis autour de lui, mes tirailleurs écoutaient bouche Montagnards âprement indépendants, endiablé» « sale village noir » — Hé ?... Il était beau, le gaillard ! bée, et, par moment, des ah ! admiratifs sortaient de guerilleros, s’embusquant derrière des rochers dont ils De retour à Kati avec une centaine de francs, il fit leurs rudes poitrines. savaient les moindres fentes, les Habés nous avaient une noce princière de huit jours. N ’ayant plus le sou le J’écoutais, intéressé par le brio du conteur. Mais tué trop de monde impunément. On voulait en finir. neuvième, il s’engagea pour deux ans et « fit tirailleur ». tout à coup, au moment où Moussa nous parlait de la Mon peloton, cantonné à Bandiagara, reçut l’ordre de Intelligent, mais bambocheur, batailleur, forte tête, fille du roi Makan qui allait laver le linge dans le rejoindre à marches forcées la compagnie Laffite. il voulut soutenir sa réputation de crânerie. Il crut se fleuve, je vis ses traits se crisper. Il tendit le bras Partis dès le petit jour, nous nous arrêtâmes vers devoir à lui-même de « rouspéter » à tout propos. vers le feuillage en plumeau d’un palmier dont le fût onze heures en grand’halte devant un défilé que j ’en­ La salle de police et la prison n’altéraient pas sa se dressait à cent mètres sur notre gauche. voyai reconnaître. bonne humeur. Aux heures libres, sa fantaisie allait Puis il bondit, me couvrit de son corps, criant : ¿es tirailleurs allumèrent des feux pour « moyen jusqu’à l’extravagance. Cet homme auquel tous, dans « ...tention, liét’nant ! » gagner la tambouille », et montèrent ma tente de cam­ le camp, servaient de pantins, avait le don d’imposer J’aperçus un canon de fusil, là-haut, braqué sur moi. pagne. Je m’étendis sur une chaise longue. ses farces tyranniques en déchaînant le rire, l’énorme Une flamme en jaillit dans un bruit sec... et le Kamélé Mais le soleil s’écrasait sur la toile. Pas d’air. Impos­ rire des noirs, un rire pantagruélique et inextinguible. tomba, la poitrine trouée. sible de dormir. D ’ailleurs,pehdant la cuisson du koùss- Il savait tous les chants guerriers des griots de Ségou, Un Habé, sans doute, sentinelle perdue, surprise par kouss, mes tirailleurs jacassaient, assis à l’ombre mai­ les origines de tous les totems, les légendes de toutes les notre arrivée, qui se sacrifiait dans l’espoir d’abattre gre des fromagers voisins. races, toutes les fables de la brousse. Il contait, en mi­ un chef blanc ! Bientôt ce fut du délire. Des exclamations, des mant, d’une manière merveilleuse, avec des gestes, des — Mamady ! commaiidai-je au sergent indigène. hoquets de joie fusaient. Des questions, des explica­ attitudes, des clignements d’yeux qui soulignaient les Trois fusils! Feu sur l’homme... tu vois?... Feu! tions s’entrechoquaient, coupées de silences attentifs allusions, avec tout le prestige de son passé d’aventures. Je n’avais pas fini que les lebel ronflaient. Un corps Alors, on n’entendait plus qu’une voix. Moussa donc pérorait. Maintenant, deux répondants aoir dégringolait de l’arbre comme un fruit trop mûr. « Encore Moussa, pensai-je, Moussa, l’intarissable — faisant l'office du chœur antique — l’assistaient Quant à Moussa, il agonisait. Courbé sur lui, boule­ boute-en-train ! » avec animation, lançant des approbations énergiques : versé, je perçus un murmure : Engourdi par la fatigue et la chaleur, je n’eus pas le — Ah ! c ’est vrai ! «— ... Toi pas connaître fin histoire courage de les faire taire. Je songeais qu’ils allaient se — J’comprends I — Hein! sursautai-je... battre et cette insouciance ne me déplaisait pas. — Ti parles ! Il se tournait de mon côté, souriant. Je me repris : J’avais connu Moussa Kamara, du 2e régiment séné­ ou modulaient fortement des « heuh ! heuh ! » — Attends ¡Moussa, du calme!... Là... Voilà ton galais, au camp de Kati. sympathiques et admiratifs. Et les auditeurs de ren­ ceinturon débouclé... ta vareuse ouverte... Tu res­ Trapu, moustachu, les yeux bridés et malicieux, les chérir, de se rouler à terre de contentement. Le sergent pires?... Oh! je te sortirai de là! lèvres railleuses, la chéchia sur l’oreille, la vareuse Marnady Keïta, resté debout, manifestait son plaisir Etreint d’angoisse, de pitié, j’étanchai sa blessure, retouchée à la taille, la démarche souple.il contraignait plus dignement en se tapant sur les cuisses et s’excla­ avec la douloureuse certitude que c’était inutile et le dé­ au respect les hommes par sa force et par son esprit. Il mait : sir désespéré de maintenir la vie dans ce corps généreux. recevait galamment les œillades des femmes, qu’il « Il est... patant, c’t’animal-là ! » J’en suis sûr, il comprit ma pensée. Son regard, éblouissait à la danse, les soirs de lune, par ses entre­ La contagion de la gaîté, l’ennui d’une mauvaise adouci, se fixa, me pénétrant au point que nos âmes chats et ses mines amoureuses. s,ieste fouettèrent ma nonchalance. Je m’approchai — avait-il donc une âme? — se frôlèrent. Les gens du village l’avaient baptisé « le Kamélé ». curieusement. Et ce ne fut pas un pauvre bougre de tirailleur séné­ A Montmartre, on l’eût appelé « le Costaud ». Moussa prit un air important et déclara : galais,^ un primitif, un demi-sauvage, non, ce fut un C’était un type. A quinze ans, laptot sur le Niger, il — Y a fini blague ! Debout ! Voilà service y a com­ être délicatement affiné qui me prit la main, la pressa n’avait pas son pareil, affirmait-on, pour piquer la mandé ! lentement, et, dans un dernier souffle, affirma : perche, d’un coup net, dans le fond du fleuve, et — Non, dis-je, raconte. Je viens t’entendre. — Pff!... C’est Dié qui faire! s’arc-boutant dessus, pour lancer de l’avant sa pirogue, — Moi y en a beaucoup soif, ti sais, liét’nant 1 Ainsi finit Moussa, dit le Kamélé, qu’à Montmartre en rythmant son effort de refrains joyeux. Il fut mous­ Il redevenait loustic. on eût appelé le Costaud ! saillon à bord d’un navire de commerce bordelais. Un — Tout à l’heure. Après. Les tirailleurs se taisaient. Leurs yeux, à travers la administrateur de Ouagadougou le prit comme boy et — Alors, ça va bien. Mais ti comprends rien bambara, brousse infinie, semblaient chercher les toits de chaume l’emmena en France. Il vécut quelques mois à Nice et à moi y a parler france ! des cases du pays natal. On entendait à nouveau le Marseille. Moussa laissait discrètement à entendre Alors Moussa se mit à nous conter une de ces inter­ craquement monotone des herbes sèches tordues par le qu’il y était considéré par des « madaines blanches » minables histoires africaines... soleil redoutable. Ma u r ic e Q u e r c y . LE MIROIR *7

l'JN E GRANDE VICTOIRE GRECQUE

C’est aux avant-postes, entre velid bey, dépêché en parlementaire par Essad pacha, général en chef de l’armée turque et le général Sulzos, commandant les troupes grecques de première ligne, que se réglèrent les conditions de la capitulation de Janina. Là encore, comme dans les plaines de la Thessalie, le canon français décida de la victoire. Il méritait bi^n cette couronne de myrte, symbole de la gloire chez les anciens Grecs, qu’après la bataille, des artilleurs ont tressée pour lui.

PREMIER CONSEIL DE CABINET A WASHINQTON UN NOUVEL AMBASSADEUR

De gauche à droite : M M. Woodrow Wilson, président;— William G. Me Adoo, secrétaire Selon la coutume, le nouveau Président des Finances ; — Jas Me Reynolds, secrétaire de la Justice ; — Josephus des États-Unis renouvelle, à son entrée Daniels, secrétaire de la Marine ; — David F. Houston, secrétaire de l’Agriculture ; en fonctions, le personnel gouverne­ — Wi liam B. Wilson, secrétaire du Travail; — William C. Redfield, secrétaire mental ; M. Woodrow Wilson a donc du Commerce ; — Franklin K. Lane, secrétaire de l’intérieur ; — Albert u. Burleson, chargé M. Me Combs, président du directeur général des Postes ; — Lindlay M. Garrison, secrétaire de la Guerre ; — Comité Démocrate, de représenter, à William Jennings Bryan, secrétaire d’Etat. Paris, la grande République. 8 L.E MIROIR

Par Fem&nd de CROIDELYS

Le hall très élégant d'un grand hôtel de la Riviera. Wagner. Le brouhaha augmente dans le vaste hall. P ie r r e . — Vous n’avez jamais cru que j’étais sin­ Deux jeunes et jolies femmes prennent le thé, tout en Il est onze heures, les plafonniers électriques projettent cère... Le jour où j’ai imploré votre pardon...si \ous devisant gaiement. A travers les larges baies du hall, une lumière éclatante. Les toilettes de soirée prennent aviez voulu... ■. -u- on aperçoit la promenade des Anglais et la mer des tons chatoyants. Les femmes semblent toutes jolies. S u z a n n e , sèchement. — Je n’ai pas voulu et j ai bien intensément bleue. Suzanne Avril, divorcée depuis A la boule, on joue plus gros jeu. On devise, on rit. fait. plusieurs mois, a fait la rencontre de Berthe Lancy, C'est la vie fantasmagorique du Nice élégant. P ie r r e , avec amertume. — Bien fait... une jetme veuve venue, elle aussi, passer la saison à Berllie et Pierre se parlent presque bas. Suzanne les S u z a n n e . — Vous en doutez? Nice. observe, elle s’amuse surtout de la gêne bien évidente P ie r r e . — Peut-être du jeune homme. M ais voici qu’à une salle voisine on ( Un silence. ) B e r t h e . — Je suis sûre que vous allez me blâmer. appelle Berthe Lancy : ce sont des amis de Paris, de S u z a n n e . — Vous blâmer?... Mais à quel sujet, passage à Nice, qui l'accaparent bien malgré elle. S u z a n n e , avec émotion. — Pourquoi me dites-vous ma chère amie?... Je vous ai dit que votre tailleur bleu Suzanne et Pierre sont restés seuls pour quelques ins­ cela? vous allait à ravir... tants. Pierre voudrait bien échanger quelques paroles P ie r r e . — Parce que je le pense. B e r t h e . — Il ne s’agit pas de mon tailleur bleu, avec la jeune femme, mais il n’ose pas. S u z a n n e . — Si je pouvais vous croire... mais de quelque chose beaucoup plus grave. P ie r r e . — Oui, je ne mérite plus votre confiance... S u z a n n e . — Vraiment? S u z a n n e , avec un peu d'ironie. — Puis-je vous féli­ cependant, il y a un an, si vous aviez voulu être moins B e r t h e . — Je vais me marier. citer ? sévère... Evidemment, je n’aurais pas dû... je me S u z a n n e . — Vous marier? P ie r r e . — Je ne pensais certes pas vous rencon­ suis laissé entraîner... oh! j’ai bien regretté, je vous B e r t h e , avec une petite moue confuse. — Et vous trer ici... assure... pas tout de suite cependant... ce n’est que me désapprouvez, n’est-ce pas? S u z a n n e . — Autrement vous ne seriez pas venu? plus tard que j’ai senti tout ce que je perdais... quand S u z a n n e . — Cela dépend... Moi, j’ai été très P ie r r e . — Peut-être. tout a été irrémédiable entre nous. malheureuse avec mon mari... Mais vous avez peut- S u z a n n e . — Mais, pourquoi ?... Nous sommes S u z a n n e , en riant. — Voilà que vous me faites être rencontré l’homme qui vous donnera le bonheur, absolument libres vis-à-vis l’un de l’autre... Le divorce la cour maintenant ! cette vie paisible et douce auprès de l’être aimé, à nous a redonné notre pleine indépendance... Je vois P ie r r e . — Je suis très sincère, je vous assure. laquelle nous aspirons toutes et qui nous fuit sans cesse. en tout cas avec plaisir qu’un premier et malheureux S u z a n n e . — Comme vous l’êtes, sans doute, avec B e r t h e , avec feu. — Je crois que c’est le bonheur, essai ne vous a pas guéri du mariage... tant mieux... Mme Lancy. le vrai bonheur ! mais ce n’est pas moi, mon cher, qui... P ie r r e . — Comprenez-moi... Quand je vous ai S u z a n n e , avec mélancolie. — Vous êtes bien heu­ P ie r r e , sèchement. — Evidemment vous n’avez revue, j’ai été troublé comme par un parfum du passé... reuse... Ce sont des joies que je n’envisage plus... aucun regret. je me suis rappelé quelques beaux jours d’autrefois... B e r t h e . — Et vous avez grand tort. S u z a n n e . — Et vous, pas davantage. je n’aurais pas dû, je le sais bien, et j’ai l’air ridicule S u z a n n e . — A vingt-six ans ! P ie r r e . — Mme Lancy est charmante. en ce moment... Mon émotion vous amuse... vous ne B e r t h e . — Désespérer de la vie 1 S u z a n n e . — Certes. me comprenez pas. S u z a n n e . — Non, je ne désespère pas de la vie, P ie r r e . — Elle est d’une douceur exquise. S u z a n n e , gravement. — Je comprends beaucoup mais je n’ai jamais eu de chance, voilà!... D’abord, S u z a n n e . — Vous avez bien raison... elle me vaut de choses... Il aurait mieux valu que vous ne m’eussiez c’est bien de ma faute... pourquoi avais-je épousé un cent fois. pas revue, puisque tout est fini entre nous... puisque artiste? P ie r r e . — N’exagérez pas. rien ne saurait revivre. B e r t h e , avec émotion. — Un artiste? S u z a n n e . — Depuis huit jours que je la connais, je • P ie r r e , en se rapprochant d’elle. — Croyez-vous? S u z a n n e , étonnée, regardant Berthe. — Eh mon ne lui ai pas découvert l’ombre du plus petit défaut. S u z a n n e . — Quelle pensée avez-vous, mon ami? Dieu oui, un artiste... P ie r r e . — Vous la connaissez depuis si peu de P ie r r e , avec émotion. — Et si vous m’autorisiez B e r t iie . — C’est que... temps? à vous revoir?... comme si nous venions de nous S u z a n n e . — Lui aussi est un artiste? S u z a n n e . — Qu’est-ce que cela peut vous faire?... rencontrer pour la première fois... voulez-vous, B e r t h e . — Un peintre. Vous ne vous attendez pas, je suppose, à ce que ce soit Suzanne... voulez-vous?... S u z a n n e . — Comme était mon mari. moi qui fasse votre mariage?... Ce serait trop drôle. S u z a n n e . — Mais Mme Lancy... P ie r r e . — Il n’y a rien de drôle dans tout ceci... ( Un silence. ) P ie r r e . — Vous venez de singulièrement l’enlaidir... Je me sens bien seul dans mon atelier... Je m’étais S u z a n n e , en riant. — Comme vous êtes fidèle B e r t h e , après avoir réfléchi un instant. — Je l’ai­ accoutumé à la vie à deux... vous m’avez manqué dans vos amours ! merai tant qu’il faudra bien qu’il me reste fidèle ! brusquement. P ie r r e . — Oui, je suis fidèle, et beaucoup plus que S u z a n n e , vaguement sceptique. — Evidemment... S u z a n n e . — A qui la faute? vous ne le croyez... puisque je n’ai pas cessé de vous B e r t h e . — D’ailleurs, je vous le présenterai... P ie r r e . — A moi, certes... enfin, je me suis senti aimer... Voyez comme j’ai confiance en vous... C’est qu’il est seul... très seul... J’ai été présenté dernièrement, à S u z a n n e , avec angoisse. — Taisez-vous, Pierre, très bien... très beau... très distingué... Je ne veux Paris, à Mmo Lancy, chez des amis communs... je taisez-vous ! pas vous en faire trop l’éloge, vous en deviendriez songe à l’épouser. P ie r r e , amèrement. — Mais vous vous souciez amoureuse. S u z a n n e . — Je vous approuve. fort peu de moi ! S u z a n n e . — Oh ! moi, ma chère... j’ai raté ma P ie r r e . — Seulement, puisque vous êtes son amie... S u z a n n e . — Ne dites pas cela. vie... j’ai divorcé... j ’ai peut-être eu tort... il est vrai S u z a n n e . — Soyez tranquille, je me brouillerai P ie r r e . — Est-ce bien vrai? qu’on me trompait... mais, j’aurais dû pardonner... avec elle... Ça ne me coûtera pas beaucoup du reste... S u z a n n e . — En doutez-vous? B e r t h e . — Aussi, ma chère amie, suis-je bien P ie r r e . — Je ne voudrais pas cependant être la P ie r r e , avec émotion. — Vous voudriez... déterminée à pardonner très largement... je ne le dirai cause... S u z a n n e . — Ah ! je ne sais plus ce que je dis.i. pas à mon mari, il en abuserait... mais je saurai me S u z a n n e . — Mais non... ne vous excusez pas... c’est vous qui^me troublez... pourquoi me faites-vous montrer très bonne, très généreuse... ( Un silence. ) entrevoir des bonheurs impossibles... S u z a n n e , avec tristesse. — Cela vaut mieux. P ie r r e . — Tout dépend de vous... voulez-vous B e r t h e . — Mais vous voilà tout émue... toute P ie r r e . — Il y a longtemps que vous êtes à Nice? demain matin que nous nous revoyions?... triste. S u z a n n e . — Je suis venue pour la saison. S u z a n n e . — Non, Pierre... non. S u z a n n e . — Du tout... (Regardant sa montre.) P ie r r e . — Vous n’aimiez pas Nice dans le temps. P ie r r e . — Oh! très discrètement... à Cimiez... Cinq heures I Vous n’y pensez pas... Mmo de Luxeuil S u z a n n e . — J’ai changé. aux arènes. ious attend chez Rumpelmaver. P ie r r e . — Ah ! S u z a n n e . — Non, ce n’est pas possible... S u z a n n e . — Mais que vous importe? Dans un joli froufrou, les deux femmes se lèvent. P ie r r e . — Je vous attendrai vers dix heures... P ie r r e .' — Evidemment, je n’ai aucun droit de voulez-vous?... * * * m’occuper de ce que vous faites. S u z a n n e , très faiblement. — Oui. Quelques heures après, le soir, au Casino. Dans le hall, S u z a n n e . — Oh ! ce que je fais... (Avec impatience:) Berthe et Suzanne sont mollement assises dans de Je ne vais pas me remarier en tout cas ! Elle abandonne sa main à Pierre. A u même moment, confortables fauteuils. Foule très élégante... Valse lente P ie r r e . — C’est un reproche? Berthe revient. jouée par l ’orchestre... La voix lointaine des croupiers: S u z a n n e , pincée. — Pas du tou.. B e r t h e . — Excusez-moi de vous avoir laissés seuls... « Messieurs, faites vos jeux... » Fleurs et palmiers... P ie r r e . — Mais qu’en pense votre amie ? Elle doit Ce sont des amis de Paris... Cela vous a permis de faire Papotages autour des tables... bien savoir que vous avez été ma femme ? connaissance, n’est-ce pas? u z a n n e Berthe examine avec inquiétude les groupes qui défilent S , gravement et comme à elle-même. — Oui, Su z a n n e . — Mais certainement, ma chère amie. lentement devant elle. j’ai été votre femme... mais Mme Lancy l’ignore. (Bas à Pierre): Elle est charmante. Je vous répète qu’elle est pour moi une connaissance P ie r r e . — Absolument charmante. B e r t h e , à Suzanne. — J’aurais bien voulu cepen­ d ’hôtel... rien de plus...Vous n’avez donc rien à craindre. dant vous le présenter... je tiendrais beaucoup à con­ Le lendemain matin, à A tlantic-Palace, Berthz Lancy P ie r r e . — Jé ne crains absolument rien... Je dis sim­ est dans sa chambre, elle achève sa toilette avec une naître votre opinion... plement que la^ic a des retours étranges... voilà tout. S u z a n n e , négligemment. — Oh! ma chère amie... coquetterie minutieuse, car elle doit, l ’après-midi, se S u z a n n e . — Que voulez-vous dire? en fait de mariage... rendre aux courses avec Pierre. On frappe. Une sou­ P ie r r e . — Rien... ou plutôt... oui, j’aurais peut- e r t h e brette apporte une lettre. C ’est de Pierre. Fiévreuse- B . — Si, si... vous êtes une femme au juge­ être beaucoup de choses à dire, mais à quoi bon... ment très sûr... Vous n’avez pas du tout l’air d’une ment elle décachette Venveloppe : S u z a n n e , ironique. — Est-ce votre grand amour divorcée... pour Mme Lancy qui vous donne cette mélancolie ? « Chcre amie, S u z a n n e , en riant. — Vraiment? P ie r r e . — Oh! amour... vous allez vite dans vos « M ille regrets. Ne comptez pas sur moi pour vous B e r t h e pousse un petit cri. — Ah ! ma chère amie, conclusions. accompagner aujourd’hui aux courses. Je pars à P a r is.. le voici !... J ’étais sûre qu’il viendrait. S u z a n n e . — Elle vous plaît? avec ma femme. , « Votre P ie r r e . » Pierre Laitier s'avance vers Berthe, très élégant dans son P ie r r e . — Oui... mais cependant depuis quelques Puis au bas de la lettre en petite écriture fine : smoking. La jeune femme lu i tend gentiment sa main. instants... « M oi aussi, je pars à Paris... avec mon mari. A u même moment les regards de Suzanne et de Pierre S u z a n n e . — Ah ! se croisent. Berthe les présente cérémonieusement l ’un P ie r r e . — Depuis que je vous ai revue. « Votre S u z a n n e . » S u z a n n e . — Allons donc I à l ’autre. Conversation banale. L ’orchestre joue du F e r n a n d d e C r o id e l y s . LE MIROIR

L a Fin de Saint-Lazare

Qui l’eût pensé ! La « vieille prison cou­ Car sœur Perpétue est sévère et ne leur de boue », ainsi que la désignait si tolère aucune infraction au règlement. pittoresquement Alfred de Vigny, va dis­ Vive, agile, remuante, se dépensant paraître. sans arrêt, elle va, elle vient sans ja­ Pas de grâce pour les vieilles pierres. mais se lasser. Dès l ’ elle est de­ Pas de grâce pour le passé ni pour les bout. On la voit toujours et partout souvenirs qu’il évoque. Paris étouffe et les à la fois, et le couvre-teu a sonné depuis démolisseurs sont prêts. longtemps déjà qu’elle parcourt encore — Je voudrais qu’ils fussent déjà au la prison, inspectant les dortoirs, péné­ travail, me disait en souriant M. Girou trant dans les cellules et visitant la qui représente à l’Hôtel de Ville le quar­ « ménagerie » pour s’assurer que l’ordre tier où se dresse la maison sinistre qui fut règne. Sur son passage le calme se celle du grand saint Vincent de Paul. fait, les querelles entre prisonnières « Mais c’est surtout une œuvre de salu­ s’apaisent... et le grand silence dont brité qu’il faut accomplir car le maintien s’enveloppe la prison n’est plus troublé de cette geôle d’un autre âge au cœur de que par les tintements de la cloche Paris est un véritable défi à la moralité d’argent de la chapelle qui, lentement, publique. égrène les heures. « Il est certains sujets sur lesquels il A 5 heures c’est le réveil. La journée convient de ne pas insister. Celui-ci est commence et voici l’impression qu’en a du nombre; mais laissez-moi cependant donné une détenue en des vers exacte­ plaindre les malheureuses qui, pour la pre­ ment adaptés à l’air du menuet d’Exau- mière fois, par mesure administrative, sont det, vers qui ont été recueillis et qui internées à Saint-Lazare. Pas de rédemp­ m’ont été communiqués pour les lecteurs tion possible pour elles; c’est la déchéance du Miroir par Mlle Chapon, la fille érudite sans rémission, elles sortent à tout jamais et charmante de l’économe de la prison : perdues. C’est l’enlisement complet. » Et le médecin de Saint'Lazare, le savant docteur sons la photographie, sont réservées aux prévenues Bizard, qui, depuis de longues années prodigue inlas­ assez riches pour dépenser 20 centimes en été et 25 cen­ sablement son admirable apostolat, ne dissimule pas times en hiver : ce supplément de 5 centimes étant L E M A T IN L E S O I R non plus qu’il faut au plus vite porter le fer rouge au consacré au chauffage. 4* COUPLE! plus profond de la plaie. Toutes les héroïnes des procès célèbres, de toutes E n prison, Pour le soir, Moralistes et hygiénistes ont bien souvent tenté de les causes sensationnelles qui ont alimenté la chronique Sans raison, Il faut voir judiciaire ont passé à la « pistole » : Gabrielle Bom- On s’éveille. La tristesse réagir. Tous leurs efforts, ou presque, ont été vains. Et On trouve, en sortant du Ut, Et l’ennui tourmenter, cependant ils ne se découragent pas. Chaque jour pard, Mme Clovis Hugues, la Merelli, Thérèse Humbert, Sous son bonnet de nuit, En croyant éviter quelques dames patronnesses des œuvres qui se sont Mme Steinhel, Mme Bloch et plus récemment encore les Tout l'ennui de la veille. Ee chagrin qui les presse. vouées au relèvement des prisonnières viennent assister compagnes des anarchistes compüces de Bonnot et de Tout besoin On attend, E st un soin On apprend à l’arrivée des épaves humaines rejetées par le tribunal Gamier. Qui vous pèse. Une histoire administratif de la Conciergerie ou les chambres cor­ A l’heure actuelle, d’après les chiffres enregistrés au On descend pour avoir de l’eau, Dont le conteur ne sait rien, rectionnelles. greffe, Saint-Lazare compte 840 pensionnaires répar­ Ou remplit son fourneau Pourtant chacun veut bien De braise. Souvent elles se heurtent à ime mauvaise volonté ties dans les deux catégories. E a croire. 2« COUPLET Lorsque l’on sonne à la porte, que rien ne peut faire céder; souvent aussi elles ren­ Sur ces 840 femmes plus des deux tiers sont des réci­ On fait son lit et l'on frotte, Aussitôt chacun s’y porte. contrent des âmes sournoises et hypocrites qui divistes et comptent à leur actif — si l’on peut dire — Et scs souliers on décrotte. I,e désir jouent la comédie du repentir afin d’obtenir quelques cinq, quinze ou vingt condamnations dont elles se Puis les plats D e sortir adoucissements au régime de la prison ; mais quelque­ targuent comme d’un titre de gloire. Qui sont gras Etincelle. On récure. Chacun, d’aise transporté, fois, elles trouvent — avec quelle joie ! — des malheu­ La « clientèle » du quartier judiciaire se recrute Contre la malpropreté, Croit que la liberté reuses dont la sincérité est réelle et qui sont disposées à principalement parmi les femmes qui dérobent des Chacun de son côté I/appelle. se racheter pour toujours. E t c’est alors qu’il faut sans Murmure. marchandises, aux heures d’affiuence, dans les grands 5 * COUPLET tarder les soustraire à la promiscuité de la prison sans magasins. Chaque année au début de la saison prin­ 3” COUPLET quoi nulle puissance humaine ne pourrait bientôt plus Pour le pain Au coucher, tanière le nombre des voleuses prises en flagrant délit E t le vin, Sans souper. aider à leur rédemption. alors qu’elles détournent des fanfreluches, des chiffons On vous sonne. On arrive, Mais comment éviter le contact? Hélas ! les progrès où quelques-uns de ces mille riens dont se pare la grâce Chacun, à son numéro, A moins qu’on ait sur sa faim du mal sont parfois rapides... trop rapides pour qu’une Va chercher le fricot Fait, au dîner, larcin féminine, augmente dans des proportions considéra­ Qu’un gargotier vous donne : D’un plat dont on se prive. intervention efficace puisse se produire. bles. En ce moment, par exemple, les jprisonnières Soupe à l’eau, Puis au lit, Saint-Lazare abrite en moyenne un millier de déte­ de cette catégorie sont en grande majorité. Mauvais veau, Tout finit. nues qui sont cachées derrière l’imposante façade dans Bœuf ou vache. Sans lumière, A part quelques rares exceptions, toute cette popu­ Chaque plat s’en va nageant, Chacun s’y rend de son mieux deux immenses bâtiments parallèles surélevés de trois lation interlope vit, man^e, travaille et dort en com­ Et la sauce, en tombant, Et de fermer les yeux étages, aux murs épais, à l’aspect sévère et dur. Une mun dans une promiscuité contre laquelle on ne cessera Vous tache. Espère. voûte sombre donne accès à la salle de garde que jamais trop de protester. L ’exiguïté des locaux ne per­ C’est aussi et surtout les murs de la prison que les défend une lourde porte bardée de fer : met pas à l’administration d’isoler les détenues et cette détenues prennent pour confidents de leurs impres­ Toc !... Toc !... Le marteau d’acier résonne, les ver­ raison seule, à défaut d’autres considérations, suffirait sions. Elles les traduisent par des dessins naïfs, des rous grincent; une clé tourne dans la serrure énorme, pour justifier la désaffectation de la vieille maison du phrases pittoresques... trop pittoresques même pour placée à hauteur d’homme et dont l’œil semble regar­ faubourg Saint-Denis. être reproduites ici. der avec méfiance. La vie à Saint-Lazare est sévèrement réglementée; Notons seulement ces tendres et mélancoliques L’huis s’entr’ouvre... Dans l’encadrement se profile mais le rôle des gardiens s’arrête aux portes des cellu­ quatrains respectivement inscrits et signés par deux la silhouette massive d’un surveillant qui dévisage les, là où commence la mission des religieuses chargée poétesses captives, Mmes Mélie et Lola, et qui ne sans aménité le visiteur, puis s’efface comme à regret de la surveillance des prisonnières. Mission difficile et dépareraient pas les albums les plus collet monté : devant lui... Un couloir à traverser et voici la cour délicate entre toutes et dont s’acquittent noblement Le soir, quand je souffle ma lumière, d’honneur (?) avec une grande douceur qui n’exclut pas la fermeté les T.e cœur rempli d’un doux émoi, A droite et à gauche les « guichets » de la double sœurs de Marie-Joseph. Avant de fermer la paupière, Je pense à toi. prison : d’un côté, le quartier judiciaire où sont gar­ Sans bruit, sans cris inutiles, sans menaces vaines, dées les femmes en prévention ou condamnées; de elles savent faire respecter la discipline par les plus A travers les barreaux de ma cellule sombre, l’autre, le quartier administratif des retenues par ordre turbulentes des pensionnaires. Bien rarement il leur Je te salue soleil, astre béni des cieux. de la préfecture de police. Voici encore le greffe où est donné de sévir et lorsque la punition indispensable Tu chasses la tristesse de ce séjour de l’ombre Et tu rends à mon âme un peu d’espoir en Dieu. s’accomplissent les formalités d’écrou ; le parloir où les est par hasard infligée, le pardon ne tarde pas à inter­ détenues reçoivent, jeudis et dimanches, les visites de venir si la délinquante manifeste quelque repentir au Tous ces souvenirs trouveront place à Carnavalet, leurs parents. Au premier étage la « pistole » dont les passage de sœur Perpétue, assistante de la sœur supé­ lorsque Saint-Lazare aura vécu. Cela ne saurait tarder lÿ* cellules, toutes semblables à celle dont nous reprodui­ rieure. maintenant. EÉi.ix MÉTÉn iEK.

La Cellule d’une détenue Un Ouvrolr et la religieuse surveillante LE MIROIR

AUTOUR D’UN GRAND DÉBAT LE GÉNÉRAL ANDRÉ Mardi dernier, devant le Sénat, M. Brland, président du Conseil, a défendu, avec une L’ancien ministre de la Guerre des remarquable éloquence, le projet de loi sur la réforme électorale, actuellement soumis cabinets Wa I deck-Rou ssea u et à la Haute Assemblée. M. Clemenceau lui a répondu au nom des majoritaires. Le Combes vient de mourir à Dijon gouvernement posa la question de confiance, mais ne put obtenir que 12S voix con­ après une longue maladie ; il était tre 161; le soir même M. Briand remettait à M. Polncaré la démission du ministère. âgé de soixante-quinze ans. 'Photos Manuel.) (Photo Bolssonnas et Taponnler.)

DE RUDES PETITS GARS LE TAMBOUR-MAJOR Au congrès international de l'éducation physique, les Pupilles de la Marine viennent de faire la démonstration du système de culture corporelle du lieutenant de vaisseau Hébert. Ces enfants ont fait l’admiration du public par leur adresse, leur force mus­ culaire *t leur merveilleux développement. Le jeune tambour-major des pupilles, admirable de sérieux, a obtenu un vrai succès. LE MIROIR

LA GRÈCE EN DEUIL

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G E O R G E S 1“ A J A N IN A LE ROI CONSTANTIN Il fut appelé au trône à dix-huit ans. son règne Le diadoque entre dans la ville, après la capitula* Aaé de quarante-cinq ans, le roi, marié à la prln> aura duré cinquante année«. tlon de l'armée turque qui la défendait. cesse Sophie de Prusse, est père de cinq enfants.

LA PRINCESSE HÉLÈNE DE RUSSIE LA PRINCESSE HÉLÈNE LE PRINCE ALEXANDRE ET LA PRINCESSE II R Ê N E / belle-soeur du nouveau roi. Fille aînée du Diadoque Constantin. ^ scs plus leunes enfants.

Rar une tragique destinée, Qeorges l“', le Victorieux, est assassiné à Salonique, à l’heure même où ses armées ont définitivement conquis la Macédoine et l’Épire, ces deux provinces qui faisaient autrefois partie de la Qrande Grèce et que les patriotes hellènes n’ont jamais cessé de revendiquer. Le nouveau roi, le diadoque Constantin, vainqueur de Sarantaporos,) de Yénldzé et de Janina, qui a fait preuve de si brillantes qualités comme chef d’armée, monle sur le trône avec la noble tâche d’achever l’oeuvre de la renaissance hellène commencée par son père. Beau-frère de Guillaume II,cousin germain de Nicolas II et de George V, le nouveau roi ne trouvera en Europe que sympathies et qu’amitiés. 12* LE MIROIR

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Jamais il n’a été davantage question de médiums, esprits, qui soulèvent les tables, qui_ déplacent les de spiritisme, d’apparitions médianimiques. Qu’y a- objets, qui apparaissent en effluves lumineux. t-il de vrai dans ces phénomènes? Est-ce une science L ’explication est cependant bien simple ; tôt ou tard, nouvelle qui, peu à peu, se précise, se dégage du nébu­ elle guérira les spirites de leur crédulité. Tous ces leux et du fantasmagorique pour se rattacher à la phénomènes de lévitation, c’est-à-dire les déplace­ Psychique et à la Physiologie, cxu s’agit-il, plus simple­ ments d’objets, de percussion, de matérialisation du ment, de jongleries très habiles qui ressortent unique- poids des corps, du moment qu’ils se produisent sans n îent de l’art du prestidigitateur ? supercherie, relèvent évidemment de la science. Au Je me suis livré à une enquête impartiale, minu­ contraire, tout ce qui est apparition, commerce avec tie» ise, tant auprès des scientifiques que des spirites, l’au-delà, paroles d’outre-tombe, n’est que superche­ pou r tenter d’élucider ces problèmes très étranges ; et rie de médium. c’est le résultat de ces recherches que je voudrais’ ici Ah la supercherie ! C’est elle qui, pendant longtemps, exposer. I a détourné les savants de l’étude de phénomènes étran­ Prô, blêmes passionnants; certes ! Comment expliquer ges qui,- de prime abord, paraissaient inexplicables. par ex emple que la simple volonté d’un médium Les meilleurs médiums ont en effet une propension puisse i oulever une table, déplacer des objets, faire fâcheuse à la fraude. Voici Eusapia, par exemple, apparaître des ombres fantomatiques, pour ne citer qu’on surpend au cours d’une séance, au moment où que les actions mécaniques et les phénomènes lumi­ elle se Sert d’un cheveu pour faire osciller le plateau neux les plus souvent observés? d’une balance... Une autre fois, par une photographie Pendant' très longtemps les esprits scientifiques prise à l’improviste, à la lueur d’un éclair de magné­ refusèrent de s'occuper de ces faits étranges, que les sium, on s’aperçoit qu’elle se sert de la paume de sa spirites considéraient d’ailleurs comme de leur seul main gauche pour faire pencher la table. Bien sou­ domaine; ils n’y voyaient que grossière superstition. vent elle parvient à rapprocher habilement les mains Cependant, devant des faits cent fois répétés, des expé­ de ses deux contrôleurs de manière à libérer les sien­ riences étrangement concluantes, force fut bien aux nes pour toucher un des assistants, alors que les con­ savants d’observer, de contrôler et d’enregistrer ces trôleurs sont persuadés tenir toujours les mains du extraordinaires phénomènes. Mais quelle explication médium. pouvait-on en donner? Cependant, bien que dans les phénomènes produits De très grands savants comme MM. Pierre Curie, Le médium Eusapia Palladino par l’action d’Eusapia la supercherie puisse jouer Branly, d’Arsonval, Bergson, Mme Curie, Charles encore un rôle important, il n’en est pas moins vrai que Pichet, Debieme, Youriévitch, s’en sont occupés. là comme une phosphorescence très nette qui s’exhale certaines lévitations ont été certainement exécutees Tour faire saisir le caractère rigoureusement scienti­ du corps du médium. C’est là ce que les occulistes sans aucune aide frauduleuse. fique de ces expériences, je ne saurais mieux décrire appellent l’aura. Mais alors sous quelle action se sont-elles produites? une des nombreuses séances données par Sous l’action d’un fluide nerveux spécial le médium Eusapia Palladino dans le local qui, du reste, agit en certains cas comme même de l’institut psychologique, il y a. l’électricité et peut mettre en mouvement quelques années. des corps en dehors de toute action mus­ Les séances eurent lieu, la nuit, dans une culaire ou mécanique ; c’est ce fluide et ce chambre complètement débarrassée de tous fluide seul qui transporte les objets à dis­ ses meubles, et éclairée par une ampoule tance, fait vibrer la cithare, soulève la électrique rouge rubis suspendue au plafond. table ; c’est cette force psychique qui Deux rideaux de laine noire masquaient un s’accumule plus facilement chez certains des angles de la pièce. sujets et que nous pouvons tous, du reste, Eusapia est assise sur placée plus ou moins acquérir par une longue ex­ à l’tm des petits bouts de la salle (voir la périence, qui produit ces phénomènes mer­ photographie) et quatre autres personnes veilleux. prennent place sur les chaises. On forme M. Ochorowicz, à qui l’Académie des alors la chaîne, c’est-à-dire que les assis­ sciences a attribué le prix l'anny Emden tants se tiennent mutuellement les mains; pour son livre la Suggestion mentale, a la personne placée à gauche d’Eusapia et étudié particulièrement ce fluide psychique. celle qui est à sa droite, non seulement tou­ Ayant émis l’hypothèse que les objets chent les mains du médium mais tiennent étaient soulevés par ime force inconnue qui ses pouces ; leur rôle consiste à contrôler émanait des mains du médium, il a eu le sujet durant toute la séance, qui dure l’idée de faire placer les mains de ce dernier plusieurs heures. A l’intérieur de la cabine au-dessus d’une plaque photographique. on a disposé un guéridon léger, des papiers, Or deux arcs lumineux, se croisant et une cithare, quelques menus objets, et à allant du pouce de chaque main à l’extré­ gauche de la cabine, à un mètre environ mité des doigts de l’autre main, ont apparu du médium, un second guéridon. sur la plaque ! Le point d’intersection des Eusapia demeure quelques instants silen­ Phénomène élranae : un meuble en "lévitation” deux arcs se trouvait précisément à l’en­ cieuse, elle s’auto-suggestionne, puis elle droit même où était posé l’objet à déplacer. entre « en transe », dans une sorte d’élat second. Voilà les faits. Quelle explication en donner? Le professeur Ochorowicz continue ses recherches Aussitôt les phénomènes se produisent. Oh ! pour les spirites, ce n’est guère compliqué : ces sur ces rayons rigides qu’il dénomme rayons X x . Us Eusapia frappe avec la main gauche sur l’épaide de étranges phénomènes sont dus à l’intervention des ont en effet beaucoup d’analogie avec les rayons X, M. Curie... des coups correspondants résonnent dans mais ils sont plus pénétrants que ces derniers : ils la table; elle incline trois fois sa tête vers la table... traversent très facilement le fer et le plomb; ils ont trois forts coups répondent dans la table. Ces bruits aussi beaucoup d’analogie avec les émanations des sont tantôt faibles, tantôt violents comme des coups de corps radio-actifs, c’est probablement ce qui explique marteau. les lueurs observées souvent autour des médiums. Mais voici qu’Eusapia esquisse le geste de tirer la Voilà donc ce merveilleux des phénomènes dits table vers elle et la table s’avance ; puis, brusquement; spirites, dont la science vient de faire bonne justice. celle-ci se soulève des quatre pieds et reste en l’air... on Les esprits ne sont autres que le fluide psychique, cette compte sept secondes ; or à ce moment, une main du force hier encore seulement connue de certains êtres sujet est placée sur la tête de M. d’Arsonval et l’autre exceptionnels : les médiums. Certes, il reste à l’étudier sur celle de M. Youriévitch... comme les pieds d’Eu­ expérimentalement. sapia sont attachés à sa chaise, il n’y a donc pas de Je ferai grâce à mes lecteurs de ces plaques photo­ supercherie possible. graphiques, sur lesquelles les esprits ont bien voulu Quelques minutes après, la table se soiüève de nou­ laisser trace de leur passage... plaques sensibles s’il en veau. On crie : « Plus haut ! Plus haut ! » Alors, est... trop sensibles même !... D’ailleurs, pour certains formant la chaîne, les cinq assistants se lèvent, la médiums, qui sont le plus souvent des prestidigitateurs table monte davantage, puis elle retombe... Elle est émérites, c’est un jeu, dans la pénombre propice aux restée en l’air 27 secondes! Mais ce n’est pas tout... manifestations d’outre-tombe, d’incarner les ombres Eusapia fait des gestes avec ses mains et la cithare, pla­ et de parler au nom des morts. Il y a surtout une cée à plusieurs mètres derrière elle, dans la cabine, certaine petite lampe à phospho/e qu’on enflamme au résonne. moment propice, et giâce à laquelle on fait revenir Maintenant c’est le guéridon placé à la gauche d’Eu­ sur terre le prophète Ezéchiel... ou quelqu’autre. sapia qui bouge et se soulève... Il approche et recule D’ailleurs, voulez-vous savoir ce qu’un des plus suivant ses commandements... Cependant, les poi­ grands médiums, Home, pensait de ce monde des gnets du sujet sont attachés à ceux des deux contrô­ esprits, au nom duquel tant de fois il avait provoqué leurs, et ses pieds sont liés par des lacets aux pieds de des phénomènes merveilleux? Le docteur Philip Davis, la chaise!... Bien plus extraordinaire, le guéridon se qui fut son ami pendant vingt-cinq années, va nous soulève, contourne M. Curie, se retourne complètement l'apprendre, en rapportant les paroles que le célèbre et vient se poser sur la table ! medium prononça quelques heures avant de mourir : Le médium, totijours étroitement tenu, n’a pu faire « Cette foule d’esprits devant lesquels s’agenouillent un geste. les âmes crédules et superstitieuses n’a jamais existé. Maintenant ce sont les assistants qui subissent des Je m ’en suis servi pour donner à mes expériences cette contacts. Voilà Mme Curie, placée trop loin d’Eusapia apparence de mystère qui, de tout temps, a plu aux pour que le bras de cette dernière puisse l’atteindre, masses, mais je n’ai point cru à leur intervention dans qui sent une main serrer la sieime... M. d’Arsonval les phénomènes que je produisais, et que chacun attri­ perçoit nettement une pression sur sa tempe... buait à des influences d’outre-tombe. Comment pou­ M. Branly sent une main lui tirer les cheveux... vais-je y croire? J’ai toujours fait dire aux objets que Plus « frappant » encore : la chaise de M. Yourié­ j influençais de mon fluide tout ce qui me plaisait et vitch étant violemment arrachée de dessous lui, le quand cela me plaisait ! Non, un médium ne peut pas savant tombe à terre. croire aux esprits ! C’est même le seul qui n’y puisse Ces phénomènes sont accompagnés de lueurs au jamais croire. » front d’Eusapia, des lueurs d'un reflet bleuâtre; il y a La Table telle qu’elle servit aux expériences C a g u o s t r o . LE MIROIR 1 3

9 Manteau en drap Manteau en ratine tau- O 0 9 mastic garni bro­ pejgrandcol drapblanc deries blanches. (Modes Francis.) (Modes Martial cl Arm and pression du pantalon. E t Jaquette ratine rouge, iupe cote d e Costume taillfur en serao ceci VOUS plaît infiniment. cheval blanche, boutons nacre r o u o f . Je n approuve pas : ]e (Modes Robe ri. J (Modes Francis, j 'constate. La jaquette sac, en ratine rouge, a une Nos jolis tailleurs jolie allure et l’ensemble est net et chic. Je fais figurer parmi les tailleurs une charmante création en Je ne veux pas médire de l’ini­ duvetyn tabac, car sa coupe simple l’en rapproche et grâce à tiative d’un groupe d’artistes qui la mode des jaquettes différentes, elle peut servir à deux tentent, en collaborant avec des couturiers, d’obtenir de ceux-ci un fins. Je souligne l’indication économique. renouveau esthétique dont la mode a évidemment grand besoin. Les grands manteaux représentent le complément indis­ Je ne crois guère cependant au pensable de vos toilettes, soit qu’ils recouvrent vos robes succès de cette association et si son d’après-midi, soit qu’ils protègent vos costumes ci'’automobile prélude: une toilette fleur de lys, ou de voyage. Us affectent des formes diverses d’après l’em­ amusa nos regards, je ne vous vois ploi auquel on les destine. pas néanmoins, mesdames, revê­ C’est ainsi que nous vous montrons un très chic et' fantai­ tues d’aussi symboliques atours. siste vêtement en drap mastic orné de broderies blanch ’es. Je vous reprocherais volontiers Fort classique, au contraire, s’affirme notre second* vête­ déjà d’abuser des préoccupations ment en ratine taupe garni de drap blanc. à l’ordre du jour en vous faisant * * * , tantôt le porte-drapeau des alliés Savez-vous, mesdames, qu’on vient de lancer u 'ne balkaniques, et tantôt de l’armée haute plume, recourbée à son point culminant, «. ^ turque, selon que vous nous appa­ qu’on appelle point d’interrogation? Hélas ! la réponse ' raissez couvertes de broderies bul­ n’est pas douteuse. Oui, mes chères lectrices, toutes, gares et roumaines, ou enserrées tant que vous êtes, et à des degrés diverà, vous deve­ dans les ceintures « à la sultane ». nez un peu... toquées, passez-moi le mot, quand il Cette façon contradictoire de s’agit de vos chapeaux. proclamer vos sympathies... di­ En ce moment les rues de Paris sont sillonnées de verses — Vive le Roy 1 Vive la minois délicieux surmontés de panaches ambitieux de Ligue ! — embrouille la question battre le record de la hau­ déjà compliquée. Il est vrai qu’en teur. cela vous vous apparentez à tous Il existe d’heureuses ceux qui cherchent à maintenir exceptions. Vous pou­ l’équilibre européen ! , vez en juger par l’amour Quoi qu’il en soit, la mode tient de chapeau plat que ses promesses d’incohérence, car nous vous montrons orné ses créations définitives commen­ d’une guirlande de fleurs cent à se montrer et les plus oppo­ et d’un nœud carré en sées voisinent, très d’accord, et arrière. Notre second mo­ font même fort bon ménage. dèle sacrifie davantage Si les réunions mondaines présentent de ce fait un aspect un peu bariolé, mes chères lectrices, femmes chics et pratiques tout à la fois, s’applaudiront, j’en (VI11* J. D e lm a r Robe en ratine tabac ceinture suis sûre, de cette diversité. e n b r o c h é . Car là où les fantaisies individuelles prennent le pas (Modes Drecoll.) (Clichés Félix.) sur la direction absolue de la mode, il suffit de posséder un goût impeccable pour s’habiller à sa guise et déli­ Les jaquettes ont tantôt la taille cieusement. De plus, la vogue des mélanges et des gar­ haute, tantôt la taille longue; la nitures permet des combinaisons et des rajeunisse­ veste sac plaît, mais la jaquette à ments de toilettes fort appréciables. ceinture de cuir verni souple et de Et enfin, vous pourrez éviter les créations extrava­ couleur vive garde des fidèles. L ps gantes que certaines femmes arborent, puisque, à côté basques courtes et très décollées de ces futuristes en délire, vous trouvez à suivre des se montrent grandes favorites et M,U Ariette Doro^re modèles exquis. quelques-unes se souviennent des Chapeau taffe tas et fleurs. Aujourd’hui, nous nous occuperons à nouveau des habits Louis XV. Le boléro avec Modes Lewis tailleurs, uniforme séduisant des femmes raffinées. long pan tombant droit en arrière Us se présentent en ce moment délicieusement variés, reparaît, le mouvement fuyant des basques se géné­ à l ’opportunisme, et qu’ils soient en soie, en laine, déjà même en toile, ils ralise. Je vous ai déjà dit le succès des gilets et des mais il est relati­ se divisent en trois catégories : corrects, bons garçons jaquettes différentes des jupes qu’elles accompagnent. vement très modé­ un peu négligés, et gavroches. Enfin, la blouse russe s’offre encore à nous. Non plus ré et d’une jolie Dans un précédent article, je vous ai cité la plupart sous sa forme première et classique, mais avec mille correction. des étoffes dont ils se composent. U y en a d’autres variantes jolies. Ah ! mesdames, encore : les moires souples, le shantung, la serge * * * pourquoi ces pro­ crêpée, la ratine mi-soie; Quant aux formes, sans vocations supplé­ admettre les jupes de omyo de tour, nous devons Je vous présente des « tailleurs i> très dans la note mentaires ? et ce avouer que les plus modérées d’allure demeurent terri­ du jour. L’un est en serge rouge, non pas d’un ton écla­ besoin d’affirmer blement étroites du bas. tant, mais de ce rouge sombre et velouté grâce auquel que la folie mène Absolument plates et faites d’un seul morceau qui se la nuance écarlate a conquis les suffrages des plus le monde... car croise de côté sous un pli, ou bien ornées d’un tablier récalcitrants. chacun vous suit 1 Chapeau picot bleu, garni ^ plissé ou d’un groupe de plis en arrière, les robes se Un autre tailleur nous montre une jupe en côte de a u tr u c h e . resserrent toutes au niveau du genou. cheval blanche avec pli en avant donnant un peu l’im- P r in c e s se L ... Modes Bagel 1 4 IL. E M I R O I R

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chrétienne, comme l’établissait une inscrip­ Tous ces abris étaient munis d’appareils truire un cube relativement exigu, suffi­ Moi, William Masters, professeur de phy­ tion découverte surle mur del’atrium d’une à oxygène perfectionnés,pour le renouvel­ sant pour n#i seul, mais trop petit pour sique et de sciences naturelles au Lycée maison de Pompéi, demeure d’un très doc­ lement de l’air sans qu’il y eût besoin recevoir même deux personnes. Sinon, il d’Alexandrie, j’entreprends ici de conter te et très riche observateur d’astres, nom­ d’ouvrir à cet effet la plus mince porte au m’eût fallu diminuer l’épaisseur, calculée l’histoire extraordinaire et véridique de la mé Valentinus Fulgor. moindre atome de gaz asphyxiant. De avec soin, des parois, ce qui était pure folie. grande comète qui balaya de sa queue, Or cette comète, dite comète Stark, telle sorte que, lorsque le jour critique arri­ Mieux aurait valu, dans ce cas, ne rien ten­ l’an 1917 de l’ère chrétienne et le 11 juin, devait, le 11 juin suivant, passer exacte­ verait, les millions d’êtres qui se targue­ ter ! La divulgation de mon secret dans un la surface de la planète Terre. ment entre le Soleil et la Terre, à cette date raient de représenter l’expression supé­ but humanitaire n’eût donc abouti qu’à Je ne voudrais point qu’on pût m’accu­ sa queue, d’une longueur de 18 millions de rieure du règne animal sur la Terre, pour­ me susciter des concurrences d’autant plus ser, au seuil de ce récit, de me décerner un lieues, viendrait balayer notre planète raient, à juste titre, se prétendre garantis redoutables que je les savais d’avance sté­ stupide laurier et d’être poussé par une comme un immense pinceau de lumière, contre toute alerte. riles. Les possibilités matérielles, c’est-à- fatuité basse et vaine. Le caractère d’un l’englober pendant quelques heures, et, Plusieurs jours avant la date marquée, dire la quantité des minerais, ne permet­ libre citoyen du Royaume-Uni est au-des- somme toute, rééditer pour les hommes le beaucoup de gens commencèrent à s’en­ tant qu’à un seul être de réaliser mon idée, sus de telles suspicions. Néanmoins je suis beau spectacle du 18 mai 191O. fermer. Sorte de contagion électrique par­ si je la révélais, je la tuais dans l’œuf, aussi bien obligé de déclarer — et ceci n’est que La vénérable comète ne nous réservait courant notre sphère... Et quand se cou­ bien pour moi que pour les autres. vérité pure, comme on le verra par la suite pas autre chose : nul n’en doutait, et l’ex- cha le soleil du 10 juin, il n’y avait plus Du reste, je ne connaissais personne au — que si je n’ai pas succombé à l’implaca­ périence des siècles était là pour étayer dehors, à la surface du vieux monde, que monde à qui m’intéresser assez pour lui ble fléau, c’est grâce à ma sagacité dou­ fortement cette conviction rassurante. les bêtes ignorantes du terrible tournant offrir une place dans mon abri. Affecté au blée d’une incontestable énergie. On aura Ainsi qu’il est de mise en pareille occur­ qui allait, le lendemain, marquer le cours lycée d’Alexandrie depuis cinq ans, j ’avais bientôt la preuve que ces mots ne sont pas rence, les blagueurs du monde entier, au­ des âges : les hommes avaient disparu au exécuté ce joli tour de force de n’être fami­ écrits ici au hasard, qu’ils ont leur rair-on teurs de revues, chansonniers de cafés- fond de leurs casemates comme des lapins lier avec aucun de mes concitoyens de for­ d’être, et que, dût-on m’en louer ou m’en concerts, caricaturistes, humoristes de tous dans leurs terriers, tune. Je ne tiens pas à ces amitiés qui ne haïr, je fus, en ces circonstances liistoriquos poils et de tous grades, s’en donnèrent à semblent profondes et indissolubles que réellement sagace et énergique, je ne crains cœur joie. Us firent plaisamment ressortir II pour se rompre à la première occasion A la ville et alentour, je ne possédais que pas de le répéter. que la jeune personne en question n’avait Ce fut sur cette éclipse générale de des « relations », et m’en trouvais fort * pas trop vieilli depuis le règne d’EdouardII notre sphère que se leva l’aube du 11 juin * * bien. Sur ce chapitre, de même que sur et que, pour une douairière de cet âge, ses 1917. celui de l’amour, j’ai toujours été considéré A vrai dire, ce n’était point la première cheveux étaient encore très blonds. D’au­ J’étais, comme je l’ai dit au début de un peu comme un original, un sauvage. Ces fois que l’apparition d’une comète et son tres proposaient gravement que, le matin ces pages, attaché en qualité de professeur jugements ne sont pas faits pour me frois­ approche de la Terre provoquaient chez ’e? du ix juin, dès l’aube, lorsqu’elle opérerait au lycée d’Alexandrie. La maison que ser : on sait ce qu’en vaut l’aune, comme hommes une émotion générale. Ces longues son entrée solennelle dans l’atmosphère j’habitais, située un peu à l’écart de la disent les Français, et à quel point ils sont traînées de feu, il semblait que si le globe terrestre, chaque ville de l’Univers délé­ ville, près d’un parc fort apprécié des faciles à énoncer pour le bon prochain, tant obscur où nous roulons dans '’espace arri­ guât au-devant d’elle ses autorités consti­ citadins, ne m’avait pas semblé offrir une hommes que femmes. vait à les rencontrer, il dût en résulter des tuées, avec fanfare, bannière et petites sécurité suffisante, et j’avais résolu de catastrophes, ou tout au moins des acci­ filles chargées de gerbes de fleurs et de n’y pas rester. Je dois dire que, dès l’ori­ Je crois bien, à propos de ces dernières, dents très graves. compliments. Bref, la gaîté la plus franche gine, je m’étais montré un partisan des n’avoir jamais aimé qu’une seule fois, dans Abstraction faite des racontars d’ordre ne cessa de se donner libre cours durant moyens préventifs, convaincu que j’étais mon existence, mais alors je fus sérieuse­ purement superstitieux, suivant lesquels deux mois sur cet inépuisable sujet. dans mon for intérieur de la probabilité ment pincé, comme disent encore les Fran­ les comètes étaient des messagères en­ Cependant, vers cette époque (c’est-à- d’une catastrophe. Il est facile de pré­ çais. voyées par Dieu pour annoncer aux hom­ dire à la fin de mars, si mes souvenirs sont tendre qu’on a prévu une chose après que C’est dans les premiers temps de mon mes de nombreuses calamités, on s’imagi­ exacts), un savant allemand vint jeter une cette chose est arrivée. Aussi je juge inu­ séjour à Alexandrie. J’avais vingt-quatre nait couramment qu’elles offraient des douche d’eau froide sur cette épidémie de tile de développer ici les raisons qui me ans, je débutais dans la carrière universi­ dangers matériels, soit par leur masse, facéties cométaires, par la simple annonce dictaient cette appréciation pessimiste, taire et aussi dans la vie, car toute ma jeu­ soit par leur composition. Des physiciens suivante : dont les événements subséquents ne nesse jusqu’alors, avait été remplie par les études. Le hasard voulut que je rencon­ notoires étaient de cet avis. Mais quand la « Les gaz dont est formée la comète démontrèrent que trop la justesse. Il me Terre eut plusieurs fois croisé sur son che­ suffira de dire que, sans m’en tenir aux trasse, au cours des obligatoires visites de « Stark (cyanogène, hydrogène carboné, présentation, la femme d’un riche commer­ min céleste de ces astres errants, et quand « protoxyde d’azote) semblent exister à rapports des savants, j’avais moi-même on eut constaté que nul dommage ne s’en personnellement, d’abord par un goût çant d’origne ottomane et de nationalité « l’état de condensation très haute dans indécise, enrichi dans l’exportation des était suivi, les préjugés commencèrent à « cet astre. Il n’y aurait aucune iinpossi- ancien pour l’astronomie, ensuite par s’effriter peu à peu, dans le public comme souci de mon propre sort, étudié la comète éponges et du corail. Il se nommait — « bilité, si étrange que cela pût paraître, à mettons Kadjian — et sa compagne était chez les privilégiés qui font profession de « ce que non seulement le noyau, mais vStark. J’avais déduit de ces examens très science. Ce fut ainsi qu’en l’an 1910, par soignés plusieurs enseignements sur les­ bien la plus exquise créature que l’on pût « aussi la queue, offrissent une certaine rencontrer sous ce ciel divin de l’Egypte. exemple, nous nous trouvâmes plongés, au « solidité, due à cette condensation inusi- quels je reviendrai et qui, on ne le niera matin du 18 mai, dans la queue de la pas, me furent profitables. Ils vivaient sur un pied de très large aisan­ « tée. Il s’agirait là d’un état particulier de ce, avec un nombreux personnel, en une comète de Halley, queue qui ne .mesurait « la matière : l’état colloïdal, ainsi étendu La première nécessité qui m’apparut pas moins de 25 millions de kilomètres de fut donc de ne pas me fier « aux maisons vaste maison installée à l’européenne. Leui « aux milieux gazeux. Le passage de la luxe offrait un bizarre mélange des mœurs longueur. Les astronomes appréhendaient « Terre à travers une masse de cette nature de sûreté » du modèle courant. Mes res­ vivement le passage de la Terre dans cette sources me permirent (j’en rends grâce orientales et des usages occidentaux. Pour « serait exceptionnellement grave par ses sacrifier à la coutume qui exige qu’à chevelure, formée — selon leurs analyses « conséquences. » au destin) de faire construire une cellule les plus exactes — d’un gaz meurtrier par juste assez grande pour moi, et d’un Alexandrie comme ailleurs les dames de la excellence : le cyanogène. Or le seul résul­ Il n’en fallut pas davantage pour éveiller alliage dont j’établis la formule. J’effec­ bonne société ne sortent que voilées à la tat appréciable ne s’adressa qu’aux yeux des alarmes qu’on croyait à jamais endor­ tuai pour cela le voyage du Caire et turque, Mme Kadjian (appelons-la, si vous des humains, et ce fut un splendide lever mies. La polémique qui s’engagea entre les m’adressai à une usine métallurgique voulez, Fizah) ne se montrait jamais hors de soleil, au matin du jour où notre race corps savants ne rassura personne, l’hu­ où je tins à présider moi-même à la de sa demeure sans être enveloppée du était condamnée à disparaître. manité ayant eu le loisir d’apprendre à ses fusion de l’alliage en question. Des ou­ yabrah noir et de ces amples mousselines Cette aventure porta le dernier coup aux dépens que de la discussion n’a jamais jailli vriers le coulèrent sous mes yeux en soyeuses d’où ne paraissent que les yeux craintes encore subsistantes. On proclama aucune lumière. Effectivement, quand les plaques de 15 pouces anglais d’épais­ peints et les doigts aux ongles teints de officiellement que les comètes étaient des académies eurent disserté à foison sur le seur (1). Celles-ci furent ensuite ‘expé­ henné. Mais, chez elle, quand on la visitait, « riens visibles », et qu’en acceptant l’hy­ point dé savoir si la comète annoncée était diées à un industriel d’Alexandrie, qui elle se laissait admirer dans toute la ra­ pothèse qu’elles fussent constituées par de dangereuse ou non, elles se gardèrent bien les ajusta de la manière convenable. dieuse magnificence de son visage au la matière nuisible à l’homme, par des gaz de conclure, et le public ne fut pas mieux Mes allures, à la vérité, intriguaient regard de velours mordoré, à la peau chau­ de nature à modifier notre atmosphère et à instruit qu’auparavant. Mais son siège vivement les personnes qui se trou­ de et brune où les lèvres éclataient comme la rendre irrespirable, ou mêrne^ par des était fait : dangereux ou inoffensif, l’astre vaient mêlées à ces opérations; mais la chair d’une grenade, découvrant à l’in­ particules solides, tout cela notait pas ne trouverait pas les mortels sans défense j’avais déclaré mystérieusement au fon­ térieur les graines régulières des dents. assez condensé pour qu’on en pût prendre contre sa malignité éventuelle. Loin d’ap­ deur que les plaques étaient destinées La suave gravité des filles d’Orient éma­ pliquer le vieil adage : Dans le doute souci. à servir de plancher à un grand navire. nait d’elle et provoquait une indicible at­ Des « riens visibles », telles étaient les abstiens-toi, dans le doute on décida d’agir, Quant au fabricant qui les assembla, il tirance, à laquelle d’ailleurs n’était pas et le défaut de certitude ’théorique poussa comètes. ne connaissait point la formule du métal. étranger le charme réel de sa conversation. d’autant plus aux précautions pratiques. De cette façon, chacun était ignorant d’im Tout de suite, je me sentis saisi, subjugué : Les gouvernements y aidèrent d’ailleurs. des éléments nécessaires à la reproduc­ j’eus le bonheur de ne pas paraître indiffé­ Ce fut dans ces conditions que, vers le Subventionnée par eux, l’industrie privée tion de ma « maison de sûreté », et j’étais rent, et nous eûmes par la suite de nom­ mois de février 1917, les divers observa­ put se consacrer à la préparation d’engins certain que le secret serait gardé, pour breuses causeries où elle m’admettait seul, toires éparpillés dans l’univers annoncè­ destinés à combattre la rigueur du fléau, l’excellente raison que je n’avais eu besoin en tête à tête avec elle, dans le petit salon rent une nouvelle comète en vue de la s’il s’abattait sur la Terre. Ces engins con­ de le confier à'personne. aux somptueuses soieries brodees qu’elle Terre. Aussitôt, comme il est d’usage, on sistaient essentiellement, suivant les con­ Ouvrons une parenthèse ici : les motifs avait fait aménager à son usage. Elle avait dressa un état-civil à la nouveau-néè. clusions d’un congrès international d’in­ d’un tel mystère ne peuvent guère être beaucoup voyagé, savait mille choses, et Après lui avoir donné plusieurs noms con­ génieurs, en maisons de sûreté où la race appréciés que de moi seul. Le principal vraiment ces entretiens me sont demeurés tradictoires, l’avoir désignée par des chif­ humaine s’abriterait durant la phase criti­ était le suivant, et je pense qu’il contentera un souvenir d’une exceptionnelle douceur. fres et des lettres de l’alphabet grec, 011 que. C’étaient des maisons ordinaires, amplement tous ceux qui seraient tentés Après bien des hésitations, je me décidai constata qu’elle était déjà classée, que mais rendues absolument étanches et im­ de me taxer de dureté de cœur vis-à-vis de à avouer à Fizah mon amour. Elle ne me c’était une vieille connaissance. Une très perméables aux gaz les plus subtils par mes semblables : les circonstances s’oppo­ repoussa ni ne m’encouragea, mais je com­ v ieille connaissance, en vérité. Sa dernière différents travaux et garnies de tout ce quj saient à ce que cette cellule de métal eût pris que, tout en posant comme base rigou­ visite remontait en effet à l ’an 1325, sous le serait nécessaire à la vie de leurs habitant des dimensions supérieures à celles qu’on reuse à nos rapports que nous resterions règne d’Edouard II d’Angleterre, ainsi pendant un mois et davantage. De même’ lui donna. J’avais déjà eu des peines énor­ dans les limites les plus strictes de l’amitié qu’en fait foi un fort beau poème de Cocco les édifices publics furent convertis en mes, dans le court délai qui m’était im­ pure, elle consentait à me prendre pour le d’Ascoli, rimeur et philosophe florentin, « maisons de sûreté », et l’on fabriqua en parti, à rassembler juste assez de minerais confident de son cœur. Elle me révéla les qui fut brûlé l’année suivante par le Saint- outre un nombre considérable de cubes en indispensables à l’exécution de mon projet ; tristesses que cachait sa beauté tranquille : Office, pour hérésie. Auparavant, on l’avait fer, énormes, percés de fenêtres.et aména­ cette quantité restreinte m’obligeait à cous - un mari infidèle, dur, travaillé par le encore observée sous Charles Martel, et gés pour contenir chacun deux ou trois démon du jeu, et gaspillant au tapis vert aussi au début du premier siècle de l’ère cents personnes. (i) om.375. les bénéfices que lui donnaient ses affaires 16 LE MIRO IR

Combien de ces existences, pareilles à des jour par jour, heure par heure, les choses tenant plus, je m’assurai par les allées et pénètre les prunelles, et m’oblige A me objets d art truqués dont la surface vemic, et les visages que nous avons laissés sur venues de quelques personnes au loin, qu’il garantir la figure des deux maius. doree, ne dissimule qu’une matière friable notre chenfin. n’y avait rien de changé pour les vivait ts, 4 h. 26. — Un craquement sinistre a qui tombe en poussière au premier examen. et je sortis. Cette occasion me donna lieu couru le long de mes murs. J’ai senti jouer III Je puis dire que cette pauvre femme de vérifier combien absolue était l’étan- le métal. Mais ai-je le temps d’avoir peur? m'aima alors de toute son âme, dans les Trois jours avant le i l juiu, c’est-à-dire cïiéité de la cellule. La porte, faite du Une chose inouïe 111c fige le visage à la conditions où son intransigeante honnêteté ■ le 9, mes dispositions étaient prises, et je même métal que l’ensemble, était garnie de avait juré de se maintenir. Pour moi, je m’enfermai dans ma cellule de métal. On bourrelets de cuir et de caoutchouc qui vitre, et un cri d’horreur s'étrangle dans 1 adorais d’autant plus que je la savais l’avait apportée de chez le constructeur pénétraient à frottement dur entre le bat­ ma gorge : à peu de distance, une maison inaccessible, et j’étonnerai sans doute devant ma maison même. L’endroit était tant et le chambranle. J’eus beaucoup de s’est effondrée soudain, puis une autre, et beaucoup de personnes sceptiques d’au­ situé sur une éminence de rochers et de mal à la rouvrir et dus m’y reprendre à partout où se dirigent mes regards, j’aper­ jourd’hui en ajoutant que cette situation sable aux abords de la ville, et je pouvais plusieurs fois, bien qu’elle roulât sur des çois des édifices qui s’aplatissent, comme offre de grandes, de rares délices. contempler, à travers les massifs disques billes et que je l’eusse fermée avec aisance. terrassés d’en haut par une poigne ver­ de verre enchâssés dans les parois de ma Sur le moment, je ne m’attachai pas à ce dé­ tigineuse. Les arbres se recroquevillent en prison volontaire, le panorama d’Alexan­ tail qui me parut simplement une preuye tas informes de feuilles et de bois, tout ce drie se déroulant en contre-bas. Mosquées de l’hermétisme de mon compartiment. qui s’élevait à la surface du sol subit le Aux vacances qui suivirent cette liaison sans nombre, palais khédivial, touffes de même sort. Les chambres de sûreté ont avec Mrae Kadjian, je partis voir ma famil­ Je me mis donc à l’ombre chez moi, dans palmiers, terrasses des habitations indigè­ paru vouloir résister davantage, mai* bien­ le en Angleterre. J’avais ^jtenu un congé la maison fraîche, riant un peu de l’exagé­ nes, puis, sur un côté, le canal Mahmou- tôt je les vois se disloquer à leur tour et de trois mois, et Fizah m’avait juré de ration qui m’avait fait occuper mon abri si dieh scintillant au soleil et parsemé de tôt d’avance. Mais vers le soir, comme le laisser échapper leur contenu de foule affo­ m’écrire régulièrement durant cette longue dahabehs, pareils, avec leur grêle mâture, à soleil s’inclinait lentement derrière les col­ lée — du moins ceux qu’a épargnés la séparation. Elle tint parole d’abord, puis des insectes aux antennes dressées... Le lines de l’horizon, je fus repris machinale­ brusque rupture des plafonds. ses lettres s’espacèrent sans que le ton s’en lac Mariout était caché derrière un repli de ment de mon besoin de sécurité, et réinté­ Or, je le déclare ici, j’avais prévu ce dé­ trouvât cependant modifié; enfin elles ces­ terrain. Mais au fond, par delà les champs grai ma boîte. nouement. sèrent brusquement, du jour au lendemain. de cotonniers, devant la mer dont l’indigo C’était un soir pareil aux autres, et ce­ Pourquoi la construction de cette cel­ Celles que j ’adressai à partir de ce moment se mariait à celui du ciel et que piquaient pendant il était étrange de songer que lule avec un métal d’une résistance hors me furent retournées avec la mention : des voiles claires, la plage de Ramleh — le peut-être celui-là était le dernier que ver­ ligne? Pourquoi ces murs d’une épaisseur Inconnu. Dans la stupeur de ces faits inex­ magique San Stefano — groupait ses cara­ raient les humains!... A l’heure accoutu­ inusitée? Parce que je redoutais ce qui plicables, affolé par cette espèce de suaire vansérails à l’européenne, ses palaces- mée, la comète allongea silencieusement s’est produit, parce que, de mes études sur que la distance drape entre les choses et les hôtels d’hivemeurs mondains, ses villas entre la mer et le ciej son yatagan de la comète, j’avais dégagé la conclusion êtres, je voulais sur-le-champ repartir pour modernes,un cordon de bâtisses blanches, lumière. Et, frissonnant un peu, partagé que, si cet astre pouvait être redoutable Alexandrie (Il me restait encore près d’un flambant dans la lumière, noyées d’une entre l’inquiétude et l’assurance, j’atten­ par la toxicité de ses gaz, il le serait bien mois à demeurer auprès des miens). Mais, vibration chaude. dis l’arrivée de ce il juin qui marquerait davantage par autre chose : la pression. par surcroît de malheur, le règlement Plus près de moi le jardin public planté la mort ou la survivance du monde. En effet, la pression formidable de la d’importantes affaires de famille me retint à grand’peine au moyen de terre végétale Ah ! j’étais bien certain qu’à cette heure masse gazeuse, condensée à un degré sans deux mortelles semaines de plus, si bien apportée là, dressait ses palmiers, ses buis­ les plaisantins n’avaient plus envie de rire, exemple et incorporée à notre atmosphère, que ce fut seulement à la rentrée des clas­ sons de cactus d’un gris bleu, ses eucalyp­ et que d’un bout de l’univers à l’autre, les a déjoué les précautions des hommes et ses que je pus regagner mon poste et m’in­ tus et ses lauriers. roses. Il était désert. railleurs d’hier s’entassaient avec le com­ fait éclater comme de simples bulles de former de mon amie. Nul bruit n’arrivait à,mon oreille. J’avais mun des mortels dans leurs taupinières savon leurs abris spéciaux établis contre J’appris alors que les Kadjian étaient l’impression que tout ce paysage se mou­ improvisées. l’asphyxie, non contre la pression. ruinés, qu’ils avaient quitté la ville après vait dans un silence de mort. Mais l’épais­ Quant à moi, j’ai victorieusement essuyé avoir vendu leur maison, liquidé tout seur seule de mes murs étouffait pour moi le premier choc. Toute la membrure a leur arriéré. On ignorait où ils étaient allés ! les échos ordinaires de la vie. Peu d’agita­ La nuit s’écoula lentement. frémi, mais l’ajustage des cloisons ne sem­ Cette catastrophe si inattendue, si rapide, tion au surplus : la ville était plongé dans ble pas avoir souffert. C’est l’essentiel. Que me plongea dans un état voisin de la neu­ Au dire des astronomes, l’orbite de la l’ensommeillement du milieu du jour, dans Terre et celle de la comète devaient se cou­ vont-ils devenir ceux qui se trouvent main­ rasthénie. J e fus obligé de me soigner sérieu­ la torpeur des heures qui précèdent celles tenant livrés sans défense à la comète? sement durant tout l’hiver de cette année- per à 4 heures 20 minutes du.matin du maghreb, où tout s’éveille. Rien n’au­ L ’aurore commença bientôt de semer ses Pour l’instant, la différence de pression, là, essayant de réagir contre le désespoir rait, au premier aspect, laissé supposer cependant énorme, n’a pas l’air de les et de me persuader que je reverrais Fizah, lueurs confuses. L’instant décisif appro­ qu’une préoccupation inaccoutumée pesât chait... Je n’avais pas dormi : une extra­ incommoder. Je ne puis y croire : ils cou­ que cette incomparable et unique amie sur la vieille cité égyptienne. Cependant si rent à droite et à gauche, les bras levés, n’était pas perdue pour toujours... Mais le ordinaire tension de mon système nerveux ' mes yeux se reportaient de nouveau vers me tenait en éveil. Je surveillais avec une avec une expression affreuse de stupeur temps s'écoulait sans apporter rien de nou­ l’horizon, ils y distinguaient, entre les sur le visage. Mais, logiquement, ils de­ veau à mes attentes. attention fébrile les instruments de préci­ demeures pressées, aux places restées vraient être tombés tous ensemble, dès Quatre années passèrent : certes, je sion dont la chambre était garnie : chrono­ libres, de bizarres boîtes analogues à celle mètre, appareil à oxygène, thermomètre l’anéantissement de leurs casemates... n’avais pas oublié Fizah mais son souve­ que j’habitais présentement. Déjà une A quoi attribuer ce phénomène, à savoir nir sommeillait maintenant à l’arrière- baromètre et bien d’autres. importante fraction de la population s’y qu’ils se maintiennent l.. .eLout au plan de ma mémoire, car le tourbillon de 4 h. — Les teintes vermeilles du matin était réfugiée. couvrirent l’orient de leur éventail somp­ la vie impérieuse éloigne un peu de nous, (Voir la suite à la page ). Le soir tomba. Quand les muezzins tueux. Je regardais le lever du soleil, 19 eurent clamé du haut des minarets leur m’efforçant d’y trouver certaines des carac­ cantilène, je pus assister, par la vitre scel­ téristiques annoncées, mais je ne décou­ lée dans mon toit, à l’assombrissement gra­ vrais rien d’anormal. Ces rayons qui bai­ Machine à écrire Le SIROP PHÉNIQUÉ de VIAL duel du firmament. gnaient ma face à travers le verre épais combat les microbes ou germes de mala­ Alors, à l’extrênte bord de l’horizon, au- LAMBERT. représentaient l’habituelle splendeur des Pas d’apprentissage, pas d'entretien, dies de poitrine, réussit merveilleusement dessus de la Méditerranée, j ’aperçus la visi-, levers de soleil égyptiens. la plus simple, la moins cher. dans les Toux, Rhumes, Catarrhes, Bron­ teuse tant redoutée : la comète. Elle avait Cependant, quelques instants plus tard, Demandez-nous la brochure des« chites, Grippe, Enrouements, Injluenza. criptive illustrée par Willette, l’apparence d’une faux couleur jaune la clarté de l’astre radieux me sembla subir adressée gratis et francs. Dans toote* les Pharmacies. paille, couchée la pointe en bas, plongeant une bizarre modification. De rosée, elle Facilités de Paiement17^ dans les flots. Sa queue gigantesque cou­ devint rougeâtre, ensuite franchement Machine à écrire LAMBERT, 42e Vivienne.Paris'*-" J vrait derrière elle toute une portion du rouge... Sans doute l’interposition de la ciel. Visiblement dense et lourde — ce qui masse cométaire commençait-elle. Ma DYSENTERIE - CHOLÉRINE confirmait l’hypothèse du savant alle­ montre à la main, de grosses gouttes de mand et la mienne — elle masquait les Guérison immédiate par les sueur aux tempes, je guettais l’envol des étoiles. minutes... Mon cœur battait une charge Elle disparut vers neuf heures du soir, convulsive... Le moment n’était pas encore GOUTTES d e s COLONIES par suite de la rotation de la Terre et je venu et déjà me tenaillait la conviction DE CHANPRON dormis pendant le reste de la nuit. absolue que c’étaient bien les gaz délétères Je passai dans une inaction de plus en qui produisaient cet effet de rouge, cette pour la demande d’une. DANS TOUTES LES PHARMACIES plus • énervante les deux autres journées lumière inconnue. Calfeutré dans mon tom­ Venta en gros 8, rue Vivienne, PARIS qui me séparaient du I I . Mes appareils, beau hermétique, je n’entendais rien, mais uverture de Crédit soigneusement réglés,- fonctionnaient à j’assistais des yeux à la rapide genèse du pour l ’achat d ’un merveille, m’alimentaient d’oxygène et phénomène, à cette fonnidable expérience absorbaient les résidus de ma respiration. de chimie qui se déroulait sur le laboratoire c._, gramophone CRYSTOL-TOILETTE Italien, enregistre seule­ On trouvera peut-être étrange que je me du monde. Tout devenait rouge, non seu­ ment pour le Gramophone, ANTISEPTIQUE pnree que c’est la seule ma­ fusse ainsi enfermé d’avance, et que j ’eusse lement le ciel, mais aussi la terre. La teinte chine parlante qui ne n»zil- Recommandé spécialement aux Dame* obligé les instruments à un travail préma­ naturelle des' objets se neutralisait : ils le pas, — ce qui explique pour pourquoi elle est adoptée turé. Je répondrai qu’à mes yeux il n’est empruntaient un reflet de pourpre’ d’abord de tous les vrais amateurs BAINS. LOTIONS. ABLUTIONS de belle musique. PharSTBAPENARD, 35, rue des Dames, Paris point de petites précautions : les comètes indécis, puis foncé. Les habitations, le sol, Découpez cette annonce et et toutes les pharmacies. sont des astres assez capricieux pour les végétaux ordinairement poussiéreux, envoyez nous là avec votre nom et votre adresse pour qu’on admette bien de leur part quelque rougissaient. Nul mouvement au loin. recevoir gratuitement nos Catalogues et renseigne­ inexactitude... Il en est de même des astro­ Un calme inaccoutumé, pas une ombre ments en vue de l’ouverture nomes. Notre comète aurait pu couper remuante... Si : un chat, blanc naguère

LE PRIEUR Par Louis CHAMPEAUX

santé pour les maçonneries épaisses, pour une voûte dans les demeures ’ qui semble à l’épreuve de la bombe, se sont laissés muettes, se rap- fM ,-jfcsSlg^ tomber sur le sol et soufflent, sentant décroître leur prochent. f - émotion panique. Le novice dis- ‘SjjBi’ i j Le padre est large et gras; le novice est petit et tingue au loin la jX j maigre. L ’un est encore congestionné de sa course; ■ façade du couvent T l’autre demeure pâle de frayeur. Des deux robes déserté, avec ses " •noires, toutes déchirées et salies, la première se tend volets arrachés 'é T '* ' \ i l p sur un ventre respectable, l’autre se drape autour de pendant aux fenê­ hanches maigres. tres. Il a un re­ Le prieur a vite repris la mine sereine qui convient à gard anxieux pour un religieux de son importance; il constate menta­ une maison pro- " " ' - lement l’absence de provisions de bouche, forme^ des che, la maison de voeux pour la sauvegarde de ses chers fils dispersés et Luiza, sa petite fi mie. Pourvu que la chère enfant, de l’époque. Antonio, qui s’est dans la tourmente de la guerre civile, soit demeurée tordu le pied en sautant, saine et sauve. Antonio murmure une prière pour cela, voit sa cheville enfler à vue rien que pour cela — la centième depuis le matin. d’œil et geint sourdement, Cependant, voici que des clameurs s’élèvent de la comme un petit garçon, petite maison. Bonté divine 1 que se perpètre-t-il der­ v Depuis deux ans, le jeune rière cette muraille? Antonio a un geste pour s’élancer, homme, destiné aux ordres mais sa blessure lui arrache une plainte. Il s’exclame par une tante fanatique, ne sourdement : cause à son supérieur C[ue — Oh ! père... père !... des satisfactions mitigees. — Qu’y a-t-il, mon cher fils? s’inquiète dom Bene­ Sans doute. Antonio vénère dicto. ' Mais le novice ne répond pas. Un groupe vient de jaillir hors de la porte béante de la maison de Luiza : trois ou quatre femmes, un homme qui lutte avec les pillards puis s’effondre sur le sol, assommé d’un coup de crosse. Des insurgés ressortent, emportant dans leurs bras des choses indistinctes, tandis que les femmes éperdues fuient tout droit devant elles, dans la rue déserte. Les balles recommencent à siffler. A la bonne heure î voici des buts animés et plus intéressants qu’une baraque casematée. La fusillade s’anime, acharnée, joyeuse. Une des femmes s’abat. Antonio, grelottant d’horreur, a reconnu Luiza. bout de la rue étroite, une fusil­ A son râle, le prieur a bondi près de lui, et maintenant lade crépite et perce de ses brefs le jeune homme se débat sous la poigne vigoureuse qui éclairs le brouillard bleuâtre de la l’empêche de quitter l’abri de la voûte. poudre. Les balles ricochent sur le — Mais, mon père, c’est elle... Ne voyez-vous pas?... pavé, égratignent les façades irré­ C’est elle, je vous dis... gulières, trouent les volets, déchi­ La forme étendue sur le pavé s’agite puis se met quettent les linges pendus aux fe­ à ramper. Elle n’est donc que blessée. Hélas, les balles nêtres. pleuvent autour d’elle et vont bien vite l’achever. Une Toutes les maisons semblent dé­ pitié, malgré tout, envahit le prieur. sertes. Une construction isolée, ce­ Près de lui, la voix d’Antonio s’élève : pendant, s’empanache de fumée et retentit par — Elle vit, mon père, elle vit... Il faudrait aller la instants de coups de feu. Une poignée d’hommes chercher, la tramer ici... Elle serait sauvée... Et moi, — des officiers, des gardes du palais, quelques je ne peux pas... Dieu tout-puissant, je ne peux pas... bourgeois royalistes — s’est retranchée là et tient Oh! mon père... encore tête aux insurgés. Une lueur d’incendie em­ La figure ravagée du novice se tourne vers dom pourpre violemment un coin du ciel bas. Les révo­ Benedicto. Une prière ardente se ht dans ses yeux lutionnaires sont maîtres de Lisbonne. éperdus. Le prieur feint de ne pas comprendre. Il voit L’escarmouche se prolonge, car les partisans devant lui l’orage de. plomb s’acharner, étoiler la enfermés dans le réduit vendent chèrement leur pierre, et il tremble. peau. Une compagnie de ligne, une des La jeune fille, à vingt mètres d’eux, n’entend pas révoltées, occupe l’extrémité l’appel rauque d’Antonio. Les autres femmes ont dis­ de la rue et tiraille éperdu­ paru. Elle s’en va à quatre pattes, comme une bête, ment, heureuse de gaspiller fuyant la mort

— Un bridge, messieurs? proposa sternum et les grimaces qu’il fai­ le conseiller Gardelle avec un sou­ sait attestaient suffisamment ses rire. Mais, si vous le voulez bien, souffrances. Mais les amoureux, nous ne médirons pas de cet affreux d’ordinaire, ne prêtent guère at­ temps. Moi, j ’adore les bois humides tention aux douleurs des autres. et le parfum qu’exhalent les fou­ Consciencieusement la jeune femme gères mouillées. La pluie, mieux et moi nous vidâmes le légumier que le beau temps, évoque des sou­ avec l’animale férocité de nos ap­ venirs. Aujourd’hui, tenez, il me pétits. semble que je suis encore substitut « _ Tant pis pour Rosalie, dit et tout au début d ’une heureuse Annette, gaîment, en agitant la carrière. J ’avais vingt-cinq ans, il petite sonnette, qui appelait le pleuvait souvent et j’étais exilé dessert. dans un trou de province, une de « Il pouvait être onze heures, ces mornes petites cités qui se ré­ et je m’apprêtais à prendre congé clament d’un passé glorieux, pour quand, brusquement, Gaspard se excuser, sans doute, un present leva et tira sa montre : maussade. Entre les « raouts » de « — La digestion est faite... Mme de S... (l’expression était de Très bien, dit-il, d’une voix rau­ mise à cette époque) et les froides que, étrange, que je ne lui con­ réceptions de la sous-préfète, il n’y naissais pas. Mon cher substitut, avait place que pour la lecture, le ma chère femme, je vous préviens tric-trac et les beuveries philoso­ que vous n’échapperez pas au châ­ phiques du café Magloire. Beaucoup timent qu’il a plû à mon honneur de potins, à peine d’aventures... insulté de vous infliger. Parmi les Ah ! si, pardon, j ’oubliais la mienne. champignons que vous avez man­ Gardelle toussota, vissa grave­ gés ce soir, il y avait des « ama­ ment son monocle, puis débuta : nites mappa », les plus dangereux « Dans notre petite ville, je vous de tous, ceux qui ne pardonnent l’ai dit, les distractions étaient peu pas, d’autant moins que leur effet, nombreuses. La meilleure consistait d’ordinaire, se fait sentir de douze à rendre visite au châtelain d’En- à quinze heures après l’ingestion... vierge. C’était un rustre mal dégrossi quand les toxines sont passées dans qu’un héritage avait mis au rang le sang, qu’aucun médicament n ’a des propriétaires. Les bonnes gens le pouvoir de les éliminer... Je de M... se souvenaient d’un petit vous engage, monsieur, à bien em­ homme trapu et bilieux qui, vingt ployer les courts moments qu’il ans de suite, avait servi comme vous reste à vivre... Quant à ma garde-chasse le baron d’Envierge. 11 femme, elle mourra ici. C’est mon atteignait la cinquantaine quand, droit et mon devoir de lui donner brusquement, un oncle de Montevi­ un dernier abri. deo lui laissa, en trépassant, un mil­ « Je poussai un cri terrible et me lion tout net. Le baron étant mort précipitai, le poing levé sur l’ex- et ses enfants ayant mis le castel en garde-chasse. Mais j’avais compté vente, Gaspard Turquet, l’ex-garde- sans la force herculéenne de Gas­ chasse, s’en rendit acquéreur pour pard Turquet. D’un tour de main, cent billets de mille et connut la vo­ il m’empoigna, me jeta dehors. lupté secrète de s’asseoir triompha­ Je titubai. Malgré le froid de la lement à la place du maître. Cela nuit une sueur affreuse m’inondait fait, le drôle s’avisa de prendre les tempes. Etait-ce donc déjà femme. Sa fortune lui valut detre l’effet du redoutable poison que agréé par le fermier de Ronceray charriaient mes veines? Je cher­ qui lui donna sa fille aînée, la jolie chai à tâtons la blancheur de la Annette, une créature de vingt ans, Souvent Gaspard m’inVitalt à l’accompagner et ta gracieuse Annuité se joignait à nou*.., route A présent, je n’avais plus dorée et rose comme un grain de qu’une pensée : rentrer à temps, chasselas. Mais, comme la petite redoutait l’ennui, elle êtres nerveux, compliqués, dont l’âme est un problème dénoncer au procureur l’ignoble assassin... obtint sans peine d’installer au château, en qualité de qu’il faut débrouiller. Annette était une créature « Tout à coup, derrière moi, j ’entends des pas pres­ cuisinière, sa sœur cadette, Rosalie, une gamine de simple. Jetée dans les bras de Gaspard par l’avidité sés, une voix haletante ; seize ans, active et fûtée. Celle-ci s’acquitta de sa d’une famille qui voulait s’assurer une montagne « — M’sieu!... M’sieu.., besogne à la satisfaction du maître, ce qui n’était pas d’écus, la pauvrette découvrait un peu tard, il est vrai, une mince affaire car Turquet était gourmand et que le garde-chasse n’était pas le mari rêvé. Peut-être « — Qu’y a-t-il? raffolait des sauces compliquées. Vous voyez d’ici eut-elle pu se résigner si, poussé par quelque démon, « C’est Rosalie, la petite sœur d’Annette. Elle ac­ l’amusant tableau Deux sœurs, l’une la maîtresse, je ne me fusse avisé de lui faire une déclaration... Nous court vers moi, une main sur le cœur l’autre la bonne, échangent des baisers et des confi­ étions seuls dans un petit chemin bordé de chèvre­ « — M’sieu... Je venais dire à m’sieu qu’il ne se dences. Mais, dès que la sonnette grésille, la petite, en feuilles, Gaspard s’étant éloigné quelques instants tourmente pas. Bien sûr qu’il y avait dans le panier tablier, court ouvrir la porte, tandis que « madame », pour aller déraciner dans le buisson des touffes de de mauvais champignons... Mais je les connais, m’sieu, dans ^ le salon, prend une pose élégante et aban­ clavaires. A ma phrase victorieuse, Annette répondit et je les ai jetés. Monsieur et Madame n’ont mangé que donnée. par un long regard chargé de tendresse. Alors, oubliant les bons. « Ma position m’avait valu l’amitié du châtelain toute prudence, j’enlaçai la taille ronde de la jeune « La brave fillette ! J’ai failli lui sauter au cou à ce d Envierge, Gaspard Turquet. Si les ménages, par prin­ femme et lui appliquai sur la nuque un baiser furtif. moment-là. Pourtant, j’ai passé une nuit détestable. cipe, déclinaient les invitations de l’ex-garde chasse, Elle devint très rouge, poussa un petit cri. A ce Pensez donc, si elle en avait oublié un seid, même un les célibataires, en revanche, les acceptaient toutes! moment, une main vigoureuse écarta les feuilles et petit dans la quantité !... Je ne fus tout à fait rassuré J étais de ceux-là. Outre ma qualité de magistrat, un nous vîmes surgir, à quatre pas de nous, l’ex-garde- que vingt-quatre heures plus tard, quand je m’aperçus détail m’avait aeguis la sympathie de Gaspard. chasse. que ma santé, en somme, restait excellente. J avais un goût spécial pour les champignons et le « — Je ne vous dérange pas, au moins? interrogea- Quelqu’un interrogea : châtelain était un fin connaisseur... t-il avec un rire faux. — Mais comment tout cela a-t-il fini? « Entendons-nous bien. Par « connaisseur », je ne «Mais, comme il n’ajoutait rien, que ses yeux de Gardelle poursuivit : veux pas dire que 1 ami Gaspard était un savant, un fauve gardaient leur flamme joviale, un peu mysté­ mycologue, pour employer le terme précis. Il raillait, au rieuse, nous pensâmes, Annette et moi, qu’il n’avait — Le mieux du monde... J’eusse pu faire interve­ contraire, ceux qui chaussent des lunettes et s’absor­ rien vu. Un clocher tintait l’angélus du soir. Nous nir la justice, mais c’était nous mettre, Annette et moi, bent consciencieusement, dans les analyses. Mais il reprîmes silencieusement le chemin de la maison, dans une sotte posture. J’ai préféré laisser agir le avait derrière lui trente années de pratique. Ce n’était mais, arrivés devant un petit pré, Gaspard s’ar­ hasard, qui remet souvent chaque chose à sa place. pas lu.i qui eût confondu l’innocente patrelle avec rêta : Et puis, il y a toujours dans la vie, une certaine l’amanite. Après une journée de pluie, quand le soleil joie à se laisser emporter par la fatalité, à attendre « — Attendez-moi, mes amis... Le temps de faire une paresseusement qu’elle décide pour nous. escaladait de ses rayons les nuées en déroute. Gaspard dernière cueillette. partait en guerre, le panier au poing et il fallait voir Gaspard, devant le résultat de son crime, éprouva « Nous nous assîmes au bord du talus. Dissimulés avec quelle adresse, quel flair de chasseur, il décou­ moins de colère que de surprise. C’est qu’il apprenait derrière un bouquet de sureaux, nous regardions, vrait dans la mousse et l’humus les petits parasols... du même coup que les mycologues étaient des farceurs Annette et moi, le dos penché de Gaspard qui tanguait Il connaissait les chanterelles blondes qu’on nomme et que 1’ « amanite mappa », malgré sa réputation, lourdement à travers les feuilles. En revenant vers aussi « girolles » et dont le bonnet ourle semble une était un champignon inoffensif, voire même délicieux. nous, cinq minutes plus tard, il tapota le couvercle du coquetterie, il savait dénicher les golmottes qui ont Afin de le prouver davantage et d’asséner, en bonne panier : des gouttes de sang sur leurs feuilles; il voyait de loin connaissance de cause, un coup de massue aux savants les boules de neige qui mettent leurs taches éclatantes « — Ce sont les meilleurs, proclama-t-il. ignares, il en récolta un second plat quinze jours plus dans le vert des prés; il cueillait avec dévotion les « Le soir, je dînai au château. La petite bonne avait tard, pria la petite de l’apprêter et s’en régala seul, hautes lépiotes qui ont l’air de jouets chinois et per­ reçu l’ordre d’apprêter les champignons. Elle n’y cette fois, car Annette avait juré que, de toute sa vie, sonne n ’eut osé lui adresser la parole quand il brisait la manqua pas et, mis en gaîté par une bouteille de vieux elle ne toucherait plus à l’amour et aux cryptogames. chair d’un cèpe pour en reconnaître la couleur. Sou­ Pommard, ce fut avec un vrai plaisir de gourmet que Le résultat ne se fit pas attendre. Vingt heures plus vent, Gaspard m’invitait à l’accompagner et la gra­ nous accueillîmes le légumier d’où s’évadait un exquis tard, Gaspard Turquet expirait selon la formule « dans cieuse Annette se joignait à nous. La vérité m’oblige à parfum. d’atroces souffrances ». J’avoue que la gamine s’est dire que je m’intéressais moins aux champignons qu’à « — Sacrés veinards, dit brusquement l’ex-garde- montrée un peu rosse en la circonstance... Mais, au la jeune femme. Elle maniait son ombrelle à pomme de chasse, vous allez vous régaler, vous, au moins. Moi, fait, pourquoi auriez-vous voulu qu’elle empêchât ce jade avec une gaucherie puérile qui me ravissait. Au j’ai ma crampe d’estomac... Impossible d’avaler la vieux coquin de s’empoisonner? » fond, messieurs, j’ai toujours eu une prédilection moindre bouchée. secrète pour les campagnardes. Je les préfère aux petits « Gaspard, de fait,' se frappait du poing la base du P ie r r e V il l e t a r d . LE MIROIR 19 lieu d’être laminés comme leurs maisons? L’organisme humain se serait-il accom­ s échapper de ces gorges dilatées par Je de ses secrètes tristesses, cela me déchirait. quoi le siège laissa tomber à terre ses mor­ modé en un clin d’œil à ce nouvel état? manque d’oxygène et où s’engouffre l’air Toute ma prudence, tout mon souci de ceaux disloqués. Démence pure... Que croire? vicie, assassin. Je crois entendre les suppli­ déjouer la comète tombaient davant ces Cette lutte durait depuis d’intermina­ En tous cas, ce^que je vois, moi, simple cations, les encouragements, les : Doghri, mains jointes, cette tête charmante où les bles, de terrifiantes minutes. La clarté témoin sourd, mais non aveugle, c’est une doghri ! ( Tout droit!) Les exclamations stigmates de la mort déjà s’imprimaient. rouge du dehors persistait, accusant dans population hagarde, en proie au plus ter­ desespérées : A l chams! (Le soleil ! ) les Allons!... Je tirai rapidement les deux leurs moindres détails le paysage et les rible réveil, après l’espoir berceur du salut résignations sombres au fatalisme orien­ lourds verrous qui condamnaient la porte. objets les plus lointains. Le spectacle tal : Del ouakti! (C’est maintenant!) Je auquel j’assistai à partir de cet instant et qui entrecroise ses ombres parmi l’infer­ Celle-ci s’ouvrait en dehors. Je la poussai... nale clarté d’incendie. vois des bouches s’agrandir, pareilles à je la poussai d’abord doucement, avec mo­ ne peut être traduit en aucune langue : Je songe : celles des poissons qu’on a tirés de l’eau dération, pour ne pas l’ouvrir plus qu’il mon amie, qui avait espéré jusqu’au bout et qui sont en train de mourir sur le sable... en mon intervention, s’abandonna désor­ — A présent, l’asphyxie, probable­ convenait. Puis, éprouvant une résistance ment. . je poussai plus fort. Enfin, j’employai mais à l’asphyxie envahissante. Elle tom­ ba sur les genoux puis s’affaissa ; son visage Néanmoins cette asphyxie tarde, et IV toute ma vigueur à peser sur le panneau se pencha vers le sol, sa chevelure, enve­ c’est seulement la terreur qui paraît agi- aiassif derrière lequel Mme Kadjian, tor­ Brusquement, j’eus un recul : à la porte loppée d’une mantille noire, toucha le sable ter les silhouettes désemparées de la foule. turée par l’asphyxie, attendait. de ma cage, percée d’un hublot comme les rugueux, et, après deux ou trois spasmes. De mon observatoire, seul, égoïstement La racine de mes cheveux se dressa, mon autres côtés, une de ces faces agonisantes Mme Kadjian expira. seul, — oui, égoïstement, je le concède, — sang reflua des membres à mon cœur : venait d’apparaître, et je reconnus... avec je regarde, les yeux remplis de l’affreux je ne pouvais plus ouvrir la porte! * * * un choc au cœur, je te reconnus, ô visage tableau. Violemment, avec un cri étouffé de merveilleux et inoubliable de Fizah!... rage, je me jetai sur l’obstacle, il ne bron­ Comment je vécus trois semaines dans Soudain débouche un groupe de fuyards Ce fut un éclair, une révélation, pas une ce cauchemar; comment, ensuite, l’atmos­ sur le plateau où se dresse ma cellule. cha pas. Arc-bouté, j’utilisai mon dos lueur de doute en moi. Je savais que c’était comme bélier, comme levier : peine per­ phère étant peu à peu redevenue respirable, Us ont grimpé le raidillon qui mène à cette elle, malgré l’apparente impossibilité. Elle j'arrivai à briser à coups de marteau pa­ hauteur, poussés par on ne sait quel ins­ due. Je haletais, je proférais à voix haute à Alexandrie ! Elle ici !... Et je l’ignorais, des sons inarticulés, j’appelais Fizah tients une glace de ma geôle de métal et tinct d’échapper au danger en montant. à m’en extraire, je ne le conterai pas en et j’avais vécu près d’elle sans me sentir comme si elle avait pu m’entendre, je la Je distingue de près leurs traits crispés de détail. invinciblement attiré vers sa beauté ! La conjurais de m’aider, de tirer à elle cette peur. Us jettent un regard à ma retraite voici qui se souvenait de moi... Oui, je Je sus, au sortir de mon abri, qu’une intacte. Vont-ils se diriger vers elle? Non, porte ; il me semblait que c’était mon salut rétablissais tout : elle habitait de nouveau et non le sien qui fût en jeu. infime partie de la population d’Alexan­ ils passent et s’enfoncent dans le champ notre ville, le désastre l’avait surprise et drie avait été épargnée; c’étaient ceux qui Un instant, au milieu de cette crise de de décombres feuillus que forme désormais elle s’était rappelé le chemin de ma de­ avaient eu l’idée de se cloîtrer dans des sou­ démence, je m’arrêtai, et, réunissant mes le square. Je me retourne pour les suivre meure. Elle le connaissait bien, ce logis; terrains. pensées éparses, j'essayai de réfléchir. et les considère à travers le panneau oppo­ souvent, autrefois, nous nous étions'ren­ Des milliers de cadavres, des ruines im­ Une seule explication était plausible : la sé de la chambre. Dans ce mouvement, je contrés dans le jardin d’en face, sous les menses marquaient sur notre ville et dans pression de l’atmosphère cométaire m’em­ découvre un spectacle auquel j’aurais cer­ palmiers et les lauriers en fleurs... le monde entier le passage de l’inexorable pêchait d’ouvrir. C’était elle qui avait ainsi tainement dû m’attendre et qui me bou­ O mon roman d’il y a quatre ans ! visiteuse. Pour moi, si mes cheveux ont rivé la porte, et plus puissamment que leverse : ma maison, mon pauvre logis, Comme les souvenirs m’étreignent en foule, blanchi et si j’ai vieilli au point que mes n’importe quelle autre force ! Les bandes aplati lui aussi, télescopé par l’ouragan de comme je suis tremblant, éperdu, souffrant amis survivants d’Angleterre m’ont re­ de cuir et de caoutchouc destinées à assu­ la surpression atmosphérique... Un tas mille morts! Je me raidis, j’assemble le connu avec peine, on ne s’en étonnera phis. rer le parfait hermétisme de la chambre de pierres ! troupeau dispersé de mes idées, il faut la Je porte en moi, pour parler le langage de Et toujours cette lumière rouge qui con­ sauver ! étaient « coincées » et résisteraient à tous notre poète Wordsworth, « une blessure les efforts. fine à l’hallucination : comment des êtres La cellule était étroite. Tout avait été inguérissable par où s’égoutte le sang de humains peuvent-ils vivre dans une telle réglé, on se le rappelle, pour qu’elle n’abri­ Cette constatation me pénétra avec la mon cœur »... masse, indéniablement composée de gaz tât que moi et moi seul. Les appareils à netteté d’un poignard. Ali ! mes précau­ Mais, malgré tout, la vie est là, et par­ irrespirables? oxygène n’étaient capables de suffire qu’à tions étaient bonnes!... Le mauvais air dessus notre obscure individualité, elle L’asphyxie ne sera qu’une question de la respiration d’une seule personne. Mais n’entrerait pas, il n'y avait pas de danger... poursuit sa marche incessante. C’est à m inutes... n’importe, ne fallait-il pas la sauver?... Et j’étais condamné, moi, l’ingénieux et nous, humbles créatures, de l’aider à s’en Talonné moi-même par l’angoisse de Peut-être pourrions-nous vivre tout de habile constructeur de cloisons étanches, aller vers le bien et le beau, par notre tra - périr étouffé, je surveille le fonctionne­ même, traverser la crise en nous serrant, à regarder mourir à quelques centimètres vail, notre abnégation, l’exercice de nos ment de mes appareils, j'étudie la solidité en économisant notre souffle. de moi la femme que j’avais aimée, que humbles facultés et du peu d’énergie dont de mes cloisons; heureusement, elles res- Entr’ouvrir la porte juste assez pour lui j’aimais par-dessus tout ! la nature a pu nous doter. Chacun de nous rent robustes, j’ai bien calculé leur résis­ livrer passage : elle entrerait, elle serait Je m’emparai d’un ciseau à froid dans n’est qu’un grain de sable, mais l’immense tance. près de moi, en sûreté. Tel fut le plan la trousse qui devait me servir à la répara­ lit des mers n’est-il pas fait de ces grains Encore de nouvelles ombres qui s’appro­ qu’instantanément j’élaborai. tion de mes instruments de physique, en accumulés? Ainsi sont les hommes; si chent. Des hommes, des femmes serrant De l’autre côté de la vitre, Fizah m’ap • cas d’avarie. J’introduisis l’outil entre la petits qu’ils soient, la Terre a besoin d’eux leurs petits contre leur sein : un incessant paraissait en une attitude de supplication porte et son cadre, à une place où me parut pour accomplir ses destinées, pour devenir défilé vers un point que j’ignore situé très et de détresse, me criait évidemment des exister quelque solution de continuité. Je meilleure et pacifiée. Qu’elle ait confiance loin, sans doute, des cavernes taillées dans mots dont le son ne frappait pas mon pesai : l'acier cassa net. en eux, comme ils ont confiance en elle. des rochers, là-bas, en pleine campagne... oreille. Elle avait dû courir d’abord à ma Je me rappelle avoir salué cette rup­ Et, toujours, pensons, luttons, surtout Mais je surprends sur ces visages des symp­ maison, puis, la voyant détruite, se détour­ ture — assez escomptée, du reste — d’un aimons-nous sans relâche, en ouvriers tômes non équivoques de souffrance. Puis ner vers la chambre de métal où j’étais rire presque insensé, avoir empoigné ma joyeux d’une tâche constamment renou­ des mains convulsives portées aux poi­ blotti. chaise par un pied et, dans un accès de velée. Mêlons-nous à la vie, soyons la vie trines, et le sinistre cortège s’arrête, pié­ Ce qui me frappait aussi chez elle, c’é­ véritable démence, avoir frappé à coups elle-même et allons de l’avant... For- tine, lentement gagné par l’empoisonne­ tait son costume européen, une robe cou­ redoublés la vitre qui me séparait de Fizah wards!... ment de l’air. pée par un tailleur de Londres ou de Paris, mourante. Mais là encore, la minutie de Mais, certains soirs, quand ma songerie Il y en a qui se mettent à tanguer comme qui attestait qu’elle avait séjourné en mes précautions se tournait contre moi : évoque soudain un visage de femme, des gens ivres, d’autres qui se couchent Occident. La retrouver ainsi, elle si ten­ le verre massif défia mes coups et je ne toutes ces nobles et fortes pensées s’effi­ à terre, un bras sur les lèvres, dans la posi­ dre, si prenante, moi, le confident ancien réussis qu’à en écailler la surface. Àprcs lochent en moi comme une branche au vent tion de Pline, le naturaliste, quand il fut d’orage. Et c’est toujours elle que je re­ étouffé par le volcan. Les vieillards restent vois, elle, avec son regard inoubliable et en arriéré, abandonnés des plus rapides. son sourire qui découvrait les grains régu­ Il y a de tout dans cette horde, des fellahs Dans le prochain numéro, nous donnerons la fin de liers des dents; et il me semble encore en­ à tarbouch rouge et à robe bleue, des hom­ tendre sa voix orientale et grave qui mes vêtus en fonctionnaires, avec la stam- :: :: LA VILLA DES QUATRE PENDUS :: :: m ’appelle. bouline et le fez, des femmes de toute con­ dition, voilées ou non, des guenilles ara­ et nous commencerons notre roman de Victor Forbin, Fait à Londres, le 28 mai 19x8. bes et des robes européennes, des turbans, :: LA CARGAISON MAUDITE W il l ia m M a s t e r s . des chapeaux. Les gestes se tordent. Et je Pour copie conforme : devine quelles terribles clameurs doivent M a r c e l R o l a n d .

iiiiiiiiiiiiiiii!iiiiiiii!iiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii!iiiiiiiniiiuiiinmiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii!iiiiiiiiiiiiiiiiiiiu!ii!iiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiuuuiii!i!i:ii!Miiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiuiiiiimiiiiniiiiiiiiiiiniiiiiiiiiiuiiiiiimiiiiiiuiiiiiiiiiiiin

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