Les Collaborateurs 1940-1945 Pascal Ory
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Pascal Ory Points Les collaborateurs 1940-1945 Pascal Ory Les collaborateurs 1940-1945 Éditions du Seuil 1976 Préface à l'édition de 1980, où l'auteur, innocemment, dit «je ». 1 1. Comme le temps passe. 7 2. Leur avant-guerre. Préhistoire de la collaboration .... 11 Germanophiles et stipendiés, 11. — Le réseau Abetz, 14. — Autour du Comité France-Allemagne, 18. — A la recherche d’un fascisme français, 20. — Premiers passages à l’acte, 24. — A gauche : néos et pacifistes, 27. — La montée des périls, 30. — « Drôle de guerre », 32. 3. Jeux interdits. Conditions générales de la collaboration . 36 Jeu allemand, jeu français, 36. — Collaboration d’État, collabora¬ tion d’état, 4L — Cinq années d’avatars, 48. 4. La règle du jeu. Les auxiliaires de la propagande allemande 54 L’appareil idéologique allemand, 54. — Interlocuteurs et haut par¬ leurs, 57. — Du bon usage des échanges culturels, 59. — Le groupe Collaboration, 62. — La presse aux liens, 64. — Le royaume d’inter- France, 67. — Ersatz et à-peu-près, 69. — Une aimable diversité... quotidienne..., 72. — ... hebdomadaire, 74. — La CNPF, exclusivité Luchaire, 77. — Radio-Paris est allemand, 78. — Henriot et Paquis, deux voix, 81. — L’écran gammé, 83. — Version doublée, 86. — La France européenne, 89. 5. Les sept couleurs. Partis uniques et chefs suprêmes . ... 91 Feu et Tempête, 92. — Du Front franc aux francistes, le second souffle des anciens, 93. — Les nouveaux petits chefs, 96. — Le cama¬ rade Doriot, 100. — Le professeur Déat, 104. — Deux discours, 107. — Deux institutions, 110. — Une base, 113. 6. Les cadets de l'Alcazar. Un fascisme : « Je suis partout » 116 Le triomphe, 116. — Brasillach, fasciste charmé, 118. — Le meurtre du Père, 121. — Restent les purs et les durs, 124. 7. Les enfants du paradis. Une gauche socialiste et nationale 128 Une certaine extrême gauche, 128. — « La France au travail », échec d’un populisme nazi, 130. — Les socialistes aussi, 134. — Une colla¬ boration Front populaire, 137. — Des syndicalistes proallemands, 139. — René Chateau, au carrefour de « l’Atelier », 142. 8. Le Français d'Europe. L'idéologie ordinaire de la collabo¬ ration.146 Le régime et ses affidés, 146. — Churchill = Staline, 150. — Juifs et enjuivés : une maladie sociale, 153. — Nouveaux mythes, 159. — Nouvelle Europe, 161. — Nouvelle société, 164. 9. Je suis partout. Minorités nationales et collaboration ... 168 Les Corses du Duce, 169. — Les Flamands du Führer, 171. — Les Algériens de nulle part, 174. — Extrême Est, extrême Ouest : deux séparatismes, 177. — Les Alsaciens-Lorrains de l’Anschluss..., 183. — ... face aux réalités de l’hégémonie allemande, 187. — L’heure bretonne?, 190. — Un parti pour l’État breton, 193. — La quête du graal national-socialiste, 198. 10 .Voir la figure. Les intellectuels de l'Europe nouvelle. 201 Ce que parler veut dire, 202. — Culture/Kultur?, 205. — Drieu La Rochelle, ou l’entre-deux-guerres, 208. — Itinéraire d’un suicidé, 210. — L’édition continue, 216. — Quand des savants inventent la collaboration, 221. — Quelques voix haut perchées, 225. — Char- donne et Montherlant, deux aristocrates, 229. — Céline, une colla¬ boration hypocondriaque, 232. 11 -Le don de sa personne. La collaboration armée.236 Agir?, 236. — LVF, 240. — Les croisés du XXe siècle, 242. — Damand sur le front intérieur, 247. — La société milicienne, 250. — Vers l’État milicien, 253. — Deux « grandes compagnies », 257. — Les Français de la police allemande, 259. — Milieu et milieux, 261. — Le crépus¬ cule SS, 264. 12. Les visiteurs du soir.269 Annexes.275 La pénétration culturelle : les Cahiers de l’Institut allemand aux éditions Sorlot, 277. — Le collaborationnisme en chiffres : l’exemple de la Côte- d’Or et delà Mayenne, 279. — Une propagande raciste : les brochures de l’Institut d’étude des questions juives, 282. — La presse parisienne. Quelques chiffres, 283. Une chronologie. 285 Introduction bibliographique.299 Index. ->no Index des personnes, 311. — Index des associations, administrations et sociétés, 321. — Index des médias, 327. Préface à l’édition de 1980 où l’auteur, innocemment, dit “je ” Je me souviens... Les grands et gros volumes étaient remisés dans la zone la plus obscure, la moins accessible de la salle des Archives. Tout le XXe siècle français s'étageait là, en rang serré, papier jauni et typographie austère. Ou du moins un certain regard sur le siècle, entre affaire Dreyfus et guerre d'Algérie; toujours bon à prendre. Mon père, journaliste depuis toujours dans ce grand quotidien régional, m'en avait un jour ouvert la porte, et j'avais fait de cette caverne apparem¬ ment silencieuse et hors du temps, en fait tonitruante d'histoire, comme une pièce supplémentaire de notre appartement, une classe annexe de mon lycée. Je devais avoir douze ans. Lourds à porter, ces in-folio, et quelle poussière je soulevais en les ouvrant, mais aussi quelle prodigieuse initiation cryptique ! Un jour, j'ouvris le volume Juin 1940, avec dans le cervelet une voix de 18-Juin, quelques images d'exode, un bruit de bottes sur le pavé. Premier choc : les blancs de la censure qui, jour après jour, montent à l'assaut des titres optimistes de la première page. Deuxième invention, inoubliable : tourner une feuille, vers le milieu du volume, constater un arrêt de parution de quelques jours, au vu de la date en manchette — mais le journal d'avant et le journal d'après sont bien là, reliés l'un à l'autre par le fil, la colle, le carton, toute la continuité organique d'une nation —, vérifier que, pour le reste, on lit bien la même typographie, la même mise en pages, le même nom de directeur, les mêmes signatures, et en prime plus de blancs. Tout est en ordre, quoiqu'un peu restreint encore. Quelque chose d'un recueillement juste gris. Au centre de la première page trône toujours le communiqué militaire. Il a simplement changé d'épithète; il n'est plus « français », il est « allemand ». II Les collaborateurs Il ne me restait plus qu’à rencontrer, quelques années plus tard, le destin trouble de Robert Brasillach, ce jeune intellectuel monté de sa province dans le Paris des Grandes Ecoles, de la Culture et de la Poli¬ tique, mon semblable, mon frère, qui terminait dans la peau d'un tueur stylographique et d’un fusillé pour l’exemple. Désormais ne s’éteindrait plus en moi cette interrogation en forme d’inquiétude sur Vichy comme non pas crime établi mais équivoque établie, et sur le collaborationnisme, avant-garde consciente, sinon organisée, de ce nouvel Ordre Moral, sorte de révélateur des virtualités profondes du consensus de juillet 1940. De cette inquiétude et de la confiance d’un directeur de collection naquit l'ouvrage que vous lirez un peu plus loin, étranger donc a priori à tout effet de mode mais que sa date de parution fit participer, bon gré mal gré, au mouvement général. Et voilà qu’une deuxième vie lui est offerte par l’édition de poche, que trois années sont passées et que le rétro des premières années 1970 est insensiblement devenu prescience de toute une fin-de-siècle, la fascina¬ tion pour les Années Noires, métaphore d’une certaine crise grise de l'Occident. Bien troublantes, ces trois années. Au lieu du reflux périodiquement pronostiqué, voici que notre pays n'aura cessé de rebondir d'une « affaire » à l’autre, d’un professeur de lettres lyonnais à un professeur de médecine parisien, de Darquier de Pellepoix à Alfred Fabre-Luce, ^'Holocauste à la Nouvelle Droite. Des séries, cinématographiques ou littéraires, se sont instaurées. Au Chagrin et la Pitié avait succédé Français, si vous saviez; vinrent Chantons sous l’occupation ou Juifs et Français. Une noble maison d’édition, après des Cahiers André Gide, se mettait à publier des Cahiers Céline. Les seuls Drieu La Rochelle et Maurice Sachs, parangons du sadomasochisme intellec¬ tuel, suscitaient chacun en moins d’une année plusieurs essais biogra¬ phiques et maints dossiers de presse. Les survivants encore muets s’en¬ gouffraient par la brèche éditoriale ouverte par Christian de La Mazière, et nous donnaient qui des mémoires militants (Victor Barthélémy), qui des souvenirs distanciés (Lucien Combelle). Marie Chaix avait inauguré la littérature rétro-familiale, Pascal Jardin (le Nain jaune, 1978) et Jean-Luc Maxence (l’Ombre d’un père, 1978) lui emboîtaient le pas. Parler de mode n'avait plus guère de sens, même si, dans la foulée, la haute couture versait dans la basse époque et le comique troupier se Préface ni refaisait une pinte de bon sang à coup de 7e Compagnie en débandade et de Führer en folie. C'était désormais l'évidence : toute la décennie allait y passer; et la configuration du mouvement devenait tout autre. Celle d'un vaste règlement de compte historique — la France de 1945 avait eu son épuration, celle de 1975 avait son apurement — au travers duquel, par-delà tous les faux-semblants, était posée une série de ques¬ tions fondamentales à l'adresse de notre propre communauté : — la spécificité du phénomène vichyssois, la France ayant été le seul pays occupé à n'avoir eu ni gauleiter, ni Quisling, mais un gouvernement légal, investi d'un large assentiment; — le racisme ordinaire, vécu ici non dans l'atrocité d'un lynchage mais dans l’horreur d’un silence, celui qui environna la publication des statuts antisémites de 1940 et 1941 ou la Rafle de 1942, silence du « petit peuple » comme des « grands corps » — à commencer par l'Uni¬ versité française; — la généalogie d'un darwinisme social renaissant, dont on décou¬ vrait petit à petit qu'il avait de brillantes lettres de noblesse autoch¬ tones, entre Gustave Le Bon et Georges Vacher de Lapouge, étouffées un temps par l'hégémonie culturelle du rationalisme libéral. Il n'était dès lors plus possible d'interpréter le phénomène comme une impure et simple machination de la bourgeoisie new-look, décidée à passer l'éponge sur un passé ambigu et comme acharnée à laver le cerveau des classes populaires de toute mémoire de ses luttes (inter¬ prétation Cahiers du cinéma — Michel Foucault, 1974).