Ecrire L'histoire Des Évêques De Metz Au Moyen Age: Les Gesta
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
Ecrire l’histoire des évêques de Metz au Moyen Age : les Gesta episcorum de la fin du VIIIe à la fin du XIVe siècle Arnaud Hari To cite this version: Arnaud Hari. Ecrire l’histoire des évêques de Metz au Moyen Age : les Gesta episcorum de la fin du VIIIe à la fin du XIVe siècle. Histoire. Université Paul Verlaine - Metz, 2010. Français. NNT: 2010METZ007L. tel-01752685 HAL Id: tel-01752685 https://hal.univ-lorraine.fr/tel-01752685 Submitted on 29 Mar 2018 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. AVERTISSEMENT Ce document est le fruit d'un long travail approuvé par le jury de soutenance et mis à disposition de l'ensemble de la communauté universitaire élargie. Il est soumis à la propriété intellectuelle de l'auteur. Ceci implique une obligation de citation et de référencement lors de l’utilisation de ce document. D'autre part, toute contrefaçon, plagiat, reproduction illicite encourt une poursuite pénale. Contact : [email protected] LIENS Code de la Propriété Intellectuelle. articles L 122. 4 Code de la Propriété Intellectuelle. articles L 335.2- L 335.10 http://www.cfcopies.com/V2/leg/leg_droi.php http://www.culture.gouv.fr/culture/infos-pratiques/droits/protection.htm École doctorale Perspectives interculturelles : écrits, médias, espaces, sociétés ÉCRIRE L’HISTOIRE DES ÉVÊQUES DE METZ AU MOYEN ÂGE : LES GESTA EPISCOPORUM MESSINS DE LA FIN DU VIII e SIECLE A LA FIN DU XIV e SIECLE Thèse de l’université Paul Verlaine – Metz soutenue par Arnaud HARI sous la direction de Mireille Chazan, professeur d’histoire médiévale Centre Régional Universitaire Lorrain d’Histoire Année universitaire 2009-2010 I « Touttes flours sormonte la rose : Chescuns sceit bien c’est veriteit ; Pour ceu vous ai dit ceste chose Qu’ensi fait Mets toutes citeis… » La Guerre de Mets , éd. E de Bouteiller, Paris, 1875. 2 INTRODUCTION En plein XVII e siècle, lorsqu’est publiée son Histoire des évêques de Metz 1 , le suffragant du diocèse, Martin Meurisse, entend prouver que l’Eglise de cette ville est recommandable pour cinq raisons : « pour son antiquité, pour la succession non interrompue de ses pasteurs, pour leur sainteté, pour la splendeur de leur sang et la grandeur de leur naissance, pour avoir été toujours très constamment orthodoxes parmi les schismes et les divisions des autres églises circonvoisines .2 » Pour réaliser ce vaste programme, Martin Meurisse a choisi de présenter son ouvrage sous la forme de notices consacrées aux pontifes messins, classées chronologiquement depuis Clément, le fondateur du siège jusqu’à Henri de Bourbon-Verneuil, demi-frère de Louis XIII et titulaire de la dignité épiscopale au moment de la rédaction 3. Le suffragant messin est certes féru d’histoire mais d’autres considérations l’ont poussées à entreprendre la rédaction d’une telle œuvre. L’histoire des évêques de Metz est en effet dans les années 1630 un sujet brûlant qui oppose les partisans de l’intégration définitive de Metz à la France et les défenseurs des libertés communales 4. Louis XIII, à la suite d’un séjour à Metz à la fin de l’année 1631 décide l’installation d’un parlement, geste fort dont la signification n’échappa pas aux contemporains : Metz, ville d’Empire, qui vivait depuis 1552 sous la protection des rois de France, allait devenir une cité du royaume soumise à la haute justice du roi. Quelques gestes importants accompagnèrent cette mesure et suivirent l’entrée des nouveaux parlementaires dans la ville lors de l’été 1634. Les plus spectaculaires furent assurément la suppression du 1 Martin Meurisse, Histoire des évêques de Metz , 1634, Metz, 2 vol. 2 Ibidem., t.I, p.24. 3 Henri III de Bourbon-Verneuil, évêque de Metz de 1612 à 1652, était le fils illégitime d’Henri IV et de Henriette d’Entraigues. 4 Gaston Zeller, le rattachement de Metz à la France , 1926, Paris, t.2, p.280-283 ; A. Hari, «Reprise et continuations modernes des Gesta episcoporum médiévaux à Metz », dans Sot, M., et Bougard, F., Liber, Gesta, Histoire. Ecrire l’histoire des évêques et des papes de l’Antiquité au XXI e siècle, 2009, Turnhout, p.347-365 ; le pasteur Paul Ferry a tenté de réfuter les arguments de Martin Meurisse, voir Julien Léonard, « Paul Ferry, historien engagé du Moyen Âge messin », dans Mireille Chazan et Gérard Nauroy (dir.), Ecrire l’histoire à Metz au Moyen Âge , à paraitre. 3 sceau de la cité qui portait l’aigle impérial et l’occupation (provisoire) du palais des Treize , où siégeaient les principaux magistrats de la cité. Tous les habitants de la ville n’étaient cependant pas mécontents de cette intégration au royaume et Martin Meurisse fut un des fers- de-lance du parti français. Le suffragant messin, pour défendre ses convictions, décida de mettre sa plume au service du roi de France en présentant sa propre vision du passé de la lignée épiscopale messine. Pour donner forme à des préoccupations politiques très enracinées dans son époque, il choisit de se conformer, en plein XVII e siècle, aux caractéristiques d’un genre littéraire médiéval, les gesta episcoporum 1. Les gesta episcoporum Comme le montre cet exemple, ce genre historiographique a connu un grand succès à Metz durant le Moyen Âge et une partie de l’époque moderne. Il s’inspire d’un prestigieux modèle, le Liber Pontificalis , dont la première version remonte au VI e siècle, et qui présente l’histoire de la papauté sous la forme d’une suite de notices consacrées aux souverains pontifes depuis saint Pierre 2. « Dans ces écrits que l’on nomme « gestes épiscopales », relatant les hauts faits des évêques qui se succédèrent à la tête d’un diocèse, la suite des prélats est décrite, selon Georges Duby, comme une lignée charnelle, et la mater ecclesia , l’église cathédrale, comme véritablement mère, sorte de ventre fécond engendrant l’un après l’autre, les détenteurs du pouvoir spirituel »3. La première rédaction du Liber Pontificalis remonte au début du VI e siècle et l’ouvrage connut des continuations jusqu’à la fin du IX e siècle. Il n’est pas question de retracer ici les péripéties qui sont à l’origine de la composition de cette œuvre, en pleine 1 Ce genre littéraire a été étudié de façon synthétique par Michel Sot, Gesta abbatum, gesta episcoporum, coll. Typologie des sources du Moyen Age, Turnhout, 1981 ; R. Kaiser, « Die Gesta episcoporum als Genus der Geschichtsschreibung », dans Scharer, A., Historiographie im frühen Mittelalter , Oldenburg, Vienne, Munich, 1994, p. 459-480 ; Dirk Schlochtermeyer, Bistumschroniken des Hochmittelalters. Die politische Instrumentalisierung von Geschichtsschreibung , Paderborn, 1998. 2 Sur le Liber Pontificalis , voir les travaux toujours fondamentaux de Louis Duchesne, Etude sur le Liber Pontificalis , Paris, 1877; voir également l’article de F. Monfrin, « Liber Pontificalis », dans le Dictionnaire historique de la Papauté , sous la direction de P. Levillain, Paris, 1994 ; voir les actes du colloque M. Sot et F. Bougard, (dir.), Liber, Gesta, Histoire. Ecrire l’histoire des évêques et des papes de l’Antiquité au XXI e siècle, 2009, Turnhout. 3 G. Duby, Le Moyen Age, 987-1460 , p.12, Paris, 1987. 4 période de domination ostrogothique sur Rome et l’Italie 1. Il faut cependant s’arrêter quelques instants sur la structure interne de ce livre qui a servi de modèle au rédacteur de gesta episcoporum . Le Liber Pontificalis se présente comme une suite de notices classées dans l’ordre chronologique ; chaque pape depuis saint Pierre a droit à une notice, qui fournit généralement le même type d’informations : le nom et le rang du pontife, son lieu de naissance et son ascendance, la durée de son règne, les décrets qu’il a pris, les constructions mises en chantier, les ordinations qu’il a célébrées, et enfin sa date de décès ainsi que le lieu où repose son corps 2. Cette trame ainsi définie appelle plusieurs remarques. Premièrement, l’histoire de Rome et dans une certaine mesure celle de la Chrétienté s’identifient complètement à la lignée des papes. Les auteurs de gesta episcoporum n’ont pas eu de mal à transposer ce schéma dans le cadre de leur cité au moyen de quelques adaptations. L’évêque est représenté comme le père de la communauté chrétienne, son protecteur et son intercesseur auprès des puissances célestes. Michel Sot a attiré l’attention sur le vocabulaire utilisé par les rédacteurs de gesta pour désigner leurs pontifes, qui renvoie souvent au champ lexical de la famille 3. D’autre part, ces auteurs insistent plus sur la sainteté de la lignée épiscopale, qui se doit d’être ininterrompue et orthodoxe, que sur un prélat en particulier. Même les mauvais évêques ont leur place dans les gesta , dans la mesure où ils constituent des preuves a contrario de la sainteté de la lignée. De plus, la recension des lieux autour desquels s’enracine la mémoire des évêques aboutit à la présentation d’une véritable géographie du sacré à l’intérieur de la cité 4. Pour résumer, les gesta episcoporum ne se distinguent pas seulement par leur forme. Ils ne sont pas qu’une simple succession de notices servant de cadre chronologique à la narration d’événements; ils sont porteurs de la sainteté de toute une lignée de pasteurs.