Bugatti, Une Entreprise Alsacienne Dominique Lejeune
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Bugatti, une entreprise alsacienne Dominique Lejeune To cite this version: Dominique Lejeune. Bugatti, une entreprise alsacienne : Une marque automobile de luxe. 2017. hal-01558734v2 HAL Id: hal-01558734 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01558734v2 Preprint submitted on 16 Oct 2018 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. Distributed under a Creative Commons Attribution - NonCommercial - NoDerivatives| 4.0 International License Bugatti, une entreprise alsacienne, une marque automobile de luxe par Dominique Lejeune, prof Dr Dr Réédition d’octobre 2018 Des voitures de rêve, dessinées par un pionnier, personnage mythique, une entreprise industrielle alsacienne, et aujourd’hui des voitures automobiles reines de la collection de véhicules anciens… Les origines sociales d’Ettore Isidoro Arco Bugatti, né en 1881 à Milan ? Un ancêtre peintre officiel de la cour au XVe siècle, un grand-père sculpteur, un père (Carlo, 1856-1940) décorateur-ébéniste, peintre et orfèvre, émigré en France, des études à l’école des Beaux-Arts de Milan, un frère cadet, prénommé… Rembrandt, considéré comme le génie de la famille et qui acquerra une belle renommée de sculpteur animalier (1884-1916). En cette fin de XIXe siècle, quand naît Ettore, on est, dans une ville de Milan en plein développement, au sein d'un artisanat inventif parfois proche de l'art. Mais l’adolescent Ettore ne rêve que de moteurs et d’automobiles. Son artiste de père se résigne à le laisser entrer, à 17 ans, chez Prinetti et Stucchi, les fabricants les plus célèbres de tricycles italiens. Ettore s’occupe des moteurs et il remporte, en mars 1899, la course Vérone-Mantoue sur un tricycle de sa conception. Il vient tout juste d’avoir 18 ans. Ettore Bugatti s’inscrit la même année à la course Paris-Bordeaux avec un tricycle mu par deux moteurs : il abandonnera après avoir percuté un chien. Puis il conçoit une petite voiture propulsée par quatre moteurs de tricycles et pour laquelle la société Pirelli met au point ses premiers pneus. Mais, chez Prinetti et Stucchi on est désorienté par ce jeune homme ambitieux qui bouleverse les habitudes et entraîne dans une voie que l’entreprise estime sans issue : la véritable automobile. Ettore Bugatti est remercié. Son père vient alors à la rescousse, nonobstant le fameux « destin familial ». Ensemble, ils réalisent une voiture légère de 650 kg qui atteint les 60 km/h grâce à son moteur quatre cylindres et, au premier Salon automobile de Milan, en 1901, Ettore Bugatti remporte le premier prix avec elle. Il signe, dans la foulée et pour sept ans, un contrat de salarié avec la firme fondée (en 1897) et dirigée par Eugène de Dietrich (1844-1918), installée à Reichshoffen et Niederbronn (Bas-Rhin), et qui est donc le « premier employeur » d’Ettore Bugatti 1. Pour cette société alsacienne, Ettore construit plusieurs voitures, avec soupapes en tête commandées par un arbre à cames situé au-dessus du bloc, solution à laquelle il restera obstinément fidèle. Dans le même temps, il participe à de nombreuses compétitions, remportant quelques succès au 1 Une brochure, luxueusement illustrée : Association des Amis de la Société De Dietrich, Eugène de Dietrich, premier employeur d’Ettore Bugatti, Reichshoffen, 2001, 16 p. volant de voitures dont la puissance, limitée par rapport à leurs concurrentes, est largement compensée par la légèreté du châssis. Mais, en 1904, De Dietrich abandonne l’automobile. Du coup, Bugatti s’associe à un autre constructeur alsacien, Émile Mathis ; les deux hommes produiront une seule voiture. De nouveau seul, Bugatti conçoit un nouveau modèle dont il cède la licence à l’usine Deutz de Cologne, pour laquelle il deviendra responsable de la fabrication automobile, tout en conservant la possibilité de travailler pour son propre compte 2. Ettore Bugatti décide, à 28 ans, de se mettre définitivement à son compte : il s’installe au mois de décembre 1909 dans une ancienne teinturerie abandonnée de Molsheim, non loin de Strasbourg, en Alsace, allemande depuis 1871. Secondé par son fidèle compagnon, Ernest Friedrich qu’il a connu à l’époque de son association avec Mathis, et par quelques dessinateurs de l’ancien bureau d’études de Deutz, Bugatti construit cinq voitures en 1910. La production augmentant, les modèles se multipliant, il adopte en 1911 ce qui va devenir le légendaire emblème de la marque sur le radiateur, un ovale rouge frappé du logo Bugatti. C’est également à cette époque que débute la collaboration avec le carrossier Gangloff, de Colmar, qui habille la première Bugatti en conduite intérieure. Cette même année 1911, en marge de sa propre production, Ettore conçoit le prototype d’une petite voiture économique de 855 cm3 à soupapes latérales, dont il vend la licence à Peugeot afin de financer ses futurs investissements : c’est le célèbre « Bébé Peugeot », qui sera vendu à plus de trois mille exemplaires. L’année 1912 marque un changement notable, avec le début de la course à la puissance. Une première 5 litres à moteur quatre cylindres, trois soupapes par cylindre, transmission par chaîne, sort des usines. Créditée d’une vitesse maxi de 150 km/h, cette 5 Litres Roland-Garros — en hommage à l’aviateur, qui a commandé le premier châssis et va devenir un grand ami pour Bugatti — est un véritable monstre. À la déclaration de la guerre de 1914, Ettore Bugatti, sujet italien, fuit l’Alsace allemande, pour se réfugier en Italie et venir finalement à Paris se mettre à la disposition du gouvernement français. Il réalisera ainsi deux moteurs d’avion. Lorsqu’il revient, sitôt l’armistice signé, à Molsheim, Ettore retrouve son usine saccagée. Tant bien que mal, l’activité reprend, les modèles d’avant-guerre sont à nouveau produits, mais équipés de nouveaux moteurs et Bugatti cède la licence du « Type 23 » à plusieurs constructeurs italiens, anglais et même allemands. La marque remporte un notable succès au Grand Prix de Brescia, le 8 septembre 1921, en plaçant ses quatre voitures aux quatre premières places. Quelques semaines plus tard, au Salon de l’Auto, Bugatti fait, une fois de plus, sensation. Il présente un prototype extraordinaire, le « Type 28 », équipé d’un 8 cylindres de trois litres tout en aluminium et de freins hydrauliques sur les roues avant, un véhicule qui 2 C’est ainsi qu’il profitera de ses moments de loisirs pour fabriquer (la légende veut que ce soit dans sa cave) une 4 cylindres de 1 100 cm3, de 300 kg, qui atteint les 80 km/h. Une voiture qu’il sera obligé de démonter, pièce par pièce, pour pouvoir la sortir de chez lui, l’auto ne passant pas... la porte ! Officiellement dénommé Type 10 (ce qui correspond à l’étude n° 10), ce châssis est baptisé « Pur-sang de l’automobile » par Ettore Bugatti mais est plus connu des passionnés de la marque sous le nom de « Baignoire », à cause de sa carrosserie. ne sera jamais commercialisé. Mais c’est désormais la compétition qui motive Bugatti. Et, pour gagner des chevaux, il explore les solutions les plus inédites, carrosserie fuselée et ronde qui épouse parfaitement le châssis 3, carrosserie enveloppante façon aile d’avion, ce qui donne à Bugatti une réputation d’illuminé, doué certes, mais confondant art et automobile. Pourtant, le génial artisan va sortir une des plus belles autos de course des années 20, le Type 35 : carrosserie fluide et dépouillée, prolongée par le célébrissime radiateur en fer à cheval, splendides roues à huit branches en alliage léger avec tambour de freins incorporé, essieu avant, tubulaire et creux, réalisé en acier poli, forgé à partir d’une seule pièce, huit cylindres, deux litres, 190 km/h, voire plus de 200 km/h pour les versions avec compresseur, 2 000 victoires ! Ces succès répétés et les commandes multiples permettent à l’usine de tourner à plein rendement, avec une gamme qui s’étoffe. Dans sa course à la puissance, Ettore Bugatti n’a pas oublié qu’une voiture peut également être un objet de désir, une « auto absolue » : grande, puissante, chère, inimitable. Ce sera en 1926 la « Royale » (Type 41), un — beau — monstre : 4,57 m d’empattement, trois tonnes, un énorme 8 cylindres de plus de 14 litres de cylindrée (14 726 cm3 exactement), un arbre à cames en tête, trois soupapes par cylindre, de superbes roues coulées en alliage léger d’un mètre de diamètre, un vilebrequin d’1,30 m de long usiné dans la masse, un paquebot des routes de près de 300 ch, faisant du 160 km/h ! Dans l’esprit de Bugatti, la Royale c’est le summum de ce que peut être l’automobile, une œuvre d’art destinée aux têtes couronnées de la planète et d’ailleurs la « mascotte » de la voiture est un éléphant debout, réalisé d’après une sculpture de Rembrandt, le frère d’Ettore, qui s’est suicidé à Paris en 1916. Il décide de lancer la Royale en édition limitée à 25 exemplaires, chacun pouvant être personnalisé selon les désirs du client, qui doit débourser à peu près un demi-million de francs, soit le double d’une Rolls-Royce. Le client potentiel le plus démarché, par le patron en personne bien sûr, est le roi Alphonse XIII d’Espagne, le 26 juillet 1927.