Debout, Partisans !
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DEBOUT, PARTISANS! Dans la même collection Marie-Madeleine Fourcade L'ARCHE DE NOÉ Silvain Reiner ET LA TERRE SERA PURE sous couverture illustrée Jean-François Steiner TREBLINKA (Prix littéraire de la Résistance) Philippe Alexandre L'ÉLYSÉE EN PÉRIL Paul Bonnecarrère PAR LE SANG VERSÉ (Prix Eve-Delacroix 1969) Claude Angeli et Paul Gillet Debout, partisans ! GRANDS DOCUMENTS CONTEMPORAINS COLLECTION DIRIGÉE PAR CONSTANTIN MELNIK Fayard © Librairie Arthème Fayard, 1970 Ce livre évoque l'aventure des communistes depuis le mois de mai 1940, où la défaite s'abat sur la France, jusqu'à ce printemps 1942, où les Francs-tireurs et Partisans trouvent leur nom. Tant de silences ont été maintenus, tant d'erreurs écrites, volontairement ou non, sur cette période mal connue, que le simple récit de ce que vécurent quelques hommes, des obstacles qu'ils eurent à franchir, de leur courage et de leur sacrifice, sera sans doute pour beaucoup une révélation. Pourquoi ceux-là précisément? D'abord, parce qu'ils en étaient, et qu'ils en étaient vraiment. Ensuite, parce qu'il fallait choisir entre tant de vies, entre tant d'actions, entre tant de morts. C'est toujours une injustice que de faire un choix. Mais un livre ne suffit pas pour raconter des milliers d'hommes. Celui-ci veut simplement être vrai. C. A. et P. G. Principaux personnages suivant l'ordre où ils apparaissent dans le récit. (Les responsabilités politiques et les métiers indiqués sont ceux du moment.) ROGER PANNEQUIN, instituteur. LAURENT CASANOVA, avocat. ARTHUR DALLIDET, métallurgiste, membre du Comité central, responsable aux cadres. CLAUDINE CHOMAT, secrétaire nationale de l'Union des jeunes filles de France. DANIELLE CASANOVA, dentiste, secrétaire générale de l'U.J.F.F. Les députés, BAREL, BARTOLINI, BENOIST, BERLIOZ, BILLOUX, BONTE, COR- NA VIN, COSSONEAU, FAJON. YVONNE BERTHO, brocheuse, militante d'une cellule de Montrouge. MAURICE LE BERRE, métallurgiste, militant des Jeunesses communistes de Draveil. MARCEL PAUL, secrétaire de la fédération C.G.T. de l'éclairage. BORIS TASLITZKY, artiste peintre, militant de la cellule Montparnasse. MOULIN (pseudonyme), étudiant en lettres, dirigeant des Jeunesses commu- nistes du Rhône. GEORGES POLITZER, philosophe, membre du Comité central. BENOÎT FRACHON, secrétaire de la C.G.T., membre de la direction du Parti. MADELEINE MARZIN, institutrice, militante d'une cellule du XV arrondisse- ment de Paris. RINO SCOLARI, dirigeant des Jeunesses communistes de Puteaux. GABRIEL PÉRI, journaliste, membre du Comité central, chef de la rubrique de politique étrangère de L'Humanité. ANDRÉ KIRCHEN, lycéen. JULES LEGUY, cordonnier, militant d'une cellule du Perreux. ODILE ARRIGHI, collégienne, militante de l'U.J.F.F. du XVIII arrondis- sement. VALENTINE GRUNENBERGER, gérante d'un restaurant ouvrier, militante d'une cellule du X arrondissement. GEORGES GRUNENBERGER, son fils, ancien employé au service des abonne- ments de L'Humanité. MAURICE TRÉAND, membre du Comité central. CHARLES TILLON, membre du Comité central du Parti, futur chef des F.T.P. JACQUES DUCLOS, membre du Bureau politique, secrétaire du Comité cen- tral, organisateur et responsable numéro un du Parti et des organi- sations communistes. EUSÈBE FERRARI, électricien, responsable des Jeunesses communistes de Fenain. FORTUNÉ DUBOIS, mineur, militant communiste de Fenain. MARINETTE DUBOIS, sa fille, fiancée d'Eusèbe Ferrari, employée des P.T.T., militante des Jeunesses communistes de Fenain. JEAN CHAINTRON, dessinateur d'études, membre du Comité central. GILBERT BRUSTLEIN, tapissier, militant des Auberges de la jeunesse. MICHEL BRÛLÉ, mineur à la fosse Dahomey de Montigny-en-Gohelle, mili- tant communiste. PAUL LANGEVIN, professeur au Collège de France. MAURICE GLEIZE, imprimeur. JEAN MÉROT, employé des P.T.T., membre du Comité central des Jeunesses communistes. ANDRÉ LEROY, secrétaire national des Jeunesses communistes. LES MILITANTS INTERNÉS AU CAMP DE CHATEAUBRIANT. PIERRE GEORGES, dit Frédo, métallurgiste, responsable des Jeunesses communistes pour la région Sud-Est. Deviendra le colonel Fabien. ALBERT OUZOULIAS, responsable de la lutte armée des Jeunesses commu- nistes. MARCEL BOUDARIAS, TONY BLONCOURT, MADELEINE CAPIEVIC, MAURICE ET HENRI SCHLEWITZKY, PIERRE DAIX, JACQUES DANDURRAIN, BOB GHEUSQUIN, ROGER HANLET, PIERRE MILAN, CHRISTIAN RIZO, ROBERT PELTIER, ASHER SEMHAYA, GUIDO SPARTACO, PIERRE TOURETTE, FERNAND ZALKINOV, mili- tants des premiers groupes armés parisiens des Jeunesses communistes. ERMINDO ANDRÉOLI, ANDRÉ ET JULES BRIDOUX, MARTHE DALBERTO, RENÉ DENYS, GEORGES (pseudonyme), FÉLICIEN JOLY, TADDEUZ PAVLOWSKY, ANDRÉ ROCH, compagnons d'Eusèbe Ferrari, militants des premiers groupes armés du Nord. CHARLES DEBARGE, mineur, militant communiste à Harnes. Première partie Ils arrivent mai-juin 1940 1. Deux conscrits dans la défaite Le 20 mai 1940, deux jeunes gens de Bully-les-Mines, dans le Pas-de-Calais, l'instituteur Roger Pannequin et Martin Lillers, enfourchaient leur vélo pour répondre à leur convocation mili- taire et rejoindre à Cherbourg une unité de fusiliers-marins. Logiquement, ils auraient dû descendre vers le sud. Mais tout était déjà devenu illogique et, sachant que le front était percé, sentant que la menace arrivait sur leur gauche à une allure insensée, ils se dirigèrent d'instinct vers le sud-ouest. Gagner la mer, longer les côtes, c'était à tenter, en effet. S'ils le pou- vaient. Les routes étaient encombrées de fuyards, de soldats en déroute. Il fallait passer. Pannequin et Lillers longèrent de loin le cimetière national de Notre-Dame-de-Lorette, et les morts d'une autre guerre dont leurs pères étaient sortis vainqueurs. Les deux candidats à l'habit militaire sautaient de chemin en chemin, la guerre à leur trousse. Ils atteignirent la Scarpe. Plus personne n'y comprenait rien. Cela faisait dix jours que la guerre avait cessé d'être « drôle », que les tréteaux des théâtres aux armées avaient volé en éclats et que les notes de la chanson à la mode, Nous irons pendre notre linge sur la ligne Siegfried, s'étaient figées sur les lèvres. Dix jours, et c'était déjà le désastre. Il en avait fallu cinq pour que les Hollandais déposent les armes, submergés par la marée qui déferlait sur leur pays, et quatre seulement pour que Sedan craque. Sedan! Les Allemands s'étaient engagés dans la brèche. Le front était partout, et nulle part. Les nazis surgissaient où on les attendait le moins. Les cartes d'état-major se zébraient de coups de crayon en folie. Or, ce même 20 mai 1940, le 39 Panzerkorps du général Schmidt se heurta, entre Arras et le canal de la Haute-Deule, à une résistance inattendue et farouche. Des éléments français et anglais s'accrochaient au terrain. On se battait furieusement. C'était, sans qu'ils s'en doutent — mais de quoi se dou- taient-ils? — la première aubaine des deux garçons de Bully-les- Mines, celle qui leur avait permis d'arriver jusqu'à la Scarpe. Lorsqu'ils dépassèrent Aubigny-en-Artois, ils aperçurent de loin des auto-mitrailleuses anglaises qui abandonnaient la ville. Ils sentirent la menace se préciser et obliquèrent encore vers l'ouest. Il fallait aller plus vite. Mais quelques kilomètres plus loin, à Ambrines, un petit bourg comme tous ceux d'ici, avec ses maisons de brique, les voici soudain nez à nez avec les Allemands. Coincés. Par chance, comme ils étaient en civil, on ne les arrêta pas. Et vint la nuit. Une nuit étrange, où l'on se terre, où tout est bouleversé. On cherche à recoller les morceaux. On rencontre à tâtons des ombres de civils éperdus et de soldats belges. Par ces derniers, les deux jeunes garçons apprennent qu'on se bat dans Arras. Pannequin et Lillers se concertent. La route de la mer leur est désormais coupée et tout vaut mieux que l'incertitude. Ils iront à Arras. Ils y trouveront sans doute une unité, quelque chose à quoi se raccrocher, ils sauront ce qu'ils ont à faire. A l'aube, ils sont de nouveau sur la route, droit vers l'est, cette fois. Ils espèrent pouvoir franchir cette ligne de bataille insai- sissable sans trop d'encombre. En fait, cela se passe avec faci- lité. Rien qui ne les arrête. Au fur et à mesure qu'ils avancent, les gens se font plus rares. Ils traversent Pont-du-Gy sans rien remarquer. Puis un silence inattendu. Ils sont dans Arras. Le combat vient de finir. La ville est vide. Les rues ne sont peuplées que de cadavres. Pas un vivant. On leur avait dit, à Ambrines, qu'il leur faudrait essayer de sortir d'Arras par la route de Cambrai. Ils commencent à douter, mais ils traversent tout de même cette ville qu'ils connaissent, où ils sont chez eux, et qui les épouvante. Et c'est lorsqu'ils sortent, par la nationale 39, qu'ils aper- çoivent enfin la première silhouette debout, un soldat anglais, avec son fusil, dans l'angle d'un mur et d'un poteau électrique. Ils accélèrent. Ils vont pouvoir parler à quelqu'un. L'Anglais les fixait d'un regard qui leur parut difficilement soutenable. Mais il leur fallut s'approcher très près pour s'apercevoir que lui aussi était mort, les yeux ouverts. Ni l'instituteur ni son compa- gnon n'étaient encore habitués à l'horreur. Qu'est-ce qui les pousse alors à faire brutalement demi-tour? La peur de cette route silencieuse, au-delà de l'Anglais mort? Ou la conscience subite d'être pris au piège, au fond d'un filet qui se resserre et dont ils heurtent les mailles? Ils décident de revenir sur leurs pas, de traverser encore la ville et de rega- ger le bassin minier, vers le nord-nord-ouest. C'était ce qu'ils auraient dû faire depuis le début. S'ils avaient réussi, ils auraient pu rejoindre Lille, qui tenait encore, puis Dunkerque qui tiendra jusqu'au 4 juin. Mais à l'autre extrémité d'Arras, en haut de la côte Sainte- Catherine, les Allemands arrivent avant eux.