Cinéma Iranien Après La Révolution : Le Cinéma Iranien Aujourd’Hui Miriam Rosen
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Document généré le 26 sept. 2021 09:06 Ciné-Bulles Le cinéma d’auteur avant tout Perspective : cinéma iranien Après la révolution : le cinéma iranien aujourd’hui Miriam Rosen Volume 13, numéro 4, automne 1994 URI : https://id.erudit.org/iderudit/33869ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Association des cinémas parallèles du Québec ISSN 0820-8921 (imprimé) 1923-3221 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Rosen, M. (1994). Perspective : cinéma iranien : après la révolution : le cinéma iranien aujourd’hui. Ciné-Bulles, 13(4), 20–25. Tous droits réservés © Association des cinémas parallèles du Québec, 1994 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Perspective pense que Sabzian est un escroc, un charlatan, etc. Après la révolution: Mais cadré en gros plan, on s'aperçoit que ce n'est pas vrai. J'ai placé une caméra, visible pour le le cinéma iranien spectateur, à 1 ' avant de la cour pour filmer tout ce que aujourd'hui Sabzian pouvait vouloir dire; c'est la caméra de l'art, celle qui permet aux gens de parler de leurs problèmes personnels car c'est ce qui est important.» Dans la par Miriam Rosen vingtaine de films que Kiarostami a réalisés — courts métrages éducatifs, longs métrages docu mentaires, films de fiction — la caméra scrute les aspects extraordinaires de la vie quotidienne. Cela est vrai aussi pour plusieurs films iraniens actuels; comme si l'écran était le miroir de la société, les cinéastes examinent les détails du présent et du passé, exorcisent les cauchemars collectifs de la n octobre 1989, un certain Hossein Sabzian, domination européenne, du règne du shah, de la chômeur, profitant d'une confusion d'iden guerre Iran-Irak, et expriment les angoisses indi E tité, se fit passer auprès d'une riche famille viduelles, qui se révèlent tout aussi universelles que de Téhéran pour le réputé cinéaste Mohsen Makh- spécifiquement iraniennes. malbaf. Il fut rapidement démasqué, et l'histoire de son usurpation d'identité manquée et de son arres Si Close-up pousse à la limite le mélange du docu tation fut publiée dans un hebdomadaire à grand mentaire et de la fiction, le cinéma iranien, et l'art tirage; elle y attira l'attention d'un autre cinéaste persan en général, ne sépare pas le vécu de l'imaginé, connu, Abbas Kiarostami, qui décida d'en faire un les événements réels et les apparences subjectives. film. Cettejuxtapositiondesfaitsetde la fiction implique une technique souple, qui laisse tant de place à Kiarostami allait commencer un autre tournage, mais l'improvisation que le tournage finit souvent par il réussit à convaincre son producteur d'envoyer faire partie du film. C'est ainsi qu'à la fin de Close- l'équipe du film à la prison où Sabzian était détenu, up, le vrai Mohsen Makhmalbaf accueille Sabzian à et les autorités judicaires, y compris le juge religieux sa sortie de prison et l'emmène, à sa demande, rendre commis à l'affaire, de le laisser filmer le procès, une visite à la famille auprès de laquelle Sabzian s'était première en Iran; enfin, il persuada tous les intéressés, fait passer pour lui. La caméra les suit, on perd le son accusé, victimes, policiers et journalistes de participer — «c'est la seule prise» se lamente Kiarostami — à la reconstitution de ce qui s'était passé au procès. remplacé par de la musique pendant le reste de la séquence. Ce véritable «passage à travers le miroir» devint Close-up (Nema-ye nazdik, 1990), un film où il est Dans le Mariage des élus (Arusi-e khuban, 1989) impossible de distinguer le documentaire de la fiction, de Makhmalbaf, on voit lors d'une scène de rue en grande partie grâce à l'extraordinaire capacité de nocturne de vrais agents de police attaquer les acteurs, Kiarostami de plier la réalité à ce qu'elle devrait être ! puis le caméraman et le metteur en scène. Dans les trois sketches du Colporteur (Dastforoush, 1987), D'abord présenté au Festival du film «Fajr» (qui certains personnages, assumant une existence signifie «l'aube») de Téhéran en 1990, où il obtient autonome, reviennent d'un sketch à l'autre comme Filmographie le Prix du jury, Close-up fit ensuite la tournée des dans le Décalogue de Kieslowski. Cette conception d'Abbas Kiarostami: festivals européens et nord-américains, gagnant no de F art comme spectacle et comme artifice fait partie tamment le Grand Prix à Montréal en 1990 et à de la culture traditionnelle de l'Iran, des farces 1973: A Dress For the Dunkerqueen 1991. populaires appelées siah-bazi, des pièces tazaiyeh Wedding Ceremony 1974: The Passenger qui mettent en scène le martyre de l'iman shiite 1978: The Report Bien qu'il soit un film inclassable, Close-up est Hussien comme des contes inspirés par l'épopée pré 1987: Où est la maison de mon pourtant caractéristique à maints égards du cinéma islamique du Livre des rois (Shah-named). À vrai ami? iranien d'aujourd'hui, ne serait-ce que par son utili dire, l'esthétique très élaborée et la composition très 1989: Homework structurée de ces films montrent bien que même si le 1990: Close-up sation du gros plan. Selon Kiarostami, «le gros plan 1992: Et la vie continue implique qu'on s'approche le plus possible de quel tournage a comporté une grande part d'improvisation, 1994: A travers les oliviers qu'un. Si l'on considère l'affaire Sabzian de loin, on l'œuvre achevée est rien moins qu'improvisée. Ainsi, Vol. 13 n" 4 C\HE3ULLES 20 Cinéma iranien pour Close-up, non seulement Kiarostami a-t-il fait Ces antécédents très variés expliquent chez les Filmographie de avancer la date du procès, mais il a passé dix heures cinéastes une conception peu spécialisée, sinon arti Bahram Beizai: à filmer une procédure qui prend normalement une sanale, de la production, l'utilisation fréquente d'ac 1970: Uncle With a heure, après quoi il a encore tourné du métrage teurs non professionnels, une grande part de souplesse Moustache supplémentaire, notamment de l'accusé s'adressant et d'improvisation. Beaucoup écrivent leurs propres 1971: Downpour directement à la caméra installée juste devant lui. scénarios, plusieurs, notamment Beizai, Kiarostami, 1972: The Journey Naderi et Ayyari, font le montage de leurs films, et 1973: Stranger and Fog 1976: The Crow Quelques réalisateurs Makhmalbaf apparaît au générique de ses derniers 1978: The Legend of Tara films non seulement comme réalisateur, scénariste et 1981: The Death of Abbas Kiarostami a étudié les beaux-arts; il a été monteur mais aussi comme décorateur! En outre les Yazdgerd affichiste, illustrateurdelivresd'enfantsetréalisateur cinéastes, en particulier ceux qui sont associés à 1985-1989: Bashu the Little l'Institut, collaborent les uns avec les autres: Naderi Stranger de films publicitaires avant de devenircinéaste à part 1988: Maybe Some Other entière. En 1989, il fut chargé de mettre sur pied une a écrit le scénario du court métrage de Kiarostami Time équipe de production à l'Institut pour le dévelop l'Expérience (Tajrobe, 1975), Kiarostami celui de 1992: Travellers pement intellectuel des enfants et adolescents, qui la Clé (Kelid, 1989) d'Ibrahim Foruzesh, tandis que est resté sa base. Beizai a monté plusieurs films de Naderi. C'est le film de Naderi le Coureur (Devandeh, 1985) qui a Comme lui, beaucoup de cinéastes iraniens sont des fait connaître à l'étranger le «nouveau cinéma autodidactes ou viennent d'un autre métier. Bahram iranien»; il a été sélectionné aux festivals de Venise, Beizai qui, à 54 ans, peut être considéré comme le Londres, Nantes, Tokyo, Hong Kong, San Francisco doyen des cinéastes actuels, fut critique de théâtre et et Sydney, et a connu une distribution commerciale de cinéma dans les années 50; il est l'auteur d'une aux États-Unis et en Europe. Naderi lui-même s'était vingtaine de pièces et d'essais sur le théâtre indien, déjà exilé à New York où il a réalisé Manhattan By chinois et japonais qui font autorité. Lui aussi a Numbers. réalisé ses premiers films à l'Institut pour le dévelop pement intellectuel. Le Coureur est l'histoire d'un enfant qui grandi dans les rues d'Abadan, la ville natale de Naderi; Massoud Kimiai (1943) et Amir Naderi (1945) sont c'est à la fois une autobiographie néoréaliste et un tous deux autodidactes. Orphelin, Naderi grandit récit allégorique sur la recherche de la liberté qui se dans les Abadan, port du sud du pays où il a tourné situe dans le prolongement des films précédents de plusieurs de ses films; il n'alla pas plus loin que Naderi. l'école primaire et fit toutes sortes de métiers, de concierge à projectionniste, avant de devenir photo De même si son dernier film, la Vie continue (Zendeji graphe de plateau, assistant-monteur, assistant- va digar hich, 1992) a gagné le Prix Rossellini à réalisateur, et de réaliser, pour l'Institut, son premier Cannes et fait «découvrir» Kiarostami, celui-ci, à 52 court métrage en 1971. Mais les cinéastes plus jeunes ans, a derrière lui 20 ans de production régulière. La ne sont pas nécessairement les produits d'une école continuité est en fait un aspect essentiel du «nouveau de cinéma.